Séance en hémicycle du 14 juin 2006 à 21h30

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

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La séance

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La séance, suspendue à dix-neuf heures vingt, est reprise à vingt et une heures trente-cinq, sous la présidence de M. Philippe Richert.

Photo de Philippe Richert

La séance est reprise.

Nous poursuivons la discussion du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, relatif à l'immigration et à l'intégration.

Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus, au sein du chapitre Ier du titre II, à l'article 24 bis.

TITRE II

DISPOSITIONS RELATIVES À L'IMMIGRATION POUR DES MOTIFS DE VIE PRIVÉE ET FAMILIALE

CHAPITRE IER

Dispositions générales

La section 2 du chapitre III du titre Ier du livre III du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est complétée par une sous-section 7 ainsi rédigée :

« Sous-section 7

« L'admission exceptionnelle au séjour

« Art. L. 313-14. - La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7.

« Les critères d'admission exceptionnelle au séjour mentionnés à l'alinéa précédent sont précisés par la Commission nationale de l'admission exceptionnelle au séjour.

« Cette commission présente chaque année un rapport évaluant les conditions d'application en France de l'admission exceptionnelle au séjour.

« La demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans est soumise à l'avis de la commission.

« Un décret en Conseil d'État définit les modalités d'application du présent article et en particulier la composition de la commission, ses modalités de fonctionnement ainsi que les conditions dans lesquelles le ministre de l'intérieur, saisi d'un recours hiérarchique contre un refus d'admission exceptionnelle au séjour, peut prendre l'avis de la commission. »

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery, sur l'article.

Debut de section - PermalienPhoto de Alima Boumediene-Thiery

Usine à gaz, gadget, éléphant blanc ou écran de fumée : je ne sais comment qualifier, monsieur le ministre, la proposition de création de cette énième commission qui figure à l'article 24 bis. La France souffre vraiment de la maladie de la « commissionite » !

Cette proposition résulte directement de votre embarras à présenter et à défendre l'abrogation de la disposition permettant de régulariser les migrants étrangers après dix ans de présence sur le territoire.

Ainsi, à l'Assemblée nationale, vous vous êtes livré à une nouvelle opération qui s'inscrit dans votre stratégie générale alliant affichage et tromperie.

Affichage, parce que vous continuez de vouloir maintenir la fiction de l'humanité de votre projet de loi. Ainsi, monsieur le ministre, vous avez présenté cette commission à l'admission exceptionnelle au séjour des étrangers en situation irrégulière en vue, je vous cite, « d'homogénéiser les pratiques préfectorales et de préciser les critères d'admission exceptionnelle au séjour, qui pourront prendre en compte des exigences humanitaires ou des motifs exceptionnels invoqués par les étrangers ».

Je vous le dis avec regret, ces arguments ne tiennent pas. En effet, vous dites vouloir en finir avec l'appréciation au cas par cas des dossiers d'admission exceptionnelle par les préfets, mais cette disposition ne fera que renforcer leur pouvoir discrétionnaire parce que, en l'état actuel du texte, c'est le préfet qui soumet le dossier à ladite commission.

Ce qui signifie donc que l'administration, au lieu d'appliquer directement les critères relativement objectifs de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, pourra instaurer une sorte de filtre, en soumettant à la commission les seuls dossiers qu'elle estime bons.

Parmi les dossiers qui ne trouveront pas grâce aux yeux des préfectures, figureront sûrement ceux dont les titulaires auront du mal à prouver leur résidence habituelle en France. Or, c'est justement pour éclairer le préfet sur la question de savoir si l'étranger apporte des preuves suffisantes de sa présence en France que cette commission est créée.

De plus, l'intérêt d'une nouvelle commission est considérablement limité, si l'avis qu'elle émet ne lie pas l'administration. Apparemment, au vu du texte, c'est bien l'administration qui aura tout de même le dernier mot.

Il convient également de combattre la création de cette commission qui a pour effet collatéral de paralyser le recours contentieux. En effet, en cas de refus d'attribuer le titre de séjour, le recours devant les tribunaux administratifs aura peu d'effet puisque les juges ne pourront sanctionner les préfectures sur la base de la violation d'un droit qui n'existera plus.

Monsieur le ministre, compte tenu de l'architecture alambiquée de la saisine de cette fameuse commission, pouvez-vous nous éclairer sur le devenir des recours gracieux et hiérarchique ?

Se pose également la question du principe même de l'examen de dossiers individuels par une commission nationale. Comment feront les migrants et leur avocat pour quitter leur région et venir à Paris plaider leur dossier ? Devront-ils aussi, dans ces cas-là, choisir un avocat parisien ?

Comment une telle instance pourra-t-elle gérer tous les dossiers ? Selon les critères que vous établissez, cette commission ne s'occupera pas seulement des cas de migrants résidant en France depuis dix ans, mais également des migrants répondant à des considérations humanitaires. Or ces critères sont toujours flous et ne correspondent à aucune définition claire dans le droit français.

Les instances départementales qui sont prévues par la loi n'ont presque jamais fonctionné, sauf dans de très rares cas. Pourquoi donc créer une commission thématique supplémentaire dont la composition est, de surcroît, plus qu'imprécise ?

Pourquoi ne pas réactiver plutôt les commissions qui existent déjà et sont plus proches de la réalité, puisque leur ressort est départemental ?

Monsieur le ministre, cette commission ne servira à rien d'autre qu'à faire croire qu'on a tenté de répondre à un souci humanitaire mais, une fois de plus, on renvoie les personnes à leur clandestinité. Telle est précisément la politique que votre Gouvernement promeut, et nous ne pouvons l'accepter.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

Je suis saisi de six amendements faisant l'objet d'une discussion commune ; les trois premiers sont identiques.

L'amendement n° 176 est présenté par M. Frimat, Mmes Alquier et M. André, MM. Assouline, Badinter, Bel et Bockel, Mmes Boumediene-Thiery et Cerisier-ben Guiga, M. Collombat, Mme Demontès, MM. Dreyfus-Schmidt et C. Gautier, Mmes Khiari et Le Texier, MM. Mahéas, Mermaz, Peyronnet et Sueur, Mme Tasca, M. Yung et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

L'amendement n° 244 rectifié est présenté par MM. Delfau, Baylet, A. Boyer, Collin et Fortassin.

L'amendement n° 369 est présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat et Mathon-Poinat.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, pour présenter l'amendement n° 176.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Yves Collombat

Cet amendement de suppression résulte de notre désaccord avec l'ensemble des articles qui restreignent les possibilités de régularisation des étrangers.

L'article 24 bis nouveau se veut un correctif à ce durcissement, s'agissant notamment des étrangers qui justifient d'une présence en France de plus de dix ans et qui pourront donc, demain, faire appel à cette commission nationale de l'admission exceptionnelle au séjour.

Ma collègue Alima Boumediene-Thiery vient de formuler un ensemble de critiques que je fais miennes. Je ne reviendrai donc pas sur le détail de son argumentation.

Nous ne savons pas comment cette commission supplémentaire sera composée, puisqu'un décret en Conseil d'État définira « les modalités d'application du présent article et en particulier la composition de la commission, ses modalités de fonctionnement ainsi que les conditions dans lesquelles le ministre de l'intérieur, saisi d'un recours hiérarchique contre un refus d'admission exceptionnelle au séjour, peut prendre l'avis de la commission ».

C'est pourquoi nous préférerions nous passer de cette commission nouvelle, qui ne fait qu'alourdir le dispositif et l'éloigner des demandeurs et des réalités du terrain, et réactiver les commissions départementales du titre de séjour, qui sont précisément plus proches des gens et du réel.

Nous ne voyons donc pas pourquoi cette commission est créée, sinon pour des motifs d'affichage, pour bien faire voir à ceux qui pourraient s'émouvoir que l'on a ménagé une sorte de soupape de sécurité.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

L'amendement n° 244 rectifié n'est pas soutenu.

La parole est à Mme Éliane Assassi, pour présenter l'amendement n° 369.

Debut de section - PermalienPhoto de Éliane Assassi

L'article 24 bis, qui crée une procédure d'admission exceptionnelle au séjour, a été introduit à l'Assemblée nationale. Les critères d'admission exceptionnelle au séjour seront précisés par la commission nationale de l'admission exceptionnelle au séjour.

Dans les faits, cette commission ne sert qu'à légitimer la réduction des catégories pouvant bénéficier de plein droit d'un titre de séjour - je pense ici, en particulier, à l'abrogation du droit au titre de séjour après dix années de présence habituelle en France - et n'ouvre aucun droit nouveau.

Nous considérons que, loin de régler le problème de la régularisation des sans-papiers au bout de dix ans de résidence sur le territoire français, l'instauration d'une telle commission ne fera que compliquer la situation de ces étrangers.

De plus, elle est loin de constituer une nouveauté puisque le préfet peut déjà, de façon discrétionnaire, décider de régulariser un étranger en situation irrégulière pour des considérations humanitaires ou pour des motifs exceptionnels. Avec une différence de taille, cependant : les étrangers qui pouvaient demander leur régularisation au bout de dix ans de présence en France n'auront plus, avec ce texte, qu'un droit à déposer un dossier devant la commission.

C'est cette même commission qui aura à examiner « au cas par cas » la situation des enfants scolarisés en France nés de parents étrangers, alors que, avant que la loi du 26 novembre 2003 n'entre en vigueur, ces enfants ne pouvaient être expulsés. Il s'agit donc, une fois de plus, de passer du droit à l'arbitraire.

Quant à la mission de cette commission d'harmonisation des pratiques, il est à craindre qu'elle ne se trouve, dans les faits, rapidement compromise par les circulaires, directives et télégrammes émanant du ministère de l'intérieur !

En ce qui concerne le fonctionnement de la commission, l'avis que celle-ci émettra ne liera pas la préfecture ou le ministère, et les étrangers concernés ne pourront pas se prévaloir des critères qu'elle aura dégagés pour contester en justice un rejet de leur demande.

Dans ces conditions, plutôt que de créer une énième commission, pourquoi ne pas réactiver les commissions départementales du titre de séjour existantes, dont les avis, au moins, liaient les préfectures ?

La logique de la saisine semble, quant à elle, difficile à appréhender. En effet, dès lors que l'étranger justifie d'une présence en France depuis plus de dix ans, sur quel autre aspect de son dossier la commission sera-t-elle appelée à se prononcer ?

Tous ces éléments nous ont amenés à déposer cet amendement de suppression de l'article 24 bis, que nous vous demandons, mes chers collègues, de bien vouloir adopter.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

L'amendement n° 39, présenté par M. Buffet, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Rédiger comme suit le deuxième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile :

La Commission nationale de l'admission exceptionnelle au séjour exprime un avis sur les critères d'admission exceptionnelle au séjour mentionnés à l'alinéa précédent.

La parole est à M. le rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

Cet amendement vise à préciser les choses, afin de ne pas ériger la commission nationale de l'admission exceptionnelle au séjour en quasi-autorité administrative indépendante.

À cette fin, il prévoit que ladite commission exprimera un simple avis sur les critères définis par l'autorité administrative compétente.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

L'amendement n° 119 rectifié, présenté par Mme Dini, M. Badré, Mmes Morin-Desailly et G. Gautier, MM. Détraigne, Zocchetto, Merceron, Pozzo di Borgo et les membres du groupe Union centriste - UDF, est ainsi libellé :

Compléter le troisième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile par une phrase ainsi rédigée :

Ce rapport est annexé au rapport mentionné à l'article L. 111-10.

La parole est à M. Yves Détraigne.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Détraigne

Dans la mesure où le projet de loi prévoit la création d'une commission nationale de l'admission exceptionnelle au séjour, il convient de permettre à cette instance de joindre ses observations au rapport du Gouvernement qui sera remis chaque année au Parlement.

Ce rapport portera sur les orientations pluriannuelles de la politique d'immigration, en vertu de l'article L. 111-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il nous semble que les observations de la commission nationale de l'admission exceptionnelle au séjour y auront toute leur place.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

L'amendement n° 116 rectifié bis, présenté par Mme Dini, M. Badré, Mmes Payet, Morin-Desailly et G. Gautier, MM. Détraigne, Zocchetto, Merceron, Pozzo di Borgo et les membres du groupe Union centriste - UDF, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi le quatrième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 313-14 du code de l'entrée et de séjour des étrangers et du droit d'asile :

« L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1, la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans. »

La parole est à M. Yves Détraigne.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Détraigne

J'indiquerai en préambule que le groupe de l'UC-UDF tient particulièrement à cet amendement.

L'article 24 tend à modifier sensiblement la rédaction de l'article L. 331-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui porte sur la carte de séjour temporaire « vie privée et familiale », notamment en supprimant l'alinéa qui prévoyait la régularisation des étrangers résidant irrégulièrement en France depuis plus de dix ans.

L'article 24 bis, qui a été introduit par les députés, vise à instituer une commission nationale de l'admission exceptionnelle au séjour chargée de préciser les critères d'admission au séjour des étrangers ne vivant pas en état de polygamie et dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'ils font valoir.

La création de cette autorité est censée contrebalancer la suppression de la régularisation au terme de dix années de séjour sur le territoire français.

À cet égard, si une partie des sénateurs de l'UC-UDF se sont émus de la suppression du 3° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la solution de remplacement trouvée par les députés ne nous satisfait pas non plus tout à fait.

En effet, la création de la commission précitée ne répond pas de manière satisfaisante à la disparition de la règle que j'évoquais, qui existe depuis 1993.

C'est pourquoi, au travers de l'amendement n° 116 rectifié bis, nous souhaitons confier aux commissions départementales du titre de séjour, et non pas à la commission nationale de l'admission exceptionnelle au séjour, le soin d'examiner ces cas d'espèce, souvent difficiles et qui recouvrent parfois des situations humaines dramatiques.

En la matière, la proximité nous paraît devoir garantir un meilleur traitement des demandes. En effet, comment une commission nationale pourrait-elle apprécier l'effort d'intégration accompli par la personne concernée ? Il nous semble que les préfets, les élus, les responsables locaux et les associations, sont plus à même de se prononcer sur la régularisation des personnes vivant sur notre territoire depuis plus de dix ans. Il s'agit véritablement de problématiques humaines, relevant d'un traitement de proximité, au cas par cas ; par conséquent, attribuer cette compétence à une autorité nationale nous paraîtrait tout à fait inapproprié.

Certes, les techniques modernes de communication permettent une transmission rapide des informations, mais l'appréciation de ce qui relève du concret et de l'humain ne pourra jamais faire l'objet d'un traitement numérique. Nous préférons donc confier l'examen des dossiers - ce sont autant de cas d'êtres humains - aux commissions départementales du titre de séjour déjà existantes.

Tel est l'objet de cet amendement ; j'espère avoir convaincu le Sénat de son intérêt.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

Quel est l'avis de la commission sur les amendements autres que celui qu'elle a elle-même présenté ?

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

Sur les amendements identiques n° 176 et 369 de suppression de l'article, la commission émet bien évidemment un avis défavorable.

Sur le fond, je soulignerai que la commission nationale de l'admission exceptionnelle au séjour présentera un double intérêt.

Tout d'abord, lorsque le ministre sera saisi sur recours hiérarchique, sa décision pourra être éclairée par un avis de ladite commission, ce qui n'est tout de même pas négligeable dans ce type de situation.

Par ailleurs, la commission d'enquête avait souligné la nécessité de procéder à une harmonisation des méthodes préfectorales et de l'appréciation de ces dossiers par les préfectures, ce que permettra précisément la création de la commission nationale de l'admission exceptionnelle au séjour. Je rappelle que ce point était visé expressément dans le rapport.

En ce qui concerne l'amendement n° 119 rectifié, je dois à la sincérité du débat d'indiquer que la commission des lois a considéré qu'il s'agissait là d'instituer un rapport supplémentaire, alors même que l'article L. 111-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile prévoit déjà la remise d'un rapport, auquel de nombreux organismes doivent joindre leurs observations.

La commission des lois n'a donc pas manifesté un enthousiasme débordant devant cet amendement, dont elle a souhaité le retrait. Toutefois, nous attendons de connaître l'avis du Gouvernement sur ce point.

Enfin, l'amendement n° 116 rectifié bis tend à attribuer aux commissions départementales du titre de séjour la mission de rendre un avis sur les demandes de régularisation émanant d'étrangers justifiant d'une résidence habituelle en France depuis plus de dix ans, tandis que le projet de loi prévoit de réserver cette compétence à la commission nationale de l'admission exceptionnelle au séjour.

Lorsque la commission des lois a examiné cet amendement, elle a souligné l'intérêt évident qu'il y aurait à réactiver les commissions départementales du titre de séjour. Toutefois, elle a alors émis de fortes réserves sur le fait que leurs avis puissent lier les décisions des préfets. Or la rectification apportée au présent amendement, qui n'a pu être examiné par la commission des lois dans sa nouvelle version, nous rassure sur ce point. C'est la raison pour laquelle j'émettrai, à titre personnel, un avis favorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

Quel est l'avis du Gouvernement sur l'ensemble des amendements ?

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre délégué à l'aménagement du territoire

Cet article a une première vertu : inscrire dans la loi une possibilité d'admission exceptionnelle au séjour.

En effet, le pouvoir de régularisation au cas par cas que le Conseil d'État a reconnu au préfet se trouve ici consacré dans le projet de loi. Un étranger qui n'a pas droit au séjour mais qui fait valoir des motifs humanitaires ou d'autres motifs exceptionnels pourra bénéficier d'une carte de séjour : c'est une « soupape de régularisation » nécessaire, que le Gouvernement assume pleinement en proposant de l'inscrire dans la loi.

La seconde vertu de cet article tient à la rationalisation de la procédure d'admission exceptionnelle au séjour qu'il prévoit. C'est d'ailleurs le sens de la création de la commission nationale de l'admission exceptionnelle au séjour. Celle-ci sera composée, je le rappelle, de représentants de l'administration, mais aussi de représentants des associations s'intéressant aux droits des étrangers et d'élus.

La commission aura, aux termes du projet de loi initial, deux missions essentielles : d'une part, donner un avis sur les critères d'admission exceptionnelle au séjour, afin d'harmoniser les pratiques préfectorales - concrètement, dès son installation en septembre prochain, elle devra, par exemple, donner un avis sur la question des enfants scolarisés ; d'autre part, donner un avis au ministre de l'intérieur sur un dossier individuel lorsqu'il est saisi d'un recours hiérarchique et qu'il souhaite être éclairé par la commission.

Par ailleurs, l'Assemblée nationale a souhaité lui confier une troisième mission. Puisque vous avez défendu un amendement de suppression de l'article, je vous ferai d'ailleurs observer, madame Assassi, que cette troisième mission a été introduite par M. Patrick Braouezec, qui avait présenté un amendement en ce sens au nom du groupe des député-e-s communistes et républicains.

J'ai trop de respect pour M. Braouezec pour ne pas souligner, à cet instant, que cela ne signifie nullement qu'il adhère à la philosophie du texte. Tout comme vous, il n'a eu de cesse, au contraire, de rappeler qu'il était opposé aux principes qui sous-tendent ce projet de loi. Je tenais à insister sur ce point, par souci d'honnêteté.

Néanmoins, M. Braouezec a estimé que cet article 24 bis pouvait malgré tout constituer une avancée et qu'il était possible d'aller encore plus loin que ne le prévoyait sa rédaction initiale, en ouvrant à tous ceux qui peuvent justifier de leur résidence en France depuis plus de dix ans le droit de demander à la commission nationale d'examiner leur dossier.

Hier, à propos de l'article 24, la suppression de l'automaticité de la régularisation au bout de dix ans de présence irrégulière sur le sol français a été contestée sur les travées de votre groupe, madame Assassi. Pour sa part, M. Braouezec a donc souhaité, s'agissant de l'article 24 bis, que l'on permette aux personnes se trouvant dans cette situation de voir leur cas examiné par la commission nationale de l'admission exceptionnelle au séjour.

Il me semble, dans ces conditions, que le dispositif présenté peut répondre à certaines de vos attentes. Je voulais relever ce point, car, en présentant un amendement de suppression de l'article, vous allez quelque peu à l'encontre des intentions de M. Braouezec, qui a souhaité donner une dimension supplémentaire au dispositif en prévoyant, pour les étrangers concernés, un droit à l'examen de leur dossier par la commission nationale.

Ce principe doit être conservé, mais le Gouvernement a évolué dans son appréciation du niveau pertinent d'examen des demandes. La réflexion conduite par la CIMADE nous a, je tiens à le dire, beaucoup aidés à cet égard. Que les choses soient claires : en faisant ainsi référence à cet organisme, je n'entends nullement me prévaloir d'un quelconque soutien de sa part.

Mme Monique Cerisier-ben Guiga s'exclame.

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre délégué à l'aménagement du territoire

Vous savez, madame la sénatrice, j'ai soif de vérité et de transparence : je reconnais donc que la CIMADE n'a jamais apporté son appui au texte. Cependant, elle a contribué à l'élaboration de certaines de ses dispositions, en indiquant comment, même si elle n'est pas complètement favorable à ce projet de loi, ...

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre délégué

... il serait possible, sur certains points, de l'améliorer dans le sens qu'elle souhaite.

Loin de moi, encore une fois, l'arrière-pensée de revendiquer un soutien de la CIMADE : ses responsables ont dit et répété qu'ils étaient hostiles au projet de loi ; dont acte. Toutefois, cela ne nous a pas empêchés d'échanger avec eux de manière approfondie sur les dispositions du projet de loi, non pour rechercher leur caution, mais pour bénéficier de leur éclairage. En effet, cette association est à nos yeux tout à fait respectable, et les propositions qu'elle formule permettent même parfois de faire évoluer les points de vue.

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre délégué

Il s'agit donc non pas de se convaincre, mais au moins de s'écouter. Certains échanges que nous avons eus avec les interlocuteurs associatifs nous conduisent à être favorables à l'évolution très importante proposée par l'amendement n° 116 rectifié bis du groupe UC-UDF et de son président Michel Mercier.

Les dossiers des étrangers résidant en France de manière irrégulière depuis plus de dix ans seront examinés non pas par la commission nationale, mais par les commissions départementales du titre de séjour. L'échelon départemental paraît en effet le plus pertinent pour un tel examen individuel.

Je tiens, cher président Mercier, à saluer également le rôle déterminant pour notre réflexion de l'association lyonnaise Forum réfugiés, que vous connaissez bien. Elle m'a autorisé à indiquer au Sénat qu'elle était tout à fait prête à siéger au sein de la Commission nationale de l'admission exceptionnelle au séjour. Vous pouvez en attester puisque vous avez des relations très constructives avec cette association.

J'en viens maintenant aux amendements déposés sur l'article 24 bis.

Sur la base de ce que je viens d'indiquer, bien évidemment, j'émettrai un avis défavorable sur les amendements n° 176 et 369 de suppression.

Je remercie M. le rapporteur de l'amendement n° 39, qui tend à préciser que la commission nationale donne un avis sur les critères de régularisation, étant entendu que l'admission au séjour reste une compétence de l'État.

S'agissant de l'amendement n° 119 rectifié, le Gouvernement y est très favorable.

Pour ce qui est de l'amendement n°116 rectifié bis, j'ai expliqué les raisons pour lesquelles nous y étions favorables. Je précise d'ailleurs que les préfets seront tenus de soumettre les demandes pour avis aux commissions départementales.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

La parole est à Mme Monique Cerisier-ben Guiga, pour explication de vote sur les amendements identiques n° 176 et 369.

Debut de section - PermalienPhoto de Monique Cerisier-ben Guiga

À l'évidence, pour des raisons humanitaires, nous restons hostiles à l'idée qu'un étranger en France depuis dix ans ne bénéficie que d'une admission exceptionnelle au séjour, avec des restrictions de toutes sortes, au lieu d'une régularisation définitive de sa situation.

On a déjà souligné le nombre important de commissions. Cette commission nationale pose quand même quelques difficultés. Elle ne pourra donner qu'un avis consultatif, basé sur des critères généraux. Comme vient de l'indiquer M. le rapporteur, cet avis, comme celui des commissions départementales, ne liera en aucun cas le préfet, dont on reste totalement dépendants.

Vous nous présentez l'admission exceptionnelle au séjour comme une nouveauté ! Or elle existe depuis bien longtemps pour des étrangers résidant en France depuis moins de dix ans. Cette belle magnanimité est prévue dans notre droit et elle est d'usage constant.

Cette nouvelle Commission nationale de l'admission exceptionnelle au séjour est donc loin d'être aussi merveilleuse que vous le prétendez ! Si certaines associations jugent bon de s'en contenter, on peut le comprendre : en permanence sur le terrain, elles se disent que mieux vaut sauver un étranger que personne.

Monsieur le ministre, les étrangers en situation irrégulière depuis dix ans en France pourront-ils saisir eux-mêmes cette Commission ? Si oui, dans quelles conditions pour leur propre sécurité ?

En tout cas, cette restriction incroyable des droits des étrangers vivant en France, même agrémentée d'une nouvelle commission, n'est pas acceptable.

Les amendements ne sont pas adoptés.

L'amendement est adopté.

L'amendement est adopté.

L'amendement est adopté.

L'article 24 bis est adopté.

L'article L. 313-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est ainsi modifié :

1° Le premier alinéa est complété par les mots : «, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée » ;

2° Dans le deuxième alinéa, les mots : « ses enfants mineurs ou dans l'année qui suit leur dix-huitième anniversaire » sont remplacés par les mots : « ses enfants dans l'année qui suit leur dix-huitième anniversaire ou entrant dans les prévisions de l'article L. 311-3 ».

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

L'amendement n° 370, présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat et Mathon-Poinat, est ainsi libellé :

Supprimer le 1° de cet article.

La parole est à Mme Éliane Assassi.

Debut de section - PermalienPhoto de Éliane Assassi

Il s'agit, là encore, d'un amendement de coordination destiné à supprimer toute référence à l'article L 311-7. L'article 2 ayant été adopté, je retire cet amendement pour les mêmes raisons que celles qui ont été précédemment développées.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

L'amendement n° 370 est retiré.

L'amendement n° 40, présenté par M. Buffet, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :

3° Le deuxième alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée : « La condition prévue à l'article L. 311-7 n'est pas exigée. »

La parole est à M. le rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

Le conjoint et les enfants d'un étranger bénéficiaire de la protection subsidiaire ne doivent pas être soumis à l'obligation de visa de long séjour pour obtenir une carte « vie privée et familiale ». En effet, il est impossible de demander à des membres de la famille d'un étranger menacé dans son pays de retourner dans celui-ci pour obtenir un visa.

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre délégué

Favorable.

L'amendement est adopté.

L'article 25 est adopté.

La première phrase de l'article L. 314-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est complétée par les mots : « ni à un ressortissant étranger poursuivi pour avoir commis sur un mineur de quinze ans l'infraction définie à l'article 222-9 du code pénal, ou s'être rendu complice de celle-ci ».

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

L'amendement n° 177, présenté par M. Frimat, Mmes Alquier et M. André, MM. Assouline, Badinter, Bel et Bockel, Mmes Boumediene-Thiery et Cerisier-ben Guiga, M. Collombat, Mme Demontès, MM. Dreyfus-Schmidt et C. Gautier, Mmes Khiari et Le Texier, MM. Mahéas, Mermaz, Peyronnet et Sueur, Mme Tasca, M. Yung et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Dans cet article, remplacer le mot :

poursuivi

par le mot :

condamné

La parole est à Mme Bariza Khiari.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

Cet article, introduit par l'Assemblée nationale, prévoit un nouveau cas de non-délivrance de la carte de résident pour l'étranger poursuivi pour avoir commis sur un mineur de quinze ans des violences ayant entraîné une mutilation ou une infirmité permanente, telle que l'excision.

Nos collègues de l'Assemblée nationale ont eu raison d'évoquer ces violences d'un autre âge faites aux femmes au nom de traditions ancestrales, que je qualifierais de barbares. Ces pratiques ne sauraient être tolérées chez nous ; elles doivent être sévèrement condamnées.

Sur le fond, nous sommes tout à fait d'accord pour lutter contre ce type de violences et ne pas délivrer de carte de résident à leurs auteurs. Mais nous sommes soucieux de respecter le principe constitutionnel de la présomption d'innocence. C'est la raison pour laquelle nous souhaitons remplacer le mot : « poursuivi » par le mot : « condamné ».

Je suis heureuse qu'on étende l'article L 314-5, qui était réservé aux étrangers vivant en état de polygamie, aux infractions qui pourraient être commises en cas d'excision.

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre délégué

Je rappelle que cet article a été adopté à l'unanimité à l'Assemblée nationale. Il prévoit que la carte de résident ne peut être délivrée à un étranger poursuivi pour avoir commis une excision sur un mineur de quinze ans.

L'amendement que vous proposez respecte parfaitement le principe de la présomption d'innocence, auquel nous sommes tous attachés. Le Gouvernement y est bien évidemment favorable.

L'amendement est adopté.

L'article 25 bis est adopté.

Après l'article L. 314-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il est inséré un article L. 314-5-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 314-5-1. - Le retrait, motivé par la rupture de la vie commune, de la carte de résident délivrée sur le fondement du 3° de l'article L. 314-9 ne peut intervenir que dans la limite de quatre années à compter de la célébration du mariage sauf si un ou des enfants sont nés de cette union et à la condition que l'étranger titulaire de la carte de résident établisse contribuer effectivement, depuis la naissance, à l'entretien et à l'éducation du ou des enfants dans les conditions prévues à l'article 371-2 du code civil. Toutefois, lorsque la communauté de vie a été rompue à l'initiative de l'étranger en raison de violences conjugales qu'il a subies de la part de son conjoint, l'autorité administrative ne peut pas procéder au retrait. »

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery, sur l'article.

Debut de section - PermalienPhoto de Alima Boumediene-Thiery

Monsieur le ministre, ce projet de loi, mais également le projet de loi relatif au contrôle de la validité des mariages, qui a d'ailleurs été opportunément retiré de l'ordre du jour du Sénat, démontrent à merveille la suspicion perpétuelle que vous avez à l'égard de chaque migrant. Pour vous, un migrant étranger est forcément un « faux » : faux étudiant, faux malade, faux mineur abandonné, faux père, et maintenant faux époux.

Le message que vous adressez aux Français n'est autre que le suivant : « Françaises, Français, ne tombez pas amoureux d'un migrant étranger, surtout s'il est en situation irrégulière ! ».

Après avoir créé en 2003 le délit de mariage de complaisance et renforcé, la même année, les contrôles lors de la célébration du mariage, votre Gouvernement entend maintenant durcir les conditions pour obtenir un titre de séjour.

Pendant très longtemps, la seule qualité de conjoint de Français donnait droit à une carte de résident, dans la mesure où cela suffisait à démontrer des attaches personnelles, fortes et durables, en France.

Mais une fois que le migrant étranger a obtenu si difficilement ce titre de séjour, une fois qu'il a passé l'obstacle de la célébration du mariage, à la différence de n'importe quel ressortissant français, il se voit appliquer un droit au divorce « parcellaire ».

Il est ainsi prévu de retirer la carte de résident en cas de rupture de la vie commune dans un délai de quatre années suivant la célébration du mariage. C'est donc maintenant un recul du droit au divorce, après les limitations apportées à la liberté du mariage, y compris d'ailleurs pour les Français qui ont le tort d'aimer un étranger.

Cette condition est plus que discriminante, car elle force le migrant, quoiqu'il arrive dans sa vie de couple, à continuer de vivre avec son conjoint. Vous en faites un prisonnier de son mariage. Même s'il n'aime plus son conjoint français, ou même si celui-ci ne l'aime plus, il doit tout mettre en oeuvre, dans les quatre années qui suivent son mariage, pour rester marié.

Cette condition fait réfléchir lorsque l'on sait que les deux tiers des couples français se séparent au bout de trois ans de vie commune.

Pis, vous écartez la possibilité pour un couple binational d'avoir des problèmes et, pendant un temps - qui peut être plus ou moins long, d'ailleurs : quelques semaines ou quelques mois - de se séparer pour faire le point, avant de se retrouver.

Selon vous, il y aurait, d'un côté, l'amour entre Français, exempt de suspicion et pouvant se vivre sous toutes les formes et, de l'autre, l'amour entre un Français et un étranger, qui doit être conditionné, contenu, restreint, évalué, et en tout cas maintenu dans une suspicion permanente. Heureusement que les débats à l'Assemblée nationale ont permis d'amoindrir la portée de cet article en permettant de prendre en compte la naissance d'un enfant et les violences conjugales.

Mais cela ne suffit pas ! Outre le fait d'avoir un enfant né de l'union, le migrant doit en plus établir qu'il a effectivement contribué à l'entretien et à l'éducation de l'enfant depuis sa naissance.

Vous le savez, monsieur le ministre, cette condition est plus qu'injuste. Depuis quand le fait de s'occuper de son enfant est-il une preuve de la réalité des liens du mariage ?

Nous avons tous vécu ou connu personnellement des cas de couples de Français réellement mariés, mais dans lesquels l'homme, ou la femme d'ailleurs, n'entretient pas son enfant. Pourquoi demander plus au conjoint étranger qu'au conjoint français ?

De plus, la disposition concernant la naissance d'un enfant entre la célébration du mariage et la rupture de la vie commune écarte de facto un nombre trop important de personnes. Quid des couples, que vous appelez « mixtes », qui ne veulent ou ne peuvent avoir d'enfant et dont la vie commune est rompue pendant cette période de quatre ans ? Cette mesure est tout simplement discriminatoire.

Je terminerai en évoquant l'autonomie et l'indépendance de l'être humain. Ces dispositions conduisent en effet à instaurer une dépendance durable du conjoint étranger vis-à-vis du conjoint français.

Avez-vous pensé à tous ces cas, qui ne relèvent pas d'une pure fiction, où vous avez un homme, ou parfois une femme, qui use de tous les chantages, de tous les stratagèmes afin de faire pression sur son conjoint ? Vous rendez-vous compte de la pression que pourra représenter la menace de la rupture de la vie commune entre les mains d'un époux abusif ? Il n'aura même pas à dire que sa femme étrangère veut divorcer ou à prouver son absence. Il pourra se contenter de quitter le domicile conjugal ou d'en chasser sa femme, puis d'aller la dénoncer aux autorités compétentes. Celle-ci risquera alors de se voir retirer sa carte de résident.

En fait, vous imposez au conjoint étranger de choisir entre le maintien d'un couple, malgré toutes les difficultés lorsque celui-ci ne fonctionne plus, ou la clandestinité.

Pour toutes ces raisons, nous vous proposons la suppression de cet article.

Debut de section - PermalienPhoto de Monique Cerisier-ben Guiga

Monsieur le président, mon intervention portera sur les articles 26, 27 et 28 du projet de loi, qui forment un tout.

Monsieur le ministre, je voudrais que vous répondiez à une question : qu'a ce Gouvernement contre les familles binationales ?

Debut de section - PermalienPhoto de Monique Cerisier-ben Guiga

Le fait d'épouser des étrangers est prévu depuis bien longtemps dans notre droit de la nationalité, dans notre code civil. La loi de 1927 en est un exemple ! Mais nous en reparlerons au moment de l'examen des articles sur la nationalité.

Que se passe-t-il ? Pourquoi cet acharnement soudain ? Les articles 26, 27 et 28, ajoutés aux dispositions portant sur le visa de long séjour et l'acquisition de la nationalité, ont pour finalité évidente de précariser la situation des conjoints étrangers de Français sur le territoire national.

Ce gouvernement fait peser une suspicion sur les 90 000 mariages binationaux célébrés chaque année ; celle-ci se décline en mesures tracassières et répressives, d'autant plus pénibles qu'elles se cumulent. Ce n'est pas tant chaque disposition - souvent odieuse, au demeurant - que l'accumulation de celles-ci qui devient terrifiante.

Je rappelle qu'un visa de long séjour est maintenant exigé préalablement à l'entrée en France du conjoint étranger, ce qui signifie en pratique que le séjour du conjoint n'est plus de plein droit : il est soumis aux mêmes conditions administratives que n'importe quel étranger. La vie familiale n'entraîne aucun droit au séjour en France ; c'est clair !

L'acharnement contre le conjoint étranger, et donc contre la famille binationale, continue à l'article 28, puisque l'on y abroge la délivrance de plein droit d'une carte de résident au bout de deux ans de vie commune. Le conjoint étranger devra donc faire une demande, soumise à la condition d'intégration dans la société française.

Cette condition ne devrait pas poser trop de difficultés, dans la mesure où l'étranger qui vit dans le pays de son conjoint a souvent très envie de s'intégrer, en particulier les premières années.

Néanmoins, je voudrais que vous m'expliquiez selon quels critères vous allez mesurer l'intégration. La manière de s'habiller, de se nourrir, de parler à ses enfants ? A-t-on encore le droit d'employer sa langue maternelle avec ses enfants ou bien faut-il à tout prix leur parler uniquement français pour être bien intégré ? Convient-il d'appartenir à des associations, à un parti politique, que sais-je encore ? Qui va mesurer l'intégration, et comment ? Par ailleurs, si l'intégration est jugée insuffisante, quelle carte de séjour délivrera-t-on au conjoint ?

Ces questions ne sont pas purement rhétoriques, monsieur le ministre, et je souhaite obtenir des réponses.

En outre, au durcissement des conditions administratives s'ajoute la prolongation des délais. Aux termes de l'article 27, trois ans de vie commune sont dorénavant nécessaires à l'obtention de la carte de résident. Enfin, une mesure punitive couronne le dispositif, l'État disposant d'un délai de quatre ans après la célébration du mariage pour retirer la carte de séjour en cas de rupture de la vie commune.

Incidemment, vous remarquerez que les couples binationaux ne doivent surtout pas se séparer provisoirement. Ce genre de fantaisie conjugale, pourtant relativement fréquent, leur est interdit. Pour les couples binationaux, c'est l'union ou l'expulsion !

Pour terminer, l'aumône d'une indulgence sera accordée aux couples qui auront enfanté : ils ne peuvent être soupçonnés de mariage blanc ! Mais, pour en bénéficier, le conjoint étranger devra prouver qu'il a effectivement subvenu aux besoins de ses enfants depuis leur naissance. Il faudra donc conseiller aux mères étrangères qui allaitent de se faire délivrer en temps utile un certificat par la PMI, et aux pères étrangers de conserver un livre de comptes bien tenu, avec les pièces justificatives relatives à toutes les dépenses effectuées au profit de leurs enfants : achats de couches, de vêtements, etc.

Il reste enfin le cas de grande bienveillance envers la femme étrangère battue, qui sera protégée de l'expulsion, même si elle quitte son conjoint violent. Effectivement, il valait mieux l'inscrire dans la loi, car, dans l'état d'esprit où nous sommes, une telle disposition n'allait pas de soi !

Je vous le dis franchement, le jour où les Norvégiens, les Américains, les Sénégalais ou les Brésiliens exigeront les mêmes conditions administratives et d'intégration au séjour des conjoints français mariés à leurs ressortissants, il faudra mettre en place des procédures énergiques de rapatriement.

Combien de Français mariés à des Norvégiens parlent couramment la langue après deux ans de séjour et commencent à rire des mêmes plaisanteries ? Combien de Français au Sénégal se sont donnés la peine d'apprendre le wolof et connaissent le rôle des Mourides dans la vie économique et politique de ce pays ? J'en connais peu ! Je dois reconnaître que les femmes de ma génération ayant vécu en Tunisie étaient très peu nombreuses à parler l'arabe convenablement au bout de quelques années.

Si les conditions que nous imposons aux étrangers nous étaient appliquées à l'étranger, nous trouverions cela insupportable et vous multiplieriez les protestations diplomatiques !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

Je suis saisi de sept amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

Les deux premiers sont identiques.

L'amendement n° 178 est présenté par M. Frimat, Mmes Alquier et M. André, MM. Assouline, Badinter, Bel et Bockel, Mmes Boumediene-Thiery et Cerisier-ben Guiga, M. Collombat, Mme Demontès, MM. Dreyfus-Schmidt et C. Gautier, Mmes Khiari et Le Texier, MM. Mahéas, Mermaz, Peyronnet et Sueur, Mme Tasca, M. Yung et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.

L'amendement n° 371 est présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat et Mathon-Poinat.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, pour défendre l'amendement n° 178.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Après les plaidoyers éloquents de Mmes Boumediene-Thiery et Cerisier-ben Guiga, qui connaissent bien ces questions, je n'ai pas grand-chose à ajouter. Mais j'espère, monsieur le ministre, que vous apporterez des réponses précises aux questions posées par Mme Cerisier-ben Guiga.

Je prenais connaissance, aujourd'hui encore, des articles parus dans la presse relatifs à la décision du ministre de l'intérieur, que vous avez annoncée hier, monsieur Estrosi, quant à la régularisation possible de la situation des enfants dont les parents n'ont pas de papiers. Le fait de vérifier que ces enfants ne parlent pas la langue de leurs parents me paraît proprement ahurissant ! Pouvez-vous citer un autre pays au monde, monsieur le ministre, où l'on demande à quelqu'un de bien vouloir attester qu'il ne parle pas la langue de ses parents pour obtenir une régularisation administrative ? Cette condition est ridicule et il faut absolument la supprimer !

Les dispositions de l'article 26, que notre amendement vise à supprimer, sont du même ordre. Nous avons le sentiment d'un véritable acharnement à l'égard des couples mixtes.

Tout d'abord, il est mis fin à la délivrance de plein droit d'une carte de résident aux conjoints de Français, puisque ceux-ci devront désormais en faire la demande, soumise à la condition d'intégration dans la société française, par ailleurs difficile à vérifier.

Ensuite, la durée de mariage requise pour bénéficier de la carte de résident passe de deux à trois ans. Nous serions heureux que quelqu'un nous explique pourquoi ! Les couples mixtes semblent faire l'objet d'une suspicion perpétuelle...

Enfin, en cas de rupture de la vie commune dans les quatre années qui suivent le mariage, la personne qui n'est pas de nationalité française se voit retirer son droit de séjour. Cela est stupéfiant, monsieur le ministre ! Nous n'accepterions pas que des Français soient traités de la sorte dans un autre pays !

Comme l'ont souligné Mmes Cerisier-ben Guiga et Boumediene-Thiery, une telle disposition comporte des risques de pression de toutes natures. Les couples qui souhaitent se séparer seront amenés à différer leur rupture pendant quatre ans, de manière à remplir cette condition administrative. Nous pensons qu'il conviendrait au moins de renoncer à cette condition exorbitante, monsieur le ministre.

Si vous ne donniez pas un avis favorable sur notre amendement de suppression, monsieur le ministre, il faudrait vraiment répondre aux questions précises qui vous ont été posées.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

La parole est à Mme Éliane Assassi, pour présenter l'amendement n° 371.

Debut de section - PermalienPhoto de Éliane Assassi

Le plaidoyer de Mme Cerisier-ben Guiga était excellent, à la fois pertinent et en phase avec les réalités de la vie. Aussi n'aurai-je pas grand-chose à ajouter.

J'affirme à mon tour que l'article 26 précarise les couples mixtes et les conjoints étrangers. Sa suppression me semble donc tout à fait justifiée.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

L'amendement n° 479, présenté par M. Pozzo di Borgo et les membres du groupe Union centriste - UDF, est ainsi libellé :

Rédiger comme suit le texte proposé par cet article pour l'article L. 314-5-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile :

« Art. L. 314 -5 -1. - Le refus de renouvellement de la carte de séjour temporaire motivé par la rupture de la vie commune, délivrée sur le fondement du 4° de l'article L. 313-11, ne peut intervenir que dans la limite de quatre années à compter de la célébration du mariage sauf si un ou des enfants sont nés de cette union et à la condition que l'étranger titulaire de la carte de séjour temporaire établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation du ou des enfants.

« Toutefois, lorsque la communauté de vie a été rompue à l'initiative de l'étranger en raison de violences conjugales qu'il a subies de la part de son conjoint, l'autorité administrative ne peut pas procéder au non-renouvellement. »

La parole est à M. Yves Pozzo di Borgo.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Pozzo di Borgo

J'ai tendance à adhérer aux propos que j'ai entendus.

Mon amendement, en substituant le refus de renouvellement de la carte de séjour temporaire au retrait de la carte de résident, a pour objet d'instituer un cadre moins rigide et moins contraignant pour les personnes concernées.

Cette mesure ne figerait pas, à titre définitif, une situation déjà difficile ; les personnes concernées n'atteignent pas le point de non-retour avec cette décision. Tout le monde a droit à la rémission des péchés.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

L'amendement n° 179, présenté par M. Frimat, Mmes Alquier et M. André, MM. Assouline, Badinter, Bel et Bockel, Mmes Boumediene-Thiery et Cerisier-ben Guiga, M. Collombat, Mme Demontès, MM. Dreyfus-Schmidt et C. Gautier, Mmes Khiari et Le Texier, MM. Mahéas, Mermaz, Peyronnet et Sueur, Mme Tasca, M. Yung et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Dans la première phrase du texte proposé par cet article pour l'article L. 314-5-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, remplacer le mot :

quatre

par le mot :

deux

La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Il s'agit d'un amendement de repli, ainsi d'ailleurs que l'amendement n° 180.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

L'amendement n° 372, présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :

Après le mot :

union

supprimer la fin de la première phrase du texte proposé par cet article pour l'article L. 314-5-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

La parole est à Mme Éliane Assassi.

Debut de section - PermalienPhoto de Éliane Assassi

Nous venons de le voir, l'article 26 apporte une restriction importante au droit au séjour du conjoint étranger s'il se sépare de son conjoint français dans les quatre années qui suivent le mariage.

Cependant, cette disposition ne s'applique pas si des enfants sont issus de cette union et - la condition est cumulative - si l'étranger titulaire de la carte de résident établit qu'il contribue effectivement à l'entretien et à l'éducation de ses enfants depuis leur naissance.

La première condition, introduite par nos collègues députés, a immédiatement été complétée par le Gouvernement de la deuxième condition.

Cette dernière mesure nous semble tout à fait inutile et tend, une fois de plus, à jeter l'opprobre sur les couples mixtes suspectés de s'être mariés dans le seul but d'obtenir un titre de séjour ou, pire, la nationalité française.

Nous ne pouvons accepter cette logique de suspicion, et ce d'autant plus fortement lorsque des enfants sont issus de cette union. Nous considérons que leur simple existence suffit à démontrer qu'il ne s'agit pas d'un mariage de complaisance.

C'est pourquoi nous souhaitons supprimer la deuxième condition introduite par le Gouvernement à l'Assemblée nationale qui prévoit que le parent étranger « établisse contribuer effectivement, depuis la naissance, à l'entretien et à l'éducation du ou des enfants ».

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

L'amendement n° 180, présenté par M. Frimat, Mmes Alquier et M. André, MM. Assouline, Badinter, Bel et Bockel, Mmes Boumediene-Thiery et Cerisier-ben Guiga, M. Collombat, Mme Demontès, MM. Dreyfus-Schmidt et C. Gautier, Mmes Khiari et Le Texier, MM. Mahéas, Mermaz, Peyronnet et Sueur, Mme Tasca, M. Yung et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Dans la seconde phrase du texte proposé par cet article pour l'article L. 314-5-1 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, après les mots :

la communauté de vie a été rompue

insérer les mots :

par le décès de l'un des conjoints ou

La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

L'amendement n° 127 rectifié bis, présenté par Mme Dini, M. Badré, Mmes Morin-Desailly et G. Gautier, MM. Détraigne, Zocchetto, Merceron, Pozzo di Borgo et les membres du groupe Union centriste - UDF, est ainsi libellé :

Compléter le texte proposé par cet article pour l'article L. 314-5-1 du code de l'entrée et de séjour des étrangers et du droit d'asile par les mots :

, ni refuser le renouvellement du titre de séjour

La parole est à M. Yves Détraigne.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Détraigne

L'article 26 prévoit le retrait de la carte de résident remise au conjoint étranger s'il y a rupture de la vie commune pendant les quatre ans suivant la célébration du mariage.

Cet article a donc pour objet de limiter les mariages dits « de complaisance ».

L'amendement voté par nos collègues de l'Assemblée nationale vise à empêcher l'autorité administrative de retirer la carte de résident à l'étranger qui, en raison des violences subies de la part de son conjoint français, a rompu la communauté de vie.

L'amendement 127 rectifié bis va plus loin : il tend à interdire à l'autorité administrative de refuser le renouvellement de la carte de résident à l'étranger victime de violences.

En effet, le retour dans le pays d'origine peut, dans ce cas, être dangereux lorsque la famille est susceptible d'exercer des sanctions ou des représailles qui menacent directement l'intégrité physique et morale de la victime de violences. La rupture de la vie commune par une jeune fille peut, par exemple, être perçue comme un véritable déshonneur dans certains pays.

La France ne doit pas être complice de ces actions, et il convient d'assurer la protection de ces personnes - en général, il s'agit de femmes - victimes de violences en leur permettant de se maintenir sur le territoire français.

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

La commission est défavorable aux amendements identiques n° 178 et 371.

Je rappelle que, dans le cas d'un couple séparé avec des enfants, si la preuve est rapportée de leur éducation, l'étranger conserve son titre.

En ce qui concerne l'amendement n° 479, l'article L. 313-12 du code de l'entrée et de séjour des étrangers et du droit d'asile dispose déjà que le renouvellement de la carte de séjour « vie privée et familiale » délivrée à un conjoint de Français est subordonné au fait que la communauté de vie n'a pas cessé.

Cet amendement est donc en grande partie déjà satisfait par le droit en vigueur. C'est la raison pour laquelle la commission a émis un avis défavorable.

La commission est également défavorable aux amendements n° 179 et 372.

Elle est favorable à l'amendement n° 180, qui tend à rendre impossible le retrait de la carte de résident lorsque la rupture de la vie commune est la conséquence du décès de l'un des conjoints.

Quant à la précision apportée par l'amendement n°127 rectifié bis, elle me paraît inutile puisque la carte de résident, en application du deuxième alinéa de l'article L. 311-2, est déjà renouvelable de plein droit. Elle l'est donc aussi en cas de violences conjugales.

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre délégué

Avant toute chose, je veux répondre à la question de M. Sueur, qui n'a aucun rapport avec l'article 26.

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre délégué

La circulaire signée hier par le ministre d'État n'indique nullement que, parmi les critères de régularisation des familles ayant un enfant scolarisé, figurerait l'obligation de vérifier que l'enfant est incapable de parler la langue de son pays d'origine. C'est donc faux !

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre délégué

Je le prends comme un propos de café du commerce !

Le mariage avec un Français, je le rappelle pour ceux qui semblent l'ignorer dans cette assemblée, est devenu le premier motif de l'immigration familiale : 50 000 en 2004.

Nous ne disons pas que tous les mariages mixtes sont des mariages de complaisance, madame Cerisier-ben Guiga, ...

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre délégué

... mais nous sommes convaincus que, parmi les 50 000 titres de séjour délivrés en 2004, certains le sont à tort, en raison d'automatismes dangereux, peut-être pas pour vous, mais pour les règles qui régissent la République française.

Je n'ai rien contre les mariages binationaux, mais comme vous feignez d'ignorer qu'il y aurait des mariages de complaisance, voire de contrainte, dans notre pays, je citerai un certain nombre d'exemples à l'intention de toutes celles et tous ceux qui ont défendu, sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste, des amendements de suppression.

Le 17 mai 2006, à Saint-Gilles, dans le Gard, un Marocain est interpellé. Il avait épousé une jeune fille française de dix-huit ans, en fugue. La fraude a été établie et l'intéressé s'est révélé un entremetteur ayant organisé quatorze mariages frauduleux.

En avril 2006, à Montpellier, interpellation de quarante-sept personnes appartenant à une filière d'organisation de mariages de complaisance. Pour mettre en relation des Nord-Africains avec des Françaises, les intermédiaires percevaient 9 000 euros versés par le client étranger, le prix d'achat d'une épouse française donnant droit automatiquement à une carte de séjour, puis à une carte de résident, puis à la nationalité française !

En janvier 2006, dans les Pyrénées-Orientales, quatre organisateurs de mariages blancs entre Français et Russes sont interpellés. L'enquête démontre qu'ils prenaient en charge des femmes russes pour leur procurer des papiers. La séparation était systématique après deux ans de vie commune, dès que la carte de résident était obtenue.

En novembre 2005, à Chamonix - les Alpes, la montagne ! - interpellation d'une entremetteuse ayant organisé huit mariages blancs entre Françaises et Tunisiens depuis 2002. Le tarif était de 1 000 euros par mariage pour l'entremetteuse et jusqu'à 9 500 euros pour la Française acceptant de se marier !

D'ailleurs, on se demande pourquoi une telle différence de tarif entre tous ces cas !

Sourires

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre délégué

En octobre 2005, à Perpignan, deux intermédiaires sont arrêtés. Ils organisaient des mariages moyennant la somme de 15 000 euros, dont 700 euros pour le ressortissant français acceptant de se prêter au jeu.

En septembre 2005, à Mulhouse, deux intermédiaires turcs sont interpellés.

En septembre 2005, à Brest, un intermédiaire turc est interpellé ; il pratiquait un tarif de 8 000 euros.

En juillet 2005, à Lille, interpellation d'un Marocain qui recrutait des Françaises pour contracter des mariages de complaisance, moyennant le paiement de 3 000 euros, cette fois, par le client marocain.

En juin 2005, à Marseille, est démantelée une autre filière franco-marocaine qui, elle, tarifait la rencontre entre 6 000 et 15 000 euros, dont 4 000 euros étaient versés aux futures épouses françaises.

Madame Cerisier-ben Guiga, nous ne parlons pas d'une question théorique : les mariages de complaisance ou les mariages forcés sont une réalité ! Vous avez choisi de participer à ce débat en feignant d'ignorer cette réalité. Il était de notre devoir de veiller à ce que cette réalité soit enfin reconnue et identifiée, et que nous puissions y mettre un terme.

Il est donc tout à fait logique de prévoir que la carte de résident de dix ans sera délivrée aux conjoints de Français trois ans après le mariage, et non plus seulement deux ans - j'ai fait suffisamment de démonstrations pour légitimer ce passage à trois ans -, à condition que le conjoint soit intégré ; nous le verrons à l'article 27.

La carte de résident peut être retirée en cas de rupture de vie commune dans les quatre ans qui suivent le mariage, c'est-à-dire, en réalité, dans l'année qui suit la date de délivrance de la carte de résident.

J'ajoute qu'à l'Assemblée nationale nous avons veillé à corriger certains effets pervers de cette nouvelle règle de retrait de la carte de résident, car nous avons été sensibles aux arguments présentés notamment par les églises chrétiennes.

Le Gouvernement a ainsi été très favorable à deux amendements visant à préciser que l'on ne peut retirer sa carte de résident à l'étranger qui contribue à l'éducation d'un enfant né de ce mariage, ni à l'étranger qui a rompu la communauté de vie en raison des violences conjugales qu'il a subies.

Il a semblé au Gouvernement que les églises chrétiennes apportaient une contribution importante pour que nous rendions ces dispositions plus justes et plus équitables.

Fort de ces explications, j'en viens à l'examen des amendements.

Le Gouvernement est défavorable aux amendements identiques n° 178 et 371.

Il demande le retrait de l'amendement n° 479, car il est déjà satisfait par l'article L. 313-12 du code de l'entrée et de séjour des étrangers et du droit d'asile.

Le Gouvernement est défavorable aux amendements n° 179 et 372.

En revanche, il est favorable à l'amendement n° 180, car il estime utile de prévoir expressément que le décès d'un conjoint n'est pas une cause de rupture de vie commune.

Enfin, le Gouvernement demande le retrait de l'amendement n° 127 rectifié bis. Il partage le souci de M. Détraigne de prévoir non seulement que la carte de résident n'est pas retirée au conjoint victime de violences conjugales, mais également que celui-ci a droit au renouvellement de sa carte de résident. Néanmoins, cet amendement est déjà satisfait par le droit actuel puisque l'article L. 314-1 dispose que la carte de résident est renouvelable de plein droit.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

La parole est à Mme Monique Cerisier-ben Guiga, pour explication de vote sur les amendements identiques n°s 178 et 371.

Debut de section - PermalienPhoto de Monique Cerisier-ben Guiga

Monsieur le ministre, si mes souvenirs sont bons, un décret paru en mars 2005 offre aux services consulaires et au parquet de Nantes, où sont centralisées toutes les affaires, la possibilité de refuser la transcription d'un acte de mariage célébré à l'étranger. Le parquet de Nantes peut éventuellement requérir l'annulation du mariage. Des dispositions ont donc été prises il y a un an !

Les consulats sont très motivés - et ils ont raison de l'être ! - pour lutter contre ce que j'appelle les mariages « migratoires », qui constituent des abus à l'institution du mariage à des fins migratoires. En se donnant beaucoup de mal, ils ont détecté 1 000 cas au sujet desquels ils ont saisi le parquet de Nantes.

Je suis d'ailleurs passée récemment dans des consulats très concernés - Annaba, Rabat, Pondichéry - et j'ai constaté que ces mesures donnaient un travail considérable aux services consulaires, travail qu'ils accomplissent avec beaucoup de dévouement et souvent beaucoup de finesse.

Je vous rappelle que 45 000 mariages binationaux sont célébrés en France, 45 000 à l'étranger, soit un total de 90 000 mariages : seuls 1 000 cas sur 90 000 sont soumis au parquet de Nantes ! Monsieur le ministre, pour 1 000 fraudeurs qui utilisent le mariage à des fins migratoires, on rend la vie vraiment très difficile, pour ne pas dire parfois impossible, à 90 000 couples par an. Il y a disproportion !

Vous utilisez un énorme marteau pour écraser une tête d'épingle, soyons gentils, une tête de clou, sur une enclume - les consulats et le parquet de Nantes - que vous allez finir par « casser ». Ils ne sont pas en mesure de faire ce que vous leur demandez !

Le point n'a même pas pu être fait, monsieur le ministre, sur l'application du décret de mars 2005 et vous êtes déjà en train de prendre d'autres dispositions. Dans un an ou deux, on doublera de nouveau les délais, on compliquera encore les choses, sans avoir analysé les résultats.

Je ne défends pas du tout les mariages de ce type : ils provoquent des drames humains épouvantables, et je suis trop patriote pour approuver que l'on joue avec la nationalité française.

Du temps de ma grand-mère, il existait ce que l'on appelait « les chasseurs de dot ». Les familles se méfiaient terriblement, et à juste titre, de ces jeunes gens. Ils présentaient bien, mais ils n'en voulaient qu'aux biens que la jeune fille pouvait apporter.

Exclamations sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Monique Cerisier-ben Guiga

Quand j'avais vingt ans, de jeunes internes en médecine, doués, mais pas alliés aux familles médicales qui comptaient, cherchaient à épouser la fille du patron dans l'objectif de servir leur carrière.

Et du temps de la marquise de Sévigné, les nobles désargentés épousaient de riches roturières afin de fumer les terres.

Le détournement du mariage à des fins autres que matrimoniales n'est donc pas nouveau. Il prend une forme que je juge particulièrement odieuse. Pour autant, aller jusqu'à rendre suspects tous les couples mixtes - 90 000 mariages par an ! -, c'est totalement disproportionné !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.

Les amendements ne sont pas adoptés.

L'amendement n'est pas adopté.

L'amendement n'est pas adopté.

L'amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

L'amendement n° 127 rectifié bis est retiré.

Je mets aux voix l'article 26, modifié.

L'article 26 est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

L'amendement n° 373, présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :

Après l'article 26, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Les étrangers qui, à la date d'entrée en vigueur de la présente loi, sont titulaires d'une carte de séjour temporaire d'un an autorisant à travailler, reçoivent de plein droit une carte de résident à la première échéance de l'un de ces titres de séjour ou de travail.

La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat.

Debut de section - PermalienPhoto de Josiane Mathon-Poinat

Par le présent amendement, nous souhaitons insérer dans le projet de loi un nouvel article, afin de conforter l'insertion sociale et professionnelle grâce à l'accès à la carte de dix ans.

La multiplication des cartes de séjour d'un an précarise leurs détenteurs et handicape notamment leur accès à l'emploi et au logement. Nous proposons donc les dispositions suivantes : « Les étrangers, qui, à la date d'entrée en vigueur de la présente loi, sont titulaires d'une carte de séjour temporaire d'un an autorisant à travailler, reçoivent de plein droit une carte de résident à la première échéance de l'un de ces titres de séjour ou de travail ».

Je tiens à rappeler que cette mesure avait été votée à l'unanimité par le Parlement en 1984.

Depuis 1984 - année de création de la carte de résident de dix ans -, l'accès à un titre de séjour de longue durée a constitué un instrument légal d'intégration de dizaines de milliers de migrants. Or, depuis la loi du 26 novembre 2003, on assiste à un retournement majeur dans la conception de l'intégration, renforcée aujourd'hui par votre réforme. Dorénavant, la délivrance d'un titre de séjour devient la « récompense » de l'intégration.

L'intégration suppose un minimum de stabilité dans le droit au séjour permettant un véritable ancrage dans le pays d'accueil non soumis à l'aléa ou à la précarité.

L'intégration ne vous sert en réalité qu'à constituer une condition supplémentaire - donc, un obstacle - à la régularisation de nombre de situations administratives.

Pour toutes ces raisons, nous vous proposons, mes chers collègues, d'adopter cet amendement.

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre délégué

Défavorable.

L'amendement n'est pas adopté.

Après l'article L. 314-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il est inséré un article L. 314-6-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 314-6-1. - La carte de résident d'un étranger qui ne peut faire l'objet d'une mesure d'expulsion en application des articles L. 521-2 ou L. 521-3 peut lui être retirée s'il fait l'objet d'une condamnation définitive sur le fondement des articles 433-3, 433-4 ou 433-6 du code pénal.

« La carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale lui est délivrée de plein droit. »

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

Je suis saisi de quatre amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

Les trois premiers sont identiques.

L'amendement n° 181 est présenté par M. Frimat, Mmes Alquier et M. André, MM. Assouline, Badinter, Bel et Bockel, Mmes Boumediene-Thiery et Cerisier-ben Guiga, M. Collombat, Mme Demontès, MM. Dreyfus-Schmidt et C. Gautier, Mmes Khiari et Le Texier, MM. Mahéas, Mermaz, Peyronnet et Sueur, Mme Tasca, M. Yung et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.

L'amendement n° 245 rectifié est présenté par MM. Delfau, Baylet, A. Boyer, Collin et Fortassin.

L'amendement n° 374 est présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, pour présenter l'amendement n° 181.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Yves Collombat

L'article 26 bis a été introduit par l'Assemblée nationale. Il ne figurait donc pas dans le texte initial, qui était pourtant passablement répressif. Cela prouve que l'on peut toujours en rajouter. D'ailleurs, je vois déjà poindre la soixante-douzième modification de l'ordonnance de 1945.

Cet article dispose que la carte de résident d'un étranger qui ne peut faire l'objet d'une mesure d'expulsion en application des articles L. 521-2 ou L. 521-3 peut lui être retirée - une carte d'un an portant la mention « vie privée et familiale » lui est délivrée - s'il fait l'objet d'une condamnation définitive pour menaces et actes d'intimidation ou pour acte de rébellion à l'encontre des personnes dépositaires de l'autorité publique ou chargées d'une mission de service public.

Cet ajout de l'Assemblée nationale peut paraître de bon sens. Comment peut-on conserver sur notre sol des gens qui se rebelleraient contre l'autorité publique, me direz-vous ? Certes ! Sur le plan des principes, nous n'avons rien à redire. Toutefois, la notion d'intimidation ou de rébellion est assez difficile à définir et elle est particulièrement aléatoire.

Le rapport annuel de la Commission nationale de déontologie de la sécurité fait apparaître de nombreux cas où les accusations de rébellion servent à cacher - je voudrais employer une litote -, disons des irrégularités de procédure, des comportements douteux, souvent liés d'ailleurs à des situations difficiles et à un manque d'encadrement, et parfois même, j'en ai eu des exemples dans mon département, des règlements de comptes. Cette notion peut donc servir à autre chose qu'à faire respecter la grandeur de la France.

En outre, cet article ne fait pas référence à la gravité de l'acte. Un pied de nez est-il du même ordre que des coups et blessures ?

Étendre à ce point la notion de rébellion paraît tout à fait excessif. Si l'on n'y prend garde, cet article pourrait être extrêmement destructeur et aboutir au résultat inverse de celui qui est recherché.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

L'amendement n° 245 rectifié n'est pas soutenu.

La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat, pour présenter l'amendement n° 374.

Debut de section - PermalienPhoto de Josiane Mathon-Poinat

L'article 26 bis prévoit de nouvelles possibilités de retrait de la carte de résident d'un titulaire qui est protégé contre une mesure d'expulsion.

On pourrait croire que cet article vise les étrangers qui se retrouveraient mêlés à des manifestations, telles que celles qui ont été organisées cet hiver contre le CPE, ou à des violences urbaines, comme celles que nous avons connues dans nos banlieues à l'automne.

En fait, les infractions de rébellion ou de menace contre les forces de l'ordre sont systématiquement invoquées par ces dernières lorsque des confrontations ont lieu. Ainsi, si cet article est adopté, ce serait le moyen de retirer de façon quasi automatique la carte de résident à ces étrangers.

Je tiens à insister sur le fait que cette sanction interviendrait après que l'étranger a fait l'objet d'une condamnation définitive. Si la justice l'a sanctionné, il n'apparaît pas nécessaire de le sanctionner à nouveau ; sinon, cela ressemblerait à une double peine.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

L'amendement n° 85 rectifié bis, présenté par MM. Courtois, Dassault et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, est ainsi libellé :

Dans le premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 314-6-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, remplacer les mots :

433-4 ou

par les mots :

433-4, 433-5, du deuxième alinéa de l'article 433-5-1 ou de l'article

La parole est à M. Jean-Patrick Courtois.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Patrick Courtois

L'article 26 bis permet de retirer la carte de résident, qui est le signe d'une intégration dans la société française, aux étrangers condamnés pour avoir commis des violences urbaines, et même des violences rurales.

Il est légitime d'ajouter aux incriminations retenues par l'article L. 314-6-1 du CESEDA celles qui sont visées à l'article 433-5 du code pénal relatives à l'outrage à personne chargée d'une mission de service public et de nature à porter atteinte à sa dignité ou au respect dû à la fonction dont elle est investie, dès lors qu'elles témoignent d'un déficit flagrant d'intégration.

La version rectifiée de cet amendement ajoute, conformément au débat ayant eu lieu en commission des lois, une nouvelle forme d'outrage pouvant entraîner le retrait de la carte de résident : il s'agit de l'outrage fait publiquement à l'hymne national ou au drapeau tricolore.

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

Les amendements identiques n° 181 et 374 visant à supprimer l'article, la commission a bien évidemment émis un avis défavorable.

S'agissant de l'amendement n° 85 rectifié bis, la commission a émis un avis très favorable.

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre délégué

Le Gouvernement est défavorable aux amendements identiques n° 181 et 374.

En revanche, il est très favorable à l'amendement n° 85 rectifié bis. Un étranger condamné pour outrage à l'encontre d'une personne chargée d'une mission de service public ou dépositaire de l'autorité publique : c'est évidemment l'objectif ! Ajouter l'outrage au drapeau tricolore ou à l'hymne national ne peut que conforter la dimension que nous avons voulu conférer à ce texte. Un tel comportement démontrerait en effet que la personne n'est pas intégrée

Les amendements ne sont pas adoptés.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

La parole est à M. Alain Vasselle, pour explication de vote sur l'amendement n° 85 rectifié bis.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Vasselle

Je me réjouis d'autant plus volontiers de l'initiative de MM. Courtois et Dassault que, comme tous les membres du groupe de l'UMP, je suis cosignataire de cet amendement.

Cela étant, j'aimerais que la rigueur qui prévaut pour les étrangers s'applique de la même manière aux Français qui ont un comportement peu respectueux vis-à-vis des personnes chargées d'une mission de service public ou des premiers magistrats des communes. Jusqu'à ce jour, les tribunaux ne s'empressent pas de prendre des mesures à l'encontre de ces concitoyens.

Cette mesure n'est-elle pas un coup d'épée dans l'eau ? Je le répète, j'approuve les dispositions législatives visant les étrangers qui n'auraient pas un comportement citoyen, mais il faudrait que ces mêmes mesures s'appliquent aux Français.

Mme Bariza Khiari applaudit.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Vasselle

Plusieurs premiers magistrats dans mon département ont été victimes d'insultes de la part de certains de nos concitoyens. Or nous attendons encore que la justice se prononce à l'égard de ceux qui ont eu ce comportement condamnable.

Je ne doute pas que M. le ministre s'empressera de prendre une circulaire ministérielle pour rappeler aux magistrats, avec le concours du garde des sceaux, qu'il y a lieu de faire preuve de sévérité à l'égard tant des étrangers que des citoyens français.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

La parole est à Mme Monique Cerisier-ben Guiga, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Monique Cerisier-ben Guiga

Voilà le type même de mesure qui paraît fortement défendre la dignité nationale. C'est très bien, mais qui jugera de la réalité des faits ?

Debut de section - PermalienPhoto de Monique Cerisier-ben Guiga

Quand on voit ce qui se passe dans les tribunaux et dans les commissariats de police, quand on entend le témoignage des avocats ou quand on lit le rapport de la commission de déontologie de la sécurité, je crains vraiment que ce texte ne favorise les abus de droit caractérisés.

Les comportements dont nous parlons sont bien évidemment condamnables, mais il faudrait les juger avec toute la sérénité nécessaire. Or ces conditions ne sont pas réunies dans un grand nombre de tribunaux. En flagrant délit, les affaires sont jugées les unes après les autres, à toute allure, avec des avocats commis d'office qui ne savent pas de quoi il retourne quelques secondes auparavant. On peut donc avoir des craintes.

Protestations sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Madame Cerisier-ben Guiga, remettre systématiquement en cause les décisions de justice, alors que toutes les voies de recours existent, me semble une attitude franchement insupportable !

Très bien ! et vifs applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre délégué

Vis-à-vis des symboles de la République !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

... ou vis-à-vis de symboles de la République, il est normal qu'ils en assument les conséquences s'ils sont condamnés.

Certains disent qu'il ne faudrait pas prononcer de sanctions.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

Les individus concernés seraient, paraît-il, mal jugés et injustement condamnés.

Je le répète, madame Cerisier-ben Guiga : votre généralisation est insupportable !

Applaudissements sur les travées de l'UMP. - Exclamations sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

La parole est à Mme Bariza Khiari, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

J'ai particulièrement apprécié l'intervention de notre collègue Alain Vasselle.

En effet, cette intervention démontre en creux qu'il y a une discrimination à l'égard des étrangers...

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

... et que le présent projet de loi, notamment à l'article dont nous débattons actuellement, tend à renforcer ce phénomène.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Yves Collombat

Apparemment, nous en sommes à nous raconter nos différentes anecdotes personnelles.

Dans ces conditions, je voudrais m'adresser à mon collègue Alain Vasselle. J'ai remarqué que le président de la commission ne s'était pas insurgé contre les propos de M. Vasselle sur la manière dont les juges traitent ceux qui insultent les premiers magistrats.

Pour ma part, j'ai été confronté au problème à plusieurs reprises. J'ai pu constater avec satisfaction que ceux qui m'avaient insulté et menacé avaient été sanctionnés.

Par conséquent, mon cher collègue, peut-être votre département se caractérise-t-il par un laxisme particulier, mais ce n'est pas le cas du mien. Alors, ne généralisons pas !

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Yves Collombat

En pratique, la définition concrète de la notion de « rébellion » est extrêmement floue. Le dispositif risque donc de provoquer de multiples bavures.

L'amendement est adopté.

L'article 26 bis est adopté.

L'article L. 314-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est ainsi modifié :

1° Dans le premier alinéa, le mot : « également » est supprimé ;

2° Dans le 1°, les mots : « aux enfants mineurs ou dans l'année qui suit leur dix-huitième anniversaire » sont remplacés par les mots : « aux enfants dans l'année qui suit leur dix-huitième anniversaire ou entrant dans les prévisions de l'article L. 311-3 », et le mot : « deux » est remplacé par le mot : « trois » ;

3° Dans le 2°, le mot : « deux » est remplacé par le mot : « trois » ;

4° Après le 2°, il est inséré un 3° ainsi rédigé :

« 3° À l'étranger marié depuis au moins trois ans avec un ressortissant de nationalité française, à condition que la communauté de vie entre les époux n'ait pas cessé depuis le mariage, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français. »

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

Comme c'était déjà le cas pour l'article précédent, la lecture de cet article 27 démontre que l'objet de ce projet de loi est non pas de maîtriser l'immigration ou d'améliorer son pilotage, mais bien de précariser à l'extrême les parcours de séjour des étrangers dans notre pays.

Cet article comporte deux volets. Tout d'abord, il tend à créer de nouveaux critères pour la délivrance de la carte de résident aux conjoints de Français et aux bénéficiaires du regroupement familial. Ensuite, il vise à porter le délai de séjour régulier préalable à la délivrance d'une carte de résident de deux ans à trois ans.

Ces mesures laissent une nouvelle fois une grande part à l'arbitraire administratif. Monsieur le ministre, vous faites du respect des conditions d'intégration et de la continuité de la communauté de vie des préalables à la délivrance d'une carte de résident. Vous supprimez donc de fait les délivrances de plein droit de ces titres de séjour. En outre, l'ajout d'une condition d'intégration me laisse plus que perplexe. Plutôt que de contribuer à l'intégration des étrangers en leur accordant la stabilité du séjour, vous faites du contrat d'accueil et d'intégration un préalable.

Tout cela est bien la preuve de l'utilisation que vous voulez faire du contrat d'accueil et d'intégration. Si nous sommes favorables à ce dispositif, nous sommes en revanche inquiets quant à l'usage qui en sera fait. Selon nous, ce contrat ne sera aucunement un moyen de favoriser l'intégration des primo arrivants dans notre pays. Vous souhaitez au contraire en faire un outil d'exclusion et de précarisation des parcours de séjour.

Ensuite, l'allongement de deux ans à trois ans de l'obligation de séjour préalable à la délivrance d'une carte de résident pour les conjoints de Français, les bénéficiaires du regroupement familial et les parents d'enfants français n'a pas de raison d'être. Pour le justifier, vous avancez la nécessité de lutter contre les mariages forcés. Vous avez ainsi égrené toute une liste d'entraves. Nous admettons tout à fait l'existence de mariages forcés ou des filières de complaisance. Mais ce n'est pas une raison pour jeter l'anathème sur l'ensemble des couples mixtes !

Monsieur le ministre, ce projet de loi ne participe pas d'une politique de l'immigration. Cet article 27 ne sert à rien. Comme toute la philosophie qui sous-tend ce texte, il s'agit seulement de vous permettre d'affirmer que vous avez une nouvelle fois durci la législation.

C'est la raison pour laquelle le groupe socialiste demandera la suppression de cet article.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

Je suis saisi de deux amendements identiques.

L'amendement n° 182 est présenté par M. Frimat, Mmes Alquier et M. André, MM. Assouline, Badinter, Bel et Bockel, Mmes Boumediene-Thiery et Cerisier-ben Guiga, M. Collombat, Mme Demontès, MM. Dreyfus-Schmidt et C. Gautier, Mmes Khiari et Le Texier, MM. Mahéas, Mermaz, Peyronnet et Sueur, Mme Tasca, M. Yung et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.

L'amendement n° 375 est présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, pour présenter l'amendement n° 182.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Monsieur le président, permettez-moi de faire une remarque préalable.

La déclaration enflammée de M. Vasselle de tout à l'heure comportait une conclusion qui m'est apparue quelque peu choquante. En fait, mon cher collègue, vous avez émis l'idée selon laquelle le ministre de l'intérieur pourrait envoyer une circulaire aux juges.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

C'est le garde des sceaux qui peut envoyer une circulaire aux parquets ; nous sommes bien d'accord ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Il était préférable de clarifier ce point. Le procès-verbal fera foi, mais j'avais cru vous entendre parler du ministère de l'intérieur.

J'en viens à présent à l'amendement n° 182.

Les conditions de délivrance de la carte de résident sont aujourd'hui définies par les articles L. 314-8 à L. 314-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

L'article L. 314-9 traite spécifiquement des cas de délivrance de la carte de résident à certaines catégories d'étrangers présents en France depuis une durée inférieure au délai de droit commun de cinq ans.

Or l'article 27 du présent projet de loi tend à modifier sensiblement ce dispositif.

D'une part, les étrangers entrant en France par la voie du regroupement familial, qu'il s'agisse de conjoints, d'enfants ou de parents de Français, devront justifier de trois années de présence régulière en France, et non plus seulement de deux.

D'autre part, les conjoints de Français relèveront désormais de l'article L. 314-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et non plus de l'article L. 314-11 pour l'accès à la carte de résident.

Il s'agit d'une modification très substantielle. En effet, ces personnes ne bénéficieront plus d'une carte de résident de plein droit après une certaine durée de séjour, mais elles devront faire une demande dans les conditions de droit commun. L'administration aura donc un pouvoir d'appréciation sur l'opportunité de délivrer cette carte, ce qui rendra très difficile la situation d'un certain nombre de couples mixtes.

Par ailleurs, la durée de vie commune nécessaire pour qu'un conjoint de Français puisse bénéficier de la carte de résident sera portée de deux ans à trois ans, par cohérence avec l'allongement équivalent de la durée nécessaire pour pouvoir demander la nationalité française dans le cadre du mariage.

Monsieur le ministre, selon nous, l'ensemble de ces dispositions sont contraires à la lettre et à l'esprit de l'article 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, qui pose le principe du droit à la vie familiale.

C'est pourquoi nous demandons la suppression de l'article 27.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat, pour présenter l'amendement n° 375.

Debut de section - PermalienPhoto de Josiane Mathon-Poinat

Cet article 27, qui décline l'article 5 du présent projet de loi, symbolise une fois de plus la suspicion généralisée et la précarisation de l'étranger dans notre pays, y compris s'il décide de fonder un foyer avec un homme ou une femme de nationalité française.

Comme l'indique M. le rapporteur, le prétexte de cette précarisation extrême est la « satisfaction de la condition d'intégration dans la société française ».

Comment cette satisfaction sera-t-elle évaluée en pratique ? Par l'allongement de deux ans à trois ans du délai pour l'obtention de la carte de résident du conjoint ou des enfants mineurs de l'étranger et même du conjoint étranger d'une Française ou d'un Français !

À quelques mois d'une échéance électorale, je ne cesse de m'étonner de ce nouveau durcissement d'une législation que M. Sarkozy avait lui-même ardemment préconisée et défendue en 2003.

Comment ne pas percevoir des raisons d'opportunité dans cette obsession du ministre de l'intérieur, du Gouvernement et de certains sénateurs siégeant sur ces travées à remettre sur le tapis la question de l'immigration et de la sécurité lorsque la marmite sociale bouillonne ?

En fait, quel bilan peut-on tirer de la réforme précédente ? Monsieur le ministre, pouvez-vous nous dire à quelle date les décrets d'application ont été rendus exécutoires ? À moins que cet article 27 ne soit purement idéologique !

C'est un rappel à la rigueur législative et républicaine qu'il faudrait plutôt formuler. La France doit donner une image d'elle-même autre que celle d'un pays apeuré, agressif et d'exclusion.

Vous venez d'adopter un amendement tendant à sanctionner l'outrage au drapeau tricolore. L'article 27 constitue un outrage à tout humanisme !

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

L'amendement n° 376, présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :

Supprimer le 2° de cet article.

La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat.

Debut de section - PermalienPhoto de Josiane Mathon-Poinat

Les dispositions que le 2°de l'article 27 tend à instituer sont motivées par les échéances électorales à venir. Je viens de le dire, mais je peux le répéter : c'est tellement vrai !

En fait, en évoquant le texte en vigueur, M. le rapporteur explique que : « Cette rédaction est issue de la loi du 26 novembre 2003. Auparavant, les regroupés bénéficiaient immédiatement d'un titre de même nature et de même durée que celui du regroupant. »

M. Buffet souligne ainsi - j'ignore s'il le fait volontairement ou non - le caractère particulièrement oppressant de la législation actuelle et la violence supplémentaire proposée par cet article, et tout particulièrement par son 2°.

Aussi, un étranger, conjoint ou enfant, qui doit déjà passer la barrière de l'accès au territoire national - ce n'est pas simple du tout et nous pouvons compter sur la vigilance obsessionnelle de l'actuel gouvernement -, devra patienter trois ans, et non plus deux ans, pour sortir de la précarité statutaire et obtenir une carte de résident.

L'enfant scolarisé sera-t-il maintenu dans cette précarité et les jeunes époux seront-ils également soumis à cette précarité au détriment de la sérénité nécessaire à l'épanouissement de leur vie familiale ou, plus simplement, de leur vie ?

La croissance depuis 2003 est-elle si importante qu'il faille véritablement durcir encore la législation ?

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

L'amendement n° 377, présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :

Supprimer le 4° de cet article.

La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat.

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

Je crains que l'on ne me prête des intentions que je n'ai pas.

S'agissant des amendements identiques n° 182 et 375, est-il utile de rappeler que l'allongement des délais contribue également à lutter contre les fraudes ? En outre, obtenir la carte de résident n'est pas un droit qui s'acquiert par simple capitalisation des années. Nous devons nous appuyer sur ces deux principes.

Par conséquent, la commission émet un avis défavorable sur ces amendements de suppression, ainsi que sur les amendements n° 376 et 377, qui sont des amendements de repli.

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre délégué

Monsieur Sueur, vous avez mentionné l'article 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Comme vous avez la réputation d'être un bon législateur, donc un bon juriste, je vous invite à lire la jurisprudence sur ce sujet.

Ainsi, aux termes de l'arrêt Abdulaziz, Cabales et Balkandali contre Royaume-Uni de la Cour européenne des droits de l'homme du 28 mai 1985, « l'article 8 ne saurait s'interpréter comme comportant pour un État contractant l'obligation générale de respecter le choix, par des couples mariés, de leur domicile commun et d'accepter l'installation de conjoints non nationaux dans le pays. »

Par ailleurs, je vous rappelle que les dispositions de l'article 27 ont été largement validées par l'assemblée générale du Conseil d'État.

Depuis le début de cette discussion, j'ai le sentiment d'assister à une tentative de manipulation des esprits sur certaines travées

Marques d'étonnement sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre délégué

, et vous en êtes l'un des principaux instigateurs, monsieur Sueur, même si vous le faites avec une certaine modération, sous des dehors généreux, solidaires.

Exclamations sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre délégué

À la demande de M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur, je suis venu vous présenter hier soir, par respect pour la Haute Assemblée, le contenu de la circulaire que M Sarkozy a signée hier et adressée ce matin à tous les préfets de France pour expliquer les dispositions devant être prises pour préserver la présence d'un certain nombre d'enfants d'origine étrangère scolarisés en France.

Dès cet instant, j'ai vu la mise en oeuvre d'une démarche coordonnée visant à dénaturer l'esprit et la lettre de cette circulaire. Je veux donc, dès ce soir, profiter de l'occasion que vous m'offrez de mettre un terme à toute tentative de manipulation.

J'ai lu ce matin, dans un organe de presse qui se disait autrefois très proche d'un parti implanté place du Colonel-Fabien, un article assez délirant - il est peut-être votre source d'inspiration -, qui me semble témoigner de cette tentative de manipulation.

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre délégué

Cet article était intitulé : « Faudra-t-il leur couper la langue pour qu'ils puissent rester ici ? ».

Lorsque le ministre d'État a défini les conditions dans lesquelles il convenait, par humanité, d'envisager la régularisation de certaines familles, il a évoqué la situation d'enfants arrivés en France en bas âge ou nés en France, qui ne connaissent que la France.

Je relis les propos qu'il a tenus ici même, au Sénat, le mardi 4 juin : « Lorsqu'un enfant étranger est né en France où qu'il y est arrivé en très bas âge, qu'il est scolarisé en France, qu'il ne parle pas la langue de son pays d'origine, ...

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre délégué

...qu'il n'a aucun lien avec ce pays, il serait très cruel de l'y reconduire de force ! Car ce pays d'origine, en réalité, n'est pas le sien. Les attaches de cet enfant sont en France et son départ serait vécu comme une véritable expatriation, un déracinement. »

Telles sont les propos qu'a tenus Nicolas Sarkozy. Voilà où se situe votre manipulation, monsieur Sueur ! Une manipulation d'extrême gauche voudrait nous faire croire aujourd'hui que l'on interdit aux enfants étrangers de parler la langue de leur pays d'origine. C'est tout simplement un procès stalinien

Exclamations sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre délégué

et je voulais ce soir, devant ceux qui en sont à l'origine, effectuer la mise au point nécessaire.

Applaudissements sur les travées de l'UMP.

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre délégué

D'ailleurs, les uns et les autres utilisent de façon répétée le même vocabulaire : « précarisation extrême », « obsession », « article purement idéologique ».

Vous vous en êtes pris, madame Cerisier-ben Guiga, à M. Alain Vasselle, ...

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre délégué

C'est vous qui, hier, soupçonniez la police nationale ou les pompiers de travailler au noir ! Tous les Français installés aux Etats-Unis seraient en situation clandestine. Et je pourrais ainsi faire référence à l'ensemble de vos interventions devant la Haute Assemblée...

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre délégué

...depuis quelques jours, et ce soir encore.

Quel crime y aurait-il à prévoir dans la loi que tous ceux qui portent atteinte au drapeau, à l'hymne national, aux symboles de la République, puissent être sanctionnés ?

Vous considériez hier - car ce sont vos propositions ! - que nous pouvions donner l'image d'un pays où l'irrégularité de tous ceux qui viennent en France sans en respecter les règles devrait être une référence dans le monde entier.

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre délégué

M. Christian Estrosi, ministre délégué. Quelle leçon êtes-vous en train de donner à tous ceux qui attendent que nous redonnions un peu de repères, un peu d'authenticité, un peu d'identité aux fondements de notre histoire, aux lois de la République et aux règles qui régissent les valeurs de la nation française ?

Bravo ! et applaudissementssur les travées de l'UMP.

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre délégué

Je tenais à faire cette mise au point au moment où le ministre d'État prépare un texte sur la prévention de la délinquance des mineurs. Il s'agit, notamment par une réforme de l'ordonnance de 1945, d'assurer l'égalité de tous les Français devant la loi : les crimes les plus odieux doivent être punis de la même manière, devant toutes les juridictions de France, quel que soit l'âge auquel ils ont été commis. Malheureusement, lors des violences urbaines du mois de novembre dernier, nous avons pu constater que les mineurs qui avaient commis des actes barbares étaient jugés de façon totalement différente selon les juridictions.

Je crois donc que le rappel qu'a effectué M. Vasselle tout à l'heure était tout à fait justifié et qu'il est légitime que nous fassions ces propositions. C'est l'expression de la démocratie ! C'est elle qui nous permet aujourd'hui de proposer un certain nombre de réformes. Que des sénateurs de la République se soient engagés dans cette voie et fassent des suggestions au Gouvernement me paraît parfaitement fondé.

Pour toutes ces raisons, bien évidemment, le Gouvernement est défavorable aux amendements identiques n°s 182 et 375, ainsi qu'aux amendements n°s 376 et 377.

Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, pour explication de vote, sur les amendements identiques n°s 182 et 375.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Il importe de ne pas entrer dans le procès instruit par M. le ministre.

Vous me dites, monsieur le ministre, que j'ai l'air généreux, mais qu'en réalité je fais de la manipulation. Je suis le représentant - c'est bien connu ! - de l'extrême gauche.

Rires

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre délégué

Je parlais de votre comportement, pas de vos discours !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Nous n'acceptons pas que vous profériez de telles accusations !

Je cherchais tout à l'heure le texte exact de la circulaire, mais les déclarations de M. le ministre d'État, dont vous venez de donner lecture, sont très claires : parmi les conditions posées à la régularisation des enfants de sans-papiers, il y a bien le fait, pour ceux-ci, de ne pas parler la langue de leur pays d'origine.

Cela signifie que l'un des critères pour bénéficier de cette circulaire est de ne parler que le français. Cela nous paraît extrêmement critiquable, car on ne peut tout de même pas reprocher à un enfant de parler la langue de ses parents ou de l'un de ses parents ! De nombreux enfants d'immigrés parlent à la fois le français et la langue de leur pays d'origine.

Il ne s'agit pas là d'une manipulation de notre part, monsieur le ministre : nous commentons simplement les propos de Nicolas Sarkozy, que vous venez de rapporter.

Nous assistons, en ce moment - nous en sommes tous témoins - à un mouvement de solidarité avec ces enfants. Et ce mouvement dépasse largement les frontières politiques : nous rencontrons tous des parents d'élèves qui ne comprennent vraiment pas pourquoi tel élève, qu'ils connaissent, devrait quitter notre pays.

Lorsque M. le ministre d'État décide de mettre en oeuvre, par circulaire, un dispositif en faveur de ces enfants, je trouve cela positif. Mais à la lecture de cette circulaire, je suis plus dubitatif ; je viens d'expliquer pourquoi. Quand j'entends que ce dispositif ne saurait concerner que huit cents enfants, je ne comprends plus du tout ! En effet, puisque l'on demande aux préfets de procéder à un examen au cas par cas de la situation de ces enfants, il n'est pas possible de dire combien d'entre eux seront concernés par ce dispositif avant que cet examen ait eu lieu !

Annoncer qu'une réponse sera apportée au problème et déclarer que celle-ci ne concernera que huit cents enfants, n'est-ce pas de la manipulation ?

Vous nous assénez des propos sur les sapeurs-pompiers et les policiers.

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre délégué

Ce n'est pas moi !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

J'ai un grand un respect pour les sapeurs-pompiers, avec qui je travaille dans mon département. J'ai également un grand respect pour les policiers. Je ne vois pas pourquoi on devrait suspecter tel ou tel groupe ; d'ailleurs, je n'en suspecte aucun.

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre délégué

Adressez-vous à Mme Cerisier-ben Guiga !

Debut de section - PermalienPhoto de Monique Cerisier-ben Guiga

Cessez, monsieur le ministre ! La calomnie a ses limites !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

On a le droit d'émettre des critiques, mais on doit respecter les sapeurs-pompiers et les policiers ! Tel est tout à fait notre état d'esprit.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Je termine, monsieur le président, mais M. le ministre s'est longuement exprimé, sur de nombreux sujets.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Je ne pensais pas devoir avoir la cruauté, mais je vais finir par l'avoir, de répéter ici les propos qu'a tenus M. Nicolas Sarkozy en 2003, lorsqu'il a présenté la loi relative à la maîtrise de l'immigration, au séjour des étrangers en France et à la nationalité. Il a dit, en substance : avec cette nouvelle loi, la question va enfin être résolue, alors qu'avant ce n'était pas le cas ; enfin, nous apportons les réponses ; il va y avoir des reconduites à la frontière ; on va réduire l'immigration clandestine, etc.

Or nous avons montré que, si l'on excepte le cas particulier de l'outre-mer, le nombre de reconduites à la frontière n'a pas augmenté sensiblement : le même décalage subsiste entre le nombre de personnes en situation irrégulière et celui des reconduites à la frontière. Pourtant, M. Nicolas Sarkozy est là depuis cinq ans !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

M. Jean-Pierre Sueur. C'est la fin de ma conclusion !

Rires

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Lorsque, à quelques mois d'une échéance électorale, on nous soumet un nouveau texte sur l'immigration, avec la volonté évidente que le débat politique s'organise autour de ce sujet, alors que ce n'est sans doute pas la meilleure façon de le faire avancer, n'est-ce pas, là aussi, une forme de manipulation ?

Que chacun dise ici ce qu'il a à dire, mais, moi, je n'accuse personne de manipulation ! J'ai trouvé, monsieur le ministre, que votre plaidoyer était très largement excessif.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

La parole est à Mme Monique Cerisier-ben Guiga, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Monique Cerisier-ben Guiga

Ayant enseigné les lettres françaises et la langue française pendant vingt-huit ans, j'ai appris à mes élèves à ne pas déformer les propos, à ne pas tirer d'un texte ce qui n'y figurait pas. Nous verrons donc, à la lecture du compte rendu de nos débats dans le Journal officiel, qui, ici, dit la vérité et qui déforme sciemment les propos d'autrui. Je n'en dirai pas plus sur ce sujet !

Pour en revenir à l'article 27, je tiens tout de même à souligner l'incohérence de l'obligation d'une communauté de vie continue depuis le mariage imposé aux familles binationales. En effet, depuis la mise en oeuvre du décret de mars 2005, un grand nombre de ces couples passent plusieurs mois sans pouvoir mener une vie commune et certains d'entre eux, d'après les magistrats qui traitent ces problèmes, passeront même plusieurs années dans cette situation. Notre État impose à ces couples, dont le mariage est - parfois à raison, mais aussi parfois à tort - suspecté, une condition qu'ils ne peuvent remplir.

Il n'est donc pas honnête, vis-à-vis des familles binationales qui se sont constituées à l'étranger, d'imposer comme condition la vie commune depuis la célébration du mariage pour l'obtention d'un droit au séjour en France.

Les amendements ne sont pas adoptés.

L'amendement n'est pas adopté.

L'amendement n'est pas adopté.

L'article 27 est adopté.

L'article L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est ainsi modifié :

1° Le 1° est abrogé ;

2° Dans le 2°, les mots : « a moins de vingt et un ans » sont remplacés par les mots : « est âgé de dix-huit à vingt et un ans ou dans les conditions prévues à l'article L. 311-3 », et sont ajoutés les mots : «, sous réserve qu'ils produisent un visa pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois » ;

3° Dans le 8°, les mots : « mineurs ou dans l'année qui suit leur dix-huitième anniversaire » sont remplacés par les mots : « dans l'année qui suit leur dix-huitième anniversaire ou entrant dans les prévisions de l'article L. 311-3 », et sont ajoutés les mots : « ainsi qu'à ses ascendants directs au premier degré si l'étranger qui a obtenu le statut de réfugié est un mineur non accompagné » ;

4° Dans le 9°, les mots : « mineurs ou dans l'année qui suit leur dix-huitième anniversaire » sont remplacés par les mots : « dans l'année qui suit leur dix-huitième anniversaire ou entrant dans les prévisions de l'article L. 311-3 » ;

5° Le 10° est abrogé.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

Je suis saisi de huit amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

Les deux premiers amendements sont identiques.

L'amendement n° 183 est présenté par M. Frimat, Mmes Alquier et M. André, MM. Assouline, Badinter, Bel et Bockel, Mmes Boumediene-Thiery et Cerisier-ben Guiga, M. Collombat, Mme Demontès, MM. Dreyfus-Schmidt et C. Gautier, Mmes Khiari et Le Texier, MM. Mahéas, Mermaz, Peyronnet et Sueur, Mme Tasca, M. Yung et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.

L'amendement n° 378 est présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Bariza Khiari, pour présenter l'amendement n° 183.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

L'article 28 tend à modifier les conditions de délivrance de plein droit de la carte de résident.

Tout d'abord, il réduit les catégories d'étrangers pouvant bénéficier d'une carte de plein droit afin d'obliger les personnes qui en relèvent à passer par le parcours d'intégration et afin de vérifier qu'elles satisfont à la condition d'intégration.

Ainsi, par coordination avec l'article 27, les conjoints de Français ne relèveront plus de l'article L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile - délivrance de plein droit de la carte de résident - par la suppression du 1° de cet article.

Il en sera de même, par l'abrogation du 10° de l'article L. 314-11, des étrangers en situation régulière depuis plus de dix ans.

Ensuite, le 2° de l'article 28 vise à modifier la procédure de délivrance de plein droit de la carte de résident aux enfants et parents étrangers de ressortissants français. En effet, l'article L. 314-11 permet d'accorder une carte de résident aux enfants de moins de vingt et un ans et aux ascendants à charge de ressortissants français. Ces derniers devront produire un visa de long séjour qu'ils ne pourront obtenir que dans leur pays d'origine.

Enfin, le 3° de l'article 28 vise à étendre au contraire les cas de délivrance de plein droit de la carte de résident aux ascendants directs d'un mineur non accompagné qui a obtenu le statut de réfugié. Ce cas très spécifique est en effet le seul où la législation française en matière de regroupement familial est moins favorable que la directive du 22 septembre 2003 relative au droit au regroupement familial.

Cette disposition permettra donc à la France d'achever la transposition de cette directive.

L'immigration dite « subie », les membres de la famille et même les conjoints sont, en l'espèce, particulièrement visés : le mouvement entrepris il y a plusieurs années et consistant à réduire les catégories d'étrangers pouvant obtenir de plein droit la carte de dix ans se poursuit avec ce projet. Outre les membres de la famille et les parents d'enfants français en 2003, il s'agit maintenant d'exclure du droit à bénéficier de ce titre stable les conjoints et ceux qui peuvent justifier de dix ans de situation régulière, sauf si, pendant cette période, ils ont été en possession d'une carte de séjour portant la mention « étudiant ».

Le projet de loi construit ainsi, monsieur le ministre, des précarités perpétuelles.

Toutes ces raisons conduisent le groupe socialiste à demander la suppression de cet article.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

La parole est à M. Thierry Foucaud, pour présenter l'amendement n° 378.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

L'article 28 tend à réduire les possibilités de délivrance de plein droit de la carte de résident de façon inacceptable.

La carte de résident est non seulement la plus stable qui soit, mais c'est aussi elle qui garantit une véritable intégration de l'étranger dans notre société.

Vouloir en restreindre l'accès apparaît donc comme un non-sens de ce point de vue, surtout lorsque l'on met en avant, comme le fait le Gouvernement, cette notion d'intégration, de la même manière qu'il est aberrant de conditionner l'obtention de cette carte à l'intégration républicaine. C'est un raisonnement par l'absurde, puisque la carte de résident permet d'assurer cette intégration.

Les conjoints de Français sont les premiers pénalisés par cette réforme. En effet, le 1° de l'article 28 vise à leur supprimer la délivrance de plein droit de la carte de résident. Désormais, ils seront soumis au 3° de l'article L. 314-9 qui ne prévoit qu'une simple faculté de délivrance. Le préfet aurait donc la possibilité de la leur délivrer si certaines conditions sont remplies, mais n'en aurait plus l'obligation.

Ainsi que notre groupe l'a répété, nous ne pouvons cautionner l'attitude réactionnaire du Gouvernement à l'encontre des mariages mixtes.

Je ne reviendrai pas non plus sur le fait qu'il semble complètement absurde de demander à l'enfant étranger d'un ressortissant de nationalité française qui a moins de vingt et un ans ou qui est à la charge de ses parents de produire un visa de long séjour s'il veut obtenir une carte de résident. Quel est l'intérêt de lui demander de retourner dans son pays s'il a déjà passé plusieurs années en France ?

Enfin, la délivrance de la carte de résident aux étrangers résidant régulièrement en France depuis plus de dix ans est purement et simplement supprimée. Je n'y reviens non plus, nous en avons déjà parlé.

À tous les points de vue, cet article rend lui aussi pratiquement impossible la vie de famille, que ce soit pour les étrangers ou pour les familles franco-étrangères.

Dans ces conditions, la suppression de l'article 28 nous semble pleinement justifiée.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

L'amendement n° 184, présenté par M. Frimat, Mmes Alquier et M. André, MM. Assouline, Badinter, Bel et Bockel, Mmes Boumediene-Thiery et Cerisier-ben Guiga, M. Collombat, Mme Demontès, MM. Dreyfus-Schmidt et C. Gautier, Mmes Khiari et Le Texier, MM. Mahéas, Mermaz, Peyronnet et Sueur, Mme Tasca, M. Yung et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Supprimer le 1° de cet article.

La parole est à Mme Bariza Khiari.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

L'amendement n° 185, présenté par M. Frimat, Mmes Alquier et M. André, MM. Assouline, Badinter, Bel et Bockel, Mmes Boumediene-Thiery et Cerisier-ben Guiga, M. Collombat, Mme Demontès, MM. Dreyfus-Schmidt et C. Gautier, Mmes Khiari et Le Texier, MM. Mahéas, Mermaz, Peyronnet et Sueur, Mme Tasca, M. Yung et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Supprimer le 2° de cet article.

La parole est à Mme Bariza Khiari.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

L'amendement n° 379, présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :

Après le troisième alinéa () de cet article, insérer un alinéa ainsi rédigé :

...° Il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« ... °Au mineur étranger recueilli régulièrement en vertu d'une décision de kafala judiciaire par un ressortissant de nationalité française et à la charge de ce dernier » ;

La parole est à M. Thierry Foucaud.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La loi du 6 février 2001 dispose : « L'adoption d'un mineur étranger ne peut être prononcée si sa loi personnelle prohibe cette institution, sauf si ce mineur est né et réside habituellement en France ».

Par conséquent, les enfants nés dans les pays de droit coranique ne peuvent être adoptés par des candidats de nationalité française. Or ces enfants sont d'ores et déjà accueillis par des couples français dans le cadre d'une kafalajudiciaire, qui est « le recueil légal des enfants abandonnés ou dont les parents s'avèrent incapables d'assurer l'éducation ».

Avant l'introduction de cette disposition dans l'article 370-3 du code civil, le juge appréciait au cas par cas la situation des enfants et prononçait le plus souvent une adoption, qu'elle soit simple ou plénière.

Depuis 2001, la France s'interdit d'accepter ces enfants sur son territoire dans le cadre de la procédure d'adoption.

Dans son rapport annuel pour 2004, la Défenseure des enfants, Mme Claire Brisset, dénonce cet état de fait : « Il s'agit d'un véritable recul dans la prise en compte de l'intérêt de ces enfants, pour lesquels la jurisprudence antérieure de la Cour de cassation ouvrait cette possibilité. » Elle ajoute, sur ce sujet, d'autres éléments qui vont dans le même sens.

Par ailleurs, les pratiques en matière de délivrance des visas d'entrée et des autorisations de séjour sont très diverses pour les enfants recueillis régulièrement en kafalajudiciaire par nos concitoyens.

Saisi à plusieurs reprises de recours contre des décisions de refus d'autorisation d'entrer en France demandée pour des enfants recueillis en kafala dans le cadre de la procédure du regroupement familial, le Conseil d'État a annulé ces refus en rappelant, conformément aux principes de la Convention internationale des droits de l'enfant et de la Convention européenne des droits de l'homme, ceci : « Si les dispositions combinées de l'article 15 et de l'article 29 de l'ordonnance n°45-2658 du 2 novembre 1945 prévoient que l'enfant pouvant bénéficier du regroupement familial est l'enfant légitime ou naturel ayant une filiation légalement établie ainsi que l'enfant adopté, il appartient à l'autorité administrative de s'assurer, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, qu'une décision refusant le bénéfice du regroupement familial demandé pour une enfant n'appartenant pas à l'une des catégories mentionnées ne porte pas une atteinte excessive aux droits des intéressés au respect de leur vie privée et familiale et ne méconnaît pas les stipulations de l'article 3-1 de la Convention relative aux droits de l'enfant du 26 janvier 1990, selon lesquelles dans toutes les décisions qui concernent les enfants, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale . »

De plus, la loi du 26 novembre 2003 a mis en place une « période de stage » de cinq ans avant que puisse être déposée une demande de nationalité française, pour l'enfant recueilli et élevé par une personne de nationalité française, et de trois ans pour un enfant qui a été confié à l'aide sociale à l'enfance.

Avant l'adoption de ces dispositions, la possibilité de réclamer la nationalité française était donnée à ces enfants, dès lors qu'ils résidaient sur le sol français, et elle n'était assortie d'aucune condition de durée.

En raison de l'ensemble de ces dispositions, les familles françaises ayant accueilli des enfants en kafala judiciaire et, au premier chef, les enfants subissent une discrimination intolérable.

Or la kafala judiciaire, reconnue par les conventions internationales, est considérée par les autorités des pays d'origine et des pays d'accueil, y compris par des représentants de la France au Maroc et en Algérie, comme une procédure « structurée, encadrée et sécurisée ».

Enfin, nous tenons à souligner qu'en Europe la France fait figure d'exception dans ce domaine.

Les principaux pays européens ont en effet voulu et su régler les différents aspects du recueil d'enfants en kafala par leurs citoyens.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Monsieur le président, je ne me suis guère exprimé ce soir, et le sujet est important.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

Mon cher collègue, je comprends votre souci, mais vous devez respecter les temps de parole qui ont été fixés.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

J'ajoute seulement que tel est le cas de l'Espagne, de la Suisse et, tout récemment, de la Belgique qui, par une loi en date du 6 décembre 2005, vient de modifier son code civil pour permettre l'entrée sur le territoire belge et l'adoption d'enfants « dont l'État d'origine ne connaît ni l'adoption ni le placement en vu d'adoption ».

La situation actuelle fait de ces enfants qui ne sont pas adoptables, tout en étant abandonnés, des enfants au « milieu du gué », pour reprendre une expression utilisée en 1996 par le professeur Jean-François Mattei dans le rapport qu'il a établi au nom de la commission spéciale de l'Assemblée nationale.

L'objet de cet amendement est donc de mettre fin à cette discrimination et de permettre à l'enfant recueilli en kafala judiciaire par une personne de nationalité française de bénéficier de la délivrance de plein droit de la carte de résident.

Ainsi, si notre amendement était adopté, ce que nous espérons, il s'inscrirait dans les dispositions prévues par l'article L. 211-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui prévoit notamment la délivrance des titres de séjour pour l'adoption et le regroupement familial.

Je vous remercie, monsieur le président de m'avoir laissé parler une minute de plus.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

C'était plus d'une minute, mon cher collègue ! Vous ne pouvez pas, sur chaque article ou chaque amendement, dépasser systématiquement les cinq minutes de temps de parole. Le règlement intérieur, qui est la base du travail parlementaire, s'applique à tout le monde et je demande à chacun de le respecter.

Je suis saisi de deux amendements identiques.

L'amendement n° 186 est présenté par M. Frimat, Mmes Alquier et M. André, MM. Assouline, Badinter, Bel et Bockel, Mmes Boumediene-Thiery et Cerisier-ben Guiga, M. Collombat, Mme Demontès, MM. Dreyfus-Schmidt et C. Gautier, Mmes Khiari et Le Texier, MM. Mahéas, Mermaz, Peyronnet et Sueur, Mme Tasca, M. Yung et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.

L'amendement n° 246 rectifié est présenté par MM. Delfau, Baylet, A. Boyer, Collin et Fortassin.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Supprimer le 5° de cet article.

La parole est à Mme Bariza Khiari, pour présenter l'amendement n° 186.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

Je considère que cet amendement est défendu.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

L'amendement n° 246 rectifié n'est pas soutenu.

L'amendement n° 380, présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi le 5° de cet article :

5° Le 10° est ainsi rédigé :

« 10º A l'étranger qui est en situation régulière depuis plus de dix ans ou qui a travaillé régulièrement en France pendant plus de cent vingt mois cumulés sauf s'il a été, pendant toute cette période, titulaire d'une carte de séjour temporaire portant la mention « étudiant ». »

La parole est à M. Thierry Foucaud.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

S'il est exact qu'aux termes de la jurisprudence du Conseil d'État le caractère discontinu du séjour régulier d'un étranger ayant passé plus de dix ans en France s'oppose à ce qu'on lui reconnaisse le bénéfice d'une situation régulière depuis plus de dix ans, cette interprétation a toutefois été retenue dans le cas d'étrangers dont le séjour régulier avait été interrompu à la suite de circonstances ne pouvant être imputées en aucune façon à la responsabilité de l'administration préfectorale.

De même, cette interprétation a été admise dans le cas de travailleurs saisonniers, dont le caractère occasionnel du travail et du séjour n'avait pas été remis en question. Rien n'interdit en effet, dans la rédaction de l'article L. 314-11 du CESEDA, de prendre en compte la totalité des périodes de séjour régulier d'un travailleur migrant permanent, en partant du principe que, dans le cas d'un travailleur qui effectue des « saisons » de huit mois, le caractère discontinu du séjour est factice et que l'interruption de celui-ci est purement artificielle.

Cette interprétation serait du reste parfaitement conforme à la volonté du législateur au moment du vote à l'Assemblée nationale des dispositions relatives à la carte de résident de dix ans. En effet, l'origine de cet article remonte à la loi 81-973 du 29 octobre 1981 relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France, qui définissait des catégories d'étrangers non expulsables, parmi lesquels figuraient les titulaires d'une rente d'accident du travail et les personnes ayant leur résidence habituelle en France depuis plus de quinze ans.

La loi 84-622 du 17 juillet 1984 attribuait de plein droit une carte de résident à ces mêmes étrangers.

Enfin, la loi 86-1025 du 9 septembre 1986 a ajouté le critère de la résidence régulière depuis plus de dix ans.

Si l'on examine les débats parlementaires relatifs à ces diverses modifications de la législation sur les étrangers, on constate une rare unanimité sur la nécessité de protéger les travailleurs migrants qui, eux aussi, ont contribué à créer les richesses de notre pays.

J'aurais pu citer les propos tenus à l'époque par Charles Ledermann, au Sénat, et Roger Rouquette, à l'Assemblée nationale.

En outre, le droit externe reprend à son compte cette volonté des législateurs de protéger les travailleurs migrants en fonction de la pérennité de leur emploi et impose la délivrance d'un titre de séjour dans des cas similaires à celui d'un travailleur saisonnier habituel.

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

La commission est défavorable aux amendements de suppression n° 183, 378, 184 et 185.

S'agissant de l'amendement n° 379, la commission a émis un avis défavorable, à la suite des explications qui ont été fournies hier sur ce sujet.

La commission est également défavorable aux amendements n° 186 et 380.

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre délégué

Même avis.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

La parole est à Mme Monique Cerisier-ben Guiga, pour explication de vote sur les amendements identiques n°s 183 et 378.

Debut de section - PermalienPhoto de Monique Cerisier-ben Guiga

J'évoquerai une seule des raisons pour lesquelles nous souhaitons la suppression de l'article 28.

Cet article tend à supprimer le dixième alinéa de l'article L. 314-11 du CESEDA, aux termes duquel un étranger présent en France depuis dix ans et en situation régulière bénéficie de plein droit d'une carte de résident.

Dix ans, c'est beaucoup dans une vie ! Quand un étranger a passé dix ans en France, sans avoir causé de trouble à l'ordre public et sans que l'on puisse lui reprocher quoi que ce soit, on peut tout de même avoir l'élégance, la générosité, l'ouverture d'esprit et de coeur de lui donner une carte de résident de plein droit. Cette mesquinerie, cette fermeture, même dans un cas comme celui-là, sont vraiment insupportables.

Cet article, qui tend à supprimer la possibilité, pour quelqu'un qui travaille, qui vit et qui paie ses impôts en France depuis dix ans, d'obtenir de plein droit une carte de résident, est l'un des pires de ce projet de loi.

Les amendements ne sont pas adoptés.

L'amendement n'est pas adopté.

L'amendement n'est pas adopté.

L'amendement n'est pas adopté.

L'amendement n'est pas adopté.

L'amendement n'est pas adopté.

L'article 28 est adopté.

I. - Le premier alinéa de l'article L. 316-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est ainsi modifié :

1° Dans la première phrase, les mots : « une autorisation provisoire de séjour » sont remplacés par les mots : « une carte de séjour temporaire portant la mention «vie privée et familiale» », et, dans la dernière phrase, les mots : « Cette autorisation provisoire de séjour » sont remplacés par les mots : « Cette carte de séjour temporaire » ;

2° Après la première phrase, il est inséré une phrase ainsi rédigée :

« La condition prévue à l'article L. 311-7 n'est pas exigée. »

II. - La dernière phrase de l'article L. 316-2 du même code est ainsi rédigée :

« Il détermine notamment les conditions de la délivrance, du renouvellement et du retrait de la carte de séjour temporaire mentionnée au premier alinéa de cet article et les modalités de protection, d'accueil et d'hébergement de l'étranger auquel cette carte est accordée. »

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 381, présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

I. L'article L. 316-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est ainsi modifié :

1° Avant le premier alinéa, il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« L'étranger, pour lequel il existe des motifs raisonnables de croire qu'il est victime des infractions visées aux articles 225-4-1 à 225-4-6 et 225-5 à 225-10 du code pénal, bénéficie, s'il le souhaite, d'un délai de réflexion de trois mois pendant lequel il est autorisé à séjourner sur le territoire, afin de lui permettre de se rétablir, de se soustraire à l'influence des auteurs des infractions et de décider en connaissance de cause de coopérer ou non avec les autorités compétentes. » ;

2° Le premier alinéa est remplacé par une phrase ainsi rédigée : « Sauf si sa présence constitue une menace à l'ordre public, une carte de séjour temporaire portant la mention « vie privée et familiale » est délivrée à l'étranger qui coopère avec les autorités publiques concernant les infractions visées aux articles 225-4-1 à 225-4-6 et 225-5 à 225-10 du code pénal commises à son encontre. » ;

3° Dans la seconde phrase du premier alinéa, les mots : « Cette autorisation provisoire de séjour » sont remplacés par les mots : « Cette carte de séjour temporaire » ;

4° Il est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« La condition prévue à l'article L. 311-7 n'est pas exigée. ».

II. La dernière phrase de l'article L. 316-2 du même code est ainsi rédigée : « Il détermine d'une part les conditions de délivrance, renouvellement et retrait de l'autorisation à séjourner prévue pour le délai de réflexion et de la carte de séjour précitée, d'autre part les modalités de protection, d'accueil et d'hébergement de l'étranger auquel ce délai ou cette carte sont accordés. »

La parole est à Mme Éliane Assassi.

Debut de section - PermalienPhoto de Éliane Assassi

Selon l'exposé des motifs du projet de loi, l'article 29 vise à transposer la directive 2004/81/CE de l'Union européenne du 29 avril 2004 prévoyant la délivrance d'un titre de séjour aux ressortissants des pays tiers victimes d'atteintes à la dignité humaine qui témoignent ou portent plainte. Désormais, ces personnes se verront remettre non plus une autorisation provisoire de séjour, mais une carte de séjour temporaire.

Si l'on peut se féliciter d'une telle amélioration du statut offert aux victimes acceptant de participer aux procédures engagées pour faire cesser les atteintes en question, il convient toutefois de rappeler que celles-ci ne bénéficieront pas du délai de réflexion nécessaire leur permettant de mesurer la réelle portée de leur engagement à collaborer. En effet, elles peuvent légitimement craindre des représailles contre elles-mêmes ou leurs proches en cas de collaboration à l'identification des auteurs des violations dont elles ont été victimes et refuser alors toute participation à la manifestation de la vérité.

L'instauration d'un délai de réflexion leur permettrait de s'engager ou non, de façon éclairée, dans une coopération. C'est d'ailleurs ce que prévoit la directive européenne arrivant à échéance le 6 août 2006, qui instaure un tel délai afin de les aider à décider en connaissance de cause si elles entendent ou non coopérer avec les autorités policières, répressives et judiciaires - compte tenu des risques encourus - afin qu'elles coopèrent librement et donc plus efficacement.

En outre, la convention sur la lutte contre la traite des êtres humains adoptée par le Conseil de l'Europe réaffirme la nécessité d'offrir un délai de réflexion « lorsqu'il existe des motifs raisonnables de croire que la personne concernée est une victime ». Cette convention précise que « ce délai doit être d'une durée suffisante pour que la personne concernée puisse se rétablir et échapper à l'influence des trafiquants et/ou prenne, en connaissance de cause, une décision quant à sa coopération avec les autorités compétentes. Pendant ce délai, aucune mesure d'éloignement ne peut être exécutée à son égard. [...] Pendant ce délai, les parties autorisent le séjour de la personne concernée sur leur territoire ». Cette convention n'a cependant pas encore été signée par la France.

L'adoption de notre amendement serait le moyen de reconnaître la situation de ces personnes, qui sont avant tout des victimes.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

L'amendement n° 187, présenté par M. Frimat, Mmes Alquier et M. André, MM. Assouline, Badinter, Bel et Bockel, Mmes Boumediene-Thiery et Cerisier-ben Guiga, M. Collombat, Mme Demontès, MM. Dreyfus-Schmidt et C. Gautier, Mmes Khiari et Le Texier, MM. Mahéas, Mermaz, Peyronnet et Sueur, Mme Tasca, M. Yung et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Après le 1° du I de cet article, insérer un alinéa ainsi rédigé :

... ° Dans le dernier alinéa, les mots : « peut être » son remplacés par le mot : « est »

La parole est à M. Pierre-Yves Collombat.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Yves Collombat

La loi du 18 mars 2003 pour la sécurité intérieure a institué une procédure spécifique de délivrance d'une autorisation provisoire de séjour pour l'étranger qui porte plainte ou témoigne contre une personne qu'il accuse d'avoir commis à son encontre les infractions de traite des êtres humains et de proxénétisme, sous réserve que sa présence sur le territoire français ne constitue pas une menace à l'ordre public. Ces dispositions sont aujourd'hui codifiées.

L'article 29 prévoit la possibilité d'accorder aux personnes qui acceptent de collaborer avec la justice pour lutter contre le proxénétisme et la traite des êtres humains une carte de séjour portant la mention « vie privée et familiale ».

Nous proposons que cette carte soit de droit. Il est indispensable, en effet, de garantir à ces personnes vulnérables une réelle protection à l'issue du dépôt de la plainte ou du témoignage. Ce serait une manière efficace de lutter contre les réseaux de traite des êtres humains, qui sont l'une des plaies de notre vie moderne.

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

Il convient de tenir compte des situations évoquées dans l'amendement n° 381. Mais il faut aussi éviter de créer des conditions trop larges d'obtention de la carte de séjour temporaire, afin d'éviter d'éventuels détournements de procédure. C'est la raison pour laquelle la commission a émis un avis défavorable.

S'agissant de l'amendement n° 187, la délivrance d'une carte de séjour à une personne témoignant dans des affaires de proxénétisme et de traite des êtres humains doit relever de l'appréciation de l'autorité administrative. En effet, l'expérience a montré qu'il existait des risques de détournement de procédure : certains témoignages pourraient être faits dans le seul but d'obtenir un titre de séjour. L'avis de la commission est donc défavorable.

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre délégué

Madame Assasi, je comprends la démarche qui sous-tend votre amendement n° 381, mais le délai de réflexion de trois mois que vous proposez me semble un peu long. Nous envisageons, pour notre part, de retenir le délai d'un mois ; il sera fixé par le décret d'application prévu au II de l'article 29.

Cette disposition n'étant pas en contradiction avec votre démarche, je vous demande de bien vouloir retirer votre amendement.

Monsieur Collombat, nous sommes très attachés aux dispositions de la loi pour la sécurité intérieure du 18 mars 2003. Je sais que Jean-Patrick Courtois, qui était le rapporteur de ce texte au Sénat, partage mon sentiment ; j'en étais pour ma part le rapporteur à l'Assemblée nationale.

Notre objectif était d'engager une démarche à l'encontre non pas des prostituées elles-mêmes, mais plutôt des proxénètes, ainsi que des responsables des filières de prostitution et de traite des êtres humains. En accord avec le ministre de l'intérieur, nous avions donc proposé que toutes celles et tous ceux qui contribueraient à apporter à l'administration ou à la justice des éléments nous permettant de démanteler ces filières et ces réseaux puissent bénéficier de dispositions visant à les protéger, comme la délivrance d'une autorisation de séjour, de courte durée dans un premier temps, puis de plus longue durée, ainsi que de mesures sociales, voire d'une autorisation de travail sur le sol français.

Les dispositions prises de manière déterminée dans la loi du 18 mars 2003 me semblent donc avoir eu un effet déterminant.

Dans cet article 29, le ministre de l'intérieur propose de renforcer cette dimension en allant encore plus loin. D'ailleurs, monsieur Collombat, je ne vous cache pas que j'ai d'abord été tenté d'être favorable à votre amendement. La seule raison qui me conduit à ne pas l'être tient au fait que je considère malgré tout nécessaire que l'administration comme l'autorité compétente gardent leur marge d'appréciation, ce qui ne serait pas le cas si les mots « peut être » étaient remplacés par le mot « est ».

À titre d'exemple, cela pourrait conduire à accorder la carte de séjour y compris à des personnes qui, pour profiter de la situation, feraient des dénonciations calomnieuses.

Par prudence donc, et sachant que le présent projet de loi va encore plus loin que les dispositions de la loi de 2003 et qu'il constitue une grande avancée pour protéger toutes celles et tous ceux qui sont, hélas ! victimes des filières d'immigration clandestine ou des proxénètes, j'émets donc un avis défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Yves Collombat

Monsieur le ministre, la meilleure façon de faire cesser la tentation est d'y succomber...

Dans le cas d'espèce, il me semble que c'est en envoyant un signal fort à ces filières que l'on aura le plus de chance de les démanteler. Il faut donc commencer par faire savoir à ceux qui prendront le risque de les dénoncer que l'on s'occupera d'eux. Ensuite, si d'aventure une dénonciation se révélait calomnieuse, les circonstances qui avaient justifié la délivrance de la carte disparaissant, cette dernière serait retirée à son bénéficiaire.

La crainte d'encourager la création de filières, comme pour les mariages blancs, me paraît donc excessive. C'est peut-être passer à côté d'un moyen pour porter le fer là où est le mal.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

La parole est à Mme Éliane Assassi, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Éliane Assassi

Si je vous ai bien compris, monsieur le ministre, le décret accordera aux victimes un délai d'un mois.

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre délégué

Tout à fait !

Debut de section - PermalienPhoto de Éliane Assassi

C'est une petite avancée, mais une avancée tout de même, et je retire donc mon amendement.

L'amendement n'est pas adopté.

L'article 29 est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

L'amendement n° 382, présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :

Après l'article 29, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

La carte de séjour temporaire prévue à l'article 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile peut être délivrée pour un an à l'étranger qui justifie d'une démarche de réinsertion, attestée notamment par la participation à un programme de réinsertion, en accord avec les personnes concernées, organisé par les services de l'État ou par une association figurant sur une liste établie chaque année par arrêté préfectoral dans le département concerné, et qui se propose, par son statut, d'aider les victimes.

Cette carte donne droit à l'exercice d'une activité professionnelle. Elle est renouvelable à deux reprises dans les mêmes conditions et pour la même durée.

À l'expiration de ce délai, la carte de séjour temporaire peut être renouvelée si l'étranger apporte la preuve qu'il peut vivre de ses ressources propres.

Un décret en Conseil d'État précise les conditions d'application du présent article.

La parole est à Mme Éliane Assassi.

Debut de section - PermalienPhoto de Éliane Assassi

Pour ne prendre que l'exemple de Paris, 70 % des personnes prostituées d'origine étrangère, venant des pays de l'Est ou d'Afrique, seraient victimes de réseaux mafieux.

Soumises à des violences terribles de la part de leurs exploiteurs, elles sont privées de tout droit et de toute dignité, car nous savons bien que la prostitution est synonyme de violences et d'humiliation et qu'elle s'inscrit toujours dans un rapport de domination.

Il s'agit donc d'aider ces personnes à recouvrer leur dignité et, pour cela, de les considérer comme des victimes, avec toutes les conséquences que ce statut induit.

Or, en s'en prenant aux personnes prostituées pour atteindre leur proxénète, la loi du 18 mars 2003 pour la sécurité intérieure a favorisé les reconduites à la frontière des personnes prostituées étrangères.

Ces reconduites à la frontière, opérées sans que rien ne garantisse que les personnes concernées ne courent aucun danger, sont inacceptables. C'est pourquoi nous proposons qu'une personne prostituée étrangère ait droit à la délivrance d'un titre de séjour temporaire dès lors qu'elle entame une démarche de réinsertion, et cela qu'elle ait ou non dénoncé ses exploiteurs.

Il nous semble en effet exclu et contraire aux libertés fondamentales de conditionner cette protection à une collaboration avec la justice dans la lutte contre les proxénètes. Ce serait la première fois dans notre droit qu'une liberté essentielle de l'individu - en l'occurrence sa sécurité - serait conditionnée.

De plus, ces victimes, qui ont subi des menaces et des violences terribles, sont généralement dans un état psychologique très fragile. Elles ont peur de dénoncer, d'autant qu'elles n'ont souvent pas confiance dans les services de police. Le titre de séjour temporaire, renouvelable, doit être assorti d'une autorisation de travail, afin qu'elles soient en mesure de « s'en sortir ». À l'issue de la période de validité de ce titre, on retomberait dans le « droit commun » des titres de séjours provisoires, avec la nécessité de prouver des ressources suffisantes.

Ainsi, les services de l'État ou des associations agréées prendraient ces personnes en charge et leur proposeraient un accompagnement jusqu'à ce que les conditions soient réunies pour qu'elles puissent éventuellement retourner dans leur pays d'origine, si elles le souhaitent et si elles sont en mesure de le faire.

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

Une fois de plus, les intentions sont généreuses. Néanmoins, la commission estime que les conditions d'obtention du titre de séjour sont beaucoup trop larges et, faute de précision, elle émet un avis défavorable.

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre délégué

Madame Assassi, vous abordez des sujets auxquels je suis sensible et je comprends votre démarche, mais elle remettrait en cause les avancées importantes que nous avons obtenues en termes de résultat grâce à la loi de 2003.

C'est en effet en contrepartie du dépôt d'une plainte et des indications qu'elles peuvent nous donner que nous accordons aux victimes du proxénétisme ou de la traite des êtres humains notre protection et une autorisation de séjour ; nous allons même jusqu'à les placer dans un dispositif social, parfois accompagné de mesures d'éloignement, qui les met à l'abri de toute menace et qui leur permet ensuite une réelle réinsertion.

La référence à une démarche de réinsertion constitue évidemment une proposition intéressante. Mais, si j'acceptais de retenir votre amendement, ce serait un retour en arrière : j'affaiblirais la démarche que nous avons adoptée en mars 2003, puisque la condition relative à la dénonciation du proxénète disparaîtrait.

Or c'est bien cette contrepartie qui nous a permis, depuis 2003, en délivrant 1 039 autorisations provisoires de séjour dans le cadre de ce dispositif, de mettre 880 proxénètes ou responsables de filières de traite d'êtres humains, dont 596 hommes et 284 femmes, hors d'état de nuire, non seulement en France mais aussi à l'étranger, car nous avons passé des accords avec les pays depuis lesquels bon nombre de ces dangereux individus opèrent et organisent les filières.

C'est donc grâce aux indications qui nous ont été fournies dans ce cadre ainsi qu'aux partenariats passés entre la France et les pays d'origine que nous sommes parvenus à démanteler des réseaux.

Aussi, je le répète, même si votre proposition relative à la démarche de réinsertion est intéressante, je ne peux qu'y être défavorable puisque, en supprimant la contrepartie, elle affaiblirait les dispositions que nous avons prises en mars 2003.

L'amendement n'est pas adopté.

Dans l'article L. 321-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, les mots : « appartenant aux catégories mentionnées à l'article L. 313-11, au 1° de l'article L. 314-9 et aux 8°, 9° et 10° de l'article L. 314-11 » sont remplacés par les mots : « dont au moins l'un des parents appartient aux catégories mentionnées à l'article L. 313-11, au 1° de l'article L. 314-9, aux 8° et 9° de l'article L. 314-11, à l'article L. 315-1 ou qui relèvent, en dehors de la condition de majorité, des prévisions du 2° de l'article L. 313-11 ».

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

L'amendement n° 41, présenté par M. Buffet, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Dans cet article après les mots :

des prévisions du 2°

insérer les mots :

et du 2°bis

La parole est à M. le rapporteur.

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre délégué

Favorable.

L'amendement est adopté.

L'article 29 bis est adopté.

L'article L. 622-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Les exceptions prévues aux 1° et 2° du présent article ne s'appliquent pas lorsque l'étranger bénéficiaire de l'aide au séjour irrégulier vit en état de polygamie ou lorsque cet étranger est le conjoint d'une personne polygame résidant en France avec le premier conjoint. »

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

L'amendement n° 383, présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat.

Debut de section - PermalienPhoto de Josiane Mathon-Poinat

En novembre, lors des violences qui ont eu lieu dans certaines villes, le ministre de l'intérieur expliquait dans L'Express, à propos des responsables de ces violences : « Ils sont tout à fait français juridiquement. Mais disons les choses comme elles sont : la polygamie et l'acculturation d'un certain nombre de familles font qu'il est plus difficile d'intégrer un jeune Français originaire d'Afrique noire qu'un jeune Français d'une autre origine. »

Ces mots sont terribles, parce ce que ce sont des mots qui méprisent, qui divisent ; ce sont des mots dangereux. Ils traduisent la recherche constante de boucs émissaires et, parmi eux, les familles polygames, brandies comme une menace dès qu'on parle d'immigration, parce qu'on tente de faire croire qu'elles seraient présentes en France en très grand nombre.

Or, d'après la Commission nationale consultative des droits de l'homme, les situations de polygamie concernent environ 180 000 personnes, ...

Debut de section - PermalienPhoto de Josiane Mathon-Poinat

...adultes et enfants compris, ce qui représente moins de 0, 3 % de la population française. Comment d'ailleurs pourrait-il y avoir afflux ou raz-de-marée puisque la polygamie est, tout simplement, interdite en France ?

La première loi qui a interdit la délivrance d'une carte de résident aux étrangers vivant en état de polygamie est la loi Pasqua du 24 novembre 1993, qui a d'ailleurs été confirmée depuis et même renforcée par la loi du 26 novembre 2003.

Il faut faire attention : accorder une importance disproportionnée à un phénomène statistiquement marginal alimente l'idée que, décidément, les immigrés ne sont pas intégrables. Ce sont d'ailleurs à peu près les propos du ministre de l'intérieur.

La réalité, c'est qu'on brandit la polygamie pour faire accepter des mesures toujours plus sévères, plus répressives, plus restrictives.

Nous sommes évidemment opposés à la polygamie : il faut la combattre. Elle est contraire à notre conception des droits des femmes, de leur dignité, de leur égalité avec les hommes, et c'est au titre de cette égalité que l'on ne doit pas pénaliser encore plus les épouses concernées et leurs enfants.

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

L'article 29 ter retire l'immunité dont bénéficient les membres de la famille d'un étranger en situation irrégulière qui commettent le délit d'aide au séjour et à l'entrée irrégulière en France lorsque cet étranger vit en état de polygamie.

Je rappelle que cet article, dont l'objectif est bien évidemment de lutter contre la polygamie, a été voté à l'unanimité à l'Assemblée nationale.

Par conséquent, la commission émet un avis défavorable.

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre délégué

Comme l'a rappelé le rapporteur, l'amendement de Mmes Brunel et Morano qui a conduit à l'introduction de cet article additionnel dans le projet de loi a été voté à l'unanimité par l'Assemblée nationale.

La suppression de l'immunité lorsque le séjour clandestin en cause est celui d'un polygame est de surcroît totalement conforme à nos engagements européens.

Vous vous plaisez souvent à citer la Cour européenne des droits de l'homme. Je vous signale que, dans son arrêt du 29 juin 1992, la Cour a jugé que les mesures dites d'immunité familiale ne s'appliquaient pas aux étrangers polygames.

L'amendement n'est pas adopté.

L'article 29 ter est adopté.

Dans le premier alinéa de l'article L. 552-6 du code de la sécurité sociale, après les mots : « l'intérêt des enfants », sont insérés les mots : « ou lorsque la personne ayant la charge des enfants a été reconnue comme vivant en état de polygamie ».

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

L'amendement n° 384, présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Éliane Assassi

Debut de section - PermalienPhoto de Éliane Assassi

La fiche n°8 du document de présentation du Comité interministériel à l'intégration, réuni le 24 avril dernier, s'intitule : « Encourager la décohabitation des femmes issues de ménages polygames ».

Dans ce document, le Comité interministériel à l'intégration décide de favoriser l'autonomie des épouses concernées par diverses mesures, notamment « le versement des allocations familiales à la femme qui a la charge de l'entretien et de l'éducation des enfants sur un compte bancaire personnel, dès lors qu'elle est en situation de recherche d'un logement à son nom ».

Quelques jours après, le Gouvernement lui-même soutenait un amendement prévoyant une règle différente : la tutelle et non l'autonomie !

Cette mise sous tutelle introduite par l'Assemblée nationale me semble injuste, car elle rendra plus difficile encore la vie des enfants et de leur mère ; elle fragilisera leur quotidien au mépris de l'intérêt des enfants.

Elle me paraît, de plus, inutile : le code de la sécurité sociale prévoit déjà que les prestations familiales peuvent être versées à la personne qui assure l'entretien de l'enfant au quotidien, le plus souvent la mère, plutôt qu'à l'allocataire. Il suffit de la désigner « attributaire » auprès de la caisse d'allocations familiales.

En mettant ainsi sous tutelle des prestations qui ont vocation à contribuer au bien-être matériel des enfants, il me semble qu'on ne lutte pas contre la polygamie. Une nouvelle fois, au prétexte de lutter contre ce qui est un problème, ce sont les victimes qui sont pénalisées, plutôt que les initiateurs, et rien n'est fait pour résoudre les causes. Car, en tout état de cause, le problème reste entier.

La lutte contre la polygamie suppose de favoriser les conditions de la décohabitation, comme l'indique si bien cette fiche n° 8, adoptée par plusieurs ministres.

Tout d'abord, cela supposerait de favoriser l'attribution de logements sociaux pour les personnes concernées, des femmes en général.

Cela supposerait également que les associations de terrain qui sont aux côtés de ces femmes, qui tentent de les aider, ne voient pas leurs subventions diminuées. Le regroupement des subventions au sein de l'agence de cohésion nationale, sous la tutelle du ministère de l'intérieur, ne peut que susciter des inquiétudes.

Que la polygamie soit condamnable, c'est certain ! Mais, franchement, ne pose-t-elle pas moins de problèmes à la France qu'aux femmes qui en sont les victimes et qu'à leurs enfants ?

Si l'on condamne la polygamie, c'est au nom de l'égalité des sexes et de la dignité des femmes. Attention à ce que les mesures répressives ou, à l'inverse, l'absence de mesures de soutien ne lèsent d'abord ces femmes et leurs enfants.

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

L'avis de la commission est défavorable.

Il s'agit d'une simple mise sous tutelle et non pas d'une suppression. De surcroît, cet article a été voté à l'unanimité à l'Assemblée nationale.

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre délégué

Défavorable.

L'amendement n'est pas adopté.

L'article 29 quater est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

L'amendement n° 141 rectifié, présenté par MM. Goujon, Karoutchi, Peyrat et Cambon, Mme Procaccia et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, est ainsi libellé :

Après l'article 29 quater, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le sixième alinéa () de l'article 225-19 du code pénal est ainsi rédigé :

« 5° La confiscation de tout ou partie de leurs biens, quelle qu'en soit la nature, meubles ou immeubles, divis ou indivis, ayant servi à commettre l'infraction prévue à l'article 225-14 ; »

La parole est à M. Philippe Goujon

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Goujon

Il s'agit, par cet amendement, d'intensifier la lutte contre ceux qui exercent l'effroyable activité de marchands de sommeil, soumettant de nombreux étrangers en situation irrégulière à des conditions d'hébergement totalement incompatibles avec la dignité humaine, abusant de leur vulnérabilité et de leur dépendance.

L'élu de la capitale que je suis, qui a vécu les incendies dramatiques survenus à Paris en août dernier, au cours desquels pas moins de vingt-quatre personnes d'origine africaine ont perdu la vie dans des conditions atroces, sait que, même quand les pouvoirs publics organisent le logement d'urgence, l'hébergement dans des hôtels meublés contrôlés par la préfecture de police, la sécurité n'est pas forcément garantie. A fortiori, il convient de lutter contre ceux qui font peu de cas de la sécurité d'autrui et des conditions de vie.

C'est la raison pour laquelle nous proposons de compléter l'article 225-19 du code pénal, qui permet de confisquer les fonds de commerce destinés à l'hébergement de personnes et ayant servi à commettre cette infraction prévue par l'article 225-14 du même code.

Il s'agissait alors de sanctionner et de dissuader les propriétaires d'hôtels meublés. Or il est apparu que les marchands de sommeil utilisent désormais d'autres lieux pour contourner la loi et ce, de façon massive, en louant des pavillons, des appartements ou même des immeubles de bureau, afin de les transformer en dortoirs pour des étrangers, évidemment toujours en situation irrégulière.

C'est la raison pour laquelle nous proposons de contrer ces nouvelles dérives en étendant la possibilité de confiscation à tout ou partie des biens de ces marchands de sommeil, quelle que soit la nature de ces biens, meubles ou immeubles, dès lors qu'ils ont servi à enfreindre l'article 225-14 du code pénal, relatif à la soumission à des conditions de travail et d'hébergement incompatible avec la dignité humaine.

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre délégué

C'est un excellent amendement.

Depuis 1998, la loi permettait de sanctionner les marchands de sommeil qui exploitaient des hôtels meublés pour y installer des étrangers en situation irrégulière, avec les conséquences malheureusement dramatiques que nous avons pu voir.

Par cet amendement, Philippe Goujon propose d'aller au-delà des seuls propriétaires d'immeubles meublés, puisqu'on se rend compte aujourd'hui que ce sont des pavillons, voire quelquefois des immeubles de bureaux qui sont utilisés par ces marchands de sommeil pour exploiter des étrangers en situation irrégulière et les placer dans des conditions d'hébergement tout à fait insalubres ou dangereuses et, surtout, pouvoir tirer le meilleur profit de cet hébergement.

Je pense donc, monsieur Goujon, que le Sénat ne peut que voter à l'unanimité votre amendement En tout cas, le Gouvernement y est favorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Yves Collombat

Le trafic des marchands de sommeil étant, avec la traite des êtres humains, l'une des plaies contre lesquelles il faut absolument lutter, nous voterons cet amendement : le dispositif proposé nous paraît efficace.

L'amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 29 quater.

La suite de la discussion est renvoyée à une prochaine séance.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

J'ai reçu, transmis par M. le Premier ministre, un projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, portant dispositions statuaires applicables aux membres de la Cour des comptes.

Le projet de loi sera imprimé sous le n° 398, distribué et renvoyé à la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

J'ai reçu de M. le Premier ministre le texte suivant, soumis au Sénat par le Gouvernement, en application de l'article 88-4 de la Constitution :

- Proposition de décision du Conseil portant attribution d'une aide financière exceptionnelle de la Communauté au Kosovo.

Ce texte sera imprimé sous le n° E-3163 et distribué.

J'ai reçu de M. le Premier ministre le texte suivant, soumis au Sénat par le Gouvernement, en application de l'article 88-4 de la Constitution :

- Proposition de décision du Conseil, déterminant le montant du soutien communautaire en faveur du développement rural pour la période allant du 1er janvier 2007 au 31 décembre 2013, sa ventilation annuelle, ainsi que le montant minimal à affecter aux régions pouvant bénéficier de l'objectif « convergence ».

Ce texte sera imprimé sous le n° E-3164 et distribué.

J'ai reçu de M. le Premier ministre le texte suivant, soumis au Sénat par le Gouvernement, en application de l'article 88-4 de la Constitution :

- Proposition de règlement du Conseil fixant les règles applicables à la modulation facultative des paiements directs prévus par le règlement (CE) n° 1782/2003 établissant des règles communes pour les régimes de soutien direct dans le cadre de la politique agricole commune et établissant certains régimes de soutien en faveur des agriculteurs et modifiant le règlement (CE) n° 1290/2005.

Ce texte sera imprimé sous le n° E-3165 et distribué.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

J'ai reçu de M. André Lardeux un rapport fait au nom de la commission des affaires sociales sur le projet de loi réformant la protection de l'enfance (330, 2005-2006).

Le rapport sera imprimé sous le n° 393 et distribué.

J'ai reçu de Mme Catherine Tasca un rapport fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées sur le projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, autorisant l'adhésion à la convention sur la protection et la promotion de la diversité des expressions culturelles (384, 2005-2006).

Le rapport sera imprimé sous le n° 394 et distribué.

J'ai reçu de M. André Boyer un rapport fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées sur le projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, autorisant l'adhésion au protocole modifiant la convention de 1976 sur la limitation de la responsabilité en matière de créances maritimes (294, 2005-2006).

Le rapport sera imprimé sous le n° 395 et distribué.

J'ai reçu de M. Jean-François Humbert un rapport fait au nom de la commission des affaires culturelles sur sa proposition de loi portant diverses dispositions relatives aux arbitres (323, 2005-2006).

Le rapport sera imprimé sous le n° 397 et distribué.

J'ai reçu de M. André Boyer un rapport fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées sur le projet de loi autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française, le Gouvernement du Royaume de Norvège et le Gouvernement du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord relatif à la propriété commune d'un système de sauvetage sous-marin (325, 2005-2006).

Le rapport sera imprimé sous le n° 396 et distribué.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

J'ai reçu de M. Jean-Jacques Hyest un rapport d'information fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale sur les nouvelles formes de parentalité et le droit.

Le rapport d'information sera imprimé sous le n° 392 et distribué.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

Voici quel sera l'ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à aujourd'hui, jeudi 15 juin 2006 :

À neuf heures trente :

1. Désignation des membres de la mission d'information commune sur la notion de centre de décision économique et les conséquences qui s'y attachent en termes d'attractivité du territoire national ;

2. Déclaration du Gouvernement, suivie d'un débat, sur la politique énergétique de la France;

Aucune inscription de parole dans le débat n'est plus recevable.

À quinze heures et le soir :

3. Suite de la discussion du projet de loi (362, 2005-2006), adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, relatif à l'immigration et à l'intégration ;

Rapport (371, 2005-2006) de M. François-Noël Buffet, fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale.

Le délai limite pour le dépôt des amendements est expiré.

Projet de loi réformant la protection de l'enfance (330, 2005-2006) ;

Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : lundi 19 juin 2006, à dix-sept heures ;

Délai limite pour le dépôt des amendements : lundi 19 juin 2006, à seize heures.

Conclusions de la commission des lois (n° 386, 2005-2006) :

- sur la proposition de loi de M. Jean-Pierre Sueur et plusieurs de ses collègues sur le statut et la destination des cendres des personnes dont le corps a fait l'objet d'une crémation (464, 2004 2005) ;

- et sur la proposition de loi de M. Jean-Pierre Sueur relative à la législation funéraire (375, 2005-2006) ;

Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : mercredi 21 juin 2006, à dix-sept heures ;

Délai limite pour le dépôt des amendements : mardi 20 juin 2006, à dix-sept heures.

Conclusions de la commission des affaires sociales sur la proposition de loi de M. Christian Gaudin visant à prolonger le congé pour événement familial en cas de décès d'un conjoint ou d'un enfant (158, 2005-2006) ;

Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : mercredi 21 juin 2006, à dix-sept heures ;

Délai limite pour le dépôt des amendements : mardi 20 juin 2006, à dix-sept heures.

Question orale avec débat (n° 8) de M. Philippe Leroy à M. le ministre délégué à l'industrie sur la gestion de l'après-mines ;

Délai limite pour les inscriptions de parole dans le débat : mercredi 21 juin 2006, à dix-sept heures.

Conclusions de la commission des affaires culturelles sur la proposition de loi de M. Jean-François Humbert portant diverses dispositions relatives aux arbitres (323, 2005-2006) ;

Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : mercredi 21 juin 2006, à dix-sept heures ;

Délai limite pour le dépôt des amendements : mardi 20 juin 2006, à dix-sept heures.

Personne ne demande la parole ?...

La séance est levée.

La séance est levée le jeudi 15 juin 2006, à zéro heure vingt-cinq.