La séance, suspendue à dix-neuf heures trente-cinq, est reprise à vingt et une heures cinquante, sous la présidence de Mme Monique Papon.
I. - Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° Après le troisième alinéa de l'article L. 433-1, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :
« L'indemnité journalière peut également être maintenue, après avis du médecin-conseil, lorsque la victime demande à accéder durant son arrêt de travail, avec l'accord du médecin traitant, aux actions de formation professionnelle continue prévues à l'article L. 6313-1 du code du travail ou à d'autres actions d'évaluation, d'accompagnement, d'information et de conseil auxquelles la caisse primaire est partie prenante. La caisse informe l'employeur et le médecin du travail de sa décision de maintenir l'indemnité.
« L'indemnité journalière peut être rétablie pendant le délai mentionné à l'article L. 1226-11 du code du travail lorsque la victime ne peut percevoir aucune rémunération liée à son activité salariée. Le versement de l'indemnité cesse dès que l'employeur procède au reclassement dans l'entreprise du salarié inapte ou le licencie. Lorsque le salarié bénéficie d'une rente, celle-ci s'impute sur l'indemnité journalière. Un décret détermine les conditions d'application du présent alinéa. » ;
2° Au 3° de l'article L. 412-8, après le mot : « code, », sont insérés les mots : « les victimes menant des actions de formation professionnelle ou d'autres actions d'évaluation, d'accompagnement, d'information et de conseil dans les conditions prévues au quatrième alinéa de l'article L. 433-1, ».
II. - Après le deuxième alinéa de l'article L. 1226-7 du code du travail, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Le contrat de travail est également suspendu au cours de l'arrêt de travail mentionné au quatrième alinéa de l'article L. 433-1 du code de la sécurité sociale et donnant lieu à une action de formation professionnelle continue prévue à l'article L. 6313-1 du présent code ou à d'autres actions d'évaluation, d'accompagnement, d'information et de conseil auxquelles la caisse primaire est partie prenante. »
L'amendement n° 201, présenté par M. Fischer, Mme David, M. Autain, Mmes Pasquet, Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Après le I de cet article, insérer un paragraphe ainsi rédigé :
... - L'article L. 1226-11 du code du travail est ainsi rédigé :
« Art. L. 1226-11. - Lorsque, à l'issue d'un délai d'un mois à compter de la date de l'examen médical de reprise du travail, le salarié déclaré inapte n'est pas reclassé dans l'entreprise, l'employeur est tenu de lui verser, dès l'expiration de ce délai et jusqu'au reclassement effectif du salarié, le salaire correspondant à l'emploi que celui-ci occupait avant la suspension de son contrat de travail.
« Au terme d'une période dont la durée est fixée par décret, l'allocation compensatrice de perte de salaire est versée au salarié par un fonds auquel cotisent les employeurs. »
La parole est à Mme Annie David.
L’amendement que nous vous présentons vise à préciserjusqu’à son reclassement effectif.
Nous estimons qu’il s’agit là d’une mesure de justice de nature à permettre au salarié victime
Cet amendement ne semble pas très cohérent dans la mesure où, d’une part, le salarié déclaré inapte continue de percevoir son salaire jusqu’à son reclassement et, d’autre part, une allocation compensatrice de perte de salaire est prévue. Dès lors, qui percevrait cette allocation ?
Par ailleurs, l’adoption de cet amendement interdirait à un employeur dont un salarié est déclaré inapte à occuper son poste de travail de le licencier, et il aurait l’obligation de le reclasser. Or le reclassement n’est pas toujours possible, notamment dans les petites entreprises.
Pour toutes ces raisons, la commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.
M. Xavier Bertrand, ministre. Tout d’abord, j’indique que le Gouvernement souhaite que la Haute Assemblée se prononce par scrutin public sur cet amendement.
Exclamations sur les travées du groupe socialiste.
Madame la sénatrice, votre proposition revient à interdire le licenciement d’un salarié déclaré inapte et à obliger la branche accidents du travail–maladies professionnelles à financer, via un fonds alimenté par une contribution des employeurs, une allocation compensatrice dont la durée de versement peut être longue si le reclassement tarde à intervenir ou se révèle impossible. Cette mesure pose donc une difficulté majeure.
En conséquence, le Gouvernement est défavorable à cet amendement. Mais, je le répète, il souhaite que le Sénat se prononce par scrutin public.
Mon explication de vote s’apparente plutôt à un rappel au règlement.
M. le ministre vient de demander un scrutin public sur l’amendement n° 201 parce qu’il a bien évidemment compté les sénateurs présents dans l’hémicycle. Permettez-moi de répéter ce que nous avons souvent dit.
Dans le cadre de la rénovation du Sénat…
M. Jean-Pierre Godefroy. …et eu égard au fonctionnement démocratique de notre assemblée, il faudra supprimer ou modifier la procédure de vote par scrutin public. Je le dis comme je le pense – et mes collègues s’accordent à penser comme moi ! –, on ne peut pas continuer à accepter que les absents votent contre les présents !
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.
Avant d’expliquer mon vote, je souhaite m’associer aux propos de Jean-Pierre Godefroy. Recourir à la procédure de vote par scrutin public dans ces conditions ne fait pas l’honneur au Parlement, compte tenu du nombre de sénateurs présents. Il ne faut pas continuer ainsi.
J’en viens à l’amendement n° 201. Je ne comprends pas les raisons pour lesquelles M. le rapporteur et M. le ministre m’opposent l’argument selon lequel cet amendement obligerait l’employeur à procéder au reclassement du salarié déclaré inapte. Nous demandons simplement que le salarié puisse bénéficier d’un salaire équivalent le temps de son reclassement, car, comme vous l’avez souligné à juste titre, monsieur le ministre, le reclassement peut parfois être long. Or les salariés concernés ne sont pas toujours justement indemnisés.
Si le salarié est déclaré inapte, des procédures juridiques existent dans le code du travail, qui permettent à un employeur de se séparer du salarié concerné.
Mon propos sera très bref.
Il n’y a que quelques minutes que la séance est reprise. J’admire la ponctualité de nos collègues de l’opposition, mais…
M. Jean-Pierre Cantegrit. …je les invite à laisser le temps à nos collègues de la majorité de venir nous rejoindre avant de prononcer des paroles définitives !
Mme Brigitte Bout applaudit. – Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.
Je mets aux voix l'amendement n° 201.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin a lieu.
Il est procédé au comptage des votes.
Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 34 :
Le Sénat n'a pas adopté.
L'amendement n° 204, présenté par M. Fischer, Mme David, M. Autain, Mmes Pasquet, Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Après les mots :
du présent code
supprimer la fin de second alinéa du II de cet article.
La parole est à Mme Annie David.
Avec la rédaction proposée pour l’article L. 1226-7 du code du travail, vous entendez autoriser la suspension du contrat de travail, durant la période d’arrêt, avec maintien de salaire, dès lors que le salarié victime d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle accomplit des « actions d’évaluation, d’accompagnement, d’information et de conseil auxquelles la caisse primaire est partie prenante ».
Cette insertion supplémentaire, résultant de l’examen du texte par l’Assemblée nationale, ne nous paraît pas souhaitable, car elle apporte de l’obscurité là où la rédaction était pourtant claire. Aujourd’hui, personne n’est capable de nous préciser la nature de ces actions. Et il nous semble qu’il n’est pas sérieux de demander à la représentation nationale de donner un chèque en blanc en matière d’activité du salarié durant sa période d’arrêt. Celle-ci est par nature incompatible avec une activité professionnelle normale.
En outre, nous nous interrogeons sur la notion d’accompagnement. Est-il question, durant la période d’arrêt de travail, de faire financer par la collectivité, c’est-à-dire par la cotisation de tous les salariés, des mesures visant à faciliter l’insertion professionnelle du salarié en arrêt, dans l’éventualité où celui-ci serait par la suite licencié ? Entendez-vous déresponsabiliser les employeurs en leur permettant de se décharger de leur obligation de reclassement ? De la même manière, de quelle nature pourraient être les conseils promulgués au salarié victime d’un accident du travail ?
Déjà, la notion de formation initialement prévue nous posait problème. Nous considérions en effet qu’il n’était pas nécessairement souhaitable que, durant une période nécessaire à la reconstruction du salarié, celui-ci puisse faire autre chose que ce pourquoi l’arrêt de travail a été décidé. Je vous renvoie sur ce point à la disposition que vous avez adoptée l’an dernier, mes chers collègues, qui prévoit que les médecins-conseils vérifient régulièrement que les salariés en arrêt de travail sont effectivement chez eux. En l’espèce, c’est vous qui allez faire en sorte qu’ils ne restent pas à leur domicile.
Nous estimons, en tout état de cause, que cette formation doit être supportée non pas par la collectivité, mais par l’employeur, qui est responsable de la situation et profitera indirectement de cette formation. Il est donc illégitime de suspendre le contrat de travail.
Par ailleurs, connaissant la propension de votre gouvernement à conditionner toutes les aides qu’il accorde à une contrepartie de la part du bénéficiaire, nous redoutons que ce qui est facultatif aujourd’hui ne soit obligatoire demain ; je pense notamment aux dispositions relatives au RSA, le revenu de solidarité active.
Compte tenu du manque de clarté de cette mesure, nous proposons de la supprimer, quitte à en rediscuter de manière plus approfondie lors de la commission mixte paritaire ou d’un autre débat.
L’Assemblée nationale a souhaité élargir le dispositif prévu à l’article 66 en permettant aux victimes d’accidents du travail de suivre non seulement des actions de formation, mais aussi des actions d’évaluation, d’accompagnement, d’information et de conseil, tout en continuant à percevoir leurs indemnités journalières.
Pendant cette période, leur contrat de travail est suspendu et non pas rompu, ce qui constitue une garantie. Le présent amendement ne nous paraît donc pas avantageux pour les salariés. En outre, il affecterait la cohérence du texte.
Telles sont les raisons pour lesquelles la commission a émis un avis défavorable.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 205, présenté par M. Fischer, Mme David, M. Autain, Mmes Pasquet, Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... - Le refus pour le salarié de participer à l'une des actions mentionnées au I ou II de cet article ne peut être constitutif d'une sanction.
La parole est à Mme Annie David.
Cet amendement fait suite à celui que je viens de vous présenter et qui n’a pas été adopté.
Par l’amendement n° 205, nous entendons préciser que le refus pour le salarié de participer à l’une des actions mentionnées à l’article 66 de ce projet de loi ne peut être constitutif d’une sanction à son égard.
En effet, bien que le salarié doive être volontaire, comme pour le travail le dimanche ou les heures supplémentaires, et que l’accord de la caisse primaire soit requis, de telles garanties semblent bien minces face aux nécessités économiques et aux pressions sur l’emploi.
Puisque chacun s’accorde à dire que la disposition prévue par cet amendement va de soi, pourquoi ne pas l’intégrer au projet de loi ?
La commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
Puisqu’il s’agit d’une démarche volontaire, il est exclu qu’une sanction soit appliquée à quelqu’un qui ne souhaiterait pas s’engager dans une formation.
L'amendement n'est pas adopté.
L'article 66 est adopté.
L'amendement n° 206, présenté par M. Fischer, Mme David, M. Autain, Mmes Pasquet, Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Avant l'article 67, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans le premier alinéa de l'article 222-19 du code pénal, après les mots : « trois mois », sont insérés les mots : « ou une incapacité permanente, partielle ou totale ».
La parole est à Mme Annie David.
L’article 222-19 du code pénal réprime les atteintes involontaires à l’intégrité de la personne, mais les actions de maladresse, d’imprudence, d’inattention, de négligence ou de manquement à une obligation de sécurité ou de prudence imposée par la loi ne sont sanctionnées à hauteur de deux ans d’emprisonnement et de 30 000 euros d’amende qu’à la condition que la victime soit atteinte d’une incapacité totale de travail de plus de trois mois.
Cette rédaction n’est pas la mieux à même de permettre la sanction pénale des employeurs pour les dommages causés à leurs salariés. En effet, en faisant explicitement référence à une incapacité totale de travail de plus de trois mois, elle a pour conséquence d’exclure un certain nombre de victimes d’accidents du travail ou de maladies professionnelles.
Nous avons déposé cet amendement afin de permettre la pleine application de cet article. Son adoption permettrait notamment de prendre en compte la situation très spécifique des salariés exposés à l’amiante durant leur activité professionnelle et qui auraient développé des plaques pleurales. Comme vous le savez, l’apparition de telles plaques n’ouvre pas droit à un arrêt de travail. Ces victimes, car c’est bien de cela qu’il s’agit, ne peuvent pas, par conséquent, profiter des dispositions prévues dans cet article du code pénal.
Vous le voyez, cet amendement est de pur pragmatisme. C’est pourquoi je ne doute pas que vous l’adopterez.
Les mesures aujourd’hui en vigueur nous paraissent suffisamment dissuasives. Il ne faut pas oublier que, au-delà d’une éventuelle sanction pénale, les employeurs fautifs s’exposent à une augmentation du montant de leur cotisation sociale et peuvent aussi être sanctionnés en cas de faute inexcusable, dont la définition a été élargie depuis 2002. Dans ces conditions, il ne nous paraît pas nécessaire d’alourdir les sanctions déjà prévues par le code pénal.
La commission a donc émis un avis défavorable sur cet amendement.
Ce débat, je le vois bien, n’a pas l’air d’intéresser les foules. J’aimerais tout de même que M. le ministre soit un peu plus attentif. Certes, nous représentons l’opposition, mais celle-ci a droit au respect parlementaire.
Madame David, au cours de la discussion générale, nous sommes intervenus en détail sur ce point. J’ai tenu à être présent pour vous répondre précisément et personnellement sur ces questions.
Nous savons pertinemment que vous organisez les débats comme vous le souhaitez et vous avez décidé d’évoquer de nouveau cette question, sur laquelle je me suis d’ores et déjà exprimé. Souvenez-vous-en, madame David !
Très bien ! et applaudissements sur les travées de l ’ UMP.
L'amendement n'est pas adopté.
I. - L'article 47 de la loi n° 2004-1370 du 20 décembre 2004 de financement de la sécurité sociale pour 2005 est abrogé.
II. - Le montant de la contribution de la branche Accidents du travail et maladies professionnelles du régime général de la sécurité sociale au financement du Fonds de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante est fixé à 880 millions d'euros au titre de l'année 2009.
III. - Le montant de la contribution de la branche Accidents du travail et maladies professionnelles du régime général de la sécurité sociale au financement du Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante est fixé à 315 millions d'euros au titre de l'année 2009.
Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, vous me permettrez tout d’abord d’excuser ma collègue Nathalie Goulet, qui devait intervenir sur cet article, mais qui est retenue à Valence, où se réunit actuellement l’assemblée parlementaire de l’OTAN. Elle m’a chargé de vous dire, ce que je fais bien volontiers, qu’elle était très impliquée dans la reconnaissance des sinistrés de la vallée de l’amiante, qui s’étend, dans son département, de Caligny à Condé-sur–Noireau. Tous les sénateurs bas-normands sont concernés par ce drame de la « vallée de la mort », comme on l’appelle.
Vous savez tous ici à quel point je suis particulièrement sensible au problème de l’amiante. Je regrette, une fois de plus, le minimalisme du texte en la matière.
Comme chaque année, le Gouvernement restreint cette question à son aspect purement financier. Et les règles en matière d’irrecevabilité financière nous empêchent, en tant que parlementaires, de proposer par voie d’amendements les évolutions positives attendues par les milliers de salariés confrontés à ce problème.
Une fois de plus, le projet de loi de financement de la sécurité sociale est vide de toute mesure de nature à rendre plus justes et plus pérennes les modalités de financement des fonds amiante. Pourtant, depuis 2005, les propositions ne manquent pas. Le rapport du Sénat, qui a été salué par tous, et celui de l’Assemblée nationale ont ouvert la voie à l’évolution des dispositifs de prise en charge des maladies liées à l’amiante, non sans considérer le coût financier d’une telle évolution.
D’autres rapports, comme celui de la Cour des comptes ou, plus récemment, de M. Jean Le Garrec, ont adopté une vision plus comptable du problème et laissent craindre une réforme restrictive des fonds amiante.
Monsieur le ministre, je souhaiterais savoir quand aura lieu cette réforme. Combien de temps faudra-t-il attendre pour connaître l’orientation du Gouvernement à la suite de tous ces rapports ?
Puisqu’il ne nous est pas possible d’agir dans le cadre de ce projet de loi de financement de la sécurité sociale, nous sommes contraints d’attendre que le Gouvernement prenne l’initiative. Pour l’instant, monsieur le ministre, j’espère que vous voudrez bien répondre à deux questions au moins.
La première concerne le FCAATA, le Fonds de cessation anticipée d’activité des travailleurs de l’amiante. L’article 67 prévoit de supprimer la contribution à la charge des entreprises, officiellement pour cause de complexité et de rendement insuffisant, et d’y substituer une contribution de la branche Accidents du travail et maladies professionnelles.
Or, vous le savez, le nombre de victimes de l’amiante va malheureusement augmenter au cours des vingt prochaines années : on estime à 100 000 les personnes qui vont déclarer la maladie et, éventuellement, en mourir. Alors que vous aviez mis en place une contribution employeur censée réunir 100 millions d’euros, vous ne disposez aujourd’hui que de 30 millions d’euros et vous y substituez un financement par la branche AT-MP, sans augmentation de l’enveloppe. Dès lors, comment allez-vous financer le dispositif de la cessation anticipée d’activité ?
Je suis sûr, monsieur le ministre, que vous verrez dans cette question une allusion à une autre question fondamentale, celle des conditions d’accès au FCAATA. Si l’enveloppe doit rester constante, cela signifie-t-il que vous comptez restreindre l’accès à l’ACAATA, l’allocation de cessation anticipée d’activité des travailleurs de l’amiante ?
Ma seconde question a trait au FIVA, le Fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante. L’exposé des motifs du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2009 indique que le financement de ce fonds ne pose pas de problème – c’est peut-être vrai – et que nous n’avons pas besoin d’augmenter son enveloppe pour l’année 2009. Dans le même temps, vous précisez que les moyens supplémentaires, notamment humains, que vous allez allouer au fonds lui permettront de traiter avec une plus grande efficacité un nombre plus important de dossiers.
Si tel est le cas, je vois mal comment vous allez pouvoir indemniser un plus grand nombre de victimes à enveloppe constante, à moins que les moyens que vous prévoyez d’allouer ne soient inefficaces et que l’on continue à traiter le nombre de victimes à flux constant. Pourriez-vous nous indiquer, monsieur le ministre, quels sont ces moyens supplémentaires et, surtout, comment ils seront financés si le fonds est toujours alimenté au même niveau ?
Je suis saisi de cinq amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 207, présenté par M. Fischer, Mme David, M. Autain, Mmes Pasquet, Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Guy Fischer.
L’article 67 a pour objet de supprimer la contribution à la charge des entreprises ayant exposé leurs salariés à l’amiante, prévue à l’article 47 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2005.
La contribution que vous entendez supprimer a pour objet le financement du Fonds de cessation anticipée d’activité des travailleurs de l’amiante qui permet à ces salariés de ne pas attendre l’âge légal de départ à la retraite pour cesser leur activité professionnelle. Il s’agit non pas d’une mesure généreuse, mais d’un droit légitime, les salariés dont il est question ayant une durée de vie inférieure à celle qui aurait dû être la leur s’ils n’avaient pas été exposés. Ce départ anticipé n’est donc rien d’autre qu’une compensation légitime.
Je constate d’ailleurs que personne ne remet en cause ce principe. Toutefois, vous entendez supprimer cette contribution au motif, d’une part, que celle-ci serait trop difficile à percevoir et, d’autre part, qu’elle aurait fait obstacle à la reprise des activités de certaines entreprises. Je voudrais revenir sur ces deux points.
D’après le rapport de notre collègue Alain Vasselle, la contribution visant à financer le FCAATA serait tellement complexe à percevoir qu’elle n’aurait rapporté en 2008 que 30 millions d’euros. Et vous prenez prétexte de cette complexité pour proposer une mutualisation à l’ensemble des employeurs.
M. Guy Fischer. Effectivement, mais je voulais tester votre vigilance, monsieur le rapporteur !
Sourires
Agir ainsi, c’est oublier les objectifs impartis à cette contribution. Lors de sa création en 2004, les législateurs l’ont imaginée à la fois comme un outil de financement du fonds et comme un outil de responsabilisation des employeurs. Afin de mieux responsabiliser ces derniers, ils ont fait le choix de l’individualiser, c’est-à-dire d’en faire supporter le financement par ceux qui étaient responsables de cette exposition. Il s’agissait, en quelque sorte, d’une application du principe pollueur-payeur.
Ce que vous proposez aujourd’hui revient à considérer qu’il n’y a pas de responsabilité particulière, puisque vous diluez cette contribution sur l’ensemble des employeurs. Je m’étonne donc que ceux qui, dans cet hémicycle, se font les chantres de la moindre taxation des entreprises ne soient pas contre cette taxe imposée à des entreprises qui n’ont pas de responsabilité particulière en la matière.
En fait, cet article 67 ne vise pas tant à généraliser cette contribution qu’à la supprimer. Car cette contribution, qui ne vous suffisait pas et qui vous a conduits à proposer cet article, vous y renoncez en partie !
Il s’agira donc d’une réorientation d’une partie des cotisations patronales de la branche AT-MP au FCAATA. Vous me direz que le montant de la contribution de la branche AT-MP progresse de 30 millions d’euros – soit exactement le produit de cette contribution –, puisqu’elle passe de 850 millions d’euros en 2008 à 880 millions d’euros pour 2009.
Toutefois, nous nous interrogeons : si votre objectif était réellement de trouver les moyens suffisants pour financer le FCAATA, pourquoi vous limiter alors aux seuls résultats de cette contribution – que vous estimez, à juste titre, insuffisante – et ne pas avoir profité de ce dispositif pour récupérer l’ensemble des sommes initialement prévues, c’est-à-dire aux alentours de 100 millions d’euros ?
En réalité, cette mesure contribue à réduire le coût du travail. C’est un signal fort de déresponsabilisation des entreprises coupables de milliers de maladies professionnelles, alors que, dans le même temps, les associations d’insertion et de formation vont subir de plein fouet cette disposition mettant en péril bon nombre de leurs missions.
C’est la raison pour laquelle nous avons déposé cet amendement. La suppression de l’article 67 est vitale pour les 100 000 personnes victimes de l’amiante, dont l’indemnisation serait moindre si cet article était adopté. On voit bien que ce sont toujours les mêmes qui paient moins.
L'amendement n° 79, présenté par M. Jégou, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
I. Supprimer le I de cet article.
II. Dans le II de cet article, remplacer le montant :
880 millions
par le montant :
850 millions
La parole est à M. le rapporteur pour avis.
Cet amendement concerne le problème particulièrement douloureux de l’amiante dont M. Godefroy a fort bien parlé.
Le I de l'article 67 tend à supprimer la contribution à la charge des entreprises, introduite par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2005 et versée au Fonds de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante.
Son faible rendement – 30 millions d'euros – et les difficultés de recouvrement sont avancés pour justifier sa suppression.
Le II de cet article prévoit, en conséquence, d’augmenter la dotation de la branche Accidents du travail et maladies professionnelles au FCAATA de 30 millions d’euros. Cette augmentation sera supportée par une majoration des cotisations AT-MP de l’ensemble des employeurs.
Je tiens à souligner le caractère particulièrement déresponsabilisant de cette mesure. En effet, les entreprises, même si elles ont changé de main, n’ont pas disparu. On a parlé tout à l’heure de la vallée de l’amiante : les affections ont été contractées au sein d’entreprises réputées qui fabriquaient des produits particuliers ou dans lesquelles les salariés étaient directement en contact avec ce produit qu’il y a quelques dizaines d’années encore on utilisait les uns et les autres couramment, y compris dans les travaux ménagers.
Je sais, monsieur le ministre, que vous êtes particulièrement sensible à ce problème. Je voudrais néanmoins rappeler que le coût de la prise en charge des victimes de l’amiante serait actuellement compris entre 1, 3 et 1, 9 milliard d’euros par an, et qu’il est évalué dans une fourchette comprise entre 26 et 37 milliards d’euros pour les vingt prochaines années. L’amiante causera donc assurément plus de décès que le sida, une maladie dont on sait combien elle a remué notre société.
Je pense qu’il faudrait prévoir autre chose que la déresponsabilisation d’entreprises dont on connaît la grande responsabilité et qui, au demeurant, ont été rachetées par un certain nombre de groupes industriels. Tel est le sens de cet amendement.
Je sais que l’emploi dans cette affaire n’est pas neutre ; je sais que les entreprises n’hésitent pas à recourir au chantage à la fermeture. Mais, eu égard à la gravité du problème, ces arguments ne me paraissent pas suffisants pour justifier la suppression de la contribution à la charge des entreprises.
Les amendements n° 88 et 340 sont identiques.
L'amendement n° 88 est présenté par MM. Godefroy, Cazeau, Teulade, Le Menn, Daudigny et Desessard, Mmes Le Texier, Jarraud-Vergnolle, Schillinger, Demontès, Campion, Printz, Chevé, San Vicente-Baudrin, Alquier, Ghali et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
L'amendement n° 340 est présenté par M. Vanlerenberghe, Mme Dini, MM. Mercier, J. Boyer et les membres du groupe Union centriste.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer le I de cet article.
La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy, pour défendre l’amendement n° 88.
L’objet de cet amendement est de revenir sur la suppression de la contribution au Fonds de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante des entreprises dont les salariés ont été exposés à l'amiante.
Nous comprenons bien les raisons techniques qui ont conduit le Gouvernement à opter pour une mutualisation totale du financement du fonds par les entreprises, en particulier la difficulté de retrouver les entreprises responsables et le faible rendement de leur contribution. Cependant, il n’est pas exact de dire qu’il est toujours impossible de remonter jusqu’aux entreprises concernées et, sur le plan des principes, il peut paraître choquant de ne pas les faire contribuer au FCAATA.
L'amendement n° 208, présenté par M. Fischer, Mme David, M. Autain, Mmes Pasquet, Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
A - Rédiger comme suit le I de cet article :
I. - Les deux derniers alinéas du II de l'article 47 de la loi n° 2004-1370 du 20 décembre 2004 de financement de la sécurité sociale pour 2005 sont supprimés.
B - La perte de recettes résultant pour la sécurité sociale sont compensées, à due concurrence, par la majoration des taux de cotisations visés à l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale.
La parole est à Mme Isabelle Pasquet.
Avec cet amendement, nous prenons, et nous en sommes conscients, le contre-pied total de cet article 67.
En effet, là où vous proposez de supprimer la contribution finançant le FCAATA, nous envisageons au contraire, suivant en cela les conclusions du rapport de l’IGAS rendu en 2005, de supprimer les dispositions prévues à l’article 47 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2005, donc d’accroître les ressources et de développer le financement.
Il s’agit, comme le préconisait ce rapport, de supprimer le plafonnement prévu, qui vise à limiter le montant de la contribution à 4 millions d’euros par année civile. Nous considérons en effet que cette mesure de plafonnement ne se justifie en rien.
Nous entendons également supprimer l’exonération dont bénéficient les entreprises placées en redressement ou en liquidation judiciaire.
Notre amendement se justifie pleinement, particulièrement au regard de ce que vous avez dit sur la faible efficacité de cette contribution. Elle devait rapporter 120 millions d’euros et n’a finalement rapporté que 30 millions ! Cette situation résulte en grande partie d’exonérations légales que notre amendement entend supprimer.
Cet amendement a le mérite de poser clairement la question de notre conception de la solidarité à l’égard des victimes de l’amiante, et d’opposer nos positions aux vôtres en termes de responsabilité des entreprises.
En outre, je voudrais revenir sur ce qui a été dit à propos de la difficulté que ferait naître la contribution pour les entreprises qui cherchent un repreneur. Il me semble, mais je peux me tromper, que cette difficulté ne s’est présentée qu’une seule fois.
D’une manière plus générale, c’est bien une question de responsabilité qui est posée. L’individualisation de la contribution permet à l’entreprise sanctionnée d’attester de sa propre responsabilité à l’égard des salariés qu’elle a embauchés et qu’elle a exposés à l’amiante.
Le Gouvernement voudrait nous faire croire que le repreneur de cette société ne devrait pas subir cette contribution au motif qu’il n’a pas lui-même exposé le salarié à l’amiante. Mais cette contribution pèse sur l’entreprise et non sur l’employeur : elle est donc, comme l’ensemble des dettes et des passifs, transmissible au repreneur.
Par ailleurs, votre proposition tend à réduire à néant la valeur travail, que le candidat de l’UMP disait pourtant vouloir reconnaître. Car l’entreprise reprise a un certain capital, une valeur, que les salariés exposés à l’amiante ont contribué à constituer. Il est donc incompréhensible que le repreneur profite du fruit des travailleurs exposés à l’amiante et ne participe nullement à cette logique de compensation.
Tous ces amendements se rejoignent en ce qu’ils tendent à maintenir la contribution à la charge des entreprises qui ont exposé leurs salariés à l’amiante.
Avec Jean-Pierre Godefroy et Jean-Marie Vanlerenberghe, nous avions, il y a deux ans, rédigé un rapport sur ces problèmes de l’amiante. Nous étions, les uns et les autres, particulièrement sensibles à cette question de la contribution des entreprises responsables à l’indemnisation des victimes. La meilleure preuve en est que, lors de l’examen du PLFSS pour 2008, je vous avais proposé de doubler le plafond de perception de cette contribution.
À l’époque, les contentieux étaient très nombreux ; on pensait que seuls les grands groupes avaient les moyens d’engager de tels contentieux et que, de leur côté, les petites entreprises étaient condamnées à s’acquitter de la contribution. En doublant le plafond, nous estimions justement pouvoir élargir cette contribution aux plus grandes entreprises. Curieusement, c’est l’inverse qui s’est produit, puisque le montant de celle-ci a finalement été inférieur à ce qu’il avait été l’année précédente.
Ainsi que vous l’avez rappelé, mon cher collègue, au départ, au moins 120 millions d’euros avaient été prévus, mais, très rapidement, le montant de cette contribution est tombé à 30 millions d’euros. Donc, un véritable problème se pose. Quoi qu’il en soit, il importe avant tout de pouvoir indemniser les personnes qui ont été exposées à l’amiante.
Je conviens que la suppression de cette contribution est un symbole. Personnellement, je me suis beaucoup interrogé avant de me ranger à la position de M. le ministre, mais je suis parvenu à la conclusion que cette contribution comportait plus d’inconvénients que d’avantages et qu’il valait mieux la supprimer pour la remplacer par un mécanisme de mutualisation, étant entendu que l’indemnisation des personnes qui ont été en contact avec l’amiante et qui prendront une retraite anticipée ne baissera nullement : le FCAATA continuera d’être financé à l’identique.
Cette question peut être analysée sous deux angles : d’une part, il convient de mesurer ce que chacun perçoit et le coût réel de cette contribution à la branche AT-MP, c'est-à-dire y compris les frais de constitution de dossiers pour faire face à l’ensemble des contentieux ; d’autre part, il importe d’aborder la question de la reprise des entreprises, essentiellement les petites ou les moyennes, les plus grosses n’étant pas concernées. Il faut en effet se mettre à la place du repreneur d’une entreprise toujours assujettie à cette contribution : il s’agit d’une véritable épée de Damoclès, alors même que celui-ci n’est aucunement responsable de cette situation. Souvent, et fort heureusement, l’entreprise a modifié complètement les habitudes de travail ou la manière d’utiliser les produits.
Mes chers collègues de l’opposition, je ne doute pas que vous serez sensibles au principe qui régit l’assurance maladie dans toutes ses composantes, à savoir la mutualisation des moyens au profit de tous. Je reconnais que la suppression de cette contribution revêt un caractère symbolique, mais n’oubliez pas que seules les entreprises financent la branche AT-MP, en aucun cas les salariés. Cette branche mutualise les moyens pour intervenir sur toute forme d’accident.
En outre, le contexte a changé avec l’entrée en vigueur de la directive REACH. Théoriquement, des affaires comme celle de l’amiante ne devraient plus être possibles, même si l’on ne peut jamais être sûr de rien, en dépit de tous les garde-fous censés nous protéger de toute dérive ou de tout accident. Dans le cadre de ma profession, j’ai toujours été particulièrement sensibilisé aux problèmes de sécurité et à la nécessité de contrôles permanents. La mutualisation des moyens permettra précisément d’intervenir auprès de celles et de ceux qui risqueraient malheureusement d’être victimes de l’amiante.
Aujourd’hui, il s’agit d’être efficace et d’agir le plus rapidement possible pour venir en aide à ces personnes. C’est pourquoi la commission estime que la suppression de cette contribution constitue une mesure de simplification pour assurer la pérennité d’entreprises qui sont totalement étrangères à cette époque où des salariés ont été exposés à l’amiante.
La commission demande donc le retrait de ces amendements. À défaut, elle émettra un avis défavorable.
M. Xavier Bertrand, ministre. Il est difficile d’ajouter quoi que ce soit à ce que vient de dire le rapporteur Gérard Dériot !
Marques de satisfaction sur les travées de l’UMP.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. C’était parfait !
Sourires
Comment est né cet article ? Jean-Claude Lenoir, député de l’Orne, est venu me voir afin de m’entretenir de la situation de PAMCO Industries. Le repreneur de cette entreprise, de toute bonne foi, était confronté à une immense difficulté dans la mesure où il n’avait absolument pas les moyens de faire face à la charge créée par cette contribution spécifique.
Pendant plusieurs mois, nous avons tout tenté pour éviter que cette entreprise ne dépose le bilan, cherchant dans la réglementation un moyen, même « limite » – vous voyez ce que je veux dire ! – d’y parvenir.
J’ai fait la promesse de régler cette question dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale.
Retire-t-on quoi que ce soit au FCAATA ? Non ! Son financement est stabilisé, ses recettes demeurent inchangées et le FIVA dispose d’un fonds de roulement supérieur à une année. Modifie-t-on en quoi que ce soit le régime juridique de la faute inexcusable ? Non ! Le droit en vigueur reste identique.
S’il existe un sujet qui échappe au débat entre la droite, la gauche, le centre, c’est bien celui de l’amiante, sujet difficile s’il en est. Les gouvernements successifs s’y sont attelés et se sont efforcés de le traiter le mieux possible.
À l’origine, ce dispositif devait faire l’objet d’un amendement. Mais le Gouvernement a voulu assumer ses responsabilités. Seul l’intérêt des salariés et le souci de sauvegarder l’emploi ont guidé sa plume au moment de rédiger cet article. Il a eu pour seule préoccupation d’éviter qu’une entreprise ne disparaisse à cause de cette contribution spécifique et de ne pas pénaliser ses salariés. Pour autant, le Gouvernement n’oublie rien des méfaits de l’amiante. Oui, il y a mutualisation et garantie des recettes !
Le Gouvernement demande donc le retrait de ces amendements. À défaut, il émettra un avis défavorable.
Cette question de l’indemnisation des victimes de l’amiante a été au cœur de nos débats lorsque nous avons présenté notre rapport, en 2005. Décider la suppression de cette contribution serait véritablement du plus mauvais effet. Il faut trouver une autre solution !
Je suis très attaché au principe du pollueur-payeur, qui est un principe de base. Dans le cas d’espèce, nous y renonçons. Faut-il rappeler que nous parlons non pas simplement de pollution atmosphérique, mais d’atteintes à la santé et à la vie d’autrui ?
L’application de la mutualisation n’est pas juste : pourquoi les entreprises dont les salariés n’ont pas manipulé de l’amiante seraient-elles mises à contribution au même titre que celles qui, à l’époque, n’ont pris aucune précaution pour protéger leurs salariés, alors que beaucoup d’entre elles connaissaient la dangerosité de l’amiante ?
Je conviens bien volontiers, monsieur le ministre, que la question des reprises d’entreprise pose un problème. Mais ce n’est pas une raison pour supprimer la contribution. Il doit être possible de prévoir des mécanismes de dédouanement du repreneur, au premier rang desquels figure la recherche de la responsabilité initiale de l’entreprise, y compris sur un plan pénal.
Monsieur le ministre, je considère qu’il est tout à fait envisageable de trouver une solution au problème que vous avez soulevé, sans pour autant pénaliser les repreneurs de bonne foi d’une entreprise, et en continuant à faire payer les responsables.
Vous allez exonérer de grandes entreprises, toujours en activité, qui ont employé des milliers de salariés et qui normalement devraient continuer à payer – je ne citerai pas de nom –, cependant que vous allez faire payer les petites entreprises, qui, elles, n’ont pas pollué.
Je comprends parfaitement les inquiétudes dont vous vous êtes fait l’écho ; dans ma ville de Cherbourg, une entreprise que je connais bien est confrontée à une situation identique à celle de l’entreprise que vous avez citée.
Je connais bien Jean-Claude Lenoir, au côté duquel j’ai siégé au conseil régional de Basse-Normandie, dont l’ancien président est ici présent ce soir. La suppression brutale de la contribution – donc de toute responsabilité – au profit de la mutualisation n’est pas la solution. Monsieur le ministre, acceptez nos amendements de suppression de l’article et recherchez une autre solution pour faire payer ceux qui ont fauté sans faire payer ceux qui reprennent une entreprise. Ce doit être possible !
La reconstitution, par les salariés qui ont été exposés à l’amiante, de leur carrière est un véritable parcours du combattant et ils n’y parviennent pas toujours. Ils sont obligés de retrouver des entreprises qui ont parfois disparu. Permettez-moi de vous dire que, dans mon département, nous sommes bien contents qu’elles aient disparu !
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.
Il n’est ni juste ni conforme aux conclusions du rapport que nous avons établi de dédouaner ces entreprises et de mutualiser la contribution. D’un point de vue moral, c’est inacceptable pour les salariés victimes de l’amiante.
Monsieur le ministre, nous nous connaissons bien ; vous savez pertinemment que cette question dépasse le clivage politique entre la droite et la gauche. Le drame de l’amiante est terrible ! Les victimes ne parviennent pas à reconstituer leur carrière ; elles meurent étouffées, à petit feu, ne peuvent plus respirer, sinon sous assistance ventilatoire. Je vous invite à considérer ce qu’est devenue leur vie et à vous demander si l’on a véritablement le droit d’exonérer de leurs responsabilités ceux qui sont la cause de leur état.
Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.
Je n’ai pas grand-chose à ajouter à ce que vient de dire Jean-Pierre Godefroy, dont je partage évidemment la colère.
Mes chers collègues, je vous demande de nouveau de voter ces amendements de suppression, car nous parviendrons toujours à trouver un moyen d’épargner le repreneur d’une entreprise pour lequel l’assujettissement à cette contribution pourrait être source de difficulté.
Monsieur le ministre, vous avez évoqué le cas d’une entreprise, mais les victimes de l’amiante se comptent par centaines de milliers !
Vous nous avez dit que notre système de santé devait être solidaire et que chacun devait pouvoir obtenir réparation. Effectivement, notre système de protection sociale doit être fondé sur la solidarité nationale. Néanmoins, dans le cas présent, les plaignants sont victimes d’une faute grave commise par leur employeur et l’on ne peut, en l’espèce, faire appel à la solidarité nationale.
Lorsqu’a été créée la contribution à la charge des entreprises ayant exposé leurs salariés à l’amiante, celle-ci devait rapporter 120 millions d’euros. Or, finalement, elle n’a rapporté que 30 millions d’euros en 2008. Vous manquez d’ambition, monsieur le ministre ! Quitte à mettre toutes les entreprises à contribution, fixez au moins leur participation aux 120 millions d’euros prévus initialement !
Ayant rencontré de nombreuses victimes de l’amiante, je comprends parfaitement les sentiments que ce drame peut inspirer. Je connais le problème moral qui se pose, de même que les problèmes de santé qui résultent de l’amiante. Il convient naturellement de tenir compte de tous ces éléments. Notre collègue Jean-Pierre Godefroy a très bien exprimé les sentiments que, les uns et les autres, nous éprouvons.
Il s’agit cependant d’être pragmatique. Si de graves erreurs ont été commises, elles l’ont été non pas par l’entreprise en tant que telle – c’est une entité non identifiée –, mais par les dirigeants, c’est-à-dire des hommes et des femmes. Or ces dirigeants ont pour la plupart disparu ou sont partis.
Nous imputons la responsabilité de la situation à l’entreprise, mais comment faire pour ne pas dissuader d’éventuels repreneurs ? Les entreprises se trouvent confrontées à un problème de gestion. Elles doivent effectivement indemniser les victimes de l’amiante. Les moyens financiers demeurant les mêmes, ce sont la mutualisation et la solidarité entre les entreprises qui permettront d’y parvenir.
Je n’ai pas d’exemple précis à l’esprit, mais je suppose que nombre d’accidents du travail ont été indemnisés par l’ensemble des entreprises via la branche Accidents du travail et maladies professionnelles. C’est ce que nous appelons la mutualisation, principe de la sécurité sociale dont nous nous satisfaisons pleinement.
Il s’agit, je le répète, d’être pragmatique et d’éviter que des entreprises ne soient pas reprises, car des emplois sont en jeu. Il ne saurait cependant être question de se dérober lorsque les victimes demandent réparation : les moyens financiers existent ! Malheureusement, et contrairement à ce que nous espérions, la mission d’information présidée par Jean Le Garrec ne nous a pas apporté de solutions, hors celles que nous connaissons.
Il convient aujourd’hui d’être efficace. Vous évoquez le montant de 120 millions d’euros. Normalement, cette contribution aurait dû rapporter davantage. Or son produit diminue, alors même que nous avons relevé le plafond l’an dernier.
Soyons donc réalistes. Comme à l’accoutumée, quand on est habitué à diriger, on prend non pas la meilleure décision, mais la moins mauvaise. Encore faut-il ne léser personne ! Or là réside le risque dans le cas présent.
Si les auteurs d’infractions doivent être condamnés…
… ils le seront, effectivement ! Rien n’est changé sur le plan pénal ! Mais il faut être efficace.
C’est pourquoi la commission émet un avis défavorable sur ces amendements, s’ils ne sont pas retirés.
Comme je l’avais dit en commençant l’exposé de mon amendement, cette affaire est très délicate. Ayant appartenu au monde hospitalier et ayant également été chef d’entreprise, je suis très sensibilisé à ce problème.
Cher Gérard Dériot, je ne puis vous laisser présenter l’entreprise comme une sorte d’ovni : l’entreprise est une entité juridique, dont la responsabilité est réelle. Aujourd’hui, si un grutier ou un pelleteur meurt carbonisé pour être entré en contact avec un fil électrique, c’est le chef d’entreprise qui est responsable et, parfois, il va même en prison. C’est donc l’entreprise qui indemnise !
Je crois que nous avons tous raison. N’opposons pas les rêveurs et les pragmatiques.
Dans le cas des maladies nosocomiales, ce n’est pas l’hôpital qui indemnise !
Cela viendra peut-être !
Je crois très honnêtement que l’adoption de mon amendement, rédigé dans de bonnes conditions et adopté par la commission des finances, permettrait de reconsidérer le problème. Mes chers collègues, je vous le demande instamment : ne balayons pas cette affaire, ce soir, d’un revers de manche ; je souhaite que nous puissions y revenir.
Cela représente 30 millions d’euros. Certes, l’emploi ne doit pas être négligé, mais il n’est pas possible d’exonérer de leur responsabilité ceux qui ont causé ces drames. Je maintiens donc cet amendement non pas pour vous ennuyer, monsieur le ministre, mais pour que nous puissions le voter.
M. Xavier Bertrand, ministre. Pour ma part, je souhaite avant tout maintenir l’emploi.
Exclamations sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.
Si certains sénateurs peuvent se permettre de réagir ainsi lorsque l’on veut maintenir l’emploi, libre à eux de le faire, chacun assumera !
Protestations sur les mêmes travées.
Ce débat peut susciter des propos enflammés, mais il est également possible de s’exprimer sereinement !
Je peux tout à fait souscrire aux propos que vous avez tenus, monsieur Godefroy. Une chose est certaine : nous éprouvons tous la même émotion lorsqu’il est question de l’amiante. J’ai découvert l’amiante non pas en devenant ministre, mais en tenant ma permanence d’élu local. D’ailleurs, aucun élu ici présent ne réagit simplement en tant que législateur : des personnes sont venues les voir, cassées par l’amiante ou anxieuses quant à l’évolution de la maladie de leurs proches. Je crois ce paramètre important, car il est de nature à dépolitiser ce dossier.
Je connais bien le cas de PAMCO Industries : si ce texte n’est pas adopté, si le directeur général de la caisse régionale d’assurance maladie n’accepte pas d’opter pour une lecture souple des textes, cette entreprise ferme !
M. Xavier Bertrand, ministre. L’avez-vous présenté, ce texte ? Non !
Protestations sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.
Je laisse à chacun la responsabilité de ses propos, …
…mais peut-être ceux-ci dépassent-ils parfois la pensée. C’est en tout cas mon sentiment, surtout sur un sujet comme celui-là !
Vous connaissez tous suffisamment bien le dossier pour savoir que la suppression de la contribution n’exonère en aucun cas les entreprises de leur responsabilité pénale. Une action en justice pour faute inexcusable est toujours possible pour les salariés victimes de l’amiante. Telle est la vérité !
Toutes les actions qui doivent être menées continueront de l’être. En revanche, si un repreneur ne peut faire face aux conséquences financières de l’indemnisation de l’amiante, une mutualisation intervient, dont l’incidence se limite à 0, 007 % de cotisations supplémentaires.
Si le dispositif ne vous convient pas…
M. Xavier Bertrand, ministre. Vous dites non avant même que j’aie terminé ! C’est terrible de ne pas s’écouter sur un tel sujet !
Exclamations sur les travées du groupe socialiste.
Si ce dispositif ne vous convient pas, disais-je, faites des propositions dans le cadre du prochain PLFSS.
Oui, mais que faites-vous, en attendant, pour une entreprise comme PAMCO Industries ? Pour notre part, nous estimons de notre responsabilité de chercher des solutions lorsqu’un problème se pose.
Gérard Dériot l’a dit à l’instant : si le sujet était facile, cela se saurait. Nous maintenons en tout cas des principes juridiques intangibles : la faute inexcusable ; la recherche des responsabilités. En attendant que celles-ci soient établies, je veux tout simplement éviter des situations que l’on qualifiera, au choix, d’ubuesques ou dramatiques, où des emplois seraient détruits à cause de cette contribution.
Nous préservons les droits des salariés victimes de l’amiante, et ce n’est que justice. Pour le reste, nous faisons preuve de pragmatisme. Voilà la vérité !
Peut-être pourrions-nous à l’avenir étudier les modalités de mise en place d’une action récursoire dans le cadre du Fonds de cessation anticipée d’activité des travailleurs de l’amiante ? Une telle action récursoire existe déjà dans le cadre du Fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante. La sécurité sociale, qui verse les indemnités par l’entremise de sa branche AT-MP, pourrait ainsi se retourner contre les auteurs des fautes.
Tout ayant déjà été dit, je ne prolongerai pas outre mesure la discussion.
J’ai connu la situation avec un grand groupe industriel, Renault Trucks. L’adage « deux poids, deux mesures » s’est vérifié ; les salariés l’ont vécu douloureusement : la procédure de reconnaissance allait aboutir à Annonay, mais non à Vénissieux. Les salariés des deux établissements avaient pourtant coordonné leur action. Le succès de telles procédures n’est donc pas assuré.
S’agissant plus précisément de l’indemnisation, la reconstitution des carrières retarde tellement les droits que l’indemnisation se trouve nivelée par le bas.
Je mets aux voix l'amendement n° 207.
Je suis saisie d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin a lieu.
Il est procédé au comptage des votes.
Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 35 :
Le Sénat n'a pas adopté.
Monsieur le rapporteur pour avis, l’amendement n° 79 est-il maintenu ?
Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, n'adopte pas l'amendement.
Monsieur le ministre, je persiste à penser que nous envoyons un très mauvais signe.
Vous affirmez, et vous n’êtes pas le seul, qu’il sera toujours possible d’engager des poursuites au pénal. Mais pouvez-vous me dire comment vous entendez poursuivre au pénal des personnes que vous ne parvenez pas à retrouver pour leur faire payer la contribution dont ils sont redevables ? La question mérite d’être posée ! Je considère qu’il s’agit d’une mesure dilatoire pour faire passer ce que vous voulez.
C’est un très mauvais signe parce que vous dédouanez, de fait, les entreprises qui n’ont pas respecté leurs travailleurs.
C’est aussi un très mauvais signe pour le futur. Les entreprises de désamiantage requièrent toute notre vigilance. Si nous n’y prenons garde, les difficultés que nous avons connues avec l’amiante se répéteront demain avec le désamiantage.
Vous dites aux entreprises concernées que le risque sera mutualisé si elles ne font pas gaffe, si vous me permettez l’expression. Il suffira qu’une entreprise soit rachetée par un repreneur pour être exonérée de toute responsabilité. Non, vraiment, vous n’envoyez pas un bon signe, vous ne prenez pas une bonne mesure de santé publique !
Je persiste donc à penser qu’au lieu de la supprimer de manière hâtive, il eût été nécessaire de maintenir cette contribution, qui n’a somme toute rien d’extraordinaire.
Si le Trésor public le voulait vraiment, il aurait les moyens de trouver les responsables. Il sait bien trouver les simples salariés lorsqu’il le faut !
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.
Il faudrait faire un effort pour rechercher les personnes qui doivent payer.
Mes chers collègues, le problème de l’amiante n’est pas résolu. Nous aurions eu tout intérêt à maintenir la contribution, à mieux la recouvrer et, peut-être, comme l’a suggéré M. le président de la commission des affaires sociales, à rechercher une mesure de substitution pour le prochain PLFSS.
Si nous supprimons cette contribution sans prévoir d’autres dispositions, je suis persuadé que, malgré toutes les bonnes intentions et en dépit des propositions du président de la commission des affaires sociales, elle ne sera jamais rétablie.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.
Je mets aux voix l'amendement n° 88.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe socialiste.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin a lieu.
Il est procédé au comptage des votes.
Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 36 :
Le Sénat n'a pas adopté.
Je mets aux voix l'amendement n° 208.
L'amendement n'est pas adopté.
L'article 67 est adopté.
L'amendement n° 210, présenté par M. Fischer, Mme David, M. Autain, Mmes Pasquet, Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Après l'article 67, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le Gouvernement transmet au Parlement, avant le 1er juillet 2010, un rapport sur la situation des salariés des régimes spéciaux victimes de l'amiante qui ne peuvent plus intenter une action en reconnaissance du caractère professionnel de leurs maladies, ni même une procédure de reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur dès lors qu'ils ont fait l'objet d'une première constatation médicale entre le 1er janvier 1947 et le 28 décembre 1998.
La parole est à Mme Annie David.
Avant de défendre cet amendement, je tiens à regretter une nouvelle fois que l’application de l’article 40 de la Constitution ait empêché mon groupe de déposer un amendement qui, en l’occurrence, visait explicitement la situation des salariés relevant de ce qu’il est convenu d’appeler les régimes spéciaux.
Ledit amendement tendait à inclure les régimes spéciaux dans l’article 40 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 1999. Cela aurait permis que la branche Accidents du travail et maladies professionnelles du régime général de la sécurité sociale, celle des régimes spéciaux visés à l’article R. 711-1 du code de la sécurité sociale et celle du régime des salariés agricoles supportent définitivement, chacune pour ce qui la concerne, la charge imputable issue de la rédaction de cet article.
Pour mémoire, l’article 40 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 1999 a levé la prescription en matière de maladies professionnelles pour toutes les victimes de l’amiante dont la première constatation médicale de la maladie résultant de l’exposition du salarié à l’amiante a été faite entre le 1er janvier 1974 et le 29 décembre 1998.
Récemment, la Cour de cassation a considéré que cette législation n’était pas applicable aux salariés des régimes spéciaux.
Je sais par ailleurs, pour avoir suivi les débats de l’Assemblée nationale, que bon nombre de nos collègues, de droite comme de gauche, partagent notre proposition, qui est également portée par de nombreuses associations de victimes de l’amiante. Notre collègue Gérard Dériot, rapporteur de la commission des affaires sociales pour les accidents du travail est les maladies professionnelles s’en est lui-même fait l’écho au Sénat.
Mes collègues du groupe communiste républicain et citoyen et moi-même nous réjouissons que la bataille que nous avons menée ait trouvé un écho favorable et que le Gouvernement ait déposé l’amendement n° 506, même si nous regrettons de n’avoir pu déposer cet amendement nous-mêmes du fait de l’article 40 de la Constitution.
Aussi, le présent amendement, plus consensuel et financièrement recevable, perd son utilité : il visait simplement à demander au Gouvernement, sensibilisé à cette question, de remettre au Parlement, avant le 1er juillet 2010, un rapport sur la situation des salariés des régimes spéciaux victimes de l’amiante qui ne peuvent plus intenter une action en reconnaissance du caractère professionnel de leur maladie, ni même une procédure de reconnaissance de la faute inexcusable de l’employeur dès lors qu’ils ont fait l’objet d’une première constatation médicale entre le 1er janvier 1947 et le 28 décembre 1998.
Je remercie les membres de la commission des affaires sociales d’avoir émis un avis favorable sur cet amendement et d’avoir précisé qu’il permettrait sans doute d’engager un débat plus approfondi sur cette situation inéquitable.
Je remercie également M. le rapporteur d’avoir évoqué ce sujet dans son intervention.
Le présent amendement fera sans doute l’objet d’une demande de retrait, mais cela me paraît légitime eu égard à l’amendement du Gouvernement.
La commission avait effectivement émis un avis favorable sur cet amendement. Cependant, le Gouvernement a déposé entre-temps l’amendement n° 506, qui, me semble-t-il, devrait être examiné en discussion commune avec l’amendement n° 210.
Je pense, madame David, qu’il sera nécessaire que vous retiriez votre amendement, puisque celui du Gouvernement – si, comme je l’espère, il est voté – devrait régler définitivement le problème, qui est réel.
Le Gouvernement montre ainsi, mes chers collègues, à quel point il se préoccupe des difficultés que rencontrent les personnes qui ont été exposées à l’amiante et qui, jusqu’à présent, ne percevaient aucune indemnité.
J’appelle donc en discussion l’amendement n° 506, présenté par le Gouvernement, qui est ainsi libellé :
Après l’article 67, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au IV de l’article 40 de la loi n° 98-1194 de financement de la sécurité sociale pour 1999, après les mots : « du régime général de sécurité sociale », sont insérés les mots : «, celle des régimes spéciaux mentionnés à l’article L. 711-1 du code de la sécurité sociale qui comportent une telle branche ».
La parole est à M. le ministre.
Madame David, je vous remercie de vos propos.
L’application de l’article 40 de la Constitution vous a conduite à vous contenter de demander au Gouvernement un rapport sur la situation des salariés concernés ; je vous propose d’aller plus loin, conformément à l’engagement que j’ai pris en ce sens à l’Assemblée nationale envers M. Muzeau, bien connu ici, ainsi qu’envers M. Roy et Mme Filippetti.
L’amendement n° 506 vise à mettre un terme à la différence de traitement qui existe en droit, depuis un arrêt de la Cour de cassation de juillet 2008, entre les salariés exposés à l’amiante. Depuis cette jurisprudence, en effet, les salariés exposés à l’amiante relevant de régimes spéciaux d’accidents du travail et de maladies professionnelles ne peuvent plus faire reconnaître le caractère professionnel de leur maladie ni intenter d’action en réparation lorsque l’affection a fait l’objet d’une première constatation médicale entre 1947 et 1998, en application des règles de droit commun régissant la prescription.
Pour les salariés du régime général et du régime agricole, au contraire, l’action est autorisée au-delà des délais de prescription, en application de l’article 40 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 1999.
C’est pourquoi le présent amendement vise à étendre le bénéfice de cet article 40 aux ressortissants des régimes spéciaux d’accidents du travail et de maladies professionnelles, notamment aux assurés des industries électriques et gazières, EDF et GDF principalement, mais aussi des mines.
Il s’agit donc, conformément à l’engagement que nous avions pris, de réparer un oubli.
L’amendement est adopté.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 67.
L’amendement n° 212, présenté par M. Fischer, Mme David, M. Autain, Mmes Pasquet, Hoarau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Avant l’article 68, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article L. 471-4 du code de la sécurité sociale sont insérés deux articles ainsi rédigés :
« Art. L. 471 -5. – Est passible d’un emprisonnement d’un an et d’une amende de 3 750 euros ou de l’une de ces deux peines seulement, l’employeur ou son représentant qui n’a pas remis au salarié, lors de son départ de l’établissement, l’attestation d’exposition aux risques chimiques et produits dangereux telle que prévue par la réglementation en vigueur.
« Art. L. 471 -6. – Est passible d’un emprisonnement d’un an et d’une amende de 3 750 euros ou de l’une de ces deux peines seulement, l’employeur ou son représentant entravant la procédure de déclaration, de reconnaissance de l’accident du travail ou de la maladie professionnelle. »
La parole est à Mme Annie David.
Sans revenir sur les débats que nous avons déjà eus au sujet de la contribution sur les entreprises destinée à financer le FCAATA et du rôle incitatif qui est le sien, nous entendons, par cet amendement, permettre la création d’une sanction à l’encontre des entreprises qui ne remettraient pas à leurs salariés une attestation d’exposition aux risques chimiques et produits dangereux.
Cette sanction, parce qu’elle serait individualisée, parce qu’elle viendrait sanctionner un manquement à une obligation légale de sécurité en matière de prévention, viserait à renforcer, précisément, la prévention.
L’amende prévue en cas de défaut de remise au salarié de son attestation d’exposition nous paraît déjà suffisamment dissuasive, et il ne nous semble pas tout à fait nécessaire d’y ajouter une peine de prison.
De même, l’employeur qui ne déclare pas un accident du travail s’expose à une amende de quatrième classe, et même de cinquième classe en cas de récidive. Cela nous paraît largement dissuasif.
C’est pourquoi la commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.
L’amendement n’est pas adopté.
Le montant du versement mentionné à l’article L. 176-1 du code de la sécurité sociale est fixé, pour l’année 2009, à 710 millions d’euros.
L’amendement n° 480, présenté par M. P. Dominati, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
Cet amendement n’est pas soutenu.
Je mets aux voix l’article 68.
L’article 68 est adopté.
Pour l’année 2009, les objectifs de dépenses de la branche Accidents du travail et maladies professionnelles sont fixés :
1° Pour l’ensemble des régimes obligatoires de base de sécurité sociale, à 13, 0 milliards d’euros ;
2° Pour le régime général de la sécurité sociale, à 11, 4 milliards d’euros.
Dans cet article, l’objectif de dépenses de la branche accidents du travail et maladies professionnelles est fixé à 13 milliards d’euros pour 2009, en hausse d’environ 10 % par rapport à l’objectif qui avait été arrêté pour 2008. Cette progression résulte d’une série de mesures nouvelles, introduites dans ce texte, qui vont accroître les dépenses de la branche.
Malgré cette forte augmentation des dépenses, le PLFSS prévoit que, l’an prochain, la branche se trouvera juste à l’équilibre : selon le rapporteur, ce sont les excédents de 2008 qui permettront en 2009 de financer les nouvelles dépenses.
En effet, après un exercice lourdement déficitaire en 2007, la branche devrait renouer cette année avec les excédents, ce qui ne s’était pas produit depuis 2001. On ne peut évidemment que s’en réjouir ! Les chiffres montrent que cette amélioration est due à une progression des recettes de la branche s’expliquant elle-même par deux raisons : la suppression, dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2008, de certaines exonérations de cotisations AT-MP, qui a rapporté 180 millions d’euros supplémentaires ; et la croissance de la masse salariale, que l’on estimait initialement à 4, 5 % en 2008.
Pourtant, je ne crois pas que l’excédent sera aussi important que le laissaient espérer les chiffres avancés jusqu’à maintenant, la remontée du chômage, depuis le mois d’août, agissant sur la masse salariale et les cotisations sociales.
Pour 2009, le PLFSS prévoit que les recettes de la branche s’établiront à 11, 4 milliards d’euros, en progression de 3, 6 %. Cette augmentation reposerait sur la hausse de 3, 5 % attendue pour les cotisations patronales globales, « en ligne avec la progression attendue de la masse salariale du secteur privé », selon le rapport de M. Dériot.
Vous me permettrez, mes chers collègues, d’exprimer de sérieux doutes sur la fiabilité de ces prévisions de recettes. Elles semblent bien optimistes, ce qui s’explique probablement par le fait qu’elles ont été construites longtemps avant le déclenchement de la crise et le retournement du marché de l’emploi, crise dont les effets dévastateurs sur l’emploi n’en sont malheureusement qu’à leurs débuts.
Au vu des nouvelles prévisions de croissance et d’emploi, il semble bien irréaliste de prévoir une hausse des recettes. Comme l’a reconnu Christine Lagarde pas plus tard que la semaine dernière, la croissance pourrait s’établir en 2009 dans une fourchette comprise entre 0, 2 % et 0, 5 % du produit intérieur brut, au lieu du 1 % initialement prévu. Quant à l’emploi, au troisième trimestre 2008, il a été détruit plus d’emplois qu’il n’en a été créé, et les perspectives pour 2009 laissent malheureusement augurer une forte remontée du chômage. M. le ministre des comptes publics a dû le reconnaître, mais n’en a pas tiré les conséquences puisque le PLFSS maintient les prévisions initiales.
Une fois de plus, c’est par le déficit que se fera l’ajustement comptable ; en 2009, le risque est réel de renvoyer la branche AT–MP dans le déficit. Nous ne pouvons y souscrire.
Pour cette raison, le groupe socialiste ne votera pas l’article 69.
L’article 69 est adopté.
Nous allons examiner maintenant les articles 51 à 64, relatifs aux dépenses d’assurance vieillesse, appelés en priorité.
Section 2
priorité
I. – Les montants de l’allocation de solidarité aux personnes âgées mentionnée à l’article L. 815-1 du code de la sécurité sociale et de l’allocation supplémentaire vieillesse prévue à l’article L. 815-2 du même code, dans sa rédaction antérieure à l’entrée en vigueur de l’ordonnance n° 2004-605 du 24 juin 2004 simplifiant le minimum vieillesse, les plafonds de ressources prévus pour le service de ces allocations et des prestations mentionnées à l’article 2 de la même ordonnance, ainsi que les montants limites mentionnés au premier alinéa de l’article L. 815-13 du même code, peuvent être portés entre le 1er janvier 2009 et le 31 décembre 2012, par décret, à un niveau supérieur à celui qui résulterait de l’application de l’article L. 816-2 du même code.
II. – Le chapitre V bis du titre Ier du livre VIII du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° À l’article L. 815-24, les mots : « et dans la limite du plafond de ressources applicable à l’allocation de solidarité aux personnes âgées prévu à l’article L. 815-9 » sont supprimés ;
2° Après l’article L. 815-24, il est inséré un article L. 815-24-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 815 -24 -1. – L’allocation supplémentaire d’invalidité n’est due que si le total de cette allocation et des ressources personnelles de l’intéressé et du conjoint, du concubin ou du partenaire lié par un pacte civil de solidarité n’excède pas des plafonds fixés par décret. Lorsque le total de la ou des allocations supplémentaires d’invalidité et des ressources personnelles de l’intéressé ou des époux, concubins ou partenaires liés par un pacte civil de solidarité dépasse ces plafonds, la ou les allocations sont réduites à due concurrence. »
Avec l’article 51, nous abordons le grand sujet que constitue l’assurance vieillesse.
La loi Fillon de 2003 était censée résoudre toutes les difficultés ; aujourd’hui, on se rend compte du lourd échec de ce texte, qui n’a apporté aucune solution durable au problème des retraites. Les comptes de l’assurance vieillesse, encore à l’équilibre en 2003, présenteront un déficit de plus de 5, 6 milliards d’euros cette année, alors que la réforme de M. Fillon ne prévoyait qu’un déficit de 1 milliard d’euros pour 2008.
L’année 2008 devait être celle des grands débats sur les retraites ; malheureusement, ce rendez-vous n’aura pas lieu, et la mesure la plus importante – l’allongement de la durée de cotisation – n’aura même pas été soumise à la discussion. Nous regrettons également qu’à aucun moment dans ce texte ne soit évoquée la pénibilité.
La question des retraites aurait dû déboucher sur un projet de loi spécifique. Mais le Gouvernement ne le souhaite pas : il préfère agir sans concertation.
Nous aurions aimé que soient discutés des sujets tels que les conditions dans lesquelles, demain, on partira à la retraite, ou encore la pénibilité, le travail des seniors…
Alors que l’on observe que les Français en âge de prendre leur retraite se montrent très méfiants, aucune concertation n’est proposée pour les rassurer. Certains d’entre eux pourraient continuer de travailler quelques années de plus ; pourtant, ils préfèrent partir à la retraite, craignant que les conditions qui leur sont proposées aujourd’hui ne se dégradent demain : ils ne veulent pas prendre le risque de voir le niveau de leur pension baisser ou la durée de cotisation requise s’allonger. Le Gouvernement ne fait rien pour rassurer nos concitoyens.
La revalorisation du minimum vieillesse proposée à l’article 51 sera donc exclusivement réservée aux personnes seules. Les personnes vivant en couple en seront exclues, et ce quelle que soit la forme dudit couple : mariage, PACS ou concubinage. Cette revalorisation reviendra donc à concentrer les ressources existantes sur une partie réduite de la population. Certains retraités s’attendent à voir augmenter leur minimum vieillesse ; ils vont donc être déçus ! Nous aurions souhaité une extension de la revalorisation du minimum.
Par ailleurs, cette hausse du minimum vieillesse, annoncée pour le 1er avril 2009, est fixée à 6, 9 %. Ainsi, jusqu’en avril prochain, le minimum vieillesse restera bloqué ; ensuite, le Gouvernement prévoit de le porter à 676 euros, au lieu de 633 euros actuellement. Malheureusement, monsieur le ministre, c’est toujours insuffisant, car cela reste en deçà du seuil de pauvreté européen, à savoir 817 euros.
Comme je l’ai déjà mentionné dans la discussion générale, le nombre de retraités pauvres augmentera encore et, une fois de plus, ce sont les femmes qui seront les plus touchées, puisque ce sont elles qui ont interrompu leur carrière pour se consacrer à leur famille.
Il est urgent de militer pour une réforme négociée des retraites par répartition fondée sur la justice sociale, la solidarité intergénérationnelle et la confiance retrouvée des générations actuelles. Il y va du contenu et de l’authenticité de notre contrat social.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.
Après la déclaration de ma collègue Mme Schillinger, je serai peut-être amené à répéter certaines des idées qu’elle a avancées. Néanmoins, la répétition étant l’âme de l’enseignement, je reviendrai sur plusieurs points.
Avec cet article, nous abordons les dispositions relatives aux dépenses d’assurance vieillesse. Souvenons-nous que, aux termes de la loi de 2003 portant réforme des retraites, 2008 devait être l’année où nous aurions dû débattre des retraites. Dans les faits, nous en sommes bien loin, puisque la mesure qui consiste à porter la durée de cotisation de 40 à 41 annuités nous est présentée sans qu’aucune concertation ni aucun dialogue n’aient eu lieu préalablement.
En 2003, aux dires du ministre des affaires sociales de l’époque, François Fillon, la réforme devait apporter des solutions pérennes au problème des retraites, qu’il s’agisse de son financement ou de sa sauvegarde. Malheureusement, et comme nous l’avions pronostiqué, cinq ans plus tard, rien n’est réglé.
Le déficit de 4, 6 milliards d’euros en 2007 passera à 5, 6 milliards d'euros cette année, pour atteindre très certainement 8 milliards d'euros avant les corrections apportées par ce PLFSS, dès 2009.
Depuis 2005, le déficit cumulé de la branche vieillesse atteint la somme astronomique de 21 milliards d'euros.
La faute – car il s’agit bien d’une faute – est d’avoir fait peser l’ensemble du poids de cette réforme sur la seule durée de cotisation. Mécaniquement, notamment pour les femmes, premières victimes du sous-emploi salarié et de la précarité qui ne cesse de se développer, cette logique engendre une baisse du niveau des pensions.
L’inefficience de cette politique est d’autant plus grande que le chômage progresse très rapidement et que notre pays enregistre des taux d’inactivité record pour les séniors et pour les jeunes.
Il est évident qu’à structuration égale, qui plus est dans un contexte de récession ou de croissance zéro, pour une majorité de nos concitoyens âgés, cet allongement se soldera par une augmentation d’une année de la période de chômage ou de faible activité. En effet, il ne suffit pas que la ministre de l’économie déclare le plus sérieusement du monde à un quotidien économique que, pour favoriser l’emploi des seniors, il faut repousser l’âge légal de la retraite ;...
...encore faut-il que l’exclusion des salariés de la sphère de l’emploi ne soit pas considérée par les dirigeants d’entreprise comme la variable d’ajustement privilégiée.
Le bilan de cette politique est sans appel : 60 % – chiffre effarant ! – de la population active qui liquide ses droits à pension est déjà sortie de l’emploi.
J’ajoute que la question des retraites ne peut pas être gagée sur une hypothétique reprise de l’emploi de nos concitoyens âgés de plus de cinquante-cinq ans. Certes, monsieur le ministre, vous avez déclaré vouloir « libérer le cumul emploi-retraite, favoriser le temps partiel en fin d’activité, faire du tutorat en entreprise autre chose qu’une expérimentation, imaginer un système de bonus-malus qui valorise les initiatives des entreprises recrutant ou gardant les salariés âgés ».
Il n’en reste pas moins que, depuis six ans, et alors que ce Gouvernement reste arcbouté sur une logique économique qui a démontré ses limites et sa vacuité, aucune amélioration sur ce front n’a été enregistrée.
J’en viens aux mesures prévues à l’article 51. Le candidat à l’élection présidentielle Nicolas Sarkozy avait promis d’augmenter de 25 % le minimum vieillesse durant son mandat.
Cette disposition en constituerait donc la première étape.
Je constate que cette hausse est calculée sur la base de 2007. Or, compte tenu de l’étalement de la mesure, les effets, notamment en gain de pouvoir d’achat, risquent fort d’être limités. Actuellement, le montant du minimum vieillesse réformé par l’ordonnance du 24 juin 2004 est de 643, 90 euros pour une personne seule et de 1126, 77 euros pour un ménage. Plus de 600 000 de nos concitoyens sont concernés.
Cependant, nous le savons tous, de pareils montants ne permettent parfois même pas de faire face aux dépenses de nature incompressible. Je pense notamment aux personnes vivant dans des zones de notre territoire où les loyers se sont envolés dans des proportions sans précédent.
Au reste, cet article pose problème, puisqu’il vise exclusivement les personnes seules. Certes, les femmes retraitées, qui constituent la majorité de ce segment de population isolée, verront leurs ressources quelque peu augmenter, mais qu’en est-il des couples éligibles à l’allocation de solidarité aux personnes âgées, l’ASPA ?
Dans les faits, cet ostracisme, qui ne répond qu’à une seule préoccupation comptable, est une nouvelle illustration du peu de cas que fait le Gouvernement des difficultés auxquelles sont confrontés nos aînés.
Dans cette logique, monsieur le ministre, vous n’avez pas daigné étendre le champ d’application de cette disposition aux bénéficiaires de l’allocation supplémentaire d’invalidité, l’ASI, ni même définir la revalorisation du minimum vieillesse non pas sur le montant de 2007, mais sur celui de 2008 majoré des 200 euros attribués par décret le 7 mars dernier.
À l’heure où le pouvoir d’achat est une problématique de premier ordre, que les perspectives économiques sont extrêmement inquiétantes, et alors que le Gouvernement octroie plus de 40 milliards d’euros aux banques sans garantie sur l’usage qui sera fait de ces fonds, il paraît pour le moins extraordinaire qu’une politique qui devrait avoir pour objectif de répondre aux attentes de nos aînés tout en contribuant à réamorcer la consommation ne soit pas mise en œuvre. Il s’agit pourtant bien là d’un impératif de toute première urgence.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.
Je suis saisie de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 291, présenté par Mmes Demontès et Le Texier, M. Cazeau, Mmes Jarraud-Vergnolle, Schillinger et Campion, MM. Teulade, Godefroy et Desessard, Mmes Printz et Chevé, MM. Le Menn, Daudigny et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... - Le Gouvernement évaluera les conditions d'évolution de l'allocation supplémentaire d'invalidité par rapport à celles retenues chaque année pour le minimum vieillesse. Ses conclusions feront l'objet d'un rapport déposé devant le Parlement avant le 30 juin 2009.
La parole est à M. Claude Domeizel.
Le Président de la République a pris l’engagement, quand il était candidat, d’augmenter de 25 %, sur la durée du quinquennat, le montant de l’allocation aux adultes handicapés, l’AAH, et d’accroître dans la même proportion le montant du minimum vieillesse.
Le II de l’article 51 organise le décrochage entre l’allocation supplémentaire d’invalidité, l’ASI, et le minimum vieillesse. Les allocataires de l’ASI, dont les revenus restent bien en dessous du seuil de pauvreté, ne bénéficieront pas de la revalorisation prévue pour les allocataires du minimum vieillesse.
Le présent amendement prévoit que le Gouvernement évalue les conditions d’évolution de l’allocation supplémentaire d’invalidité par rapport à celles qui sont retenues chaque année pour le minimum vieillesse. Ces conclusions feront l’objet d’un rapport déposé devant le Parlement avant le 30 juin 2009.
L'amendement n° 352 rectifié, présenté par M. Fischer, Mme David, M. Autain, Mmes Pasquet, Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Compléter le I de cet article par une phrase ainsi rédigée :
Le ministre chargé de la sécurité sociale transmet au Parlement, avant le 30 juin 2009, un rapport sur les conséquences pour les comptes sociaux, de la revalorisation de l'allocation supplémentaire d'invalidité (ASI), dans les mêmes conditions que l'allocation de solidarité aux personnes âgées.
La parole est à M. Guy Fischer.
Avec cet article, Claude Domeizel l’a rappelé, le Gouvernement entend concrétiser une promesse du candidat à l’élection présidentielle aujourd’hui devenu Président de la République : l’augmentation du minimum vieillesse et de l’ASPA.
Cette revalorisation, échelonnée sur plusieurs années, ne sera pas suffisante. À peine permettra-t-elle de venir compenser la perte de pouvoir d’achat des années précédentes, sans pour autant garantir une hausse de celui-ci pour les années à venir.
Toutefois, une disposition insuffisante pouvant cacher une mesure injuste, vous profitez de cet article pour déconnecter l’ASPA et l’allocation supplémentaire d’invalidité. En d’autres termes, vous revenez sur une disposition actuellement en vigueur, qui prévoit que l’augmentation de l’ASPA entraîne celle de l’ASI.
Cela est inacceptable et constitue une rupture d’égalité, pour ne pas dire de solidarité. Ce faisant, vous maintenez les invalides dans une situation de grande pauvreté, ce qui aura pour conséquence de créer une sous-catégorie de pauvres. Notre pays comptera des pauvres en raison de leur âge et des pauvres, encore plus pauvres, du fait de leur invalidité.
Nous aurions été tentés de déposer un amendement visant à « reconnecter » l’ASPA et l’ASI, mais nous ne nous faisions pas d’illusions sur les conséquences de l’application de l’article 40 de la constitution.
C’est pourquoi nous avons déposé cet amendement, qui vise à demander au Gouvernement de transmettre au Parlement un rapport sur les conséquences pour les comptes sociaux de la revalorisation de l’ASI dans les mêmes conditions que l’allocation de solidarité aux personnes âgées.
MM. Claude Domeizel et Guy Fischer s’étonnent qu’à l'article 51 ne figure pas la réévaluation de l’ASI. Or ils savent que cet article fixe la réévaluation du minimum vieillesse de 25 % jusqu’à 2012 ; il s’agit d’un engagement pris par le Gouvernement l’an dernier. Le rendez-vous de 2008 était prévu par la loi de 2003 portant réforme des retraites.
C'est la raison pour laquelle la commission ne peut être favorable ni à la réévaluation de l’ASI ni à l’idée d’une étude permettant d’évaluer l’évolution de cette allocation dans le cadre d’une hypothétique réévaluation.
Je tiens à faire remarquer à nos deux collègues que leurs propos ne sont pas tout à fait exacts. Certes, les revalorisations des deux allocations sont déconnectées, mais les bénéficiaires de l’ASI percevant par ailleurs l’AAH pourront obtenir un différentiel d’AAH. Ainsi profiteront-ils de la réévaluation de 25 % de l’AAH qui a été annoncée par le Président de la République voilà quelque temps.
Le minimum vieillesse est un mécanisme assez complexe, qui s’articule autour de deux dispositifs. Dernièrement, une réforme a été engagée pour regrouper ceux-ci en une seule allocation, l’allocation spécifique aux personnes âgées, afin d’apporter aux personnes seules, de façon non contributive, bien évidemment, un complément de revenus.
Vous l’avez dit, mes chers collègues, il s’agit des plus vulnérables de nos concitoyens. Nous le savons tous, aujourd'hui, percevoir le minimum vieillesse, c’est vivre au-dessous du seuil de pauvreté. C'est la raison pour laquelle le Gouvernement, soucieux de proposer aux plus démunis une revalorisation des prestations qui leur sont accordées, propose cette augmentation de 25 %.
Cela concerne les deux tiers des 600 000 bénéficiaires du minimum vieillesse ; je vous laisse faire le calcul.
Avec cette réforme de l’ASPA ont été regroupées un certain nombre d’allocations, qui sont portées par le Fonds de solidarité vieillesse, puisqu’elles sont non contributives.
C’est une mesure destinée aux personnes seules, essentiellement des femmes qui n’ont jamais travaillé ou qui n’ont pas eu une carrière professionnelle leur permettant de percevoir des pensions significatives.
Je le répète, l'article 51 ne porte pas sur l’ASI.
Pour toutes ces raisons, la commission émet un avis défavorable sur les amendements n° 291 et 352 rectifié.
Le Gouvernement émet également un avis défavorable.
J’insiste sur le fait que les titulaires de l’ASI peuvent bénéficier d’une prestation différentielle au titre de l’allocation aux adultes handicapés, ce qui va dans le sens de la revalorisation.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 345, présenté par Mme Dini, MM. Mercier, J. Boyer, Vanlerenberghe et les membres du groupe Union centriste, est ainsi libellé :
Supprimer le II de cet article.
La parole est à Mme Muguette Dini.
Cet amendement a pour objet d'éviter que la revalorisation de l'allocation supplémentaire invalidité ne décroche de celle de l'allocation de solidarité aux personnes âgées.
Le Président de la République s’est engagé à revaloriser le montant de l’allocation aux adultes handicapés de 25 % et à augmenter dans les mêmes proportions l’allocation de solidarité aux personnes âgées avant la fin de son mandat.
L’allocation supplémentaire d’invalidité est une prestation versée sous conditions en complément d’un avantage viager attribué au titre de l’assurance vieillesse ou invalidité jusqu’à ce que le titulaire atteigne l’âge requis pour bénéficier de l’ASPA.
Jusqu’alors, comme les anciennes allocations octroyées au titre du minimum vieillesse, les montants de l’ASPA et de l’ASI étaient revalorisés au 1er janvier de chaque année par application du coefficient de revalorisation des pensions de vieillesse.
L’article 51, dans sa rédaction actuelle, organise le décrochage entre ces deux allocations.
L’amendement n° 345 vise à faire en sorte que les bénéficiaires de l’ASI dont les revenus restent très inférieurs au seuil de pauvreté fixé par Eurostat à 817 euros ne soient pas exclus de ces avancées de la solidarité nationale.
Les mêmes causes produisant les mêmes effets, la commission émet un avis défavorable.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 289, présenté par Mmes Demontès et Le Texier, M. Cazeau, Mmes Jarraud-Vergnolle, Schillinger et Campion, MM. Teulade, Godefroy et Desessard, Mmes Printz et Chevé, MM. Le Menn, Daudigny et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... - Le Gouvernement évaluera les conditions d'extension de la revalorisation du minimum vieillesse aux conjoints, aux concubins et aux partenaires liés par un pacte civil de solidarité. Ses conclusions feront l'objet d'un rapport déposé devant le Parlement avant le 30 juin 2009.
La parole est à Mme Annie Jarraud-Vergnolle.
Au travers de l’article 51, monsieur le ministre, vous reprenez d’une main ce que vous donnez de l’autre. Vous introduisez des mesures extrêmement restrictives cachées sous un affichage de façade qui caractérise l’ensemble de ce projet de loi. La revalorisation annoncée revient donc à concentrer des ressources existantes sur une partie réduite de la population âgée se trouvant dans le besoin. Certains retraités s’attendent à voir augmenter leur minimum vieillesse ; ils vont être déçus !
Cette revalorisation s’élèvera à moins de 30 euros par an pour une personne seule. Les retraités ne vont pas comprendre pourquoi sont exclus de cette augmentation les titulaires de l’ASPA bénéficiant de l’allocation attribuée à un couple.
Nous souhaitons connaître les conditions d’extension de la revalorisation du minimum vieillesse aux personnes vivant en couple, mariées ou pacsées, puisque nous devons pouvoir en apprécier le coût financier et les conséquences sur le budget de la sécurité sociale.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.
Nous sommes toujours dans la logique de l’ASI. La commission émet donc un avis défavorable.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 290, présenté par Mmes Demontès et Le Texier, M. Cazeau, Mmes Jarraud-Vergnolle, Schillinger et Campion, MM. Teulade, Godefroy et Desessard, Mmes Printz et Chevé, MM. Le Menn, Daudigny et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... - Le Gouvernement évaluera les conditions d'intégration des revalorisations de 1, 1 % au 1er janvier 2008 et de 0, 8 % au 1er septembre 2008 et du versement exceptionnel attribué par le décret n° 2008-241 du 7 mars 2008, dans le montant du minimum vieillesse à partir duquel sera calculée la revalorisation de 25 % à l'horizon 2012. Ses conclusions feront l'objet d'un rapport déposé devant le Parlement avant le 30 juin 2009.
La parole est à Mme Jacqueline Chevé.
L’article 51 est le premier d’une série d’articles traitant de ce grand sujet qu’est l’assurance vieillesse, le devenir des retraites et leur revalorisation. Il correspond à l’engagement du candidat Nicolas Sarkozy d’augmenter de 25 % le minimum vieillesse sur les quatre ans à venir.
Mais nous ne pouvons que constater que c’est une politique des petits pas qui est menée. Au travers de cette revalorisation, vous vous adressez uniquement aux personnes âgées seules. Sont donc exclus pour l’instant les couples éligibles au minimum vieillesse. Cela n’est pas acceptable !
Vous le savez, les retraités ont beaucoup cru aux promesses. Aujourd’hui, la déception est grande. Le minimum vieillesse individuel s’établissait au 31 décembre 2007 à 621, 27 euros par mois ; depuis le 1er septembre dernier, il a été porté à 648, 43 euros. Vous comprendrez que, disposant d’une telle somme, la personne âgée concentre ses dépenses sur les achats alimentaires et sur le chauffage, c’est-à-dire sur le « nécessaire à vivre ».
On ne peut ignorer que le pouvoir d’achat des retraités a baissé, notamment celui des personnes percevant les plus petites retraites.
En ma qualité d’ancienne directrice d’un foyer logement, je peux vous dire à quel point est grande l’inquiétude des retraités qui craignent de ne plus pouvoir faire face avec leur pension.
Les mesures proposées dans le PLFSS ne sont que des trompe-l’œil puisque leur impact sera très limité.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.
Notre collègue propose que soient évaluées les conditions d’intégration dans le montant du minimum vieillesse des revalorisations de 1, 1 % au 1er janvier 2008 et de 0, 8 % au 1er septembre 2008 et du versement exceptionnel de 200 euros. Un rapport doit être déposé devant le Parlement.
La commission s’en remet à la sagesse de la Haute Assemblée.
Des engagements ont été pris. Pour en tenir compte, la revalorisation sera de 6, 9 % au 1er avril 2009, soit bien supérieure au taux de 5 %.
Ce n’est pas un scoop : nous l’avions déjà annoncé !
Le Gouvernement s’en remet également à la sagesse du Sénat.
L'amendement n'est pas adopté. – Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.
La parole est à M. Guy Fischer, pour explication de vote sur l’article 51.
Nous prenons acte du vote qui vient d’intervenir.
Au travers de tous les amendements qui ont été présentés relatifs à l’ASPA, à l’ASI, nous traitons d’une question qui est de plus en plus d’actualité, celle des retraités pauvres. Le tassement des retraites au cours des années passées soulève un véritable problème de pouvoir d’achat : la perte financière, de l’ordre de 15 % sur les dix dernières années, mériterait des revalorisations bien plus importantes du minimum vieillesse.
D’un côté, se pose le problème des jeunes en difficulté et qui, étant âgés de 18 à 25 ans, ne bénéficieront pas du RSA et, de l’autre côté, apparaît une nouvelle génération de retraités dont certains peuvent être pauvres.
L'article 51 est adopté.
I. - Le chapitre III du titre V du livre III du code de la sécurité sociale est complété par un article L. 353-6 ainsi rédigé :
« Art. L. 353 -6. - La pension de réversion est assortie d'une majoration lorsque le conjoint survivant atteint l'âge mentionné au 1° de l'article L. 351-8 et que la somme de ses avantages personnels de retraite et de réversion servis par les régimes légaux ou rendus légalement obligatoires, de base et complémentaires, français et étrangers, ainsi que par les régimes des organisations internationales, n'excède pas un plafond fixé par décret. La majoration est égale à un pourcentage fixé par décret de la pension de réversion. Lorsque le total de cette majoration et de ces avantages excède ce plafond, la majoration est réduite à due concurrence du dépassement.
« Le conjoint survivant ne peut bénéficier des dispositions du présent article que s'il a fait valoir les avantages personnels de retraite et de réversion auxquels il peut prétendre auprès des régimes légaux ou rendus légalement obligatoires, de base et complémentaires, français et étrangers, ainsi qu'auprès des organisations internationales. »
II. - À l'article L. 634-2 du code de la sécurité sociale, la référence : « L. 353-5 » est remplacée par la référence : « L. 353-6 ».
III. - À l'article L. 643-7 du code de la sécurité sociale, le mot et la référence : « et L. 353-3 » sont remplacés par les références : «, L. 353-3 et L. 353-6 ».
IV. - Après l'article L. 732-51 du code rural, il est inséré un article L. 732-51-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 732 -51 -1. - La pension de réversion est assortie d'une majoration lorsque le conjoint survivant atteint l'âge mentionné au 1° de l'article L. 351-8 du code de la sécurité sociale et que la somme de ses avantages personnels de retraite et de réversion servis par les régimes d'assurance vieillesse légaux ou rendus légalement obligatoires, de base et complémentaires, français et étrangers, ainsi que par les régimes des organisations internationales, n'excède pas un plafond fixé par décret. La majoration est égale à un pourcentage fixé par décret de la pension de réversion. Lorsque le total de cette majoration et de ces avantages excède ce plafond, la majoration est réduite à due concurrence du dépassement.
« Le conjoint survivant ne peut bénéficier des dispositions du présent article que s'il a fait valoir les avantages personnels de retraite et de réversion auxquels il peut prétendre auprès des régimes légaux ou rendus légalement obligatoires, de base et complémentaires, français et étrangers, ainsi qu'auprès des régimes des organisations internationales. »
V. - Au premier alinéa de l'article L. 353-1 du code de la sécurité sociale et de l'article L. 732-41 du code rural, après les mots : « son conjoint survivant a droit à une pension de réversion », sont insérés les mots : « à partir d'un âge et dans des conditions déterminés par décret ».
VI. - Les personnes qui ne remplissent pas la condition d'âge prévue à l'article L. 353-1 du code de la sécurité sociale et à l'article L. 732-41 du code rural bénéficient jusqu'au 31 décembre 2010 de l'assurance veuvage dans les conditions en vigueur à la date de publication de la loi n° 2003-775 du 21 août 2003 portant réforme des retraites.
VI bis. - Après l'article L. 357-10-1 du code de la sécurité sociale, il est inséré un article L. 357-10-2 ainsi rédigé :
« Art. L. 357 -10 -2. - La pension de veuf ou de veuve servie au titre du code local des assurances sociales ou au titre de la loi du 20 décembre 1911 relative à l'assurance des employés privés est assortie de la majoration prévue à l'article L. 353-6 dans les conditions prévues audit article. »
VI ter. - À la dernière phrase de l'article L. 342-6 du même code, après la référence : « L. 353-5 », sont insérés les mots : « et de l'article L. 353-6 ».
VII. – Les I à IV, VI bis et VI ter sont applicables à compter du 1er janvier 2010.
VIII. - Le présent article est applicable à Saint-Pierre-et-Miquelon.
La France compte 4 millions de veuves et de veufs, ainsi que 500 000 orphelins de moins de vingt ans. Leur situation demeure préoccupante.
Au-delà de la douleur et du choc provoqués par la perte d’un être cher se pose fréquemment pour le conjoint survivant le problème d’une chute brutale du niveau de ses ressources, pouvant trop souvent conduire à une précarisation, voire à une exclusion. Aussi, l’annonce par le Président de la République d’une augmentation du taux de la pension de réversion de 54 % à 60 % était évidemment bienvenue, car elle correspondait à une revendication ancienne et légitime. Le présent article avait pour ambition de satisfaire cette promesse.
Malheureusement, la mesure sera progressive, donc sa mise en œuvre sera longue et, surtout, elle sera limitée aux personnes âgées de 65 ans et plus dont le montant total de la retraite n’excède pas 800 euros.
En outre, pour bénéficier d’une pension de réversion, il faudra désormais avoir plus de 55 ans, tandis qu’il suffisait d’être âgé de 51 ans jusqu’à aujourd’hui, alors même que la réforme des pensions du mois d’août 2003 abaissait progressivement les conditions d’âge pour les supprimer totalement d’ici à 2011. On ne peut que dénoncer ce revirement en défaveur des veufs et des veuves.
Au final, la revalorisation promise est assortie de restrictions telles qu’elles durciront les conditions d’attribution de la pension de réversion.
La déception est grande parmi la population concernée des veufs et surtout des veuves, car ce sont essentiellement les femmes qui sont pénalisées, de surcroît lorsqu’elles travaillent à temps partiel et qu’elles ont des enfants.
Contrairement aux couples séparés ou divorcés, les veuves ne perçoivent ni pension alimentaire ni prestation compensatoire ; elles doivent supporter seules les charges liées à l’éducation des enfants lorsque ces derniers poursuivent des études onéreuses. Aujourd’hui, elles s’estiment lésées et particulièrement ignorées, victimes d’une injustice difficile à admettre dans notre République qui affiche la solidarité comme une valeur fondamentale.
Monsieur le ministre, nous sommes opposés à cette mesure, car elle est trop restrictive. Certes, les veuves et veufs ne constituent pas la partie la plus revendicative de la population française. Mais ce n’est pas une raison pour ignorer leur fragilité et les risques d’exclusion qui guettent certains d’entre eux.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.
Comme le rappelle le rapport de notre collègue M. Leclerc, l’augmentation des pensions de réversion était un engagement du candidat Nicolas Sarkozy à l’élection présidentielle. Je me suis donc procuré son document de campagne : les propositions qui y figurent sont quelque peu différentes de celles qui nous sont soumises aujourd’hui.
Afin que nos débats soient clairs, je veux vous citer, mes chers collègues, la page 9 de ce document, que je garde à votre disposition : « Je comprends la forte inquiétude des personnes âgées qui, depuis dix ans, subissent une véritable érosion de leur pouvoir d’achat sous l’effet de la pression fiscale. C’est pour cela que je suis autant soucieux de réduire les impôts. J’augmenterai de 25 % le minimum vieillesse, je revaloriserai les petites retraites et les pensions de réversion pour que ces retraités vivent mieux ».
Le Président de la République s’était donc d’abord engagé à augmenter le minimum vieillesse de 25%. Cet engagement est quelque peu édulcoré, puisque cette augmentation se fera, en réalité, sur cinq ans.
Il s’était ensuite engagé à augmenter les retraites des plus faibles. Il ne se contente pas de repousser cet engagement à demain ; il ne l’évoque même plus ! C’est simple : ce PLFSS est le seul, me semble-t-il, depuis des années, dans lequel on ne propose pas un taux de revalorisation des retraites servies par les régimes obligatoires.
Si je comprends bien, on nous proposera une revalorisation « calée » sur celle des retraites complémentaires au 1er avril.
Quant à l’engagement d’augmenter le montant de la pension de réversion, autant vous dire que les dispositions qui nous sont proposées ici constituent selon nous un véritable renoncement.
La promesse de campagne de Nicolas Sarkozy faisait référence à toutes les pensions de réversion, quand vous vous limitez à revaloriser les retraites les plus faibles. Précisons même que la majoration que vous proposez ne s’appliquera qu’aux veuves ou aux veufs dont le montant de la retraite cumulée à la pension de réversion n’excèdera pas un seuil de 800 euros.
Après le projet de loi portant création du RSA, c’est le deuxième texte que nous examinons et qui maintient les personnes concernées dans une situation de grande précarité, en ne leur octroyant que des ressources inférieures au seuil de pauvreté.
Surtout, l’engagement présidentiel ne mentionnait absolument pas la réintroduction d’une condition d’âge ; il s’agit d’une promesse des gouvernements précédents, y compris ceux qui émanaient de votre majorité, monsieur le ministre.
Ainsi, des promesses d’hier, il ne reste qu’un engagement à demi respecté et deux promesses trahies !
Toutefois, il faut admettre, à la décharge du Président de la République, que celui-ci s’est aperçu entre-temps que la suppression de la condition d’âge avait un coût financier estimé à 150 millions d’euros. Le chef de l’État a certainement dû en tirer les mêmes conclusions que notre collègue Dominique Leclerc, qui indique dans son rapport : « Il convenait donc, selon ces études, de recibler le dispositif de la réversion sur les veufs et veuves qui en ont le plus besoin. La réintroduction d’une condition d’âge et la majoration de la pension de réversion des plus modestes devraient y contribuer. »
En un mot, ce que le Gouvernement donne de la main droite, il le reprend de la main gauche !
Sourires
Comme nous n’avons eu de cesse de le rappeler, et comme les propos de M. le rapporteur le prouvent encore, le Gouvernement refuse obstinément de doter notre régime de protection sociale des ressources suffisantes.
Et il n’y a pas de solution de rechange : comme vous refusez de trouver des sources de financement solidaires, il vous faut bien aller chercher dans les poches des personnes concernées les sommes nécessaires à vos effets d’annonces.
Mes chers collègues, avant de conclure, je ne résiste pas à la tentation de vous lire un autre paragraphe du document de campagne de M. Sarkozy.
Marques de lassitude sur les travées de l ’ UMP.
Sans doute a-t-il changé d’avis depuis lors, puisque le système qu’il jugeait éthique hier, il souhaite le moraliser aujourd’hui. Le candidat de l’UMP annonçait même vouloir « renforcer le capitalisme familial ». C’est sans doute pour cette raison qu’il vient d’injecter des millions d’euros dans le capitalisme financiarisé, dans l’économie de la spéculation !
Telle est la solidarité à deux vitesses : tout pour les uns, rien pour les autres !
Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.
Mes chers collègues, il est minuit. À cet instant se termine en théorie la grève des pilotes. Comme il me semble nécessaire d’aborder ce sujet aujourd'hui, je demande que les articles 61 bis et 61 ter soient examinés par priorité avant l’article 53.
Je suis saisie de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 176, présenté par M. Fischer, Mme David, M. Autain, Mmes Pasquet, Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Supprimer le V de cet article.
La parole est à Mme Annie David.
Cet amendement a pour objet de supprimer la disposition introduisant une condition d’âge, qui d'ailleurs sera définie ultérieurement par décret, tout comme d’autres exigences dont on peut imaginer que l’une au moins sera financière.
Ce renoncement à la parole donnée est un mauvais signal adressé à nos concitoyens : l’État s’était engagé à supprimer toute condition d’âge. Or, monsieur le ministre, vous apercevant que votre mesure de revalorisation aurait des incidences sur les comptes sociaux, et vous refusant à dépenser un euro de plus pour les moins riches, vous avez recherché un mécanisme dont le seul but était de réduire les coûts. Ce fut la réintroduction d’une condition d’âge.
Une telle mesure n’est pas acceptable, car elle privera temporairement des millions de nos concitoyens d’un complément financier ; les veuves et les veufs de notre pays en ont pourtant particulièrement besoin dans le contexte inflationniste que nous connaissons.
C’est d’autant plus injuste que, l’été dernier, vous n’avez pas hésité à débloquer 15 milliards d'euros pour instaurer ce que vous avez qualifié vous-même de « bouclier fiscal ».
Je crois urgent aujourd'hui de mettre en place pour les populations les plus modestes de notre pays un « bouclier social » capable de protéger les retraités, les salariés, les personnes privées d’emploi ou encore les malades des mauvais coups que vous multipliez et qui affectent sérieusement leurs conditions de vie.
L'amendement n° 312 rectifié ter, présenté par Mmes Hermange, Bout et B. Dupont, M. Dériot et Mmes Rozier et Desmarescaux, est ainsi libellé :
Supprimer les V et VI de cet article.
La parole est à Mme Marie-Thérèse Hermange.
Le V de l’article 52 rétablit une condition d’âge, à savoir 55 ans, pour bénéficier de la pension de réversion, alors que la réforme réalisée par la loi du 21 août 2003 portant réforme des retraites abaissait progressivement cette exigence, pour la supprimer définitivement au 1er janvier 2011.
Il convient de ne pas revenir sur ce progrès, qui permettait de faire bénéficier toutes les veuves et veufs de la pension de réversion et mettait ainsi en œuvre une application plus juste de la solidarité nationale.
En outre, il est incompréhensible qu’aucun dispositif ne soit prévu pour les plus jeunes veuves au-delà de 2011.
En ce qui concerne l’amendement n° 176, la suppression du V de l’article 52 reviendrait à abroger la condition d’âge.
La loi de 2003 a remplacé cette limite de 55 ans par un dispositif dégressif. Toutefois, l’an dernier, Claude Domeizel, alors membre de la commission des affaires sociales, et moi-même avions proposé, dans le cadre d’un rapport de la MECSS, la mission d’évaluation et de contrôle de la sécurité sociale, de cibler les plus petites pensions de réversion. Nous entendions rester à enveloppe constante, c'est-à-dire trouver des solutions pour revaloriser les plus petites pensions tout en tenant compte de la dégradation de la situation de la branche vieillesse.
Nous avions considéré que, si nous voulions rester raisonnables sur le plan financier, il fallait précisément mettre fin à la suppression progressive de la condition d’âge. Tel est l’objet de cet article porté par le Gouvernement.
En ce qui concerne l’amendement n° 176, la commission émet un avis défavorable, car elle entend rester fidèle à l’esprit du texte et donc cibler l’effort de la collectivité sur les plus petites pensions de réversion.
S’agissant de l’amendement n° 312 rectifié ter, après une discussion assez sérieuse, la commission a décidé d’émettre un avis favorable. Néanmoins, j’aimerais connaître l’avis du Gouvernement à ce sujet.
Le Gouvernement émet un avis défavorable sur ces deux amendements.
D'ailleurs, pour que tout soit très clair, je demanderai que le Sénat se prononce par scrutin public sur l’amendement n° 312 rectifié ter si je ne parviens pas à convaincre Mme Hermange de le retirer.
Le sujet n’est pas nouveau ! Si ma mémoire est bonne, Dominique Leclerc et Claude Domeizel, qui comptent, et depuis longtemps, parmi les meilleurs connaisseurs de la question des retraites, ont proposé le rétablissement d’une condition d’âge dans un rapport conjoint réalisé au nom de la MECSS du Sénat. En effet, la condition d’âge offre, d’une certaine façon, des garanties. Sans cette disposition, en cas de veuvage précoce, le montant de la prestation versée sera très faible.
Parfois, l’assurance veuvage apporte davantage de garanties. Prenons le cas d’une veuve de quarante ans dont le mari aurait cotisé pendant vingt ans et perçu des salaires dont le montant était de l’ordre du SMIC. Sa pension de réversion serait de 264 euros par mois et son allocation veuvage de 560 euros par mois. C’est un exemple parmi d’autres !
Toutefois, madame Hermange, vous avez raison de souligner que nous devrons apporter de nouvelles solutions avant la fin de l’année 2010. En effet, il ne serait pas cohérent de mettre en place un système apportant des réponses aux situations de veuvage précoce sans prévoir un dispositif s’appliquant après cette date.
Une concertation sera menée dans le cadre du Conseil d’orientation des retraites d’ici à la fin de l’année, ce qui nous laisse le temps de poser les bases d’un autre système destiné à éviter que quiconque ne passe au travers des mailles du filet de la protection sociale.
Telle est notre logique ! Si nous avons fait ce choix, c’est en raison de la possibilité de bénéficier de l’assurance veuvage jusqu’au 31 décembre 2010. Nous avons largement le temps de régler ensemble cette question, et je m’y engage au titre de mon ministère.
Je vous demande donc, madame Hermange, de bien vouloir retirer votre amendement au bénéfice de ces explications.
Monsieur le ministre, serait-il possible de sous-amender ma proposition pour y faire figurer l’engagement que vous venez de prendre ?
En effet, les veuves et les veufs sont confrontés à un véritable problème ! Si nous inscrivions votre engagement dans le projet de loi, la négociation s’ouvrirait dans de meilleures conditions.
Je crains malheureusement que nous ne puissions sous-amender un amendement de suppression.
Tout au plus pouvons-nous préciser ce point soit à la demande des parlementaires pendant la commission mixte paritaire, soit sur l’initiative du Gouvernement après celle-ci.
Il n’est pas possible de donner une traduction juridique à mes propos. En revanche, je tiens à vous indiquer, madame Hermange, que je viens d’écrire à la présidente de la FAVEC en lui tenant exactement les mêmes propos. C’est donc un engagement du Gouvernement qui dépasse le cadre de cette discussion.
En effet, il s’agit là d’un vrai sujet et nous ne pouvons nous permettre de créer, après 2010, une sorte de no man’s land juridique pour les veuves précoces.
Je précise que cette mesure ne s’appliquerait qu’aux situations nouvelles : pour les personnes qui sont aujourd'hui concernées par le dispositif, la limite d’âge existante restera en vigueur.
Compte tenu de vos explications, de vos engagements, monsieur le ministre, et en espérant que la représentation nationale sera associée à la négociation, je retire mon amendement.
L’amendement n° 312 rectifié ter est retiré.
La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy.
Eu égard à la longue hésitation de Mme Hermange et au doute qui s’est instauré dans l’hémicycle, nous reprenons l’amendement n° 312 rectifié ter.
Je suis donc saisie d’un amendement n° 312 rectifié quater, présenté par M. Godefroy et qui est ainsi libellé :
Supprimer les V et VI de cet article.
Je mets aux voix l'amendement n° 176.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 382, présenté par M. Detcheverry, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi le VIII de cet article :
VIII. - Après l'article 16 de la loi n° 87-563 du 17 juillet 1987 portant réforme du régime d'assurance vieillesse applicable à Saint-Pierre-et-Miquelon, il est inséré un article ainsi rédigé :
« Art. ... - La pension de réversion est assortie d'une majoration lorsque le conjoint survivant atteint l'âge mentionné au 1° de l'article 11 et que la somme de ses avantages personnels de retraite et de réversion servis par les régimes légaux ou rendus légalement obligatoires, de base et complémentaires, français et étrangers, ainsi que par les régimes des organisations internationales, n'excède pas un plafond fixé par décret. La majoration est égale à un pourcentage fixé par décret de la pension de réversion. Lorsque le total de cette majoration et de ces avantages excède ce plafond, la majoration est réduite à due concurrence du dépassement.
« Le conjoint survivant ne peut bénéficier des dispositions du présent article que s'il a fait valoir les avantages personnels de retraite et de réversion auxquels il peut prétendre auprès des régimes légaux ou rendus légalement obligatoires, de base et complémentaires, français et étrangers, ainsi qu'auprès des organisations internationales.
« Les dispositions du présent article sont applicables à compter du 1er janvier 2010. »
La parole est à M. Denis Detcheverry.
L’Assemblée nationale a complété l’article 52 d’un alinéa VIII prévoyant que les dispositions dudit article s’appliqueront au régime d’assurance vieillesse de Saint-Pierre-et-Miquelon, afin de permettre aux conjoints survivants d’assurés de ce régime de bénéficier de la majoration de la pension de réversion.
Cependant, l’article 52 ne comporte pas que des dispositions relatives à cette majoration. Dans un souci de lisibilité, il serait donc préférable que le texte, qui régit le régime d’assurance vieillesse de Saint-Pierre-et-Miquelon, soit complété d’une disposition expresse. Il s’agit en fait d’un amendement de précision.
L'amendement est adopté.
L'article 52 est adopté.
L'amendement n° 42, présenté par M. Leclerc, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Après l'article 52, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article L. 114-4 du code de la sécurité sociale est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Avant le 1er juillet 2010, la Commission de garantie des retraites rend aux commissions compétentes de l'Assemblée nationale et du Sénat un avis sur la question des modalités techniques de remplacement du système de calcul par annuités de la Caisse nationale d'assurance vieillesse des travailleurs salariés par celui des comptes notionnels de retraite. Afin de réaliser les travaux d'expertise nécessaires, elle fait appel autant que de besoin aux services de la direction de la sécurité sociale, de la direction du Budget, de la direction générale du Trésor et de la politique économique, de l'Institut national de la statistique et des études économiques et du Conseil d'orientation des retraites. La commission de garantie des retraites peut également demander toutes les informations nécessaires aux administrations de l'État, aux organismes de sécurité sociale, ainsi qu'aux organismes privés gérant un régime de base de sécurité sociale légalement obligatoire. Cet avis technique est rendu public après sa transmission au Parlement. »
La parole est à M. Dominique Leclerc, rapporteur.
À cette heure de la nuit, je ne voudrais pas que nous refassions complètement le débat sur la réforme des retraites. Cet amendement, que j’ai présenté à la commission et sur lequel j’ai insisté dans la discussion générale, est cependant très important à mes yeux.
Cela a été dit, nous constatons une dégradation des comptes de la branche vieillesse. L’année 2008 marque le premier des rendez-vous sur les retraites prévus par la loi de 2003, mais il est important de préparer déjà le prochain, celui de 2010.
En effet, les réformes dites paramétriques ont atteint leurs limites, à moins que l’on ne décide d’augmenter le taux des cotisations. Toutefois, dans le contexte économique que nous connaissons, cela paraît impossible. En outre, nous sommes tous d’accord sur le fait qu’il est également impossible d’augmenter la durée de cotisation. Enfin, diminuer le niveau des pensions serait inacceptable…
Par conséquent, il nous faudra peut-être, dans un avenir prochain, imaginer d’autres modes de réforme, selon des voies que, jusqu’à présent, nous n’avons pas eu le temps d’explorer.
Par cet amendement, je demande que la Commission de garantie des retraites, s’appuyant sur des études conduites par différents organismes et par le Conseil d’orientation des retraites, nous présente des projections en vue des rendez-vous de 2010 et de 2012, afin que nous puissions nous déterminer en connaissance de cause.
Cet amendement, je le répète, est très important aux yeux de la commission. Il s’agit de poser, dès aujourd’hui, des jalons pour le prochain rendez-vous sur les retraites.
M. le président About me disait que ce sujet devrait être travaillé au corps…
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Non, je n’ai pas dit cela !
Sourires
Je pense qu’il a raison.
Il me semble que la réflexion doit être menée au sein du Conseil d’orientation des retraites.
Toutefois, monsieur Leclerc, s’agissant du changement en profondeur visé par votre amendement, il faut tout dire : dans un système de comptes notionnels, c’est l’ensemble de la carrière qui est prise en considération, alors que, à l’heure actuelle, en France, les quinze moins bonnes années sont exclues.
Par conséquent, procéder à un tel changement, pour instaurer un dispositif analogue à celui qui prévaut en Italie, comporte des avantages et des inconvénients : on obtient certes un reflet plus fidèle de la carrière accomplie, mais cela a des incidences réelles sur le niveau des retraites.
Voilà pourquoi, à titre personnel, je suis particulièrement réservé sur ces questions, faute d’une étude approfondie de l’ensemble du dossier. Je le répète, j’estime que c’est au sein du Conseil d’orientation des retraites que la réflexion doit être engagée.
Le Gouvernement vous demande donc de bien vouloir retirer votre amendement, monsieur Leclerc. À défaut, je serais contraint d’en demander le rejet.
Je ne partage pas tout à fait le point de vue de M. le ministre.
Faute d’études prospectives, nous ne pouvons tirer de conclusions sur ce sujet, même s’il existe différentes instances compétentes, dont le Conseil d’orientation des retraites, et si la Commission de garantie des retraites s’est exprimée, pour la première fois, sur l’allongement de la durée de cotisation.
Lors de la présentation de la réforme des régimes spéciaux, M. le ministre a insisté sur la nécessaire convergence des paramètres les plus importants de ces régimes, afin de tendre vers une certaine équité, objectif qui nous tient à cœur.
Or nos concitoyens s’étonnent que, dans certains régimes, on prenne en compte les vingt-cinq meilleures années de la carrière, et, dans d’autres, les six derniers mois. Ils ont également pu constater que, dans certains cas, le taux de cotisation appliqué est, au minimum, supérieur de 20 % à ce qu’il est dans d’autres. Il y a là un problème de justice et d’équité, et il ne saurait y avoir de tabous sur cette question.
Nous ne pouvons continuer à débattre sans disposer d’études chiffrées très sérieuses sur lesquelles nous appuyer. Nous savons parfaitement, en outre, que nous ne pourrons, à l’avenir, jouer sur le taux de cotisation, le niveau des pensions ou la durée de cotisation.
Monsieur le ministre, vous me demandez donc l’impossible.
La Commission de garantie des retraites pourra s’appuyer sur toutes les instances qui l’entourent. Quant au Conseil d’orientation des retraites, dont l’action, il faut bien le dire, présente des limites liées à sa composition et à son mode de fonctionnement, son apport est important mais ne constitue pas, à mes yeux, l’alpha et l’oméga de la discussion et, surtout, des propositions d’avenir en matière de retraites.
L'amendement est adopté.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 52.
L'amendement n° 292, présenté par Mme Le Texier, M. Cazeau, Mmes Jarraud-Vergnolle, Demontès, Schillinger et Campion, MM. Teulade, Godefroy et Desessard, Mmes Printz et Chevé, MM. Le Menn, Daudigny et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 52, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le Gouvernement évaluera les conditions de l'ouverture des droits à pension de réversion aux concubins et aux personnes liées par un pacte civil de solidarité. Ses conclusions feront l'objet d'un rapport déposé devant le Parlement avant le 30 juin 2009.
La parole est à Mme Raymonde Le Texier.
Les droits des concubins ou des personnes liées par un pacte civil de solidarité, un PACS, ont fortement évolué pour se rapprocher de ceux des personnes mariées, voire s’y identifier.
En mai 2008, la Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité a estimé discriminatoires les dispositions qui subordonnent l’ouverture du droit à la pension de réversion à l’existence d’un mariage, en excluant concubins et partenaires liés par un pacte civil de solidarité.
Nous souhaitons donc que le Gouvernement examine la possibilité de revenir sur cette discrimination et présente les conclusions de sa réflexion sur ce point par le biais d’un rapport qui sera remis au Parlement au plus tard le 30 juin 2009.
La parole est à M. Claude Domeizel, pour explication de vote sur l'amendement n° 292.
Nous sommes de plus en plus souvent sollicités sur cette question, qui intéresse de nombreuses personnes liées par un PACS ou vivant en concubinage.
Monsieur le président de la commission des affaires sociales, si ma mémoire est bonne, l’une des propositions de loi que vous avez présentées dans le passé tendait à accorder le bénéfice de la réversion aux personnes « pacsées » pour les pensions militaires.
Un pas dans la bonne direction a donc déjà été accompli. Nous vous proposons, aujourd’hui, d’en faire un autre.
L'amendement n'est pas adopté.
Après l'article L. 161-1-4 du code de la sécurité sociale, il est inséré un article L. 161-1-6 ainsi rédigé :
« Art. L. 161-1-6. - Les organismes et services chargés de la gestion des régimes de retraite de base et complémentaires légaux ou rendus légalement obligatoires communiquent par voie électronique, selon des modalités fixées par décret, les informations nécessaires à la détermination du droit au bénéfice des prestations de retraite et, s'il y a lieu, au calcul de ces dernières, notamment pour la mise en œuvre des articles L. 173-2 et L. 353-6 du présent code et L. 732-51-1 et L. 732-54-3 du code rural. »
L'amendement n° 515, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
I. - Dans le texte proposé par cet article pour l'article L. 161-1-6 du code de la sécurité sociale, supprimer les mots :
, selon des modalités fixées par décret,
II. - Compléter ce même texte par deux phrases ainsi rédigées :
Un décret en Conseil d'État fixe les modalités d'application du présent article. Ce décret peut, aux mêmes fins, prévoir la création d'un répertoire national.
La parole est à M. le ministre.
Cet amendement a pour objet de faciliter les échanges d’informations entre régimes de retraite pour l’application des articles 52, 53 et 55 du présent projet de loi.
Pour tout dire, il s’agit de la reprise d’une idée pertinente de M. Leclerc. Je rends donc à M. le rapporteur ce qui lui appartient !
Il est très important qu’un tel échange d’informations entre les différents régimes puisse avoir lieu, afin d’établir les prestations que nous avons évoquées tout à l’heure, notamment le minimum contributif. Il me paraît indispensable de pouvoir disposer d’une reconstitution complète de la carrière des futurs pensionnés. Ce n’était pas toujours le cas jusqu’à présent, et cette situation ne manquait pas de surprendre les intéressés.
L'amendement est adopté.
L'article 52 bis est adopté.
I. - L'article L. 421-9 du code de l'aviation civile est ainsi modifié :
1° Après la première phrase, il est inséré une phrase ainsi rédigée :
« Dans le cas des vols en équipage avec plus d'un pilote, la limite d'âge pour exercer une activité en qualité de pilote ou de copilote du transport aérien public est fixée à soixante-cinq ans, à la condition qu'un seul des pilotes soit âgé de plus de soixante ans. » ;
2° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Le personnel navigant de la section A du registre peut de droit, à partir de soixante ans, demander à bénéficier d'un reclassement dans un emploi au sol. En cas d'impossibilité pour l'entreprise de proposer un reclassement dans un emploi au sol, le contrat de travail est rompu. À soixante-cinq ans, le contrat de travail de ce personnel n'est pas rompu du seul fait que cette limite d'âge est atteinte, sauf impossibilité pour l'entreprise de proposer un reclassement dans un emploi au sol. »
II. - Le I entre en vigueur le 1er janvier 2010.
Cet article très important, inséré par l’Assemblée nationale, suscite beaucoup de réactions : il vise à autoriser les pilotes et copilotes du transport aérien public à poursuivre leur activité jusqu’à l’âge de soixante-cinq ans.
Au travers des articles 61 bis et 61 ter, le Gouvernement persiste dans un processus d’allongement de la durée de cotisation, en permettant aux salariés de notre pays – s’ils le souhaitent, dites-vous, monsieur le ministre – de travailler après l’âge légal de départ à la retraite.
En réalité – et cela nous ramène à un débat que nous avons déjà eu l’année passée, à propos d’un amendement qui n’avait pas été adopté –, il s’agit de préparer progressivement l’allongement de la durée légale de cotisation pour tous les salariés, cette fois de manière obligatoire.
Il n’aura d’ailleurs échappé à personne que les articles 61, 61 bis et 61 ter visent tous trois à repousser l’âge limite pour le départ à la retraite à soixante-cinq ans, voire à soixante-dix ans, preuve s’il en est que le Gouvernement est cohérent et qu’il prépare un allongement généralisé de la durée du travail.
Le thème de la pénibilité du travail est toutefois le grand absent de ce débat, alors que vous nous aviez assuré l’année dernière, monsieur le ministre, que le Gouvernement aborderait ce problème.
Or, la prise en compte de la pénibilité est particulièrement importante en matière de fixation de l’âge du départ à la retraite, et ce ne sont pas les pilotes de l’aviation civile présents dans les tribunes, qui participent à un grand mouvement de grève
Exclamations sur les travées de l ’ UMP
En effet, plusieurs études scientifiques attestent de la nocivité, pour l’organisme humain, d’une exposition prolongée et répétée aux vibrations et aux radiations cosmiques.
Selon une étude commanditée par Santé Canada, c’est-à-dire par le ministère fédéral canadien de la santé, le rayonnement cosmique est, aux altitudes où se déplacent les aéronefs civils, cent fois plus fort qu’il ne l’est au sol.
Cette étude souligne que cette exposition accroît notamment le risque de survenue d’un cancer, dans une mesure modeste, certes, mais réelle. En outre, personne n’est, à ce jour, en mesure de préciser les conséquences, pour l’organisme, de l’exposition aux vibrations.
Nous savons néanmoins que, chez les hôtesses et les stewards, les troubles musculo-squelettiques sont très fréquents, notamment en raison du temps passé debout à piétiner.
C’est pourquoi mes collègues et moi-même voterons contre les articles 61 bis et 61 ter, élaborés sans consultation avec les partenaires sociaux et qui vont, ce qui est encore plus grave, à l’encontre des intérêts des travailleurs concernés. Or, nous aurons l’occasion de le redire et d’argumenter sur ce point : ce n’est pas promouvoir l’intérêt de nos concitoyens que de leur demander de sacrifier leur santé pour accroître leurs revenus.
C’est, par ailleurs, un mauvais calcul pour les comptes sociaux : à n’en pas douter, les dépenses liées aux arrêts maladie et aux accidents professionnels vont exploser. On ne manquera pas d’assister demain à une hausse des dépenses de santé, que le Gouvernement aura tôt fait de stigmatiser et de combattre en instaurant de nouvelles franchises et de nouveaux déremboursements.
Cet article vise à porter à soixante-cinq ans l’âge de la cessation d’activité pour les pilotes du transport public aérien, à compter du 1er janvier 2010.
Y aura-t-il demain un bon pilote dans l’avion ?
M. Jean Desessard applaudit. – Exclamations sur les travées de l ’ UMP.
Il est à souligner que, pour cet article comme pour le suivant, aucune négociation n’a eu lieu, une fois de plus. Le Gouvernement va provoquer un véritable trou d’air !
Exclamations amusées sur les travées du groupe socialiste.
Ceux qui ne voudront pas continuer leur activité de navigant pourront être reclassés au sol, mais, si cela n’est pas possible, il y aura rupture du contrat de travail. Le même dispositif serait appliqué aux hôtesses et aux stewards, pour lesquels l’âge de cessation d’activité est aujourd’hui fixé à cinquante-cinq ans.
Comme vous le savez, monsieur le ministre, les garanties apportées sont jugées insuffisantes par les syndicats de pilotes, qui n’ont toujours pas accepté d’être mis devant le fait accompli par les députés. Ils redoutent de devoir choisir, in fine, entre la poursuite de leur activité jusqu’à soixante-cinq ans ou un reclassement au sol si l’entreprise décidait de le leur imposer.
Au cours de sa campagne électorale, M. Nicolas Sarkozy s’était déclaré très clairement en faveur du maintien à soixante ans de la limite d’âge pour l’exercice de la fonction de pilote de ligne. Encore une promesse qui n’est pas respectée !
Par ailleurs, le 3 décembre 2007, M. Dominique Bussereau, secrétaire d’État chargé des transports, s’est engagé à mener une concertation avec l’ensemble des partenaires sociaux avant de modifier l’âge limite d’activité des personnels navigants.
Or nous constatons que, à l’Assemblée nationale, un amendement tendant à cette fin a été accepté par le Gouvernement, sans concertation préalable et en parfaite contradiction avec les engagements de MM. Nicolas Sarkozy et Dominique Bussereau.
Cette mesure apparaît comme étant particulièrement choquante, quand on sait que la limite d’âge pour l’exercice des fonctions de pilote de ligne est toujours en débat au plan européen.
En effet, l’AESA, l’Agence européenne de la sécurité aérienne, ne s’est toujours pas prononcée sur la délicate question de l’âge limite. Ses propositions sont actuellement soumises à consultations pour avis et observations. Nous déplorons que le Gouvernement s’engage dans la voie de la modification de cette limite d’âge avant même que l’AESA ait rendu à la Commission européenne sa recommandation.
Par ailleurs, au sein des principales compagnies européennes, les pilotes cessent leur activité au plus tard à soixante ans.
Monsieur le ministre, pourquoi mettre en œuvre cette mesure, alors que la fixation à soixante-cinq ans de la limite d’âge pour piloter n’a fait l’objet d’aucune validation scientifique ?
Bien qu’aucune étude scientifique n’ait été effectuée à ce jour, il est avéré et reconnu que les performances mentales et cognitives se dégradent avec l’âge.
Exclamations sur les travées de l ’ UMP.
C’est la raison pour laquelle l’OACI, l’Organisation de l’aviation civile internationale, interdit que des pilotes volant ensemble soient tous deux âgés de plus de soixante ans. Le principe de précaution doit prévaloir.
J’ajouterai que cet article aura des conséquences sur l’emploi. En effet, une telle mesure va ralentir l’avancement de carrière des jeunes pilotes et les embauches.
La complexité et l’importance du sujet de l’âge limite de cessation d’activité des pilotes de ligne imposent une véritable réflexion, une concertation avec l’ensemble des acteurs.
En général, on réfléchit, on discute et, ensuite, on prend des mesures. Aujourd’hui, on fait le contraire ! Il ne faut donc pas s’étonner qu’il y ait des mouvements de grève. La tension monte, monsieur le ministre !
Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.
Il est tout de même plus que discutable que, sans étude préalable et sans concertation avec les organisations syndicales représentatives des pilotes de ligne, les députés aient inséré par voie d’amendement dans ce PLFSS une disposition qui risque d’avoir de sérieuses répercussions sur la sécurité du transport aérien, ainsi que sur la santé et la fin de carrière de ces professionnels.
Cette mesure, approuvée par le Gouvernement, est en totale contradiction avec la loi portant rénovation de la démocratie sociale de juillet 2008 – ce n’est pas vieux ! –, qui renforce les exigences en matière de représentativité des organisations syndicales susceptibles de négocier des accords nationaux, ainsi qu’avec l’esprit de la loi du 31 janvier 2007 de modernisation du dialogue social, qui tend à imposer une concertation avec les syndicats représentatifs avant toute réforme de portée nationale concernant « les relations individuelles et collectives du travail, l’emploi et la formation professionnelle ».
Cependant, revenons-en au métier de pilote de ligne.
Pénibilité, responsabilité de la sécurité des vols et, cela va de soi, des passagers, exigences en matière de performances individuelles, accroissement des cadences de travail, décalages horaires, stress, fatigue : autant de facteurs susceptibles de nuire à la sécurité des vols.
La volonté du Gouvernement de favoriser le travail des seniors est peut être louable, compréhensible pour celles et ceux qui sont âgés de cinquante ans à soixante ans, mais ne tombons pas dans les extrêmes !
Comment demander à certains professionnels de travailler plus longtemps, alors qu’il est reconnu que les contraintes de leur métier ne sont pas compatibles avec une baisse des performances liée à l’âge ? Monsieur le ministre, soyons sérieux !
Vous nous avez dit voilà quelques minutes vouloir toujours prendre le temps d’aller au fond des débats ! Dans ces conditions, pourquoi légiférer dans la précipitation, à plus forte raison dans un contexte de crise économique qui risque d’avoir de fâcheuses conséquences sur la santé des compagnies aériennes et l’emploi des personnels et alors que la rédaction des décrets concernant la réforme de la retraite de ces derniers, négociée depuis quatre ans et adoptée par le conseil d’administration de la caisse voilà six mois, n’a pas encore été menée à son terme dans les ministères intéressés ?
Monsieur le ministre, laissons du temps au temps ! Laissons du temps à la concertation et à la négociation !
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.
Les articles 61 bis et 61 ter ont pour objet d’ouvrir la possibilité aux personnels navigants techniques – pilotes et copilotes – de continuer à travailler jusqu’à soixante-cinq ans, au lieu de soixante ans actuellement, et aux personnels navigants commerciaux – hôtesses de l’air et stewards – de travailler jusqu’à soixante ans, au lieu de cinquante-cinq ans.
Ces dispositions concernent un domaine où une négociation préalable avec les représentants des personnels aurait dû avoir lieu, puisqu’elles touchent directement aux conditions de travail et de départ à la retraite de ces catégories de salariés.
Dois-je vous rappeler, monsieur le ministre, que le Syndicat national des pilotes de ligne est favorable à l’ouverture d’une négociation sur l’âge de départ à la retraite ?
Toutefois, comment les partenaires sociaux pourraient-ils négocier quoi que ce soit si nous décidons à leur place en légiférant ?
Certes, ces articles ont été introduits à l’Assemblée nationale à la suite de l’adoption d’amendements d’origine parlementaire, mais vous ne vous y êtes pas opposé, monsieur le ministre, et vous l’avez même encouragée. Vous avez ainsi déclaré, à l’Assemblée nationale, que les dispositions prévues allaient « dans le sens de la politique du Gouvernement ».
Ce déni de dialogue social, qui se traduit, depuis déjà quatre jours, par une grève des pilotes d’Air France, …
… démontre que l’argument selon lequel ces mesures reflèteraient la volonté des personnels navigants eux-mêmes est fallacieux.
De plus, ces dispositions ne tiennent aucun compte des conditions dans lesquelles les personnels navigants exercent leur profession et, notamment, de leurs conséquences sur la santé, lesquelles, M. Fischer l’a bien décrit, revêtent un caractère particulier dans l’aéronautique.
Monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, saviez-vous que, à partir de l’âge de cinquante-cinq ans, chaque année de travail supplémentaire correspond à deux années d’espérance de vie en moins pour les personnels navigants techniques ?
Murmures sur les travées de l’UMP.
M. Alain Vasselle, rapporteur. C’est la même chose pour les sénateurs de gauche !
Sourires.
C’est une étude sérieuse qui le montre !
Ainsi, à soixante-cinq ans, âge auquel vous proposez de repousser le départ à la retraite, fût-ce de manière facultative, leur espérance de vie serait réduite à une année à peine !
Aujourd’hui, il n’y a aucune reconnaissance des maladies professionnelles liées à leur environnement de travail : en particulier, rien n’est dit sur les effets de la pressurisation sur la thyroïde, ou encore sur les dégâts causés par les horaires de travail atypiques, …
Sourires sur les travées de l’UMP.
… qui entraînent des problèmes de diabète et de cholestérol dès l’âge de quarante-cinq ou cinquante ans.
Les centres d’expertises médicales du personnel navigant connaissent très bien les maladies dont souffrent spécifiquement les personnels navigants techniques et commerciaux. Il aurait été utile de les interroger sur la condition physique des personnels les plus âgés avant de proposer de les faire travailler jusqu’à soixante-cinq ans.
Notre collègue Simon Loueckhote pourra vous le confirmer, la pénibilité des conditions de travail des personnels navigants techniques a d’ailleurs été officiellement reconnue par le congrès de Nouvelle-Calédonie.
Ce dernier a en effet inscrit les professions de personnel navigant technique et de personnel navigant commercial dans la liste des « activités particulièrement pénibles, dangereuses ou nocives pouvant provoquer l’usure prématurée de l’organisme ».
Aussi voterai-je pour la suppression de ces articles. Je demande au Gouvernement d’ouvrir des négociations sociales avec les personnels navigants pour tenir compte de la spécificité de leur environnement de travail et assurer la reconnaissance des maladies qui en découlent.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.
Je suis saisie de cinq amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
Les trois premiers sont identiques.
L’amendement n° 190 est présenté par M. Fischer, Mme David, M. Autain, Mmes Pasquet, Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.
L’amendement n° 252 est présenté par M. About.
L’amendement n° 302 est présenté par Mmes Schillinger et Le Texier, M. Cazeau, Mmes Jarraud-Vergnolle, Demontès et Campion, MM. Teulade, Godefroy et Desessard, Mmes Printz et Chevé, MM. Le Menn, Daudigny et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Annie David, pour présenter l’amendement n° 190.
Ma chère collègue, je vous invite à aller à l’essentiel, car le sujet a déjà été longuement débattu.
Protestations sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.
Qu’est-ce que c’est que cette manière de présider ? C’est de la provocation ! Vous sortez de votre rôle, madame la présidente !
Mes chers collègues, je vous en prie, la parole est à Mme David, et à elle seule !
Cet article 61 bis a été introduit dans le texte par l’Assemblée nationale sans aucune concertation avec les principaux intéressés. Il vise à relever la limite d’âge pour l’exercice de la profession de pilote de ligne dans le transport aérien public, tout en prévoyant qu’un équipage ne devra jamais comporter deux pilotes âgés de plus de soixante ans. C’est dire, monsieur le ministre, que vous-même considérez qu’une telle situation ne serait pas de nature à garantir toutes les conditions de sécurité…
Cela montre bien que les questions posées par les pilotes sur la sécurité des vols sont tout à fait fondées.
Par ailleurs, et comme toujours dès lors qu’il s’agit de rallonger la durée de cotisation, vous invoquez la liberté de décider soi-même de la date de son départ à la retraite.
Seulement, dans le cadre d’un système de retraite par répartition, solidaire et intergénérationnelle, les décisions des uns ont des incidences sur la situation des autres. La liberté laissée aux personnels en fin de carrière de fixer le moment de leur départ à la retraite ne sera donc pas sans conséquences pour les plus jeunes, puisqu’elle influera sur le nombre de créations de poste, particulièrement dans un contexte marqué par une crise financière qui affecte tout spécialement les compagnies aériennes.
À cet égard, je tiens à souligner un fait qui n’a pas encore été évoqué : Air France n’aurait besoin prochainement que de 3 800 pilotes, alors que l’entreprise en compte aujourd’hui 4 100. Comment, dès lors, justifier l’allongement de carrière de certains tandis que les plus jeunes resteront à la porte ?
Pourtant, le Gouvernement avait pris des engagements auprès des organisations syndicales, et donc des pilotes de nos compagnies : « Il n’entre pas dans les intentions du Gouvernement de proposer au Parlement une modification de la législation nationale applicable aux personnels navigants techniques qui exercent en qualité de commandant de bord et de copilote. »
Le Gouvernement avait même ajouté que « la notion de limite d’âge soulève des interrogations complexes qui tiennent aux conditions de sécurité, aux conditions de travail et aux secondes parties de carrière des personnels navigants. Leur remise en cause ne peut être considérée en l’absence de concertation de l’ensemble des partenaires sociaux. »
Dans ces conditions, pourquoi vous précipitez-vous pour faire cette réforme, alors que, pour des raisons de sécurité des vols, l’IFALPA, la Fédération internationale des associations des pilotes de ligne, se prononce de manière constante en faveur d’un âge limite de soixante ans pour les pilotes de ligne ? Pourquoi une telle précipitation puisqu’il n’y a ni urgence ni nécessité ?
Enfin, avec cet article, il s’agit non pas seulement du droit à la retraite des pilotes, mais aussi d’une question de santé publique, car les rythmes de travail et l’exposition aux radiations et aux ondes doivent être pris en compte. Lors de leurs interventions sur l’article, Guy Fischer, Jean Desessard et Annie Jarraud-Vergnolle ont bien montré l’importance de ces facteurs, même si leurs propos n’avaient pas l’air de vous satisfaire, chers collègues de la majorité !
Pour toutes ces raisons, pour la sécurité des pilotes comme pour celle des passagers, nous vous invitons à voter en faveur de notre amendement de suppression. Nous donnerons ainsi la possibilité à la négociation de se poursuivre dans les meilleures conditions.
Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.
Après le dépôt d’un amendement inopportun à la demande de l’association de pilotes PNT 65, dont l’adoption par l’Assemblée nationale a entraîné l’insertion d’un article 61 bis dans le PLFSS, le Gouvernement a engagé des négociations.
J’emploie l’adjectif « inopportun » à dessein, car le secrétaire d’État chargé des transports, M. Bussereau, avait pris en décembre 2007 l’engagement, au nom du Gouvernement, et donc de la majorité, de ne pas légiférer sur ce sujet sans avoir mené, au préalable, une large concertation.
Dès lors, comment sortir de l’impasse ? Quel est le véritable contentieux ? Selon moi, quatre points méritent d’être soulevés.
Il s’agit, premièrement, d’une question d’ambiance. Les syndicats de pilotes se sont sentis agressés par l’absence de concertation ou de consultation sur le projet de loi portant rénovation de la démocratie sociale et réforme du temps de travail, …
… alors que les dispositions adoptées menacent l’existence de syndicats professionnels.
Il s’agit, deuxièmement, d’une question de rythme. La rédaction des décrets concernant la réforme de la Caisse de retraite du personnel navigant, la CRPN, adoptée par le conseil d’administration voilà dix mois, est toujours en souffrance dans les ministères de tutelle après quatre ans de travaux, alors que cette réforme assurait la pérennité de cette caisse qui gère les régimes de retraite obligatoire et complémentaire de la profession.
La DGAC, la Direction générale de l’aviation civile, est en train de procéder à une réécriture complète du livre IV du code de l’aviation civile, consacré au personnel navigant, mais dans la précipitation et sans aucune concertation.
Il s’agit, troisièmement, d’une question de liberté, ce qui suppose, tout naturellement, l’existence d’un choix, celui de continuer ou non à travailler après l’âge de soixante ans. Cela ne doit pas entraîner, à court ou à moyen terme, l’application à tous, de façon autoritaire, de ce prolongement de l’activité.
Quatrièmement et surtout, il s’agit d’une question de sécurité. Ce métier spécifique exige, à tout moment, un haut degré de performance, pour faire face à des situations délicates et imprévues, en particulier au terme de longs vols de nuit.
Dans ces conditions, que proposer ?
Nous le savons, une réglementation européenne sur l’âge limite d’activité fixera un plafond, mais celui-ci ne remettrait pas en cause les dispositions plus favorables.
Nous souhaitons que ceux qui en expriment le désir puissent travailler plus, plus longtemps, si leur état de santé est irréprochable.
Encore faudrait-il que la surveillance médicale – et c’est un médecin qui vous le dit ! – soit parfaitement bien adaptée à cette profession, ce qui n’est pas le cas.
Nous devons garantir aux uns que l’octroi d’un droit nouveau aux autres ne portera pas atteinte à leurs avantages.
Enfin, monsieur le ministre, le Gouvernement doit marquer sa volonté de poursuivre la concertation en prenant rapidement les décrets confirmant les travaux menés sur le régime de retraite complémentaire. Il est souhaitable, compte tenu de la spécificité du métier, qu’un collège des personnels navigants techniques soit créé pour assurer la représentation des pilotes.
En définitive, le Gouvernement doit approuver la suppression de l’inopportun article 61 bis, proposer une nouvelle rédaction plus conforme aux engagements pris en décembre 2007 et s’engager à prendre les décrets relatifs au régime de retraite complémentaire.
Plusieurs amendements de suppression de l’article ont été déposés, et nous sommes tous désireux de voir le secteur du transport aérien retrouver sérénité et activité.
Monsieur le ministre, empruntant au plus illustre de nos prédécesseurs un de ses vers, tiré des Contemplations, je vous adresse une invitation : à nous qui avons déposé des amendements de suppression, « donnez-nous un regret » ; à ceux qui ont fait grève et essaient de se battre pour rendre un meilleur service, « donnez-leur un espoir » !
Très bien ! et applaudissements sur les travées de l’Union centriste, du groupe socialiste et du groupe CRC.
La parole est à M. Claude Domeizel, pour présenter l’amendement n° 302.
M. Claude Domeizel. Madame la présidente, je tiens tout d’abord à vous dire que j’ai été choqué par les propos que vous avez tenus à l’adresse d’une de nos collègues, en l’invitant à aller à l’essentiel.
Marques d’approbation sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC. – Exclamations sur les travées de l ’ UMP.
Pour ma part, madame la présidente, je vais vous donner satisfaction !
L’essentiel, c’est que toutes ces mesures prises sans concertation, qu’il s’agisse du relèvement de soixante-cinq à soixante-dix ans de l’âge à partir duquel un salarié pourra être mis à la retraite d’office, disposition inscrite à l’article 61 que nous examinerons tout à l’heure, du passage de la durée de cotisation de quarante à quarante et une annuités ou de la suppression des « clauses couperets » au travers des articles 61 bis et 61 ter, ne sont qu’une préparation de la remise en cause de la retraite à soixante ans !
Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.
Monsieur le ministre, je vous entends déjà me répondre que j’exagère. Mais il n’en est rien ! Permettez-moi de rappeler que, dans le cadre de ses travaux, le Conseil d’orientation des retraites, à la demande du MEDEF – et peut-être avec le consentement du Gouvernement, allez savoir ! §–, a étudié, en avril dernier, le relèvement de l’âge minimal de départ à la retraite.
Il s’agissait d’évaluer le coût du passage de l’âge de la retraite à soixante et un ans, à soixante-deux ans, à soixante-trois ans, à soixante-quatre ans ou à soixante-cinq ans. Voilà ce qu’est l’essentiel !
Par ailleurs, je souhaite souligner le manque de cohérence entre les discours et la pratique du Gouvernement.
En effet, depuis des mois, voire des années, l’actuelle majorité et les ministres des affaires sociales qui en sont issus n’ont eu de cesse de rabâcher que le pouvoir législatif devait intervenir une fois la négociation entre partenaires sociaux conclue.
Or cette règle n’a guère valu lorsque, au détour d’un amendement présenté par des parlementaires, le Gouvernement a jugé opportun d’anticiper sur une négociation qui, en tout état de cause, est bien loin d’avoir trouvé sa conclusion !
Dès lors que vous nous avez demandé de légiférer, de quelle latitude disposeront les représentants des partenaires sociaux engagés dans la négociation ? La question mérite d’être posée.
Sur le fond, si les personnels navigants commerciaux sont mécontents, c’est non pas parce qu’il est impossible de voler après cinquante-cinq ans, mais parce que leur reclassement à terre sera impossible.
Les auteurs de l’amendement et le Gouvernement ont-ils pris la précaution de se pencher sur la pyramide des âges des personnels en service ? Se sont-ils vraiment interrogés sur les possibilités réelles de reclasser à terre les personnels atteignant l’âge de cinquante-cinq ? Ce que je dis vaut tant pour les pilotes que pour les hôtesses et les stewards.
Quand on sait que les compagnies réduisent le personnel affecté aux comptoirs, on devine aisément que le reclassement à terre sera impossible. Dès lors, les personnels concernés n’auront pas d’autre choix que de quitter l’entreprise et de se présenter aux ASSEDIC.
C’est proprement scandaleux ! En effet, il n’est pas acceptable que les ASSEDIC soient mises à contribution parce qu’une entreprise n’a pas pris en compte l’évolution de la pyramide des âges de son personnel.
Ce constat concerne également les personnels qui développent des pathologies liées à l’altitude, ainsi que ceux qui ont été affectés par les changements importants intervenus dans le secteur du transport aérien au cours des quinze dernières années.
Or le deuxième alinéa de l’article 61 bis, s’il instaure le droit, pour le salarié, de solliciter un reclassement au sol, ne soumet l’entreprise à aucune obligation à cet égard.
Compte tenu de ces remarques et des négociations en cours, et au nom du respect que l’on doit aux représentants des partenaires sociaux, nous demandons la suppression pure et simple de cet article, en espérant être entendus au-delà des travées de notre groupe.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.
L’amendement n° 517, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit cet article :
I. - L'article L. 421-9 du code de l'aviation civile est ainsi modifié :
1° La première phrase est précédée de la mention : « I. » ;
2° Il est complété par un paragraphe ainsi rédigé :
« II. - Le personnel navigant de la section A du registre qui remplit les conditions nécessaires à la poursuite de son activité de navigant est toutefois maintenu en activité au-delà de soixante ans pour une année supplémentaire sur demande formulée au plus tard trois mois avant son soixantième anniversaire, uniquement dans le cas des vols en équipage avec plus d'un pilote, à la condition qu'un seul des pilotes soit âgé de plus de soixante ans. Cette demande peut être renouvelée dans les mêmes conditions les quatre années suivantes.
« Le personnel navigant de la section A du registre peut de droit et à tout moment, à partir de soixante ans, demander à bénéficier d'un reclassement dans un emploi au sol.
« Lorsqu'il ne demande pas à poursuivre son activité de navigant ou atteint l'âge de soixante-cinq ans, le contrat n'est pas rompu de ce seul fait, sauf impossibilité pour l'entreprise de proposer un reclassement dans un emploi au sol ou refus de l'intéressé d'accepter l'emploi qui lui est offert. »
II. - Les dispositions du II de l'article L. 421-9 du code de l'aviation civile entrent en vigueur à compter du 1er janvier 2010.
Les textes réglementaires relatifs à l'aptitude physique et mentale du personnel navigant technique professionnel de l'aéronautique civile seront adaptés, après consultation des organisations syndicales représentatives des personnels navigants techniques, pour tenir compte de ces nouvelles dispositions.
Jusqu'au 1er janvier 2010, le contrat de travail du personnel navigant de la section A n'est pas rompu du seul fait que la limite d'âge de soixante ans est atteinte sauf impossibilité pour l'entreprise de proposer un reclassement dans un emploi au sol ou refus de l'intéressé d'accepter l'emploi qui lui est offert.
III. - Dans la branche et dans les entreprises de transport aérien, l'employeur et les organisations syndicales représentatives des personnels navigants techniques engagent, en vue de les conclure avant le 31 décembre 2009, des négociations relatives à l'emploi des seniors et à ses conséquences sur les déroulements de carrière et sur l'emploi, en abordant notamment les questions des modulations de l'activité en fonction de l'âge et du temps partiel.
La parole est à M. le ministre.
J’espère que la présentation de cet amendement permettra de répondre aux questions posées par les uns et les autres. J’ai tout écouté avec beaucoup d’attention, comme c’est d’ailleurs le cas depuis maintenant plus d’un an, car ce sujet récurrent ne date pas d’aujourd’hui et fait l’objet de discussions depuis l’année dernière.
Cet amendement a pour objet de compléter les dispositions adoptées par l’Assemblée nationale concernant les pilotes et les copilotes. Il vise à prévoir que la limite d’âge pour le personnel navigant technique demeure fixée à soixante ans. C’est marqué noir sur blanc !
Les personnels qui le souhaiteront pourront toutefois continuer à exercer leur métier au-delà de cette limite, sous réserve d’en avoir fait la demande, de remplir les conditions nécessaires à la poursuite de leur activité, et uniquement dans le cas des vols en équipage avec plus d’un pilote, un seul pilote devant être âgé de plus de soixante ans.
Pourquoi avons-nous fait ce choix, madame David ? Nous l’avons fait, tout simplement, pour répondre aux préconisations de l’Organisation de l’aviation civile internationale. Il ne s’agit pas d’un modèle spécifique français !
Bien évidemment, monsieur About, les personnels volontaires pourront décider d’interrompre leur activité à tout moment, dans les mêmes conditions financières qu’aujourd’hui.
Le salarié qui ne demandera pas à poursuivre son activité de personnel navigant devra, comme aujourd’hui, faire l’objet d’un reclassement sur un poste au sol.
Je vais être encore plus précis.
En cas d’impossibilité, pour l’entreprise, de proposer un tel reclassement ou de refus de l’intéressé d’accepter l’emploi qui lui est offert, le contrat sera rompu comme aujourd’hui, et selon les mêmes conditions financières.
Ces dispositions ne seront applicables qu’à partir du 1er janvier 2010, et non en 2009, afin de permettre aux concertations engagées par le Gouvernement avec les organisations syndicales représentatives de se poursuivre – et non de commencer, j’y insiste ! –, notamment pour adapter les différents textes réglementaires et tenir compte des travaux menés à l’échelon européen. Si ces concertations font apparaître que des modifications de nature législative sont également nécessaires, nous les proposerons au Parlement avant la fin de l’année 2009.
La sécurité du transport aérien n’est en rien remise en cause par ces dispositions. L’Organisation internationale de l’aviation civile autorise dès à présent un pilote à exercer son métier au moins jusqu’à soixante-cinq ans. Tous les pays européens, à l’exception de la France et de l’Italie, permettent aux pilotes de poursuivre leur activité au-delà de soixante ans.
L’année 2009 sera également consacrée aux négociations, dans la branche et dans les entreprises, relatives à l’emploi des seniors, aux aménagements de fin de carrière, à la gestion prévisionnelle de l’emploi et des compétences. Air France est une entreprise où le dialogue social existe : vous le savez, et les syndicats aussi.
Le Gouvernement proposera, dans le cadre du projet de loi relatif aux transports que le Parlement examinera au début de l’année 2009, des dispositions permettant d’adapter les règles du temps partiel à l’exercice du métier de navigant. Les organisations syndicales représentatives seront naturellement associées à ces discussions.
Je tiens à rappeler que les discussions en cours ne sont que la poursuite de celles qui ont déjà eu lieu. Elles ne viennent pas de commencer, comme l’a dit, me semble-t-il, M. Domeizel ! Pas moins de huit réunions, depuis le printemps 2008, se sont tenues avec les directions successives du principal syndicat de pilotes. Je n’ai guère entendu les médias en faire état !
À les écouter, on a l’impression qu’aucune réunion, aucune concertation n’a eu lieu. Huit réunions, excusez du peu !
Ce sujet n’est pas nouveau. Depuis le dépôt à l’Assemblée nationale de l’amendement tendant à insérer l’article 61 bis, quatre réunions se sont tenues ! Les deux dernières ont permis de compléter, dans le sens souhaité par le Syndicat national des pilotes de ligne, les dispositions introduites dans le texte par l’Assemblée nationale au travers de l’adoption dudit amendement.
Il y a eu des échanges pendant le conflit, et Dominique Bussereau et moi-même nous sommes engagés par écrit, en apportant des précisions sur toutes les mesures qui figurent dans le présent amendement. D’ailleurs, le porte-parole des responsables syndicaux avait le sentiment que cette lettre était de nature à permettre de lever le préavis de grève, ce qui aurait été important pour les usagers et pour la compagnie. Cela n’a pas été possible, et je le regrette.
La grève n’a pas pris fin samedi, comme certains l’espéraient, notamment les usagers. Cette grève a pénalisé avant tout ces derniers, qu’ils soient français ou étrangers, ainsi que la compagnie Air France. Je reste persuadé que les précisions apportées par écrit sur l’ensemble des mesures contenues dans cet amendement étaient propres à apaiser les esprits et à répondre à tous les questionnements.
En outre, comme l’indique l’objet de l’amendement, un suivi médical sera mis en place. Le Conseil médical de l’aéronautique civile y sera associé, en concertation avec les organisations syndicales.
Je ne suis pas un grand spécialiste de la question, mais j’ai interrogé de nombreux pilotes, notamment lors de mon dernier déplacement, et j’ai également consulté des enquêtes qui démontrent que l’expérience constitue un facteur de sécurité.
Ce n’est pas moi qui le dis ! Il existe des études sur le sujet.
Certes, la question de l’âge se pose, mais l’âge est aussi synonyme d’expérience.
Concernant la représentativité, vous avez fait, monsieur About, une démonstration étoffée, solide et sérieuse. Ce sujet n’est pas non plus nouveau, et ce n’est pas un scoop que je vais maintenant vous livrer : nous avons discuté avec les syndicats des spécificités de la profession, et nous sommes prêts à envisager les adaptations nécessaires pour en tenir compte. Nos interlocuteurs syndicaux le savent et nous tiendrons les engagements que nous avons pris devant eux, car ces engagements sont de même nature et de même force que ceux que le Gouvernement prend dans cet hémicycle.
Nous veillerons ainsi à la création d’une représentation spécifique.
Là encore, je ne fais que répéter ce qui a déjà été précisé à différentes reprises.
Tous ces éclaircissements méritaient d’être apportés, dans la mesure où j’ai été interpellé par des sénateurs de plusieurs sensibilités. Je tiens surtout à préciser que, sur ce sujet, tout est sur la table des négociations non pas seulement depuis plusieurs jours, mais depuis plusieurs années, et que nous avons échangé avec les représentants syndicaux à huit reprises depuis le mois de mars 2008.
Je pense sincèrement que la volonté des uns et des autres d’avancer ensemble était réelle, bien que le préavis de grève ait été déposé et que la grève ait eu lieu, ce que je trouve dommage. Certes, la grève est un droit constitutionnel, mais discuter et rechercher des solutions a aussi du sens.
Très bien ! et applaudissements sur les travées de l ’ UMP.
Madame la présidente, je demande le vote par priorité de l’amendement n° 517.
L’amendement n° 425 rectifié, présenté par MM. Dassault et Houel, est ainsi libellé :
À la fin du II de cet article, remplacer le millésime :
par le millésime :
La parole est à M. Michel Houel.
Cet amendement vise à faire entrer en vigueur dès le 1er janvier 2009 les modifications relatives à la limite d’âge s’imposant aux pilotes et aux copilotes.
Quel est l’avis de la commission sur la demande de priorité formulée par le Gouvernement ?
La commission a pris bonne note de l’amendement du Gouvernement. M. le ministre a été complet et a pu répondre aux inquiétudes des uns et des autres sur la liberté de choix, le droit à la retraite et le maintien des conditions financières lors du départ à la retraite.
J’émets donc un avis doublement favorable : sur le fond de l’amendement et sur sa mise aux voix par priorité.
Mme la présidente. Je vais consulter le Sénat sur la demande de priorité.
Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.
Mme la présidente. Il n’y a pas d’explications de vote sur une demande de priorité ! Je ne puis donner la parole qu’à un orateur souhaitant s’exprimer contre celle-ci, pour une durée n’excédant pas cinq minutes. Voilà ce que prévoit le règlement du Sénat !
Nouvelles protestations sur les mêmes travées.
La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy, contre la demande de priorité, dans le calme et la sérénité.
Il ne me semble pas que nous ayons perdu notre calme et notre sérénité, madame la présidente !
Mon intervention ne durera pas cinq minutes. Je souhaite simplement protester contre la façon de procéder du Gouvernement. Nous avons bien compris que M. le ministre, en demandant la priorité, voulait absolument éviter un vote, surtout par scrutin public, sur les amendements de suppression de l’article !
En tout état de cause, nous demandons un vote par scrutin public sur l’amendement du Gouvernement.
La demande de priorité est adoptée.
La commission est favorable à l’amendement n° 517 du Gouvernement, et défavorable aux autres amendements.
La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy, pour explication de vote sur l’amendement n° 517.
Je tiens tout d’abord à dire que la loi portant rénovation de la démocratie sociale et réforme du temps de travail en prend tout de même un coup ! Vous avez beau nous expliquer, monsieur le ministre, que des échanges avec les représentants des organisations syndicales ont eu lieu, il n’en demeure pas moins que le préalable fixé par cette loi, aux termes de laquelle il convient d’engager des discussions avec les parties concernées afin d’aboutir si possible à un accord, n’a pas été respecté.
J’ignore complètement si vous avez été débordé par l’initiative d’un député qui a fait du zèle, monsieur le ministre, ou si ce député a déposé son amendement à la demande du Gouvernement.
Cela étant, même si vous essayez d’apaiser la situation avec votre amendement, même si, le cas échéant, un certain nombre des dispositions que vous proposez pourraient donner satisfaction aux personnels en question, nous ne pouvons nous associer à votre démarche, compte tenu des conditions dans lesquelles le débat se déroule.
Sans revenir sur tout ce qui a été dit par mes collègues, je voudrais évoquer un passage de l’objet de l’amendement dont la lecture m’inquiète : « Un tel mécanisme permettra enfin une évaluation très précise de l’impact de l’emploi des seniors en termes de santé et de sécurité. » Autrement dit, il s’agira d’une expérimentation grandeur nature !
Ensuite, il est écrit que « la poursuite d’une activité de pilote au-delà de soixante ans ne pourra ainsi s’effectuer que dans le respect des conditions nécessaires à l’activité de navigant. Sur ce point, le Conseil médical de l’aéronautique civile sera associé au suivi médical de ces salariés après consultation des organisations syndicales représentatives des personnels navigants techniques et une étude sera menée afin de s’assurer que la sécurité du transport aérien n’est en aucun cas détériorée. » J’insiste sur ce dernier membre de phrase, qui figure bel et bien dans votre texte, monsieur le ministre !
Enfin, il est précisé que « les résultats de ces études seront portés à la connaissance du Parlement – il sera bien temps, surtout si l’on constate qu’il y a un risque pour la sécurité ! – et permettront le cas échéant d’adapter les dispositions législatives et réglementaires ».
Cette lecture suffirait à m’empêcher de voter votre amendement, monsieur le ministre. Comment peut-on accepter une expérimentation grandeur nature faisant peser des risques sur les pilotes et sur les passagers ! Cela ne me semble pas très sérieux !
Le dispositif devant entrer en application le 1er janvier 2010, alors que nous devons examiner au début de 2009 un projet de loi relatif aux transports, je crois qu’il serait sage, mes chers collègues, devant de si grandes incertitudes, de ne pas adopter cet amendement et de supprimer l’article. En effet, nous ferions courir de gros risques aux passagers et aux personnels en votant cette disposition visant uniquement à faire travailler les pilotes au-delà de soixante ans ! Ce n’est pas acceptable, mais c’est pourtant ce que vous indiquez dans l’objet de votre amendement, monsieur le ministre !
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.
Pour expliquer mon vote sur cet amendement, je m’appuierai quelque peu sur les propos qu’a tenus M. le ministre.
Il nous a été dit que les pilotes pourront partir au même âge et dans les mêmes conditions financières qu’actuellement, ce qui a suscité quelque émoi sur les travées de droite de notre assemblée. On vous a pourtant connus moins effarouchés quand il s’est agi d’autoriser l’octroi de parachutes dorés aux dirigeants d’entreprises qui licencient à tour de bras, chers collègues de la majorité ! §Les pilotes ont obtenu ces conditions de départ à la retraite au terme de luttes menées au sein de leur entreprise. Ce sont aujourd’hui des droits auxquels ils sont tout à fait légitimement attachés.
Il nous a également été dit que le reclassement dans un poste au sol pourra être demandé par les pilotes au-delà de soixante ans. Cependant, aucune disposition du texte n’impose à l’entreprise de faire droit à cette requête. Dès lors, les pilotes pourront toujours demander : si l’entreprise a décidé de ne pas accorder le reclassement, ils n’obtiendront pas satisfaction !
Il nous a encore été dit que la négociation est en cours. Or j’ai déjà relevé que pour que cette négociation se poursuive dans les meilleures conditions possibles, mieux valait voter notre amendement de suppression de l’article !
Par ailleurs, vous soulignez que de nombreuses réunions ont eu lieu entre le Gouvernement et les syndicats de pilotes, monsieur le ministre. Cependant, il ne suffit pas de tenir des réunions, encore faut-il qu’elles soient constructives, respectueuses de l’ensemble des partenaires et que les demandes de chacun puissent être entendues. Or, si votre amendement est adopté, il sera difficile de poursuivre la négociation dans de bonnes conditions.
Enfin, je veux bien croire que les pilotes continuant leur activité au-delà de soixante ans feront l’objet d’un suivi particulier par les médecins. N’étant pas moi-même médecin, je ne ferai pas de commentaires sur ce sujet, auquel M. About a fait allusion, mais il me semble qu’une telle évolution suscite de fortes réserves parmi les spécialistes concernés, car il leur apparaît d’ores et déjà que toutes les conditions de sécurité ne seront pas remplies.
Par conséquent, monsieur le ministre, j’estime que cet amendement ne donne pas satisfaction, contrairement à ce que vous avez affirmé. Pour notre part, nous voterons contre.
M. Jean Desessard. Je ferai une remarque d’ordre général, avant d’apporter une aide à M. le ministre.
Exclamations amusées sur les travées du groupe socialiste.
De façon insidieuse, on change les règles et les valeurs. En effet, affirmer qu’il est bon que les gens puissent travailler un peu plus longtemps s’ils en ont envie et s’ils sont en forme induit l’idée que cela est tout à fait envisageable. On s’engage dans cette voie, on s’y habitue, puis ceux qui travaillent plus longtemps en viennent à se demander pourquoi les autres ne font pas de même. Ainsi se crée un autre système de valeurs et se modifie la normalité.
Actuellement, la normalité consiste à considérer que, selon la fonction exercée et sa pénibilité, il existe un âge limite au-delà duquel il convient de cesser son activité. Cela rend le système homogène et cohérent.
Or voici que l’on nous propose d’entrer dans l’individualisation, ce qui brouille les repères, d’autant que l’on ne voit plus où s’arrêter. C’est la raison pour laquelle je suis contre cet amendement du Gouvernement.
J’en viens à l’aide que je souhaite apporter à M. le ministre !
Vous nous avez dit, monsieur le ministre, que huit réunions s’étaient tenues en un an, dont quatre en une semaine, sans que la négociation puisse aboutir. Je me suis alors demandé comment il était possible qu’un orateur aussi éloquent que vous n’ait pas réussi à convaincre le personnel et les syndicats.
J’ai trouvé la réponse en lisant l’objet de votre amendement, monsieur le ministre. En effet, vous y affirmez une chose et son contraire. Je vais vous en apporter la démonstration.
« Le développement de l’emploi des seniors doit être une priorité nationale. » Telle est la première phrase de l’objet de l’amendement. Je comprends qu’un certain nombre de personnes âgées de cinquante-cinq ans ou plus aimeraient travailler encore afin d’atteindre le nombre d’annuités nécessaire pour toucher une pension de retraite décente, et qu’il faut donc permettre à ceux qui n’ont pas d’emploi d’en trouver un. Or la deuxième phrase précise que « l’un des obstacles à l’activité des seniors est constitué par les limites d’âge » : vous préconisez donc que ceux qui pourraient partir à la retraite continuent à travailler !
Par conséquent, on relève une contradiction dès les deux premières phrases de l’objet de votre amendement : voilà pourquoi, monsieur le ministre, vous n’êtes pas compris des syndicats. Deux réunions supplémentaires n’auraient pas davantage permis de trouver une solution ! §
Je constaterai d’abord que, quoi qu’en dise M. le ministre, le Sénat ne peut remédier ce soir à l’absence d’une véritable concertation avec les syndicats représentatifs des personnels.
Ensuite, je tiens à souligner que les préconisations d’instances telles que l’Organisation de l’aviation civile internationale et l’Agence européenne de sécurité aérienne, en matière de fixation de l’âge limite d’activité, ne sont pas opposables aux partenaires sociaux.
L’OACI, dont les prérogatives recouvrent l’organisation du transport aérien mondial, à l’exclusion du domaine socioprofessionnel, a édicté une simple recommandation. Quant à l’AESA, cet organisme n’est nullement habilité à définir des normes sociales, son champ d’intervention étant exclusivement technique, selon les indications mêmes du Gouvernement.
Je ne reviendrai pas sur la sécurité des vols, sinon pour relever que la viabilité et la prospérité du secteur du transport aérien lui sont profondément liées. Le recul de l’âge limite ne peut objectivement pas contribuer à la renforcer, alors qu’elle fonde la réputation d’un groupe comme Air France-KLM.
En outre, dans la conjoncture actuelle et eu égard à la crise structurelle durable que risque de connaître le transport aérien, le développement de l’emploi des seniors aura un effet négatif sur l’emploi des plus jeunes, en dépit des dispositions envisagées pour y pallier. En effet, les seniors maintenus dans leurs fonctions de commandant de bord au-delà de l’âge de soixante ans bloqueront l’évolution de carrière de leurs cadets.
En ce qui concerne les régimes spéciaux, aucun élément objectif ne permet d’établir la nécessité d’un report de l’âge limite d’activité pour les personnels navigants techniques, les calculs actuariels montrant que la pérennité du dispositif est assurée dans les conditions actuelles.
Je terminerai en évoquant deux pistes à explorer.
Tout d’abord, il revient au Gouvernement de saisir Jacques Barrot, commissaire européen aux transports, pour que l’âge limite de soixante ans soit inscrit dans un cadre communautaire.
Ensuite, il conviendrait qu’Air France-KLM agisse auprès des autres transporteurs, au sein de l’alliance Sky Team et de l’IATA, pour que soient maintenues les limites d’âge actuelles, conformément à la position que la compagnie a réaffirmée, à l’adresse de son personnel, dans l’édition du 7 novembre dernier de Flash actu.
Les revendications du personnel, qui reposent sur des bases solides et étayées, nous ont permis d’aller plus loin dans l’argumentation. Les prendre en considération nous semble très important, c’est la raison pour laquelle nous voterons contre l’amendement du Gouvernement.
Je mets aux voix, par priorité, l'amendement n° 517.
Je suis saisie de deux demandes de scrutin public émanant l'une du groupe CRC, l'autre du groupe socialiste.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin a lieu.
Il est procédé au comptage des votes.
Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 37 :
Le Sénat a adopté.
En conséquence, l’article 61 bis est ainsi rédigé, et les amendements n° 190, 252, 302 et 425 rectifié n’ont plus d’objet.
I. - L'article L. 421-9 du code de l'aviation civile est ainsi modifié :
1° À la fin de la deuxième phrase, les mots : « d'un âge fixé par décret » sont remplacés par les mots : « de soixante-cinq ans » ;
2° La dernière phrase est supprimée ;
3° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Le personnel navigant de la section D du registre peut de droit, à partir de cinquante-cinq ans, demander à bénéficier d'un reclassement dans un emploi au sol. En cas d'impossibilité pour l'entreprise de proposer un reclassement dans un emploi au sol, le contrat de travail est rompu. À soixante-cinq ans, le contrat de travail de ce personnel n'est pas rompu du seul fait que cette limite d'âge est atteinte, sauf impossibilité pour l'entreprise de proposer un reclassement dans un emploi au sol. »
II. - Le I entre en vigueur le 1er janvier 2010.
Je suis saisie de quatre amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
Les trois premiers sont identiques.
L'amendement n° 191 est présenté par M. Fischer, Mme David, M. Autain, Mmes Pasquet, Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.
L'amendement n° 253 est présenté par M. About.
L'amendement n° 303 est présenté par Mmes Schillinger et Le Texier, M. Cazeau, Mmes Jarraud-Vergnolle, Demontès et Campion, MM. Teulade, Godefroy et Desessard, Mmes Printz et Chevé, MM. Le Menn, Daudigny et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. le président de la commission des affaires sociales.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Madame la présidente, cet article 61 ter ne soulève aucune difficulté, dans la mesure où l’accord de toutes les organisations syndicales sur la rédaction qu’en propose le Gouvernement à l’amendement n° 518 est désormais acquis.
Protestations sur les travées du groupe CRC.
En conséquence, je retire, bien entendu, l’amendement de suppression que j’avais déposé à titre personnel, et j’appelle les auteurs des deux amendements identiques au mien à faire de même, …
… puisque, aujourd’hui, plus aucun syndicat – y compris, me semble-t-il, monsieur Fischer, la CGT – ne conteste la rédaction présentée par le Gouvernement.
Monsieur About, le débat n’est pas terminé, d’autant que les décisions qui sont prises aujourd'hui pèseront sur plusieurs générations !
Ce n’est d’ailleurs qu’une « mise en bouche » par rapport à ce qui attend les Françaises et les Français en termes de recul de l’âge légal de la retraite !
On commence par le volontariat et, demain, il faudra « bosser » jusqu’à soixante-dix ans !
L’amendement n° 191 est similaire, dans son esprit, à celui que nous avions déposé à l’article 61 bis. Il vise à supprimer l’article 61 ter, qui concerne le personnel navigant commercial de l’aéronautique.
Je ne reviendrai donc pas sur ce que nous avons pu dire à propos de l’article 61 bis.
Je voudrais toutefois lire un extrait d’un courriel que j’ai reçu de l’association Avenir navigants, que vous connaissez bien, monsieur le ministre, puisqu’elle soutient votre réforme tendant à l’allongement de la durée de cotisation, car en définitive c’est bien de cela dont il s’agit.
Cette association nous demandait de ne pas présenter notre amendement dans les termes suivants, que je vais citer textuellement : « En conséquence, nous vous serions reconnaissants de bien vouloir retirer votre amendement. Nous avons besoin de travailler pour élever nos enfants, payer leurs études, nos crédits, etc. De grâce, laissez travailler ceux qui en ont besoin. »
Ces propos, d’une certaine gravité, soulèvent une vraie difficulté. Ils témoignent des problèmes financiers que rencontrent nos concitoyens, et l’on voit bien que l’allongement de la durée du travail est une manœuvre détournée pour éviter les véritables débats sur le financement de la sécurité sociale et de la retraite, ou encore sur les salaires et le montant des pensions.
J’évoquerai, en contrepoint, la pénibilité du travail du personnel navigant, notamment sur les longs courriers : travail de nuit important, alternance irrégulière du travail de jour et du travail de nuit, décalages horaires, durée des vols, travail sous pression… Ce sont autant d’éléments nous conduisant à maintenir notre amendement de suppression.
La parole est à Mme Patricia Schillinger, pour présenter l'amendement n° 303.
Ce qui est tout à fait regrettable ici, c’est, encore une fois, l’absence de négociations.
Ce type de dispositions votées en catimini, au mépris des personnes concernées, n’est pas acceptable.
Le fait de reculer l’âge de départ à la retraite va-t-il éviter les reclassements au sol ? En adoptant cette mesure, réglera-t-on tous les problèmes ?
En l’absence de réponse à ces questions, et en regrettant que le Sénat travaille dans la précipitation, nous demandons le retrait de cet article.
L'amendement n° 518, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit cet article :
I. - L'article L. 421-9 du code de l'aviation civile est ainsi modifié :
1° Les deuxième et dernière phrases sont supprimées ;
2° Il est complété par deux paragraphes ainsi rédigés :
« III. - Le personnel navigant de l'aéronautique civile de la section D du registre prévu à l'article L. 421-3 ne peut exercer aucune activité en qualité de personnel de cabine dans le transport aérien public au-delà de cinquante-cinq ans.
« IV. - Le personnel navigant de la section D du registre qui remplit les conditions nécessaires à la poursuite de son activité de navigant est toutefois maintenu en activité au-delà de cinquante-cinq ans sur demande formulée au plus tard trois mois avant son cinquante-cinquième anniversaire. Cette demande peut être renouvelée dans les mêmes conditions les neuf années suivantes. Il peut de droit et à tout moment, à partir de cinquante-cinq ans, demander à bénéficier d'un reclassement dans un emploi au sol. En cas d'impossibilité pour l'entreprise de proposer un reclassement dans un emploi au sol ou de refus de l'intéressé d'accepter l'emploi qui lui est offert, le contrat de travail est rompu. Le contrat de travail n'est pas rompu du seul fait que l'intéressé atteint l'âge de cinquante-cinq ans et renonce ou épuise son droit à bénéficier des dispositions du présent alinéa, sauf impossibilité pour l'entreprise de proposer un reclassement au sol ou refus de l'intéressé d'accepter l'emploi qui lui est offert. »
II.- Les dispositions des III et IV de l'article L. 421-9 du code de l'aviation civile entrent en vigueur à compter du 1er janvier 2009.
Les textes réglementaires relatifs aux conditions physique et mentale du personnel navigant commercial seront adaptés, après consultation des organisations syndicales représentatives, pour tenir compte de ces nouvelles dispositions.
À titre transitoire, la demande de poursuite d'activité pourra être formulée moins de trois mois avant la date anniversaire pour les salariés qui atteindront l'âge de cinquante-cinq ans au cours du premier trimestre 2009.
III. - Dans la branche et dans les entreprises de transport aérien, les employeurs et les organisations syndicales représentatives engagent, en vue de les conclure avant le 31 décembre 2009, des négociations relatives à l'emploi des seniors et à ses conséquences sur les déroulements de carrière et sur l'emploi, en abordant notamment les questions des modulations de l'activité en fonction de l'âge et du temps partiel.
La parole est à M. le ministre.
Cet amendement a pour objet de compléter les dispositions adoptées par l’Assemblée nationale concernant les personnels navigants commerciaux à la suite des concertations conduites avec les syndicats des personnels concernés.
Vous le savez, mesdames, messieurs les sénateurs, un préavis de grève avait été déposé. Il a été levé par les organisations syndicales et, pour répondre à la demande de celles-ci, ces dispositions seront applicables à partir du 1er janvier 2009.
J’ajoute que je demande le vote par priorité de l’amendement n° 518.
Quel est l’avis de la commission sur cette demande de priorité formulée par le Gouvernement, ainsi que sur l’amendement n° 518 ?
La commission est favorable à l’amendement comme à la demande de priorité.
Il n’y a pas d’opposition ?...
La priorité est ordonnée.
La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy, pour explication de vote sur l’amendement n° 518.
J’aurais voulu m’exprimer sur la demande de priorité, car je m’interroge sur le fait que, comme à l’article précédent, l’amendement déposé par le Gouvernement puisse être mis aux voix par priorité avant les trois amendements identiques de suppression de l’article, qui forment un sous-ensemble distinct.
Cela est possible, monsieur Godefroy, puisqu’il s’agit d’amendements faisant l’objet d’une discussion commune et que la priorité vient d’être votée.
Je mets donc aux voix, par priorité, l'amendement n° 518.
Je suis saisie d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin a lieu.
Il est procédé au comptage des votes.
J’ai reçu de M. le Premier ministre le texte suivant, soumis au Sénat par le Gouvernement en application de l’article 88-4 de la Constitution :
- Projet de règlement (CE) de la Commission portant application de la directive 2005/32/CE du Parlement européen et du Conseil en ce qui concerne les exigences d’écoconception relatives à la consommation d’électricité en mode veille et en mode arrêt des équipements ménagers et de bureau électriques et électroniques.
Ce texte sera imprimé sous le n° E-4087 et distribué.
J’ai reçu de M. le Premier ministre le texte suivant, soumis au Sénat par le Gouvernement en application de l’article 88-4 de la Constitution :
- Initiative de la France modifiant l’annexe 13 des instructions consulaires communes relative au remplissage de la vignette-visa.
Ce texte sera imprimé sous le n° E-4088 et distribué.
J’ai reçu de M. le Premier ministre le texte suivant, soumis au Sénat par le Gouvernement en application de l’article 88-4 de la Constitution :
- Proposition de décision du Conseil relative à l’adhésion de la Communauté européenne au règlement n° 61 de la Commission économique pour l’Europe des Nations unies relatif aux dispositions concernant la réception de véhicules commerciaux en ce qui concerne les saillies extérieures à l’avant de la cloison postérieure de la cabine.
Ce texte sera imprimé sous le n° E-4089 et distribué.
J’ai reçu de M. le Premier ministre le texte suivant, soumis au Sénat par le Gouvernement en application de l’article 88-4 de la Constitution :
- Proposition de décision du Conseil relative à la signature du protocole portant modification de la Convention relative au régime de la navigation sur le Danube du 18 août 1948 (convention de Belgrade).
Ce texte sera imprimé sous le n° E-4090 et distribué.
J’ai reçu de M. le Premier ministre le texte suivant, soumis au Sénat par le Gouvernement en application de l’article 88-4 de la Constitution :
- Proposition de règlement du Conseil établissant, pour 2009, les possibilités de pêche et les conditions associées pour certains stocks halieutiques et groupes de stocks halieutiques, applicables dans les eaux communautaires et, pour les navires communautaires, dans les eaux soumises à des limitations de capture.
Ce texte sera imprimé sous le n° E-4091 et distribué.
J’ai reçu de M. le Premier ministre le texte suivant, soumis au Sénat par le Gouvernement en application de l’article 88-4 de la Constitution :
- Proposition modifiée de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive 2002/22/CE concernant le service universel et les droits des utilisateurs au regard des réseaux et services de communications électroniques, la directive 2002/58/CE concernant le traitement des données à caractère personnel et la protection de la vie privée dans le secteur des communications électroniques et le règlement (CE) n° 2006/2004 relatif à la coopération en matière de protection des consommateurs.
Ce texte sera imprimé sous le n° E-4092 et distribué.
J’ai reçu de M. le Premier ministre le texte suivant, soumis au Sénat par le Gouvernement en application de l’article 88-4 de la Constitution :
- Proposition de décision du Conseil sur la signature et l’application provisoire d’un accord sous forme d’un échange de lettres entre la Communauté européenne et la République du Belarus modifiant l’accord entre la Communauté européenne et la République du Belarus sur le commerce des produits textiles.
Ce texte sera imprimé sous le n° E-4093 et distribué.
Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à aujourd’hui, mardi 18 novembre 2008 :
À dix heures quarante-cinq :
1. Suite de la discussion du projet de loi (n° 80, 2008-2009), adopté par l’Assemblée nationale, de financement de la sécurité sociale pour 2009 ;
Rapport (n° 83, 2008-2009) de MM. Alain Vasselle, André Lardeux, Dominique Leclerc et Gérard Dériot et Mme Sylvie Desmarescaux, fait au nom de la commission des affaires sociales ;
Avis (n° 84, 2008-2009) de M. Jean-Jacques Jégou, fait au nom de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation.
À seize heures et le soir :
2. Éloge funèbre d’André Boyer.
3. Suite de l’ordre du jour du matin.
À partir de dix-huit heures :
Désignation des trente-six membres de la délégation du Sénat aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes.
Personne ne demande la parole ?…
La séance est levée.
La séance est levée le mardi 18 novembre 2008, à une heure quarante-cinq.