La séance est ouverte à neuf heures trente.
Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.
L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2016, adopté par l’Assemblée nationale (projet n° 163, rapport général n° 164).
Dans la discussion des articles, nous poursuivons l’examen, au sein de la première partie du projet de loi de finances, des dispositions relatives aux ressources.
PREMIÈRE PARTIE
CONDITIONS GÉNÉRALES DE L’ÉQUILIBRE FINANCIER
TITRE Ier
DISPOSITIONS RELATIVES AUX RESSOURCES
I. – IMPÔTS ET RESSOURCES AUTORISÉS (suite)
B. – Mesures fiscales
Hier, nous avions entamé l’examen des amendements portant article additionnel après l’article 2.
L'amendement n° I-238, présenté par MM. Requier, Mézard, Collin, Amiel, Arnell, Barbier, Bertrand, Castelli, Esnol et Fortassin, Mmes Jouve, Laborde et Malherbe et M. Vall, est ainsi libellé :
Après l’article 2
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Le 1 de l’article 195 du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Après le mot : « distincte », la fin du a. est supprimée ;
2° Après le mot : « guerre », la fin du b. est supprimée ;
3° Après le mot : « ans », la fin de la seconde phrase du e. est supprimée.
II. – Le I est applicable à compter de l’imposition des revenus de l’année 2014.
III. – La perte de recettes résultant pour l’État du I ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Jean-Claude Requier.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, jusqu’en 2008, les personnes veuves ou isolées bénéficiaient d’une demi-part supplémentaire dans le calcul de leur impôt sur le revenu. Ce dispositif a été progressivement réduit par la majorité précédente, jusqu’à disparaître complètement en 2014.
La suppression de cette demi-part a représenté une hausse significative et souvent imprévue de l’impôt pour les personnes concernées, fréquemment âgées et isolées du fait de leur situation familiale. L’augmentation du revenu fiscal de référence de quelques dizaines d’euros peut facilement aboutir, sans même que la personne concernée en ait conscience, à un passage à la tranche supérieure.
L’effet a été d’autant plus brutal qu’il s’est conjugué à la hausse générale de l’impôt sur le revenu – le produit de cet impôt a augmenté de 40 % – depuis 2012.
La disparition de la demi-part a également eu pour effet de supprimer la non-imposition à d’autres contributions : exonération de la taxe d’habitation, de la taxe foncière et de certains prélèvements sociaux. À titre d’exemple, la taxe foncière a, pour certaines personnes, été multipliée par six du fait de cette mesure. Pour ces contribuables, c’est une double peine.
L’adoption du présent amendement constituerait donc un geste de solidarité envers les aînés. Le sujet a été soulevé par plusieurs de nos collègues de l’Assemblée nationale lors de l’examen du projet de loi de finances le mois dernier. Le groupe du RDSE s’associe à cette demande.
L’avis de la commission sera identique à celui qu’elle a émis sur l’amendement du groupe CRC examiné hier soir, car l’objet est le même : réintroduire la demi-part pour les parents isolés. C'est ce que l’on appelle traditionnellement « l’amendement veuves ».
Nous l’avons rappelé hier, le coût d’un tel amendement serait considérable, d’environ un milliard d’euros.
Par ailleurs, il tendrait à créer une iniquité entre ceux qui ont élevé un enfant pendant au moins cinq ans et les autres.
Aussi, pour les mêmes raisons que celles qui ont été invoquées hier, la commission émet un avis défavorable.
L’avis du Gouvernement est le même que celui de la commission. Je rappelle que les effets sur l’impôt sur le revenu de la mesure prise en 2008 par la majorité précédente ont été corrigés grâce à différentes mesures : d’une part, la suppression de la première tranche et, d’autre part, la décote que nous proposons cette année.
Monsieur le rapporteur général, la commission a supprimé cette mesure d’aménagement de la décote qui figurait dans l’article sur l’impôt sur le revenu. En faisant cela, vous maintenez un certain nombre d’effets de la suppression de la demi-part que le Gouvernement proposait d’effacer avec cette mesure.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° I-239, présenté par Mme Laborde, MM. Mézard, Collin, Requier, Amiel, Arnell, Barbier, Castelli, Collombat, Esnol, Fortassin et Guérini, Mmes Jouve et Malherbe et M. Vall, est ainsi libellé :
Après l’article 2
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le 3 de l’article 199 sexdecies du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa, le montant : « 12 000 € » est remplacé par le montant : « 8 000 € » ;
2° Au deuxième alinéa, le montant : « 12 000 € » est remplacé par le montant : « 8 000 € » et le montant : « 15 000 € » est remplacé par le montant : « 10 000 € » ;
3° Au troisième alinéa, le montant : « 20 000 € » est remplacé par le montant : « 13 333 € » ;
4° Le quatrième alinéa est ainsi modifié :
a) le montant : « 12 000 € » est remplacé deux fois par le montant : « 8 000 € » ;
b) le montant : « 1 500 € » est remplacé deux fois par le montant : « 1 000 € » ;
c) le montant : « 15 000 € » est remplacé deux fois par le montant : « 10 000 € » ;
d) le montant : « 18 000 € » est remplacé par le montant : « 12 000 € ».
II. – Le code de l’action sociale et des familles est ainsi modifié :
1° L’article L. 14-10-4 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« …° La part du produit de l’impôt sur le revenu correspondant à l’abaissement des plafonds de l’article 199 sexdecies du code général des impôts. » ;
2° L’article L. 14-10-5 est ainsi modifié :
a) Au a du II, après les mots : « 4° du même article », sont insérés les mots : «, 70 % du produit des contributions visées au 6° du même article » ;
b) Le a du III est complété par les mots : « et 30 % du produit des contributions visées au 6° du même article ».
La parole est à M. Jean-Claude Requier.
Cet amendement concerne la réduction d’impôt sur le revenu et le crédit d’impôt sur le revenu accordés, au titre des sommes versées pour l’emploi d’un salarié à domicile ou pour le recours à une association agréée ou à un organisme habilité ou conventionné ayant le même objet.
Dans son rapport du 10 juillet 2014 intitulé Le développement des services à la personne et le maintien à domicile des personnes âgées en perte d’autonomie, la Cour des comptes a fait valoir que l’avantage fiscal lié au recours à l’emploi à domicile ou à un prestataire de service à la personne « se concentre majoritairement sur les foyers aux revenus fiscaux les plus élevés ».
Or le maintien à domicile de personnes âgées en perte d’autonomie constitue un enjeu à la fois financier, pratique et affectif. Il est tout d’abord financier, car, souvent, le maintien à domicile est somme toute moins onéreux que l’admission en hôpital ou en établissement spécialisé. Il est ensuite pratique, car l’admission dans lesdits établissements n’est pas automatique. Il faut souvent être inscrit sur une liste d’attente et patienter parfois plusieurs mois avant de trouver une place, ce qui peut conduire à des situations difficiles. L’enjeu est enfin, et peut-être surtout, affectif, car nombre de personnes souhaitent pouvoir rester durant leurs vieux jours dans la demeure à laquelle elles sont attachées, où elles ont leurs habitudes. En France aujourd’hui, trop souvent, on passe ses derniers moments et on décède dans un établissement de santé. Pouvoir demeurer chez soi n’est pas un luxe.
C'est la raison pour laquelle cet amendement vise à redéployer les dépenses liées à l’avantage fiscal pour le recours à l’emploi à domicile en direction de la prise en charge des personnes âgées aux revenus plus modestes, qui constituent la majorité de ce public.
Cet amendement vise à baisser le plafond des dépenses éligibles au crédit et à la réduction d’impôt sur le revenu pour emploi à domicile et à affecter la somme ainsi dégagée à la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie, la CNSA.
Les présidents de conseils départementaux en conviendront, cet amendement présente un aspect sympathique puisqu’il tend à donner davantage de recettes à la CNSA. Néanmoins, nous savons bien que, en pratique, on ne récupère jamais les recettes de la CNSA pour les départements : des « hold-up » sont exercés à divers titres sur ces recettes. En outre, cela ne couvre pas totalement le coût de l’APA, l’allocation personnalisée d’autonomie, comme en témoigne le taux de financement effectif de cette allocation. L’idée est donc sans doute bonne, mais, en pratique, on ne voit jamais les sommes à l’arrivée !
Par ailleurs, abaisser le plafond de 12 000 à 8000 euros pénaliserait durement l’emploi à domicile, notamment pour les familles qui ont besoin d’aide pour la garde d’enfants.
Il s’agit d’une niche certes coûteuse, estimée à plus de 6, 5 milliards d’euros par la Cour des comptes, mais qui permet d’éviter le « travail au noir ». En effet, grâce à cette déduction fiscale, les emplois à domicile sont déclarés. Sinon, ces emplois existeraient, mais sans être déclarés.
Pour vous en convaincre, mes chers collègues, je vous rappellerai que, lorsque le Gouvernement avait supprimé le forfait sur l’emploi à domicile, les recettes de cotisations avaient instantanément baissé, alors que, nous le savons bien, le volume d’heures de travail était resté le même. Recourir à l’emploi à domicile est en effet une nécessité pour certaines personnes, notamment pour faire garder leurs enfants lorsqu’elles travaillent. Elles n’ont pas le choix.
Cette niche, qui, je le redis, est coûteuse, est aussi utile, car elle permet d’amener dans le régime de la déclaration des emplois qui sont nécessaires.
La commission ne peut évidemment qu’être défavorable à une mesure qui pénaliserait l’emploi à domicile.
Le Gouvernement est défavorable à cet amendement, mais souhaite réagir aux propos qui viennent d’être tenus.
Monsieur le rapporteur général, je ne peux pas continuer à vous laisser dire que la suppression du forfait était la mesure la plus injuste et la plus pénalisante pour le secteur. Déclarer les salariés à domicile au forfait entraînait pour ceux-ci moins de prestations, en termes tant de retraite que d’indemnités journalières.
Je rappelle que la majorité précédente avait supprimé la réduction de quinze points de contributions sociales qui avait été mise en place pour compenser le fait que les particuliers employeurs ne bénéficient pas des « allégements Fillon ». Cette mesure avait été bien plus massive et injuste que la suppression du forfait.
Monsieur le sénateur Requier, il est vrai que le secteur connaît des difficultés, mais votre proposition pourrait présenter l’inconvénient – sur ce point, je vous rejoins, monsieur le rapporteur général – d’encourager le travail dissimulé.
Il faut sans cesse répéter à nos concitoyens qu’un particulier employeur est bénéficiaire lorsqu’il déclare son salarié, car la réduction de 50 % s’applique non seulement au salaire net, mais également aux contributions sociales qu’il doit verser. Il est donc mécaniquement avantageux pour un employeur de déclarer son salarié. Quant au salarié, la déclaration lui ouvre des droits, notamment à la retraite.
Cette niche très coûteuse a donc des vertus, et le Gouvernement ne souhaite pas y toucher.
Nous soutiendrons cet amendement, car nous estimons qu’il faut être vigilant sur les moyens qui doivent permettre à un certain nombre de foyers de maintenir des emplois à domicile déclarés.
Néanmoins, ce qui est proposé, ce n’est pas la suppression du soutien à l’emploi à domicile. L’amendement vise à revoir la façon dont l’État contribue à un allégement fiscal qui est tout de même lourd. En effet, cet allégement concerne, pour une part importante, des foyers fiscaux qui pourraient faire quelques efforts, alors même que l’on demande à la masse de la population des efforts beaucoup plus lourds, particulièrement depuis l’augmentation de la TVA.
La proposition qui nous est faite me semble intéressante, puisque l’idée sous-jacente est aussi d’accompagner l’ensemble des politiques sociales au niveau départemental.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° I-268 rectifié, présenté par MM. Collin, Mézard, Requier, Amiel, Arnell, Barbier, Bertrand, Castelli, Esnol, Fortassin et Guérini, Mmes Laborde et Malherbe et M. Vall, est ainsi libellé :
Après l’article 2
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Au b) du 1 de l’article 199 sexdecies du code général des impôts, après la première occurrence du mot : « code », sont insérés les mots : « ou autorisé en application de l’article L. 313-1 du code de l’action sociale et des familles ».
II. – Le I ne s’applique qu’aux sommes venant en déduction de l'impôt dû.
III. – La perte de recettes résultant pour l’État du paragraphe précédent est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Jean-Claude Requier.
Le présent amendement vise à prendre en compte les modifications du statut juridique des services à la personne prévus par la loi relative à l’adaptation de la société au vieillissement, dont l’entrée en vigueur est prévue au début de l’année 2016.
Cet amendement étant très technique, je n’entrerai pas dans son détail. Il est de nature à garantir la stabilité juridique des services à la personne en matière fiscale, stabilité qui pourrait être remise en cause par l’adoption de la loi précitée.
Cet amendement aborde un sujet intéressant, mais il est quelque peu prématuré. La loi relative à l’adaptation de la société au vieillissement n’étant pas encore promulguée, la question méritera d’être examinée après le lancement des expérimentations.
Je note que, devant l’Assemblée nationale, M. le secrétaire d’État s’est engagé à maintenir les exonérations si des expérimentations avaient lieu avant le 1er janvier 2016.
Mon cher collègue, la commission vous invite donc à retirer votre amendement dans l’attente de l’entrée en vigueur de la loi susmentionnée.
Effectivement, comme vient de l’indiquer M. le rapporteur général, nous pouvons difficilement nous appuyer un texte qui n’est pas encore définitivement adopté. Cela n’aurait pas de sens.
Par ailleurs, je confirme que, puisque des expérimentations pourraient être engagées, ce dont nous ne sommes pas certains, je m’engage bien évidemment, au cas où le problème se poserait, à tenir compte de la création du nouveau régime d’autorisation, le cas échéant par une instruction.
Certains craignent que des problèmes ne se posent. Je le comprends, mais ce n’est pas le cas pour le moment. Cela pourrait arriver quand la loi relative à l’adaptation de la société au vieillissement sera promulguée ; mais pour l’instant, je le redis, ce texte n’est pas encore définitivement voté. Néanmoins, je réitère l’engagement que j’avais déjà pris à l'Assemblée nationale. Monsieur le sénateur, dans ces conditions, il serait plus sage que vous retiriez votre amendement.
Non, compte tenu des propos tenus par M. le secrétaire d’État, je retire cet amendement d’appel, monsieur le président.
L'amendement n° I-268 rectifié est retiré.
L’amendement n° I-66 rectifié, présenté par MM. Savary, G. Bailly, Bouchet, Calvet et Cambon, Mme Canayer, MM. Carle, Chasseing, Commeinhes, de Raincourt, B. Fournier et Gilles, Mme Giudicelli, MM. Grand, Gremillet, Grosdidier, Huré, Husson, Joyandet et Laménie, Mme Lamure, MM. D. Laurent et Lefèvre, Mme Lopez, M. Mandelli, Mme Micouleau et MM. Morisset, Pellevat, Pierre, Pointereau et Raison, est ainsi libellé :
Après l’article 2
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Après le 15° ter du II de la section V du chapitre premier du titre premier de la première partie du livre premier du code général des impôts, est insérée une division additionnelle ainsi rédigée :
« 15°quater
« Réduction d’impôt accordée au titre des souscriptions en numéraire au capital des groupements fonciers agricoles
« Art. 199 terdecies-0 D. – I. – Les contribuables domiciliés fiscalement en France peuvent bénéficier d’une réduction d’impôt sur le revenu égale à 18 % des souscriptions en numéraire au capital initial ou aux augmentations de capital des groupements fonciers agricoles répondant aux conditions mentionnées aux a et b du 4° du 1 de l’article 793.
« II. – Les versements ouvrant droit à la réduction d’impôt mentionnée au I sont retenus dans la limite annuelle de 50 000 € pour les contribuables célibataires, veufs ou divorcés, et de 100 000 € pour les contribuables mariés soumis à imposition commune.
« La fraction d’une année excédant, le cas échéant, les limites mentionnées au premier alinéa ouvre droit à la réduction d’impôt dans les mêmes conditions au titre des quatre années suivantes.
« La réduction de l’impôt dû procurée par le montant de la réduction d’impôt mentionnée au I qui excède le montant mentionné au premier alinéa du 1 de l’article 200-0 A peut être reportée sur l’impôt sur le revenu dû au titre des années suivantes jusqu’à la cinquième inclusivement. Pour la détermination de cet excédent au titre d’une année, il est tenu compte de la réduction d’impôt accordée au titre des versements réalisés au cours de l’année concernée et des versements en report mentionnés au deuxième alinéa du présent II ainsi que des reports de la réduction d’impôt constatés au titre d’années antérieures.
« III. – Le I de l’article 197 est applicable.
« Lorsque tout ou partie des parts ayant donné lieu à la réduction est cédé avant le 31 décembre de la cinquième année suivant celle de la souscription, il est pratiqué au titre de l’année de la cession, une reprise des réductions d’impôt obtenues. Il en est de même en cas de remboursement des apports en numéraires aux souscripteurs.
« IV. – Un décret fixe les modalités d’application du présent article, notamment les obligations déclaratives incombant aux contribuables et aux groupements. »
II. – La perte de recettes pour l’État résultant du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A au code général des impôts.
La parole est à M. Jean-Marie Morisset.
Cet amendement, dont le premier des trente et un signataires est M. Savary, concerne les groupements fonciers agricoles, les GFA.
Chacun sait que les groupements fonciers agricoles permettent, au moyende baux à long terme, d’assurer la sécurité des fermiers, tout en offrant une nouvelle structure d’accueil aux détenteurs de capitaux, agriculteurs ou non, souhaitant réaliser un placement « terre ». Ils constituent un outil de portage efficient face à l’augmentation du prix du foncier. Leur attractivité est néanmoins atténuée du fait d’une rentabilité très modeste et d’une faible liquidité des parts sociales.
L’institution d’une réduction d’impôt, comparable à celle qui existe pour la souscription au capital de certaines PME, permettrait de redynamiser les GFA et, espérons-le, de mener à bien les projets de portage indispensable à la sauvegarde des exploitations familiales.
La majorité sénatoriale a déposé une proposition de loi en faveur de la compétitivité de l’agriculture et de la filière agroalimentaire qui comporte un certain nombre de dispositions d’ordre juridique et fiscal. Ce texte, élaboré par Jean-Claude Lenoir et Jean Bizet, a été cosigné par un très grand nombre de collègues. Il constitue un ensemble cohérent, notamment sur le plan fiscal, et trouvera une traduction sous la forme d’amendements au projet de loi de finances pour 2016. Ce dispositif ayant fait l’objet d’une réflexion et d’une concertation très larges, la commission des finances, par cohérence, émettra un avis favorable sur les propositions de nature fiscale qui en sont directement issues.
L’amendement n° I-66 rectifié vise à créer une nouvelle réduction d’impôt au profit des groupements fonciers agricoles, sur le modèle de celle qui existe pour la souscription au capital de certaines PME. Ses auteurs souhaitent redynamiser les GFA.
La commission n’ayant pas eu le temps d’expertiser ce dispositif, elle souhaiterait connaître l’avis du Gouvernement.
Le monde agricole bénéficie déjà de dispositifs de soutien fiscal importants, puisque les activités agricoles sont éligibles au dispositif Madelin lorsqu’elles sont exercées sous forme de société. Par ailleurs, les parts de groupement foncier agricole sont éligibles, sous certaines conditions, à une exonération d’impôt sur la fortune de 75 % et sont également exonérées des droits de mutation à titre gratuit.
La création de cette nouvelle niche fiscale en faveur de l’investissement dans les GFA n’est donc pas envisageable du point de vue tant de l’équité que de l’équilibre budgétaire. La création d’un tel dispositif serait également hasardeuse dans un contexte juridique européen restrictif au regard des aides d’État.
Pour rebondir sur les propos de M. le rapporteur général, je vous indique que le Gouvernement travaille actuellement à un certain nombre de dispositions plus générales sur la fiscalité agricole. Celles-ci n’ont pas été introduites dans le texte initial du projet de loi de finances rectificative, mais je crois savoir qu’un certain nombre d’amendements bénéficieront d’un accueil favorable et quasiment concerté entre le Gouvernement et le groupe de travail constitué à l’Assemblée nationale autour du député François André.
Pour parfaire votre information, je vous indique que nous serons amenés à adapter le régime de l’ISF, voire également, par cohérence, celui du dispositif Madelin, eu égard aux exigences du droit européen. Cette question sera traitée dans le cadre du prochain projet de loi de finances rectificative.
Dans ce contexte, vous comprendrez que l’avis du Gouvernement soit défavorable.
Monsieur le secrétaire d’État, je vous remercie de ces précisions sur les modifications de notre fiscalité qui pourraient intervenir en faveur de l’agriculture. J’insiste sur les GFA, car ils constituent un outil qui favorise l’installation des jeunes agriculteurs. Si des priorités doivent être définies, les GFA en font partie.
Cet amendement a permis d’ouvrir un débat qui se poursuivra à l’occasion de l’examen du projet de loi de finances rectificative. Je le retire donc, dans l’attente de la discussion des orientations futures.
L’amendement n° I-66 rectifié est retiré.
L’amendement n° I-313 rectifié, présenté par Mme Lienemann, est ainsi libellé :
Après l’article 2
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article 263 de la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques est abrogé.
La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann.
Cet amendement vise à supprimer un ajout résultant de la loi n° 2015-990 du 6 août 2015, dite loi Macron, qui a étendu le régime d’exonération d’impôt sur le revenu de certains salariés et dirigeants étrangers travaillant en France et y étant fiscalement domiciliés. Il s’agit de ce que l’on appelle le régime des « impatriés ».
En effet, ce régime, instauré par la précédente majorité, est extrêmement favorable aux impatriés. Durant cinq ans, les cadres et dirigeants étrangers embauchés dans une entreprise française voient leur prime d’impatriation, ainsi que la part de leur revenu correspondant à leur activité liée à l’étranger, exonérée d’impôt sur le revenu. Certaines valeurs mobilières et cessions de plus-values le sont également. En outre, des dispositions favorables concernant l’impôt de solidarité sur la fortune leur sont accordées.
Cette « niche fiscale » ne touche que très peu de contribuables, lesquels sont de plus très aisés en raison de la nature même du dispositif qui vise à attirer des salariés et dirigeants étrangers très qualifiés. En 2013, seuls 11 070 contribuables en ont bénéficié, pour un gain moyen par bénéficiaire de 12 195 euros.
Le nombre de bénéficiaires a augmenté de 51 % depuis 2007, et le gain moyen par bénéficiaire de 124 %. À titre de comparaison, l’Allemagne n’accorde aucun régime favorable à ses impatriés. Le Luxembourg, quant à lui, n’exonère que les dépenses concrètes liées à l’impatriation, comme les frais de déménagement ou les frais scolaires. Le régime français est ainsi l’un des plus favorables en Europe ;…
… or je ne crois pas qu’il ait contribué massivement à notre compétitivité. Enfin, son coût pour les finances publiques est assez élevé, puisqu’il était de 135 millions d’euros en 2013 et a considérablement augmenté depuis.
Cet amendement vise non pas à supprimer totalement l’avantage acquis par les impatriés, mais à revenir simplement sur son extension prévue par la loi d’août 2015. Celle-ci a pour effet d’accorder l’exonération d’impôt sur le revenu également en cas de changement de poste ou d’entreprise au sein d’un même groupe. Vous voyez comment ce petit jeu peut favoriser le développement des niches fiscales.
Monsieur le secrétaire d’État, au regard des graves difficultés rencontrées par nos finances publiques et des ruptures de financement touchant des activités beaucoup plus utiles à la nation, l’augmentation des aides aux impatriés qui bénéficient déjà d’un régime très favorable dont l’efficacité n’est pas prouvée pour l’économie française ne me paraît pas prioritaire. Je sollicite donc nos collègues afin de revenir sur cet avantage que je considère comme indu et qui est en tout cas inconsidéré au regard de l’état de nos finances publiques.
Mme Lienemann nous propose de revenir sur le régime des impatriés qui a été créé en 2004, réformé en 2008 et étendu par la loi Macron en 2015. Ce régime permet effectivement d’attirer en France des cadres de haut niveau qui paient des impôts en France, mais qui sont exonérés de taxation sur le surplus de rémunération lié de l’impatriation.
La commission est très défavorable à cet amendement. En effet, ce dispositif a un coût, mais il a également un effet bénéfique, car il permet tout simplement – avec un succès grandissant, puisqu’il compte déjà plus de 11 000 bénéficiaires – de faire venir en France des cadres qui paient leurs impôts en France. Sans ce régime, ces cadres de haut niveau ne viendraient pas dans notre pays, pour des raisons fiscales notamment.
La commission estime donc qu’il ne faut pas limiter la réflexion au coût brut de cette mesure, qui comporte un aspect positif, à savoir un véritable effet de levier qui se traduit par un surcroît de recettes, de quinze à vingt fois supérieur à ce coût, selon les évaluations qui nous avaient été communiquées lors de la discussion du projet de loi Macron.
Mme Lienemann a mis en avant l’attention toute particulière qu’elle porte à l’état de nos recettes fiscales. La commission est également sensible à ces considérations et estime que le régime des impatriés est à l’origine d’un surplus de recettes fiscales. C’est pourquoi elle a émis un avis défavorable sur cet amendement.
Madame la sénatrice, la loi Macron n’a ni révolutionné, ni amplifié, ni fait exploser le régime fiscal des impatriés.
Les bénéficiaires de ce régime sont exonérés d’impôt sur le revenu uniquement sur leur surplus de rémunération pendant cinq ans. Le correctif introduit par la loi Macron consiste à laisser courir ce délai lorsque la personne qui bénéficie du dispositif change de poste ou de société tout en restant en France.
Auparavant, une personne qui changeait de poste au sein de la même société cessait de bénéficier du régime des impatriés, ce qui n’était pas équitable. En effet, un collègue dans la même situation qui conservait son poste pendant cinq ans conservait l’avantage fiscal. La loi Macron n’a donc pas procédé à une modification majeure, et celle-ci me paraît cohérente.
Puisque c’est le seul élément que vous souhaitez changer, il ne me semble pas judicieux de vous suivre dans cette voie, madame la sénatrice. L’avis du Gouvernement est donc défavorable.
L’amendement n’est pas adopté.
À la seconde phrase du 2 de l’article 80 duodecies du code général des impôts, les mots : « les montants définis aux 3° et 4° du 1 » sont remplacés par les mots : « trois fois le plafond mentionné à l’article L. 241-3 du code de la sécurité sociale ».
L’amendement n° I-158, présenté par M. Bocquet, Mme Beaufils, M. Foucaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Remplacer les mots :
trois fois
par les mots :
une fois
La parole est à M. Éric Bocquet.
Nous souhaitons attirer l’attention du Sénat sur la portée symbolique de la mesure introduite par l’article 2 bis, qui tend à ramener à trois fois le plafond annuel de la sécurité sociale – soit plus de 114 000 euros, tout de même ! – le montant exonéré d’impôt sur le revenu de l’indemnité de rupture du contrat de travail d’un dirigeant ou mandataire social. Nous parlons ici des fameux « parachutes dorés » qui défrayèrent la chronique à une certaine époque.
La morale semble bien nous indiquer que permettre aujourd’hui à quelqu’un de disposer d’une franchise fiscale sur un revenu de 228 240 euros laisse sans doute quelque peu rêveurs ceux qui vivent de revenus modestes. Comme il n’y a pas, en général, de préjudice moral à réparer, on se demande même si l’indemnité de rupture n’est pas plutôt, dans certains cas, la preuve d’une certaine forme de reconnaissance…
En revanche, il est sûr que le code déontologique de l’Association française des entreprises privées, dont certains feignaient d’attendre qu’il constituât le remède miracle à tous les travers du capitalisme moderne, n’a pas empêché que l’on constate, encore trop souvent, le caractère exorbitant des conditions de cessation d’activité offertes à quelques hauts dirigeants, même lorsqu’ils ont failli dans leur démarche de gestion de leur entreprise, accompagné moult plans sociaux meurtriers, voire perdu des parts de marché.
Un grand dirigeant d’entreprise a récemment vu son indemnité fixée à un niveau fort élevé qui a fait scandale. Le seul motif de cette décision était qu’il avait atteint l’un des objectifs qui lui étaient assignés, à savoir la remontée du cours de bourse d’Alcatel-Lucent...
Nous ne pouvons donc, mes chers collègues, que vous inciter à donner plus de force encore au dispositif instauré par cet article 2 bis et nous vous invitons à adopter notre amendement.
Les « parachutes dorés » ont, à juste titre, choqué par leurs montants, mais la question est très largement résolue, puisqu’une taxation leur est applicable aujourd’hui.
Toutefois, l’abaissement à 114 000 euros du plafond à partir duquel ces indemnités sont soumises à l’impôt sur le revenu vise des cas qui ne correspondent pas à ceux que vous évoquez, où les indemnités se chiffrent en millions d’euros.
La commission s’interroge donc sur l’incidence réelle de cette mesure. Elle considère que le problème est d’ores et déjà résolu par les plafonds actuels, qui permettent de répondre aux situations les plus choquantes. Si l’on abaissait encore ces plafonds, on ne viserait plus les « parachutes dorés », mais plutôt les « parachutes argentés ».
La commission a donc émis un avis défavorable.
Le Gouvernement comprend votre argumentation, monsieur Bocquet. C’est la raison pour laquelle il a accepté la proposition de vos collègues députés lors de l’examen du projet de loi de finances à l’Assemblée nationale.
Cela dit, vous souhaitez aller plus loin et vous visez des niveaux d’indemnité que l’on ne peut qualifier de vraiment excessifs.
Peu de personnes sont concernées, puisque l’article ne concerne que les départs forcés des mandataires sociaux ou des dirigeants d’entreprise. On est loin de milliers de cas !
Le Gouvernement ne souhaite pas aller jusqu’à abaisser le seuil d’assujettissement à l’impôt sur le revenu à une seule fois le plafond annuel de la sécurité sociale, le PASS.
Il souhaite en rester au niveau fixé par les auteurs de l’amendement qu’il a soutenu à l’Assemblée nationale et émet donc un avis défavorable sur le présent amendement.
Le groupe socialiste suivra l’avis de la commission et du Gouvernement. Certes, il est toujours possible d’aller plus loin, mais le dispositif adopté par l’Assemblée nationale constitue déjà une avancée significative.
Cela dit, je veux soutenir l’argumentation de notre collègue Éric Bocquet.
Dans cette période troublée, alors que nombre de nos concitoyens sont en difficulté et perçoivent de tout petits salaires, quand certains ont été licenciés dans le cadre d’un plan social – nous aurions pu évoquer ce point –, cet amendement, que je considère comme un amendement d’appel, M. le secrétaire d'État nous ayant bien montré sa faible portée pratique, a le mérite de nous faire réfléchir à la situation et à l’équilibre social et économique de notre pays.
Indépendamment de leur qualité, je ne veux plus voir de mandataires sociaux ou de grands chefs d’entreprise recevoir 12 ou 15 millions d’euros ! Cela a encore été le cas récemment, et c’est inacceptable ! Au demeurant, ces sommes sont bien loin des montants proprement ahurissants qu’a touché ou que va toucher le PDG de Volkswagen qui vient de se faire débarquer.
En tant que parlementaires de la République, nous représentons toute la société, ceux qui réussissent comme ceux qui sont en difficulté. Il ne faut jamais oublier d’où l’on vient !
Monsieur le secrétaire d'État, quand je vois les difficultés que rencontrent nombre de nos concitoyens dans ma région, quand, surtout, je les vois choqués par les parachutes dorés déplacés dont ils ont entendu parler à la télévision, j’estime que les avancées qui ont été permises à l’Assemblée nationale vont dans le bon sens.
J’y insiste, si nous soutenons le texte de l’Assemblée nationale, je considère que l’amendement de M. Bocquet, auquel nous sommes défavorables, a permis d’ouvrir le débat. Celui-ci méritait d’avoir lieu aussi devant la Haute Assemblée. En effet, par leur présence sur le terrain, les sénateurs sont aux prises avec la réalité.
Concrètement, les cas choquants par leur montant que nous évoquons sont d'ores et déjà soumis à l’imposition et aux cotisations, grâce au plafond actuel. Je ne vois donc pas en quoi abaisser celui-ci de 114 000 à 38 000 euros aurait un effet dissuasif.
Pour éviter les cas les plus choquants de parachutes dorés, il faut s’en remettre à d’autres mécanismes de régulation – je pense au rôle que peuvent jouer les comités de rémunération, les conseils d’administration, à l’édiction de nouvelles règles extrafiscales…
Pour ce qui me concerne, je considère qu’il ne faudrait pas complexifier notre législation fiscale pour un nombre de cas très limité. Il ne s’agirait pas de procéder à une modification ad hominem !
D’ailleurs, je veux vous interroger, monsieur le secrétaire d'État : avez-vous une idée du nombre de cas concernés par de tels montants ? Dans son analyse, la commission en avait recensé très peu – dix ou vingt, peut-être –, la plupart des cas choquants étant évidemment résolus par le plafond actuel.
Je veux apporter quelques précisions.
Effectivement, monsieur le rapporteur général, le nombre de cas concernés est très faible.
Au reste, il est vrai que l’amendement ne modifiera pas considérablement les choses pour les cas extravagants que vous évoquez, à juste titre.
Monsieur Bocquet, dans la présentation de votre amendement, vous avez fait remarquer, avec raison, qu’un code dit « de bonne conduite » avait été édicté voilà quelques années. Certains avaient pensé que ce document résoudrait tous les problèmes. Pour ce qui nous concerne, nous avions des doutes… et nous avions raison !
Il nous faut d'ailleurs constater aujourd'hui qu’un certain nombre de comportements n’ont pas été conformes à ce code de bonne conduite – le MEDEF, pour ne pas le citer, l’a lui-même reconnu.
De ce point de vue, M. Guillaume a raison : les choses sont évidemment trop choquantes pour que l’on s’en remette à des codes de bonne conduite, lesquels sont de toute façon transgressés, puisqu’ils sont souvent rédigés par les personnes directement concernées par les pratiques en cause.
La loi doit s’intéresser à ce problème. C’est le sens de l’amendement adopté à l’Assemblée nationale, qui permet des progrès. C’est aussi le sens d’autres dispositions qui ont été prises, mais qu’il serait quelque peu fastidieux d’énumérer à cet instant.
Bien entendu, je me réjouis de l’évolution positive qui a été introduite à l’Assemblée nationale en matière de fiscalisation des revenus provenant de parachutes dorés.
D’autres évolutions pourraient encore être imaginées à l’avenir. À cet égard, la philosophie développée par nos collègues du groupe CRC paraît tout à fait pertinente, mais, comme l’a dit M. le secrétaire d'État, l’avancée que marque l’article 2 bis semble pour l’instant déjà significative.
Cependant, je veux attirer l’attention sur un point, qui porte non pas sur la fiscalisation, mais sur la fixation des rémunérations par les conseils d’administration. Le fond du problème est bien là ! En effet, aujourd'hui, nos concitoyens souhaitent que tout le monde participe à l’effort collectif qui permettra à la situation de s’améliorer.
Pour ma part, je me félicite que l’on puisse déjà constater une prise de conscience incontestable des membres des conseils d’administration sur la question des rémunérations – les décisions prises par certains le prouvent. On sent bien qu’une évolution est en cours. Je note, par exemple, que plus de la moitié des groupes du CAC40 – 23 sociétés, pour être exact – ont adopté, en 2014, une indexation de la rémunération variable sur des critères de responsabilité sociale ou environnementale de l’entreprise.
Toutefois, il faudra sans doute susciter de nouvelles évolutions.
Je compte, pour ma part, sur le projet de loi « Macron II » pour responsabiliser les conseils d’administration et conduire à une évolution des mécanismes qu’ils mettent en œuvre pour fixer les rémunérations variables.
En résumé, les choses avancent, la fiscalisation progresse, mais de nouvelles avancées peuvent être utiles ; je compte à cet égard, je le répète, sur la loi Macron II.
Voilà quelques années, à l’Assemblée nationale, j’avais été le premier à déposer des amendements relatifs aux parachutes dorés. Ces amendements avaient été adoptés par la commission des finances.
Il est vrai que nous avons beaucoup progressé depuis.
Pour autant, les propos de François Marc me paraissent parfaitement fondés : il convient de réaliser un bilan et de réfléchir à la manière d’encadrer encore mieux les choses.
Comme certains le savent ici, j’ai eu à m’occuper, pendant un temps limité, du Crédit immobilier de France, société anonyme incluse dans la sphère sociale.
Les conditions de départ de son dirigeant, qui a failli dans ses responsabilités – cela a d'ailleurs abouti à la disparition de la société –, ont été particulièrement choquantes, compte tenu du parachute doré qui lui a été versé sous couvert de retraite.
En clair, sans vouloir tout contrôler, sans vouloir brider la compétitivité du pays ni sa capacité à attirer des dirigeants de talent, nous devons aujourd'hui régler notamment le problème des dirigeants des entreprises ayant connu une mauvaise gouvernance, des déficits ou une gestion calamiteuse qui partent avec des primes ou avec des rémunérations complémentaires, au titre de la retraite ou à d’autres titres. Ce sont ces situations qu’il faut encadrer.
En revanche, nous ne pouvons évidemment pas voter l’amendement, qui, pour le coup, ne traite pas de ce sujet et qui est sans doute trop ample, eu égard au nombre de personnes qui seraient couvertes par les plafonds de rémunération mentionnés.
J’entends bien tout ce qui vient d’être dit ! Cependant, j’estime que nous devons faire un peu attention.
Bien évidemment, il me paraît scandaleux que l’on verse des parachutes dorés à des chefs d’entreprise qui ont échoué dans leur mission, qui ont conduit leur entreprise au désastre, qui ont licencié des salariés, réduit l’emploi… Mais ce n’est ni plus ni moins scandaleux que nombre de ventes ou d’achats de joueurs de football à coup de millions d’euros ou que les salaires versés dans le show-business ! §Dans une période difficile, il est assez légitime que nos concitoyens trouvent les sommes en question un peu surprenantes, pour ne pas dire indécentes.
En revanche, je veux rappeler aux auteurs de l’amendement que nous sommes dans une économie ouverte. Nous sommes très heureux que certains Français réussissent parfaitement à l’étranger, deviennent patrons de grandes sociétés internationales et perçoivent des salaires mirobolants !
Exclamations sur les travées du groupe socialiste et républicain.
Cela se passe souvent ainsi au Japon ou aux États-Unis, et c’est tant mieux.
En sens inverse, nous avons aussi parfois besoin de faire venir en France de grands patrons étrangers. Si nous voulons réussir, il ne faut pas que la France soit perçue, dans la compétition internationale, comme le pays qui, au final, n’offre pas de capacités aux dirigeants.
Autant je suis favorable à l’absence d’indemnités, voire à des sanctions pour les dirigeants qui ont échoué ou licencié, autant j’en appelle à un minimum de prudence pour ceux qui réussissent bien, qui créent de l’emploi et de la richesse et qui développent leur entreprise.
Il ne faut pas d’excès, mais il ne faut pas non plus décourager !
Nouvelles exclamations sur les travées du groupe socialiste et républicain.
L'amendement n'est pas adopté.
L'article 2 bis est adopté.
L'amendement n° I-162, présenté par M. Bocquet, Mme Beaufils, M. Foucaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’article 2 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
À la première phrase du deuxième alinéa du 2° de l’article 83 du code général des impôts, les mots : « huit fois » sont remplacés par les mots : « une fois ».
La parole est à Mme Marie-France Beaufils.
La question du devenir de nos retraites est posée depuis plusieurs années, l’assurance vieillesse solidaire et intergénérationnelle, élément clé de notre pacte social et républicain, étant progressivement minée par l’accroissement des inégalités salariales, le développement préoccupant du chômage, la précarité grandissante des conditions de travail et de rémunération imposées aux salariés.
Depuis la « loi Balladur » de 1993, puis avec la « loi Fillon » de 2003 et avec certaines dispositions de la « loi Macron », votée à l’été 2015, une démarche visant à favoriser le développement de l’épargne retraite individualisée a été mise en œuvre.
L’objectif fondamental de cette démarche n’a pas changé : sous couvert d’une inquiétude plus ou moins feinte à l’endroit de l’avenir du régime général et, plus récemment, des régimes complémentaires obligatoires, les promoteurs de l’épargne retraite individualisée entendent distraire du financement mutualisé de l’assurance vieillesse des sommes sans cesse plus importantes, pour pouvoir les engager sur les marchés financiers à long terme. Ce recours au long terme est évidemment encouragé par le fait que les salariés doivent désormais consacrer plus de quarante ans à leur vie professionnelle.
Le système de retraite individualisée crée de profondes inégalités.
Il pose un véritable problème pour les retraites dites « chapeau » : les niveaux de financement par l’entreprise de dispositifs qui sont très largement dérogatoires du droit commun conduisent à des montants de prestations servies particulièrement élevés.
C’est pour éviter ces travers que nous vous proposons, mes chers collègues, de plafonner, par référence au plafond annuel de la sécurité sociale, le montant des abondements aux régimes de retraite supplémentaire ne présentant pas le caractère de rémunérations dissimulées.
Nous parlons ici non pas des « retraites chapeaux », mais des régimes de retraite supplémentaire qui concernent environ 3, 5 millions de salariés.
Abaisser le plafond de huit fois à une fois, comme l’a proposé à l’instant Mme Beaufils, reviendrait à pénaliser ces salariés, ce qui n’est pas acceptable. C'est la raison pour laquelle la commission des finances émet un avis défavorable sur cet amendement.
L’avis du Gouvernement rejoint celui de la commission.
Pardon de le redire, mais il s’agit de sujets très complexes. Quand on évoque les « retraites chapeaux », tout le monde a en tête des exemples extravagants.
Or, certaines entreprises, notamment dans le secteur de la sidérurgie…
… secteur que je connais bien en tant que Lorrain, ont mis en place des systèmes de retraite supplémentaire. Il s’agit en quelque sorte du troisième étage, après la retraite de base et la retraite complémentaire. C’est le cas, par exemple, de grands groupes comme Arcelor, entre autres. Des centaines de milliers de personnes touchent ainsi des retraites supplémentaires, liées à différents régimes.
Voilà deux ans, en collaboration avec le président Carrez, nous avons décidé de mettre en place un système d’imposition différent suivant le niveau de ces retraites dites « chapeaux » : quasi-exonération – de mémoire – pour les plus petits niveaux, taux d’imposition moyen pour les niveaux intermédiaires, et taux beaucoup plus fort pour les montants dépassant l’entendement.
Vous soulevez le problème de l’exonération au moment de la constitution de ces retraites. Or il s'agit d’un dispositif visant justement à éviter tout risque de double imposition, ces retraites étant imposées lors de la sortie.
Il faut distinguer entre les retraites constituées au sein de l’entreprise – c’est là qu’est la complexité – ou déléguées à des organismes extérieurs. Dans ce dernier cas, les traitements sont différents. Il faut donc éviter de généraliser, tout en combattant tout ce qui peut choquer l’entendement.
Pour ces raisons, le Gouvernement est défavorable à cet amendement.
La réponse de M. le secrétaire d’État va me permettre de me limiter à un bref propos.
Ce régime concerne en effet de nombreuses entreprises industrielles du secteur de la métallurgie, dans lequel il s’agit d’une tradition. Voilà quelques années, nous avons légiféré trop vite et de manière trop intense au détriment de centaines de salariés du groupe Pechiney Ugine-Kuhlmann, et il a fallu revenir sur ces dispositions.
Je pense que nous devons garder le souvenir des erreurs que nous avons pu commettre collectivement, ainsi que des rectifications intervenues. Il serait judicieux, madame Beaufils, de ne pas pénaliser ces anciens salariés, dont beaucoup sont des retraités modestes ou moyens, …
Plutôt moyens : il s’agit en général d’anciens cadres.
Nous considérons que ces plans d’épargne retraite sont une bonne chose, non seulement pour le salarié, même modeste, comme l’a souligné M. Bouvard – il s’agit d’un bon complément –, mais aussi pour la structuration de l’épargne à long terme dans notre pays, objectif que nous poursuivons tous.
J’ai le sentiment d’une confusion, ou d’un amalgame, entre ce que l’on appelle traditionnellement les « retraites chapeaux » des grands dirigeants, souvent choquantes – cela rejoint notre précédent débat –, et les plans d’épargne des salariés.
C'est la raison pour laquelle nous ne soutiendrons pas cette mesure qui, au final, tend à écraser tout le monde de la même façon. Il ne s’agit pas, à notre avis, d’une bonne proposition.
Nous allons maintenir notre amendement, même si j’entends les remarques qui ont été formulées sur ces cas particuliers.
Par cet amendement, nous avons voulu alerter sur le développement de ces régimes qui semblent, petit à petit, vouloir prendre le pas sur notre système de retraite actuel.
Entre le « huit fois » et le « une fois » que nous proposons, il existe tout de même une marge non négligeable. Notre amendement vise à soulever un vrai problème : prenons garde de ne pas soutenir la création d’outils de type fonds de pension qui pourraient être facilement utilisés, à terme, par une autre majorité pour mieux encore aller à l’encontre de notre régime solidaire de retraite.
Nous maintenons notre amendement, même si nous reconnaissons qu’il faudrait peut-être l’améliorer eu égard au problème particulier de la sidérurgie qui a été soulevé.
… en disant craindre qu’une nouvelle majorité ne puisse s’en prendre au régime général.
Ma réponse sera simple, chère collègue : non, non et non ! Ces dernières années, nous avons beaucoup plus réformé pour sauver les régimes de retraite que les majorités de gauche !
M. Roger Karoutchi marque son approbation.
Sourires sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste et républicain.
Ne craignez rien, nous sommes tout autant que vous attachés à notre régime de retraite. Et si certains salariés peuvent bénéficier d’une meilleure retraite grâce aux dispositifs existants, à l’instar de la Préfon pour les fonctionnaires, c’est tant mieux ! Beaucoup de Français en profitent et y sont attachés. Soyez donc tout à fait rassurée !
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° I-371 rectifié ter, présenté par MM. Delahaye, Capo-Canellas, Marseille, Canevet, Laurey, Delcros, Zocchetto et les membres du groupe Union des Démocrates et Indépendants - UC, est ainsi libellé :
Après l’article 2 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le code général des impôts est ainsi modifié :
1° Après la première phrase du I de l’article 150 VB, est insérée une phrase ainsi rédigée :
« Le prix d’acquisition s’entend également de l’effet de l’érosion de la valeur de la monnaie pendant la durée de détention du bien. » ;
2° Les six premiers alinéas du I de l’article 150 VC sont remplacés par un alinéa ainsi rédigé :
« I. – Pour la prise en compte de l’effet de l’érosion de la valeur de la monnaie mentionnée au I de l’article 150 VB, dans l’établissement du prix d’acquisition, la durée de détention est décomptée : » ;
3° À la première phrase du premier alinéa de l’article 200 B, le taux : « 19 % » est remplacé par le taux : « 9 % » ;
4° Après la première phrase du premier alinéa du même article, il est inséré une phrase ainsi rédigée :
» Pour les cessions intervenant après moins de deux ans de détention, les plus-values réalisées sont, par exception, imposées au taux forfaitaire de 18 % » ;
5° L’article 1609 nonies G est abrogé.
II. – Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° Le I de l’article L. 136-6 est ainsi modifié :
a) Au e, après le mot : « Des plus-values », sont insérés les mots : « de cessions mobilières » ;
b) Après le e, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« …) Des plus-values de cessions immobilières et de terrains à bâtir soumises à l’impôt sur le revenu ; »
2° Le I de l’article L. 136-8 est ainsi modifié :
a) Au 2°, après la référence : « à l’article L. 136-6 », sont insérés les mots : « à l’exception des plus-values de cessions immobilières visées par son septième alinéa, » ;
b) Après le 2°, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« …° A 8 % pour les plus-values mentionnées au septième alinéa de l’article L. 136-6 pour les cessions intervenant après moins de deux ans de détention. À 3 % pour les plus-values mentionnées au même alinéa pour les cessions intervenant après plus de deux ans de détention ; »
3° L’article L. 245-16 est complété par un paragraphe ainsi rédigé :
« … – Par exception au I du présent article, les plus-values de cessions immobilières visées au septième alinéa de l’article L. 136-6 sont soumises à un taux de 4 % de prélèvements sociaux pour les cessions intervenant après moins de deux ans de détention. Pour les cessions intervenant après plus de deux ans de détention, le taux de prélèvements sociaux est de 3 %.
« Le produit de ces prélèvements est ainsi réparti :
« 1° Une part correspondant à un taux de 1 % à la Caisse d’amortissement de la dette sociale quelle que soit la durée de détention ;
« 2° Une part correspondant à un taux de 1 % à la Caisse nationale d’assurance vieillesse des travailleurs salariés quelle que soit la durée de détention ;
« 3° Une part correspondant à un taux de 2 % à la Caisse nationale de l’assurance maladie des travailleurs salariés pour les cessions intervenant après moins de deux ans de détention. Pour les cessions intervenant après plus de deux ans de détention, le taux correspondant est de 1 %. »
III. – Le III de l’article 27 de la loi n° 2013-1278 du 29 décembre 2013 de finances pour 2014 est abrogé.
IV. – Les dispositions du présent article s’appliquent aux cessions intervenant à compter du 31 décembre 2016.
V. – La perte de recettes résultant pour l’État des I à IV est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
VI. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale visés au II est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Vincent Delahaye.
Cet amendement, que nous avions déjà déposé l’an dernier, vise à simplifier la taxation des plus-values immobilières et à la rendre plus efficace économiquement, un impôt simple sur une base plus large étant de nature à favoriser l’augmentation du nombre de transactions.
Le régime actuel prévoit un taux différent pour l’imposition de la plus-value et la CSG, ainsi qu’une durée d’abattement différente : vingt-deux ans pour l’un, trente ans pour l’autre. Ce système complexe favorise la détention longue des biens, ce qui n’est pas très favorable économiquement.
À travers cet amendement, nous proposons de fixer un taux unique de 15 % – 9 % au titre de l’impôt sur le revenu et 6 % au titre de la CSG –, bien plus bas que le taux facial de 34, 5 % actuellement en vigueur.
L’an dernier, M. le secrétaire d’État s’était montré intéressé. Il nous avait demandé de nous appuyer sur des simulations afin de démontrer qu’aucune perte de recettes n’en résulterait pour l’État. Au contraire, l’idée est de dégager davantage de recettes grâce à une augmentation du nombre de transactions.
Les premières simulations que nous avons obtenues de Bercy ne nous ont pas satisfaits. Nous avons fini par obtenir un échantillon de 100 000 transactions au premier semestre 2014, sur la base duquel nous avons pu calculer qu’un taux global – impôt sur le revenu et CSG – d’un peu plus de 10 % suffirait pour obtenir le même produit. Or nous proposons ici un taux de 15 %, ce qui garantit un produit au moins équivalent.
La commission des finances avait formulé deux observations. La première portait sur la période transitoire, que nous proposons d’étendre jusqu’au 31 octobre 2016.
La seconde concernait les transactions de court terme, plus spéculatives. Nous proposons donc un doublement du taux à la fois de l’impôt sur le revenu et de la CSG – 30 % – sur les transactions lors des deux premières années, afin de décourager la spéculation de court terme.
Tel est le sens de cet amendement qui me paraît aller dans la bonne direction en termes de fiscalité.
Le sous-amendement n° I-422, présenté par M. Bouvard, est ainsi libellé :
Amendement n° I-371 rectifié ter
I. – Alinéa 10
Remplacer le chiffre :
deux
par le chiffre :
trois
II. – Alinéa 20, première phrase
Remplacer le chiffre :
deux
par le chiffre :
trois
III. – Alinéa 20, seconde phrase
Remplacer le chiffre :
deux
par le chiffre :
trois
IV. – Alinéa 22, première phrase
Remplacer le chiffre :
deux
par le chiffre :
trois
V. – Alinéa 22, seconde phrase
Remplacer le chiffre :
deux
par le chiffre :
trois
VI. – Alinéa 26, première phrase
Remplacer le chiffre :
deux
par le chiffre :
trois
VII. – Alinéa 26, seconde phrase
Remplacer le chiffre :
deux
par le chiffre :
trois
La parole est à M. Michel Bouvard.
Ce sous-amendement a été déposé après que l’on a débattu de l’amendement n° I-372 rectifié ter en commission et avant que M. Delahaye ne rectifie ce dernier.
Ce sous-amendement, à l’instar de la rectification, vise à éviter les effets d’aubaine. Il s’agit en effet de prévenir certains effets pervers tenant à l’acquisition de terrains préalablement à une modification de documents d’urbanisme, par exemple, afin de réaliser une plus-value substantielle sans être rattrapé par la fiscalité.
Il s’agit également d’un vieux sujet, à l’instar de celui des parachutes dorés ou des retraites chapeaux. Voilà des années que nous tâtonnons sur la définition de ce que peut être ou non le bon régime en matière de plus-value immobilière. Les textes ont été modifiés à de multiples reprises, sans avoir pris la peine de s’assurer que ces changements avaient eu un quelconque effet sur le déblocage du marché du foncier et la libération d’un plus grand nombre de terrains.
À titre personnel, je suis intellectuellement favorable à l’amendement n° I-371 rectifié ter, que je vais voter.
Cela étant, je pense souhaitable de disposer d’une estimation réelle des effets de toutes les mesures d’ajustement du régime des plus-values immobilières prises depuis vingt ans : eu égard à leur environnement économique, quels ont été leurs effets, en bien ou en mal, en termes de libération du foncier ? Une telle estimation me semblerait d’autant plus utile que, sur ce sujet, nous légiférons depuis des années un peu à l’aveugle, sinon dans le brouillard.
Tout au long de cette année, un groupe de travail – je précise qu’il était pluraliste – sur l’immobilier s’est réuni au sein de la commission des finances. Nous avons auditionné des acteurs extrêmement variés dans le domaine du logement, promoteurs ou fiscalistes, par exemple.
Nous pouvons d'ores et déjà partager un constat : il est extrêmement difficile de mesurer l’incidence d’un certain nombre de mesures fiscales, qu’il s’agisse de tous les régimes d’immobilier aidé ou des abattements en matière de plus-value immobilière. En clair, nous n’avons pas pu mesurer d’effet direct de ces mesures, notamment concernant les abattements exceptionnels sur les plus-values immobilières.
Un abattement exceptionnel est actuellement en vigueur jusqu’au 31 décembre 2015 sur le fait de donner un terrain à bâtir ; d’autres abattements exceptionnels à durée limitée ont également cours. Or personne n’est capable de démontrer que ces mesures, qui ont un coût, produisent un quelconque effet, notamment en termes de nombre de transactions.
Par ailleurs, des dispositifs de surtaxe sont venus complexifier le système. Taxes sur les plus-values élevées, abattements, exonérations : force est de constater que le régime est devenu extrêmement complexe et que, comme le soulignait à l’instant Michel Bouvard, nous sommes incapables de faire le bilan de ces abattements exceptionnels ou de ces surtaxes.
En outre, le régime des plus-values immobilières reste fondamentalement complexe. Le Gouvernement dit l’avoir réformé, prétendant que les exonérations interviennent après vingt-deux ans de détention. Mais non ! Cela reste bien trente ans en matière de CSG et de prélèvements sociaux ! Pourquoi une telle différence ?
Au travers de cet amendement, Vincent Delahaye pose une question essentielle sur notre système de taxation des plus-values, qui favorise la détention longue et incite les propriétaires à conserver leurs biens. Dans la mesure où ce système exonère les propriétaires, de fait, au-delà de trente ans de détention, ceux-ci ne sont absolument pas incités fiscalement à céder leurs biens. Cela n’accélère pas la rotation des transactions, puisque ne sont pas mis sur le marché des logements ou des terrains dont on a besoin pour la construction.
Ainsi, le système va sans doute à l’encontre de son objectif. C’est la raison pour laquelle il convient d’encourager un mécanisme qui ne tienne pas compte de la durée de détention, afin de favoriser les transactions.
J’ajoute qu’il existe deux bornes constitutionnelles en la matière : l’érosion monétaire, dont nous tenons compte, et le caractère non confiscatoire. Le système proposé a été conçu pour susciter autant de recettes que l’ancien dispositif, mais la conviction de la commission est qu’il en produira plus.
La commission avait émis un avis de sagesse bienveillante sur cet amendement, dont les dispositions prévoient, comme nous le souhaitions, une période transitoire jusqu’au 31 décembre 2016 et une taxation des plus-values réalisées après deux ou trois ans de détention, de façon à éviter les spéculations des marchands de biens, à savoir les allers et retours très rapides en matière d’immobilier.
Les dispositions du sous-amendement n° I-422 vont exactement dans le sens souhaité par la commission, qui a souhaité régler la question de la période transitoire. Le dispositif proposé prévoit en effet que les propriétaires envisageant de vendre et bénéficiant à l’heure actuelle d’une exonération disposent encore d’un an, jusqu’au 31 décembre 2016, pour réaliser leur transaction sans être taxés ; ensuite, c’est le nouveau système qui prendra le relais.
L’objet de ce sous-amendement est d’éviter que les transactions bénéficient d’un effet d’aubaine, en portant à trois ans la durée minimum de détention pour bénéficier du nouveau système. Je ne sais pas si l’auteur de l’amendement et celui du sous-amendement se mettront d’accord sur cette durée minimum de détention. En tout cas, je le répète, la commission souhaite éviter un achat suivi d’une revente immédiate, qui bénéficierait de fait d’un régime fiscal extrêmement favorable.
J’émets donc un avis de sagesse positive sur le sous-amendement n° I-422, ainsi que sur l'amendement n° I-371 rectifié ter.
Monsieur le rapporteur général, vous venez de l’expliquer vous-même, il est impossible de dresser le bilan des mesures qui ont été prises, quels que soient les gouvernements concernés. Dès lors, comment voulez-vous renforcer des dispositifs dont vous ne savez pas vous-mêmes évaluer les effets ?
Au reste, il est normal de rencontrer des difficultés en la matière, puisque les différents dispositifs adoptés ces dernières années, par des majorités de droite ou de gauche, s’inscrivent dans des contextes qui ont complètement changé : la crise, l’évolution favorable, mais brutale, des taux d’intérêt… Tant de facteurs interviennent sur ce marché qu’il est difficile d’apprécier la part de la fiscalité en la matière.
De mon côté, pour avoir rencontré un grand nombre d’acteurs dans ce domaine, je sais qu’ils nous demandent d’abord de la stabilité.
Ils nous exhortent à cesser de changer les règles. Vous le dites vous-mêmes, nous n’avons apporté la démonstration ni de l’efficacité ni même de l’inefficacité des dispositifs existants. Parallèlement, tout le monde nous dit de laisser vivre le régime des plus-values. Je ne vois donc pas pourquoi vous le voulez le bouleverser avec cet amendement.
Vous allégez la fiscalité sur les transactions de courte durée. Finalement, alors que la taxation disparaissait au bout de vingt-deux ans pour l’imposition sur le revenu et de trente ans pour les cotisations sociales, elle subsistera – on paiera toujours –, quelle que soit la durée de détention, même si, je l’ai bien noté, le mécanisme de l’érosion monétaire doit être pris en compte.
Vous affirmez que l’adoption de cet amendement ne pèsera pas sur le budget de l’État. Pour notre part, nous évaluons son coût à quelque 800 millions d’euros.
Exclamations sur les travées de l'UDI-UC et du groupe Les Républicains.
Certes, je connais le discours – je l’ai d’ailleurs entendu à l’instant – qui consiste à dire qu’un tel système multipliera le nombre de transactions, ce qui augmentera les recettes de l’État.
Toutefois, le Gouvernement ne comprend pas le sens de cet amendement, qui vise un secteur pour lequel tout le monde demande de la stabilité. Il faut bien le reconnaître, nous sommes tous quelque peu interrogatifs. Certains veulent des chocs d’offre, d’autres des chocs fiscaux dissuasifs… Ce n’est d’ailleurs pas une question de gauche ou de droite : j’entends ces demandes depuis plusieurs années.
Je pense que la sagesse qui caractérise votre assemblée serait de ne pas légiférer sur ce point à ce stade et de laisser vivre les dispositifs mis en place. Vous le savez, le secteur s’adapte assez bien à la complexité, même si elle est parfois regrettable.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur le sous-amendement n° I-422 et sur l'amendement n° I-371 rectifié ter.
Monsieur le secrétaire d’État, vous avez raison, tous les acteurs que nous avons rencontrés nous ont demandé de la stabilité fiscale. Pour autant, ils considèrent que le système en vigueur n’est pas bon. Ils souhaitent que nous trouvions le bon système, auquel on ne touchera plus au cours des vingt ou trente ans à venir, si tant est que cela soit possible !
Ces acteurs nous ont aussi parlé de la complexité et de l’illisibilité du dispositif. Il faut bien le reconnaître, aussi bien sous les gouvernements que nous soutenions que depuis 2012, les règles du jeu ont été modifiées, pour ainsi dire, tous les quatre matins.
Notre collègue Vincent Delahaye a le mérite, depuis deux ans, de soulever cette question et de travailler à un nouveau mécanisme. Certes, le problème du coût se pose. Toutefois, j’ai un peu de mal à croire, monsieur le secrétaire d’État, que le chiffre que vous venez d’annoncer reflète la réalité de la situation.
On a là un nouveau dispositif, qui pourrait être durable. Les dispositions visant des chocs d’offre ou des allégements pour détention longue sont complètement illisibles ! Les notaires nous l’ont dit, les chocs d’offre ne fonctionnent absolument pas. Ils ne déclenchent que des effets d’aubaine : celui qui se trouve là au bon moment en profite, et c’est tant mieux pour lui.
Le cas contraire s’est aussi présenté : il faut voir les bêtises que nous avons commises sur le foncier non bâti, avec ces taxes à cinq euros le mètre carré, qui auraient dû passer à dix euros le mètre carré. Franchement, on a tout essayé ! Selon moi, on s’est beaucoup trompé au cours des dernières années. Il faut donc que l’on trouve le dispositif le plus simple et le plus clair possible, permettant de neutraliser la durée de détention.
Le seul point d’achoppement, qui est peut-être traité par le sous-amendement défendu par M. Bouvard, c’est la durée de la période transitoire. Deux ans, c’est court. Une durée de trois ou quatre ans ne m’aurait pas particulièrement choqué. À mes yeux, le dispositif est bon, même si l’on peut encore discuter de la durée minimale de détention.
Je suis tout à fait défavorable à cet amendement. M. le secrétaire d’État a eu raison de l’indiquer, nous avons besoin aujourd'hui d’une grande stabilité dans le domaine fiscal.
Chers collègues, ce que vous proposez, je le rappelle, aura pour premier effet de diminuer le montant des sommes payées par la grande masse des vendeurs de terrains qui réalisent une plus-value immobilière.
Par ailleurs, j’observe que la majorité du Sénat propose un mécanisme visant à favoriser un certain nombre de transactions, alors qu’elle a supprimé au sein de la commission des finances l’avantage fiscal accordé au logement social au moment de la vente du terrain – aujourd'hui, quand la vente s’effectue en faveur d’un organisme d’HLM, le vendeur bénéficie d’allégements fiscaux. J’espère bien que l’Assemblée nationale restaurera ces dispositions.
Les seuls mécanismes dont l’efficacité a été prouvée concernent des créneaux très limités du marché. Sinon, ils se traduisent par une hausse des prix, par un biais ou un autre.
Certes, une réforme fondamentale de la fiscalité sur les transactions immobilières et sur le foncier est nécessaire, car la compétitivité de la France pâtit de la rente foncière considérable qui s’est accumulée au cours du temps. Tous les experts économiques considèrent qu’il s’agit là d’un handicap majeur de notre pays. De ce point de vue, France Stratégie a réalisé un certain nombre d’études tout à fait intéressantes.
Si l’on veut réformer le système, et il faut le faire, il convient de procéder de manière globale et pérenne.
On ne peut donc pas éluder la question de l’évolution du foncier non bâti et, plus globalement, de la taxe foncière. Dans la plupart des pays du monde, le foncier est taxé en fonction de la valeur vénale du bien. Ainsi, dans le cas de la construction d’un tramway, la valeur du bien a un impact sur le montant de l’impôt versé. Au moment de la transaction, la plus-value effectivement réalisée est taxée, de manière que la puissance publique puisse récupérer une partie de ce que le privé a capté de la richesse publique d’intérêt général. Il y a donc un effet anti-spéculatif.
En conclusion, en l’état actuel des choses, la mesure que vous proposez allégera la taxe pesant sur un certain nombre de propriétaires qui ont les moyens de payer et favorisera l’augmentation des prix du foncier, …
… car vous avez supprimé les outils de régulation qui existaient.
Selon moi, il faut donc s’opposer fermement à l’amendement qui nous est proposé.
Je soutiens le principe qui a présidé à l’élaboration de cet amendement. Je considère en effet que le système d’abattement actuellement en vigueur ne fait que favoriser la durée de la détention.
Au sein du groupe de travail, nous avons comparé le nombre de logements vacants, qui ne sont mis ni en location ni à la vente, soit 2, 8 millions d’habitations, au nombre de logements dont nous manquerions dans notre pays, qui est estimé à un million environ. Dans un tel contexte, je me pose la question : ce système d’abattement ne fait-il que favoriser la spéculation ?
Par ailleurs, j’avais imaginé, et M. Vincent Delahaye l'avait promis, qu’une telle modification de la fiscalité serait neutre en termes de recettes fiscales. Or je constate sur ce point une différence d’appréciation relativement importante entre le Gouvernement et l’auteur de l’amendement. Par conséquent, il ne m’est pas possible de suivre complètement le raisonnement proposé et je demande une estimation réelle et contradictoire de la situation.
Sur le cas particulier des terrains à bâtir, je prendrai l’exemple des pays nordiques, dans lesquels la plus-value, hors érosion monétaire, est taxée à 100 %, directement versée aux collectivités et affectée au logement. Ce serait selon moi une bonne mesure à prendre, si l’on considère le manque de foncier actuel. Dans tous les cas, cela donnerait des moyens supplémentaires aux collectivités pour faire de la construction.
Par conséquent, bien que je soutienne le principe qui sous-tend cet amendement, je m’abstiendrai.
Le prix du foncier est effectivement un dossier intéressant. Certains prétendent d’ailleurs que ce seul facteur renchérit de 50 % le coût du logement en France par rapport à celui qui s’applique en Allemagne. Au demeurant, tout ceci mériterait d’être vérifié.
Si la fiscalité organise, bien sûr, les conditions du marché, des outils adéquats sont également nécessaires. Dans la région parisienne, où vous avez été élue durant de nombreuses années, madame Lienemann, …
… nous disposions d’un outil, l’Agence foncière technique de la région parisienne, ou AFTRP. Elle a acquis des milliers d’hectares pour construire cinq villes nouvelles.
Or, aujourd'hui, plus une seule commune n’est capable de constituer une réserve d’un ou deux hectares ! Pourquoi ? La réponse est simple : l’AFTRP a été complètement dépouillée de l’instrument dont elle disposait pour agir, à savoir le Fonds national d’aménagement foncier et d’urbanisme.
Il s’agissait d’un compte spécial du Trésor, dont les dotations permettaient d’allouer à l’Agence des avances pour financer, par exemple, le lancement de projets de construction de lignes de tramway ou de train – ce compte spécial a même permis, dans certains cas, de financer leur équipement. Grâce au crédit revolving, les comptes de l’AFTRP étaient parfaitement équilibrés, et des milliers de maîtrises foncières ont pu être réalisées, la plupart du temps sans expropriation.
Le problème de la région parisienne, c’est que depuis la suppression de ce compte spécial du trésor, aucune anticipation d’aucune sorte n’est plus possible ! Une commune ou un département, face à un problème foncier, n’a plus les moyens de procéder à des acquisitions.
Il faut donc certes améliorer la législation fiscale, mais surtout réfléchir aux outils qui ont permis d’accomplir ce travail de façon intelligente pendant trente ans.
Le président de la commission des finances de l’Assemblée nationale doit se féliciter de cette situation, puisqu’il fut l’un des administrateurs de ce compte spécial du Trésor.
Nous pouvons au moins nous accorder sur un point : comme l’a dit Daniel Raoul, le système actuel favorise franchement les détentions longues.
Il faut attendre vingt-deux ans pour obtenir l’exonération d’impôt sur le revenu pour durée de détention, et même trente ans pour l’exonération des prélèvements sociaux. Ces délais, loin d’encourager la rotation, incitent les propriétaires à ne pas céder leur bien.
Nous avions d’ailleurs voté, sur l’initiative du Gouvernement – donc, selon toute vraisemblance, en accord avec le groupe socialiste –, la suppression de l’abattement pour durée de détention applicable à l’imposition des plus-values de cessions de terrains à bâtir : c’était l’objet de l’article 27 de la loi de finances pour 2014.
Le Conseil constitutionnel avait censuré cette disposition, tout simplement parce que le Gouvernement avait oublié de tenir compte de l’érosion monétaire. Toutefois, le principe de cette réforme avait bel et bien été acté. Je m’étonne donc que l’on nous dise aujourd’hui que ce n’est pas possible.
Le principe avait été acté, mais seulement sur une durée limitée.
Non ! L’abattement devait être supprimé à compter du 1er mars 2014, monsieur le secrétaire d'État.
J’ai apprécié l’intervention de mon collègue Daniel Raoul. Nous avons beaucoup discuté sur ce sujet, et je le remercie d’avoir exprimé son point de vue comme il l’a fait.
En revanche, je m’insurge fortement contre les chiffrages à l’emporte-pièce fournis par M. le secrétaire d’État. Je suis prêt à m’assoir autour d’une table avec ses services pour que nous analysions ensemble les chiffres. Et je prends le pari que ma proposition, si elle est adoptée, aura pour effet une augmentation, et non une diminution, des recettes liées au régime des plus-values de cessions immobilières !
Bercy a pu nous fournir des éléments de chiffrage sur la base de 100 000 transactions. Ces éléments sont nouveaux : auparavant, toute simulation était impossible, soit – dans un premier temps – parce que les plus-values faisaient l’objet d’une autodéclaration, ce qui affectait l’efficacité du dispositif, soit – dans un second temps, depuis que les notaires sont chargés de déclarer les plus-values, avec à la clef d'ailleurs une progression de 50 % des recettes afférentes –, parce que ces déclarations étaient stockées, mais non saisies informatiquement. Il n’était pas possible de ressortir chaque année l’ensemble des liasses des déclarations des notaires pour en tirer des simulations !
Les services de Bercy ne sont pas en cause – j’ai d’ailleurs félicité le service de communication du ministère. Néanmoins, sans saisie informatique, toute simulation précise, donc tout chiffrage, était par définition rendue impossible.
Les choses ont changé depuis le premier semestre de 2014, et des éléments de chiffrage ont pu être fournis sur la base de 100 000 transactions. Le produit issu de ces transactions s’élève à environ 320 millions d’euros. Or, je l’ai précisé tout à l’heure, avec un taux d’imposition réel de 10, 2 %, la simulation, sur la même base de transactions imposables, donne le même produit. Je vous propose 15 %, c’est-à-dire, normalement, un tiers de recettes supplémentaires. Ce n’est pas aberrant !
La réforme que j’ai proposée était pensée pour être à recettes constantes ; elle ne représente, quoi qu’il en soit, aucun coût supplémentaire : il s’agit d’un impôt avec un taux plus bas, mais une assiette plus large, donc économiquement plus efficace.
Ce système me paraît bon : il tient compte de l’érosion monétaire et les délais qu’il prévoit sont suffisants pour que les agents économiques puissent faire des choix – vendre immédiatement, ou intégrer le nouveau système. Il est fait pour durer au moins vingt ans, en tout cas je l’espère. En matière fiscale, c’est très long !
Sourires.
Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, n'adopte pas le sous-amendement.
C’est illogique ! Si j’avais imaginé que la gauche voterait contre le sous-amendement, j’aurais demandé un scrutin public !
Je mets aux voix l'amendement n° I-371 rectifié ter.
J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe de l'UDI-UC.
Je rappelle que la commission s'en remet à la sagesse du Sénat et que l'avis du Gouvernement est défavorable.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
Le scrutin a lieu.
Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
Il est procédé au dépouillement du scrutin.
Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 69 :
Le Sénat a adopté.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 2 bis.
Au f du 1 de l’article 195 du code général des impôts, le nombre : « 75 » est remplacé, deux fois, par le nombre : « 74 ».
L'amendement n° I-25, présenté par M. de Montgolfier, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Remplacer les mots :
Au f du 1 de
par le mot :
et le mot :
deux
par le mot :
trois
La parole est à M. le rapporteur général.
Il s'agit d’un amendement de cohérence, dont l’adoption n’entraînerait pas de coût supplémentaire.
Il s’agit de plus que d’un amendement de cohérence, monsieur le rapporteur général ! Vous étendez aux couples le régime que l’Assemblée nationale a adopté pour les personnes isolées. Le vote de cet amendement aurait des conséquences financières, puisque le coût de ce dispositif passerait de 7 à 44 millions d’euros.
Votre amendement est néanmoins utile : il tend à substituer au dispositif adopté à l’Assemblée nationale, sur lequel le Gouvernement avait émis un avis de sagesse, un système plus équitable. C’était d’ailleurs l’intention des auteurs de l’amendement déposé à l’Assemblée nationale : malgré une rédaction limitée aux personnes isolées, ils souhaitaient bel et bien viser les couples.
Le Gouvernement s’en remet à la sagesse du Sénat, et il lève le gage, monsieur le président.
M. André Gattolin applaudit.
Il s’agit donc de l’amendement n° I-25 rectifié.
La parole est à M. Claude Raynal, pour explication de vote.
M. Claude Raynal. Cet amendement de la commission des finances vise, tout à fait légitimement, à élargir aux couples le bénéfice de cette disposition. Nous y sommes favorables, et nous voterons donc en sa faveur, ce qui nous évitera, monsieur le rapporteur général, un nouveau scrutin public.
Sourires.
Je soutiens évidemment cet amendement présenté par M. le rapporteur général. Certes, il est de cohérence, mais il tend surtout à œuvrer pour la reconnaissance du monde combattant.
En effet, la mesure proposée abaisse d’un an, de soixante-quinze ans à soixante-quatorze ans, l’âge minimum permettant aux titulaires de la carte du combattant ou d’une pension militaire d’invalidité, à leurs veuves, ainsi qu’aux conjoints mariés ou pacsés, de bénéficier de la demi-part supplémentaire de quotient familial, sachant que l’attribution de la carte du combattant est, depuis le 1er octobre 2015, étendue aux militaires ayant servi au moins quatre mois en opération extérieure, ou OPEX.
Dans le contexte dramatique que nous vivons, ce message de reconnaissance et de respect, qui s’inscrit également dans le cadre du devoir de mémoire, me paraît nécessaire. Les bénévoles des associations patriotiques et de mémoire y sont d’ailleurs extrêmement sensibles.
Même s’il y a là un dilemme, puisque, je le répète, toute dépense supplémentaire est une recette en moins pour le budget de l’État, il s’agit d’une mesure d’équité et surtout de respect et de reconnaissance pour le monde combattant et pour tous ces bénévoles qui se dévouent.
L’amendement est adopté.
L'article 2 ter est adopté.
Au 2° du I de l’article 199 tervicies du code général des impôts, l’année : « 2015 » est remplacée par l’année : « 2017 ».
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° I-129 rectifié est présenté par Mme Estrosi Sassone, MM. Commeinhes, Bouchet et Morisset, Mme Di Folco, MM. B. Fournier, Vaspart, Cornu et Mandelli, Mme Deseyne, M. Mouiller, Mme Canayer, MM. Pillet et Lefèvre, Mme Primas, MM. Grand, Carle, Gournac et Leleux, Mmes Imbert et Deroche, MM. Gremillet et Milon, Mmes Morhet-Richaud et Gruny, M. Pellevat, Mmes Duchêne et Deromedi et MM. D. Laurent et Longuet.
L’amendement n° I-345 est présenté par MM. Eblé, Chiron, Lalande, Raynal, Yung et D. Bailly, Mmes Claireaux, Cartron et Emery-Dumas, MM. Filleul, Kaltenbach et Marie, Mmes D. Michel et Monier, M. Poher et Mme S. Robert.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Rédiger ainsi cet article :
I. – Au 2° du I de l’article 199 tervicies du code général des impôts, les mots : « jusqu’au 31 décembre 2015 » sont remplacés par les mots : « ayant fait l’objet d’un dépôt d’autorisation de travaux nécessaire au plus tard l’année suivant l’échéance de la convention prévue par le programme national de requalification des quartiers anciens dégradés ».
II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Jean-Marie Morisset, pour présenter l’amendement n° I-129 rectifié.
La loi de mobilisation pour le logement et la lutte contre l’exclusion a mis en place, en mars 2009, le programme national de requalification des quartiers anciens dégradés, dit « PNRQAD ».
Ce programme a pour objectif la requalification urbaine et sociale des quartiers, la résorption de l’habitat indigne, l’amélioration de la performance énergétique des logements et le maintien de la mixité sociale. Il se fonde sur une politique foncière volontariste.
Quelque quarante territoires ont ainsi passé une convention avec l’ANRU, l’Agence nationale pour la rénovation urbaine, l’ANAH, l’Agence nationale de l’habitat, et l’État. Les acquisitions portent sur des îlots soumis à démolitions partielles pour rendre les logements dignes en retrouvant plus de lumière, une ventilation naturelle et la sécurité incendie. L’ANRU aide les collectivités dans ces opérations.
La collectivité, dans un souci de mixité de l’offre de logements, revend aussi à des opérateurs privés.
Les procédures de maîtrise du foncier sont longues, complexes et font appel aux expropriations et aux pouvoirs de police du maire et du préfet. Les conventions portent sur sept ans ; la première a été signée en octobre 2010 à Saint-Denis et la dernière en 2014 à Nice. On constate donc selon les territoires une disparité de situation qui ne peut être traitée par une date unique.
De plus, les constats de l’ANRU sur ces opérations montrent que les acquisitions foncières s’effectueront jusqu’aux termes des conventions, pour des raisons tenant à la complexité déjà évoquée, mais aussi parce que les collectivités, confrontées aux difficultés financières que l’on connaît, étalent budgétairement leurs investissements.
Tel est l’objet de cet amendement, qui vise à différer la date du 31 décembre 2015.
Je ne répéterai pas ce que vient d’exposer notre collègue. Je me bornerai à ajouter qu’il s’agit, en fait, d’un ajustement des échéances des conventions. C’est essentiellement cet aspect que vise l’amendement.
Les opérations sont conduites, pour la plus ancienne, depuis octobre 2010, à Saint-Denis. La plus récente a débuté en mai 2014 à Nice. La complexité de la conduite de ces opérations nécessite d’allonger le délai prévu. Par conséquent, plutôt que de fixer pour leur échéance une date calendaire, comme c’était le cas avec le 31 décembre2015, nous proposons la formulation suivante : « Ayant fait l’objet d’un dépôt d’autorisation de travaux nécessaire au plus tard l’année suivant l’échéance de la convention prévue par le programme national de requalification des quartiers anciens dégradés ».
L’Assemblée nationale a voté, avec l’avis favorable du Gouvernement, la prolongation jusqu’au 31 décembre 2017, soit deux années supplémentaires. Ces deux amendements identiques visent à proposer une prolongation adaptée au rythme de conclusion des programmes, ce qui paraît utile et pratique.
Toutefois, la commission n’ayant pu estimer l’impact de cette mesure sur les finances publiques, elle s’en est remise à la sagesse du Sénat.
À l’Assemblée nationale, le dispositif a été prolongé jusqu’au 31 décembre 2017. L’objet principal de ces amendements identiques est de ne plus imposer de borne temporelle à ce dispositif.
Or le projet de loi relatif à la liberté de la création, à l’architecture et au patrimoine, qui est en cours d’examen à l’Assemblée nationale, a pour but de refondre les dispositifs de ce type. On assure donc la prolongation jusqu’au 31 décembre 2017 et, d’ici là, on peut penser que la loi à laquelle je fais référence sera non seulement adoptée, mais aussi promulguée et que nous disposerons donc d’un raccord, si je puis dire, tout à fait adapté.
Le Gouvernement était favorable à la prolongation du dispositif, comme vous l’êtes, mesdames, messieurs les sénateurs. Toutefois, il le borne à 2017 dans la mesure où, ensuite, c’est la loi qui précisera les choses. Je ne puis donc qu’être défavorable à ces deux amendements identiques.
Je souhaite poser une question complémentaire au Gouvernement.
Pour ce qui est des opérations en cours, qui, pour les dernières d’entre elles, peuvent encore nécessiter six ou sept ans, on comprend bien l’idée de les laisser aller jusqu’à la fin de leur cycle. Toutefois, monsieur le secrétaire d'État, une loi qui interviendrait ensuite serait-elle de nature à reprendre les engagements précédents ? On peut en douter.
On ne touche pas aux engagements précédents. Pour le dire très clairement : les dossiers déjà engagés iront jusqu’à leur terme. Ce sont les procédures de mise en route des nouveaux dossiers qui sont concernées par la date du 31 décembre 2017.
Monsieur le secrétaire d’État, j’ai une question : vous évoquez le 31 décembre 2017. Or l’amendement vise à remplacer les mots « jusqu’au 31 décembre 2015 » par les mots « ayant fait l’objet, etc. ». Dès lors, de quoi parlons-nous ? Je finis par avoir un doute…
Il s'agit d’un article additionnel, qui modifie le droit existant. Ce dernier fixe la date du 31 décembre 2015, même si l’Assemblée nationale a prévu une prolongation au 31 décembre 2017.
Nous modifions donc bien le droit positif existant.
Si j’ai bien compris ce qui nous est proposé au travers de ces amendements identiques, il s'agit de l’année non pas de l’achèvement du programme, mais du dépôt d’autorisation. Ce texte constitue donc une modification par rapport à ce qui a été voté à l’Assemblée nationale. Il s’agit de programmes déposés aujourd'hui, qui demandent à perdurer, alors que le nouveau texte n’est pas encore adopté. C’est d’ailleurs pour cette raison que je trouvais ces amendements identiques intéressants : pour l’instant, nous ignorons tout des dispositions de la prochaine loi !
À mon avis, ces amendements identiques tendent à apporter une protection, et nous ferions donc bien de les adopter.
Je mets aux voix les amendements identiques n° I-129 rectifié et I-345.
Les amendements sont adoptés.
Je suis saisi de cinq amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° I-342, présenté par MM. Eblé, Chiron, Lalande, Raynal, Yung et D. Bailly, Mmes Claireaux, Cartron et Emery-Dumas, MM. Filleul, Kaltenbach et Marie, Mmes D. Michel et Monier, M. Poher et Mme S. Robert, est ainsi libellé :
Après l’article 2 quater
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. − L’article 156 bis du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Le II est ainsi modifié :
a) Le premier alinéa est complété par les mots : « ni aux immeubles ayant fait l’objet d’une division à compter du 1er janvier 2009, sauf si : » ;
b) Le deuxième alinéa est supprimé ;
c) Le 1° est ainsi rédigé :
« 1° La société civile non soumise à l'impôt sur les sociétés ou la division a fait l'objet d'un agrément du ministre chargé du budget, après avis du ministre chargé de la culture, lorsque le monument a fait l'objet d'un arrêté de classement ou d’inscription, en tout ou en partie, au titre des monuments historiques et est affecté dans les quatre ans qui suivent cette demande à un usage compatible avec la préservation de son intérêt patrimonial ; » ;
d) Le 3° est ainsi rédigé :
« 3° Ou lorsque les associés de la société civile non soumise à l’impôt sur les sociétés sont membres d'une même famille. » ;
e) À la première phrase du sixième alinéa, les mots : « deuxième à quatrième » sont remplacés par les mots : « trois premiers » ;
f) Après le sixième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« En l’absence de changement de propriétaire et sauf avis contraire du ministre chargé de la culture, une société civile non soumise à l’impôt sur le revenu bénéficie de plein droit des dispositions de l’article 156 propres aux immeubles classés ou inscrits au titre des monuments historiques dans le cas où elle succède immédiatement à une copropriété ayant fait l’objet d’un agrément tel que défini au 1° du présent II. » ;
2° Le V est abrogé.
II. – Le présent article s'applique aux demandes d'agrément déposées à compter du 1er janvier 2015.
III. − Le I ne s’applique qu’aux sommes venant en déduction de l’impôt dû.
IV. – La perte de recettes pour l’État résultant du paragraphe précédent est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Vincent Eblé.
Cet amendement vise à la fois à réintégrer les monuments historiques inscrits dans le champ de l’agrément permettant à une SCI, une société civile immobilière, ou à une copropriété de bénéficier du régime des monuments historiques, à adapter les critères de délivrance de l’agrément aux réalités patrimoniales et à unifier l’agrément.
Il s’agit, tout d'abord, de réintégrer les monuments inscrits et d’assouplir les critères de délivrance de l’agrément. En effet, la réforme intervenue dans la loi de finances rectificative pour 2014 a bouleversé le régime fiscal des monuments historiques et l’a significativement restreint, au détriment de la préservation du patrimoine historique bâti. Le régime de l’agrément a d’abord été pensé pour de grands bâtiments – anciennes casernes, hôpitaux, couvents, etc. –, qui sont majoritairement inscrits.
Comme en témoigne la lecture des travaux préparatoires de l’Assemblée nationale sur le sujet, la réforme de 2009 avait pour but de contrôler les divisions abusives de petits édifices, châteaux ou hôtels particuliers, qui se prêtent mal à un découpage trop important, et non de bloquer des projets de rénovation dans des grands bâtiments, pour lesquels la division est indispensable tout à la fois pour financer les travaux et pour faire revivre le bâtiment. L’exclusion des monuments inscrits est donc assez difficile à comprendre.
Il faut également souligner qu’à l’occasion de l’examen de la loi dite « loi Macron », tant au Sénat qu’à l’Assemblée nationale, nous avions voté en faveur de la réinclusion des monuments inscrits au sein de l’agrément, mais que cet article a été invalidé par le Conseil constitutionnel au motif qu’il s’agissait d’un cavalier législatif. Le projet de loi de finances nous donne aujourd’hui l’occasion de mettre le droit en vigueur en conformité avec les visées déjà exprimées du législateur.
De même, les critères de délivrance de l’agrément ne paraissent pas assurer une protection effective de la qualité des immeubles à conserver. Deux points sont particulièrement problématiques : l’affectation de trois quarts des surfaces à l’habitation et l’instauration d’un délai de deux ans entre la demande de l’agrément et l’affectation à l’habitation. Il s’agit d’assouplir ces critères.
Les enjeux budgétaires n’apparaissent pas particulièrement significatifs. Le coût du régime des monuments historiques s’élevait à 60 millions d’euros en 2014, mais seule une fraction de cet agrégat est liée aux exceptions prévues à l’article 156 bis du code général des impôts.
Il paraît également opportun d’unifier l’agrément destiné aux SCI et aux copropriétés. Les dispositions concernant l’agrément sont distribuées à deux alinéas différents du code général des impôts, selon que le bien est détenu par le biais d’une copropriété ou d’une SCI.
Enfin, dans la mesure où les critères de délivrance de l’agrément sont et ont toujours été les mêmes pour une SCI et pour une copropriété, la délivrance d’un nouvel agrément en cas de passage d’une copropriété à une SCI ne se justifie par aucune nécessité, ni patrimoniale ni juridique. Elle contribue à faire perdre du temps tant à l’administration fiscale qu’aux parties prenantes du projet.
Il s’agit donc, par cet amendement, de clarifier le droit en prévoyant la délivrance d’un agrément unique.
Les deux amendements suivants sont identiques.
L'amendement n° I-343 rectifié est présenté par MM. Eblé, Chiron, Lalande, Raynal, Yung et D. Bailly, Mmes Claireaux, Cartron et Emery-Dumas, MM. Filleul, Kaltenbach et Marie, Mmes D. Michel et Monier, M. Poher et Mme S. Robert.
L'amendement n° I-401 rectifié est présenté par M. J.L. Dupont et les membres du groupe Union des Démocrates et Indépendants - UC.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 2 quater
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. − Aux 1° et 2° du II et au V de l’article 156 bis du code général des impôts, après les mots : « de classement », sont insérés les mots : « ou d’inscription ».
II. – Le présent article s'applique aux demandes d'agrément déposées à compter du 1er janvier 2015.
III. − Le I ne s’applique qu’aux sommes venant en déduction de l’impôt dû.
IV. – La perte de recettes pour l’État résultant du paragraphe précédent est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Vincent Eblé, pour présenter l'amendement n° I-343 rectifié.
Cet amendement était déjà contenu dans le précédent, si j’ose dire. Il vise uniquement l’extension du dispositif aux édifices inscrits.
La parole est à M. Vincent Delahaye, pour présenter l'amendement n° I-401 rectifié.
Le présent amendement tend à ce que les propriétaires indirects ou copropriétaires de monuments historiques inscrits puissent de nouveau bénéficier du régime fiscal des monuments historiques.
Ce régime permet aux propriétaires de monuments historiques de déduire de leur revenu foncier ou global une partie du coût des travaux réalisés sur le bâtiment. Il s’agit d’une incitation forte à l’entretien privé de notre patrimoine historique, d’autant plus nécessaire que l’État et les collectivités territoriales ont de moins en moins les moyens d’assurer seuls la préservation de l’ensemble du patrimoine monumental français. Il faut d’ailleurs rappeler que près de la moitié des 44 000 monuments historiques que compte la France est détenue par des personnes privées.
La loi de finances rectificative pour 2014 a exclu de ce régime les monuments inscrits détenus par propriété indirecte ou en copropriété. Pourtant, la détention indirecte ou en copropriété concerne presque toujours les monuments inscrits : un ancien hôpital, une caserne, un couvent ne peuvent, sauf rare exception, être détenus par une personne privée unique qui assumerait seule l’ensemble des charges liées à la rénovation et à l’entretien du bâtiment.
Cette exclusion ne représente pas un gain financier très important pour l’État, mais bloque la rénovation de nombreux monuments historiques inscrits.
C’est la raison pour laquelle cet amendement vise à réintroduire pleinement les monuments inscrits dans le régime des monuments historiques, afin de permettre à des sociétés civiles immobilières ou à des copropriétés de participer à la préservation de notre patrimoine.
Le coût de la réforme n’ayant pas été chiffré par le Gouvernement, il est difficile de donner une estimation précise des conséquences budgétaires de cet amendement. Celles-ci ne dépasseront pas quelques dizaines de millions d’euros, puisque le régime fiscal des monuments historiques s’élève à quelque 60 millions d’euros et que seule une fraction de ce montant est dirigée vers des propriétaires indirects ou des copropriétés.
En contrepartie, l’adoption de cet amendement permettrait de favoriser la conservation de notre patrimoine historique privé et sa mise à disposition, au bénéfice de l’ensemble de nos concitoyens.
L'amendement n° I-344, présenté par MM. Eblé, Chiron, Lalande, Raynal, Yung et D. Bailly, Mmes Claireaux, Cartron et Emery-Dumas, MM. Filleul, Kaltenbach et Marie, Mmes D. Michel et Monier, M. Poher et Mme S. Robert, est ainsi libellé :
Après l’article 2 quater
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – L’article 156 bis du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Après les mots : « est affecté », la fin du 1° du II est ainsi rédigée : «, dans les quatre ans qui suivent cette demande, à un usage compatible avec la préservation de son intérêt patrimonial ; »
2° Après les mots : « est affecté », la fin du V est ainsi rédigée : «, dans les quatre ans qui suivent cette demande, à un usage compatible avec la préservation de son intérêt patrimonial. »
II. – Le présent article s'applique aux demandes d'agrément déposées à compter du 1er janvier 2015.
III. − Le I ne s’applique qu’aux sommes venant en déduction de l’impôt dû.
IV. – La perte de recettes pour l’État résultant du paragraphe précédent est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Vincent Eblé.
Cet amendement a été défendu. Il vise les critères de délivrance de l’agrément.
L'amendement n° I-320 rectifié, présenté par MM. Guené et Baroin, Mmes Garriaud-Maylam et Cayeux, MM. Commeinhes, Joyandet, de Legge, Cambon, Mouiller, Masclet, Pellevat, Bignon, Grand, Milon, Doligé, D. Bailly et Gilles, Mmes Imbert et Estrosi Sassone, MM. Fouché, Perrin, Raison, Laufoaulu et Morisset, Mmes Morhet-Richaud et Chain-Larché, MM. Pierre et Bouchet, Mmes Troendlé et Hummel, MM. Dallier et Husson, Mme Deromedi, MM. Laménie, Saugey, D. Laurent, Savary, Revet et Grosdidier, Mmes Deseyne, Canayer et Deroche, MM. Falco, Trillard, Cornu, Vaspart et César, Mme Gruny, MM. Chasseing, Danesi, P. Leroy, B. Fournier, del Picchia et Lefèvre, Mme Primas, MM. Gournac, Mandelli et Dufaut et Mme Des Esgaulx, est ainsi libellé :
Après l’article 2 quater
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – À la première phrase du V de l’article 156 bis du code général des impôts, après les mots : « ministre de la culture, », la fin de l’article est ainsi rédigée :
« lorsque le monument :
« a) a fait l’objet d’un arrêté de classement ou d’une inscription, en tout ou en partie, au titre des monuments historiques au moins douze mois avant la demande d’agrément, et
« b) est affecté, dans les deux ans qui suivent cette demande, à l’habitation pour au moins 75 % de ses surfaces habitables portées à la connaissance de l’administration fiscale ; à cet égard, les immeubles ou fractions d’immeubles destinés à une exploitation à caractère commercial ou professionnel ne sont pas considérés comme affectés à l’habitation. »
II - Les dispositions du I ne s'appliquent qu'aux sommes venant en déduction de l'impôt dû.
III - La perte de recettes résultant pour l'État des I et II est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Éric Doligé.
Cet amendement, dans la même veine que ceux qui viennent d’être présentés, tend à s’appuyer sur les travaux réalisés par notre collègue Vincent Eblé.
Le V de l’article 156 bis du code général des impôts issu de la réforme engagée à la fin de 2014 limite fortement le bénéfice de la déduction du revenu imposable relative à la restauration des monuments historiques en copropriété. En sont en effet exclues toutes les copropriétés des immeubles « inscrits » à l’inventaire des monuments historiques.
Or les immeubles inscrits représentent les deux tiers des bâtiments historiques, et leur préservation est problématique, comme le souligne le rapport d’information de Vincent Eblé, établi en octobre 2015.
La lutte contre les schémas abusifs ayant été parachevée par les réformes successives de 2009 et de la fin de 2014, il est anormal, et au final très coûteux pour la collectivité, que ces immeubles inscrits ne puissent être éligibles au régime d’agrément ministériel préalable à leur division, régi par le V de l’article 156 bis.
L’amendement vise donc à rétablir cette possibilité d’agrément en cas de division d’un immeuble inscrit, en la soumettant aux conditions instaurées par la deuxième loi de finances rectificative pour 2014, tenant à la priorité donnée au logement et à l’antériorité de l’inscription du monument.
L’évaluation de l’impact budgétaire de ce réalignement fait apparaître un coût quasi nul, car l’avantage fiscal, limité, est compensé immédiatement par les recettes fiscales résultant de la restauration et de la transformation en logements, sans compter les gains pour les collectivités, qui sont liés à la vente des immeubles et à l’économie des charges d’entretien.
En pratique, la division en copropriété d’un monument historique inscrit est souvent utilisée pour des programmes de réhabilitation de casernes, d’hospices, etc. Exclure ces programmes du régime fiscal conduirait à laisser ces immeubles à l’abandon, donc à la charge des collectivités.
Par ailleurs, faciliter la réhabilitation de ces bâtiments favorisera au contraire l’activité du BTP et des métiers du patrimoine, tout en accroissant l’offre de logements.
Comme cela a été souligné, les dispositions de l’amendement n° I-342 présenté par Vincent Eblé font suite au contrôle approfondi que celui-ci a exercé sur le régime fiscal des monuments historiques et qui a fait l’objet d’une présentation extrêmement intéressante devant la commission.
Cet amendement tend à soulever deux problèmes.
Le premier problème est la différence de traitement entre les monuments détenus directement et ceux qui sont détenus par l’intermédiaire d’une société civile immobilière, ou SCI. Pourquoi la détention d’un monument par l’intermédiaire d’une SCI, avec un agrément qui, de surcroît, met en place des conditions restrictives, devrait-elle faire l’objet d’un régime fiscal différent ? Il s’agit d’un problème d’égalité devant l’impôt, qui est peut-être même de nature constitutionnelle.
Le second problème concerne les conditions de l’agrément, notamment l’obligation de consacrer une part prépondérante de ces monuments à l’habitation. Comme l’a souligné à juste titre Vincent Eblé, il ne s’agit pas d’un dispositif adapté, car les trois quarts des monuments ne sont pas destinés à l’habitation. Je pense aux bâtiments transformés en centres culturels ou destinés à l’hôtellerie. Bref, le critère à privilégier est davantage l’intérêt patrimonial du monument, dans l’esprit de la loi de 1913 sur les monuments historiques, que sa transformation en logement.
Les élus locaux, quelle que soit leur appartenance politique, peuvent tous constater qu’il existe des réutilisations réussies de monuments historiques – à commencer par le Palais du Luxembourg où nous siégeons, sans parler des nombreux ministères classés. Ce ne sont pas forcément des transformations en logement.
Dans la pratique, comme l’a précisé Vincent Eblé, une telle disposition pose de vraies difficultés au bureau des agréments. Comment apprécier l’affectation aux trois quarts de la superficie lorsqu’il s’agit d’un château ou d’une ancienne abbaye ? Doit-on prendre en compte les annexes, les greniers, les douves, etc. ?
L’amendement n° I-342 est un amendement bon sens, sans coût réel, puisqu’il vise à prévoir un simple réaménagement. Le coût total de la dépense fiscale sera relativement modeste au regard des 42 000 monuments protégés. C’est la raison pour laquelle la commission des finances a émis un avis favorable.
La commission est également favorable aux amendements identiques n° I-343 rectifié et I-401 rectifié, ainsi qu’aux amendements n° I-344 et I-320 rectifié, mais elle demande à leurs auteurs de bien vouloir se rallier à l’amendement n° I-342, dont la rédaction, plus aboutie, est de nature à atteindre l’objectif visé par toutes ces dispositions.
Je ne partage pas l’analyse de M. le rapporteur général : une détention directe ou via une SCI ou une copropriété ne crée pas des droits ou des devoirs différents – c’est le point mis en avant par la commission, y compris pour des questions de constitutionnalité. Que l’on soit propriétaire individuel, propriétaire au travers d’une SCI ou propriétaire en copropriété, les conditions sont les mêmes.
Quelles sont-elles ? Tout d’abord, il doit s’agir d’un monument classé. Sur ce point, il existe bien entre nous une différence, que nous assumons. Vous souhaitez que la mesure concerne tous les monuments inscrits, alors que le Gouvernement souhaite quant à lui clairement resserrer le dispositif sur les seuls monuments classés. Cependant, contrairement à ce que vous avez affirmé, cela ne pose pas de problème d’égalité devant l’impôt ni de problème de constitutionnalité.
Il existe également une seconde différence entre nous : nous avons souhaité recentrer le dispositif en prévoyant une condition : quelque 75 % de la surface habitable doivent être consacrés au logement. Je précise bien qu’il s’agit de la surface habitable, non de la surface totale.
C’est une volonté politique de la part du Gouvernement, avec laquelle vous pouvez ne pas être d’accord. Vous avez d’ailleurs proposé une rédaction beaucoup plus large, puisque vous prévoyez que cette demande soit affectée « à un usage compatible avec la préservation de son intérêt patrimonial ». J’ignore ce qu’en pensera le Conseil constitutionnel, mais il risque d’y voir un cas d’incompétence négative…
Par ailleurs, comment estimer la préservation de l’intérêt patrimonial suivant la nature de l’opération, selon qu’il s’agisse d’un musée, de bureaux, de logements, d’un commerce, d’une salle de sport, d’un gîte rural, que sais-je encore ? Les choses peuvent être vues d’une façon ou d’une autre. Cette rédaction est donc très fragile et peut donner lieu à des applications extrêmement subjectives, ce qui n’est pas le but du législateur.
Bref, il est important de clarifier ces points. Nous avons des lectures différentes. Pour ma part, je prétends que le mode de détention du patrimoine n’a pas d’influence sur les conditions de sa fiscalité.
De plus, il nous a paru légitime, en cas de changement du mode de détention, de renouveler l’agrément, car il s’agit de personnes juridiques différentes.
Enfin, le Gouvernement souhaite s’en tenir aux monuments classés, alors que vous souhaitez assouplir le dispositif en l’élargissant aux monuments inscrits et en faisant sauter la condition de logement. Une telle mesure aura certainement des incidences en termes de coût. Je ne conteste pas les chiffres que vous avez évoqués. Ils sont de l’ordre de 60 ou de 70 millions d’euros. Quel sera exactement le surcoût ? Je l’ignore. Je suis uniquement en mesure de vous dire que l’on recevait environ soixante demandes d’agrément entre 2012 et 2014.
Pour toutes ces raisons, le Gouvernement a émis un avis défavorable sur l’ensemble de ces amendements.
Je souhaite m’expliquer sur la différence de traitement, qui pose à mon sens un problème d’égalité devant l’impôt, peut-être de nature constitutionnelle.
Je parlais bien, monsieur le secrétaire d'État, de la différence de traitement entre deux monuments inscrits, et non de la différence entre monuments classés et monuments inscrits.
Prenons deux monuments inscrits : un monument A détenu directement par un propriétaire et un monument B détenu par une SCI. Pourquoi le monument A peut-il bénéficier des dispositions de l’article 156 bis du code général des impôts, contrairement au monument B ? Il ne me paraît pas opportun que le mode de détention influence le régime fiscal.
Le fait que les monuments détenus de manière indirecte, sauf les SCI familiales, soient exclus ipso facto du bénéfice de l’article 156 bis du code général des impôts pose, selon moi, un problème de nature constitutionnelle.
Monsieur le secrétaire d’État, les dépenses liées au dispositif Malraux sont très stables dans la durée, puisqu’elles oscillent globalement chaque année entre 50 et 60 millions d’euros. Le nombre de dossiers déposés est donc à peu près le même d’un an sur l’autre. Dans le même temps, certains édifices se dégradent, ce qui met en péril une partie du patrimoine protégé de notre pays.
Pour ma part, je suis tout à fait favorable à ce que l’on élargisse le dispositif aux monuments inscrits. En effet, la différence entre monuments classés et monuments inscrits se justifiait il y a quarante ou cinquante ans, mais elle ne vaut plus depuis quelques années. En effet, la qualité du monument n’est plus le seul paramètre qui entre en ligne de compte pour le classement. Disons-le clairement : si l’on ne procède quasiment plus à des classements, mais uniquement à des inscriptions à l’inventaire complémentaire des monuments historiques, c’est d’abord pour des raisons budgétaires, car l’État se doit d’apporter davantage de subventions au patrimoine classé.
Je le répète, le problème de fond auquel nous sommes confrontés est la dégradation de notre patrimoine.
D’un côté, les crédits de l’action Patrimoine monumental diminuent ou stagnent depuis quelques années, même si pour 2016 un rétablissement a été décidé ; de l’autre, notre patrimoine monumental continue à se dégrader. Nous devons passer à la vitesse supérieure, dans le même esprit que la loi Malraux, votée à l’époque pour inciter l’investissement privé en faveur du patrimoine. C’est évident, tout cela aura un coût budgétaire, mais qui sera somme toute assez limité au regard des enjeux, car cette dépense fiscale n’est pas galopante et elle est loin d’être exorbitante au regard d’autres dépenses.
Comme je l’ai souligné au cours de la discussion générale, je plaide en faveur d’une vision consolidée des crédits budgétaires et de la dépense fiscale dans les politiques d’investissement de l’État.
M. Vincent Eblé. Nous savons de façon certaine que l’ensemble du dispositif coûtait quelque 60 millions d’euros avant la réforme de 2014.
M. Michel Bouvard opine.
Néanmoins, il ne peut s’agir que d’une fraction de 60 millions d’euros, ce qui reste une somme assez raisonnable.
Je veux simplement apporter une précision sur l’évolution du nombre des inscriptions. Je constate en effet que les DRAC font du zèle en inscrivant à l’inventaire supplémentaire des monuments historiques des églises que les communes sont incapables de maintenir en état. Je pourrai citer des exemples précis.
Je n’arrive pas à comprendre l’intérêt culturel ou artistique de ce classement ! Je ne vois pas pourquoi on continue à classer des monuments en état de quasi-péril, que les communes ne peuvent pas continuer à entretenir.
L'amendement est adopté.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 2 quater.
En outre, les amendements identiques n° I-343 rectifié et I-401 rectifié, ainsi que les amendements n° I-344 et I-320 rectifié, n’ont plus d'objet.
Le IX de l’article 199 novovicies du code général des impôts est abrogé à compter du 1er janvier 2016. –
Adopté.
L’amendement n° I-356 rectifié, présenté par Mme Lamure, MM. Retailleau, Allizard, G. Bailly, Baroin, Bignon, Bizet, Bonhomme, Buffet, Calvet et Cambon, Mme Canayer, M. Cardoux, Mme Cayeux, MM. César, Chaize, Charon, Chasseing, Chatillon, Commeinhes, Cornu, Dallier et Danesi, Mme Debré, MM. Delattre et del Picchia, Mmes Deroche, Deromedi, Des Esgaulx, Deseyne et Di Folco, M. P. Dominati, Mmes Duchêne et Estrosi Sassone, M. Bouchet, Mme Duranton, MM. B. Fournier, J.P. Fournier et Frassa, Mme Garriaud-Maylam, M. Genest, Mme Giudicelli, MM. Gournac, Gremillet et Grosdidier, Mme Gruny, MM. Huré, Husson, Joyandet et Karoutchi, Mme Keller, MM. Kennel, D. Laurent, Lefèvre, Leleux et Lenoir, Mme Lopez, MM. Malhuret, Mandelli, Masclet, A. Marc et Mayet, Mmes M. Mercier et Micouleau, MM. Milon, Morisset, Mouiller, Nègre, de Nicolaÿ, Panunzi, Paul, Pellevat, Perrin, Pierre, Pillet, Pointereau et Poniatowski, Mme Primas, MM. de Raincourt, Raison, Reichardt, Revet, D. Robert, Savary, Savin et Trillard, Mme Troendlé et MM. Vaspart, Vasselle, Vogel, Dassault et Dufaut, est ainsi libellé :
Après l’article 2 quinquies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Lorsque les conditions prévues au II du présent article sont remplies, les gains nets mentionnés à l’article 150-0 A du code général des impôts sont réduits, par dérogation au 1 ter de l’article 150-0 D du même code, d’un abattement égal à :
1° 50 % de leur montant lorsque les actions, parts, droits ou titres sont détenus depuis moins de quatre ans à la date de la cession ;
2° 75 % de leur montant lorsque les actions, parts, droits ou titres sont détenus depuis au moins quatre ans et moins de huit ans à la date de la cession ;
3° 100 % de leur montant lorsque les actions, parts, droits ou titres sont détenus depuis au moins huit ans à la date de la cession.
II. – L’abattement mentionné au I s’applique lorsque sont réunies les conditions suivantes :
1° La cession est intervenue entre le 15 décembre 2015 et le 31 décembre 2016 ;
2° Les actions, parts ou droits cédés ne sont pas éligibles au plan d’épargne en actions destiné au financement des petites et moyennes entreprises et des entreprises de taille intermédiaire mentionné à l’article L. 221-32-1 du code monétaire et financier ;
3° Le produit de la cession est, dans un délai de trente jours, versé sur un plan d’épargne en actions destiné au financement des petites et moyennes entreprises et des entreprises et investis en titres mentionnés à l’article L. 221-32-2 du même code ;
4° Le contribuable s’engage à détenir les titres mentionnés au 3° de manière continue pour une durée minimale de 5 ans.
III. – Un décret précise les obligations déclaratives nécessaires à l’application du présent article.
IV. – La perte de recettes pour l’État résultant des I et II du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits mentionnés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Francis Delattre.
Nous allons désormais aborder un certain nombre de questions liées au financement de notre économie, qui concernent en particulier les PME, PMI et ETI, ou entreprises de taille intermédiaire.
Le présent amendement a pour objet le plan d’épargne en actions destiné au financement des PME et ETI, le PEA-PME, un très bon outil qui mériterait d’être développé. À cette fin, le Sénat avait déjà voté un amendement en ce sens lors de l’examen de la loi Macron.
Il s’agit d’instaurer un dispositif d’abattement exceptionnel, afin d’encourager l’investissement dans le PEA-PME et de permettre ainsi aux PME, PMI et ETI de disposer de fonds et moyens propres.
Il faut bien comprendre une réalité de ce pays : quelque 90 % des investissements des entreprises sont financés par des crédits bancaires. C’est un véritable problème pour la France, qui est, de ce fait, désavantagée par rapport à ses concurrents. À cet égard, nous en étions tous d’accord, le PEA-PME est un bon dispositif. Il permet en effet d’orienter l’épargne française vers le secteur économique, lequel est plus « à risque » que les placements traditionnels, tels que l’assurance-vie ou les livrets d’épargne.
La commission est favorable à cette mesure, qui avait été adoptée à l’occasion de l’examen de la loi Macron.
Cet amendement vise à encourager ou à relancer le PEA-PME, lequel ne rencontre malheureusement pas le succès escompté. Je souligne que le dispositif proposé, dont le coût est très limité, est entouré d’un certain nombre de garanties qui doivent permettre d’éviter les dérapages : des conditions d’investissement effectives dans les titres éligibles au PEA-PME et une obligation de détention d’une durée minimale de cinq ans. Par ailleurs, les titres cédés ne doivent pas être éligibles au PEA-PME, afin d’éviter les effets d’aubaine.
Compte tenu de ces garanties et de l’utilité du dispositif pour encourager l’investissement dans le PEA-PME, la commission a émis, je le répète, un avis favorable.
Mesdames, messieurs les sénateurs, le Gouvernement réfléchit actuellement à la mise en place de dispositions non pas identiques, mais proches de celles que vous préconisez, qu’elle vous soumettra à l’occasion de la présentation du projet de loi de finances rectificative.
Nous vous proposerons ainsi d’exonérer les plus-values de SICAV à hauteur des montants investis dans les PME-PEA, et non pas celles de titres de PME, comme vous l’indiquez dans l’amendement.
J’ai bien compris que vous aviez prévu des mesures d’encadrement, mais il me paraît toutefois difficile de contrôler le dispositif. Il faudra en effet s’assurer que les plus-values proviennent de titres non éligibles au PEA-PME.
Certes, philosophiquement, l’intention est bonne, mais, encore une fois, ce sera difficile à contrôler. En effet, vous pouvez investir dans un PEA-PMA sous forme de liquidités. Il faudra donc vérifier que le montant correspondant à l’abattement de certaines plus-values soit bien réinvesti dans le PEA-PMA, lequel comporte une part en liquidités et une part en titres.
Le dispositif est assez lourd, même s’il est intellectuellement séduisant. Pour ma part, je me mets à la place de la personne qui devra contrôler une telle opération, y compris dans le temps : ce sera difficile, dans la mesure où l’investissement peut être immédiatement suivi d’une revente. Peuvent se produire des effets de contournement et d’opportunité tout à fait massifs.
Vous prévoyez que le montant consacré au PEA-PME doit être investi en actions. Certes, mais si celles-ci sont vendues trois jours plus tard, que se passera-t-il ?
Pour le PEA-PME ? Dans ce cas, j’ai lu le texte de cet amendement un peu trop vite...
Quoi qu’il en soit, cette proposition doit être retravaillée. À ce stade, le Gouvernement y est défavorable.
Vous nous avez dit, monsieur le secrétaire d’État, que vous alliez proposer un dispositif visant à atteindre le même objectif que celui qui est visé au travers de cet amendement. Pourriez-vous nous indiquer à quelle date ?
Nous sommes prêts à retirer notre amendement. Nous comprenons tout à fait qu’un dispositif fiscal doive être techniquement au point.
Nous présenterons ce dispositif à l’occasion de l’examen du projet de loi de finances rectificative.
L’amendement n° I-356 rectifié est retiré.
L’amendement n° I-357, présenté par Mme Lamure, MM. Retailleau, Allizard, G. Bailly, Bignon, Bizet, Bouchet, Buffet, Calvet et Cambon, Mme Canayer, M. Cardoux, Mme Cayeux, MM. César, Chaize, Charon, Chasseing, Chatillon, Commeinhes, Cornu, Dallier et Danesi, Mme Debré, MM. de Nicolaÿ, Delattre, de Raincourt et del Picchia, Mmes Deroche, Deromedi, Des Esgaulx, Deseyne et Di Folco, M. P. Dominati, Mmes Duchêne, Duranton et Estrosi Sassone, MM. B. Fournier, J.P. Fournier et Frassa, Mme Garriaud-Maylam, M. Genest, Mme Giudicelli, MM. Gournac, Gremillet et Grosdidier, Mme Gruny, MM. Huré, Husson, Joyandet et Karoutchi, Mme Keller, MM. Kennel, D. Laurent, Lefèvre, Leleux et Lenoir, Mme Lopez, MM. Malhuret, Masclet, A. Marc, Mandelli et Mayet, Mmes M. Mercier et Micouleau, MM. Milon, Morisset, Mouiller, Nègre, Panunzi, Paul, Pellevat, Perrin, Pierre, Pillet, Pintat, Pointereau et Poniatowski, Mme Primas, MM. Raison, Reichardt, Revet, D. Robert, Savary, Savin et Trillard, Mme Troendlé et MM. Vaspart, Vasselle, Vogel, Dassault et Dufaut, est ainsi libellé :
Après l’article 2 quinquies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le 2 du II de l’article 150-0 A du code général des impôts est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Elle n’est pas non plus applicable lorsque les actions, parts ou droits cédés ne sont pas éligibles au plan d’épargne en actions destiné au financement des petites et moyennes entreprises et des entreprises de taille intermédiaire mentionné à l’article L. 221-32-1 du code monétaire et financier, que le produit de la cession est, dans un délai de trente jours, versé sur un plan d’épargne en actions destiné au financement des petites et moyennes entreprises et des entreprises et investis en titres mentionnés à l’article L. 221-32-2 du même code et que le contribuable s’engage à détenir ces titres de manière continue pour une durée minimale de cinq ans ; »
II. - Après la première phrase du second alinéa du II de l’article L. 221-32 du code monétaire et financier, est insérée une phrase ainsi rédigée :
« Des retraits ou des rachats de sommes ou de valeurs figurant sur le plan peuvent également être effectués au cours des huit années suivant l’ouverture du plan sans entraîner la clôture, lorsque les actions, parts ou droits cédés ne sont pas éligibles au plan d’épargne en actions destiné au financement des petites et moyennes entreprises et des entreprises de taille intermédiaire mentionné à l’article L. 221-32-1, que le produit de la cession est, dans un délai de trente jours, versé sur un plan d’épargne en actions destiné au financement des petites et moyennes entreprises et des entreprises et investis en titres mentionnés à l’article L. 221-32-2 et que le cédant s’engage à détenir ces titres de manière continue pour une durée minimale de cinq ans. »
II. – Les I et II s’appliquent à compter du 15 décembre 2015.
III. - La perte de recettes résultant pour l’État des I, II et III est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Francis Delattre.
L’amendement n° I-357 est retiré.
L’amendement n° I-27, présenté par M. de Montgolfier, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Après l’article 2 quinquies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Au dernier alinéa du 1 de l’article 150-0 D du code général des impôts, après les mots : « ne s’applique pas », sont insérés les mots : « aux moins-values ni ».
II. – Le I s'applique aux moins-values réalisées à compter du 1er janvier 2013.
La parole est à M. le rapporteur général.
Cet amendement vise à préciser le droit positif, car nous contestons la doctrine fiscale en vigueur. Le jour même où la commission des finances a adopté le présent amendement, le Conseil d’État a annulé ladite doctrine fiscale et a confirmé notre interprétation de la loi : l’abattement pour durée de détention s’applique aux gains nets, et non pas aux moins-values mobilières.
Compte tenu de cet arrêt du Conseil d’État, je vais retirer l’amendement, en espérant que l’administration fiscale ne reviendra pas à la charge en énonçant une nouvelle doctrine. Nous souhaiterions entendre les engagements de M. le secrétaire d’État sur ce point.
Il est regrettable, selon moi, qu’il faille attendre un arrêt du Conseil d’État pour pouvoir contraindre l’administration fiscale à appliquer la bonne doctrine. Ce problème, qui est évident, avait été soulevé à plusieurs reprises. C’est la raison pour laquelle nous avions déposé cet amendement : nous voulions réaffirmer ce que dit la loi.
Nous demandons à M. le secrétaire d’État de prendre des engagements en matière de stabilité fiscale, et en attendant nous retirons cet amendement, monsieur le président.
Je tiens à être précis, car ce sujet, qui a d’ailleurs fait l’objet de discussions depuis de longs mois, est très important.
Le Conseil d’État ne dit pas la même chose que vous, monsieur le rapporteur général, au travers de votre amendement.
Si ! Il affirme que l’abattement pour durée de détention ne s’applique pas aux moins-values mobilières.
Non, ce n’est pas ce que dit le Conseil d’État. Nous avons examiné cette question délicate très attentivement.
Nous considérions auparavant que, par symétrie, l’abattement pour durée de détention devait s’appliquer de la même façon aux plus-values et aux moins-values. Un certain nombre de parlementaires le contestaient, notamment Gilles Carrez, président de la commission des finances de l’Assemblée nationale, qui a régulièrement déposé des amendements visant à supprimer cette disposition.
Le Conseil d’État n’a pas dit que l’abattement ne s’appliquait pas aux moins-values, mais qu’il convenait d'abord d’imputer les moins-values à des plus-values, puis de calculer l’abattement sur le solde. C’est complètement différent !
Un journal économique bien connu a consacré récemment un article à ce sujet : il a rendu compte de l’arrêt du Conseil d’État et donné des exemples. Si vous le lisez, vous vous rendrez compte que cet arrêt, je le répète, ne dit pas la même chose que votre amendement.
Nous évaluons actuellement le coût de la mesure préconisée par le Conseil d’État. Nous pensons qu’il est relativement faible, dans la mesure où le dispositif ne pourrait bénéficier qu’à ceux qui choisiraient d’imputer des moins-values sur des durées de détention très courtes de plus-values, ce qui serait un moyen d’optimisation.
L’adoption de votre amendement, en revanche, entraînerait un coût évalué entre 400 et 700 millions d’euros. Je vous remercie donc de l’avoir retiré, monsieur le rapporteur général. Je souhaitais cependant indiquer, pour la clarté de ce débat qui est suivi de près par les fiscalistes, quelle est notre lecture de l’arrêt du Conseil d’État.
L’amendement n° I-27 est retiré.
L’amendement n° I-26, présenté par M. de Montgolfier, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Après l’article 2 quinquies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Après le 5° ter de l'article 157 du code général des impôts, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« ...° Les gains nets mentionnés au 1 du I de l’article 150-0 A résultant de la cession à titre onéreux de droits sociaux, valeurs, titres ou droits considérés au moment de leur cession comme des biens professionnels en vertu de l’article 885 O bis ; ».
II. – Le I s’applique à compter du 15 décembre 2015.
III. – La perte de recettes pour l’État résultant des I et II du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
IV. – La perte de recettes pour les organismes de sécurité sociale résultant des I et II du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. le rapporteur général.
Le présent amendement vise à exonérer d’impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux les plus-values résultant de la cession de titres et droits considérés comme des biens professionnels.
Je suis conscient que cet amendement est lourd de conséquences, mais il s’agit là d’un véritable problème. Pour parler concrètement, certains des pays dont nous sommes limitrophes, comme le Luxembourg, la Suisse et la Belgique, ne taxent pas les plus-values mobilières.
Nous proposons, non pas d’aller aussi loin que ces pays, …
Sourires sur les travées du groupe socialiste et républicain.
… mais de ne pas taxer les plus-values mobilières issues de la cession de biens professionnels, au sens des dispositions fiscales relatives à l’impôt de solidarité sur la fortune.
Nous ne visons pas toutes les plus-values mobilières. Lorsqu’il s’agit de la gestion de portefeuilles de valeurs mobilières, il est normal qu’une taxation s’applique. En revanche, pour la cession d’une entreprise, nous préconisons une exonération. Cette mesure est destinée à éviter les exils fiscaux.
Comme l’a justement souligné Richard Yung hier, ce n’est pas l’impôt sur le revenu qui est à l’origine de l’exil fiscal. Ce n’est pas non plus la douceur du climat belge ou la beauté de l’architecture bruxelloise qui font que des contribuables s’installent à Uccle ou Ixelles !
Sourires.
Nous avons la conviction que ce dispositif n’entraînerait qu’une perte de recettes minime. Aujourd’hui, en effet, les plus-values résultant de la cession de biens professionnels d’entreprise sont relativement faibles, puisque les personnes concernées s’organisent : elles s’installent en Belgique ou en Suisse, par exemple, avant de vendre leur entreprise pour bénéficier de l’exonération.
Ce problème mérite d’être posé. Nous avons la conviction que les règles fiscales en vigueur ont pour résultat de faire partir des personnes, lesquelles sont de plus en plus jeunes. Lorsque des entrepreneurs âgés de 35 ou 40 ans cèdent aujourd’hui leur société, nous perdons des contribuables à l’impôt sur le revenu ou à l’ISF pour plusieurs années !
Nous avons donc tout intérêt à mettre en place un régime fiscal proche de celui de nos voisins. Cela fera revenir en France des contribuables qui paieront l’impôt sur le revenu, des impôts locaux et d’autres taxes. Quant à la perte de recettes induite par cette mesure, elle est à notre sens minime, puisque, je le répète, les plus-values importantes échappent, de fait, à l’impôt via les délocalisations.
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Pour le coup, c’est bien une révolution que vous proposez !
Sourires.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Le Sénat est plus avancé qu’on ne le pense !
Nouveaux sourires.
En disant cela, j’ai quasiment tout dit…
Le régime d’imposition des plus-values des valeurs mobilières a été revu dans un sens particulièrement favorable. Certains ont même estimé, avant d’occuper le poste qui est le mien aujourd’hui, que c’était un régime trop favorable, au motif qu’il prévoit des abattements pour des durées de détention extrêmement courtes. On aboutit ainsi très rapidement à une exonération de 65 % pour le régime de droit commun et de 85 % pour le régime dit « spécifique », c’est-à-dire favorable. C’est massif !
De plus, puisque vous évoquez ce cas, a été ajouté un abattement spécifique pour le départ à la retraite qui, de mémoire, est de 500 000 euros, ce qui n’est pas rien. Les salariés qui partent en retraite avec une prime de départ de 500 000 euros ne sont pas si nombreux… Le régime est donc très favorable.
Vous affirmez que certains pays limitrophes ont des régimes plus favorables. C’est vrai ! Toutefois, l’alignement sur les régimes les plus favorables, ne serait-ce qu’en Europe – je ne parle même pas du monde – conduirait immanquablement à la faillite de la plupart des budgets des pays européens. On trouve, ici ou là, des régimes plus favorables, soit en matière d’impôt sur le revenu, soit pour les plus-values, soit pour l’ISF, soit pour les contributions indirectes.
Si nous décidions de nous aligner systématiquement sur les régimes les plus favorables qui existent dans les pays voisins, nous serions confrontés à un déficit d’une ampleur comparable à celui que vous nous avez laissé en 2012.
Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.
L’adoption de cet amendement aurait un coût de plusieurs centaines de millions d’euros, et même plutôt – puisque celui-ci n’a pas été évalué avec précision – d’un milliard d’euros. Nous y sommes complètement opposés, monsieur le rapporteur général, et, si vous le mainteniez, je le soumettrais à la calculatrice qui fonctionne depuis le début de nos travaux !
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable.
Nous ne voterons évidemment pas cet amendement, personne n’en sera surpris. Nous le rejetons non pas pour des raisons dogmatiques, mais parce que, en creux, cette proposition soulève la question de l’harmonisation fiscale en Europe.
Trois pays ont été cités : si je mets à part la Suisse, à qui il faut faire un sort particulier, restent le Luxembourg et la Belgique, pays que nous respectons et adorons, qui, avec les Pays-Bas, sont des fondateurs historiques de l’Union européenne.
On sait quelles sont les pratiques fiscales de ces deux États. On nous dit qu’il ne faut pas aller aussi loin qu’eux en matière d’exonération d’imposition. M. le rapporteur général nous a rassurés de ce point de vue : nous n’irons pas jusque-là. Toutefois, on voit bien qu’on réfléchit quand même à « tendre vers », c'est-à-dire à toujours aller vers moins d’imposition, à diminuer la pression, à harmoniser vers le bas, avec les conséquences que l’on sait, et, à cet égard, je partage le point de vue de M. le secrétaire d’État.
C’est donc la question de la concurrence fiscale au sein de l’Union européenne qui est posée. Vous savez aussi que la règle de l’unanimité s’applique en matière de modification fiscale.
Il est vrai qu’il y a de l’exil fiscal et que celui-ci concerne davantage Uccle que Molenbeek dans l’agglomération bruxelloise, pour des raisons que, malheureusement, on comprend. Néanmoins, il ne suffit pas de constater pour le déplorer cet état de fait et d’en prendre acte ; il faut engager véritablement, à notre échelle et avec nos partenaires européens, ce chantier de l’harmonisation fiscale vers le haut, qui ne pénalisera personne.
M. le rapporteur général a lui-même indiqué que son amendement avait une dimension d’interpellation, si ce n’est de provocation, mais je pense qu’il soulève un vrai sujet.
Bien évidemment, certains pays ont des fiscalités tellement basses que l’on ne pourra jamais s’aligner sur leurs positions. Le coût budgétaire serait dissuasif et, même sans se placer sur le plan moral, du seul point de vue de la justice fiscale, on n’aurait aucun intérêt à le faire.
Pour autant, nous devons voir le monde tel qu’il est. Aujourd’hui, la mobilité s’est accrue et le mouvement enclenché depuis fort longtemps a malheureusement été aggravé par un certain nombre de mesures fiscales dont nous parlons depuis hier. Le propos de M. Bocquet me paraît donc frappé au coin du bon sens.
Cela nous renvoie à la nécessité d’une harmonisation fiscale européenne. En dépit de son aspect « serpent de mer », le sujet devient inévitable. Faute de prendre en compte cette réalité, on continuera à voir se développer un certain nombre de mouvements produits par ceux qui ont les moyens financiers de s’offrir les conseils nécessaires. Et même si cette situation fait la fortune de bon nombre de spécialistes en la matière, je pense que M. le rapporteur général a raison de nous interpeller.
Il y a deux solutions : soit on va vers l’harmonisation fiscale, soit nous faisons, nous, un certain nombre de pas pour éviter que ce mouvement ne se poursuive. En tout état de cause, on ne peut pas en rester là.
Je formulerai trois remarques.
Premièrement, le coût de cet amendement est d’un milliard d'euros, monsieur le rapporteur général. Pour ceux qui tiennent la chronique de ces débats, c’est un progrès !
Sourires sur les travées du groupe socialiste et républicain.
Deuxièmement, nous nous retrouvons sur l’idée qu’il faut une harmonisation fiscale. Que ce soit en matière d’impôt sur les sociétés, de transactions financières ou de taxation des plus-values, cela fait partie de ces veaux d’or que nous adorons.
Toutefois, nous n’avançons pas sur ces sujets. S’il doit y avoir harmonisation, ce qui pour l’instant n’est pas le cas, elle ne doit pas être calquée sur le statut fiscal de l’île de Man ; elle doit être raisonnable pour les finances publiques françaises.
Troisièmement, je ne vous suis pas sur cette position, monsieur le rapporteur général, puisque, il y a quatre ans si ma mémoire est bonne, M. Sarkozy nous avait longuement préparés à la loi sur l’exil fiscal. A alors été mis en place un système de taxation des plus-values patrimoniales d’entreprises pour ceux qui partent à l’étranger – car c’est odieux, c’est Coblence ! Voilà ce qu’il en était il y a quatre ans. Et aujourd'hui, vous voulez faire le contraire.
Nous n’y comprenons donc plus rien.
J’ai bien conscience des conséquences assez lourdes de cet amendement, dont les dispositions ont le mérite de poser le débat. Objectivement, il a un caractère d’appel. Plusieurs éléments nous interpellent.
Tout d'abord, les chiffres – le dernier rapport date de 2013, et vous nous avez reçus très aimablement avec Gilles Carrez l’été dernier, monsieur le secrétaire d’État, pour en discuter – montrent une progression importante du nombre de départs. On peut dire que les gens partent pour différentes raisons, mais lorsque l’on examine concrètement la valeur des titres qui sont attachés à ces départs, on constate une forte augmentation.
On ne peut pas nier que Bruxelles est à une heure vingt de Paris et que ce n’est pas exclusivement pour la beauté de l’architecture ou pour la qualité du climat que les personnes s’installent à Uccle ou à Ixelles.
Sourires.
M. le secrétaire d’État nous dit que le coût de cet amendement serait de plusieurs centaines de millions d’euros. Soit. Toutefois, quand la France perd des contribuables qui vont s’installer en Belgique, qui sont d'ailleurs de plus en plus jeunes et qui vivront encore cinquante ou soixante ans, elle perd les impôts qu’ils n’acquitteront pas.
Certains reviennent parfois en France !
À cet égard, je rappelais hier les chiffres relatifs à la concentration de l’impôt. Ils ne paieront plus les impôts locaux. Ils ne consommeront plus en France – d’où une perte de recettes de TVA – et ne paieront plus d’ISF s’ils ont cédé leurs titres. Il y a là une perte récurrente de matière fiscale. Vaut-il mieux, à un moment donné, perdre le produit de la taxe sur la plus-value ou perdre de manière définitive des contribuables qui ne paieront plus tous ces impôts ?
C’est en ce sens que le débat mérite d’être posé. Néanmoins, je vais retirer cet amendement.
Libre à vous de le reprendre, madame Debré. En effet, il s'agit essentiellement d’un amendement d’appel, et son coût n’a pas été précisément chiffré. Toutefois, je le répète, nous ne pouvons pas nous exonérer de ce débat.
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Je signalerai tout d’abord qu’il y a aussi des retours. Une fois que les affaires sont faites, les personnes en question reviennent parfois, pour différentes raisons, peut-être à cause de l’architecture française, monsieur le rapporteur général !
Sourires.
Toutefois, il y a aussi le service de traitement des déclarations rectificatives. Ceux qui ont des patrimoines et des comptes bancaires à l’étranger sont aujourd'hui enclins à revenir, parce qu’ils savent qu’ils seront bientôt rattrapés par la patrouille fiscale. Aujourd’hui, ils le sont de façon ponctuelle, mais les contrôles seront bientôt systématiques. N’oublions pas que 2, 5 milliards d'euros environ entrent ainsi chaque année dans les caisses !
L'amendement n° I-26 est retiré.
L'amendement n° I-28, présenté par M. de Montgolfier, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Après l’article 2 quinquies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – L’article 163 bis G du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Le 5 du II est abrogé ;
2° En conséquence, à la première phrase du troisième alinéa du II, la référence : « 5 » est remplacée par la référence : « 4 ».
II. – Le I s’applique à compter du 15 décembre 2015.
III. – La perte de recettes pour l’État résultant des I et II du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. le rapporteur général.
Cet amendement vise à étendre le dispositif des bons de souscription de parts de créateur d’entreprise aux sociétés non cotées ou de petite capitalisation boursière de plus de quinze ans.
Aujourd'hui, ce dispositif existe. Toutefois, une condition d’âge est actuellement prévue qui ne semble absolument pas adaptée à la réalité du tissu entrepreneurial français. Par exemple, une entreprise ancienne de taille modeste qui a fait l’objet d’une reprise est, aujourd’hui, compte tenu du droit en vigueur, dans l’impossibilité d’attribuer ces bons de souscription, qui sont un élément important d’attraction.
L’adoption de cet amendement renforcerait l’attractivité de ce type d’entreprises et aurait un coût modeste pour les finances publiques, puisque celui-ci est estimé à quelques millions d’euros pour les exercices 2015 et 2016. Il serait utile, notamment, aux petites sociétés non cotées ou avec de faibles capitalisations de plus de quinze ans.
Je mets aux voix l'amendement n° I-28.
J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe Les Républicains.
Je rappelle que l'avis du Gouvernement est défavorable.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
Le scrutin a lieu.
Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
Il est procédé au dépouillement du scrutin.
Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 70 :
Le Sénat a adopté.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 2 quinquies.
L'amendement n° I-102 rectifié bis, présenté par MM. Delattre, Doligé, Joyandet, Morisset, Mouiller, D. Laurent, Portelli, Masclet et Charon, Mme Primas, M. Pellevat, Mme Duchêne et MM. P. Dominati, Chatillon, Mayet, Savary, Husson et Pierre, est ainsi libellé :
Après l’article 2 quinquies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Aux premier et second alinéas du 1 de l’article 200-0 A du code général des impôts, après la référence : « 199 undecies C », est insérée la référence : «, 199 terdecies-0 A ».
II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Francis Delattre.
Il s’agit de faire en sorte que nos petites entreprises puissent trouver des financements, notamment pour se doter de fonds propres.
Jusqu’en 2012, il était possible d’obtenir grâce au système dit « Madelin » une réduction d’impôt pouvant s’élever à 18 % du montant de l’investissement, ce qui permettait à un couple d’investir jusqu’à 100 000 euros. Lors du rabotage de l’ensemble des niches fiscales, le montant maximal de l’avantage fiscal est passé de 18 000 euros à 10 000 euros.
Le résultat ne s’est pas fait attendre : l’investissement ne reste incitatif fiscalement que jusqu’à 55 550 euros.
En fait de lisibilité et de continuité de l’action, nous avons assisté, en l’occurrence, à une rupture que nombre de PME déplorent, notamment les plus jeunes et les plus innovantes d’entre elles. Notre dispositif de crédit d’impôt recherche, ou CIR, est convenable, mais nombre de start-ups rencontrent néanmoins des difficultés à monter un financement pour s’installer en France, alors que c’est plus facile, par exemple, au Canada.
Je suis conscient que les dispositions de cet amendement posent problème au regard des règles applicables à l’ensemble des niches. Toutefois, leur adoption permettrait de retrouver une masse de crédits à même de soutenir les fonds propres de nos PME, dont l’insuffisance constitue aujourd'hui pour elles un vrai problème.
Cet amendement vise à placer la réduction d’impôt sur le revenu Madelin sous le plafonnement global des avantages fiscaux de 18 000 euros, plutôt que sous celui de 10 000 euros, comme c’est le cas actuellement.
Une partie de la préoccupation exprimée par Francis Delattre me semble d’ores et déjà satisfaite, puisque, en cas de dépassement du plafond, la réduction d’impôt est reportable sur les cinq années suivantes.
Quoi qu’il en soit, la commission sollicite le retrait de cet amendement, car le dispositif ISF-PME, voisin de l’IR-PME, sera entièrement refondu dans le prochain collectif, en raison notamment d’un problème d’incompatibilité avec le droit communautaire. Nous aurons donc à cette occasion un débat sur l’ensemble des dispositifs de soutien à l’investissement dans les PME, qu’ils soient assis sur l’IR ou sur l’ISF.
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. On peut au moins saluer votre constance, monsieur Delattre : vous proposez systématiquement d’élargir les niches et de rehausser les plafonds !
Souriressur les travées du groupe socialiste et républicain.
Une réduction d’impôt de 10 000 euros, c’est loin d’être négligeable. Encore faut-il payer un tel montant d’impôt, ce qui n’est pas donné à tout le monde. Hier soir, vous déploriez que trop de Français ne payent pas l’impôt sur le revenu. Aujourd’hui, vous voulez qu’un plus grand nombre encore d’entre eux en soit exonéré… À un moment donné, il faut tout de même poser des limites.
De surcroît, comme l’a souligné opportunément M. le rapporteur général, ceux qui ne peuvent pas loger dans leur niche, déjà assez confortable, l’ensemble de leur investissement Madelin ont le droit de le reporter sur les années suivantes. Comme vous l’avez précisé, monsieur Delattre, il est possible d’investir un peu plus de 55 000 euros pour atteindre la réduction maximale.
Le Gouvernement est évidemment défavorable à cet amendement. Même si l’on peut considérer que certains investissements sont vertueux, nous atteignons là des montants qui troublent l’imagination.
Monsieur Delattre, l'amendement n° I-102 rectifié bis est-il maintenu ?
M. Francis Delattre. Monsieur le secrétaire d’État, le Gouvernement aussi fait preuve de constance, en persistant à mener la même politique depuis trois ans, avec les résultats que l’on sait, eux aussi très constants !
Sourires sur les travées du groupe Les Républicains et de l'UDI-UC.
Nous le savons tous, les PME-PMI sont le principal réservoir d’emplois marchands dans notre pays.
On gage, de façon un peu ridicule, nos amendements sur le tabac, mais on pourrait plus efficacement les gager sur les emplois aidés au sens large, qui coûtent des milliards d’euros. On le sait très bien, ces emplois ne servent qu’à passer un cap, alors que notre pays résoudrait tous ses problèmes s’il était capable de créer, au minimum, deux millions d’emplois marchands.
Naturellement, cela suppose de faire quelques efforts financiers et fiscaux pour engager le mouvement… Le dispositif visé dans cet amendement a déjà produit des résultats. En revanche, lorsqu’on le rabote, on crée des chômeurs supplémentaires. Pour ma part, j’assume ce choix ! Nous sommes d’ailleurs plusieurs collègues, sur différentes travées, à proposer des amendements allant dans ce sens, et nous pensons qu’il serait utile de réfléchir sérieusement à ces questions.
M. le rapporteur général nous propose d’attendre le débat sur le projet de loi de finances rectificative. Nous sommes prêts à patienter, car nous ne sommes pas dogmatiques.
En attendant, le problème demeure. Ce pays est-il capable de créer entre un et deux millions d’emplois marchands pour résoudre ses problèmes ? Car il n’y a pas d’autre solution !
Ce sont les PME et les PMI qui créent des emplois, nous nous accordons tous sur ce point, et vous devriez donc, monsieur le secrétaire d’État, examiner plus sérieusement nos amendements, au lieu de nous opposer un discours strictement politique.
Cela étant, je retire cet amendement, monsieur le président.
L’amendement n° I-102 rectifié bis est retiré.
Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d'une discussion commune.
Les amendements n° I-274 rectifié et I-405 rectifié, présentés par M. Pointereau, ne sont pas soutenus.
Je reprends l’amendement n° I-405 rectifié au nom de la commission, monsieur le président.
Je suis donc saisi d’un amendement n° I-427, présenté par M. de Montgolfier, au nom de la commission des finances, et ainsi libellé :
Après l’article 2 quinquies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – L’article 726 du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Le 1° bis du I est abrogé ;
2° Le 1° du I est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« – pour les cessions, autres que celles soumises au taux mentionné au 2°, de parts sociales dans les sociétés dont le capital n’est pas divisé en actions. Dans ce cas, il est appliqué sur la valeur de chaque part sociale un abattement égal au rapport entre la somme de 23 000 € et le nombre total de parts sociales de la société. »
4° Au quatrième alinéa du II, la référence : « et 1° bis » est supprimée.
IV. – La perte de recettes pour l’État est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
Vous avez la parole pour le défendre, monsieur le rapporteur général.
Nous voudrions surtout comprendre la raison de certaines différences de traitement.
Pourquoi le taux des droits d’enregistrement applicables aux cessions de SA, c'est-à-dire de sociétés anonymes, ou de SAS, autrement dit de sociétés par actions, est-il de 0, 1 %, alors que les cessions de parts sociales de SARL ou d’EURL sont, pour leur part, taxées à 3 % ? Comme le soulignait l’auteur de l’amendement n° I-405 rectifié, les dirigeants de société sont logiquement tentés de modifier les statuts avant d’envisager une cession.
Comment expliquer, monsieur le secrétaire d’État, ce traitement défavorable aux PME ? Quel serait le coût d’un alignement des taux ? Ces deux questions méritent d’être posées, et nous avons besoin, sur ce point, d’un éclairage du Gouvernement.
Au travers de cet amendement, vous proposez de diminuer, voire de supprimer purement et simplement les droits d’enregistrement applicables aux cessions de parts sociales dans les sociétés dont le capital n’est pas divisé en actions. Celles-ci sont actuellement soumises aux droits proportionnels d’enregistrement de 3 % et bénéficient d’un abattement appliqué sur la valeur de chaque part sociale et dont le montant équivaut au rapport entre la somme de 23 000 euros et le nombre total de parts sociales de la société.
Votre proposition aurait un coût budgétaire. Elle romprait en outre l’équilibre entre la taxation des cessions de fonds de commerce et des fonds de clientèle, qui sont taxés de manière similaire à la cession des parts sociales au taux global de 3 % si l’on cumule le droit budgétaire perçu par l’État et les taxes additionnelles perçues par les collectivités territoriales, jusqu’à 200 000 euros.
Je n’ai pas particulièrement examiné ce point avant notre séance, et je m’en excuse. L’on me dit en effet qu’il conviendrait peut-être de réexaminer certaines situations historiques, en vue d’une d’harmonisation. Nous pourrons donc de nouveau aborder ce sujet à l’avenir.
Dans ces conditions, je sollicite, pour l’heure, le retrait de cet amendement.
Monsieur le rapporteur général, l'amendement n° I-427 est-il maintenu ?
Ces différences de taux s’expliquent sans doute pour des raisons historiques, mais il est difficile, aujourd’hui, de les comprendre. Peut-être faudrait-il travailler à la définition un taux de convergence.
Dans l’immédiat, nous retirons cet amendement, monsieur le président.
L'amendement n° I-427 est retiré.
L'amendement n° I-104 rectifié bis, présenté par MM. Delattre, Doligé, Commeinhes, Pierre et Portelli, Mme Deroche, M. Pellevat, Mmes Gruny et Canayer et MM. P. Dominati, Charon, Grand et Mayet, est ainsi libellé :
Après l’article 2 quinquies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – L’article 777 du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Tableau I
a) À la cinquième ligne de la première colonne, le montant : « 552 324 » est remplacé par le montant : « 1 104 648 » ;
b) À la sixième ligne de la première colonne, les mots et montants : « Comprise entre 552 324 € et 902 338 € » sont remplacés par les mots et le montant : « Au-delà de 1 104 648 € » ;
c) Les septième et huitième lignes sont supprimées ;
2° Tableau II
a) À la cinquième ligne de la première colonne, le montant : « 552 324 » est remplacé par le montant : « 1 104 648 » ;
b) À la sixième ligne de la première colonne, les mots et montants : « Comprise entre 552 324 € et 902 338 € » sont remplacés par les mots et le montant : « Au-delà de 1 104 648 € » ;
c) Les septième et huitième lignes sont supprimées ;
II. – Le I s’applique à compter du 1er janvier 2016.
III. – La perte de recettes pour l’État résultant des I et II est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits mentionnés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Francis Delattre.
Il s’agit, là encore, d’un problème bien connu, celui des successions dans les PME-PMI. Comme vous le savez, mes chers collègues, environ 30 % des entreprises disparaissent du fait de transmissions non accomplies ou mal accomplies. Naturellement, la fiscalité de transmission du patrimoine constitue l’une des difficultés auxquelles les entreprises sont confrontées.
Notre collègue députée Fanny Dombre-Coste a rédigé, en juillet dernier, un rapport sur les transmissions d’entreprise, dont j’ai lu quelques extraits. Nous pouvons tous faire le même constat : il y a un vrai problème !
Cet amendement vise donc à la fois à simplifier et à diminuer le barème des droits de mutation, afin qu’ils encouragent la succession plutôt que la rétention, évitant ainsi que des entreprises ne disparaissent.
Nous proposons simplement de doubler la tranche à 20 %, pour fixer sa limite supérieure à 1 104 648 euros, et d’appliquer un taux de taxation maximal à 30 % au-delà de cette limite supérieure.
Il me semble que ce dispositif simple serait bien accueilli dans le milieu des PME-PMI, monsieur le secrétaire d’État.
Francis Delattre pose un vrai sujet, celui de la transmission des entreprises. Certains dispositifs favorisant cette transmission existent déjà, en particulier le pacte dit « Dutreil » ; la commission a d’ailleurs déposé plusieurs amendements afin de l’améliorer.
Si nous pouvons souscrire à l’intention de l’auteur de cet amendement, nous nous heurtons à une difficulté, car le dispositif qu’il propose vise non pas simplement les transmissions d’entreprise, mais toutes les transmissions en ligne directe à titre gratuit, notamment la cession d’un appartement ou d’un portefeuille d’actions. Le coût de cette mesure serait donc très élevé, de l’ordre de plusieurs milliards d’euros.
Par conséquent, j’invite Francis Delattre à bien vouloir retirer cet amendement.
Cet amendement va encore dans le même sens… Diminuer les impôts, mais uniquement pour ceux qui en payent beaucoup, ou du moins un peu !
Mesdames, messieurs les sénateurs, rendez-vous compte de ce que vous proposez : aujourd’hui, plus de 90 % des successions – je crois même que nous sommes plus proches de 95 %, mais je reste prudent – sont exonérées de droits de succession.
Il faut le dire et le répéter, car c’est ce qu’indiquent les notaires : plus de 90 % des successions aujourd’hui sont exonérées de droits. Or nos concitoyens ne le savent pas, car ils payent des frais de notaire. Ceux-ci sont légitimes – ils correspondent à un travail réalisé –, mais les Français les assimilent à des droits perçus par l’État, ce qui crée une confusion et rend parfois populaire la présentation que vous pouvez faire de certains de vos amendements.
Ici, vous proposez d’aller plus loin. On peut vous entendre, mais on ne peut pas vous écouter. Vous dites que vous souhaitez agir au bénéfice des entreprises, mais votre amendement, en réalité, vise tout le monde ! Tous les particuliers sont concernés, qu’ils détiennent des capitaux, de l’immobilier, des biens mobiliers, etc.
Sourires sur les travées du groupe socialiste et républicain.
Je voudrais vous rappeler que, pour les entreprises, il existe de nombreux dispositifs favorables. Il faut le dire aussi, car, à vous entendre, les larmes pourraient nous monter aux yeux !
Le pacte Dutreil, par exemple, permet de transmettre des parts de société en bénéficiant d’une exonération de 75 % de leur valeur. Oui, 75 % ! Et ce chiffre ne tient même pas compte des abattements applicables, soit 100 000 euros par ascendant en ligne directe, et 50 % de plus quand on cède avant soixante-dix ans.
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Nous devrions donc réussir à contenir nos larmes !
Souriressur les travées du groupe socialiste et républicain et du groupe CRC.
On pourrait effectivement aller encore plus loin... Je n’ai pas chiffré le coût de votre amendement, mais je comprends mieux pourquoi nous avons trouvé plus de 5 % de PIB de déficit public en arrivant aux responsabilités !
Protestations sur les travées du groupe Les Républicains et de l'UDI-UC.
Vous l’aurez compris, mon avis sur cet amendement est défavorable.
Monsieur Delattre, l’amendement n° I-104 rectifié bis est-il maintenu ?
Monsieur le secrétaire d'État, si vous lisez le rapport qui a été préparé par Fanny Dombre-Coste, députée socialiste de l’Hérault, vous verrez qu’elle partage largement le constat que je viens de dresser.
Si notre amendement ne vise pas seulement les entreprises, c’est peut-être parce que nous ne disposons pas de l’appui des directions d’un grand ministère. Il s’agit peut-être d’un impair : j’entendais bien, pour ma part, cibler la transmission des entreprises.
En effet, dans nos circonscriptions, nous connaissons la situation et la réalité des successions mal réglées, qui entraînent finalement la disparition de certaines entreprises.
Ce n’est pas à cause de de la fiscalité !
Monsieur le rapporteur général, il faut travailler sur ce sujet, car nous connaissons les failles du système Dutreil. En tout cas, nous essayons de perfectionner ce dispositif.
Le problème existe, cette préoccupation est partagée par nombre de parlementaires. Toutefois, comme nous sommes de petits artisans de la législation, j’accepte de retirer mon amendement, monsieur le président.
L’amendement n° I-104 rectifié bis est retiré.
Je suis saisi de dix-sept amendements faisant l'objet d’une discussion commune.
L’amendement n° I-166, présenté par M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Bocquet et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l'article 2 quinquies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Les articles 787 B, 885 I bis, 885 I ter et 885 I quater du code général des impôts sont abrogés.
La parole est à M. Éric Bocquet.
Le présent amendement tend à supprimer certaines dispositions correctrices de l’impôt de solidarité sur la fortune, l’ISF, qui, selon nous, nuisent à sa bonne répartition entre les contribuables.
Nous souhaitons tout d’abord viser la disposition permettant aux membres des pactes d’actionnaires, qui constituent le noyau dur de l’actionnariat d’une entreprise, de diminuer leur contribution à l’ISF à proportion de leur participation.
Cette exonération des intérêts minoritaires, instaurée par la loi pour l’initiative économique, dite « loi Dutreil », qui vient d’être évoquée, n’a pas rencontré, il faut le dire, un grand succès, malgré les assurances contraires qui figuraient à l’époque dans le rapport sur le fondement duquel elle avait été élaborée. À en croire l’évaluation des voies et moyens qui est annexée au projet de loi de finances, quelque 12 700 ménages recouraient à ce dispositif en 2012, pour une dépense fiscale globale de 63 millions d’euros.
L’ensemble des dispositions que nous visons représente une dépense fiscale de 260 millions d’euros au total, ce qui doit représenter une exemption d’assiette comprise entre 40 et 55 milliards d’euros. Quand on sait que le patrimoine imposable des redevables de la tranche moyenne de l’ISF s’élève à près de 440 milliards d’euros, on mesure aisément la faible pertinence de l’ensemble du dispositif.
Le pacte d’actionnaires concerne, au premier chef, des actionnaires minoritaires et non impliqués dans la gestion courante de l’entreprise. Il s’agit souvent d’une technique d’optimisation fiscale pour celles et ceux dont le rapport avec l’entreprise se limite à la perception de dividendes.
Nous pouvons alors poser la question : la fiscalité dans notre pays aurait-elle vocation uniquement à permettre la transmission des positions acquises, voire des rentes de situation, ou doit-elle aussi participer de la dynamique économique dans son ensemble ? La question se pose.
C’est pour ces motifs qu’il nous faut supprimer le dispositif Dutreil. Une niche en moins va sans doute en faire aboyer quelques-uns, mais cette loi n’a pas vocation à préserver l’actionnariat d’entreprises dynastiques ou à simplement empêcher certains de payer « trop d’impôt ».
Mes chers collègues, nous ne pouvons donc que vous inviter à adopter cet amendement.
L’amendement n° I-29, présenté par M. de Montgolfier, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Après l’article 2 quinquies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le dernier alinéa du b de l’article 787 B du code général des impôts est supprimé.
II. – Le I s’applique à compter du 15 décembre 2015.
III. – La perte de recettes pour l’État résultant des I et II du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. le rapporteur général.
Cet amendement, comme les deux suivants, vise non pas à supprimer le dispositif Dutreil, comme le précédent amendement, mais au contraire à l’améliorer.
Ce dispositif a fait la preuve de son efficacité, notamment pour la transmission d’entreprises familiales. Toutefois, à l’usage, on a pu constater que certains points, sans constituer de réels coûts, n’en sont pas moins des freins ou n’emportent aucune justification particulière.
L’amendement n° I-29 devrait recueillir un large assentiment. En effet, il s’agit d’une disposition qui a déjà été votée dans le cadre de la loi pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques, dite « loi Macron ». En outre, elle constitue une proposition relativement consensuelle, qui figure dans le rapport des députés Olivier Carré et Christophe Caresche sur l’investissement productif de long terme.
Il s’agit d’assouplir le dispositif Dutreil, en supprimant l’obligation de conserver les participations inchangées à chaque niveau d’interposition pendant la phase d’engagement collectif. Cette condition, qui ne se justifie guère, est restrictive et inutile. Elle peut retarder la prise de décisions dans la vie des entreprises, qui est faite, notamment, de cessions.
L’amendement n° I-30, présenté par M. de Montgolfier, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Après l’article 2 quinquies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le b de l’article 787 B du code général des impôts est complété par quatre alinéas ainsi rédigés :
« Dans l’hypothèse où les titres sont détenus par une société possédant directement une participation dans la société dont les parts ou actions peuvent être soumis à un engagement collectif de conservation visé au a, ou lorsque la société détenue directement par le redevable possède une participation dans une société qui détient les titres de la société dont les parts ou actions peuvent être soumis à un engagement de conservation, l’engagement collectif de conservation est réputé acquis lorsque les conditions cumulatives ci-après sont réunies :
« - Le redevable détient depuis deux ans au moins, seul ou avec son conjoint ou le partenaire avec lequel il est lié par un pacte civil de solidarité, les titres de la société qui possède une participation dans la société dont les parts ou actions peuvent être soumises à un engagement collectif, ou les titres de la société qui possède les titres de la société dont les parts ou actions peuvent être soumises à un engagement de conservation ;
« - Les parts ou actions de la société qui peuvent être soumises à un engagement collectif, sont détenues par la société interposée, depuis deux ans au moins, et atteignent les seuils prévus au premier alinéa du présent b ;
« - Le redevable ou son conjoint ou son partenaire lié par un pacte civil de solidarité exerce depuis plus de deux ans au moins, dans la société dont les parts ou actions peuvent être soumises à un engagement collectif, son activité professionnelle principale ou l'une des fonctions énumérées au 1° de l'article 885 O bis lorsque la société est soumise à l'impôt sur les sociétés. »
II. – Le I s’applique à compter du 15 décembre 2015.
III. – La perte de recettes résultant pour l'État des I et II du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. le rapporteur général.
Cet amendement vise lui aussi à reprendre une mesure déjà adoptée par le Sénat lors de l’examen de la loi Macron. Et là encore, il s'agit d’améliorer le dispositif Dutreil, en permettant l’application de l’engagement collectif réputé acquis à des situations où les titres transmis sont détenus par des sociétés interposées.
En clair, il existe aujourd'hui une différence de traitement, qui ne paraît pas justifiée, entre la détention directe et indirecte. De fait, cela empêche l’application du dispositif Dutreil pour certaines transmissions d’entreprises. Il y a lieu de mettre fin à cette différence.
L’amendement n° I-31, présenté par M. de Montgolfier, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Après l'article 2 quinquies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Au premier alinéa du f de l'article 787 B du code général des impôts, les mots : « de la condition prévue au » sont remplacés par les mots : « des conditions prévues aux a ou ».
II. – Le I s’applique à compter du 15 décembre 2015.
III. – La perte de recettes résultant pour l'État des I et II du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. le rapporteur général.
Toujours en vue d’améliorer le dispositif Dutreil, cet amendement, qui a également été adopté au Sénat lors de l’examen de la loi Macron, a pour objet de faciliter la transmission d’entreprises, en permettant des opérations d’apport de titres dans la période d’engagement collectif.
Ce serait une amélioration bienvenue, qui lèverait un obstacle aux transmissions d’entreprises familiales, sans pour autant affaiblir la phase d’engagement initial.
Au total, les trois amendements que je viens de présenter ont un coût très limité ; leur adoption permettrait toutefois de lever des obstacles techniques, qui ne sont pas justifiés et qui constituent souvent des freins à l’objectif de faciliter les transmissions d’entreprises.
L’amendement n° I-193, présenté par MM. P. Dominati, Morisset, Vogel et Revet, Mme Deromedi, MM. Vasselle, Dassault et Mandelli, Mme Gruny, M. Bouchet, Mme Deseyne et M. Magras, est ainsi libellé :
Après l'article 2 quinquies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Les articles 885 A à 885 Z du code général des impôts sont abrogés.
II - Les pertes de recettes pour l'État résultant du I ci-dessus sont compensées à due concurrence par un relèvement des droits visés aux articles 402 bis, 438, 520 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Philippe Dominati.
M. Philippe Dominati. Comme tous les ans depuis une dizaine d’années, je propose une solution beaucoup plus simple, monsieur le rapporteur général : supprimer purement et simplement l’ISF !
Exclamations sur les travées du groupe socialiste et républicain et du groupe CRC.
Je ne vais pas revenir sur les inconvénients techniques de cet impôt, qui ne fait pas de distinction entre les assujettis, qui frappe particulièrement les couples et qui affecte plutôt la classe moyenne que les ultra-riches.
Mêmes mouvements.
Les coûts de recouvrement de cet impôt sont particulièrement élevés, et le nombre de ses assujettis progresse chaque année.
Voilà pour la forme, mais, sur le fond, il y a beaucoup plus grave ! Il semblerait en effet, d’après de nombreux économistes, que le rendement de cet impôt soit préjudiciable aux recettes fiscales de l’État. Les uns parlent de deux fois le coût de la TVA ; d’autres, d’une évasion en capitaux qui pourrait être comprise entre 150 et 200 milliards d’euros. M. Christian Chavagneux, qui est éditorialiste au journal Alternatives économiques, évoque quant à lui quelque 10 % des recettes fiscales de l’État.
Ils sont donc nombreux à s’exprimer en ce sens, et la Cour des comptes a eu l’occasion de le souligner en 2009 : c’est un impôt au rendement négatif !
Ensuite, l’ISF procède d’une grande hypocrisie de la part des plus hautes autorités de l’État, quelles qu’elles soient, puisque j’évoque cette situation depuis une dizaine d’années... Nos artistes, écrivains, sportifs ou élites sont accueillis dans les palais de la République, nous assistons à leurs concerts ou à leurs manifestations culturelles ou sportives, mais il faut bien admettre que, pour la plupart d’entre eux, ils ne peuvent plus résider dans notre pays.
Protestations sur les travées du groupe socialiste et républicain et du groupe CRC.
Cet impôt cause donc une perte nette assez importante. J’ai entendu, il est vrai, des hommes d’État de l’opposition, qui sont peut-être appelés demain à redevenir majoritaires, faire un mea culpa à ce sujet. J’ai donc bon espoir !
Mes collègues Bocquet ou Yung ont évoqué un souci d’harmonisation.
La France est le seul pays qui possède une telle imposition, et le Gouvernement devrait peut-être développer une réflexion sur ce sujet pour trouver une position médiane.
Enfin, cette discussion sera également l’occasion pour vous, monsieur le secrétaire d’État, de nous dire quel a été le rendement de l’impôt à 75 %, maintenant que l’expérience est terminée, afin d’évaluer si cette mesure a contribué à l’augmentation de 40 % du nombre des exilés fiscaux, qui a été signalée durant l’été dernier.
L’amendement n° I-165, présenté par M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Bocquet et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’article 2 quinquies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le code général des impôts est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa de l’article 885 A, le montant : « 1 300 000 € » est remplacé par le montant : « 800 000 € » ;
2° L’article 885 U est ainsi modifié :
a) La seconde colonne du tableau constituant le second alinéa du 1. est ainsi rédigé :
Tarif applicable
b) Le 2. est abrogé.
La parole est à M. Éric Bocquet.
L’ISF, tel qu’il existe actuellement, a fini par épargner environ 300 000 contribuables de toute imposition, soit autant de foyers appartenant tout de même aux couches moyennes supérieures risquant de devoir contribuer un peu plus aux charges publiques.
Le patrimoine médian des habitants de notre pays se situe aux alentours de 120 000 euros et le seuil d’imposition de l’ISF y est plus de 10 fois supérieur. Le nombre de redevables de cet impôt n’a pas forcément connu une inflexion à la baisse, montrant l’importance des glissements constatés depuis une quinzaine d’années en matière d’inégalités de patrimoine.
Ainsi, les redevables de l’ISF qui sont domiciliés dans l’arrondissement parisien où nous nous trouvons en ce moment même étaient au nombre de 3 472 en 2011 et disposaient d’un patrimoine total de 12, 6 milliards d’euros. Ils sont aujourd’hui quelque 3 925 – on voit bien que l’impôt fait fuir !
Sourires sur les travées du groupe CRC.
Voilà qui justifie pleinement, me semble-t-il, le fait que nous restions fidèles à l’ancien barème de l’ISF, qui commençait à hauteur de 800 000 euros ; cela correspondait à environ 600 000 contribuables, un nombre qui reste évidemment minoritaire au regard des 37 millions de Françaises et de Français qui font une déclaration en vue de l’impôt sur le revenu.
Nos principes constitutionnels sont connus : l’impôt doit être justement réparti entre les membres de la société, et ceux qui ont des moyens et facultés plus importants que les autres doivent contribuer à raison de ces mêmes facultés et moyens.
En d’autres termes, l’intérêt particulier du contribuable doit s’effacer derrière l’intérêt général de la collectivité, qui a du sens, particulièrement en ce moment. Au demeurant, il tirera lui-même parti de cet intérêt général.
Les contribuables assujettis à l’ISF doivent être fiers de participer, plus encore que les autres, à cet effort, œuvrant in fine pour le bien commun.
Comme nous l’avons souvent indiqué, le taux de prélèvement constaté en matière d’ISF demeure relativement limité pour un contribuable moyen. Y faire face impose soit de renoncer à une partie – mais c’est loin d’être le tout – du rendement d’un patrimoine, dès lors que ce dernier est correctement géré, soit d’en céder quelques éléments pour pouvoir payer la facture.
L’amendement n° I–170, présenté par M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Bocquet et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’article 2 quinquies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le dernier alinéa de l’article 885 A du code général des impôts est ainsi rédigé :
« Dans la limite de deux millions d’euros, les biens professionnels définis aux articles 885 N à 885 R ne sont pas pris en compte pour l’assiette de l’impôt de solidarité sur la fortune. »
La parole est à M. Éric Bocquet.
La recherche de la justice fiscale et celle de l’efficacité économique de l’impôt constituent les deux principaux axes de notre démarche ; cela a été rappelé lors de la discussion générale. Or, dans les faits, l’ISF est aujourd’hui insuffisant pour répondre à ces deux exigences.
L’assiette de cet impôt est largement tronquée puisque nombre de biens parfaitement représentatifs de la réalité des patrimoines les plus importants sont exonérés ou pris en compte très en deçà de leur valeur. Quant à son taux, il reste parfaitement supportable et n’a rien de la fiscalité « confiscatoire » dont on nous rebat les oreilles régulièrement ici et là.
Cet amendement a donc pour objet de revenir au principe de réalité, en faisant en sorte que la justice la plus élémentaire s’applique entre les contribuables.
Nous n’avons jamais jugé normal – j’insiste sur ce point – que les biens professionnels se trouvent exclus de l’assiette de l’ISF, d’autant qu’il ne s’agit bien souvent que de titres et de parts de sociétés, patrimoine dont la matérialité se résume à celle de morceaux de papiers imprimés…
Ainsi, un traitement différencié des titres, à nos yeux injustifié, persiste dans notre fiscalité : exonération de droits pour les biens professionnels ; exonération possible en cas de participation à un pacte d’actionnaires, qui n’entraîne d’ailleurs en règle générale aucune conséquence du point de vue de l’implication desdits actionnaires dans la vie quotidienne de l’entreprise concernée ; exonération impossible, enfin, pour les titres détenus par des actionnaires minoritaires n’étant pas liés par un tel pacte.
Notre démarche est simple : rendons imposables les biens professionnels au-delà du seuil de 2 millions d’euros, afin de rétablir l’égalité de traitement entre les actionnaires. J’ajoute que notre proposition reste relativement mesurée, eu égard au taux actuel de l’ISF et même au taux moyen d’imposition.
C’est donc pour rétablir la justice sociale entre contribuables de l’ISF que nous vous invitons, mes chers collègues, à adopter cet amendement.
L’amendement n° I–388 rectifié, présenté par MM. Delahaye, Capo-Canellas, Canevet, Delcros, Marseille, Laurey et les membres du groupe Union des Démocrates et Indépendants – UC, est ainsi libellé :
Après l’article 2 quinquies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Après l’article 787 B du code général des impôts, il est inséré un article 787 B … ainsi rédigé :
« Art. 787 B – I. – Sont exonérées de droits de mutation à titre gratuit les parts ou les actions d’une société ayant une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale transmises par décès ou entre vifs à la condition que l’héritier, le donataire ou le légataire prenne l’engagement, dans la déclaration de succession ou l’acte de donation, pour lui et ses ayants cause à titre gratuit, de conserver les parts ou les actions pendant une durée minimale de dix ans à compter de la transmission.
« II. – L’exonération s’applique également lorsque la société détenue directement par le redevable possède une participation dans une société qui exerce une des activités visées au I. Dans cette hypothèse, la valeur des titres de cette société, qui sont transmis, bénéficie de l’exonération à proportion de la valeur réelle de son actif brut correspondant à la participation dans la société qui exerce une des activités visées au I.
« III. – L’exonération s’applique également lorsque la société détenue directement par le redevable possède une participation dans une société qui détient les titres de la société qui exerce une des activités visées au premier paragraphe. Dans cette hypothèse, l’exonération est appliquée à la valeur des titres de la société détenus directement par le redevable, dans la limite de la fraction de la valeur réelle de l’actif brut de celle-ci représentative de la valeur de la participation indirecte dans la société qui exerce une des activités visées au I.
« IV. – À compter de la transmission et jusqu’à l’expiration de l’engagement de conservation visé au I, la société dont les parts ou actions ont été transmises, doit adresser, dans les trois mois qui suivent le 31 décembre de chaque année, une attestation certifiant que l’engagement de conservation est satisfait au 31 décembre de chaque année.
« V. – En cas de non-respect de l’engagement de conservation prévu au I, par suite d’une fusion ou d’une scission au sens de l’article 817 A d’une augmentation de capital, ou d’un apport en société, l’exonération accordée lors d’une mutation à titre gratuit avant l’une de ces opérations, n’est pas remise en cause si le donataire, héritier ou légataire respecte l’engagement prévu au I jusqu’à son terme. Les titres reçus en contrepartie de ces opérations doivent être conservés jusqu’au même terme. De même, cette exonération n’est pas non plus remise en cause lorsque l’engagement de conservation prévu au I n’est pas respecté par suite d’une annulation des titres pour cause de pertes ou de liquidation judiciaire ;
« VI. – En cas de non-respect de l’engagement de conservation prévu au I, par suite d’une donation ou d’une succession, l’exonération accordée au titre de la mutation à titre gratuit visée au I n’est pas remise en cause, à condition que le donataire, héritier ou légataire poursuive l’engagement prévu au I jusqu’à son terme.
« VII. – Les dispositions du présent article s’appliquent en cas de donation avec réserve d’usufruit. »
II. – Après l’article 885 I quater du code général des impôts, il est inséré un article 885 I … ainsi rédigé :
« Art. 885 I ... – I. – Les parts ou actions d’une société ayant une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale ne sont pas comprises dans les bases d’imposition à l’impôt de solidarité sur la fortune lorsque ces parts ou actions restent la propriété du redevable pendant une durée minimale de dix ans, courant à compter du premier fait générateur au titre duquel l’exonération a été demandée.
« II. – L’exonération s’applique lorsque la société détenue directement par le redevable possède une participation dans la société qui exerce une des activités visées au I. La valeur des titres de cette société bénéficie de l’exonération prévue au I, à proportion de la valeur réelle de son actif brut qui correspond aux titres de la société qui exerce une des activités visées au I.
« III. – L’exonération s’applique également lorsque la société détenue directement par le redevable possède une participation dans une société qui, elle-même, détient les titres d’une société exerçant une des activités visées au I. Dans cette hypothèse, l’exonération partielle est appliquée à la valeur des titres de la société détenus directement par le redevable, dans la limite de la fraction de la valeur réelle de l’actif brut de celle-ci représentative de la valeur de la participation indirecte exerçant une des activités visées au I.
« IV. – L’exonération est acquise au terme d’un délai global de conservation de dix ans. Au-delà de ce délai, est seule remise en cause l’exonération accordée au titre de l’année au cours de laquelle le redevable cède les titres qu’il s’est engagé à conserver.
« V. – En cas de non-respect de la condition de détention prévue au I par suite d’une fusion ou d’une scission au sens de l’article 817 A, d’une augmentation de capital, ou d’un apport en société, l’exonération n’est pas remise en cause si les titres reçus en contrepartie de l’opération concernée sont conservés jusqu’au même terme par le redevable. Cette exonération n’est pas non plus remise en cause lorsque la condition prévue au I n’est pas respectée par suite d’une annulation des titres pour cause de pertes ou de liquidation judiciaire.
« VI. – En cas de non-respect de l’engagement visé au I, par suite d’une donation ou de succession des titres objets de l’engagement de conservation visé au I, l’exonération n’est pas remise en cause, sous réserve que les titres dévolus soient conservés par le donataire, l’héritier ou le légataire, jusqu’au terme du délai prévu au I.
« VII. – Toute remise en cause de l’exonération ne s’applique qu’à raison des titres cédés par le redevable.
« VIII. – La déclaration visée au 1 du I de l’article 885 W doit être appuyée d’une attestation de la société dont les parts ou actions sont conservées par le redevable, certifiant que les conditions prévues au I ont été remplies l’année précédant celle au titre de laquelle la déclaration est souscrite. »
III. – La perte de recettes pour l’État est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Vincent Capo-Canellas.
L’une des nombreuses carences économiques de notre pays repose sur la faiblesse de notre tissu de petites et moyennes entreprises, les PME, et d’entreprises de taille intermédiaire, les ETI. En effet, nos entreprises sont souvent de très petites entreprises, des TPE, ou bien de grands groupes mondiaux, que nous appelons, à juste titre, « nos champions ».
Les 4 600 ETI réalisent à elles seules 34 % des exportations françaises et représentent 23 % de l’emploi salarié de notre pays. Or, par comparaison avec nos voisins européens, elles sont moins nombreuses – trois fois moins qu’en Allemagne – et elles sont souvent plus petites parce qu’elles sont entravées dans leur développement par un certain nombre d’obstacles – réglementaires ou fiscaux – touchant à leur transmission et à la stabilité de leur actionnariat.
Or, pour construire des marques mondiales fortes et des produits innovants, pour bâtir des entreprises conquérantes – car les petites entreprises, on le souhaite, sont celles qui deviendront grandes par la suite –, il faut du temps. Il faut souvent deux générations avant qu’une entreprise atteigne la taille d’une ETI et parfois trois ou quatre pour qu’elle devienne leader dans son secteur. Le temps est donc l’une des clefs de la montée en gamme des entreprises.
À l’instar de la proposition portant sur la création d’un statut d’investisseur de long terme qui émane du rapport d’information, déjà cité, de MM. Carré et Caresche sur l’investissement productif de long terme, l’adoption d’un tel statut lèverait ces obstacles en réalignant la France sur les pratiques de ses grands partenaires européens. Il ne s’agit pas ici d’accorder des avantages mais de se mettre en situation de compétitivité par rapport à d’autres pays.
Au moment où l’investissement est à l’arrêt, la création de ce statut d’investisseur de long terme constituerait un signal fort de confiance en direction des investisseurs qui prennent des risques pour développer les ETI. Ce signal serait également adressé aux entreprises qui veulent associer leurs cadres et leurs salariés à l’actionnariat ou aux jeunes entreprises.
Le présent amendement tend donc, dans son I, à encourager la transmission d’entreprise en l’exonérant totalement de droits de mutation en contrepartie de la détention des parts pendant dix ans après transmission. C’est une mesure qui existe chez certains de nos voisins : l’Allemagne, l’Italie et l’Espagne.
Dans son II, cet amendement vise à déconnecter la fiscalité du patrimoine de l’outil productif en sortant les parts d’entreprises de la base de calcul de l’ISF, en contrepartie d’un engagement de conservation individuelle des titres de l’entreprise sur une période de dix ans.
Le coût de cette mesure est estimé à 80 millions d’euros ; par ailleurs, le statut de l’investisseur de long terme induirait une simplification profonde des textes fiscaux en vigueur.
L’amendement n° I–194, présenté par MM. P. Dominati, Morisset, Vogel et Revet, Mme Deromedi, MM. Vasselle et Dassault, Mme Procaccia, M. Mandelli, Mme Gruny, MM. Bouchet et Karoutchi, Mme Deseyne et M. Magras, est ainsi libellé :
Après l’article 2 quinquies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - À la première phrase du second alinéa de l’article 885 S du code général des impôts, le taux : « 30 % » est remplacé par le taux : « 100 % ».
II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Philippe Dominati.
Sourires.
M. Philippe Dominati. Si, à mon grand étonnement, je n’obtenais pas satisfaction sur l’amendement visant à supprimer l’ISF
Sourires. – Plusieurs sénateurs du groupe CRC s’esclaffent.
… ou dans des communes à proximité géographique, en soient exonérés.
Cet amendement vise ainsi à accroître l’abattement sur la résidence principale dans le calcul de l’ISF. Ma préférence aurait consisté en un abattement de 100 % §mais la modération qui inspire nos débats sur les finances publiques plaide pour un abattement de 50 %, qui me semble convenable et que je propose à travers l’amendement suivant.
L’amendement n° I–195, présenté par MM. P. Dominati, Morisset, Vogel et Revet, Mme Deromedi, MM. Vasselle et Dassault, Mme Procaccia, M. Mandelli, Mme Gruny, MM. Bouchet et Karoutchi, Mme Deseyne et M. Magras, est ainsi libellé :
Après l’article 2 quinquies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - À la première phrase du second alinéa de l’article 885 S du code général des impôts, le taux : « 30 % » est remplacé par le taux : « 50 % ».
II. - La perte de recettes résultant pour l’État du I ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Philippe Dominati.
Cet amendement est défendu, monsieur le président. Mais l’amendement n° I–193 sera peut-être adopté…
L’amendement n° I–279, présenté par M. Bocquet, Mme Beaufils, M. Foucaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’article 2 quinquies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article 885 S du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Cet abattement est plafonné à 200 000 euros. »
La parole est à M. Éric Bocquet.
Les collectivités territoriales assurent plus de 70 % des investissements publics ; cela est régulièrement, et fort utilement, rappelé. Les baisses de dotations aux collectivités déjà effectives dans le cadre du budget pour 2015 ont déjà engendré une baisse très importante des investissements.
Les diminutions proposées dans le cadre de ce projet de loi de finances vont encore aggraver la situation, tout le monde le craint. Au moment où notre pays est touché par un choc brutal et où le niveau du chômage atteint déjà des records, il est plus que jamais nécessaire de relancer notre économie via des investissements utiles pour un avenir responsable du point de vue social et environnemental.
Le fonds national pour l’investissement local créé par l’article 59 du projet de loi de finances pour 2016 ne permet d’apporter que 1 milliard d’euros pour soutenir l’investissement des collectivités, ce qui ne compense les baisses de dotations qu’à hauteur d’à peine un quart.
L’accumulation toujours plus importante de capitaux marque notre pays – ce constat est établi – et l’accumulation par les particuliers, ou par certains d’entre eux en tout cas, de capital immobilier contribue de façon décisive à cet enrichissement des plus fortunés.
Il est donc juste et nécessaire qu’une augmentation des ressources dégagées par l’impôt de solidarité sur la fortune, entre autres ressources, vienne alimenter ce fonds national pour l’investissement local. Le plafonnement de l’abattement sur la valeur de la résidence principale dans le calcul de l’ISF permettrait ainsi de faire contribuer les détenteurs de patrimoine immobilier de plus de 600 000 euros, qui ont tout à fait les moyens d’apporter des ressources supplémentaires pour la relance de l’économie via des investissements utiles du point de vue social et environnemental.
L’amendement n° I–167, présenté par M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Bocquet et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’article 2 quinquies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article 885–0 V bis du code général des impôts est abrogé.
La parole est à M. Éric Bocquet.
S’il fallait trouver une bonne raison de supprimer le dispositif ISF-PME – je crois d’ailleurs savoir qu’il pose problème du point de vue du droit européen, cela a été évoqué –, je pourrais prendre les données mêmes du ministère de l’économie et des finances.
Selon ces données accessibles à tous, lorsqu’un contribuable de l’ISF sollicite le dispositif ISF-PME, il y consacre en moyenne moins de 15 000 euros quand son versement est direct ou transite par la voie d’une société holding, et moins de 10 000 euros quand il emprunte la voie d’un fonds commun de placement, qu’il s’agisse d’un fonds d’investissement de proximité, un FIP, ou d’un fonds commun de placement dans l’innovation, un FCPI.
Ce décalage sensible entre les montants investis et le plafond de la mesure montre suffisamment que l’intention principale de ces contribuables n’est pas d’apporter leur concours actif au financement de l’activité mais bel et bien, dans la plupart des cas, de disposer de l’outil leur permettant de payer peu ou pas d’ISF. Le tout est donc de mettre en place une forme d’optimisation fiscale aussi rentable que possible.
Faisons une autre observation : huit ans après le vote de la loi du 21 août 2007 en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat, dite « loi TEPA », qui l’avait instauré, le nombre de contribuables de l’ISF qui font jouer le dispositif ISF-PME demeure relativement faible. Sur la tranche moyenne de l’ISF, qui compte environ 240 000 contribuables, nous sommes en présence d’environ 35 000 engagements et versements.
Cette donnée est d’ailleurs corroborée par l’évaluation des voies et moyens, qui nous indique qu’un peu moins de 54 000 redevables de l’ISF recourent au dispositif ISF-PME et que l’affaire coûte rien de moins que 620 millions d’euros au budget de l’État. Cela laisse supposer, eu égard au taux de la réduction d’impôt, que les sommes avancées aux entreprises constituent le double de cette coûteuse dépense fiscale ; cela représente donc une contrepartie coûteuse et faible de l’incapacité du secteur bancaire à aider le développement de nos PME.
L’amendement n° I–98, présenté par MM. Delattre, Doligé, Commeinhes, Pierre et Portelli, Mme Deroche, M. Pellevat, Mmes Gruny et Canayer et MM. P. Dominati, Charon, G. Bailly, Chasseing, D. Laurent et Husson, est ainsi libellé :
Après l’article 2 quinquies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – L’article 885-0 V bis du code général des impôts est ainsi modifié :
1° À la seconde phrase du premier alinéa du 1 du I, le montant : « 45 000 » est remplacé par le montant « 90 000 » ;
2° Au 2 du III, le montant : « 18 000 » et le montant : « 45 000 » sont remplacés par le montant « 90 000 » .
II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Francis Delattre.
Si vous le permettez, monsieur le président, je défendrai en même temps les amendements n° I–98, I–103 et I–99.
Il s’agit par ces amendements, sur le fondement d’une philosophie différente, d’orienter une part du produit éventuel de l’ISF vers les entreprises, puisque même le pacte national pour la croissance, la compétitivité et l’emploi fait le constat selon lequel l’épargne des Français n’est pas suffisamment orientée vers le financement des entreprises.
Le dispositif de l’ISF-PME, imaginé effectivement par l’ancienne majorité, a naturellement connu quelques restrictions. Ainsi, il existe aujourd’hui une forme de distinguo entre investissements directs et investissements indirects. Par conséquent, il est assez compliqué de favoriser la souscription de parts de fonds communs de placement dans l’innovation.
Ce distinguo est en réalité assez confus, donc cet amendement vise à le faire disparaître et à instaurer un plafond unique global de 90 000 euros, au lieu de 45 000 euros et de 18 000 euros actuellement. Pour les PME et les PMI, ce dispositif a quand même bien fonctionné et on aurait par conséquent intérêt, monsieur le secrétaire d'État, à le préserver et à le développer.
L’amendement n° I–103, présenté par MM. Delattre, Doligé, Joyandet, Morisset, Mouiller, D. Laurent, Portelli, Masclet et Charon, Mme Primas, M. Pellevat, Mme Duchêne et MM. P. Dominati, Chatillon, Mayet, Savary, Gremillet, Pierre, Lemoyne et Mandelli, est ainsi libellé :
Après l’article 2 quinquies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – À la seconde phrase du premier alinéa du 1 du I de l’article 885-0 V bis du code général des impôts, le montant : « 45 000 » est remplacé par le montant « 90 000 ».
II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
Cet amendement a été précédemment défendu.
L’amendement n° I–99, présenté par MM. Delattre, Doligé, Commeinhes, Pierre et Portelli, Mme Deroche, M. Pellevat, Mmes Gruny et Canayer et MM. P. Dominati, Charon, Mayet, G. Bailly, Chasseing et D. Laurent, est ainsi libellé :
Après l’article 2 quinquies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Au 2 du III de l’article 885-0 V bis du code général des impôts, le montant : « 18 000 » est remplacé par le montant : « 45 000 ».
II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
Cet amendement a également été précédemment défendu.
L’amendement n° I–168, présenté par M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Bocquet et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’article 2 quinquies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au premier alinéa du I de l’article 885–0 V bis A du code général des impôts, le montant : « 50 000 € » est remplacé par le montant : « 10 000 € »
La parole est à M. Éric Bocquet.
Cet amendement vise à réduire le plafond de la dépense éligible à la réduction d’impôt pour dons aux œuvres. Nous pouvons en effet parfaitement comprendre que les redevables de l’ISF aient un comportement philanthropique, mais il faudrait que ce fait soit considéré à juste proportion.
Citons, de ce point de vue, quelques données précises. Dans la tranche moyenne de l’ISF, un peu plus de 25 000 redevables font de tels versements, qu’il s’agisse de l’aide apportée à des associations caritatives, à des fondations ou encore à certains établissements d’enseignement supérieur, pour ne donner que quelques exemples. Ils le font pour un montant total de dons dépassant de peu 63 millions d’euros, soit un don moyen d’environ 2 500 euros. Les versements effectués dans l’Espace économique européen au profit d’œuvres de mêmes nature et objet sont plus rares et d’un montant équivalent.
Autant dire que le plafond actuel de dons, fixé à 50 000 euros, est parfaitement superfétatoire au regard de la réalité des mouvements constatés et qu’il n’y a sans doute qu’un nombre très réduit de contribuables, qui pourraient d’ailleurs effectuer la même opération pour ce qui concerne l’impôt sur le revenu, qui l’atteignent.
Au-delà des bonnes intentions et de la philanthropie, nous craignons en effet que les dons ne soient ajustés, si j’ose dire, aux besoins, c’est-à-dire que les redevables de l’ISF concernés ne versent par principe et par habitude que la somme nécessaire pour leur permettre d’être dispensés du paiement de l’impôt.
Réduire le plafond des dons retenus pour alléger l’ISF participe aussi d’une autre démarche et de l’approche globale de nos prélèvements. On ne peut, d’une part, légiférer sur le plafonnement des niches fiscales – cela s’est fait – et fixer des plafonds plus « raisonnables » pour un certain nombre de dépenses fiscales et, d’autre part, laisser perdurer dans le cadre de l’ISF deux niches fiscales rapportant, en allégements de droits, l’une 25 000 euros et l’autre 37 500 euros. Nous pourrions comparer utilement ces sommes avec le revenu médian d’un contribuable français, qui doit se situer aux alentours de 18 000 euros par an.
À cet égard, je ne rappelle pas ici le plafond actuel du dispositif « Coluche » ni celui qui est applicable aux dons et œuvres d’intérêt général qui se trouvent, de fait, limités à 3 600 euros pour un contribuable médian de notre pays.
L’amendement n° I–209 rectifié bis, présenté par M. Bouvard, est ainsi libellé :
Après l’article 2 quinquies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Au I de l’article 885 V bis du code général des impôts, après les mots : « par l’article 156, » sont insérés les mots : « du montant des charges mentionnées au 2° du II de l’article 156, notamment des pensions judiciairement fixées au titre du devoir de secours, ».
II. – Le I s’applique aux pensions versées à compter du 1er janvier 2015.
III. – La perte de recettes résultant pour l’État des I et II est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Michel Bouvard.
Je n’ai pour ma part aucun problème avec l’ISF et je suis lucide sur le fait que, en l’état actuel des finances publiques, toute modification est difficile.
Il s’agit d’un amendement technique, destiné à assurer l’équité dans la mise en œuvre des dispositions de l’article 885 V bis du code général des impôts. Cet article institue un plafonnement de l’ISF lorsque le total des impôts dus en France et à l’étranger excède 75 % du total des revenus du redevable.
En matière d’impôt sur le revenu, les pensions et autres obligations peuvent faire l’objet d’une déduction. En revanche, en ce qui concerne le plafonnement de l’ISF, il semble que cela ne soit pas le cas puisque, notamment, un certain nombre de pensions fixées judiciairement ou d’autres obligations ne peuvent faire l’objet d’une déduction.
Cet amendement a donc uniquement pour objet de traiter cette situation, qui doit concerner un nombre très limité de cas et n’avoir, de ce fait, qu’une incidence très marginale sur le rendement de cet impôt.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quatorze heures quinze.
La séance est suspendue.
La séance, suspendue à douze heures quarante-cinq, est reprise à quatorze heures quinze, sous la présidence de M. Jean-Pierre Caffet.