La séance, suspendue à douze heures quarante, est reprise à quatorze heures quarante, sous la présidence de M. Thierry Foucaud.
La séance est reprise.
Nous poursuivons l’examen du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, de finances rectificative pour 2012.
Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus aux amendements tendant à insérer des articles additionnels après l’article 8.
L'amendement n° 207 rectifié quater, présenté par M. Assouline et les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
Après l’article 8
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - L'article 42-3 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Sans préjudice de l'application du premier alinéa, tout éditeur de service détenteur d'une autorisation délivrée en vertu des articles 29, 29-1 et 30-1 doit obtenir un agrément du Conseil supérieur de l'audiovisuel en cas de transfert du contrôle direct ou indirect, au sens de l'article L. 233-3 du code de commerce, de la société titulaire de l’autorisation. Le Conseil apprécie si les modifications envisagées sont, eu égard, le cas échéant, aux engagements pris par les opérateurs intéressés pour en atténuer ou en compenser les effets, de nature à compromettre l'impératif fondamental de pluralisme et l'intérêt du public. »
II. - Le chapitre III du titre Ier de la première partie du livre Ier du code général des impôts est complété par une section XXIII ainsi rédigée :
« Section XXIII
« Taxe sur la cession de titres d'un éditeur de service de communication audiovisuelle
« Art. 235 ter ZG. - Tout apport, cession ou échange de titres ayant fait l'objet d'un agrément dans les conditions prévues au dernier alinéa de l'article 42-3 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication est soumis à une taxe au taux de 5 %, assise sur la valeur des titres apportés, cédés ou échangés. Cette taxe est due par la personne ayant, au terme des apports, cessions ou échanges réalisés sur ses titres, transféré le contrôle de la société titulaire de l'autorisation d'usage de la ressource radioélectrique.
« La taxe s'applique à l'ensemble des apports, cessions ou échanges dont le cumul au cours de six mois a abouti au transfert de contrôle de la société titulaire de l'autorisation.
« Le montant dû au titre de cette taxe fait l’objet d’un abattement de 1 000 000 € par société titulaire d'une autorisation d'usage de la ressource radioélectrique.
« Cette taxe est due et acquittée auprès du comptable public au plus tard le 1er mai de l'année qui suit celle de l'apport, de la cession ou de l'échange. Le paiement est accompagné d'un état conforme au modèle fourni par l'administration faisant apparaître les renseignements nécessaires à l'identification de la personne assujettie et à la détermination du montant dû.
« Cette taxe est recouvrée selon les règles et sous les sanctions et garanties applicables aux droits d'enregistrement. »
III. – Les I et II sont applicables aux apports, cessions ou échanges réalisés à compter du 26 juillet 2012.
La parole est à M. David Assouline.
Je procéderai tout d’abord à un petit rappel.
Quand le gouvernement de Lionel Jospin décida de promouvoir la télévision numérique terrestre, la TNT, il s’agissait d’atteindre deux objectifs en matière d’offre audiovisuelle : le pluralisme, en augmentant l’offre de chaînes, et l’émergence de nouveaux acteurs dans un paysage audiovisuel relativement concentré et fermé.
Malgré un certain scepticisme initial, le succès a été au rendez-vous. Les téléspectateurs ont apprécié l’augmentation de l’offre audiovisuelle, qui s’est étoffée de plus de vingt chaînes nouvelles.
Depuis, nous avons parfois assisté à quelques transgressions au regard des objectifs précités. Au rebours de l’esprit initial de pluralisme et de diversité, sont apparus des mouvements de concentration, voire des tentations de valorisation financière des fréquences appartenant au domaine public et concédées gratuitement par l’État.
Le présent amendement ne constitue pas une innovation, puisqu’il a été adopté par notre assemblée dans le cadre de l’examen du projet de loi de finances initiale pour 2012. Il a ensuite été voté par l’Assemblée nationale, le gouvernement de l’époque ayant lui-même estimé qu’il allait dans le bon sens. En effet, le Conseil supérieur de l’audiovisuel, le CSA, s’était ému des dérives que j’évoquais à l’instant et cherchait les moyens de les interdire. Cela étant, les préconisations du CSA seront certainement contestées devant le juge.
L’adoption de cet amendement, dont les dispositions sont assez modérées, permettrait de dégager des recettes supplémentaires pour le budget de l’État, ce que le Gouvernement ne peut manquer d’apprécier au regard des difficultés actuelles.
En décembre dernier, l’Assemblée nationale et le Sénat s’étaient prononcés en faveur de la mesure que je vous soumets à nouveau aujourd’hui. Le gouvernement d’alors y était plutôt favorable dans l’esprit, mais il avait jugé utile, devant les députés, de modifier la rédaction du texte élaboré par notre assemblée, pensant ainsi la sécuriser sur le plan juridique. Malheureusement, le Conseil constitutionnel a ensuite censuré la formulation adoptée par l’Assemblée nationale…
Instruits par cette expérience, nous avons établi une rédaction tenant compte des considérants de la décision du Conseil constitutionnel, tout en étant propre à éviter les effets pervers et à répondre aux attentes des acteurs du secteur, qui sont nombreux à avoir manifesté leur intérêt pour notre travail.
Je souhaite donc vivement que cet amendement dont le dispositif fait consensus puisse être adopté sans que se manifestent des clivages superflus.
Cet amendement, que David Assouline a brillamment défendu, comme à son habitude, vise à créer une taxe sur les cessions de titres par un éditeur de service de communication audiovisuelle.
Il s’agit de réguler la revente spéculative de sociétés détentrices de fréquences. J’indique d’emblée que je suis favorable à cet amendement, d’autant qu’il a été rectifié de manière à supprimer le caractère rétroactif de son dispositif, que la commission des finances avait souligné.
Cet amendement, qui avait été adopté par le Sénat lors de la discussion du projet de loi de finances pour 2012, avait été inspiré par l’opération réalisée par Canal Plus en septembre dernier : cette chaîne avait en effet pris une participation de 60 % dans Direct 8 et Direct Star, au profit du groupe Bolloré. Cet événement avait ému le monde de l’audiovisuel et inspiré l’action législative.
L’Assemblée nationale avait ensuite supprimé l’amendement en nouvelle lecture, puis le gouvernement d’alors avait introduit en loi de finances rectificative un dispositif d’inspiration similaire, mais à la rédaction plus complexe, à tel point que ce dernier fut censuré par le Conseil constitutionnel, au motif que l’assiette de la taxe proposée n’était pas suffisamment bien définie.
Tel n’est pas le cas pour la mesure qui nous est ici présentée, la rédaction étant beaucoup plus précise à cet égard.
Ainsi, elle prévoit un abattement suffisamment important pour que ne soient pas pénalisées les PME éditrices de radios indépendantes, qui n’ont aucune part dans le développement de la TNT nationale, et les entreprises éditrices de services de télévision locale, qui peinent à trouver leur équilibre économique.
En outre, la rédaction recentre le champ de la taxe sur son véritable objet, à savoir la taxation des seuls transferts de propriété.
Enfin, contrairement au dispositif adopté en décembre, le présent amendement, après rectification par ses auteurs, n’a plus de caractère rétroactif, puisque ses dispositions s’appliqueraient simplement à compter du 26 juillet 2012.
Pour toutes ces raisons, la commission a émis un avis favorable sur cet amendement.
Le Gouvernement comprend très bien les intentions des auteurs de l'amendement, ainsi que les motivations de l’avis favorable de la commission des finances.
Je voudrais simplement préciser, au nom du Gouvernement, que l’objectif n’est évidemment pas de taxer telle ou telle société, ou de pénaliser tel ou tel acteur du monde industriel : il s’agit bien entendu d’une taxe de portée générale.
Pour autant, il paraît difficile au Gouvernement d’émettre un avis favorable ou défavorable. C'est pourquoi il s'en remet à la sagesse du Sénat.
Il me serait agréable de pouvoir dire à M. Assouline que le groupe UMP est disposé à soutenir cet amendement.
Malheureusement, celui-ci réserve un sort particulier aux petites entreprises audiovisuelles ; or elles ne sont pas seules à pouvoir rencontrer des difficultés. Imposer cette taxation punitive pour toute vente présenterait l'inconvénient d'empêcher le bon fonctionnement d'un marché qui n'est pas forcément spéculatif : certaines ventes peuvent fort bien être inspirées par la nécessité d'apporter des capitaux nouveaux à une entreprise en difficulté, quelle qu'en soit la taille.
La précaution qui a été prise pour atténuer les effets de ce nouveau prélèvement ne dissipe pas complètement l'inquiétude que peut susciter la création de celui-ci.
D'une manière plus générale, je constate que, chaque fois que se pose un problème dans ce pays, la première réaction de la majorité actuelle est de créer un impôt nouveau pour le régler… En ce qui me concerne, je ne partage pas cette idée que la taxation serait systématiquement la bonne solution. On a encore eu ce matin la démonstration que cela n’était pas vrai : la taxe sur les logements vacants, créée en 1999 et dont le taux a été augmenté, n’a eu aucune efficacité pour remettre sur le marché des logements inoccupés. Dans le même esprit, le nouvel impôt que l’on nous propose ici d’instaurer ne me paraît pas être le bon instrument pour régler un problème dont je ne nie pas la réalité.
Je comprends moi aussi les bonnes intentions qui animent les auteurs de cet amendement, mais il me semble qu’il faut faire confiance au Conseil supérieur de l'audiovisuel pour régler efficacement la question. L'agrément que celui-ci doit délivrer suffit largement à empêcher des opérations spéculatives qui ne seraient pas justifiées par des motifs d'intérêt général tenant à la pérennité des entreprises audiovisuelles.
Telles sont les raisons pour lesquelles, en ce qui me concerne, je voterai contre cet amendement.
Pour ma part, je pense au contraire que cet amendement est très pertinent. Si les pouvoirs publics ont chargé une autorité indépendante, le Conseil supérieur de l'audiovisuel, d’attribuer les fréquences, c'est qu'ils savent combien sont forts les enjeux liés à l'utilisation publique ou marchande de celles-ci.
Les exigences sont fortes, les auditions rigoureuses et les propositions des candidats enregistrées et suivies dans la durée, jusqu'à ce qu'un détenteur d'une fréquence d’émission, qui s’en considère propriétaire, bouscule l'équilibre du système et revende sa chaîne, confondant dans la même transaction un bien marchand et un bien public, à savoir la fréquence.
L'amendement de notre collègue a donc pour objet de taxer de telles transactions : c’est le moins que l’on puisse faire.
En tant que présidente de la commission de la culture, je précise que cet amendement avait été adopté par le Sénat lors du dernier débat budgétaire par une majorité allant du groupe CRC au groupe UMP – à cet égard, je m'étonne que certains membres de ce dernier semblent avoir changé d'avis –et que c'est une modification maladroite de sa rédaction à l’Assemblée nationale qui a provoqué la censure du Conseil constitutionnel.
Nous soutenons donc résolument la création de cette taxe, tout en estimant que des régulations plus vertueuses encore devront voir le jour. Mais, aujourd'hui, nous examinons un projet de loi de finances rectificative et nous parlons de taxes.
Je voudrais simplement attirer l'attention de notre assemblée sur une question de date : il est prévu que les dispositions de cet amendement entrent en vigueur le 26 juillet 2012, c'est-à-dire aujourd'hui. Or le présent texte ne sera pas définitivement adopté avant le 30 ou le 31 de ce mois, à l'issue de la commission mixte paritaire. Il ne faudrait pas que le Conseil constitutionnel puisse trouver là un nouveau motif de censure.
Je soutiens cet amendement frappé au coin du bon sens, d'autant qu’il ne me semble pas tout à fait pertinent de s’en remettre à l’action du CSA.
Nous rencontrons des difficultés, dans nos régions, pour faire respecter le pluralisme dans l'utilisation du réseau hertzien. En Normandie, notamment, on constate désormais une forte concentration. Je pense donc que M. Assouline a eu parfaitement raison de proposer la création de cette taxe.
Monsieur Bas, pour avoir discuté de cette question avec certains de vos collègues au sein de la commission de la culture, je ne considère pas, à ce stade, que votre intervention reflétait l’opinion de la majorité des membres du groupe UMP.
En outre, c’est la première fois que l’on me dit que je suis trop répressif ; on m’a même plutôt fait le reproche inverse dans le passé ! Ainsi, les membres du CSA sont tellement conscients que les opérations spéculatives sur des fréquences qu’ils ont attribuées gratuitement représentent une menace qu'ils envisageaient des mesures d'interdiction. Moi qui suis plus modéré
Exclamations amusées sur les travées de l'UMP.
Nous sommes face à des acteurs du paysage audiovisuel qui prônent la concentration pour résister à la concurrence internationale, mais une telle évolution nuit au pluralisme. À l’inverse, la TNT était censée permettre l’arrivée de nouveaux acteurs, y compris de taille modeste, et garantir la diversité. Or ce sont de grands groupes qui sont derrière les derniers attributaires de fréquences. Je comprends la nécessité de constituer des groupes forts, mais cela ne doit pas amener à négliger l’objectif de pluralisme fixé par le législateur et ceux qui ont fait la TNT. Cette préoccupation transcende les clivages gauche-droite.
La taxe que nous proposons d’instaurer rapportera de l'argent à l'État et incitera à des pratiques plus vertueuses. Au travers de cet amendement de portée générale, je ne désigne personne à la vindicte publique. J'espère qu'il fera l’objet d’un très large consensus au sein de notre assemblée.
Je voterai très volontiers cet amendement.
Outre qu’il me semble absolument anormal de réaliser des plus-values grâce à des fréquences attribuées gratuitement trois ou quatre ans plus tôt, je pense, monsieur le rapporteur général, que de telles opérations donnent probablement lieu à des pratiques d'évasion fiscale, puisqu’elles ont par exemple permis à M. Bolloré de devenir l’actionnaire de référence de Vivendi.
Il existe un réel problème en matière de pluralisme. Ainsi, à l’UMP, nous avons souffert d’un manque de pluralisme au cours des dernières campagnes électorales.
Exclamations amusées sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.
Par conséquent, toute mesure tendant à infléchir la tendance en la matière est bienvenue.
Comme l’a rappelé M. Assouline, la TNT devait être un instrument de pluralisme. Il est tout à fait anormal que le CSA n’ait pas aujourd’hui les moyens de s’opposer aux opérations financières en question ; il incombe au législateur de les lui donner. À cet égard, je me suis inspiré de l’une des propositions de loi que vous aviez rédigées voilà deux ans, monsieur Assouline, pour élaborer, avec mes collègues du groupe UMP, un texte visant à la fois à permettre la constitution de groupes forts et à garantir le pluralisme. Nous le présenterons au Sénat en septembre prochain.
En effet, il ne nous a pas échappé que, derrière les journalistes que l’on accuse volontiers de parti pris, se trouvent des groupes industriels. Or, à la veille de chaque échéance électorale importante, on voit se manifester le syndrome du favori : les grands médias, qui ont besoin de la commande publique, se rangent au côté du favori désigné par les sondages, car il ne faut pas insulter l’avenir… On a ainsi vu cette chose extraordinaire : le magazine de M. Pinault est passé du centre droit au centre gauche, voire au-delà ! Je vais peut-être vous choquer en disant cela, mais si la couverture médiatique de la dernière campagne présidentielle avait été plus équilibrée, je ne suis pas sûr que le résultat eût été le même… §
M. Jean Arthuis. Je voterai cet amendement, qui me semble fondé et juste.
Marques de satisfaction sur les travées du groupe socialiste.
Tout gouvernement doit être attentif aux conditions dans lesquelles sont délivrées les licences. En matière de téléphonie mobile, par exemple, il est très bien de vendre une licence à un quatrième opérateur, mais les moins-values qu’engendre l’arrivée sur le marché de ce nouvel acteur pour des sociétés dont l’État ou la Caisse des dépôts et consignations sont actionnaires sont nettement supérieures au produit de cette vente…
Réguler un peu mieux les transactions en question me paraît être de bonne administration publique.
La position du groupe de l’UCR sur ce sujet est très claire, dans la mesure où nous avions déjà voté une telle disposition.
Je voudrais que chacun ici soit convaincu de la nécessité de légiférer en la matière, en vue de lutter contre la spéculation et la concentration liée au rachat des fréquences par de grands groupes. Pour atteindre ce double objectif, il est malheureusement nécessaire de mettre en place une taxation.
Cela étant, je m’interroge sur certains aspects du dispositif.
Ainsi, cette taxe est assise sur la valeur de revente des titres, qui sera le plus souvent égale, si j’ai bien compris, au montant de la plus-value réalisée, dans la mesure où les fréquences sont attribuées gratuitement. Si tel est bien le cas, le taux de 5 % prévu me paraît plutôt faible, puisqu’il est nettement inférieur au taux d’imposition des plus-values.
En outre, instaurer un abattement de 1 million d’euros sur le montant de la taxe paraît plutôt généreux pour les vendeurs. Ne devrait-on pas le réduire ?
Enfin, l’échéance pour le paiement de la taxe est fixée au 1er mai de l’année suivant l’opération : est-il judicieux de prévoir un tel délai, alors que l’imposition de la plus-value sur titres, aux termes du code général des impôts, interviendra plus tôt ?
Le groupe de l’UCR votera bien sûr cet amendement.
L'amendement est adopté.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances rectificative, après l'article 8.
J’informe le Sénat que la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif au harcèlement sexuel est parvenue à l’adoption d’un texte commun.
Nous reprenons la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, de finances rectificative pour 2012.
Dans la discussion des articles, nous poursuivons l’examen des amendements tendant à insérer des articles additionnels après l’article 8.
L'amendement n° 122, présenté par MM. Dantec, Placé et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
Après l'article 8
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le a. du 1° du 4 de l'article 298 du code général des impôts est ainsi rédigé :
« a. Les essences et gazoles utilisés comme carburants mentionnés au tableau B de l'article 265 du code des douanes, à l'exception de ceux utilisés pour les essais effectués pour les besoins de la fabrication de moteurs ou d'engins à moteur ; »
La parole est à M. Ronan Dantec.
Cet amendement vise à remettre en cause l’avantage accordé aux véhicules diesel dans les flottes des parcs d’entreprise, lié à la déductibilité de la TVA pour l’utilisation de ce type de carburant.
Le présent amendement s’inscrit totalement dans l’esprit des déclarations d’Arnaud Montebourg sur le développement de la « voiture propre » dans le cadre du plan de soutien au secteur automobile qu’il a présenté hier. Accorder un avantage fiscal pour l’utilisation du diesel est à mes yeux une aberration ; cela est incohérent avec la stratégie industrielle que nous souhaitons aujourd’hui mettre en place.
En outre, la suppression de cet avantage représenterait, pour l’État, une économie de 350 millions d’euros, ce qui n’est pas négligeable !
J’insiste sur le fait que les véhicules d’entreprise se renouvellent plus rapidement que les véhicules de particuliers, d’où l’intérêt d’inciter les entreprises à renoncer au diesel, pour accélérer la transition vers la voiture propre.
Cela me donne l’occasion de redire à quel point il est important, pour l’avenir de l’industrie automobile française, de sortir le plus rapidement possible de la filière diesel. L’Organisation mondiale de la santé et de nombreux rapports le soulignent, l’utilisation du diesel est dangereuse pour la santé humaine. Cette filière représente une impasse industrielle, dont il faut sortir. Tel était le sens, me semble-t-il, des déclarations d’Arnaud Montebourg.
Cet amendement tend à supprimer l’avantage fiscal accordé pour les véhicules diesel.
La commission des finances n’est évidemment pas insensible à la philosophie qui guide cette démarche. Le sujet est récurrent dans nos débats fiscaux depuis plusieurs années, d’autant que plusieurs rapports récents, notamment celui qui a été remis par le groupe de travail mis en place par le Centre d’analyse stratégique et présidé par Guillaume Sainteny, font état de la nocivité de certaines aides publiques pour l’environnement et la santé.
Je crois que le Gouvernement est bien conscient de cette préoccupation sociétale. C’est la raison pour laquelle une conférence environnementale est prévue pour le mois de septembre. Afin que la présente disposition puisse s’inscrire dans un plan global prenant en compte toutes considérations liées aux carburants, aux énergies et aux transports, il conviendrait peut-être de l’examiner dans ce cadre.
Dans cette perspective, nous sollicitons le retrait de l’amendement.
Comme vient de l’indiquer M. le rapporteur général, cette question sera traitée lors de la conférence environnementale, laquelle aura à se pencher sur un problème de droit qui ne me paraît pas simple à régler. Nous ne pourrons en tout cas certainement pas le faire cet après-midi.
En effet, une directive communautaire de 2006 rend juridiquement impossible la non-déductibilité de la TVA pour les biens intermédiaires, en l’espèce le gazole. L’essence est un cas à part, car pour elle la non-déductibilité de la TVA prévalait déjà avant l’adoption de la directive, or il est constant que, si le droit à venir est conditionné par celle-ci, le droit déjà en vigueur demeure. J’ajoute que, de surcroît, l’adoption de cet amendement fragiliserait la situation de la France.
Par conséquent, au bénéfice des explications que je viens de vous donner, il serait prudent que vous retiriez cet amendement, comme l’ont fait les députés du groupe écologiste à l’Assemblée nationale, en laissant à la conférence environnementale le soin de définir les voies et moyens qui permettraient d’améliorer la situation actuelle. Pour des raisons juridiques et communautaires, il me semble impossible de le faire par voie d’amendement.
Pour toutes ces raisons, je sollicite le retrait de cet amendement ; à défaut, je serais contraint d’émettre un avis défavorable.
J’ai pris bonne note de la volonté d’ouverture de M. le rapporteur général. M. le ministre délégué a reconnu l’incohérence du système actuel, les règles n’étant pas les mêmes pour l’essence et le diesel en matière de déductibilité de la TVA.
Je retire l’amendement, compte tenu des difficultés techniques soulevées, mais cette question devra être traitée, car nous ne pouvons laisser subsister une telle incohérence.
Je suis donc saisi d’un amendement n° 122 rectifié, présenté par M. Marini, qui reprend le contenu de l’amendement n° 122.
Vous avez la parole pour le défendre, monsieur Marini.
Monsieur le ministre, je voudrais vous poser une question portant sur un sujet connexe.
Chacun a pu prendre connaissance du plan de soutien au secteur automobile et des moyens supplémentaires prévus en faveur du système de bonus-malus. J’ai cru comprendre que ce plan comportait des financements très divers, y compris des sommes issues du grand emprunt, des sommes susceptibles d’être allouées par Oséo et des éléments d’ordre budgétaire, sans doute nouveaux, pour un montant s’établissant, si ma mémoire est bonne, entre 150 millions et 200 millions d’euros.
Puisque nous débattons d’un projet de loi de finances rectificative, je souhaiterais savoir si la partie budgétaire de ces financements a une existence dans les lois de finances déjà votées ou dans le texte que nous examinons aujourd’hui. En d’autres termes, n’annonce-t-on pas des sommes qui n’existent pas encore ou qui ne pourraient être dégagées que par de nouvelles augmentations de prélèvements ou par d’autres réductions de dépenses publiques ?
Cette question étant posée, je retire l’amendement n° 122 rectifié.
L’amendement n° 122 rectifié est retiré.
L'amendement n° 123, présenté par M. Labbé et Mmes Blandin et Bouchoux, est ainsi libellé :
Après l’article 8
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article 265 bis A du code des douanes est abrogé.
La parole est à M. Joël Labbé.
Cet amendement vise à supprimer l’avantage fiscal accordé aux producteurs d’agrocarburants de première génération. Pour l’année 2012, ce dispositif représente une perte de 196 millions d’euros pour le budget de l’État.
Selon le rapport publié par la Cour des comptes en janvier 2012, durant la période 2005-2010, la filière agricole productrice d’agrocarburants a bénéficié de 2, 6 milliards d’euros de dépenses fiscales cumulées, pour 1, 5 milliard d’euros d’investissements. Du point de vue strictement économique, le maintien de cette niche fiscale n’est pas justifié, puisque les investissements ont été réalisés et sont d’ores et déjà largement rentabilisés. Il s’agit avant tout d’une question de justice fiscale, d’autant que, pour nous écologistes, les efforts en matière de réduction de la dette n’auront de sens que s’ils s’inscrivent dans une stratégie générale de transition écologique et énergétique.
Cette transition doit permettre d’effacer l’autre dette, immense, que nous avons à l’égard des générations futures : la dette environnementale. Désormais, les mesures de l’État devront intégrer la notion de sobriété au lieu de perpétuer la fuite en avant dans le domaine des transports et des déplacements comme dans les autres champs d’activité.
Le même rapport mentionne l’avis de la direction générale du Trésor : les producteurs de biocarburants, compte tenu de l’importance de la pénalité représentée par la TGAP et de la possibilité de la répercuter sur les consommateurs, ce qu’ils ne manquent pas de faire, bénéficient « d’une rente […] assimilable à une subvention ». Par ailleurs, aux termes du rapport, le « soutien aux biocarburants […] paraît […] peu approprié dans la mesure où les exploitations concernées sont parmi les plus riches, et bénéficient déjà d’un soutien public plus important que la moyenne via la politique agricole commune ». C’est une question de justice, disais-je !
L’État subventionne une industrie bénéficiaire et, de surcroît, le développement de l’utilisation des agrocarburants de première génération s’opère au détriment du pouvoir d’achat des consommateurs. En effet, ces derniers paient les agrocarburants intégrés à l’essence ou au gazole, tandis que les performances énergétiques sont moindres.
De plus, du point de vue écologique, rien ne justifie cette niche fiscale que le Centre d’analyse stratégique considère comme dommageable à la biodiversité. Ce jugement est confirmé par l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie, l’ADEME.
En outre, comme l’a rappelé la Food and agriculture organization, la FAO, promouvoir les agrocarburants, c’est également soutenir une politique qui engendre indéniablement une hausse des prix des denrées alimentaires à l’échelle mondiale, au risque de provoquer de nouvelles émeutes de la faim.
Par ailleurs, dans les pays du Sud, les cultures destinées à la filière des agrocarburants, qui participent de la scandaleuse pratique de l’accaparement des terres, ont mobilisé 128 millions d’hectares au cours des dix dernières années. Elles représentent, à elles seules, deux fois la surface agricole de la France.
Mes chers collègues, pour toutes ces raisons, cette exonération n’a plus lieu d’être. Je vous demande donc avec force de voter la suppression d’un dispositif qui, je le répète, représente une perte de 196 millions d’euros pour le budget de l’État.
Comme pour l’amendement précédent, il s’agit de faire diligence pour valider une option certes tout à fait intéressante, mais la conférence environnementale a vocation à se saisir de ce dossier, non pas dans six mois ou dans un an, mais dans quelques semaines.
Dans cette perspective, la commission demande le retrait de cet amendement.
Monsieur Labbé, les raisons pour lesquelles j’ai sollicité, il y a quelques instants, le retrait du précédent amendement, valent aussi pour celui que vous venez de présenter.
Cet amendement semble prématuré au regard de l’action du Gouvernement. Je vous ai indiqué le programme que nous comptons suivre. Agir de manière concertée, dans le cadre d’un plan d’ensemble, me paraît préférable, même si je respecte tout à fait votre liberté de déposer des amendements.
Comme M. le rapporteur général, je souhaiterais donc que vous retiriez cet amendement, d’autant que des agréments sont en cours de finalisation : son adoption créerait une situation d’instabilité juridique, dont les actuels bénéficiaires du dispositif risqueraient de demander à l’État de leur rendre compte, sous une forme ou sous une autre.
Il ne s’agit pas, pour le Gouvernement, de se défausser. Il s’est clairement engagé à réunir une conférence environnementale à la rentrée.Prendre une telle mesure au cœur de cet été paraît prématuré, je le redis, même s’il n’y a pas de désaccord de principe entre les auteurs de l’amendement et le Gouvernement.
Monsieur le président de la commission des finances, je répondrai maintenant à la question que vous avez posée voilà quelques instants, en reprenant l’amendement de M. Dantec. Au demeurant, je vous remercie d’assurer ainsi un certain écho aux propositions du Gouvernement. J’ai cru comprendre que vos propos n’étaient nullement ironiques et que vous approuviez le plan de soutien au secteur automobile.
Il est vrai qu’une partie du financement s’opérera dans le cadre d’un jeu à somme nulle : de fait, une incitation sera mise en œuvre sous la forme d’un bonus et financée par le biais d’un malus.
M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Le dispositif du bonus-malus avait déjà été préconisé lors du Grenelle de l’environnement et avait d’ailleurs été mis en œuvre par le gouvernement précédent.
M. le président de la commission des finances acquiesce.
J’espère que ces explications vous donneront satisfaction, monsieur Marini, et je vous remercie de nouveau d’avoir assuré la publicité de ce plan de soutien au secteur automobile !
Monsieur le ministre délégué, un débat relatif aux agrocarburants aura certes lieu dans le cadre de la conférence environnementale, mais cette dernière n’aura évidemment pas vocation à arrêter des décisions.
Pour l’heure, le présent amendement ne remet pas en cause les agrocarburants, dont les producteurs bénéficient d’autres avantages, notamment au titre de la TGAP. De surcroît, la France a anticipé sur le quota de 10 % fixé par l’Union européenne.
Quand on parle d’agrocarburants en France, il s’agit en fait du biodiesel. Ronan Dantec a évoqué tout à l’heure l’enjeu de santé publique que représente l’utilisation du diesel.
Il faut dire les choses telles qu’elles sont : chacun le sait, il existe une structure, Sofiprotéol, très liée à la FNSEA, qui jouit d’une forme de monopole et bénéficie à elle seule de près de 80 % de l’aide publique au développement des agrocarburants.
Si certains de nos compatriotes souffrent déjà énormément, d’autres sont plus à même de consentir un effort. Tout le monde admet la nécessité de réaliser des économies, mais un principe supérieur de justice doit prévaloir. Or cet amendement va précisément dans le sens de la justice !
Monsieur le ministre délégué, nous attendons qu’un acte soit posé. Je dis cela sans la moindre acrimonie, car nous appartenons très loyalement à la majorité. Nous avons cependant des exigences strictes, comme celle-ci. Nous souhaitons que des engagements soient pris au titre du projet de loi de finances pour 2013. Pour l’heure, je maintiens l’amendement.
On ne peut pas ne pas réagir aux propos qui viennent d’être tenus quand on connaît un tant soit peu l’agro-industrie, notamment la filière de la bioraffinerie végétale, dont les agrocarburants ne constituent que la production la plus connue !
De quoi s’agit-il ? Il s’agit, par des voies propres, les voies fermentaires, de transformer la plante entière. Ainsi, la transformation de la paille de blé peut permettre d’obtenir des coproduits à valeur ajoutée tels que la pâte à papier, des pentoses, des lignines.
Pour cela, un effort de recherche est indispensable ! Les agrocarburants ne constituent qu’une première phase de transformation dans le domaine de la bioraffinerie végétale, c'est-à-dire des biotechnologies blanches. Leur production s’inscrit dans un ensemble de procédés industriels qui créeront les emplois de demain.
S’attaquer à cette filière, c’est donc, une fois de plus, s’attaquer à l’ensemble des entreprises qui la constituent, donc à l’emploi. C’est envoyer un mauvais signal à la filière agricole, qui s’est particulièrement investie dans le domaine de la recherche et de l’innovation. C’est la raison pour laquelle je suis opposé à cet amendement dont l’adoption mettrait dès à présent en péril tout un secteur de notre économie.
En matière d’agrocarburants, la recherche porte sur la transformation de la plante entière et ouvre de nouveaux débouchés. C’est la raison pour laquelle un certain nombre de crédits lui ont été alloués. Contrairement à ce qui a été affirmé, ces investissements n’ont pas encore été rentabilisés. Il faut poursuivre l’effort si l’on veut pouvoir, demain, produire des carburants à partir de la biomasse, de la fétuque ou d’autres plantes. C’est ainsi que nous pourrons nous assurer une certaine indépendance énergétique !
Or pour aboutir à la deuxième génération, il faut commencer par mener à leur terme les travaux sur la première génération : cela est indispensable. §
Par ailleurs, si l’on n’aide pas la filière française, qui, contrairement à ce que d’aucuns ont affirmé, n’a pas encore, tant s’en faut, amorti ses investissements dans le développement de biocarburants de première génération, c’est une production venue d’Asie, du Brésil ou d’Amérique du Nord qui envahira notre marché national. §Or cette production est bien plus fortement subventionnée que ne le sont nos biocarburants de première génération ! Il y a là un véritable enjeu pour notre balance commerciale.
Aux yeux de certains de nos concitoyens, les biocarburants sont entachés d’un péché originel : ils sont élaborés dans des régions d’agriculture productive. Il faut rappeler, parce que l’on n’en parle jamais, que cette agriculture dégage un excédent commercial de 10 milliards d’euros chaque année, soit l’équivalent de trente-deux Airbus ! C’est l’agriculture productive qui permet à la France d’être exportatrice dans le domaine agricole et agroalimentaire. Personnellement, je n’ai rien contre l’agriculture biologique. À mon sens, les deux modes de production ont leur place, mais, disons-le clairement, les rendements à l’hectare de l’agriculture biologique ne représentent que 40 % de ceux de l’agriculture conventionnelle, grâce à laquelle l’Europe a acquis son indépendance alimentaire.
Nous devons être très attentifs à cette dimension. Certes, le développement des agrocarburants de première génération n’est pas une fin en soi. Certes, ils ne sont pas parfaits, mais ils sont le point de passage obligé vers la mise au point des biocarburants de deuxième génération produits à partir de la plante entière et de végétaux non alimentaires. Il faut aller dans cette direction, nous sommes tous d’accord sur ce point, mais ne coupons pas les jambes aux entreprises qui sont précisément sur la voie de cet accomplissement.
Je voudrais profiter de cette occasion pour interroger à mon tour M. le ministre.
La concomitance de l’adoption par le conseil des ministres d’un plan de soutien au secteur automobile et de notre présente discussion n’aurait-elle pas justifié que nous obtenions connaissance de l’incidence budgétaire de ce plan, dans la mesure où il n’est pas douteux qu’il affectera les finances publiques au titre de l’année 2012 ?
De ce point de vue, monsieur le ministre, des fonds provenant du grand emprunt seront-ils alloués au financement des actions de soutien au secteur automobile ? Si tel est le cas, il faudra reconnaître que, finalement, c’est le budget de 2010 qui aura financé une partie de votre plan.
En effet, le grand emprunt était une opération marquée par une grande habileté en matière de présentation budgétaire, puisque les 35 milliards d’euros ont été imputés au budget de 2010, alors que les dépenses n’interviendront que plus tard, sur une période de cinq à dix ans. Vous en saurez sans doute gré au gouvernement précédent…
Notre collègue Joël Labbé a soulevé de vraies questions.
On a développé la filière des biocarburants sans mener une véritable réflexion de fond sur la pertinence, au regard des besoins de l’alimentation tant humaine qu’animale, de consacrer des terres agricoles à cette finalité.
Un travail au fond me semble donc nécessaire sur ce sujet.
J’ai bien entendu les arguments de certains de nos collègues sur le risque de voir se développer l’importation de biocarburants produits à l’étranger grâce à des aides importantes. Toutefois, cela ne justifie pas que nous nous engagions nous aussi dans une démarche qui est destructrice pour les pays concernés !
Marques d’approbation sur les travées du groupe écologiste.
Faut-il voter immédiatement cet amendement ou attendre la conférence environnementale ? En tout cas, il convient de prendre le temps de mener une réflexion de fond sur ces questions, afin de pouvoir prendre ensuite les mesures les plus efficaces possible.
Nous nous abstiendrons, mais c’est une abstention positive…
En ce qui nous concerne, nous ne voterons pas cet amendement, car nous considérons qu’il n’est pas raisonnable de faire systématiquement le procès de l’utilisation du diesel, des agrocarburants, du kérosène.
Nous sommes dans une période où notre filière automobile connaît des difficultés, où il est nécessaire d’avoir une approche – c’est un laïc qui parle ! – non pas « religieuse » de ces problèmes, mais sociétale et économique.
Il s’agit de questions de fond, qui comportent également une dimension sanitaire qu’il ne faut pas sous-estimer. On ne peut les traiter de cette manière, en faisant de l’affichage, car cela ne peut aboutir, au contraire, qu’à les compliquer encore.
Dans ces conditions, nous ne pouvons pas voter cet amendement.
M. Jean-Pierre Chevènement applaudit.
J’entends bien qu’il y a deux raisons de ne pas voter l’amendement : soit parce que l’on n’est pas d’accord avec nous sur le fond et que l’on soutient les agrocarburants, soit pour des considérations de stratégie industrielle concertée. Sur ce point, je réponds que lorsque l’industrie automobile française cessera de construire des véhicules hybrides roulant au diesel, elle aura peut-être des chances de réaliser des ventes dans d’autres pays, ce qui sera très bon pour notre balance commerciale.
M. le ministre, quant à lui, nous a suggéré d’attendre la conférence environnementale. Nous pourrions l’entendre, mais cette conférence durera moins de quarante-huit heures et se déroulera à la mi-septembre. Nous n’en saurons donc pas plus.
Considérez au moins cet amendement comme une petite fiche de rappel pour la ministre qui organisera cette conférence environnementale, afin qu’elle n’oublie pas notre volonté d’engager la discussion sur ce sujet.
M. le ministre l’a très bien dit, il s’agit là d’un sujet de société fondamental.
Cela étant, nous ne pouvons pas être favorables à cet amendement, parce que nous discutons ici d’un projet de loi de finances rectificative et que ce débat doit être mené à l’échelle de la société, avec les associations et, évidemment, les partis politiques. À ce titre, la conférence environnementale fournira un cadre adapté.
Je ne pense pas qu’il faille opposer l’agriculture biologique et l’agriculture conventionnelle : la France a besoin des deux.
L’agriculture conventionnelle apporte une contribution indispensable à notre commerce extérieur, et nous devons féliciter ces industriels de l’agroalimentaire, ces semenciers, tous ces exportateurs dont l’activité enrichit notre pays !
Par ailleurs, dans beaucoup de territoires, l’agriculture biologique est la seule filière pouvant permettre aux producteurs de s’en sortir.
Certes, les rendements sont modestes, mais les revenus dégagés sont, dans leur cas, supérieurs à ceux que pourrait leur procurer un mode de production conventionnel.
Ce n’est pas là un positionnement politicien, c’est une réalité ! Nous devrons définir une orientation stratégique : quelle agriculture voulons-nous pour les années à venir ? Si l’on ne mène pas cette réflexion, il ne sera plus nécessaire, d’ici à dix ans, de débattre de la place des biocarburants, parce qu’il n’y aura plus d’agriculteurs dans notre pays ! Il faut sauver notre agriculture, la défendre, la promouvoir. À cet égard, engager le débat sur la PAC sera indispensable.
La conférence environnementale doit permettre de définir une véritable stratégie, …
… en mobilisant tous les acteurs. Le Grenelle de l’environnement a duré des mois, ma chère collègue, mais la loi Grenelle 2 a fait « pschitt » et tout le monde s’accorde aujourd’hui à reconnaître que les résultats ne sont pas à la hauteur des espérances suscitées.
Certains d’entre nous pourraient approuver le dispositif du présent amendement, …
… mais l’adopter aujourd’hui, dans le cadre de la discussion de ce projet de loi de finances rectificative, ce serait voir les choses par le petit bout de la lorgnette.
M. le ministre a pris des engagements, nous nous sommes tous exprimés : j’invite nos collègues à retirer leur amendement et à attendre l’automne pour revenir sur le sujet dans un cadre plus adapté. Pour notre part, nous avons une grande ambition et nous estimons qu’il convient d’élaborer des lois d’orientation, des lois-cadres pour aller plus loin et donner de la visibilité aux acteurs.
J’apprends encore le métier…
J’ai entendu la position du groupe socialiste et l’expression d’une volonté forte de mettre les choses à plat.
Il ne s’agissait pas, pour moi, de faire le procès de l’agriculture intensive. La discussion portait sur l’énergie et les biocarburants.
Sur le fond, il y aura certes un débat sur les grandes orientations en matière agricole pour les années à venir, mais on continue à s’inscrire dans le court terme. Bien évidemment, il faut continuer à travailler sur les biocarburants de deuxième et troisième générations et y consacrer des moyens.
En ce qui concerne les agrocarburants de première génération, le maintien de la niche fiscale ne se justifie pas car la filière fonctionne bien.
Cela étant, je vais retirer mon amendement, pour éviter les divisions. Toutefois, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur général, notre exigence est extrêmement forte sur ces sujets. Nous nous inscrivons dans une logique majoritaire pour avancer ensemble.
Enfin, je voudrais également vous parler d’éthique.
Marques d’impatience sur les travées de l’UMP.
L'amendement n° 123 est retiré.
Je donne la parole à Mme Keller, qui l’avait demandée avant que M. Labbé n’annonce le retrait de l’amendement.
Mes collègues du groupe UMP et moi-même avions presque envie de nous retirer, car un débat interne à la majorité sénatoriale et présidentielle s’était instauré. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste, du groupe CRC et du groupe écologiste.)
On nous a promis que la conférence environnementale des 14 et 15 septembre prochains résoudrait la question de la transition énergétique en 48 heures chrono, pour reprendre le slogan d’un grand distributeur.
Changer de sources d’énergie, être plus attentifs au caractère limité des ressources, protéger la biodiversité et le cadre de vie de nos concitoyens, essayer de construire une forme de développement et d’urbanisme plus respectueuse des ressources : nous sommes tous d’accord sur ces objectifs, mais par quelle voie les atteindre ?
Le Grenelle de l’environnement a posé des jalons très forts. Je forme le vœu que, les 14 et 15 septembre prochains, dans un large consensus, nous puissions progresser ensemble.
Monsieur le ministre, j’espère que, en dépit de la chaleur du mois d’août, vous travaillerez beaucoup, parce qu’un grand effort de concertation au sein de la majorité est nécessaire pour parvenir à des propositions réalistes, de nature à prolonger de manière constructive le travail qui a été bien amorcé par le Grenelle de l’environnement. §
L'amendement n° 121, présenté par MM. Dantec, Placé et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 8
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après la première occurrence du mot : « aéronefs », la fin du b) du 1. de l’article 265 bis du code des douanes est ainsi rédigée : « pour les vols, à l’exclusion des aéronefs de tourisme privé et des vols effectués intégralement sur le territoire français. »
La parole est à M. Ronan Dantec.
Cet amendement vise d’abord à abonder le budget de la France à hauteur de 1, 3 milliard d’euros. Nous n’aurons guère d’autres occasions de dégager un tel montant de ressources nouvelles, il convient donc d’analyser notre proposition avec attention !
Il s’agit là aussi de remédier à une aberration : le kérosène utilisé par les avions est exonéré de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques, la TICPE, alors que le transport aérien émet davantage de gaz à effet de serre que d’autres modes de déplacement.
Cette exonération apparaît donc à la fois comme une aberration écologique et comme une distorsion de concurrence avantageant le transport aérien par rapport aux autres modes de déplacement, notamment le rail. Cela va à l’encontre tant des principes posés lors du Grenelle de l’environnement que de la volonté exprimée par le Gouvernement de renforcer la part du rail dans les modes de transport en France.
J’insiste sur le fait que cet amendement s’inscrit dans le respect de la convention de Chicago, qui prévoit la possibilité de supprimer cette exonération pour les vols domestiques. Les Pays-Bas et la Norvège ont déjà retenu cette option.
Je voudrais souligner trois autres points.
Tout d’abord, en ce qui concerne la fragilité actuelle du transporteur aérien historique Air France, il me semble que les exonérations dont bénéficie le transport aérien profitent surtout aux compagnies low cost, qui peuvent proposer des tarifs beaucoup plus attractifs que ceux des transporteurs classiques, lesquels respectent un certain nombre de normes sociales et de critères de qualité de service. La mesure que nous proposons ne handicaperait donc absolument pas les transporteurs aériens historiques.
Ensuite, le groupe écologiste est bien sûr très sensible à l’aménagement équilibré du territoire. À cet égard, nous n’oublions pas la situation des territoires qui ont particulièrement besoin du transport aérien, notamment les îles. Toutefois, ce n’est pas en rendant le transport aérien moins cher partout que l’on aidera ces territoires insulaires. Il faut trouver d’autres mécanismes, et le fait pour l’État de disposer d’une nouvelle ressource pourrait d’ailleurs lui permettre de déployer des dispositifs de soutien aux territoires les plus excentrés, qui rencontrent des difficultés en raison de cette situation.
Enfin, je voudrais insister sur la question de l’ETS, ou emissions trading system, à l’échelon européen, qui ne doit pas être confondue avec celle de la TICPE.
Premièrement, les montants en jeu ne sont pas les mêmes : l’ETS ne permettra jamais de compenser le cadeau concurrentiel au transport aérien que représente l’exonération de TICPE.
Deuxièmement, il est absolument impératif que le Gouvernement français et l’Europe continuent de défendre l’inscription du transport aérien dans l’ETS au niveau européen. Nous connaissons tous les pressions exercées pour que le transport aérien soit exclu de l’ETS. Toutefois, lâcher sur ce point reviendrait à décrédibiliser l’Europe dans les négociations internationales sur le climat, qui constituent un enjeu majeur.
Nous vous soumettons donc un amendement qui rapportera 1, 3 milliard d’euros au budget de l’État et qui aidera à lutter efficacement contre l’effet de serre.
Applaudissements sur les travées du groupe écologiste.
La position de la commission est la même que pour les deux amendements précédents : nous souhaitons que les questions soient envisagées globalement, en s’appuyant sur la conférence environnementale.
Quant aux moyens, je ne suis pas sûr que la retraite de Strasbourg proposée par Fabienne Keller soit de nature à faire avancer le sujet… Mais bon, pourquoi pas ?
S’agissant des montants, l’estimation avancée ne nous semble pas des plus fiables. Le rapport Guillaume évoquait un montant de 315 millions d’euros, et non de 1, 3 milliard d’euros. §Il faudra donc préciser les choses et affiner la réflexion d’ici à la présentation du projet de loi de finances pour 2013.
Dans l’immédiat, je préconise le retrait de cet amendement, monsieur le sénateur.
Le Gouvernement n’est pas favorable à cet amendement, d’abord pour des raisons juridiques. On peut certes gloser sur la prévalence de la convention de Chicago, qui est un traité, sur notre droit interne. Certains juristes la contestent. En revanche, personne ne remet en cause la prééminence de la directive adoptée en 2003.
L’adoption de cette mesure poserait ensuite un problème d’ordre économique.
Certes, il y a le précédent des Pays-Bas, mais ce pays n’a pas la même superficie que la France, ni les mêmes niveaux d’infrastructures, notamment ferroviaires.
Surtout, les compagnies opérant sur notre territoire rencontreraient des problèmes de deux ordres.
Elles seraient tout d’abord pénalisées dans la concurrence avec les compagnies low cost, qui organisent l’avitaillement en dehors de nos frontières et bénéficieraient dès lors d’un avantage compétitif supérieur à ce qu’il est actuellement.
Par ailleurs, un certain nombre de vols au départ de notre territoire se poursuivent à l’extérieur de nos frontières. Comment faire par exemple la part des choses pour un passager qui transiterait par Paris pour se rendre de Toulouse à Francfort, à Londres ou à New York ? Il y aurait de nombreux recollements et ajustements à faire. Ce serait une formidable source de complexité et de contentieux, et certainement pas satisfaisant sur le fond.
Pour ces deux raisons, je vous engage à retirer votre amendement, monsieur le sénateur. Je comprendrais que mes propos ne vous semblent pas agréables : sachez qu’il m’est arrivé, lorsque j’étais parlementaire de l’opposition, de déposer des amendements comparables et de me voir opposer les mêmes arguments… Cela étant, nous n’allons pas engager ici le fameux débat, parfaitement retracé par Weber, entre l’éthique de responsabilité et l’éthique de conviction ! Souffrez que je maintienne ma position.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.
Je comprends très bien la philosophie de cet amendement, mais il y a loin de la théorie à la réalité !
Il existe deux France ferroviaires : celle des TGV, avec un accès rapide, régulier et confortable à la capitale, et celle des liaisons lentes, intermittentes et chaotiques avec Paris !
Nous avons donc besoin de liaisons aériennes. Je ne parle pas ici des grandes villes, comme Toulouse ou Nice, mais de petites capitales régionales comme Agen, Aurillac, Brive-la-Gaillarde, Castres, Le Puy ou Lannion, autant de villes qui sont desservies par des lignes régionales déficitaires, renflouées par les collectivités locales : conseils généraux, communautés d’agglomération ou communes. §Si l’on supprime l’exonération de TICPE, on aggravera encore les déficits, aux dépens des collectivités.
En conséquence, le groupe RDSE est opposé à cet amendement. C’est peut-être une vision de court terme, mais, pour nous déplacer à partir de nos territoires, la solution de court terme est de recourir au transport aérien !
Très bien ! et applaudissements sur les travées du RDSE.
Je voudrais rappeler que le prix du carburant pèse de plus en plus lourd dans le coût du transport aérien : il représente aujourd’hui 35 % de celui-ci, contre 20 % à 25 % il y a encore peu de temps.
À l’heure où les échanges et les déplacements se multiplient, au sein de notre pays comme avec l’extérieur, il est important de démocratiser l’ensemble des modes de transport, dont le transport aérien.
Ce sont les lignes intérieures qui font vivre les aéroports régionaux, accroissent l’attractivité d’un territoire et renforcent son économie, dans des proportions parfois plus importantes que l’on aurait pu l’imaginer.
Certains d’entre vous connaissent l’aéroport de Vatry, dans la Marne. Nous avons ouvert des liaisons aériennes avec Marseille et Nice. Or, lorsque l’on analyse les choses, on constate que, contrairement aux idées reçues, il y a plus de passagers qui voyagent de Nice ou de Marseille vers la Champagne que de Champenois qui prennent l’avion pour le Sud. Une offre de transport aérien à des coûts raisonnables permet de créer des activités supplémentaires.
Parce qu’il est important de ne pas alourdir le coût du transport aérien, je suis personnellement opposé à cet amendement, d’autant que, comme l’a rappelé M. le ministre, l’avitaillement des avions se fait facilement en dehors de nos frontières, là où le prix du carburant est nettement plus avantageux.
M. le président. La parole est à M. Serge Dassault, pour explication de vote.
Ah ! sur diverses travées.
Sourires.
Je voudrais féliciter M. le ministre chargé du budget de sa sagesse. Bien entendu, je suis moi aussi opposé à cet amendement.
Je voudrais remercier M. Dantec d’avoir ouvert ce débat important.
Comme vous l’avez rappelé, monsieur le ministre, la convention de Chicago ne permet pas la fiscalisation du gazole utilisé par les avions. Ce texte a d’ailleurs étendu, me semble-t-il, une réglementation qui s’appliquait depuis le Moyen Âge au transport maritime.
Si l’Europe a décidé d’intégrer les transports aériens dans le mécanisme des quotas d’émission de carbone – c’est une bonne nouvelle, même si l’on voit que la mise en œuvre de cette mesure rencontre certaines résistances –, je ne suis pas sûre, monsieur le rapporteur général, que ce sujet relève de la conférence environnementale.
En effet, on pourrait certainement réunir un consensus politique très large sur l’instauration d’une telle taxe, pour peu que son taux soit raisonnable et progressif dans le temps.
Cependant, la question du processus de renégociation de cet accord mondial se pose, monsieur le ministre. Pouvez-vous nous donner des informations sur les moyens que le Gouvernement entend mettre en œuvre pour transformer en réalité ce qui apparaît comme une proposition raisonnable, mais de très long terme ?
M. Pierre Hérisson applaudit
Aujourd’hui, il s’agit de se demander si le transport aérien doit bénéficier d’un tel avantage fiscal, notamment par rapport au transport ferroviaire, qui dans l’avenir aura grand besoin du soutien de l’État pour la modernisation des lignes, en particulier de celles que n’empruntent pas les TGV.
Le groupe écologiste, fidèle à ses convictions en la matière, maintient cet amendement.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 120, présenté par MM. Dantec, Placé et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 8
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le III de l’article 265 C du code des douanes est abrogé.
La parole est à M. Ronan Dantec.
La présentation de cet amendement sera plus brève, le débat ayant déjà eu lieu à l'Assemblée nationale.
L’autoconsommation des raffineries n’est pas taxée à l’heure actuelle, ce qui représente un très mauvais signal. Établir une telle taxation inciterait à l’amélioration des process industriels et contribuerait à la lutte contre l’effet de serre.
Néanmoins, il est apparu que cet amendement n’est sans doute pas compatible avec le droit européen. Pour cette raison, je le retire, en dépit de son caractère pédagogique.
I. – Le code général des impôts est ainsi modifié :
1° Le second alinéa du III de l’article 235 ter ZAA est supprimé ;
2° Il est rétabli un article 1668 B ainsi rédigé :
« Art. 1668 B. – La contribution mentionnée à l’article 235 ter ZAA est payée spontanément au comptable public compétent, au plus tard à la date prévue au 2 de l’article 1668 pour le versement du solde de liquidation de l’impôt sur les sociétés.
« Elle donne lieu à un versement anticipé à la date prévue pour le paiement du dernier acompte d’impôt sur les sociétés de l’exercice ou de la période d’imposition.
« Le montant du versement anticipé est fixé :
« a) Pour les entreprises ayant réalisé un chiffre d’affaires compris entre 250 millions d’euros et 1 milliard d’euros au cours du dernier exercice clos ou de la période d’imposition, ramené s’il y a lieu à douze mois, aux trois quarts du montant de la contribution exceptionnelle estimée au titre de l’exercice ou de la période d’imposition en cours et déterminée selon les modalités prévues au I de l’article 235 ter ZAA ;
« b) Pour les entreprises ayant réalisé un chiffre d’affaires supérieur à 1 milliard d’euros au cours du dernier exercice clos ou de la période d’imposition, ramené s’il y a lieu à douze mois, à 95 % du montant de la contribution exceptionnelle estimée au titre de l’exercice ou de la période d’imposition en cours et déterminée selon les modalités prévues au même I.
« Pour l’application des a et b, le chiffre d’affaires est apprécié, pour la société mère d’un groupe mentionné à l’article 223 A, en faisant la somme des chiffres d’affaires de chacune des sociétés membres de ce groupe.
« Si le montant du versement anticipé est supérieur à la contribution due, l’excédent est restitué dans les trente jours à compter de la date de dépôt du relevé de solde de l’impôt sur les sociétés mentionné au 2 de l’article 1668. » ;
3° Après l’article 1731 A, il est inséré un article 1731 A bis ainsi rédigé :
« Art. 1731 A bis. – L’intérêt de retard prévu à l’article 1727 et la majoration prévue à l’article 1731 sont appliqués :
« 1° Pour les entreprises mentionnées au a de l’article 1668 B, à la différence entre, d’une part, trois quarts du montant de la contribution exceptionnelle sur l’impôt sur les sociétés due au titre d’un exercice et, d’autre part, trois quarts du montant de cette contribution estimée au titre du même exercice servant de base au calcul du versement anticipé en application du même article 1668 B, sous réserve que cette différence soit supérieure à 20 % du montant de la contribution et à 100 000 € ;
« 2° Pour les entreprises mentionnées au b dudit article 1668 B, à la différence entre, d’une part, 95 % du montant de la contribution mentionnée au 1° du présent article et, d’autre part, 95 % du montant de cette contribution estimée dans les conditions mentionnées au même 1°, sous réserve que cette différence soit supérieure à 20 % du montant de la contribution et à 400 000 €.
« Toutefois, l’intérêt de retard et la majoration mentionnés au premier alinéa ne sont pas appliqués si le montant estimé de la contribution mentionnée au 1° a été déterminé à partir de l’impôt sur les sociétés lui-même estimé à partir du compte de résultat prévisionnel mentionné à l’article L. 232-2 du code de commerce, révisé dans les quatre mois qui suivent l’ouverture du second semestre de l’exercice, avant déduction de l’impôt sur les sociétés. Pour la société mère d’un groupe mentionné à l’article 223 A du présent code, le compte de résultat prévisionnel s’entend de la somme des comptes de résultat prévisionnels des sociétés membres du groupe. »
II. – Le I s’applique aux exercices clos à compter du 31 décembre 2012.
L’article 9 est le premier d’une série portant, de manière générale, sur l’impôt sur les sociétés.
Si nous approuvons la philosophie qui sous-tend ces articles, nous tenons néanmoins à formuler deux observations.
Tout d’abord, nous n’avions pas vu depuis longtemps un texte financier comportant un volet aussi fourni de mesures diverses relatives à l’impôt sur les sociétés. Aussi nous semble-t-il indispensable que les textes à venir approfondissent singulièrement la question.
Ensuite, cette floraison législative, certes bienvenue, montre qu’il y a beaucoup à faire dans le vaste champ de la fiscalité des entreprises.
Les entreprises ont été, pendant plusieurs décennies, au centre des politiques de moins-disant fiscal. Selon une croyance assez répandue, moins on soumettrait les circuits productifs à l’imposition, plus les vertus d’une plus grande liberté d’action conduiraient l’économie tout entière sur la voie de la croissance, du progrès et du plein emploi.
Le fameux théorème de Schmidt selon lequel « les profits d’aujourd’hui sont les investissements de demain et les emplois d’après-demain » s’est largement appliqué en France et en Europe, pour un résultat que nous connaissons tous et avec les conséquences que l’on sait pour les salariés : la France compte 5 millions de chômeurs à temps plus ou moins complet, 3 millions de salariés payés au SMIC, soit un salarié sur dix, 3 millions de salariés précaires. En outre, l’industrie assure aujourd’hui péniblement un sixième de notre PIB, le déficit de notre commerce extérieur atteint 70 milliards d’euros et la croissance est atone, rechutant parfois aussi vite qu’elle avait faiblement repris.
En Europe, on constate une concurrence fiscale et sociale exacerbée, tandis que le taux de chômage atteint 25 % en Espagne, où il s’élève même à 50 % chez les jeunes.
Devenue un véritable gruyère, farcie d’exemptions et de dérogations diverses, la fiscalité des entreprises doit clairement être revue et corrigée.
Selon certains économistes, 178 milliards d’euros sont affectés tous les ans à la réduction des impôts et des cotisations sociales prélevés au niveau de la production, donc de l’entreprise.
Dans le même ordre d’idées, il est évident que, comme l’a montré le travail réalisé par la commission d’enquête sénatoriale sur l’évasion des capitaux et des actifs hors de France et ses incidences fiscales, les entreprises sont les responsables et les bénéficiaires de l’essentiel de la fraude fiscale. Nous avons là du « grain à moudre », des marges importantes d’action pour réduire les déficits et financer les politiques publiques.
Percevoir mieux pour dépenser utile : voilà le principe qui doit, à notre avis, guider le travail de la nouvelle majorité parlementaire. Nous vous proposerons ultérieurement d’adopter, mes chers collègues, un certain nombre d’amendements en ce sens.
Applaudissements sur les travées du groupe CRC. – M. Didier Guillaume applaudit également.
Monsieur le président, je souhaite dire quelques mots sur l’organisation de nos travaux.
Je me suis livré à quelques petits calculs classiques afin de déterminer ce que l’on appelle traditionnellement notre « braquet » : il était de huit amendements examinés à l’heure ce matin, il n’est plus que de deux à l’heure cet après-midi. Sachant qu’il nous reste encore quelque 140 amendements à examiner, nous avons devant nous une vingtaine d’heures de débat.
Si nous poursuivons à ce rythme, nous devrons peut-être demander à la conférence des présidents de prévoir une séance publique samedi, car celle de vendredi ne suffira pas.
Je souhaitais simplement vous informer de cette réalité, mes chers collègues : c’est la pendule qui vous parle ! §
L'amendement n° 112, présenté par M. J. C. Gaudin et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Philippe Dominati.
Comme l’a dit tout à l’heure Mme Keller, ce sont surtout les débats internes à la majorité présidentielle plurielle et le manque de préparation de ce projet de loi de finances rectificative qui nous retardent.
C’est la richesse du débat public ! Nous avons la chance de pouvoir discuter !
L’amendement n° 112 vise donc à supprimer l’article 9, tendant à instaurer un versement anticipé de la contribution exceptionnelle au titre de l’impôt sur les sociétés.
Une telle avance altérerait le budget de 2013 au profit de celui de 2012, ce qui nuirait à la lisibilité des comptes publics. Certes, il a pu être occasionnellement recouru à cette pratique dans le passé, mais pas avec une telle ampleur.
Surtout, il s’agit d’une question de principe. Solliciter la trésorerie des entreprises au bénéfice de celle de l’État, ainsi qu’on peut le lire dans le rapport, c’est tout de même faire preuve d’un grand cynisme dans la conjoncture économique présente.
Nous avons déjà dénoncé le fait que le monde de l’entreprise soit votre cible principale dans ce projet de loi de finances rectificative. En témoignent toutes les mesures proposées risquant de grever la compétitivité des entreprises. M. le rapporteur général nous avait ainsi indiqué, en commission, que l’effort fiscal demandé reposerait à hauteur de 42 % sur les entreprises.
Telles sont les raisons pour lesquelles le groupe UMP demande la suppression de l’article 9.
Certes, le dispositif de l’article 9 entraînera une perte de recettes pour le budget de 2013, mais la réforme prévue de la fiscalité du patrimoine, de l’impôt sur les sociétés et de l’impôt sur le revenu permettra de définir un mécanisme susceptible d’assurer les recettes qui seront nécessaires.
Contrairement à ce que vient d’affirmer notre collègue, il s’agit non pas de ponctionner la trésorerie des entreprises par le biais de je ne sais quel nouveau dispositif, mais d’anticiper une recette fiscale selon des modalités clairement définies. Nous restons dans le cadre de la fiscalité existante.
Dans ces conditions, la commission est défavorable à cet amendement.
Le Gouvernement est également défavorable à cet amendement.
Tout d’abord, il ne s’agit pas de créer une recette ; la majorité précédente l’avait déjà prévue et l’avait votée. Il s’agissait à l’époque, pour l’État, de reprendre une avance de trésorerie qu’il consentait aux entreprises dont le chiffre d’affaires est supérieur à 250 millions d’euros. Nous modifions simplement le calendrier de perception de cette recette, pour des raisons qui n’échappent à personne.
Je ne suis pas certain que l’on puisse vraiment parler d’une recette.
En effet, à la page 157 de votre rapport, vous-même écrivez, monsieur le rapporteur général, que « le présent article apporte un gain de trésorerie ». Cela signifie que nous avons affaire à un budget insincère, quelque 10 % des 7, 2 milliards d’euros de crédits nouveaux relevant d’un système qui s’apparente à de la cavalerie… Je ne pensais pas que l’État avait vocation à pratiquer la cavalerie aux dépens de la trésorerie des entreprises !
En outre, par un tour de passe-passe qui vous est assez habituel, vous nous expliquez régulièrement que les amendements que nous avons déposés – voire certains amendements de la majorité ! – ne sont pas recevables au motif que l’on ne saurait préempter les réformes à venir et le budget de 2013. Or je m’aperçois que ce principe ne vaut pas en l’occurrence…
Pour toutes ces raisons, je voterai l’amendement.
L'amendement n'est pas adopté.
L'article 9 est adopté.
L'amendement n° 69, présenté par M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Bocquet et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l'article 9
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Après le 2 bis de l’article 38 du code général des impôts, il est inséré un 2 ter ainsi rédigé :
« 2 ter Pour l’application du 1 et du 2 du présent article, les charges d’intérêts liées à l’émission d’emprunts par une société sont admises, en déduction pour le calcul du bénéfice net, à condition que le rapport entre les capitaux propres et la dette financière ne soit pas inférieur à 50 %. »
II. – Les dispositions du présent I ne sont applicables qu’à compter du 1er octobre 2012.
La parole est à Mme Marie-France Beaufils.
Cet amendement vise à limiter l’effet de levier des emprunts contractés lors d’un rachat d’entreprise ou, pour être plus précise encore, à restreindre les conséquences que ces opérations peuvent avoir sur la situation même des entreprises concernées.
Le dispositif, maintes fois décrit, est bien identifié : une entreprise est achetée, qu’elle soit ou non en difficulté ; celui qui l’achète ne disposant pas des liquidités nécessaires, il recourt à un emprunt pour financer l’opération.
Si le contexte économique s’y prête, l’activité et le chiffre d’affaires de l’entreprise seront suffisamment importants pour assurer le remboursement de l’emprunt sans difficulté majeure. En revanche, la profitabilité de l’entité concernée sera, dans un premier temps, relativement limitée, et l’essentiel de l’excédent d’exploitation sera d’abord absorbé par les frais financiers, ce dont la majorité sortante ne parle jamais, préférant s’en tenir au « coût du travail »…
Si, par contre, la conjoncture est moins favorable, il existe deux possibilités : soit l’entreprise, victime de son endettement, croule et se trouve rapidement soumise à des procédures collectives, avec un plan de licenciements à la clé, soit les acquéreurs vendent au plus offrant machines, biens matériels et immatériels pour solder les comptes, en attendant que le démembrement ainsi organisé des capacités de production ne se traduise par des suppressions d’emplois.
Des exemples de recours à ce processus, nous en connaissons un nombre significatif dans notre pays. L’entreprise Samsonite, située dans le Pas-de-Calais, a ainsi fait l’objet d’une opération de LBO, ou leverage buy-out operation. Plus récemment, ce fut également le cas de l’entreprise Plysorol, ex-leader européen du contreplaqué, propriétaire de massifs forestiers en Afrique, qui avait été reprise par un groupe libanais, après être passée quelque temps sous la coupe d’un groupe chinois, et dont le propriétaire actuel entend réduire l’endettement en fermant deux des trois sites de production subsistants.
Il est donc plus que temps de mettre un terme à ces opérations spéculatives, qui coûtent beaucoup à notre économie et s’accompagnent bien souvent de suppressions massives d’emplois et de capacités de production.
Plusieurs études, notamment celle de la direction générale du Trésor du début de l’année 2011, ont montré que les grandes entreprises payent proportionnellement moins d’impôt sur les sociétés que les PME.
Ce phénomène s’explique, en partie, par le fait qu’elles recourent davantage à l’endettement et à l’effet de levier. Elles peuvent déduire les charges financières afférentes à ces opérations, c’est-à-dire les intérêts d’emprunts, de leur bénéfice imposable.
Cet amendement soulève une question majeure. Je sais que le Gouvernement étudie différentes pistes en vue de proposer un dispositif lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2013. Pour l’heure, j’invite nos collègues du groupe CRC à réfréner leur impatience légitime, que je partage, et à retirer leur amendement, au bénéfice de l’éclairage que pourra nous apporter M. le ministre.
On connaît la situation actuelle : un certain nombre d’entreprises réduisent l’assiette de leur impôt sur les sociétés par le recours à un endettement excessif, directement ou par le biais d’une filiale. Cela fait partie des abus que le présent projet de loi de finances rectificative vise à corriger, au moins en partie.
Pour le reste, le Gouvernement travaille actuellement à l’élaboration d’un dispositif allant dans le sens de vos préoccupations, madame Beaufils, afin de pouvoir être en mesure de l’introduire dans le projet de loi de finances pour 2013 que le Sénat examinera à l’automne.
Dans cette perspective, j’aimerais que vous retiriez cet amendement ; à défaut, l’avis sera défavorable.
Monsieur le ministre, nous sommes très attentifs à ces sujets, car l’activité économique de notre pays est fortement affectée par les opérations financières en question, qui pèsent également lourdement sur le budget de la nation.
J’entends que le Gouvernement compte réaliser un travail de fond sur ces questions. Nous nous tenons à sa disposition pour participer à la réflexion, en vue de favoriser le développement de notre activité économique, au service de l’emploi, et d’éviter que celle-ci ne soit rongée par une approche financiarisée.
Pour l’heure, j’accepte de retirer cet amendement.
L'amendement n° 69 est retiré.
L'amendement n° 70 rectifié, présenté par M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Bocquet et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l'article 9
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le code général des impôts est ainsi modifié :
1° L’article 112 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« 9° La fraction d’intérêts non déductible en application du dernier alinéa du 1 de l’article 212 bis. » ;
2° Le premier alinéa du II de l’article 209 est ainsi modifié :
a) Après les mots : « mentionnée au sixième alinéa du 1 du II de l'article 212 », sont insérés les mots : « et au dernier alinéa du 1 de l’article 212 bis » ;
b) À la fin, les mots : « et au sixième alinéa du 1 du II de l’article 212 » sont remplacés par les mots : «, au sixième alinéa du 1 du II de l'article 212 et au dernier alinéa du 1 de l'article 212 bis » ;
3° Après l’article 212, il est inséré un article 212 bis ainsi rédigé :
« Art. 212 bis. – 1. Lorsque le montant des intérêts déductibles servis par une entreprise excède simultanément au titre d’un même exercice les deux limites suivantes :
« a. 3 000 000 euros ;
« b. 80 % du résultat courant avant impôts préalablement majoré desdits intérêts, des amortissements pris en compte pour la détermination de ce même résultat et de la quote-part de loyers de crédit-bail prise en compte pour la détermination du prix de cession du bien à l’issue du contrat, pour les exercices ouverts à compter du 1er janvier 2011 ;
« La fraction des intérêts excédant la limite visée au b ne peut être déduite au titre de cet exercice.
« Ce taux est fixé à 60 % pour les exercices ouverts à compter du 1er octobre 2012 et à 30 % pour les exercices ouverts à compter du 1er avril 2013.
« Toutefois, cette fraction d’intérêts non déductible immédiatement peut être déduite au titre de l’exercice suivant à concurrence de la différence calculée au titre de cet exercice entre la limite mentionnée au b et le montant des intérêts déductibles. Le solde non imputé à la clôture de cet exercice est déductible au titre des exercices postérieurs dans le respect des mêmes conditions sous déduction d’une décote de 5 % appliquée à l’ouverture de chacun de ces exercices.
« 2. Les dispositions prévues au 1 ne s’appliquent pas aux intérêts dus à raison des sommes ayant servi à financer :
« 1° Des opérations réalisées dans le cadre d’une convention de gestion centralisée de la trésorerie d’un groupe par l’entreprise chargée de cette gestion centralisée ;
« 2° L’acquisition de biens donnés en location dans les conditions prévues aux 1 et 2 de l’article L. 313-7 du code monétaire et financier.
« Ces dispositions ne s’appliquent pas non plus aux intérêts dus par les établissements de crédit mentionnés à l’article L. 511-9 du même code. » ;
4° L’article 223 B est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Par exception aux dispositions prévues au dernier alinéa du 1 de l’article 212 bis, les intérêts non admis en déduction, en application des quatre premiers alinéas du 1 du même article, du résultat d’une société membre d’un groupe et retenus pour la détermination du résultat d’ensemble ne peuvent être déduits des résultats ultérieurs de cette société. » ;
5° Après la référence : « 209 », la fin du dernier alinéa du 6 de l’article 223 I est ainsi rédigée : « d’une part et au sixième alinéa du 1 du II de l’article 212 et au dernier alinéa du 1 de l’article 212 bis d’autre part. » ;
6° Le dernier alinéa de l’article 223 S est complété par les mots : « et au cinquième alinéa du 1 de l’article 212 bis. »
La parole est à Mme Marie-France Beaufils.
La commission d’enquête sur l’évasion des capitaux et des actifs hors de France et ses incidences fiscales, créée à la demande de notre groupe et dont M. Éric Bocquet est le rapporteur, …
… a mis en évidence que les entreprises utilisaient largement tous les outils juridiques et financiers disponibles pour échapper, autant que faire se peut, à l’imposition due à raison de leurs résultats.
La Haute Assemblée avait d’ailleurs déjà eu l’occasion, lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2012, de s’interroger sur quelques-unes des facettes de cette optimisation fiscale, dont les travaux de ladite commission d’enquête ont permis dans une large mesure de cerner les contours.
Je dois dire que, avant les travaux de la commission d’enquête, nous étions fort loin, pour la plupart d’entre nous, de nous douter du comportement fiscal de certaines de nos entreprises, singulièrement des grands groupes.
Le présent amendement n’est pas d’une originalité absolue, ne serait-ce que parce que le Sénat l’a déjà voté, à l’automne dernier, à la demande de Nicole Bricq, qui était alors rapporteure générale de la commission des finances. Ce dispositif pour le moins rentable procède d’une recommandation du Conseil des prélèvements obligatoires ; il est en vigueur en Allemagne et il fut défendu, en d’autres temps, par M. le ministre chargé du budget, en tant que président de la commission des finances de l’Assemblée nationale.
Il s’agit en fait de plafonner la déductibilité fiscale des intérêts versés par les entreprises au titre d’un même exercice, notamment lorsque ces intérêts rémunèrent des prêts accordés par la maison mère du groupe et qu’ils vont de pair avec le maintien de la sous-capitalisation de la société filiale. Cette sous-capitalisation est un instrument permettant de valoriser la société mère au détriment de ses filiales ; c’est l’un des outils d’optimisation fiscale les plus couramment utilisés, et il nous semble donc nécessaire de mettre un terme à ces pratiques.
La commission des finances souhaite connaître l’avis du Gouvernement.
Pour ma part, j’approuve évidemment la philosophie qui sous-tend cet amendement, puisque notre groupe avait déposé un amendement similaire lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2012. Il me semble d'ailleurs, monsieur le ministre, que cet amendement reprenait une proposition que vous aviez faite lorsque vous étiez député. C’est dire que cet amendement a du sens à nos yeux ! Cela étant, est-il opportun de l’adopter aujourd’hui ou vaut-il mieux attendre le dispositif plus large que vous nous soumettrez sans doute à l’automne, monsieur le ministre, lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2013 ?
Il m’est bien cruel, madame Beaufils, d’être obligé de vous demander de retirer un amendement que je connais bien… Je m’y résous malgré tout, car le Gouvernement présentera au Parlement une vraie réforme en la matière dans le cadre du projet de loi de finances pour 2013.
L’exercice sera délicat, car s’il faut éviter qu’un endettement « de convenance » puisse permettre à des entreprises de réduire leur assiette de l’impôt sur les sociétés de manière illégitime, il faut également se garder, a fortiori en cette période de crise, de pénaliser des entreprises qui vont avoir besoin d’encours bancaires, du fait notamment d’une trésorerie défaillante. La rédaction du dispositif devra donc être fine.
Il n’est pas forcément pertinent de s’inspirer du modèle allemand, car c’est précisément quand une entreprise va mal que son EBITDA est faible ; par conséquent, instaurer un plafonnement en fonction de ce dernier reviendrait à appliquer une sorte de double peine à des entreprises déjà en difficulté.
Il m’est déjà pénible de vous inviter à retirer cet amendement, madame la sénatrice ; ne m’obligez à appeler à voter contre !
Monsieur le ministre, vous l’aurez compris, il s'agit d’un amendement d’appel, auquel nous tenons beaucoup. Nous n’éviterons pas ce débat lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2013. Ces sujets sont très importants à nos yeux.
Cela étant dit, nous retirons l’amendement.
L'amendement n° 70 rectifié est retiré.
L'amendement n° 68 rectifié, présenté par M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Bocquet et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l'article 9
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
À la seconde phrase du deuxième alinéa du a quinquies du I de l’article 219 du code général des impôts, les mots : « portée au taux de 10 % » sont remplacés par les mots : « portée à 10 % du prix de cession des titres ».
La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin.
La niche « Copé », fondée sur un traitement privilégié des plus-values réalisées lors de cessions d’actifs constitués par des parts sociales, est l’un des plus intéressants véhicules d’optimisation fiscale de notre droit… Selon l’évaluation des voies et moyens, son coût s’établit entre 3, 5 milliards et 4 milliards d'euros, soit tout de même de 7 % à 8 % du rendement de l’impôt sur les sociétés. Si l’on rapporte ce taux au taux normal d’imposition des bénéfices, la décote est comprise entre 2 et 2, 5 points.
À mesure que les années passent, la niche « Copé » représente un coût cumulatif de plusieurs milliards d’euros –probablement plus de 20 milliards d’euros aujourd'hui – pour les finances publiques, auquel il faut ajouter les financements extrabudgétaires ayant compensé la perte de recettes fiscales.
On peut donc se demander si le maintien de cette niche est justifié. A-t-elle permis de doper, de stimuler notre économie, en particulier notre industrie et notre commerce extérieur ? D’après les données disponibles, il semble bien que non : depuis 2007, année de la création de cette niche fiscale, nous avons perdu des centaines de milliers d’emplois dans le secteur industriel et productif, et notre balance commerciale s’est continûment dégradée.
Il nous a donc semblé particulièrement bienvenu que le Sénat adopte, à l’automne 2011, un amendement présenté par Nicole Bricq, alors rapporteure générale de la commission des finances, qui visait à modifier l’assiette du prélèvement libératoire en la faisant glisser de la plus-value constatée vers le produit de la cession lui-même. Comme le soulignait alors Nicole Bricq, « l’assiette logique, pour des charges afférentes à des actifs, c’est le prix de cession, la valeur des actifs, et non la plus-value nette, qui relève d’une autre logique puisque les moins-values en sont soustraites ».
Au bénéfice de ces observations, j’invite le Sénat à adopter cet amendement.
Nous renvoyons là encore à la grande réforme de l’assiette de l’impôt sur les sociétés que le ministre s’est engagé à mettre en œuvre et que nous attendons avec impatience. Le sort à réserver à la niche « Copé » devra être envisagé dans ce cadre.
J’invite donc nos collègues à retirer cet amendement, qu’ils pourront redéposer lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2013.
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Je vous remercie, monsieur le ministre !
Rires.
Je reprends à mon compte les arguments du rapporteur général. La question soulevée doit impérativement être traitée ; nous le ferons dans le cadre de l’élaboration du projet de loi de finances pour 2013.
Cette grande réforme que vous annoncez est une urgence. J’ai rappelé le coût de la niche « Copé-Marini » et souligné son inefficacité. Comme l’a indiqué Nicole Borvo Cohen-Seat, nos amendements sont des amendements d’appel : il est impératif, pour le bon fonctionnement de notre économie et la sauvegarde de l’emploi, que le prochain projet de loi de finances comporte des mesures efficaces, qui soient de nature à régler les problèmes soulevés. Dans l’immédiat, je retire l’amendement.
L'amendement n° 68 rectifié est retiré.
L'amendement n° 76, présenté par M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Bocquet et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’article 9
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Les personnes morales mentionnées aux articles L. 511-1 et L. 531-4 du code monétaire et financier qui, au jour de la publication de la présente loi, exploitent une entreprise en France au sens du I de l'article 209 du code général des impôts, acquittent une taxe spécifique.
II. - La taxe est assise sur la part variable des rémunérations attribuées par les personnes morales mentionnées au I, à ceux de leurs salariés, professionnels des marchés financiers, dont les activités sont susceptibles d'avoir une incidence significative sur l'exposition aux risques de l'entreprise, ainsi qu'aux professionnels de marché sous le contrôle desquels opèrent ces salariés.
La part variable des rémunérations mentionnée à l'alinéa précédent correspond au montant brut de l'ensemble des éléments de rémunération attribués à ces salariés en considération de leurs performances individuelles ou collectives, y compris lorsque leur versement et leur acquisition définitive sont sous condition, à l'exception des sommes leur revenant au titre de l'intéressement ou de la participation des salariés aux résultats de l'entreprise en application du livre III de la troisième partie du code du travail.
Les éléments de rémunération qui entrent dans l'assiette de la taxe sont pris en compte quelle que soit l'année de leur versement ou celle au cours de laquelle leur acquisition est définitive.
Lorsque la part variable prend la forme d'une attribution d'options sur titres, d'actions gratuites ou d'autres titres consentis à des conditions préférentielles, y compris lorsque cette attribution est effectuée par une société mère ou filiale de l'entreprise dans laquelle le salarié exerce son activité, l'assiette est égale à la juste valeur de ces options, actions ou titres à la date de leur attribution, telle qu'elle est estimée pour l'établissement des comptes consolidés pour les sociétés appliquant les normes comptables internationales adoptées par le règlement (CE) n° 1606/2002 du Parlement européen et du Conseil du 19 juillet 2002 sur l'application des normes comptables internationales.
Seule la part variable de la rémunération individuelle qui excède 27 500 € est prise en compte dans l'assiette de la taxe.
III. - Le taux de la taxe est de 50 %.
IV. - La taxe est exigible au premier jour du mois qui suit la publication de la présente loi. Lorsque tout ou partie de la part variable des rémunérations définie au II est attribué après cette date, la taxe correspondante est exigible au premier jour du mois suivant la décision d'attribution.
La taxe est déclarée et liquidée dans les vingt-cinq jours de son exigibilité sur une déclaration dont le modèle est fixé par l'administration.
Elle est acquittée lors du dépôt de cette déclaration.
V. - Dans le cas où le montant de la part variable des éléments de la rémunération finalement versés ou acquis aux salariés est inférieur au montant compris dans l'assiette de la taxe, aucune restitution n'est opérée.
VI. - La taxe est recouvrée et contrôlée selon les procédures et sous les mêmes sanctions, garanties et privilèges que la taxe sur la valeur ajoutée. Les réclamations sont présentées, instruites et jugées selon les règles applicables à cette même taxe.
La parole est à Mme Annie David.
Mme Annie David. Lorsque, à l’été 2008, les marchés financiers avaient connu une dangereuse surchauffe, la presse avait relevé que l’organisation économique du monde présentait des caractères étonnants et que les activités de ce que certains appellent l’industrie financière – mais que, pour notre part, nous avons plutôt tendance à nommer le grand capital
Ah ! sur les travées de l’UMP.
… s’étaient particulièrement développées.
Bien loin du guichet de banque ordinaire où les particuliers ouvrent leur compte, gèrent leurs économies et retirent leurs carnets de chèques ou leur carte de paiement, une activité bancaire intense, utilisant des outils financiers de plus en plus sophistiqués et composites – pour ne pas dire hybrides – s’est développée, jusqu’à créer des bulles financières de plus en plus grosses et de plus en plus incontrôlables. D’ailleurs, lorsque ces bulles explosent, elles ébranlent la planète tout entière !
Cette industrie financière, nourrie de transactions en temps réel, farcies d’algorithmes et de produits de synthèse, a des promoteurs zélés : ce sont ces fameux traders, à qui mission est donnée de valoriser autant que possible les potentiels de la banque qui les emploie, en les engageant dans de féroces parties de poker financier à échelle mondiale.
Si tout va bien, tant mieux ; celui qui a parié pour le compte de sa banque est récompensé et même plus que bien récompensé. En revanche, si les choses tournent mal, il en est évidemment tout autrement, comme nous l’avons constaté dans l’affaire Kerviel, du nom du trader concerné, quand bien même la responsabilité de ce dernier est limitée par le degré de liberté qu’on lui a laissé et les ordres qu’on a pu lui donner.
Pour apporter une touche de moralité ou de morale – on avait beaucoup entendu parler de moralisation du capital –, nous avions introduit dans notre législation, au détour d’une loi de finances rectificative, une taxation exceptionnelle assise sur la rémunération des traders dont le produit avait été réservé en grande partie à OSEO, organisme dont on connaît le rôle quand il s’agit de financer le développement des PME. D’ailleurs, cette taxe avait conduit certaines banques à minorer assez rapidement les rémunérations de caractère exceptionnel accordées à leurs commerciaux donneurs d’ordre, ce qui n’était déjà pas si mal…
Pour notre part, nous proposons de faire en sorte que cette taxe soit inscrite dans notre droit fiscal positif, afin, précisément, que les modes de rémunération de ces salariés ne débordent pas le droit commun.
Tel est le sens de cet amendement que, mes chers collègues, je vous invite vraiment à adopter.
L’amendement a pour objet de rendre pérenne la taxe sur les bonus des traders instituée, vous l’avez rappelé, pour la première fois par la loi de finances rectificative pour 2010. Comme vous l’avez aussi indiqué, elle a rapporté 360 millions d’euros, principalement affectés à OSEO.
À l’époque, elle devait répondre à des circonstances exceptionnelles, lesquelles ont eu tendance à se perpétuer. Il est vrai que les temps restent difficiles…
La taxe visait à modérer la masse salariale dans les banques et à limiter les risques pris par les opérateurs de marché.
Lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2012, nous avions tous considéré que la pérennisation de cette mesure était souhaitable. L’amendement proposé par nos collègues avait d’ailleurs été voté par le Sénat, mais supprimé par la commission mixte paritaire.
Quel est l’élément nouveau par rapport à la philosophie qui, au fond, reste la même ? Depuis lors, le Président de la République a pris l’engagement ferme qu’une nouvelle fiscalité sur les rémunérations excessives, parmi lesquelles celles des traders, serait élaborée. Cela ouvre, je pense, une perspective nouvelle : la mise en place d’un texte unificateur et sans doute fondateur. En effet, nous sommes partis pour de nombreuses années de soubresauts au sein de la sphère financière, ce qui nécessite une régulation stricte, durable, et donc le vote d’un texte fondateur dans des délais rapides. Le Président de la République s’y est engagé, et le sujet sera, j’imagine, traité à l’occasion du débat sur l’imposition à 75 %.
Cela me conduit à suggérer à nos collègues le retrait de l’amendement dans l’attente de la mise en œuvre de cet ambitieux programme qui nous est annoncé. Je pense que M. le ministre délégué ne manquera pas de nous éclairer sur ce point.
Le Gouvernement est défavorable à cet amendement pour deux raisons.
D’abord, une directive est en préparation à Bruxelles, précisément sur la rémunération de ces personnels particuliers : la CRD IV. La France contribue activement à son élaboration, en tentant de faire prévaloir l’efficacité autant qu’une forme de morale publique.
Ensuite, vous l’avez remarqué, dans ce projet de loi de finances rectificative, il est demandé aux banques et au secteur financier un effort particulier de plus de 500 millions d’euros. Il nous semble que, pour légitime et justifié qu’il soit, cet effort pourrait suffire et demander un effort supplémentaire à ce secteur-là, d’une manière ou d’une autre, pourrait être excessif. En effet, notre pays va avoir besoin du secteur bancaire et financier pour financer l’économie et aider en particulier les entreprises qui sont en grande difficulté. La réforme du secteur bancaire que nous nous proposons de présenter au Parlement devrait d’ailleurs y contribuer.
Enfin, si ces deux raisons ne vous ont pas convaincus de retirer votre amendement, sachez qu’une nouvelle fiscalité sera effectivement proposée à l’occasion de la réforme de l’impôt sur le revenu. On sait déjà qu’une tranche à 45 % sera instaurée. On sait aussi qu’une tranche exceptionnelle verra le jour. Le principe en a été décidé, même si les modalités restent à définir.
Pour toutes ces raisons, il me semble que le fait d’en discuter et, au terme de ce débat, d’adopter, je l’espère, les bonnes mesures en loi de finances initiale pourrait suffire. C’est dans cette perspective que je vous engage, une nouvelle fois, en vous priant de m’en excuser, à retirer cet amendement. À défaut, le Gouvernement appellera à voter contre.
Monsieur le ministre délégué, ce dispositif était effectivement provisoire, mais le législateur est tout à fait habilité à le rendre pérenne.
Certes, vous annoncez une réforme qui couvrirait le dispositif d’imposition des traders. Pour notre part, nous pensons que la coproduction législative n’est pas une mauvaise chose. C’est pourquoi, prenant nos responsabilités, nous ne retirons pas l’amendement.
L’amendement n’est pas adopté.
I
II. – Le même article 237 bis A est complété par un IV ainsi rédigé :
« IV. – Les provisions prévues au II cessent d’être admises en déduction des résultats imposables constatés au titre des exercices clos à compter de la date de publication de la loi n° du de finances rectificative pour 2012.
« Les provisions figurant à l’ouverture du premier exercice clos à compter de la date de publication de la même loi sont rapportées aux résultats imposables dans les conditions prévues au 4 du II. »
Cet article s’attaque à la participation et s’inscrit ainsi dans la même lignée idéologique que la mesure de hausse de 150 % du forfait social que nous examinerons plus tard.
Je dois bien avouer mes interrogations.
Est-ce parce que ce fut le général de Gaulle qui lança cette idée de la participation que vous voulez aujourd’hui décourager de ce système d’épargne salariale qui fonctionne très bien, en augmentant de manière spectaculaire sa taxation ?
Dix ans de droite au pouvoir vous poussent-ils à vouloir faire table rase de toute mesure de droite ? Circulez, il n’y a plus rien à voir !
Il s’agit pourtant d’associer les travailleurs à leur entreprise, de les faire participer aux bénéfices. Franchement, mes chers collègues du côté gauche de l’hémicycle, comment pouvez-vous décourager cette idée ? Cette position va complètement à l’encontre de votre dogme de la justice fiscale, censé guider toutes vos réformes ; en tout cas, c’est ce que j’avais cru comprendre. De plus, cela aura des conséquences sur la participation, qui concerne quand même entre dix millions et douze millions de salariés !
Le mécanisme fiscal lié à la provision pour investissement a pour objectif de maintenir les marges d’autofinancement des PME, afin de leur permettre d’investir, sous certaines conditions d’attribution à leurs salariés d’une participation aux résultats de l’entreprise.
Cesser d’admettre ces provisions en déduction des résultats imposables sera un mauvais signal pour les entreprises françaises, dans un contexte économique déjà peu propice aux investissements et dans lequel le taux de marge des entreprises est à son plus bas niveau depuis vingt-cinq ans. Cette mesure risque également d’avoir des conséquences sur les TPE et les PME de moins de cinquante salariés qui ne sont pas assujetties obligatoirement à la participation et qui ont opté – et il y en a beaucoup ! – pour ce mécanisme fiscal de provision pour investissement.
En outre, malgré la dégradation des comptes publics, il convient de souligner que les recettes pour l’État résultant de cet article seraient marginales : 31 millions d’euros seulement !
Les facteurs de la croissance ne sont pas uniquement liés à la consommation ; ils le sont également à la capacité d’investissement des entreprises ainsi qu’à la stabilité juridique. Aussi, plutôt que d’abroger ce dispositif, il conviendrait de l’encourager davantage. C’est la raison pour laquelle je soutiendrai l’amendement de suppression de cet article présenté par M. Dassault, au nom du groupe UMP.
Applaudissements sur les travées de l’UMP.
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 107 est présenté par M. Dassault et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire.
L’amendement n° 136 rectifié est présenté par MM. Arthuis, Zocchetto, J. Boyer, Delahaye, Marseille, Dubois, Capo-Canellas, Amoudry, Roche et Deneux et Mme Férat.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Serge Dassault, pour présenter l’amendement n° 107.
Cet article est une opération contre les participations dérogatoires, autrement dit contre les salariés. Je ne comprends pas du tout cette attitude antisociale qui consiste à vouloir supprimer ainsi aux salariés des rémunérations, des possibilités d’épargne, puisque la société accepte – ce n’est pas obligatoire – des accords dérogatoires qui leur permettent d’avoir plus.
Si je puis évoquer ma société, je vous signale que, pour le moment, nous reversons chaque année 100 millions d’euros au personnel, à égalité avec les dividendes distribués. Cela dure depuis plus de vingt ans et marche très bien. Je crois que nous sommes l’une des rares sociétés à pratiquer ainsi.
Avec la hausse du forfait social que vous avez décidé d’appliquer, la société sera pénalisée de 30 millions d’euros ; c’est intelligent ! Elle va donc diminuer la participation du personnel de 30 millions d’euros et ne plus distribuer que 70 millions d’euros, réduisant par là même les facilités qui étaient accordées.
Cette opération n’est vraiment pas du tout dans la ligne sociale du parti socialiste consistant à favoriser les personnels. Pourtant, voilà quelques années, les sénateurs socialistes et communistes avaient repris à leur compte l’amendement que j’avais proposé et qui avait été refusé par mes petits camarades de l’époque, car ils ne voulaient pas que j’applique ce système d’une façon obligatoire. Et j’avais voté avec vous, contre eux !
La présidente de séance d’alors est présente aujourd’hui.
Je m’en souviendrai toute ma vie, cet amendement n’a pas été accepté à quelques voix près, ce qui était tout à fait désagréable !
Je souhaite que vous supprimiez cet article, qui est antisocial. C’est à croire que je suis plus socialiste que vous
Exclamations sur les travées du groupe socialiste.
Vous voulez, avez-vous dit – et je trouve la phrase que vous avez prononcée tout à fait inacceptable ! –, supprimer certaines formes de rémunération pour les salariés. Au fond, votre objectif serait donc de supprimer la participation dérogatoire pour enlever cette forme de rémunération supplémentaire au personnel, afin que les salariés ne touchent pas plus. Là encore, ce n’est ni très social, ni très socialiste !
Par conséquent, dans l’intérêt de tous, à commencer par les salariés, puisque ce sont eux qui sont visés par le dispositif, je souhaite que vous votiez cet amendement de suppression.
Applaudissements sur les travées de l’UMP.
La parole est à M. Jean Arthuis, pour présenter l’amendement n° 136 rectifié.
Dans le contexte de crise que nous connaissons, l’article 10 est un très mauvais signal. Je reconnais toutefois que le Gouvernement fait preuve de cohérence !
En effet, il nous expliquait hier qu’il fallait hypothéquer la compétitivité en renonçant à l’allégement des cotisations sociales.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat s’exclame.
Le mécanisme prévu introduisait, sur le plan fiscal, la possibilité, dès lors que l’intéressement et la participation étaient bonifiés, de constituer une provision pour investissement et d’assurer une certaine neutralité fiscale.
Le Gouvernement nous invite à remettre en cause un dispositif favorable au pouvoir d’achat des salariés, à l’intéressement et à la participation, ainsi qu’à l’investissement. Monsieur le ministre délégué, le feu est dans la maison : il importe de bouger sans attendre et de sortir de toute vision dogmatique !
C’est pour ces raisons que j’ai déposé un amendement tendant à supprimer l’article 10.
Applaudissements sur les travées de l’UMP.
La provision pour investissement avait été conçue afin d’encourager la participation, à laquelle nous sommes, bien sûr, tous attachés, au-delà des obligations légales, tout en préservant les capacités d’investissement des entreprises.
Or le récent rapport d’évaluation des dépenses fiscales, dit rapport Guillaume, a montré que cette niche était inefficace. Notée 1 sur une échelle de 0 à 3, il y est dit qu’elle ne réussit ni à encourager la participation ni à faciliter les dépenses d’investissement. Elle n’atteint donc aucun des deux objectifs fixés.
Pour répondre aux préoccupations de certains de nos collègues, il convient de souligner que les PME bénéficient peu du dispositif.
La niche procure surtout des effets d’aubaine aux plus grandes entreprises.
S’agissant des niches, madame Des Esgaulx, puisque vous avez abordé le sujet, je souhaitais vous dire que notre préoccupation est de nous appuyer sur les évaluations qui ont pu être faites.
Nous l’avons bien vu, dans les dispositions prises au début de l’année, notamment dans le cadre de la première loi de finances rectificative pour 2012 de mars dernier, le gouvernement précédent s’était complètement « assis » sur le classement et les évaluations du rapport Guillaume, choisissant de supprimer des niches pourtant annoncées comme très efficaces.
Pour notre part, nous sommes fondés à considérer, à partir de ce travail rigoureux, que la niche en question n’est sans doute pas la plus performante, la plus utile, la plus efficace. L’article 10 vient opportunément la supprimer. Je suis donc bien sûr défavorable aux amendements identiques n° 107 et 136 rectifié.
Mesdames, messieurs les sénateurs, je veux vous rassurer, il n’y a pas, chez le Gouvernement, d’obsession qui consisterait à vouloir remettre en cause la participation, au motif que ce dispositif ne serait pas idéologiquement correct.
Pour avoir moi-même, lors de la conférence sociale, animé la table ronde sur les salaires, l’épargne salariale, le SMIC, j’ai pu voir quelles étaient les préoccupations et les objectifs des partenaires sociaux, tant du côté employeurs que du côté salariés. Des oppositions se sont manifestées chez les premiers au sujet de l’augmentation du forfait social, dont nous reparlerons tout à l’heure. Mais les discussions ont été sérieuses. Il a notamment été question de la façon dont il serait possible de faire évoluer l’épargne réglementée, l’épargne salariale, pour que la participation puisse être utilement employée comme un complément de rémunération.
Que constatons-nous cependant ? Outre que la participation et l’intéressement ne concernent qu’une minorité de salariés, principalement ceux des grandes entreprises et peu ceux des PME, une réalité s’impose : ces mécanismes servent de plus en plus de substituts à la rémunération du travail par le salaire.
Nous entendons lutter contre ce phénomène.
Actuellement, vous le savez, le taux des prélèvements et des cotisations affectés aux salaires oscille entre 40 % et 45 % quand celui du forfait social est à 8 %. Même si ce dernier est porté à 20 %, la participation et l’intéressement resteront considérablement attractifs.
Il y a donc toujours un avantage « compétitif » évident à rémunérer les salariés sous la forme de participation et d’épargne salariale plutôt que de salaire. La contribution supplémentaire que nous proposons n’est donc ni injuste ni illégitime. Nous avons la volonté non pas de sanctionner de manière idéologique la participation et l’intéressement, mais de réintroduire un peu plus d’équité et de justice dans la façon dont ces dispositifs contribuent à l’effort collectif.
Dans le sillage des propos de M. le rapporteur général, je souligne que la niche sur la provision pour investissement a été jugée inefficace. Dès lors que le législateur a mis en place un certain nombre de dispositifs favorables à la compétitivité de nos entreprises ou à l’amélioration de la rémunération des salariés et que l’on constate que cela n’a que peu d’effets sur l’économie réelle, sur l’investissement, la tâche qui doit être la nôtre est de tirer les conséquences d’une telle évaluation.
Hormis pour les sociétés coopératives ouvrières, soumises à des statuts particuliers, il faut remettre en cause cette niche fiscale inefficace. C’est donc du bon usage de l’argent public que je m’inspire pour recommander le retrait, sinon le rejet, de ces deux amendements identiques.
Monsieur le ministre délégué, je vous remercie des précisions que vous venez d’apporter. Qu’il est dommage que vous n’ayez pu assister à tous nos débats depuis que nous avons ouvert la discussion sur ce collectif budgétaire ! Disant cela, je ne fais nullement reproche à M. Pierre Moscovici et à M. Jérôme Cahuzac d’avoir été alternativement présents, mais c’est vous qui avez évoqué votre participation au sommet social organisé au début du mois de juillet.
Au fil des années, il est vrai, nous avons multiplié les régimes dérogatoires, …
… pour permettre le versement de rémunérations exonérées de cotisations sociales. Si ces pratiques se sont développées, c’est parce que les cotisations sociales, dans notre pays, sont particulièrement élevées.
Il a donc fallu trouver un équilibre extrêmement délicat, très technocratique, pour encadrer le dispositif, afin d’éviter tout glissement vers l’exonération d’une fraction de la rémunération des salariés.
Les partenaires sociaux se trouvent, aujourd’hui, dans une situation presque pathétique. Ils sont gestionnaires de la protection sociale. Il y a cinq caisses nationales, et autant de centrales syndicales : il faut que chacun puisse tenir sa position.
Si le salaire n’est plus l’assiette de cotisations, cette gestion paritaire a-t-elle encore une légitimité ?
Comment régler une telle difficulté existentielle ?
Pourtant, le surcroît de cotisations sociales patronales – nous avons essayé de le démontrer et peut-être aurons-nous l’occasion d’en reparler avec vous – participe à la perte de compétitivité et à l’organisation assez systématique des délocalisations et de la désindustrialisation.
J’entends bien votre message, monsieur le ministre délégué, mais le signal que vous donnez par cet article 10 est, je le répète, très négatif, propre à mettre en cause la participation, l’intéressement et l’investissement, pour un enjeu financier vraiment très marginal. Il va à l’encontre de l’ambition, qui nous anime, de recréer de l’emploi et de donner du pouvoir d’achat à nos concitoyens, bref, de donner de l’espérance et de la confiance !
Mme Marie-Annick Duchêne applaudit.
Mme Annie David. Monsieur Arthuis, je suis très en colère après vos propos, vous vous en doutez.
Murmures sur les travées de l’UMP.
Vous nous parlez de coût du travail, vous reprochez à M. le ministre délégué de ne pas avoir assisté aux débats d’hier, qui, prétendez-vous, ont montré que le coût du travail était aujourd’hui le principal problème pour l’emploi dans notre pays. Non, ce n’est pas ce qui est ressorti de nos échanges ! Une telle affirmation découle des arguments avancés du côté droit de cet hémicycle.
Mme Annie David. De ce côté-ci de l’hémicycle, mon cher collègue, quand nous parlons du coût du travail, c’est pour dénoncer, non le niveau des salaires et de la participation, mais la rémunération versée aux actionnaires, aux traders, le montant des parachutes dorés !
Oh la la ! sur les travées de l’UMP.
C’est pour dénoncer tous ces bonus octroyés, cette logique qui est de faire en sorte de rapporter 10 % à 15 % de profits aux actionnaires plutôt que de répondre aux besoins industriels des entreprises.
Monsieur Dassault, puisque vous êtes présent parmi nous cet après-midi et que vous nous avez fait part de votre volonté de voir l’article 10 supprimé, j’aimerais bien connaître votre position à propos de l’entreprise Thales, dont vous êtes l’un des actionnaires et qui procède actuellement à un certain nombre de restructurations, avec des licenciements annoncés un petit peu partout sur le territoire français.
En Isère, ce sont 760 salariés qui vont être mis à la porte, parce que vous, entre autres, avez décidé que Thales devait recentrer sa stratégie sur l’armement. Ce groupe produit en Isère, de manière tout à fait compétitive puisqu’il est le leader mondial dans ce domaine, des appareils de radiologie médicale, dont il est inutile de rappeler l’importance en termes de santé publique.
Mesdames les sénatrices et messieurs les sénateurs de droite, nous n’avons pas la même conception de l’entreprise. §Nous n’avons pas la même conception du coût du travail et de la création d’emplois.
Cela fait dix ans que nous supportons votre politique, comme je vous le disais déjà hier. Résultat : il y a, aujourd’hui, en France, 8 millions de pauvres, dont 2 millions d’enfants !
À vous entendre, il n’y a jamais de corrélation entre votre politique et la réalité, comme si la crise et le chômage étaient l’œuvre du Saint-Esprit !
Pour en revenir au présent article et pour ne pas dépasser mon temps de parole, car je suis respectueuse de notre institution, cet article, je veux dire combien nous y sommes favorables.
M. le ministre délégué l’a souligné, mais en étant plus modéré puisqu’il a parlé de « substituts », il y a là un détournement de la politique salariale. Cela permet aux entreprises de ne pas payer tous les impôts qu’elles devraient sur les revenus engrangés grâce à la productivité des travailleurs. Voilà la réalité, mes chers collègues !
Il faut plutôt alourdir la taxation des revenus financiers des entreprises rentières que vous soutenez !
À la vérité, les grands groupes font preuve d’un réel manque de solidarité. J’aimerais bien qu’un jour, ici, soit évoquée la question de la responsabilité sociale des entreprises. Parlons du sort réservé à celles et ceux qui produisent les richesses : 700 milliards d’euros de richesses supplémentaires en dix ans, ce n’est tout de même pas rien ! Où sont-elles allées ? Sans doute pas dans les poches des 8 millions de pauvres, encore moins dans celles des 2 millions d’enfants, qui, aujourd’hui, ne vivent pas de manière décente.
Mes chers collègues, j’espère bien que ces deux amendements de suppression ne seront pas adoptés.
Applaudissements sur les travées du groupe CRC.
Nous sommes des imbéciles, c’est bien connu ! Vous, en tout cas, vous êtes les champions du chômage !
La participation est une source de motivation formidable pour le personnel. Dès lors qu’il sait qu’une partie du bénéfice lui sera aussi distribuée, il fait plus attention, il travaille mieux, il se réjouit que l’entreprise fasse du profit.
Voici ce qu’un syndicaliste m’a dit un jour : « Monsieur le président, votre système est formidable, parce que nous savons maintenant que nous travaillons non pas seulement pour le patron, mais aussi pour nous. » C’est cela, le principe de la participation : tout le monde travaille ensemble, en équipe.
Il n’y a pas de lutte des classes : quand l’un gagne plus, l’autre aussi, en toute égalité. Voilà l’intérêt de la participation ! En plus, cela aboutit à augmenter l’épargne disponible.
Monsieur le ministre délégué, vous auriez tout intérêt à développer la participation. Certains de vos amis m’avaient fait confiance à cet égard voilà quelques années, mais cela n’avait pas suffi pour emporter la décision. J’espère qu’un jour nous serons les plus nombreux.
Les mois de juillet se suivent et ne se ressemblent pas. Il y a cinq ans, c’est Mme Lagarde, qui était assise au banc du Gouvernement, et M. Marini, alors rapporteur général de la commission des finances, que M. Dassault tentait de convaincre du bien-fondé de son intention.
Certes, monsieur le président de la commission des finances, mais tout en demandant le retrait de cet amendement, …
… qui fut long à obtenir, comme s’en souviennent ceux qui ont assisté à cet épisode.
Notre collègue François Marc, aujourd’hui rapporteur général, avait alors pensé que nous pourrions le reprendre.
Non, nous n’avions pas encore eu connaissance du rapport Guillaume. Nous ne l’avons analysé en commission des finances que par la suite, puis avons organisé un débat afin d’examiner l’efficacité des niches et de cette politique.
Il y a cinq ans, notre collègue Serge Dassault était venu nous serrer la main pour nous remercier de notre soutien. Cette année, tel ne sera pas le cas : le groupe socialiste suivra l’avis du rapporteur général.
Monsieur le ministre délégué, vous en avez appelé au programme de François Hollande. Puis vous vous êtes empressé d’ajouter que tout le reste était soumis à cet impératif.
Que l’on soit d’accord ou non avec les engagements de François Hollande, on peut comprendre votre logique. Mais permettez-moi de vous dire qu’avec ce dispositif – et ne parlons pas des heures supplémentaires ! –, vous envoyez un signal extraordinairement négatif. Tout ça pour gagner quelques millions d’euros, alors que vous cherchez 7 milliards !
La participation et l’intéressement sont une « invention » du général de Gaulle, de René Capitant et d’autres, qui pensaient que l’association capital-travail devait permettre de dépasser la lutte des classes. Que l’on partage ou non ce point de vue, il faut reconnaître que ce mécanisme a changé les relations sociales au sein de l’entreprise.
Même si les ordonnances de 1967 sont désormais un peu anciennes et s’il convient de modifier celle du 21 octobre 1986, qui est quelque peu dépassée, pourquoi ne proposez-vous pas plutôt d’en revoir les modalités d’application ? Une telle décision éviterait de donner le sentiment que vous voulez porter un coup à la participation et à l’intéressement, alors même que vous vous posez en défenseurs du pouvoir d’achat.
Par rapport à l’ampleur du projet de loi de finances rectificative, l’article 10 n’est que très secondaire sur le plan financier. Sur le plan symbolique, en revanche, il est terrible.
Je partage tout à fait l’analyse de M. Arthuis : la participation et l’intéressement, quelles que soient leurs modalités fiscales, concernent des millions de Français, qui considèrent que ces dispositifs représentent un « plus » pour eux. Pourquoi remettre en cause, pour un résultat si mince, un dispositif qui est de nature à créer un peu de pouvoir d’achat supplémentaire et qui suscite une telle envie, une telle motivation ?
J’entendais Mme David évoquer les parachutes dorés. Pourquoi pas ? Allons-y ! Mais l’intéressement et la participation profitent à des millions de salariés susceptibles d’y gagner quelques dizaines, quelques centaines, voire quelques milliers d’euros supplémentaires. Quel signal le Gouvernement leur envoie-t-il ? Quel message envoyez-vous aux entreprises qui, depuis des années, font un effort en la matière ? Car il s’agit bien d’un effort, d’une volonté d’améliorer les relations dans l’entreprise.
Comme l’a dit notre collègue Serge Dassault, il règne dans les entreprises qui ont mis en place ces dispositifs un autre climat, une autre manière de concevoir les relations sociales. Ne les détruisez pas ; vous y gagneriez bien peu !
Applaudissements sur les travées de l’UMP. – M. Jean Arthuis applaudit également.
Le Gouvernement se prévaut de demander un effort important aux entreprises plutôt qu’aux ménages. Or, au fur et à mesure que nous progressons dans ce débat, je constate que la distinction entre prélèvements sur les entreprises et les ménages est spécieuse. Pour s’en convaincre, il suffit de faire l’inventaire des dispositions dont nous avons discuté jusqu’à présent.
Il en est ainsi de la disposition relative aux cotisations patronales versées à la Caisse nationale des allocations familiales. En revenant sur la baisse de ces cotisations, vous allez à l’évidence pénaliser le pouvoir d’achat des salariés.
Vous avez également décidé de taxer les heures supplémentaires, qui, je le dis au passage, étaient des heures de travail normales avant que vous n’instauriez les 35 heures, en 1998. En taxant ces heures supplémentaires, vous allez naturellement pénaliser les salariés.
Vous voulez désormais rendre plus difficiles la participation et l’intéressement. Or qui profite de ces dispositifs ? Les salariés, bien sûr !
Voilà trois mesures, prétendument destinées à faire porter l’effort sur les entreprises plutôt que sur les salariés, qui se retournent immédiatement contre les salariés de notre pays. C’est une mauvaise action pour le pouvoir d’achat !
C’est donc une raison supplémentaire d’adopter l’amendement excellemment présenté par notre collègue Serge Dassault et de rejeter les arguments du Gouvernement.
Enfin, je tiens à dire à Mme David qu’il est tout à fait déplorable d’évoquer les intérêts privés de certains de nos collègues. Je ne connais ici que des sénateurs !
Applaudissements sur les travées de l’UMP.
J’ai écouté avec attention l’intervention de M. le ministre délégué, qui nous a dit deux choses.
Tout d’abord, il nous a indiqué que le comité d’évaluation des dépenses fiscales avait jugé ce dispositif « inefficace » ; il a cependant pris la précaution de rappeler que cette instance l’avait aussi classé au niveau 1 sur une échelle de 0 à 3. Or j’ai la faiblesse de penser que, lorsque le comité assortit sa note d’un commentaire évoquant une possible amélioration du dispositif pour mieux atteindre son objectif d’incitation à l’investissement, il ne le juge pas totalement inefficace.
Ensuite, il a tenu à rassurer les sénateurs de droite, en indiquant que le Gouvernement n’était pas hostile à la participation et qu’il avait bien pris acte, lors de la conférence sociale, des préoccupations des salariés à cet égard.
Compte tenu de ces éléments, monsieur le ministre délégué, pourquoi ne pas prendre le temps d’améliorer ces dispositifs, qui ne semblent pas heurter votre vision et qui ne fonctionnent pas suffisamment bien ? Une réflexion pourrait être menée de façon consensuelle dans le cadre d’une concertation, notion si chère au Gouvernement, avec les partenaires sociaux. Après tout, vous prenez bien le temps d’examiner d’autres dispositifs à modifier… En tout cas, cela éviterait d’envoyer un signal détestable en matière de participation.
Je vous demande, mes chers collègues, de surseoir à la mise en œuvre de l’article 10 et de prendre le temps de la réflexion. Il en va, vous l’aurez compris, non seulement du respect d’un principe cher à ce gouvernement, celui de la concertation « à tout va » avant la prise de décision, mais aussi du pouvoir d’achat des travailleurs.
Applaudissements sur les travées de l’UMP.
Il y a lors des débats parlementaires de grandes plages d’ennui, durant lesquelles on ne traite que de questions techniques, notamment juridiques et fiscales. On peut ainsi discuter pendant des heures, sans changer quoi que ce soit aux textes. Cela fait partie du jeu !
À d’autres moments, en revanche, quelque chose apparaît brusquement. Cela vient de se produire à l’occasion de l’examen de l’amendement de notre collègue Serge Dassault, dont chacun connaît la doctrine, la personnalité et les positions politiques. Une sorte de haine est en effet apparue du côté de l’extrême gauche.
Cela peut paraître tout à fait étonnant ; pour notre part, cela ne nous étonne pas.
Ce qui me surprend, en revanche, c’est que le Gouvernement ne manifeste aucune espèce de volonté d’adoucir le débat. Qu’y a-t-il de gênant dans le fait qu’une entreprise développe une politique un peu différente de celle des autres ? Pourquoi s’en prendre à de telles pratiques ?
Que le parti communiste, opposé depuis toujours à ces dispositifs, monte sur ses grands chevaux, c’est tout à fait normal. Mais pourquoi le Gouvernement ne manifeste-t-il pas un peu plus de compréhension ?
En quoi cela le gêne-t-il ? De tels dispositifs sont pourtant un « plus » offert aux salariés. Cette attitude est révélatrice du fonctionnement même de ce gouvernement, dont nous avons malheureusement hérité à la suite de la dernière élection présidentielle.
Ce débat illustre assez bien le fossé qui existe entre la communication et la réalité des projets de loi. Ce grand écart va bientôt atteindre ses limites. Je lis ainsi dans un hebdomadaire, dont le moins que l’on puisse dire est qu’il vous a soutenus (M. Francis Delattre brandit L’Express.), à propos du Président de la République : « Il repousse les réformes » ; « Il endort les Français ». Vous y prenez votre part, monsieur le ministre délégué… Une prochaine rubrique pourrait s’intituler : « Les salariés trinquent ».
: on taxe, on surtaxe et maintenant on fait les poches des salariés ayant la chance de travailler dans des entreprises qui les incitent à bénéficier des fruits de leurs efforts.
« La cohérence », « l’État stratège », « l’effort juste » ne sont en fait que des éléments de langage, les marques distinctives d’une communication mensongère !
Mes chers collègues, cette communication a beau avoir marché lors des dernières élections, les futures fiches de paie vont bientôt contredire bien des complaisances médiatiques.
L’intéressement et la participation n’apparaissent pas sur la fiche de paie !
Le projet de loi de finances rectificative qui devait, mesdames, messieurs de la gauche extrême, sonner l’hallali fiscal des riches, des très riches, est en réalité une parfaite imposture.
Car ce sont les salariés qui, découvrant leur nouveau statut de riches, vont régler l’essentiel de l’addition !
M. Francis Delattre. En lisant le tableau que j’ai rapidement évoqué hier, on voit que les choses sont assez simples pour les salariés. Au cas où cela vous aurait échappé, monsieur le ministre délégué, les mesures relatives aux heures supplémentaires et à l’épargne salariale représentent très exactement 6 milliards d’euros de prélèvements supplémentaires à la charge des salariés et, pour l’essentiel, des salariés relativement modestes.
Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.
Pendant ce temps, les plus riches d’entre les riches, ceux dont on avait annoncé l’hallali, que paieront-ils ? Tout au plus 2 ou 3 milliards d’euros, en une seule fois, au titre de la contribution exceptionnelle…
Quant à la taxation sur les stock-options, elle représente seulement 0, 3 milliard d’euros ; et celle sur les banques, 0, 6 milliard d’euros !
Autrement dit, la taxation des plus riches rapportera à peine 50 % des 6 milliards d’euros que vous allez prendre dans la poche des salariés !
Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.
Le désir de détricoter certaines mesures votées par l’ancienne majorité l’emporte quand nous ferions mieux de discuter d’un problème beaucoup plus important : trouver 33 milliards d’euros pour boucler le budget de 2013.
Et vous osez nous demander des anticipations de recettes sur ce budget !
Aux multiples demandes d’information que l’opposition et le président de la commission des finances lui adressent depuis le début de la séance, le Gouvernement oppose l’évitement de toutes les questions importantes.
Renvoyer à septembre, à des commissions ou autres comités Théodule, les mesures indispensables à la recherche d’une meilleure compétitivité de nos entreprises, alors que nous sommes submergés par une vague de plans sociaux, est une faute.
Plutôt que de vous voir rogner de nombreuses successions modestes et essayer de faire les poches des salariés qui bénéficient d’un peu de participation, …
… nous aurions préféré débattre de la future banque publique d’investissement, savoir quand elle sera opérationnelle et discuter de la manière dont OSEO, qui existe déjà, pourrait agir immédiatement pour faire face aux problèmes d’actualité que nous connaissons tous.
Cela aurait peut-être été plus utile que de s’acharner pendant trois jours sur les mêmes dossiers !
Nous nous interrogeons sur la capacité des entreprises à faire l’avance fiscale, ainsi que sur les raisons pour lesquelles vous essayez de matraquer – il n’y a pas d’autre mot – les quelques réserves qui restent aux salariés.
M. Francis Delattre. En réalité, ce débat montre notre attachement à cette idée : il n’est de vraie richesse que d’hommes, que d’hommes au travail. Et on travaille dans les entreprises !
Applaudissements sur les travées de l’UMP.
Mon cher collègue, vous avez parlé pendant six minutes.
Je vous signale, mes chers collègues, qu’il nous reste 140 amendements à examiner. Si nous avançons à cette allure, comme vous l’a dit le président de la commission des finances, ce n’est pas demain à midi ni demain après-midi que nous terminerons, mais demain soir.
Sachez que, si nous avançons lentement, ce ne sera pas la peine d’aller jusqu’à trois heures du matin ; nous nous arrêterons vers minuit.
Je vous demande donc de respecter le temps de parole de cinq minutes que notre règlement prévoit pour les explications de vote.
La parole est à M. Jean-Claude Lenoir, pour explication de vote.
Monsieur le président, j’ignore si vous vous adressiez à ceux qui étaient intervenus ou à celui qui allait intervenir… En tout cas, je vais essayer de ne pas encourir vos reproches.
Je suis frappé par les efforts pédagogiques que déploient les différents ministres qui se succèdent au banc du Gouvernement depuis trois jours pour minimiser l’importance du projet de loi de finances rectificative.
Ils nous expliquent que, finalement, les prélèvements nouveaux ne sont pas importants, qu’ils auraient pu être bien supérieurs et que, de toute façon, les réformes sont à venir. En particulier, les échanges qui ont eu lieu tout à l’heure avec le groupe communiste au sujet du renvoi à plus tard d’une réforme de la fiscalité montrent bien que le présent projet de loi de finances rectificative n’est qu’un petit exercice.
Pour autant, nous avons de bonnes raisons d’être inquiets. En effet, les signaux que vous donnez ont de quoi préoccuper une grande majorité de nos compatriotes.
Il faut dire qu’avec ce « petit collectif budgétaire » vous commencez par prendre largement dans la poche des Français. C’est leur pouvoir d’achat qui est amputé ! Et quand vous dites que, l’an prochain, il faudra prélever encore beaucoup plus, on sait très bien où vous irez chercher l’argent : sur le dos du contribuable !
L’examen de l’article 10 illustre bien votre propension à aller dans ce sens. Il s’agit de supprimer purement et simplement le dispositif mis en place par l’ordonnance du 21 octobre 1986.
Ce dispositif permet à une entreprise de donner plus de façon dérogatoire ou, quand elle n’est pas obligée de le faire, de donner néanmoins.
Quel signal vous adressez au monde du travail au moment où vous amputez le pouvoir d’achat des salariés en supprimant la défiscalisation des heures supplémentaires !
Un certain nombre de nos collègues ont prétendu tout à l’heure que de tels dispositifs existaient seulement dans les grandes entreprises.
Dans le territoire que j’ai l’honneur de représenter, les grands groupes ne sont pas vraiment présents, mais il y a de nombreuses PME. Or, au cours des mandats que j’ai exercés, j’ai été surpris de voir tant de petites entreprises se tourner vers ces dispositifs pour apporter à leurs salariés un complément de salaire très apprécié.
Sans compter que l’intéressement exerce des effets, que Roger Karoutchi a très bien décrits, sur les rapports des salariés avec les dirigeants et le climat social dans l’entreprise.
M. le ministre délégué a soutenu que, dans un certain nombre de cas, la part versée au titre de l’intéressement est un substitut au salaire. J’aimerais l’amener à un petit peu plus de réalisme.
Les salaires ne sont pas une variable. Des minima existent et, à temps de travail constant, le salaire ne peut pas être diminué. Allez donc voir les salariés dans les entreprises pour recueillir leur avis !
De manière ironique, c’est vous, monsieur le ministre délégué chargé de l’économie sociale et solidaire, qui siégez au banc de Gouvernement. Les principes que vous avez développés devant nous vous inspirent-ils dans la mission qui vous a été confiée par le Président de la République et le Premier ministre ? Avez-vous le sentiment que c’est ainsi que l’on peut promouvoir l’économie dite sociale et solidaire ?
Au Gouvernement et à nos collègues de la majorité, je demande à nouveau de réfléchir aux conséquences de cette mesure et au signal très négatif qu’enverrait son adoption. Pensez aux très nombreux salariés qui vont être profondément troublés par cette offensive en règle contre leur pouvoir d’achat !
C’est pourquoi, mes chers collègues, je vous demande de voter les amendements de nos collègues Dassault et Arthuis.
Applaudissements sur les travées de l’UMP.
Je remercie nos collègues de l’opposition, car, en les écoutant, je me sens d’un seul coup rajeuni de cinq ans.
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Ça fait du bien !
Sourires.
À l’époque, le président sorti nous promettait qu’il serait le président, non pas du pouvoir d’achat, mais de l’augmentation du pouvoir d’achat. Et, en effet, la première mesure prise a consisté à mettre en place le bouclier fiscal…
Il s’agissait d’éviter que les plus fortunés quittent notre pays, et même les faire revenir. J’attendais donc avec impatience le retour d’un ami du Président de la République, M. Johnny Hallyday. Mais celui-ci avait dû comprendre que la politique du Président Sarkozy était à l’image de sa chanson : « Noir c’est noir, il n’y a plus d’espoir ».
Exclamations sur les travées de l’UMP.
Monsieur Delattre, à supposer même que cette idée malheureuse nous soit venue à l’esprit, elle serait totalement inutile : les poches des salariés sont vides depuis longtemps, puisque vous avez réussi à fabriquer plus de 8, 5 millions de Français en dessous du seuil de pauvreté. Comment voulez-vous faire les poches à ceux dont les doublures du portefeuille se touchent aujourd’hui ?
Soyez donc rassuré : ce n’est pas aux salariés qu’on va faire les poches.
Nous savons bien qu’un effort est nécessaire de la part de l’ensemble des Français, mais nous voulons qu’il soit équitable.
En donnant leur confiance à François Hollande, les Français ont voulu dire qu’ils sont d’accord pour faire cet effort, à condition qu’il soit équitablement réparti et que ceux qui ont le plus donnent plus.
Certains essaient de nous faire pleurer en nous accusant de créer une taxe insupportable de 75 % pour ceux qui gagnent plus de 1 million d’euros.
Protestations sur les travées de l’UMP.
Je n’aurai pas la cruauté de leur rappeler que la première mesure qui a été prise il y a cinq ans, le bouclier fiscal, s’inscrivait largement dans la politique la plus antisociale qui soit, celle du paquet fiscal, qui a consisté à prélever 15 milliards d’euros qui auraient été très utiles pour mener une véritable politique sociale et de développement économique.
Monsieur Delattre, en vous écoutant parler, j’avais l’impression que vous étiez en train de vous regarder dans une glace et que vous parliez de vous il y a cinq ans !
Je serai bref, mais certains propos doivent être rectifiés.
Vous avez dit, monsieur Néri, que le Président de la République qui n’a pas été reconduit dans ses fonctions avait annoncé qu’il serait le président de la hausse du pouvoir d’achat. Je vous rappelle que, à l’époque de cet engagement, il n’y avait pas la crise. Lorsqu’elle est survenue, il s’est battu pour défendre le pouvoir d’achat des Français, et il a réussi ! Voyez ce qui se passe dans un certain nombre de pays du sud de l’Europe ces jours-ci encore. Les baisses considérables de pouvoir d’achat que ces pays ont connues ne se sont pas produites en France !
Pour ma part, je constate que le Président de la République nouvellement élu est le président de la baisse du pouvoir d’achat. Telle est la réalité qu’illustrent les quelques mesures dont nous avons déjà débattu : celle qui concerne les heures supplémentaires, celle dont nous discutons actuellement à propos de l’intéressement, mais aussi celle qui va être prise au sujet des cotisations retraite de certains fonctionnaires pour compenser le retour à soixante ans de l’âge de départ à la retraite. Il en résulte que, dans nos collectivités et dans nos entreprises, le pouvoir d’achat va baisser pour les salaires moyens et les salaires les plus bas.
Celui qui s’est fait élire Président de la République n’avait pas annoncé tout cela. La réalité, c’est qu’il commence son mandat par ces quelques mesures révélatrices, qui adressent un signal dramatique aux salariés Il est d’ores et déjà le président de la baisse du pouvoir d’achat.
Applaudissements sur les travées de l’UMP.
La participation est un sujet qui tient à cœur à beaucoup d’entre nous sur ces travées. Je suis moi-même membre du COPIESAS, le Conseil d’orientation de la participation, de l’intéressement, de l’épargne salariale et de l’actionnariat salarié, l’ancien CSP, ou Conseil supérieur de la participation. Or, monsieur le ministre délégué, je m’étonne que l’une de vos premières mesures soit de taxer les entreprises vertueuses pratiquant la participation et l’intéressement et de pénaliser par là même les salariés qui en profitent.
Je prendrai plus longuement la parole à ce sujet sur les articles 26 et 27, mais je souhaiterais en attendant vous lire cet extrait d’un journal qui me paraît sérieux, puisqu’il s’agit des Échos. Voici ce qu’écrivent deux économistes : « Nous voudrions aussi convaincre que le partage du profit est une piste féconde, qu’un gouvernement de gauche peut l’emprunter sans crainte, comme il l’a d’ailleurs déjà fait en 2001 avec la loi Fabius, précédée par les rapports en ce sens de Michel Sapin et Pierre Moscovici. » Je vous laisse méditer cette phrase.
… exhibé la couverture quelque peu racoleuse d’un magazine hebdomadaire, dont le titre – « L’Hypnotiseur » – est assez injuste à l’égard du Président de la République.
Au reste, au cours de cette séance, j’ai cru moi-même pendant quelques secondes être doté du don d’hypnotiser les foules, quand M. Dassault s’est qualifié de socialiste.
Je me suis dit alors que je possédais des pouvoirs tout à fait nouveaux.
Plus sérieusement, le pouvoir d’achat par unité de consommation a reculé au premier trimestre de 2012. Le revenu arbitral disponible a, quant à lui, diminué en 2011. Cela signifie que la dégradation du pouvoir d’achat des Français, qui est une réalité, est antérieure à l’élection de François Hollande.
Le précédent Président de la République avait commandé à M. Jean-Philippe Cotis un rapport fort utile – peu importe que l’on approuve ou non ses conclusions – sur le partage de la valeur ajoutée. Ces travaux avaient d’ailleurs abouti à cette fameuse proposition des trois tiers dans la répartition des profits, qui a connu le sort que vous savez, mesdames, messieurs les sénateurs.
Je veux y insister, ce qui ressort de ce rapport et de toutes les expertises effectuées, c’est que la crise a eu raison du pouvoir d’achat des ménages comme des marges des entreprises.
M. Benoît Hamon, ministre délégué. Or, et là c’est moi qui suis surpris, la seule mesure que vous avez trouvée pour relancer la compétitivité a été d’augmenter la TVA, ce qui, compte tenu de la faiblesse des marges des entreprises, aurait forcément eu un impact sur les prix.
Exclamations sur les travées de l’UMP et de l’UCR.
Dans le monde magique qui est le vôtre, cette mesure ne devait pas toucher les Français. Pourtant, tel aurait bien été le cas, au premier euro, du plus riche au plus pauvre.
Qu’avons-nous fait, nous, pour le pouvoir d’achat ? Nous avons augmenté immédiatement l’allocation de rentrée scolaire de 80 euros par enfant, donné un coup de pouce au SMIC, engagé dans toutes les branches des négociations salariales sur les minima conventionnels. Nous avons lancé un véritable dialogue sur ce qui constitue l’élément essentiel des rémunérations : les salaires. Voilà des mesures concrètes !
Je veux à présent revenir sur la question de l’épargne salariale, de la participation et de l’intéressement.
M. Benoît Hamon, ministre délégué. Nous avons décidé de réunir le COPIESAS.
Exclamations sur les travées de l’UMP et de l’UCR.
Certes, monsieur Delattre, mais cet organisme qui a pour objet l’épargne salariale, l’actionnariat salarié, l’intéressement et la participation ne s’était jamais réuni. Les partenaires sociaux pourront donc faire le point sur ces questions.
Nous avons donc engagé un processus de discussion, alors que vous ne l’aviez jamais fait.
J’observe aussi que vous avez été les premiers à augmenter le forfait social sur la participation. À présent, vous vous étonnez que nous fassions de même. Pourquoi agissons-nous ainsi ? Je le répète, en dépit de l’augmentation du forfait social, il subsistera un écart de plus de vingt points dans le niveau des prélèvements entre la participation et les salaires.
Oui, la participation restera un instrument utile pour permettre aux entreprises d’intéresser les salariés à leurs résultats, et même, dans certaines sociétés, pour favoriser les relations sociales ! Nous ne pénalisons pas la participation, nous mettons en place un système de prélèvements plus juste, …
… pour faire en sorte que, demain, celles et ceux qui bénéficient de ce dispositif contribuent quelque peu à l’effort collectif, à un moment où, je vous le rappelle, vous nous laissez une situation des comptes publics extrêmement préoccupante.
Si nous examinons la situation que vous nous avez laissée, nous nous rendons compte que nous ne sommes plus capables de satisfaire l’objectif sur lesquels vous vous êtes engagés, à savoir un déficit public de 4, 5 % du PIB. C’est pourquoi nous mobilisons des recettes supplémentaires…
M. Benoît Hamon, ministre délégué. … et faisons en sorte de concilier redressement et équité.
Applaudissementssur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.
Je mets aux voix les amendements identiques n° 107 et 136 rectifié.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe de l’UCR.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que l’avis du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
Le scrutin a lieu.
Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
Il est procédé au dépouillement du scrutin.
L’amendement n° 35, présenté par M. Marc, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 3
Remplacer la référence :
au II
par les références :
aux 1. et 2. du II
II. - Alinéa 4
Après le mot :
provisions
insérer les mots :
mentionnées au premier alinéa
La parole est à M. le rapporteur général.
Le présent amendement vise à apporter des corrections purement rédactionnelles au dispositif adopté par l’Assemblée nationale, afin de rendre celui-ci totalement opérant.
Cette disposition ne pose pas de problème en soi, au contraire.
Toutefois, monsieur le ministre délégué, je suis extrêmement surprise : vous nous annoncez que vous allez réunir le COPIESAS pour discuter de la participation et de l’intéressement et, dès maintenant, avant même d’avoir écouté les partenaires sociaux, vous prenez des décisions en la matière.
J’ai rarement vu un gouvernement affirmer qu’il va prendre des décisions et que, ensuite, il va réunir les acteurs.
Je m’étonne de la méthode que vous employez. Vous nous annoncez ici que vous allez réunir le COPIESAS. Dont acte ! Je vous en félicite. Mais alors, pourquoi prendre dès maintenant des décisions sur ce sujet ? Cet organisme est tout de même composé d’experts, de représentants des partenaires sociaux, de personnalités qualifiées, de parlementaires…
Pour adopter des décisions du genre de celle qui figure dans ce collectif, nous n’étions pas à deux ou trois mois près. Le projet de loi de finances pour 2013 arrivera vite. Une fois encore, vous agissez dans la précipitation, sans étude d’impact et sans écouter les partenaires.
Applaudissements sur les travées de l’UMP.
L’amendement est adopté.
L’article 10 est adopté.
I. – L’article 209 B du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Le III est ainsi rédigé :
« III. – En dehors des cas mentionnés au II, le I ne s’applique pas lorsque la personne morale établie en France démontre que les opérations de l’entreprise ou de l’entité juridique établie ou constituée hors de France ont principalement un objet et un effet autres que de permettre la localisation de bénéfices dans un État ou territoire où elle est soumise à un régime fiscal privilégié.
« Cette condition est réputée remplie notamment lorsque l’entreprise ou l’entité juridique établie ou constituée hors de France a principalement une activité industrielle ou commerciale effective exercée sur le territoire de l’État de son établissement ou de son siège. » ;
2° Le III bis est abrogé.
II. – Le I est applicable aux exercices clos à compter du 31 décembre 2012.
Monsieur le ministre délégué, je m’étonne que vous nous accusiez d’avoir tenté d’augmenter les prix par le biais de la TVA sociale. À votre décharge, il faut dire que vous n’étiez pas présent lors du long débat au cours duquel a été abordée la question de l’allégement des cotisations sociales en vue d’améliorer la compétitivité des entreprises et, par voie de conséquence, de recréer des emplois, ainsi que celle du pouvoir d’achat de nos concitoyens. Nous avions alors fait la démonstration que si nous allégions les cotisations sociales, la compétitivité pouvait être restaurée sans augmentation corollaire des prix payés par les consommateurs français.
Nous avons noté que, lors de la conférence sociale, vous aviez reconnu – tout comme implicitement le Président de la République – que pouvait se poser un problème en matière de charges sociales, lesquelles devraient être allégées. Dès lors, comment comptez-vous compenser ?
Le supplément de TVA que nous préconisons doit être significatif ; cependant, il ne permettra pas à lui seul d’équilibrer les comptes publics. En effet, la TVA doit compenser à l’euro près les allégements de cotisations sociales.
Le jour où vous aurez abaissé ces cotisations, vous pourrez alors mettre un terme à toutes les rémunérations qui font l’objet de régimes dérogatoires et qui bénéficient d’allégements de cotisations sociales. En outre, si vous allez au bout du raisonnement, vous introduirez de la flexibilité dans la législation sur le travail. Alors oui, nous trouverons les bons leviers pour réhabiliter la compétitivité, pour améliorer l’emploi et le pouvoir d’achat !
L’article 11 a trait au renversement de la charge de la preuve pour les transferts de bénéfices vers les pays à fiscalité privilégiée. Cette disposition figure parmi les 59 mesures proposées par la commission d’enquête sur l’évasion fiscale, qu’a déjà citée Mme Beaufils, dont le président était Philippe Dominati et le rapporteur Éric Bocquet.
Malgré le travail réalisé par le Conseil des prélèvements obligatoires, on ne peut pas évaluer avec précision le montant de l’évasion fiscale ; il se situerait entre 30 milliards d’euros et 80 milliards d’euros, soit le montant de l’intérêt de la dette.
Les transferts de bénéfices et le prix de ces opérations représentent une part importante du rapport de la commission d’enquête, qui a effectué de multiples auditions à ce sujet. En effet, alors que les regards se tournent vers la fraude, l’enjeu principal se trouve en réalité ailleurs : les systèmes qui exploitent les failles.
Monsieur le ministre délégué, je vous suggère à nouveau d’étudier avec beaucoup d’attention le travail de la commission d’enquête sénatoriale, qui devrait inspirer sinon le présent projet de loi de finances rectificative, la commission n’étant pas encore parvenue au terme de sa tâche, du moins le projet de loi de finances que vous allez nous présenter à l’automne.
L’article 11 est adopté.
I. – Le code général des impôts est ainsi modifié :
A. – Le II de l’article 209 est ainsi modifié :
1° Le b est ainsi rédigé :
« b) L’activité à l’origine des déficits ou des intérêts dont le transfert est demandé n’a pas fait l’objet par la société absorbée ou apporteuse, pendant la période au titre de laquelle ces déficits et ces intérêts ont été constatés, de changement significatif notamment en termes de clientèle, d’emploi, de moyens d’exploitation effectivement mis en œuvre, de nature et de volume d’activité ; »
2° Sont ajoutés des c et d ainsi rédigés :
« c) L’activité à l’origine des déficits ou des intérêts dont le transfert est demandé est poursuivie par la ou les sociétés absorbantes ou bénéficiaires des apports pendant un délai minimal de trois ans sans faire l’objet, pendant cette période, de changement significatif notamment en termes de clientèle, d’emploi, de moyens d’exploitation effectivement mis en œuvre, de nature et de volume d’activité ;
« d) Les déficits et intérêts susceptibles d’être transférés ne proviennent ni de la gestion d’un patrimoine mobilier par des sociétés dont l’actif est principalement composé de participations financières dans d’autres sociétés ou groupements assimilés, ni de la gestion d’un patrimoine immobilier. » ;
B. – Le 5 de l’article 221 est ainsi rédigé :
« 5. a. Le changement de l’objet social ou de l’activité réelle d’une société emporte cessation d’entreprise. Il en est de même en cas de disparition des moyens de production nécessaires à la poursuite de l’exploitation pendant une durée de plus de douze mois, sauf en cas de force majeure, ou lorsque cette disparition est suivie d’une cession de la majorité des droits sociaux.
« Toutefois, dans les situations mentionnées au premier alinéa du présent a, l’article 221 bis est applicable, sauf en ce qui concerne les provisions dont la déduction est prévue par des dispositions légales particulières.
« b. Le changement d’activité réelle d’une société s’entend notamment :
« i) De l’adjonction d’une activité entraînant, au titre de l’exercice de sa survenance ou de l’exercice suivant, une augmentation de plus de 50 % par rapport à l’exercice précédant celui de l’adjonction :
« – soit du chiffre d’affaires de la société ;
« – soit de l’effectif moyen du personnel et du montant brut des éléments de l’actif immobilisé de la société ;
« ii) De l’abandon ou du transfert, même partiel, d’une ou plusieurs activités entraînant, au titre de l’exercice de sa survenance ou de l’exercice suivant, une diminution de plus de 50 % par rapport à l’exercice précédant celui de l’abandon ou du transfert :
« – soit du chiffre d’affaires de la société ;
« – soit de l’effectif moyen du personnel et du montant brut des éléments de l’actif immobilisé de la société.
« c. Sur agrément délivré par le ministre chargé du budget selon les modalités prévues à l’article 1649 nonies, ne sont pas considérées comme emportant cessation d’entreprise :
« i) La disparition temporaire des moyens de production pendant une durée de plus de douze mois mentionnée au a lorsque l’interruption et la reprise sont justifiées par des motivations principales autres que fiscales ;
« ii) Les opérations mentionnées au b lorsqu’elles sont indispensables à la poursuite de l’activité à l’origine des déficits et à la pérennité des emplois. » ;
C. – L’article 223 I est ainsi modifié :
1° Les trois premiers alinéas du c du 6 sont remplacés par un alinéa ainsi rédigé :
« c. Les déficits et les intérêts mentionnés au premier alinéa proviennent de la société absorbée ou scindée ou des sociétés membres du groupe auquel il a été mis fin qui font partie du nouveau groupe et pour lesquelles le bénéfice des dispositions prévues au 5 est demandé, sous réserve du respect, par ces sociétés, des conditions mentionnées aux b, c et d du II de l’article 209. » ;
2° Le c du 7 est complété par les mots : «, sous réserve du respect, par ces sociétés, des conditions mentionnées aux b, c et d du II de l’article 209 ».
II. – Le I s’applique aux exercices clos à compter du 4 juillet 2012.
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 47 est présenté par Mme Des Esgaulx.
L’amendement n° 185 rectifié bis est présenté par MM. P. Dominati, Cambon, J. Gautier, Beaumont et Dassault et Mlle Joissains.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 20
Remplacer le mot :
et
par le mot :
ou
La parole est à Mme Marie-Hélène Des Esgaulx, pour présenter l’amendement n° 47.
L’article 12 du présent projet de loi de finances rectificative vise à limiter les possibilités d’exploitation des déficits à des fins d’optimisation fiscale. Toutefois, pour ne pas pénaliser les opérations de restructuration, un agrément du ministère du budget pourra être accordé quand les opérations d’adjonction, d’abandon ou de transfert d’activité sont indispensables à la poursuite de l’activité à l’origine des déficits et à la pérennité des emplois.
Or le cumul de critères prévu par le texte pour obtenir l’agrément n’est pas économiquement réaliste. En effet, si pérenniser les emplois est essentiel, il faut permettre à une entreprise en restructuration de bénéficier de l’agrément du seul fait de la poursuite d’activité.
Concrètement, le présent amendement vise à rendre les critères d’obtention de l’agrément ministériel alternatifs et non plus cumulatifs.
La parole est à M. Philippe Dominati, pour présenter l’amendement n° 185 rectifié bis.
L’article 12 vise à éviter le transfert abusif de déficits. La procédure d’agrément apporte toutefois un tempérament afin de ne pas pénaliser les entreprises en difficulté, et c’est essentiel.
Ainsi, parmi les critères retenus figurent la poursuite de l’activité et la pérennité des emplois, deux conditions cumulatives. L’adoption des amendements identiques que nous examinons et qui visent à rendre celles-ci alternatives affaiblirait le dispositif.
Je ne peux y être favorable, car nous savons que si un choix est laissé entre maintien de l’activité et pérennité des emplois, le risque est que le sacrifice de ces derniers soit privilégié. Nous devons donc conserver la fermeté du dispositif initial.
Malgré la cohérence de votre raisonnement, madame la sénatrice, le Gouvernement considère essentiel et légitime, eu égard à la situation actuelle de l’emploi, le cumul des deux critères, à savoir le maintien de l’activité et de l’emploi, pour que soit délivré l’agrément. Si tel n’était pas le cas, la mesure visée, qui est une disposition anti-abus, bénéficierait aussi à une entreprise qui souhaiterait conserver les actifs indépendamment des emplois. C’est pourquoi le Gouvernement demande le retrait des amendements, faute de quoi il émettra un avis défavorable.
Mme Des Esgaulx fait preuve de pragmatisme et propose une solution efficace.
Je regrette qu’aucune étude d’impact n’ait été réalisée – le rapporteur général en fait pourtant bien souvent la demande – et que nous ne disposions pas de chiffres sur les dix ou vingt dernières entreprises sauvées grâce à l’agrément délivré par les pouvoirs publics et qui ont néanmoins réduit les emplois. Tel est le cas de Lejaby, d’une compagnie maritime du Nord de la France, notamment.
La solution suggérée permettrait de sauver des entreprises. En effet, monsieur le ministre délégué, vous instaurez un carcan d’une grande brutalité. Ne pouvant pas récupérer un investissement indéterminé, un certain nombre d’entreprises vont couler.
Je souhaite obtenir quelques précisions du Gouvernement, plus précisément de la direction de la législation fiscale.
Si je comprends bien, sont en cause les conditions pour obtenir un agrément. Le ministre peut – ce n’est pas une obligation – accorder le transfert des déficits, sans aucune compétence liée, si, selon la proposition qui nous est faite, poursuite de l’activité et maintien des emplois sont combinés. Mais que signifie précisément « poursuite de l’activité » ?
Si l’on retient une interprétation économique, ces termes font référence à un outil qui fonctionne. Peut-être une société fabriquant initialement des chaussures de sécurité produira-t-elle à l’avenir des chaussures de sport ? Certes, son activité aura changé, mais le site sera toujours opérationnel.
Si l’on se livre à une interprétation plus juridique en fonction de la jurisprudence du Conseil d’État, on peut considérer que l’expression susvisée veut dire « poursuite de l’activité d’origine qui a engendré les déficits ». Ces derniers sont liés à une activité bien définie dans les statuts de l’entreprise.
Nous avons besoin d’éclaircissements pour nous prononcer en toute connaissance de cause. Or si l’on opte pour cette dernière interprétation, étroitement juridique, la société que j’ai citée en exemple tout à l’heure qui fabriquerait désormais des chaussures de sport après avoir trouvé des clients pour cet article ne pourra pas bénéficier de l’agrément, même si elle maintient les emplois.
Monsieur le ministre délégué, peut-être est-il possible de lever les craintes exprimées par certains collègues et de concilier le dispositif avec la lecture qu’en fait M. le rapporteur général.
Tout d’abord, lorsque nous évoquons un maintien de l’activité, il ne s’agit pas forcément d’une activité identique. Nous ne demandons pas que la société qui a été reprise fabrique au lacet près la même chaussure ! L’objectif est de contribuer à la restructuration de l’outil industriel et au maintien de l’activité. Par conséquent, la production peut être différente mais nécessiter des machines assez semblables. J’insiste sur ce point : ce sont bien les composantes de l’activité économique que nous prenons en considération.
Ensuite, lors de reprises effectives d’entreprises, des agréments ont été délivrés et l’emploi a été maintenu, même si, j’en conviens, parfois ce ne fut pas en totalité. En effet, nous l’avons constaté, face à une situation de crise – absence de marché, carnets de commandes vides, perte de clients –, les sociétés essaient de transformer l’outil de production et de se repositionner sur un autre marché. La société Lejaby, dont les salariés conservés en totalité doivent changer radicalement de métier, est un exemple en la matière.
S’il doit y avoir, hélas ! une contraction des effectifs liée à la restructuration, l’agrément pourra être donné, même si notre objectif reste bien sûr le maintien de l’emploi à 100 %. Nous tenons à ce que le repreneur sache bien, au moment où il demande le transfert des déficits, qu’il a des obligations en termes de maintien tant de l’activité que de l’emploi. Il y a d’ores et déjà une forme de jurisprudence en la matière, et elle sera suivie.
Dans la plupart des cas, je vous rassure, le repreneur a la volonté de conserver les effectifs ; il ne reprend pas une entreprise et ses machines dans l’intention maligne de faire tourner ces dernières sans salariés. Je n’en crois pas moins que lier le maintien de l’activité et le maintien de l’emploi comme nous voulons le faire sera profitable aux salariés et à celles et ceux qui cherchent un emploi.
Nous le savons bien, quand une entreprise est en difficulté et s’engage dans une restructuration, tout doit être fait pour l’accompagner. Que fait d’autre le ministre du développement productif lorsqu’il intervient vis-à-vis de PSA – en utilisant une méthode que je réprouve à titre personnel –, sinon d’essayer de trouver des solutions aux difficultés qui frappent cette entreprise ? Or l’un des éléments pour aider les entreprises en restructuration est précisément l’agrément du ministère du budget.
Aussi, monsieur le ministre délégué, quand vous dites que cet agrément doit désormais être accordé à condition qu’il y ait non seulement engagement de poursuivre l’activité, mais également, de façon cumulative, engagement de pérenniser les emplois, vous vous trompez. Même en nuançant, comme vous venez de le faire, ce qu’il faut entendre par poursuite de l’activité, il n’est pas possible de demander ce double engagement à une entreprise en difficulté et en restructuration, puisque l’on sait qu’elle va, à un moment ou à un autre, être amenée à jouer – veuillez me pardonner de l’emploi de ce terme – sur cet élément de la compétitivité que constitue le coût salarial.
C’est porter un grave coup aux entreprises qui tentent de se restructurer que de leur imposer ces deux critères cumulatifs. Il me paraît évident qu’un chef d’entreprise qui s’engage à poursuivre son activité va essayer de maintenir le plus d’emplois possible. Ne mettons donc pas dès le départ une barre infranchissable pour la grande majorité des entreprises en restructuration.
Je vous en conjure, mes chers collègues : votez l’amendement de Mme Des Esgaulx ! Si vous ne le faites pas, tout ce qu’entreprend l’actuel gouvernement en matière de redressement productif est peu ou prou voué à l’échec.
Vous disposez là d’un levier qu’il vous faudrait utiliser à fond, monsieur le ministre délégué, mais vous êtes en train de vous priver de la possibilité de le faire en imposant ces deux critères cumulatifs.
Monsieur le ministre délégué, il me semble que vous avez parlé du maintien de l’activité – qui peut, éventuellement, on le sait, impliquer une diminution de l’effectif dans le cas d’une société en difficulté – et non pas du maintien de la totalité des emplois. Comme je ne demande qu’à comprendre avant de voter, pourriez-vous me confirmer que j’ai bien saisi votre pensée ?
Par ailleurs, s’agissant de l’action du Fonds stratégique d’investissement, j’avais moi-même assez lourdement insisté – j’avais d’ailleurs obtenu qu’un débat se tienne dans cette maison – pour que les subventions de l’État soient conditionnées par des comportements sociaux cohérents. Je pense à certaines entreprises, par exemple au groupe Trèves, ayant bénéficié de subsides importants et licencié du personnel dans des conditions totalement inadmissibles.
Ces dispositions relatives à l’engagement de maintenir les effectifs me paraissent relever de la bonne conscience des politiques appelés à accorder des subventions, des aides publiques ou encore des agréments.
« J’ai pris la décision, mais j’ai veillé à ce que l’on maintienne l’emploi ou même à ce que l’on en crée. » C’est beau comme l’antique, mais, très franchement, c’est la situation économique qui va faire la différence ! Lorsque, malheureusement, l’entreprise n’atteint pas ses objectifs, on ne peut que le constater.
Ce type de clause me paraît donc quelque peu superfétatoire. Lorsque l’on délivre un agrément, il faut acquérir la conviction que ceux qui le souscrivent sont de bonne foi et qu’ils ont pris toutes les précautions requises. C’est un acte de confiance.
Je me permets donc de vous dire, monsieur le ministre délégué, que l’engagement sur le maintien de l’emploi, si vous confirmez qu’il est une condition absolument nécessaire, sera assez virtuel.
Je ne veux pas allonger le débat, quoi qu’il soit passionnant, mais prenons le cas d’une entreprise dans laquelle le repreneur ne s’intéresse qu’aux brevets et à la technologie et, de facto, pas aux salariés. Cela existe – pas partout, heureusement, car les repreneurs ont plutôt envie, en général, de maintenir l’activité et l’emploi – et, dans de tels cas, il faut pouvoir refuser le transfert de déficits.
Évidemment, l’agrément conserve un caractère un peu discrétionnaire, même avec un texte comme celui que nous proposons, puisqu’il n’est pas postulé que la totalité des emplois sera maintenue mais seulement que le maximum sera fait pour que le plus d’emplois possible soient conservés.
Nous savons qu’il y a des entreprises qui se « cassent la figure ». Nous savons qu’il y a aussi des petites entreprises qui, si elles ne font pas de grosses marges, sont bénéficiaires mais ont du mal à trouver un repreneur. Ce que nous voulons tout simplement éviter, conformément à notre stratégie – que je crois d’ailleurs assez largement partagée –, c’est qu’un repreneur puisse obtenir le transfert du déficit de l’entreprise en difficulté qu’il reprend quand il n’a pas pour objectif réel de maintenir, avec l’activité, l’emploi.
Voilà le lien que nous voulons établir et, objectivement, il me semble distinguer dans les divers arguments plus de choses qui nous rapprochent que de choses qui nous éloignent. Je me permets donc d’insister une fois encore sur notre volonté de combiner activité et emploi.
Les amendements ne sont pas adoptés.
Monsieur le ministre délégué, mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pendant quelques instants.
La séance est suspendue.
La séance, suspendue à dix-huit heures dix, est reprise à dix-huit heures vingt.
La séance est reprise.
Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 186 rectifié bis, présenté par MM. P. Dominati, Cambon, J. Gautier, Beaumont et Dassault et Mlle Joissains, est ainsi libellé :
Alinéa 25
Rédiger ainsi cet alinéa :
II. – Le I s’applique aux opérations engagées à compter du 1er août 2012.
La parole est à M. Philippe Dominati.
On ne peut pas dire que la nouvelle disposition prévue à l’article 12 ait fait l’objet d’une large publicité et que les entreprises aient pu l’anticiper. Elle s’applique aux exercices clos à compter du 4 juillet 2012. Or, au regard de la date probable de promulgation de ce texte, il semble plus judicieux de repousser son entrée en vigueur au 1er août 2012.
Tel est l’objet de cet amendement.
L’amendement n° 48, présenté par Mme Des Esgaulx, est ainsi libellé :
Alinéa 25
Remplacer les mots :
exercices clos
par les mots :
opérations engagées.
La parole est à Mme Marie-Hélène Des Esgaulx.
Cet amendement s’inscrit exactement dans la même logique. J’avais choisi la date du 4 juillet 2012, mais je me rallierai très facilement à celle du 1er août que propose Philippe Dominati.
L’article 12 prévoit un dispositif anti-abus. Dès lors que l’on considère que le montage est abusif, il n’y a pas de raison d’accorder une clémence particulière. Or l’adoption de ces amendements réduirait la portée de la mesure.
Je rappelle que la rétroactivité depuis le début de l’exercice fiscal n’est pas une nouveauté. C’est ainsi que sont traditionnellement rédigés les dispositifs anti-abus.
La commission a donc émis un avis défavorable.
Le Gouvernement émet également un avis défavorable, pour les mêmes raisons.
L’amendement n’est pas adopté.
L’amendement n’est pas adopté.
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 49 est présenté par Mme Des Esgaulx.
L’amendement n° 187 rectifié bis est présenté par MM. P. Dominati, Cambon, J. Gautier, Beaumont, Adnot et Dassault et Mlle Joissains.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Compléter cet article par un III ainsi rédigé :
III. – Les dispositions du I ne s’appliquent pas aux petites et moyennes entreprises qui satisfont à la définition des micro, petites et moyennes entreprises visées à l’annexe I du règlement (CE) n° 800/2008 de la Commission du 6 août 2008.
La parole est à Mme Marie-Hélène Des Esgaulx, pour présenter l’amendement n° 49.
L’article 12 est de nature à pénaliser les PME en difficulté, pour lesquelles les opérations de restructuration constituent, dans bien des cas, une voie indispensable de rétablissement. En effet, en pratique, il leur sera souvent très difficile de remplir tous les critères exigés par la loi.
En conséquence, le présent amendement vise à écarter du nouveau dispositif les PME au sens de la règlementation communautaire.
La parole est à M. Philippe Dominati, pour présenter l’amendement n° 187 rectifié bis.
Là encore, la disposition prévue par ces amendements identiques réduirait la portée effective de l’article 12.
Le Gouvernement a entendu la préoccupation des PME, puisque la poursuite de l’activité et la pérennité des emplois font partie des critères d’agrément. Les PME n’auront donc pas à souffrir du présent article.
C’est la raison pour laquelle la commission demande le retrait de ces amendements identiques ;…
La parole est à Mme Marie-Hélène Des Esgaulx, pour explication de vote.
Ne pas tenir compte de la taille de l’entreprise, c’est ne rien comprendre à l’économie !
Les amendements ne sont pas adoptés.
L’article 12 est adopté.
I. – Le code général des impôts est ainsi modifié :
A. – Le 6 de l’article 145 est complété par un k ainsi rédigé :
« k) Aux produits des parts de sociétés immobilières inscrites en stock à l’actif de sociétés relevant du régime prévu au 1° du I de l’article 35. » ;
B. – Le 1 de l’article 210 A est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque la société absorbante a acquis les titres de la société absorbée moins de deux ans avant la fusion, l’éventuelle moins-value à court terme réalisée à l’occasion de l’annulation de ces titres de participation n’est pas déductible à hauteur du montant des produits de ces titres qui a ouvert droit à l’application du régime prévu aux articles 145 et 216 depuis leur acquisition. » ;
C. – Le a ter du I de l’article 219 est ainsi modifié :
1° La première phrase du deuxième alinéa est complétée par les mots : «, à l’exception des moins-values afférentes aux titres de ces sociétés à hauteur du montant des produits de ces titres qui a ouvert droit à l’application du régime prévu aux articles 145 et 216 au cours de l’exercice au titre duquel ces moins-values ont été constatées et des cinq exercices précédents » ;
2° Le quatrième alinéa est complété par les mots : «, à l’exception des provisions pour dépréciation des titres de sociétés mentionnés à la première phrase du deuxième alinéa à hauteur du montant des produits de ces titres qui a ouvert droit à l’application du régime prévu aux articles 145 et 216 au cours de l’exercice au titre duquel les provisions ont été comptabilisées et des cinq exercices précédents » ;
D. – Le troisième alinéa de l’article 223 B est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Lorsque les titres mentionnés à la première phrase du deuxième alinéa du a ter du I de l’article 219 sont conservés pendant au moins deux ans, leur prix de revient est diminué, pour la détermination de la moins-value de cession, du montant des produits de participation y afférents dont le montant a été retranché du résultat d’ensemble en application du présent alinéa, au cours de l’exercice au titre duquel cette moins-value a été constatée et des cinq exercices précédents. » ;
E
II. – Le I s’applique aux exercices clos à compter du 4 juillet 2012.
L’amendement n° 36, présenté par M. Marc, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Alinéa 3
Remplacer les mots :
relevant du régime prévu au
par les mots :
qui exercent une activité de marchand de biens au sens du
La parole est à M. le rapporteur général.
L’amendement est adopté.
L’article 13 est adopté.
I. – Le code général des impôts est ainsi modifié :
1° L’article 39 est complété par un 13 ainsi rédigé :
« 13. Sont exclues des charges déductibles pour l’établissement de l’impôt les aides de toute nature consenties à une autre entreprise, à l’exception des aides à caractère commercial. » ;
2° Le 4 du I de l’article 1586 sexies est ainsi modifié :
a) Après le mot « exploitation », la fin du quatrième alinéa du a est supprimée ;
b) Le huitième alinéa du b est supprimé.
II. – Le I s’applique aux exercices clos à compter du 4 juillet 2012.
L’amendement n° 93, présenté par M. Marini, est ainsi libellé :
Alinéa 3
Compléter cet alinéa par les mots :
et de celles consenties aux entreprises soumises à l’une des procédures collectives du livre VI du code de commerce
La parole est à M. Philippe Marini.
L’article 14 complète l’article 39 du code général des impôts, relatif aux charges déductibles et non déductibles, afin de rendre non déductibles les « aides de toute nature consenties à une autre entreprise, à l’exception des aides à caractère commercial ». Cet objectif est légitime et s’inscrit dans la longue lignée des dispositifs anti-abus existants qui ont été renforcés ces derniers mois.
Toutefois, je souhaite mettre l’accent sur les entreprises en difficulté, en particulier celles qui font l’objet d’une procédure collective prévue par le livre VI du code de commerce. Il me semble en effet préférable d’insérer cette précision dans le projet de loi de finances rectificative, afin de garantir à ces entreprises la liberté de trouver les meilleures conditions susceptibles de préserver l’emploi et de maintenir ce qui peut l’être et, ainsi, d’éviter un carcan excessivement contraignant.
Monsieur le ministre délégué, pouvez-vous prendre des engagements en ce sens et nous rassurer ? Dès lors, cet amendement ne serait peut-être pas indispensable. À vous de nous dire si les entreprises faisant l’objet d’une procédure collective bénéficieront bien d’un traitement spécifique.
La commission souhaite connaître la position du Gouvernement sur cet amendement. La préoccupation exprimée par Philippe Marini est légitime : la portée d’un dispositif anti-abus doit être limitée au strict nécessaire. En l’espèce, des questions se posent sur lesquelles le Gouvernement pourrait nous éclairer, de manière à nous permettre d’émettre un avis définitif.
L’objectif du Gouvernement, au travers de cet article, est de lutter contre les abus liés aux subventions et aux abandons de créances.
L’amendement de M. Marini vise à protéger les entreprises en difficulté, ce qui est parfaitement recevable. Toutefois, à nos yeux, il comporte quelques défauts, notamment parce qu’il est trop large et qu’il crée un régime de déductibilité plus favorable qu’antérieurement. Le Gouvernement s’en remet donc à la sagesse du Sénat. Si la Haute Assemblée devait adopter cet amendement, il serait bienvenu d’y retravailler dans le cadre de la commission mixte paritaire.
À la lumière de ces éléments, la commission émet également un avis de sagesse. Nous sommes disposés à faire vivre cet amendement et à lui donner toute perspective d’aboutissement.
L'amendement est adopté.
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 50 est présenté par Mme Des Esgaulx.
L'amendement n° 188 rectifié bis est présenté par MM. P. Dominati, Cambon, J. Gautier, Beaumont, Adnot et Dassault et Mlle Joissains.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 3
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Cette disposition n’est pas applicable, dès lors que l’entreprise qui consent l’aide démontre que l’entreprise bénéficiaire a inclus cette aide dans son résultat imposable.
La parole est à Mme Marie-Hélène Des Esgaulx, pour présenter l’amendement n° 50.
Le sujet est un peu technique, mais il faut comprendre que, là encore, le but de la proposition est d’éviter de pénaliser les PME en difficulté, ce soutien financier constituant la première des demandes des banques pour contribuer à un plan de redressement.
Le présent amendement cible davantage la mesure afin d’atteindre l’objectif anti-abus visé par l’article 14, tout en évitant les conséquences économiques désastreuses pour les PME.
La parole est à M. Philippe Dominati, pour présenter l’amendement n° 188 rectifié bis.
La commission a émis un avis défavorable sur ces deux amendements identiques, car leur adoption reviendrait à priver d’effet l’article 14. En pratique, l’aide consentie à « la mère » est toujours incorporée aux résultats imposables de « la fille ».
Le Gouvernement considère également que l’adoption de ces amendements risquerait de priver la mesure des effets recherchés.
La parole est à Mme Marie-Hélène Des Esgaulx, pour explication de vote.
Monsieur le ministre, monsieur le rapporteur général, je ne suis pas du tout d’accord avec vous. Les exemples visés par ces amendements existent réellement et ne sont pas des cas d’école. D’ailleurs, s’il n’en était ainsi, nous n’aurions pas pris la peine de présenter cet amendement.
Je ne vois vraiment pas ce qui peut vous gêner dans notre proposition. Vous voulez éviter les abus, mais, en l’espèce, les aides étant intégrées à un résultat imposable, on ne peut pas considérer qu’il y a abus. Votre position n’est vraiment pas logique !
Les amendements ne sont pas adoptés.
L'amendement n° 16 rectifié quater, présenté par Mmes Lamure et Procaccia, MM. Milon et Cardoux, Mme Cayeux, M. Gilles, Mmes Bruguière, Deroche et Des Esgaulx, MM. Pierre, Buffet et P. Leroy et Mme Hummel, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 3
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Les dispositions précitées ne s’appliquent pas aux petites et moyennes entreprises, au sens européen, c’est-à-dire employant moins de 250 personnes et réalisant un chiffre d’affaires inférieur à 40 millions d’euros. »
La parole est à Mme Catherine Procaccia.
L’article 14 prévoit de rendre non déductibles du bénéfice imposable des entreprises, à l’impôt sur le revenu et à l’impôt sur les sociétés les aides à caractère financier qu’elles accordent à d’autres entreprises, le plus souvent à leurs filiales.
À l’origine, deux options ont été envisagées. L’une visait à interdire la déduction des seules aides à caractère financier consenties à des filiales étrangères. L’autre conduisait à interdire ces déductions, que les aides soient consenties à des filiales françaises ou étrangères. Dans ce dernier cas, la précision sur les abandons de créances était prévue dans l’article 1586 sexies du code général des impôts ; il conviendrait alors de la supprimer.
Au final, le second choix a été privilégié au motif que la première option exposait la France à un risque d’incompatibilité communautaire sur le fondement de la liberté d’établissement.
Toutefois, si l’objectif anti-abus est louable, ce système pénalisera les PME et notamment celles en difficulté.
Aussi, cet amendement vise à exclure du dispositif prévu par l’article 14 les PME au sens européen, c’est-à-dire celles de moins de 250 salariés.
L’article 14 s’applique à des groupes d’entreprises, à savoir au moins une « mère » et une « fille ».
Les auteurs de l’amendement entendent exclure les PME, mais ils ne précisent pas s’il s’agit de la « mère », de la « fille » ou des deux.
Cette imprécision rédactionnelle me semble donc être de nature à le disqualifier, mais la commission des finances a néanmoins souhaité connaître l’avis du Gouvernement. M. le ministre sera peut-être en mesure de donner quelques précisions susceptibles de rassurer Mme Procaccia.
Le Gouvernement est défavorable à cet amendement puisque son adoption risque de priver en grande partie l’article 14 de son effet. Vous avez déjà proposé, à l’occasion de la discussion d’un article précédent, cette exclusion du champ d’application de la loi des PME, dont la définition communautaire est très large. Elles pourraient donc continuer leurs pratiques d’optimisation, notamment en faisant remonter en France les pertes subies à l’étranger.
L'amendement n'est pas adopté.
Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 198 rectifié bis, présenté par MM. P. Dominati, Cambon, J. Gautier, Beaumont et Dassault et Mlle Joissains, est ainsi libellé :
Alinéa 7
Rédiger ainsi cet alinéa :
II. – Le I s’applique aux opérations engagées à compter du 1er août 2012.
La parole est à M. Philippe Dominati.
Le dispositif proposé par l’article 14 tend à prévoir l’interdiction de la déduction des aides pour la société donatrice pour les exercices clos à compter du 4 juillet. Or une entreprise donatrice peut avoir déjà engagé des opérations avant cette date, dans un exercice courant encore. De fait, alors qu’elle comptait sur cette aide déductible pour se maintenir, le texte envisage de mettre à mal sa trésorerie interne.
Par exemple, sur un exercice qui sera clôturé le 31 août 2012, la société A a accordé, le 4 avril 2012, une subvention de 100 000 euros à une société B, visant le comblement du net négatif de cette dernière. La société A devait donc bénéficier d’une déduction de 100 000 euros de son résultat imposable. Or l’opération engagée antérieurement, non seulement au 4 juillet, mais également à l’élection présidentielle et aux annonces du nouveau gouvernement, n’est plus déductible, du fait que l’exercice est clos après le 4 juillet.
Afin de ne pas remettre en cause la déductibilité des aides, il convient de modifier l’entrée en application en prévoyant que la disposition s’appliquera à compter des opérations engagées à partir du 4 juillet, sans tenir compte de la clôture de l’exercice.
Monsieur le ministre délégué, j’ai présenté cet exemple détaillé pour vous prouver que, au travers tant de l’article 12 que de l’article 14, vous imposez aux PME un véritable carcan, et ce au nom de la clause que vous appelez désormais anti-abus, mais qui vise en l’occurrence un dispositif qui n’était que le simple respect de la loi. Plus grave, c’est à vous-même que vous imposez ces contraintes dogmatiques.
En effet, en application de l’article 12, vous vous privez pratiquement des moyens de donner un agrément, nonobstant une vague référence à l’emploi et vous manifestez le même état d’esprit à l’égard des amendements proposés à l’article 14.
Je vous ai donc fait la démonstration technique de ce qu’allait entraîner l’application de ces dispositions, à savoir, in fine, la destruction d’emplois. Je m’attends, certes, aux mêmes réponses que précédemment, mais nous tenions, Mme Des Esgaulx et moi-même, à attirer votre attention sur des cas concrets, qui auraient mérité une écoute pragmatique.
L'amendement n° 51, présenté par Mme Des Esgaulx, est ainsi libellé :
Alinéa 7
Rédiger ainsi cet alinéa :
II. - Le I s’applique aux opérations engagées à compter du 4 juillet 2012.
La parole est à Mme Marie-Hélène Des Esgaulx.
Cet amendement a été excellemment défendu par M. Dominati, mais je souhaite insister de nouveau sur les méfaits de la rétroactivité, laquelle me choque d’une manière générale. Je souhaiterais donc que nous soyons très attentifs aux problèmes qu’elle pose.
En l'occurrence, il me paraît essentiel de ne pas remettre en cause la déductibilité des abandons de créances antérieurs au 4 juillet 2012. Nous n’avons pas le droit d’en décider autrement. Des engagements ont été pris, il faut les respecter. C’est la raison pour laquelle j’ai déposé cet amendement n° 51.
Le problème est simple et je ferai le même type de réponse que celle que j’ai faite aux amendements portant sur l’article 12.
Il s’agit cette fois-ci de supprimer une rétroactivité. J’estime qu’il n’y a pas lieu de le faire, car nous risquerions d’atténuer la portée de l’article 14. Dans ces conditions, la commission n’a pu qu’émettre un avis défavorable sur ces deux amendements.
Le Conseil d’État a considéré que cet article ne posait pas de problème de rétroactivité. Il est assez fréquent que le fait générateur de l’impôt soit fixé à la clôture de l’exercice social, donc par forcément au moment de la promulgation de la loi. Le Gouvernement est défavorable à ces deux amendements.
Tous les amendements déposés sur l’article 14 visent à vider celui-ci de sa substance et à faciliter en fait les montages financiers qui existent entre sociétés mères et sociétés filles.
C’est aussi vrai d’ailleurs pour les transferts de bénéfices et autres manœuvres. Tel est le but que vous visez. Vous avez dû recevoir des liasses toutes préparées puisque vous présentez des amendements identiques, mis à part la date sur laquelle vous ne semblez pas d’accord.
En tout cas, nous ne pouvons pas accepter de voir l’article 14 vidé ainsi de son contenu. Nous voterons donc contre tous ces amendements.
N’étant pas une grande spécialiste du droit fiscal, je vais simplement m’exprimer sur la rétroactivité.
Jean Arthuis et moi-même avons voté tout à l’heure un amendement qui portait déjà sur ce problème, amendement qui n’a pas été adopté. Nous comprenons bien la position du Conseil d’État, mais, dans nos territoires, nos permanences, nous entendons les préoccupations de tous ceux qui souhaitent un minimum de stabilité juridique en matière budgétaire et fiscale.
Le fait d’imposer des mesures rétroactives dans une loi de finances rectificative, même si elles sont juridiquement correctes, provoque l’incompréhension, tout le monde n’étant pas conseiller d’État…
Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, n'adopte pas l'amendement.
L'amendement n'est pas adopté.
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 52 est présenté par Mme Des Esgaulx.
L'amendement n° 189 est présenté par MM. P. Dominati, Cambon, J. Gautier, Beaumont et Dassault et Mlle Joissains.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
I. - Compléter cet article par un III ainsi rédigé :
III. - À la seconde phrase du deuxième alinéa de l’article 216 A, après les mots : « en numéraire », sont insérés les mots : « en nature ».
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Marie-Hélène Des Esgaulx, pour présenter l’amendement n° 52.
Cet amendement vise à permettre aux sociétés mères de bénéficier des dispositions de l’article 216 A du code général des impôts pour ce qui concerne les apports en nature. Au demeurant, je suis sans illusion sur le sort qui lui sera réservé.
La parole est à M. Philippe Dominati, pour présenter l’amendement n° 189.
Le dispositif de l’article 216 A du code général des impôts est vertueux, puisqu’il conditionne un avantage fiscal à une recapitalisation de la filiale. Je n’ai pas eu le loisir de retrouver les raisons pour lesquelles le législateur a souhaité que la recapitalisation intervienne en numéraire ou par conversion de créances, et non en nature.
Nous pouvons néanmoins les deviner, car l’apport en nature, même placé sous le contrôle d’un commissaire aux apports, présente un caractère de solidité moins affirmé que l’apport en numéraire. Une entreprise peut-elle être sauvée uniquement par des apports en nature ? J’en doute ! Néanmoins, la commission, dont l’avis est plutôt négatif, a souhaité entendre sur ce point le Gouvernement, qui pourra peut-être confirmer son impression.
En effet, monsieur le rapporteur général, les entreprises en difficulté ont moins besoin d’apports en nature que d’apports en numéraire ou en abondement de créances. Le Gouvernement n’est donc pas favorable à une extension du dispositif de l’article 216 A du code général des impôts aux apports en nature.
Pour répondre à votre question, monsieur le rapporteur général, je dirai que des stocks qui n’appartiennent pas à l’entreprise peuvent constituer un apport en nature susceptible d’aider celle-ci.
Les amendements ne sont pas adoptés.
L'article 14 est adopté.
I. – Après le 2 de l’article 39 quaterdecies du code général des impôts, il est inséré un 2 bis ainsi rédigé :
« 2 bis. La moins-value résultant de la cession, moins de deux ans après leur émission, de titres de participation acquis en contrepartie d’un apport réalisé et dont la valeur réelle à la date de leur émission est inférieure à leur valeur d’inscription en comptabilité n’est pas déductible, dans la limite du montant résultant de la différence entre la valeur d’inscription en comptabilité desdits titres et leur valeur réelle à la date de leur émission. »
II. – Le I s’applique aux cessions de titres reçus en contrepartie d’apports réalisés à compter du 19 juillet 2012.
L'amendement n° 219, présenté par M. Delattre et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Après le mot :
apport
insérer les mots :
, autre que de créances commerciales,
La parole est à M. Francis Delattre.
Il s’agit d’un amendement purement technique.
Lorsqu’une entreprise est en difficulté, elle essaie souvent de reconstituer des fonds propres. L’Assemblée nationale a pris en compte un certain nombre d’apports, mais s’est efforcée d’écarter les valeurs d’apports contestables, notamment sur des participations qui ont moins de deux ans et dont on sait tous ici qu’elles peuvent éventuellement faire l’objet d’acrobaties fiscales.
Si nous pouvons tous nous retrouver sur l’esprit qui préside à cet article, le fait de ne pas avoir distingué les créances commerciales a créé une difficulté.
Il serait tout de même souhaitable de faire en sorte que les vraies créances commerciales, parfaitement établies, puissent être réintégrées dans la valeur réelle, pour conforter la capitalisation d’une entreprise en difficulté. C’est souvent ainsi que procèdent les entreprises mères et les filiales.
Il semblerait que cet amendement, dont M. le rapporteur général a reconnu qu’il était non seulement d’une très grande complexité technique, mais aussi très utile, ait reçu un avis favorable de la commission, ce dont je me réjouis.
Cet amendement vise à exempter du dispositif les recapitalisations par incorporation de créances commerciales. Il est de nature très technique, nous en avions convenu en commission.
Vous le savez, monsieur Delattre, nous avons manqué du temps nécessaire pour l’expertiser dans le détail. C’est la raison pour laquelle j’avais souhaité connaître l’avis du Gouvernement. Dans ces conditions, monsieur le ministre, pouvez-vous préciser votre position ?
Le Gouvernement n’est pas favorable à cet amendement.
Tout d’abord, une telle disposition, si elle était adoptée, reviendrait à accentuer les différences de traitement entre les apports et les abandons de créance. Or celles-ci, on le sait, sont certainement l’une des causes, sinon la plus importante, des maux que nous tentons précisément de traiter.
Par ailleurs, la disposition est parfaitement contraire à l’objectif anti-abus visé au présent article : il s’agit précisément de limiter l’optimisation fiscale liée à la cession de sociétés en difficulté. En tant qu’élus, nous avons probablement tous rencontré ce cas de figure. Des sociétés en difficulté sont reprises dans des conditions telles que le repreneur, en réalité, réalise plus une opération fiscale qu’un projet industriel. En matière d’emploi, ce sont de véritables mirages, qui finissent par se dissiper. Restent l’optimisation fiscale, puis les licenciements et la disparition des entreprises.
Je ne crois vraiment pas que cet amendement s’inscrive dans la philosophie du projet gouvernemental.
J’ai bien compris que le dispositif anti-abus pouvait être affaibli par cette modalité particulière. Dans la mesure où la portée de l’article ne doit pas être atténuée par ses modalités de mise en œuvre, je ne peux que recommander le rejet de cet amendement. Nous avons, par le passé, observé de trop nombreux abus en la matière. Il convient donc de rester fermes.
J’ai le regret de dire, sous le contrôle de M. le président de la commission des finances, que vous aviez donné, monsieur le rapporteur général, un avis favorable sur cet amendement, que nous avions adopté. Tous les membres de la commission des finances sont là pour en témoigner.
La commission souhaitait demander l’avis du Gouvernement, mon cher collègue !
Cela étant, les discussions avec le Gouvernement ont dû faire évoluer votre position, monsieur le rapporteur général !
La commission a demandé à connaître l’avis du Gouvernement, mon cher collègue !
Quoi qu’il en soit, on sait très bien que les entreprises en difficulté ont du mal à faire rentrer les créances. Soit celles-ci sont valables et peuvent contribuer au renforcement des capitaux propres dont l’entreprise en difficulté a besoin pour être relancée, soit elles ne le sont pas. Or je ne vois pas pourquoi les créances valables seraient frappées plus particulièrement d’un interdit. C’est totalement contraire au droit du commerce !
À mon sens, l’adoption de cet amendement ouvrirait des possibilités plus grandes dans certains cas. Au demeurant, si vous pensez que les créances commerciales doivent être écartées, c’est votre responsabilité !
Cher collègue Delattre, la majorité de la commission avait souhaité s’en remettre à l’avis du Gouvernement, que nous venons d’entendre.
Sur le fond, monsieur le ministre délégué au budget, nous aurions besoin de quelques explications complémentaires. Je redoute en effet que ce dispositif ne nous conduise, dans certains cas, à jeter le bébé avec l’eau du bain.
Cet article a dû être réécrit par notre collègue Christian Eckert, rapporteur général à l’Assemblée nationale, ce qui a permis, me semble-t-il, d’apporter une clarification particulièrement utile. Si on allait trop loin, le risque serait de taxer comme un bénéfice dans une filiale un coup d’accordéon classique sur le capital de l’entreprise, décidé pour compenser des pertes ayant rendu les capitaux propres de la filiale négatifs.
Compte tenu de la rédaction adoptée par l’Assemblée nationale, si je comprends bien, la moins-value constatée par la maison mère lors d’une cession ultérieure à un repreneur pour un euro symbolique n’est plus déductible.
Je me pose dès lors une question.
En effet, en vertu de l’article 14, qui prévoit la non-déductibilité des abandons de comptes courants, et du présent article 15, une société mère désireuse de combler les pertes de sa filiale en difficulté pour faciliter sa reprise fait une perte non déductible, alors que, si la filiale dépose son bilan, la perte des créances sur la filiale est, me semble-t-il, déductible.
Il est à craindre qu’avec ce type de mesure certains actionnaires ne soient conduits à accélérer le dépôt de bilan et le règlement de la question sous l’égide du tribunal de commerce. Je ne sais pas si c’est une bonne ou une mauvaise chose, cela dépendra des circonstances et des cas particuliers, mais, en tout état de cause, en cas de dépôt de bilan, de procédure collective, la perte des créances sur la filiale deviendra déductible.
Je me demande tout naturellement si ce ne sont pas les emplois qui risqueront d’en pâtir et finalement d’être victimes de l’évolution de l’entreprise.
Dans ce contexte, l'amendement de Francis Delattre mériterait d'être considéré car, à moins que je n’en aie pas fait une lecture correcte tant le sujet est complexe, il me semble être en phase avec l'article 14, qui prévoit la non-déductibilité des « aides de toute nature consenties à une autre entreprise, à l’exception des aides à caractère commercial ». En effet, notre collègue, me semble-t-il, par souci de clarification, a fait le choix de transposer à l'article 15 un dispositif frère, en quelque sorte, de celui qui est prévu à l'article 14.
Monsieur le ministre, nous aurions besoin que vous nous apportiez des éclaircissements afin d’être bien certains que ce dispositif, dont on ne saurait contester le principe et la finalité du point de vue du contrôle fiscal et de la lutte anti-abus, ne soit pas de nature, dans certains cas, à aggraver les difficultés que rencontre actuellement le tissu économique.
Notre collègue Francis Delattre a affirmé à l’instant que le rapporteur général avait émis hier, lors de l’examen des amendements en commission, un avis favorable sur celui qu’il vient de nous présenter. Or, comme l’a également fait remarquer Marie-France Beaufils, le compte rendu de commission atteste bien du fait que le rapporteur général s’en est remis à l’avis du Gouvernement. Je tenais à le préciser.
L'amendement n'est pas adopté.
L'article 15 est adopté.
L'amendement n° 220, présenté par M. Delattre et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, est ainsi libellé :
I. - Après l'article 15
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le c du 2 du I de l'article 163 quatervicies du code général des impôts est ainsi rédigé :
« c) L'excédent correspondant à des rachats de cotisations ou de primes à l'un des régimes mentionnés au c du 1 du présent I effectués par les personnes affiliées à ces régimes au 31 décembre 2004 ou ayant la qualité de fonctionnaire ou d'agent public en activité et affiliées à ces régimes après le 31 décembre 2004 n'est pas réintégré dans la limite de deux années de cotisations, lorsque ce montant des cotisations ou primes excède la limite définie au a du présent 2 ».
II. - Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
… - La perte de recettes résultant pour l'État est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Francis Delattre.
Le présent amendement vise à modifier l’article 163 quatervicies du code général des impôts afin de pérenniser la possibilité de déduction fiscale supplémentaire de deux années de cotisations de rachat.
On dénombrait, en 2009, 37 532 personnes relevant du régime Préfon et des régimes assimilés – Corem et CGOS – ayant procédé à des cotisations de rachat en 2008. Ce nombre est à comparer aux 375 000 affiliés au régime Préfon.
Puisqu’il est question de la Préfon, je ne doute pas que cet amendement bénéficiera d’un soutien unanime de la part des membres de cette assemblée !
Sourires.
Cet amendement appelle plusieurs observations.
Premièrement, cette dérogation a été conçue comme transitoire dès l’origine, couvrant une période de huit années.
Deuxièmement, il apparaît que le montant global de l’enveloppe de déductions, soit 28 281 euros en 2012, permet de couvrir tant les versements annuels que les rachats.
Troisièmement, la cible visée est restreinte ; moins de 38 000 personnes, affiliées à la Préfon et aux régimes assimilés, ont versé des cotisations de rachat en 2008. Ce nombre est à comparer aux 375 000 affiliés à la Préfon, soit 10 % environ.
S’agissant du nombre de personnes ayant bénéficié de l’enveloppe supplémentaire de déduction, je n’en ai malheureusement pas eu communication.
Quatrièmement, concernant le coût de la dérogation, la seule donnée disponible est le montant de la dépense fiscale correspondant à la déduction des cotisations pour l’ensemble des dispositifs relevant de l’article 163 quatervicies – Préfon, Corem, CGOS et PERP. Il s’élevait en 2011 à 390 millions d’euros.
Pour toutes ces raisons, je ne suis pas certain que cette mesure soit nécessaire. C’est pourquoi la commission serait tentée d’émettre un avis défavorable. Toujours est-il qu’elle s’en remettra à l’avis du Gouvernement.
Un contrat à durée déterminée a été conclu. L’année 2012 marque le terme de ce contrat et je crois qu’il est toujours bon de respecter tous les termes d’un contrat, notamment sa durée.
Cette période transitoire a permis d’atteindre l’objectif qui avait été fixé. Si celle-ci devait être prolongée, il est permis de penser que c’est alors un autre objectif qui serait visé. Si oui, lequel ?
En outre, à l'époque où cette possibilité de déduction fiscale fut offerte, le PERP n'existait pas. Aussi, l’adoption par le Sénat de cet amendement créerait une distorsion, une rupture d'égalité entre les affiliés à la Préfon et ceux qui ont souscrit un PERP. Ce ne serait pas admissible, sauf à accorder des avantages comparables à ceux qui disposent d'un régime de retraite complémentaire autre que la Préfon.
Enfin, je rappelle qu'il est encore possible, au titre de l'année 2012, de déduire près de 30 000 euros. C’est un avantage important qu'il est sans doute inutile de prolonger.
Aussi, monsieur le sénateur, il serait sage de retirer cet amendement. À défaut, le Gouvernement sera obligé d'émettre un avis défavorable.
L'amendement n° 220 est retiré.
Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L'amendement n° 168 rectifié, présenté par MM. Mézard, Collin, C. Bourquin, Fortassin, Barbier, Baylet et Bertrand, Mme Laborde et MM. Mazars, Requier, Tropeano, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :
Après l'article 15
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le chapitre 7 du titre 3 du livre 1 du code de la sécurité sociale est complété par une section 12 ainsi rédigée :
« Section 12
« Contribution sur les entreprises de vente en gros de tabacs
« Art. L. 137-27. – I. –Les personnes mentionnées au 2° du I de l’article 302 G ainsi qu’aux articles 302 H ter et 565 du code général des impôts et les personnes qui leur fournissent des produits visés à l’article 564 decies du même code sont assujetties à une contribution sur leur chiffre d’affaires hors taxes réalisé en France au titre de l’activité liée à ces produits.
« L’assiette de la contribution est composée de deux parts. La première part est constituée par le chiffre d’affaires hors taxes réalisé par l’entreprise au cours de l’année civile ; la seconde part est constituée par la différence entre le chiffre d’affaires hors taxes réalisé au cours de l’année civile et celui réalisé l’année civile précédente.
« Le montant de la contribution est calculé en appliquant un taux de 1, 5 % à la première part et un taux de 25 % à la seconde part.
« Lorsqu’une entreprise est soumise pour la première fois à la contribution, elle n’est redevable la première année que de la première part. En ce qui concerne le calcul de la seconde part pour la deuxième année d’acquittement de la contribution, et dans le cas où l’entreprise n’a pas eu d’activité commerciale tout au long de la première année civile, le chiffre d’affaires pris en compte au titre de la première année est calculé au prorata de la durée écoulée afin de couvrir une année civile dans son intégralité.
« II. – La contribution est versée de manière provisionnelle le 1er septembre de chaque année, pour un montant correspondant à 80 % de la contribution due au titre de l’année civile précédente. Une régularisation annuelle intervient au 31 mars de l’année suivante, sur la base du chiffre d’affaires réalisé pendant l’année civile et déclaré le 15 février de l’année suivante.
« III. – La contribution est recouvrée et contrôlée en application des dispositions prévues aux articles L. 138–20 à L. 138–23. Les modalités particulières de recouvrement de la contribution, notamment les pénalités, les taxations provisionnelles ou forfaitaires, sont précisées par décret en Conseil d’État.
« IV. – Le produit de la contribution est affecté à la Caisse nationale de l’assurance maladie des travailleurs salariés. »
L'amendement n° 169 rectifié, également présenté par MM. Mézard, Collin, C. Bourquin, Fortassin, Barbier, Baylet et Bertrand, Mme Laborde et MM. Mazars, Requier, Tropeano, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :
Après l'article 15
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après la section 2 bis du chapitre 5 du titre 4 du livre 2 du code de la sécurité sociale, il est inséré une section 2 ter ainsi rédigée :
« Section 2 ter
« Contribution sur le chiffre d’affaires des entreprises de vente en gros de tabacs
« Art. L. 245-6-1. – Il est institué au profit de la Caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés une contribution des personnes mentionnées au 2° du I de l’article 302 G ainsi qu’aux articles 302 H ter et 565 du code général des impôts et des personnes qui leur fournissent des produits visés à l’article 564 decies du même code au titre de l’activité liée à ces produits.
« La contribution est assise sur le chiffre d'affaires hors taxes réalisé en France au cours d'une année civile.
« Le taux de la contribution est fixé à 5 %. La contribution est exclue des charges déductibles pour l'assiette de l'impôt sur le revenu ou de l'impôt sur les sociétés.
« La contribution est versée de manière provisionnelle le 15 avril de l'année au titre de laquelle elle est due, pour un montant correspondant à 80 % du produit du chiffre d'affaires réalisé au cours de l'année civile précédente par le taux défini au troisième alinéa. Une régularisation intervient au 15 avril de l'année suivant celle au titre de laquelle la contribution est due.
« Les modalités d'application du présent article sont définies par décret en Conseil d'État. »
La parole est à M. Jacques Mézard, pour défendre ces deux amendements.
L’amendement n° 168 rectifié, comme l’amendement n° 169 rectifié, répond à un double objectif.
Il vise tout d’abord à apporter des recettes supplémentaires à l’État, suivant une logique identique à celle qui sous-tend ce projet de loi de finances rectificative, puisqu’il s’agit de redresser nos comptes publics en faisant contribuer ceux qui le peuvent le plus. Monsieur le ministre, c’est ce que vous appelez fort justement la justice fiscale.
Tout comme vous avez proposé aux articles 7 et 8 de taxer le secteur financier ou les groupes pétroliers, nous vous proposons, avec cet amendement, de taxer une industrie qui ne contribue que trop peu à l’effort collectif, à savoir celle du tabac.
Cette industrie continue de s’enrichir sur le dos de la santé publique et au détriment de nos comptes sociaux. Elle s’enrichit d’autant plus que sont décidées des augmentations successives des prix du tabac, ce qu’ont démontré plusieurs enquêtes.
Cet amendement correspond donc tout à fait à la logique de justice fiscale. En outre, il s’attaque à une industrie qui est directement liée à plus de 60 000 morts par an dans notre pays. Le tabac est en effet la première cause de mortalité.
Faut-il permettre, monsieur le ministre, mes chers collègues, à l’industrie du tabac de continuer de s’enrichir sans participer aux dépenses croissantes de santé publique ? D’une certaine façon, plus cette industrie gagne, plus cela coûte à la Nation.
Le coût social pour la France est estimé à 47 milliards d’euros, un montant que les recettes fiscales aujourd’hui générées par la taxation du tabac, de l’ordre de 11 milliards d’euros, sont bien loin de couvrir.
Vous avez confirmé, monsieur le ministre, une hausse de 6 % du prix du tabac décidée par le gouvernement précédent pour le mois de septembre. Mais, si cette augmentation garantit de nouvelles recettes pour l’État, ce sont surtout les industriels de ce secteur qui en tireront le plus grand bénéfice.
C’est pourquoi je propose, par cet amendement, de mettre à contribution les fabricants de tabac à travers une taxe sur leur chiffre d’affaires.
Je me permets de vous rappeler, monsieur le ministre, que le principe d’une telle contribution, calquée sur celle qui existe déjà et qui est à la charge des établissements de vente en gros de spécialités pharmaceutiques, a été adopté, à plusieurs reprises, par la commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale, avec les voix de l’opposition d’hier, dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale, avant d’être rejeté par l’ancienne majorité.
Nous vous proposons donc deux versions d’une telle contribution sur les entreprises de vente en gros de tabac. La première, contenue dans le présent amendement, prévoit une taxation assise sur deux parts : le chiffre d’affaires et la variation de celui-ci. Cela nous semble en effet, la version la plus à même de répondre aux enjeux de santé et de finances publiques que j’ai mentionnés.
Si cet amendement n’était pas adopté, nous vous inviterions alors, mes chers collègues, à voter l’amendement de repli n° 169 rectifié.
L’amendement n° 168 rectifié vise à créer une taxe sur les fabricants de tabac. Je demanderai à notre collègue de bien vouloir le retirer, pour la bonne et simple raison que, en l'état, cette taxe n'est pas compatible avec le droit communautaire, en particulier avec l'article 1er de la directive 2008/118/CE du 16 décembre 2008 relative au régime général d’accise. À défaut, la commission émettra un avis défavorable.
L'amendement n° 169 rectifié, cousin germain du précédent, pose lui aussi un problème de compatibilité avec le droit communautaire qui rendrait inapplicable le dispositif qu’il vise à mettre en place. Aussi, là encore, je ne peux que recommander à son auteur de bien vouloir le retirer.
Bien évidemment, il peut être tentant de voter l’amendement n° 168 rectifié ou, à défaut, l'amendement de repli n° 169 rectifié, car non seulement cette taxe permettrait à l’État de toucher des subsides supplémentaires, mais encore elle serait parée de toutes les vertus puisqu’elle répondrait à un objectif de santé publique.
Là encore, monsieur le sénateur, il faut sans doute résister à la tentation et, en premier lieu, pour des raisons juridiques. À cet égard, je souscris à l'argumentation que vient d'exposer M. le rapporteur général.
En outre, je considère que les hausses prévues pour cette année sont suffisantes. Comme vous le savez, la ministre des affaires sociales et de la santé présentera un plan de santé publique comportant une hausse du prix du tabac.
Au-delà de ces considérations, il faut bien savoir que les seules entreprises qui seraient alors contributrices seraient les entreprises demeurant sur le territoire national. Certes, il en reste peu, mais il en reste quand même. Les autres seraient évidemment épargnés. Ce n'est pas un argument qui plaide en faveur de l'adoption de cette taxe.
La comparaison que vous avez faite avec les entreprises de vente en gros de médicaments doit être maniée avec prudence, car les prix des produits dont il s'agit sont réglementés, cependant que le prix du tabac ne l'est pas, en dépit des hausses que peut décider d’appliquer l'État.
J'en termine par une dernière réflexion destinée à vous convaincre d'accepter de retirer non seulement l'amendement n° 168 rectifié, mais également l'amendement de repli n° 169 rectifié.
En effet, j'ai demandé aux services du ministère de l'économie et des finances de réfléchir à une restructuration des droits sur le tabac.
Vous le savez, la fiscalité sur le tabac comporte une part proportionnelle et une part fixe. Notre droit d'ailleurs se distingue du droit en vigueur dans les pays voisins dans la mesure où toute augmentation des prix décidée par la puissance publique aboutit de fait à favoriser les produits de moins bonne qualité, dont les prix sont plus faibles et dont certains estiment, à supposer que ce jugement ait une quelconque valeur scientifique, qu’ils sont encore plus nocifs que les autres. Il s’ensuit un déport du marché des produits les plus chers vers ceux qui le sont moins. C’est pourquoi il faut rapprocher notre fiscalité de celle qui est en vigueur chez nos voisins et modifier, pour l’inverser, la place qu’occupent la part proportionnelle et la part fixe, de sorte que toute augmentation des droits sur le tabac ait bien la conséquence voulue, à savoir une augmentation uniforme des prix du tabac quel que soit le prix initial de ces produits et sans que soient favorisés ceux qui peuvent être objectivement considérés comme plus préjudiciables à la santé publique.
Voilà la réflexion dans laquelle nous nous sommes engagés.
J’espère pouvoir présenter au Parlement cette restructuration des droits sur le tabac lors de la discussion du projet de loi de finances initiale pour 2013, qui, vous le devinez, devrait être dense eu égard aux nombreux engagements du Gouvernement.
Sous le bénéfice de cette information, le Gouvernement apprécierait que vous retiriez ces deux amendements. À défaut, et pour les raisons que j’ai indiquées, il serait contraint d’émettre un avis défavorable.
Monsieur le ministre, j’ai bien noté que vous travailliez à une restructuration des droits sur le tabac.
Il s’agit d’un vrai problème de santé publique, auquel s’ajoutent des préoccupations d’ordre économique pour nombre de nos concitoyens. Il est urgent de prendre en la matière des mesures fortes, peut-être plus que sur le kérosène…
Monsieur le ministre, je ne voudrais pas que les propos que je viens d’entendre ne s’envolent tel un nuage de fumée… §Cela étant, je vais vous faire confiance et je retire mes amendements.
Il s’agit donc de l’amendement n° 168 rectifié bis.
Vous avez la parole pour le défendre, monsieur Bas.
Monsieur Mézard, vous avez raison de dire qu’il y a urgence dans ce domaine. Or aucun des arguments présentés par M. le rapporteur général ou par M. le ministre ne m’ont convaincu.
Les arguments qui ont été avancés par M. le rapporteur général sont seulement d’ordre juridique. Or j’ai la conviction que ce problème juridique peut être résolu. En effet, la directive qui vient d’être citée ne saurait prévaloir sur les clauses générales du droit européen, qui permettent de prendre les mesures nécessaires à la protection de la santé des personnes. C’est bien l’impératif qui justifie l’amendement n° 168 rectifié que je viens de reprendre.
En réalité, cet argument juridique me paraît être un prétexte pour différer l’adoption d’une telle mesure, qui a notamment été examinée par l’Assemblée nationale depuis des années de la manière la plus approfondie, y compris sur le plan de sa conformité au droit européen.
La seconde raison qui a été invoquée, cette fois par M. le ministre, ne me paraît pas davantage convaincante, car le fait de remettre en chantier l’ensemble de la fiscalité sur le tabac ne doit pas nous dissuader, en attendant, d’adopter cette mesure, qui pourrait être un stimulant supplémentaire pour que cette refonte ait vraiment lieu.
Je ne mets pas en doute la parole de M. le ministre, mais quand je vois l’ensemble des sujets qui ont été reportés pour être examinés à l’occasion de la discussion du projet de loi de finances initiale pour 2013, …
… je crains fort que le Gouvernement ne soit pas en mesure de mener à bien tous ces projets, alors même que, comme le disait tout à l’heure Jacques Mézard, il est urgent, du point de vue de la santé publique, de dissuader la consommation du tabac.
La parole est à Mme Marie-Hélène Des Esgaulx, pour explication de vote.
Cet amendement est excellent, et je vais voter pour.
Monsieur le ministre, j’ai un peu de mal à vous croire dans la mesure où, depuis trois jours, vous évacuez tous les dossiers difficiles, j’entends par là tous les sujets gênants pour votre majorité. Chaque fois qu’un petit problème se profile, hop ! le magicien intervient, on arrête tout et on décide que c’est la loi de finances initiale qui réglera la question.
Si vous êtes sincère, il fallait alors, au lieu de présenter ce projet de loi de finances rectificative, engager immédiatement une discussion sur le projet de loi de finances initiale. En effet, nous allons mettre six mois à délibérer puisque vous comptez mettre dans ce projet de loi de finances toutes les réformes structurelles dont nous discutons actuellement et toutes les mesures correspondant aux annonces qui ont été faites depuis trois jours.
Monsieur le ministre, ce n’est pas très sérieux ! Je vais noter tous les engagements que vous avez pris, et je doute fort que vous les respectiez.
Le groupe de l’Union centriste et républicaine votera cet excellent amendement pour plusieurs raisons.
D’abord, il respecte un impératif de santé publique, nous sommes tous d’accord sur ce point.
Ensuite, à travers cette disposition, nous poursuivons l’incessant combat de notre ancienne collègue Anne-Marie Payet contre la consommation du tabac.
Enfin, monsieur le rapporteur général, le déficit public et celui de la sécurité sociale ne sont pas beaucoup plus conformes au droit communautaire que la mesure que nous nous apprêtons à voter !
Monsieur le ministre, il faut donner un signal fort à nos concitoyens face à ce fléau qui sévit dans toutes les couches de notre société. Les effets du tabagisme sont insidieux, et le médecin généraliste que je suis les a constatés, qu’il s’agisse de l’apparition de coronaropathies bien longtemps après l’arrêt du tabac ou de tumeurs cancéreuses. En outre, ce fléau touche de plus en plus les femmes et se traduit par un souci sociétal face à la façon dont il faut répondre à cette addiction.
Nous devons faire un effort tout à fait significatif dans le domaine de la prévention pour éviter que les générations futures ne connaissent ce que nous sommes en train de vivre.
C’est la raison pour laquelle je soutiendrai cet amendement.
Je soutiens à mon tour cet amendement.
L’ensemble du texte qui nous est soumis répond à une seule idée-force : pénaliser les salariés et ceux qui travaillent.
Tous les amendements que nous avons déposés pour améliorer le texte ont été repoussés. Avec l’élargissement de l’assiette de la taxe sur les transactions financières, nous avions tout à l’heure une bonne occasion de donner une impulsion, mais vous l’avez refusé.
Le présent amendement vise à donner une autre tonalité au texte en émettant un signal de pénalisation à l’encontre de la consommation de tabac, par l’intermédiaire de cette taxe sur les grossistes.
C’est la raison pour laquelle je vous incite, mes chers collègues, dans un esprit constructif, à adopter cet amendement.
Je suis en désaccord avec l’analyse de M. Bas sur le contexte juridique de ce débat.
Sur le plan communautaire, la situation est assez simple puisque les règles de calcul de la TVA ont fait l’objet d’une unification, même si les taux peuvent être variés. Ce système paraît assez logique au sein d’un marché commun. Il existe par ailleurs une fiscalité indirecte spécifique, les accises, qui est organisée de la même façon, c’est-à-dire que les règles de calcul sont homogènes et que les taux applicables dans chaque nation peuvent varier.
Il paraît assez cohérent que, si un type de produits ou de prestations fait l’objet d’une accise, les États ne peuvent pas adopter dans le même temps un système distinct de fiscalité directe pour les entreprises concernées. En agissant ainsi, on fausserait la règle commune édictée en matière d’accises. Le raisonnement est aussi simple que cela !
Nos travaux doivent porter – M. Mézard y réfléchira certainement – sur le niveau et le mode de calcul du droit indirect, qui est le vrai élément de dissuasion s’agissant de la consommation de tabac. En tout cas, prendre, en quelque sorte, ce « fusil à tirer dans les coins », c’est-à-dire agir sur le résultat de l’entreprise plutôt que sur le coût du produit, n’est sans doute pas la meilleure façon d’appliquer le droit européen.
Le débat qui s’est engagé sur la taxation du tabac est intéressant et on pourrait évidemment poursuivre sur ce sujet. Mais le texte que nous examinons est de nature budgétaire et, dans le contexte actuel, le souci du Gouvernement est de répondre à l’exigence d’équilibre du budget et à la recherche de solutions pour y parvenir.
Certes, l’opportunité de bénéficier de 200 millions d’euros supplémentaires, tel que proposé, aurait pu paraître alléchante, et le ministre aurait pu la saisir. Mais revenons à l’argumentation que la commission des finances a retenue et qui a été rappelée à l’instant par Alain Richard. Sans citer tous les principes juridiques concernés, je rappelle une nouvelle fois que cette mesure n’est pas compatible avec le droit communautaire et que c’est bien la raison pour laquelle nous nous privons, à regret, de la possibilité d’obtenir ces 200 millions d’euros supplémentaires.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 218, présenté par M. Delattre et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, est ainsi libellé :
Après l'article 15
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Au premier alinéa du II de l'article 1er de la loi n° 2011-1117 du 19 septembre 2011 de finances rectificative pour 2011, après la date : « du 1er février 2012, », sont insérés les mots : « à l'exception des biens fonciers ayant fait l'objet d'une promesse de vente enregistrée avant le 1er janvier 2011 et ».
II. - Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
… - La perte de recettes résultant pour l'État est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Francis Delattre.
Les lois de finances de 2011 et 2012 ont modifié assez profondément la fiscalité foncière. Cet amendement technique vise les transactions qui, sous forme de promesse de vente sans condition suspensive, ont été signées en 2010 et n’ont pu être définitivement conclues en raison d’un contentieux donnant lieu parfois à une procédure judiciaire.
Il s’agit donc d’une mesure d’équité afin que celui qui a conclu une promesse de vente, qui vaut vente en droit civil, puisse bénéficier des conditions fiscales en vigueur au moment de la signature du contrat.
Je suis défavorable à cet amendement parce qu’il tend à revenir sur la réforme du régime d’imposition des plus-values immobilières que nous avons adoptée l’année dernière sous le gouvernement Fillon, lors de l’examen du projet de loi de finances rectificative de septembre 2011, afin de prévoir une nouvelle dérogation, cette fois pour les biens fonciers ayant fait l’objet d’une promesse de vente avant le 1er janvier 2011.
Mon cher collègue, il faut éviter de détricoter le régime fiscal qui relève de l’ancienne majorité §
… sans imaginer une réforme globale dotée d’une cohérence d’ensemble. Des réflexions sont en cours à cet égard.
Le Gouvernement émet également un avis défavorable sur cet amendement. La réforme date de l’année dernière, et je suggère qu’un peu de stabilité fiscale soit assurée en la matière.
J’espère que vous serez tous sensibles à cette argumentation.
L'amendement n'est pas adopté.
Après la deuxième phrase du premier alinéa de l’article L. 31-10-2 du code de la construction et de l’habitation, est insérée une phrase ainsi rédigée :
« Cette condition ne s’applique pas à l’acquisition de logements destinés à être occupés par des titulaires de contrats de location-accession conclus dans les conditions prévues par la loi n° 84-595 du 12 juillet 1984 définissant la location-accession à la propriété immobilière, qui font l’objet, dans des conditions fixées par décret, d’une convention et d’une décision d’agrément prise par le représentant de l’État dans le département avant le 1er janvier 2012. » –
Adopté.
L'amendement n° 20 rectifié, présenté par Mme Lienemann et M. Dilain, est ainsi libellé :
Après l'article 15 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Le code général des impôts est ainsi modifié :
1° Aux 7° et 8° du II de l'article 150 U, l'année : « 2011 » est remplacée par l'année : « 2015 » ;
2° À la dernière phrase du V de l'article 210 E, les mots : « le III aux cessions réalisées jusqu'au 31 décembre 2011 » sont remplacés par les mots : « le III aux cessions réalisées jusqu'au 31 décembre 2015 ».
II. - La perte de recettes résultant pour l'État du I ci-dessus est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du même code.
La parole est à M. Claude Dilain.
Je vais présenter cet amendement en mon nom et en celui de Mme Lienemann, qui en fut l’initiatrice.
À mon sens, nous sommes tous d’accord pour affirmer que, dans notre pays, il faut améliorer la situation du logement en général et celle du logement social en particulier. En outre, tout le monde sait que, pour cela, il faut du foncier. Sans doute Mme la ministre du logement nous adressera-t-elle très bientôt des propositions allant dans ce sens.
L’objet de cet amendement, s’il s’inscrit dans cette perspective, est plus modeste.
Une disposition du code général des impôts permettait, jusqu’à il y a peu, des allègements ou des exonérations d’impôts lorsqu’un particulier vendait un bien à un organisme d’HLM, ce qui encourageait les transactions dans ce domaine et permettait d’assurer un meilleur équilibre du budget de l’organisme acheteur. Malheureusement, ce dispositif s’est éteint le 31 décembre 2011. Conséquemment, je propose non pas de le prolonger mais de le réactiver, jusqu’en 2015.
Cet amendement reprend une suggestion émise par les organisations de bailleurs sociaux, afin de faciliter le développement du logement social. L’article 150 U du code général des impôts institue une exonération d’impôts sur les plus-values au profit des particuliers qui cèdent des immeubles leur appartenant à des organismes d’HLM. L’article 210 E, pour sa part, applique un allégement d’impôts sur les plus-values aux entreprises qui agissent de même.
Ces dispositions sont toutefois devenues caduques au 31 décembre 2011, et le présent amendement vise à ressusciter ces niches jusqu’au 31 décembre 2015. Quel serait, pour l’État, le coût d’une telle mesure ? Le rapport Guillaume sur les niches précisait que l’article 210 E avait coûté 70 millions d’euros en 2010. Le coût du dispositif pour les particuliers était, quant à lui, évalué à 10 millions d’euros.
Dans son rapport, l’IGF ne se prononce pas sur l’opportunité de maintenir ces dispositifs au-delà de leur date d’expiration, en l’absence d’études sur leurs effets qui, à ce jour, ne sont pas explicites. Leur existence même est sujette à caution.
Compte tenu des contraintes budgétaires que nous connaissons et de la nécessité face à laquelle nous nous trouvons de réduire ou de supprimer les niches existantes, on peut se demander s’il est réellement opportun de ressusciter des niches qui viennent d’être supprimées.
La commission émet donc un avis plutôt défavorable, tout en restant ouverte aux suggestions du Gouvernement en la matière. Au demeurant, les contraintes sont telles qu’il nous semble difficile de donner un avis favorable sur cet amendement.
Monsieur le sénateur, le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement. Je vous le rappelle, au début de l’examen du présent texte, un amendement également cosigné par Mme Lienemann a été adopté qui, à mes yeux, va dans le sens que vous indiquez.
Ainsi, le signal qui devait être lancé l’a été. Adopter cet amendement ne serait sans doute pas raisonnable au regard, non seulement de son coût, mais aussi de l’appréciation que l’IGF a pu porter sur la pertinence de cette disposition fiscale dérogatoire que vous souhaiteriez voir rétablir.
Monsieur le sénateur, le Gouvernement invite donc le Sénat à rejeter cet amendement, en espérant que vous comprendrez cette position.
Mme Lienemann considérera sans nul doute que son appel a été lancé dans cet hémicycle. En conséquence, je retire cet amendement, monsieur le président.
L’amendement n° 20 rectifié est retiré.
Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 173 rectifié bis, présenté par MM. Mézard, Collin, Fortassin, Baylet, Bertrand, C. Bourquin et Collombat, Mme Laborde et MM. Mazars, Plancade, Requier, Tropeano, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :
Après l'article 15 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - L'article L. 423-14 du code de la construction et de l'habitation est abrogé.
II. - La perte de recettes résultant pour l’Agence nationale pour la rénovation urbaine du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
III. – La perte de recettes résultant pour l’État du I ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Jacques Mézard.
Par cet amendement, nous demandons à la Haute Assemblée de supprimer un prélèvement qui nous paraît tout à fait injuste et injustifié. Nous avons déjà fait part de ce problème au Sénat lors de précédents débats.
En effet, la loi de finances pour 2011 a instauré un système qui handicape fortement les organismes d’HLM : nombre d’entre eux subissent d’importants prélèvements dans beaucoup de nos départements.
J’ai noté que Mme la ministre de l’égalité des territoires et du logement a récemment reconnu le caractère pénalisant de ce prélèvement sur le potentiel financier des organismes d’HLM. Mme Duflot a même annoncé, devant l’assemblée générale des entreprises sociales pour l’habitat, le 31 mai dernier, que « ce prélèvement imposé sur la trésorerie des bailleurs devra être supprimé. »
Il nous semble donc quelque peu étonnant que le présent projet de loi de finances rectificative ne mette pas en application cet engagement du Gouvernement, alors que la situation nécessite une action rapide. De fait, l’autofinancement de nombre d’organismes d’HLM a été touché par cette mesure adoptée dans le cadre du projet de loi de finances pour 2011.
En conséquence, nous vous proposons de réparer ce qui nous semble être un oubli, en adoptant cet amendement qui tend à supprimer le prélèvement sur le potentiel financier des bailleurs sociaux.
L'amendement n° 174 rectifié bis, présenté par MM. Mézard, Collin, Fortassin, Baylet, Bertrand, C. Bourquin et Collombat, Mme Laborde et MM. Mazars, Plancade, Requier, Tropeano, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :
Après l’article 15 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Au premier alinéa de l’article L. 423-14 du code de la construction et de l’habitation, après le mot : « locatif » sont insérés les mots : «, à l’exception des établissements mentionnés au 6° du I de l’article L. 312-1 du code de l’action sociale et des familles, ».
II. - La perte de recettes résultant pour l’Agence nationale pour la rénovation urbaine du I est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
III. – La perte de recettes résultant pour l’État du I ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Jacques Mézard.
Cet amendement vise à exclure du prélèvement sur le potentiel financier une catégorie particulièrement importante de bailleurs sociaux.
Il s’agit de préserver les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes, les EHPAD, dont certains propriétaires répercutent les prélèvements qu’ils subissent sur les loyers, ce qui est compréhensible. Cette situation emporte bien sûr des conséquences dramatiques pour certains locataires. En outre, le paiement de ce prélèvement remet en cause d’autres dépenses, comme le financement des travaux de rénovation et de mise aux normes.
Ce prélèvement menace donc non seulement la sécurité de certains établissements, mais aussi leur existence même, comme l’illustre l’exemple de plusieurs départements : faute d’être aux normes, un établissement pourra être contraint de fermer purement et simplement. Sur ce point également, nous considérons qu’il y a urgence – en particulier pour les EHPAD – à abolir ce prélèvement sur le potentiel financier. Je viens de le rappeler, Mme la ministre du logement s’y est engagée le 31 mai dernier.
L'amendement n° 179 rectifié, présenté par Mme Lienemann et M. Dilain, est ainsi libellé :
Après l’article 15 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Les onzième à quatorzième alinéas de l'article L. 423-14 du code de la construction et de l'habitation sont supprimés.
La parole est à M. Claude Dilain.
L’amendement n° 173 rectifié bis tend à supprimer le prélèvement sur le potentiel financier des organismes d’HLM, qui a remplacé la taxe sur les « dodus dormants » à compter de 2011.
Ainsi, cet amendement tend à supprimer une ponction de 175 millions d’euros et à alimenter le budget de l’État par la voie de fonds de concours. De fait, les organismes devaient se substituer en 2011, à hauteur de 90 millions d’euros, au crédit budgétaire d’aide à la pierre qui était inscrit dans la mission « Ville et logement ».
En 2011, aucun versement n’a été effectué sur le budget de l’État à cause du retard qu’a subi la parution des décrets, mais le prélèvement a bien été opéré.
On notera que ce prélèvement alimente également l’Agence pour la rénovation urbaine, l’ANRU, à hauteur de 95 millions d’euros. La suppression de ce prélèvement, annoncée par le Gouvernement le 31 mai dernier, par la bouche de Mme Duflot, soulève donc une question plus générale quant au financement de l’ANRU et des aides à la pierre. Il faudra résoudre ce problème dans le cadre du budget 2013. En effet, il est hors de question de mettre en péril les opérations de rénovation urbaine.
Dans ces conditions, il me semble préférable de renvoyer ce sujet à l’examen du projet de loi de finances pour 2013. Toutefois, dès à présent, il serait intéressant de connaître la position du Gouvernement sur ce dossier. De fait, monsieur le ministre, il a récemment été question d’une ponction plus importante, en lien avec le dispositif du 1 % logement. Peut-être pourriez-vous nous apporter quelques précisions à ce sujet ?
Je le répète, l’amendement n° 173 rectifié bis nous inspire quelque inquiétude. L’éclairage complémentaire du Gouvernement nous serait, partant, très précieux.
L’amendement n° 173 rectifié bis est tout à fait intéressant. Il s’inscrit du reste dans la droite ligne des campagnes présidentielle et législatives menées par l’actuelle majorité. Sur le fond, il ne peut donc emporter que notre accord.
Toutefois, le présent projet de loi de finances rectificative n’a pas pour finalité de mettre en œuvre la totalité des mesures annoncées au cours de la campagne. Ces engagements seront pleinement assumés, je le répète, mais nous avons une mandature entière devant nous pour les honorer.
Je l’ai souligné lors de mon intervention liminaire, le présent texte doit avant tout permettre à la France de respecter sa parole en restaurant ses finances publiques. À cet égard, convenez que le coût d’une telle disposition, près de 175 millions d’euros, …
… ne serait pas de nature à consolider celles-ci. De fait, à l’évidence, il me faudrait alors lever le gage, lequel n’est, en l’espèce, mentionné que pour assurer la conformité au Règlement de cet amendement, et naturellement pas pour compenser le coût que celui-ci engendrerait réellement s’il était adopté.
Monsieur le sénateur, en conséquence, je ne peux malheureusement pas donner un avis favorable sur cet amendement, qui ne relève pas de l’objet du présent texte. J’en suis désolé. Je comprends tout à fait votre démarche, qui s’inscrit dans la ligne de conduite de la majorité présidentielle et je me réjouis du soutien que vous apportez à celle-ci. De toute façon, je vous confirme que les mesures annoncées seront mises en œuvre. Simplement, le moment n’est pas encore venu d’adopter cette disposition, le présent projet de loi de finances rectificative n’ayant pas pour objet de réformer la politique du logement. Un texte spécifique sera soumis au Parlement à cette fin ; votre amendement y occupera naturellement toute sa place.
Monsieur le ministre, sauf erreur de ma part, c’est vous qui avez annoncé que des innovations interviendraient en la matière. Sans doute serait-il utile que vous nous indiquiez quels sont les projets du Gouvernement et quel est, à ce jour, l’état de sa réflexion.
S’agit-il de s’acheminer vers une fiscalisation totale de l’ancien 1 % logement ? Vous situez-vous dans la logique des opérations précédentes, à savoir celle des « participations sollicitées », si je puis m’exprimer ainsi – j’observe du reste que l’État les sollicitait souvent avec une certaine force – en préservant les formes du dialogue social ou, du moins, en garantissant un minimum de concertation avec les milieux intéressés ? Tout simplement, pouvez-vous nous indiquer vos objectifs budgétaires, pour ce qui concerne Action logement et la participation des employeurs à l’effort de construction ?
Compte tenu des explications que M. le ministre délégué vient de nous apporter, je vais retirer cet amendement. Toutefois, à mon tour, je me fais l’écho de l’inquiétude – pour ne pas dire plus – exprimée par le président et le rapporteur général de la commission des finances, concernant l’avenir d’Action logement. À l’heure actuelle, les alarmes du monde HLM dépassent la simple inquiétude.
L’amendement n° 179 rectifié est retiré.
La parole est à M. le ministre délégué.
Monsieur le sénateur, en lisant les déclarations auxquels vous venez de faire référence, j’ai moi aussi ressenti l’inquiétude que vous exprimez.
Monsieur le président de la commission des finances, vous avez suggéré que certains des propos que j’aurais tenus pouvaient susciter des craintes. Je vous mets au défi de lire de semblables assertions dans les comptes rendus des débats de l’Assemblée nationale ou du Sénat, ou dans des entretiens publics accordés à tel ou tel média. Je n’ai jamais tenu le moindre propos de cette nature. C’est sans risque d’être démenti que je vous l’affirme, les yeux dans les yeux.
J’en suis très honoré, Monsieur le président de la commission des finances.
Il ne s’agit d’ailleurs plus du 1 % logement, nous le savons tous, mais du 0, 45 %.
Nous connaissons tous également l’historique d’Action logement, action collective menée par le secteur associatif, qui se voit attributaire non pas d’un impôt mais d’une taxe, bref d’argent public.
Le budget du ministère du logement est en cours d’élaboration. Ce sera l’occasion pour le Gouvernement de préciser ce qu’il décide. En tout cas, à aucun moment, il n’a été prévu de supprimer Action logement. Je m’interroge d’ailleurs sur les objectifs de celles ou de ceux qui ont pu se croire autorisés à faire paraître dans la presse ce genre de propos.
Nous sommes d’accord, mais il existe un adage qui peut, me semble-t-il, s’appliquer en l’occurrence : fecit cui prodest ? À qui profite le crime ?
Monsieur le ministre, j’ai pris acte de votre engagement de reprendre la teneur de cet amendement dans le prochain projet de loi de finances.
Non, il sera repris dans un projet de loi sur le logement !
Comme je crois savoir que l’on nous en soumettra un avant la prochaine loi de finances, cela pourrait tout à fait combler nos espoirs.
En tout cas, grâce au débat qui a eu lieu sur ces amendements, vous avez rassuré le monde HLM sur le 1 % logement. Je vais donc retirer mes propositions, qui avaient pour but de revenir sur une décision du précédent gouvernement, extrêmement pénalisante pour le monde HLM.
Les amendements n° 173 rectifié bis et 174 rectifié bis sont retirés.
II. – RESSOURCES AFFECTÉES
I. – Après la seconde occurrence du mot « sociales », la fin de la deuxième phrase du c de l’article 30 de la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 relative à l’organisation du service public de la poste et à France Télécom est supprimée.
II. – Le I s’applique à la contribution due au titre des rémunérations versées en 2012 dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État. –
Adopté.
I. – Il est ouvert, à compter du 1er septembre 2012 et jusqu’au 31 décembre 2020, un compte d’affectation spéciale intitulé : « Participation de la France au désendettement de la Grèce ».
Ce compte retrace :
1° En recettes : le produit de la contribution spéciale versée par la Banque de France au titre de la restitution des revenus qu’elle a perçus sur les titres grecs détenus en compte propre ;
2° En dépenses :
a) Le versement de la France à la Grèce au titre de la restitution à cet État des revenus mentionnés au 1° ;
b) Des rétrocessions de trop-perçu à la Banque de France.
II
L'amendement n° 37 rectifié, présenté par M. Marc, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Alinéa 7
Rédiger ainsi cet alinéa :
II. - Le Gouvernement remet au Parlement, avant le dépôt du projet de loi de finances pour 2013, un rapport évaluant l’ensemble des engagements financiers de l’État dans le cadre du programme de soutien au désendettement de la Grèce et des autres dispositifs pour la stabilité de la zone euro.
La parole est à M. le rapporteur général de la commission des finances.
Cet amendement est simple et il n’accroîtra pas beaucoup les dépenses.
L’Assemblée nationale a demandé la remise d’un rapport évaluant les engagements financiers de l’État dans le cadre du programme de soutien au désendettement de la Grèce. Ce rapport doit être remis avant le dépôt du projet de loi de finances pour 2013.
La commission des finances souhaite – cet amendement a vocation à traduire ce souhait – que l’on conserve le principe de ce rapport, mais qu’on l’étende à l’ensemble des dispositifs en faveur de la stabilité de la zone euro, de manière que nous puissions disposer d’une information exhaustive.
Nous aurions souhaité que ce rapport devienne une annexe au projet de loi de finances, mais, dans un premier temps, contentons-nous d’un tour de chauffe avant de statuer sur l’opportunité de créer une nouvelle annexe aux lois de finances.
Si notre amendement était adopté, la commission des finances du Sénat, comme celle de l’Assemblée nationale, disposerait d’une information actualisée, et donc très utile, sur l’étendue progressive de ce champ d’intervention de l’État français.
Tel est l’objet de cet amendement que nous vous demandons d’adopter, mes chers collègues.
Monsieur le rapporteur général, le Gouvernement accède bien volontiers à votre demande. Si je comprends bien, il s’agit d’un tour de chauffe avant de faire du document concerné une annexe à la loi de finances. Toutefois, prenons garde à ne pas alourdir cette procédure !
Quoi qu’il en soit, nous vivons un moment un peu exceptionnel, qui justifie une information tout à fait transparente et complète du Parlement. Le Gouvernement émet donc un avis favorable sur cet amendement.
pour faire l’éloge du commentaire de l’article 17 qui figure dans le rapport de M. François Marc. Vous y trouverez, mes chers collègues, présentés de manière extrêmement méthodique, les chiffres figurant, ou qui ont vocation à figurer, au compte d’affectation spéciale : « Participation de la France au désendettement de la Grèce ». Très sincèrement, cela mérite une lecture attentive.
Selon le tableau figurant page 220, notre engagement financier est supérieur à 50 milliards d’euros. Il se décompose ainsi : avant la création du Fonds européen de stabilité financière, « Prêts bilatéraux (premier programme) » ; depuis que le Fonds existe, « Reliquat du premier programme », puis « deuxième programme », enfin, « sur-garantie », ce qui fait au total 50, 8 milliards d’euros. Il est important, me semble-t-il, de bien réaliser cet ordre de grandeur, mes chers collègues.
Merci encore à M. le ministre de nous permettre d’obtenir toute la clarté nécessaire sur les engagements pris non seulement vis-à-vis de la Grèce, mais aussi vis-à-vis de l’ensemble des autres bénéficiaires de la solidarité financière au sein de la zone euro !
Le groupe UMP votera cet article utilement complété, sur l’initiative du groupe UMP de l’Assemblée nationale, par une disposition prévoyant la remise au Parlement, avant le dépôt du projet de loi de finances pour 2013, d’un rapport évaluant l’ensemble des engagements financiers de l’État dans le cadre du programme de soutien de la Grèce.
Avant de voter cet article, je voudrais vous lire des extraits d’un ouvrage écrit en 1858 par Edmond About, de l’Académie française
Ah ! sur les travées du groupe socialiste.
« Le régime financier de la Grèce est tellement extraordinaire et ressemble si peu au nôtre que je crois nécessaire, avant d’entrer dans les détails du budget, de placer ici quelques observations générales.
« La Grèce est le seul exemple connu d’un pays vivant en pleine banqueroute depuis le jour de sa naissance. §Si la France ou l’Angleterre se trouvait seulement une année dans cette situation, on verrait des catastrophes terribles : la Grèce a vécu plus de vingt ans en paix avec la banqueroute.
« Tous les budgets, depuis le premier jusqu’au dernier, sont en déficit.
« Lorsque, dans un pays civilisé, le budget des recettes ne suffit pas à couvrir le budget des dépenses, on y pourvoit au moyen d’un emprunt fait à l’intérieur. C’est un moyen que le gouvernement grec n’a jamais tenté, et qu’il aurait tenté sans succès.
« Il a fallu que les puissances protectrices de la Grèce garantissent sa solvabilité pour qu’elle négociât un emprunt à l’extérieur.
« Les ressources fournies par cet emprunt ont été gaspillées par le gouvernement sans aucun fruit pour le pays ; et, une fois l’argent dépensé, il a fallu que les garants, par pure bienveillance, en servissent les intérêts : la Grèce ne pouvait point les payer. » Et je pourrais continuer…
Vous l’avez compris, c’est une simple lecture « apéritive » !
Au demeurant, l’objet de mon intervention est d’appeler la vigilance du ministre du budget et de la commission des finances sur le caractère un peu insolite de ce que nous sommes en train de faire, c'est-à-dire de créer un document d’information financière du Parlement par une loi ordinaire.
Cela nous oblige, me semble-t-il, à constater une faiblesse dans la loi organique sur les lois de finances. La LOLF, dont tous ceux qui l’ont préparée ou votée sont fiers à juste titre –, comporte des manques en ce qui concerne le « hors bilan » de l’État.
La création par une loi ordinaire d’un outil d’information, d’ailleurs partiel même s’il est important, sur le « hors bilan » de l’État est certainement une bonne solution d’attente. Cependant, la commission des finances ne serait-elle pas dans son rôle, dans la ligne du travail engagé sur la LOLF voilà une douzaine d’années, en se demandant si nous avons aujourd'hui les bons instruments de recensement et d’analyse du hors bilan de l’État ?
La Cour des comptes travaille sur le sujet. Nous lui avons demandé, dans le cadre de l’article 58-2, parmi les thèmes qu’elle étudie pour la commission des finances, d’examiner précisément cette question du « hors bilan » de l’État.
Nous ne manquerons pas d’évoluer dans le sens d’une plus grande transparence.
L'amendement est adopté.
L'article 17 est adopté.
Est autorisée, au-delà de l’entrée en vigueur de la présente loi, la perception de rémunération de services instituée par le décret n° 2012-822 du 26 juin 2012 relatif à la rémunération de certains services rendus par l’Autorité de la concurrence. –
Adopté.
M. le Premier ministre a demandé au Sénat de bien vouloir procéder à la désignation de sénateurs appelés à siéger au sein de plusieurs organismes extraparlementaires, en remplacement de sénateurs nommés membres du Gouvernement.
Conformément à l’article 9 du règlement, j’invite :
- la commission du développement durable, des infrastructures, de l’équipement et de l’aménagement du territoire, compétente en matière d’impact environnemental de la politique énergétique, à présenter une candidature pour siéger en tant que titulaire au sein du Conseil d’administration de l’établissement public « Parcs nationaux de France » (230), en remplacement de M. Thierry Repentin ;
- la commission des affaires économiques à présenter des candidatures pour siéger au sein :
- du Conseil national des villes (257) ;
- du conseil d’administration de l’Agence nationale de l’habitat (258) ;
- de la Commission nationale chargée de l’examen du respect des obligations de réalisation de logements sociaux (243) ;
- du Comité de liaison pour l’accessibilité des transports et du cadre bâti (163) ;
- et du Conseil national de l’habitat (81), en remplacement de M. Thierry Repentin ;
- et la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées à présenter une candidature pour siéger au sein du conseil d’administration de l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger (115), en remplacement de Mme Hélène Conway Mouret.
La nomination au sein de ces organismes extraparlementaires aura lieu ultérieurement, dans les conditions prévues par l’article 9 du règlement.
J’informe le Sénat que la commission des finances a fait connaître qu’elle a procédé à la désignation des candidats à une éventuelle commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi de finances rectificative pour 2012 actuellement en cours d’examen.
Cette liste a été affichée conformément à l’article 12, alinéa 4, du règlement et sera ratifiée si aucune opposition n’est faite dans le délai d’une heure.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt-deux heures.
La séance est suspendue.
La séance, suspendue à vingt heures, est reprise à vingt-deux heures.