Séance en hémicycle du 20 juin 2016 à 14h30

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

  • d’entreprise
  • l’employeur
  • majoritaire
  • référendum
  • syndicale

La séance

Source

La séance, suspendue à douze heures trente-cinq, est reprise à quatorze heures trente, sous la présidence de M. Thierry Foucaud.

Photo de Thierry Foucaud

La séance est reprise.

Nous reprenons la discussion du projet de loi, considéré comme adopté par l’Assemblée nationale en application de l’article 49, alinéa 3, de la Constitution après engagement de la procédure accélérée, visant à instituer de nouvelles libertés et de nouvelles protections pour les entreprises et les actif-ve-s.

Dans la discussion du texte de la commission, nous poursuivons l’examen des amendements tendant à insérer un article additionnel après l’article 9.

Articles additionnels après l'article 9

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

L’amendement n° 382 rectifié bis, présenté par MM. Marie, Néri, Labazée et Cabanel, Mme Lienemann, MM. Gorce, Vincent, Durain et Anziani, Mme Tocqueville et M. Masseret, n’est pas soutenu.

L’amendement n° 633, présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David, Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Après l’article 9

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

À la fin du premier alinéa du II de l’article L. 225-27-1 du code de commerce, les mots : « est au moins égal à deux dans les sociétés dont le nombre d’administrateurs mentionnés aux articles L. 225-17 et L. 225-18 est supérieur à douze et au moins à un s’il est égal ou inférieur à douze » sont remplacés par les mots : « ne peut être inférieur à deux, sauf dans l’hypothèse où le nombre des administrateurs mentionnés aux articles L. 225-17 et L. 225-18 est de trois ».

La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin.

Debut de section - PermalienPhoto de Brigitte Gonthier-Maurin

Cet amendement vise à poser les premiers jalons d’un modèle de gouvernance et d’actionnariat permettant d’associer davantage les salariés aux décisions fondamentales des entreprises.

La représentation des salariés au sein des conseils d’administration est, en France, très insuffisante, car limitée aux très grandes entreprises. Or la crise actuelle confirme que le mode de gouvernance des entreprises qui s’est imposé depuis vingt ans est tout à fait inadéquat ; le pouvoir y appartient quasi exclusivement aux actionnaires et aux manageurs, mais, quand les affaires tournent mal, ce sont au premier chef les salariés qui paient le prix fort. En effet, les logiques financières de rentabilité et de retour immédiat sur investissement priment sur l’emploi et le développement industriel.

Au-delà des conséquences sociales des décisions purement financières, c’est bien la compétitivité de notre pays qui est en jeu. L’absence de discussion en amont sur les choix stratégiques et économiques, au sein du conseil d’administration, entraîne un blocage du dialogue social en aval, en raison à la fois du manque d’information des salariés et d’une logique de pouvoir à l’avantage exclusif des actionnaires.

En comparaison, en Allemagne, les salariés représentent un tiers du conseil d’administration des entreprises de 500 à 2 000 salariés et la moitié du conseil d’administration des très grandes entreprises. Nous proposons donc ici de nous inspirer du fameux « modèle allemand », en garantissant aux salariés un tiers des sièges au conseil d’administration des entreprises. En d’autres termes, le plafond actuellement applicable deviendrait un seuil plancher.

La présence d’administrateurs salariés permettrait de résister à la pression trop forte de certains actionnaires uniquement préoccupés de rentabilité à court terme. Lors d’arbitrages complexes relatifs aux investissements, aux dividendes, aux cessions d’actifs ou encore à la croissance externe, cette présence obligerait à toujours examiner plusieurs scénarios en tenant compte de l’intérêt de toutes les parties prenantes de l’entreprise.

Tel est l’objet de cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Baptiste Lemoyne

Nous avons amorcé ce matin le débat sur la présence des représentants des salariés dans les conseils d’administration.

Pour ma part, par conviction philosophique, j’ai tendance à associer le capital et le travail ; indéniablement, cette mesure ferait partie des moyens d’associer les salariés à la conduite de l’entreprise, et il est important de les impliquer également dans la stratégie.

Néanmoins, la loi Rebsamen a déjà modifié ce dispositif ; peut-être faudrait-il le laisser vivre, l’évaluer et envisager éventuellement ensuite d’abaisser son seuil d’application. En attendant, la commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.

Debut de section - Permalien
Myriam El Khomri, ministre

Le Gouvernement a également émis un avis défavorable, en cohérence avec ce que j’ai dit ce matin : je ne souhaite pas revenir sur l’équilibre trouvé dans la loi Rebsamen.

L’amendement n’est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

L’amendement n° 661, présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David, Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Après l’article 9

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’article L. 2242-20 du code du travail est abrogé.

La parole est à M. Dominique Watrin.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Watrin

La loi Rebsamen a réorganisé en trois ensembles les thèmes relevant du champ de la négociation obligatoire dans l’entreprise et elle a modifié la périodicité de cette négociation. Ces dispositions amoindrissent, selon nous, le dialogue social au lieu de l’enrichir.

L’objet de notre amendement cible plus précisément la question de la périodicité, que modifie ce projet de loi. Ce texte, tel qu’il est issu des travaux de la commission, permettra de modifier par le biais d’un accord d’entreprise la périodicité des négociations obligatoires annuelles et triennales en les rendant respectivement triennales et quinquennales. La négociation annuelle porte, je le rappelle, sur les rémunérations, le temps de travail, le partage de la valeur ajoutée dans l’entreprise et la qualité de vie au travail ; la négociation triennale porte, quant à elle, sur la gestion des emplois et les parcours professionnels.

Il nous semble, au contraire, très important de réintroduire une fréquence plus grande dans ces rendez-vous qui permettent d’informer et de mobiliser les salariés sur ces thèmes essentiels. Ces négociations représentent un moment nécessaire d’information, d’expression et d’implication des salariés. Or, pour ce qui concerne l’égalité professionnelle, par exemple, bien des choses restent à discuter, d’où l’intérêt de maintenir une forme de pression ou d’exigence, ce que permet l’annualité du rendez-vous.

L’extension de la périodicité de ces négociations et la possibilité d’un système à la carte nous semblent constituer un très mauvais signal, surtout dans une période de crise économique marquée par une dégradation des conditions de travail, par une tension sur les embauches et par des salaires de plus en plus individualisés, alors même que les inégalités professionnelles entre hommes et femmes perdurent.

Enfin, l’adoption de l’article 2 de ce projet de loi plaide doublement en faveur d’un renforcement de la négociation obligatoire et, donc, d’un retour à une périodicité annuelle et triennale des négociations obligatoires.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Baptiste Lemoyne

Toujours pour laisser vivre les dispositions de la loi Rebsamen, la commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.

J’ajoute qu’il faut un accord majoritaire pour moduler la fréquence de ces négociations. Qui dit accord majoritaire dit consentement des parties et, donc, équilibre trouvé au sein de l’entreprise.

Debut de section - Permalien
Myriam El Khomri, ministre

Je l’ai indiqué précédemment, notre démarche, dont procède aussi l’article 2, que vous mentionnez, consiste à faire confiance aux acteurs du dialogue social pour définir leurs méthodes et les priorités de leurs négociations.

Je rappelle en outre que la négociation sur les salaires reste annuelle, sauf si les partenaires sociaux en décident autrement.

Par ailleurs, la loi du 17 août 2015 est aussi le fruit des concertations menées avec l’ensemble des partenaires sociaux, et je ne souhaite pas qu’on modifie cet équilibre.

L’amendement n’est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Chapitre II

Renforcement de la légitimité des accords collectifs

Le chapitre II du titre III du livre II de la deuxième partie du code du travail est ainsi modifié :

1° Après la sous-section 2 de la section 3, est insérée une sous-section 2 bis ainsi rédigée :

« Sous-section 2 bis

« Modalités de négociation dans les entreprises de moins de cinquante salariés dépourvues de délégué syndical

« Art. L. 2232-20-1. – Dans les entreprises employant moins de cinquante salariés dépourvues de délégués syndicaux, ou de délégué du personnel désigné comme délégué syndical, l’employeur peut conclure un accord collectif de travail avec les délégués du personnel.

« L’accord peut également être conclu avec les représentants élus du personnel au comité d’entreprise ou à la délégation unique du personnel ou à l’instance mentionnée à l’article L. 2391-1.

« Art. L. 2232-20-2. – La validité de l’accord mentionné à l’article L. 2232-20-1 est subordonnée à sa signature par un ou plusieurs représentants élus titulaires ayant recueilli au moins 30 % des suffrages exprimés au premier tour des dernières élections des titulaires au comité d’entreprise ou de la délégation unique du personnel ou, à défaut, des délégués du personnel, quel que soit le nombre de votants.

« Art. L. 2232-20-3. – Dans les entreprises mentionnées à l’article L. 2232-20-1 dans lesquelles un procès-verbal de carence a établi l’absence de représentants élus du personnel, l’employeur peut soumettre un projet d’accord pour ratification à la majorité des deux tiers du personnel.

« Art. L. 2232-20-4. – L’accord mentionné aux articles L. 2232-20-1 et L. 2232-20-3 peut porter sur toutes les mesures qui peuvent être négociées par accord d’entreprise ou d’établissement sur le fondement du présent code.

« Il peut également être négocié et conclu avec un ou plusieurs salariés mandatés dans les conditions prévues aux articles L. 2232-24 à L. 2232-27-1.

« L’employeur communique l’accord à l’autorité administrative compétente. Elle contrôle qu’il n’enfreint pas les dispositions législatives, réglementaires ou conventionnelles applicables. À défaut de réponse dans un délai de deux mois suivant sa transmission, l’accord est réputé validé. » ;

2° La sous-section 3 de la section 3 est ainsi modifiée :

a) L’intitulé est ainsi rédigé : « Modalités de négociation dans les entreprises de cinquante salariés et plus dépourvues de délégué syndical » ;

b) À la première phrase de l’article L. 2232-21, les mots : «, ou de délégué du personnel désigné comme délégué syndical dans les entreprises de moins de cinquante salariés, » sont remplacés par les mots : « employant cinquante salariés et plus » ;

c) Au dernier alinéa de l’article L. 2232-24, les mots : « ainsi que dans les entreprises de moins de onze salariés » sont supprimés.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Je suis saisi de deux amendements identiques.

L’amendement n° 48 est présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David, Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

L’amendement n° 965 est présenté par le Gouvernement.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Annie David, pour présenter l’amendement n° 48.

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

Cet article pose un sérieux problème du point de vue de la conception du dialogue qui devrait animer le travail sur ce projet de loi.

La commission des affaires sociales nous appelle en quelque sorte à donner une forme de représentativité aux élus du personnel sans étiquette syndicale affichée, notamment à ce qu’on appelle « les syndicats indépendants ».

D’une certaine manière, cette reconnaissance des délégués sans étiquette serait une validation a posteriori de cette forme de non-respect de la loi que constitue, comme nous l’avons souvent vu, l’opposition forcenée de certains chefs d’entreprise à la présence de la moindre structure syndicale dans leur propre entreprise. Il s’agit là d’une situation parfaitement regrettable qui pose la question de la conception de l’entreprise qui anime fondamentalement la ligne directrice des amendements de la commission des affaires sociales.

D’ailleurs, il existe en matière de scrutins sociaux d’autres élections où l’on pourrait souligner le problème de la représentativité des élus. Quand les membres d’une chambre consulaire sont élus avec une participation située entre 15 % et 25 % des électeurs inscrits, voire sous le seuil de 10 %, se pose-t-on cette question ?

Le problème des élus dits indépendants est qu’ils souffrent d’un déficit de représentativité, celle-ci ne dépassant pas les portes de l’entreprise où ils sont élus. Il convient donc de ne pas modifier les règles en la matière. En effet, ne serait-ce qu’en donnant une place aux élus indépendants, on risque de donner quelque sens aux tentatives patronales plus ou moins ouvertes de mise en cause des garanties sociales existantes.

Tel est le sens de cet amendement de suppression de l’article 10 A.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à Mme la ministre, pour présenter l’amendement n° 965.

Debut de section - Permalien
Myriam El Khomri, ministre

Le Gouvernement propose de supprimer cet article, situé aux antipodes de la philosophie du projet de loi, qui vise à donner plus de place à la négociation avec les syndicats, acteurs les plus légitimes pour défendre les intérêts des salariés. Cet article vise, en un sens, à contourner les organisations syndicales, alors que nous souhaitons précisément les renforcer.

J’ai bien conscience de la difficulté qui se pose dans les petites entreprises, mais, justement, au travers du mandatement, sur lequel une bataille culturelle doit être menée, ou des accords types pour les TPE négociés au niveau des branches, le projet de loi permettra que des souplesses soient négociées dans les petites entreprises. Ce sont ces réponses-là, pour traiter cette forme d’angle mort, que nous devons privilégier.

Je vous demande donc, mesdames, messieurs les sénateurs, d’adopter cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Baptiste Lemoyne

L’idée qui nous anime n’est pas idéologique ; il s’agit de donner un canal de négociation, de discussion, à des entreprises qui en sont en partie dépourvues. Je dis « en partie », parce que, on le sait bien, la règle du mandatement existe, mais elle a ses limites.

En effet, un certain nombre d’employeurs sont réticents à y recourir. Pourquoi ? Parce qu’ils sont instruits par l’expérience de leurs voisins. Ainsi, il est régulièrement arrivé qu’un salarié soit mandaté par une organisation syndicale, que la négociation ait lieu, qu’un accord soit trouvé, mais, comme il faut un nouveau mandatement pour signer, que l’organisation syndicale ne l’accorde pas parce que l’accord ne lui convient pas. Ce fonctionnement rend ce mode de discussion difficile.

D’ailleurs, j’observe que, au cours de nos débats, le groupe CRC a régulièrement pointé au travers d’amendements les limites du mandatement, d’un autre point de vue. Il craignait qu’un employeur ne choisisse un salarié, ne lui demande de chercher une affiliation auprès d’une organisation syndicale et ne lui propose ensuite de négocier à deux. Il existe donc bien de part et d’autre des craintes relatives à ce dispositif.

Cela étant, nous ne le supprimons pas, nous ouvrons une faculté supplémentaire : celle de discuter avec des salariés élus par leurs pairs. Cela nous semble reposer sur un principe démocratique simple, sain et qui rend effective la possibilité de négocier dans les plus petites entreprises.

Tel était l’état d’esprit de la commission lorsqu’elle a examiné ces amendements identiques, sur lesquels elle a émis un avis défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à Mme Annie David, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

Monsieur le rapporteur, n’essayez pas de vous cacher derrière une prétendue entente entre nous sur le mandatement !

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

Que les choses soient claires : le mandatement est parfois compliqué pour le salarié mandaté, non parce que nous ne lui ferions pas confiance, mais parce qu’il se retrouve dans la position d’un élu du personnel sans bénéficier, à la différence de ce dernier, d’une formation syndicale donnant les outils pour mener une négociation face à son patron. Il est donc dans une situation plus délicate. C’est la seule réserve que le groupe CRC a vis-à-vis du mandatement.

Nous n’allons pas jusqu’à dire que cela entraîne un dysfonctionnement au sein des organisations syndicales, qui diraient aux salariés mandatés qu’ils ne sont pas habilités à signer un accord négocié. Sans doute, cela a pu arriver puisqu’un salarié mandaté ne peut pas forcément déjouer les pièges inclus dans un accord et l’organisation syndicale mandante peut appeler son attention sur tel ou tel souci posé par l’accord et lui recommander de ne pas le signer, en tout cas en son nom.

L’article que vous avez inséré dans le projet de loi donne une place aux syndicats « maison ». Certes, vous dites que vous ne touchez pas au mandatement, mais vous introduisez ces types de syndicats. Cela permettra à un patron qui ne souhaite pas passer par le mandatement, pour ne pas voir débouler dans son entreprise une organisation syndicale quelle qu’elle soit – je n’en cite aucune, il y en a cinq qui sont représentatives, et il peut y en avoir d’autres –, de signer un accord avec un ou deux de ses salariés. Le patron pourra dire à ceux-ci qu’il organise des élections et que, puisqu’il n’y aura pas d’organisation syndicale candidate, ils sont sûrs d’être élus et constitueront un syndicat « maison » avec lequel il pourra négocier.

Voilà, monsieur le rapporteur, le dispositif que, sous prétexte qu’il n’y a pas beaucoup de participation lors des élections professionnelles, vous introduisez. Pourtant, il y a d’autres élections où c’est le cas ; j’en ai cité quelques-unes, mais il y en a encore d’autres et, tous ici, nous sommes confrontés à cette situation dans notre vie politique. Ainsi, faut-il valider certaines élections partielles ou nommer directement quelqu’un ?

Nous sommes donc défavorables aux syndicats « maison », mais non au mandatement s’il a lieu dans de bonnes conditions.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à M. Yves Daudigny, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Daudigny

Nous sommes pleinement en accord avec ces amendements de suppression de l’article 10 A, qui vise à instaurer un dialogue direct entre le chef d’entreprise et ses salariés.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Daudigny

C’est une tentative de contournement du droit syndical !

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Daudigny

Nous, nous défendons la primauté de l’accord d’entreprise, mais, pour que celui-ci ait un sens, encore faut-il que les deux partenaires aient une parfaite légitimité. D’un côté, il y a celle du chef d’entreprise, de l’employeur, mais, de l’autre, la nature de la légitimité ne peut être que syndicale, sous des formes d’ailleurs différentes selon la taille de l’entreprise, y compris, pour les petites entreprises, celle du mandatement.

Le mandatement a fonctionné, notamment avec la loi Aubry en 1998 relative aux 35 heures. Nous savons que ce dispositif est fortement contesté, mais il s’agit bien du moyen d’instaurer dans la négociation une légitimité qui soit syndicale. C’est pourquoi des mesures permettent, à différents endroits du texte, une activité syndicale plus facile, mieux documentée et donc, bien sûr, plus efficace pour les salariés.

Nous soutenons donc très fortement ces amendements, qui tendent à supprimer un article totalement contraire à l’esprit de la loi tel que nous le défendons depuis une semaine.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à Mme Nicole Bricq, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bricq

Monsieur le rapporteur, cet article que vous avez introduit en commission et que nous voulons supprimer montre bien que vous n’avez pas compris…

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bricq

… la philosophie du projet de loi, ou que vous ne voulez pas la comprendre. Il y a donc, à droite, ce qu’on peut appeler un véritable obstacle culturel.

Donner pleine légitimité aux organisations représentatives, notamment syndicales, c’est très important pour nous. Le problème de la représentativité syndicale a été réglé en 2008 et nous réglons, par ce texte, celui de la représentativité patronale. La représentativité n’est pas le sujet, mais, il faut le rappeler, un syndicat, forcément représentatif, peut mandater soit un délégué du personnel, soit un salarié ; nous tenons à ce dispositif. Ce dernier a d’ailleurs bien fonctionné en 1998, quand il s’est agi d’appliquer les 35 heures, même s’il est vrai qu’à l’époque les entreprises ont touché 20 milliards à l’appui de cette négociation… Pour reprendre un argument souvent utilisé contre nous, une fois la loi de finances pour 2017 adoptée, nous aurons permis aux entreprises de toucher à peu près 41 milliards d’euros. Je considère donc que celles-ci doivent tout de même accepter le fait syndical.

La philosophie du projet de loi consiste à donner plus de place à la négociation et, pour pouvoir négocier, il faut avoir du temps et une pleine légitimité, d’où le mandatement syndical. Celui-ci permet de redonner de la vitalité non seulement au dialogue au sein de l’entreprise, mais aussi aux représentants du personnel quand ils sont syndiqués, ce qui est très important. En effet, on ne peut pas se contenter du fait syndical actuel encore trop minoritaire. Tout le monde en a besoin, y compris les patrons.

C’est donc cela qui me désole : culturellement, vous n’avez pas compris le monde dans lequel nous vivons, alors même que des patrons – j’ai évoqué l’accord tout récent de compétitivité de Michelin, datant de 2015-2016 – ont compris l’intérêt d’avoir des organisations fortes avec lesquelles négocier des compromis. C’est bien dommage… Toutefois, on a encore le temps, d’ici à la fin de l’examen de ce texte, pour insister, afin que ça vous rentre dans la tête. §Mais on y arrivera !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Baptiste Lemoyne

Si je comprends bien, il faut encore un peu de temps pour que tout cela m’arrive au cerveau…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Baptiste Lemoyne

On parle là de salariés élus par leurs pairs ; quelle défiance envers l’élection ! Je trouve cela stupéfiant !

Ce que nous souhaitons, sur les travées de la droite et du centre, c’est assurer l’effectivité du dialogue social et proposer, pour cela, plusieurs canaux, plusieurs possibilités. En effet, on ne peut avoir les mêmes processus, les mêmes méthodes, dans une entreprise de huit salariés et dans une entreprise de 25 000 salariés. De ce point de vue, l’article 10 A, introduit par la commission, est très pragmatique. Je rappelle en outre qu’il est applicable aux entreprises de moins de cinquante salariés dépourvues de délégués syndicaux. Il ne s’agit donc pas de contourner cette institution, mais de prévoir des dispositifs quand il n’y en a pas.

Par ailleurs, cet article prévoit autre chose, dont il n’a pas encore été question : l’instauration de consultations avec une majorité qualifiée des deux tiers. Dans la démocratie sociale comme dans la démocratie politique, nous sommes à un moment où nous devons trouver une articulation – pas un remplacement, une articulation – entre l’expression directe et la démocratie représentative. On sent bien, en effet, une envie de participation des publics, électeurs ou salariés, et on n’y coupera pas !

L’équilibre introduit par l’article 10 A est pragmatique. Expérimentons-le pendant quelques années et, s’il ne fonctionne pas, il sera bien temps d’en tirer les conclusions. Mais il est aussi possible que cela fonctionne.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à Mme Catherine Deroche, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Deroche

Jean-Baptiste Lemoyne a parfaitement expliqué la philosophie de cet article et les raisons pour lesquelles la commission l’a écrit sous cette forme.

Je ne sais pas si c’est une question de cerveau qui ne serait pas assez abouti, mais je pense que nous avons tous autant de circonvolutions cérébrales les uns que les autres…

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Milon

M. Alain Milon, président de la commission des affaires sociales. Mais on s’en sert plus ou moins bien…

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Deroche

… et l’on peut avoir des opinions différentes sans forcément tenir des propos désagréables les uns vis-à-vis des autres.

On a suffisamment répété tout au long du débat que l’on avait fondé notre texte sur deux piliers, celui de la liberté et celui de la confiance. C’est ce dont les entreprises, notamment les petites, ont besoin. On les voit et on les entend dans nos territoires, et la demande est très forte en ce sens.

Nous avons pour notre part une confiance totale envers les employeurs et les salariés. On peut afficher de la confiance, mais, quand on l’assortit de tels carcans, c’est de la défiance !

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à M. Olivier Cadic, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Olivier Cadic

Je veux soutenir ceux qui ont rédigé cet article.

Les salariés des PME, ceux qui en dirigent une le savent, se défient parfois des syndicats, qu’ils trouvent politisés et qui ne représentent pas toujours, selon eux, leurs intérêts.

L’exercice mis en place par cet article est un exercice de démocratie participative dans l’hypothèse où il n’y a pas de délégué syndical – c’est exclusivement pour ce cas-là que cet article a été rédigé. La rédaction retenue procède d’une volonté de recherche de consensus puisque la majorité des deux tiers est requise pour ratifier les accords. Aussi, contrairement à Mme Bricq, je pense que c’est cette démarche qui va dans le sens de l’histoire.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Milon

M. Alain Milon, président de la commission des affaires sociales. Je suis sûr que, de toute façon, son cerveau non reptilien lui fera lire directement mes propos.

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Milon

Je veux aussi faire fonctionner le mien. Si je comprends bien l’ensemble de la discussion, ce qui est proposé pour les entreprises de moins de cinquante salariés par le Gouvernement et par la majorité présidentielle, c’est soit le délégué syndical élu, soit un salarié mandaté par un syndicat qui n’est pas obligatoirement représenté au sein de l’entreprise.

Nous proposons une troisième possibilité : un salarié de l’entreprise, élu par ses pairs et qui discute directement avec l’employeur. Pourquoi ne pas accepter la démocratie en son entier ? On recourt à une possibilité, à la deuxième ou à la troisième. C’est tout ce que propose l’article écrit par la commission, et je pense que cette solution respecte la pluralité.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à M. Gérard Roche, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Roche

Je suis un peu choqué par cette discussion, je ne la comprends pas. J’entends bien ce qui est dit : quand il y a une représentation syndicale, c’est elle qui discute. Mais on parle là des entreprises de moins de cinquante salariés ! On en connaît dans la ruralité. J’étais médecin, je ne connaissais pas l’entreprise, mais je savais le vécu des ouvriers qui travaillaient dans ce cadre et les démarches qu’ils menaient quand un conflit survenait.

Ce qui est proposé par l’article 10 A me paraît assez logique, et je trouve les propos qui ont été tenus quelque peu discriminatoires. Discriminatoires, ils le sont vis-à-vis des patrons, qui ne sont pas tous de méchants patrons farouchement déterminés à écraser les gens ! Certains veulent que leur entreprise marche, allant même jusqu’à souhaiter en faire profiter leurs ouvriers et à avoir l’ambition de créer des emplois ! Ce que j’ai entendu me paraît très dur. Je pense que la France doit, pour se réformer, se réconcilier avec son patronat. §Sinon, on ira dans le mur !

Discriminatoires, les propos le sont aussi vis-à-vis des salariés. Y a-t-il, d’un côté, les bons salariés, ceux qui sont syndiqués, et, de l’autre, les mauvais, ceux qui ne sont pas syndiqués ? Ceux qui ne sont pas syndiqués sont dans cette situation pour des raisons de circonstances, parce qu’ils sont bien avec leur patron, parce qu’ils travaillent dans une entreprise qui marche bien et qu’ils n’ont pas, en définitive, ressenti le besoin d’adhérer à un syndicat. En revanche, s’il y a un problème, ils sont capables d’aller demander conseil auprès d’un syndicat, voire d’y adhérer, si cela leur paraît nécessaire.

La zone de clivage n’est pas aussi forte que ne le laissent entendre les propos qui ont été tenus dans cette assemblée. Voilà tout simplement ce que je voulais dire.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à M. Didier Guillaume, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

Nous abordons une partie importante du texte, et il est normal que les convictions s’expriment.

Nous pensons, pour notre part, que les corps intermédiaires sont importants. Les syndicats, y compris ceux avec lesquels il nous arrive de ne pas être d’accord, sont des interlocuteurs crédibles. Nous devons leur faire confiance, parce qu’ils sont la base même de notre contrat social, du dialogue social ; il ne faut pas les squeezer.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

La proposition que vous faites, monsieur le rapporteur, au nom de la commission, est différente de celle que nous soutenons.

Le deuxième tour laisse toujours la possibilité d’élire quelqu’un de l’entreprise. Mais, ce que nous voulons, c’est garder, pour le premier tour, le droit actuel, ce qui ne signifie pas que nous voulons à tout prix préserver les gardiens du temple ou je ne sais quoi ! Si nous sommes attachés au droit actuel, ce n’est pas tant pour une question de symbole ; c’est pour une question de démocratie sociale.

Pour le premier tour, nous souhaitons que les candidats soient désignés par les syndicats présents dans l’entreprise. S’il n’y a pas de présence syndicale dans l’entreprise, nous souhaitons que les candidats soient désignés par mandatement syndical. Cette proposition nous semble relever de la bonne logique du dialogue social, ce qui explique d’ailleurs nos échanges. À cet égard, je ne pense pas que les propos de Mme Bricq – qui vient justement de nous rejoindre – aient été excessifs. Elle s’est s’exprimée sur le vif, comme on le fait au cœur d’une discussion.

La légitimité des syndicats est un aspect très important. C'est la raison pour laquelle nous souhaiterions vraiment que le Sénat supprime cet article.

J’entends qu’il faut réconcilier les patrons ou les entreprises et la politique. Or on nous a assez fait grief d’avoir montré, par les actions en direction de l’entreprise que les gouvernements ont menées durant ce quinquennat – je pense notamment au pacte de responsabilité et au CICE –, que nous aimions l’entreprise et les chefs d’entreprise. Nous souhaiterions d’ailleurs que l’inverse soit également vrai et que nous puissions nous accorder sur un pacte social. Pour y parvenir, nous pensons qu’il faut, dans un premier temps, garder la rédaction du Gouvernement s’agissant du premier tour d’une élection.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Je mets aux voix les amendements identiques n° 48 et 965.

J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant de la commission.

Je rappelle que l'avis de la commission est défavorable.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

Le scrutin a lieu.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

Il est procédé au dépouillement du scrutin.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 333 :

Le Sénat n'a pas adopté.

L'amendement n° 639, présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David, Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 6

Supprimer cet alinéa.

II. - Alinéa 7

Remplacer le pourcentage :

par le pourcentage :

III. – Alinéas 8 à 10

Supprimer ces alinéas.

IV. – Alinéa 11, deuxième phrase

Supprimer cette phrase.

V. – Alinéas 12 à 15

Supprimer ces alinéas.

La parole est à Mme Annie David.

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

Il s’agit pour nous, vous l’aurez compris, d’un amendement de repli, puisque, la commission étant elle-même à l’origine de l’article 10 A, nous nous attendions fort au rejet de notre amendement de suppression en séance publique. Néanmoins, nous persistons à dire que cet article est très mauvais pour la démocratie sociale. Nous proposons donc, en guise de moindre mal, d’en revenir aux accords fixant le seuil de représentativité à 50 % des suffrages exprimés pour établir la représentativité des salariés habilités à signer les accords collectifs plutôt que de l’abaisser à 30 %.

Pour répondre à ce qui a été dit précédemment, il n’est pas question pour nous de priver les entreprises de la possibilité de négocier. Cependant, la conduite d’une négociation demande de la part des salariés concernés une « aptitude » à l’exercice.

Dans les entreprises de moins de cinquante salariés, lesquelles constituent la grosse majorité de nos entreprises – elles emploient plusieurs millions de salariés –, il ne serait ni juste ni même normal que les salariés retenus pour négocier ne soient pas capables de le faire. Je le dis avec d’autant plus de force que la logique du projet de loi, qui conduit à inverser la hiérarchie des normes et à privilégier les accords d’entreprise, rend indispensable la présence de salariés capables de négocier.

Nous ne nous battons pas pour refuser la négociation dans les entreprises, notamment les plus petites d’entre elles. Nous nous battons pour réserver aux organisations syndicales la possibilité de se présenter au premier tour des élections destinées à établir la représentativité des salariés. Si le quorum n’est pas atteint, parce que les électeurs ne sont pas assez nombreux, un second tour est organisé. Des personnes non mandatées par une organisation syndicale pourront toujours s’y présenter, briguer les suffrages et être élues par leurs pairs. Nous ne nous opposons pas à cette disposition, qui existe dans le droit actuel et que nous respectons. Ce que nous refusons, c’est qu’il soit mis un terme au monopole syndical pour les candidatures au premier tour.

Faut-il le rappeler, la négociation et la signature d’un accord, quel qu’il soit, requièrent quand même de la part des salariés qui représentent les leurs la possession d’un minimum de bases juridiques, notamment de connaissances en droit social et en droit du travail. Si tel n’est pas le cas, les salariés sont placés dans des conditions inacceptables pour négocier face à un patron !

Je vous invite à aller interroger les représentants des salariés aux conseils de prud’hommes sur le nombre de litiges dont ils sont saisis venant de petites entreprises. Ils vous diront que la quantité des contentieux trouve son origine dans le fait que les salariés ne sont pas suffisamment informés de leurs droits pour parvenir à se défendre eux-mêmes dans le cadre de l’entreprise.

Par cet amendement, nous essayons de limiter le champ de l’article 10 A, qui, pour nous, porte vraiment atteinte à la démocratie sociale dans les entreprises.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Baptiste Lemoyne

Pour promouvoir ce nouveau canal de négociation, la commission a souhaité que les accords soient signés dans des conditions similaires à celles qui existent aujourd'hui.

Lors de l’examen de l’article 10, nous aurons un débat sur la règle majoritaire ; je ne développerai donc pas plus longuement mon propos. Je me contente d’indiquer que c’est cette logique retenue par la commission qui l’a conduite à émettre un avis défavorable sur cet amendement.

Debut de section - Permalien
Myriam El Khomri, ministre

Je partage évidemment votre constat, madame David, sur l’importance de la règle majoritaire. Telle est précisément la raison pour laquelle le Gouvernement a déposé un amendement de suppression de l’article 10 A. En revanche, je ne vous suis pas quand vous proposez de supprimer le mandatement. Au-delà de la bataille culturelle, je crois en effet aux vertus du collectif en termes d’accompagnement et de formation. Je suis tout à fait d’accord avec vous, on ne naît pas négociateur !

Être mandaté par une organisation syndicale, c’est avoir la garantie qu’elle vous formera, vous accompagnera et vous soutiendra. Telles sont les raisons pour lesquelles je favorise le mandatement.

Je crois que nous sommes tous d’accord ici pour ne pas interdire aux petites entreprises de bénéficier de souplesse. À partir de là, comment trouver des règles pour parvenir à compenser le déséquilibre inhérent à la relation entre un employeur et un salarié ? Je pense que c’est en agissant au nom du mandat délivré par une organisation syndicale qu’on parvient à rééquilibrer les choses.

Pour moi, les enjeux sont au nombre de deux.

Le premier consiste à ne pas empêcher les petites entreprises de bénéficier de la souplesse dont elles ont besoin. Pour ce faire, les accords types négociés au niveau de la branche, directement applicables, doivent être prêts à être signés dans l’entreprise. Cette notion, bien évidemment nouvelle, qui peut, à mon sens, beaucoup apporter aux petites entreprises, était l’une des préconisations du rapport de Jean-Denis Combrexelle. Imaginez une négociation sur le forfait jours, qui doit s’établir entre 215, 220 ou 222 jours. Cet accord « à trous » négocié au niveau de la branche peut être applicable directement au sein de l’entreprise. Pour moi, c’est la solution d’avenir. J’y vois une vraie forme de modernisation de dialogue social.

Le second enjeu, c’est le mandatement, qui permettra, selon moi, aux petites entreprises de bénéficier de souplesse.

Parce que je ne veux absolument pas exclure le mandatement, j’émets un avis défavorable sur cet amendement.

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Je mets aux voix l'article 10 A.

J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant de la commission.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

Le scrutin a lieu.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

Il est procédé au dépouillement du scrutin.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 334 :

Le Sénat a adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

Les amendements n° 144 rectifié et 145 rectifié, présentés par Mme Deromedi, M. Bouchet, Mme Cayeux, MM. Chasseing, Dallier, de Legge, Doligé, Frassa, Gremillet, Husson et Laménie, Mme Lopez et MM. Magras, Mandelli, Masclet, Morisset, Pellevat, Pillet, Pointereau, Soilihi et Vasselle, ne sont pas soutenus.

L'amendement n° 267 rectifié ter, présenté par Mme Deroche, MM. Retailleau, Allizard, Bignon, Bouchet, Buffet, Calvet et Cambon, Mme Canayer, MM. Cantegrit et Cardoux, Mme Cayeux, MM. César, Chaize, Chasseing, Cornu, Dallier, Danesi et Dassault, Mmes Debré, Deromedi, Des Esgaulx, Deseyne et Di Folco, MM. Doligé et P. Dominati, Mme Duchêne, M. Dufaut, Mme Duranton, M. Emorine, Mme Estrosi Sassone, MM. Falco, B. Fournier, J.P. Fournier, Frassa, J. Gautier, Genest, Gilles, Gournac, Grand, Gremillet et Grosperrin, Mme Gruny, MM. Guené, Houel et Houpert, Mme Hummel, MM. Huré, Husson et Joyandet, Mme Kammermann, MM. Karoutchi, Kennel et Laménie, Mme Lamure, MM. D. Laurent, Lefèvre, Legendre, de Legge, Leleux, Lenoir, P. Leroy et Longuet, Mme Lopez, MM. Malhuret, Mandelli, A. Marc, Masclet et Mayet, Mmes Mélot, M. Mercier, Micouleau et Morhet-Richaud, MM. Morisset, de Nicolaÿ, Nougein, Panunzi, Paul, Perrin, Pierre, Pinton, Pointereau et Poniatowski, Mmes Primas et Procaccia et MM. de Raincourt, Raison, Rapin, Revet, Savary, Savin, Trillard, Vaspart, Vasselle, Vendegou, Vial, Vogel et Baroin, est ainsi libellé :

Après l'article 10 A

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Les articles L. 2314-24 et L. 2324-22 du code du travail sont ainsi modifiés :

1°Au premier alinéa, les mots : « deux tours » sont remplacés par les mots : « un tour » ;

2° Le deuxième alinéa est supprimé.

La parole est à Mme Catherine Deroche.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Deroche

Le monopole syndical de désignation des candidats au premier tour des élections interdit les candidatures libres qui pourraient émerger dès ce premier tour parmi les salariés non syndiqués, mais qui, néanmoins, voudraient représenter le point de vue des salariés présents dans l’entreprise. L’amendement vise à lever cet obstacle.

Nous voulons également pallier le faible taux d’appartenance des salariés à un syndicat.

Le sujet est complexe, comme nous avons pu le voir en commission, mais nous aimerions entendre la réponse du rapporteur sur cet amendement d’appel.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Baptiste Lemoyne

La commission a eu un débat intéressant sur cet amendement, un débat qui est d’ailleurs appelé à se prolonger devant les Français.

Les règles du dialogue social ne doivent bien évidemment pas être calquées sur celles de la démocratie politique. Nous y viendrons lorsque nous aborderons, plus loin dans le texte, les notions de majorité, par exemple. Reste que s’il y avait un monopole des partis politiques pour la présentation des candidats aux élections sénatoriales, je ne serais pas devant vous, et le président Milon non plus, me dit-il !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Baptiste Lemoyne

Non, j’étais un candidat indépendant !

Ce que je veux dire, c’est qu’il est sain de permettre à des personnes sans étiquette de pouvoir apporter leur pierre à l’édifice. Elles ne doivent pas être suspectes a priori. C’est ce que pointe cet amendement, porté par de nombreux collègues du groupe Les Républicains.

À ce stade, la commission préconise le retrait de l’amendement, considérant que le débat aura lieu dans les prochains mois et que le peuple français aura à se prononcer sur cette question, notamment.

Debut de section - Permalien
Myriam El Khomri, ministre

Le Gouvernement émet un avis défavorable. Nous tenons en effet au monopole syndical, fruit de la position commune arrêtée en 2008 par les partenaires sociaux.

L’objectif est de trouver le moyen de favoriser l’implantation syndicale plutôt que de la contourner ou de la détourner. Le projet de loi vise, en élargissant l’objet de la négociation, à permettre aux organisations syndicales de se saisir des questions les plus structurantes de la vie quotidienne des salariés. Pour renforcer leur rôle, il me paraît essentiel de faire partager la conviction que la dimension collective est garante d’un meilleur soutien et d’un accompagnement de qualité.

Refuser de remettre en cause ce monopole n’est pas une atteinte au libre choix des salariés : tous les syndicats légalement constitués depuis deux ans peuvent présenter des listes. Par ailleurs, si les salariés ne font pas confiance aux candidats présents au premier tour, ils peuvent toujours s’abstenir. Et, lors du deuxième tour, ils peuvent tout à fait voter pour un candidat de leur choix ! Dans beaucoup de PME, les instances représentatives du personnel ne sont pas syndiquées. On voit donc bien que la question du libre choix n’est pas le sujet.

L’enjeu dans notre pays aujourd’hui, c’est de faire en sorte, pour sortir de la culture de l’affrontement qui revient souvent dans nos débats, de renforcer le poids et la légitimité des organisations syndicales dans l’entreprise. Tel est l’axe que nous devons avoir dans toutes les entreprises de notre pays où seront organisées, à la fin de l’année, des élections dans le cadre des TPE. Nous travaillons actuellement sur le sujet avec les organisations syndicales et mettons au point une large communication.

On ne peut pas se contenter d’avoir une telle défiance envers les organisations syndicales ! Je ne pense vraiment pas que la bonne solution soit de trouver des voies pour les contourner. Nous avons une bataille culturelle à mener sur cette question, comme sur la question du mandatement.

Je le sais bien, et nous en avons tous conscience, il faut arriver à améliorer les choses dans les TPE, ce qui passe, pour moi, par un renforcement de l’implantation syndicale.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Deroche

Sur ce sujet, qui mérite d’être débattu, il n’y a pas une solution toute simple. Nous l’avons bien vu lors des auditions, notamment celle de Jean-Denis Combrexelle, qui est à l’origine du rapport.

Pour l’heure, je retire l’amendement. Nous aurons le débat plus tard.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

M. Jean Desessard. Vous n’allez quand même pas en discuter dans le cadre de la primaire ?

Sourires.

L’article L. 2232-12 du code du travail est ainsi rédigé :

« Art. L. 2232 -12. I. – La validité d’un accord d’entreprise ou d’établissement est subordonnée aux deux conditions cumulatives suivantes :

« 1° L’accord est signé par une ou plusieurs organisations syndicales de salariés représentatives ayant recueilli au moins 30 % des suffrages exprimés au premier tour des dernières élections des titulaires au comité d’entreprise ou de la délégation unique du personnel ou, à défaut, des délégués du personnel, quel que soit le nombre de votants ;

« 2° Les organisations syndicales de salariés représentatives ayant recueilli la majorité des suffrages exprimés à ces mêmes élections, quel que soit le nombre de votants, n’ont pas exprimé leur opposition dans un délai de huit jours à compter de la date de notification de cet accord, dans les conditions prévues à l’article L. 2231-8.

« II. – Au plus tard un mois après l’opposition, l’employeur ou une ou plusieurs des organisations signataires du projet d’accord peuvent indiquer qu’ils souhaitent une consultation des salariés visant à valider l’accord.

« Cette consultation est organisée dans un délai maximal de deux mois.

« Elle peut être organisée par voie électronique, se déroule dans le respect des principes généraux du droit électoral et selon les modalités prévues par un protocole spécifique conclu entre l’employeur et les organisations ayant souhaité la consultation.

« Participent à la consultation les salariés des établissements couverts par l’accord et électeurs au sens des articles L. 2314-15 et L. 2314-17 à L. 2314-18-1.

« L’accord est valide s’il est approuvé par les salariés à la majorité des suffrages exprimés, quel que soit le nombre de votants.

« Faute d’approbation, l’accord est réputé non écrit.

« Un décret définit les conditions de la consultation des salariés dans le cadre du présent II. »

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, sur l'article.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Noëlle Lienemann

Je suis opposée au référendum d’entreprise tel qu’il est proposé dans le projet de loi.

J’observe que ce dispositif n’est soutenu que par un très faible nombre d’organisations syndicales. Même l’UNSA, qui est plutôt favorable au texte, tout en soulignant qu’il doit être amélioré, nous a envoyé un tract très détaillé dans lequel on peut lire : « Loi El Khomri, il faut que ça bouge encore ! » et « Référendum : suppression de son utilisation dans la procédure de validation des accords d’entreprise – article 10 ! ». Pourquoi très peu d’organisations syndicales sont favorables à cette méthode ?

Je connais bien évidemment l’argument tendant à nous reprocher de ne pas faire confiance aux salariés au sein de l’entreprise. Je relève cependant que le recours à la technique du référendum est utilisé quand la majorité des syndicats représentant la majorité des salariés n’acceptent pas de signer un accord. Je relève également qu’il suffit que des organisations syndicales représentant seulement 30 % des salariés le demandent pour qu’il soit déclenché. La commission a ajouté la possibilité pour le patron de prendre la même initiative. J’ai bien noté, madame la ministre, et je m’en félicite, que vous n’avez pas retenu cette disposition, d’autant plus dangereuse qu’elle serait décidée par le patron !

Quelle légitimité peut bien avoir une majorité si la minorité peut, à tout moment, décider d’organiser un référendum pour revalider la légitimité de ceux qu’elle représente ?

Dans notre pays – je ne parle pas de la Suisse –, on peut demander l’organisation d’un référendum d’initiative populaire non pas pour poser directement une question, mais pour demander qu’une question soit posée. C’est le Parlement qui décide de soumettre ou non ladite question à référendum. Dans le champ du politique, on s’assure donc toujours que le passage par le tamis majoritaire est consolidé.

On le sait, la conjoncture dans laquelle intervient un vote en entreprise pèse. On le sait aussi, quand, au sein d’une entreprise, un accord pénalise une catégorie particulière et que la majorité n’est pas concernée – ou estime que les efforts demandés ne sont pas considérables –, cette dernière peut imposer à une minorité un alourdissement de sa charge de travail. L’accord recueille ainsi la majorité des suffrages, non parmi les catégories concernées, mais au sein de l’entreprise, prise dans sa globalité.

Je prends l’exemple de Smart, où 53 % à 56 % des personnes consultées ont été favorables à l’accord, un accord que les syndicats – la CFDT et la CGT – ont dénoncé. Chez Smart, 74 % des cadres et des agents techniques étaient favorables à l’accord, contre seulement 39 % des ouvriers. Quand on travaille comme ouvrier sur une chaîne, une augmentation de la durée du travail de dix minutes, d’un quart d’heure ou de vingt minutes n’a pas le même impact que pour un cadre ! Vous voyez bien que la composition du corps électoral peut donner des résultats injustes.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Cohen

Cet article comporte deux mesures qui, au final, affaiblissent encore la légitimité des organisations syndicales.

La première concerne la représentativité que doivent avoir les organisations syndicales pour être en position de signer un accord. Dans son texte, le Gouvernement prévoyait qu’un ou plusieurs syndicats représentant 50 % des suffrages exprimés au premier tour des élections professionnelles puissent signer un accord. Nous ne pouvons que regretter la décision de la commission d’abaisser ce seuil à 30 %, laissant les organisations minoritaires en position de valider les accords.

La seconde mesure, c’est la possibilité pour ces mêmes organisations syndicales minoritaires de renforcer leur légitimité en recourant à l’organisation d’un référendum. Apparemment gage de démocratie – la consultation de tous les salariés sur une problématique –, cette mesure s’apparente en réalité à un court-circuitage en règle des organisations majoritaires.

Cela pose la question de votre vision du dialogue social et de la démocratie dans l’entreprise, madame la ministre. Les employeurs organisent une élection professionnelle qui donne une légitimité aux organisations syndicales majoritaires. Pourtant, apparemment, il vous semble normal de passer outre ! Et, là-dessus, vous êtes finalement d’accord avec la majorité sénatoriale et avec une partie du groupe socialiste.

Avec votre mesure, par le biais du référendum, pourraient être validées des choses contraires à l’intérêt des salariés ! Manifestement, les Français ne sont pas dupes de cette manœuvre.

Dans une lettre que j’ai reçue récemment, Sébastien, âgé de quarante ans, se montre très critique à l’égard des consultations de salariés pour ratifier des accords d’entreprise : « Les rares fois où il y a eu des référendums de ce type, c’était avec le pistolet sur la tempe : soit vous acceptez de travailler plus pour gagner moins, soit on licencie. Évidemment, dans ces conditions-là, on peut atteindre la majorité de 50 %. »

Il est tout à fait hypocrite de laisser croire qu’il n’existe pas dans les entreprises un rapport de force défavorable aux salariés, du fait notamment du poids du chômage. C’est hypocrite de nier le lien de subordination !

Où est la démocratie, madame la ministre, quand un référendum est organisé parce qu’un accord n’a pas pu être signé ? Or tout le monde sait que, quand un accord n’est pas signé, c’est parce qu’il est mauvais pour les salariés.

Enfin, quel paradoxe ! Votre loi prétend favoriser le dialogue social en valorisant les syndicats, alors qu’elle les remet en cause.

Cet article 10 est, en réalité, un outil pour faire taire toute résistance afin d’imposer des régressions sociales. Voilà la réalité ! Telles sont les raisons pour lesquelles nous ne le voterons pas.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bricq

Nous sommes à l’évidence pris entre deux feux. Nous – le Gouvernement et le groupe socialiste – devons répondre à deux groupes qui préfèrent en rester à la situation actuelle.

L’article 10, dans notre schéma, est le miroir de l’article 2 et la pierre sur laquelle se fonde l’équilibre du texte. Si l’on est d’accord avec la philosophie de l’article 2…

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bricq

… – je ne parle là que du temps de travail et non pas de manière générale –, on ne peut qu’être d’accord avec la rédaction de cet article élaborée par le Gouvernement, par la négociation, pendant les quinze jours de suspension du parcours de ce texte avant sa délibération en conseil des ministres et ainsi présentée à l’Assemblée nationale.

En effet, cet article assure l’équilibre des parties en instaurant l’accord majoritaire. Cela est très important : cette règle des 50 % avait été acceptée par toutes les organisations représentatives de salariés en 2008. Voilà pourquoi nous souhaitons qu’elle soit inscrite dans le texte. En outre, aux termes de cet article, si l’accord n’a pas la majorité, un syndicat signataire, dès lors qu’il représente au moins 30 % des salariés, peut demander l’organisation d’une consultation des salariés, c’est-à-dire d’un référendum. Comme l’expliquait Mme Génisson, c’est un bon compromis entre démocratie représentative et démocratie directe.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Cohen

C’est ce qu’il faut faire pour ce projet de loi : un référendum !

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bricq

Cette consultation des salariés est possible, mais elle ne se fait pas de prime abord. Nous avons retenu cette architecture, parce que nous ne voulons pas que l’employeur puisse faire ce qu’il veut. Voilà pourquoi nous soutiendrons l’amendement du Gouvernement visant à rétablir la rédaction issue de l’Assemblée nationale : si elle n’est pas rétablie, tout le texte sera dénaturé.

Je lance sur ce point un appel à nos collègues de droite qui ont soutenu l’article 2, même si l’on met de côté ce qui concerne les 35 heures et le plancher horaire du travail à temps partiel : refuser le rétablissement de cette rédaction, ce serait montrer votre désaccord avec la philosophie du texte, qui consiste à donner de l’espace au dialogue social…

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bricq

… et à conforter les organisations syndicales dans cet exercice.

Quant à mes autres collègues, je les préviens que si l’on n’accepte pas cette règle majoritaire, c’est tout l’équilibre du texte qui disparaît.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

M. Jean Desessard. J’ai beaucoup apprécié le discours de Mme Bricq, qui m’est arrivé au cerveau et que j’ai très bien compris.

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

Selon ses explications, cet article répond à l’article 2 et pose un équilibre entre la démocratie représentative et la démocratie directe. La seule question que je me pose est la suivante : si la droite est majoritaire, non seulement au Sénat mais aussi à l’Assemblée nationale, que deviendront cette loi et son fameux équilibre ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

Certes, mais c’est quand même la question qu’il faut poser.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

Et si c’est votre majorité qui l’emporte ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

Ce n’est pas nous qui avons buté la CGT !

Je lis dans les journaux qu’il y a un bras de fer entre le Gouvernement et cette organisation syndicale ; M. le Premier ministre a pris des positions très nettes envers la CGT et FO pour les faire céder. Or c’est bien, selon moi, ce qui va se passer : vous allez gagner, mais votre loi, une fois adoptée, ne tiendra que six ou sept mois !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

En effet, la droite attend, la droite est prête. Il existe certes des désaccords en son sein, mais ils seront réglés facilement, d’après leurs dires. Or la droite une fois au pouvoir changera complètement la philosophie de ce texte.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

Voici ce qui m’inquiète : vous aurez fait adopter une loi contre une partie du mouvement syndical, une loi dont la philosophie est peut-être bonne, mais dont l’application est irréaliste.

Je dirais même, madame Bricq, que vous vous montrez quelque peu utopique dans cette histoire. En effet, au nom d’une grande idée, certes discutable, de la démocratie sociale, vous risquez de faire entrer autre chose dans notre droit.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

En outre, vous n’entendez pas aujourd’hui vos alliés potentiels ; ils risquent de vous en vouloir quand il sera temps de voter pour décider qui appliquera cette fameuse loi.

Le schéma que vous décrivez est bon, madame Bricq, il m’est arrivé jusqu’au cerveau ; je ne suis pas sûr pour autant que vous ayez les moyens d’agir dans les prochaines années. Par conséquent, votre belle loi risque de ne connaître aucune application puisqu’elle sera transformée par une majorité non plus seulement sénatoriale mais gouvernementale.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

Mme Nicole Bricq a dit l’essentiel au nom de notre groupe ; néanmoins, à écouter M. Jean Desessard, je me demande, alors, à quoi sert le Parlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

Selon lui, de toute façon, un quinquennat passe vite, et ce n’est pas la peine de faire une loi puisque, en cas d’alternance, elle sera changée !

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Deroche

Bien sûr ! Autant ne rien faire pendant cinq ans !

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

Mais toutes les lois, mon cher collègue, seront changées, sans aucune exception ! Nous devons donc examiner le fond du problème sans nous perdre dans les rêves ou – c’est affaire de perspective – les cauchemars les plus fous.

J’en reviens à cet article : là aussi, monsieur Desessard, votre argumentation ne tient pas. L’équilibre du projet de loi défendu par Mme El Khomri repose sur l’article 2 et sur l’article 10. On peut être contre l’article 2, contre l’inversion de la hiérarchie des normes : c’est respectable, même si je ne partage pas cet avis. En revanche, quand on en vient à l’article 10, voici ce que nous, les femmes et les hommes de gauche qui sommes ici élus, devons faire si nous croyons en ce texte : nous devons le voter. Cet article donne des garanties à la démocratie sociale en faisant passer de 30 % à 50 % le seuil de représentativité nécessaire à la conclusion d’un accord. Toutes les organisations syndicales, globalement parlant, sont favorables à la négociation et au vote des accords. Voilà pourquoi nous disons qu’il faut croire en ce qui se passe sur le terrain.

Après ce qui a été dit lors de l’examen de l’article précédent, je voudrais éviter que se tiennent de nouveaux faux procès. Je n’accepte pas qu’on dise aux uns ou aux autres qu’ils ont trahi, qu’ils ont démissionné ou encore qu’ils ont oublié leurs convictions. Chacun a le droit d’exposer ses convictions avec autant de force qu’il le souhaite, mais sans dénaturer celles des autres !

Le débat ne s’est pas trop mal passé la semaine dernière : il faut qu’il se passe bien cette semaine !

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

Du moins ne l’ai-je pas personnellement entendu.

Ce qui importe, c’est la démocratie au sein de l’entreprise. Or, selon moi, ni le passage de 30 % à 50 % ni le référendum d’entreprise ne représentent un risque de ce point de vue. En revanche, la majorité sénatoriale, que je respecte malgré nos désaccords, entend aller beaucoup plus loin dans l’inversion des normes et s’éloigner de ce que veut la gauche en adoptant la primauté du référendum, qui écarte les syndicats. Pour notre part, nous croyons encore au fait syndical !

Debut de section - PermalienPhoto de Éliane Assassi

C’est pour ça que les manifestations sont interdites !

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

Quand on est une femme ou un homme de gauche, pour reprendre l’expression de M. Guillaume, on essaye d’abord d’écouter ce que les femmes et les hommes de gauche expriment dans la rue.

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

Or ces gens ne sont pas entendus aujourd’hui. En effet, les manifestations de jeudi prochain ne seront pas autorisées.

Monsieur Guillaume, je peux partager votre soutien au passage aux accords majoritaires. L’un de nos amendements sur cet article, l’amendement n° 641, a d’ailleurs un tel objet. Nous souhaitons bien que les accords d’entreprise, pour être adoptés, soient signés par des organisations représentant au moins 50 % des salariés.

Ce que nous contestons, c’est votre réintroduction du référendum d’entreprise. Notre collègue Marie-Noëlle Lienemann vient de rappeler que l’UNSA, l’un des trois syndicats à être d’accord avec ce texte, conteste le référendum. Il n’y a plus qu’un seul syndicat à être favorable au référendum d’entreprise. La plupart des organisations syndicales qui soutiennent votre texte vous demandent de supprimer cet article 10, à cause non pas des 50 % mais bien de ce référendum.

N’essayez donc pas de nous faire croire que seraient opposés à votre vision, d’une part, la droite, qui voudrait aller encore bien plus loin et retirer tous leurs droits aux salariés, et, d’autre part, les membres du groupe communiste, qui voudraient simplement s’en tenir aux anciennes lois et ne donner des droits qu’aux seuls travailleurs. Nous aussi portons des propositions ! Nous continuons en revanche de contester l’idée du référendum d’entreprise, qui n’a rien de démocratique lorsqu’il est organisé tel qu’il l’est dans les entreprises.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

L’amendement n° 49, présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David, Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Dominique Watrin.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Watrin

Pour toutes les raisons qui ont été exposées, cet amendement vise logiquement à supprimer le référendum d’entreprise convoqué à l’initiative des syndicats minoritaires. Il faut bien avouer que cet article 10 constitue un véritable bouleversement dans les règles du dialogue social. Nous y sommes donc fermement opposés.

L’article tel qu’il est issu des travaux de la commission prévoit que, si un ou des syndicats représentatifs ne totalisant que 30 % des voix aux élections professionnelles sont disposés à signer un accord proposé par l’employeur, ils pourront demander que celui-ci soit validé par l’organisation d’un référendum dans l’entreprise, contournant ainsi l’opposition des syndicats majoritaires. Il me faut cependant préciser que, si la réécriture de la commission ne nous satisfait pas, la rédaction issue de l’Assemblée nationale que le Gouvernement souhaite rétablir n’attire guère plus nos faveurs.

Madame la ministre, comme Annie David vient de le rappeler, vous tentez de nous faire croire que votre texte renforce le dialogue social, alors qu’il affaiblit en réalité les organisations syndicales majoritaires. S’il en fallait une preuve, c’est bien cet article, qui permet aux organisations syndicales minoritaires de passer outre les règles actuelles de la représentativité dans l’entreprise. Or les syndicats élus du personnel tirent leur légitimité des élections professionnelles.

Sous prétexte de démocratie directe – ce qui est déjà contestable –, cette mesure affaiblit d’évidence la légitimité syndicale, alors qu’aucun dialogue social n’est possible sans les syndicats. En conséquence, selon moi, c’est un court-circuitage des syndicats qui s’opère : là réside notre divergence fondamentale avec vous.

D’ailleurs, pour prolonger les propos de Mme Marie-Noëlle Lienemann, au-delà des syndicats qui s’opposent globalement au texte, je citerai la position de Carole Couvert, ancienne présidente de la CFE-CGC, selon laquelle ce référendum revient à dire qu’aucun poids n’est donné aux élections professionnelles, alors que les syndicats tirent leur légitimité de celles-ci, ou encore celle de Joseph Thouvenel, vice-président de la CFTC, qui se demande si ce n’est pas pour faire avaler des pilules qui ne passent pas que la ministre envisage une telle option. Vous voyez donc que nous ne sommes pas isolés sur ce point. Selon moi, prôner la démocratie sociale, ce serait déjà écouter les syndicats qui représentent la majorité des salariés.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Baptiste Lemoyne

La commission a émis un avis défavorable sur cet amendement de suppression.

L’article 10 a effectivement été retravaillé par la commission. Initialement, il comprenait deux volets : d’une part, la validation d’un accord d’entreprise par des syndicats représentant 50 % des salariés et, d’autre part, la consultation.

Sur le premier point, j’avoue être entré sans a priori dans le débat. Au fur et à mesure, des auditions je me suis rendu compte que le seuil qui était fixé était peut-être un peu haut…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Baptiste Lemoyne

… pour permettre la conclusion d’accords. Or si nous souhaitons que ce texte soit adopté après quatre mois de débats intenses, c’est bien pour permettre que des accords soient signés : à quoi bon sinon !

Permettez-moi de vous citer le compte rendu des auditions devant notre commission. Selon l’UNSA, « 50 %, c’est compliqué » ; pour le cabinet NDRH, « 50 %, on ne voit pas comment l’atteindre » ; le DRH de Bosch nous déclarait : « je ne vais pas signer beaucoup d’accords » ; enfin, selon la CFTC « y aller par palier, pourquoi pas ? » On voit donc bien que, même parmi les syndicats, cette nouvelle règle est perçue comme un défi.

En conséquence, bien que nous ne souhaitions pas y renoncer de manière définitive, il faut nous montrer prudents. Un amendement a d’ailleurs pour objet d’instaurer une clause de revoyure en 2018 pour en tirer un bilan.

Par ailleurs, plusieurs orateurs ont fait référence à la position syndicale commune de 2008. Or nulle part dans cette position, que j’ai lue attentivement, il n’est évoqué une date butoir pour le passage à l’accord majoritaire, qui n’est évoqué qu’en tant qu’objectif. Permettez-moi de vous la citer : « Cette même règle transitoire » – la règle des 30 % – « sera applicable dans les entreprises au 1er janvier 2009 et jusqu’au passage à un mode de conclusion majoritaire des accords. Les partenaires sociaux décideront du passage à l’étape suivante au vu des résultats des négociations conduites dans les entreprises suivant ces nouvelles modalités. » Voilà la position adoptée en 2008. Aucun phasage n’était prévu, on ne renonçait à rien et nulle part n’est même mentionnée la proportion de 50 %. Si vous disposez d’un document en faisant mention, mes chers collègues, je suis preneur !

Debut de section - Permalien
Myriam El Khomri, ministre

Vous faites état, monsieur le rapporteur, de la position syndicale commune de 2008 ; je peux vous affirmer pour ma part que de nombreuses organisations syndicales sont contentes de ce passage à la règle majoritaire, qui constitue selon moi un élément déterminant de ce projet de loi. Selon Philippe Martinez lui-même, que je recevais vendredi, il s’agit de l’un des points positifs de ce texte.

Par ailleurs, il s’agit en quelque sorte d’un miroir de l’article 2. On ne peut en effet élargir l’objet de la négociation sans aller vers cette règle majoritaire. J’ai parlé souvent à son propos de verrou ; je crois du moins qu’il s’agit d’une garantie extrêmement importante.

Il est vrai par ailleurs que beaucoup d’organisations, notamment patronales, sont opposées à cette règle. Je pense néanmoins que, quand on veut favoriser la légitimité des acteurs, leur responsabilité et leur engagement, et passer ainsi d’une culture de l’affrontement à une culture du compromis, il est nécessaire de sortir de la règle qui permet des accords avec 30 % de soutien et 70 % d’opposition.

La seconde question posée est celle de la consultation des salariés. Je rappelle qu’aujourd’hui de telles consultations sont extrêmement fréquentes. Certaines sont décidées par des organisations syndicales, comme chez Sephora, parce qu’il convient de demander l’avis des salariés sur certains accords. Pour citer une fois encore Philippe Martinez, …

Debut de section - Permalien
Myriam El Khomri, ministre

… lui-même disait la semaine dernière, à propos de l’accord à la SNCF, que c’était aux salariés de cette entreprise de juger si c’était un bon ou un mauvais accord.

Aujourd’hui, la validité d’un accord est soumise à la règle des 30 %. Le présent projet de loi propose en revanche que, lorsqu’un accord sur le temps de travail a fait l’objet d’une négociation, les organisations syndicales puissent le soumettre à la consultation des salariés. Or le temps de travail est un sujet quotidien et structurant pour les salariés.

Nous savons bien en outre que l’accord majoritaire sera la règle et le référendum l’exception. En effet, demander l’avis des salariés représente un risque pour une organisation syndicale : elle sait très bien qu’elle peut le payer lors des élections professionnelles quelques années plus tard. Je rappellerai que le seuil de 30 %, qui sera celui du référendum, représente aujourd’hui le seuil de validité des accords.

Je voudrais dire un mot du cas de Smart. J’ai eu l’occasion de dénoncer le référendum mené par cette entreprise lors de sa tenue ; je reste cohérente avec cette position. J’ai pu alors clairement affirmer que l’entreprise en question n’avait pas mené un dialogue social interne exemplaire ; c’est le moins que l’on puisse dire. Ma conception du dialogue social est sans ambiguïté : il faut d’abord qu’il y ait une totale transparence, ce qui n’était pas le cas pour les négociateurs chez Smart. La négociation de l’accord était donc déjà mal partie.

En outre, non seulement la direction n’a pas été claire avec les représentants des salariés dès le début de cette affaire, mais elle n’a pas non plus fait montre de clarté sur les enjeux et les raisons économiques de la négociation. Si nous mentionnons aujourd’hui dans ce texte la méthode, la loyauté et la transparence nécessaires pour la conclusion d’accords, c’est bien pour éviter qu’il y ait une nouvelle affaire Smart. Une négociation qui n’est d’emblée ni transparente ni loyale ne peut finir qu’ainsi. Voilà pourquoi, dans le cadre de ce projet de loi, nous fixons des règles particulièrement claires à ce sujet.

Quant à la consultation des salariés de Smart, même si elle a été demandée par des organisations syndicales, elle avait néanmoins pour objectif d’instaurer un climat de peur dans l’entreprise : comme il y avait eu un défaut de transparence en amont, on ne savait pas véritablement à quoi s’attendre derrière. Il s’agissait donc, à mon sens, de tout sauf d’un dialogue social exemplaire.

Par ailleurs, monsieur Watrin, vous mentionnez la position de Joseph Thouvenel. Or Philippe Louis, de la CFTC lui aussi, m’a tenu dans mon bureau des propos divergents de ceux que vous me rapportez de son collègue. La CFDT et la CFTC sont aujourd’hui en accord avec ce dispositif. Que faire si des organisations syndicales qui représentent 49 % des salariés et ont négocié un tel accord souhaitent sa conclusion ? Nous devons aussi nous poser cette question. C’est dans de telles circonstances que sera utilisée la consultation des salariés, quand ces organisations estimeront qu’il s’agit d’un accord qui préserve l’intérêt collectif de l’entreprise et qu’elles voudront qu’il repose sur un consensus suffisamment large. Bien entendu, cela représente un risque pour elles : voilà pourquoi le référendum aura un caractère exceptionnel.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Cohen

Vous nous parlez, madame la ministre, de la non-transparence de Smart, mais c’est bien la version Smart du dialogue social que vous renforcerez avec cet article !

En effet, Smart a organisé une consultation de ses employés par référendum. Ayant reçu des réponses défavorables parmi les ouvriers et favorables parmi les cadres, ils ont poursuivi leur plan et fait régner la peur au sein de l’entreprise. Ils ont commencé par convoquer les délégués syndicaux ; un forcing terrible a été exercé sur eux six mois durant. Ensuite, les employés ont été victimes d’un chantage à l’emploi : ils étaient convoqués individuellement et devaient donner leur réponse dans la semaine.

On s’aperçoit bien qu’une pression énorme s’exerce dans de telles entreprises et que les délégués syndicaux ne progressent pas. Le climat est terrible de ce point de vue : après les événements de Goodyear et d’Air France, on ne peut pas dire que les choses s’arrangent ; au contraire, le chantage à l’emploi est absolument terrifiant.

Vous dites regretter que la direction de Smart n’ait pas été inquiétée, mais que faites-vous avec cet article ? Vous généralisez ces pratiques ! Selon vous, la représentation syndicale a quelque peu raison d’avoir peur, mais ce n’est pas le fond du problème. Or les syndicats ne défendent pas eux-mêmes, mais les salariés, dans un rapport de force donné !

J’en viens à l’argument de M. le rapporteur, selon qui il faudrait bien aboutir à un accord sur ce texte après quatre mois de négociations pour que des accords puissent être signés dans les entreprises. Des accords, tout d‘abord, sont déjà conclus. Ensuite, pour poursuivre dans cette logique, je souhaiterais vous poser, madame la ministre, une simple question : pourquoi, alors que votre loi est majoritairement contestée dans la rue et dans les entreprises, ne la soumettez-vous pas au référendum ?

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Noëlle Lienemann

Je voudrais d’abord répondre à Mme la ministre que, en effet, le fait que les accords soient désormais négociés et conclus par des organisations représentatives majoritaires représente une grande avancée. C’est un fait incontestable ! Cela légitime, quand il y a un accord, le fait que les organisations syndicales sont responsables ; d’ailleurs, je pense que cela changera la culture de tous, du patronat comme des organisations syndicales.

Quant à la question référendaire, elle arrive, comme vous le dites très justement, madame la ministre, en écho à l’article 2. Nous contestons l’article 2, parce que nous pensons qu’il déroge à la hiérarchie des normes. Quand vous nous répondez à ce propos, vous nous dites qu’il faut avoir confiance dans les organisations syndicales, qui seront formées et aptes à aboutir à un équilibre entre l’entreprise et l’intérêt général. Or M. le rapporteur nous dit à présent que ce sera difficile de rassembler 50 % dans une entreprise et d’obtenir ainsi un accord, alors même qu’on veut justement par ce texte encourager une culture de l’accord. Dès lors, plutôt que de pousser les organisations à créer du consensus par l’accord, vous leur proposez une stratégie de fuite : la possibilité d’un référendum à partir de 30 %.

Je sais bien qu’on peut faire confiance au référendum, mais j’observe que cette confiance est à géométrie variable en fonction des sujets…

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Noëlle Lienemann

Surtout, comme je l’ai expliqué, il s’agit non pas d’un référendum de tout le peuple, mais d’une consultation des seuls salariés, qui peuvent avoir, au sein de la même entreprise, des intérêts contradictoires, par exemple entre les cadres et les ouvriers. L’un des points forts des organisations syndicales est justement qu’elles incarnent cette synthèse et ce compromis.

En outre, si l’on considère qu’une majorité n’est pas fiable, parce qu’elle ne parvient pas à un accord, il ne faudra pas vous étonner que certains de nos concitoyens appellent au référendum révocatoire. Selon cette perspective, quand on n’est pas d’accord avec la majorité, soit parce qu’elle vote quelque chose, soit parce qu’elle ne le vote pas, on peut dire : ce n’est pas grave, renvoyons l’affaire au peuple souverain !

Cette logique consiste à mettre en cause la légitimité de la majorité de l’extérieur, par un fait plébiscitaire. Or l’histoire nous a montré que, chaque fois qu’on mettait le doigt dans cet engrenage, cela ne structurait pas les corps intermédiaires pour produire du consensus ou, à défaut, des compromis positifs ; cela ne faisait qu’irriter des colères et du populisme. Par conséquent, comme la majorité des organisations syndicales, j’estime que ce mécanisme de référendum n’est pas nécessaire, même suivant la logique qui est la vôtre dans l’article 2 ; en outre, il est selon moi dangereux dès lors qu’il permet de remettre en cause la hiérarchie des normes.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à Mme Nicole Bricq, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bricq

Mme Nicole Bricq. Une démarche démocratique, c’est d’essayer de comprendre l’argumentation adverse. Par conséquent, je vous écoute, mes chers collègues : vous ne voulez pas du référendum. Il faut alors que vous m’expliquiez comment vous défendez la nécessité d’écouter la rue. En effet, nous sommes dans un État de droit, muni de représentations démocratiques ; si nous sommes ici, ce n’est pas pour faire de la figuration : on pourrait sinon faire autre chose de plus agréable par ces journées pluvieuses. Vous voulez qu’on écoute la rue, mais vous ne voulez pas qu’on écoute les salariés !

Exclamations sur les travées du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bricq

Mme Nicole Bricq. C’est quand même extraordinaire ! C’est la moindre des choses que, face au refus de 50 %, un syndicat signataire puisse demander que l’on écoute la voix des salariés. Cela concerne le temps de travail, c’est-à-dire la vie de tous les jours. Il est quand même normal de donner la parole aux salariés, qui sont concernés directement dans leur entreprise, de même que leurs familles. Il s’agit en effet de sujets très importants : les temps de pause, les congés, ou encore la durée hebdomadaire ou annuelle du travail. Voilà ce que nous défendons. Je n’arrive pas à comprendre : oui à la rue mais non aux salariés, telle est votre position !

Mêmes mouvements sur les mêmes travées.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à M. Gérard Longuet, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Longuet

Madame le ministre, je n’avais pas l’intention d’intervenir avant de vous entendre citer longuement le cas de l’entreprise Smart.

Il y a une vingtaine d’années, j’ai eu, en tant que président du conseil régional de Lorraine, la possibilité d’orienter vers Hambach l’installation de l’usine Smart du groupe Daimler-Benz. Il s’agissait là d’une idée de l’ingénieur Hayek, qu’il ne faut pas confondre avec le professeur Hayek.

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Longuet

Depuis vingt ans, cette usine est régulièrement en compétition avec l’ensemble des unités du groupe Daimler-Benz pour obtenir le droit de fabriquer des automobiles en France. À de rares exceptions, elle obtient gain de cause.

Or les discussions entre les responsables de l’entreprise et les salariés ne se résument pas, hélas ! à un face-à-face entre des patrons pleins de bonne volonté et des salariés pleins de bonne volonté. L’enjeu des négociations, c’est également la survie de l’entreprise dans un environnement concurrentiel.

Ce contexte se définit non seulement par le nombre de parts de marché que l’entreprise peut garder ou perdre, mais aussi par la place de l’unité de production au sein d’un groupe mondialisé très puissant : le chiffre d’affaires de Daimler-Benz est certes inférieur au PIB français, mais pas tant que cela.

À cet égard, le référendum tel que le propose M. le rapporteur est totalement pertinent. Il permettra de faire appel au bon sens de l’ensemble des salariés.

Je conçois qu’au sein d’une unité de production, les opérateurs, pour employer la sémantique à la mode, soient attachés à défendre leurs intérêts au plus juste. À court terme, ils n’ont pas nécessairement le même point de vue que les cadres : ces derniers travaillent en général au-delà de la durée légale, car ils sont animés par la passion de leur entreprise.

Cela étant, l’intérêt collectif de l’entreprise entre également en ligne de compte : dès lors que l’employeur, ou que des syndicats signataires minoritaires recourent au référendum, c’est au nom d’une conscience solide de l’intérêt collectif. Ce dernier va au-delà des divisions syndicales, lesquelles sont par définition provisoires et ne reflètent pas toujours des préoccupations de très long terme.

Voilà pourquoi je voulais revenir sur l’exemple de l’entreprise Smart, dont la direction et les salariés se sont montrés responsables. Plus largement, je tenais à prendre position pour la rédaction élaborée par la commission.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à Mme Catherine Deroche, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Deroche

En écoutant ces discussions, je me revois un an en arrière : le Sénat débattait du projet de loi Macron. Nous défendions déjà le référendum des salariés pour le travail du dimanche.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bricq

La question, c’est l’initiative laissée à l’employeur !

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Deroche

Pour notre part, nous sommes constants. Parallèlement, je constate que Mme Bricq évolue, …

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Deroche

Mme Catherine Deroche. … et je ne peux que m’en réjouir, même si cela doit désespérer M. Desessard !

Sourires sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à Mme Éliane Assassi, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Éliane Assassi

Mes chers collègues, je le répète, cet article a toute son importance et mérite une discussion de nature politique, au bon sens du terme.

À cet égard, j’insiste : au sein d’une entreprise, un tel référendum revient à opposer les salariés entre eux. En effet, il permet d’exercer des pressions directes sur ces derniers. C’est un outil parfait pour faire du chantage à l’emploi. Laurence Cohen l’a bien indiqué, pour les salariés, il se résumera à un ultimatum du type : « Si vous ne validez pas l’accord, nous licencions. »

Or la représentation syndicale a notamment pour but d’éviter une confrontation directe entre l’employeur et les salariés et c’est bien évidemment cette conception que nous défendons !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Baptiste Lemoyne

Mes chers collègues, le référendum et la consultation des salariés ne sont pas une nouveauté : ils ont déjà cours au sein des entreprises. Je le rappelle sous le contrôle de Jean-Marc Gabouty : l’intéressement et la participation sont des matières qui s’y prêtent et qui sont déjà prévues par le code du travail.

Les syndicats organisent également des consultations de manière informelle. Régulièrement, avant de signer un accord, ils reviennent vers leur base pour demander son avis. Mais, pour ma part, je préfère que la consultation soit effectuée dans les urnes qu’à main levée.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Baptiste Lemoyne

Ainsi, le vote reflétera un peu mieux la réalité.

On nous reproche de vouloir court-circuiter les syndicats, mais il me semble que l’un des grands défis qui s’imposent dans la sphère sociale comme dans la sphère politique est la conciliation de la démocratie représentative avec la démocratie participative.

Voilà plusieurs années que l’on nous vante les mérites des méthodes participatives. Elles seraient pertinentes pour élaborer le budget à Porto Alegre, mais non pour prendre des décisions à l’échelle humaine au sein de l’entreprise ?

Debut de section - PermalienPhoto de Éliane Assassi

Et le référendum de 2005, vous ne vous en souvenez plus ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Baptiste Lemoyne

En réalité, il ne faut pas accabler le référendum. Il ne mérite ni cet excès d’honneur ni cette indignité ! Au demeurant, je ne crois pas qu’il sera employé ad nauseam, tous les quatre matins.

Debut de section - Permalien
Myriam El Khomri, ministre

Bien sûr !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Baptiste Lemoyne

Pour y recourir, le droit d’opposition devra s’être manifesté. Puis, les organisations signataires, ou encore, dans la rédaction élaborée par la commission, l’employeur, devront solliciter la consultation.

À ce titre, je précise que nous avons souhaité étendre cette faculté à l’employeur par parallélisme des formes. Dès lors que deux parties négocient, il faut bien que l’une et l’autre puissent dénouer les oppositions.

Protestations sur les travées du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Cohen

Mais les deux parties ne sont pas à égalité !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Baptiste Lemoyne

Certes, mais elles participent toutes les deux à la négociation. Nous avons donc tenu à rétablir une forme de symétrie.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Brigitte Gonthier-Maurin

Monsieur le rapporteur, dans cette affaire, vous ignorez une dimension essentielle et évidente : organiser directement un référendum, …

Debut de section - PermalienPhoto de Brigitte Gonthier-Maurin

… c’est placer le ou les salariés face au patron, en ignorant le lien de subordination qui existe entre eux.

De surcroît, celui qui maîtrise la rédaction de la question joue un rôle de maître d’œuvre dans l’organisation du référendum.

Debut de section - PermalienPhoto de Brigitte Gonthier-Maurin

Enfin, j’attire votre attention sur le danger que représente la négation de la spécificité des institutions représentatives du personnel. Bien souvent, ces dernières aident à la compréhension du dialogue et à la négociation. En supprimant ce filtre, on laissera monter des colères susceptibles d’entraîner de graves conséquences.

Aussi, il ne faut pas opposer la démocratie représentative et la démocratie directe : il faut construire un dispositif équilibré en articulant intelligemment l’une et l’autre.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Je mets aux voix l’amendement n° 49.

J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe CRC.

Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

Le scrutin a lieu.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

Il est procédé au dépouillement du scrutin.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 335 :

Le Sénat n’a pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 891 rectifié, présenté par MM. Collombat, Amiel, Bertrand et Guérini et Mmes Jouve et Malherbe, n’est pas soutenu.

L’amendement n° 958, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

I. – Le titre III du livre II de la deuxième partie du code du travail est ainsi modifié :

1° L’article L. 2232-12 est ainsi modifié :

a) Le premier alinéa est ainsi modifié :

– au début, les mots : « La validité d’un accord d’entreprise ou d’établissement » sont remplacés par les mots : « I. – La validité d’un accord d’entreprise ou d’établissement portant sur la durée du travail, les repos et les congés ou d’un accord mentionné à l’article L. 2254-2 » ;

– après le mot : « par », sont insérés les mots : «, d’une part, l’employeur ou son représentant et, d’autre part, » ;

– les mots : « au moins 30 % » sont remplacés par les mots : « plus de 50 % » ;

– après la première occurrence du mot : « exprimés », sont insérés les mots : « en faveur d’organisations représentatives » ;

– à la fin, les mots : «, et à l’absence d’opposition d’une ou de plusieurs organisations syndicales de salariés représentatives ayant recueilli la majorité des suffrages exprimés à ces mêmes élections, quel que soit le nombre de votants » sont supprimés ;

b) Le second alinéa est remplacé par sept alinéas ainsi rédigés :

« Si cette condition n’est pas remplie et si l’accord a été signé à la fois par l’employeur et par des organisations syndicales représentatives ayant recueilli plus de 30 % des suffrages exprimés en faveur d’organisations représentatives au premier tour des élections mentionnées au premier alinéa, quel que soit le nombre de votants, une ou plusieurs de ces organisations ayant recueilli plus de 30 % des suffrages disposent d’un délai d’un mois pour indiquer qu’elles souhaitent une consultation des salariés visant à valider l’accord.

« Si, à l’issue d’un délai de huit jours à compter de cette demande, les éventuelles signatures d’autres organisations syndicales représentatives n’ont pas permis d’atteindre le taux de 50 % mentionné au premier alinéa et que les conditions mentionnées au deuxième alinéa sont toujours remplies, cette consultation est organisée dans un délai maximal de deux mois.

« La consultation des salariés, qui peut être organisée par voie électronique, se déroule dans le respect des principes généraux du droit électoral et selon les modalités prévues par un protocole spécifique conclu entre l’employeur et les organisations qui ont demandé la consultation.

« Participent à la consultation les salariés des établissements couverts par l’accord et les électeurs au sens des articles L. 2314-15 et L. 2314-17 à L. 2314-18-1.

« L’accord est valide s’il est approuvé par les salariés à la majorité des suffrages exprimés.

« Faute d’approbation, l’accord est réputé non écrit.

« Un décret définit les conditions de la consultation des salariés dans le cadre du présent article. » ;

c) Il est ajouté un II ainsi rédigé :

« II. – La validité des autres accords d’entreprise ou d’établissement est subordonnée aux règles définies au présent article, dans sa rédaction antérieure à la loi n° … du … visant à instituer de nouvelles libertés et de nouvelles protections pour les entreprises et les actif-ve-s. » ;

2° L’article L. 2232-13 est ainsi modifié :

a) Le second alinéa est ainsi modifié :

– après le mot : « par », sont insérés les mots : «, d’une part, l’employeur ou son représentant et, d’autre part, » ;

– les mots : « au moins 30 % » sont remplacés par les mots : « plus de 50 % » ;

– après la première occurrence du mot : « exprimés », sont insérés les mots : « en faveur d’organisations représentatives » ;

– à la fin, les mots : «, et à l’absence d’opposition d’une ou de plusieurs organisations syndicales de salariés représentatives ayant recueilli la majorité des suffrages exprimés à ces mêmes élections, quel que soit le nombre de votants » sont supprimés ;

b) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« Les règles de validité de la convention ou de l’accord sont celles prévues à l’article L. 2232-12. Les taux de 30 % et de 50 % mentionnés au même article sont appréciés à l’échelle du collège électoral. La consultation des salariés, le cas échéant, est également effectuée à cette échelle. » ;

3° L’article L. 2231-7 est abrogé ;

II. – Au premier alinéa de l’article L. 2242-20 du même code, les mots : « signé par une ou plusieurs organisations syndicales de salariés représentatives ayant recueilli plus de 50 % des suffrages exprimés en faveur d’organisations représentatives au premier tour des élections des titulaires au comité d’entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel, quel que soit le nombre de votants, » sont supprimés.

III. – Au premier alinéa de l’article L. 2391-1 du même code, les mots : « signé par une ou plusieurs organisations syndicales de salariés représentatives ayant recueilli plus de 50 % des suffrages exprimés, quel que soit le nombre de votants, en faveur d’organisations représentatives au premier tour des élections des titulaires au comité d’entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel » sont supprimés.

IV. – L’article L. 7111-9 du même code est ainsi modifié :

1° A Après le mot : « par », sont insérés les mots : «, d’une part, l’employeur ou son représentant et, d’autre part, » ;

1° Les mots : « au moins 30 % » sont remplacés par les mots : « plus de 50 % » ;

2° Après la première occurrence du mot : « exprimés », sont insérés les mots : « en faveur d’organisations représentatives » ;

2° bis Après le mot : « personnel », sont insérés les mots : « ou, à défaut, des délégués du personnel » ;

3° À la fin, les mots : «, et à l’absence d’opposition d’une ou de plusieurs organisations syndicales de salariés représentatives ayant recueilli la majorité des suffrages exprimés dans ce collège à ces élections, quel que soit le nombre de votants » sont supprimés ;

4° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« Les règles de sa validité sont celles prévues à l’article L. 2232-12. Les taux de 30 % et de 50 % mentionnés au même article sont appréciés à l’échelle du collège des journalistes. »

IV bis. – Le V de l’article L. 4312-3-2 du code des transports est ainsi modifié :

1° Le premier alinéa est ainsi modifié :

a) La première phrase est ainsi modifiée :

– après les mots : « code du travail », sont insérés les mots : « qui portent sur la durée du travail, les repos et les congés ou celle des accords mentionnés à l’article L. 2254-2 du même code » ;

– après le mot : « par », sont insérés les mots : «, d’une part, l’employeur ou son représentant et, d’autre part, » ;

– les mots : « au moins 30 % » sont remplacés par les mots : « plus de 50 % » ;

– après la première occurrence du mot : « exprimés », sont insérés les mots : « en faveur d’organisations représentatives » ;

– à la fin, les mots : « et à l’absence d’opposition d’une ou plusieurs organisations syndicales représentatives ayant recueilli au moins la majorité des suffrages exprimés à ces mêmes élections » sont supprimés ;

b) La seconde phrase est supprimée ;

c) Sont ajoutées deux phrases ainsi rédigées :

« Les règles de validité de ces accords sont celles prévues à l’article L. 2232-12 du code du travail. Les taux de 30 % et de 50 % mentionnés au même article sont appréciés à l’échelle du collège des salariés mentionnés au 4° de l’article L. 4312-3-1 du présent code. » ;

2° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« La validité des autres accords collectifs de travail concernant les salariés mentionnés au 4° de l’article L. 4312-3-1 du présent code est subordonnée aux règles définies à l’article L. 2232-12 du code du travail, dans sa rédaction antérieure à la loi n° … du … visant à instituer de nouvelles libertés et de nouvelles protections pour les entreprises et les actif-ve-s. »

V. – L’article L. 6524-4 du code des transports est ainsi modifié :

1° À la fin, les mots : «, appréciée dans ce collège » sont supprimés ;

2° Est ajoutée une phrase ainsi rédigée :

« Les taux de 30 % et de 50 % mentionnés au même article sont appréciés à l’échelle de ce collège. »

V bis. – L’article L. 514-3-1 du code rural et de la pêche maritime est ainsi modifié :

1° Au début du premier alinéa, est ajoutée la mention : « I. – » ;

2° Il est ajouté un II ainsi rédigé :

« II. – La convention ou les accords d’établissement sont négociés entre l’employeur et les organisations syndicales de salariés représentatives dans l’établissement.

« La validité d’un accord d’établissement est subordonnée à sa signature par, d’une part, l’employeur ou son représentant et, d’autre part, une ou plusieurs organisations syndicales de salariés représentatives ayant recueilli plus de 50 % des suffrages exprimés en faveur d’organisations représentatives au premier tour des dernières élections des titulaires au comité d’entreprise ou de la délégation unique du personnel ou, à défaut, des délégués du personnel, quel que soit le nombre de votants.

« Si cette condition n’est pas remplie et que l’accord a été signé à la fois par l’employeur et par des organisations syndicales représentatives ayant recueilli plus de 30 % des suffrages exprimés en faveur d’organisations représentatives au premier tour des élections mentionnées au deuxième alinéa du présent II, quel que soit le nombre de votants, une ou plusieurs de ces organisations ayant recueilli plus de 30 % des suffrages disposent d’un délai d’un mois pour indiquer qu’elles souhaitent une consultation des salariés visant à valider l’accord.

« Si, à l’issue d’un délai de huit jours à compter de cette demande, les éventuelles signatures d’autres organisations syndicales représentatives n’ont pas permis d’atteindre le taux de 50 % mentionné au deuxième alinéa du présent II et que les conditions mentionnées au troisième alinéa du présent II sont toujours remplies, cette consultation est organisée dans un délai de deux mois.

« La consultation des salariés, qui peut être organisée par voie électronique, se déroule dans le respect des principes généraux du droit électoral et selon les modalités prévues par un protocole spécifique conclu entre l’employeur et les organisations qui ont demandé la consultation.

« Participent à la consultation les salariés des établissements couverts par l’accord et électeurs au sens des articles L. 2314-15 et L. 2314-17 à L. 2314-18-1.

« L’accord est valide s’il est approuvé par les salariés à la majorité des suffrages exprimés.

« Faute d’approbation, l’accord est réputé non écrit.

« Les conditions d’application du présent II sont identiques à celles prévues pour l’application de l’article L. 2232-12 du code du travail.

« Les conventions ou accords régionaux sont négociés et conclus entre :

« 1° D’une part, le président de la chambre régionale ou un ou plusieurs représentants, mandatés à cet effet, des employeurs des établissements du réseau relevant du champ d’application de la convention ou de l’accord ;

« 2° D’autre part, les organisations syndicales de salariés représentatives au niveau régional ou dans l’ensemble des établissements du réseau relevant du champ d’application de la convention ou de l’accord.

« La validité d’un accord au niveau régional est subordonnée à sa signature par une ou plusieurs organisations syndicales de salariés représentatives ayant recueilli, aux élections prises en compte pour la mesure de l’audience, au moins 30 % des suffrages exprimés, quel que soit le nombre de votants, et à l’absence d’opposition d’une ou de plusieurs organisations syndicales de salariés représentatives ayant recueilli la majorité des suffrages exprimés à ces mêmes élections, quel que soit le nombre de votants.

« Les conventions ou accords nationaux sont négociés et conclus entre :

« a) D’une part, le président de l’Assemblée permanente des chambres d’agriculture ou un ou plusieurs représentants, mandatés à cet effet, des employeurs des établissements du réseau relevant du champ d’application de la convention ou de l’accord ;

« b) D’autre part, les organisations syndicales de salariés représentatives au niveau national.

« La validité d’un accord national est subordonnée à sa signature par une ou plusieurs organisations syndicales de salariés représentatives ayant recueilli, aux élections prises en compte pour la mesure de l’audience, au moins 30 % des suffrages exprimés en faveur d’organisations reconnues représentatives au niveau national, quel que soit le nombre de votants, et à l’absence d’opposition d’une ou plusieurs organisations syndicales de salariés représentatives ayant recueilli la majorité des suffrages exprimés en faveur des organisations représentatives à ces mêmes élections, quel que soit le nombre de votants. »

V ter. – Le II de l’article L. 1432-11 du code de la santé publique est ainsi modifié :

1° Le deuxième alinéa est ainsi modifié :

a) À la première phrase, après le mot : « code, », sont insérés les mots : « qui portent sur la durée du travail, les repos et les congés » et les mots : « au moins 30 % » sont remplacés par les mots : « plus de 50 % » ;

b) À la fin de la première phrase, les mots : « et à l’absence d’opposition d’une ou plusieurs organisations syndicales représentatives ayant recueilli au moins la majorité des suffrages exprimés à ces mêmes élections » sont supprimés ;

c) La seconde phrase est supprimée ;

2° Après le deuxième alinéa, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :

« Les règles de validité de ces accords sont celles prévues à l’article L. 2232-12 du même code. Les taux de 30 % et de 50 % mentionnés au même article sont appréciés à l’échelle des deux collèges de personnel mentionnés aux 1° et 2° du 1 du I du présent article.

« La validité des autres accords collectifs de travail prévus au livre II de la deuxième partie du code du travail est subordonnée aux règles définies à l’article L. 2232-12 du même code, dans sa rédaction antérieure à la loi n° … du … visant à instituer de nouvelles libertés et de nouvelles protections pour les entreprises et les actif-ve-s. » ;

3° Au troisième alinéa, les références : « deux alinéas précédents » sont remplacées par les références : « quatre premiers alinéas du présent II » et, à la fin, les références : « aux 1° et 2° du 1 du I du présent article » sont remplacées par la référence : « au troisième alinéa du présent II ».

VI. – A. – Le présent article s’applique à compter du 1er janvier 2017 aux accords collectifs qui portent sur la durée du travail, les repos et les congés et, dès la publication de la présente loi, aux accords mentionnés à l’article L. 2254-2 du code du travail. Il s’applique à compter du 1er septembre 2019 aux autres accords collectifs, à l’exception de ceux mentionnés à l’article L. 5125-1 du code du travail.

B. – Le Gouvernement remet au Parlement, au plus tard au 31 décembre 2018, un rapport faisant le bilan de la mise en œuvre des nouvelles règles de validité des accords conclus au niveau de l’entreprise définies au présent article, notamment celles relatives à la consultation des salariés.

Ce rapport est établi après concertation avec les organisations syndicales de salariés et les organisations professionnelles d’employeurs représentatives, après avis de la Commission nationale de la négociation collective.

La parole est à Mme la ministre.

Debut de section - Permalien
Myriam El Khomri, ministre

Le présent amendement vise à rétablir l’article 10 dans sa rédaction issue de l’Assemblée nationale.

Dans un premier temps, le principe majoritaire s’appliquera à l’ensemble des accords relatifs à la durée du travail, aux congés et aux repos, ainsi qu’aux accords visant à développer l’emploi.

Dans un second temps, ce principe sera généralisé, à compter de 2019 au plus tard. Dans le cadre du débat à l’Assemblée nationale, le Gouvernement a accepté de consacrer, en 2018, un bilan intermédiaire à la mise en œuvre de cette mesure.

En outre, cet amendement a pour objet la consultation des salariés, dont il vient d’être question. Il tend à laisser cette procédure à la main des organisations syndicales, à condition qu’elles représentent au minimum 30 % des suffrages exprimés.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Baptiste Lemoyne

La commission réaffirme son attachement à la rédaction qu’elle a élaborée le 1er juin dernier. Je n’en dirai pas davantage, étant donné que nous venons de débattre longuement de ces questions.

J’émets, au nom de la commission, un avis défavorable sur cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Brigitte Gonthier-Maurin

Madame la ministre, nous avons exposé de nombreux arguments pour tenter de vous expliquer en quoi il nous paraît dangereux de saper les fondements de la représentation syndicale.

D’ailleurs, c’est à la suite d’une visite précipitée de M. Bompard, président-directeur général de la Fnac, que vous avez annoncé l’inscription du référendum d’entreprise dans ce projet de loi…

Initialement, le présent texte indiquait que les accords signés par les syndicats dont l’audience est comprise entre 30 % et 50 % des voix pouvaient être soumis à référendum.

La droite sénatoriale a encore étendu cette possibilité, qui nie la représentativité des syndicats majoritaires tout en reconnaissant celle des organisations minoritaires et, ainsi, donne l’illusion d’un système plus démocratique. En réalité, voter l’instauration d’un tel référendum consiste à approuver un recul social.

À l’heure actuelle, n’importe quel employeur peut, de manière unilatérale, modifier en mieux – entendez bien ces deux mots ! – les conditions de travail et de rémunération.

Debut de section - PermalienPhoto de Brigitte Gonthier-Maurin

En revanche, les employeurs sont obligés de passer par un accord pour durcir les accords sociaux.

Bref, cette proposition aboutit à entériner des reculs sociaux. Nous ne sommes pas naïfs ! L’expérience montre que, pris individuellement, les salariés acceptent plus facilement les régressions sociales que les organisations syndicales, lesquelles ont l’habitude des tactiques patronales visant à réduire les droits des salariés.

Au demeurant, à ma connaissance, tous les référendums qui ont eu lieu jusqu’à présent étaient destinés à répondre aux revendications patronales !

Franchement, comment peut-on ignorer ce lien de subordination ?

Mme Laurence Cohen applaudit.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à M. Gérard Roche, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Roche

Mes chers collègues, au fur et à mesure que le débat avance, nous entendons peu ou prou les mêmes arguments…

Je tenais toutefois à opérer quelques mises au point.

Premièrement, je rappelle que la règle des 50 % reste la pierre angulaire de toute vie démocratique.

Deuxièmement, j’ai été très sensible aux propos que Mme Bricq, MM. Guillaume et Lemoyne ont consacrés au référendum d’entreprise. Il s’agit bien de trouver un compromis entre la démocratie représentative et la démocratie participative. À cet égard, je crois que nous sommes tous d’accord.

Cela étant, il faut tenir compte du contexte : la France est déchirée. D’aucuns considèrent ce projet de loi comme une dérive libérale sur le plan économique. Plus largement, certains syndicats refusent de franchir le pas de la réforme et s’en tiennent à des positions très dures.

Il faudra bien sortir de cette crise ! Le Gouvernement souhaite étendre aux syndicats disposant d’une représentativité de 30 % le droit de demander un référendum. En outre, avec un tel amendement, cette procédure ne serait pas engagée sur l’initiative du patronat. Il s’agit là d’un compromis susceptible de débloquer la situation : les uns et les autres doivent avoir des billes pour négocier.

Même si tel n’est pas l’avis de la majorité du groupe UDI-UC, je soutiens l’amendement du Gouvernement à titre personnel. À mon sens, cette solution est à même de favoriser les négociations au cours des jours à venir et, partant, de nous aider à sortir de la crise.

Debut de section - Permalien
Myriam El Khomri, ministre

Mesdames, messieurs les sénateurs, que la position du Gouvernement soit bien claire : doivent s’appliquer ou bien le principe majoritaire, ou bien, sur un accord négocié en amont, la consultation des salariés à la seule main des organisations syndicales représentant plus de 30 % des votants.

De plus, je ne tolère pas la manière dont certains analysent mon agenda public.

Je me suis bien entretenue avec M. Bompard, président-directeur général de la Fnac, comme je rencontre des représentants d’organisations syndicales, comme je reçois d’autres employeurs, d’autres représentants des entreprises. Mais un axe de travail n’est pas inventé le jour où il sort dans la presse !

Debut de section - PermalienPhoto de Éliane Assassi

Eh bien, plaignez-vous à la presse elle-même !

Debut de section - Permalien
Myriam El Khomri, ministre

Avec M. Bompard, je n’ai à aucun moment évoqué le présent projet de loi en général ou ce mode de consultation des salariés en particulier.

Debut de section - Permalien
Myriam El Khomri, ministre

Mme Myriam El Khomri, ministre. Cette mesure, que j’assume à 200 %, ne m’a en aucun cas été soufflée par M. Bompard : elle est le fruit d’un travail que j’ai mené avec mes services, au fil des contacts que nous avons eus avec les organisations syndicales, en tout cas avec celles qui acceptent de se rendre à la table des négociations !

Applaudissementssur de nombreuses travées du groupe socialiste et républicain. – Mme Catherine Deroche et M. Robert del Picchia applaudissent également.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Je mets aux voix l’amendement n° 958.

J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant de la commission.

Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

Le scrutin a lieu.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

Il est procédé au dépouillement du scrutin.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 336 :

Le Sénat n’a pas adopté.

Je suis saisi de huit amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 935 rectifié, présenté par Mme Laborde, M. Bertrand et Mmes Jouve et Malherbe, est ainsi libellé :

Alinéa 3

Remplacer les mots :

au moins 30 %

par les mots :

plus de 50 %

La parole est à Mme Françoise Laborde.

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Laborde

Estimant qu’un seuil de 50 % risquait de bloquer le dialogue social dans de nombreuses entreprises, la commission a opté pour le seuil de 30 %.

Mes chers collègues, pour ma part, je suis contre cette modification. Il était temps que je vous le dise ! §Aussi, je vous propose par cet amendement de revenir à un seuil de 50 %.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

L’amendement n° 641, présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David, Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 3

Remplacer le taux :

par le taux :

II. – Alinéas 5 à 11

Supprimer ces alinéas.

La parole est à M. Dominique Watrin.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Watrin

Avec cet amendement, nous espérons conserver dans le présent texte ce que nous considérons comme une avancée, tout en supprimant ce qui, en parallèle, nous apparaît comme un recul inacceptable.

D’une part, nous l’avons expliqué, nous sommes favorables aux accords majoritaires à 50 %. Mais, en commission, la droite a abaissé ce seuil à 30 %.

D’autre part, nous sommes opposés au référendum d’entreprise sous la forme qui nous est proposée : je le répète, tel qu’elle est conçue, cette procédure serait une voie ouverte au contournement des organisations syndicales. Sous couvert de démocratie, elle donnerait aux organisations syndicales minoritaires une place et une légitimité ne reflétant pas les suffrages exprimés aux élections professionnelles. Surtout, elle serait clairement le moyen de faire passer en force des accords rejetés par les syndicats représentant la majorité des salariés.

Enfin, je rappelle que les entreprises ne sont pas des lieux neutres, sans enjeux de domination, de rivalité voire de chantage, en particulier de chantage à l’emploi. Un référendum au sein d’une entreprise est nécessairement empreint de ces réalités, d’autant plus sur des sujets aussi délicats que l’emploi et dans le contexte de crise particulièrement vive que nous connaissons.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Les deux amendements suivants sont identiques.

L’amendement n° 205 rectifié est présenté par MM. Labazée, Durain, Godefroy, Cabanel et Gorce, Mmes Jourda et Lienemann, M. Montaugé, Mme Bonnefoy, M. Duran, Mme Ghali, M. Néri et Mmes Monier et Guillemot.

L’amendement n° 436 est présenté par M. Desessard, Mmes Archimbaud, Benbassa, Blandin et Bouchoux et MM. Dantec, Gattolin, Labbé et Poher.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Alinéas 5 à 11

Supprimer ces alinéas.

La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour présenter l’amendement n° 205 rectifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Noëlle Lienemann

Nous avons déjà largement débattu de ces questions.

Premièrement, nous refusons par principe le référendum tel qu’il est défini par le présent article : dès lors que 30 % des organisations syndicales peuvent engager cette procédure, l’état d’esprit de la négociation change sensiblement. Ce seuil ne nous paraît pas acceptable.

Deuxièmement, la commission a aggravé ce dispositif en instituant l’initiative patronale.

Voilà pourquoi nous proposons la suppression des alinéas 5 à 11 de l’article 10.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à M. Jean Desessard, pour présenter l’amendement n° 436.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

Pour la signature des accords d’entreprise, la commission a abaissé le seuil de représentation syndicale à 30 %.

Parallèlement, pour s’opposer à ces accords, il faut réunir des syndicats représentant au moins 50° % des salariés.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

Bref, s’il n’y a pas d’opposition, 30 % des syndicats suffisent ; et, dans le cas contraire, l’employeur a la possibilité d’organiser un référendum. C’est contre ce dispositif que nous avons déposé le présent amendement !

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

L’amendement n° 349, présenté par Mme Bricq, MM. Guillaume et Caffet, Mmes Campion et Claireaux, MM. Daudigny et Durain, Mmes Emery-Dumas, Féret et Génisson, MM. Godefroy, Jeansannetas et Labazée, Mmes Meunier, Riocreux et Schillinger, MM. Tourenne et Vergoz, Mme Yonnet et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Alinéas 5 à 11

Rédiger ainsi ces alinéas :

« Si cette condition n’est pas remplie et si l’accord a été signé à la fois par l’employeur et par des organisations syndicales représentatives ayant recueilli plus de 30 % des suffrages exprimés en faveur d’organisations représentatives au premier tour des élections mentionnées au premier alinéa, quel que soit le nombre de votants, une ou plusieurs de ces organisations ayant recueilli plus de 30 % des suffrages disposent d’un délai d’un mois pour indiquer qu’elles souhaitent une consultation des salariés visant à valider l’accord.

« Si, à l’issue d’un délai de huit jours à compter de cette demande, les éventuelles signatures d’autres organisations syndicales représentatives n’ont pas permis d’atteindre le taux de 50 % mentionné au premier alinéa et si les conditions mentionnées au deuxième alinéa sont toujours remplies, cette consultation est organisée dans un délai maximal de deux mois.

« La consultation des salariés, qui peut être organisée par voie électronique, se déroule dans le respect des principes généraux du droit électoral et selon les modalités prévues par un protocole spécifique conclu entre l’employeur et les organisations signataires.

« Participent à la consultation les salariés des établissements couverts par l’accord et électeurs au sens des articles L. 2314-15 et L. 2314-17 à L. 2314-18-1.

« L’accord est valide s’il est approuvé par les salariés à la majorité des suffrages exprimés.

« Faute d’approbation, l’accord est réputé non écrit.

« Un décret définit les conditions de la consultation des salariés dans le cadre du présent article. »

La parole est à Mme Nicole Bricq.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bricq

Étant donné que l’amendement n° 958, présenté par le Gouvernement, a été rejeté, nous proposons cet amendement de repli. Tout syndicat signataire d’un accord et pesant plus de 30 % doit pouvoir organiser un référendum d’entreprise !

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

L’amendement n° 642, présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David, Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Alinéa 5

Remplacer les mots :

une ou plusieurs des organisations signataires du projet d’accord

par les mots :

l’ensemble des organisations syndicales de salariés représentées

La parole est à M. Dominique Watrin.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Watrin

Il s’agit là aussi d’un amendement de repli, qui tend à élargir l’initiative référendaire dans l’entreprise à l’ensemble des organisations syndicales représentées.

Ainsi, le référendum ne sera plus réservé aux organisations minoritaires, et l’on évitera les risques que nous avons relevés : ceux du contournement et du passage en force d’un accord.

Selon leur détermination et leur volonté, tous les syndicats pourront, sans exception, faire appel à la consultation des salariés.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

L’amendement n° 1018, présenté par MM. Lemoyne, Gabouty et Forissier, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Alinéa 7

Remplacer les mots :

ayant souhaité la consultation

par le mot :

signataires

La parole est à M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Baptiste Lemoyne

Cet amendement tend à préciser le mode d’élaboration du protocole spécifique qui doit être conclu en vue de la consultation. À cette fin, nous proposons de viser non les organisations « ayant souhaité la consultation », mais les organisations « signataires ». Ainsi, nous élargissons l’ensemble considéré.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

L’amendement n° 643, présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David, Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :

« Dans le cadre de ces accords collectifs et suivant les mêmes modalités, les salariés sont consultés sur le montant de rémunération de la direction de l’entreprise et sur le niveau de versement de dividendes aux actionnaires, quand l’entreprise pratique ce mode de rémunération. Cette consultation des salariés conditionne l’application de l’accord collectif dans sa globalité. »

La parole est à Mme Annie David.

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

Cet amendement apparaîtra peut-être comme une provocation…

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

Vous l’aurez compris, nous ne sommes pas favorables au référendum d’entreprise, …

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

… je n’y reviendrai pas.

Néanmoins, puisque référendum il doit y avoir, cet amendement tend à ce que les salariés puissent, par ce biais, s’exprimer sur davantage de sujets relatifs à la vie de l’entreprise.

On nous laisse entendre que cette procédure a pour but de développer le dialogue social. Eh bien, nous proposons de l’étendre à des points tout aussi importants que la durée du travail, les repos et les congés, en permettant, par exemple, aux salariés de se prononcer sur la stratégie suivie par leur entreprise, notamment via la rémunération de sa direction et le montant du versement des dividendes liés à telle ou telle de ses activités économiques.

Cette extension est d’autant plus justifiée que les facteurs dont il s’agit pèsent sur le tissu productif français. Les grandes entreprises augmentent les versements de dividendes au détriment de l’investissement. Elles ne privilégient pas l’investissement destiné à préparer l’avenir et à renforcer la compétitivité. Elles ne font pas primer l’emploi. Au contraire, elles donnent la priorité à la rémunération des actionnaires.

Ces dividendes massifs sont obtenus au prix de restructurations, de réductions d’effectifs tout aussi massives – j’ai en tête l’exemple de Sanofi –, ou encore de délocalisations vers des pays à bas salaires.

Dans le même mouvement, les dirigeants perçoivent des revenus obscènes. Joints aux distributions d’actions gratuites, les salaires, primes et bonus peuvent représenter jusqu’à 225 fois le SMIC !

Dès lors, pour accroître la justice, l’égalité et la citoyenneté au sein des entreprises, mais aussi pour assurer la bonne marche de ces dernières, nous proposons d’élargir le champ du référendum à l’ensemble de ces sujets. À nos yeux, ces questions sont elles aussi d’une très grande importance pour la vie des entreprises.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Baptiste Lemoyne

L’amendement n° 935 rectifié vise à rétablir le quota de 50 %. Se situant dans une logique non pas de renoncement, mais de cheminement, la commission estime préférable de procéder par palier et de maintenir les règles existantes jusqu’au 31 décembre 2018.

Avant de me faire une religion sur ce sujet – je le dis spécialement à votre attention, madame Laborde !

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Baptiste Lemoyne

Si nous voulons donner une véritable effectivité à la réforme, il nous semble important de disposer de ces données avant de nous engager sur des éléments, certes très séduisants intellectuellement, mais également très structurants.

L’amendement n° 1016 que la commission présentera tout à l’heure vise à introduire une « clause de revoyure » au 31 décembre 2018. J’incite le ministère à enrichir ces données afin que nous puissions alors légiférer en toute connaissance de cause. Nous ne pourrions légiférer aujourd’hui qu’en faisant le pari que les acteurs vont s’adapter.

À ce stade, la commission a donc émis un avis défavorable sur l’amendement n° 935 rectifié, ainsi que sur l’amendement n° 641 présenté par le groupe CRC qui vise notamment à introduire la même disposition.

Sur les amendements identiques n° 205 rectifié et 436 visant à supprimer la possibilité de consulter les salariés si un accord est frappé d’opposition, la commission a émis un avis défavorable, réaffirmant par là son attachement à la consultation.

Sur l’amendement n° 349 du groupe socialiste républicain et citoyen, elle a également émis un avis défavorable.

Concernant l’amendement n° 642, elle considère qu’il est incohérent d’étendre le droit de demander une consultation à tous les syndicats, y compris à ceux qui ne sont pas signataires de l’accord. Dans la mesure où ils n’ont pas exercé leur droit d’opposition, il ne semble pas très logique qu’ils puissent demander une consultation des salariés. La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.

Enfin, sur l’amendement n° 643 qui vise à introduire l’obligation de consulter les salariés sur les rémunérations des dirigeants de l’entreprise et le niveau de versement de dividendes aux actionnaires, la commission émet un avis défavorable.

Debut de section - Permalien
Myriam El Khomri, ministre

Le Gouvernement émet un avis favorable sur l’amendement n° 935 rectifié présenté par Mme Laborde.

Depuis la loi de 2008 portant rénovation de la démocratie sociale, le principe majoritaire est en effet ce vers quoi nous tendons. J’ai relu les débats sur le projet de loi relatif à la sécurisation de l’emploi. Personne ne croyait alors que l’on pourrait trouver des accords majoritaires sur les plans de sauvegarde de l’emploi, les PSE. Or, en un peu plus de deux ans, plus de mille décisions sont intervenues, dont 60 % sont signées à ce jour.

L’obligation de signer un accord majoritaire n’est donc pas nécessairement synonyme de blocage du dialogue social dans notre pays. Lorsqu’un accord est signé par des organisations syndicales ayant obtenu plus de 30 % des voix aux dernières élections professionnelles, cela ne veut pas dire que les non-signataires s’y opposent nécessairement. On peut même penser que, s’ils n’usent pas de leur droit à opposition, c’est qu’ils sont d’accord.

L’objectif est de changer les pratiques et d’inciter chacun à prendre ses responsabilités et je pense qu’il faut absolument passer à ce principe majoritaire.

Sur l’amendement n° 641, le Gouvernement émet un avis défavorable. Je n’y reviens pas, car nous avons déjà eu ce débat.

J’émets un avis favorable sur les amendements identiques n° 205 rectifié et 436 et sur l’amendement n° 349, et un avis défavorable sur les amendements n° 642 et 1018, ce dernier tendant à donner la possibilité à l’employeur de convoquer un référendum, ce qui n’est pas le cas dans la rédaction défendue par le Gouvernement.

Concernant l’amendement n° 643, le partage de la valeur ajoutée et l’encadrement de la rémunération des dirigeants sont de vraies questions, mais elles seront traitées dans le projet de loi relatif à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique dit Sapin II.

Par ailleurs, pourquoi ne pas proposer ces consultations sur d’autres questions tout aussi essentielles dans la vie quotidienne des salariés, comme les négociations relatives aux salaires ou aux conditions de travail ?

Debut de section - Permalien
Myriam El Khomri, ministre

Pour toutes ces raisons, le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Je mets aux voix l’amendement n° 935 rectifié.

J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant de la commission.

Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable et que celui du Gouvernement est favorable.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

Le scrutin a lieu.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

Il est procédé au dépouillement du scrutin.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 337 :

Le Sénat n’a pas adopté.

La parole est à Mme Annie David, pour explication de vote sur l’amendement n° 641.

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

J’ai dû mal entendre les avis donnés par Mme la ministre parce que, sauf erreur de ma part, l’amendement n° 641 a reçu un avis défavorable alors que son premier paragraphe a le même objet que l’amendement n° 935 rectifié visant à remplacer le taux de 30 % par un taux de 50 %, qui a reçu un avis favorable, et que son second paragraphe a le même objet que les amendements n° 205 rectifié et 436 visant à supprimer les alinéas 5 à 11, qui ont également reçu un avis favorable.

Cela ne me semble pas logique, à moins que Mme la ministre n’ait donné par réflexe un avis défavorable sur cet amendement parce qu’il est présenté par le groupe CRC ? Je sollicite donc de plus amples explications.

Debut de section - Permalien
Myriam El Khomri, ministre

Je suis en effet favorable aux dispositions que tend à introduire l’amendement n° 641, mais défavorable à son exposé des motifs. C’est également le cas pour les amendements n° 205 rectifié et 436.

J’émets donc un avis défavorable sur ces trois amendements.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

Vous ne vous êtes expliquée qu’à moitié, madame la ministre, parce qu’on ne prend pas position par rapport à un exposé des motifs ! Il aurait semblé plus logique de demander le retrait de l’amendement n° 641, par exemple au profit de l’amendement n° 349 de Mme Bricq. Toutefois, je ne crois pas que vous soyez opposée à la suppression des alinéas 5 à 11, qui ouvrent la possibilité à l’employeur d’organiser une consultation.

En effet, vous ne pouvez pas être défavorable aux amendements n° 205 rectifié et 436 sans être favorable au référendum organisé sur l’initiative de l’employeur dans les conditions prévues par l’article tel qu’il nous est soumis.

Les majorités nécessaires pour signer les accords me rappellent certains problèmes de mathématiques : est-ce que l’ensemble des ensembles qui n’appartiennent pas à un ensemble appartient à cet ensemble ? Si 30 % des salariés ont voté pour les organisations syndicales signataires d’un accord, mais que plus de 50 % des salariés exercent leur droit d’opposition à cet accord, en quoi est-ce différent d’un taux d’élection de 50 % exigé dès le départ ?

Madame la ministre, je ne trouve pas très correct de d’émettre des avis en fonction des signataires des amendements plutôt qu’en fonction des mesures qu’ils tendent à introduire. Nous demander le retrait de notre amendement au profit de celui de Mme Bricq aurait été plus clair et plus respectueux du dialogue, non pas social, mais entre les parlementaires et le Gouvernement.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Comme quoi les mathématiques sont utiles !

La parole est à Mme la ministre.

Debut de section - Permalien
Myriam El Khomri, ministre

Monsieur le sénateur, j’ai donné un avis favorable sur les amendements n° 205 rectifié et 436 parce que je suis favorable à la suppression des alinéas 5 à 11. Toutefois, compte tenu de leurs exposés des motifs – je suis sincère en le disant –, je souhaite qu’ils soient retirés, de même que l’amendement n°641, au profit de l’amendement n° 349.

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

Oui, je le maintiens, monsieur le président.

L’amendement n’est pas adopté.

Les amendements ne sont pas adoptés.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Je mets aux voix l’amendement n° 349.

J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant de la commission.

Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable et que celui du Gouvernement est favorable.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

Le scrutin a lieu.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

Il est procédé au dépouillement du scrutin.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 338 :

Le Sénat n’a pas adopté.

Je mets aux voix l’amendement n° 642.

L’amendement n’est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Je mets aux voix l’amendement n° 1018.

J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant de la commission.

Je rappelle que l’avis du Gouvernement est défavorable.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

Le scrutin a lieu.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

Il est procédé au dépouillement du scrutin.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 339 :

Le Sénat a adopté.

Je mets aux voix l’amendement n° 643.

L’amendement n’est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

L’amendement n° 1016, présenté par MM. Lemoyne, Gabouty et Forissier, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

… Au plus tard le 31 décembre 2018, le Gouvernement remet au Parlement un rapport évaluant la mise en œuvre de l’article L. 2232-12 du code du travail.

Ce rapport, établi après concertation avec les organisations syndicales de salariés et les organisations professionnelles d’employeurs représentatives au niveau national et après avis de la Commission nationale de la négociation collective, étudie également l’opportunité :

1° de subordonner la validité d’un accord collectif à sa signature par une ou plusieurs organisations syndicales de salariés représentatives ayant recueilli plus de 50 % des suffrages exprimés en faveur d’organisations représentatives au premier tour des dernières élections des titulaires au comité d’entreprise ou de la délégation unique du personnel ou, à défaut, des délégués du personnel, quel que soit le nombre de votants ;

2° d’instaurer une consultation des salariés, à la demande de l’employeur ou des organisations syndicales signataires d’un accord ayant recueilli au moins 30 % des suffrages exprimés en faveur d’organisations syndicales représentatives au premier tour des élections mentionnées au 1°, en vue d’approuver cet accord.

La parole est à M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Baptiste Lemoyne

Souhaitant favoriser un cheminement vers l’accord majoritaire, la commission a fait le choix d’en rester aux règles actuelles en matière de validité des accords dans l’article 10 : majorité d’engagement de 30 % des suffrages exprimés et droit d’opposition des syndicats majoritaires. Il s’agit de l’expression d’une majorité négative – la position commune de 2001 faisait déjà référence à la notion de majorité positive et de majorité négative –, mais le fait majoritaire existe bien.

Cet amendement vise à prévoir une clause de revoyure au 31 décembre 2018 et la remise d’un rapport. Madame la ministre, contrairement au Gouvernement, nous n’avons pas été très gourmands en matière de rapports. Compte tenu de la bénévolence de la commission, qui a toujours donné des avis favorables à vos demandes de rapport, nous espérons la même bienveillance du Gouvernement concernant cette clause de revoyure.

Permettez-moi de revenir sur votre argument concernant les plans de sauvegarde de l’emploi, les PSE, qui sont conclus avec un seuil de 50 %. Comme vous l’avez dit, les PSE aboutissent dans les deux tiers des cas, mais l’incitation à signer est forte, parce que, si les syndicats ne signent pas, l’employeur peut procéder de manière unilatérale. En outre, le PSE accorde un certain nombre de mesures qui sont de nature à accompagner le mouvement. J’estime donc que la comparaison avec le PSE n’est pas totalement valable.

Je vous prie donc de croire à notre sincérité quand nous affirmons notre volonté d’en rester aux règles actuelles pour une période transitoire.

Debut de section - Permalien
Myriam El Khomri, ministre

J’émets un avis défavorable sur cet amendement, puisqu’il tire la conséquence de la fin de la règle de l’accord majoritaire.

Sur les PSE, je rappelle qu’au moment des débats sur le projet de loi relative à la sécurisation de l’emploi tout le monde disait qu’il serait impossible d’avoir des accords à 50 % sur un sujet aussi chargé symboliquement que le licenciement. En revanche, dans l’article 10, il est question de temps de travail.

Par ailleurs, je vous rappelle que la rédaction du Gouvernement prévoit la remise d’un rapport de mise en œuvre par étapes en 2018.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Milon

La commission retire sa demande de scrutin public pour le vote de cet amendement.

L’amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Je mets aux voix l’article 10, modifié.

J’ai été saisi de deux demandes de scrutin public émanant, l’une, de la commission et, l’autre, du groupe CRC.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

Le scrutin a lieu.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Personne ne demande plus à voter ?… Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

Il est procédé au dépouillement du scrutin.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 340 :

Le Sénat a adopté.

Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.

La séance est suspendue.

La séance, suspendue à dix-sept heures, est reprise à dix-sept heures quinze.

I. – Le chapitre IV du titre V du livre II de la deuxième partie du code du travail est complété par des articles L. 2254-2 à L. 2254-7 ainsi rédigés :

« Art. L. 2254 -2.I. – Lorsqu’un accord d’entreprise est conclu en vue de la préservation ou du développement de l’emploi, ses stipulations se substituent de plein droit aux clauses contraires et incompatibles du contrat de travail, y compris en matière de rémunération et de durée du travail.

« Lorsque l’employeur envisage d’engager des négociations relatives à la conclusion d’un accord mentionné au premier alinéa, il transmet aux organisations syndicales de salariés toutes les informations nécessaires à l’établissement d’un diagnostic partagé entre l’employeur et les organisations syndicales de salariés.

« L’accord mentionné au premier alinéa comporte un préambule indiquant notamment les objectifs de l’accord en matière de préservation ou de développement de l’emploi. Par dérogation au second alinéa de l’article L. 2222-3-3, l’absence de préambule entraîne la nullité de l’accord.

« L’application des stipulations d’un accord de préservation de l’emploi ne peut avoir pour effet ni de diminuer la rémunération, horaire ou mensuelle, des salariés lorsque le taux horaire de celle-ci, à la date de conclusion de cet accord, est égal ou inférieur au taux horaire du salaire minimum interprofessionnel de croissance majoré de 20 %, ni de ramener la rémunération des autres salariés en dessous de ce seuil.

« La validité d’un accord est subordonnée à sa signature par une ou plusieurs organisations syndicales de salariés représentatives ayant recueilli au moins 50 % des suffrages exprimés en faveur d’organisations représentatives au premier tour des dernières élections des titulaires au comité d’entreprise ou de la délégation unique du personnel ou, à défaut, des délégués du personnel, quel que soit le nombre de votants.

« Dans les entreprises dépourvues de délégué syndical, cet accord peut être négocié et conclu dans les conditions mentionnées aux articles L. 2232-20-1 à L. 2232-20-4 pour les entreprises employant moins de cinquante salariés, et dans les conditions mentionnées aux articles L. 2232-21 à L. 2232-27 pour les entreprises employant cinquante salariés et plus.

« II. – Le salarié peut refuser la modification de son contrat de travail résultant de l’application de l’accord mentionné au premier alinéa du I du présent article. Ce refus doit être écrit.

« Si l’employeur engage une procédure de licenciement à l’encontre du salarié ayant refusé l’application de l’accord mentionné au même alinéa, ce licenciement repose sur un motif spécifique qui constitue une cause réelle et sérieuse et est soumis aux seules modalités et conditions définies aux articles L. 1233-11 à L. 1233-15 et L. 2254-3 applicables au licenciement individuel pour motif économique ainsi qu’aux articles L. 1234-1 à L. 1234-20. La lettre de licenciement comporte l’énoncé du motif spécifique sur lequel repose le licenciement.

« III. – L’accord mentionné au premier alinéa du I du présent article précise :

« 1° Les modalités selon lesquelles est prise en compte la situation des salariés invoquant une atteinte disproportionnée à leur vie personnelle ou familiale ;

« 2° Les modalités d’information des salariés quant à son application et son suivi pendant toute sa durée.

« L’accord peut prévoir les conditions dans lesquelles fournissent des efforts proportionnés à ceux demandés aux autres salariés :

« – les dirigeants salariés exerçant dans le périmètre de l’accord ;

« – les mandataires sociaux et les actionnaires, dans le respect des compétences des organes d’administration et de surveillance.

« L’accord prévoit les conditions dans lesquelles les salariés bénéficient d’une amélioration de la situation économique de l’entreprise à l’issue de l’accord.

« Afin d’assister dans la négociation les délégués syndicaux ou, à défaut, les élus ou les salariés mandatés mentionnés au dernier alinéa du I, un expert-comptable peut être mandaté :

« a) Par le comité d’entreprise, dans les conditions prévues à l’article L. 2325-35 ;

« b) Dans les entreprises ne disposant pas d’un comité d’entreprise :

« – par les délégués syndicaux ;

« – à défaut, par les représentants élus mandatés ;

« – à défaut, par les salariés mandatés.

« Le coût de l’expertise est pris en charge par l’employeur.

« Un décret définit la rémunération mensuelle mentionnée au quatrième alinéa du I du présent article et les modalités par lesquelles les salariés sont informés et font connaître, le cas échéant, leur refus de voir appliquer l’accord à leur contrat de travail.

« IV. – Par dérogation au premier alinéa de l’article L. 2222-4, l’accord est conclu pour une durée déterminée. À défaut de stipulation de l’accord sur sa durée, celle-ci est fixée à cinq ans.

« V. – Un bilan de l’application de l’accord est effectué chaque année par les signataires de l’accord.

« Art. L. 2254 -3. – Le salarié licencié en application de l’article L. 2254-2 bénéficie d’un parcours d’accompagnement personnalisé, qui débute par une phase de pré-bilan, d’évaluation des compétences et d’orientation professionnelle en vue de l’élaboration d’un projet professionnel. Ce parcours, dont les modalités sont précisées par décret, comprend notamment des mesures d’accompagnement et d’appui au projet professionnel, ainsi que des périodes de formation et de travail.

« L’accompagnement personnalisé est assuré par Pôle emploi, dans des conditions prévues par décret.

« Art. L. 2254 -4. – Le bénéficiaire du dispositif d’accompagnement mentionné à l’article L. 2254-3 est placé sous le statut de stagiaire de la formation professionnelle et perçoit, pendant une durée maximale de douze mois, une allocation supérieure à celle à laquelle le salarié aurait pu prétendre au titre de l’allocation d’assurance mentionnée à l’article L. 5422-1 pendant la même période.

« Le salaire de référence servant au calcul de cette allocation est le salaire de référence retenu pour le calcul de l’allocation d’assurance du régime d’assurance chômage mentionnée à l’article L. 5422-1.

« Pour bénéficier de cette allocation, le bénéficiaire doit justifier d’une ancienneté d’au moins douze mois à la date de rupture du contrat de travail.

« Le montant de cette allocation ainsi que les conditions dans lesquelles les règles de l’assurance chômage s’appliquent aux bénéficiaires du dispositif, en particulier les conditions d’imputation de la durée d’exécution de l’accompagnement personnalisé sur la durée de versement de l’allocation d’assurance mentionnée à l’article L. 5422-1, sont définis par décret.

« Art. L. 2254 -5. – L’employeur est tenu de proposer le bénéfice du dispositif d’accompagnement mentionné à l’article L. 2254-3 à chaque salarié dont il envisage le licenciement en application de l’article L. 2254-2.

« Art. L. 2254 -6. – L’employeur contribue au financement du dispositif d’accompagnement mentionné à l’article L. 2254-3 par un versement représentatif de l’indemnité compensatrice de préavis, dans la limite de trois mois de salaire majoré de l’ensemble des cotisations et contributions obligatoires afférentes.

« La détermination du montant de ce versement et son recouvrement, effectué selon les règles et sous les garanties et sanctions mentionnées au premier alinéa de l’article L. 5422-16, sont assurés par Pôle emploi. Les conditions d’exigibilité de ce versement sont précisées par décret.

« Art. L. 2254 -7. – Lorsque l’employeur n’a pas proposé le dispositif d’accompagnement en application de l’article L. 2254-3, Pôle emploi le propose au salarié. Dans ce cas, l’employeur verse à l’organisme chargé de la gestion du régime d’assurance chômage mentionné à l’article L. 5427-1 une contribution égale à deux mois de salaire brut, portée à trois mois lorsque son ancien salarié adhère au dispositif d’accompagnement mentionné à l’article L. 2254-3 sur proposition de Pôle emploi. Cette contribution finance la partie de l’allocation supérieure à celle à laquelle le salarié aurait pu prétendre au titre de l’allocation d’assurance.

« La détermination du montant de cette contribution et son recouvrement, effectué selon les règles et sous les garanties et sanctions mentionnées au premier alinéa de l’article L. 5422-16, sont assurés par Pôle emploi. Les conditions d’exigibilité de cette contribution sont précisées par décret. »

II. – L’article L. 2323-15 du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Cette consultation porte également, le cas échéant, sur les conséquences pour les salariés de l’accord conclu en vue de la préservation ou du développement de l’emploi mentionné à l’article L. 2254-2. »

III. – À la première phrase du II de l’article L. 2325-35 du même code, après la référence : « L. 5125-1 », est insérée la référence : «, L. 2254-2 ».

IV (nouveau). – Le chapitre V du titre II du livre Ier de la cinquième partie du code du travail est abrogé.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, sur l’article.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Noëlle Lienemann

Nous sommes un certain nombre à avoir déposé des amendements tendant à supprimer l’article 11 au motif que celui-ci est tout à fait dangereux.

Par ailleurs, nous sommes étonnés de voir repris ici ce que l’on appelle abusivement « des accords offensifs » pour l’emploi, proposés par M. Sarkozy et contre lesquels la gauche, alors dans l’opposition, s’était élevée.

Nous avons déjà eu ce débat lors de l’examen de la loi relative à la sécurisation de l’emploi, qui avait institué les fameux accords de maintien de l’emploi, les AME, des accords dits « défensifs ». Déjà, nous n’étions pas très convaincus, mais M. Sapin, alors ministre du travail, nous avait assuré que ces accords étaient bien balisés : ils étaient assortis d’un ensemble de garanties et n’étaient en rien comparables aux accords proposés par la droite et M. Sarkozy.

Quelles sont ces garanties ?

Premièrement, ces accords ne sont signés que si l’entreprise est confrontée à des difficultés réelles et lourdes.

Deuxièmement, ils sont d’une durée déterminée.

Troisièmement, les graves difficultés économiques sont notifiées.

Or, la loi Macron, qui a déjà donné lieu à ce débat, a allongé la durée de cet accord, en le portant à cinq ans, ce qui accroît d’autant, dans la durée, les inconvénients subis par les salariés.

Aujourd’hui, on nous dit qu’il faut non plus seulement des accords défensifs, mais aussi des accords offensifs. On remet en cause les avancées sociales non plus seulement pour maintenir l’emploi, mais aussi pour développer l’entreprise. Et, pour ce faire, il serait judicieux de revenir sur toute une série de garanties octroyées aux salariés.

J’entends bien qu’il ne sera pas ici possible de baisser le salaire, mais il n’aura échappé à personne que les rémunérations ne sont pas constituées uniquement par les salaires. Il sera, par exemple, possible de travailler plus pour le même salaire, ce qui équivaut à une baisse de la rémunération du travail.

Pour notre part, nous estimons que ce n’est pas de cette façon que l’on doit développer les activités dans notre pays, car cela ne doit pas se faire au détriment des droits sociaux des salariés. Même s’il s’agit d’accords majoritaires dans l’entreprise, on voit bien que l’on va petit à petit sur le terrain bien connu du MEDEF qui, au nom du dynamisme économique, cherche essentiellement à réaliser des gains qui se traduisent par des reculs sociaux. Or notre pays ne fait pas suffisamment d’efforts dans d’autres directions tout à fait essentielles.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Cohen

Comme nous l’avons dénoncé à plusieurs reprises, notamment lors de l’examen de l’article 10, le lien de subordination au sein de l’entreprise est un principe totalement ignoré du Gouvernement. La jurisprudence de la Cour de cassation est pourtant suffisamment étoffée pour définir les paramètres de ce lien. Malgré cela, nous nous retrouvons avec un article 11 qui permet une baisse de la rémunération horaire des salariés par le biais d’un maintien du salaire mensuel couplé à une augmentation du temps de travail, en laissant le soin audit accord de définir les modalités de prise en compte de l’atteinte à la vie privée des salariés.

En échange de cela, quelle protection pour les salariés ?

La possibilité pour un salarié de refuser que son contrat de travail soit modifié arbitrairement, au risque d’être licencié, comme le permet l’article L. 1233-3 du code du travail !

Plus besoin que l’entreprise rencontre des difficultés économiques, puisqu’il suffit que l’accord d’entreprise ait pour objet « la préservation ou le développement de l’emploi », un motif qui pourrait être avancé par n’importe quelle entreprise. Une fois cet accord adopté, ces dispositions s’imposeront au salarié. Exit le principe de faveur, en vertu duquel les dispositions les plus avantageuses s’appliquent obligatoirement !

De plus, en cas de refus, le salarié ne bénéficiera plus des garanties propres au licenciement économique, comme c’était le cas avec les accords de maintien de l’emploi, hors droit au reclassement.

Ainsi, un salarié qui n’accepterait pas cet accord dit « offensif » pourra, grâce à votre texte, madame la ministre, être licencié pour raison personnelle. Au-delà du cas du salarié, je souligne que ce texte permet aux employeurs de se soustraire aux obligations afférentes à la mise en place d’un plan social en cas de licenciement collectif.

Votre argument selon lequel il faudrait renforcer la compétitivité de l’entreprise est totalement démonté par l’exemple des « Conti » ou celui de Bosch. De fait, le principe de flexisécurité est un échec flagrant, mais vous vous obstinez, aggravant encore les choses avec cet article. Pour le groupe CRC, c’est « non » : nous ne voterons pas cet article.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

L’article 11 de ce projet de loi ouvre la possibilité de négocier au sein des entreprises des accords de préservation ou de développement de l’emploi.

Nous souhaitons la suppression de cet article, afin d’éviter que les entreprises ne puissent avoir recours aux accords dits « offensifs » en raison de la grande précarité dans laquelle ils pourraient placer les salariés.

En effet, des entreprises auraient la possibilité de conclure un accord majoritaire qui primerait le contrat, notamment en matière de rémunération et de durée du temps de travail. Ainsi, ces accords, sans conditions ni économiques ni d’emploi, permettraient, par exemple, de faire travailler davantage les salariés, sans augmenter pour autant leur rémunération, sous peine de se faire licencier.

En 2013, la loi relative à la sécurisation de l’emploi prévoyait déjà des accords permettant de contourner le contrat. Ces accords, appelés « accords de maintien de l’emploi », étaient limités à des circonstances particulières, lorsque la survie de l’entreprise était en jeu. Les conditions de mise en place de ces accords avaient ensuite été assouplies par la loi Macron ; et nous avions alors exprimé des réserves, car cette dynamique était peu contrôlée et elle était susceptible de conduire à d’autres régressions, ce qui est aujourd’hui le cas.

L’article 11 que nous examinons aujourd’hui étend ces accords à des objectifs de développement de l’emploi. Les conséquences pour les salariés pourraient être considérables : le salarié concerné devra faire le choix entre la précarité et la perte de son emploi. Or ce n’est pas le sens que nous voulons donner à ce texte. La flexibilité ne doit pas se développer au détriment de la sécurité.

De plus, les modifications apportées en commission ne font que renforcer les conséquences néfastes pour les salariés. À titre d’exemple, la rémunération mensuelle pourra désormais être diminuée si le taux horaire est supérieur ou égal à 1, 2 SMIC. Dans ces conditions, nous le voyons bien, la relation contractuelle unissant l’employeur et son salarié est totalement déséquilibrée, et le rapport de force s’établit en défaveur du salarié.

Aussi, pour toutes ces raisons, nous vous proposerons, par amendement, de supprimer l’article 11.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bricq

Il s’agit là d’un article très important, et je comprends qu’il donne matière à une bataille. J’ai bien entendu certaines revendications syndicales, notamment celle émanant d’un syndicat ; cela fait partie des points de principe. Mais supprimer cet article ou l’accepter dans la rédaction actuellement proposée par la commission des affaires sociales, reviendrait à déséquilibrer le texte.

J’ai cité les accords intervenus chez Michelin, je n’y reviendrai pas, mais permettez-moi de prendre un exemple plus parlant, celui de Peugeot.

Quand Peugeot allait mal, un accord défensif borné dans le temps a été signé par les syndicats et mis en œuvre. Venu à expiration, il donne aujourd’hui lieu à examen et va être renégocié pour devenir offensif. Peugeot va mieux grâce à l’intervention de l’État, il faut le rappeler, mais aussi parce que l’entreprise a été remise à flot et qu’elle a de nouveau les capacités d’investir. Elle fait aujourd’hui le bilan de l’accord qui est intervenu, et les organisations syndicales, qui étaient dans un rapport défensif, sont aujourd’hui dans une démarche offensive.

Il importe d’être réactif à la vie de l’entreprise pour donner des points d’appui aux organisations syndicales : celles-ci vont voir ce qui a été fait dans le cadre du précédent accord et ce qui ne l’a pas été, et, dans la mesure où il s’était agi d’un accord de modération salariale, elles vont évidemment demander que les salariés récoltent les fruits de leurs efforts.

Pour notre part, nous ne souhaitons pas supprimer l’article 11, car nous souhaitons le modifier par amendements. Nous voulons exposer nos amendements et entendre le Gouvernement.

Nous voulons maintenir la rémunération, ainsi que le mandatement dans les petites entreprises. Notre collègue Jean-Louis Tourenne défendra, au nom du groupe socialiste, un amendement prévoyant que les efforts des salariés soient proportionnés à ceux qui seront attendus des dirigeants d’entreprise et des mandataires sociaux ; c’est, à nos yeux, un point très important.

Je le répète, nous voulons défendre ces amendements. Mme la ministre nous dira ce qu’elle pense de nos propositions. Nous soutenons la version originale et originelle du texte, pas celle qui a été adoptée par la commission des affaires sociales.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Je suis saisi de trois amendements identiques.

L’amendement n° 50 est présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David, Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

L’amendement n° 447 est présenté par M. Desessard, Mmes Archimbaud, Benbassa, Blandin et Bouchoux et MM. Dantec, Gattolin, Labbé et Poher.

L’amendement n° 961 rectifié est présenté par MM. Durain, Labazée, Godefroy, Cabanel et Montaugé, Mmes Lienemann, Bonnefoy et Ghali, M. Néri, Mme Guillemot et M. Karam.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Dominique Watrin, pour présenter l’amendement n° 50.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Watrin

Nous sommes fermement opposés à cet article, qui s’inscrit dans la lignée des lois régressives votées depuis 2008. Celles-ci ont permis aux entreprises de déroger aux accords de branche et aux conventions collectives, en imposant des sacrifices souvent très importants aux salariés, au nom du maintien de l’emploi.

Je veux parler bien sûr de la loi Bertrand de 2008, qui instaure la primauté de l’accord d’entreprise en termes d’annualisation du temps de travail. Il a fallu ensuite imposer cet accord au contrat de travail, car la jurisprudence a considéré que tout ce qui relevait de la durée du temps de travail était un élément essentiel du contrat de travail. Ainsi, la loi Warsmann de 2012 a permis de licencier pour motif personnel les salariés qui refusaient ces accords. Puis est venu l’ANI, l’accord national interprofessionnel, qui a encore élargi, en cas de graves difficultés économiques, la possibilité de déroger à des droits plus favorables concernant les modalités d’organisation, de répartition du travail et de rémunération.

Nous avons un désaccord fondamental avec Mme Bricq sur le bilan, mais nous allons en reparler en séance publique, car de nombreux amendements ont été déposés. Nous pourrons alors considérer le nombre de suppressions d’emplois, les sacrifices consentis par les salariés

Mme Nicole Bricq s’exclame.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Watrin

Non seulement on ne tire pas les enseignements de ces accords, qui ont constitué un recul eu égard aux capacités industrielles de notre pays, mais, avec ce texte, on va plus loin encore dans les sacrifices exigés des salariés, même lorsque l’entreprise n’est pas confrontée à des difficultés économiques. Plus de durées fixées, sauf celle qui figurera dans l’accord. On crée des licenciements sui generis, puisque, dès lors qu’un accord aura été conclu en vue de développer l’emploi, le salarié ne pourra pas contester la cause sérieuse et réelle du licenciement. Se pose aussi la question des rémunérations. Un véritable débat doit donc être engagé sur ce sujet.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bricq

C’est pour cette raison qu’il ne faut pas supprimer l’article !

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à M. Jean Desessard, pour présenter l’amendement n° 447.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

Je l’ai défendu lorsque je me suis exprimé sur l’article 11. Je souscris à l’argumentation du groupe CRC.

Lors de l’examen de chaque nouveau projet de loi portant sur le travail, on nous dit qu’il faut faciliter l’adaptation des entreprises, mais, à chaque fois, on s’aperçoit que ce n’est pas suffisant. On fait un peu plus, mais ce n’est pas encore assez, et ainsi de suite… Nous n’en ferons jamais assez, car nous sommes en concurrence avec des pays asiatiques en voie de développement, dont les conditions sociales n’ont rien à voir avec les nôtres ! Il nous faut adapter toujours plus nos entreprises, mais il y a un gouffre entre les nôtres et celles-là.

Dans un an, le patronat nous dira : ce que vous avez fait est bien, mais ce n’est pas assez ! Il faut encore faire un effort. Comparez les rémunérations de nos salariés avec celles des salariés des pays en voie de développement ; ces entreprises peuvent faire la même chose que nous, en beaucoup moins de temps et pour beaucoup moins cher.

Est-ce là ce que nous voulons ? Voulons-nous adapter petit à petit la situation des entreprises françaises à celle de ces pays, qui nous font concurrence ? Ou affirmons-nous qu’il existe une spécificité française dans les rapports sociaux, avec une qualité de travail et un niveau de formation intéressants ?

Grâce à ces projets collectifs, à ces infrastructures, à ce capital humain, nous pouvons faire en sorte que nos entreprises soient compétitives, sans remettre en cause tous les droits sociaux, ainsi que les conditions de travail, qui sont effectivement plus favorables en France que dans de nombreux autres pays.

La droite a choisi : il faut adapter l’entreprise, il faut aller le plus loin possible ; ils ne le disent pas ouvertement, mais ce n’est qu’une question d’années ou de mois. Les socialistes s’engagent aussi dans cette voie, mais il n’y a pas d’espoir : vous ne pourrez jamais être statiques, vous ne trouverez jamais le bon équilibre. Le MEDEF estimera toujours que ce n’est pas suffisant et que les entreprises n’y arrivent pas. Si la finalité est que notre pays soit compétitif par rapport aux pays en voie de développement, alors il faudra encore beaucoup de lois de régression sociale !

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour présenter l’amendement n° 961 rectifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Noëlle Lienemann

J’ai déjà exposé ma position il y a quelques instants, en parlant sur l’article, et je souscris à l’argumentaire des collègues qui viennent de prendre la parole. J’insisterai donc seulement sur la remise en cause du contrat de travail, qui me paraît extrêmement dangereuse.

Au moins les députés socialistes ont-ils souhaité que le projet de loi prévoie un licenciement économique, et non un licenciement sec. Reste que le contrat de travail pourra être modifié unilatéralement, même en l’absence de problème majeur. La logique dans laquelle on entre ainsi conduit à placer les salariés dans une situation de vulnérabilité, où ils seront soumis à une pression.

M. Desessard a raison : est-ce ainsi que nous rendrons notre économie performante et, en particulier, que nous assurerons le redressement de notre industrie ? Non ! Nous n’y parviendrons pas en rabiotant à la marge ici ou là, comme on est en train de le faire, mais en accompagnant la mutation technologique, en encourageant l’innovation et en mettant l’accent sur la formation des salariés et sur le 4.0. Concentrons tous nos efforts dans cette direction, car nous sommes encore en retard dans cette mutation !

Le FMI lui-même a mis en évidence que, dans la plupart des secteurs, en particulier des secteurs exportateurs mondialisés, le coût du travail n’est pas le facteur déterminant. Consolidons donc plutôt notre modèle social et, en même temps, pour soutenir les services et les autres secteurs moins exposés à la concurrence internationale, qui ont avant tout besoin de remplir leurs carnets de commandes, menons une politique de relance par la redistribution des richesses au service du pouvoir d’achat !

Un équilibre est nécessaire. Or que constatons-nous ? On nous avait promis 1 million d’emplois avec le pacte de stabilité ; on les attend toujours ! On nous promet aujourd’hui qu’en permettant de licencier et en « flexibilisant » le travail, comme on dit, on modernisera les entreprises ; les résultats positifs de cette politique, nous les attendrons longtemps. Pendant ce temps, la fragilisation économique et industrielle du pays se poursuit… Ce n’est pas la bonne voie !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Baptiste Lemoyne

La commission a émis un avis défavorable sur les amendements identiques tendant à supprimer l’article 11. Elle estime en effet que le dispositif qu’elle a adopté apporte un certain nombre de réponses, après que les accords de maintien de l’emploi ont, comme vous le savez, rencontré un succès tout relatif, puisqu’une douzaine seulement ont été conclus.

Dans ce contexte, nous considérons que ce dispositif va dans le bon sens, d’autant qu’il comporte un certain nombre de garanties pour les salariés qui ne souhaitent pas s’inscrire dans la dynamique d’un accord, offensif ou défensif, un parcours d’accompagnement ayant été prévu par l’Assemblée nationale.

Debut de section - Permalien
Myriam El Khomri, ministre

Ma conviction est que l’une des réponses au problème du chômage, à la question de l’emploi, tient à notre capacité à prendre les bonnes décisions au bon moment et au bon niveau.

Malheureusement, dans notre pays qui perdait déjà des emplois industriels depuis le deuxième trimestre de 2001, les conséquences de la crise ont été plus sévères qu’en Allemagne, où les salariés ont accepté, avec leurs syndicats, des accords collectifs sur l’emploi, dont la plupart, d’ailleurs, ne prévoyaient pas de baisse de rémunération, mais des gels de salaires. Les entreprises allemandes ont joué le jeu en renonçant aux licenciements, de sorte que de nombreux emplois ont pu être maintenus, dans des conditions qui assuraient des garanties aux salariés. À l’issue de la crise, les mesures ont pu être levées ; ainsi, dans la métallurgie allemande, les augmentations salariales avoisinent aujourd’hui 5 %.

En un sens, la question n’est pas d’être offensif ou défensif ; elle est de trouver les meilleures voies pour développer l’emploi, car le chômage que nous connaissons n’est pas acceptable. La question du bon moment est tout aussi essentielle. Par ailleurs, il ne s’agit évidemment pas d’agir à n’importe quel prix : nous sommes tous d’accord pour dire que les garanties des salariés et les exigences sociales doivent être préservées.

Oui, comme le montrent les exemples de Michelin, STX et PSA, les accords, quand ils sont conclus par des syndicats majoritaires, sont à la fois efficaces et justes ! Dans ces trois cas, en effet, des centaines d’emplois ont pu être préservées et les salariés ont obtenu des contreparties en échange de leur effort ; je pourrais vous en citer de multiples. Les accords pour développer l’emploi fourniront un cadre à ces négociations et leur permettront d’être efficacement mises en œuvre.

Je comprends, bien sûr, les interrogations que ce dispositif suscite, mais elles ne me paraissent pas justifiées, même si je reconnais à ceux qui les formulent une certaine cohérence. De fait, leur position est dans le droit-fil de celle qu’ils ont adoptée au sujet de la loi sur la sécurisation de l’emploi, notamment en ce qui concerne les accords de maintien de l’emploi. Ainsi, j’ai relu les propos que vous avez tenus à l’époque, madame Lienemann, et je reconnais volontiers une certaine cohérence à vos positions.

D’abord, les accords prévus par le projet de loi seront majoritaires ; ils reposeront donc sur un consensus large, ce qui me paraît essentiel. L’intérêt collectif doit primer une situation individuelle : tel est le sens du principe majoritaire, qui sera pour les salariés la première des garanties.

Ensuite, les accords en faveur de l’emploi, contrairement aux accords de maintien de l’emploi, avec lesquels la commission propose de les fusionner, ne pourront pas avoir pour effet de diminuer la rémunération mensuelle des salariés, c’est-à-dire leur pouvoir d’achat.

Debut de section - Permalien
Myriam El Khomri, ministre

Même si, conformément aux souhaits des partenaires sociaux, une telle baisse a été fortement encadrée, notamment par l’accord national interprofessionnel de 2013, elle est possible dans le cadre d’un accord de maintien de l’emploi, ce qui se justifie par les difficultés graves de l’entreprise. Elle ne le sera pas dans le cadre des accords prévus par le projet de loi, ce qui constitue une différence majeure.

Par ailleurs, ces accords seront assortis de garanties importantes, renforcées au demeurant, dans le cadre des concertations que nous avons menées avec les partenaires sociaux, mais aussi avec les députés dans leur ensemble.

Premièrement, contrairement à ce que d’aucuns prétendent, ces accords auront une durée : ils devront être conclus pour une durée déterminée, une durée par défaut étant fixée à cinq ans.

Debut de section - Permalien
Myriam El Khomri, ministre

Elle pourra être inférieure, éventuellement supérieure ; il appartiendra aux partenaires sociaux d’en décider.

Deuxièmement, les accords devront être conclus sur le fondement d’un diagnostic partagé. C’est pourquoi l’employeur qui envisage un tel accord devra transmettre en amont toutes les informations nécessaires aux organisations syndicales représentatives. En outre, le préambule de l’accord devra énoncer les objectifs de celui-ci et, faute de préambule, l’accord sera frappé de nullité ; cela est très clair et tout à fait essentiel.

Troisièmement, la négociation sera strictement réservée aux syndicats. Dans les entreprises sans délégué syndical, la négociation d’un accord ne pourra avoir lieu qu’avec des salariés ou des élus du personnel mandatés par une ou plusieurs organisations syndicales représentatives. C’est aussi une garantie importante.

Quatrièmement, les salariés qui refuseront l’accord bénéficieront de garanties renforcées. La question du contrat de travail, soulevée par Mme Lienemann, se pose, en fin de compte, si un salarié refuse un accord en faveur de l’emploi – un accord, je le rappelle, proposé par le rapport Combrexelle. Il ne s’agit pas de transposer en France le système allemand, dans lequel un tel salarié est déclaré démissionnaire ; cela est extrêmement clair, comme l’ont montré les débats en commission à l’Assemblée nationale.

En effet, le projet de loi prévoit que le licenciement des salariés qui refuseront l’accord sera proposé selon les modalités de la procédure applicable au licenciement individuel pour motif économique ; ces salariés bénéficieront d’un accompagnement personnalisé et percevront une indemnité.

Cinquièmement, les efforts ne seront pas unilatéraux, puisque les accords pourront contenir des mesures assurant que les mandataires et dirigeants fournissent eux aussi des efforts proportionnés pendant la durée de l’accord ; cela me paraît également important.

Dans tous les cas, les partenaires sociaux devront dresser un bilan annuel de l’application de l’accord, permettant de réajuster la situation en tant que de besoin.

Mesdames, messieurs les sénateurs, au-delà des débats que nous pouvons avoir sur le caractère offensif ou défensif des accords, la question qui se pose est : sommes-nous capables de prendre par le dialogue social les bonnes décisions au bon moment, pour ne pas avoir à négocier des plans de sauvegarde de l’emploi ? De ce point de vue, quand j’examine de près certains accords, comme ceux conclus chez STX et Michelin, il m’apparaît qu’il faut fournir un cadre à l’ensemble des accords qui sont signés !

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Brigitte Gonthier-Maurin

Si, comme l’a expliqué mon collègue Dominique Watrin, nous sommes opposés à l’article 11 du projet de loi dans la rédaction proposée par le Gouvernement, il va de soi que nous sommes totalement défavorables à la rédaction adoptée par la commission des affaires sociales de notre assemblée. En effet, la droite sénatoriale s’est engouffrée dans la brèche ouverte en exigeant que les accords de préservation et de développement de l’emploi puissent modifier la rémunération mensuelle des salariés.

Debut de section - PermalienPhoto de Brigitte Gonthier-Maurin

Or, comme l’a souligné notre collègue Jean Desessard, le MEDEF n’est jamais satisfait.

Ainsi donc, il serait désormais possible de réduire la rémunération mensuelle des salariés au-dessus de 1, 2 SMIC. Cette éventualité nous inquiète au plus haut point, puisque nous sommes convaincus que c’est aussi par la relance du pouvoir d’achat des salariés que nous contribuerons à l’augmentation de la croissance.

De même, la majorité sénatoriale a étendu les accords de préservation et de développement de l’emploi aux entreprises de moins de cinquante salariés, dépourvues de délégué syndical.

Je n’oublie pas non plus la clause de retour à meilleure fortune, qui permettra aux entreprises de maintenir les mesures le temps de la crise économique.

Quand on songe qu’on nous assène depuis quarante ans que l’austérité nécessite de se serrer toujours plus la ceinture pour relancer la croissance, il est à craindre que ces dispositifs aient de beaux jours devant eux…

Madame la ministre, vous avez expliqué qu’il fallait prendre les bonnes décisions au bon moment. Nous ne pouvons que vous suivre, mais, en ce qui concerne l’Allemagne, il me semble, même si je ne suis pas une grande spécialiste de ce pays, qu’il faudrait regarder la situation de plus près, s’agissant notamment des conditions dans lesquelles des emplois ont été créés. En effet, je crois avoir compris que les faits positifs dont vous avez parlé s’accompagnent d’une grande précarité et de nombreux contrats à bas salaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à Mme Annie David, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

Comme vous l’aurez compris, l’article 11 du projet de loi ne nous satisfait pas du tout, puisque, après les accords défensifs issus de la loi sur la sécurisation de l’emploi, on en vient aux accords offensifs.

Pourtant, les accords de maintien de l’emploi permettent déjà à une entreprise en difficulté économique de conclure un accord afin de diminuer la rémunération des salariés à temps de travail constant ou d’augmenter la durée du temps de travail sans contrepartie. Comme l’ont souligné Jean Desessard, Dominique Watrin et Brigitte Gonthier-Maurin, il n’y a pas de limite : plus on en donne, plus ils en veulent ! Jusqu’où allons-nous aller, mes chers collègues ?

Voilà qu’il suffira désormais, pour signer un accord, de déclarer avoir pour objectif le développement ou la préservation de l’emploi… Difficile de nier que la condition est bien floue et que le champ est très vaste ! En d’autres termes, n’importe quelle entreprise pourra conclure un accord à n’importe quel moment.

De plus, une fois adoptés, ces accords s’imposeront aux salariés, même si les clauses en sont moins favorables que les dispositions légales ou les stipulations du contrat de travail. La hiérarchie des normes est donc bien inversée, et le principe de faveur abandonné.

En outre, le salarié qui refusera de se soumettre au nouveau régime pourra faire l’objet d’un licenciement économique individuel, ce qui signifie qu’il sera privé des protections de reclassement assurées dans le cadre des actuels accords de maintien de l’emploi.

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

Madame la ministre, vous avez mentionné les plans de sauvegarde de l’emploi. Or, précisément, les accords dont nous parlons autorisent les entreprises à se soustraire à leur obligation de mettre en place un plan de sauvegarde de l’emploi ! Dès lors, les effets d’aubaine vont se multiplier, car de nombreuses entreprises chercheront à éviter une procédure collective.

Je rappelle aussi que le plan de sauvegarde de l’emploi s’accompagne d’une convention de revitalisation. Aujourd’hui, ces conventions sont mises en œuvre dans un grand nombre de nos territoires ; hier, en visitant une entreprise concernée, j’ai mesuré combien ces conventions de revitalisation sont essentielles pour permettre l’implantation de nouvelles entreprises dans les territoires où l’activité économique recule. Aussi bien, madame la ministre, avec vos accords offensifs, non seulement vous ne préservez pas les emplois existants, mais vous ne favoriserez pas non plus le développement d’emplois de remplacement !

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

À chaque projet de loi, on nous dit : on a atteint l’équilibre, c’est formidable. Ainsi, M. Rebsamen nous assurait qu’on avait trouvé le bon dosage. Et puis vous voilà, madame la ministre, avec votre texte ! Je suis à peu près sûr que, dans quelque temps, un autre ministre, ou peut-être vous-même, reviendrez avec un texte nouveau…

Au demeurant, les socialistes, lorsqu’ils étaient dans l’opposition, n’ayant pas à gérer, étaient beaucoup plus réticents devant les évolutions qu’il fallait envisager ; je me souviens de positions plus tranchées.

En vérité, il y a une dynamique, car les rapports sociaux, aujourd’hui, ne sont pas statiques : dans un monde en mouvement, rien n’est établi une fois pour toutes. Dans ce contexte, la question est : quel projet social d’envergure a-t-on ?

Madame la ministre, vous proposez d’avancer vers la flexibilité en établissant des garde-fous qui ne constituent pas une sécurité. La sécurité contre les précarités et le chômage, c’est au niveau de l’État qu’elle devrait être assurée, ce qui n’est pas prévu dans le projet de loi ! Les garde-fous prévus au niveau de l’entreprise sauteront, parce qu’on entendra ce discours : pourquoi m’imposez-vous ces règles, pas assez flexibles, qui ne correspondent pas à la situation de mon entreprise ?

Vous avez pris l’exemple de l’Allemagne. Pourtant, lorsque nous vous avons demandé de prévoir un plus grand nombre de salariés administrateurs, comme en Allemagne, vous avez refusé ! L’exemple n’est donc pas probant, puisqu’on n’emprunte à l’Allemagne que ce que l’on veut bien.

Par ailleurs, le patronat allemand n’est pas le patronat français – même si celui-ci comprend, monsieur Cadic, des éléments extrêmement positifs. Je me souviens de ce qui s’est passé lors de la vente d’Adidas : alors que les vendeurs entendaient que l’appareil de production reste en Allemagne, le repreneur, qui s’appelait Tapie, après avoir pris l’engagement qu’il en serait ainsi, a évidemment, sitôt la transaction conclue, organisé une vente à la découpe et la délocalisation des lieux de production partout dans le monde… J’y insiste : la culture du patronat français et même sa composition, sa structure, diffèrent de celles du patronat allemand.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Baptiste Lemoyne

Je ne veux pas laisser caricaturer le travail de la commission.

En réalité, l’unification des régimes est déjà présente dans le texte gouvernemental, puisque la rédaction initiale de l’article 11 traite bien de préservation et de développement de l’emploi. Pour éviter que trente-six dispositifs ne continuent à coexister, la commission a repris ce travail d’unification, tout en s’attachant à bien préciser les choses. Ainsi, il s’agit de transposer dans le cadre des accords de préservation de l’emploi le régime prévu pour les accords de maintien de l’emploi, ni plus ni moins. La rémunération des salariés ne pourra donc pas être abaissée au-delà de 1, 2 SMIC.

Je le répète : je ne fais que reprendre le texte présenté par le gouvernement socialiste !

En outre, je défendrai au nom de la commission l’amendement n° 1017 visant à préciser que la rémunération mensuelle des salariés ne peut pas baisser dans le cadre d’un accord de développement de l’emploi. Qu’on ne caricature donc pas le travail que nous avons accompli !

Par ailleurs, c’est la commission qui a ajouté à l’article 11 la disposition aux termes de laquelle « l’accord prévoit les conditions dans lesquelles les salariés bénéficient d’une amélioration de la situation économique de l’entreprise à l’issue de l’accord ». Cette clause de retour à meilleure fortune ne figurait pas dans le texte initial du Gouvernement.

La commission des affaires sociales a accompli un travail sérieux d’amélioration du dispositif, qui prend en compte à la fois les besoins collectifs des entreprises et les besoins collectifs et individuels des salariés !

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à M. Dominique Watrin, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Watrin

Le temps m’a manqué dans mon intervention précédente pour aborder la dimension de l’efficacité économique, mais je pense qu’il faut aussi situer le débat sur ce plan. Face à la concurrence internationale, des mesures doivent en effet être prises.

La principale raison pour laquelle l’Allemagne, que vous avez citée, madame la ministre, a peut-être un peu mieux surmonté la crise économique de 2008 que la France est qu’elle a développé beaucoup plus que nous le chômage partiel indemnisé ; ce ne sont donc pas forcément les accords d’entreprise qui expliquent les meilleurs résultats allemands.

En termes macroéconomiques, j’incline à penser comme M. Desessard : nous observons une mise en concurrence des salariés à l’échelle européenne, dont nos groupes profitent largement en s’appuyant sur des accords qu’ils signent, comme Renault en Espagne, pour faire pression sur les salariés afin qu’ils acceptent toujours plus de sacrifices, sous la menace de voir un nouveau modèle de véhicule affecté à un autre site, dont les salariés se seront montrés plus accommodants. Où est l’efficacité économique ?

À la vérité, les seuls gagnants de ce système sont les actionnaires et les grands dirigeants. Souvenez-vous, mes chers collègues, que pendant que de tels accords étaient appliqués, Carlos Ghosn a multiplié son salaire par deux, de 2, 75 millions d’euros à 5, 24 millions d’euros, tandis que les salariés de Renault n’ont été augmentés que de 11 euros bruts par mois…

Je pourrais parler aussi du bilan de ce qui s’est passé à PSA. En termes d’intérêt économique général et de développement de l’emploi dans notre pays, quel est le résultat ? Il faut tout de même le dire : 13 000 suppressions d’emplois ! Encore est-ce sans compter les 750 suppressions d’emplois dont on parle aujourd’hui à l’usine de Poissy, dont les salariés ont pourtant consenti beaucoup d’efforts – travail le samedi moins indemnisé, flexibilité accrue, suppressions de RTT et de congé et une productivité en progrès. Qu’on m’explique où est l’efficacité économique !

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Je mets aux voix les amendements identiques n° 50, 447 et 961 rectifié.

J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe CRC.

Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

Le scrutin a lieu.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

Il est procédé au dépouillement du scrutin.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 341 :

Le Sénat n’a pas adopté.

L’amendement n° 645, présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David, Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Alinéa 2

Remplacer les mots :

y compris en matière de rémunération et de

par les mots :

à l’exclusion des dispositions relatives à la rémunération et à la

La parole est à Mme Laurence Cohen.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Cohen

Cet amendement de repli vise à exclure les questions de rémunération et de durée du travail du champ d’application de l’alinéa 2.

L’article 11 dans sa rédaction actuelle sape l’un des piliers de notre droit du travail : le principe de l’ordre public social de protection, qui garantit depuis des décennies au salarié que la disposition la plus favorable lui sera appliquée. Désormais, en effet, il suffira pour imposer les conditions de l’accord d’entreprise en matière de temps de travail et de rémunération des salariés que l’accord ait pour objectif la préservation ou le développement de l’emploi.

J’insiste sur le risque, que mes collègues ont déjà signalé, que ce motif soit invoqué par n’importe quelle entreprise, de manière injustifiée. Nous craignons que cet article n’ouvre une véritable boîte de Pandore ! En effet, sous la pression du chantage aux licenciements ou à la fermeture de l’entreprise, un employeur pourra imposer à un salarié un accord moins favorable que les clauses stipulées dans son contrat ou dans la convention collective ou même que les dispositions prévues par la loi.

Certes, il est prévu a priori qu’un accord ne pourra diminuer la rémunération mensuelle des salariés. Mais a priori seulement, dès lors qu’il est aussi prévu qu’« un décret définira la rémunération mensuelle ». Les craintes sont vives que cette rémunération n’englobe pas l’ensemble des rémunérations fixes et variables versées aux salariés, mais uniquement les rémunérations fixes, ce qui permettrait aux employeurs de supprimer les primes de leurs salariés.

Enfin, il pourra être tout bonnement procédé à l’augmentation du temps de travail.

Nous sommes donc en présence d’un nouveau principe ; pas si nouveau, à vrai dire, puisqu’il s’agit de travailler plus pour gagner moins, ce qu’on avait déjà entendu dans la bouche d’un présidentiable…

C’est pour éviter ce recul social et sociétal que nous invitons le Sénat à adopter cet amendement de repli !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Baptiste Lemoyne

L’adoption de cet amendement reviendrait à vider de sa substance l’article 11. La commission ayant adopté celui-ci, y compris son alinéa 2, elle a émis un avis défavorable sur l’amendement.

Dans le modèle allemand, dont nous avons déjà parlé – certes à un autre propos, puisqu’il s’agissait de la composition des conseils d’administration des entreprises –, un salarié qui n’accepte pas un accord de compétitivité est purement et simplement déclaré démissionnaire. Le dispositif que nous avons adopté prévoit un certain nombre de mesures d’accompagnement, qu’il faut considérer en miroir – pour reprendre une expression chère au Gouvernement – de l’alinéa 2, qui est une disposition fondatrice de l’article 11.

Debut de section - Permalien
Myriam El Khomri, ministre

Il me semble, sans parler de dialogue de sourds, que ce débat sur le principe majoritaire et la signature des accords par les syndicats repose sur un malentendu.

D’un côté, nous pouvons rejoindre le groupe CRC dans notre refus absolu de contourner les organisations syndicales, compte tenu du déséquilibre qui existe en effet dans la relation entre l’employeur et le salarié ; nous considérons que, lorsque le salarié est accompagné, formé et soutenu par une organisation syndicale, ce déséquilibre se réduit.

De l’autre, je constate que les orateurs du groupe CRC emploient dans toutes leurs démonstrations l’argument du pistolet sur la tempe, faisant fi de ce que nous parlons d’accords majoritaires négociés avec des organisations syndicales.

Pour moi, il y a là une vraie divergence de fond : nous considérons qu’il faut laisser la possibilité d’adaptations au sein des entreprises par le moyen de la négociation et d’un accord majoritaire. Proposer de supprimer la rémunération des salariés et la durée du travail du champ des accords de préservation et de développement de l’emploi procède, d’une certaine manière, d’un manque de confiance à l’égard des syndicats !

Murmures sur les travées du groupe CRC.

Debut de section - Permalien
Myriam El Khomri, ministre

À chaque organisation syndicale que je rencontre, je dis : montrez-moi un tel accord, car, moi, je ne connais que des accords signés ou non signés ! C’est là que nous avons une vraie divergence.

Vous ne pouvez pas considérer qu’être représenté par une organisation syndicale équivaut à être seul face à son employeur !

Nouvelles protestations sur les travées du groupe CRC.

Debut de section - Permalien
Myriam El Khomri, ministre

J’estime pour ma part qu’il faut développer le syndicalisme dans notre pays, créer des acteurs forts, c’est-à-dire des acteurs dont on renforce à la fois la légitimité et la responsabilité. C’est ce que l’on retrouve dans le dispositif de l’article 11.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Cohen

Nous n’avons vraiment pas la même lecture du texte !

Debut de section - Permalien
Myriam El Khomri, ministre

Par ailleurs, si l’accord conclu est défavorable aux salariés, ne pensez-vous pas que les organisations syndicales qui l’auront signé se feront « retoquer » par ces mêmes salariés aux prochaines élections professionnelles ? C’est quand même ça, la réalité du terrain ! En prévoyant un dispositif où les syndicats s’engagent, le Gouvernement a évidemment tout cela en tête.

Je fais confiance aux syndicats et au dialogue social. Je considère que ce n’est pas le projet unilatéral de l’employeur qui doit primer, mais un autre projet de société, celui que je défends au travers de ce texte.

L’amendement n’est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

L’amendement n° 646, présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David, Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Alinéa 3

Après les mots :

il transmet

insérer les mots :

dans le délai d’un mois

La parole est à Mme Laurence Cohen.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Cohen

Je ne sais pas si vous faites confiance aux syndicats, madame la ministre, mais, en ce qui nous concerne, nous ne sommes pas convaincus par vos arguments depuis le début de ce débat, et nous ne sommes pas les seuls !

L’alinéa 3 de l’article 11 comporte une imprécision à laquelle il conviendrait de remédier, afin d’éviter un certain nombre d’abus qui pourraient survenir lors de la préparation des négociations en vue de la signature d’accords de préservation et de développement de l’emploi.

Si chacun souscrit ici à l’idée – du moins, je l’espère ! –que l’employeur doit avoir pour obligation de transmettre aux organisations syndicales toutes les informations nécessaires à l’établissement d’un diagnostic partagé, il n’en reste pas moins que l’alinéa en question ne précise pas le délai dans lequel celui-ci doit le faire. L’absence d’une telle précision constitue un manque qu’il conviendrait de corriger. Compte tenu de ce que vous avez dit tout à l’heure, madame la ministre, je suis d’ailleurs persuadée que vous serez d’accord avec moi !

En effet, comment les organisations syndicales pourraient-elles se préparer au mieux à de futures négociations, en lien avec l’ensemble des salariés, sans que le respect d’un certain délai soit garanti ?

Comme le reconnaissent une grande partie des juristes spécialisés en droit du travail, les accords d’entreprise sont déjà par définition favorables aux employeurs. Ne pas fixer de délai minimal creuserait donc encore davantage le fossé entre eux et les salariés, et ce bien sûr systématiquement au détriment de ces derniers.

C’est pourquoi nous proposons d’imposer à l’employeur de transmettre ces informations dans un délai d’un mois, durée qui semble être la plus pertinente au regard de ce que jugent les syndicats et les experts en droit du travail.

À notre avis, refuser d’instaurer un tel délai serait un non-sens en matière de démocratie dans l’entreprise – puisque chacun, quelles que soient les positions qu’il adopte, prétend défendre la démocratie dans l’entreprise –, et rendrait caducs ces accords de préservation et de développement de l’emploi.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Baptiste Lemoyne

La commission émet un avis défavorable sur cet amendement, parce que la rédaction de l’article ne permet pas de connaître le point de départ précis à compter duquel il faudrait faire courir ce délai d’un mois. Le texte ne prévoit en effet la transmission des informations que « lorsque l’employeur envisage d’engager des négociations ». C’est donc un peu flou.

En outre, on peut considérer qu’un employeur a un intérêt objectif à transmettre les données le plus rapidement possible, dès lors qu’il souhaite entrer dans une démarche de discussion ou de négociation avec les partenaires sociaux pour aboutir à la signature d’un accord de préservation et de développement de l’emploi. Le comportement naturel des acteurs laisse à penser que l’on n’observera pas d’attitudes dilatoires, car les employeurs seront incités à transmettre rapidement toutes les informations nécessaires à l’établissement d’un diagnostic partagé.

En définitive, la commission est défavorable à l’amendement, non pas en raison de la rédaction de l’amendement lui-même, mais de l’article 11 tel qu’il était rédigé initialement.

Debut de section - Permalien
Myriam El Khomri, ministre

Le Gouvernement est défavorable à cet amendement.

Tout d’abord, les partenaires sociaux eux-mêmes nous demandent d’arrêter d’être trop formalistes. On est en effet parfois tenté de faire preuve d’un peu trop de formalisme quand on élabore la loi, alors que cela peut rendre les choses plus compliquées par la suite sur le terrain.

Ensuite, pourquoi fixer le délai à un mois ? La durée pourrait être plus longue, elle pourrait également l’être moins. On pourrait également s’interroger sur le moment à partir duquel il faudrait faire partir ce délai.

En réalité, une règle très claire s’applique : si un chef d’entreprise ne transmet pas les informations nécessaires, il n’y a pas de diagnostic partagé et donc pas d’accord ! Si l’employeur veut en conclure un, il est soumis à l’obligation de transmettre ces informations, comme je l’ai rappelé. L’amendement tend à créer une contrainte pour les deux camps, tant pour les organisations syndicales que pour l’employeur, ce qui ne présente pas beaucoup d’intérêt.

Enfin, contrairement à ce que vous indiquiez tout à l’heure lorsque vous affirmiez que nous allions à l’encontre des conventions de branche, je tiens à rappeler qu’aucun accord d’entreprise ne peut aller en deçà des accords de branche dans les quatre domaines que sont les classifications, la prévoyance, les garanties collectives et les salaires, domaines que nous ne touchons absolument pas dans ce projet de loi.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Cohen

Mme Laurence Cohen. Si j’ai bien compris, la commission serait défavorable à notre amendement, parce que le texte du Gouvernement serait flou. C’est ce que j’ai compris de votre argumentaire, monsieur le rapporteur !

M. le rapporteur opine.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Cohen

D’un côté, on a la commission et son avis, de l’autre, la démonstration – certes intéressante – de Mme la ministre, selon laquelle il ne faut pas trop de formalisme. Mais, depuis le début de l’examen du texte, c’est toujours aux mêmes qu’on reproche d’être formalistes ! Alors que nous proposons des amendements visant à mieux encadrer les dispositions figurant dans le texte et à sécuriser les droits des salariés, on nous reproche d’être trop formalistes, trop confus et de ne pas les avoir suffisamment élaborés.

Je ne sais pas si cela s’apparente à un dialogue de sourds ; en tout cas, il y a effectivement une divergence non seulement de niveau de langage, mais aussi d’appréciation sur ce qu’est l’entreprise.

Depuis le début du débat, nous revenons toujours sur les mêmes sujets, à savoir l’inversion de la hiérarchie des normes et la mise à sac du principe de faveur. On se rend compte que tous les articles, l’un après l’autre, déclinent la même philosophie. C’est pourquoi nous essayons à chaque fois de montrer les raisons pour lesquelles cette loi est mauvaise pour les salariés et d’améliorer les choses. Malheureusement, c’est évidemment une fin de non-recevoir que l’on nous oppose !

L’amendement n’est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Je suis saisi de six amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 892 rectifié, présenté par MM. Requier, Amiel, Arnell, Bertrand, Castelli, Collin, Esnol, Fortassin et Guérini, Mmes Jouve, Laborde et Malherbe et MM. Mézard et Vall, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 5

Rédiger ainsi cet alinéa :

« L’accord mentionné au premier alinéa ne peut avoir pour effet de diminuer la rémunération mensuelle du salarié.

II. – Alinéas 6 et 7

Remplacer ces alinéas par un alinéa ainsi rédigé :

« Dans les entreprises dépourvues de délégué syndical, cet accord peut être négocié par des représentants élus mandatés par une ou plusieurs organisations syndicales de salariés représentatives dans les conditions prévues aux articles L. 2232-21 et L. 2232-21-1 ou, à défaut, par un ou plusieurs salariés mandatés mentionnés à l’article L. 2232-24.

III. – Alinéa 41

Supprimer cet alinéa.

La parole est à Mme Françoise Laborde.

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Laborde

Monsieur le président, mon propos vaudra pour l’amendement n° 892 rectifié et l’amendement n° 920 rectifié, ce dernier étant un amendement de repli.

À côté des accords dits « défensifs », l’article 11 met en place des accords dits « offensifs », qui ont pour but de pérenniser ou de développer l’emploi.

Or, en l’absence de péril pour l’entreprise ou l’établissement, il paraît inconcevable que ces accords puissent être mis en place sans aucune garantie pour les salariés et que le salaire mensuel de ceux-ci soit diminué.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

L’amendement n° 350, présenté par Mme Bricq, MM. Guillaume et Caffet, Mmes Campion et Claireaux, MM. Daudigny et Durain, Mmes Emery-Dumas, Féret et Génisson, MM. Godefroy, Jeansannetas et Labazée, Mmes Meunier, Riocreux et Schillinger, MM. Tourenne et Vergoz, Mme Yonnet et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 5

Rédiger ainsi cet alinéa :

« L’application des stipulations d’un accord de préservation ou de développement de l’emploi ne peut avoir pour effet de diminuer la rémunération mensuelle des salariés.

La parole est à Mme Evelyne Yonnet.

Debut de section - PermalienPhoto de Evelyne Yonnet

Cet amendement vise à garantir le maintien de la rémunération des salariés.

Sur le fond, l’article 11 répond à la nécessité de concilier la sécurité des salariés avec l’indispensable adaptation de notre économie à la réalité de marchés en évolution rapide. À moins de considérer que nous devrions quitter le système de l’économie de marché – c’est une option –, il faut permettre aux entreprises de s’adapter à des situations qui, de favorables, peuvent rapidement devenir menaçantes, afin que celles-ci ne soient pas obligées de passer directement par la case « règlement judiciaire ».

Pour obtenir une telle souplesse, il faut respecter les institutions représentatives, leur capacité de réflexion et de conviction. À cet égard, il faut rappeler que les accords de préservation et de développement de l’emploi bénéficieront de la nouvelle procédure des accords majoritaires. Nous observons d’ailleurs que la majorité de la commission a préservé le seuil de 50 % comme condition de validité de ces accords. Qui peut le plus peut le moins : c’est peut-être le signe que la commission ne peut pas vraiment en contester le bien-fondé ! En tout cas, ces accords auront un impact certain sur la pérennité et le développement des entreprises.

Pour en revenir à notre amendement, je crois que la préoccupation que nous exprimons à l’égard de la rémunération des salariés est partagée dans l’ensemble de l’hémicycle. Nous estimons indispensable d’inscrire dans la loi, quels que soient le nom et la finalité que l’on donne aux accords, qu’il s’agisse du maintien, de la préservation ou du développement de l’emploi, le fait que ces accords ne peuvent pas avoir pour effet de diminuer la rémunération des salariés.

Avec l’amendement qu’elle a déposé un peu tardivement, la commission semble finalement rejoindre cette préoccupation, à deux nuances près, mais d’importance : seuls les salaires égaux ou inférieurs à 1, 2 SMIC seraient réellement préservés, et ce uniquement dans le cadre d’un accord de développement de l’emploi ! Le moins que l’on puisse demander d’un accord de développement de l’emploi est en effet qu’il ne conduise pas à une diminution de salaire…

Quelle organisation syndicale osera signer un accord ayant pour effet de diminuer des rémunérations « pléthoriques » s’élevant à 1, 3 ou 1, 4 SMIC ?

Le texte issu des travaux de l’Assemblée nationale fixe un cadre qui préserve l’intérêt de l’entreprise et maintient la rémunération des salariés. Il faut faire confiance à la négociation collective pour une application intelligente de ces dispositions.

Pour nous, le rôle des organisations syndicales est très précieux. Si tout est inscrit dans la loi, quelle bataille les syndicats mèneront-ils demain ? Suivre les transformations économiques et sociales, les accompagner en préservant au maximum non seulement les salariés, mais aussi l’outil de travail, nous semble indispensable. C’est notre rôle à nous tous ici.

Pour toutes ces raisons, le groupe socialiste et républicain appelle à voter cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

L’amendement n° 920 rectifié, présenté par Mme Malherbe, MM. Amiel, Arnell, Bertrand, Castelli, Collin, Esnol, Fortassin et Guérini, Mmes Jouve et Laborde et MM. Mézard, Requier et Vall, est ainsi libellé :

Alinéa 5

Rédiger ainsi cet alinéa :

« L’accord mentionné au premier alinéa du présent article ne peut avoir pour effet de diminuer la rémunération mensuelle du salarié.

Cet amendement a été précédemment défendu.

L’amendement n° 1017, présenté par MM. Lemoyne, Gabouty et Forissier, au nom de la commission, est ainsi libellé :

I. – Après l’alinéa 5

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« L’application des stipulations d’un accord de développement de l’emploi ne peut avoir pour effet de diminuer la rémunération mensuelle des salariés.

II. – Alinéa 6

Après le mot :

accord

insérer les mots :

de préservation ou de développement de l’emploi

La parole est à M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Baptiste Lemoyne

L’amendement vise à écrire noir sur blanc que « l’application des stipulations d’un accord de développement de l’emploi ne peut avoir pour effet de diminuer la rémunération mensuelle des salariés ».

Les accords de préservation de l’emploi, quant à eux, reprennent le dispositif des accords de maintien de l’emploi, les AME, puisqu’il a vocation à s’éteindre.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

L’amendement n° 351, présenté par Mme Bricq, MM. Guillaume et Caffet, Mmes Campion et Claireaux, MM. Daudigny et Durain, Mmes Emery-Dumas, Féret et Génisson, MM. Godefroy, Jeansannetas et Labazée, Mmes Meunier, Riocreux et Schillinger, MM. Tourenne et Vergoz, Mme Yonnet et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 7

Rédiger ainsi cet alinéa :

« Dans les entreprises dépourvues de délégué syndical, cet accord peut être négocié par des représentants élus mandatés par une ou plusieurs organisations syndicales de salariés représentatives dans les conditions prévues aux articles L. 2232-21 et L. 2232-21-1 ou, à défaut, par un ou plusieurs salariés mandatés mentionnés à l’article L. 2232-24.

La parole est à Mme Stéphanie Riocreux.

Debut de section - PermalienPhoto de Stéphanie Riocreux

Pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué ?

Le texte issu de l’Assemblée nationale prévoit qu’un accord d’entreprise puisse être négocié par des représentants élus, mandatés par une ou plusieurs organisations syndicales, dans les entreprises dépourvues de délégué syndical. Pour certains, le mandatement serait pourtant un épouvantail qui aurait pour effet de faire surgir dans une entreprise où régnaient jusqu’alors l’harmonie et la sérénité une horde de syndicalistes venant semer le trouble et la désolation ! §de la manière dont certains – ils sont de plus en plus rares, fort heureusement ! – envisagent le dialogue social avec les organisations syndicales.

Le texte de la commission prévoit de remettre la capacité de négociation du côté des salariés entre les mains de délégués du personnel, ou de maintenir la procédure actuelle de validité des accords à 30 %, sauf exercice du droit d’opposition. Cette solution n’est ni raisonnable ni de nature à préserver la cohésion de tous les acteurs de l’entreprise, surtout dans le cas d’un accord de maintien de l’emploi. Un accord de cette nature est complexe sur le plan à la fois juridique et économique.

Nous l’entendons depuis ce matin dans cet hémicycle : la négociation nécessite des compétences particulières et, le cas échéant, une certaine expertise. Les délégués du personnel, quelles que soient leur bonne volonté et leurs capacités, pourraient se retrouver en difficulté. La procédure envisagée par la commission pourrait alors se révéler source de confusion et de contentieux. Ce n’est pas la bonne manière de faire avancer la cause du dialogue social.

Vous l’avez rappelé, madame la ministre, le mandatement est l’un des moyens de faire progresser un dialogue social actif et responsable et le groupe socialiste et républicain vous soutient dans cette démarche. Nous proposons donc de rétablir le texte issu de l’Assemblée nationale, qui est plus opérationnel que celui de la commission des affaires sociales.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

L’amendement n° 1036, présenté par MM. Lemoyne, Gabouty et Forissier, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Alinéa 7

Remplacer les deux occurrences des mots :

dans les conditions

par les mots :

par les personnes

La parole est à M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Baptiste Lemoyne

La commission émet un avis défavorable sur les amendements n° 892 rectifié, 350 et 920 rectifié, qui visent à rétablir le texte du Gouvernement tel qu’issu de l’Assemblée nationale. Elle émet également un avis défavorable sur l’amendement n° 351.

Par cohérence avec les travaux conduits le 1er juin dernier et la réécriture partielle de l’article 11, elle a par ailleurs déposé les amendements n° 1017 et 1036.

Debut de section - Permalien
Myriam El Khomri, ministre

Le Gouvernement émet un avis favorable sur l’amendement n° 892 rectifié, parce que nous souhaitons bien différencier les AME des accords en faveur de l’emploi, notamment en ce qui concerne la clause relative aux « graves difficultés économiques ».

Le Gouvernement émet également un avis favorable sur les amendements n° 350 et 920 rectifié, même si ces amendements sont moins complets que l’amendement précédent. Il est en outre favorable à l’amendement n° 351.

En revanche, le Gouvernement est défavorable à l’amendement n° 1017 car, comme je le disais, nous souhaitons vraiment distinguer les AME des accords en faveur de l’emploi. Le régime des AME a été fixé par les partenaires sociaux et constitue un engagement à leur égard après la conclusion de l’accord national interprofessionnel, l’ANI, de 2013. Pour nous, la clause relative aux « graves difficultés économiques » différencie les deux types d’accords.

Enfin, le Gouvernement est défavorable à l’amendement n° 1036, car les accords de développement de l’emploi doivent être conclus dans le cadre du mandatement syndical.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à M. Dominique Watrin, pour explication de vote sur l’amendement n° 892 rectifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Watrin

Mon explication de vote sera globale, car deux propositions différentes ont en réalité été formulées en matière de maintien de la rémunération mensuelle des salariés dans le cadre de ces accords de préservation et de développement de l’emploi.

En effet, M. le rapporteur propose que le maintien de la rémunération ne soit garanti que dans le cadre des accords de développement de l’emploi, alors que nos collègues du groupe socialiste et républicain et du groupe du RDSE proposent de ne pas distinguer entre les accords de développement de l’emploi et ceux de préservation de l’emploi.

Quelle que soit la formulation, les garanties sont, de notre point de vue, insuffisantes.

Je donnerai l’exemple, dans mon département, des salariés de la Française de mécanique, société qui appartient au groupe PSA.

Depuis trois ans, chaque salarié a perdu des milliers d’euros en raison du gel des salaires, de la fin du treizième mois et du blocage, voire de la disparition des primes. Malgré tous les sacrifices consentis, et bien que la situation du groupe se soit redressée, ces mesures extrêmement sévères s’appliquent toujours.

Mme la ministre nous a expliqué que la rémunération mensuelle d’un salarié comprenait son salaire et les cotisations sociales de base. Par conséquent, je ne vois pas bien ce que la formulation proposée apporterait aux salariés comme garantie. Le gel des salaires continuerait à s’appliquer, les salariés ne toucheraient toujours pas leurs primes, pas plus que leur treizième mois.

Je rappelle que l’entreprise dont je parle a retrouvé des marges de compétitivité et que son chiffre d’affaires est même en hausse de plus de 6 %. Pourtant, des accords continuent à s’appliquer, ce qui expose les salariés à de nombreux sacrifices.

C’est pourquoi nous ne voterons pas les différents amendements en discussion commune.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à Mme Nicole Bricq, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bricq

J’ai bien noté que Mme la ministre considérait que l’amendement n° 892 rectifié était plus complet que l’amendement n° 350. C’est pourquoi je vais le retirer.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

L’amendement n° 350 est retiré.

Je mets aux voix l’amendement n° 892 rectifié.

J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant de la commission.

Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable et que celui du Gouvernement est favorable.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

Le scrutin a lieu.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

Il est procédé au dépouillement du scrutin.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 342 :

Le Sénat n’a pas adopté.

Je mets aux voix l’amendement n° 920 rectifié.

L’amendement n’est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Je mets aux voix l’amendement n° 1017.

J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant de la commission.

Je rappelle que l’avis du Gouvernement est défavorable.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

Le scrutin a lieu.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

Il est procédé au dépouillement du scrutin.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 343 :

Le Sénat a adopté.

Je mets aux voix l’amendement n° 351.

J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant de la commission.

Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable et que celui du Gouvernement est favorable.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

Le scrutin a lieu.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

Il est procédé au dépouillement du scrutin.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 344 :

Le Sénat n’a pas adopté.

Je mets aux voix l’amendement n° 1036.

L’amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

L’amendement n° 647, présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David, Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Alinéa 9, première phrase

Supprimer le mot :

individuel

La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin.

Debut de section - PermalienPhoto de Brigitte Gonthier-Maurin

Si un employeur engage une procédure de licenciement à l’encontre d’un salarié ayant refusé l’application d’un accord de préservation et de développement de l’emploi, la procédure se fera selon les règles applicables au licenciement individuel pour motif économique. En l’état actuel du texte, la situation est donc beaucoup moins protectrice pour le salarié que pourrait l’être un éventuel licenciement économique collectif.

En effet, dans le cas d’un licenciement individuel pour motif économique, l’employeur n’a pas l’obligation de négocier avec les délégués du personnel. Les informations reçues par le salarié licencié seront insuffisantes – elles seront en tout cas moindres – pour permettre à ce dernier de se défendre correctement.

Combien de salariés, aujourd’hui, connaissent suffisamment leurs droits pour être capables de négocier seuls ? Sans l’appui des organisations syndicales, il est souvent difficile, voire impossible pour eux de le faire.

Sans modification de la rédaction du texte, cette disposition viendrait casser la logique apparente défendue par le Gouvernement sur les accords de préservation et de développement de l’emploi, qui, comme leur nom l’indique, sont censés être des « accords » collectifs, reposant sur une volonté commune des deux parties. On pourrait effectivement voir dans la mesure une quasi-sanction à l’encontre d’un salarié refusant l’accord, le laissant seul à même de se défendre.

C’est pourquoi nous proposons la suppression du terme « individuel ». Cette modification permettrait de mettre en œuvre une logique plus protectrice pour les salariés, sans pour autant négliger les situations individuelles exigeant des clauses spécifiques. Elle offre surtout la garantie d’une plus grande démocratie sociale dans l’entreprise, une démocratie sociale accessible à tous et bénéfique pour tous !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Baptiste Lemoyne

La procédure s’apparente à celle d’un licenciement individuel pour motif économique, mais le motif, en lui-même, n’est pas individuel. Il s’agit donc, comme précisé par le texte, d’un licenciement sui generis.

Si tel n’avait pas été le cas, effectivement, certaines obligations se seraient imposées à l’employeur – par exemple, les obligations relatives à la mise en œuvre d’un PSE, pour plus de dix salariés concernés. Or, on le sait, les mesures de cette sorte font office de verrous et n’incitent pas à la conclusion d’accords.

La commission a donc émis un avis défavorable.

Debut de section - Permalien
Myriam El Khomri, ministre

Il est également défavorable.

Effectivement, nous avons retenu un certain parallélisme avec les accords de maintien de l’emploi, d’où, notamment, l’absence de mise en œuvre d’un PSE si plusieurs salariés refusent. Cela, d’ailleurs, correspond aussi à une demande formulée par les partenaires sociaux dans le cadre de l’ANI de 2013.

Pour autant, nous avons veillé à instaurer de nombreuses garanties, en particulier en termes d’accompagnement spécifique. L’ensemble de ces mesures est détaillé dans l’article 11 du projet de loi et nous avons déjà eu l’occasion d’échanger sur la question.

L’amendement n’est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

L’amendement n° 307 rectifié, présenté par MM. Tourenne, Vaugrenard, M. Bourquin et Lalande, Mme Bricq, MM. Guillaume et Caffet, Mmes Campion et Claireaux, MM. Daudigny et Durain, Mmes Emery-Dumas, Féret et Génisson, MM. Godefroy, Jeansannetas et Labazée, Mmes Meunier, Riocreux et Schillinger, M. Vergoz, Mme Yonnet et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 13

Remplacer les mots :

peut prévoir

par le mot :

prévoit

La parole est à M. Yves Daudigny.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Daudigny

L’objet de cet amendement, dont M. Jean-Louis Tourenne est premier signataire, est une évidence : comment peut-on espérer faire accepter par des salariés un accord de préservation ou de développement de l’emploi, par lequel ils consentent des sacrifices, si leurs efforts ne sont pas partagés par les dirigeants et les actionnaires ?

Nous proposons donc de rendre obligatoire, et non facultative, la clause précisant les conditions dans lesquelles les dirigeants et les actionnaires fournissent des efforts proportionnés à ceux des salariés.

Cette clause est d’autant plus nécessaire, notamment dans les grandes entreprises, que les rémunérations fixes comme variables des dirigeants sont régulièrement l’objet d’étonnement et de commentaires peu amènes. C’est pourquoi, d’ailleurs, le Gouvernement a entrepris dans le projet de loi relatif à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique – le projet de loi Sapin II – d’obliger à tout le moins les conseils d’administration à tenir compte des votes des assemblées générales.

La presse économique s’est aussi fait l’écho d’entreprises importantes qui exigent des efforts des salariés au nom de la compétitivité, mettent en place des plans de licenciement et, parallèlement, augmentent les dividendes annuels et les rémunérations des dirigeants de 20 % ou 30 %. Dans le même temps, dans les TPE et PME de nos territoires, les efforts sont partagés par tous, avec des dirigeants qui travaillent beaucoup et ne sont en rien des privilégiés.

L’opinion ne comprendrait pas que les efforts ne soient pas partagés dans toutes les entreprises par les dirigeants et les actionnaires.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Baptiste Lemoyne

La commission souhaite connaître l’avis du Gouvernement sur cet amendement.

À nos yeux, l’alinéa 13 de l’article 11, tel qu’il est rédigé, ouvre une voie facultative que certaines entreprises emprunteront sans aucun doute pour obtenir la signature d’un accord. L’expérience des AME nous montre, a contrario, que la présence de nombreux verrous a pu parfois décourager la signature d’accords.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Baptiste Lemoyne

Attendons les explications du Gouvernement, madame Bricq, avant de trancher définitivement la question.

La commission, je le précise, a ajouté une clause de retour à meilleure fortune pour les salariés. Nous considérons avoir trouvé là une disposition qui leur est favorable, leur permettant de recueillir des fruits de leurs efforts. Si on leur demande de « se serrer la ceinture », soit pour sauver l’entreprise, soit pour conquérir de nouveaux marchés, ils doivent en « voir la couleur » à un moment donné ! Ce dividende du salarié, en quelque sorte, ne semblerait absolument pas volé !

Votre avis, madame la ministre, serait très précieux pour éclairer le vote à venir.

Debut de section - Permalien
Myriam El Khomri, ministre

La position du Gouvernement est alignée sur celle de la commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale, qui avait émis un avis défavorable sur une proposition identique à celle qui est avancée par les auteurs de cet amendement, laissant le choix aux partenaires sociaux de fixer les contreparties à mettre en œuvre dans le cadre de l’accord.

Dans le texte soumis au 49.3, nous avons repris les termes « peut prévoir », sachant que c’est la question de la proportion qui a fait l’objet d’un débat au sein de la commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale, puisque, contrairement aux AME, nous ne sommes pas, ici, dans une situation de graves difficultés économiques.

L’avis est donc défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Baptiste Lemoyne

Peut-être le groupe socialiste, eu égard aux explications de Mme la ministre, accepterait-il de retirer son amendement…

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à Mme Nicole Bricq, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bricq

Nous n’avons pas l’intention de retirer notre amendement.

J’entends l’argumentation du rapporteur, qui diffère de celle de Mme la ministre. Effectivement, les AME n’ont pas donné les résultats escomptés, tant le dispositif avait été corseté, mais cette disposition n’est pas de celles qui ont bloqué.

Mme la ministre donne, quant à elle, une autre explication, que je comprends du reste : le fait que l’accord « puisse prévoir » laisse une marge de négociation, notamment aux organisations syndicales, pour demander des efforts proportionnés des dirigeants et actionnaires en guise de contrepartie.

Toutefois, au moment où nos collègues députés ont mené leurs travaux en commission des affaires sociales, nous n’avions pas encore connaissance de certains excès, révélés par la suite, en matière de rémunérations, notamment variables, d’où, d’ailleurs, la disposition prévue dans le projet de loi Sapin II, et rappelée tout à l’heure par M. Yves Daudigny.

Franchement, il serait très difficile pour nous de retirer cet amendement. Si des efforts doivent être demandés, ils doivent être fournis par tous, y compris par les dirigeants !

Vous dites, monsieur le rapporteur, avoir inséré une clause de retour à bonne fortune. Cette clause, que vous appliquez aux salariés, peut parfaitement l’être aux dirigeants ! Je ne vois rien de choquant à cela. Mais là, nous sommes, non plus dans votre philosophie, mais dans celle que nous partageons avec Mme la ministre !

Donc, nous ne souhaitons pas retirer cet amendement, dont la charge symbolique est très forte.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à M. Gérard Roche, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Roche

Nous avons adopté un certain nombre d’amendements en faveur d’accords dits « offensifs ». Le terme est dur, mais c’est bien ce que nous avons voté.

Pour l’image du Sénat, il serait regrettable que nous assortissions ces efforts financiers qui vont être demandés aux salariés d’un rejet de l’amendement de nos collègues socialistes.

C’est un problème d’affichage, mes chers collègues. Nous donnerions une bien mauvaise image au public, si nous demandions aux salariés de réaliser un certain nombre d’efforts pour essayer de sauver leur entreprise, sans avoir la même exigence vis-à-vis des employeurs et des actionnaires.

C’est pourquoi, à titre personnel, je voterai cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

Je me réjouis que les socialistes n’aient pas retiré leur amendement, que je m’apprêtais à reprendre. Je suis tout à fait satisfait de constater qu’ils jugent normal d’envisager une modulation des rémunérations des patrons, dès lors que les salariés sont aussi mis à contribution, afin que chacun participe à l’effort général.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Je mets aux voix l’amendement n° 307 rectifié.

J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant de la commission.

Je rappelle que la commission a souhaité connaître l’avis du Gouvernement, et que celui-ci est défavorable.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

Le scrutin a lieu.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

Il est procédé au dépouillement du scrutin.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 345 :

Le Sénat n’a pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Je suis saisi de dix amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

Les amendements n° 449 rectifié et 879 rectifié sont identiques.

L’amendement n° 449 rectifié est présenté par Mmes Billon et Lamure, MM. Bouchet, Canevet, Cadic, Danesi et Adnot, Mmes Deromedi et Primas et M. Vaspart.

L’amendement n° 879 rectifié est présenté par Mme Aïchi et M. Labbé.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Alinéas 17 à 23

Supprimer ces alinéas.

La parole est à M. Olivier Cadic, pour présenter l’amendement n° 449 rectifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Olivier Cadic

Cet amendement, soutenu par plusieurs membres de la délégation aux entreprises, tend à supprimer la nouvelle obligation, évidemment à la charge de l’employeur, de payer un expert-comptable pour assister les délégués syndicaux, ou équivalents, dans la négociation des accords défensifs ou offensifs.

C’est encore une nouvelle contrainte de gestion que l’on fait peser sur l’employeur alors que la priorité de ce dernier, dans le contexte de l’article 11, est par définition de préserver ou développer l’emploi. Ces alinéas préservent certes l’emploi des experts-comptables, mais pas nécessairement celui des salariés des entreprises concernées !

En outre, on peut s’interroger sur le choix de cette profession par rapport à d’autres, notamment juridiques, qui auraient certainement une expertise très légitime à apporter à des délégués syndicaux soucieux d’avoir les meilleurs conseils pour négocier au mieux.

Au-delà de cette appréciation de bon sens, une telle disposition nous semble contraire au respect des règles de concurrence du droit européen.

Pour toutes ces raisons, il nous a semblé judicieux de proposer la suppression de ces alinéas 17 à 23.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à Mme Leila Aïchi, pour présenter l’amendement n° 879 rectifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Leila Aïchi

Cet amendement vise à supprimer les alinéas 17 à 23 de l’article 11, ayant pour objet, effectivement, de créer une nouvelle situation de monopole au profit des seuls experts-comptables pour assister les délégués syndicaux ou, à défaut, les élus ou les salariés mandatés dans la négociation des accords sur l’emploi.

Il s’agit, d’après nous, d’une atteinte au périmètre du droit. L’article 11 tend à instaurer, au profit des experts-comptables, un monopole d’assistance qui n’est nullement justifié par l’intérêt général ou par l’intérêt des salariés, et qui, en tout état de cause, dépasse le périmètre d’intervention des experts-comptables, même à titre accessoire.

Alors que la question des accords sur l’emploi est exclusivement d’ordre juridique, il est totalement incompréhensible que le monopole juridique créé le soit au profit d’une profession non juriste.

De surcroît, ces dispositions engendrent une distorsion de concurrence entre les experts-comptables et les autres professionnels, notamment ceux qui sont habilités à intervenir en qualité de conseil juridique à titre principal dans les conditions fixées par les dispositions du titre II de la loi du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques.

Enfin, l’institution de droits exclusifs au profit des seuls experts-comptables, telle que prévue par ces alinéas, est contraire à l’intérêt des délégués syndicaux, des élus et des salariés mandatés. Ces derniers sont ainsi privés de la possibilité de recourir à l’expert le plus adapté à leur besoin d’assistance, notamment dans les domaines juridiques ou techniques, les experts-comptables ne pouvant intervenir que dans le périmètre restreint de leurs compétences.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

L’amendement n° 1020, présenté par MM. Lemoyne, Gabouty et Forissier, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Alinéa 17

Remplacer les mots :

élus ou les salariés mandatés mentionnés

par les mots :

personnes mentionnées

La parole est à M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Baptiste Lemoyne

Il s’agit d’un amendement de coordination, monsieur le président.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Les amendements n° 83, 101 rectifié, 112 rectifié, 131 rectifié, 174, 878 rectifié et 897 rectifié sont identiques.

L’amendement n° 83 est présenté par M. Courteau.

L’amendement n° 101 rectifié est présenté par Mme Des Esgaulx et M. Pierre.

L’amendement n° 112 rectifié est présenté par M. Godefroy, Mmes Emery-Dumas et Génisson et M. Tourenne.

L’amendement n° 131 rectifié est présenté par MM. Daudigny et Bigot.

L’amendement n° 174 est présenté par MM. Montaugé et Cabanel.

L’amendement n° 878 rectifié est présenté par Mme Aïchi et M. Labbé.

L’amendement n° 897 rectifié est présenté par MM. Mézard, Amiel, Bertrand, Arnell, Barbier, Castelli, Collin, Esnol, Fortassin et Guérini, Mmes Jouve, Laborde et Malherbe et MM. Requier et Vall.

Ces sept amendements sont ainsi libellés :

Alinéa 17

Remplacer les mots :

un expert-comptable

par les mots :

tout professionnel habilité

La parole est à M. Roland Courteau, pour présenter l’amendement n° 83.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Courteau

En l’état, le projet de loi tend à instituer un monopole au profit des seuls experts-comptables pour assister dans la négociation les délégués syndicaux ou, à défaut, les élus ou les salariés mandatés.

Le présent amendement a pour objet de mettre en conformité cette faculté à se faire assister pendant les négociations par un tiers avec les stipulations du traité sur l’Union européenne, le principe général de liberté du commerce et de l’industrie, les dispositions de la loi du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques et celles de l’ordonnance du 19 septembre 1945 portant institution de l’ordre des experts-comptables et réglementant le titre et la profession d’expert-comptable.

Le projet de loi, dans sa rédaction actuelle, tend effectivement à créer une distorsion de concurrence entre les experts-comptables et les autres professionnels, notamment ceux qui sont habilités à intervenir en qualité de conseil juridique à titre principal.

Cette situation, caractérisant une rupture de concurrence, ne satisfait pas aux exigences de libre circulation des services et de libre et égale concurrence visées par le traité sur l’Union européenne, en ce qu’elle crée un monopole au profit des experts-comptables, qui n’est justifié ni par l’intérêt général ni par les intérêts du public.

Ainsi, l’expert-comptable se voit doté d’un monopole sur l’accompagnement des délégués syndicaux, des élus et des salariés mandatés dans les négociations des accords d’entreprise, sans considération des compétences et métiers dont les organisations syndicales ont besoin pour les accompagner dans ces processus de négociation.

Ces compétences peuvent être celles des experts-comptables dans le domaine économique et financier, mais aussi celles d’avocats, s’agissant des questions de droit, d’organisation et de négociation, ou de médiateurs assermentés, s’agissant de l’assistance à la négociation.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Les amendements n° 101 rectifié et 112 rectifié ne sont pas soutenus.

La parole est à M. Yves Daudigny, pour présenter l’amendement n° 131 rectifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Daudigny

Dans le cadre de cette nouvelle catégorie d’accords dits de préservation et de développement de l’emploi, l’article 11 tend à prévoir que le comité d’entreprise ou, à défaut, les délégués syndicaux, les représentants élus mandatés ou les salariés mandatés peuvent désigner un expert-comptable pour les assister dans la négociation.

Nous vous proposons, mes chers collègues, de ne pas limiter cette désignation aux seuls experts-comptables et de l’élargir à toute personne habilitée, et ce pour deux raisons.

En premier lieu, la négociation d’un tel accord doit s’engager après l’établissement d’un diagnostic partagé entre l’employeur et les organisations syndicales de salariés, auxquelles ont été transmises toutes les informations nécessaires à cette appréciation.

Il s’agit ici, pour les représentants des salariés, d’envisager l’entreprise sous tous ses aspects, non seulement économiques, mais aussi juridiques et techniques. De même, l’assistance qui pourra leur être apportée dans la négociation ne se limite pas à la comptabilité de l’entreprise et comporte également une dimension de méthode, voire de médiation.

Il est donc de l’intérêt des représentants des salariés que puisse être désignée la personne dont le domaine de compétence leur paraît le plus adapté à la situation et le plus utile à la négociation.

En deuxième lieu, restreindre cette assistance à la seule profession des experts-comptables irait à l’encontre, semble-t-il, d’un certain nombre de dispositions, tant de la réglementation européenne que du droit interne.

Ont été évoquées, à cet égard, les règles du traité sur l’Union européenne relatives à la liberté du commerce et de l’industrie ; celles de la loi du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques, qui autorisent les professions réglementées à donner des consultations juridiques relevant de leur activité principale ; celles, enfin, de l’ordonnance du 19 septembre 1945 portant institution de l’ordre des experts-comptables et réglementant le titre et la profession d’expert-comptable, selon laquelle les prestations de conseils ne peuvent être que l’accessoire d’une mission principale.

Pour toutes ces raisons, de droit et de fait, dans l’intérêt de l’ensemble des acteurs appelés à négocier, il nous paraît opportun de ne pas restreindre le domaine de l’assistance et du conseil auquel il peut être recouru.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

L’amendement n° 174 n’est pas soutenu.

La parole est à Mme Leila Aïchi, pour présenter l’amendement n° 878 rectifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Leila Aïchi

Le présent amendement a pour objet de mettre en conformité la faculté à se faire assister pendant les négociations par un tiers avec les stipulations du traité sur l’Union européenne – à savoir le principe général de liberté du commerce et de l’industrie –, les dispositions de la loi du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques et celles de l’ordonnance du 19 septembre 1945 portant institution de l’ordre des experts-comptables et réglementant le titre et la profession d’expert-comptable.

Ainsi, mes chers collègues, nous vous proposons d’élargir ce périmètre à tous les professionnels habilités.

Dans sa rédaction actuelle, le projet de loi tend à créer une distorsion de concurrence entre les experts-comptables et les autres professionnels, notamment ceux qui sont habilités à intervenir en qualité de conseil juridique.

Cette situation, caractérisant une rupture de concurrence, ne satisfait pas aux exigences de libre circulation des services et de libre et égale concurrence visées par le traité sur l’Union européenne, en ce qu’elle crée un monopole au profit des experts-comptables qui n’est justifié ni par l’intérêt général ni par les intérêts du public.

Enfin, cette disposition est contraire à l’intérêt des délégués syndicaux, des élus et des salariés mandatés, dans la mesure où ces derniers sont privés de la possibilité de recourir à l’expert le plus expérimenté et le mieux adapté à leurs besoins.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à Mme Françoise Laborde, pour présenter l’amendement n° 897 rectifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Laborde

Cet amendement est largement défendu, monsieur le président.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Baptiste Lemoyne

Les amendements identiques n° 449 rectifié et 879 rectifié visent à supprimer la possibilité, pour les négociateurs représentant les salariés, de bénéficier de l’expertise d’un expert-comptable.

Le sujet, je le sais, tient à cœur à Olivier Cadic, qui l’a défendu dans le cadre des travaux de la commission.

L’accord dont il est question ici, qu’il soit offensif ou défensif, revêt une grande importance. Il sera, d’une certaine manière, fondamental pour les trois ou quatre années qui vont suivre dans l’entreprise.

Il semble donc essentiel que les salariés puissent se forger une idée précise de la situation et du diagnostic établi, au regard des éléments transmis par l’employeur, et puissent, dans ce cadre, bénéficier de l’aide d’un expert. Il y va de la loyauté du dialogue, mais cette assistance est certainement aussi de nature à faciliter la conclusion d’un accord.

Au terme d’un débat animé, dans lequel Olivier Cadic a défendu ses convictions, la commission a donc émis un avis défavorable sur ces deux amendements n° 449 rectifié et 879 rectifié.

Les amendements suivants sont relatifs à la nature précise des experts auxquels on pourrait avoir recours.

Le texte proposé par le Gouvernement précise : « afin d’assister dans la négociation les délégués syndicaux ou, à défaut, les élus ou les salariés mandatés mentionnés au dernier alinéa du I, un expert-comptable peut être mandaté ».

La commission souhaite connaître l’avis du Gouvernement sur ce point, étant entendu, néanmoins, que les AME – lesquels ont tout de même inspiré, en partie, la rédaction de l’article 11 – prévoyaient bien la possibilité d’une assistance par un expert-comptable. Aucune autre profession n’était citée, et l’on n’avait pas retenu un terme générique, comme « professionnel habilité ».

Depuis le début, mes chers collègues, nos discussions sur cet article 11 témoignent du travail réalisé par la commission, un travail d’unification des régimes – dans le cadre de cet article – qui nous a conduits à importer un certain nombre de dispositions issues des AME.

Voilà pourquoi le recours spécifique à un expert-comptable ne nous paraissait pas extravagant, mais nous souhaitons tout de même recueillir l’avis du Gouvernement sur ces amendements.

Debut de section - Permalien
Myriam El Khomri, ministre

Ce dispositif a été choisi par les partenaires sociaux dans le cadre de l’ANI du 11 janvier 2013 sur la sécurisation de l’emploi. Dans cet accord, les partenaires sociaux ont décidé de confier à un expert-comptable la compétence à la fois pour accompagner les comités d’entreprise dans la négociation sur les orientations stratégiques, mais également pour assister les élus dans les procédures de licenciement économique et pour accompagner les syndicats qui signent un accord de maintien de l’emploi. Il s’agit donc d’un parallélisme des formes par rapport aux AME.

J’ai interrogé de nouveau les organisations syndicales sur le recours à l’expert-comptable après le dépôt des amendements. Elles ont clairement exprimé leur choix. Il n’est donc pas exact de dire que celui-ci est contraire à leurs intérêts.

Ce choix est-il justifié ? Lorsque nous avons abordé précédemment la question du diagnostic partagé, nous avons constaté que la mission d’accompagnement des organisations syndicales dans le cadre des accords de développement de l’emploi exigerait des compétences avant tout comptables et financières.

L’enjeu principal est de bien comprendre tous les éléments d’ordre économique, financier et social que fournira l’employeur – nous avons eu le débat tout à l’heure sur le délai d’un mois –, en amont de la négociation, afin d’apprécier la situation de l’entreprise. C’est en tout cas la volonté qui a été clairement exprimée par les organisations syndicales. Le diagnostic partagé, je le redis, est le point crucial et l’enjeu véritable de ce débat. Les quelques exemples que nous avons cités en attestent. C’est aussi pourquoi les compétences requises sont plutôt financières et comptables.

J’entends bien tous les arguments qui ont été invoqués. Toutefois, ouvrir cet appui à d’autres professionnels comme des avocats, qui sont tout à fait légitimes en matière d’expertise juridique, n’est pas l’enjeu principal. Je rappelle enfin que rien n’empêchera les syndicats ou le comité d’entreprise de faire en outre appel à d’autres professionnels s’ils l’estiment nécessaire à tel ou tel moment de la négociation.

En conséquence, le Gouvernement émet un avis défavorable sur l’ensemble des amendements.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à M. Gérard Longuet, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Longuet

J’ai deux soucis. Le premier me fait sourire, mais il est grave.

Nous sommes soumis à une déontologie qui exige la présentation de nos intérêts lors d’un vote. Or j’ai un intérêt très fort dans ce vote, ayant – depuis longtemps – une épouse avocat – également depuis longtemps. Si je prends position pour ces amendements, ce que je crois légitime, d’aucuns risquent de me reprocher une confusion d’intérêts, me reprochant de voter pour préserver la paix du ménage… C’est un vrai sujet.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Longuet

Sur le fond, et plus sérieusement, je regrette votre position, madame la ministre, car elle donne le sentiment que seule Secafi-Alpha a la possibilité d’intervenir dans l’évaluation.

Je comprends très bien que les syndicats soient attachés à cette organisation et à quelques autres cousines, mais, très honnêtement, je pense que nous pourrions étendre cette mission de conseil à d’autres compétences. En effet, bien des entreprises en difficultés ont été sauvées par des avocats, qui sont devenus de vrais professionnels, ou par des salariés de sociétés, investisseurs financiers de retournement, qui sont aussi de vrais professionnels. Les experts-comptables ont en général une vue rétrospective parfaite – c’est d’ailleurs leur raison d’être –, mais pas nécessairement une vue prospective, car les business plans sont établis plutôt par les financiers qui prennent des risques sur des projets.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à Mme Nicole Bricq, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bricq

Cette querelle entre les gens du chiffre et les gens du droit est bien connue.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Longuet

Ce n’est pas une querelle, c’est un vrai débat !

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bricq

Les barreaux, qu’il s’agisse du Conseil national ou des barreaux dans les départements, ont agi auprès des sénateurs. Pour notre part, nous avons expérimenté la situation lors de l’examen du projet de loi pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques, à l’issue duquel les avocats l’ont emporté sur les experts-comptables.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bricq

Donc, nous connaissons le sujet.

Si j’interviens en explication de vote sur ces amendements, c’est parce que nous sommes confrontés à une question récurrente : le coût des experts-comptables et celui des expertises techniques à la charge de l’employeur, dont il ne peut réclamer le remboursement au comité d’entreprise. Même si l’expertise demandée par un CHSCT est annulée, c’est l’employeur qui est tenu de la prendre en charge.

Cette question revient très régulièrement, car des sommes importantes sont en jeu. Ces expertises ont effectivement un coût très élevé et nécessitent souvent des contre-expertises techniques.

M. Cadic invoque à l’appui de son raisonnement le monopole syndical pour justifier que l’entreprise soit déchargée du coût de l’expertise. Or, lorsque nous avons discuté du monopole syndical, cher collègue, vous aviez affirmé que vous étiez contre. Vous voulez donc gagner sur les deux tableaux. C’est la raison pour laquelle nous ne sommes pas du tout d’accord avec l’objet de ces amendements, qui visent notamment à avantager les avocats. Au nom du groupe socialiste, je ne les voterai pas.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Daudigny

Je pensais, et je pense toujours, avoir présenté une argumentation cohérente et solide. Néanmoins, au vu des éléments présentés à son tour par Mme la ministre avec beaucoup de clarté et de cohérence, comme à son habitude depuis une semaine, je retire mon amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

L’amendement n° 131 rectifié est retiré.

La parole est à M. Olivier Cadic, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Olivier Cadic

M. Olivier Cadic. Je remercie M. le rapporteur d’avoir rappelé mes convictions. Celles-ci n’ont pas changé, bien que j’aie entendu l’argumentaire de Mme la ministre.

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Olivier Cadic

Madame Bricq, vous aviez très bien commencé avec la question du coût sur laquelle nous sommes tout à fait d’accord avec vous et qui motive, pour partie, cet amendement. Je regrette juste que vous n’ayez pas tout à fait compris la question du monopole. Ce qui était en cause, ce n’était pas le monopole syndical.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bricq

Dans ce cas, il ne faut pas le faire figurer dans l’objet de votre amendement !

Debut de section - PermalienPhoto de Olivier Cadic

C’était le fait que cette question soit réservée aux experts-comptables, comme l’ont également souligné d’autres intervenants.

Comme l’a rappelé à juste titre Gérard Longuet, il n’est pas opportun de réserver cette assistance aux experts-comptables, afin qu’ils revérifient en fin d’année les comptes des entreprises avec les bilans. Tout le monde a conscience des dérives qui peuvent en résulter…

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bricq

Alors, vous êtes pour les syndicats et non pour les avocats ! Vous aggravez votre cas.

Debut de section - PermalienPhoto de Olivier Cadic

… et qui sont aussi très régulièrement contestées par les entreprises.

Nous pouvons ne pas être d’accord, madame Bricq, et je respecte votre avis. Seulement, nous voterons différemment.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à M. Jean-Noël Cardoux, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Noël Cardoux

J’ai écouté avec attention ce débat. Permettez simplement à un ancien professionnel qui n’exerce plus d’apporter un éclairage concernant la terminologie employée.

Beaucoup de choses ayant été dites, je me contenterai d’insister sur deux formulations.

En premier lieu, les conseils juridiques n’existent plus, Gérard Longuet l’a parfaitement expliqué. Cette profession a été supprimée et fondue dans l’ordre des avocats. En conséquence, dans un amendement ou dans une explication, n’employons plus ces termes.

En second lieu, l’expression « professionnel habilité » ne veut rien dire : habilité par qui, par quoi, comment ? On ne peut que se référer à des professions réglementées. À ce propos, Mme Bricq a parfaitement raison, la querelle du chiffre et du droit est connue depuis de nombreuses années. J’y ai moi-même participé, mais dans la pratique, sur le terrain, les angles s’arrondissent.

Il convient d’évoquer également les experts judiciaires inscrits près les cours d’appel. Au sein de la section des experts judiciaires, se trouvent en effet des experts en diagnostic, c’est-à-dire des experts-comptables spécialisés ou d’autres experts spécialisés dans les diagnostics d’entreprise et qui ont été habilités par les cours d’appel.

À mon sens, dans certaines procédures particulières, l’expert-comptable qui aura été mandaté pourra légitimement s’appuyer sur un avocat pour aborder certains problèmes juridiques.

Enfin, les honoraires sont réglementés par des procédures très précises au sein de l’Ordre national des experts-comptables et soumis à des barèmes. À mon sens, une fois ce texte adopté, tant le Gouvernement que les partenaires sociaux devraient prendre contact avec le président du Conseil national de l’Ordre, afin de lui demander d’élaborer une norme sur les conditions d’intervention pour assister les partenaires sociaux et les comités d’entreprise dans le cadre de ce texte, et de fixer un barème en fonction des masses financières, par exemple. Cela serait de nature à rassurer tout le monde sur le plan financier.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à Mme Marie-Christine Blandin, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Christine Blandin

Les deux premiers amendements de cette liasse tendent à valoriser la diversité des experts. D’ailleurs, dans certaines entreprises où sévissent les éthers de glycols ou l’amiante, les experts toxicologiques seraient également bienvenus pour établir un bilan !

C’est pourquoi nous sommes assez favorables à la série d’amendements commençant par l’amendement n° 83 visant à favoriser la diversité, conformément au droit européen, et se terminant par l’amendement n° 878 rectifié.

Il en va différemment pour les deux premiers à propos desquels l’un de nos collègues a parlé au nom des avocats en disant qu’il n’avait pas de conflit d’intérêt, …

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Christine Blandin

Mme Marie-Christine Blandin. … et un autre au nom des experts en disant qu’il n’exerçait plus. Puisque nous avons entendu les deux sons de cloches, les conflits d’intérêts n’existent plus…

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Christine Blandin

Je voulais juste insister sur un point. Ces deux premiers amendements qui tendent à réintroduire les avocats aux côtés des experts-comptables le font d’une drôle de manière : ils suppriment sept alinéas, dont ceux qui prévoient le financement de la mission des experts-comptables par l’entreprise. Il doit être possible de défendre la présence des avocats sans supprimer le financement de la mission d’expertise !

Debut de section - Permalien
Myriam El Khomri, ministre

Qu’il n’y ait aucune méprise concernant les propos que j’ai tenus tout à l’heure, compte tenu de ce qu’a dit notamment M. Longuet.

Je reconnais bien évidemment le rôle d’accompagnement des avocats en matière de droit du travail ; je crois l’avoir déjà dit.

Debut de section - Permalien
Myriam El Khomri, ministre

Mes propos faisaient davantage écho au débat que nous avons eu tout à l’heure sur la situation de l’entreprise et la question du diagnostic. C’est vraiment l’enjeu central, préalable indispensable pour instaurer un climat de confiance en vue de la négociation ultérieure.

L’appui d’un expert-comptable vise à permettre un constat objectif sur la situation de l’entreprise, qui constitue en ce sens une vraie garantie en matière de sincérité. Nous avons beaucoup parlé au cours de la journée de la loyauté et de la transparence. Or, à mes yeux, de cette intervention dépendra ensuite la sincérité de la démarche de la négociation.

Cela n’enlève rien au travail vraiment formidable que réalisent les avocats, notamment en matière de droit du travail, …

Debut de section - Permalien
Myriam El Khomri, ministre

… à côté d’autres intervenants, bien évidemment. Le choix des partenaires sociaux est décisif pour répondre à cet enjeu.

Les amendements ne sont pas adoptés.

L’amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Courteau

Compte tenu des explications de Mme la ministre, je retire l’amendement n° 83.

Les amendements ne sont pas adoptés.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

L’amendement n° 648, présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David, Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Alinéa 25, seconde phrase

Remplacer le mot :

cinq

par le mot :

trois

La parole est à M. Dominique Watrin.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Watrin

L’article 11, sous bien des aspects, rend quasiment inutile la discussion de l’article 30 relative à la définition du licenciement économique que nous aurons plus tard, tant il permet de faciliter les plans de restructuration.

Il s’agit en effet, comme nous l’avons vu, d’aller encore plus loin que ce qui existe – c’est déjà difficilement supportable – en matière d’accords dits « de préservation de l’emploi », en permettant des suppressions massives d’emplois dans le cadre de grands groupes, comme Renault ou Peugeot. J’en ai fait la démonstration lors de mes interventions précédentes.

Le sujet qui nous préoccupe ici plus précisément est celui de la durée de validité de l’accord en question, qui est fixée, sauf accord collectif différent, à cinq ans, reprenant une orientation déjà imprimée dans le passé.

Signer les accords prévus par l’article 11, c’est, de fait, accepter que les salariés portent le risque industriel de leur propre entreprise, dont ils ne sont le plus souvent pas actionnaires, en conjuguant leurs efforts et leurs sacrifices pour faire en sorte qu’elle se redresse et puisse, selon la formule de l’article 11, « préserver et développer l’emploi ».

Nous aurons peut-être ici un débat sur les clauses de revoyure, mais cette possibilité n’est envisagée dans le présent projet de loi qu’à l’issue de l’accord. Donc, en l’état actuel du texte, les salariés pourront constater une reprise des dividendes, une augmentation parfois importante du chiffre d’affaires ou des bénéfices nets, à l’instar de ce qui s’est produit dans ma circonscription, comme je l’ai évoqué lors de mon intervention précédente, mais l’accord durera cinq ans ou s’appliquera pendant la durée qui a été fixée lors de sa négociation.

Nous restons opposés à ce dispositif et nous proposons maintenant, par un amendement de repli, de supprimer cette barrière en réduisant la durée de l’accord de cinq ans à trois ans.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Baptiste Lemoyne

Il s’agit en fait de modifier la durée supplétive de l’accord prévu à l’article 11, si les négociateurs n’ont pas d’eux-mêmes prévu de limite, même si l’on peut légitimement penser que, sur des accords aussi importants, une durée sera négociée. Le texte initial du Gouvernement prévoyait un délai de cinq ans, tandis que M. Watrin et les membres du groupe CRC proposent trois ans. La commission ayant été assez sensible aux arguments en faveur d’une réduction du délai, elle a émis un avis favorable sur cet amendement.

Debut de section - Permalien
Myriam El Khomri, ministre

Nous avons décidé, faute de précision dans l’accord, que celui-ci soit fixé pour une durée déterminée de cinq ans qui est la durée de droit commun de tous les accords collectifs, y compris les accords de maintien de l’emploi. Les partenaires sociaux peuvent convenir d’une durée plus courte ou plus longue. Cinq ans représentent une durée raisonnable, puisque la négociation de tels accords est nécessairement longue et qu’il faut prévoir une durée d’application de l’accord suffisante.

En définitive, nous nous alignons notamment sur la durée des AME, mais toujours en prévoyant la possibilité, pour les partenaires sociaux, de s’entendre sur une durée plus courte. C’est pourquoi le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à Mme Annie David, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

J’entends bien que vous avez voulu fixer un délai de cinq ans, madame la ministre. Nous, nous souhaitons réduire cette durée à trois ans, car l’article 11 tend à permettre l’application de ces fameux accords offensifs aux salariés, même s’ils leur sont plus défavorables. En tout cas, ces accords s’inscrivent pleinement dans l’inversion de la hiérarchie des normes et l’abandon du principe de faveur, comme je vous le disais.

Dans la mesure où ces accords peuvent aller bien en deçà de la loi, il nous semble important que leur durée de vie maximale ne dépasse pas trois ans, d’autant qu’aucune clause de revoyure n’est prévue. Cela signifie que, pendant ces trois ans, l’entreprise continue de connaître des difficultés économiques. Même si l’entreprise reprend du « poil de la bête » et recommence à tutoyer les bénéfices, parfois très importants, les accords offensifs sont maintenus et les salariés restent très défavorisés par cet accord.

Une durée de trois ans nous semble donc une bonne durée pour permettre à l’entreprise de se redresser. Aller au-delà reviendrait à placer les salariés dans une position très défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

Je soutiens l’argumentaire de ma collègue de l’Isère. Si c’est pour faire face à une situation conjoncturelle, la durée prévue pourrait être beaucoup moins longue. En l’espèce, ce droit est inscrit dans le dur pour cinq ans, ce qui est considérable. On n’en voit pas le bout ! J’apprécie donc la position de la commission à cet égard.

Debut de section - Permalien
Myriam El Khomri, ministre

Je vous invite à relire l’article 11 : « À défaut de stipulation de l’accord sur sa durée, celle-ci est fixée à cinq ans. » Lorsque l’accord arrive à expiration, il cesse de produire ses effets, tout en définissant des conditions de suivi et prévoyant des clauses de rendez-vous.

Je le rappelle, la durée de cinq ans est déterminée par défaut. Dans la mesure où ce sont les partenaires sociaux qui doivent, dans le préambule, poser les conditions de l’accord, c’est-à-dire présenter de manière succincte ses objectifs et son contenu, pourquoi ne les laissons-nous pas définir eux-mêmes la méthode et le calendrier ?

L’amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

L’amendement n° 210, présenté par MM. Tourenne, Antiste, Botrel, Carrère et Duran, Mme Génisson, MM. M. Bourquin et Jeansannetas, Mmes Jourda et Lienemann, MM. Montaugé et Lalande, Mme S. Robert et MM. Vaugrenard, Courteau, Durain et Madrelle, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 27

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Le Gouvernement engage une réflexion visant à conserver au salarié concerné par un licenciement économique, le statut de salarié, en examinant les possibilités de rester dans l’entreprise, le temps de sa formation qualifiante.

La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Noëlle Lienemann

Cet amendement est plutôt un amendement d’appel, mais il paraissait extrêmement important à certains de nos collègues, en particulier à Jean-Louis Tourenne.

On nous parle beaucoup, en France, de sécurité sociale professionnelle, mais nous ne sommes pas vraiment capables de trouver des mécanismes comparables à ceux qui ont cours en Allemagne, c’est-à-dire à assurer un « portage » dans l’entreprise pour que le salarié y demeure et conserve son statut, y compris dans les périodes difficiles comme un licenciement économique, afin de l’accompagner dans sa reconversion grâce à une formation qualifiante, par exemple. Cet amendement vise donc à ce que le Gouvernement engage une réflexion à ce sujet.

Il s’agit effectivement de trouver un nouveau modèle de sécurisation des parcours professionnels, sans que le salaire et la formation qualifiante soient, bien évidemment, à la charge de l’entreprise. Une partie de ces frais ou des cotisations nécessaires pourraient néanmoins faire éventuellement l’objet d’une négociation.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Baptiste Lemoyne

La commission a estimé qu’un dispositif d’accompagnement sur mesure, spécifique, était effectivement mis en place dans le cadre de l’article 11 pour accompagner les salariés qui ne s’inscriraient pas dans la dynamique de l’accord offensif ou défensif.

Ce dispositif est très proche du contrat de sécurisation professionnelle et semble relativement bien calibré. À ce propos, une question avait d’ailleurs été posée lors des débats en commission : ne serait-il pas contre-productif de maintenir dans l’entreprise le salarié en question à côté d’autres salariés qui auraient accepté l’accord ? Cela ne serait-il pas source de petites tensions internes ?

Cela étant, nous comprenons bien le sens de votre réflexion, madame la sénatrice, qui est d’aider le salarié concerné à garder du lien social, des relations et à rester en contact avec le monde de l’entreprise.

La commission sollicite donc le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.

Debut de section - Permalien
Myriam El Khomri, ministre

Le Gouvernement émet un avis défavorable, et ce pour plusieurs raisons.

Vous l’avez dit vous-même, madame la sénatrice, il s’agit d’un amendement d’appel, puisque cette situation est déjà prévue pour les salariés des grands groupes comptant plus de mille employés en Europe, qui demeurent liés contractuellement à l’entreprise durant leur congé de reclassement. Nous avons d’ailleurs porté la durée de ce congé de neuf à douze mois dans la loi du 6 août 2015.

Une telle charge ne peut être imposée aux PME et aux entreprises qui se trouvent actuellement en liquidation ou en redressement judiciaire, mais le contrat de sécurisation professionnelle que nous avons réformé l’année dernière apporte des garanties très importantes en termes d’accompagnement et d’accès à la formation.

Les salariés qui refuseront l’application de l’accord ne pourront pas rester salariés de l’entreprise. Tel était le sens du débat que nous avons eu sur l’intérêt collectif par rapport au contrat individuel. Toutefois, la loi prévoira, à juste titre, des garanties importantes, équivalentes au contrat de sécurisation professionnelle. Les salariés seront accompagnés individuellement et bénéficieront d’une indemnité spécifique en plus de l’indemnisation du chômage.

Vous avez raison, une réflexion plus large doit absolument être menée. Nous l’aborderons lors de la discussion autour du compte personnel d’activité, le CPA, en vue de mieux gérer les transitions et les ruptures professionnelles, car, j’en suis bien consciente en ma qualité de ministre du travail et de la formation professionnelle, la situation doit être améliorée dans notre pays. De ce point de vue, le compte personnel d’activité est un premier pas vers une meilleure gestion de ces transitions professionnelles.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Noëlle Lienemann

Notre message, madame la ministre, va dans le sens de ce que vous indiquez sur la gestion des transitions professionnelles. Néanmoins, en France, une évolution tendancielle se dessine, puisque celles-ci ont souvent lieu hors de l’entreprise, contrairement à ce qui se passe dans d’autres pays. Je pense notamment au chômage partiel de salariés dont on pense qu’ils vont effectuer une transition professionnelle. Or ils sont tellement loin de l’entreprise qu’ils ont quittée ou des éventuelles entreprises qu’ils pourraient intégrer que, de toute façon, cette connexion ne se fait pas.

Certes, le CPA constitue plutôt une avancée, mais elle ne sera pas suffisante à mes yeux. J’ai néanmoins bien pris acte du souci du Gouvernement de poursuivre la réflexion en ce sens. C’était également la volonté de Jean-Louis Tourenne, qui est à l’origine de cet amendement. Notre collègue se mettra en rapport avec l’ensemble de vos services, madame la ministre, pour envisager la suite de cette réflexion.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

L’amendement n° 210 est retiré.

L’amendement n° 1021, présenté par MM. Lemoyne, Gabouty et Forissier, au nom de la commission, est ainsi libellé :

I. – Après l’alinéa 28

Insérer deux alinéas ainsi rédigés :

« L’adhésion du salarié au parcours d’accompagnement personnalisé emporte rupture du contrat de travail.

« Cette rupture du contrat de travail, qui ne comporte ni préavis ni indemnité compensatrice de préavis, ouvre droit à l’indemnité prévue à l’article L. 1234-9 et à toute indemnité conventionnelle qui aurait été due en cas de licenciement au terme du préavis ainsi que, le cas échéant, au solde de ce qu’aurait été l’indemnité compensatrice de préavis en cas de licenciement et après défalcation du versement de l’employeur mentionné à l’article L. 2254-6. Les régimes social et fiscal applicables à ce solde sont ceux applicables aux indemnités compensatrices de préavis.

II. – Alinéa 33

Après le mot :

proposer

insérer les mots :

, lors de l’entretien préalable,

La parole est à M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Baptiste Lemoyne

Cet amendement vise à clarifier le cadre juridique du parcours d’accompagnement personnalisé, le PAP, mis en place pour accompagner les salariés qui refusent l’application de l’accord offensif ou défensif. Le PAP est financé pour partie par l’employeur à partir des indemnités compensatrices de préavis. Il est précisé qu’il ne peut pas y avoir deux fois un versement pour l’employeur, l’un au titre de l’indemnité compensatrice de préavis, l’autre au titre du PAP.

Debut de section - Permalien
Myriam El Khomri, ministre

Bien que je sois opposée à la fusion des accords de maintien de l’emploi et des accords en faveur de l’emploi, je suis favorable aux modifications proposées. Elles permettent en effet de se rapprocher du contrat de sécurisation professionnelle – j’avais appelé l’attention de l’Assemblée nationale sur ce point – ; elles sécurisent les garanties apportées aux salariés qui refuseront l’accord. C’est une bonne chose.

L’amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

L’amendement n° 649, présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David, Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Alinéa 34

Remplacer le mot :

trois

par le mot :

six

La parole est à Mme Annie David.

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

Cet amendement vise à allonger la durée du versement de l’indemnité compensatrice de préavis. En effet, le refus de participer à l’accord peut être considéré comme un motif réel et sérieux de licenciement. Il faut donc prévoir, comme le fait l’alinéa 34 que nous proposons de modifier, les contours d’une allocation de reclassement destinée à dédouaner l’entreprise de ses difficultés et de ses obligations.

Le moins que l’on puisse dire, c’est que la dotation prévue est assez ridicule et ne permet pas d’engager un véritable parcours de réinsertion professionnelle. Au regard de la généralisation probable de ce type de rupture du contrat de travail, on semble ne pas avoir souhaité rendre les choses trop difficiles aux employeurs !

On peut donc penser que, demain, des licenciements interviendront, après qu’une provision, soigneusement constituée avec le produit du travail des salariés, aura été mobilisée pour financer les conséquences sociales d’un plan de préservation et de développement de l’emploi qui n’aura évidemment aucun lien avec la stratégie d’un quelconque groupe, si tant est que l’entreprise concernée soit ou non intégrée dans un groupe. Rappelons en outre que cette provision fait l’objet d’une réduction fiscale.

Vous comprendrez donc aisément, étant donné la fragilité du statut accordé au licencié pour cause réelle et sérieuse de refus de changement arbitraire de poste de travail, que nous souhaitions que les garanties accordées aux salariés concernés soient d’un montant plus important.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Baptiste Lemoyne

La commission émet un avis défavorable sur cet amendement. Elle souhaite s’en tenir, par homothétie, aux conditions de mise en œuvre des contrats de sécurisation professionnelle, qui prévoient également une durée de trois mois.

Par ailleurs, le bénéficiaire du dispositif est éligible au PAP sur une période largement plus longue : « Le bénéficiaire du dispositif d’accompagnement […] est placé sous le statut de stagiaire de la formation professionnelle et perçoit, pendant une durée maximale de douze mois, une allocation supérieure à celle à laquelle le salarié aurait pu prétendre au titre de l’allocation d’assurance chômage… » Les modalités seront fixées par décret.

Un encadrement renforcé est bien prévu pour faciliter la transition professionnelle du salarié. Ce dispositif ne dure que douze mois, me rétorquerez-vous. Certes, nous souhaitons que, au bout de douze mois, la réorientation soit achevée et que le salarié ne reste pas trop longtemps « sur le quai ». Telle est l’intention de la commission.

Debut de section - Permalien
Myriam El Khomri, ministre

Le Gouvernement émet également un avis défavorable sur cet amendement, dont l’adoption pourrait pénaliser les salariés.

Pour établir ce dispositif, nous nous sommes calés sur le contrat de sécurisation professionnelle, qui, lui-même, a été décidé par les partenaires sociaux. L’adoption de cet amendement aurait pour conséquence de priver le salarié de la partie de l’indemnité compensatrice de préavis supérieure à trois mois de salaire, lorsqu’une convention ou un accord collectif de travail le prévoit. Certains salariés pourraient donc y perdre.

L’amendement n’est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

L’amendement n° 1019, présenté par MM. Lemoyne, Gabouty et Forissier, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Alinéa 40

1° Supprimer le mot :

après

2° Remplacer le mot :

insérée

par les mots :

remplacée par

La parole est à M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur.

Debut de section - Permalien
Myriam El Khomri, ministre

Défavorable, par coordination !

L’amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote sur l’article.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Cohen

Je tiens à répéter que cet article est lourd de conséquences. Outre ce que les membres de mon groupe et moi-même avons déjà dénoncé, les accords sur l’emploi constituent une véritable bombe.

Avec ce principe de préservation et de développement de l’emploi, les employeurs n’auront plus à justifier les licenciements par l’existence de graves difficultés économiques, d’un diagnostic partagé avec les syndicats, voire d’un engagement pour maintenir l’emploi. Quel magistrat pourra apprécier si un accord respecte bien ce nouveau critère, à savoir qu’il est signé « en vue de développer et de maintenir l’emploi » ? Faut-il rappeler ici, mes chers collègues, que l’on ne construit pas un code du travail sur la confiance ?

En outre, cet article est ni plus ni moins la reprise de l’accord « compétitivité emploi » que Nicolas Sarkozy n’avait pas eu le temps d’introduire dans le code du travail en 2011.

Au mois de mars 2015, le ministère du travail ne recensait, fort heureusement, qu’une dizaine d’accords dans toute la France. Le groupe Mahle-Behr qui fabrique des climatiseurs et des chauffages pour l’industrie automobile a signé l’un de ces accords. Cela n’a pas permis à l’entreprise de se redresser : les licenciements et investissements massifs dans des pays à bas coûts ont été de mise.

Il aurait donc été juste de ne pas poursuivre dans cette direction. Malheureusement, non seulement le Gouvernement ne rompt pas avec ce dispositif antisocial, mais il l’aggrave.

En résumé, M. Sarkozy en rêvait, M. Hollande l’a fait…

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à Mme Nicole Bricq, pour explication de vote sur l’article.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bricq

C’est à regret que nous voterons contre cet article, car nous étions favorables à la rédaction issue des travaux de l’Assemblée nationale. Selon nous, cet article donnait un équilibre au projet de loi, de manière générale. En effet, il permettait de s’adapter aux réalités économiques, tout en préservant les droits des salariés, voire en les augmentant.

La commission des affaires sociales l’a emporté et a modifié les règles de fond, au détriment des salariés. Nous sommes donc contraints de voter contre sa version.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Je mets aux voix l’article 11, modifié.

J’ai été saisi de deux demandes de scrutin public émanant, l’une, du groupe CRC, l’autre, de la commission.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

Le scrutin a lieu.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

Il est procédé au dépouillement du scrutin.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 346 :

Le Sénat a adopté.

Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente.

La séance est suspendue.

La séance, suspendue à dix-neuf heures quarante-cinq, est reprise à vingt-et-une heures trente, sous la présidence de Mme Françoise Cartron.