Séance en hémicycle du 16 mars 2005 à 15h00

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

  • bourse
  • classe
  • enseignant
  • mérite
  • réussite
  • éducatif

La séance

Source

La séance est ouverte à quinze heures.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n'y a pas d'observation ?...

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d'usage.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

Je rappelle au Sénat que M. le Premier ministre a demandé au Sénat de bien vouloir procéder à la désignation du sénateur appelé à siéger au sein du Haut conseil du secteur public, en remplacement M. Yves Fréville, démissionnaire.

La commission des finances a fait connaître qu'elle propose la candidature de M. Paul Girod pour siéger au sein de cet organisme extraparlementaire.

Cette candidature a été affichée et sera ratifiée, conformément à l'article 9 du règlement, s'il n'y a pas d'opposition à l'expiration du délai d'une heure.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

M. le président du Sénat a été saisi de deux demandes tendant à obtenir du Sénat l'autorisation de désigner des missions d'information. Ces demandes ont été formulées par :

- M. Jean Arthuis, président de la commission des finances, afin qu'une mission puisse se rendre en Inde, dans le prolongement des travaux que cette commission consacre à l'étude des phénomènes de délocalisation des emplois de service ;

- M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois, pour étudier, au Canada, le processus de simplification du droit et de réforme de l'Etat et, à Saint-Pierre-et-Miquelon, les perspectives d'évolution statutaire de cette collectivité d'outre-mer.

Le Sénat sera appelé à statuer sur ces demandes dans les formes fixées par l'article 21 du règlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, après déclaration d'urgence, d'orientation pour l'avenir de l'école (nos 221, 234, 239).

Je rappelle que la discussion générale a été close.

La parole est à M. le ministre.

Debut de section - Permalien
François Fillon, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche

Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, comme on pouvait l'espérer, la discussion générale sur la loi d'orientation pour l'avenir de l'école a été de grande qualité. Le débat a ouvert des perspectives nouvelles et permis de soulever des questions précises. Les controverses qui s'y sont fait jour contribueront à éclairer les Français sur les positions du Gouvernement ainsi que sur les propositions de la majorité et de l'opposition.

Notre débat s'est engagé de façon sereine ; c'est important, car l'avenir de l'école ne saurait se construire, comme l'a parfaitement exprimé M. Jacques Valade, sur des procès d'intention, des slogans simplificateurs ou des querelles de mots.

Je tiens ici à adresser une nouvelle fois tous mes remerciements à M. Jean-Claude Carle pour la qualité de son rapport, la clarté de son jugement et la force de son engagement.

Les orateurs de la majorité ont, chacun à sa façon, parfaitement saisi l'esprit de ce texte : il s'agit d'ouvrir le chemin de la réussite à tous les élèves, en recentrant nos priorités éducatives sur l'essentiel et en personnalisant le parcours scolaire, comme le souhaite le rapporteur de la commission des affaires culturelles. Cela suppose, bien sûr, non seulement des mesures de soutien pour les élèves qui éprouvent des difficultés, mais aussi des actions adaptées au rythme d'acquisition de chacun, notamment en faveur des élèves intellectuellement précoces. Il s'agit aussi de faire mieux fonctionner le service public de l'éducation et d'ouvrir l'école sur l'Europe et le monde.

Avec une sagesse nourrie par l'expérience, mais aussi avec la passion qui prend ses racines au coeur même de ses convictions, M. Adrien Gouteyron a brossé une perspective historique dans laquelle ce projet de loi s'inscrit résolument.

Il a aussi montré que les critiques qui s'adressent au Gouvernement concernent un projet qui n'est pas celui dont nous débattons, et qu'une lecture objective du texte devrait rallier le consensus, comme il y a aujourd'hui une vraie convergence de tous les républicains autour de notre école.

Face à la tentation de l'immobilisme, l'UMP et l'UC-UDF ont démontré qu'elles cherchaient des solutions innovantes. Lorsque, malgré le dévouement des enseignants et les efforts financiers de la nation, le système s'essouffle, c'est bien le rôle du politique que de repenser les pratiques et de clarifier les missions du service public.

Certains, dans l'opposition, ont d'abord regretté qu'un consensus ne se soit pas dégagé sur cette réforme, d'aucuns allant même jusqu'à en réclamer le retrait.

Murmures sur les travées de l'UMP.

Debut de section - Permalien
François Fillon, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche

J'ai l'habitude de dire qu'en France 60 millions d'avis coexistent sur l'école. Les débats sont encore marqués par de vieux clivages idéologiques, par des querelles entre disciplines et entre méthodes pédagogiques, voire, parfois, entre parents et corps enseignant.

Dans ces conditions, je dis qu'espérer atteindre le consensus général est une utopie, ...

Debut de section - Permalien
François Fillon, ministre

M. François Fillon, ministre. ... à moins de le faire reposer sur l'immobilisme, en finançant le statu quo et, disons-le, le silence !

Applaudissementssur les travées de l'UMP.

Debut de section - Permalien
François Fillon, ministre

C'est d'ailleurs cette situation qui a prévalu pendant une dizaine d'années, celles où Claude Allègre a occupé ce poste mises à part.

Debut de section - Permalien
François Fillon, ministre

Pour avancer, la réforme doit passer par des choix, des choix qui sont forcément critiqués et momentanément contestés.

Naturellement, nous devons entendre les jeunes parce que ce sont nos enfants. Mais nous devons aussi prendre nos responsabilités, car leur avenir en dépend. Or les écouter, les comprendre, ce n'est pas toujours leur donner raison. Lorsque les élèves nous disent que le travail les intéresse peu, nous devons les pousser à l'effort.

Debut de section - Permalien
François Fillon, ministre

En effet, c'est souvent l'effort qui finit par déboucher sur l'intérêt pour les disciplines et la réussite.

A cet égard, je voudrais citer Pierre Emmanuel : « L'éducation est un effort de convergence et de sublimation des instincts. Cet effort ne va pas sans discipline et la tâche de l'éducateur est de faire découvrir à l'enfant que cette discipline est le support de sa liberté. »

Telle est, me semble-t-il, la meilleure réponse que l'on puisse apporter à la caricature que Mme Voynet a faite du projet de loi, sans pour autant dissimuler les différences qui existent entre nos conceptions de l'école.

Pierre Martin a parfaitement illustré la philosophie de responsabilité et d'effort qui imprègne la position de la majorité.

Madame David, permettez-moi ce simple rappel : la procédure d'urgence, ce n'est pas l'état d'urgence !

Rires sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Hélène Luc

Cela signifie tout de même une seule lecture dans chaque assemblée !

Debut de section - Permalien
François Fillon, ministre

M. François Fillon, ministre. Il s'agit là d'une procédure tout à fait régulière, prévue par la Constitution, et l'urgence que vous dénoncez aujourd'hui, monsieur Assouline, ne semblait pas vous gêner en 1989, lorsque la loi Jospin fut adoptée selon cette même procédure !

Applaudissementssur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.

Debut de section - Permalien
François Fillon, ministre

Manifestement, il y a une urgence de droite et une urgence de gauche !

Le Gouvernement a suivi la procédure d'urgence tout simplement parce qu'il est urgent de réformer l'école. S'il n'y avait pas urgence, la réforme attendrait la rentrée de 2006.

Debut de section - Permalien
François Fillon, ministre

Or, moi, je souhaite que, dès la prochaine rentrée, les établissements aient un conseil pédagogique - il n'y a pas besoin de budget pour mettre en place un tel conseil dans les établissements -, ...

Debut de section - Permalien
François Fillon, ministre

... qu'ils organisent les remplacements - pour cela non plus, il n'y a pas besoin de budget -, qu'ils développent l'enseignement des langues, que le Haut conseil de l'éducation soit mis en place et nous aide à préparer le contenu du socle et les programmes qui le constituent.

Ainsi, dès la rentrée prochaine, nous pourrons préparer la mise en place des programmes personnalisés de réussite scolaire, les PPRS, la réforme des IUFM, la rénovation du brevet.

Sur toutes les travées de cet hémicycle, vous avez dénoncé l'importance de l'échec scolaire. Cet échec, je propose à la majorité de le combattre en adoptant ce projet de loi. Quant à l'opposition, elle fait le même diagnostic, mais elle suggère de ne rien changer !

Pour ma part, je ne souhaite pas conduire l'école dans cette impasse. Car, oui, il y a un risque d'impasse. Oui, il y a des signes d'essoufflement.

S'agissant de l'évaluation des résultats de l'école, on ne peut pas dire avec M. Dauge qu'« on ne sait pas » ce qu'il en est.

Tous les ans, le ministère publie « l'état de l'école » : la dernière version date de septembre 2004. Ses statistiques corroborent à la fois les évaluations internationales et les résultats que l'on enregistre par ailleurs, à savoir que 15 % des élèves à la fin du primaire sont en très grande difficulté et que 15 % des collégiens ne manifestent aucune maîtrise des compétences de base attendues au collège.

Debut de section - Permalien
François Fillon, ministre

Il n'y a rien de subjectif dans ces chiffres !

Il ne s'agit pas d'en déduire une responsabilité des enseignants ; rien ne justifie un tel regard. Mais une raison de plus en découle pour agir : agir pour éviter la déperdition d'énergie et de moyens ; agir pour recentrer l'école sur ses missions essentielles.

Mesdames, messieurs les sénateurs, il est inexact de dire, comme l'ont fait certains orateurs, que le rapport de la commission du débat national sur l'avenir de l'école n'est pas à la source de notre projet de loi.

Le parti socialiste, par la bouche de M. Bodin, critique l'ambition de la réforme, mais se réfère aux travaux de Claude Thélot.

Debut de section - Permalien
François Fillon, ministre

M. François Fillon, ministre. Soit dit en passant, le parti socialiste, sollicité au même titre que les groupes de la majorité, n'avait pas souhaité participer aux travaux de la commission Thélot, et je crois que c'est dommage.

Applaudissementssur les travées de l'UMP.

Debut de section - Permalien
François Fillon, ministre

Toutefois, je me félicite que le groupe socialiste se réclame désormais des conclusions de la commission Thélot.

Notre projet retient beaucoup des propositions de ce rapport : le socle, le soutien, le conseil pédagogique, la priorité aux langues vivantes.

Nous en reparlerons tout au long du débat, mais je voudrais évoquer brièvement ce que nous avons écarté des conclusions de la commission, car il est de la responsabilité de tout gouvernement de faire des choix !

Je n'ai pas retenu l'idée d'obliger chaque élève, dès le primaire, à apprendre l'anglais. Je rends justice à M. Thélot d'avoir défendu là une position courageuse. Certains pays, notamment du nord de l'Europe, ont fait ce choix, mais, en France, nous éprouvons un réel attachement à la diversité linguistique.

Dans le même esprit, je n'ai pas retenu l'abaissement de la scolarité obligatoire à cinq ans. Plus de 95 % des élèves sont effectivement scolarisés avant leur sixième anniversaire. Certaines familles, pour des motifs divers, font le choix contraire : je ne vois pas de raison impérieuse de les contraindre.

La troisième proposition que je n'ai pas retenue est celle qui tendait à créer un statut de lycéen professionnel, avec une rémunération. Je pense qu'il s'agit là d'une fausse bonne idée. En effet, au-delà du coût d'une telle mesure, qui a été mis en évidence par Gérard Longuet hier, j'observe qu'il est relativement difficile socialement de créer ainsi une attraction forte pour les filières professionnelles au détriment des séries générales et technologiques. Ce serait accentuer le ou les biais sociologiques dans les choix d'orientation.

J'ai préféré mettre en place un projet ambitieux de bourses au mérite, qui vient s'ajouter aux bourses sur critères sociaux.

La commission Thélot évoquait encore une évolution importante du métier d'enseignant, en prévoyant notamment un temps d'accompagnement des élèves, de travail en équipe, de coordination, de relations avec les familles. D'aucuns évoquaient ainsi un temps de travail hors enseignement de trois à six heures par semaine.

Je n'ai pas retenu cette idée, et ce pour plusieurs raisons. Tout d'abord, l'article L. 912-1 du code de l'éducation, issu de la loi d'orientation sur l'éducation du 10 juillet 1989, prévoit déjà que ces missions font partie du travail des enseignants au même titre que leurs cours aux élèves. C'est un principe qu'explicite d'ailleurs largement une circulaire du 23 mai 1997.

Je n'ai pas non plus retenu la création d'établissements publics locaux qui rassembleraient des écoles voisines. Je pense que le lien entre la commune et son école primaire est trop fort pour être ignoré.

Pour répondre à M. Vallet, qui regrettait que ce texte ne prenne pas suffisamment en compte les conclusions du rapport Thélot, je rappellerai simplement les principaux éléments qui en ont été retenus : le brevet refondu pour sanctionner l'acquisition du socle, une meilleure différenciation des filières au lycée, la simplification de la voie technologique, le développement des formations et diplômes dans le secteur sanitaire et social, la rénovation de la série littéraire, la contractualisation des établissements avec l'académie, la réorganisation de la formation des enseignants, l'affectation des nouveaux enseignants dans leur académie de formation.

M. Valade a eu particulièrement raison de souligner que, au-delà de la formation scolaire, l'enjeu du parcours dans le supérieur devrait aussi être pris en compte. Il le sera, mais ce n'est pas l'objet de ce texte. Je ferai d'ailleurs remarquer que jamais une réforme de l'enseignement secondaire et de l'enseignement primaire n'a inclus l'université. Cela étant, vous en conviendrez, c'est un objectif que l'on pourra d'autant mieux atteindre que les bases scolaires auront été consolidées.

Instrument de justice et de qualité, l'idée de socle n'est pas pour autant exclusive. On a vu revenir dans le débat la hantise du « SMIC culturel » ; M. Bodin s'en est fait l'écho. Faut-il, une fois encore, répéter que notre ambition actuelle ne retire rien aux programmes ? Mais il est temps, selon nous, de donner à l'école une obligation de résultat sur les éléments d'un « coeur » de connaissances et de compétences.

Debut de section - Permalien
François Fillon, ministre

Ce socle, en réalité, est évoqué et attendu depuis trente ans ! On peut citer, en particulier, le rapport du Collège de France rédigé par Pierre Bourdieu en 1985, à la demande de François Mitterrand : « Des programmes nationaux devraient définir le minimum culturel commun, c'est-à-dire le noyau de savoirs et de savoir-faire fondamentaux et obligatoires que tous les citoyens doivent posséder. »

Debut de section - Permalien
François Fillon, ministre

Le rapport sur les collèges de M. François Dubet, publié en 2000, ne déroge pas à la règle : « Le collège doit mieux définir les savoirs et les compétences qu'il peut attendre de tous... ce qui suppose une réflexion sérieuse sur les compétences et les connaissances qui doivent constituer le socle commun d'une génération. »

Debut de section - Permalien
François Fillon, ministre

Vous avez eu raison, monsieur Seillier, de rappeler que les enseignants qui font réussir les élèves doivent être encouragés. C'est pourquoi j'ai proposé que soit inscrit dans la loi le principe de la liberté pédagogique : cette liberté doit permettre à l'enseignant qui apprend à lire à ses élèves de choisir de le faire avec une méthode traditionnelle. Ce qui compte, c'est le succès de l'élève et, plus largement, c'est le succès dans notre pays de la lutte contre ce fléau qu'est encore l'illettrisme.

Je partage pleinement, madame Papon, votre plaidoyer pour le livre, en particulier dès les débuts de l'apprentissage de la lecture à l'école.

Les manuels sont utiles, mais sans doute insuffisamment utilisés, et la multiplication de coûteuses photocopies ne peut s'y substituer.

En tout état de cause, je ne manque jamais de rappeler l'intérêt de tous les livres que l'enfant peut utiliser, à l'école comme à la maison. Je sais que les professeurs des écoles et les parents tirent profit de l'extraordinaire foisonnement de la littérature pour la jeunesse et des outils d'aide à l'apprentissage de la lecture, y compris sur ordinateur.

Chacun sait bien l'ouverture exceptionnelle qui se produit dans l'esprit des enfants qui apprennent à lire.

Je veux, à cet égard, rendre un hommage tout particulier aux enseignants de CP, qui accomplissent chaque année ce miracle, pour le plus grand bonheur des parents et des enfants, de conduire ceux-ci vers l'acquisition des fondamentaux et, par là même, des instruments de leur liberté intellectuelle.

Ce qui compte, c'est que l'on puisse dire un jour que tous les enfants de notre pays savent effectivement lire, écrire et compter.

Debut de section - Permalien
François Fillon, ministre

Pour autant, je l'ai dit et répété, les autres disciplines ne sont pas exclues. Il faut en finir avec les rumeurs et les craintes sans fondement !

Prenons l'exemple de l'éducation physique et sportive, que certains d'entre-vous ont cité. Notre projet n'apporte aucune modification concernant cette matière. Trente articles de la partie législative du code de l'éducation en font mention. Aucun de ces articles n'est supprimé !

Quant à l'idée d'inclure l'éducation physique dans le socle, il suffit de réfléchir deux minutes pour comprendre qu'elle ne tient pas la route !

Debut de section - Permalien
François Fillon, ministre

Imaginez que l'on soit amené à empêcher de passer en sixième un élève qui ne maîtriserait pas l'éducation physique et sportive ! Imaginez un instant que l'on soit amené à mettre en place des heures de soutien pour permettre l'acquisition des disciplines sportives !

Chacun comprend bien que le socle doit être concentré sur un certain nombre de matières absolument indispensables à la compréhension de l'enseignement, puis à la progression dans les études ; l'éducation physique et sportive ne peut faire partie de ces matières.

Debut de section - PermalienPhoto de Hélène Luc

Vous vouliez la retirer des épreuves du brevet et du baccalauréat !

Debut de section - PermalienPhoto de Josselin de Rohan

M. Josselin de Rohan. La performance sportive obligatoire à l'école, c'était bon pour l'Union soviétique !

Rires sur les travées de l'UMP.

Debut de section - Permalien
François Fillon, ministre

Par ailleurs, monsieur Fortassin, ce socle prend en compte l'exercice de la citoyenneté.

Vous le savez, l'Etat propose des objectifs à l'école, il lui donne les moyens dont personne ne peut nier qu'ils sont importants, il lui fixe des règles.

Dans cet esprit, je vous rappellerai que, à l'initiative du gouvernement auquel j'appartiens, vous avez voté l'an passé une loi qui met en oeuvre le principe de laïcité en refusant le port à l'école de signes manifestant ostensiblement une appartenance religieuse.

L'école doit transmettre les valeurs de la République et notamment la tolérance, qui s'applique à tous les membres de la communauté éducative.

Je ne polémiquerai pas sur ce sujet, mais vous avez voté ce texte et, naturellement, vous devez prendre votre part de responsabilité dans la mise en oeuvre de cette nouvelle législation.

Reconnaissez tout de même que, pendant dix ans, rien n'a été fait pour régler cette question : on a débattu à l'infini sans jamais apporter aux responsables d'établissements de ligne de conduite claire.

Ce sont ce gouvernement et cette majorité qui ont proposé un texte que je mets en oeuvre chaque jour, à la fois avec fermeté et avec le souci d'une compréhension intelligente du principe de laïcité.

Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP.

Debut de section - Permalien
François Fillon, ministre

L'enseignement des langues est une des grandes priorités de ce projet de loi. Le rapport de M. le sénateur Legendre sur la diversification linguistique a été une de ses sources d'inspiration.

Monsieur Legendre, l'apprentissage des langues doit, en effet, favoriser la diversité et la qualité.

Le principe de diversité nous a amenés à refuser, je l'ai dit, l'apprentissage obligatoire de l'anglais que nous proposait le rapport Thélot, mais il nous a conduit à assurer la cohérence de l'enseignement des langues dans les académies. Les langues européennes et celles des grandes civilisations - je pense à l'arabe et au chinois - doivent être à l'avenir proposées dans toutes les académies.

La qualité doit être garantie par un enseignement en groupes réduits, organisé plus tôt : dès le CE1 pour la première langue, dès la cinquième pour la seconde langue.

M. Revet défend le point de vue d'un apprentissage plus précoce encore, avant même le CE1, que le projet retient comme point de départ dans les prochaines années. Je regrette de ne pas pouvoir suivre cette proposition. Cela ne s'explique pas seulement par des raisons budgétaires, même si celles-ci peuvent être sérieuses. Je suis en effet convaincu que les conditions d'acquisition de la langue maternelle, à l'école maternelle puis au CP, avec l'accès à la lecture et à l'écriture, justifient une certaine forme de prudence.

On connaît naturellement les avantages d'un bilinguisme précoce. Mais, à l'école, je suggère de privilégier dans un premier temps la langue maternelle, en évitant tout risque de confusion. Il me semble que cette approche, d'ailleurs partagée par la plupart de nos voisins, est une nécessité pour la grande majorité des enfants.

Il nous faut également des enseignants qui seront formés à enseigner leur discipline dans une langue étrangère. A travers les langues, c'est l'ouverture des Français sur le monde que nous préparons.

Mme Férat a légitimement insisté sur le retard de notre pays en la matière. Le coeur de cette réforme consiste à mettre l'accent sur la communication et l'expression orales. C'est pourquoi j'ai prévu le dédoublement des groupes de langues, en commençant par les classes terminales dès la rentrée prochaine.

Sur ce point, monsieur Bodin, je suis au regret de vous dire que vous vous trompez. Le travail de préparation de la rentrée n'est pas achevé : aussitôt la loi sera votée, l'ensemble des moyens disponibles sera mobilisé pour mettre en oeuvre le dédoublement des cours de langues dans les terminales générales, et en priorité dans la première langue vivante. Je donnerai des instructions en ce sens.

Debut de section - PermalienPhoto de Hélène Luc

Vous allez nous présenter un collectif budgétaire supplémentaire, alors ?

Debut de section - Permalien
François Fillon, ministre

Cette stratégie en faveur des langues étrangères m'a conduit à faire des choix.

M. Fourcade m'a interrogé sur la question des TPE, que ses petits-enfants avaient évoquée avec lui. Si je les ai supprimés en terminale, c'est dans le souci de ne pas alourdir les emplois du temps déjà très chargés des lycéens, car je ne pouvais à la fois dédoubler les cours de langues et maintenir ce type d'activités. J'ai fait un choix, je l'assume.

Je précise toutefois à M. Fourcade que les TPE sont maintenus en classe de première et que les notes obtenues pourraient être prises en compte pour le baccalauréat.

Mme David manie le paradoxe avec talent sur bien des points et en particulier au sujet des inégalités. Dire que ce texte accroît les inégalités, que l'on va vers une marchandisation de l'éducation

Exclamations sur les travées de l'UMP

Debut de section - Permalien
François Fillon, ministre

Si l'organisation, dans le cadre scolaire, d'un soutien gratuit pour tous ceux qui en ont besoin est, comme elle le prétend, de la marchandisation et va vers l'accroissement des inégalités, alors je me demande vraiment ce qui pourrait satisfaire les élus communistes !

Rires sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

Vous le verrez : nous proposerons des amendements !

Debut de section - Permalien
François Fillon, ministre

Certains reprochent à ce projet de creuser les inégalités sociales. J'affirme, au contraire, que mon projet incarne la justice scolaire contre la façade égalitaire. (Protestations sur les travées du groupe CRC.)

Debut de section - Permalien
François Fillon, ministre

Concernant par exemple les bourses au mérite, qui suscitent d'extraordinaires critiques sur les travées de la Haute Assemblée, ...

Debut de section - Permalien
François Fillon, ministre

... sur les travées de gauche de la Haute Assemblée, ...

Debut de section - Permalien
François Fillon, ministre

... bourses au mérite qui, soit dit en passant, ont été créées par M. Lang et dont nous nous proposons simplement d'augmenter le volume et le montant, je précise qu'il s'agit d'un dispositif supplémentaire s'adressant aux élèves déjà détenteurs de bourses sur critères sociaux.

Je précise que, si l'obtention d'une mention « bien » ou « très bien » au diplôme national du brevet ouvre droit à ces bourses, elles sont aussi destinées à encourager les élèves qui, sans obtenir de telles mentions, ont fait des efforts particuliers.

Marques d'approbation sur les travées de l'UMP.

Debut de section - Permalien
François Fillon, ministre

Enfin, Mme David souhaite à toute force « déshabiller Pierre pour habiller Paul » et veut en conséquence que les ZEP, les zones d'éducation prioritaire, soient mises en difficultés.

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

C'est vous qui le voulez ! N'inversez pas les rôles !

Debut de section - Permalien
François Fillon, ministre

Je ne peux que renouveler mon engagement : l'effort supérieur à la moyenne en faveur des ZEP sera maintenu.

Debut de section - Permalien
François Fillon, ministre

Nous allons même passer à la vitesse supérieure, et cela en développant une stratégie complémentaire autour, notamment, des programmes personnalisés de réussite scolaire.

Plus de 700 millions d'euros seront programmés, à partir de l'analyse des difficultés personnelles rencontrées par les élèves. Ce sera fait partout, mais, naturellement, tout particulièrement dans les ZEP, où le nombre d'enfants en difficulté est plus grand.

Comme l'a parfaitement souligné Gérard Longuet, il ne suffit pas de faire porter exclusivement l'action dans les territoires : il faut aussi apporter une aide directe aux élèves, quel que soit le point du territoire où se trouve l'établissement qu'ils fréquentent.

Debut de section - Permalien
François Fillon, ministre

Ainsi que l'a dit M. Demuynck, la multiplication des violences dans les établissements doit cesser parce qu'elle est l'une des premières sources d'injustice sociale et culturelle.

Monsieur Assouline, vous nous reprochez d'avoir prévu un correspondant de la police ou de la gendarmerie auprès de chaque établissement. Eh bien en effet, monsieur Assouline, nous ne voulons pas que les écoles, les collèges et les lycées soient des lieux où se pratiquent vols, rackets ou violences.

Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - Permalien
François Fillon, ministre

Au nom de la justice sociale et de la fraternité, au nom de l'épanouissement de chaque élève, nous assumons une volonté politique : celle de stopper l'insécurité. Je vous le dis tout net : tant pis si cela ne vous plaît pas !

Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF. - Protestations sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.

Debut de section - Permalien
François Fillon, ministre

L'école est un lieu où l'on doit étudier en paix ; je vous propose d'augmenter les dispositifs relais pour donner envie aux élèves qui ont décroché de revenir apprendre, mais aussi pour éviter que quelques perturbateurs n'empêchent les autres élèves, notamment les plus fragiles, de travailler.

Mesdames, messieurs les sénateurs, tout le monde évoque les filières professionnelles, mais d'aucuns avec une sorte de regret de voir l'école ne pas exclusivement prodiguer un enseignement académique. J'ai même entendu certains s'insurger du fait que l'école puisse avoir une relation avec le monde du travail et celui de l'économie.

Esclaffements sur les travées de l'UMP.

Debut de section - Permalien
François Fillon, ministre

C'est injuste et irresponsable à l'égard des adolescents qui privilégient des filières plus pratiques.

M. Carle a eu raison de souligner le travail de terrain que le système éducatif doit accomplir pour tenir compte des perspectives d'emploi dans les entreprises. L'ignorer serait contre-productif ; ce serait prendre le risque de désillusions pour les élèves au terme de leur parcours scolaire. M. Carle a justement relevé le décalage, par rapport à la formation professionnelle, entre l'offre et la demande.

Debut de section - Permalien
François Fillon, ministre

Pour remédier à cette situation, trois priorités fortes sont affichées : d'abord, le baccalauréat professionnel sera proposé en trois ans au lieu de quatre pour ceux qui le souhaitent et qui le peuvent ; ensuite, la redéfinition des filières de l'enseignement professionnel sera mise en adéquation avec les perspectives d'emplois et les techniques d'aujourd'hui ; enfin, dans la série technologique, le nombre des sections de STI, sciences et techniques industrielles, sera resserré autour de dominantes plus lisibles et plus attractives.

D'une façon plus globale, afin de sensibiliser tous les jeunes Français aux enjeux et aux différents aspects de la vie professionnelle et des métiers, nous allons généraliser l'enseignement de découverte professionnelle, enseignement qui sera de trois heures par semaine en classe de troisième. Il est temps, en la matière, d'en finir avec les cloisons, les hiérarchies, les ségrégations à l'égard des enseignements professionnels et technologiques. Il est temps de rappeler que l'école a aussi le devoir de sensibiliser la jeunesse à son avenir professionnel !

Jean-luc Mélenchon, lorsqu'il était ministre délégué à l'enseignement professionnel, ...

Debut de section - Permalien
François Fillon, ministre

M. François Fillon, ministre. Mais oui, il était bon ! D'ailleurs, vous lui avez créé un peu de souci, justement parce qu'il était bon !

Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Hélène Luc

Il a indiscutablement fait avancer les choses !

Debut de section - Permalien
François Fillon, ministre

M. François Fillon, ministre. Voici en tout cas ce que M. Mélenchon disait à l'époque : « Je suis en guerre contre cette mentalité de caste qui engendre l'humiliation en vendant la voie professionnelle comme une voie de relégation. C'est une idéologie de mépris du travail, de la technique, de la science. »

Applaudissementssur l'ensemble des travées.

Debut de section - Permalien
François Fillon, ministre

Cette déclaration forte lui a valu bien des ennuis dans son propre camp politique.

Nouvelles protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.

Debut de section - Permalien
François Fillon, ministre

Pour ma part, je la comprends et en défends l'esprit.

Je partage la conviction de M. Mélenchon quant à l'importance des filières professionnelles. Le texte qui vous est proposé trace le cadre d'une rénovation de ces filières pour les rendre plus attractives encore, au bénéfice de la réussite des élèves et du dynamisme de notre économie.

Une illustration de l'intérêt d'une orientation positive vers les baccalauréats professionnels se trouve dans une récente étude du Centre d'études et de recherches sur les qualifications, le CEREQ : le risque de chômage pour un jeune dans les trois premières années de sa vie professionnelle est divisé par deux pour un titulaire de baccalauréat professionnel par rapport aux autres diplômés de niveau équivalent. Il faut remonter au niveau d'un diplôme de second cycle universitaire pour trouver une meilleure sécurité pour l'emploi.

Oui, nous souhaitons soutenir l'enseignement professionnel, son développement et son adéquation à la demande des élèves et à celle de l'économie. La difficulté que nous rencontrons est l'adaptation des aspirations des élèves à ces besoins de l'économie.

Trop de filières professionnelles dans les spécialités industrielles restent, nous le savons, sans élèves ou insuffisamment connues.

Quant à la perspective européenne et à la certification, je voudrais ou démentir ou rassurer M. Mélenchon : j'ai défendu à Bruxelles l'évolution vers des certifications européennes, et nous aurons des résultats.

S'agissant du « bond en avant » qu'appelle M. Mélenchon, il est possible si l'on revoit, comme nous le proposons, les filières de Bac Pro et les CAP pour les adapter, et si nous réussissons à augmenter les effectifs en apprentissage dans le cadre de l'éducation nationale.

Je souligne à cet égard que la philosophie de ce projet de loi s'inscrit dans la continuité des mesures adoptées par M. Mélenchon lorsqu'il avait la responsabilité de ce dossier au Gouvernement. Il s'agit bien, comme il avait commencé de le faire avec la mise en place des lycées des métiers, non seulement de donner à l'enseignement professionnel et technologique une image attractive et valorisante, mais encore d'installer les métiers au coeur même de notre école.

Debut de section - Permalien
François Fillon, ministre

Mesdames, messieurs les sénateurs, la formation des enseignants est l'une des grandes priorités de ce projet de loi. Alors que nous devons renouveler 150 000 enseignants dans les cinq prochaines années, nous avons besoin d'une vision d'avenir pour la formation des maîtres dans ce pays. C'est la raison pour laquelle j'ai proposé d'intégrer les IUFM, les instituts universitaires de formation des maîtres au coeur des universités, et j'ai souhaité la mise en place d'un cahier des charges national de la formation des maîtres.

Je suis quelque peu surpris des réactions de M. Bodin sur cette question : comme si l'université n'était pas en mesure de former des professionnels ! A ma connaissance, ce sont bien les universités qui forment nos médecins, une partie de nos ingénieurs, etc.

Cette inquiétude quant à la capacité de l'université française à former les enseignants - ce qui est sa raison d'être - en dit long, finalement, sur le manque de confiance qu'une partie d'entre nous éprouve envers l'université française.

En vérité, il n'y a pas d'avenir pour la formation des maîtres à moyen et à long terme en dehors de l'intégration de cette formation dans notre système universitaire.

Debut de section - Permalien
François Fillon, ministre

Nous savons que le métier d'enseignant n'est pas un métier comme les autres. La formation continue est, comme l'a signalé Mme Morin-Desailly, un objectif important de la loi puisque, à côté des dispositifs déjà existants, nous avons proposé la mise en place d'un droit à la formation de vingt heures par an pour un projet personnel concourant à la qualité de l'enseignement.

Certains d'entre vous ont évoqué la place de l'école maternelle. Elle est, à l'intérieur de notre système éducatif, l'un de nos grands sujets de fierté !

Sa contribution à la socialisation et à l'épanouissement des enfants est essentielle, mais elle doit aussi fournir à chacun les bases pour les apprentissages fondamentaux de l'école élémentaire et faciliter le dépistage précoce des difficultés ou des besoins éducatifs particuliers. C'est le sens de ce qui est proposé dans ce projet de loi.

La loi de 1989 prévoyait que la scolarisation des enfants de moins de trois ans serait développée, en particulier dans les zones d'éducation prioritaire. Mme Dini a évoqué très largement cette question. C'est un sujet complexe, sur lequel la réflexion doit aller plus loin. Mme Brisset, que vous avez récemment auditionnée, estime, par exemple, qu'il n'est pas utile de scolariser les enfants à l'âge de deux ans. D'autres pensent le contraire.

Je proposerai, l'an prochain, d'organiser une conférence sur ce sujet, afin de définir une position consensuelle.

Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.

Debut de section - Permalien
François Fillon, ministre

Moi, je ne pousserais pas des cris sur un sujet qui concerne la structuration même des jeunes enfants et qui mérite un peu plus de prudence que des positions dogmatiques et idéologiques

M. Jean-Marc Todeschini proteste.

Debut de section - Permalien
François Fillon, ministre

, lesquelles peuvent être dangereuses pour les enfants !

Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.

Debut de section - Permalien
François Fillon, ministre

En attendant, notre politique reste la même : accueillir les enfants de deux ans des milieux défavorisés. Le rapport annexé précise que « l'accueil des enfants de deux ans reste assuré en priorité dans les écoles situées dans un environnement social défavorisé ».

Debut de section - Permalien
François Fillon, ministre

M. Signé a souligné l'attachement que portent les communes à leurs écoles et à leurs collèges. Le Gouvernement, monsieur Signé, a déjà pris position sur cette question. Je vous le confirme : il n'y aura pas de fermetures d'écoles rurales hors réseau à la rentrée prochaine.

J'ai demandé par ailleurs que toute mesure relative à la carte scolaire fasse l'objet d'un dialogue étroit entre les autorités académiques et les représentants des collectivités.

Debut de section - Permalien
François Fillon, ministre

Comme M. Longuet l'a justement fait remarquer, les directeurs d'école méritent toute notre attention et toute notre reconnaissance. Leurs charges sont aujourd'hui plus complexes qu'hier. Les tâches administratives se sont accrues, les nécessaires contacts avec les élus et les partenaires de l'école se sont multipliés. Les parents attendent du directeur une disponibilité plus grande.

Cette situation a progressivement fait naître chez les directeurs d'école un sentiment d'insuffisante reconnaissance et a conduit ces derniers, depuis près de cinq ans, à refuser certaines tâches administratives. Je souhaite que, comme l'a demandé avec force et conviction Philippe Goujon, les responsabilités qu'assument au quotidien les directeurs d'école soient mieux reconnues et que leurs fonctions deviennent plus attractives.

Debut de section - Permalien
François Fillon, ministre

M. François Fillon, ministre. Vous allez toujours trop vite, madame Luc !

Sourires

Debut de section - Permalien
François Fillon, ministre

J'ai engagé des négociations avec l'ensemble des organisations syndicales et j'ai fait des propositions qui portent sur une indemnité de première prise de fonction, sur une revalorisation du régime indemnitaire et de la bonification indiciaire ; j'espère bien qu'elles vont aboutir.

Debut de section - Permalien
François Fillon, ministre

M. Longuet a fait un exposé d'une grande clarté. Il a d'abord, de manière un peu inhabituelle pour un représentant de la commission des finances, fait référence aux objectifs qualitatifs du texte, en particulier dans le domaine des valeurs de la République que l'école se doit de proposer aux élèves.

Sur ce sujet, je ne prétends pas innover ; je veux seulement réaffirmer l'ambition traditionnelle de l'école de la République. Permettez-moi, à cet égard, de citer Jules Ferry : « Les enfants ont en morale un apprentissage à faire, absolument comme pour la lecture ou le calcul. »

Debut de section - Permalien
François Fillon, ministre

Venons-en, maintenant, aux objectifs quantitatifs de ce projet de loi.

Au cours de nos débats, beaucoup de questions ont en effet porté sur les moyens consacrés à la réforme. Qui ne voit que la question des moyens, comme toujours largement évoquée par l'opposition, ne peut plus être posée sans une redéfinition des priorités et de l'organisation de notre système éducatif ?

M. Vallet et M. Lardeux ont parfaitement raison de souligner le caractère impératif d'une meilleure gestion, d'une gestion plus réactive et mieux évaluée. La présentation sommaire des conclusions de la Cour des comptes par la presse ne saurait toutefois être acceptée sans nuances, comme l'a d'ailleurs aussi relevé hier M. Philippe Séguin, Premier président de la Cour des comptes.

Il nous reviendra d'améliorer l'efficacité du remplacement, de limiter les mises à disposition aux cas dans lesquels une priorité éducative est vérifiée.

Debut de section - Permalien
François Fillon, ministre

Aucun enseignant ne doit être employé autrement qu'en rapport avec ses compétences pédagogiques. Telle est l'orientation que je suis.

Mais, pour revenir à la question des moyens, j'ai conscience que la réforme que je propose doit s'accompagner d'un effort particulier, et cet effort sera engagé.

L'éducation n'est pas une dépense de fonctionnement ; c'est une dépense d'investissement. Cet investissement doit, en certains lieux, être plus intense qu'ailleurs, et croyez bien, madame Hoarau, monsieur Virapoullé, que je mesure parfaitement ce que cela implique pour la Réunion.

Dans ce département, l'école a encore des difficultés que je ne nie pas. C'est pourquoi il fera l'objet, à la rentrée, d'un effort particulier : il bénéficiera de 143 postes supplémentaires d'enseignant. Sachez-le, la Réunion continuera à faire l'objet de toutes nos attentions dans la préparation des rentrées suivantes.

Roger Karoutchi a mis en lumière avec beaucoup de tact et de lucidité la nécessité de faire « bouger le système » sous peine d'essoufflement. J'affirme que, comme lui, je cherche la transformation du système et non sa révolution. Oui au changement, non au chambardement ! Voilà mon approche. Ce réformisme pragmatique est, je crois, le gage d'une rénovation applicable et concrète de notre système éducatif !

Debut de section - Permalien
François Fillon, ministre

Mesdames, messieurs les sénateurs, « la mission des hommes et des femmes qui font accéder les jeunes aux domaines de la connaissance comporte, au point de vue humain, une responsabilité primordiale ». Cette conviction de Charles de Gaulle, exprimée dans ses Mémoires d'espoir, n'est pas restée dans le seul ordre du discours.

Dès 1960, les collèges d'enseignement général sont créés. En 1975, René Haby instituait le collège unique. C'est dire que cette majorité est l'héritière d'une tradition réformatrice et qu'elle a toujours eu à coeur de conduire le plus grand nombre sur les chemins de la connaissance et du savoir ! Il lui appartient aujourd'hui de prolonger cette tradition pour que le service public soit une fois encore au rendez-vous et puisse conforter l'égalité des chances en même temps que l'avenir de la France.

Applaudissements vifs et prolongés sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

Je suis saisi, par M. Renar, Mme David, MM. Ralite, Voguet et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, d'une motion n° 170, tendant à opposer l'exception d'irrecevabilité.

Cette motion est ainsi rédigée :

En application de l'article 44, alinéa 2, du Règlement, le Sénat déclare irrecevable le projet de loi d'orientation pour l'avenir de l'école, adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence (221, 2004-2005).

Je rappelle que, en application de l'article 44, alinéa 8, du règlement du Sénat, ont seuls droit à la parole sur cette motion l'auteur de l'initiative ou son représentant, pour quinze minutes, un orateur d'opinion contraire, pour quinze minutes également, le président ou le rapporteur de la commission saisie au fond et le Gouvernement.

En outre, la parole peut être accordée pour explication de vote, pour une durée n'excédant pas cinq minutes, à un représentant de chaque groupe.

La parole est à M. Ivan Renar, auteur de la motion.

Debut de section - PermalienPhoto de Ivan Renar

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, ce projet de loi nous est présenté comme un vaste dispositif permettant de mettre un terme à l'échec scolaire.

En réalité, les dispositions inscrites dans ce texte ne garantissent en aucune manière l'égalité des chances au sein du système éducatif et ne contribuent pas à réduire les inégalités d'accès à l'éducation. En occultant la question des moyens, en éludant le problème de la carte scolaire, en reléguant certaines disciplines au rang de matières optionnelles, ce projet risque même de les aggraver. C'est pourquoi nous avons déposé cette motion tendant à opposer l'exception d'irrecevabilité.

Tout le monde s'accorde à constater que l'école, aujourd'hui plus qu'hier, est confrontée au renforcement des inégalités sociales et culturelles, à la violence, à la montée des communautarismes. Il est difficile d'admettre que plus de 150 000 jeunes sortent du système scolaire sans aucune qualification : l'échec scolaire demeure comme une blessure à notre flanc.

Il est clair qu'une vaste réforme du système éducatif est nécessaire. Cependant, elle ne saurait être conduite sans un véritable dialogue avec la communauté éducative. La tentative de concertation, dans le cadre de la commission Thélot, a fait long feu, le Gouvernement ayant choisi un passage en force de son projet de refonte de l'école, négligeant les recommandations du Conseil supérieur de l'éducation et du Conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche tendant à un réexamen de ce projet de loi.

Monsieur le ministre, vous n'avez pas non plus souhaité entendre les demandes des lycéens, particulièrement mobilisés pour préserver et renforcer la qualité des enseignements dispensés au sein de l'éducation nationale. Car ces lycéens, même s'ils ne sont que de passage, pensent, à juste titre, être les dépositaires de l'avenir du système éducatif.

Et ne considérez pas ces jeunes comme une population turbulente à mettre au pas. Ils étaient sortis dans la rue au lendemain du premier tour de l'élection présidentielle pour manifester leur refus de la haine et de la xénophobie ; aujourd'hui, ils sont à nouveau dans la rue parce qu'ils sont confrontés à une véritable urgence.

Vous avez également dédaigné les organisations représentatives du corps enseignant qui, unanimes, avaient fait part de leur opposition à ce texte et avaient proposé d'autres pistes de travail et de réflexion.

Il ne faut pas s'y tromper : la colère des enseignants ne peut se réduire à l'expression d'une simple frilosité corporatiste ; elle traduit le mal-être d'équipes pédagogiques qui se sentent méprisées, rendues responsables de tous les maux qui accablent l'école, alors qu'elles tentent, tant bien que mal, avec des moyens en constante diminution, de remédier quotidiennement aux difficultés de leurs élèves.

Les parlementaires peuvent en témoigner, eux qui, sur le terrain, observent les conséquences désastreuses des suppressions de postes au sein de l'éducation nationale. Au-delà des clivages partisans, nombreux sont ceux qui vous demandent de reconsidérer vos décisions. Les recteurs et inspecteurs d'académie eux-mêmes jugent que la rentrée prochaine sera extrêmement difficile.

L'expérience des enseignants, le témoignage des élèves et de leurs parents, les conclusions de travaux scientifiques, tout démontre que la lutte contre l'échec et les inégalités scolaires exige la mise en oeuvre d'importants moyens financiers, mais surtout humains. Le Gouvernement prétend assurer la réussite de chaque élève. Dont acte ! Il reste que la question des moyens, pourtant cruciale, est absente de ce projet de loi et que de nouvelles suppressions de postes sont déjà prévues pour la rentrée de 2006. Celles-ci s'ajouteront aux nombreuses mesures de rigueur qui ont déjà touché l'école et dont on constate les effets négatifs, comme le non-remplacement de quelque 10 000 surveillants et la suppression des emplois-jeunes au sein de l'éducation nationale.

Dans le même ordre d'idée, comment mettre en oeuvre le programme personnalisé de réussite scolaire et le dédoublement des classes pour l'enseignement des langues vivantes tout en continuant, tambour battant, à supprimer des postes d'enseignants ? Comment pensez-vous renforcer le collège, qualifié par vous-même de « maillon faible » de notre système éducatif, alors que vous diminuez considérablement les moyens qui lui sont attribués ?

Et comment faut-il interpréter les baisses drastiques des effectifs enseignants du second degré dans les académies de Lille et de Nancy-Metz, qui comptent beaucoup de ZEP et de zones sensibles ? Peut-on admettre que, sous prétexte de réduire les écarts en matière de taux d'encadrement des élèves, le Nord-Pas-de-Calais et la Lorraine perdent respectivement 900 et 500 postes, alors que l'avenir de ces régions économiquement et socialement sinistrées dépend des jeunes générations, qui devraient être hautement qualifiées ?

Debut de section - PermalienPhoto de Ivan Renar

A l'inverse du nivellement par le bas aujourd'hui mis en oeuvre, ne faudrait-il pas saisir l'occasion que constitue la baisse démographique actuelle pour mener des expériences inédites ? De récents travaux scientifiques et la pratique des enseignants ont permis d'établir une relation directe entre la taille des classes et la réussite des élèves. Aussi je vous propose de maintenir les effectifs existants pour améliorer le taux d'encadrement des élèves et en finir avec les classes surchargées. Il y a fort à parier que le dédoublement des classes, notamment pour l'enseignement des langues vivantes, et l'individualisation des mesures de soutien et d'aide aux devoirs gagneraient en efficacité et permettraient d'avancer de manière significative vers la solution du douloureux problème de l'échec scolaire.

Les inégalités géographiques reflètent les inégalités sociales. Or le projet de loi ne traite pas de la carte scolaire, qui constitue pourtant le révélateur social des maux de l'école. Le recrutement des élèves en fonction de leur domicile contribue en effet à importer les inégalités sociales et culturelles au sein de l'école. En outre, le principe de mixité sociale a été souvent contourné par la pratique des dérogations, sous couvert de choix d'options. Ainsi peut-on observer que les usages sociaux de la carte scolaire produisent des « initiés » et des « relégués ».

Pour remédier à cette situation, il faudrait certainement s'interroger sur l'offre éducative en termes d'enseignements optionnels : langues anciennes, langues vivantes autres que l'anglais. Je pense en particulier qu'il est indispensable que l'enseignement de la langue arabe soit proposé à l'école. §L'éducation nationale ne saurait nullement se satisfaire de la situation actuelle où l'enseignement de l'arabe est pris en charge par certaines associations, parfois perméables à l'idéologie islamiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Ivan Renar

Cela dit, monsieur le ministre, votre projet se fonde sur la conception d'une scolarité resserrée autour de compétences de bases. La définition d'un socle commun révèle une volonté politique de réduire le coût d'un système éducatif que vous jugez trop dispendieux. L'utilisation de l'idée d'un « indispensable minimum » permet de réduire l'offre en termes d'options, de reléguer certains enseignements au rang de disciplines secondaires.

Monsieur le ministre, toutes les disciplines contribuent à la construction de la personnalité et de la citoyenneté. L'apport de chaque enseignement ne saurait être minoré. Sachons écouter les témoignages d'enseignants qui nous parlent de l'épanouissement de certains de leurs élèves, faibles en mathématiques ou en français, mais révélant un véritable talent artistique ou sportif leur permettant de rattraper leur retard.

Il apparaît donc essentiel de redéfinir ce que doit être une culture scolaire commune de haut niveau, accessible à chaque élève.

Dans un monde toujours plus complexe, n'est-il pas paradoxal de vouloir réduire le socle commun des connaissances aux rudiments mêmes de l'école : écrire, lire compter. Aborder l'enseignement par le plus petit dénominateur commun, n'est-ce pas faire peu de cas des potentialités pourtant gigantesques de chacun de nos enfants ? J'y vois un recul de civilisation qui revient à renoncer à donner à l'ensemble de notre jeunesse les moyens d'exprimer la meilleure part d'elle - même.

Comment vivre sans poésie, sans peinture, sans histoire, sans sciences, sans conscience ? Cela me fait penser à Tadeusz Kantor à qui l'on demandait à quoi servait le théâtre et qui répondait : « Le théâtre, c'est comme l'amour, ça ne sert à rien mais comment vivre sans ? »

Vous mettez les enfants au régime : moins de nourritures intellectuelles et de pensées sensibles. C'est le « bol élémentaire » !

Debut de section - Permalien
François Fillon, ministre

Comment pouvez-vous dire des choses pareilles ? Vous n'y croyez pas vous-même !

Debut de section - PermalienPhoto de Ivan Renar

On donne la règle du jeu à tout le monde, mais on réserve les bonnes cartes à quelques-uns. Est-ce bien démocratique ?

Dans son film l'Esquive, le cinéaste Abdellatif Kechiche nous fait découvrir les lettres de noblesse dont chaque jeune est porteur. Les professionnels du cinéma ont justement attribué le César du meilleur film à ce réalisateur, car son oeuvre témoigne, par le verbe insolent de Marivaux, que le langage est bien un pouvoir dès lors qu'il est maîtrisé. L'homme est langage et il ne naît véritablement au monde qu'avec la capacité de s'exprimer.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Longuet

Il faut donc apprendre à lire et à écrire. C'est bien ce que nous disons !

Debut de section - PermalienPhoto de Ivan Renar

L'enseignement, l'éducation sont vraiment des défis de notre temps. Quand les têtes s'emplissent de divertissements « décervelants », quand la culture marchande de loisirs mondialisés ne propose que de la consommation déshumanisante, le devoir impérieux du service public de l'enseignement est de renforcer sa politique en matière de formation de l'imaginaire, de la sensibilité et de l'esprit critique.

Une société qui abandonne les principes d'élévation de l'individu se condamne elle-même, tout comme une démocratie qui renonce à ce que chaque homme et chaque femme demeurent des citoyens debout.

Au-delà du système éducatif, la réforme que vous conduisez aura des répercussions profondes sur l'ensemble de la société. On ne brade pas impunément l'héritage du siècle des Lumières. L'éducation comme la culture sont porteuses d'émancipation personnelle et collective. Comme l'a si bien dit Condorcet, « il n'y a pas de liberté pour l'ignorant ».

Alors que l'on assiste à un retour en force de l'obscurantisme, les jeunes n'ont jamais eu autant besoin du pluralisme des savoirs humanistes pour apprendre à penser par eux-mêmes. Votre projet de loi revient à mettre notre éducation nationale sous le régime du service minimum : après le RMI et les minima sociaux, voici l'école minimum !

Votre projet épouse comme un gant le dogme libéral qui entraîne un nombre croissant d'hommes et de femmes à l'écart de l'échange social mais aussi de l'échange symbolique sans lesquels la vie n'est pas la vie. Or le droit et le respect ne se divisent pas. Comme vous le savez, le monde du peu se satisfait finalement de la démocratie du petit : un tout petit peu de sous, un tout petit peu de savoir, un tout petit peu de bonheur, un tout petit peu d'école, bref, un RMI de vie !

Vous voulez nous faire croire qu'il y aurait trop de matières enseignées. C'est faux, et les lycéens ne s'y trompent pas. Ils ont envie d'avoir le choix : des maths, du sport, du français, des langues vivantes, du théâtre avec des artistes, de l'histoire et de la géographie, de la philosophie, des sciences. Ils sont bien placés pour savoir ce qui ne va pas dans leur établissement. Et ce qu'ils revendiquent, à juste titre, ce n'est pas moins d'offre des savoirs, c'est plus de moyens, plus de profs - et des profs mieux formés -, plus de surveillants, des classes à petit effectif. Ils ne demandent que les conditions de la réussite pour tous et l'égalité des chances. Et parce qu'ils ne veulent pas d'une vie au rabais, ils ne veulent pas d'une éducation bas de gamme !

Comment demeurer une nation à la pointe du progrès et de l'innovation si on ne permet pas aux futures Marie Curie de devenir Marie Curie, aux futurs Mozart de devenir Mozart ? Chacun a droit à sa piste d'envol.

Puisque la France s'enorgueillit, à bon droit, de défendre la diversité culturelle, comment peut-elle être crédible si l'école ne promeut plus la jubilatoire diversité des connaissances pour tous ? Notre jeunesse souhaite se nourrir du présent et de la création d'aujourd'hui, mais aussi de l'assimilation critique de l'héritage du passé. A nous de leur donner « des racines et des ailes » afin, en quelque sorte, de se souvenir de l'avenir.

Au sein de l'école, la place de la mémoire, de l'histoire, de la culture, mais aussi de l'art et des artistes aux côtés des professeurs, est vitale. Non seulement l'approche d'une discipline artistique permet à certains élèves de surmonter de graves difficultés, mais elle permet à tous de développer sa part d'humanité. L'éducation artistique autorise chacun à devenir acteur de sa propre vie, à grandir et à se grandir.

Les arts à l'école, c'est aussi une formidable façon de diversifier les méthodes de transmission et les formes d'apprentissage. En raison de leurs spécificités, les disciplines et pratiques artistiques édifient des ponts entre les différents savoirs et éclairent ainsi toute l'intelligence des multiples enseignements dispensés. Redonner toute sa place à l'art et à la culture pendant toute la vie scolaire est fondamental. En effet, l'article et la culture agissent sur le réel, sur la relation à autrui, et renouvellent le rapport social en construisant les raisons du « vivre ensemble ». Contre la standardisation et le formatage, l'art et la culture valorisent la singularité tout en éclairant les valeurs universelles.

Le général de Gaulle, accompagné d'André Malraux, déclarait, lors de l'inauguration de la maison de la culture de Bourges : « La culture n'est pas qu'un refuge et une consolation, c'est la condition même de notre civilisation ! » C'est toujours vrai !

Au-delà de la notion de socle commun, votre projet de loi révèle votre vision utilitariste de l'école. En cela il se distingue de l'ensemble des réformes qu'a connu notre système éducatif. Il évacue toute référence au bonheur, qui demeure pourtant une idée neuve en Europe, et dont l'éducation nationale devrait être porteuse. Une fois encore, entendons les lycéens qui revendiquent le bonheur d'apprendre, le plaisir d'étudier et le droit à s'épanouir à l'école.

Monsieur le ministre, le vieux révolutionnaire que je suis rêve toujours de pain et de roses et ne peut cautionner un tel projet de loi, qui sonne le glas d'une conception de l'école fraternelle et émancipatrice pour tous.

Ce texte ne propose qu'une vision étroite de l'école. De ce point de vue, il est intéressant de constater qu'il n'intègre pas la question de l'enseignement supérieur, qui constitue pourtant l'ultime maillon de notre système éducatif. On ne peut penser l'offre éducative des lycées sans prendre en considération les débouchés offerts par les universités : BTS, IUT ou classes préparatoires.

De même, si votre projet fixe à l'école l'objectif de mener 50 % d'une classe d'âge à un diplôme de l'enseignement supérieur, aucun article ne traite des conditions de réussite dans le supérieur ou du passage du lycée à l'université, en particulier pour les enfants des milieux populaires. Il aurait été pourtant plus que souhaitable que la loi prévoie des dispositions permettant à tous les élèves d'accéder réellement aux études supérieures.

Vous ne traitez pas non plus véritablement de la formation et du déroulement de carrière des enseignants. Ainsi ne trouve-t-on dans votre projet aucune mesure significative pour améliorer l'attractivité de ce métier, alors que l'éducation nationale connaît un important mouvement de renouvellement des générations. N'y figure aucune disposition concernant le temps réel de formation des enseignants, alors que les directeurs d'IUFM recommandaient vivement l'allongement de la formation professionnelle sur deux ans, chaque enseignant devant alterner pratique sur le terrain et apprentissage théorique, acquérir des savoirs disciplinaires et des compétences pédagogiques.

Face à la diversité des élèves et des conditions d'enseignement, la formation des professeurs demeure l'une des clés pour parvenir à une école de la réussite pour tous.

Votre projet manque aussi de lisibilité sur la question de l'intégration des IUFM aux universités. On peut se demander si le caractère national de la formation des enseignants, peu compatible avec la « culture d'autonomie » des universités, sera garanti. Dès lors que chaque IUFM sera rattaché à un unique établissement universitaire, on ignore qui prendra en compte et soutiendra une formation ne s'inscrivant pas nécessairement dans le champ des spécialités de l'université d'intégration.

Par ailleurs, la question des moyens et du niveau d'autonomie dont disposeront ces instituts demeure sans réponse.

Monsieur le ministre, nous vous invitons à revoir votre projet de loi, conçu à la hâte et par trop réducteur. L'école est un enjeu bien trop important pour faire l'objet d'une querelle partisane et il n'y aura jamais trop de sentinelles sur la ligne de front de l'obscurantisme.

Plus que jamais, nous avons besoin d'un projet éducatif global, allant de la maternelle à l'université, promouvant les valeurs humanistes de la République. Il est grand temps de redonner corps aux principes de liberté, d'égalité et de fraternité inscrits au fronton de nos écoles. Pour ce faire, sachons retrouver les ambitions qui motivèrent de nombreuses réformes : favoriser l'accès de chaque enfant aux savoirs, à tous les savoirs, et élever le niveau de qualification de chaque élève.

Investir dans notre éducation, c'est assurer l'avenir de la nation et participer au progrès en Europe ; c'est aussi permettre l'émancipation de tous les individus. A contrario, vouloir limiter les objectifs de l'école et instaurer un « minimum culturel » compromet gravement les capacités de notre pays à se maintenir au rang des grandes nations de ce monde.

C'est pour toutes ces raisons, mes chers collègues, que nous soumettons à votre suffrage cette motion tendant à opposer l'exception d'irrecevabilité.

Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

Les auteurs de cette motion considèrent que les missions essentielles de l'éducation nationale seraient menacées par la « logique libérale » qui sous-tendrait le présent projet de loi d'orientation.

Dans ce projet de loi, il est rappelé que l'école doit transmettre à tous les élèves les savoirs indispensables pour réussir leur vie personnelle, professionnelle et leur vie de citoyen dans notre société.

On ne saurait élever une objection contre l'idée selon laquelle l'école doit aussi préparer les jeunes à l'emploi quand 150 000 d'entre eux sortent chaque année du système scolaire sans qualification ni diplôme, et donc sans perspective professionnelle et sociale.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

Si se soucier de l'avenir professionnel des jeunes et faire en sorte qu'ils poussent la porte d'une entreprise plutôt que celle de l'ANPE est considéré comme relevant d'une affreuse approche libérale, eh bien j'accepte d'être un libéral.

Si se soucier de mettre en place des mesures spécifiques pour les jeunes qui éprouvent des difficultés, c'est être libéral, je suis un libéral.

Si vouloir donner l'accès à un socle commun de maîtrise des fondamentaux à tous les élèves, c'est être libéral, je suis un libéral.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

Si vouloir offrir aux « primo-arrivants » une meilleure maîtrise de notre langue, c'est être libéral, je suis un libéral.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Croyez-vous vraiment que votre loi va remédier à ces problèmes ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

Vous semblez par ailleurs oublier, chers collègues, que le projet de loi traite abondamment de l'égalité des chances et apporte des réponses très concrètes pour donner corps à cet objectif que nous défendons tous au-delà des propos incantatoires stériles.

La commission émet un avis défavorable sur cette motion.

Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Demandez-vous pourquoi les enfants ne savent pas lire !

Debut de section - Permalien
François Fillon, ministre

M. François Fillon, ministre. C'est une bonne question, madame Borvo Cohen-Seat, et vous auriez peut-être dû vous la poser pendant les années où une majorité dont vous faisiez partie a dirigé notre pays.

Applaudissementssur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Je n'ai jamais été ministre de l'éducation nationale, monsieur Fillon !

Debut de section - Permalien
François Fillon, ministre

En vérité, monsieur le président, il est très difficile de répondre à l'intervention de M. Renar parce qu'elle ne concerne pas le projet de loi qui est présenté.

Debut de section - Permalien
François Fillon, ministre

Elle n'a rien à voir avec les réformes qui vous sont proposées. C'est le discours que l'on entend depuis des semaines dans la rue, par exemple sur le « socle réducteur » qui priverait les enfants de l'enseignement de l'art ou de l'enseignement du sport.

Tout le monde sait qu'il s'agit d'un bobard qui n'a aucun sens, qui ne correspond en rien au texte qui vous est présenté et je n'ai donc pas l'intention de répéter éternellement la même chose sur ce sujet.

Quant aux arguments constitutionnels qui sont censés fonder une exception d'irrecevabilité, comme je n'en ai pas entendu, je n'ai pas à y répondre.

Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

La parole est à M. Ivan Renar, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Ivan Renar

M. Ivan Renar. Je ne serai pas aussi succinct que M. le ministre.

Exclamations sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

Le peuple s'exprime dans les urnes, pas dans la rue !

Debut de section - Permalien
François Fillon, ministre

Vous dites des bêtises, monsieur Renar !

Debut de section - PermalienPhoto de Ivan Renar

Ce n'est pas en simplifiant les choses que l'on trouve des solutions.

Je reviendrai, d'abord, sur la question de l'art et de la culture et, ensuite, j'essaierai de vous montrer, monsieur le ministre, l'inconstitutionnalité de ce projet de loi.

Cette question de la culture, de l'art et des artistes à l'école n'est pas secondaire. Nous ne sommes plus à l'époque de la cassette des menus plaisirs, disait Jean Vilar. La culture est une question d'investissement à long terme, car, dans ce domaine, c'est la présence dans la durée qui est essentielle, et cela commence par l'école.

Dans un monde où l'on assiste à l'offensive de l'argent absolu, comme on parlait de monarchie absolue, nous savions déjà que l'argent qui circule dans nos destinées mettait la main dans nos rêves comme dans nos poches et nous sacrifiait en nous flattant.

C'est ainsi que vous proclamez votre amour pour l'école et que, d'un même mouvement, vous lui coupez les vivres et vous lui rognez les ailes. Cela nous renvoie à Jacques Prévert, dont vous connaissez l'insolence et l'impertinence...

Debut de section - Permalien
François Fillon, ministre

L'insolence et l'impertinence, ce n'est pas le mensonge !

Debut de section - PermalienPhoto de Ivan Renar

... - ce sont des valeurs de la démocratie -, disant à la femme aimée à qui il venait d'offrir un superbe bouquet de roses rouges : ...

Debut de section - PermalienPhoto de Ivan Renar

M. Ivan Renar. ... « Tu dis que tu aimes les fleurs, et tu leur coupes la queue...Alors quand tu dis que tu m'aimes, j'ai un peu peur. »

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Ivan Renar

Qui ne voit que les dizaines de milliers d'enfants qui reçoivent des artistes dans leur école, qui vont à un concert, au théâtre, dans un musée, dans une bibliothèque, ont un vocabulaire déjà plus riche en sortant et qu'ils tendent à voir tous les oiseaux de leur volière ? Comme le disait justement André Malraux, « les jeunes, les enfants, là est la clé du trésor. »

Mes chers collègues, je le rappelle, le théâtre a existé bien avant l'école.

Les élus locaux qui siègent ici le savent bien, quand des artistes, quelle que soit leur discipline, viennent régulièrement dans une classe, il y a toujours un moment magique : celui où les jeunes découvrent qu'il n'y a pas de talent sans une quantité gigantesque de travail. C'est souvent là qu'ils apprennent la valeur du travail.

Maurice Schumann, qui fut notre doyen et que tous nous estimions et respections, recevant François Jacob sous la Coupole avait déclaré que la seule faute que le destin ne pardonne pas au peuple est l'imprudence de mépriser les rêves. Il rejoignait en cela ce que Jacques Prévert et Marcel Carné, dans le superbe film Les enfants du Paradis, faisaient dire à un personnage, à propos des spectateurs occupant les places les moins chères, celles du poulailler, ou « paradis » : « Les petites gens peuvent avoir de grands rêves ! »

Il nous revient maintenant de transformer ces rêves en réalité. La culture n'est pas un supplément d'âme ou une décoration que l'on porte à la boutonnière. N'hésitons pas à être élitaires pour tous !

Par ailleurs, mes chers collègues, je souhaite attirer votre attention sur l'incohérence manifeste du projet de loi. Le même reproche pourrait être formulé au sujet des propositions émanant des deux commissions sénatoriales concernées : il s'agit de l'absence, malgré les annonces faites, de dispositions de programmation budgétaire ayant une valeur normative.

En effet, différents tableaux sont censés présenter les maigres financements de mesures prévues dans le projet de loi, mais ils sont placés dans le rapport annexé, qui, j'y insiste, n'a qu'une valeur indicative.

En fait, monsieur le ministre, aucune mesure de financement n'est assurée et leur éventuelle adoption est renvoyée à plus tard, selon les aléas budgétaires du moment.

Lorsque, dans un bel élan, la commission des finances et la commission des affaires culturelles proposent d'adjoindre à la notion de loi d'orientation celle de loi de programme, elles accentuent le brouillage, puisque, même en modifiant des dispositions financières, elles les maintiennent dans le rapport annexé, c'est-à-dire hors du champ normatif. Nous restons donc dans le domaine des bonnes intentions et de l'effet d'annonce.

Monsieur le ministre, je m'interroge sur la constitutionnalité du dispositif proposé au regard de l'article 40 de la Constitution, et je souhaiterais que la commission des finances s'exprime sur cet aspect des choses.

Pouvez-vous nier que vous nous proposez aujourd'hui des mesures dont le financement est envisagé mais non prévu réellement ?

Les amendements des commissions visent à masquer la manoeuvre qui confirme la difficulté du Gouvernement à concilier quelques intentions d'augmentation de crédits et la soumission volontaire, acceptée, aux critères draconiens du carcan financier européen. C'est pour nous une raison de plus de voter cette motion d'irrecevabilité d'un texte dont j'affirme l'inconstitutionnalité.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

Je mets aux voix la motion n° 170, tendant à opposer l'exception d'irrecevabilité.

Je rappelle que l'adoption de cette motion entraînerait le rejet du projet de loi.

Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

Le scrutin a lieu.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

Personne ne demande plus à voter ?...

Le scrutin est clos.

Il est procédé au comptage des votes.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 116 :

Le Sénat n'a pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

Je rappelle que la commission des finances a proposé une candidature pour un organisme extraparlementaire.

La présidence n'a reçu aucune opposition dans le délai d'une heure prévu par l'article 9 du règlement.

En conséquence, cette candidature est ratifiée et je proclame M. Paul Girod membre du Haut conseil du secteur public.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

Nous reprenons la discussion du projet de loi d'orientation pour l'avenir de l'école.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

Je suis saisi, par MM. Bodin, Assouline, Dauge, Guérini, Lagauche, Mélenchon, Repentin et Signé, Mme Tasca, M. Todeschini, Mme Voynet et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, d'une motion n° 179, tendant à opposer la question préalable.

Cette motion est ainsi rédigée :

En application de l'article 44, alinéa 3, du Règlement, le Sénat décide qu'il n'y a pas lieu de poursuivre la délibération sur le projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, d'orientation pour l'avenir de l'école (221, 2004-2005).

Je rappelle que, en application de l'article 44, alinéa 8, du règlement du Sénat, ont seuls droit à la parole sur cette motion l'auteur de l'initiative ou son représentant, pour quinze minutes, un orateur d'opinion contraire, pour quinze minutes également, le président ou le rapporteur de la commission saisie au fond et le Gouvernement.

En outre, la parole peut être accordée pour explication de vote, pour une durée n'excédant pas cinq minutes, à un représentant de chaque groupe.

La parole est à M. Jean-Marc Todeschini, auteur de la motion.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Todeschini

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l'avenir de notre école, priorité de notre nation, mérite bien mieux qu'un débat faussé et tronqué. Oui, elle a besoin d'une réforme, monsieur le ministre, mais d'une réforme visant à pérenniser et non à détruire ce que toutes les lois sur l'école ont, depuis soixante ans, eu pour ambition : élever le niveau général et ouvrir à tous les enfants les portes du savoir.

Parce qu'il y a supercherie, mensonge, incohérence, démagogie, précipitation et danger, tant sur la forme que sur le fond de ce projet de loi, nous vous demandons de le retirer.

Je vais m'en expliquer dans un instant, mais je souhaite au préalable vous dire combien il me semble difficile de se prononcer sur ce texte.

En effet, nous ne pouvons débattre ici dans de bonnes conditions au regard du difficile contexte socio-économique actuel, mais surtout par respect du mandat qui est le nôtre.

Nous sommes, en tant que parlementaires et acteurs législatifs, les représentants de la nation, du peuple souverain et, dans cet hémicycle, nous sommes aussi souvent des élus locaux. Les lois que nous votons doivent répondre aux préoccupations des milliers de Français, jeunes ou moins jeunes, qui, depuis un an, manifestent régulièrement leur colère face au mépris dont ils sont victimes, crient leurs craintes et protestent contre la vision ultralibérale qui anime ce gouvernement aveugle et sourd.

M. le Premier ministre a eu un jour un propos malheureux, voire révélateur du diktat auquel obéit son équipe de ministres, d'ailleurs souvent rappelée à l'ordre par le Président de la République, devenu pour un temps le sage populiste du libéralisme gouvernemental.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Todeschini

« Ce n'est pas la rue qui gouverne ! » avait lancé le Premier ministre. Or la rue est dans son droit, celui d'alerter, de demander qu'on se préoccupe d'elle.

Ce gouvernement n'a pas le monopole de l'intelligence, de la détermination de ce qui est bon ou mauvais. Un gouvernement responsable présente, dans un climat de confiance et de concertation, des réformes dont l'objet est d'améliorer le quotidien des citoyens en favorisant l'égalité des chances et la solidarité.

Après avoir exclu la rue de la politique au sens premier du terme, c'est-à-dire de la gestion de la Cité, vous portez atteinte au Parlement, dont vous mésestimez le rôle, jusqu'à faire fi, j'ose le dire, de son existence. Ces propos ne sont pas gratuits ; ils sont, malheureusement, tout à fait justifiés.

Depuis le week-end dernier, en effet, dans l'ensemble de la presse quotidienne, nous voyons défiler des pages de publicité annonçant la loi et ses grandes lignes de façon subliminale, en évoquant simplement de bonnes intentions. Or il me semble que nous sommes réunis ici pour en discuter. De qui se moque-t-on, monsieur le ministre ?

Ces raisons motivent par conséquent notre question préalable, qui trouve aussi son sens au regard de la forme et du fond du projet de loi.

J'évoquerai tout d'abord sa forme.

Vous avez déclaré l'urgence sur ce texte au seul motif qu'il fallait couper court à la pression de la rue, au désaveu que suscite votre réforme et que vous témoigne toute la communauté éducative. Vous aurez beau dire le contraire, personne n'est dupe, même pas votre majorité ! C'est en tout cas ce qui ressort des débats à l'Assemblée nationale.

Bien que ce désaveu soit flagrant, vous le considérez avec un dédain certain. C'est la preuve de ce que nous dénoncions depuis longtemps : les débats sur l'avenir de notre école n'étaient qu'un trompe-l'oeil destiné à masquer la vision libérale et rétrograde du Gouvernement sur notre système éducatif. Il s'agissait d'une caution ! Autant de débats, d'énergie dépensée réduits à néant, balayés d'un revers de main ; un rapport et des avis ignorés.

Le rapport Thélot devait annoncer la loi d'orientation. Il n'est pas pris en compte dans votre projet de loi. Pourtant, il présentait les deux défis que l'école doit relever.

Le premier concerne le passage de la massification à la démocratisation de l'enseignement. Après l'égal accès à l'enseignement, il faut, en effet, offrir aux jeunes une égalité réelle des chances de réussite.

Le second défi est le renouvellement de près de la moitié des enseignants dans les dix ans qui viennent, renouvellement qui pose de manière urgente la question du recrutement et de la formation de milliers de nouveaux enseignants.

Ces deux défis sont ignorés. Et qu'on ne nous réponde pas que nous n'avons pas lu le projet de loi ! Celui-ci n'est qu'un tissu de bonnes intentions, aucun moyen n'est consacré à leur concrétisation.

De plus, ce projet de loi ignore le rapport Thélot dans la mesure où, à aucun moment, il ne lie inégalités sociales et échec scolaire. De même, il ne comporte rien s'agissant du délicat passage du second degré à l'enseignement supérieur. Comment, dès lors, faire en sorte que la moitié d'une classe d'âge accède aux diplômes de l'enseignement supérieur, alors même que le taux d'échec au DEUG est, on le sait, supérieur à 45 % ?

Des avis ignorés, les compétences de certains spécialistes et professionnels des questions éducatives remises en cause : le Conseil supérieur de l'éducation s'est majoritairement prononcé contre ce texte.

Qu'importe son avis, n'est-ce pas monsieur le ministre ? C'est vous qui décidez seul ! Pis encore, comme ce n'est pas très gentil de s'opposer à vous, il sera sanctionné ! Car sanction il y a bien, avec contrôle politique en arrière-plan.

Vous allez mettre en place une sorte d'autorité administrative indépendante qui sera compétente pour se prononcer, à votre demande, dans les domaines de la pédagogie, des programmes, de l'évaluation des connaissances des élèves, de l'organisation et des résultats du système éducatif, et de la formation des enseignants. Il s'agit du Haut conseil de l'éducation, destiné à se substituer à deux instances actuelles : le Haut conseil de l'évaluation de l'école et le Conseil national des programmes.

Ces deux instances étaient composées de personnalités qualifiées, enseignants et chercheurs, et de représentants des acteurs, partenaires et usagers de l'école que sont les syndicats, les associations de parents d'élèves et les élus.

Voilà cinquante-six personnes à la riche expérience qui vont se voir remerciées de leur travail en étant remplacées par neuf autres. Il s'agira - cela va de soi ! - d'experts, qui seront « indépendants et d'une grande neutralité » puisqu'ils seront désignés par le Président de la République, le président du Sénat et le président de l'Assemblée nationale...

Par cette composition contestable, vous orchestrez une véritable reprise en main politique des outils d'évaluation de notre système éducatif et de mise en oeuvre des politiques éducatives.

De surcroît, devant la dilution des missions de ce Haut conseil de l'éducation, on peut dire que ce dernier risque fort d'être poussé à l'inactivité !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Todeschini

Par la création de ce nouvel organe, vous faites peser le discrédit sur le travail mené par une partie de la communauté éducative.

Applaudissements sur les mêmes travées.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Todeschini

Et que dire de l'autre partie, celle que vous méprisez : les parents, les élèves, les élus, les enseignants ?

Aux parents vous refusez la coresponsabilité éducative qu'ils demandent. Ces parents qui manifestent occupent bon nombre d'établissements scolaires - c'est le cas notamment dans mon département où ils squattent nuit et jour collèges et lycées pour en refuser la fermeture.

Les élèves, quant à eux, veulent avoir les mêmes chances quels que soient leur lycée et le quartier dans lequel ils vivent. La seule réponse que vous apportez à l'inquiétude de ces jeunes pour leur avenir, c'est l'éternel procès en manipulation. Qui, monsieur le ministre, pourrait parvenir à manipuler près de 165 000 lycéens pour qu'ils battent le pavé ? Ils n'obéissent qu'à eux-mêmes et à leur intelligence !

Applaudissements sur les mêmes travées.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Todeschini

Soyez aussi responsable qu'eux en retirant votre projet de loi !

Les élus fournissent depuis vingt ans, dans leurs collectivités, des efforts financiers pour le fonctionnement du système éducatif. Ces collectivités ont souvent compensé - et de façon efficace - les défaillances, voire le retrait de l'Etat. Aujourd'hui, alors qu'elles ont investi massivement dans leurs écoles élémentaires, collèges et lycées, vous fermez des filières et des établissements.

Quant aux enseignants, ils sont devenus vos souffre-douleur.

Exclamations sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Todeschini

Que dire de la date de publication du rapport de la Cour des comptes qui, sans aucune information précise quant aux tâches réelles de la plupart des enseignants concernés, jette ceux-ci en pâture à l'opinion publique, en laissant supposer que nombre d'entre eux seraient payés à ne rien faire ?

Salissez, salissez, il en restera toujours quelque chose... Même si le président de la Cour des comptes s'est senti obligé d'intervenir après les commentaires qui ont été repris en boucle par les médias !

Dites-le clairement ! Votre majorité s'efforce de le dire à demi-mot : elle n'aime pas les enseignants, en général.

Protestations sur les mêmes travées.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Todeschini

Votre projet de loi méprise ainsi la communauté éducative et va même au-delà : il méprise la Constitution. Plusieurs des dispositions qu'il comportait avant son examen à l'Assemblée nationale étaient inconstitutionnelles. Votre propre majorité, monsieur le ministre, vous a alerté sur le caractère réglementaire de certaines mesures et sur les risques d'inconstitutionnalité qu'elles encouraient.

C'est dire combien votre projet est dangereux, et défaillant ! Vous avez déposé de nombreux amendements pour faire basculer ces mesures dans un rapport annexé de trente-cinq pages qui accompagne le texte soumis au Sénat.

A quoi rime ce catalogue où figurent orientations et objectifs sur de très nombreux aspects de la politique éducative, telle la proportion de filles dans les séries scientifiques, d'enfants de familles défavorisées accédant au baccalauréat, d'apprentis dans les lycées professionnels, par exemple ?

Ces objectifs ne représentent pas le coeur de votre projet, ce que nous regrettons. En les reléguant au second plan, en les inscrivant dans une annexe qui n'a aucune valeur normative, aucune force de loi, vous nous prouvez que l'école n'est pas pour vous une priorité. Vous nous révélez ainsi votre vraie vision de l'école !

Vous nous confirmez ce que nous savions et dénoncions depuis trois ans. Vous aurez beau essayer de nous convaincre du contraire, les faits sont là, monsieur le ministre.

Éventuellement, en faisant d'énormes efforts, nous aurions pu vous croire si ce texte n'arrivait pas après que vous eûtes orchestré le plus grand et le plus long plan social jamais connu. En trois ans, ce sont près de 90 000 postes qui ont été supprimés : enseignants, aides éducateurs, surveillants, et j'en passe !

Votre priorité, c'est la casse du service public de l'éducation.

Debut de section - Permalien
François Fillon, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche

Ne craignez-vous pas d'être excessif ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Todeschini

Vos discours sont charmeurs et démagogiques. Sur le terrain, en effet, des réformes sont menées parallèlement à nos débats ; j'y reviendrai.

Votre projet de loi est bel et bien mensonger. Il est aisé de s'en rendre compte : il suffit de feuilleter les pages du texte, à la recherche des moyens financiers qu'il consacre à la bonne application des mesures qu'il comporte. Rien, absolument rien ! On ne trouve guère que quelques éléments de programmation disparates, ajoutés par voie d'amendements parlementaires, et qui ne lient pas le Gouvernement puisqu'ils figurent dans le rapport annexé.

Néanmoins, vous avez avoué, en d'autres lieux, que le financement de cette coquille vide nécessiterait 2 milliards d'euros. Ce serait plutôt le double, monsieur le ministre ! D'où proviennent ces 2 milliards, car la loi de finances pour 2005 ne contient pas même un centime d'euro à ce titre ?

Faute de moyens garantis, votre projet est voué à l'échec, et l'école est bien loin de pouvoir répondre à de nouveaux défis. Il convient donc de retirer ce texte.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Todeschini

Cette absence de moyens, ces objectifs relégués au second plan, sans réelle valeur, témoignent de votre vision libérale de l'école, de votre conception même du droit à l'éducation.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Todeschini

Or le droit à l'éducation est un droit universel, garanti à chacun, bon ou mauvais, quelle que soit son origine sociale. Mais, dans votre projet de loi, vous le conditionnez à la réussite des élèves, et dans le même temps vous supprimez les travaux personnels encadrés, alors qu'ils sont considérés comme une innovation majeure pour faire réussir le plus grand nombre. C'est illogique et inacceptable !

Vous faites peser sur les élèves la responsabilité de leur échec, en ajoutant aux inégalités sociales des inégalités scolaires. Tout le monde sait que la majorité des élèves en échec scolaire est issue de milieux défavorisés.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Todeschini

Avec cette conception intolérable, vous allez exclure du droit à l'éducation près d'un million d'enfants vivant sous le seuil de pauvreté. L'école ne peut résorber à elle seule les inégalités sociales, mais elle peut fortement contribuer à les réduire. Ce n'est pas en tout cas le chemin que vous avez choisi.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Todeschini

M. Jean-Marc Todeschini. Non, ce n'est pas le chemin que vous avez choisi, car, dans ce projet de loi, vous subordonnez l'orientation des élèves aux besoins prévisibles de la société et de l'économie. C'est la demande économique qui régulera l'offre de formation ! C'est intolérable ! Votre vision de l'école est bien libérale ; elle tend vers la marchandisation de notre système éducatif.

Exclamations sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Todeschini

Vous contestez ces propos certainement parce que leur véracité vous gêne, vous dérange !

Pour vous, cette loi est nécessaire et elle est riche. Riche, oui, mais en carences et en supercherie.

Riche en carences : elle est muette sur les ZEP, la poursuite d'une politique d'éducation prioritaire n'étant guère mentionnée que dans un paragraphe de l'annexe, dépourvue de valeur législative.

Rien non plus sur l'intégration, la réduction des inégalités, le suivi personnalisé des élèves en difficulté, la démocratisation de l'accès aux qualifications.

Rien sur le lien entre l'école élémentaire et le collège, entre le collège et le lycée, entre enseignement scolaire et enseignement supérieur.

Rien sur la scolarisation à deux ans. Vous renoncez à cette scolarisation alors qu'il est pourtant largement démontré que, même si ce n'est pas la panacée, une scolarisation précoce, dès l'âge de deux ou trois ans, représente un atout supplémentaire pour la réussite scolaire dans certains milieux.

Rien sur la formation des enseignants, si ce n'est quelques articles qui réforment le seul fonctionnement des IUFM, lesquels seront désormais assimilés à des universités et intégrés, dans chaque académie, à une seule université. Quid de leur autonomie financière et pédagogique ? Quid de la professionnalisation de la formation ? Je souhaite me tromper, mais je pense qu'avec votre projet de loi la formation initiale et continue des enseignants du premier degré sera l'objet d'une régression sans précédent. Je n'ose même pas évoquer celle des professeurs du second degré tant votre projet fait l'unanimité contre lui sur ce point.

Riche en supercheries, car, d'un côté, vous charmez par vos discours de façade mensongers et, de l'autre, vous menez des réformes parallèles qui sont aux antipodes de vos paroles.

Sur le terrain, l'application de votre budget pour 2005 fait fureur. Les décisions de fermetures de classes et de suppressions de filières d'enseignement professionnel ainsi que de postes d'enseignants tombent comme à Gravelotte. La liste s'allonge !

Comme l'a dit Ivan Renar, ...

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Todeschini

... les académies qui connaissent des situations économiques difficiles en termes d'emploi et de réindustrialisation sont les plus grandes perdantes, à l'image de celles de Lille et de Nancy-Metz. Même les académies qui enregistrent une croissance démographique sont également victimes d'une hémorragie de postes.

Après toutes les suppressions de postes non directement visibles, aujourd'hui, monsieur le ministre, pour fermer une classe, le nombre des enfants de deux ans n'est même plus pris en compte dans les effectifs, et ce sans aucune concertation avec les élus locaux, contrairement à la volonté que vous avez exprimée devant nous de vouloir agir avec eux.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Patrick Courtois

Monsieur le président, son temps de parole est épuisé !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Todeschini

Vous vous défaussez de vos responsabilités, en envoyant au charbon et en première ligne recteurs et inspecteurs d'académie pour assumer la maîtrise d'oeuvre de ce grand chantier de démolition. Ils se sentent jugés et sont « à cran ». Votre vision est loin d'être partagée par certains d'entre eux, ...

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Todeschini

Je conclus, monsieur le président.

...car ils ne disposent plus de moyens suffisants pour accomplir correctement leurs missions.

Début mars, Mme la rectrice de l'académie de Toulouse, dont je salue le courage et l'éthique professionnelle, a démissionné en s'expliquant ainsi : « La raison de ma démission réside, aujourd'hui, dans la difficulté de plus en plus certaine à assurer une continuité dans le discours pédagogique que j'ai porté... et dans la capacité à affirmer une cohérence entre des ambitions affichées et des actes posés concrètement. »

La coupe est pleine, monsieur le ministre, et personne n'est dupe : vos discours enjôleurs sont bien loin des réalités du terrain ; votre projet de loi est une supercherie permettant de vous donner bonne conscience.

L'image que vous voulez donner à la France est à l'image de la société que vous préparez avec le gouvernement Raffarin, fondée sur l'individualisme, la compétition, la concurrence et la marchandisation. Tout y passe, même notre école !

L'école de la République mérite mieux que cette réforme tronquée, examinée dans la précipitation, sans le moindre respect envers les partenaires sociaux, la communauté éducative et la représentation nationale. Cette réforme ébranle les fondations de notre école, celles-là même qui en ont fait sa renommée, son histoire, son héritage.

Face au danger que fait courir ce projet de loi, mes chers collègues, nous vous demandons de voter cette motion tendant à opposer la question préalable.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.- Exclamations sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Henri de Raincourt

M. Henri de Raincourt. Que de modération dans ce discours !

Sourires sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

Les auteurs de cette motion avancent trois motifs qui sont, à mon sens, très contestables.

Tout d'abord, ils considèrent qu'une partie de la réforme a été retirée par le Gouvernement. Or cela ne concernait que certaines dispositions du rapport annexé relatives au baccalauréat.

Ensuite, ils estiment qu'une grande partie des dispositions du projet de loi revêt un caractère réglementaire. Certes, le champ législatif en matière d'éducation est relativement restreint, mais il était important que le Parlement soit saisi du dossier à travers ce projet de loi.

De plus, sans vouloir être cruel, je soulignerai que nombre des amendements que la commission a examinés ce matin relèvent eux-mêmes du domaine réglementaire.

Enfin, les auteurs de la motion affirment qu'aucun financement n'est prévu pour l'année 2005. Il n'aura échappé à personne que le budget pour 2005 a déjà été adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

Toutefois, les éléments de programmation introduits dans le rapport annexé traduisent de façon visible l'engagement pris par le Gouvernement à partir de 2006. Par conséquent, comme vous l'avez rappelé, monsieur le ministre, l'efficacité des mesures sera perceptible dès la rentrée 2006.

Pour conclure, monsieur Todeschini, vous avez affirmé que nous n'aimions pas les enseignants.

Exclamations sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

M. Jean-Claude Carle, rapporteur. Non, cela est faux ! Monsieur Todeschini, vous n'avez pas le monopole de l'estime pour les enseignants. L'estime que nous leur portons est au moins égale à la vôtre et elle est sûrement moins intéressée !

Applaudissementssur les travées de l'UMP. - Exclamations sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

Vous avez été critiqués par les jeunes et par les enseignants !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

M. Jean-Claude Carle, rapporteur. La commission émet donc un avis défavorable sur cette motion.

Très bien ! sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

Vous n'aimez ni les jeunes, ni les enseignants !

Debut de section - PermalienPhoto de René-Pierre Signé

Vous n'aimez pas les fonctionnaires en général !

Debut de section - Permalien
François Fillon, ministre

Je me contenterai de répondre, si M. Signé veut bien me laisser m'exprimer, ...

Debut de section - Permalien
François Fillon, ministre

... aux arguments juridiques invoqués pour justifier cette motion tendant à opposer la question préalable.

Debut de section - Permalien
François Fillon, ministre

On voudrait, à travers cette question préalable, faire croire que le présent projet de loi rassemble des dispositions dépourvues de portée normative et des dispositions qui auraient pu être prises par décret. Si tel était le cas, pour quelles raisons le parti de l'opposition à toute idée de réforme en la matière mobiliserait-il tant d'énergies pour y faire obstacle ?

En réalité, loin d'être une « coquille vide », ce texte traduit pleinement l'ambition du Gouvernement de dépasser les corporatismes les plus hostiles au changement, pour mettre en place les instruments qui permettront d'assurer une meilleure réussite des élèves dans une école plus juste, plus efficace et plus ouverte.

Personne ne peut de bonne foi reprocher au projet de loi d'être dépourvu de caractère législatif, car, pour l'essentiel, il rassemble des dispositions qui modifient la partie législative du code de l'éducation. Or je rappelle que celle-ci, adoptée par une ordonnance du 15 juin 2000, a été ratifiée par la loi du 14 avril 2003, qui a consacré la valeur législative de ces dispositions.

L'opposition voudrait nous faire croire aujourd'hui que ces articles de loi, dont elle n'a jamais contesté la valeur législative tant qu'ils codifiaient à droit constant les dispositions de la loi du 10 juillet 1989, ne pourraient pas être modifiés par la loi. Ce n'est pas sérieux ! Il suffit d'ailleurs de passer rapidement en revue les articles du projet de loi pour s'en convaincre.

Quant au rapport annexé, il s'agit d'une technique législative qu'on critique d'autant plus facilement qu'on n'est pas d'accord avec les orientations qu'elle fixe. Or une telle technique n'est pas nouvelle : la loi du 10 juillet 1989 approuvait un rapport annexé, celui-là même qui plaçait l'élève au centre du système. Je ne vois pas quel changement constitutionnel intervenu depuis lors justifierait que ce qui était possible sous le gouvernement de M. Jospin ne le serait plus aujourd'hui !

Debut de section - Permalien
François Fillon, ministre

Le groupe socialiste voudrait nous faire croire que le Parlement se trouve finalement dessaisi de ses droits, à savoir approuver par le vote de la loi les orientations générales guidant l'action de l'Etat dans un domaine majeur comme celui de l'éducation nationale.

Pourtant, comme vous le savez, il existe des lois d'orientation depuis 1963, année de la première loi d'orientation agricole sous la Ve République.

L'Assemblée nationale a souhaité ajouter au projet initial des dispositions de programmation. Cet ensemble d'objectifs, désormais largement quantifiés, nous rattache clairement à la catégorie des lois de programme explicitement prévues par l'avant-dernier alinéa de l'article 34 de la Constitution. Cet alinéa permet d'associer dans un même texte des dispositions législatives classiques et l'énoncé d'objectifs qui sont de nature à orienter durablement l'action du Gouvernement et, en l'espèce, de l'ensemble des personnes qui oeuvrent pour l'éducation nationale, premier des services publics, celui qui commande non seulement l'avenir individuel des Français, mais aussi notre capacité collective de répondre aux grands enjeux économiques et sociaux.

Les éléments de programmation ne préjugent certes pas des décisions budgétaires à venir. Leur place dans le rapport annexé ne vaut d'ailleurs pas engagement au même titre que la loi de finances.

Debut de section - PermalienPhoto de Hélène Luc

Comment ferez-vous, alors, s'il n'y a pas d'engagement financier ?

Debut de section - Permalien
François Fillon, ministre

J'y vois cependant la matérialisation des objectifs qui vous sont proposés. Ils expriment un engagement politique fort du Gouvernement et de la majorité, qu'il nous reviendra de traduire en actes aussi bien dans la loi de finances annuelle qu'au travers des mesures réglementaires et de gestion qu'appellera la mise en oeuvre de la loi.

Pour terminer, je voudrais présenter toutes mes excuses à M. Renar. J'ai dit tout à l'heure que son exposé était un peu excessif et ne concernait pas vraiment le texte que je vous soumets. A l'évidence, après l'exposé que nous venons d'entendre, celui de M. Renar apparaît...

Debut de section - Permalien
François Fillon, ministre

M. François Fillon, ministre. ... très mesuré et très nuancé !

Exclamations amusées sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Hélène Luc

A la fin du débat, vous reconnaîtrez que nous avons raison !

Debut de section - Permalien
François Fillon, ministre

M. François Fillon, ministre. En vérité, depuis plus de sept heures que cette discussion est engagée, nous n'avons entendu aucune proposition sérieuse de la part du parti socialiste, et l'intervention de M. Todeschini n'était qu'une suite d'invectives et d'insultes à l'égard du Gouvernement et de la majorité.

Applaudissementssur les travées de l'UMP et sur plusieurs travées de l'UC-UDF.

Debut de section - Permalien
François Fillon, ministre

M. François Fillon, ministre. Permettez-moi, monsieur Todeschini, de vous rappeler ce qu'écrivait Aragon : « Il ne suffit pas de dire non, encore faut-il proposer quelque chose. »

Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

C'est ce que nous ferons avec nos amendements !

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

Je mets aux voix la motion n° 179, tendant à opposer la question préalable.

Je rappelle que l'adoption de cette motion entraînerait le rejet du projet de loi.

Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe socialiste.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

Le scrutin a lieu.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

Personne ne demande plus à voter ?...

Le scrutin est clos.

Il est procédé au comptage des votes.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 117 :

Le Sénat n'a pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

Je suis saisi, par Mme David, MM. Renar, Ralite, Voguet et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, d'une motion n° 171, tendant au renvoi à la commission.

Cette motion est ainsi rédigée :

En application de l'article 44, alinéa 5, du règlement, le Sénat décide qu'il y a lieu de renvoyer à la commission des affaires culturelles, le projet de loi d'orientation pour l'avenir de l'école, adopté à l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence (221, 2004-2005).

Je rappelle que, en application de l'article 44, alinéa 8, du règlement du Sénat, ont seuls droit à la parole sur cette motion l'auteur de l'initiative ou son représentant, pour quinze minutes, un orateur d'opinion contraire, pour quinze minutes également, le président ou le rapporteur de la commission saisie au fond et le Gouvernement.

Aucune explication de vote n'est admise.

La parole est à M. Jean-François Voguet, auteur de la motion.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Voguet

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous le savons tous ici, l'école, l'avenir de nos enfants et de notre jeunesse sont des sujets de préoccupation majeurs pour nos concitoyens. Leurs craintes et leurs exigences sont toujours très fortes, car chacun a bien conscience que c'est au sein de notre école que se joue largement la vie future de cette génération en devenir.

Nous savons que chaque parent investit une part importante de lui-même dans son enfant, avec une volonté farouche de dépassement, pour que sa progéniture vive mieux que lui, qu'elle ait une appréhension élargie du monde, qu'elle profite d'un bagage culturel plus important que lui.

A travers cet investissement, le parent, le citoyen, tente de s'affranchir de ses propres ignorances et des ségrégations dont il a pu être la victime.

Cette espérance est partagée par tous les membres de notre société. C'est un élément fondateur du pacte républicain qui nous rassemble, du pacte social qui nous unit.

Ainsi, cette volonté commune s'exprime dans notre Etat républicain, en faisant de l'éducation nationale une priorité, un pilier essentiel, pour fonder l'égalité entre les citoyens.

De ce fait, quand le législateur décide de se pencher sur cette importante question, il doit s'entourer des avis à la fois les plus divers et les plus autorisés. Il doit se mettre en position d'écoute, ce qui signifie qu'il lui faut entendre toutes les opinions et ne pas en rester à ses propres options.

Le sujet est trop grave pour devenir l'enjeu d'un combat idéologique dévastateur. Avec une telle attitude, c'est tout l'édifice de concertation qui s'effondre, pour ne laisser place qu'à la colère et à l'opposition de ceux qui ont été écoutés, sans doute, mais qui n'ont pas été entendus.

Et pourtant, nous en sommes là !

Après des mois de consultation, vous devez faire face, monsieur le ministre, à un vaste mouvement de protestation, que vous tentez de prendre de vitesse et de réduire en choisissant la pire des solutions : l'épreuve de force.

Ainsi, c'est au cours de l'examen de ce texte à l'Assemblée nationale que vous avez déclaré l'urgence, afin d'en permettre l'application dès la rentrée prochaine. Cet aspect vous aurait-il donc échappé au moment où vous avez déposé ce projet de loi ?

Non ! Vous avez déclaré l'urgence pour tenter de faire passer votre texte avant que la protestation ne se développe. Votre crainte est même si grande que vous avez accéléré son dépôt sur le bureau du Sénat, au risque de dévaluer la mission de notre assemblée.

Le refus d'entendre un autre avis, l'urgence que vous avez déclarée et l'accélération de nos travaux que vous avez exigée m'amènent naturellement, au nom de mon groupe, à demander le renvoi de ce texte à la commission, de manière que nous puissions travailler sérieusement.

La sagesse sénatoriale, reconnue et acceptée par tous, est indissociable d'un certain temps de réflexion et il aurait donc fallu que nous prenions du temps pour examiner un tel projet de loi.

En effet, sur un sujet aussi important, la commission des affaires culturelles - ce n'est pas votre faute, monsieur le rapporteur, monsieur le président de la commission - n'a mené que vingt-six auditions.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Voguet

Alors que bon nombre de lycéens sont descendus dans la rue, nous n'avons reçu aucun de leurs représentants.

Nous nous apprêtons à réformer les IUFM et à les rattacher aux universités. Or nous n'avons reçu aucun directeur d'IUFM ni aucun président d'université !

Par ailleurs, ce projet de loi vise notamment à supprimer le Conseil national des programmes et le Haut conseil d'évaluation de l'école. Or nous n'avons entendu aucun membre de ces organismes ! J'ai pourtant en mémoire des rapports, en particulier de ce Haut conseil, sur les raisons de l'échec scolaire au collège et sur les redoublements, rapports dont les conclusions auraient été intéressantes pour la commission. Serait-ce parce que ces avis ne correspondaient pas à ceux qui sous-tendent ce projet de loi qu'on n'a pas jugé nécessaire de les soumettre à notre réflexion ?

C'est sans doute pour les mêmes raisons que nous n'avons reçu aucun membre du Conseil supérieur de l'éducation ni du Conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche. En effet, ces deux prestigieux organismes ont émis des avis négatifs sur cette réforme.

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, par ces quelques exemples, je crois avoir fait la démonstration, certes rapide, que le travail en commission est loin d'être terminé : c'est la deuxième raison qui motive notre demande de renvoi.

Par ailleurs, permettez au nouveau sénateur que je suis d'exprimer son étonnement devant les conclusions de notre commission. En effet, toutes les personnes que nous avons reçues ont fait part de leurs craintes, pour le moins, devant les réformes proposées, certaines formulant leurs critiques, voire leur rejet du texte. Aucune ne semble avoir été entendue. J'avoue ne pas comprendre !

En tant que maire, je puis vous dire que, si l'autorité municipale agissait de la sorte, n'écoutant pas les avis émis par les représentants de la population et même, parfois, de l'opposition, la contestation, dans nos communes, serait permanente.

Je sais que, dans cette assemblée, siègent bon nombre de maires. Pourquoi, dès lors, n'avons-nous pas, ici, la même attitude et la même écoute que dans nos villes ?

Monsieur le ministre, en déclarant l'urgence sur ce texte, vous avez, d'une certaine façon, reconnu que notre éducation nationale était malade et qu'il était nécessaire de prendre rapidement des décisions.

Oui, des mesures d'urgence s'imposent ! C'est la raison pour laquelle nous vous proposons de retirer votre projet de loi, afin de le remettre sur le métier. En attendant, nous pourrions voter un collectif budgétaire, afin de redonner à l'éducation nationale, dès la prochaine rentrée, tous les moyens que, depuis deux ans, elle a perdus.

En prenant une telle décision, vous donneriez à toute la communauté éducative le signe de votre mobilisation en faveur d'une réforme en profondeur, que beaucoup attendent et dont notre pays, vous le savez, a besoin. Je parle non pas d'une réforme à la va-vite et sans moyens, mais d'une réforme ambitieuse, que nous sommes tous prêts à soutenir.

Comme l'écrivait Montesquieu, « pour faire de grandes choses, il ne faut pas être un si grand génie ; il ne faut pas être au-dessus des hommes, il faut être avec eux ». Or, depuis des semaines, la protestation grandit contre les mesures que vous soutenez. Toutes les organisations représentatives de la communauté éducative - et vous savez combien une telle unanimité est rare - vous ont dit leurs craintes, voire leur opposition sur tel ou tel aspect de votre réforme.

Vous leur répondez que vous êtes sensible à leurs remarques, mais vous ne bougez pas d'un pouce, vous ne modifiez en rien votre projet de loi, vous restez sourd aux inquiétudes qui s'expriment.

C'est à cause de votre attitude que l'ensemble de votre texte est aujourd'hui remis en cause.

Certes, devant la protestation grandissante, vous avez déclaré que la réforme du baccalauréat était repoussée, ce dont je vous donne acte. Cela étant, vous maintenez dans votre projet de loi tous les éléments qui permettront finalement de mettre en oeuvre cette réforme. Grâce à l'effet d'annonce que constitue le retrait de la réforme du baccalauréat, vous espériez sans doute masquer le fait que vous l'aviez déjà transformé. En effet, en supprimant les TPE, ce sont les conditions de préparation, de passage et, donc, d'obtention de ce diplôme qui sont d'ores et déjà modifiées.

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, ce projet de loi pose un réel problème de lisibilité quant à ses objectifs. En effet, l'exposé des motifs et les ambitions affichées sont en total décalage par rapport au projet de loi lui-même.

En regard de l'ambition de réussite pour tous, sont proposées des exigences réduites et rabougries pour le plus grand nombre, fondées sur une sélection sociale renforcée et sur une sélection par l'échec qui ne dit pas son nom et dont la responsabilité est rejetée, le cas échéant, sur l'élève et sa famille, en dédouanant l'institution républicaine.

Certes, nous savons bien que, à Lisbonne, il a été décidé d'« optimiser », et non d'augmenter, les moyens donnés pour l'éducation et la formation. Mais vous savez bien que, en réduisant les moyens accordés à l'éducation nationale, vous diminuez les chances de réussite des élèves les plus en difficulté et vous prenez un risque certain pour le plus grand nombre.

Votre seul espoir, c'est que le plus grand nombre dispose, comme le souhaite le MEDEF, des compétences minimales nécessaires à son « employabilité », dans des emplois précaires, peu qualifiés et faiblement rémunérés. Autrement dit, les conséquences pourraient être dévastatrices.

Pour toutes ces raisons, je vous demande, mes chers collègues, au nom du groupe CRC, étant entendu que le retrait pur et simple de ce texte serait la meilleure solution, de le renvoyer à la commission afin que celle-ci en fasse une étude plus approfondie et plus sérieuse.

Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

Ce projet de loi est l'aboutissement du grand débat national souhaité par le Président de la République, qui a mobilisé plus d'un million de nos concitoyens au cours des 26 000 réunions qui se sont tenues sur l'ensemble du territoire, aussi bien à l'intérieur qu'à l'extérieur des établissements.

Debut de section - PermalienPhoto de Hélène Luc

Cela n'empêche pas le débat dans les assemblées !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

La commission Thélot en a fait la synthèse dans le Miroir du débat, tout en poursuivant la consultation. A partir de ces travaux, le Gouvernement a préparé un projet qui répond aujourd'hui à de fortes attentes.

Selon un sondage de l'institut CSA rendu public la semaine dernière, 71 % du grand public, 74 % des parents d'élèves et 86 % des enseignants estiment que le système éducatif doit être réformé.

Par ailleurs, je vous rappelle que notre commission a procédé à près de cinquante auditions : vingt-six ont été menées par la commission elle-même et vingt-quatre par M. le président Valade et moi-même. Vous trouverez d'ailleurs dans le rapport la liste de toutes les personnes auditionnées.

Ce travail nous a permis de rédiger quelque 132 amendements, ce qui montre que nous avons tenu compte des remarques qui nous ont été présentées.

A l'issue de la concertation, il vient un moment où il faut faire preuve de courage politique et traduire en mots et en actes la volonté exprimée par les Français. C'est ce que vous faites, monsieur le ministre. Une fois de plus, nous tenons à vous en féliciter et à vous apporter tout notre soutien.

Compte tenu de l'ensemble de ces remarques, la commission estime que la motion tendant au renvoi à la commission n'est pas fondée et a donc émis un avis défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

Je mets aux voix la motion n° 171, tendant au renvoi à la commission.

Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

Le scrutin a lieu.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

Personne ne demande plus à voter ?...

Le scrutin est clos.

Il est procédé au comptage des votes.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 118 :

Le Sénat n'a pas adopté.

Mme Michèle André remplace M. Roland du Luart au fauteuil de la présidence.

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

L'amendement n° 429, présenté par Mme David, MM. Ralite, Renar, Voguet et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :

Avant l'article 1er, ajouter un article additionnel ainsi rédigé :

Pour répondre aux besoins d'éducation et de formation, le présent projet de loi définit les orientations et programme de façon pluriannuelle les moyens nécessaires à leur mise en oeuvre.

En ce sens, les moyens nécessaires à la création d'une école de la qualité pour la réussite de tous les élèves et de la démocratie sont affectés au service public d'éducation nationale.

Un minimum de 15 milliards d'euros de mesures d'urgence est prélevé sur les profits des 100 premières entreprises passibles de l'impôt sur les sociétés, par le biais d'une taxe spécialement prévue à cet effet.

Les sommes ainsi dégagées sont affectées prioritairement au service public d'éducation nationale.

La parole est à Mme Annie David.

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

Chacun comprendra qu'il s'agit, pour notre groupe, d'une proposition essentielle en vue d'assurer la réussite scolaire des enfants et des jeunes de notre pays.

Nous avons déjà eu l'occasion de le dire, l'absence de réelle mesure de programmation budgétaire vide ce projet de loi de l'essentiel de sa substance. En effet, les quelques mesures de financement envisagées figurent dans le rapport annexé, qui, faut-il le répéter, est dépourvu de toute valeur normative.

Les sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen prennent leurs responsabilités : ils proposent des mesures dont beaucoup revêtent un caractère d'urgence et ils en prévoient le financement.

Nous estimons qu'un minimum de 15 milliards d'euros doit être débloqué par l'Etat pour répondre, dès aujourd'hui, aux attentes des familles, des élèves et des professionnels de l'éducation nationale.

Nous aurons l'occasion, au cours de ce débat, de détailler les mesures qui attendent une réponse dans les cinq ans à venir, mais comment ne pas évoquer d'emblée, entre autres, les fermetures de classe massives, les suppressions de postes par milliers - il faut en déplorer 50 000, tous corps confondus, depuis l'arrivée de M. Raffarin à Matignon -, les exigences liées aux nouvelles technologies, la nécessité des dédoublements pour garantir la réussite scolaire, le retour d'une infirmière dans chaque établissement ?

Débattre de ce projet de loi sans évoquer avant tout la nécessité d'un engagement fort de la puissance publique en vue d'assurer l'avenir de l'école dans un monde soumis à la pression de la marchandisation, du libéralisme, constituerait un non-sens.

Certains me diront : « Pourquoi augmenter le budget de l'éducation nationale ? Rationalisons les dépenses actuelles, corsetons-les, dégraissons ! » Cette vision technocratique ne tient pas compte des réalités vécues.

Si vous évoquez le chiffre actuel du budget de l'éducation nationale, qui est de 56 milliards d'euros, son ampleur déconcertera. En revanche, si vous décrivez la réalité, c'est-à-dire le manque criant de moyens dans de si nombreux établissements, tous les parents d'élèves, tous les élus locaux, de toutes tendances confondues, exigeront la mise en oeuvre de moyens supplémentaires. Je suis persuadée que, parmi ceux qui siègent sur les travées de droite de cet hémicycle, bien peu ont entrepris, dans leur département ou dans leur commune, des démarches pour s'opposer à une fermeture de classe ou à l'abandon de telle ou telle filière dans le second degré.

Protestations sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

Mais c'est tout à votre honneur, mesdames, messieurs de la droite, si vous vous être lancés vous-mêmes dans de telles démarches !

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

J'espère que vous êtes nombreux à avoir agi ainsi. Finalement, cela va dans le sens de mon intervention.

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

Le dogme des grands équilibres et de la réduction du déficit public s'accommode mal de la réalité, des exigences des « usagers » de l'école, c'est-à-dire la grande majorité de la population.

C'est pourquoi, quoi que vous fassiez, monsieur le ministre, les habitants de notre pays sont toujours solidaires des mouvements sociaux dans l'éducation nationale, qu'ils concernent les enseignants ou les lycéens.

Le budget de l'éducation nationale semble très important. Mais comment ne pas rappeler qu'il s'agit du coeur de notre société ? Est-il acceptable que moins de 4 % du PIB soit consacré à cet enjeu fondamental qu'est l'avenir de nos enfants ?

Dans une perspective de transformation sociale, nous estimons que ce chiffre devrait être porté, en cinq ans, à 7 %, soit une augmentation de 43 milliards d'euros par rapport au niveau actuel du PIB.

Sourires sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

Transformer l'école, réduire massivement les inégalités, garantir une formation nécessiterait ce niveau d'engagement.

Un chiffre encore, monsieur le ministre : la réduction de l'impôt sur le revenu, qui a profité systématiquement aux titulaires des revenus les plus élevés, a coûté 50 milliards d'euros en six ans. Les 43 milliards d'euros qui manquent sont tout trouvés !

Il y a des choix de société à effectuer, monsieur le ministre. D'ailleurs, ce gouvernement en a fait : il préfère exonérer les plus riches plutôt que d'investir dans l'éducation ou dans la formation. Vrai ou faux ?

Notre amendement concerne des mesures d'urgence. Nous proposons de les financer en créant une taxe spécifique prélevée, à la hauteur nécessaire, sur les bénéfices des cent premières entreprises passibles de l'impôt sur les sociétés en France.

Il est dans l'intérêt de l'économie, me semble-t-il, d'assurer une bonne formation aux élèves.

Pour terminer, je rappellerai que le rapport Thélot, dont la timidité avait frappé les observateurs, prévoyait malgré tout une programmation de 8 milliards d'euros. Votre projet en est très éloigné puisque vous ne retenez que dix-sept mesures - bien entendu les moins coûteuses ! - sur les vingt-sept qui étaient préconisées.

Notre amendement est raisonnable, car il vise à sauvegarder notre service public de l'éducation nationale. Nous vous proposons donc de l'adopter par scrutin public.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

M. Jean-Claude Carle, rapporteur. La commission a souligné que l'inflation des moyens n'était plus la réponse la mieux adaptée pour relever les défis auxquels notre système éducatif est confronté. J'ai eu l'occasion de le rappeler chaque année depuis neuf ans

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat s'exclame

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

Le présent amendement ne pourrait se substituer à la réforme engagée par le Gouvernement. La commission émet donc un avis défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Hélène Luc

Vous devriez aller voir des institutrices qui ont trente élèves en dernière classe de maternelle !

Debut de section - Permalien
François Fillon, ministre

L'éducation nationale a beaucoup plus besoin aujourd'hui de priorités, de repères, que de rallonges.

Debut de section - Permalien
François Fillon, ministre

M. François Fillon, ministre. Il faut savoir que le budget de l'éducation nationale est supérieur à la totalité du produit de l'impôt sur le revenu. Les familles et les entreprises françaises participent donc de manière très importante au financement de notre système éducatif. Aujourd'hui, elles sont en droit d'attendre que nous optimisions le fonctionnement de ce système, et non pas que nous continuions une fuite en avant qui n'a produit aucun résultat.

M. Dominique Mortemousque applaudit.

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

Je mets aux voix l'amendement n° 429.

Je suis saisie d'une demande de scrutin public émanant du groupe communiste républicain et citoyen.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

Le scrutin a lieu.

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

Personne ne demande plus à voter ?...

Le scrutin est clos.

Il est procédé au comptage des votes.

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 119 :

Le Sénat n'a pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

L'amendement n° 430 rectifié, présenté par Mme David, MM. Ralite, Renar, Voguet et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :

Avant l'article 1er, ajouter un article additionnel ainsi rédigé :

D'ici à 2012, la gratuité totale des fournitures et des transports scolaires est assurée à tous les élèves jusqu'au terme de leur formation scolaire. Des primes d'équipement sont attribuées aux jeunes de l'enseignement professionnel et technologique. Les étudiants bénéficient, sur critères sociaux, de bourses revalorisées.

Les mesures d'accompagnement et les moyens financiers nécessaires à la réalisation de ces objectifs sont programmés. A cet effet, un projet de loi de finances rectificative est déposé par le gouvernement sur le bureau du Sénat avant le 31 décembre 2005.

La parole est à M. Bernard Vera.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Vera

Cet amendement vise à préciser les axes d'une lutte contre les inégalités sociales à l'école. Il s'agit, dans le cadre d'un plan pluriannuel de sept ans, d'assurer la gratuité totale des fournitures et des transports scolaires à tous les élèves, jusqu'au terme de leur formation. Il tend également à une revalorisation des bourses.

Comment ne pas percevoir l'urgence de telles dispositions lorsque l'on sait que le prix des livres et des fournitures scolaires ne cesse d'augmenter à un moment où le chômage progresse, où le nombre d'allocataires du RMI est en hausse et où le pouvoir d'achat des familles diminue ?

Je souhaite rappeler ici la réalité des coûts de rentrée scolaire constatés par la confédération syndicale des familles en 2004 : 47, 50 euros en maternelle ; 123, 75 euros au cours préparatoire ; 168, 75 euros au cours moyen, et 330, 47 euros en sixième. En seconde générale, le coût de la rentrée est de 567, 43 euros ; en technologies industrielles, il s'élève à 742, 97 euros. Enfin, dernier exemple : en première année de BEP sanitaire et social, la rentrée coûte 481, 47 euros. Il est d'ailleurs frappant de constater que ce sont précisément les filières dans lesquelles les élèves issus de milieux populaires sont les plus nombreux qui coûtent le plus cher.

Détaillons le cartable de l'élève de sixième : 180, 62 euros sont consacrés aux fournitures ; 45, 25 euros le sont aux livres, et 65, 61 euros à l'équipement sportif ; enfin, 39 euros sont destinés à payer les frais annexes.

Dans ces conditions, peut-on parler, monsieur le ministre, de gratuité de l'enseignement, concept fondateur de la République et principe reconnu par la Constitution ?

Nous ne demandons pas à l'école de réduire seule l'ensemble des inégalités sociales. Mais l'Etat, au travers de l'éducation nationale, doit agir fermement dans les domaines qui relèvent de sa compétence.

Est parfois évoquée, sur les travées de droite, l'idée d'une République sociale. Quelle valeur peut-on accorder à cet affichage quand l'accès à l'école n'est plus gratuit dans la réalité ?

Nous proposons donc également, par notre amendement, de revaloriser le système des bourses. Nous ne le proposons pas à votre manière, monsieur le ministre, vous qui n'avez que le mot « mérite » à la bouche ! Cette conception rétrograde est contraire à l'idée même d'assistance, dans le cadre d'un processus de progrès scolaire, à des élèves en difficulté.

Nous évoquions à l'instant des mesures qu'il est urgent de prendre. Cet amendement en contient déjà quelques-unes.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

Comme j'ai déjà eu l'occasion de le dire lors de l'examen de l'amendement n° 429, cet amendement comporte des dispositions dont le coût serait extrêmement important et qui ne régleraient en rien les problèmes auxquels notre école est confrontée.

Par ailleurs, des primes d'équipement sont déjà attribuées par certaines collectivités locales.

En conséquence, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.

Debut de section - Permalien
François Fillon, ministre

Défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Monsieur le ministre, nous vous avons entendu tout à l'heure affirmer que vous vouliez favoriser l'enseignement professionnel.

Chacun le sait, les élèves issus des milieux populaires intègrent plus facilement les établissements qui dispensent un enseignement professionnel que les établissements d'enseignement général. Or ces filières professionnelles coûtent cher et, si l'on veut les favoriser, on serait bien avisé de ne pas contraindre les élèves des milieux populaires à payer plus que les élèves de l'enseignement général.

Debut de section - Permalien
François Fillon, ministre

Madame Borvo Cohen-Seat, lorsque j'étais président d'un conseil régional, j'avais mis en place un dispositif visant à aider les élèves de l'enseignement professionnel. Or ce dispositif a été supprimé par la nouvelle majorité dès son installation.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Je ne suis pas la présidente de ce conseil régional !

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

L'amendement n° 431, présenté par Mme David, MM. Ralite, Renar, Voguet et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :

Avant l'article 1er, ajouter un article additionnel ainsi rédigé :

Une programmation des créations de postes de personnels nécessaires est établie après concertation avec les organisations syndicales représentatives. Durant trois ans, un minimum de 50.000 personnels sera recruté.

Un plan de titularisation permet de résorber emplois hors statut, hors contrats, dans l'enseignement scolaire et l'enseignement supérieur, les emplois précaires ou hors statut.

Les mesures d'accompagnement et les moyens financiers nécessaires à la réalisation de ces objectifs sont programmés. A cet effet, un projet de loi de finances rectificative est déposé par le gouvernement sur le bureau du Sénat avant le 31 décembre 2005.

La parole est à Mme Annie David.

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

Avec cet amendement, qui pose la question cruciale de l'augmentation des moyens consacrés à l'école du xxie siècle, je souhaite revenir sur la situation actuelle du corps enseignant et, plus largement, sur celle de la communauté éducative.

L'un et l'autre ont été victimes des mesures d'austérité appliquées depuis 2002 par M. Raffarin à l'éducation nationale.

Les différents observateurs évaluent à 50 000 le nombre de postes concernés, tous corps confondus- enseignants, assistants d'éducation, ATOSS. Pour ma part, j'ai entendu des chiffres encore plus élevés. Peut-être nous apporterez-vous des précisions sur ce point.

Le monde de l'éducation est stigmatisé par les milieux détenteurs de l'orthodoxie budgétaire. Alors que l'immense majorité de la population considère que l'investissement de la société dans l'éducation est une priorité absolue, certains responsables politiques ont trop souvent l'habitude de désigner à la vindicte populiste les prétendus gâchis de l'éducation nationale.

Comme dans toutes les grandes administrations, des correctifs sont à apporter et la lutte contre la bureaucratie doit constituer une priorité. Mais, pour un dirigeant politique, les grands axes et la perspective doivent tracer le chemin.

Les enseignants et la communauté éducative sont les acteurs de l'école. Chaque jour, ils ont la charge de nos enfants et, très souvent, font face à des situations pénibles et difficiles.

Depuis vingt ans, les conditions de travail des enseignants se sont considérablement détériorées. Ils sont aux premières loges de la crise et, bien souvent, c'est à eux que l'on confie la mission impossible de régler tous les maux et toutes les tensions de la société.

Si le chômage ravage une famille, c'est l'institutrice qui, auprès de l'enfant, doit en pallier les conséquences. L'échec d'un couple entre également dans l'enceinte de l'école, et les enseignants sont souvent amenés à en gérer les conséquences sur l'élève concerné. En matière de drogue, l'école doit aussi remplir un rôle de prévention, de diagnostic et de prise en charge. Si la violence se déclare, il appartient là encore au professeur de devenir auxiliaire de sécurité. Si la laïcité est mise en cause, c'est au proviseur d'être le garant des valeurs républicaines.

Ces quelques exemples, rapidement présentés, attestent bien l'énormité de la tâche qui incombe à la communauté éducative. Je regrette, monsieur le ministre, que l'hommage dû à ces femmes et à ces hommes se mue bien trop souvent en mépris, voire en dénonciation de privilèges supposés.

Levons les tabous ! Quel est le salaire d'un professeur certifié ayant près de vingt ans d'ancienneté ? Ces hommes et ces femmes d'un haut niveau de formation touchent entre 1 800 et 1 900 euros nets ! Les plus malintentionnés flatteront les commentateurs de comptoir en évoquant les vacances. Mais connaissez-vous la situation de stress d'un enseignant à la fin d'une journée de classe ? Connaissez-vous le temps réel cumulé qu'ils consacrent au travail de préparation, aux cours, aux réunions, aux rencontres avec les parents ? Il faut tout mettre sur le tapis.

Il y a un instant, nous sommes revenus sur le rapport pernicieux de la Cour des comptes. Je dénonce de nouveau cette nouvelle tentative de caricaturer une catégorie de personnels autrefois si valorisée - rappelons-nous la Gloire de mon père, de Pagnol - et aujourd'hui montrée du doigt, considérée comme une catégorie de « nantis ».

Il faut prendre le contre-pied de ce dénigrement et assurer des conditions de travail dignes qui permettent la réussite scolaire. Pour ce faire, il faut recruter, monsieur le ministre, et non faire le contraire.

Par ailleurs, il faut, de toute urgence, corriger les dégâts résultant de la suppression des emplois-jeunes et des assistants d'éducation. Notre collègue Gélita Hoarau en a fortement dénoncé les méfaits à la Réunion. Ce constat vaut pour tout notre territoire.

L'école, ce n'est pas seulement le cours. C'est aussi la vie de l'établissement, c'est l'apprentissage de la citoyenneté, des règles de vie collective. Il faut restaurer la communauté scolaire dans sa plénitude.

C'est le sens de cet amendement, dont l'adoption permettrait d'adresser un message au monde de l'école.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

Le rapport annexé programme le recrutement de 30 000 personnes par an durant cinq ans, soit 150 000 au total. C'est ce à quoi vise cet amendement. Il nous semble cependant que la proposition du ministre est mieux adaptée, notamment par rapport aux évolutions démographiques.

Avis défavorable.

Debut de section - Permalien
François Fillon, ministre

Le Gouvernement est défavorable à cet amendement qui, par ailleurs, fait référence à des chiffres qui n'ont pas de réalité. Aux enseignants, il amalgame les emplois-jeunes, qui avaient été recrutés pour cinq ans par le gouvernement précédent, lequel n'avait rien prévu pour leur remplacement.

Le Gouvernement est donc défavorable à cet amendement.

Par ailleurs, j'ai entendu Mme David évoquer à plusieurs reprises le mépris que nous aurions pour les enseignants. Cette accusation est insupportable !

Debut de section - Permalien
François Fillon, ministre

M. François Fillon, ministre. De quel droit vous permettez-vous de nous parler de la sorte ? Moi, je suis fils d'enseignant et je n'admets pas que, simplement parce que vous pensez que l'éducation nationale vous appartient, vous nous accusiez de mépriser les enseignants. Ceux qui méprisent les enseignants, ce sont ceux qui les instrumentalisent en permanence !

Bravo ! et applaudissementssur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

L'amendement n° 432, présenté par Mme David, MM. Ralite, Renar, Voguet et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :

Avant l'article 1er, ajouter un article additionnel ainsi rédigé :

D'ici à 2012, le nombre maximum d'élèves par classe est ramené à vingt-cinq jusqu'aux collèges et à trente dans les lycées. Les seuils de dédoublement indispensables aux travaux pratiques et au soutien individuel individualisé sont rétablis. Pour privilégier l'abaissement des effectifs des classes et le développement de l'aide aux élèves en difficulté, les fermetures de classes et les suppressions de postes sont stoppées.

Les constructions scolaires nécessaires à la réalisation de ces objectifs sont programmées. La dotation régionale d'équipement scolaire et la dotation départementale d'équipement des collèges sont augmentées en tant que de besoin.

Les mesures d'accompagnement et les moyens financiers nécessaires à la réalisation de ces objectifs sont programmés. A cet effet, un projet de loi de finances rectificative est déposé par le gouvernement sur le bureau du Sénat avant le 31 décembre 2005.

La parole est à M. Ivan Renar.

Debut de section - PermalienPhoto de Ivan Renar

Avec cette proposition, nous touchons au coeur des difficultés de l'école. Il est admis que le nombre trop élevé d'élèves dans chaque classe est l'une des causes essentielles de l'échec scolaire et des difficultés que rencontrent les professeurs du premier ou du second degré à transmettre le savoir.

Réduire ce nombre constitue pour nous une exigence déjà ancienne. Si, ici et là, des progrès ont pu être réalisés au cours des dernières années, la réalité demeure : non seulement le seuil fixé pour les effectifs d'une classe est trop élevé, mais encore on rencontre trop souvent des classes en sureffectifs.

L'évolution de nos sociétés, les effets dévastateurs du chômage et de la précarité, le développement de la violence sociale, source permanente d'agressivité dans les rapports humains, requiert une baisse du nombre d'élèves par classe.

Jamais le métier d'enseignant n'a été aussi difficile.

Comment accepter que, dans des ZEP, les classes de maternelle, que je tiens à évoquer quoiqu'elles ne soient pas concernées par ma proposition, comptent encore 25 enfants, voire plus ?

Une telle situation crée automatiquement de l'échec scolaire.

Cependant, mon amendement vise plus spécifiquement le collège et le lycée.

Comment peut-on sérieusement concevoir le développement de l'enseignement des langues quand les classes comptent plus de 25 élèves en collège et plus de 30 en lycée ? Cela vaut aussi pour l'enseignement du français. Cette question concrète du nombre d'élèves par classe mérite donc d'être posée avec force.

Nous proposons que, d'ici à 2012, le nombre d'élèves par classe soit ramené à 25 en collège et à 30 en lycée.

Nous proposons que le niveau des seuils de dédoublement, lequel est indispensable au bon fonctionnement des travaux pratiques et au soutien individualisé que nous préconisons au sein même de la classe, soit inscrit dans la loi

Dans cette optique, nous considérons qu'il faut stopper les fermetures de classes en cours. Un moratoire apparaît indispensable. Le nombre de fermetures de classes prévues pour la rentrée prochaine - plusieurs milliers, peut-être 5 000 - est insupportable. Il l'est d'autant plus que des régions socialement dévastées, tels le Nord-Pas-de-Calais ou la Lorraine, sont les premières victimes de ces coupes claires effectuées par le ministère.

Les bonnes intentions s'effondrent face à la rigueur budgétaire, face à l'alignement de la gestion de l'éducation nationale sur les critères libéraux.

Bien entendu, monsieur le ministre, il faut aussi, dans le même temps, bâtir de nouveaux établissements et en rénover d'autres. Nous proposons, pour ce faire, d'accroître l'aide de l'Etat aux collectivités territoriales.

Il est vrai que ces dispositions coûteront cher. Nous le savons. Pour autant, elles n'ont pas de prix, car il s'agit d'un choix de société.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

Les taux d'encadrement sont plus élevés en France que dans tous les autres pays européens, alors même que les performances des jeunes Français ne sont pas meilleures. Il n'existe donc pas de relation de cause à effet. En revanche, les mesures proposées dans le présent projet de loi - soutien personnalisé, dédoublement des groupes de langues - nous semblent bien mieux adaptées.

Avis défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Charasse

M. Michel Charasse. A titre personnel, j'invoque l'article 40 de la Constitution à l'encontre de cet amendement. En effet, le deuxième alinéa du texte proposé impose des charges aux collectivités territoriales en matière de construction des collèges et des lycées.

Très bien ! sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

L'article 40 de la Constitution est-il applicable, monsieur le rapporteur pour avis ?

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Longuet

Oui, madame la présidente, il l'est.

L'observation de notre collègue Charasse est tout à fait pertinente : cet amendement entraîne en effet, pour les collectivités locales, des dépenses qui, à ma connaissance, ne font l'objet d'aucune contrepartie. La réforme constitutionnelle que nous avons adoptée aurait dû conduire les auteurs de l'amendement à proposer des recettes permettant d'équilibrer ces dépenses supplémentaires.

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

Mme la présidente. L'article 40 étant applicable, l'amendement n'est pas recevable.

Exclamations sur les travées du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Le texte tout entier tombe sous le coup de l'article 40 !

Debut de section - Permalien
François Fillon, ministre

Celui-ci n'est pas opposable au Gouvernement !

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

L'amendement n° 433, présenté par Mme David, MM. Ralite, Renar, Voguet et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :

Avant l'article 1er, ajouter un article additionnel ainsi rédigé :

L'essor de la formation professionnelle et technologique débouchant sur un emploi stable est l'enjeu majeur de la décennie qui s'ouvre. D'ici à cinq ans, aucun jeune ne sortira du système éducatif sans une qualification reconnue, sanctionnée par un diplôme, CAP et BEP ouvrant l'accès au baccalauréat et au-delà. Ces diplômes doivent permettre l'accès à un métier correspondant au diplôme acquis et, pour ceux qui le souhaitent, la poursuite des études supérieures, notamment par l'instauration de classes passerelles pour chaque filière.

La parole est à M. Jean-François Voguet.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Voguet

Cet amendement concerne les formations professionnelles et technologiques. Nous proposons que l'essor de ces formations constitue un objectif prioritaire pour l'école de demain.

La formation professionnelle et technologique, qui conduit à un emploi stable, est l'enjeu des dix prochaines années. Bien qu'il s'agisse d'une simple déclaration, la mise en exergue d'une telle prévision nous paraît avoir toute sa place dans un projet de loi d'orientation.

Plus précisément, nous proposons que, d'ici à cinq ans, aucun jeune ne quitte le système éducatif sans une qualification reconnue, sanctionnée par un diplôme - CAP ou BEP - ouvrant la voie au baccalauréat ou à des études supérieures.

La reconnaissance de la qualification doit permettre l'accès à un emploi, qui demeure l'un des objectifs de toute formation. Nos lycées professionnels doivent cesser d'être trop souvent des instituts de formation au chômage de longue durée.

Le Gouvernement doit organiser le système de « sécurité-emploi-formation » des jeunes, et ce dès l'obtention du diplôme. N'oublions pas, monsieur le ministre, que la première sanction de la réussite scolaire, c'est l'embauche. On ne peut pas dire qu'avec 10 % de chômeurs les perspectives soient brillantes dans ce domaine ! Mais est-ce bien la faute de l'école ?

Nous demandons non pas de soumettre l'organisation des filières au bon vouloir du marché, comme le souhaiterait M. Seillière, mais d'assurer un accès massif à l'emploi, par coordination des politiques scolaire et industrielle.

Cette vision d'ensemble manque cruellement à la politique de M. Raffarin.

Par ailleurs, à l'occasion de la défense de cet amendement, je voudrais m'interroger sur le cloisonnement excessif des formations. Ne faut-il pas réduire la coupure élitiste qui existe entre lycée technique et lycée d'enseignement général, en développant fortement les passerelles ? Seule cette voie permettra de diversifier les possibilités de choix des élèves dans leur vie professionnelle.

A défaut de réfléchir à une telle évolution, l'écart entre ces deux écoles s'accroîtra, confortant la réalité d'une école à deux vitesses, l'une destinée à former l'élite et les cadres de la société, l'autre à former les salariés voués à la précarité et à la soumission aux règles toujours plus dures de la libéralisation du marché, c'est-à-dire appelés à jouer le rôle de variable d'ajustement.

Nous proposons donc, par notre amendement, de permettre une réelle mise en oeuvre des formations professionnelles et techniques, et nous espérons que M. Charasse le votera !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

Avis défavorable. C'est déjà ce que prévoit le projet de loi en fixant au système éducatif l'objectif de garantir que 100 % des élèves auront acquis un diplôme ou une qualification au terme de leur formation scolaire.

Debut de section - Permalien
François Fillon, ministre

L'objectif visé par les auteurs de cet amendement est aussi celui du Gouvernement. Cependant, il n'a pas à être inscrit dans le corps de la loi, contrairement à ce qu'avait d'ailleurs souhaité dans un premier temps le Gouvernement. Je rappelle que c'est le Conseil d'Etat qui nous a suggéré de le reporter dans le rapport annexé. Par conséquent, je suis défavorable à cet amendement.

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

L'amendement n° 434, présenté par Mme David, MM. Ralite, Renar, Voguet et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :

Avant l'article 1er, ajouter un article additionnel ainsi rédigé :

Tout titulaire du baccalauréat, dès l'obtention de ce dernier, doit pouvoir s'inscrire de droit dans l'enseignement supérieur.

La parole est à Mme Hélène Luc.

Debut de section - PermalienPhoto de Hélène Luc

Monsieur le ministre, cet amendement a pour objectif principal de vous faire réagir.

Le droit de s'inscrire dans une université pour tout titulaire du baccalauréat existe théoriquement. Cet amendement vise donc à vous faire préciser les mesures supplémentaires qu'il faudrait prendre pour que tous les élèves aient une place à l'université.

Selon notre proposition, « tout titulaire du baccalauréat, dès l'obtention de ce dernier, doit pouvoir s'inscrire de droit dans l'enseignement supérieur ». Il doit aussi pouvoir accéder à la filière qu'il a choisie.

Vous nous répondrez que, bien entendu, l'accès à l'enseignement supérieur est acquis de droit pour les bacheliers. Mais, monsieur le ministre, ne devez-vous pas convenir qu'il existe un fossé important entre le droit et la pratique ?

Je peux citer des exemples de lycéens qui ne partent pas en vacances - pas plus que leurs parents -, parce qu'ils ne parviennent pas à s'inscrire dans l'université qu'ils ont choisie et parfois même échouent à trouver une place dans une l'université quelle qu'elle soit.

Vous nous objecterez qu'il existe le système RAVEL. Permettez-moi, à cet égard, de vous citer l'exemple du Val-de-Marne où est mis en place, chaque année, le dispositif « SOS rentrée ». Cette année, 620 élèves étaient inscrits. Plus de 120 bacheliers n'avaient pas trouvé de place à l'université, et, même à la fin du mois de septembre, quelques-uns n'avaient toujours pas réussi à s'inscrire dans l'enseignement supérieur, que ce soit à l'université, dans une classe de BTS ou en STAPS, sciences et techniques des activités physiques et sportives.

Je sais que les présidents d'université de la région parisienne se réunissent afin de trouver des solutions pour faciliter toutes les inscriptions. Malgré ces efforts, certains jeunes ne trouvent pas de place en université.

Notre amendement concerne la garantie de l'accueil, qui est un élément très important si nous voulons que les étudiants réussissent. Cela, bien sûr, ne suffit pas. Au-delà des conditions d'accueil, le travail de l'étudiant est déterminant, mais ce dernier doit pouvoir accéder à la filière qu'il a choisie.

Un autre élément est la gratuité réelle de l'enseignement supérieur.

En conséquence, monsieur le ministre, quelles mesures supplémentaires pourraient-elles être prises par rapport à ces deux exigences que sont la garantie de l'égalité d'accès et la lutte contre les inégalités sociales ? Il est bien évident que le fait qu'un lycéen ne puisse pas accéder à l'enseignement supérieur peut mettre en cause toute sa vie professionnelle.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

Défavorable. Cet amendement est en effet satisfait par les dispositions existantes : le baccalauréat ouvre l'accès à l'enseignement supérieur pour tous ses titulaires, ainsi que Mme Luc vient d'ailleurs de le rappeler.

Debut de section - Permalien
François Fillon, ministre

Même avis. Cet amendement n'ajouterait rien à la législation actuelle. Tout titulaire du baccalauréat doit pouvoir s'inscrire dans une formation d'enseignement supérieur. Naturellement, des contraintes sont liées au nombre de places dans les différentes filières, qui doivent correspondre aux débouchés et aux besoins du pays. Il est important de ne pas laisser des jeunes s'engager dans des filières où n'existe aucun débouché. C'est parfois l'un des problèmes qui se posent, au moment de la rentrée, pour un certain nombre de jeunes, dont vous avez parlé, madame Luc.

Qu'il soit nécessaire d'améliorer le dispositif d'entrée dans l'enseignement supérieur, c'est certain. Mais ce n'est pas au détour de cet amendement ni à l'occasion de ce projet de loi que nous pourrons régler cette question.

Debut de section - PermalienPhoto de Hélène Luc

Mme Hélène Luc. Vous reconnaissez, monsieur le ministre, qu'il existe un problème !

M. le ministre opine.

L'amendement n'est pas adopté.

Les livres Ier, II, III, IV, VI, VII et IX du code de l'éducation sont modifiés conformément aux dispositions des titres Ier et II de la présente loi.

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

L'amendement n° 435, présenté par Mme David, MM. Ralite, Renar, Voguet et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Annie David.

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

Monsieur le ministre, depuis plusieurs semaines, le mouvement d'opposition à votre projet de loi n'a cessé de croître dans notre pays.

Aujourd'hui, ce projet, malgré vos quelques concessions, fait quasiment l'unanimité contre lui. Hier encore, et malgré les craintes qu'ont suscitées les agressions subies par les jeunes lors de leur immense manifestation du 8 mars qui a rassemblé plusieurs centaines de milliers d'entre eux, des milliers de lycéens ont encore manifesté dans les rues de nos grandes villes.

La grève des enseignants, le 10 mars, qui était notamment motivée par le rejet de votre projet de loi, a été, elle aussi massivement suivie.

Malgré cela, et alors que, depuis des mois, le Gouvernement insistait sur l'importance d'un vrai débat sur l'éducation, au sein du Parlement comme à travers tout le pays, et alors que la quasi-totalité des organisations syndicales et des associations - y compris celles qui, a priori, étaient plutôt favorables aux conclusions du rapport Thélot - expriment aujourd'hui leur hostilité à votre projet, vous avez décidé de le maintenir et de passer en force avec la procédure d'urgence. Si cette procédure n'est pas l'état d'urgence, monsieur le ministre, cela y ressemble parfois un peu !

Vous savez pourtant - et tous les sondages le montrent - que, dans leur majorité, la population et les parents d'élèves soutiennent les manifestations que je viens d'évoquer.

Monsieur le ministre, manifestement, votre projet est à revoir. Il faut reprendre les négociations. En effet, sur un sujet aussi sensible que celui-ci, qui engage si profondément l'avenir de la jeunesse et du pays, il est clair que votre projet ne convient pas !

Bien sûr, vous pouvez, grâce à la majorité parlementaire qui vous soutient, faire passer ce projet envers et contre tous. Mais, vous le savez, il n'est pas sain pour nos institutions, il n'est pas bon pour notre démocratie qu'un tel décalage s'installe entre la représentation parlementaire et la réalité de notre pays.

Il sera encore un peu plus difficile ensuite, si vous maintenez votre position, de parler d' « instruction civique » à nos élèves.

C'est pourquoi je vous demande, mes chers collègues, de voter cet amendement de suppression de l'article 1er, qui a simplement pour objet de permettre enfin l'instauration d'une vraie concertation entre tous les partenaires concernés pour aboutir à des propositions de réforme plus progressistes pour notre système éducatif.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

Avis défavorable. L'article 1er est un article de coordination ; il est donc inutile de proposer sa suppression.

Debut de section - Permalien
François Fillon, ministre

Même avis.

L'amendement n'est pas adopté.

L'article 1 er est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

TITRE Ier

DISPOSITIONS GÉNÉRALES

chapitre Ier

Principes généraux de l'éducation

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

L'amendement n° 240, présenté par MM. Bodin, Assouline, Dauge, Guérini, Lagauche, Mélenchon, Repentin et Signé, Mme Tasca, M. Todeschini, Mme Voynet et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Avant l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Chaque année, un rapport sur l'évaluation du système éducatif est présenté au Parlement. Il fait l'objet d'un débat et d'un vote dans chacune des deux assemblées, préalablement au débat annuel sur la loi de finances.

La parole est à M. Yannick Bodin.

Debut de section - PermalienPhoto de Yannick Bodin

Monsieur le ministre, le projet de loi que vous nous demandez d'adopter est particulièrement incomplet et inadapté, nous l'avons déjà dit. Il ne s'agit aucunement de la grande loi de programmation que le Président de la République nous avait promise.

Les éléments disparates de programmation ajoutés par l'un ou l'autre des rapporteurs des deux assemblées ne sauraient constituer des garanties quant à une évolution positive du système éducatif.

C'est pourquoi il nous paraît opportun que, chaque année, préalablement au débat sur la loi de finances, un rapport sur l'accomplissement des différentes missions d'éducation nationale soit présenté aux parlementaires. La discussion budgétaire y gagnera sans doute en clarté.

Les moyens octroyés à l'éducation nationale ne font pas à eux seuls la politique de ce secteur. C'est pourquoi il est primordial que la représentation nationale dispose d'autres indicateurs.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

Défavorable, car le projet de loi prévoit déjà que le Haut conseil de l'éducation présentera un bilan annuel des résultats du système éducatif et que le Gouvernement fera un rapport sur l'évaluation de la mise en oeuvre des orientations fixées par la loi.

Il n'est donc pas utile de prévoir un autre rapport. Cela va d'ailleurs dans le sens de la LOLF, la loi organique relative aux lois de finances.

Debut de section - Permalien
François Fillon, ministre

Même avis.

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

L'amendement n° 239, présenté par MM. Bodin, Assouline, Dauge, Guérini, Lagauche, Mélenchon, Repentin et Signé, Mme Tasca, M. Todeschini, Mme Voynet et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Avant l'article 2 insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Avant l'article L. 111-1 du code de l'éducation est inséré un article ainsi rédigé :

« Art. L. ... - Le droit à l'éducation et à la formation tout au long de la vie est garanti à chacun sur l'ensemble du territoire. La scolarité obligatoire constitue le socle de ce droit. »

La parole est à M. Yannick Bodin.

Debut de section - PermalienPhoto de Yannick Bodin

Cet amendement se justifie par son texte même.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

Défavorable. En effet, l'article L. 111-1 du code de l'éducation garantit déjà le droit à l'éducation, qui doit permettre à chacun d'élever son niveau de formation continue tout au long de la vie.

Debut de section - Permalien
François Fillon, ministre

Même avis. Le droit à la formation tout au long de la vie est déjà garanti par les dispositions du code de l'éducation ; il est réaffirmé dans le projet de loi d'orientation et, dans notre République, ce droit s'applique, bien sûr, à l'ensemble du territoire.

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

Je suis saisie de deux amendements identiques.

L'amendement n° 241 est présenté par MM. Bodin, Assouline, Dauge, Guérini, Lagauche, Mélenchon, Repentin et Signé, Mme Tasca, M. Todeschini, Mme Voynet et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.

L'amendement n° 438 rectifié est présenté par Mme David, MM. Ralite, Renar, Voguet et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Avant l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le premier alinéa de l'article L. 111-1 du code de l'éducation est complété par une phrase ainsi rédigée : « Les écoles, les collèges, les lycées et les établissements d'enseignement supérieur se réfèrent à la laïcité comme valeur fondamentale de la République. »

La parole est à M. Yannick Bodin, pour présenter l'amendement n° 241.

Debut de section - PermalienPhoto de Yannick Bodin

Nous avons déjà amplement débattu de la laïcité lors de l'examen de la loi du 15 mars 2004, qui a encadré, en application du principe de laïcité, le port de signes ou de tenues manifestant une appartenance religieuse dans les écoles, collèges et lycées publics

Les débats préalables à l'adoption de ce texte ont montré les limites de ce principe qui a pourtant valeur constitutionnelle. Il a été consacré par l'article 1er de la Constitution d'octobre 1946 et repris dans la Constitution d'octobre 1958.

La rédaction de cette loi a notamment montré qu'il est très difficile de concilier ce principe de nature constitutionnelle avec d'autres principes de même valeur comme la liberté d'expression, la liberté de conscience et le libre exercice des cultes.

Il nous semble donc plus que jamais important de faire référence au principe de laïcité comme valeur fondamentale de l'institution scolaire. Cet amendement vise donc à compléter le code de l'éducation en ce sens.

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, pour présenter l'amendement n° 438 rectifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Au préalable, et avec le respect dû à votre fonction, monsieur le ministre, je tiens à vous dire que se targuer d'être fils d'enseignant ne suffit pas à vous exonérer de tout mépris à leur égard. Je suis moi-même fille d'enseignante et je n'ai pas du tout le même sentiment que vous.

Debut de section - Permalien
François Fillon, ministre

Vous les méprisez beaucoup !

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Je parle des enseignants en général et de la façon dont ils sont considérés dans votre projet.

Concernant la laïcité, nous tenons aussi à inscrire ce principe dans le texte. Vous allez, certes, nous dire à quel point le Gouvernement y est attaché et qu'il l'a d'ailleurs prouvé en faisant voter une loi pour le respect de la laïcité à l'école.

Monsieur le ministre, nous n'approuvons pas les modalités du processus d'intégration européenne telles qu'elles sont définies à travers le projet de Constitution européenne et qui formeront la Constitution à laquelle nous devrons nous référer si, hélas ! ce projet, dans lequel il n'y a aucune référence à la laïcité, était adopté.

Il serait donc opportun, puisque vous nous proposez un projet d'avenir pour l'école en France, sans doute destiné à s'appliquer longtemps, que nous inscrivions ce principe de laïcité dans ce texte. Puisque nous sommes tous attachés à ce principe, je suis convaincue que personne ici ne s'opposera à une telle disposition.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

La commission est défavorable aux amendements identiques n° 241 et 438, dont l'objet est redondant par rapport à l'article 2 du projet de loi qui vise l'ensemble des valeurs de la République de façon générale.

Madame Borvo Cohen-Seat, je ne suis pas fils d'enseignant, mais j'ai la même estime que vous pour les enseignants. Chaque fois que vous nous insulterez en prétendant que nous n'aimons pas les enseignants, je vous répondrai !

Debut de section - Permalien
François Fillon, ministre

Adopter cet amendement serait une erreur, car cela irait contre l'objectif défendu par Mme Borvo Cohen-Seat et par M. Bodin.

La raison en est simple : les valeurs de la République sont indivisibles. Le fait d'en distinguer une parmi les autres, c'est les affaiblir toutes. Elles sont définies dans des textes de rang constitutionnel. On doit les considérer et les respecter dans leur ensemble. Certaines ne sont pas plus importantes que d'autres.

Si vous voulez que les valeurs de la République soient bien au coeur de notre école républicaine, il ne faut pas adopter cet amendement.

Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

La loi sur la laïcité n'avait donc aucune valeur puisqu'elle ne figurait pas dans la Constitution !

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

La parole est à M. Michel Charasse, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Charasse

M. Michel Charasse. On peut penser ce que l'on veut de l'amendement de M. Bodin et de l'amendement équivalent présenté par nos collègues du groupe communiste, il n'en demeure pas moins que les principes définis par la loi Jules Ferry ne sont pas remis en cause et que, même si ces amendements devaient être rejetés, la laïcité reste le fondement de l'enseignement public français. Cela doit être clair pour tout le monde !

Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Charasse

Moi, je préférerai qu'on l'écrive, comme M. Bodin ou nos collègues communistes le proposent, mais si on ne l'écrit pas, il va de soi que l'enseignement est laïc en France et qu'il le reste !

Très bien ! sur plusieurs travées de l'UMP.

Les amendements ne sont pas adoptés.

I. - Après le premier alinéa de l'article L. 111-1, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« La Nation fixe comme mission première à l'école de faire partager aux élèves les valeurs de la République. »

II. - Le troisième alinéa du même article est ainsi rédigé :

« Pour garantir ce droit, des aides sont attribuées aux élèves et aux étudiants selon leurs ressources et leurs mérites. La répartition des moyens du service public de l'éducation tient compte des différences de situation, notamment en matière économique et sociale. »

Debut de section - PermalienPhoto de Valérie Létard

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, l'article 2 de ce projet de loi a une portée symbolique très forte puisqu'il tend, selon les termes mêmes de notre rapporteur, à « refonder le pacte qui lie la nation à son école, à travers la mission de transmission, entre les générations, des valeurs que nous avons en partage ».

Cet objectif est ambitieux et nécessaire.

Pour ma part, je souhaite surtout insister sur la dernière phrase du troisième alinéa de l'article L. 111-1 du code de l'éducation : « La répartition des moyens du service public de l'éducation tient compte des différences de situation, notamment en matière économique et sociale. »

Cette précision est à mon sens essentielle, car, et toutes les études sur l'illettrisme et l'échec scolaire le rappellent, la pauvreté est la première cause du grand échec scolaire.

Si le système scolaire est « en panne », selon la formulation employée dans l'un des rapports du Haut conseil de l'évaluation de l'école, c'est bien parce que l'école n'a pas réussi à corriger les inégalités et qu'elle les a, au contraire, amplifiées.

Si l'on veut rallier tous les élèves aux valeurs de la République, il faut d'abord se préoccuper de donner leur chance à tous ceux qui ne trouvent pas naturellement leur place dans notre système. Et la seule manière efficace de parvenir à ce résultat, c'est bien d'affecter plus de moyens là où les difficultés scolaires sont les plus grandes.

Tel est d'ailleurs le sens de l'alinéa que nous allons adopter et qui prévoit une répartition différenciée des moyens. Il ne faut pas avoir peur de continuer à demander une discrimination positive en faveur des quartiers les plus difficiles.

Par ailleurs, je rapprocherai cet alinéa des dispositions du projet de loi de programmation pour la cohésion sociale que nous avons adoptées et qui concernent la mise en oeuvre de dispositifs de réussite éducative.

En tant que rapporteur du volet « égalité des chances » de ce projet de loi, je me suis attachée à donner un contenu plus précis et plus opérationnel à ces dispositifs. Le but de ces derniers est bien de rassembler tous les professionnels du secteur de l'enfance et de l'adolescence en difficulté, qu'ils soient enseignants, professionnels de santé ou travailleurs sociaux, afin d'accompagner les élèves en difficulté issus d'un milieu social difficile.

Cet accompagnement pourra prendre les formes les plus variées en fonction des situations rencontrées. Je connais bien les difficultés de ces familles et je sais à quel point un accompagnement du jeune enfant à l'âge de l'apprentissage de la lecture peut faire toute la différence, surtout si cet accompagnement conjugue l'action menée dans l'école par l'équipe enseignante et l'action mise en oeuvre autour de celle-ci afin que l'environnement de l'enfant, en dehors de l'école, soit, lui aussi, idéal.

En effet, un enfant qui entre en maternelle sans parler correctement parce qu'il n'a pas eu la chance d'avoir été suffisamment éveillé au langage, part avec un handicap.

Les moyens du plan de cohésion sociale doivent nous permettre de fournir, là où le besoin s'en fera sentir, les aides périscolaires nécessaires. Mais la réussite de ce plan sera évidemment liée au maintien d'un effort particulier de l'école dans les territoires relevant de l'éducation prioritaire.

Vous avez annoncé cet après-midi, monsieur le ministre, un effort de 700 millions d'euros pour atteindre cet objectif. Dans les faits, des enseignants de collèges et de lycées de certaines zones d'éducation prioritaires constatent actuellement que sont prévues des réductions du nombre de postes, justifiées par la suppression des TPE ou par l'évolution démographique.

Je souhaite, monsieur le ministre, que l'article 2 ne soit pas un voeu pieu et que la répartition des moyens de l'école soit suffisamment inégalitaire pour permettre, dans les zones difficiles, une pédagogie adaptée, des effectifs réduits et une approche différente, tout simplement parce que les élèves ne sont pas tous identiques.

Le choc entre lycéens « classiques » et lycéens « casseurs », auquel nous venons d'assister à l'occasion des récentes manifestations lycéennes, devrait nous inciter à renforcer encore nos efforts pour réduire la fracture sociale.

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

L'amendement n° 439, présenté par Mme David, MM. Ralite, Renar, Voguet et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Avant le I de cet article, ajouter un paragraphe ainsi rédigé :

... - La première phrase du premier alinéa de l'article L. 111-1 est complétée par les mots : « et ne peut être considérée comme une activité marchande ».

La parole est à Mme Annie David.

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

Cet amendement vise à rappeler que l'école n'est pas une marchandise.

En tant que membre du groupe des Etats adhérents de l'OMC, l'Organisation mondiale du commerce, instituée en 1994 par les accords de Marrakech, notre pays a souscrit à l'accord général sur le commerce des services, l'AGCS, qui impose, dans les 148 Etats membres de l'OMC, l'ouverture de tous les services aux lois du libre-échange.

En d'autres termes, les entreprises privées pourront utiliser les lois du marché pour transformer en marchandises des activités de service correspondant à des droits fondamentaux comme la santé et la culture.

Selon une étude du laboratoire américain de recherche en économie politique EdInvest, parue dans son bulletin de décembre 2000, l'ensemble du secteur éducatif public représente une manne financière évaluée à 2 milliards de dollars, soit un vingtième du produit intérieur brut planétaire. De quoi attiser bien des convoitises !

Dès lors, on comprend pourquoi l'éducation publique est perçue comme un concurrent, un obstacle à la recherche du profit. L'objectif d'un accès de tous à une éducation gratuite pourrait alors céder la place à une éducation payante réservée aux privilégiés.

Convaincus, au contraire, que les Etats doivent favoriser la coopération des nations en matière d'éducation, mais également de science et de culture, et que l'affirmation d'un droit à l'éducation est une condition préalable nécessaire à l'égalité d'accès de tous au savoir, nous ne pouvons souscrire à cette conception exclusivement marchande, génératrice d'injustice sociale !

Le présent amendement tend donc à réaffirmer le principe constitutionnel du droit à l'éducation dans les dispositions générales du projet de loi.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

Le service public de l'éducation nationale ne saurait être perçu comme une activité marchande - j'ai eu l'occasion de le dire lors de l'examen de la motion tendant à opposer l'exception d'irrecevabilité.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

Le service public de l'éducation constitue la priorité nationale et le premier des budgets de l'Etat. Plus qu'une dépense, il s'agit d'un investissement, et le meilleur qui soit.

Le projet de loi ne revient en rien sur ces principes fondamentaux. La commission émet donc un avis défavorable.

Debut de section - Permalien
François Fillon, ministre

Même avis.

L'article 1er du code de l'éducation énonce les principes qui fondent et organisent le service public de l'éducation. Ces principes excluent naturellement que l'éducation puisse être considérée comme un service marchand.

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

Il faut l'écrire puisque vous êtes d'accord !

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

L'amendement n° 440, présenté par Mme David, MM. Ralite, Renar, Voguet et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Avant le I de cet article, ajouter un paragraphe ainsi rédigé :

... - La dernière phrase du premier alinéa de l'article L. 111-1 est ainsi rédigée : « Il contribue à la lutte contre toutes les inégalités, notamment sociales, scolaires et à caractère sexiste. »

La parole est à Mme Annie David.

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

L'idéal de justice à l'école revêt trois formes principales : l'égalité d'accès, l'égalité de traitement et l'égalité des acquis. Pourtant, les inégalités sociales ont des effets ravageurs au sein de l'école. A l'inverse, la crise de l'école est l'un des facteurs de la crise de la société. Qui peut croire que cette situation est sans incidences sur la scolarité des élèves et sur leur devenir ?

Il est illusoire de croire que l'école peut, à elle seule, résorber les inégalités sociales. Mais dire qu'elle n'y peut rien est tout aussi dangereux. Ce sont deux faces d'une même démarche, conduisant au fatalisme et au renoncement, et en définitive à l'abandon de toute ambition réformatrice.

Pour cette raison, nous préférons parler de lutte contre les inégalités. Celle-ci implique avant tout le principe de non- discrimination, selon lequel tous les individus ayant les capacités requises pour accomplir une tâche donnée disposent des mêmes possibilités pour y accéder.

Par non-discrimination, il faut entendre que le sexe, la nationalité ou l'origine sociale ne doivent jouer aucun rôle dans les possibilités de réussite scolaire. La connaissance ne doit pas être accessible seulement à certains. Pour tous ceux qui se reconnaissent dans les idéaux de libération humaine, c'est inacceptable.

Cet amendement vise donc à préciser la nature des inégalités subies par les élèves. Si l'action contre les inégalités doit s'articuler dans et hors de l'école, il convient d'inscrire dans la loi que la lutte contre ces inégalités est une mission essentielle de l'école.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

Avis défavorable.

L'article L. 111-1 du code de l'éducation prévoit déjà que la répartition des moyens du service public de l'éducation doit tenir compte des différentes situations en matière économique et sociale afin de contribuer à l'égalité des chances. L'article L. 121-1 ajoute que tous les établissements d'enseignement favorisent l'égalité entre les hommes et les femmes. Enfin, de nombreuses dispositions du code de l'éducation font référence à la lutte contre toutes les formes d'inégalité.

Debut de section - Permalien
François Fillon, ministre

Même avis.

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

L'amendement n° 242, présenté par MM. Bodin, Assouline, Dauge, Guérini, Lagauche, Mélenchon, Repentin et Signé, Mme Tasca, M. Todeschini, Mme Voynet et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Avant le I de cet article, ajouter un paragraphe ainsi rédigé :

... - Après le premier alinéa de l'article L. 111-1, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Pour assurer cette égalité des chances et la réussite de tous les élèves; l'enseignement est adapté à la diversité de chaque élève tout au long de leur scolarité. »

La parole est à M. Jean-Marc Todeschini.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Todeschini

On parle beaucoup de la démocratisation du système éducatif et de l'accès aux études supérieures d'un plus grand nombre d'élèves.

Il est vrai que, depuis vingt-cinq ans, la proportion de bacheliers a considérablement augmenté. Elle se situe aujourd'hui à environ 62 %, contre seulement 25 % au milieu des années quatre-vingt. Cette hausse considérable doit être portée au crédit des gouvernements de gauche, et plus particulièrement de Lionel Jospin, lorsqu'il était ministre de l'éducation nationale. La mise en oeuvre de la loi d'orientation, en 1989, a permis de faire progresser ce taux.

Pourtant, selon le chiffre du Haut conseil de l'évaluation de l'école, 150 000 jeunes sortent encore chaque année du système scolaire sans qualification.

Par ailleurs, le taux d'échec en DEUG est toujours élevé. Seuls 45 % des étudiants obtiennent cette qualification en deux ans.

Ces constats prouvent bien que l'enseignement dispensé aujourd'hui n'est pas encore adapté à tous.

Aussi, par notre amendement, nous proposons d'écrire dans le code de l'éducation que l'enseignement est adapté à la diversité des élèves et que ceux-ci peuvent disposer d'un soutien individualisé tout au long de leur cursus.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

Avis défavorable.

L'article L. 311-1 du code de l'éducation prévoit déjà que, pour assurer l'égalité et la réussite de tous les élèves, l'enseignement est adapté à leur diversité tout au long de leur scolarité.

Debut de section - Permalien
François Fillon, ministre

Même avis.

J'ajoute que ce projet de loi constitue un pas en avant très important grâce au programme personnalisé de réussite scolaire vers une pédagogie plus individualisée.

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

L'amendement n° 441, présenté par Mme David, MM. Ralite, Renar, Voguet et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Avant le I de cet article pour l'article, ajouter un paragraphe ainsi rédigé :

... . - Après le premier alinéa de l'article L. 111-1 du code de l'éducation, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Le droit à l'éducation est garanti à toutes et à tous afin de permettre à chacun d'accéder aux savoirs, méthodes et compétences constitutifs d'une culture scolaire commune de haut niveau telle que définie par le Conseil supérieur de l'éducation nationale ; de développer sa personnalité et de préserver sa santé ; d'accéder à une solide formation professionnelle, initiale et continue, répondant à ses aspirations ; de participer activement à la vie de la cité, de choisir, de décider. »

La parole est à Mme Annie David.

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

Le droit à l'éducation est un droit fondamental, inscrit dans la déclaration universelle des droits de l'homme. Il occupe une place centrale parmi les droits humains. Il est inséparable de tous les autres droits fondamentaux et est indispensable au développement individuel et collectif.

Ainsi, aucun droit civil, politique, économique ou social ne peut être exercé par les individus si ceux-ci n'ont pas reçu, au préalable, l'éducation la plus ambitieuse possible.

Produire des savoirs, de la compréhension du sens de la vie et du monde, de nos rapports à autrui et à nous-mêmes, développer les capacités intellectuelles, artistiques et physiques, telle doit être la mission de l'école.

Le droit à l'éducation passe par le choix d'une école qui soit prioritairement axée sur la formation de l'humain en tant qu'individu, en tant que personne et en tant que citoyen, y compris dans son avenir professionnel.

Cette ambition pour l'école ne se résume pas au fait de permettre à nos jeunes de trouver un emploi : il s'agit bel et bien d'en faire des citoyens éclairés, épanouis tant dans leur vie professionnelle que dans leur vie sociale.

Le droit à l'éducation est impératif pour relever les grands défis lancés à l'humanité pour ce XXIe siècle. C'est pourquoi nous souhaitons que la nation fixe comme missions au système d'éducation : la transmission des savoirs, méthodes, connaissances et compétences constitutifs d'une culture scolaire de haut niveau pour tous ; le développement de la personnalité des individus, la délivrance par l'école des clés pour comprendre le monde et le transformer ; l'éducation du citoyen pour le rendre apte à participer à la vie de la cité, à choisir, à décider ; la formation du futur travailleur pour préparer son insertion professionnelle.

Avec ce droit à l'éducation, nous voulons nous assurer de la réussite scolaire de tous les jeunes.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

Avis défavorable. Le contenu de cet amendement est redondant par rapport aux dispositions déjà fixées par les articles L. 111-2 et L. 122-1 du code de l'éducation, ainsi que par les articles 4 et 6 de ce projet de loi.

Debut de section - Permalien
François Fillon, ministre

Même avis.

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

Je suis saisi de sept amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 136 rectifié, présenté par M. Charasse, est ainsi libellé :

Rédiger comme suit le texte proposé par le I de cet article pour insérer un alinéa après le premier alinéa de l'article L. 111-1 du code de l'éducation :

« Les valeurs de la République doivent être partagées par l'ensemble des personnels de l'Education nationale et doivent obligatoirement être enseignées à l'école publique. »

La parole est à M. Michel Charasse.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Charasse

Les sept amendements qui font l'objet d'une discussion commune montrent la difficulté de trouver une rédaction qui soit conforme aux souhaits exprimés par les uns et les autres, en particulier par mes amis du groupe socialiste. Je le précise, je présente cet amendement à titre personnel.

Lorsque Jules Ferry a créé l'école publique, il a écrit un certain nombre de textes auxquels on pourrait se référer et, en particulier, une lettre d'instruction adressée à tous les instituteurs, qui est tout à fait remarquable.

M. le rapporteur pour avis fait un signe d'approbation.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Charasse

Dans cette lettre d'instruction du 17 novembre 1883, il indique que les enseignants de la République doivent s'engager à respecter le principe de laïcité, c'est-à-dire le principe de neutralité, qui n'est rien d'autre que le principe de tolérance, et, surtout, à être, à expliquer, à défendre et à soutenir les principes de la République pour faire des enfants de France des bons citoyens, et des bons citoyens républicains.

Je me suis efforcé de trouver une rédaction qui soit un peu normative. En effet, si le Conseil constitutionnel est saisi du texte que le Sénat va voter, sans doute aura-t-il beaucoup de tri à faire au milieu de dispositions qui sont, entre autres, proclamatoires, déclamatoires...

J'ai essayé de trouver une rédaction qui, à défaut d'être plus satisfaisante que d'autres, a le mérite de la clarté. Elle vise à inscrire dans l'article L.111-1 du code de l'éducation, c'est-à-dire pratiquement dans le premier article du code, que « Les valeurs de la République doivent être partagées par l'ensemble des personnels de l'éducation nationale. »

Cela veut dire que les enseignants doivent être républicains, en tout cas en affichage. S'ils ne le sont pas, cela relève de leurs convictions personnelles non exprimées en classe.

Je poursuis la lecture de cet amendement : « Elles - les valeurs de la République, j'aurais tout aussi bien pu écrire les principes - « sont obligatoirement enseignées à l'école publique. »

Donc, les deux choses sont dites. Et je suis tout à fait dans la ligne des instructions adressées par Jules Ferry, lesquelles continuent à être, dans les temps que nous vivons, plus que jamais nécessaires face à la montée des violences, des intolérances et des tentations communautaristes.

M. Jean-Luc Mélenchon applaudit.

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

L'amendement n° 243, présenté par Mmes Voynet, Boumediene-Thiery et Blandin, MM. Desessard, Bodin, Assouline, Dauge, Guérini, Lagauche, Mélenchon, Repentin et Signé, Mme Tasca, M. Todeschini et les membres du groupe Socialiste et apparentés, est ainsi libellé :

Rédiger comme suit le texte proposé par le I de cet article pour insérer un alinéa après le premier alinéa de l'article L. 111-1 du code de l'éducation :

« La Nation fixe comme missions premières à l'Ecole de faire vivre et partager aux élèves les valeurs de la République, de la démocratie et du service de l'intérêt général. »

La parole est à Mme Dominique Voynet.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Voynet

Cet amendement a pour objet de modifier, en le complétant, le texte prévu par le I de l'article 2 pour le nouvel alinéa inséré après le premier alinéa de l'article L. 111-1 du code de l'éducation.

Il s'agit de préciser que « La Nation fixe comme missions premières à l'Ecole de faire vivre et partager aux élèves les valeurs de la République, de la démocratie et du service de l'intérêt général. »

De quelle République s'agit-il, en effet, dans cet article 2 ? De la République française ? Ou de la République universelle ? Ou de la République française comme République universelle ?

Cet amendement, qui n'est pas de pure forme, permet de lever l'ambiguïté : la mission de l'école est bien, au-delà de nos traditions nationales spécifiques, de faire partager des valeurs démocratiques et de « vivre ensemble » dont les formes peuvent être variées et également respectables. Nous en prenons la mesure dans le dialogue quotidien avec nos partenaires européens.

Quant à faire vivre ces valeurs, il s'agit de faire en sorte que la démonstration faite par l'école ne soit pas seulement abstraite, mais qu'elle corresponde à une mise en situation concrète et expérimentale.

L'école elle-même doit être républicaine et démocratique quant à son fonctionnement.

Si Jules Ferry écrivait aujourd'hui ses instructions à tous les instituteurs, il ne ferait pas l'impasse sur ce point, j'en suis sûre.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Charasse

M. Michel Charasse. Il aurait la grève immédiatement !

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

L'amendement n° 613 rectifié, présenté par MM. Revet, Lardeux, Ginoux, Grillot et Pierre, Mme Rozier et Henneron, est ainsi libellé :

Rédiger comme suit le texte proposé par le I de cet article pour insérer un alinéa après le premier alinéa de l'article L. 111-1 du code de l'éducation :

« La Nation fixe comme mission première à l'école d'assurer la transmission des connaissances et de préparer les jeunes qui lui sont confiés, en liaison avec leur famille, à devenir des citoyens responsables, respectueux des valeurs morales et civiques de la République. »

La parole est à M. Charles Revet.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Revet

Monsieur le ministre, nous sommes un grand nombre à regretter que les valeurs fondamentales de notre société ne soient plus ou soient peu enseignées à l'école.

Vous avez d'ailleurs, monsieur le ministre, autant qu'il m'en souvienne, fait tout à l'heure référence à Jules Ferry, selon lequel l'enseignement de la morale à l'école devait être considéré comme un enseignement normal, au même titre que l'apprentissage des connaissances.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Revet

Je vous ai également entendu, monsieur le ministre, répondre tout à l'heure au sujet d'un amendement relatif aux valeurs que celles de la République sont plus larges, ce qui est vrai.

Il me semble néanmoins important d'inscrire dans la loi d'orientation que les enseignants peuvent, bien sûr en liaison avec les familles, rappeler à nos enfants un certain nombre de valeurs, qu'elles soient morales ou civiques. En donnant ainsi des instructions aux enseignants pour un engagement républicain, nous allons revenir à ce qui était, dans notre jeunesse, quelque chose de fort.

Je vois aujourd'hui l'occasion de rappeler que ces valeurs morales et civiques font véritablement partie de la préparation de nos jeunes pour devenir demain des citoyens responsables dans la société.

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

L'amendement n° 420 rectifié bis, présenté par Mmes Dini, Férat et Morin-Desailly, MM. Détraigne et Nogrix, est ainsi libellé :

Dans le texte proposé par le I de cet article pour insérer un alinéa après le premier alinéa de l'article L. 111-1 du code de l'éducation, remplacer les mots :

mission première

par les mots :

une des missions premières

La parole est à Mme Muguette Dini.

Debut de section - PermalienPhoto de Muguette Dini

J'ai eu un choc en découvrant, à la lecture du texte proposé pour l'article L. 111-1 du code de l'éducation, que l'enseignement ne figure plus parmi les missions premières de l'école.

Il me semble, en effet, que la mission première de l'école, c'est d'enseigner, de former des élèves, de leur permettre d'acquérir les connaissances indispensables à leur épanouissement et à la conduite de leur vie personnelle et professionnelle.

S'il est indéniable que les valeurs de la République doivent être comprises et partagées par tous les élèves, on ne peut pas considérer que ce soit la mission première de l'école.

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

L'amendement n° 443, présenté par Mme David, MM. Ralite, Renar, Voguet et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :

Dans le texte proposé par le I de cet article pour insérer deux alinéas après le premier alinéa de l'article L. 111-1 du code de l'éducation, après le mot :

mission

supprimer le mot :

première

La parole est à M. Bernard Vera.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Vera

Depuis 1905, le principe républicain de la laïcité de l'enseignement et des personnels de l'Etat s'est imposé.

Les missions de l'école s'appuient sur une dimension morale et civique obéissant aux principes universels hérités du Siècle des lumières et de la révolution française.

Ces principes ne peuvent être hiérarchisés tant ils sont liés et garants du bon fonctionnement du service public de l'éducation nationale. Ils impliquent la gratuité tout au long de la scolarité, le droit à l'égalité pour tous les élèves face à l'éducation et à l'obligation scolaire.

Il convient donc de réaffirmer que l'école doit, avant tout, s'appuyer sur deux aspects complémentaires : l'égalité et la diversité.

Tous les enfants, quelles que soient leurs origines familiales, sociales et culturelles, ont un droit égal au développement maximal de leur personnalité afin de révéler et développer leurs aptitudes personnelles. Chaque enfant ne doit être confronté à d'autres limites que les siennes.

Cette hiérarchisation des missions de l'école semble accorder une moindre importance aux principes de droit à l'éducation, de gratuité tout au long de la scolarité, d'obligation scolaire et d'égalité pour tous les élèves, valeurs indispensables pour le futur du pays et de la République.

L'enseignement doit donc offrir à tous d'égales possibilités de développement, ouvrir à tous l'accès à la culture, à une formation, à une qualification reconnue et de haut niveau. Ce sont ces principes ambitieux qu'il faut réaffirmer, tout en s'appuyant sur une dimension morale et civique obéissant au principe de laïcité de l'enseignement et des personnels de l'Etat.

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

L'amendement n° 444, présenté par Mme David, MM. Ralite, Renar, Voguet et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :

Dans le texte proposé par le I de cet article pour insérer un alinéa après le premier alinéa de l'article L. 111-1 du code de l'éducation, remplacer le mot :

première

par le mot :

essentielle

La parole est à Mme Hélène Luc.

Debut de section - PermalienPhoto de Hélène Luc

Avec le paragraphe I de l'article 2, vous nous proposez de définir la mission première de l'école dans notre pays.

Cette modification du code de l'éducation s'insérerait après le premier alinéa de l'article L.111-1, qui affirme le caractère de première priorité nationale à notre éducation.

Et vous renforcez l'importance de cette mission première en plaçant votre réforme avant l'énoncé du deuxième alinéa, qui précise : « Le droit à l'éducation est garanti à chacun afin de lui permettre de développer sa personnalité, d'élever son niveau de formation initiale et continue, de s'insérer dans la vie sociale et professionnelle, d'exercer sa citoyenneté. » Je crois d'ailleurs rejoindre là le propos de Mme Dini.

En faisant une telle proposition, vous nous demandez d'entériner le fait que, dorénavant, la mission première de l'école ne serait plus de permettre à chaque élève de développer sa personnalité, ni d'élever son niveau de formation, ni de s'insérer dans la vie sociale et professionnelle, ni d'exercer sa citoyenneté. En un mot, le rôle fondamental de l'école ne serait plus la transmission des connaissances.

Il y a là une question de fond dont nous devons nous saisir et débattre.

Pour vous, donc, la mission première de l'école est de faire partager aux élèves les valeurs de la République. Outre que ce texte ne porte en lui-même aucun nouvel élément normatif, cette formulation valorise tout particulièrement cette mission au regard des autres.

Certes, les missions de l'école doivent s'appuyer sur une dimension morale et civique et obéir, comme nous l'avons dit précédemment, aux principes universels hérités du Siècle des lumières, de notre révolution française concernant, en particulier, les droits de l'homme et du citoyen, et des lois républicaines édictées depuis, en particulier les lois sur la laïcité.

Mais décider que la mission première est de transmettre ces valeurs nous paraît pour le moins restrictif. En effet, cette transmission ne peut se faire seulement de façon incantatoire. Elle doit trouver, dans la pratique, sa propre pédagogie.

C'est donc bien en énonçant l'ensemble des droits figurant au deuxième alinéa actuel que nous mettons en oeuvre les valeurs de notre République, les rendant ainsi visibles et lisibles par toutes et par tous.

Hiérarchiser ces principes est un exercice impossible, tant ils sont imbriqués et régissent dans leur globalité les missions du service public de l'éducation.

C'est pourquoi le rôle de l'école ne peut se borner à la transmission des valeurs de notre République, aussi universelles qu'elles puissent être - et vous savez, mes chers collègues, à quel point je pense qu'elles le sont.

Dans ces conditions, pour ne pas bouleverser les missions actuelles de notre école et ne pas hiérarchiser les objectifs prioritaires de celle-ci, nous proposons de remplacer le mot « première » par le mot « essentielle », afin de témoigner malgré tout de l'importance que nous souhaitons accorder, dans notre école, à la mission de transmission des valeurs républicaines.

J'indiquerai, pour conclure, que la meilleure façon de porter les valeurs de la République serait qu'une très grande majorité des enfants réussissent à l'école.

J'ose espérer, mes chers collègues, que vous voterez en faveur de l'adoption de cet amendement. Ce sera peut-être le seul de nos amendements que vous approuverez, mais je pense qu'il mérite vraiment de l'être.

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

L'amendement n° 369 rectifié, présenté par MM. Legendre et Longuet et Mme Garriaud-Maylam, est ainsi libellé :

Dans le texte proposé par le I de cet article pour insérer un alinéa après le premier alinéa de l'article L. 111-1 du code de l'éducation, après les mots :

à l'école

insérer les mots :

d'assurer la transmission des connaissances et

La parole est à M. Jacques Legendre.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Legendre

Le grand nombre d'amendements déposés à cet article montre combien il est difficile de parvenir à une rédaction qui garde toute sa force et qui soit suffisamment condensée afin de pouvoir véritablement être retenue.

Je comprends bien que l'on insiste sur le fait que la mission première de l'école doit être de faire partager les valeurs de la République. C'est peut-être d'ailleurs là un signe d'inquiétude : si l'on réaffirme aussi fortement ces valeurs, c'est qu'elles ne vont pas de soi pour tout le monde. Il faut donc en effet inscrire leur enseignement dans la loi.

Cependant, cela ne doit pas nous faire perdre de vue la tâche fondamentale, reconnue depuis toujours, de notre école, à savoir assurer la transmission des connaissances. Voilà pourquoi nous proposons de compléter la rédaction présentée au I de l'article 2, afin d'indiquer que la mission première de l'école est à la fois la transmission des connaissances et l'affirmation des valeurs de la République, ces deux priorités formant un tout et ne devant pas être hiérarchisées.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

En ce qui concerne l'amendement n° 136 rectifié, la rédaction proposée par notre collègue Michel Charasse rejoint celle qui est prévue dans le projet de loi. En effet, faire partager aux élèves les valeurs de la République implique que l'ensemble des adultes présents dans les établissements scolaires partagent eux-mêmes celles-ci, afin qu'ils puissent avoir valeur d'exemples pour les élèves.

Toutefois, la rédaction actuelle de l'article 2 a, selon moi, une portée plus symbolique, car elle traduit un engagement de la nation. C'est pourquoi je demande à notre collègue de se rallier à cette rédaction et de retirer son amendement. Sinon, la commission émettra un avis défavorable.

La commission est également défavorable à l'amendement n° 243, les valeurs de la République incluant celles de la démocratie et du service de l'intérêt général.

Par ailleurs, si vous le permettez, madame la présidente, je donnerai dès maintenant l'avis de la commission sur l'amendement n° 369 rectifié, car cela éclairera notre position sur les autres amendements.

La commission est favorable à l'amendement présenté par M. Legendre, car l'école a bien sûr pour mission première d'assurer la transmission des connaissances, comme vient de le rappeler fort justement notre collègue. Cela est d'ailleurs précisé aux articles 4 et 6 du projet de loi. Il semble bienvenu de le souligner également à l'article 2, qui a une portée très symbolique.

En ce qui concerne l'amendement n° 613, il se trouve satisfait par l'amendement n° 369 rectifié. Je demanderai à M. Revet de bien vouloir le retirer.

Je formulerai la même requête s'agissant de l'amendement n° 420 rectifié bis présenté par Mme Dini.

Enfin, les amendements n° 443 et 444 sont eux aussi satisfaits par l'amendement de MM. Legendre et Longuet et de Mme Garriaud-Maylam.

Debut de section - PermalienPhoto de Hélène Luc

Ne préférez-vous pas le mot « essentielle », monsieur le rapporteur ?

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

Quel est l'avis du Gouvernement sur l'ensemble de ces amendements ?

Debut de section - Permalien
François Fillon, ministre

L'amendement n° 136 rectifié de M. Charasse est sympathique.

Debut de section - Permalien
François Fillon, ministre

Cependant, il pose une difficulté d'ordre constitutionnel. En effet, inscrire dans la loi que les valeurs de la République doivent être partagées par l'ensemble des personnels de l'éducation nationale se heurte à un principe constitutionnel, celui de la liberté de conscience. Autant je partage le souci de M. Charasse de voir les personnels de l'éducation nationale enseigner les valeurs de la République - cela est d'ailleurs prévu dans la rédaction actuelle du projet de loi -, autant il me semble qu'inscrire dans le texte qu'ils doivent les partager pose un problème d'ordre constitutionnel, même si c'est extrêmement tentant.

C'est la raison pour laquelle je suis plutôt défavorable à cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Charasse

Je souhaite rectifier mon amendement, madame la présidente, afin de prévoir que, dans l'exercice de leurs fonctions, les personnels de l'éducation nationale devront respecter et mettre en oeuvre les valeurs de la République, qui seront obligatoirement enseignées à l'école publique.

Debut de section - Permalien
François Fillon, ministre

Dans ces conditions, mon objection tombe !

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

Je suis donc saisie d'un amendement n° 136 rectifié bis, présenté par M. Charasse et ainsi libellé :

Rédiger comme suit le texte proposé par le I de cet article pour insérer un alinéa après le premier alinéa de l'article L. 111-1 du code de l'éducation :

« Dans l'exercice de leurs fonctions, les personnels de l'Education nationale doivent respecter et mettre en oeuvre les valeurs de la République. Elles sont obligatoirement enseignées à l'école publique. »

Veuillez poursuivre, monsieur le ministre.

Debut de section - Permalien
François Fillon, ministre

En ce qui concerne l'amendement n° 243 présenté par Mme Voynet, les valeurs de la République auxquelles l'article fait référence sont bien entendu les valeurs définies par la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 et par le préambule de la Constitution de 1946, repris dans la Constitution de 1958.

Par conséquent, les valeurs de la République recouvrent naturellement celles de la démocratie et du service de l'intérêt général. Le Gouvernement est donc défavorable à l'amendement n° 243.

S'agissant de l'amendement n° 613, présenté par M. Revet, je pense que la rédaction proposée n'est pas adaptée. On y retrouve en effet bien des éléments qui figurent dans d'autres articles. Par exemple, la préparation à l'exercice de la citoyenneté est visée à l'article 6.

Que l'on me permette, en outre, de souligner que la brièveté même de la rédaction prévue dans l'article L. 111-1 a un sens : singulariser les valeurs de la République dans la loi, sans les qualifier me paraît bienvenu, au regard tant de la forme juridique de l'article que de sa valeur symbolique.

Pour ces raisons, je suis défavorable à l'amendement n° 613.

Concernant l'amendement n° 420 rectifié bis, la formulation présentée me paraît affaiblir la portée de l'article. C'est après mûre réflexion que nous avons proposé d'affirmer, comme cela fut le cas, au fond, lors de la création de l'école publique, que la mission première de celle-ci est de porter les valeurs de la République. J'y reviendrai à propos de l'amendement qu'a présenté M. Legendre.

Par ailleurs, le Gouvernement est défavorable aux amendements n° 443 et 444.

Quant à l'amendement n° 369 rectifié, au-delà des questions rédactionnelles, je crains que le rapprochement de deux notions d'ordre très différent, à savoir les valeurs de la République et la transmission des connaissances, ne soit de nature à affaiblir l'une et l'autre.

En effet, l'idée qui sous-tend l'article 2 est de faire partager les valeurs de la République et de les intégrer à la conscience des enfants, considérés en tant que futurs citoyens. Or la transmission des connaissances, si elle représente naturellement une mission essentielle, relève d'un tout autre champ : elle n'a pas de dimension morale. Pour ma part, je ne souhaite pas que l'on mêle des choses très différentes.

Debut de section - PermalienPhoto de Hélène Luc

Vous venez vous-même de parler d'une mission essentielle, monsieur le ministre ! Il faut inscrire cet adjectif dans la loi !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

Le problème est que deux rédactions différentes nous sont proposées pour un même texte. J'en reste, pour ma part, à celle qui nous a été présentée par M. Legendre, ...

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

...sauf à ce que M. Charasse accepte de transformer son amendement en un sous-amendement à l'amendement n° 369 rectifié, afin de compléter celui-ci.

Debut de section - Permalien
François Fillon, ministre

Le Gouvernement serait défavorable à un tel amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Charasse

Dans ces conditions, je préfère laisser les choses en l'état. Lorsqu'ils sont en service, les personnels de l'éducation nationale doivent respecter les valeurs et les principes de la République, qui sont enseignés à l'école : voilà ce que dit mon amendement, cela me paraît extrêmement simple et ce n'est d'ailleurs pas incompatible avec la proposition de notre collègue Jacques Legendre.

Debut de section - Permalien
François Fillon, ministre

Je souhaite simplement indiquer que la rédaction proposée par M. Charasse me convient.

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

Je vais mettre aux voix l'amendement n° 136 rectifié bis.

La parole est à M. Yves Fréville, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Fréville

Je suis, sur le principe, d'accord avec la formulation proposée par notre collègue Michel Charasse. Cependant, je voudrais que soit bien respectée la liberté des professeurs de l'enseignement supérieur. Par exemple, un professeur de droit constitutionnel peut être amené à s'écarter de la ligne définie au travers de l'amendement.

Je souhaite donc qu'il soit bien précisé que la disposition présentée ne limitera pas la liberté qui est reconnue par la Constitution aux professeurs de l'enseignement supérieur.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Longuet

En réalité, l'amendement présenté par M. Legendre et l'amendement déposé par M. Charasse se complètent parfaitement.

En effet, M. Legendre rappelle que l'objectif de l'éducation, c'est la transmission des connaissances, tandis que M. Charasse précise que, dans l'exercice de leurs fonctions, les enseignants doivent se comporter comme des « croyants », en tout cas adopter une certaine attitude : il n'y a pas là redondance, me semble-t-il, les deux amendements se complètent et l'on doit pouvoir les adopter tous les deux, l'amendement de M. Charasse visant non pas la transmission du savoir, mais le comportement des enseignants. La commission mixte paritaire remédiera aux imperfections.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

J'aimerais formuler une proposition de synthèse, consistant à compléter l'amendement présenté par M. Legendre par la première phrase de celui de M. Charasse, la seconde phrase de ce dernier étant redondante.

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

Monsieur Charasse, acceptez-vous la suggestion de M. le rapporteur ?

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Charasse

Non ! Il s'agit d'inscrire dans la loi que l'enseignement des principes de la République doit faire partie des programmes scolaires. Voilà ce que signifie mon amendement ; il n'est pas incompatible avec celui de M. Legendre, puisque celui-ci porte sur la transmission du savoir. En tout cas, je crois très important d'affirmer que l'on ne fait pas n'importe quoi à l'école publique et que l'on y enseigne les valeurs de la République !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

Au terme de cette discussion, la commission émet un avis favorable sur les deux amendements.

Debut de section - PermalienPhoto de Henri de Raincourt

Le sujet de ce débat est extrêmement important. Il apparaît nettement, au fil de la discussion, que les points de vue des uns et des autres sont en réalité très proches. Nous voulons tous défendre ce qui nous paraît être essentiel, au coeur de la République.

Par conséquent, il ne me semble pas souhaitable que l'on vote « à la sauvette » sur de tels amendements. Je demande donc une brève suspension de séance, qui nous permettra d'élaborer une rédaction reprenant les propositions formulées par MM. Charasse et Legendre.

Marques d'approbation sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

Non ! Nous, nous ne votons pas avec M. Legendre !

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.

La séance est suspendue.

La séance, suspendue à dix-huit heures trente, est reprise à dix-huit heures trente-cinq.

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

La séance est reprise.

La parole est à M. Jacques Legendre.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Legendre

Je vais vous lire la proposition que nous vous soumettons avec MM. Charasse et Longuet :

« La nation fixe comme mission première à l'école d'assurer la transmission des connaissances et de faire partager les valeurs de la République.

« Dans l'exercice de leurs fonctions, les personnels concourant au service public de l'éducation nationale doivent respecter et mettre en oeuvre ces valeurs. Elles sont obligatoirement enseignées à l'école. »

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

Je suis donc saisie d'un amendement n° 369 rectifié bis, présenté par MM. Legendre et Longuet et ainsi libellé :

Rédiger comme suit le texte proposé par le I de cet article pour insérer un alinéa après le premier alinéa de l'article L. 111-1 du code de l'éducation :

La nation fixe comme mission première à l'école de transmettre les connaissances et de faire partager les valeurs de la république.

Dans l'exercice de leurs fonctions, les personnels concourant au service public de l'éducation nationale doivent respecter et mettre en oeuvre ces valeurs. Elles sont obligatoirement enseignées à l'école.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Debut de section - Permalien
François Fillon, ministre

M. François Fillon, ministre. Le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

Quel est l'avis du Gouvernement sur cette demande de priorité ?

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

Monsieur Legendre, veuillez nous donner à nouveau lecture de l'amendement n° 369 rectifié bis.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Legendre

La nation fixe comme mission première à l'école d'assurer la transmission des connaissances et de faire partager les valeurs de la République.

« Dans l'exercice de leurs fonctions, les personnels concourant au service public de l'éducation nationale doivent respecter et mettre en oeuvre ces valeurs. Elles sont obligatoirement enseignées à l'école. »

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Todeschini

M. Jean-Marc Todeschini. Pourrions-nous avoir l'amendement par écrit et le réexaminer tout à l'heure ?

Exclamations sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

M. Jean-Claude Carle, rapporteur. Il a été lu deux fois, chacun peut donc se déterminer en fonction de ce qui vient d'être dit.

M. David Assouline proteste.

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

La parole est à M. Michel Charasse, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Charasse

Nous sommes parvenus à une rédaction qui comporte deux paragraphes reprenant les amendements n° 136 rectifié bis et 369 rectifié.

Il n'est pas impossible qu'il faille en revoir la rédaction en commission mixte paritaire mais l'idée importante, c'est bien qu'à l'école on se conduit comme il faut et on enseigne la République.

Applaudissements sur les travées de l'UMP

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

La parole est à Mme Annie David, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

Mme Annie David. Certes, l'amendement a été lu deux fois, mais il nous semble difficile de nous déterminer sans avoir l'amendement en main.

Protestations sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

La parole est à M. Jean-Marc Todeschini, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Todeschini

Nous partageons la position que vient d'exposer Mme David : nous nous abstiendrons, en attendant la commission mixte paritaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

Le texte de l'amendement vient d'être distribué.

Je mets aux voix l'amendement n° 369 rectifié bis.

L'amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

En conséquence, les amendements n° 136 rectifié bis, 243, 613 rectifié, 420 rectifié bis, 443 et 444 n'ont plus d'objet.

Je suis saisie de sept amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

Les deux premiers sont identiques.

L'amendement n° 245 est présenté par MM. Bodin, Assouline, Dauge, Guérini, Lagauche, Mélenchon, Repentin et Signé, Mme Tasca, M. Todeschini, Mme Voynet et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

L'amendement n° 442 est présenté par Mme David, MM. Ralite, Renar, Voguet et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Supprimer le II de cet article.

La parole est à M. Roland Courteau, pour présenter l'amendement n° 245.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Courteau

Il ne nous semble pas opportun de conditionner le droit à l'éducation à la réussite des élèves.

Le paragraphe II de l'article L. 111-1, que notre amendement tend à supprimer, a été introduit à l'Assemblée nationale. Il précise les modalités de garantie du droit à l'éducation, prévu par le même article. C'est ainsi qu'il est préconisé une répartition des moyens de l'éducation en tenant compte des disparités économiques et sociales, et l'octroi, sur ces bases, d'aides aux élèves et aux étudiants. En outre, ce droit serait désormais conditionné aux résultats individuels obtenus par les élèves.

Le droit à l'éducation serait ainsi garanti par l'octroi de bourses au mérite.

Or ce droit relève d'un raisonnement extrêmement pernicieux. Aussi, nous souhaitons supprimer ce dispositif, extrêmement élitiste, qui n'a pas sa place dans cet article du code dont l'objectif est de garantir un droit fondamental : le droit à l'éducation.

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

La parole est à M. Jean-François Voguet, pour présenter l'amendement n° 442.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Voguet

C'est à une question de fond qu'il nous faut répondre avec l'article 2.

En effet, monsieur le ministre, avec une telle modification du code de l'éducation, vous nous proposez de changer radicalement l'ordre des actions de l'Etat pour garantir le droit à l'éducation.

C'est, chacun s'en rend bien compte, une question essentielle, qui engage l'avenir de notre institution éducative, celui de nos enfants et de notre jeunesse.

Jusqu'à présent, cette garantie d'accès au droit s'appuyait sur une répartition des moyens, à partir d'une discrimination que nous pourrions qualifier de positive, tenant compte des disparités de situations, particulièrement dans le domaine économique et social.

Elle s'appuiera désormais sur une aide financière individualisée et, pour partie, fondée sur le mérite.

Vous reléguez ainsi au deuxième plan les moyens mis à la disposition des établissements scolaires situés en zones défavorisées.

Certes, le soutien financier individualisé peut être une mesure de justice sociale. Mais de là à en faire la garantie première de l'accès au droit à l'école, il y a un pas, que nous refusons de franchir.

Il faut des moyens pédagogiques renforcés et différenciés, des enseignants en nombre suffisant, y compris pour favoriser le travail d'aide et de soutien en petit groupe, dans des écoles bien équipées.

Voilà de quoi les enfants et les jeunes issus des familles en difficulté ont, en premier lieu, besoin.

Les conditions de vie de bon nombre de familles ne permettent pas aux enfants desdites familles de suivre une scolarité normale. Mais les bourses que vous proposez ne permettront pas de pallier la faiblesse d'un salaire ou d'une allocation d'aide sociale, ni l'exiguïté d'un logement ou son insalubrité.

L'aide financière individualisée prévue n'est pas la première garantie de l'égalité des chances.

Il faut, au contraire, renforcer le financement des aides prioritaires territorialisées, qui attribuent plus de moyens à ceux qui en ont le plus besoin, sans que cela porte préjudice aux autres.

Votre réforme est donc doublement dangereuse. D'abord, parce qu'elle inverse les priorités. Ensuite, parce que, compte tenu des moyens dont vous disposez, l'augmentation des aides individualisées se fera à partir de ce que l'on appelle pudiquement le redéploiement des moyens dévolus aujourd'hui à l'éducation prioritaire.

En un mot, vous vous apprêtez sans le dire à diminuer encore le financement des zones d'éducation prioritaires. Ce serait désastreux pour les enfants et les jeunes de ces territoires.

Nous refusons une telle perspective.

De plus, vous renforcez, dans votre réforme, le système des bourses au mérite.

Nous sommes là au coeur de votre réforme d'inspiration libérale.

En individualisant les aides, vous renvoyez l'élève à sa seule responsabilité dans la réussite ou dans l'échec de ses études et, avec les bourses au mérite, vous placez la « méritocratie » au centre de votre réforme. En renforçant les exigences pour y prétendre et en les instituant de façon précoce et élargie, vous transformez en profondeur l'école.

L'exception de réussite sera valorisée, mais l'échec sera la règle. Et, encore une fois, vous financerez ces bourses, nous en sommes certains, en réduisant les financements aux zones prioritaires.

Pour toutes ces raisons, nous vous demandons de supprimer le paragraphe Il de l'article 2, et donc de laisser en l'état le troisième alinéa de l'article L.111-1 du code de l'éducation.

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

L'amendement n° 445, présenté par Mme David, MM. Ralite, Renar, Voguet et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Rédiger comme suit le texte proposé par le II de cet article pour le troisième alinéa de l'article L. 111-1 du code de l'éducation :

« Pour garantir ce droit, la répartition des moyens du service public de l'éducation tient compte des différences de situation, notamment en matière économique et sociale. Des aides sont attribuées aux élèves et aux étudiants selon leurs ressources. »

La parole est à Mme Annie David.

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

Comme vient de le dire mon ami Jean-François Voguet, il s'agit, pour nous, de défendre des principes essentiels.

Parce que nous croyons que les valeurs de la République risquent d'être bafouées par le texte actuel de l'article 2, nous vous en proposons, au cas où l'amendement n° 442 ne serait pas accepté, une réécriture.

Il s'agit ainsi de rétablir comme priorité le soutien aux territoires en difficulté, afin de garantir l'égalité d'accès de tous à l'école.

Certes, la définition de ces territoires mériterait pour le moins d'être revue. Nous ne pouvons, par ailleurs, nous satisfaire que de tels territoires existent encore dans notre pays. Il faut donc impérativement prendre en compte cette réalité, en leur attribuant des aides financières à la hauteur de leurs besoins, mais aussi des personnels en nombre suffisant et diversifiés dans leurs missions, et en soutenant les actions pédagogiques entreprises afin de parvenir réellement à lutter contre toutes les inégalités.

Tout laisse à penser qu'un renforcement de ces moyens et leur maintien sur une longue période permettraient de lutter efficacement contre l'échec scolaire.

Monsieur le ministre, vous décidez a contrario de « prioriser » l'aide à la personne pour tenter de réduire les inégalités. Vous le savez bien, dans ce domaine, comme dans d'autres, la solution n'est pas là.

Les bourses sont, bien sûr, une aide, mais elles n'aident que ceux qui poursuivent une scolarité, et non ceux qui, en situation d'échec, quittent l'école sans qualification.

L'aide personnalisée, à la place de l'aide collective, on a vu ce que cela donnait dans d'autres domaines ! Prenons l'exemple du logement. Nous en voyons aujourd'hui les résultats : manque de construction et inaccessibilité des logements pour les personnes les plus démunies !

En développant en priorité l'aide financière individualisée dans le domaine scolaire au détriment de l'aide collective aux territoires, nous obtiendrons le même résultat : l'exclusion massive des élèves les plus en difficulté. Mais il est vrai que cette aide, de façon perverse, renverra l'élève et sa famille, voire l'enseignant, à la responsabilité de leurs propres échecs. Le système aura fait ce qu'il faut en tentant d'aider individuellement ceux qui en auraient eu besoin et en soutenant les efforts réalisés.

En effet, nous ne sommes pas dupes, comme nous le voyons chaque jour et dans tous les domaines, cette grande réforme se fera à moyens constants - donc en baisse -, appliquant par là même le traité de Lisbonne, qui prévoyait, non pas l'augmentation des dépenses pour l'école et la formation, mais leur redéploiement. Cela signifie que l'augmentation des aides individualisées se fera au détriment des aides aux territoires en difficulté.

C'est pourquoi, en réécrivant le paragraphe Il de l'article 2 du projet de loi, notre amendement vise à redonner la priorité à l'aide aux zones en difficulté, sans méconnaître la nécessaire aide financière personnalisée.

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

L'amendement n° 367 rectifié, présenté par MM. About et Pozzo di Borgo, Mmes Dini, Morin-Desailly et Férat et M. Merceron, est ainsi libellé :

Rédiger comme suit le texte proposé par le II de cet article pour le troisième alinéa de l'article L. 111-1 du code de l'éducation :

« Pour garantir ce droit, des aides sont attribuées aux élèves et aux étudiants selon leurs ressources et leurs mérites et - le cas échéant - leurs besoins de compensation liés à un handicap. »

La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Morin-Desailly

La prestation de compensation, instituée par la loi n° 2005-102 du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées ne sera attribuée qu'aux personnes handicapées âgées de plus de vingt ans.

Aussi l'objet de cet amendement est-il de prendre en compte les jeunes handicapés qui poursuivent un parcours d'étude souvent méritoire et admirable, surmontant ainsi les difficultés liées à leur situation spécifique. Parfois, - nous avons tous des exemples présents à l'esprit - ce parcours relève vraiment de l'exploit.

Il nous semble donc juste de prévoir des aides, sous forme de bourses d'étude, qui prennent en compte les surcoûts liés à ce handicap. Cela peut consister à acheter du matériel ou à recourir à des aides, en tout cas au-delà des seules compensations attribuées à leurs parents pour le logement et les véhicules.

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

L'amendement n° 1, présenté par M. Carle, au nom de la commission des affaires culturelles, est ainsi libellé :

Au début de la première phrase du texte proposé par le II de cet article pour le troisième alinéa de l'article L. 111-I du code de l'éducation, après les mots :

Pour garantir ce droit

insérer les mots :

dans le respect de l'égalité des chances

La parole est à M. le rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

Conformément à l'intention exprimée dans l'article 3 du texte initial, cet amendement souligne que les aides sociales et les bourses au mérite accordées aux élèves ou aux étudiants ont pour première finalité la promotion de l'égalité des chances.

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

L'amendement n° 446, présenté par Mme David, MM. Ralite, Renar, Voguet et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :

A la fin de la première phrase du texte proposé par le II de cet article pour le troisième alinéa de l'article L. 111-1 du code de l'éducation, supprimer les mots :

et leurs mérites

La parole est à Mme Annie David.

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

Je ne reprendrai pas l'argumentation que nous avons développée en présentant les amendements n° 442 et 445, car nous demandons à nouveau la suppression des mots « et leurs mérites ».

La rédaction de l'article 2 est pour le moins équivoque. La notion de mérite n'y est pas clairement définie, ce qui laisse la place à toutes les conjectures possibles.

En outre, et c'est grave, monsieur le ministre, vous placez la méritocratie au coeur de votre réforme. Parce que nous refusons cette idéologie, qui consacre et justifie une école à deux vitesses, nous vous proposons, mes chers collègues, d'adopter cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

L'amendement n° 137, présenté par M. Charasse, est ainsi libellé :

A la fin de la première phrase du texte proposé par le II de cet article pour le troisième alinéa de l'article L. 111-1 du code de l'éducation, remplacer les mots :

et leurs mérites

par les mots :

sous réserve qu'ils ne soient pas redoublants pour un motif autre que de force majeure ou de santé

La parole est à M. Michel Charasse.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Charasse

Si je présente cet amendement, à titre personnel, c'est parce que je suis gêné par la rédaction de cet article en ce qui concerne le mérite. Je me demande en effet comment on peut juger le mérite des enfants qui entrent en sixième. Il vaudrait mieux s'en tenir au critère des ressources, car on ne peut pas accorder des aides publiques à des familles qui n'en ont pas besoin.

Le vrai problème, ce sont les redoublants, pas ceux qui redoublent pour des raisons de force majeure ou de santé, mais ceux qui, malgré tous les efforts de la communauté éducative, ne travaillent pas à l'école ou dont les familles n'ont pas manifesté un intérêt particulier pour essayer de les empêcher de redoubler.

Il me paraîtrait donc plus juste d'attribuer les bourses d'abord en fonction des ressources. Le mérite entrerait en ligne de compte, mais il faudrait aussi tenir compte d'autres éléments. Ainsi, les redoublants n'auraient pas droit aux bourses, sauf s'ils ont été malades ou en cas de force majeur.

Je reconnais que ma rédaction n'est pas parfaite, mais j'ai essayé de trouver une solution correspondant mieux à la réalité. Le « mérite » me paraît en effet davantage relever du voeu pieu lorsqu'on l'applique aux élèves qui entrent en sixième.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

En ce qui concerne les amendements identiques n° 245 et 442, la commission a émis un avis défavorable. Le paragraphe II prévoit l'attribution d'aides sociales aux élèves et aux étudiants, y compris selon leurs mérites, afin de favoriser l'égalité des chances et de garantir le droit à l'instruction. Sa suppression serait donc contradictoire avec la défense des principes du projet de loi.

S'agissant de l'amendement n° 445, la commission a également émis un avis défavorable. La rédaction proposée aurait pour effet de supprimer la référence aux bourses au mérite, dont le renforcement constitue l'une des mesures phare du projet de loi.

Concernant l'amendement n° 367 rectifié, les familles d'enfant handicapé perçoivent déjà l'allocation d'éducation spéciale, qui est versée jusqu'à l'âge de vingt ans, sans conditions de ressource. Par ailleurs, l'article 13 de la loi du 11 février 2005 a prévu d'étendre, dans un délai de trois ans à compter de l'entrée en vigueur de cette loi, la prestation de compensation aux enfants handicapés. Cet amendement étant satisfait, je demande donc à ses auteurs de bien vouloir le retirer.

L'amendement n° 446 ayant le même objet que l'amendement n° 445, la commission a également émis un avis défavorable.

Quant à l'amendement n° 137, les bourses au mérite ne sont attribuées qu'aux élèves ayant de très bons résultats scolaires. Il est déjà prévu qu'elles peuvent être retirées sur décision des commissions départementales d'attribution si l'élève redouble ou s'il obtient, dans la suite de sa scolarité, de moins bons résultats. La précision apportée n'ajoutera donc rien. Cet amendement étant satisfait, j'invite M. Charasse à bien vouloir le retirer. A défaut, la commission émettra un avis défavorable.

Debut de section - Permalien
François Fillon, ministre

Si je suis très surpris par l'hostilité que déchaîne le principe du mérite, ...

Debut de section - Permalien
François Fillon, ministre

...je le suis encore plus par l'hostilité manifestée à l'égard des bourses au mérite.

Debut de section - Permalien
François Fillon, ministre

M. François Fillon, ministre. En effet, en voulant augmenter leur nombre et leur montant, je ne fais que m'inscrire dans les pas de Jack Lang.

Souriressur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Hélène Luc

On n'est pas obligé de le suivre sur tout !

Debut de section - Permalien
François Fillon, ministre

Les bourses au mérite ne seront pas créées par ce texte. Elles ont été instituées par une circulaire du 21 juillet 2000, signée par Jack Lang. Cette circulaire précise : « Afin de permettre aux plus méritants des élèves boursiers du collège de poursuivre, dans de bonnes conditions, une scolarité en lycée d'enseignement général, technologique ou professionnel conduisant au baccalauréat, un complément de bourses de lycée est mis en place à compter de la rentrée scolaire 2000. Un accompagnement attentif des jeunes bénéficiaires de ces bourses devra les aider à réussir leur scolarité lycéenne et à envisager dans les meilleures conditions des études supérieures. »

Ces bourses sont attribuées par des commissions académiques. A cet égard la circulaire dispose : « Pour en bénéficier, les élèves doivent remplir les conditions d'attribution définies par la réglementation en vigueur pour l'obtention d'une bourse de lycée et avoir obtenu de très bons résultats au diplôme national du brevet. »

Dans ces conditions, vous comprendrez que le Gouvernement émette un avis défavorable sur les amendements identiques n° 245 et 442 - je signale au passage que la politique des ZEP n'est en aucun cas remise en cause - ainsi qu'à l'amendement n° 445.

Concernant l'amendement n° 367 rectifié, les élèves et les étudiants handicapés doivent effectivement faire face, au cours de leur scolarité, à des surcoûts liés à leur handicap.

Cependant, s'agissant des aides techniques, des crédits sont spécifiquement réservés, depuis 2001, à l'achat de matériels pédagogiques adaptés aux besoins spécifiques des élèves handicapés. Ils s'élèvent à 23 millions d'euros dans la loi de finances pour 2005 et permettent d'assurer un prêt individuel gratuit du matériel à l'élève tout au long de sa scolarité.

S'agissant des aides humaines, le ministère de l'éducation nationale n'a cessé, depuis 2003, d'accroître le nombre d'assistants d'éducation exerçant les fonctions d'auxiliaires de vie scolaire : 6 500 à la rentrée de 2004, 800 emplois supplémentaires à la rentrée de 2005. Le bénéfice des auxiliaires de vie a été étendu aux étudiants handicapés par la loi du 11 février 2005.

S'agissant des aides financières, les parents du jeune handicapé peuvent prétendre au versement de l'allocation pour enfant handicapé et de ses compléments jusqu'à l'âge de vingt ans.

Enfin, le Gouvernement s'est engagé, dans le cadre des débats de la loi de février 2005, à étendre, sous trois ans, le bénéfice de la prestation de compensation aux enfants de moins de vingt ans. C'est dans ce cadre que devront être envisagées les améliorations encore nécessaires qui ne relèvent pas des dispositions envisagées par l'article 2 du présent projet de loi pour l'attribution des bourses au mérite.

Sur cet amendement n° 367 rectifié, le Gouvernement s'en remet donc à la sagesse du Sénat.

Par ailleurs, le Gouvernement émet un avis favorable sur l'amendement n° 1 et un avis défavorable sur l'amendement n° 446.

Enfin, le Gouvernement est défavorable à l'amendement n° 137, qui tend à exclure systématiquement les élèves redoublants du droit aux bourses.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Charasse

Au regard du texte, tel qu'il nous vient de l'Assemblée nationale, je persiste à me demander comment est jugé le mérite d'un élève qui doit redoubler parce qu'il n'a pas pu suivre sa scolarité normalement à la suite de problèmes de santé. Le projet de loi ne prévoit que deux critères : les ressources et le mérite. J'ai donc essayé d'apporter des précisions avec mon amendement, mais je n'ai pas forcément trouvé la bonne rédaction.

Je le répète, comment juger le mérite d'un élève dont la vie familiale et personnelle a été perturbée après que ses parents ont été pris dans la tourmente d'Abidjan ou qui, au cours de l'année scolaire - ce cas s'est produit chez moi -, a perdu son père et sa mère dans un accident de voiture un samedi soir ?

Monsieur le ministre, je ne suis pas contre la « méritocratie » ou les bourses au mérite, bien au contraire. Mais votre texte n'est pas assez clair. Il mériterait d'être complété par une instruction précise ou que la CMP trouve une solution afin de savoir comment traiter ces cas. Je n'en ai d'ailleurs cité que quelques-uns parmi bien d'autres, mais je suis persuadé que le Sénat aura compris ce que je voulais dire.

Cela étant, je ne veux pas créer de complications supplémentaires. Je retire donc l'amendement n° 137, mais je maintiens mon raisonnement.

Debut de section - Permalien
François Fillon, ministre

Nous ne changeons rien au dispositif des bourses au mérite. Aujourd'hui, celles-ci sont attribuées sur demande des chefs d'établissement auprès d'une commission académique, qui juge de cas individuels. Ceux que vient d'évoquer M. Charasse peuvent très bien entrer dans ce cadre.

Le projet de loi crée le caractère automatique de la bourse au mérite pour les jeunes issus de milieux défavorisés en cas de mention au brevet. Mais cette mesure ne supprime pas la possibilité, qui est offerte, depuis l'année 2000, aux chefs d'établissement, de demander à la commission académique de décider l'attribution d'une bourse au mérite pour un élève si l'équipe éducative estime que celui-ci en a besoin et qu'il fournit des efforts la justifiant.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Il va falloir budgétiser tout ça, car les coûts vont être considérables !

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

La parole est à M. Jacques Legendre, pour explication de vote sur les amendements identiques n° 245 et 442.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Legendre

Je suis stupéfait d'assister à un tel débat et de voir, sur les travées de gauche de notre hémicycle, certains partir en guerre contre un mot qui, soudain, sèmerait la terreur : le mérite.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Legendre

Je ne parlais pas de vous, monsieur Charasse.

Je comprends d'autant moins cette attitude que, en tant qu'historien, je sais que le personnage du boursier, et du boursier au mérite, fait partie du panthéon républicain du XIXe et du XXe siècle.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Il y avait alors deux écoles ! Quelle conception !

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Legendre

M. Jacques Legendre. Je souhaite que nous nous retrouvions tous sur nos sources, les valeurs de la République, qui permettent notamment à tous ceux qui le méritent de poursuivre leurs études, y compris lorsqu'ils n'en ont pas les capacités sociales. C'est un fondement de la République.

Applaudissements sur les travées de l'UMP et sur plusieurs travées de l'UC-UDF.

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

La parole est à M. Yannick Bodin, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Yannick Bodin

L'intervention de M. Legendre nécessite une mise au point dans la mesure où nous n'avons jamais été contre le mérite ni, d'ailleurs, contre des bourses au mérite.

On a cité Jack Lang tout à l'heure. Je peux prendre un autre exemple. Lorsque j'étais vice-président de la région d'Ile-de-France, j'ai créé des bourses au mérite pour les boursiers qui obtenaient la mention très bien au baccalauréat, d'un montant de l'ordre de 2 300 euros par an pendant quatre ans.

Nous ne sommes donc pas contre les bourses au mérite. Mais il est nécessaire de bien préciser comment on définit effectivement le mérite. Par ailleurs, et surtout -et c'est cela qui nous pose problème par rapport à l'article - autant nous sommes favorables à l'augmentation de la masse des bourses mises à la disposition des élèves, autant nous regrettons que ce montant global soit attribué en quasi-totalité sur le critère du mérite, alors que les boursiers en général ont des besoins qui, à l'heure actuelle, ne sont pas satisfaits.

Il ne faut pas confondre l'aspect du mérite, vis-à-vis duquel nous ne sommes pas défavorables, et les moyens dont disposent la masse des boursiers qui, eux aussi, attendent un effort de l'Etat. C'est parce que l'effort de l'Etat ne vient pas et n'apparaît pas dans cette loi que nous nous sommes prononcés de cette manière, et pas autrement.

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

La parole est à M. David Assouline, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

Je souscris à ce qui a été dit, mais puisqu'un débat intéressant, presque pédagogique, s'engage, je souhaite faire part de l'expérience d'un professeur qui a longtemps enseigné.

J'ai toujours considéré qu'un élève qui passait de deux à onze de moyenne était très méritant, et que celui qui passait de quatorze à dix-sept l'était un peu moins. §Le mérite que vous défendez concerne uniquement le haut du panier. §(Exclamations sur les travées de l'UMP). Il faut en effet avoir obtenu la mention très bien. Or celui qui est passé durant l'année de deux à dix de moyenne, ce qui est très très bien, n'obtiendra jamais une bourse au mérite.

Pour l'accès à l'enseignement supérieur, nous avons mis en place des bourses sur critères sociaux, ce qui n'interdit pas d'aider les plus méritants avec d'autres bourses. Mais la bourse de base, ce sont les critères sociaux, parce qu'il s'agit d'aider socialement ceux qui n'ont pas les moyens de poursuivre des études. Le principe des bourses dans l'enseignement secondaire devrait être organisé selon le même principe.

Applaudissements sur plusieurs travées du groupe socialiste.

Debut de section - Permalien
François Fillon, ministre

Monsieur Assouline, la bourse de base reste la bourse sur critères sociaux. La bourse au mérite n'est attribuée qu'à des boursiers déjà choisis sur des critères sociaux. Il n'y a pas de bourse au mérite pour les gens qui ne répondent pas aux critères sociaux.

(M. David Assouline proteste.) Nous nous bornons à amplifier le dispositif que vous avez mis en place.

Applaudissements sur les travées de l'UMP.

Debut de section - Permalien
François Fillon, ministre

Vous vous enferrez dans une position intenable. §

Les amendements ne sont pas adoptés.

L'amendement n'est pas adopté.

L'amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

La parole est à Mme Hélène Luc, pour explication de vote sur l'amendement n° 446.

Debut de section - PermalienPhoto de Hélène Luc

Cet amendement est très important.

Dans l'exposé des motifs, monsieur le ministre, vous indiquez que le système éducatif ne répond pas de façon satisfaisante aux défis du XXIe siècle, sans remettre en cause, dites-vous, la qualité de l'enseignement dispensé dans nos écoles.

Mais vous ne dites quasiment rien sur ce qu'il faudrait faire pour permettre aux enseignants d'assumer complètement leur rôle. S'agissant de leur formation, ce n'est pas l'intégration de l'Institut universitaire de formation des maîtres à une université qui réglera le problème de la réussite des élèves.

En effet, ce qui est au coeur du système éducatif, c'est la réussite des élèves. Il ne suffit pas de l'exprimer pour la réaliser ; il ne suffit pas de dire que votre réforme est ambitieuse pour qu'elle le soit. C'est ce qui fait justement réagir les élèves, les enseignants et les parents, qui manifestent massivement.

C'est cela qui s'exprime au travers du débat sur le baccalauréat, qui, malgré les inégalités entre établissements, doit rester un passeport de valeur nationale pour les élèves.

Récemment, une émission scientifique très intéressante montrait qu'il y a beaucoup plus d'informatique dans un téléphone portable que dans les premiers vaisseaux spatiaux.

Les élèves ont l'ambition de participer à la grande aventure technique, scientifique et sociale dans notre pays, associés aux jeunes d'Europe et du monde. Mais pour que cette ambition se concrétise et devienne le moteur du progrès, il faut que les enseignants, les élèves et leurs parents s'approprient cette idée ; il faut que l'école le permette.

Il faut, en premier lieu, créer les conditions de la réussite massive des élèves. Nous connaissons tous l'importance du cours préparatoire : il a été prouvé qu'un enfant qui le redouble n'a pratiquement aucune chance d'avoir le baccalauréat.

Monsieur le ministre, l'attribution de bourses au mérite, même en tenant compte des revenus, n'améliorera pas la qualité de l'enseignement de la masse des élèves.

D'ailleurs, quel est le mérite d'étudier d'un enfant vivant dans un milieu familial qui le stimule, où il y a des livres, où l'on a une vie culturelle ? Il aura, dans de telles conditions, l'envie d'étudier, d'en savoir plus.

Mais quand est-il de l'enfant qui grandit dans une famille où l'on vit avec le RMI ou le SMIC ? Et si la mère vit seule avec ses enfants, le père ayant quitté le foyer ? La délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes nous a appris que 70 °% des pères qui quittent le foyer ne s'occupent plus ensuite de l'éducation de leurs enfants. §Comment appréciera-t-on le mérite de ces enfants ?

La véritable question, c'est celle des moyens. Il faut mettre tous les moyens en oeuvre pour que les enfants réussissent. Cela veut dire qu'il faut créer des classes de quinze élèves si nécessaire, relancer la politique des ZEP, dédoubler certaines classes, pas seulement pour l'enseignement des langues.

Certes, on peut aussi mettre en place des classes relais. Je suis allé en visiter une : j'y ai vu des élèves que l'on arrivait à intéresser, à qui on parviendra à faire faire quelque chose d'intéressant. Mais il ne faut pas perdre de vue que, dans ces classes, on répare l'échec que les élèves ont subi.

« Un enfant qu'on enseigne, c'est un homme qu'on gagne », a dit Victor Hugo, et vous avez repris cette citation, monsieur Carle. C'est plus vrai que jamais, mais il faut l'ambition et les moyens.

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

La parole est à M. Jacques Legendre, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Legendre

Je voudrais rappeler que l'auteur du Temps des cerises était un boursier méritant !

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

La parole est à M. Adrien Gouteyron, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Adrien Gouteyron

Madame la présidente, je me sens l'obligation d'intervenir aussi. En effet, on feint d'oublier que ce sont les enseignants, les chefs d'établissement et les commissions d'attribution qui jugeront.

Debut de section - PermalienPhoto de Adrien Gouteyron

M. Adrien Gouteyron. Quand un enseignant met sur une copie « élève méritant », il sait très bien ce qu'il veut dire. Il ne vise pas uniquement, ce que vous faites semblant de croire, les enfants issus de tel ou tel milieu favorisé et qui auraient, ce qui n'est heureusement pas toujours le cas, d'excellents résultats.

Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Adrien Gouteyron

Voilà ce qu'est le mérite ! C'est aussi simple que cela. C'est la pratique qui l'indique.

Ne cherchons effectivement pas à définir le mérite dans un texte législatif : cela n'aurait pas de sens. Il serait sans doute souhaitable que le ministre apporte ultérieurement quelques précisions par la voie d'une circulaire.

J'en appelle au bon sens et à la pratique. Supprimer le mot « mérite » serait une grave faute. De surcroît, ce serait donner un signe tout à fait fâcheux à certains, y compris à des enseignants et à des enfants méritants. §

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

La parole est à Mme Annie David, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

Il s'agit d'un amendement que j'ai défendu. Vous ne m'avez pas trop comprise - mon explication était-elle trop rapide ? -, car nous avons bien vu qu'il s'agissait de bourses attribuées sur critères sociaux et au mérite.

On a donc bien compris quels élèves seraient concernés. Les jeunes dont parlait à l'instant M. Gouteyron n'en feront pas partie, et c'est tant mieux pour eux : ils n'ont pas besoin d'avoir des bourses sur critères sociaux.

Quant aux bourses au mérite, il est tout de même précisé dans le rapport annexé qu'« elles seront attribuées de droit à ceux d'entre eux qui auront obtenu une mention bien ou une mention très bien au diplôme national du brevet ». Il est également précisé que « les bacheliers boursiers ayant obtenu une mention bien ou très bien pourront bénéficier d'une bourse au mérite dans l'enseignement supérieur ». Il s'agit, dans les deux cas, de mentions bien ou très bien, pour les bacheliers et pour ceux qui ont obtenu le brevet. Les bourses seront donc attribuées de droit, mais en priorité pour les élèves ayant obtenu une mention bien ou très bien.

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

Je suis saisie de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 244, présenté par MM. Bodin, Assouline, Dauge, Guérini, Lagauche, Mélenchon, Repentin et Signé, Mme Tasca, M. Todeschini, Mme Voynet et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

... - Le même article est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Le droit à l'éducation est garanti à chaque jeune sur l'ensemble du territoire. »

La parole est à M. David Assouline.

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

Cet amendement tend à éviter l'instauration d'un enseignement à plusieurs vitesses, selon l'endroit du territoire où est scolarisé l'élève. Il est d'autant plus important d'inscrire ce droit dans le code de l'éducation que la tendance actuelle est à la décentralisation d'un nombre accru de compétences qui relevaient de l'Etat. Il en va du maintien du caractère national du service public de l'éducation nationale, ainsi que de la cohérence des formations et des diplômes sur l'ensemble du territoire.

Au nom du respect du principe d'égalité entre tous les élèves, il convient de réaffirmer que le droit à l'éducation est garanti à chaque jeune sur l'ensemble du territoire. On peut me rétorquer que c'est une évidence. Pourtant, nous pensons, avec une grande partie de l'opinion, que cette évidence n'est pas si simple dans le monde actuel, notamment dans les territoires ruraux ou dans certaines parties du territoire.

Par ailleurs, chaque fois que sont débattues des lois sur l'éducation ou l'enseignement supérieur, nous voyons surgir la crainte, parmi les jeunes, que les diplômes délivrés sur certains territoires ne soient dépréciés par rapport à d'autres.

Par conséquent, même si c'était déjà une évidence, il convient de le dire afin de le garantir et d'envoyer un message à tous ceux qui en doutent.

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

L'amendement n° 437, présenté par Mme David, MM. Ralite, Renar, Voguet et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :

Compléter in fine cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

... Le même article est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Le droit à l'éducation et à la formation tout au long de la vie est garanti à chacun sur l'ensemble du territoire. La scolarité obligatoire est un élément constitutif de ce droit. »

La parole est à M. Ivan Renar.

Debut de section - PermalienPhoto de Ivan Renar

L'évolution de la société et l'évolution de l'économie rendent nécessaires l'actualisation et le renouvellement des connaissances tout au long de la vie. En fait, l'évolution des technologies est si rapide de nos jours que beaucoup de formations initiales, tant générales que professionnelles, deviendraient rapidement obsolètes si elles n'étaient actualisées. Du fait même des progrès scientifiques et techniques, des spécialités professionnelles disparaissent, d'autres émergent tout aussi rapidement, obligeant certains professionnels à se reconvertir. Les adaptations et les reconversions nécessaires demandent alors de suivre une formation dans des disciplines connexes à la spécialité professionnelle déjà acquise, ce qui exige, pour être efficace, une solide formation générale de la part des salariés concernés.

Bref, tout pousse aujourd'hui au développement rapide de la formation continue - ou « formation tout au long de la vie », selon la nouvelle terminologie - s'appuyant sur une formation initiale de qualité. L'expérience montre en effet qu'il ne saurait y avoir de formation continue efficace sans formation initiale de qualité.

Ainsi, les statistiques officielles indiquent que 10, 3 milliards d'euros ont été consacrés à la formation continue en 2003, soit 9, 3 % de la dépense totale d'éducation ; mais elles indiquent aussi que ces formations ont principalement bénéficié aux salariés les plus diplômés, cadres moyens ou supérieurs.

Cette situation constitue une injustice pour les personnes de condition modeste et une source de gâchis pour l'économie et pour la nation qui doit consacrer chaque année des sommes très importantes à l'indemnisation du chômage et à la recherche de dispositifs destinés à permettre aux salariés concernés de retrouver un emploi.

C'est pourquoi nous pensons que la formation tout au long de la vie doit devenir un droit pour tous les salariés. Cette formation peut être délivrée soit par des organismes privés, soit par le service public d'éducation nationale grâce, par exemple, aux groupements d'établissements, les GRETA.

Afin d'éviter les dérives, nous proposons que les commandes de formations et financements publics provenant des entreprises ou services publics ou liés aux services publics soient réservés, autant que faire se peut, aux établissements publics de formation et aux entreprises privées à but non lucratif.

Des processus de validation des formations acquises devront être mis en place dans le respect du principe de la maîtrise par l'Etat de la délivrance des diplômes, les qualifications acquises devant être prises en compte dans la progression des carrières et des rémunérations. Une attention particulière devra être accordée aux chômeurs peu ou pas qualifiés, notamment les jeunes, et aux salariés âgés de plus de cinquante ans.

A nos yeux, cette proposition s'intègre dans une proposition d'une importance sociale décisive que nous appelons de nos voeux : la mise en place d'un système de sécurité emploi-formation garantissant tout au long de la vie la permanence d'une rémunération, quelle que soit la position momentanée du salarié par rapport à l'emploi. L'idée progresse, si j'ai bien compris les discours de M. Borloo et de certains syndicalistes !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

La commission est défavorable à l'amendement n° 244. En effet, ce qui est proposé est déjà affirmé à l'article L. 111-1, qui prévoit en outre une répartition des moyens du service public prenant en compte les différences de situation sur l'ensemble du territoire.

La commission émet également un avis défavorable sur l'amendement n° 437, pour les raisons invoquées sur l'amendement n° 239 présenté par le groupe socialiste et qui tendait à insérer un article additionnel avant l'article 2.

Debut de section - Permalien
François Fillon, ministre

Le Gouvernement est défavorable à l'amendement n° 244 puisque, par définition, une loi s'applique sur l'ensemble des territoires de la République.

Quant à l'amendement n° 437, le droit à l'éducation figure au deuxième alinéa de l'article L. 111 du code de l'éducation.

Concernant la formation professionnelle tout au long de la vie, la loi du 4 mai 2004, que j'ai eu l'honneur de défendre devant votre assemblée, en a fait une obligation nationale en affirmant notamment le droit individuel à la formation de toute personne engagée dans la vie active. C'est d'ailleurs ce que réaffirment les alinéas 172 et 173 du rapport annexé au projet de loi, qui invitent les groupements d'établissements de l'éducation nationale à se mobiliser pour la mise en oeuvre de ce nouveau droit.

De mon point de vue, cet amendement n'a donc pas lieu d'être.

L'amendement n'est pas adopté.

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

L'amendement n° 448 rectifié, présenté par Mme David, MM. Renar, Ralite, Voguet et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :

Compléter cet article par deux paragraphes ainsi rédigés :

... - L'article L. 111-4 du code de l'éducation est ainsi modifié :

1. Le troisième alinéa est ainsi rédigé : « Les parents d'élèves participent, par leurs représentants, au conseil d'école, au conseil scientifique et pédagogique, au conseil d'administration et au conseil de classe des établissements publics locaux d'enseignement ».

2. Il est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Un local de réunion est mis, dans chaque établissement scolaire, à la disposition des représentants élus des parents d'élèves ».

... - Le premier alinéa de l'article L. 236-1 du code de l'éducation est ainsi rédigé :

« Les représentants des parents d'élèves dans les instances locales, départementales et régionales, académiques et nationales mentionnées dans le présent code bénéficient de l'application des dispositions de l'article L. 225-8 du code du travail et des textes réglementaires pris pour son application ».

La parole est à Mme Annie David.

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

Cet amendement vise à donner un peu plus de place aux parents d'élèves au sein de l'école.

Comme vous le savez, la loi prévoit déjà que des représentants des parents d'élèves participent aux conseils de classes des collèges et des lycées, et que des représentants d'associations de parents d'élèves participent aux réunions des instances consultatives du système éducatif, conseils départementaux et académiques de l'éducation nationale et Conseil supérieur de l'éducation.

Mais, la plupart du temps, ces instances se réunissent dans la journée. De ce fait, les parents salariés désignés pour y participer sont obligés, soit d'obtenir de leur employeur une autorisation d'absence - la plupart du temps, à titre très exceptionnel et notamment à la condition de rattraper le temps ainsi consacré à l'accomplissement d'un mandat important -, soit de prendre sur leurs congés légaux, c'est-à-dire d'amputer d'autant leurs vacances, soit d'accepter une réduction de salaire correspondant à l'absence constatée.

Dans tous les cas, cette situation est extrêmement dissuasive et n'incite pas à développer la concertation que vous affirmez par ailleurs souhaiter avec les familles, monsieur le ministre, ...sauf à considérer que seuls des pères et des mères au foyer ou à la recherche d'un emploi, des travailleurs indépendants, des artisans ou de hauts cadres pouvant librement organiser leur temps de travail sont capables d'assumer cette tâche.

C'est pourquoi nous souhaitons qu'un véritable statut de parent délégué soit élaboré, naturellement sans remettre en cause le principe du bénévolat et de l'indépendance des associations de parents d'élèves, afin de résoudre ce problème, y compris pour les parents qui ne sont pas organisés en association s'agissant de la participation aux conseils classe.

De même, il serait intéressant que les associations puissent bénéficier de locaux dans chaque établissement pour organiser des réunions.

Tant que ces dispositions ne seront pas effectives, monsieur le ministre, les proclamations vertueuses sur le travail en commun avec les familles, en particulier pour lutter contre l'échec scolaire, ou sur le développement de la concertation avec les parents à tous les niveaux du système éducatif resteront largement des voeux pieux et assumés comme tels.

C'est pourquoi, mes chers collègues, je vous propose d'adopter cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Longuet

La commission des finances oppose l'article 40 de la Constitution à cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

L'article 40 étant applicable, l'amendement n° 448 rectifié n'est pas recevable.

L'amendement n° 447 rectifié, présenté par Mme David, MM. Renar, Ralite, Voguet et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

... Après l'article L. 111-5 du code de l'éducation, il est inséré un article ainsi rédigé :

 « Art. L. ... - Les élèves sont des citoyens en formation. Ils bénéficient du droit à la parole, de réunion, d'association et, dans les lycées, du droit à l'activité syndicale et politique.

« L'Etat reconnaît la place et le rôle des organisations représentatives des lycéens dans la représentation et la formation citoyenne des élèves. Il organise leur participation effective dans toutes les instances consultatives mises en place, du lycée jusqu'au niveau national ».

La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Monsieur le ministre, mes chers collègues, cet amendement est susceptible de vous intéresser. Puisque les organisations représentatives de lycéens existent, il conviendrait de leur permettre de s'exprimer dans les établissements.

Monsieur le ministre, vous avez d'ailleurs dit à propos de ce projet et en d'autres circonstances qu'il fallait responsabiliser les jeunes le plus tôt possible. Votre majorité les a tellement responsabilisés qu'elle a abaissé l'âge pénal !

Il s'agit donc de permettre aux jeunes d'être représentés par leurs organisations représentatives dès le lycée, c'est-à-dire à partir de l'âge de seize ans environ.

D'une manière générale, lorsque l'on veut s'attaquer à des problèmes tels que l'échec, la violence, il est intéressant de s'appuyer sur des expériences qui marchent. Or, s'agissant du présent projet de loi, nous ne voyons pas bien sur quelles expériences se fonde le Gouvernement, et nous le déplorons !

Parmi les expériences qui marchent, je veux citer l'exemple, certes limité, de la participation active des élèves à l'élaboration démocratique du règlement intérieur. Bien entendu, il ne s'agit en aucun cas d'une situation passive dans laquelle on viendrait faire la morale aux élèves. Nous avons dépassé l'époque où sans les bourses au mérite ils ne pouvaient accéder au lycée car celui-ci était alors payant. L'élaboration du règlement intérieur avec la participation active des élèves a des effets directs sur les rapports entre les enseignants et les élèves, sur la violence et les difficultés dans les établissements.

Pour ma part, j'essaie de m'appuyer sur des expériences pour faire des propositions qui aillent dans le sens d'une école de notre époque, et non de celle de nos grands-parents, qui était tellement élitiste.

Nous proposons donc que les lycéens soient représentés par des organisations représentatives dans les établissements.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

La commission émet un avis défavorable. En effet, l'article L. 511-2, introduit par la loi d'orientation de 1989 de M. Jospin, garantit déjà que les élèves disposent, dans les collèges et les lycées, de la liberté d'information et d'expression. Par ailleurs, un conseil de la vie lycéenne est institué dans chaque établissement scolaire. Enfin, les lycéens bénéficient du droit à l'activité syndicale au même titre que tout autre citoyen.

Debut de section - Permalien
François Fillon, ministre

Même avis.

L'amendement n'est pas adopté.

L'article 2 est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente.

La séance est suspendue.

La séance, suspendue à dix-neuf heures trente, est reprise à vingt-et-une heures trente-cinq, sous la présidence de M. Philippe Richert.