Séance en hémicycle du 13 juillet 2017 à 9h30

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

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La séance

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La séance est ouverte à neuf heures trente.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi organique, après engagement de la procédure accélérée, rétablissant la confiance dans l’action publique (projet n° 580, texte de la commission n° 608, rapport n° 607, avis n° 602).

Je vous rappelle, mes chers collègues, que la conférence des présidents a prévu que nous siégions ce matin et cet après-midi jusqu’à seize heures.

Si nous n’avions pas achevé l’examen du projet de loi organique à seize heures, nous le reprendrions lundi prochain à partir de seize heures.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

Nous passons donc à la discussion du projet de loi organique, dans le texte de la commission.

Titre Ier

DISPOSITIONS RELATIVES AU PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE

I. – La loi n° 62-1292 du 6 novembre 1962 relative à l’élection du Président de la République au suffrage universel est ainsi modifiée :

1° L’article 3 est ainsi modifié :

a) Au neuvième alinéa du I, les mots : « deux mois au plus tôt et un » sont remplacés par les mots : « quatre mois au plus tôt et trois » et, à la fin, les mots : « qui sera publiée au Journal officiel de la République française dans les huit jours de son dépôt » sont supprimés ;

b) L’avant-dernier alinéa du I est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Quinze jours après son dépôt, cette déclaration est rendue publique, dans les limites définies au même III, par la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique qui l’assortit d’un avis par lequel elle apprécie, après avoir mis l’intéressé à même de présenter ses observations, la variation de la situation patrimoniale entre le début et la fin de l’exercice des fonctions présidentielles telle qu’elle résulte des déclarations, des observations que le déclarant a pu lui adresser ou des autres éléments dont elle dispose. » ;

c) Au quatrième alinéa du II, la référence : « de l’article L. 52-8 » est remplacée par les références : « des articles L. 52-7-1 et L. 52-8 » ;

d (nouveau)) Au neuvième alinéa du II, le mot : « quatrième » est remplacé par le mot : « cinquième » ;

2° À la fin de l’article 4, la référence : « loi organique n° 2016-506 du 25 avril 2016 de modernisation des règles applicables à l’élection présidentielle » est remplacée par la référence : « loi organique n° … du … pour la régulation de la vie publique ».

II. – À la fin du deuxième alinéa du 2° du I de l’article 3 de la loi organique n° 2016-1047 du 1er août 2016 rénovant les modalités d’inscription sur les listes électorales des Français établis hors de France, la référence : « loi n° 2016-1048 du 1er août 2016 rénovant les modalités d’inscription sur les listes électorales » est remplacée par la référence : « loi organique n° … du … pour la régulation de la vie publique ».

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

L’amendement n° 31 rectifié bis, présenté par M. Marie, Mme S. Robert, MM. Sueur, Leconte, Daudigny et Durain, Mme D. Michel, MM. Montaugé, Vandierendonck et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 3

Remplacer cet alinéa par neuf alinéas ainsi rédigés :

a) Le neuvième alinéa du I est ainsi modifié :

- après les mots : « sous pli scellé, », sont insérés les mots : « une déclaration d’intérêts et d’activités et » ;

- le mot : « conforme » est remplacé par le mot : « conformes » ;

- les mots : « deux mois au plus tôt et un » sont remplacés par les mots : « six mois au plus tôt et cinq » ;

- après les mots : « nouvelle déclaration », sont insérés les mots : « de situation patrimoniale » ;

- les mots : « qui sera publiée au Journal officiel de la République française dans les huit jours de son dépôt » sont supprimés ;

- est ajoutée une phrase ainsi rédigée :

« La déclaration d’intérêts et d’activités ne comporte pas les informations mentionnées au 10° du III du même article LO 135-1. » ;

…) Au début du dixième alinéa du I, sont insérés les mots : « Les déclarations d’intérêts et d’activités et » ;

II. – Alinéa 5

Après les mots :

ses observations,

insérer les mots :

l’exhaustivité, l’exactitude, la sincérité et

La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Cet amendement vise à élargir les obligations déclaratives des candidats à l’élection présidentielle en exigeant, au-delà de la déclaration de situation patrimoniale, celles des activités et intérêts détenus.

Il y a là une grande logique. Puisque ces informations sont demandées aux parlementaires et aux ministres, personne ne comprendrait que le candidat à la présidence de la République ne les donnât point.

En se focalisant sur le patrimoine du Président de la République, la loi de 1962, déjà ancienne, fait l’impasse sur la deuxième partie de l’article LO 135-1 du code électoral auquel il se réfère, alors que la campagne présidentielle a démontré la pertinence qu’il y aurait à exiger une déclaration d’intérêts aux candidats à cette élection.

Il ne vous aura pas échappé, madame la garde des sceaux, qu’il y a une sorte d’ellipse dans mon exposé.

Debut de section - Permalien
Nicole Belloubet, garde des sceaux, ministre de la justice

Je m’en remets à la sagesse de la Haute Assemblée.

Debut de section - Permalien
Nicole Belloubet, garde des sceaux

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Celle du Gouvernement ou de la Haute Assemblée ?

Sourires.

L'amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

L'amendement n° 87, présenté par M. Bas, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 5

Remplacer les mots :

même III

par les mots :

III du même article LO 135-2

II. – Alinéa 7

Remplacer les mots :

le mot : « quatrième »

par les mots :

la seconde occurrence du mot : « quatrième »

La parole est à M. le rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

Il s’agit d’un amendement de précision rédactionnelle.

Debut de section - Permalien
Nicole Belloubet, garde des sceaux

Favorable.

L'amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

L’amendement n° 6, présenté par M. Grand, n’est pas soutenu.

Je mets aux voix l’article 1er, modifié.

L'article 1 er est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

L’amendement n° 40, présenté par Mmes Assassi et Cukierman, M. Favier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Après l'article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le I bis de l’article 3 de la loi n° 62-1292 du 6 novembre 1962 relative à l’élection du Président de la République au suffrage universel est ainsi modifié :

1° Les premier à quatrième alinéas sont supprimés ;

2° Au cinquième alinéa, les mots : « du début de la campagne » sont remplacés par les mots : « de la publication du décret de convocation des électeurs » ;

3° Au sixième alinéa, les mots : « aux premier et cinquième alinéas » sont remplacés par les mots : « au premier alinéa » ;

4° Au dernier alinéa, les mots : « de la liste des candidats » sont remplacés par les mots : « du décret de convocation des électeurs ».

La parole est à Mme Éliane Assassi.

Debut de section - PermalienPhoto de Éliane Assassi

Alors que nous discutons de la façon de renouer le lien entre les citoyens et la vie publique dans un contexte de forte abstention lors du scrutin de 2017, il est essentiel de revenir sur la réforme de 2016 relative à l’élection présidentielle.

En effet, la substitution pour une partie de la campagne du principe d’équité au principe d’égalité du temps de parole, au détriment de ce dernier, représente, selon nous, une atteinte caractérisée à la démocratie.

Ainsi, les médias et les instituts de sondage seraient légitimes à décider quel candidat est digne de s’adresser aux Françaises et aux Français. Pour ce faire, ils s’appuieraient, d’une part, sur la « capacité d’animation » des candidats – il faut comprendre par cette expression le potentiel de « buzz » et de polémiques –, et, d’autre part, sur les résultats antérieurs desdits candidats.

Ces deux éléments entraînent trois conséquences majeures.

Premièrement, ils empêchent l’émergence de nouvelles forces, puisque des résultats antérieurs conditionnent l’exposition.

Deuxièmement, ils encouragent la perpétuation de scrutin en scrutin des mêmes rapports de force. En effet, une formation ayant obtenu de bons résultats serait plus exposée et aurait donc plus de chance de maintenir son niveau de vote.

Troisièmement, ils transforment le débat de fond que doit être celui de l’élection de l’élection présidentielle en spectacle de foire.

Rappelons-nous qu’il aura tout de même fallu la mobilisation de candidats exclus d’un débat pour qu’une seconde initiative soit prise, rassemblant cette fois sous la Ve République l’ensemble des prétendants à la fonction suprême.

Cet amendement vise donc à revenir sur la réforme de 2016 en réinstaurant l’égalité du temps de parole pour l’ensemble de la campagne, et ce dès la parution du décret de convocation des électeurs. Ainsi seront concernés les candidats à l’élection présidentielle dans leur ensemble, mais aussi les candidats putatifs à la recherche de leurs parrainages d’élus. Nous considérons en effet qu’une exposition supérieure de ces candidats pourrait leur permettre de recueillir davantage de signatures, d’une part, et de sensibiliser les citoyens à leur discours, d’autre part.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

À la suite d’un rapport du Conseil supérieur de l’audiovisuel, les règles actuelles ont été modifiées par la loi organique du 25 avril 2016 de modernisation des règles applicables à l’élection présidentielle. Ce texte, et le rapport y afférent de notre collègue Christophe Béchu, a donné lieu à de longs débats entre nous, madame la présidente Assassi.

Nous étions alors convenus que les campagnes présidentielles se diviseraient en trois périodes.

Première période : avant l’échéance électorale, la presse peut s’exprimer le plus librement possible, sous réserve du respect des règles du pluralisme.

Deuxième période, plus courte : entre le dépôt des candidatures et le début de la campagne officielle, la liberté de la presse est plus restreinte, pour respecter le principe d’équité.

Troisième période, encore plus courte : lors de la campagne électorale officielle, un strict principe d’égalité de temps d’antenne entre les candidats doit être respecté.

Cet équilibre mérite d’être maintenu, l’avis est donc défavorable.

Debut de section - Permalien
Nicole Belloubet, garde des sceaux

C’est le même avis, pour les raisons qui viennent d’être exposées.

La loi organique du 25 avril 2016, extrêmement récente, a fait l’objet de longs débats. Il ne me semble donc pas opportun de revenir sur les termes de la loi à ce stade.

Par ailleurs, le texte dont nous traitons aujourd’hui porte sur des questions de transparence, et non sur les règles et modalités de l’élection présidentielle.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Yves Collombat

Pour avoir combattu la loi précitée, je soutiendrai cet amendement.

La dernière élection présidentielle a montré que même cette loi scélérate – disons-le ! §– n’a pas été respectée. On a eu affaire à un festival d’inégalités et de n’importe quoi comme on n’en a jamais vu !

Je souhaiterais que le Sénat mette en place une commission d’enquête ou une mission d’information sur la façon dont les choses se sont passées concrètement.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Yves Collombat

On est dans l’hypocrisie la plus totale ! Quant à la dérégulation…

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

M. Philippe Bas, rapporteur. On n’aime pas l’hypocrisie !

M. Pierre-Yves Collombat sourit.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Yves Collombat

C’est vrai !

Par principe, je le répète, je soutiendrai l’amendement, car une telle façon de voir les choses ne devrait pas avoir cours dans une République. Et, encore une fois, même ce dispositif ne fonctionne pas… C’est vraiment n’importe quoi, c’est la jungle !

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

L’amendement n° 86, présenté par Mmes Assassi et Cukierman, M. Favier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Après l'article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le troisième alinéa du II de l’article 3 de la loi n° 62-1292 du 6 novembre 1962 relative à l'élection du Président de la République au suffrage universel est ainsi modifié :

1° À la première phrase, le nombre : « 13, 7 » est remplacé par le nombre : « 6, 85 » ;

2° À la seconde phrase, le nombre : « 18, 3 » est remplacé par le nombre : « 9, 15 ».

La parole est à Mme Marie-France Beaufils.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-France Beaufils

Cet amendement tend à ajouter une disposition relative aux campagnes électorales.

Il s’agit de réduire de moitié les plafonds de dépenses pour les campagnes électorales en vue de l’élection présidentielle, en passant de 13, 7 millions à 6, 85 millions d’euros pour tous les candidats à l’élection, et de 18, 3 millions à 9, 15 millions d’euros pour les deux candidats encore en lice au second tour.

En effet, malgré des efforts de contrôle et de transparence depuis trois décennies, les scandales se sont multipliés. Entre les meetings, les déplacements et l’impression des tracts, les dépenses de certains candidats peuvent atteindre des sommets.

Pour éviter des abus et de possibles dérapages, des règles et un encadrement du financement des campagnes électorales ont été mises en place depuis la fin des années quatre-vingt. Mais force est de constater, à la suite de la dernière campagne en vue de l’élection présidentielle, que les choses pourraient être davantage clarifiées et encadrées.

Pour assainir quelque peu ces dépenses, et les moraliser, nous proposons de les diminuer. Dans un souci de bonne utilisation des deniers publics, ces sommes faramineuses ne se justifient pas, et encore moins en cette période où les gouvernements successifs défendent l’austérité.

L’argument consistant à dire qu’outre-Atlantique, les dépenses liées aux campagnes électorales sont beaucoup plus importantes, ne tient pas. D’ailleurs, au vu du dernier résultat des élections américaines, ce système n’emporte pas vraiment l’adhésion…

L’argent pollue la sphère publique, et plus encore à l’ère de la communication excessive et des campagnes tape-à-l’œil.

Aux candidats à la plus haute fonction de l’État de montrer l’exemple en se satisfaisant de campagnes moins onéreuses à tous les niveaux, lesquelles feront davantage appel à l’intelligence des électeurs et à l’intérêt pour le débat public.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

Les auteurs de l’amendement obtiendront nécessairement un très gros succès d’estime.

Ils auraient déposé un amendement tendant à diviser par quatre le plafond des dépenses de la campagne présidentielle, leur succès aurait été plus grand encore !

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

Si vous vouliez, ma chère collègue, recueillir l’unanimité des Français en faveur de votre amendement, vous auriez aussi pu écrire « zéro ». Après tout, la possibilité de s’exprimer à la télévision devrait suffire !

Or il se trouve que les campagnes présidentielles mobilisent tout de même nombre de nos concitoyens, qui se déplacent pour se rendre à des réunions publiques…

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

… et dont il faut prendre en charge le déplacement. Il y a aussi les tracts à distribuer. Et j’ai pu remarquer, par ailleurs, qu’un certain nombre de formations politiques manquaient singulièrement de moyens. Il convient, par conséquent, de trouver le bon étiage.

Dans le passé, il est arrivé que les plafonds de dépenses des campagnes présidentielles soient dépassés, et c’était fort regrettable. Il est très difficile de faire tenir dans un budget restreint des dépenses qui concernent la vie démocratique d’un pays de plus de 65 millions d’habitants.

Il est donc raisonnable de ne pas adopter cet amendement et d’en rester au plafond de dépenses, si difficile à tenir, prévu dans la loi.

Debut de section - Permalien
Nicole Belloubet, garde des sceaux

Madame la sénatrice, le Gouvernement ne vous suivra pas dans votre proposition.

Nous considérons en effet que l’objet de la loi est non pas de diminuer le montant des dépenses électorales, mais d’assurer leur transparence, ce qui est une première raison de refuser cet amendement.

J’ajoute que le montant des dépenses électorales n’a pas été réévalué depuis 2009, ce qui conduit, de fait, à une diminution du plafond des dépenses.

L’avis est donc défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

La parole est à Mme Marie-France Beaufils, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-France Beaufils

J’entends les arguments de M. le rapporteur et de Mme la garde des sceaux. Si encore ces sommes importantes donnaient lieu à une meilleure efficacité et à un plus grand nombre d’électeurs se rendant aux urnes ! Mais tel n’est pas le cas. Nous devons donc nous interroger.

Ce n’est pas l’augmentation du plafond qui permettra une progression à cet égard, mais bien une autre façon de mener les campagnes électorales. Il faut donc se demander comment conduire le débat public avec les électeurs.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

La parole est à M. Roger Karoutchi, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

Madame Beaufils, s’il y avait un lien entre la dépense et le nombre d’électeurs, alors, du temps du général de Gaulle, quand il n’y avait qu’une seule chaîne de télévision, en noir et blanc, et que les campagnes électorales étaient pour le moins modestes, bien peu de Français seraient allés voter. Cela n’a donc rien à voir…

Ce n’est pas moi qui fixe le coût de l’imprimerie, des spots électoraux, etc. ! C’est une évidence que les campagnes électorales coûtent plus cher aujourd’hui, quel que soit l’impact sur les électeurs.

Je ne suis donc pas convaincu qu’il y ait un lien direct entre les deux éléments. Ce dont je suis convaincu, en revanche, c’est que les formations politiques doivent s’occuper de ceux qui veulent se rendre à des réunions et payer les tracts.

Comme l’a indiqué en creux M. le rapporteur, mieux vaut un plafond cohérent, de manière à être certain que tout le monde restera dans les clous, plutôt qu’un plafond tellement bas que l’on se demandera comment faire campagne.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

La parole est à M. Marc Laménie, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laménie

Je serais tenté de soutenir cet amendement relatif au plafonnement des dépenses, car son objet est la bonne utilisation des deniers publics. Mais en prenant du recul, et au bénéfice des explications de Mme la garde des sceaux et de M. le rapporteur, on peut s’interroger.

Nous avons vécu plusieurs campagnes électorales, et la récente campagne présidentielle était globalement assez sinistre si l’on considère sa médiatisation et sa déformation. La question des meetings coûteux, entre autres, nous interpelle.

Nous sommes tous favorables, dans cet hémicycle, à la rigueur et à la transparence, qui sont l’objet de ce projet de loi organique.

Malgré tout le respect que m’inspire cet amendement, je me rallierai néanmoins à l’avis de la commission des lois.

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

Titre Ier bis

DISPOSITIONS RELATIVES AUX MEMBRES DU GOUVERNEMENT

(Division et intitulé nouveaux)

Le deuxième alinéa de l'article 5 de l’ordonnance n° 58-1099 du 17 novembre 1958 portant loi organique pour l’application de l'article 23 de la Constitution est ainsi rédigé :

« À moins que l’intéressé n’ait repris auparavant une activité rémunérée, cette indemnité est versée pendant trois mois maximum, sans que cette durée excède celle des fonctions gouvernementales. » –

Adopté.

Titre II

DISPOSITIONS RELATIVES AUX PARLEMENTAIRES

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 51, présenté par MM. J.L. Dupont, Saugey et D. Bailly, Mme Morin-Desailly, MM. Maurey, Gabouty et Commeinhes, Mme Férat, M. Reichardt, Mme Duchêne, MM. Vasselle, Pierre, Longeot, Bérit-Débat, Médevielle, Laménie, Marseille et Pozzo di Borgo, Mme Bouchoux, M. Kern et Mme Joissains, est ainsi libellé :

I. – Avant le chapitre Ier (Dispositions relatives aux conditions d'éligibilité et inéligibilités)

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’ordonnance n° 58-1210 du 13 décembre 1958 portant loi organique relative à l'indemnité des membres du Parlement est ainsi modifiée :

1° La seconde phrase de l’article 1er est complétée par les mots : « au 1er janvier 2022 » ;

2° L’article 3 est ainsi rédigé :

« Art. 3. – La revalorisation annuelle du montant de l’indemnité parlementaire visée à l’article 1er est effectuée sur la base d'un coefficient égal à l'évolution de la moyenne annuelle des prix à la consommation, hors tabac, calculée sur les douze derniers indices mensuels de ces prix publiés par l'Institut national de la statistique et des études économiques l'avant-dernier mois qui précède la date de revalorisation de l’indemnité concernée.

« Si ce coefficient est inférieur à un, il est porté à cette valeur. »

II. – En conséquence, faire précéder cet article d’une division additionnelle et de son intitulé ainsi rédigé :

Chapitre …

Dispositions relatives à l’indemnité des membres du Parlement

L’amendement n° 50, présenté par MM. J.L. Dupont, Saugey et D. Bailly, Mme Morin-Desailly, MM. Bérit-Débat, Maurey, Gabouty et Commeinhes, Mme Férat, MM. Reichardt, Vasselle et Pierre, Mme Duchêne, MM. Longeot, Médevielle, Laménie, Pozzo di Borgo et Marseille, Mme Bouchoux, M. Kern et Mme Joissains, est ainsi libellé :

I. – Avant le chapitre Ier (Dispositions relatives aux conditions d'éligibilité et inéligibilités)

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’ordonnance n° 58-1210 du 13 décembre 1958 portant loi organique relative à l’indemnité des membres du Parlement est ainsi modifiée :

1° La seconde phrase de l’article 1er est complétée par les mots : « au 1er janvier 2020 » ;

2° L’article 3 est ainsi rédigé :

« Art. 3. – La revalorisation annuelle du montant de l’indemnité parlementaire visée à l’article 1er est effectuée sur la base d’un coefficient égal à l’évolution de la moyenne annuelle des prix à la consommation, hors tabac, calculée sur les douze derniers indices mensuels de ces prix publiés par l’Institut national de la statistique et des études économiques l’avant-dernier mois qui précède la date de revalorisation de l’indemnité concernée.

« Si ce coefficient est inférieur à un, il est porté à cette valeur. »

II. – En conséquence, faire précéder cet article d’une division additionnelle et de son intitulé ainsi rédigé :

Chapitre …

Dispositions relatives à l’indemnité des membres du Parlement

La parole est à M. Jean-François Longeot.

Debut de section - Permalien
Nicole Belloubet, garde des sceaux

Je répète ce que j’ai dit, hier, à M. Jean-Léonce Dupont : le Gouvernement est favorable à une réflexion globale sur l’évolution de la rémunération des parlementaires, mais cela ne peut se faire au détour de ce projet de loi organique, sans un travail concerté et réfléchi dont nous devons définir les modalités ensemble.

L’avis est donc, pour le moment, défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

La parole est à Mme Éliane Assassi, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Éliane Assassi

Je suivrai l’avis de M. le rapporteur et de Mme la garde des sceaux, mais, je tiens à le dire, je trouve incroyable que l’on présente cet amendement à l’heure où est annoncé le gel du point d’indice des fonctionnaires.

Cette posture politique m’interroge : on se protège et, dans le même temps, on ne dit mot sur le sort qui sera réservé à nos fonctionnaires du fait du gel du point d’indice et de la suppression de milliers de postes dans la fonction publique.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

La parole est à M. Jean-François Longeot, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Longeot

On peut saisir toutes les opportunités pour faire du populisme ; c’est assez facile…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Longeot

Je ne vous ai pas coupé la parole, ma chère collègue !

S’il n’est plus possible aujourd’hui, dans cet hémicycle, de réfléchir ou de faire des propositions, à quoi servons-nous ?

Contrairement à ce que vous avez dit, il s’agissait d’un amendement d’appel. Je remercie donc Mme la garde des sceaux d’avoir dit que la discussion était ouverte.

Je retire les amendements.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

Les amendements n° 51 et 50 sont retirés.

Chapitre Ier

Dispositions relatives aux conditions d’éligibilité et inéligibilités

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

L’amendement n° 20 rectifié bis, présenté par M. Kaltenbach, n’est pas soutenu.

Le chapitre III du titre II du livre Ier du code électoral est complété par un article LO 136-4 ainsi rédigé :

« Art. LO 136-4. – L’administration fiscale transmet au député, dans le mois suivant la date de son entrée en fonction, une attestation constatant s’il satisfait ou non, à cette date et en l’état des informations dont dispose l’administration fiscale, aux obligations de déclaration et de paiement des impôts dont il est redevable. Est réputé satisfaire à ces obligations de paiement le député qui a, en l’absence de toute mesure d’exécution du comptable, acquitté ses impôts ou constitué des garanties jugées suffisantes par le comptable, ou, à défaut, conclu un accord contraignant avec le comptable en vue de payer ses impôts, ainsi que les éventuels intérêts échus, pénalités ou amendes, à condition qu’il respecte cet accord.

« L’attestation mentionnée au premier alinéa ne constitue pas une prise de position formelle de l’administration fiscale sur la situation fiscale du député.

« Le député est invité, le cas échéant, par l’administration fiscale à présenter ses observations et à se mettre en conformité avec les obligations fiscales mentionnées au même premier alinéa dans un délai d’un mois à compter de la réception de cette invitation.

« Si le député ne satisfait pas aux obligations mentionnées audit premier alinéa au terme de ce délai et que cette situation ne résulte d’aucune contestation dont est saisi le juge, l’administration fiscale informe le bureau de l’Assemblée nationale de la situation.

« Si le bureau de l’Assemblée nationale constate que le député n’est pas en conformité avec les obligations mentionnées au même premier alinéa, il saisit le Conseil constitutionnel qui peut prononcer la déchéance du mandat de député en cas de manquement d’une particulière gravité aux obligations mentionnées au même premier alinéa. »

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

L'amendement n° 70, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 6

Rédiger ainsi cet alinéa :

« Le bureau de l'Assemblée nationale saisit le Conseil constitutionnel, qui peut constater l'inéligibilité du député et le déclarer démissionnaire d'office par la même décision. »

II. – Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

…. – Au 2° de l'article LO 128 du code électoral, les références : « et LO 136-3 » sont remplacés par les références : «, LO 136-3 et LO 136-4 ; ».

La parole est à Mme la garde des sceaux.

Debut de section - Permalien
Nicole Belloubet, garde des sceaux

Compte tenu de la possibilité offerte aux élus en retard de déclaration et de paiement de se mettre en conformité avec leurs obligations fiscales, sur invitation expresse de l’administration fiscale, il ne nous semble pas justifié, en cas de manquement persistant à cette obligation, de réduire le champ d’application de la démission d’office aux seuls manquements caractérisés par une particulière gravité.

Il nous semble également qu’il n’y a pas lieu de donner au bureau de chaque assemblée un pouvoir d’appréciation du manquement.

Je rappelle, au demeurant, que la suppression du critère de particulière gravité n’empêchera pas le Conseil constitutionnel d’exercer un contrôle de proportionnalité de la sanction en tant que juge de l’élection.

Cela me conduit donc, je le dis d’ores et déjà, à être favorable au sous-amendement qui a été déposé sur cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

Le sous-amendement n° 90, présenté par M. Bas, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :

Amendement n° 70, alinéas 2 et 3

Remplacer ces alinéas par quatre alinéas ainsi rédigés :

Après le mot :

peut

rédiger ainsi la fin de cet alinéa :

constater, en fonction de la gravité du manquement aux obligations mentionnées au premier alinéa, l’inéligibilité du député et le déclarer démissionnaire d’office par la même décision. »

La parole est à M. le rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

Nous avons adopté le même dispositif hier, à la réserve près que c’est le Conseil d’État qui se prononce dans le cas des parlementaires européens.

Pour les parlementaires français, c’est le Conseil constitutionnel qui se prononcera.

Le système est très simple. Au vu de l’attestation de l’administration fiscale, si le nouvel élu n’est pas en règle avec ses obligations fiscales les plus élémentaires, la transmission au bureau de l’assemblée, lequel n’est pas une simple boîte aux lettres, se fait en fonction de la gravité du manquement.

J’admets, madame la garde des sceaux, comme nous l’avons fait pour les parlementaires européens, qu’il ne faille pas poser l’exigence d’un manquement d’une particulière gravité, mais permettre au Conseil constitutionnel d’avoir une appréciation en fonction de la gravité du manquement.

C’est subtil, mais nous ne voudrions pas que le Conseil constitutionnel n’ait aucune capacité d’appréciation.

L’avis de la commission est donc favorable sur l’amendement n° 70, sous réserve de l’adoption de ce sous-amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Je souscris à ce sous-amendement.

Puisque je dispose d’un peu plus de deux minutes de temps de parole, je veux en profiter pour dire que nous sommes nombreux à partager les propos tenus par Mme Assassi au sujet des amendements n° 51 et 50, qui ont été retirés.

Le sous-amendement est adopté.

L'amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, pour explication de vote sur l'article.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Yves Collombat

Je trouve étrange que cette attestation ne constitue pas une prise de position formelle de l’administration. On a l’impression que c'est un peu décoratif !

L'article 2 est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

Je suis saisie de quatre amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 13 rectifié, présenté par MM. Cabanel, Labbé, Manable, Tourenne et Duran, Mmes Herviaux, Yonnet et Monier, MM. Labazée, Botrel, Carcenac et Courteau, Mmes Lepage, S. Robert, Jourda, Conway-Mouret, Meunier et Benbassa, M. Desessard, Mmes Archimbaud et Bouchoux et M. Dantec, est ainsi libellé :

Après l'article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Le I de l’article 3 de la loi n° 62-1292 du 6 novembre 1962 relative à l’élection du Président de la République au suffrage universel est complété par huit alinéas ainsi rédigés :

« Le Conseil constitutionnel s’assure que le bulletin n° 2 du casier judiciaire des personnes présentées ne porte pas la mention d’une condamnation incompatible avec l’exercice d’un mandat électif au sens de l’article LO 127-1 du code électoral.

« Les condamnations incompatibles avec l’exercice d’un mandat électif sont :

« 1° Les infractions d’atteintes à la personne humaine réprimées aux articles 221-1 à 221-5-5, 222-1 à 222-18-3, 222-22 à 222-33, 222-33-2 à 222-33-3, 222-34 à 222-43-1, 222-52 à 222-67, 224-1 A à 224-8, 225-4-1 à 225-4-9, 225-5 à 225-12, 225-12-1 à 225-12-4, 225-12-5 à 225-12-7, 225-12-8 à 225-12-10, 225-13 à 225-16 du code pénal ;

« 2° Les infractions traduisant un manquement au devoir de probité, réprimées aux articles 432-10 à 432-15 du même code ;

« 3° Les infractions de corruption et trafic d’influence, réprimées aux articles 433-1, 433-2, 434-9, 434-9-1, 435-1 à 435-10 et 445-1 à 445-2-1 dudit code ;

« 4° Les infractions de recel ou de blanchiment, réprimées aux articles 321-1, 321-2, 324-1 et 324-2 du même code, du produit, des revenus ou des choses provenant des infractions mentionnées aux 1° et 2° du présent article ;

« 5° Les infractions réprimées aux articles L. 106 à L. 109 du code électoral ;

« 6° Les infractions fiscales. »

II. – Après l’article LO 127 du code électoral, il est inséré un article LO 127-1 ainsi rédigé :

« Art. L O 127-1. - Ne peuvent pas faire acte de candidature les personnes dont le bulletin n° 2 de son casier judiciaire porte la mention d’une condamnation incompatible avec l’exercice d’un mandat électif.

« Les condamnations incompatibles avec l’exercice d’un mandat électif sont :

« 1° Les infractions d’atteintes à la personne humaine réprimées aux articles 221-1 à 221-5-5, 222-1 à 222-18-3, 222-22 à 222-33, 222-33-2 à 222-33-3, 222-34 à 222-43-1, 222-52 à 222-67, 224-1 A à 224-8, 225-4-1 à 225-4-9, 225-5 à 225-12, 225-12-1 à 225-12-4, 225-12-5 à 225-12-7, 225-12-8 à 225-12-10, 225-13 à 225-16 du code pénal ;

« 2° Les infractions traduisant un manquement au devoir de probité, réprimées aux articles 432-10 à 432-15 du même code ;

« 3° Les infractions de corruption et trafic d’influence, réprimées aux articles 433-1, 433-2, 434-9, 434-9-1, 435-1 à 435-10 et 445-1 à 445-2-1 dudit code ;

« 4° Les infractions de recel ou de blanchiment, réprimées aux articles 321-1, 321-2, 324-1 et 324-2 du même code, du produit, des revenus ou des choses provenant des infractions mentionnées aux 1° et 2° du présent article ;

« 5° Les infractions réprimées aux articles L. 106 à L. 109 du code électoral ;

« 6° Les infractions fiscales.

« Un décret en Conseil d’État fixe les modalités d’application du présent article. »

III. – Le I du présent article s’applique à compter de la première élection présidentielle suivant la promulgation de la présente loi.

Le II du présent article s’applique à compter, s’agissant des députés, du prochain renouvellement général de l’Assemblée nationale et, s’agissant des sénateurs, du prochain renouvellement de la série à laquelle appartient le sénateur.

La parole est à M. Henri Cabanel.

Debut de section - PermalienPhoto de Henri Cabanel

Cet amendement vise à imposer aux candidats à l’élection présidentielle ou aux élections législatives et sénatoriales la production d’un casier judiciaire vierge.

Je ne reviendrai pas sur les arguments que j’ai développés lors de la discussion du projet de loi ordinaire. Je veux simplement vous rappeler la proposition de loi que j’ai déposée au Sénat sur le sujet. Deux propositions de loi, l’une ordinaire et l’autre organique, ayant le même objet, déposées par ma collègue députée Fanny Dombre-Coste, ont été adoptées le 1er février dernier à l'Assemblée nationale par l’ensemble des députés, quelles que soient leurs convictions politiques.

Cet amendement a pour but de répondre à la double nécessité d’exemplarité et d’équité. Hier soir, nous avons procédé au « rattrapage » de notre vote sur l’article 4. L’image du Sénat avait été écornée, comme vous avez pu le constater en lisant la presse hier matin. Nous devrions veiller à donner une image plus positive de notre assemblée. Après le vote des deux propositions de loi à l'Assemblée nationale, on sent qu’il y a ici une certaine retenue. J’ai entendu les arguments du rapporteur et de la garde des sceaux selon lesquels le dispositif proposé est beaucoup plus sévère que l’exigence de présentation d’un casier judiciaire vierge. Mais les Français peuvent-ils le comprendre ?

Il faut arrêter de s’écouter entre nous, et tendre l’oreille vers l’extérieur. Avec mon collègue Joël Labbé, comme je l’ai dit hier, j’ai proposé une consultation sur les textes dont nous discutons et les retours que nous avons eus sur l'amendement « casier vierge » sont nombreux et positifs. Il est temps d’écouter les Français pour donner, avec ces projets de loi, une image plus moderne que celle que nous avons pu avoir jusqu’à aujourd'hui.

Je ne poserai qu’une question : que dire aux citoyens candidats à la fonction publique qui, eux, doivent présenter un casier judiciaire vierge ?

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

Les amendements n° 2 rectifié bis, présenté par Mme Lienemann et M. Montaugé, n° 61, présenté par Mme Garriaud-Maylam, et n° 3 rectifié, présenté par Mme Lienemann et M. Montaugé, ne sont pas soutenus.

Quel est l’avis de la commission sur l'amendement n° 13 rectifié ?

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

Je vous rappelle, mon cher collègue, que le débat sur le choix entre l’exigence d’un casier judiciaire vierge ou l’absence de condamnation pénale a déjà eu lieu sur le projet de loi ordinaire. Il nous semble que la deuxième solution est plus sûre d’un point de vue juridique et, en réalité, plus sévère.

Le casier judiciaire vierge est un système aléatoire, puisque la personne condamnée peut demander, ou non, et obtenir, ou non, du procureur – et non d’un juge du siège – que la peine soit effacée de son casier judiciaire. On ne saura donc jamais si un condamné a réussi à faire oublier la condamnation qu’il a subie pour se porter candidat.

Par ailleurs, la mesure proposée est rétroactive. Or, en matière de loi pénale, la rétroactivité est inconstitutionnelle.

Je vous assure que le dispositif adopté dans la loi ordinaire est plus fort, plus respectueux des droits fondamentaux et moins aléatoire que votre proposition. Par conséquent, comme nous avons déjà voté sur ce sujet qui revient maintenant, il serait, me semble-t-il, préférable, si vous en êtes d’accord et sans vous demander de renoncer à vos convictions – vous les avez réitérées avec force –, que vous retiriez votre amendement.

Vous avez pu soutenir votre position, qui a déjà été rejetée dans la loi ordinaire. Si vous ne retirez pas votre amendement, nous procéderons au vote, mais je ne doute pas que le Sénat votera de la même façon pour la loi organique que pour la loi ordinaire, puisque l’exigence de cohérence s’impose à nos votes.

Debut de section - Permalien
Nicole Belloubet, garde des sceaux

Sans reprendre les débats, je veux dire qu’il existe, nous semble-t-il, un risque constitutionnel. Je comprends parfaitement l’objectif de probité qui vous a poussé, monsieur le sénateur, à défendre cet amendement, mais l’automaticité de la peine qui pourrait en découler présente un risque constitutionnel.

Par ailleurs, en ce qui concerne la comparaison que vous avez faite avec l’accès à la fonction publique, il me semble que le droit de suffrage a un caractère constitutionnel extrêmement puissant, de même que ses corollaires, la liberté de candidature et la liberté de choix de l’électeur.

Tout en comprenant l’objectif que vous défendez, j’émets un avis défavorable sur votre amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Henri Cabanel

Non, je le retire, madame la présidente, par cohérence avec le vote sur le projet de loi ordinaire.

J’entends bien les arguments que vous avez développés, madame la garde des sceaux, mais je ne les partage pas. Je souhaite que le débat qui aura lieu à l'Assemblée nationale soit plus bénéfique que celui que nous avons eu sur cet amendement.

Monsieur le rapporteur, les Français ne comprennent pas l’argumentation que vous avez développée.

Debut de section - PermalienPhoto de Henri Cabanel

M. Henri Cabanel. En revanche, ils voient très bien ce que veut dire la présentation d’un casier vierge.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

L'amendement n° 13 rectifié est retiré.

Néanmoins, et à titre très exceptionnel, je vous donne la parole, monsieur Guillaume.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

Notre collègue Henri Cabanel a retiré son amendement, mais je voulais vous dire, madame la garde des sceaux, que votre argumentation ne tient pas. Vous comparez les candidats à la fonction publique et ceux à une élection, en évoquant le droit de suffrage. Mais alors, à ce titre, on ne devrait pas limiter à trois le nombre de mandats, on n’interdit pas le cumul des mandats… Sinon le peuple a toujours raison !

Vos propos sont contradictoires avec le texte que vous présentez. Il faut envoyer des signes à la population. Celui que proposait Henri Cabanel était fort, et il est bon que le débat ait eu lieu dans notre hémicycle. Il a retiré son amendement, dont acte. Mais à certains moments, nous devons dire les choses : on peut traiter différemment certaines catégories de la population, par exemple les fonctionnaires et les élus. L’élu n’est pas au-dessus des lois : votre position est contraire à ce que vous voulez faire avec ce texte.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

L'amendement n° 5 rectifié quater, présenté par M. Vasselle, Mme Hummel, MM. Danesi, de Raincourt, César et Mayet, Mme Imbert, MM. Commeinhes, J.P. Fournier, Cuypers, Chaize, Genest, Lefèvre et Chasseing, Mme de Rose et MM. Calvet, Pierre, Pointereau, Longuet, Nougein, Grand et Revet, Mme F. Gerbaud, MM. D. Laurent, Laménie et Houpert et Mme Deromedi, est ainsi libellé :

Après l'article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – À l'exception du mandat au sein du conseil municipal d'une commune de moins de 3 500 habitants, nul ne peut faire acte de candidature pour un mandat électif si, au jour de l’élection ou, en cas de vacance du siège, au jour de la vacance, il exerce un troisième mandat consécutif.

II. – Le 1° de l'article LO 141-1 du code électoral est complété par les mots : « d'une commune comptant plus de 3 500 habitants ».

La parole est à M. Marc Laménie.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laménie

Cet amendement a été déposé sur l’initiative d’Alain Vasselle et cosigné par un certain nombre de collègues.

Dans les petites communes rurales, le mandat électif s’apparente pratiquement à du bénévolat. Cet amendement vise à harmoniser les dispositions du code électoral concernant ces petites communes.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

Mon cher collègue, il serait préférable de retirer votre amendement.

Celui-ci porte sur le renouvellement des mandats des élus locaux et pose comme règle que les maires de communes de plus de 3 500 habitants ne peuvent pas faire plus de trois mandats.

Je sais bien que votre intention est de protéger les maires des communes de moins de 3 500 habitants. Mais êtes-vous sûr d’être réellement favorable à la limitation de la souveraineté de l’électeur, qui se verrait interdire de renouveler pour un quatrième mandat le maire d’une commune de 3 502 habitants ?

Par ailleurs, si telle était tout de même votre intention – même si je suis certain que ce n’est pas le cas –, je vous indique qu’une telle disposition relève de la seule Constitution.

La liberté de candidature en démocratie est un droit fondamental. Si nous adoptions une disposition, comme le Gouvernement l’avait souhaité, qui limite dans le temps le renouvellement des mandats, il faut réviser la Constitution. C'est si vrai que, lorsque le président Nicolas Sarkozy a voulu limiter à deux le nombre de mandats présidentiels, cela s’est traduit par une disposition de la révision constitutionnelle de 2008.

On ne peut donc pas adopter par la loi la disposition que vous proposez, dont il n’est, de toute façon, pas certain qu’elle soit opportune pour les maires de nos communes.

Je vous donne acte de votre intention de permettre aux maires des plus petites communes d’être renouvelés au-delà de trois mandats, mais votre amendement présente des risques. Je vous demande donc de le retirer.

Debut de section - Permalien
Nicole Belloubet, garde des sceaux

Votre amendement, monsieur le sénateur, ne correspond pas exactement à l’objet du présent projet de loi organique. Si une réflexion devait être conduite sur le sujet, elle relèverait plutôt de la révision constitutionnelle annoncée par le Président de la République.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laménie

C'est le problème avec les cosignatures d’amendement ! On a peu de temps pour réagir et, je le reconnais, on peut parfois vite s’emballer…

Il faut toujours tout peser : chaque mot, chaque détail, compte. On connaît l’attachement de beaucoup d’entre nous aux petites communes, à leur identité et à leur légitimité, et au monde rural.

Avec Alain Vasselle et d’autres collègues, nous voulions faire passer des messages par cet amendement d’appel. Mais, après avoir entendu les explications pertinentes du rapporteur et de la garde des sceaux, je le retire.

Au 21° de l’article LO 132 du code électoral, après les mots : « des établissements publics », sont insérés les mots : «, des sociétés publiques locales et des sociétés d’économie mixte ». –

Adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

L'amendement n° 47 rectifié, présenté par MM. Delahaye et Bonnecarrère, Mme Férat, M. Gabouty et Mme Billon, est ainsi libellé :

Après l'article 2 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au premier alinéa du II de l'article LO 132 du code électoral, après les mots : « titulaires des fonctions suivantes », sont insérés les mots : «, sauf lorsque leur contrat est de droit privé ».

La parole est à M. Vincent Delahaye.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

Cet amendement a trait à certaines inéligibilités qui me paraissent choquantes. Je pense en particulier à celles qui sont relatives aux directeurs de cabinet, qui ont des contrats de droit privé et qui ne peuvent se présenter aux élections.

L'article LO 132 du code électoral vise les fonctions comportant de hautes responsabilités – fonctions de direction et d'autorité – dont la détention par le candidat pourrait influer sur le choix des électeurs, altérant ainsi la sincérité du scrutin.

Cette disposition me semble très excessive, surtout quand on sait que les ministres ne sont pas soumis à des mesures d’inéligibilité. Ils ont donc la possibilité de se présenter, alors qu’ils exercent des fonctions d’autorité qui influent forcément sur l’électeur.

La situation n’est pas normale. Je ne connais pas les raisons qui sont à l’origine de cette disposition, mais l’objectif de mon amendement est de revenir sur cette interdiction, notamment pour les personnes sous contrat de droit privé. Celles-ci ne disposent pas d’une garantie d’emploi à vie. Je ne vois pas pour quelle raison on leur interdirait de se présenter.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

Je comprends votre souci, mon cher collègue. Des responsables d’administration locale sont sous contrat de droit privé, alors que beaucoup d’autres sont sous contrat de droit public.

Néanmoins, leur fonction est la même. Le code électoral prévoit qu’un certain nombre de fonctions empêchent leurs titulaires d’être immédiatement candidats à des élections locales, parce qu’ils ont en fait un « pouvoir local ». Il n’est pas tenu compte de la nature juridique du lien entre ces personnes et leur employeur, qui, lui, est public et exerce des responsabilités d’administration générale de collectivité.

Il faut aller au fond des choses. Ce qui est important, c'est d’empêcher d’être candidats des personnalités qui pourraient, par les responsabilités qu’elles exercent, influer sur le vote des électeurs. Peu importe la nature de leur contrat !

Quand on lit la liste de l’article LO 132 du code électoral, cela reviendrait à permettre aux uns d’être candidats, parce qu’ils ont un contrat de droit privé, et à interdire aux autres de l’être parce qu’ils ont un contrat de droit public, alors que tous font exactement la même chose !

Je vous demanderai, mon cher collègue, de bien vouloir retirer votre amendement ; à défaut, l’avis de la commission serait défavorable.

Debut de section - Permalien
Nicole Belloubet, garde des sceaux

Je partage l’analyse du rapporteur. Le conflit d’intérêts est inhérent à la fonction exercée et non à la nature du contrat. Je vous saurais gré de bien vouloir retirer votre amendement ; à défaut, je serai dans l’obligation d’émettre un avis défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

J’entends bien l’argumentation qui a été avancée. Plus que la nature, publique ou privée, du contrat, il m’importe qu’on s’interroge sur les raisons qui ont prévalu à l’élaboration de cette interdiction. De nombreuses fonctions peuvent influer sur le choix des électeurs, et pas uniquement celles qui figurent dans le code électoral. Je ne vois pas pourquoi on interdit aux directeurs de cabinet de se présenter à des élections, et pas aux ministres.

J’aimerais que soit menée une réflexion de fond sur ce sujet. Je sais que mon amendement ne sera pas adopté et j’ai bien compris qu’il était difficile de faire une distinction selon la nature du contrat alors que les fonctions exercées sont les mêmes.

Dans ces conditions, je retire mon amendement, madame la présidente.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

L'amendement n° 47 rectifié est retiré.

Chapitre II

Dispositions relatives aux incompatibilités

Le 5° du III de l’article LO 135-1 du code électoral est complété par les mots : «, ainsi que les participations directes ou indirectes qui confèrent le contrôle d’une société, d’une entreprise, ou d’un organisme dont l’activité consiste principalement dans la fourniture de prestations de conseil ».

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

L'amendement n° 33, présenté par Mme S. Robert, MM. Sueur et Leconte, Mme D. Michel, M. Vandierendonck et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Supprimer les mots :

qui confèrent le contrôle

La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

L'amendement vise à élargir la portée de l'article, en prévoyant que l'obligation déclarative relative aux activités de conseil ne se limite pas aux seules participations qui « confèrent le contrôle » d'une société de conseil.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

Toutes les obligations de déclaration sont liées à une incompatibilité.

Aussi, en l’absence d’incompatibilité, une obligation de déclaration ne peut être prévue. C'est le cas avec cet amendement. La commission y est donc défavorable.

Debut de section - Permalien
Nicole Belloubet, garde des sceaux

Défavorable.

L'amendement n'est pas adopté.

L'article 3 est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

L'amendement n° 44, présenté par Mmes Assassi et Cukierman, M. Favier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Après l'article 3

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le 11° du III de l’article LO 135-1 du code électoral, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« …° La nature, la valeur, l’origine et le motif de tout avantage gratuit d’une valeur de plus de 1 500 euros, exception faite de cadeaux reçus par des parents proches. »

La parole est à Mme Marie-France Beaufils.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-France Beaufils

Des élus sont régulièrement sollicités par des concitoyens, des associations et aussi des groupes d’intérêts. Ces sollicitations peuvent s’accompagner d’un cadeau, d’une invitation, voire d’une ristourne au montant parfois élevé. Certains groupes d’intérêts espèrent obtenir compensation de ces cadeaux.

Dans l’esprit de ce qui nous a animés lors des dernières années où plusieurs réformes ont vu le jour, comme la déclaration de patrimoine et le registre des représentants d’intérêts, il s’agit aujourd’hui pour nous d’aller plus avant dans la prévention des conflits d’intérêts et de lever les soupçons réguliers de corruption.

Les récentes échéances électorales ont marqué l’attention particulière des Français au sujet des cadeaux faits aux élus. Cette exigence de transparence traduit la perte de confiance des citoyens envers leurs élus, qu’il nous convient de restaurer, en inscrivant dans le projet de loi organique dont nous débattons un principe de prudence.

Ainsi, nous proposons d’ajouter l’obligation de déclaration à la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique la nature, la valeur, l’origine et le motif de tout avantage gratuit excédant une valeur de 1 500 euros.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

Cet amendement est tout à fait inutile. L’organisation de la déontologie relève exclusivement du bureau. On ne va pas commencer à faire figurer cette question dans la loi. Le bureau a pris les devants : je vous rappelle, ma chère collègue – mais vous le savez et le pratiquez – que tout cadeau d’une valeur supérieure non pas à 1 500 euros mais à seulement 150 euros doit être déclaré.

Nous avons adopté des règles depuis mai 2015. Cette obligation est assortie de sanctions disciplinaires. Ce dispositif est bien plus exigeant que la seule déclaration à une autorité extérieure, qui n’a d’ailleurs pas vocation à se prononcer sur ce type de question.

L’avis est donc défavorable.

Debut de section - Permalien
Nicole Belloubet, garde des sceaux

Même avis.

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

L'amendement n° 46, présenté par M. Zocchetto, n'est pas soutenu.

Après le 7° de l’article LO 146 du code électoral, il est inséré un 8° ainsi rédigé :

« 8° Les sociétés, entreprises ou organismes dont l’activité consiste principalement à fournir des prestations de conseil aux sociétés, entreprises, établissements ou organismes mentionnés aux 1° à 7°. » –

Adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

L'amendement n° 85 rectifié, présenté par Mme Laborde, M. Collin et Mmes Costes, Jouve et Malherbe, est ainsi libellé :

Après l'article 4

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le 7° de l’article LO 146 du code électoral, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« …° Les sociétés, entreprises ou organismes de plus de 5 000 salariés ou dont le chiffre d'affaires excède 1, 5 milliard d'euros et le total de bilan 2 milliards d'euros. »

La parole est à Mme Françoise Laborde.

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Laborde

Cet amendement a pour objet de créer une nouvelle incompatibilité entre le mandat parlementaire et plusieurs fonctions de direction au sein des très grandes entreprises.

Il ne s’agit évidemment pas d’empêcher les personnes assurant ces fonctions de devenir parlementaires : leur expérience dans l’entreprise peut utilement éclairer le débat public.

Il est cependant nécessaire de les contraindre de choisir entre la faculté d’exercer ponctuellement un mandat de représentant de la Nation et des engagements professionnels potentiellement très lourds.

Le mandat parlementaire exige une très grande disponibilité, on l’a régulièrement entendu dans le débat sur le non-cumul des mandats. La direction d’entreprises de plus de 5 000 salariés ou générant un chiffre d’affaires supérieur à 2 milliards d’euros, avec toutes les sujétions qui lui incombent, paraît incompatible avec celles qui sont dévolues aux parlementaires.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

Ma chère collègue, la nature du problème est exactement la même, que la société soit petite ou grosse. Les incompatibilités sont faites pour éviter que les liens d’intérêts d’un parlementaire mettent en cause son indépendance.

Vous savez que les incompatibilités sont, heureusement, déjà très larges puisqu’elles comprennent le fait de travailler pour des sociétés cotées, des sociétés d’économie mixte, des sociétés subventionnées par la puissance publique. Mais que la société soit petite ou grosse, j’y insiste, ne change rien du point de vue de la protection de l’indépendance du parlementaire.

C'est la raison pour laquelle je vous serais très reconnaissant si vous acceptiez de retirer votre amendement au bénéfice des explications que je vous ai apportées. Dans le cas contraire, la commission émettra un avis défavorable.

Debut de section - Permalien
Nicole Belloubet, garde des sceaux

Madame la sénatrice, je partage l’avis du rapporteur. L’objet de la loi est la prévention des conflits d’intérêts, qui sont liés à la nature de l’activité de l’entreprise. La taille de l’entreprise ne constitue, par elle-même, ni un facteur de risque ni un critère pertinent à cette fin.

Je souhaiterais que vous retiriez votre amendement ; à défaut, j’y serai défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Laborde

Je le retire, madame la présidente, au vu des explications satisfaisantes qui m’ont été apportées.

Je me faisais juste un petit plaisir à l’endroit des grosses entreprises, que nous remarquons plus facilement que les petites…

L’article LO 146-1 du code électoral est ainsi rédigé :

« Art. LO 146-1. – Il est interdit à tout député de :

« 1° Commencer à exercer une fonction de conseil qui n’était pas la sienne avant le début de son mandat ;

« 2° Poursuivre une telle activité lorsque celle-ci a été initiée dans les douze mois précédant le premier jour du mois de son entrée en fonction ;

« 3° Fournir des prestations de conseil aux sociétés, entreprises, établissements ou organismes mentionnés aux 1° à 7° de l’article LO 146. »

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

Je suis saisie de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 4 rectifié, présenté par Mme Lienemann et MM. Montaugé et Daudigny, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 2

Après le mot :

député

insérer les mots :

et à tout sénateur

II. – Alinéa 4

Rédiger ainsi cet alinéa :

« 2° Poursuivre une telle activité dès le premier jour du mois de son entrée en fonction ;

La parole est à M. Yves Daudigny.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Daudigny

L’amendement est défendu, madame la présidente.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

L'amendement n° 59, présenté par M. Assouline, n'est pas soutenu.

L'amendement n° 34, présenté par MM. Botrel, Sueur, Leconte, Mazuir et Lozach, Mme Cartron et MM. Roux, Duran et Vandierendonck, est ainsi libellé :

Alinéa 4

Remplacer les mots :

douze mois

par les mots :

trois ans

La parole est à M. Yannick Botrel.

Debut de section - PermalienPhoto de Yannick Botrel

Le projet de loi organique prévoit que les parlementaires qui exercent une activité de conseil sont autorisés à poursuivre une telle activité si celle-ci a été initiée dans les douze mois précédant le premier jour du mois de son entrée en fonction.

Notre volonté est de faire que cette loi soit efficace et qu’elle garantisse une confiance totale de nos concitoyens dans l’action publique, sans pour autant sombrer, comme cela a été rappelé plusieurs fois, notamment lors de la discussion générale, dans une chasse aux sorcières qui serait néfaste.

Le présent amendement prévoit que le parlementaire est autorisé à poursuivre une activité de conseil si celle-ci a été initiée dans les trois ans précédant le premier jour du mois de son entrée en fonction.

Cet amendement vise à lever tout soupçon à l’encontre des parlementaires concernés. En effet, le délai de douze mois, initialement prévu, ne nous semble pas suffisant pour garantir la plus grande transparence vis-à-vis de nos concitoyens. Vous le savez, douze mois avant l’élection, dans de nombreux cas de figure, nous connaissons déjà les candidats qui se présenteront. Il s’agit de prévenir les situations dans lesquelles certains d’entre eux tenteraient de développer une activité de conseil en vue de devenir parlementaire. C’est pourquoi le délai proposé nous semble insuffisant.

Sans sombrer dans une suspicion systématique, nous ne devons pas laisser de place aux doutes pour nos concitoyens et nous devons faire preuve de la plus totale transparence.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

Mon cher collègue, votre amendement touche non pas à la liberté d’entreprendre du parlementaire, mais à la liberté pour les Français qui exercent une profession d’être candidats. Avec votre amendement, un jeune de 26 ans, qui a terminé ses études et qui se lance dans une activité de consultant, n’aurait pas le droit d’être candidat à un mandat législatif ou sénatorial pendant les trois années qui suivent le début de sa carrière professionnelle.

Cette mesure est gravement frustratoire d’un droit fondamental : celui de tout Français d’être candidat à une élection.

Je pense même que, en ayant prévu un délai d’un an avant de pouvoir être candidat à une élection tout en gardant son métier, la mesure que nous avons prise est déjà extrêmement sévère.

Ainsi, on ne peut pas adopter cet amendement, car la privation du droit fondamental d’exercer sa profession qui en résulterait serait trop grande pour les citoyens français qui voudraient être candidats à des élections législatives ou sénatoriales.

Debut de section - Permalien
Nicole Belloubet, garde des sceaux

Je ferai la même observation et j’émettrai aussi un avis défavorable sur ces amendements.

Il me semble que ne retenir aucune limite à l’antériorité ou, au contraire, prévoir un délai de trois ans, comme cela est proposé, si je ne me trompe pas, au travers de l’amendement de M. Botrel, serait totalement disproportionné. En effet, cela conduirait à interdire toute candidature à une élection aux personnes exerçant une activité professionnelle de cette nature. Le risque constitutionnel serait excessif ou disproportionné.

Pour toutes ces raisons, nous ne pouvons pas admettre cet amendement.

L’amendement n’est pas adopté.

L’amendement n’est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

Je suis saisie de quatre amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 29, présenté par Mmes Assassi et Cukierman, M. Favier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

… – Après l’article LO 146-1 du code électoral, il est inséré un article LO 146-… ainsi rédigé :

« Art. LO 146 -… – Les revenus qu’un parlementaire tire d’activités de conseil sont plafonnés à 15 % de l’indemnité parlementaire. La liste des clients du cabinet de conseil auquel appartient le parlementaire dans ce cadre est rendue publique. »

La parole est à Mme Éliane Assassi.

Debut de section - PermalienPhoto de Éliane Assassi

À défaut d’interdire l’activité de conseil aux parlementaires en cours de mandat, nous souhaitons, au travers de cet amendement, limiter les revenus annexes tirés de ces activités.

Nous préconisons ainsi l’établissement d’un seuil de 15 % des revenus et nous recommandons également que soit publiée la liste des clients du cabinet de conseil auquel appartient le parlementaire. Il s’agit, même si l’activité de conseil du parlementaire est en sommeil, de permettre une traçabilité des possibles conflits d’intérêts.

Au travers d’une contribution du groupe CRC à une mission d’information sur les conflits d’intérêts, menée par l’ancien sénateur Jean-Jacques Hyest, nous étions même allés plus loin en promouvant non seulement une conception du conflit d’intérêts quand celui-ci est avéré, mais encore de manière préventive. C’est ce qui sous-tend cet amendement, qui vise à instaurer la publicité sur les clients du cabinet de conseil d’un parlementaire, qu’il exerce ou non son activité.

Par ailleurs, nous préconisons d’aller beaucoup plus loin dans le régime des incompatibilités, en interdisant notamment tout travail pendant l’exercice d’un mandat. Le caractère général de cette interdiction aurait au moins le mérite de la clarté. Bien sûr, on aurait pu envisager des autorisations accordées par une autorité unique et indépendante de déontologie de la vie politique ; c’est en ces termes que nous intervenions déjà en 2011, anticipant ainsi la création de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique.

Vous l’aurez compris, mes chers collègues, cet amendement tend simplement, à défaut de l’interdire, à limiter la proportion des revenus issus des activités de conseil. Il s’agit donc d’un amendement de repli et, me semble-t-il, de bon sens.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

L’amendement n° 19, présenté par M. Kaltenbach n’est pas soutenu.

L’amendement n° 35 rectifié ter, présenté par Mme Yonnet, M. Sueur, Mmes Blondin, Cartron et Lepage, MM. Lozach, Marie et Mazuir, Mme Conway-Mouret, M. Madec, Mme Féret et M. Leconte, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

… – Après l’article LO 146-1 du code électoral, il est inséré un article LO 146-… ainsi rédigé :

« Art. LO 146 - … – Les revenus qu’un député tire d’activités de conseils sont plafonnés à 50 % de l’indemnité parlementaire. »

La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Cet amendement est défendu, madame la présidente.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

L’amendement n° 25 rectifié, présenté par M. Richard et les membres du groupe La République En Marche, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

… – Le III de l’article LO 135-1 du code électoral est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Le député retirant de son activité de conseil une recette brute supérieure à 150 000 € au cours de la dernière année fait figurer au titre du 11°, dans le mois suivant la clôture de l’exercice, la liste des cinq entités dont il a obtenu les recettes les plus importantes. »

La parole est à M. Alain Richard.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Richard

Sur ce thème des conflits d’intérêts liés aux activités de conseil, nous devons essayer de trouver la bonne règle, celle qui instaure un équilibre entre deux principes : d’une part, le fait que les parlementaires, sur le fondement de la Constitution, ont la liberté d’entreprendre et peuvent donc, en droit, exercer une activité professionnelle intégrale en même temps que leur mandat parlementaire – c’est quelque chose d’un peu surprenant pour la grande majorité de nos concitoyens, mais c’est le droit – et, d’autre part, l’exigence d’indépendance ainsi que celle de disponibilité.

Or, conformément au texte organique en vigueur, il existe déjà une obligation de déclaration de toute une série de données ; je souligne à ce sujet que, au 11° du III de l’article LO 135-1 du code électoral, ce sont toutes les activités professionnelles que l’on doit déclarer, qu’elles soient ou non potentiellement génératrices de conflits d’intérêts.

Dès lors, notre raisonnement consiste à dire que, quand l’activité professionnelle de conseil prend un caractère prédominant par rapport à l’exercice du mandat parlementaire, si l’on ne peut constitutionnellement s’y opposer – c’est d’ailleurs pour cela que les amendements consistant à plafonner légalement les ressources du parlementaire ne peuvent prospérer –, il nous paraît en revanche évident que, pour prévenir les conflits d’intérêts, il doit y avoir un signalement.

Notre amendement se fonde donc sur ce principe. Il vise à ce que, lorsque la recette issue de l’activité de conseil dépasse le double de l’indemnité parlementaire, ce qui semble indiquer que la personne est très fortement investie dans cette activité et qu’elle jouit d’une reconnaissance du marché très au-dessus de la moyenne, même si cette activité est licite – il n’est pas ici question de l’empêcher –, il paraît tout de même cohérent avec les déclarations d’intérêts telles que nous les avons définies, incluant par exemple les déjeuners, que l’intéressé, qui perçoit donc plus de 150 000 euros par an de son activité de conseil, indique dans sa déclaration d’intérêts qui sont les cinq premiers contributeurs.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

Ceux de ces amendements qui visent à limiter la rémunération qu’un parlementaire peut tirer d’une activité compatible avec son mandat – compatible, j’y insiste – méconnaissent le fait que les activités professionnelles ne sont pas toutes rémunérées à la même hauteur. Aussi surprenant que cela puisse paraître, il y a des activités qui, avec trois ou quatre heures de travail, peuvent apporter une rémunération très supérieure à l’indemnité parlementaire mensuelle elle-même ; c’est ainsi.

Dès lors, soit on décide que ces activités sont incompatibles avec le mandat parlementaire, mais ce n’est pas le cas ici – puisque l’on propose de limiter le montant du revenu, c’est qu’elles sont tout à fait compatibles –, soit on limite le revenu qu’elles procurent, mais alors on ne peut pour ainsi dire plus les exercer qu’à titre quasi bénévole par rapport au revenu normal que l’on tire de ce type d’activité.

Il y a en effet des activités d’avocat ou de conseil qui, pour un professionnel qui a pignon sur rue, peuvent rapporter 700, 800, voire 900 euros par heure ! Ainsi, derrière ces amendements qui limitent la rémunération susceptible d’être perçue, il y a dès le départ, me semble-t-il, une erreur dans le choix de l’instrument. On pourrait éventuellement dire que l’on ne peut consacrer plus de deux, trois ou quatre jours par semaine à ces activités, parce qu’il faut se consacrer principalement à son travail de parlementaire, mais, à ce moment-là, on rentrerait dans des considérations très délicates parce que personne ne peut nous interdire de travailler de nuit, ou le samedi, voire le dimanche.

Au fond, notre critère de décision doit uniquement être : « cette activité est-elle compatible ou non ? ». Les incompatibilités ont déjà été élargies et nous les élargissons encore en prévoyant que l’on ne peut conserver une activité de conseil qui n’aurait pas été commencée au moins un an avant le début du mandat parlementaire – nous avons rejeté le délai de trois ans, mais nous avons adopté ce délai d’un an.

L’avis de la commission est donc défavorable sur l’amendement n° 29, ainsi que sur l’amendement n° 35 rectifié ter.

L’amendement n° 25 rectifié de M. Richard, qui vise à rendre publique la liste des cinq principaux clients d’un parlementaire qui exercerait une activité de conseil, a également reçu un avis défavorable de la commission, au motif que cette liste de clients est normalement couverte par le secret professionnel.

Cela dit, je dois dire que l’entorse à nos principes que constituerait cette disposition me paraît infiniment moins grave que celle dont sont porteurs les précédents amendements. Aussi, à titre personnel, je ne serais pas éloigné, sur cet amendement, de m’en remettre à la sagesse de la Haute Assemblée.

Debut de section - Permalien
Nicole Belloubet, garde des sceaux

L’amendement n° 29, qui tend à plafonner les revenus tirés d’activités de conseil à 15 % de l’indemnité parlementaire, n’établit pas une interdiction absolue, mais, malgré cela, le fait de limiter les revenus tirés d’une activité, quelle qu’elle soit, est susceptible de porter atteinte à la liberté d’entreprendre.

En outre, l’objectif visé, tout à fait digne d’intérêt puisqu’il s’agit d’inciter fortement les parlementaires à se consacrer à l’exercice de leur mission et à leur mandat, devrait logiquement conduire à appliquer ce plafond de 15 % à l’ensemble des activités exercées par les parlementaires, et non seulement l’activité de conseil.

Enfin, dernière observation, le conflit d’intérêts dépend davantage de la nature des activités exercées, comme le faisait valoir M. le rapporteur, que du montant des sommes perçues au titre de ces activités.

Pour toutes ces raisons, tant constitutionnelles que de logique interne, j’émets un avis défavorable sur cet amendement.

L’amendement n° 25 rectifié, présenté par M. Richard, a pour objectif de rendre plus visibles un certain nombre de situations dans lesquelles le risque de conflit d’intérêts pourrait paraître élevé pour les raisons que vous avez évoquées. Vous souhaitez pour cela, monsieur le sénateur, que les parlementaires qui tirent d’une activité de conseil des revenus substantiels déclarent leurs principaux clients, les cinq plus importants, disiez-vous.

Je comprends, monsieur le sénateur, l’intérêt de votre amendement, qui va dans le sens d’un meilleur contrôle des activités de conseil. Pour autant, l’efficacité de la mesure que vous proposez ne me semble pas suffisamment établie, pour deux raisons. Tout d’abord, le seuil de 150 000 euros peut sembler arbitraire – ne voyez aucune connotation péjorative dans ce terme –, car, au fond, pourquoi 150 000 euros ? En outre, il me semble que cet amendement pose la question du secret professionnel, lorsqu’il s’agit d’une activité réglementée, mais vous avez peut-être un autre regard là-dessus.

Enfin, il me semble qu’en se concentrant sur la situation de parlementaires qui tirent des revenus importants de leur activité de conseil, cette mesure, M. le rapporteur l’a également expliqué, risque de rendre moins visibles d’autres situations qui pourraient être tout aussi problématiques. Je le répète, l’existence d’un conflit d’intérêts n’est pas liée uniquement au revenu que l’activité génère.

Pour toutes ces raisons, j’émets un avis défavorable sur cet amendement, de même que sur l’amendement n° 35 rectifié ter.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

La parole est à M. André Reichardt, pour explication de vote sur l’amendement n° 29.

Debut de section - PermalienPhoto de André Reichardt

Je voterai naturellement contre ces trois amendements, mais mon intervention portera sur l’amendement n° 29, sur lequel je souhaite particulièrement m’étendre parce que j’ai un peu de mal à le comprendre ; il me gêne même singulièrement.

Lorsque l’on propose que les revenus qu’un parlementaire tire d’activités de conseil soient plafonnés à 15 % de l’indemnité parlementaire, eu égard aux coûts des prestations de conseil, cela laisse entendre que les revenus d’un parlementaire sont énormes.

Madame Assassi, mes chers collègues, 15 % de notre indemnité, vu la tarification habituelle des prestations de conseil, je pense que cela ne couvre même pas le coût que le consultant paiera pour la cotisation forfaitaire la plus basse ! De vous à moi, si l’on devait suivre cet amendement, cela signifierait simplement qu’il n’y a aucun intérêt pour le consultant de s’installer.

C’est pourquoi j’aurais tendance à vous proposer de rectifier votre amendement en interdisant purement et simplement, puisque c’est bien cela que cela veut dire, l’activité de conseil exercée en plus d’un mandat parlementaire.

Je ne comprends donc vraiment pas du tout cet amendement ; je le répète, ce qui me gêne vraiment, c’est qu’il donne le sentiment que nous, parlementaires, sommes énormément payés. Or le moins que l’on puisse dire c’est que ce n’est pas franchement le cas.

M. Alain Gournac sourit.

Debut de section - PermalienPhoto de Éliane Assassi

Ce n’est pas risible, monsieur Gournac, il y a des personnes qui gagnent 1 200 euros par mois !

Debut de section - PermalienPhoto de André Reichardt

Très franchement, je ne comprends pas beaucoup plus l’amendement n° 35 rectifié ter, mais, lui, au moins, vise à instaurer un plafond de 50 %

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

Les explications de vote portent sur l’amendement n° 29, mon cher collègue.

Debut de section - PermalienPhoto de André Reichardt

Je voterai donc contre ces trois dispositions et, en tout état de cause, je ne comprends certainement pas les amendements n° 29 et 35 rectifié ter.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

Je mets aux voix l’amendement n° 29.

J’ai été saisie d’une demande de scrutin public émanant de la commission.

Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

Le scrutin a lieu.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

Il est procédé au dépouillement du scrutin.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 118 :

Le Sénat n’a pas adopté.

La parole est à Mme Évelyne Yonnet, pour explication de vote sur l’amendement n° 35 rectifié ter.

Debut de section - PermalienPhoto de Evelyne Yonnet

Madame la présidente, madame la garde des sceaux, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, le présent amendement vise à donner aux députés et aux sénateurs la possibilité de poursuivre une activité de conseil parallèlement à leur activité parlementaire et indépendamment de celle-ci.

Bien que je souhaite permettre aux représentants de la Nation de travailler, cela doit évidemment être encadré et soumis à certaines règles. C’est pourquoi je propose que les revenus tirés des activités de conseil soient plafonnés à un seuil de 50 % de l’indemnité parlementaire, ce qui limiterait ainsi le risque de conflit d’intérêts sans engendrer de suspension ou de cessation forcée d’activité.

En effet, je le rappelle, la politique n’est pas un métier, mais bien un mandat, une fonction ; elle ne doit donc être que momentanée. Je ne vois pas pour quel motif une telle activité pourrait entraîner une incompatibilité ou provoquer un conflit d’intérêts. Je tiens d’ailleurs à le rappeler, le présent projet de loi organique prévoit qu’un parlementaire qui aurait commencé une telle activité moins de douze mois avant son entrée en fonction ne pourrait la poursuivre pendant son mandat.

Il s’agit donc non pas d’inciter les parlementaires à se consacrer à leurs affaires personnelles plutôt qu’à celles de la Nation, mais de leur permettre de conserver leur activité de conseil qui serait bien antérieure à leur prise de fonction d’élu du peuple, sans les pénaliser, le délai d’un an écartant de facto ceux qui auraient anticipé ou souhaité un cumul des deux pour diverses raisons, comme cela a d’ailleurs pu être le cas auparavant. Cela nous paraît donc à nous, sénateurs socialistes, juste et légitime.

Nous souhaitons donc leur donner la possibilité de cumuler ces deux activités, mais avec un plafonnement de rémunération, dans la mesure où, au regard du droit en vigueur, aucun motif d’incompatibilité n’est caractérisé.

Il nous semble injuste d’imposer une cessation d’activité à tout parlementaire ayant une quelconque activité de conseil ou autre datant de plus d’un an avant son entrée en fonction à l’Assemblée nationale ou au Sénat.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

Je mets aux voix l’amendement n° 35 rectifié ter.

J’ai été saisie d’une demande de scrutin public émanant de la commission.

Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

Le scrutin a lieu.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

Il est procédé au dépouillement du scrutin.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 119 :

Le Sénat n’a pas adopté.

La parole est à M. Alain Richard, pour explication de vote sur l’amendement n° 25 rectifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Richard

Je voudrais répondre, en quelques mots, aux questions soulevées par la garde des sceaux.

Si le problème réside dans la fixation du seuil, madame la garde des sceaux, celui que je préconise n’a rien de hasardeux ; il est indexé sur le montant de l’indemnité parlementaire. Si vous considérez qu’il est préférable que cette obligation déclarative, qui n’empêche nullement l’activité, soit déclenchée par le franchissement d’un seuil qui serait fixé au niveau de l’indemnité parlementaire – environ 72 000 à 75 000 euros bruts par an –, je veux bien rectifier mon amendement en ce sens.

Néanmoins, pour que la mesure proposée ne soit pas exagérément rigoureuse, j’ai préféré que l’on se place au double de l’indemnité parlementaire, ce qui correspond au fond à une situation objective, celle dans laquelle le parlementaire a choisi de consacrer une partie de son temps et de sa disponibilité à une activité qui représente les deux tiers de son revenu. Il s’agit donc bien d’un seuil objectif.

Le secret professionnel est, quant à lui, le résultat d’une relation contractuelle. Lorsque le client, pour une activité de conseil, choisit comme prestataire un parlementaire, dont toutes les activités politiques sont publiques, on peut considérer qu’il renonce par là même au bénéfice du secret professionnel. S’il tient absolument à ce que le secret professionnel protège entièrement cette activité de conseil, il lui suffit de choisir un prestataire qui n’est pas parlementaire. C’est extrêmement simple !

Le dispositif de mon amendement me semble au moins de nature à éclairer le public sur les priorités du parlementaire dans l’exercice de son mandat et sur le risque que certaines de ses décisions soient influencées par la part que prennent, dans ses activités et revenus, des clients spécifiques, raison pour laquelle on a précisément inventé les déclarations d’intérêts.

L'amendement n'est pas adopté.

L'article 5 est adopté.

Après l’article LO 146-1 du code électoral, il est inséré un article LO 146-2 ainsi rédigé :

« Art. LO 146-2. – Il est interdit à tout député d’acquérir le contrôle d’une société, d’une entreprise ou d’un organisme dont l’activité consiste principalement dans la fourniture de prestations de conseil.

« Il est interdit à tout député d’exercer le contrôle d’une société, d’une entreprise ou d’un organisme :

« 1° Dont l’activité consiste principalement dans la fourniture de prestations de conseil, s’il en a acquis le contrôle dans les douze mois précédant le premier jour du mois de son entrée en fonction ;

« 2° Dont l’activité consiste principalement dans la fourniture de prestations de conseil aux sociétés, entreprises, établissements ou organismes mentionnés aux 1° à 7° de l’article LO 146. » –

Adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

Je suis saisie de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 67, présenté par MM. Doligé, Cardoux et Chasseing, Mme Deseyne, M. J.P. Fournier, Mmes Imbert et Lopez, MM. Milon, Pellevat et Pointereau, Mme Procaccia et M. Vasselle, est ainsi libellé :

Après l’article 6

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le code électoral est ainsi modifié :

1° Après l’article LO 146-1, il est inséré un article LO 146-2 ainsi rédigé :

« Art. LO 146 -2 – L’exercice du journalisme est incompatible avec un mandat parlementaire.

« La propriété d’un organisme de presse est incompatible avec un mandat parlementaire.

« Sont incompatibles avec le mandat de parlementaire les fonctions de président, directeur, membre du conseil d’administration chef de service, secrétaire général, conseil de surveillance d’un organisme de presse. » ;

2° L’article LO 151-1 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Dans les 3 mois qui suivent son élection, le parlementaire qui se trouve dans un des cas précités d’incompatibilité prévus à l’article LO 146-2 est tenu de la faire cesser en démissionnant de ses fonctions. À défaut d’option dans le délai imparti, le Conseil constitutionnel le déclare démissionnaire d’office de son mandat. »

La parole est à M. Éric Doligé.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Doligé

Cet amendement concerne la prévention des conflits d’intérêts.

Nous nous sommes beaucoup intéressés aux professions d’avocat, de conseil. Une autre profession importante me semble également mériter notre intérêt : il s’agit de la presse.

M. Roger Karoutchi approuve.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Doligé

En effet, la presse peut avoir parfois une influence sur le choix des électeurs, elle peut conduire à orienter les résultats des élections. Il m’a donc semblé intéressant que des journalistes élus parlementaires soient dans l’obligation de démissionner au bout de trois mois, pour retrouver leur joli métier à l’issue de leur mandat. Cette obligation me paraîtrait tout à fait logique pour éviter les éventuels conflits d'intérêts.

Les journalistes jouent un rôle important dans la société. Il est également important qu’ils puissent, comme la plupart d’entre nous, être parlementaires à temps plein.

Bien sûr, ce sujet est toujours un peu sensible dans cet hémicycle… Je me souviens notamment des interventions de M. Charasse sur les avantages de la presse. Sur ces questions, notre assemblée a toujours été très réservée.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

L'amendement n° 7 rectifié, présenté par MM. Bonhomme, Vasselle, Pellevat, Raison et A. Marc, Mmes F. Gerbaud et Duchêne, M. Doligé, Mme Deromedi et MM. de Legge, Béchu et G. Bailly, est ainsi libellé :

Après l’article 6

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l’article LO 146-1 du code électoral, il est inséré un article LO 146-… ainsi rédigé :

« Art. L O 146 - … - I. - Sont incompatibles avec le mandat parlementaire les fonctions de directeur de la publication ou de directeur de la rédaction d’une entreprise de presse.

« II. - Il est interdit à tout parlementaire de détenir des participations directes ou indirectes dans une entreprise de presse. »

La parole est à M. François Bonhomme.

Debut de section - PermalienPhoto de François Bonhomme

Mon amendement est un peu différent de celui de mon collègue.

Il s’agit de considérer que la mission d'informer est par nature consubstantielle à la démocratie et que l'indépendance nécessaire pour être source d'information ne peut être compatible avec le fait d’exercer des fonctions de représentation politique.

Dans une démocratie, la mission d’informer n’est pas une mission comme une autre : elle est essentielle.

Pour celui qui exercerait les deux fonctions, la tentation d’en abuser peut être forte. Ainsi, la détention d’un groupe de presse peut devenir un instrument politique.

C'est la raison pour laquelle je souhaite que le régime des incompatibilités parlementaires soit étendu à de telles activités.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

On comprend mieux pourquoi M. Dassault n’est pas venu ce matin…

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

Les auteurs de ces amendements soulèvent le problème de la participation de parlementaires à des organes de presse, non seulement, d'ailleurs, pour ce qui concerne la propriété ou la direction de ces organes, mais aussi, s’agissant de l’amendement de M. Doligé, pour les activités journalistiques.

Leur adoption aurait pour effet d’interdire aux parlementaires l’exercice du journalisme, notamment la possibilité de signer des articles ou des tribunes dans des journaux.

Elle aurait également pour effet de restreindre le droit de propriété des parlementaires, qui pourraient investir dans un certain nombre d’entreprises, mais pas dans des entreprises de presse, au motif que la presse, si je comprends bien, ne doit jamais exprimer d’opinion et doit se borner à relater des faits de manière objective.

Cette appréciation de la nature même du métier de journaliste n’est pas la mienne. Pour ma part, je constate que tous les journaux ont une « inspiration », et un journalisme qui serait dénué de toute expression directe ou indirecte d’opinion me paraît inaccessible.

L’histoire – je pense à Clemenceau, à Jaurès et à beaucoup d’autres – démontre au contraire la reconnaissance, dans la tradition républicaine, d’un engagement des parlementaires dans des activités de presse et de l’existence d’une presse d’opinion qui s’assume comme telle.

Par conséquent, si je reconnais volontiers que le débat sur les incompatibilités soulevées par ces amendements mérite d’être ouvert, nous devrions peut-être nous y pencher autrement qu’au détour du présent texte, dont je rappelle qu’il porte sur beaucoup d’autres matières.

Je veux aussi souligner qu’en matière d’incompatibilités, les seules règles posées, qui sont constitutionnelles, protègent le parlementaire contre le risque de dépendre d’intérêts. Aucune incompatibilité ne peut être justifiée par d’autres motifs. Or la participation à une entreprise de presse, l’exercice d’une activité de journaliste ne mettent pas en cause l’indépendance du parlementaire lui-même.

En réalité, ces amendements visent à préserver l’indépendance de la presse, et non l’indépendance du parlementaire lui-même. Or la restriction de la liberté d’entreprendre d’un parlementaire ou de sa liberté d’exercice d’une profession comme celle de journaliste, même exercée à titre gratuit, se trouve limitée par des impératifs d’ordre constitutionnel. Dès lors, même si nous admettions leur opportunité, ces amendements se heurtent à des principes fondamentaux, qui ne sont pas de pure forme et touchent à la liberté du citoyen qu’est aussi le parlementaire.

Dans ces conditions, mes chers collègues, si les problèmes que vous soulevez sont sérieux, la commission des lois, bien qu’animée de la meilleure volonté du monde, a estimé devoir s’opposer à ces amendements.

J’ajoute que j’ai été saisi par la commission de la culture, de l’éducation et de la communication, qui est toujours extrêmement sourcilleuse lorsqu’il s'agit de préserver, comme vous voulez le faire, l’indépendance de la presse. La commission m’a fait part de sa préoccupation : elle considère que l’adoption de ces amendements entraînerait l’obligation, pour les parlementaires qui siègent actuellement dans les conseils d’administration de Radio France ou de France Télévisions, de se retirer. C’est aussi un élément que nous devons prendre en considération. Souvent, j’entends des plaintes sur le traitement de l’information par les médias audiovisuels.

Pour toutes ces raisons, dans l’hypothèse où nos collègues ne retireraient pas leurs amendements, la commission des lois sera obligée d’émettre, à leur sujet, un avis défavorable.

Debut de section - Permalien
Nicole Belloubet, garde des sceaux

Je comprends parfaitement l’objet de ces amendements, qui est de renforcer les règles de déontologie applicables aux parlementaires.

M. le rapporteur a cité quelques figures historiques de parlementaires qui ont aussi été journalistes. Je ne reviendrai pas sur cette liste, qui pourrait encore être allongée.

Pour m’en tenir à un raisonnement strictement constitutionnel, l’interdiction très générale que pose l’amendement n° 67 me semble porter atteinte non seulement à la liberté d’entreprendre, mais également à la liberté d’expression, qui est, constitutionnellement, extrêmement protégée, sans parler évidemment du droit de propriété, que M. le rapporteur a également évoqué.

Pour cette simple raison constitutionnelle, je suis obligée d’émettre un avis défavorable sur ces amendements. Nul besoin d’aller au-delà !

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Yves Collombat

M. Pierre-Yves Collombat. Les ancêtres sont toujours utiles, mais on pratique souvent avec eux ce qui ressemble un peu à du trafic de reliques.

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Yves Collombat

Il est vrai que l’on ne manque pas de parlementaires qui furent aussi des journalistes de grande classe. On a évidemment cité Clemenceau et Jaurès, mais il y en eut beaucoup d’autres.

Toutefois, c’était il y a longtemps, à l’époque où les journalistes exprimaient encore des opinions, et pas tous les mêmes… Aujourd'hui, les journalistes sont beaucoup plus nombreux. Le problème, c’est que plus ils sont nombreux, plus ils disent la même chose, du moins sur l’essentiel : « Il faut faire des économies », « l’Europe fonctionne actuellement très bien », j’en passe et des meilleures. On en arrive à une situation où il n'y a plus d’expression d’opinion. Nous sommes les témoins non de la liberté de la presse, mais de la liberté de l’argent dans la presse, avec dix milliardaires qui contrôlent à peu près tout.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Yves Collombat

Au reste, les seuls qui sont en principe indépendants, notamment sur internet, ont tellement peur qu’on leur coupe les vivres qu’ils usent de leur droit d’expression avec modération.

Franchement, cela ne peut plus continuer ainsi si l’on veut que la République fonctionne normalement !

On m’oppose la Constitution, mais ce qui me frappe, c’est que le préambule de celle-ci fait référence au préambule de la Constitution de 1946, qui, me semble-t-il, appelle à la fin des monopoles… Mais cela, on l’a complètement oublié ! C’est très pratique une Constitution : chacun y prend ce qui l’arrange au moment où cela l’arrange !

Cela dit, il est vrai qu’il s’agit ici des parlementaires, et je ne suis pas persuadé que ce soit par le biais de ces amendements que l’on fera avancer les choses. Toutefois, pour le symbole, pour signaler qu’il y a un vrai problème de fond, je les voterai.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

La parole est à M. Roger Karoutchi, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

M. Roger Karoutchi. Pour ma part, je trouvais ces amendements sympathiques, ce qui n’est pas si mal par les temps qui courent…

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

Toutefois, je ne suis pas convaincu.

J’entends bien notre ami Pierre-Yves Collombat : il fut un temps où la presse et la politique entretenaient un lien sympathique. Mais c’était alors une presse d’opinion. Ce n’est pas tous les jours que l’on publie J’accuse, et les Clemenceau et autres Jaurès ne courent pas les rues. Je ne suis pas convaincu que les débats d’aujourd'hui, dans la presse ou dans les enceintes parlementaires, soient comparables, en qualité, à ceux de la Troisième République.

Je remercie Éric Doligé et François Bonhomme d’avoir ouvert le débat sur ce qui est un vrai sujet. Cependant, ce n’est pas dans le cadre de ce texte que ce débat devrait avoir lieu.

Pierre-Yves Collombat a raison : si nous débattons régulièrement de textes relatifs au milieu politique et à l’organisation de la politique, nous devrions aussi ne pas être totalement absents de l’organisation de la presse.

Est-ce pour autant dans le cadre du présent projet de loi que nous devrions en débattre ? Pas franchement. Ce n’est pas au détour d’amendements sur ce texte que devraient être posés les sujets de la liberté de la presse, de son organisation, de son indépendance, de ses liens avec la politique.

Par conséquent, je souhaite que ces amendements soient retirés, quitte à ce que l’on demande au Gouvernement un débat sur la presse, son organisation, sa liberté et son indépendance, sur ce qu’elle peut apporter à la vie publique et sur la manière dont celle-ci dépend encore des médias aujourd'hui.

Au demeurant – M. le rapporteur m’en excusera –, je n’ai pas le sentiment que nos collègues qui siègent dans les conseils d’administration exercent une influence considérable sur les médias concernés.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

La parole est à M. Jean-Pierre Leleux, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Leleux

Je suis également sensible à ce sujet, en tant que rapporteur pour avis des crédits relatifs aux médias.

Comme Roger Karoutchi, j’estime que le présent projet de loi organique n’est pas forcément le bon support pour voter une telle disposition. Le texte sur l’indépendance des médias et des rédactions que nous avons examiné voilà seulement trois mois offrait un cadre bien plus approprié ! Or, à ce moment, tous ces sujets ont été soigneusement écartés.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Leleux

Monsieur le rapporteur, votre argument nous touche, mais l’adoption de ces amendements n’empêchera pas les nouveaux journalistes dont on constate aujourd'hui le développement – ceux-là mêmes qui se font désormais appeler « éditorialistes », ce qui leur permet de dire n’importe quoi – de continuer à exister. Ce n’est pas l’impossibilité pour un journaliste de détenir un mandat de parlementaire qui changera les presses d’opinion.

J’admets donc les quelques réticences qui ont pu être exprimées, mais, pour le symbole, je voterai les amendements de nos collègues Éric Doligé et François Bonhomme.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

La parole est à Mme Colette Mélot, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Colette Mélot

Je m’exprime en qualité de membre de la commission de la culture.

À entendre M. le rapporteur, les membres de la commission de la culture qui siègent dans les conseils d’administration d’organes de presse ne pourraient plus le faire. Je m’interroge sur cet argument.

À mon humble avis, le fait de siéger dans de tels organes n’a rien à voir avec un conflit d'intérêts : il y va de la mission de contrôle exercée par les parlementaires. Nous représentons le Sénat à Radio France, à France Télévisions ou encore à l’Institut national de l’audiovisuel, pour ce qui me concerne, afin de mieux les contrôler. C’est du moins ainsi que je vois les choses.

Cela dit, il me semble que le débat soulevé est important. Il faudra certainement y revenir.

Les exemples du passé sont intéressants, mais la situation actuelle n’est plus celle du XIXe ou du XXe siècle.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

La parole est à M. François Bonhomme, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de François Bonhomme

J’ai bien entendu tous les arguments qui ont été développés, mais je dois dire que j’ai beaucoup de mal à m’y ranger.

Il n’est pas évident de s’exprimer après l’évocation des figures tutélaires de Clemenceau et de Jaurès ; on se sent écrasé sous le poids de l’histoire. §Très franchement, j’ai l’impression que l’on jette un voile pour nous empêcher de réfléchir un peu plus avant. Comme tout principe, la liberté d’informer, comme la liberté d’entreprendre, a ses limites.

On nous dit que la presse d’opinion était bien sympathique, mais n’est pas Jaurès qui veut. Quand c’est un directeur de publication ou de rédaction qui intervient d’une manière ou d’une autre auprès de ses journalistes – regardez les communiqués du Syndicat national des journalistes –, lorsque les chartes déontologiques propres à chaque journal sont ignorées, cela pose un vrai problème.

D’autres problèmes se posent concernant la presse écrite. En cas de campagne électorale, la presse audiovisuelle est assujettie à quelques règles inspirées par un souci d’équilibre. Tel n’est pas le cas de la presse écrite, notamment de la presse quotidienne régionale – la PQR – écrite. Je pourrai vous citer d’innombrables cas où les principes d’équilibre les plus élémentaires ont été ignorés au moment du débat public !

Nous faire croire qu’un élu qui dirige par ailleurs un groupe de presse en situation de monopole dans une région n’est pas amené à abuser de cette situation, c’est vraiment nous raconter un conte pour enfants !

On nous dit également que ce texte n’est pas le bon support. J’en conviens, mais, comme l’a fait remarquer notre collègue Jean-Pierre Leleux, la dernière fois, c’est l’occasion qui n’était pas la bonne !

On a le sentiment que certains veulent ignorer le principe même de séparation stricte. Je considère que cette situation est totalement anachronique : nous allons prendre des précautions pour élargir les régimes d’incompatibilité à d’autres fonctions pour lesquelles la porosité n’est pas évidente, alors que la consanguinité est, ici, le principe.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

La parole est à M. Éric Doligé, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Doligé

Bien évidemment, je n’avais pas du tout l’intention de toucher à l’indépendance ni à la liberté de la presse, qui vont bien évidemment perdurer bien au-delà de mon petit amendement.

Simplement, je ne vois pas pourquoi un avocat qui vient de terminer ses études ne pourrait pas pratiquer sa profession et devrait mettre son activité entre parenthèses pendant cinq ans, quand un journaliste ou celui qui participe à un organe de presse ne devrait pas faire de même durant son mandat. Le conflit d’intérêts est bien évident pour celui qui exerce un tel pouvoir d’influence sur la presse !

J’ai bien compris que ces sujets étaient toujours difficiles à aborder dans cette enceinte. Il faut dire que, bien souvent, certains de nos collègues ont à peine quitté l’hémicycle qu’ils contactent la presse pour essayer de faire passer un communiqué…

(Sourires.) Je voulais savoir comment il exprimerait son désaccord avec ma proposition ! J’estime qu’il s’est défendu avec beaucoup de talent, mais, pour une fois, il ne m’a pas convaincu.

M. le rapporteur s’exclame.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Doligé

Je l’avoue, j’ai aussi déposé cet amendement parce que j’adore entendre Philippe Bas. §Je maintiens donc mon amendement.

Croyez bien, monsieur le rapporteur, que je n’ai rien contre la liberté et l’indépendance de la presse.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Doligé

M. Éric Doligé. D'ailleurs, je vais essayer de faire passer un communiqué à l’issue de cette séance… Je ne suis pas certain qu’il sera accepté !

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

Je mets aux voix l'amendement n° 67.

J'ai été saisie d'une demande de scrutin public émanant du groupe La République en marche.

Je rappelle que l'avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

Le scrutin a lieu.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

Il est procédé au dépouillement du scrutin.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 120 :

Nombre de votants335Nombre de suffrages exprimés321Pour l’adoption10Contre 311Le Sénat n'a pas adopté.

M. Éric Doligé s’exclame.

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

L'amendement n° 10 rectifié bis, présenté par MM. Bonhomme, Vasselle, Pellevat et de Legge, Mmes Deromedi et Duchêne, MM. Doligé, A. Marc et Raison, Mme F. Gerbaud et M. Béchu, est ainsi libellé :

Après l’article 6

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l’article LO 146-1 du code électoral, il est inséré un article LO 146-… ainsi rédigé :

« Art. L O 146 - … – I .- Sont incompatibles avec les fonctions exécutives au sein d’une collectivité territoriale, d’un établissement public de coopération intercommunale ou d’un syndicat mixte les fonctions de directeur de la publication ou de directeur de la rédaction d’une entreprise de presse.

« II. - Il est interdit à tout élu détenant des fonctions exécutives au sein d’une collectivité territoriale, d’un établissement public de coopération intercommunale ou d’un syndicat mixte de détenir des participations directes ou indirectes dans une entreprise de presse. »

La parole est à M. François Bonhomme.

Debut de section - PermalienPhoto de François Bonhomme

En raison de la mission même d’informer, consubstantielle à la démocratie, nous voulons rendre incompatible l’exercice de fonctions exécutives locales avec celles de dirigeant d’une entreprise de presse.

On voit trop souvent le président d’un exécutif local orienter les annonces légales, dont le préfet ne contrôle que le montant, vers un support de presse appartenant au groupe qu’il dirige pour profiter de cette manne financière en toute légalité.

Il arrive encore que le même responsable de presse, par ailleurs titulaire de fonctions exécutives locales, décide de mettre en place une campagne de communication, sous couvert de publicité institutionnelle – avec argent sonnant et trébuchant – dont il confie la diffusion, ô miracle, à l’un des organes de son groupe.

Cette façon de recycler l’argent public constitue une machine à cash sans défaut, sinon qu’elle me semble en totale contradiction, madame la garde des sceaux, avec les principes affichés dans les objectifs généraux de ce texte.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

S’il vise les fonctions exécutives locales, cet amendement est de même nature que les précédents. La commission y est donc également défavorable.

Par ailleurs, les questions d’incompatibilité des mandats locaux relevant de la loi ordinaire et non d’une loi organique, le Conseil constitutionnel ne manquerait pas de censurer une telle disposition.

Debut de section - Permalien
Nicole Belloubet, garde des sceaux

Même avis, madame la présidente.

Debut de section - PermalienPhoto de François Bonhomme

Je retire cet amendement d’appel, sans plaisir mais avec raison.

La question n’en demeure pas moins criante et il faudra bien, un jour ou l’autre, se décider à la traiter.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Yves Collombat

Lors des scrutins n° 105 et 106 sur le projet de loi ordinaire, MM. Hue, Pélieu et Barbier ont été considérés comme votant contre. Or les deux premiers ne souhaitaient pas prendre part au vote et le troisième entendait s’abstenir.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

Acte vous est donné de cette mise au point, qui sera publiée au Journal officiel et figurera dans l’analyse politique du scrutin.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

Nous poursuivons la discussion du projet de loi organique, dans le texte de la commission.

L’article LO 151-1 du code électoral est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa, les références : « et LO 142 à LO 147-1 » sont remplacées par les références : «, LO 142 à LO 146-1, LO 147 et LO 147-1 » ;

2° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« Au plus tard trois mois après son entrée en fonction ou, en cas de contestation de son élection, de la date de la décision du Conseil constitutionnel, le député qui se trouve dans un des cas d’incompatibilité mentionnés aux 1° et 2° de l’article LO 146-2 se met en conformité avec les dispositions de cet article, soit en cédant tout ou partie de la participation, soit en prenant les dispositions nécessaires pour que tout ou partie de celle-ci soit gérée, pendant la durée de son mandat, dans des conditions excluant tout droit de regard de sa part. »

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

L'amendement n° 65, présenté par MM. Doligé et Cardoux, Mme Deseyne, M. J.P. Fournier, Mmes F. Gerbaud, Imbert et Lopez, MM. Milon, Pellevat et Pointereau, Mme Procaccia et M. Vasselle, est ainsi libellé :

I. – Après l'alinéa 1

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

…° Au début, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Au plus tard trois mois après son entrée en fonction ou, en cas de contestation de son élection, la date de la décision du Conseil constitutionnel, le député qui se trouve dans un cas d'incompatibilité mentionné à l'article LO 142 démissionne des fonctions incompatibles avec son mandat parlementaire sauf lorsqu’il occupe un emploi public mentionné au 1° et au 2°. » ;

II. – Alinéa 2

Remplacer la deuxième occurrence de la référence :

LO 142

par la référence :

LO 143

La parole est à M. Éric Doligé.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Doligé

Par cet amendement, nous voulons permettre à la France de s’aligner sur les règles en application dans la plupart des pays de l’OCDE, notamment dans les pays anglo-saxons.

Nous proposons que les fonctionnaires devenus parlementaires – et peut-être faudrait-il rectifier cet amendement pour limiter cette disposition à ceux de la catégorie A – aient l’obligation de démissionner de la fonction publique.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

M. Philippe Bas, président de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale, rapporteur. Vous me voyez extrêmement embarrassé : en tant que président de la commission des lois, je vais devoir émettre un avis défavorable sur cet amendement bien inspiré, qui, de surcroît, provient de membres de mon groupe, auquel je suis particulièrement attaché.

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Doligé

M. Éric Doligé. Vous êtes particulièrement attaché au groupe ou aux membres en question ?

Mêmes mouvements.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

Au groupe et aux auteurs de cet amendement, et en particulier à vous, monsieur Doligé, qui l’avez si bien présenté.

Je me sens d’autant plus fragile et incertain pour vous répondre que je n’ai su me montrer convaincant voilà quelques instants.

Certains métiers s’exercent dans la fonction publique, d’autres dans le secteur privé. Mettre un parlementaire, dont le mandat pourrait très bien ne pas être renouvelé, dans la situation de ne plus pouvoir exercer son métier serait quelque peu injuste.

Vous avez vous-même objecté qu’il aurait peut-être fallu limiter votre dispositif à la catégorie A. Or une infirmière appartient à cette catégorie. Il existe des infirmières devenues parlementaires, il en est peut-être ici même. De même, un cadre territorial, une aide-soignante ou un professeur de français… Comment ces personnes pourraient-elles reprendre leur travail, à l’issue de leur mandat électif, si nous leur imposons de démissionner de la fonction publique ?

Nous avons un problème de statut des élus. Certains de nos collègues, qui ont abandonné leur métier dans le secteur privé, vont avoir le plus grand mal à le retrouver après leur mandat. Au lieu de traiter cette question, pourquoi interdire à ceux qui pourraient le faire de retrouver leur emploi ? Cela reviendrait à leur imposer de faire tout métier, sauf le leur – infirmière, aide-soignante, cadre territorial, professeur de français, professeur des écoles, etc.

Le désir d’amener plus de justice vous amène à créer une injustice sans régler le problème de ceux qui, en fin de mandat, vont se trouver en grande difficulté.

Le problème se pose surtout pour les jeunes actifs, ou pour les actifs encore jeunes, qui quitteraient la vie publique sans être aidés pour retrouver du travail. Nous devrions nous retrouver autour de la table, avec le Gouvernement, pour résoudre, une bonne fois pour toutes, ce problème lancinant.

En espérant, cette fois, avoir été plus convaincant que précédemment, je vous demanderai, monsieur Doligé, de bien vouloir retirer votre amendement au bénéfice de mes explications.

Debut de section - Permalien
Nicole Belloubet, garde des sceaux, ministre de la justice

Il s’agit d’une question essentielle du statut de l’élu que nous n’avons pas su régler, alors que nous avons pléthore de textes sur le sujet. Cette question est d’autant plus importante que nous souhaitons faciliter le renouvellement politique.

Sous couvert de rechercher une plus grande égalité entre fonctionnaires et salariés du secteur privé, l’adoption de cet amendement risquerait de créer une discrimination à rebours. Le Parlement doit être composé de l’ensemble des représentants de la Nation, y compris des fonctionnaires. Je ne suis pas persuadée qu’en empêchant un fonctionnaire de retrouver son métier d’origine, quelle que soit sa catégorie, nous créions réellement une plus grande égalité au sein du Parlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Doligé

J’ai écouté avec attention notre rapporteur et Mme la garde des sceaux, qui ont fini par me convaincre.

Je voulais démontrer l’inégalité existant entre les parlementaires issus de la fonction publique et ceux venant du privé. Je pense notamment aux jeunes députés de La République en marche qui ont, pour certains, abandonné leur métier et qui se retrouveront en grande difficulté dans cinq ou dix ans, la fin du cumul des mandants venant leur fermer certaines portes de sortie… On n’a pas mesuré, au travers de certaines décisions, les risques encourus par ces jeunes élus.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

M. Philippe Bas, rapporteur. Ils n’auraient pas même dû se présenter !

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Doligé

Comme pour de nombreux autres sujets, ce n’est jamais le bon moment de s’attaquer au statut de l’élu et l’on préfère reporter indéfiniment l’examen de cette question. Au fil du temps, on se retrouve face à un mur de plus en plus difficile à franchir. Dans cinq ans, beaucoup de ces nouveaux élus vont être en grande difficulté. Les petits aménagements mis en place sur le court terme ne régleront rien…

Il n’y avait aucune arrière-pensée dans cet amendement. Merci à M. le rapporteur et à Mme la garde des sceaux de m’avoir permis d’aller un peu loin sur le fond.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

L'amendement n° 65 est retiré.

L'amendement n° 66, présenté par MM. Doligé, Cardoux et Chasseing, Mme Deseyne, M. J.P. Fournier, Mmes F. Gerbaud, Imbert et Lopez, MM. Milon, Pellevat et Pointereau, Mme Procaccia et M. Vasselle, est ainsi libellé :

I. - Après l’alinéa 2

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

…° Le second alinéa est complété par les mots : « ni de cotiser pour la retraite à la caisse de son administration d’origine » ;

II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par deux paragraphes ainsi rédigés :

… – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

… – La perte de recettes résultant pour la Caisse Nationale de Retraites des Agents des collectivités locales du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts

La parole est à M. Éric Doligé.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Doligé

J’avais cru comprendre qu’un fonctionnaire qui sortait frais émoulu d’une grande école et rejoignait le Conseil d’État ou le Conseil constitutionnel pouvait en partir au bout d’un an et n’y jamais retourner, sinon la veille de sa retraite potentielle, et bénéficier d’une pension au taux plein.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Doligé

Si M. Bas me confirme que ce n’est plus possible, comme on me le souffle, je retirerai mon amendement, ravi d’avoir été devancé sur cette question.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

M. Philippe Bas, rapporteur. Mon cher collègue, c’est bien volontiers que je vous le confirme. Cette mesure était tellement nécessaire qu’elle a été votée voilà maintenant quatre ans. C’est dire si vous étiez bien inspiré !

Sourires.

Debut de section - Permalien
Nicole Belloubet, garde des sceaux

Je voudrais juste préciser qu’un membre du Conseil constitutionnel ne cotise pas pour la retraite.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

L'amendement n° 66 est retiré.

L'amendement n° 8 rectifié bis, présenté par MM. Bonhomme, Pellevat, de Legge et Vasselle, Mme Duchêne, M. A. Marc, Mme Deromedi, M. Doligé, Mme F. Gerbaud et MM. G. Bailly et Béchu, est ainsi libellé :

Alinéa 4

Après la référence :

LO 146-2

insérer les mots:

ou au II de l'article LO 146-3

La parole est à M. François Bonhomme.

Debut de section - PermalienPhoto de François Bonhomme

Il s'agit de permettre à un parlementaire détenant des participations dans le capital d'une entreprise de presse de céder ses participations dans un délai de trois mois ou d'en confier la gestion, sans droit de regard, à un tiers.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

Monsieur Bonhomme, les amendements précédents n’ayant pas été adoptés, la commission vous demande de bien vouloir retirer cet amendement de pure coordination.

Debut de section - PermalienPhoto de François Bonhomme

Je me range à la sagesse du rapporteur et retire cet amendement, madame la présidente.

L'article 7 est adopté.

Le premier alinéa de l’article LO 151-2 du code électoral est ainsi modifié :

1° À la première phrase, après le mot : « général », sont insérés les mots : « ou les participations financières » ;

2° À la même première phrase, après les mots : « en application du », sont insérés les mots : « 5° et du » ;

3° À la seconde phrase, après le mot : « exercées », sont insérés les mots : « ou des participations détenues ». –

Adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

Je suis saisie de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 55, présenté par MM. Bonhomme, Allizard, G. Bailly et Calvet, Mme Canayer, M. Cardoux, Mme Cayeux, MM. Chaize, Charon, Chasseing, Chatillon, Cuypers et Danesi, Mme Debré, M. Delattre, Mmes Deroche, Deromedi, Deseyne et Di Folco, MM. Doligé et Duvernois, Mme Estrosi Sassone, MM. Frassa et Frogier, Mme F. Gerbaud, MM. Gilles, Grand et Gremillet, Mme Gruny, M. Guené, Mmes Hummel et Imbert, MM. Joyandet, Karoutchi et Laménie, Mme Lamure, MM. D. Laurent, de Legge, Leleux, Magras, Malhuret, Mandelli et Mayet, Mmes Mélot, Micouleau et Morhet-Richaud, MM. Morisset, Nègre, de Nicolaÿ, Nougein, Panunzi, Paul et Pierre, Mme Procaccia, MM. de Raincourt, Raison, Rapin, Retailleau et Revet, Mme de Rose et MM. Savary, Savin, Vaspart, Vasselle et Vogel, est ainsi libellé :

Après l’article 8

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Le code électoral est ainsi modifié :

1° L’article LO 144 est abrogé ;

2° Au premier alinéa des articles LO 176 et LO 319, les mots : «, d’acceptation des fonctions de membre du Conseil constitutionnel ou de Défenseur des droits ou de prolongation au-delà du délai de six mois d’une mission temporaire confiée par le Gouvernement » sont remplacés par les mots : « ou d’acceptation des fonctions de membre du Conseil constitutionnel ou de Défenseur des droits ».

II. – Le II de l’article 2 de la loi organique n° 2013-906 du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique est abrogé.

III. – Le 2° de l’article 1er de l’ordonnance n° 58-1066 du 7 novembre 1958 portant loi organique autorisant exceptionnellement les parlementaires à déléguer leur droit de vote est abrogé.

La parole est à M. François Bonhomme.

Debut de section - PermalienPhoto de François Bonhomme

Le Sénat a adopté, le 3 février 2016, une proposition de loi de M. Jacques Mézard visant à supprimer les missions temporaires confiées aux parlementaires par le Gouvernement.

La commission des lois, sur avis de son rapporteur, Hugues Portelli, a estimé alors que ce procédé constituait une atteinte à la séparation des pouvoirs, le parlementaire devant se consacrer parallèlement à sa mission législative, de contrôle et d'évaluation au sein du Parlement.

Cet amendement tend donc à clarifier le rôle du parlementaire dans l’action publique.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

L'amendement n° 63 rectifié, présenté par MM. Éblé et Mazuir, Mme Yonnet, MM. Vandierendonck et Raoul, Mmes Herviaux, Lienemann et Monier et M. Duran, est ainsi libellé :

Après l’article 8

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’article LO 176 du code électoral est ainsi rédigé :

« Art. L O 176. – Sous réserve du second et du dernier alinéa du présent article, les députés dont le siège devient vacant pour toute autre cause que l’annulation de l’élection, la démission d’office prononcée par le Conseil constitutionnel en application de l’article LO 136-1, la démission intervenue pour tout autre motif qu’une incompatibilité prévue aux articles LO 137, LO 137-1, LO 141 ou LO 141-1 ou la déchéance constatée par le Conseil constitutionnel en application de l’article LO 136 sont remplacés jusqu’au renouvellement de l’Assemblée nationale par les personnes élues en même temps qu’eux à cet effet.

« Toutefois, les députés dont le siège devient vacant, au motif d’une incompatibilité prévue aux articles LO 137, LO 137-1, LO 141 ou LO 141-1 intervenue dans les six mois du dernier renouvellement de l’Assemblée nationale, ne peuvent pas être remplacés par les personnes élues en même temps qu’eux à cet effet.

« Les députés qui acceptent des fonctions Gouvernementales sont remplacés, jusqu’à l’expiration d’un délai d’un mois suivant la cessation de ces fonctions, par les personnes élues en même temps qu’eux à cet effet. »

La parole est à Mme Évelyne Yonnet.

Debut de section - PermalienPhoto de Evelyne Yonnet

M. Éblé ne pouvant être présent parmi nous, je présenterai cet amendement à sa place.

La volonté des auteurs du texte que nous examinons étant de « rénover » la confiance en nos institutions, il nous a semblé opportun de renforcer la loi pour mettre fin à des pratiques électorales contestables.

En l’état du droit, l’incompatibilité entre un mandat de député et de sénateur permet au suppléant du député élu sénateur de siéger à sa place jusqu’au prochain renouvellement de l’Assemblée nationale.

Cependant, lorsque ces deux élections se succèdent à quelques semaines d’intervalle, un député récemment élu faisant le choix d’être également candidat aux sénatoriales transmettra automatiquement, s’il est élu, son siège de député à son suppléant, sans nouvelle élection.

On voit ici parfaitement la manœuvre consistant à mettre en avant un candidat à la forte notoriété pour gagner la circonscription et ensuite permettre au suppléant, moins connu, d’exercer le mandat quelques semaines plus tard, sans permettre aux électeurs de valider cette succession.

Le retour naturel aux électeurs nous paraît essentiel lorsque ce cas de figure se présente afin de permettre aux citoyens de choisir légitiment le député qu’ils souhaitent voir représenter leur territoire.

L’adoption de cet amendement permettra de limiter ces comportements électoraux douteux que nos concitoyens rejettent massivement. Il répond donc pleinement à la volonté de transparence du Gouvernement.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

La commission est favorable à ces deux amendements.

Quel plaisir, pour le président de la commission des lois, de pouvoir émettre, de temps à autre, des avis favorables !

Sourires.

Debut de section - Permalien
Nicole Belloubet, garde des sceaux

Le Gouvernement est défavorable à l’amendement n°55.

L’intérêt général justifie que des parlementaires puissent être parfois associés aux travaux de réflexion conduits à la demande du Gouvernement en amont du processus législatif stricto sensu. Cela permet d’associer des profils et des compétences variés. La pluridisciplinarité permet de mieux penser un certain nombre de réformes ensuite mises en œuvre à travers des textes législatifs.

La participation des parlementaires nous semble essentielle à ces réflexions. La suppression des missions temporaires ne me paraît pas de nature à améliorer le fonctionnement de nos institutions.

Par ailleurs, un parlementaire qui accomplit une mission à la demande Gouvernement est libre de l’organisation de son travail et de la formulation de ses conclusions et ne perçoit aucune rémunération ni indemnité. Cette pratique ancienne ne me paraît pas porter gravement atteinte au principe de séparation des pouvoirs.

Le Gouvernement est également défavorable à l’amendement n°63 rectifié. Les dispositions relatives au remplacement, adoptées en 2014, viennent d’entrer en vigueur. Il ne me semble pas opportun de les modifier dès à présent.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

La parole est à M. Roger Karoutchi, pour explication de vote sur l'amendement n° 55.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

Je soutiens l’amendement n°55.

Franchement, depuis des décennies, que ce soit à droite ou à gauche, la prolongation au-delà de six mois d’une mission confiée à un parlementaire est un moyen de transmettre son siège à son suppléant.

Aujourd’hui, si le Gouvernement veut l’avis d’un parlementaire, faire travailler une commission sur une question ou s’appuyer sur une approche un peu différente, il peut le demander sans avoir besoin de nommer un parlementaire en mission. Il y a suffisamment d’échanges entre la majorité et le Gouvernement ou les commissions et le Gouvernement pour le faire. La France n’est pas en guerre civile ! Le Gouvernement peut d’ailleurs demander à une commission, qui ne le refusera pas, de travailler sur un sujet précis et de lui remettre un rapport.

Certes, madame la garde des sceaux, le parlementaire en mission est indépendant et n’est pas rémunéré. Mais en quoi est-il plus indépendant ou plus compétent à lui seul qu’une commission entière ? Pourquoi accorder ce statut – quelque peu curieux – et ne pas simplement consulter un parlementaire ?

Sous la présidence de M. Sarkozy, je souhaitais déjà que l’on supprime ce statut qui ne correspond plus à nos méthodes de travail. Je regrette que cela n’ait pas été fait.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Bérit-Débat

Nicolas Sarkozy ne s’était pas privé de recourir à cette manœuvre !

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

Tout le monde y a eu recours, à gauche comme à droite.

Prolonger la mission du parlementaire au-delà de six mois pour lui permettre de transmettre son siège à son suppléant sans repasser devant les électeurs est une manœuvre aujourd’hui très moyenne.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de René-Paul Savary

Je soutiens également l’amendement n° 55.

Ma modeste expérience d’un mandat m’a montré que les commissions parlementaires s’emparent elles-mêmes des thèmes particulièrement importants. Nous avons conduit, au sein de la commission des affaires sociales, un certain nombre de missions – sur les urgences, par exemple – de façon consensuelle, en associant plusieurs parlementaires d’orientations politiques différentes. Notre travail y a beaucoup gagné.

La procédure spécifique de nomination d’un parlementaire en mission cache toujours une arrière-pensée politique. Laisser aux commissions la liberté de s’organiser permet d’assurer la pluralité nécessaire au traitement objectif de ces questions.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Yves Collombat

Il y a de bonnes raisons de soutenir cet amendement, ne choisissons pas les mauvaises.

La proposition de loi portée par Jacques Mézard, si ma mémoire est bonne, visait non la suppression des missions temporaires, mais celle de la disposition permettant, quand celles-ci se prolongent au-delà de six mois, la transmission du siège au suppléant. Cette manœuvre s’apparente souvent à une entourloupe pour échapper aux élections partielles.

Reprenez le texte de la proposition de loi, vous verrez qu’il n’était pas question de supprimer les sénateurs en mission temporaire. Maintenant, libre à vous de penser que cette disposition n’a plus lieu d’être, mais décidez-vous en connaissance de cause !

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

La parole est à M. Jean Louis Masson, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Louis Masson

Le remplacement des parlementaires en mission par leur suppléant est tout à fait anormal. Il s’agit d’une anomalie que j’ai déjà soulignée à plusieurs reprises.

Encore plus grave, la transmission du siège ne bénéficie qu’au parti majoritaire puisque c’est le Gouvernement qui nomme les parlementaires en mission. C’est un véritable scandale démocratique !

Madame la garde des sceaux, comment pouvez-vous considérer qu’une telle situation soit normale ?

Au moment où le parti de M. Macron prétend donner des leçons à tout le monde, il paraît incroyable de cautionner un système aussi rétrograde et antidémocratique, qui permet aux partis majoritaires de faire remplacer tel ou tel député par son suppléant, tout en excluant les partis de l’opposition du dispositif.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

La parole est à Mme Catherine Génisson, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Génisson

Comme le disait M. Pierre-Yves Collombat, il y a deux sujets, à savoir la nomination d’un parlementaire en mission et la prolongation de celle-ci au-delà de six mois, avec la possibilité de remplacer automatiquement le parlementaire par son suppléant, dispositif qui semble totalement inacceptable.

Le fait qu’un parlementaire puisse être nommé en mission ne me choque pas. Un certain nombre d’entre nous l’ont d’ailleurs été, ce qui leur a permis de traiter un sujet de façon précise et approfondie. En ce qui me concerne, j’ai eu le bonheur de produire un rapport sur l’égalité professionnelle, lequel a abouti à une proposition de loi. Je ne pense pas que, dans ce cas précis, la démocratie ait beaucoup souffert ! Pourquoi un parlementaire, dans la mesure où il adopte une approche pluraliste, ne pourrait-il pas effectuer correctement la mission qui lui est confiée ?

En revanche, le dispositif permettant de prolonger la mission me semble tout à fait anormal.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

La parole est à M. Marc Laménie, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laménie

Je suis cosignataire de cet amendement. Je le rappelle, un gros travail de fond est fait au sein de la Haute Assemblée dans le cadre des rapports d’information, avec l’ensemble des personnels des commissions. Il s’agit d’éclairer non seulement le Sénat, mais aussi le Gouvernement.

Selon moi, cet amendement va dans le sens de la transparence et de l’impartialité.

L'amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi organique, après l'article 8, et l’amendement n° 63 rectifié n’a plus d’objet.

L'amendement n° 88, présenté par M. Bas, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :

Après l'article 8

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Le II de l’article LO 145 du code électoral est ainsi rédigé :

« II. – Un député ne peut être désigné en cette qualité dans une institution ou un organisme extérieur qu’en vertu d’une disposition législative qui détermine les conditions de sa désignation. Il ne peut percevoir à ce titre aucune rémunération, gratification ou indemnité. »

II. – Les parlementaires qui se trouvent dans le cas d’incompatibilité prévu au I à la date d’entrée en vigueur de la présente loi peuvent continuer à exercer leurs fonctions au sein d’une institution ou d’un organisme extérieur pour la durée pour laquelle ils ont été désignés.

La parole est à M. le rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

Cet amendement prévoit que la désignation d’un parlementaire dans un organisme extraparlementaire ne peut se faire qu’en vertu d’une loi et non pas d’un décret.

Debut de section - Permalien
Nicole Belloubet, garde des sceaux

Sur cet amendement, le Gouvernement s’en remet à la sagesse du Sénat, dans la mesure où la nomination de parlementaires dans des organes extraparlementaires par voie de décret peut poser question.

L'amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi organique, après l'article 8.

L'amendement n° 1 rectifié ter, présenté par MM. P. Dominati et Danesi, Mme Procaccia, M. Pointereau, Mme Duchêne, MM. de Raincourt, Joyandet et Laménie, Mme Garriaud-Maylam et M. Dassault, est ainsi libellé :

Après l’article 8

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Le second alinéa de l’article L. O. 151-1 du code électoral est supprimé.

II. – L’article 3 de la loi n° 62-1292 du 6 novembre 1962 relative à l’élection du Président de la République au suffrage universel est complété par un paragraphe ainsi rédigé :

« … – Le Président de la République, s’il est membre de la fonction publique, en démissionne au plus tard le trentième jour qui suit son entrée en fonction ou, en cas de contestation de son élection, la date de la décision du Conseil constitutionnel. »

III. – La liste des fonctionnaires visés par l’obligation de démission est précisée par décret en Conseil d’État.

La parole est à M. Philippe Dominati.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Dominati

Cet amendement aurait pu être examiné en discussion commune avec les amendements présentés tout à l’heure par mon collègue Éric Doligé, qui s’est attaqué à une montagne. J’ai d’ailleurs été surpris par le silence assourdissant dans lequel ont été accueillis ses propos.

Il paraît en effet curieux d’oublier l’essentiel lorsqu’on parle de « confiance retrouvée » dans l’action publique et qu’on essaie de construire des barrières pour supprimer un certain nombre de préventions.

Car il n’y a pas de plus grande incompatibilité que de voter le budget qui fixe votre rémunération, votre salaire et votre carrière. Ainsi un mandat de parlementaire et un poste important dans la fonction publique me paraissent-ils incompatibles.

On le sait bien, la sociologie des députés comme des sénateurs, qu’ils soient de droite ou de gauche, varie suivant que ces derniers appartiennent à la fonction publique ou au secteur privé.

Cet amendement vise donc à corriger un tel dysfonctionnement. Si l’on veut faire disparaître les dysfonctionnements et incompatibilités qui s’attachent aux sociétés de conseil, aux avocats ou aux journalistes, on doit également s’intéresser à la double appartenance que je viens d’évoquer, manifestement nuisible et dommageable à un réel débat démocratique.

Dans les conseils d’administration des grandes sociétés, lorsque le statut particulier, les avantages ou la rémunération du président ou du directeur général sont évoqués, celui sort généralement de la salle.

Faudrait-il que les fonctionnaires puissent sortir de l’hémicycle lors du vote du budget ? Car ils votent alors le budget de leur propre employeur, ainsi que l’indexation de leur carrière et de leur retraite. Comment un agent d’un ministère peut-il user de son libre arbitre au moment de voter le budget de son ministère ? Au demeurant, je suis très respectueux de la fonction publique, considérant qu’elle est, en France, particulièrement performante.

Ce sujet concerne également le Président de la République. En effet, après avoir occupé les hautes fonctions qui sont les siennes, il devient membre du Conseil constitutionnel. Je demande donc que la disposition prévue par cet amendement s’applique également à lui.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

Je me suis exprimé tout à l’heure sur les amendements présentés par M. Éric Doligé, dont les objets sont comparables à celui que vous venez de nous présenter, monsieur Dominati.

Je tiens à attirer votre attention sur un point : pourquoi un ancien fonctionnaire de l’enseignement public ou de l’hôpital public devrait-il se retrouver sans emploi ou condamné à faire un travail autre que celui pour lequel il est qualifié ? Pourquoi un ancien plombier ou un ancien cadre d’entreprise pourraient-ils retrouver du travail dans une entreprise, tandis qu’un ancien professeur ne le pourrait pas et qu’un ancien médecin hospitalier devrait ouvrir un cabinet en médecine libérale ?

Pourquoi, pour traiter le problème de la précarité d’emploi d’anciens parlementaires issus du secteur privé, devrait-on absolument plonger dans la précarité d’anciens parlementaires issus du secteur public, auxquels on interdirait, puisqu’ils auraient rompu tout lien avec la fonction publique, de reprendre un travail de fonctionnaire ? Ce serait une injustice qui ne réparerait pas l’injustice dont sont victimes les anciens parlementaires issus du secteur privé ! Nous devons être attentifs à éviter ce genre de choses.

Au demeurant, je me permets de vous le signaler, mon cher collègue, tel qu’il est rédigé, cet amendement revient sur l’obligation de mise en disponibilité, laquelle exclut la possibilité de cotiser pour sa retraite et de bénéficier d’un avancement ou d’un avantage matériel. Une telle disposition, qui revient sur la loi de 2013, rend le détachement – et non pas la démission – seul possible.

En effet, si vous écartez la mise en disponibilité, vous revenez à la situation antérieure, et les droits à avancement continueront pendant le mandat parlementaire. Je suis sûr que ce n’est pas ce que vous voulez faire !

S’agissant du Président de la République, Mme la garde des sceaux s’exprimera.

Outre les arguments de fond contre cet amendement, que je viens d’évoquer et qui me tiennent à cœur, car ils relèvent selon moi de la justice entre les Français, je relève que la rédaction proposée aboutira à l’effet inverse de ce que vous voulez obtenir, mon cher collègue : en effet, en supprimant l’obligation de mise en disponibilité, qui implique le renoncement à toute forme d’avantages pendant la période durant laquelle on siège au Parlement, vous rétablissez, je le répète, la possibilité du détachement.

Pour l’ensemble de ces raisons, je vous demande, mon cher collègue, de bien vouloir retirer votre amendement, tout comme M. Doligé l’a fait au bénéfice d’explications analogues.

Debut de section - Permalien
Nicole Belloubet, garde des sceaux

Ce que nous recherchons, au fond, c’est la prévention des conflits d’intérêts et une plus grande transparence.

À cet égard, le dispositif actuel, à savoir la mise en disponibilité pendant l’exercice du mandat et le respect d’un certain nombre d’obligations déontologiques du fonctionnaire à l’issue du mandat – je pense notamment aux déclarations de patrimoine – me semble suffisant.

Je l’ai dit, mais je le répète, selon moi, une interdiction beaucoup plus générale serait d’abord source de rupture d’égalité. Ensuite, je ne vois pas ce qu’elle apporterait au regard de l’objectif que nous voulons atteindre.

En outre, cela créerait une atteinte à la liberté de candidature, laquelle me semblerait susceptible d’être sanctionnée.

Enfin, vous le savez, monsieur le sénateur, la possibilité, pour les anciens présidents de la République, d’être nommés membres du Conseil constitutionnel devrait cesser avec la prochaine révision constitutionnelle.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

La parole est à M. Roger Karoutchi, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

Chacun connaît mes liens d’amitié avec Philippe Dominati. Toutefois, en la matière, nos analyses diffèrent.

J’entends son point de vue, selon lequel les fonctionnaires, quand ils sont dans l’hémicycle, votent des budgets qui les concernent.

Pour ma part, j’ai pu constater que, au cours des débats sur des textes relatifs à la santé, ce sont essentiellement des médecins qui s’expriment. Certes, tel ne devrait pas être le cas, dans la mesure où, après leur mandat parlementaire, ils reprendront leurs cabinets médicaux et se verront appliquer des lois qu’ils auront eux-mêmes votées.

Bien sûr, le mandat de parlementaire peut être source d’incompatibilités et de conflits d’intérêts. Malgré tout, le parlementaire est censé représenter l’intérêt général. Certes, je veux bien admettre que, dans certaines situations, il faille faire preuve de vigilance.

Que vous veniez du privé ou du public, tout débat peut vous concerner de manière globale pour la suite de votre vie. Dans un tel contexte, on peut choisir de ne plus rien faire et de donner le pouvoir aux techniciens !

Du temps que j’étais sérieux, …

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

M. Roger Karoutchi. … j’ai passé une agrégation d’histoire. Je suis ensuite devenu inspecteur général de l’éducation nationale. Que voulez-vous que je fasse de cela dans le privé ? Mon cher collègue, vous me mettez dans une situation impossible !

Rires.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Yves Collombat

Il y a plus de risques de conflits d’intérêts avec les banques qu’avec les syndicats de fonctionnaires !

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

La parole est à M. Philippe Dallier, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Dallier

On parle beaucoup des parlementaires qui étaient salariés avant leur mandat et du manque de protections et de garanties dont ils bénéficient.

Tel est mon cas. Par ailleurs, ayant été élu relativement jeune, je suis assez sensible à ce que j’entends. La seule garantie que nous ayons, en entrant au Parlement, c’est l’obligation pour l’entreprise de nous mettre en suspension du contrat de travail, suspension valable une seule fois.

L’amendement présenté par Philippe Dominati m’inquiète. En effet, si les fonctionnaires devaient démissionner de facto après leur élection, que deviendraient, pour leur part, les anciens salariés ? Ainsi, en tant qu’ancien employé d’une grande banque à titre d’informaticien, on pourrait sans doute m’accuser de conflit d’intérêts lorsque je siège à la commission des finances et que cette dernière évoque la situation des banques. Sans doute en viendra-t-on un jour à dire que les salariés employés des banques ne bénéficient plus de la garantie de suspension du contrat de travail pendant au moins un mandat.

Selon moi, il ne faut donc pas aller trop loin. En effet, à force de vouloir laver plus blanc que blanc et de chercher à éliminer tout type de conflit d’intérêts, je me demande qui sera susceptible de siéger au Parlement dans les années à venir. Les candidats finiront par se réduire à une frange très limitée de la population. Or ce n’est pas, je crois, ce que nous recherchons !

Applaudissements sur certaines travées.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de René-Paul Savary

En tant que médecin, je suis condamné à réagir sur cette question.

Il est important de disposer d’expériences diversifiées sur les bancs des différentes assemblées. Il faut en effet qu’il y ait un intérêt à légiférer. Le lien d’intérêt n’est pas le conflit d’intérêts ! On a d’ailleurs tendance, dans les assemblées, à mettre le médecin, ou le président d’un conseil départemental, à la commission des affaires sociales. On estime ainsi qu’ils ont acquis une expérience en la matière et qu’ils sauront de quoi ils parlent. Ils apprennent bien sûr beaucoup d’autres choses dans d’autres domaines !

Les liens d’intérêts, qui n’ont rien à voir avec les conflits d’intérêts, sont à mes yeux importants. Quand ils n’existent pas, l’intérêt disparaît, qu’il s’agisse du territoire, du monde professionnel voire de la société, ce qui est à l’encontre de l’esprit du parlementaire.

Applaudissements sur certaines travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

La parole est à Mme Catherine Tasca, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

Sur ce sujet, il me semble que les attentes sont parfois contradictoires. D’un côté, nous souhaitons tous que le Parlement soit la représentation la plus large de la réalité de notre société ; d’un autre côté, nous sommes en train d’accumuler obstacles et interdits à cette diversité.

Selon moi, la compétence, notamment dans le domaine législatif, vient aussi de l’exercice d’un métier. Nous souffrons beaucoup aujourd'hui de l’entrée en métier politique de gens n’ayant jamais exercé aucun métier et qui ne se trouvent là où ils sont que par la grâce d’appareils politiques.

À mes yeux, tel ne doit pas être l’avenir du Parlement, dans l’intérêt même de la diversité de représentation de notre société. Soyons donc attentifs à ne pas pousser le bouchon trop loin s’agissant des interdits. Sinon, nous aurons, dans ces travées, des gens qui n’auront jamais travaillé et seront au service de leur appareil politique.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain, du groupe La République en marche, du RDSE, du groupe Union Centriste et du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Dominati

Je voulais lancer ce débat, qui me paraît d’actualité. Un ministre du Gouvernement, en l’occurrence celui de l’économie et des finances, a démissionné de la fonction publique pendant la campagne présidentielle. Dans l’opposition, une candidate, Nathalie Kosciusko-Morizet a démissionné de la fonction publique pour promouvoir cette idée d’incompatibilité.

Il s’agit donc d’une idée qui, loin d’être absurde, témoigne d’une volonté d’indépendance.

J’ai beaucoup apprécié l’intervention de ma collègue Catherine Tasca. Nous connaissons tous, aussi bien à gauche qu’à droite ou au centre, des personnalités entrées très jeunes dans la fonction publique, ayant ensuite exercé plusieurs mandats parlementaires et occupé des fonctions ministérielles, qui terminent leur carrière dans la fonction publique.

Mon cher collègue Philippe Dallier, en évoquant les obstacles que se verront opposer les professions libérales, qu’il s’agisse des médecins ou des avocats, j’ai voulu montrer l’iniquité de cette loi et toutes les entraves qu’elle vise à créer.

Vous le savez, je suis attaché à la liberté. Mon but n’est pas, madame Tasca, de créer des entraves supplémentaires. Je l’ai indiqué hier dans le cadre d’autres amendements, j’estime que les entraves dont il est question sont nuisibles au débat démocratique. Tel est le sens de mon amendement.

Dans la mesure où le débat se poursuivra à d’autres occasions, je retire aujourd'hui cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

L’amendement n° 1 rectifié ter est retiré.

La parole est à Mme Évelyne Yonnet.

Debut de section - PermalienPhoto de Evelyne Yonnet

Madame la présidente, je n’ai pas compris pourquoi l’adoption de l’amendement n° 55 avait rendu l’amendement n° 63 rectifié sans objet. Il s’agit en effet de deux sujets différents.

Par ailleurs, M. Bas avait affirmé être favorable à l’amendement n° 63 rectifié. Je souhaiterais donc qu’il s’explique sur ce point.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

Ma chère collègue, l’amendement n° 63 rectifié faisait l’objet d’une discussion commune avec l’amendement n° 55, qui a été adopté. Or celui-ci avait notamment pour objet de modifier la rédaction de l’article LO 176, tout comme l’amendement n° 63 rectifié, qui, de fait, tombe.

La parole est à M. le rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

Ma chère collègue, effectivement, je n’aurais pas dû dire que j’étais favorable à l’amendement n° 63 rectifié, cet avis étant incompatible avec l’avis favorable que j’avais auparavant formulé sur l’amendement n° 55.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

L'amendement n° 62, présenté par Mme Garriaud-Maylam, n'est pas soutenu.

Chapitre III

Soutien à l’investissement des communes et de leurs groupements

I. – Le chapitre II du titre II de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances est ainsi modifié :

1° (nouveau) Le I de l’article 7 est ainsi modifié :

a) À la seconde phrase du troisième alinéa, le mot : « deux » est remplacé par le mot : « trois » ;

b) Après le 2°, il est inséré un 3° ainsi rédigé :

« 3° Une dotation de soutien à l’investissement des communes et de leurs groupements. » ;

2° (nouveau) Au premier alinéa de l’article 11, après le mot : « imprévisibles », sont insérés les mots : « et sur la dotation de soutien à l’investissement des communes et de leurs groupements » ;

3° (nouveau) Après le même article 11, il est inséré un article 11-1 ainsi rédigé :

« Art. 11-1. – I. – Chaque année, le bureau de chaque assemblée adresse au Gouvernement la liste des projets que les députés et sénateurs proposent pour soutenir l’investissement des communes et de leurs groupements pour l’exercice suivant.

« Ces projets répondent aux critères cumulatifs suivants :

« 1° Ils correspondent à la réalisation de projets d’investissement matériel ou immatériel des communes, de leurs groupements ainsi que de leurs établissements publics ;

« 2° Ils présentent un caractère exceptionnel ;

« 3° Ils permettent la mise en œuvre d’une politique d’intérêt général ;

« 4° Les fonds qu’il est envisagé de verser n’excèdent pas la moitié du montant total du projet concerné et le plafond de 20 000 euros ;

« 5° Un même projet ne peut être proposé par plusieurs députés ou sénateurs ;

« 6° Leur délai prévisionnel d’exécution est égal ou inférieur à sept ans.

« Cette liste précise, pour chaque projet proposé, le nom de l’éventuel bénéficiaire, le montant proposé, la nature du projet à financer et le nom du membre du Parlement à l’origine de cette proposition. Chaque assemblée la publie dans un format ouvert, aisément réutilisable et exploitable par un système de traitement automatisé.

« II. – Avant le 31 mai de chaque année, le Gouvernement publie la liste des projets ayant bénéficié, au cours du précédent exercice, de la dotation prévue au I. Elle est publiée dans les conditions prévues au dernier alinéa du même I. »

II. – Le 9° de l’article 54 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances est abrogé.

III (nouveau). – Le présent article entre en vigueur à compter du 1er septembre 2017.

Debut de section - PermalienPhoto de Éliane Assassi

Le présent article visait initialement à supprimer purement et simplement la réserve parlementaire En jetant ce pavé dans la mare, le Président de la République et de son gouvernement ont fait le choix d’envoyer des signaux clairs : sous couvert de moraliser la vie politique, ils ciblent particulièrement les parlementaires et souhaitent limiter leurs financements et leurs prérogatives. Les parlementaires coûtent toujours trop cher et il faut limiter la dépense publique.

Nous connaissons le laïus. Les travers antiparlementaristes de cette loi ne nous ont donc pas échappé.

Pour autant, il s’agit d’une vraie question, tant la suspicion est forte, résultat des dérives constatées dans certains territoires. L’exigence de transparence d’aujourd’hui doit être prise en compte par les élus que nous sommes.

En commission, cet article a été totalement réécrit pour concilier à la fois le maintien de la réserve parlementaire, tout en encadrant plus fortement son usage.

Nous prenons connaissance pour la séance de trois séries d’amendements : certains parlementaires ne veulent finalement aucune contrainte sur l’usage de la réserve ; le Gouvernement souhaite supprimer cette réserve, tout en annonçant la sanctuarisation des ressources dans une prochaine loi de finances ; quelques parlementaires souhaitent aménager le texte de la commission.

Je crois qu’il faut s’entendre au préalable sur les termes de notre débat.

Si la suppression de la réserve parlementaire signifie la limitation des ressources des territoires et des collectivités, sans oublier les associations durement frappées par l’austérité, nous ne sommes pas d’accord.

Les territoires subissent la baisse des dotations, qui devrait encore s’amplifier par les récents choix politiques. Pour cette raison, nous n’avons qu’une confiance relative dans vos déclarations, madame la garde des sceaux, sur la sanctuarisation de ces crédits. Nous verrons, lors de la loi de finances, quels seront les arbitrages et nous vous rappellerons vos promesses. Ces 140 millions doivent rester au service des territoires et de leurs habitants.

Pour nous, le débat doit essentiellement porter sur la question suivante : l’idée même d’une réserve parlementaire est-elle légitime ? En la matière, les avis sont partagés. En effet, si elle permet aux élus de tisser un lien particulier avec leur territoire, les modes d’attribution, soumis au seul arbitraire des parlementaires, rendent nécessaire, pour une bonne part d’entre nous, dont je fais partie, la suppression de ce dispositif. Cette réserve apparaît aux yeux de notre peuple comme un privilège d’un autre temps, qui va jusqu’à bloquer le renouvellement de la vie politique, les sortants et les nouveaux n’étant pas sur un pied d’égalité.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Gremillet

L’article 9 visait à supprimer la réserve parlementaire, comme l’indique le titre du chapitre III.

On parle vraiment très mal de cette action parlementaire. Laisser croire aux Français que c’est un trésor caché des sénatrices et sénateurs, laisser croire qu’on va dans nos campagnes ou dans nos villes distribuer des billets de 200 euros ou de 500 euros, c’est faire injure au travail parlementaire.

Surtout, c’est faire injure aux élus de nos territoires. Madame la garde des sceaux, que font en réalité les sénatrices et les sénatrices ? Ni plus ni moins que soutenir l’action territoriale, les projets de nos territoires !

Combien d’investissements n’auraient pas eu lieu si l’action parlementaire n’était pas intervenue ? Combien de projets, orphelins de tout financement de l’État, de la région ou du département, n’auraient pas vu le jour si l’action parlementaire ne s’était pas exercée ?

C’est le mieux vivre de nos territoires dont il est question. Combien de projets d’accessibilité ont été soutenus dans nos territoires grâce à l’action parlementaire ? Autre exemple d’actualité : les maires ont l’obligation de formuler leurs propositions de mise en conformité eu égard à la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte. Comment feront-ils si l’action de proximité n’est pas au rendez-vous ?

Combien de fois le soutien de l’action parlementaire est-elle l’effet déclencheur de soutiens communautaires ?

À mes yeux, mettre fin au soutien de l’action territoriale, c’est mettre encore un peu plus les élus hors-sol.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Daudigny

Sur ce débat concernant la réserve parlementaire, je voudrais exprimer ici le ressenti d’un sénateur de la ruralité. Si cette réserve parlementaire était totalement supprimée, je m’interroge sur les réactions, dans un ou deux ans, des maires, des élus, des habitants de petites communes, qui se trouveraient dans la difficulté pour compléter les financements de travaux d’aménagement : écoles, salles de loisirs, travaux de voirie, protection du patrimoine. Ces élus, dans un ou deux ans, jugeraient-ils que la moralisation de la vie politique – c’est bien le sujet qui nous préoccupe – est réellement en marche ?

Je veux profiter de cette intervention pour réaffirmer, à la suite du collègue qui m’a précédé, que la réserve parlementaire, aujourd’hui, est totalement transparente. La procédure qui la régit répond aux mêmes règles que tout octroi de subvention de la part de l’État. Je veux dire à nos concitoyens que cette réserve parlementaire n’est pas versée en liquide, qu’elle ne passe pas par la poche des parlementaires, que ces derniers n’en prélèvent pas une partie avant de la redistribuer aux élus locaux. Or c’est ce que nos concitoyens, souvent, pensent !

Bien sûr, le cadre de ce dispositif peut être rénové – je n’y suis pas opposé –, des règles peuvent être précisées, des aménagements proposés. Réserver la réserve parlementaire à des investissements dans les petites communes ? J’y suis favorable, encore que les élus de la région parisienne y trouveraient légitimement à redire.

Il serait envisageable également d’interdire qu’un parlementaire oriente la réserve parlementaire vers une commune dans laquelle il exercerait un mandat d’élu.

Quant à l’argument du clientélisme, je prendrai pour y répondre l’exemple du département de l’Aisne, celui que je connais le mieux. Sur un mandat de six ans, 150 communes au maximum peuvent être aidées, ce qui veut dire que 550 ne le sont pas. L’argument du clientélisme est donc assez faible !

Pour conclure, je souhaite vraiment que ne soit pas sacrifié, sur l’autel de l’antiparlementarisme, dont l’ambiance hélas ! imprègne dangereusement notre pays aujourd’hui, un outil de financement simple, efficace, utile et désormais totalement transparent en direction des petites communes.

M. Jackie Pierre applaudit.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Louis Masson

Si la réserve parlementaire est utilisée honnêtement, il n’y a strictement aucun problème ; elle contribue à aider les communes, souvent les plus défavorisées, pour la réalisation de petits projets. Elle constitue souvent un déclic permettant d’inciter la commune à réaliser un petit projet d’intérêt général.

Chaque année, je distribue des petites subventions d’égale importance, ou presque, à toutes les communes de mon département ; je parviens ainsi à en distribuer une centaine. Lorsque je visite les communes, par la suite, on me montre ce qui a été réalisé, et je constate les effets très positifs de la réserve parlementaire.

Si elle est aujourd’hui contestée, c’est parce que des abus ont été commis ! Je citerai l’exemple d’un ancien parlementaire de mon département – il n’est plus parlementaire, on peut en parler librement : il a attribué deux années de suite les 200 000 euros de sa réserve parlementaire à sa propre commune ! C’est scandaleux ! Il faut donc que nous exercions un contrôle sur ce dispositif.

Me paraissent tout à fait anormales également les dérives des subventions aux associations. Mediapart a révélé le cas d’un parlementaire qui, en deux ans, avait alloué, au total, 160 000 euros à une association dont il était le président, dont le délégué général était son assistant parlementaire, et dont la trésorière était sa première adjointe ! C’est quand même incroyable ! Pour couronner le tout, le siège de l’association se trouvait dans son bureau au Sénat !

Il y a quand même des limites ! Et les communes n’ont pas à être les victimes des agissements et des dérives de quelques personnes. C’est la raison pour laquelle je suis partisan du maintien de la réserve parlementaire, à condition cependant qu’elle fasse l’objet d’un contrôle.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

De grands débats peuvent être menés sur ce thème ; je veux simplement rappeler un fait. Il y a quelques années, la réserve parlementaire était distribuée dans une certaine opacité. Je me souviens qu’à mon arrivée dans cette maison, il y a quelque temps, celui qui était alors le président de mon groupe m’avait dit qu’il ne connaissait pas ce dispositif ! J’ai réussi, peu à peu, à savoir que des subventions étaient délivrées, et de manière très inégalitaire. Ce système était donc immoral !

À cette époque, il eût été heureux – nous ne le fîmes pas, nous eussions pu le faire ! – que nous votions des dispositions pour réformer cette immoralité.

Mais aujourd’hui, grâce au travail effectué, la réserve parlementaire est totalement transparente. Il s’agit de sommes affectées à des communes, villages ou communes plus importantes où se trouvent des quartiers en difficulté, attribuées en toute transparence. Le montant des crédits qu’un sénateur ou un député peut proposer au titre de la réserve est public. L’attribution de ces sommes à des communes est publique. Tout est public ! Et la transparence, je vous l’assure, mes chers collègues, est le meilleur rempart contre toutes les dérives.

Bien sûr, si certains se livrent à des pratiques répréhensibles, celles-ci seront critiquées, puisque tout est transparent.

C’est pourquoi nous avons déposé un amendement de suppression. Ce projet de loi organique a pour objet de rétablir la confiance ; mais aujourd’hui, en l’état du dispositif, il n’y a pas matière à défiance ou à suspicion d’immoralité ! C’est pourquoi nous considérons que ce sujet ne devrait pas intervenir dans le cadre de ce texte. Mais au cas, probable, où notre amendement ne serait pas adopté, nous nous rallierons à celui de la commission, c’est-à-dire au texte tel qu’il nous est présenté.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Yves Leconte

En complément de ce qui a déjà été observé, je dois dire d’abord qu’à mon arrivée ici, j’ai été un peu étonné de découvrir ce type de pratiques. Je considère en effet, comme je l’ai déjà indiqué hier, que notre rôle est de légiférer et de contrôler l’action du Gouvernement. À l’évidence, lorsque nous soumettons au ministère des affaires étrangères ou au ministère de l’intérieur des propositions d’attribution de subventions, lesquelles sont ou non suivies d’effet, nous sortons quelque peu de notre rôle.

Voici le principe. Une fois fait ce rappel, force est d’y adjoindre deux constats.

Premièrement, la réserve permet en effet d’accompagner des projets, de lancer des initiatives qui, à défaut d’un tel dispositif, n’existeraient pas. Je pense, pour ce qui concerne les Français de l’étranger, au développement des écoles, à l’accompagnement des enfants à besoins particuliers, à l’action sociale, à l’aide au développement d’alliances françaises, aux sommes allouées pour répondre aux effets d’un séisme en Équateur ou d’une catastrophe climatique au Vanuatu – cela s’est produit l’année dernière, il avait fallu réagir très vite. Ces crédits représentent un complément indispensable à l’action de l’État.

Deuxièmement, les parlementaires tentent de contrôler l’action du Gouvernement d’un point de vue budgétaire. Or, lorsque je demande des informations au ministère des affaires étrangères sur un certain nombre d’opérations immobilières à Vienne, à Amsterdam ou à Toronto, on me balade ! Nous ne pouvons pas correctement exercer notre mission de contrôle budgétaire s’agissant d’enveloppes qui pourraient être mieux utilisées par le Gouvernement.

Dans la situation actuelle, donc, le principe est qu’il serait peut-être bon, en effet, que la réserve soit supprimée ; mais nous en avons absolument besoin, à cause de dysfonctionnements, et ce projet de loi organique ne permettra pas tout régler.

La proposition du président de la commission des lois est une manière de régler le problème pour les Français métropolitains ; pour les Français de l’étranger, il faudra la compléter. De toute façon, ce qui était proposé par le Gouvernement n’avait pas lieu d’être : il s’agissait d’une simple déclaration aux termes de laquelle nous étions censés ne pas voter d’amendements tendant à ouvrir de tels crédits en projet de loi de finances.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

La parole est à Mme la présidente de la commission des finances.

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

Je m’exprimerai en ma qualité de présidente de la commission des finances, laquelle a été saisie par la commission des lois sur cette question.

Nous vivons un moment que l’on pourrait qualifier de sortie de l’ambiguïté, ou du mystère, à notre détriment. Pendant longtemps, mes collègues l’ont dit, aucune lumière n’était faite sur cette réserve. Seuls les collègues de la commission des finances disposaient des possibilités de soutien qu’elle offrait. Ils le faisaient déjà, d’ailleurs, dans les règles qui président à l’attribution de subventions aux investissements des communes.

J’ai la chance de m’occuper de la totalité de vos dotations, mes chers collègues. Je regarde ce qui se passe, et je peux observer qu’il n’y a rien à dire de particulier depuis que les attributions donnent lieu à publication. Voici deux ans qu’elles sont publiées sur le site dédié ; ce dispositif a-t-il rendu vertueux certains collègues ? Je ne suis pas juge de cette question. Mais je considère que les dérives dont, les uns et les autres, nous avons pu entendre parler, sont largement derrière nous.

Les attributions sont donc publiées et traitées d’une manière remarquable. Je veux profiter de ce moment pour saluer la qualité du travail accompli par les fonctionnaires qui s’occupent des dossiers dans chaque ministère, que ce soit à l’intérieur, surtout, ou aux affaires étrangères, à la culture, à la jeunesse et aux sports, aux affaires sociales.

Applaudissements sur certaines travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste.

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

Un réseau a été mis en place pour que nous puissions flécher correctement des sommes – soyons clairs : de petites sommes ! – qui constituent en quelque sorte, pour un investissement communal, la cerise sur le gâteau, parfois très utile s’agissant de petits équipements.

Pour ce qui concerne le Sénat, 80 % des dotations sont fléchées vers les investissements des communes. Quant à nos collègues représentants des Français établis hors de France, ils s’occupent avec talent de ce qui concerne l’étranger – cela vient d’être dit.

Aujourd’hui, les règles sont respectées, la transparence règne et on peut presque dire que la démocratie prévaut, pour des sommes moyennes situées entre 120 000 et 140 000 euros par parlementaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

Mme Michèle André, présidente de la commission des finances. Par ce biais, nous apportons des financements dans nos territoires, auprès de nos écoles ou de nos alliances françaises. Il faut donc trouver une méthode, quelle qu’elle soit, pour que les projets soient soutenus. Je compte sur le débat qui suit pour y veiller.

Applaudissementssur certaines travées du groupe Les Républicains, du groupe Union Centriste et du groupe socialiste et républicain.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, sur l'article.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Yves Collombat

Je souscris à tout ce qui a été dit, que je ne répéterai pas.

Je voudrais simplement attirer l’attention sur le fait suivant : cette dotation est menacée depuis très longtemps. Dès lors qu’il faut faire des économies, on gratte partout ! Du côté de Bercy, on serait très intéressé par la suppression de cette dotation ; c’est pourquoi on la déclare immorale.

Vous savez comme moi, mes chers collègues, comment fonctionnent les municipalités, les départements, les régions ; le dispositif présidant à l’attribution de la dotation parlementaire est beaucoup plus transparent.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Yves Collombat

Faut-il supprimer la possibilité pour les exécutifs des collectivités de distribuer des subventions sous prétexte qu’il y a des abus ici ou là ?

Mais le plus amusant dans cette affaire, c’est d’entendre défendre la thèse selon laquelle la réserve serait une atteinte à l’article 40, faute grave s’il en est ! Mais non ! Cela fait partie du budget, l’État donne son accord ! Je vous conseille le rapport de notre ancien collègue Philippe Marini sur l’article 40 : plus rien n’échappe à l’article 40 !

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Yves Collombat

Encore plus amusants sont les développements de la Cour des comptes sur la LOLF, la loi organique relative aux lois de finances. Nous détournerions la LOLF ! C’est peut-être vrai. Admettons ! Mais un tel détournement est bienvenu ! La LOLF, en effet, est devenue une véritable entrave au développement de ce pays !

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Yves Collombat

Je n’exagère pas ! Regardez, dans les territoires, comment les services de l’État, chargés de l’agriculture, de l’équipement, etc., essaient de mutualiser leurs services, leurs moyens. Vous constaterez que les pauvres sous-préfets ont la vie impossible : les indemnités sont différentes, on ne peut pas passer d’un budget à l’autre. Cette façon pointilliste de distribuer les crédits aboutit à des blocages !

Debut de section - PermalienPhoto de François Bonhomme

C’est quand même un drôle de paradoxe : le Gouvernement propose la suppression de la réserve parlementaire au moment où les années de nébulosité sont derrière nous – dans les années 1980 et 1990, certains parlementaires ne découvraient que tardivement ou partiellement…

Debut de section - PermalienPhoto de François Bonhomme

… le fonctionnement de la réserve, avec, comme l’a dit Mme la présidente de la commission des finances, des enveloppes aux montants difficiles à connaître, réservées dans l’opacité à certaines catégories d’élus ; mais tout cela est terminé.

Debut de section - PermalienPhoto de François Bonhomme

La situation est de plus en plus claire, transparente, régulée, via notamment la publication, dont les effets sur les pratiques sont importants. Et c’est à ce moment précis que les communes, notamment les communes rurales et les petites communes, qui sortent de trois ans d’essorage par la baisse des dotations de l’État, subiraient une double peine avec la suppression pure et simple de la réserve parlementaire ?

Une nouvelle fois, elles verront ainsi réduites leurs marges de manœuvre, en particulier en termes d’investissement. La réserve parlementaire avait pourtant cette vocation, a minima, compte tenu de la modestie des sommes, de financer des projets qui ne pouvaient être bouclés et n’entraient pas nécessairement dans les cases d’autres sources de financement, leur permettant en définitive d’aboutir.

Qui n’a pas connu la situation évoquée par l’un de nos collègues, où une petite commune s’est vu offrir, par ce moyen, un véritable bol d’oxygène ?

Quant aux associations, comme l’a dit notre collègue Jean Louis Masson, il y a eu, en la matière, des dérives. Il est arrivé que la réserve soit détournée de sa fonction pour financer des associations dont l’objet était tout à fait sujet à caution et dont les pratiques l’étaient encore davantage. Il ne faut pas confondre les collectivités locales, qui font l’objet d’une procédure très claire de sélection, avec les associations, où le pire côtoie parfois le meilleur.

Il ne faudrait pas que, sous couvert de corriger des dérives qui se produisent à la marge, on supprime la totalité du dispositif, ce qui serait très dommageable pour les petites communes.

Debut de section - PermalienPhoto de André Gattolin

Je ferai entendre un avis un peu dissonant : j’ai des réserves sur la réserve.

Notre collègue Jean-Yves Leconte a bien posé la question : en quoi consiste la fonction de parlementaire ? Il s’agit de voter la loi et de contrôler l’action du Gouvernement. S’agit-il de distribuer des subventions ou des aides ? Une véritable question de fond est posée, sur la nature de ce que nous faisons.

La priorité, selon moi, est que le Gouvernement respecte un peu plus le travail parlementaire, le vote de la loi. Il existe d’autres réserves que la réserve parlementaire, à commencer par la réserve de précaution, qui nous conduit à discuter très rapidement de décrets d’avance, modifiant le cours du budget que nous avons pourtant voté.

Debut de section - PermalienPhoto de André Gattolin

Que nous adaptions le budget en fonction des aléas, c’est nécessaire ; mais il arrive très souvent que des textes votés fassent l’objet de peu de respect !

Concentrons-nous sur notre métier !

J’ai entendu l’argument de mon collègue François Bonhomme : « Les collectivités territoriales, c’est bien ; les associations, ce n’est pas bien. » Non !

Debut de section - PermalienPhoto de François Bonhomme

Ce n’est pas tout à fait ce que j’ai dit ! Ne caricaturez pas mon propos, mon cher collègue !

Debut de section - PermalienPhoto de André Gattolin

M. André Gattolin. Je suis gêné, en tant qu’élu d’un département, de pouvoir donner de l’argent, des subventions, à des municipalités où exercent nos grands électeurs, surtout dans les deux années qui précèdent le renouvellement ; d’une certaine façon, cela me semble incompatible avec nos fonctions.

Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de André Gattolin

Lorsque je donne, je donne essentiellement à des associations, qui, de surcroît, ne viennent pas de mon département.

Un vrai problème se pose, aujourd’hui, s’agissant du financement des associations d’utilité publique, avec la baisse des subventions qui leur sont allouées : depuis trois ou quatre ans, elles voient régulièrement leurs moyens diminuer.

En l’espèce, la réserve est utile, comme elle l’est pour certaines collectivités. Mais, en la matière, trouvons un moyen qui ne fonctionne pas de façon discrétionnaire – je regrette, mais c’est le cas de la réserve, malgré sa transparence !

Voyons ce que les préfets proposent, et chargeons-nous du contrôle politique de ces aides ! Que les élus puissent donner leur point de vue ! Un tel système me paraîtrait plus juste.

Lorsqu’on veut bien faire – c’est mon cas –, la réserve parlementaire représente au minimum deux mois de travail pour un collaborateur chargé d’étudier les dossiers et de répartir équitablement la dotation. Nous avons autre chose à faire, à savoir être présents dans l’hémicycle et dans nos commissions respectives, à contrôler l’action du Gouvernement ! L’attribution de la réserve me paraît secondaire dans le cadre de la fonction parlementaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

La parole est à M. Claude Bérit-Débat, sur l'article.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Bérit-Débat

M. Claude Bérit-Débat. Je suis résolument opposé à la disparition de la réserve parlementaire.

Applaudissements sur certaines travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Bérit-Débat

Un certain nombre de collègues se sont exprimés avant moi ; je voudrais être, après eux, la voix des territoires et des départements ruraux.

Je ne suis pas un élu parisien ni un élu des Français de l’étranger. Le département de la Dordogne, dont je suis un représentant, compte 557 communes, dont la moitié comptent moins de 500 habitants et le tiers moins de 300 habitants. Je ne répartis jamais mon aide aux petites communes de manière discriminatoire : je ne tiens jamais compte de l’étiquette politique des maires, mais toujours et uniquement des projets d’investissement présentés.

Lorsqu’on leur donne 1 500 ou 2 000 euros, les maires en sont très heureux, parce qu’ils ne peuvent financer à hauteur de 50 % un investissement de 30 000 ou même de 10 000 euros. Il y a donc une vraie utilité à continuer de disposer de la réserve parlementaire. Si nous la supprimons, pour les communes et départements ruraux, qui sont représentés dans cet hémicycle, sonnera la fin de financements que nous leur apportons.

Par ailleurs, nous discutons aujourd’hui de la suppression de la dotation d’action parlementaire des députés et sénateurs. À supposer qu’une telle suppression soit nécessaire, alors mettons fin aussi à la réserve ministérielle !

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mme Françoise Gatel applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Bérit-Débat

En parlant d’obscurité, personne ne sait comment fonctionne la réserve ministérielle ! Et on se retrouve avec des départements où les aides pleuvent d’un ou d’une ministre dans la plus parfaite opacité !

Si l’on veut balayer devant les portes, n’en négligeons aucune !

Vifs applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, du groupe Union Centriste et du groupe socialiste et républicain.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Dominati

Je souhaite simplement dire à Mme la garde des sceaux que, en tant que parlementaire, je considère cette réserve comme un acte de confiance de l’exécutif à l’égard du Parlement, donc du législatif.

Je l’ai toujours pratiquée dans cet esprit : lorsque j’ai utilisé ma réserve, c’était pour faire gagner du temps à l’exécutif sur des sujets qui me paraissaient importants, mais qui, compte tenu de la modestie des montants engagés, n’avaient rien à faire dans la discussion budgétaire.

Apparemment, dans votre vision des choses, madame la garde des sceaux – nous aurons, me semble-t-il, du mal à vous convaincre –, cette confiance est rompue entre l’exécutif et le législatif.

Mme la garde des sceaux fait la moue.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Dominati

Il m’appartiendra donc à l’avenir, en ma qualité de parlementaire, pour continuer à jouer mon rôle, de déposer, lors des prochaines séances budgétaires, une vingtaine ou une trentaine d’amendements correspondant à la vingtaine ou trentaine de lignes que j’utilisais chaque année sur le budget de la réserve parlementaire pour promouvoir des actions dans le département dont je suis l’élu. À raison de deux minutes trente par amendement, je plaiderai l’importance d’accorder telle subvention à telle association locale ou à tel projet d’investissement dans des biens d’équipement, scolaire ou sportif.

Quelle perte de temps, pour votre collègue ministre du budget ! Si chaque parlementaire fait comme moi, c’est-à-dire dépose vingt ou trente amendements supplémentaires, il faudra allonger l’examen du budget de nombreux jours de séance : en effet, nous avons tous à défendre avec conviction l’intérêt de l’usage de cette réserve parlementaire.

M. Daniel Gremillet applaudit.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quatorze heures trente.

La séance est suspendue.

La séance, suspendue à douze heures cinquante-cinq, est reprise à quatorze heures trente, sous la présidence de M. Jean-Pierre Caffet.