La séance est ouverte à neuf heures quarante-cinq.
Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.
M. le Président du Sénat a reçu de M. le Président du Conseil constitutionnel une lettre par laquelle il informe le Sénat que le Conseil constitutionnel a été saisi le 4 février 2009, en application de l’article 61, alinéa 2, de la Constitution, par plus de soixante sénateurs, d’une demande d’examen de la conformité à la Constitution de la loi pour l’accélération des programmes de construction et d’investissement publics et privés.
Le texte de la saisine du Conseil constitutionnel est disponible au bureau de la distribution.
Acte est donné de cette communication.
La vocation première et prioritaire de l'agriculture est de répondre aux besoins alimentaires de la population, et ce de façon accentuée pour les décennies à venir. Le changement climatique, avec ses aléas et sa rapidité, impose à l'agriculture de s'adapter, de se diversifier et de contribuer à la réduction mondiale des émissions de gaz à effet de serre.
Cependant les processus intensifs de production font peser des risques parfois trop forts sur les milieux, menaçant aussi le caractère durable de l'agriculture elle-même.
Au-delà des importantes évolutions des pratiques agricoles mises en œuvre depuis une dizaine d'années, un mouvement de transformation s'impose à l'agriculture pour concilier les impératifs de production quantitative et qualitative, de sécurité sanitaire, d'efficacité économique, de robustesse au changement climatique et de réalisme écologique : il s'agit de produire suffisamment, en utilisant les fonctionnements du sol et des systèmes vivants et, leur garantissant ainsi une pérennité, de sécuriser simultanément les productions et les écosystèmes. L'agriculture contribuera ainsi plus fortement à l'équilibre écologique du territoire, notamment en participant à la constitution d'une trame verte et bleue, au maintien de la biodiversité, des espaces naturels et des milieux aquatiques, et à la réhabilitation des sols.
À cet effet, les objectifs à atteindre sont :
a) De parvenir à une production agricole biologique suffisante pour répondre d'une manière durable à la demande croissante des consommateurs et aux objectifs de développement du recours aux produits biologiques dans la restauration collective publique ou à des produits saisonniers à faible impact environnemental, eu égard à leurs conditions de production et de distribution. Pour satisfaire cette attente, l'État favorisera la structuration de cette filière et la surface agricole utile en agriculture biologique devrait atteindre 6 % en 2012 et 20 % en 2020. À cette fin, le crédit d'impôt en faveur de l'agriculture biologique sera doublé dès l'année 2009 afin de favoriser la conversion des exploitations agricoles vers l'agriculture biologique ;
b) De développer une démarche de certification environnementale des exploitations agricoles afin que 50 % des exploitations agricoles puissent y être largement engagées en 2012. Des prescriptions environnementales pourraient être volontairement intégrées dans les produits sous signe d'identification de la qualité et de l'origine. Une incitation pour les jeunes exploitants s'installant en agriculture biologique ou en haute valeur environnementale sera étudiée ;
c) De généraliser des pratiques agricoles durables et productives. L'objectif est, d'une part, de retirer du marché, en tenant compte des substances actives autorisées au niveau européen, les produits phytopharmaceutiques contenant les quarante substances les plus préoccupantes en fonction de leur substituabilité et de leur dangerosité pour l'homme, trente au plus tard en 2009, dix d'ici à la fin 2010, et, d'autre part, de diminuer de 50 % d'ici à 2012 ceux contenant des substances préoccupantes pour lesquels il n'existe pas de produits ni de pratiques de substitution techniquement et économiquement viables. De manière générale, l'objectif est de réduire de moitié les usages des produits phytopharmaceutiques et des biocides en dix ans en accélérant la diffusion de méthodes alternatives sous réserve de leur mise au point. Un programme pluriannuel de recherche appliquée et de formation sur l'ensemble de l'agriculture sera lancé au plus tard en 2009, ainsi qu'un état des lieux de la santé des agriculteurs et des salariés agricoles et un programme de surveillance épidémiologique. Une politique nationale visera la réhabilitation des sols agricoles et le développement de la biodiversité domestique, cultivée et naturelle dans les exploitations. La politique génétique des semences et races domestiques aura pour objectif de généraliser, au plus tard en 2009, le dispositif d'évaluation des variétés, d'en étendre les critères aux nouveaux enjeux du développement durable et d'adapter le catalogue des semences aux variétés anciennes, y compris les variétés de population, contribuant à la conservation de la biodiversité dans les champs et les jardins, et aux semences de populations, et de faciliter leur utilisation par les professionnels agricoles. Un plan d'urgence en faveur de la préservation des abeilles sera mis en place en 2009 et s'appuiera notamment sur une évaluation toxicologique indépendante relative aux effets, sur les abeilles, de l'ensemble des substances chimiques ;
c bis) De réduire la dépendance des systèmes de production animale aux matières premières importées entrant dans la composition des produits d'alimentation animale et notamment les protéagineux et les légumineuses ;
d) D'accroître la maîtrise énergétique des exploitations afin d'atteindre un taux de 30 % d'exploitations agricoles à faible dépendance énergétique d'ici à 2013 ;
e) D'interdire l'épandage aérien de produits phytopharmaceutiques, sauf dérogations.
L'État mettra en place un crédit d'impôt pour la réalisation d'un diagnostic énergétique de l'exploitation agricole. Il s'agira de suivre de manière précise la consommation et de réaliser des bilans énergétiques des exploitations agricoles afin de réaliser des économies d'énergie directes et indirectes (tracteurs et machines, bâtiments et serres, consommation d'intrants). Il faudra produire et utiliser des énergies renouvelables dans les exploitations agricoles (expérimentation, méthanisation, mobilisation du bois agricole, adaptation de la fiscalité sur l'énergie).
L'État agira par une combinaison d'actions : l'encadrement des professions de distributeurs et d'applicateurs de produits phytopharmaceutiques par des exigences en matière de formation, d'identification ou de séparation des activités de vente et de conseil, dans le cadre d'un référentiel vérifiable d'enregistrement et de traçabilité des produits ; un renforcement des crédits d'impôt et des aides budgétaires pour aider les agriculteurs à développer l'agriculture biologique ; des instructions données à ses services en matière de restauration collective ; la promotion d'une organisation des acteurs agricoles et non agricoles pour mettre en œuvre des pratiques agricoles avancées sur l'ensemble du territoire concerné ; une réorientation des programmes de recherche et de l'appareil de formation agricole pour répondre d'ici à 2012 aux besoins de connaissance, notamment en microbiologie des sols, et au développement des pratiques économes en intrants et économiquement viables, notamment par un programme de recherche renforcé sur les variétés et itinéraires améliorant la résistance aux insectes et aux maladies ; l'objectif est qu'au moins 20 % des agriculteurs aient bénéficié de cette formation en 2012 ; la généralisation de la couverture des sols en hiver en fonction des conditions locales ; l'implantation progressive, pour améliorer la qualité de l'eau et préserver la biodiversité, de bandes enherbées et zones végétalisées tampons d'au moins 5 mètres de large le long des cours d'eau et plans d'eau. Ces bandes enherbées contribuent aux continuités écologiques de la trame verte et bleue.
En outre, la France appuiera au niveau européen une rénovation de l'évaluation agronomique des variétés candidates à la mise sur le marché pour mieux prendre en compte les enjeux de développement durable et notamment la réduction progressive de l'emploi des intrants de synthèse.
Au sein de cet article, nous en sommes parvenus à l’amendement n° 678.
L'amendement n° 678, présenté par MM. Bizet, Deneux, Doublet, Laurent, Pointereau et Revet, est ainsi libellé :
Dans la deuxième phrase du septième alinéa (c) de cet article, remplacer les mots :
et de leur dangerosité pour l'homme
par les mots :
telle que définie sur décision communautaire
La parole est à M. Charles Revet.
Je présente cet amendement au nom de M. Jean Bizet, dont chacun connaît l’expérience et le sérieux du travail accompli dans ces domaines.
Le retrait des produits phytopharmaceutiques doit être réalisé sur la base d'une évaluation des risques pour la santé publique et pour l'environnement telle qu’elle est définie à l’échelon communautaire et non au regard d'une approche subjective et arbitraire fondée sur des critères de danger.
On ne peut qu’être d’accord avec la teneur de cet amendement. Il semble effectivement logique de s’appuyer sur les règles communautaires qui s’imposent à nous.
Par ailleurs, la santé publique et l’environnement demeurent les meilleurs critères.
Par conséquent, le bon sens conduit à prendre en compte la proposition de M. Jean Bizet.
S’il était adopté, cet amendement supprimerait toute référence à la dangerosité des molécules actives dont le retrait est envisagé et dont le caractère préoccupant ne serait alors plus évalué qu’au regard de leur degré de substituabilité. Or ce critère est indépendant de celui qui est lié à la dangerosité propre aux molécules, laquelle peut faire l’objet d’une évaluation scientifique.
De plus, supprimer la référence à la dangerosité des substances actives sur l’homme, qui découle directement des travaux des comités opérationnels, les Comop, serait d’un affichage politique très négatif pour notre assemblée à l’égard de l’opinion publique.
Par conséquent, la commission souhaite le retrait de cet amendement. À défaut, elle émettrait un avis défavorable.
L’avis du Gouvernement est le même que celui de la commission.
Nous souhaitons une définition plus large. C’est pourquoi nous nous référons autant aux définitions communautaires qu’à celles de l’Organisation mondiale de la santé, l’OMS.
Je vous rassure vraiment, monsieur le sénateur, nous avons une évaluation très scientifique de la notion de dangerosité pour l’homme, laquelle est très encadrée scientifiquement.
Par conséquent, je souhaite que vous retiriez cet amendement.
J’ai bien entendu les arguments avancés.
M. Jean Bizet ne souhaite pas supprimer systématiquement la référence au caractère de dangerosité. Lorsque, après évaluation, la dangerosité est reconnue, une mention doit bien figurer sur les emballages. Il demande seulement que l’évaluation se fasse sur des critères fiables et non subjectifs ou arbitraires.
Cela dit, monsieur le président, après les précisions qui viennent d’être apportées, M. Jean Bizet aurait, je crois, été d’accord pour retirer cet amendement.
L'amendement n° 678 est retiré.
L'amendement n° 229, présenté par Mme Didier, MM. Danglot et Le Cam, Mmes Schurch, Terrade et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
I. - Dans la troisième phrase du septième alinéa (c) de cet article, supprimer les mots :
sous réserve de leur mise au point
II. - Après la même phrase, insérer une phrase ainsi rédigée :
Un programme de recherche publique visant à recenser l'ensemble des méthodes alternatives reconnues, notamment celles de lutte intégrée, à mettre au point de nouvelles méthodes, à valoriser et à diffuser largement ces méthodes sera lancé au plus tard en 2009.
La parole est à M. Jean-Claude Danglot.
Les connaissances relatives aux pratiques culturales permettant de réduire la dépendance aux produits de synthèse sont déjà nombreuses, mais dispersées et peu accessibles.
Dans un souci d'efficacité, il convient de réunir l'ensemble de ces connaissances et d'en produire de nouvelles, afin de les valoriser et de les diffuser le plus largement possible auprès des acteurs du secteur agricole et au-delà.
Les organismes de recherche publique français, et tout particulièrement l'INRA, pourraient être chargés de coordonner un tel programme de recherche prospectif.
Tel est le sens de cet amendement.
La commission est défavorable aux deux éléments de cet amendement.
En premier lieu, il n’est pas raisonnable de faire « sauter » le cliquet de sécurité que constitue le conditionnement de la suppression de produits phytopharmaceutiques à l’existence de méthodes alternatives de traitement. À défaut, certaines filières pourraient se retrouver privées de méthodes de traitement adaptées, ce qui les mettrait en grande difficulté d’un point de vue économique.
En second lieu, l’article 28 contient déjà des dispositions renvoyant à l’effort de recherche et de formation qu’il faudra accomplir pour atteindre l’objectif de réduction des produits phytosanitaires.
Il ne faut pas revenir sur l’équilibre qui a été trouvé entre les acteurs du Grenelle et qui a permis d’avancer sur l’ensemble de ces questions. C’est pourquoi, sur le premier point, le Gouvernement n’est pas favorable à la suppression de la mention : « sous réserve de leur mise au point ».
Sur le second point, le Gouvernement a d’ores et déjà lancé, à la fin de 2007, le Plan Ecophyto 2018, piloté par l’INRA, pour mobiliser les acteurs de la recherche et du développement, afin de recenser précisément les solutions de remplacement.
Votre objectif étant satisfait par le lancement de cette étude, je souhaite le retrait de cet amendement.
L'amendement n'est pas adopté.
Les deux amendements suivants sont identiques.
L'amendement n° 294 rectifié bis est présenté par Mme Laborde et MM. Charasse, Collin, Baylet, Fortassin et Plancade.
L'amendement n° 554 rectifié est présenté par Mme Blandin, MM. Raoul et Courteau, Mme Herviaux, MM. Raoult, Repentin, Ries et Teston, Mmes Bourzai, Alquier, M. André et Bonnefoy, MM. Guillaume, Rebsamen, Hervé, Daunis, Antoinette, Gillot, Le Menn, S. Larcher, Lise, Patient, Tuheiava, Miquel et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Compléter la troisième phrase du septième alinéa (c) de cet article par les mots :
et en facilitant les procédures d'autorisation de mise sur le marché des préparations naturelles peu préoccupantes
La parole est à Mme Françoise Laborde, pour présenter l’amendement n° 294 rectifié bis.
L'alinéa c) de cet article vise à retirer du marché les produits phytopharmaceutiques contenant les quarante substances les plus préoccupantes en fonction de leur substituabilité, ce dont nous devons nous féliciter.
En effet, le Gouvernement s’est fixé pour objectif de diminuer de 50 % l’usage des pesticides. Toutefois, le texte ne prévoit aucune solution naturelle de remplacement.
La reconnaissance des préparations naturelles peu préoccupantes, fortement sollicitée, constituerait une réponse, dans le texte de loi qui nous occupe aujourd’hui, en favorisant le développement de ces préparations comme solution de remplacement aux pesticides, avec des procédures d’agrément allégées adaptées, faciles et rapides à mettre en œuvre.
Cet amendement vise donc à favoriser l’introduction sur le marché des préparations naturelles peu préoccupantes, les PNPP, comme c’est déjà le cas dans de nombreux pays européens : l’Allemagne, l’Espagne, l’Italie, les Pays-Bas ou encore le Royaume-Uni.
Je vous serais reconnaissante, madame la secrétaire d’État, de faire en sorte que la France ne reste pas à la traîne !
La parole est à Mme Marie-Christine Blandin, pour présenter l'amendement n° 554 rectifié.
Chacun se souvient du triste et presque cocasse incident de cet entrepreneur paysagiste de l’Ain, spécialiste du traitement biologique des arbres, lui-même usager, qui avait eu le malheur d’écrire un ouvrage intitulé Purin d’ortie et compagnie.
Ses malheurs ont mobilisé non seulement les associations écologistes, mais aussi l’ensemble des Français au nom du bon sens, et tous les chroniqueurs de jardinage, les revues, les petites émissions du matin sur la façon par exemple de tailler sa haie. Tous se sont mobilisés pour diffuser la recette de ce fameux purin d’ortie, disant que, si la promotion d’une telle technique était condamnable, ils devaient également aller en prison.
S’agissant du parcours législatif, les sénateurs, comme les députés, avaient, en décembre 2006, adopté un amendement relatif aux préparations naturelles peu préoccupantes à l’occasion de l’examen de la loi sur l’eau, pour lever l’interdiction globale, qui résultait de la loi d’orientation agricole de janvier 2006.
Deux ans plus tard, contrairement à de nombreux pays européens, le vide juridique sur les préparations naturelles peu préoccupantes demeure, faute de parution du décret relatif à la définition des conditions de commercialisation simples, peu coûteuses et rapides. Le projet de décret est toujours enfermé dans les tiroirs... Quand on pose une question à ce sujet, on est renvoyé à une procédure européenne longue, coûteuse et inappropriée.
Notre objectif étant de réduire de 50 % la quantité de pesticides sous réserve de substituts possibles et au nom du simple bon sens, nous n’allons pas interdire la publication de la recette de la poudre de craie à répandre au pied des arbres pour faire fuir certains parasites ! Pourquoi ne pas interdire aussi la publication de la recette de la tarte aux pommes ?.)
Il serait bon que ce Grenelle I, qui a précisément pour objet de définir des orientations, donne le ton, sans pour autant empiéter, bien sûr, sur le domaine réglementaire, afin que la notion de préparations naturelles peu préoccupantes ne soit plus contestable.
Je serais défavorable à cet amendement si je n’écoutais que ma colère et celle de mes collaborateurs, en raison du surcroît de travail que nous avons eu à la suite de la réception de dizaines de milliers de courriels – je parle bien de courriel et non de spam –, qui ont saturé ma messagerie électronique !
Bien entendu, je n’écouterai pas ma colère.
Sourires sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG, ainsi que sur certaines travées du RDSE.
J’essaie de travailler le plus sérieusement possible !
J’ai bien compris le message des auteurs de ces nombreux courriels, que j’ai lus et relus. Finalement, j’ai proposé à la commission d’émettre un avis favorable sur cet amendement.
Sourires
Nous sommes favorables à cet amendement, qui correspond bien à l’esprit du Grenelle.
Mais je vous rassure, depuis quelques jours, le décret est au Conseil d’État. Les procédures seront donc enfin encadrées !
Cet amendement ne me pose pas en lui-même de problème particulier. Je suis donc prêt à l’adopter. Cependant, ce qui m’inquiète dans la position que vient d’exprimer le Gouvernement, c’est qu’elle tend à accréditer l’exposé des motifs de l’amendement de Mme Blandin.
Alors que l’objet de l’amendement présenté par nos collègues du groupe RDSE va dans la bonne direction, Mme Blandin laisse entendre que les procédures existant aujourd’hui pour les produits chimiques sont insuffisantes, tandis qu’elles sont trop lourdes en ce qui concerne les produits à base de plantes, par exemple les orties.
Or, je pense que nous devons faire preuve de la même rigueur pour évaluer les effets de ces produits, quelle que soit leur nature.
Toutefois, pour ce qui est des produits naturels, le nombre des critères qui seront pris en considération permettra une instruction beaucoup plus rapide des dossiers.
Il ne faut pas laisser croire à nos concitoyens que, dès lors que des produits considérés comme naturels ne posent aucun problème, on pourrait, à la limite, se passer de toute analyse préalable ! Je veux qu’il n’y ait sur ce point aucun malentendu entre nous et le Gouvernement.
Madame le secrétaire d’État, vous nous dites que le décret est prêt. Je ne sais pas si la commission des affaires économiques a pu en prendre connaissance.
M. Jean-Paul Emorine, président de la commission des affaires économiques. Non ! Nous ne voyons jamais rien passer…
Sourires
Je saisis cette occasion pour réitérer une demande que j’ai déjà eu l’occasion de formuler à maintes reprises. Le Gouvernement devrait prendre l’habitude de faire en sorte que nous n’ayons plus à examiner un texte de loi sans que les projets de décrets d’application qui l’accompagnent soient produits devant le Parlement.
À cet égard, la réforme constitutionnelle mise en œuvre à travers la loi organique que nous adopterons prochainement devrait nous permettre d’atteindre cet objectif.
Il faut absolument que nous ayons connaissance de la manière dont le Gouvernement entend appliquer la loi.
Nous disposerons dorénavant, après le temps législatif, d’un temps de contrôle, ce qui est une très bonne mesure et qui nous permettra de vérifier comment le Gouvernement applique les textes, ce qui manquait jusqu’à présent au Parlement.
Laissons-nous un peu de temps pour le contrôle et veillons à ce que, dans notre pays, les lois s’appliquent d’une manière satisfaisante.
Ainsi aurons-nous peut-être moins de remarques de la part de concitoyens, qui ont parfois le sentiment que nous faisons n’importe quoi !
Applaudissements sur les travées de l ’ UMP et de l ’ Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.
Je vais vous rassurer tout de suite, monsieur Vasselle : les dispositions du décret prévoient bien une procédure d’évaluation précise des produits concernés. Je me suis prononcée tout à l’heure sur le texte même de l’amendement et non sur son exposé des motifs.
En ce qui concerne la nécessité que le Gouvernement rende compte de la manière dont il applique les lois, il est important que vous puissiez être informés de l’état d’avancement des différents décrets.
Je crains qu’en vous soumettant tous les décrets vous ne soyez submergés, mais je laisse ce point à votre appréciation !
Je mets aux voix les amendements identiques n° 294 rectifié bis et 554 rectifié.
Les amendements sont adoptés.
M. le président. Je vous invite par ailleurs, mes chers collègues, à la suite des propos de M. Vasselle, à ne pas entamer le débat sur le projet de loi organique. Cela m’obligerait à quitter le fauteuil de la présidence, parce que je me sentirais contraint d’y participer !
Sourires
Or, le présent débat se déroule dans un climat dont tout le monde a salué la qualité et la sérénité. En outre, il faut que nous avancions !
L'amendement n° 490 rectifié bis, présenté par M. Soulage et les membres du groupe Union centriste, est ainsi libellé :
Après la troisième phrase du septième alinéa (c) de cet article, insérer une phrase ainsi rédigée :
Cette réduction ne doit cependant pas mettre en danger des productions, notamment les cultures dites mineures.
La parole est à M. Daniel Soulage.
Les retraits successifs de substances actives ces dernières années ont fortement fragilisé les systèmes de production « classiques ». En outre, les mesures contenues dans le plan Écophyto 2018, comme dans le « paquet Pesticides », adopté récemment par le Parlement européen, risquent d'accentuer cette faiblesse.
Le risque existe surtout pour les cultures dites « mineures », dans la mesure où elles ne constituent qu'une partie limitée des volumes de production totaux. En effet, au regard du faible enjeu économique qu'elles représentent sur le marché de la protection des plantes, ces productions « marginales » ne donnent parfois pas lieu à la mise au point de produits de traitement.
Les projections effectuées à partir des propositions de la Commission et du Parlement européen ont ainsi mis en évidence l'importance des conséquences d'un durcissement des conditions de mise sur le marché des produits phytosanitaires.
Cette mesure aboutirait, en matière d'arboriculture fruitière, à un retrait de 20 à 43 % des substances actives autorisées suivant les propositions de la Commission ou de 69 à 87 % suivant celles du Parlement européen.
En ce qui concerne l'incidence de cette mesure sur les autres usages arboricoles, elle serait tout aussi alarmante : jusqu'à 45 % d'entre eux seraient vides en application du projet de la Commission et jusqu'à 75 % en suivant celui du Parlement européen.
Or, ces petites productions font vivre nos territoires. Il est donc indispensable d'assouplir à la marge le dispositif prévu, afin de permettre leur survie.
Je voudrais commencer par rassurer l’auteur de cet amendement, qui est par ailleurs excellent : dans le texte du projet, il est bien question des « usages » de produits, et non pas de leur « nombre ».
Cela dit, la précision que vous proposez d’apporter est tout à fait utile ; la commission y est donc favorable.
L'amendement est adopté.
L'amendement n° 371, présenté par M. Vasselle, est ainsi libellé :
Après la quatrième phrase du septième alinéa (c) de cet article, insérer une phrase ainsi rédigée :
Des mesures incitatives, ainsi que des compensations, seront mises en œuvre afin d'assurer la viabilité économique des exploitations qui se seront engagées dans ces nouvelles pratiques ayant un impact sur les coûts de production et la productivité.
La parole est à M. Alain Vasselle.
Cet amendement vise à ce que la profession agricole n’ait pas à souffrir des nouvelles contraintes qui lui seront imposées en matière environnementale.
Ces contraintes sont instaurées pour des raisons tout à fait nobles, légitimes et que nous comprenons, mais nous souhaitons que leur impact sur les coûts de production et la productivité ne vienne pas mettre à mal la viabilité de nos exploitations agricoles.
La culture biologique bénéficie d’un certain nombre de mesures fiscales. Or, il me semble que les agriculteurs pratiquant la culture traditionnelle doivent, eux aussi, être accompagnés, à partir du moment où ils acceptent de s’engager dans la voie d’une réduction des intrants et de l’utilisation des produits pouvant être dangereux pour la santé humaine.
Tout cela est fort bien ! Encore faut-il que les produits qui seront maintenant utilisés, et qui auront des répercussions sur les niveaux de production – donc sur le revenu des agriculteurs – ne constituent pas un handicap pour la viabilité des exploitations.
Je souhaite donc que soient prises des mesures s’apparentant à celles que le Gouvernement a prises pour favoriser l’agriculture biologique.
Le sous-amendement n° 813, présenté par MM. Muller et Desessard et Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet, est ainsi libellé :
Compléter le second alinéa de l'amendement n° 371 par les mots :
en prélevant sur les crédits européens disponibles au titre du premier pilier de la politique agricole commune
La parole est à M. Jacques Muller.
Je souscris entièrement à l’esprit de l’amendement déposé par M. Vasselle. Je souhaitais simplement en préciser la rédaction dans la mesure où une agriculture plus respectueuse de l’environnement peut effectivement induire des coûts supplémentaires, sans que ce surcoût puisse être compensé par une augmentation du prix de vente. En effet, une agriculture intégrée, voire raisonnée, ne peut pas se traduire dans le prix payé par le consommateur.
Dès lors, il me semble important que « les compensations » figurant dans l’amendement n° 371 puissent être prises en charge par la collectivité, puisqu’une agriculture plus respectueuse de l’environnement profite à la collectivité tout entière.
Actuellement – et c’est un constat que j’ai déjà fait – le premier pilier de la politique agricole commune est déséquilibré. Il serait donc souhaitable d’encourager les agriculteurs au respect de l’environnement en utilisant le moyen de financement offert par ce pilier.
Il est important que nous raisonnions à charge financière constante pour la collectivité. Nous ne pouvons pas nous permettre d’accroître encore les charges budgétaires !
Monsieur Vasselle, la réduction du recours aux produits phytopharmaceutiques s’imposera à l’ensemble des exploitations, comme plus globalement le plan Écophyto 2018. Par conséquent, il ne s’agit pas d’une option ou d’une faculté. Les agriculteurs n’auront pas le choix. Dès lors, il n’y aura pas de distorsion de concurrence.
En l’absence d’éléments démontrant l’existence de ce surcoût pour les exploitations, il ne semble pas nécessaire de prévoir une compensation spécifique.
En ce qui concerne le sous-amendement n° 813 de Muller, la commission ne l’a pas examiné. Je m’exprimerai donc à titre personnel. Toutefois, puisque nous sommes défavorables à l’amendement n° 371, nous ne pouvons qu’être opposés au sous-amendement n° 813.
Sur l’amendement n° 371, l’avis du Gouvernement est le même que celui de la commission. En effet, l’évaluation de l’impact économique fait partie intégrante du dispositif. C’est pourquoi nous avons bien indiqué dans le projet de loi qu’il était question des solutions « économiquement viables ».
En ce qui concerne le sous-amendement n° 813, le Gouvernement émet également un avis défavorable. Comme je l’ai indiqué hier, les discussions sur la PAC sont en cours. L’inscription d’une telle disposition dans le présent texte serait tout à fait prématurée.
Compte tenu des explications que vient de nous fournir Mme la secrétaire d’État, je retire mon sous-amendement.
Je remercie d’abord M. Muller de corriger mes amendements de manière à éviter que leur application ne présente certains effets néfastes. Ce n’est pas la première fois que cela se produit, ni sans doute la dernière !
Peut-être pourrions-nous rédiger directement nos amendements ensemble, mon cher collègue, de façon à éviter le dépôt de sous-amendements !
Sourires
Je vous remercie, madame le secrétaire d’État, des explications que vous venez de nous fournir. Elles figureront au Journal officiel et devraient être de nature à apaiser les inquiétudes de la profession agricole.
L’essentiel est de veiller à ce que les mesures réglementaires qui sont prises n’aient pas un impact économique préjudiciable à nos exploitations.
M. le rapporteur a développé l’argument selon lequel toute la profession serait logée à la même enseigne et que, dès lors, aucun problème de concurrence ne se poserait. J’entends bien qu’il en aille ainsi, mais il m’importerait de savoir si ces mesures s’appliqueront également au niveau européen.
En son principe, la politique agricole commune concerne tous les États de l’Union européenne. Il ne faudrait donc pas que s’instaurent des distorsions de concurrence entre eux, ce qui risquerait de se produire si nous adoptions en France un dispositif réglementaire plus lourd et plus rigoureux que ceux qui existent dans les autres pays. Cela aurait inévitablement un impact sur nos coûts de production, et nous nous trouverions dans une situation défavorable sur le plan de la concurrence.
De même, je voudrais attirer tout particulièrement l’attention du Gouvernement sur la nécessité de développer la traçabilité des produits importés dans notre pays. Avons-nous l’assurance que ces produits, mis sur le marché alors qu’ils proviennent de pays où les conditions de production n’ont rien à voir avec celles qui prévalent en France, n’auront pas un effet négatif sur les cours, et, par conséquent, sur la viabilité de nos exploitations agricoles ?
L’approche doit être globale dès lors que nous vivons aujourd’hui dans une économique mondialisée. La profession agricole est d’ailleurs confrontée depuis quelques années à cette situation, comme en témoigne l’évolution du cours des différents produits au niveau de la production.
Bref, sur ces questions, nous devons apaiser la profession agricole en lui donnant des assurances. Dans la mesure où vous venez de le faire devant nous, je n’ai aucune raison de maintenir mon amendement.
J’attendrai toutefois quelques instants avant de le retirer, afin que Mme Blandin puisse exposer son point de vue.
Je serai très brève, monsieur Vasselle, afin de vous remercier de votre courtoisie !
Le même débat a eu lieu au sein du groupe « biodiversité » du Grenelle, qui s’intéressait aussi à l’agriculture. Il a été considéré que les coûts supplémentaires étaient un investissement en partie récupéré par l’exploitant en raison de la diminution des intrants, mais surtout compensé par les conséquences positives sur la santé et sur la qualité des nappes phréatiques, même si cela ne concerne pas le budget d’une exploitation.
Le principe est à peu près le même que pour les économies d’énergie : tout le monde fait un effort et c’est l’intérêt public qui en sort renforcé. Mais il est vrai que le budget de certains en pâtit.
Par ailleurs, je voudrais revenir sur une proposition, qui a été évoquée, mais qui n’a pas été menée à son terme et qu’il faudra peut-être étudier. On pourrait avoir, sur les emprises de trame ou les bonnes pratiques vertueuses, des compensations non pas en argent, mais par la prise en charge des retraites complémentaires ou des retraites des épouses qui ne sont pas couvertes par la MSA.
Il y aurait donc un donnant-donnant : solidarité générationnelle contre pratique vertueuse et on serait vraiment dans le développement durable.
Il y a depuis très longtemps des politiques agri-environnementales : les mesures agri-environnementales, les MAE, ont succédé aux contrats territoriaux d’exploitations, les CTE, qui ont eux-mêmes remplacé les contrats d’agriculture durable, les CAD.
Madame la secrétaire d’État, aujourd’hui, le cahier des charges des mesures agri-environnementales est beaucoup trop complexe et beaucoup trop difficile à mettre en œuvre à tel point que certaines lignes budgétaires n’ont pas été consommées devant l’impossibilité de négocier avec la profession agricole. Je vous demande donc de revoir ce dossier.
J’ai entendu nombre d’agriculteurs et de responsables agricoles s’exprimer sur ce sujet. En tant que membre de l’Agence de l’eau Artois-Picardie, j’ai pu constater que les crédits inscrits sur la ligne budgétaire de l’Agence de l’eau Artois-Picardie n’avaient pas pu être consommés à cause de ces difficultés purement administratives.
Je pense qu’il faudra alléger le dispositif et voir comment on peut faciliter la mise en place des mesures agri-environnementales qui s’inscrivent dans cette politique.
Monsieur Vasselle, vous avez parfaitement raison. Il ne faut pas faire en France ce qui ne se fait pas dans les autres pays européens. Mais, le marché étant mondial, nous aurons toujours des concurrents qui seront soumis à des règles différentes des nôtres.
Cela étant dit, j’appelle Mme la secrétaire d’État à veiller à ce que la réglementation française soit la même que la réglementation européenne afin que, au moins à l’échelon européen, nous soyons à égalité sur le plan de la concurrence.
Nous aurons l’occasion d’en reparler lors de l’examen des amendements suivants.
Le paquet Pesticides, une directive et des règlements, a été porté par la présidence française de l’Union européenne pour veiller à cette harmonisation entre la France et les pays européens.
Vous avez raison, monsieur Vasselle, la profession agricole demande de façon récurrente que les règles en vigueur en France s’appliquent bien à l’étranger et que les produits importés soient soumis aux mêmes règles que les produits français.
Ce paquet Pesticides a été voté en janvier dernier. Il doit permettre d’harmoniser les conditions de production, mais plus encore les conditions d’utilisation des produits phytosanitaires.
Monsieur Vasselle, comme vous l’avez annoncé, vous retirez votre amendement n° 371 ?
L'amendement n° 371 est retiré.
L'amendement n° 372, présenté par M. Vasselle, est ainsi libellé :
Après la quatrième phrase du septième alinéa (c) de cet article, insérer une phrase ainsi rédigée :
Cette généralisation sera précédée d'une étude d'impact économique afin d'en mesurer les conséquences sur la viabilité économique des exploitations.
La parole est à M. Alain Vasselle.
Il s’agit d’un amendement de repli, mais si j’ai bien compris M. le rapporteur et de Mme le secrétaire d’État, cette généralisation est partie intégrante de l’article 28 et cet exercice sera effectué avant la mise en œuvre du dispositif.
Je souhaite que Mme le secrétaire d’État le confirme et, sous cette réserve, je retire mon amendement.
Par ailleurs, je la remercie de nous avoir donné la confirmation que ces mesures ont été prises au niveau européen. Toutefois, le Gouvernement devra se préoccuper de l’entrée dans notre pays de produits équivalents concurrents.
Il ne faudra pas hésiter, me semble-t-il, à mettre en place au niveau de l’Europe une taxation à l’importation de ces produits, qui viendraient concurrencer les nôtres et qui n’auront pas été produits dans les mêmes conditions environnementales.
La France devra peser de tout son poids dans les négociations européennes pour obtenir ce résultat. Sinon, après le problème que nous aurons réglé entre pays européens, nous risquons d’être mis à mal par l’entrée de produits venant du Brésil ou de pays voisins, qui feraient une concurrence tout à fait déloyale à l’ensemble de la production européenne.
L’amendement ° 372 est retiré.
L'amendement n° 230, présenté par Mme Didier, MM. Danglot et Le Cam, Mmes Schurch, Terrade et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Avant l'avant-dernière phrase du septième alinéa (c) de cet article, insérer une phrase ainsi rédigée :
L'État respectera l'utilisation de semences de ferme en garantissant un cadre règlementaire plus souple pour les agriculteurs choisissant cette pratique qui limite les traitements phytosanitaires.
La parole est à M. Jean-Claude Danglot.
Il ne s’agit pas de refaire ici le débat que nous avons eu lors de l’examen des textes relatifs aux certificats d’obtention végétale et aux OGM. Ces textes ont montré toute l’agressivité des grands groupes semenciers, qui tentent de s’accaparer le domaine du vivant et de créer des dépendances financières et phytosanitaires pour les agriculteurs.
L’assouplissement de la réglementation en vigueur vis-à-vis des semences de ferme permettrait une gestion plus saine et plus économique pour les producteurs. Cette tradition ancestrale a fait la preuve de son efficacité, elle est aussi une garantie de biodiversité.
Au regard de ces remarques, nous vous demandons d’adopter cet amendement.
Monsieur Danglot, même les semences de ferme sont traitées. Il n’y a donc pas d’économies de produits phytosanitaires.
Cela étant dit, nous sommes défavorables à l’objet de cet amendement, qui consiste en la préconisation d’un cadre réglementaire plus souple pour les semences de ferme, c’est-à-dire des semences issues du tri d’une partie de la récolte précédente que l’agriculteur va réutiliser pour ensemencer ses champs.
En effet, ces semences ne sont pas nécessairement plus respectueuses de l’environnement que les semences classiques. Un tiers des semences de ferme sont aujourd’hui traitées avec des produits de protection systémique ou de contact, l’usage de ces traitements augmente de 20 % par an depuis deux ans, rattrapant l’usage qui en est fait dans les semences certifiées.
Le Gouvernement partage l’avis de M. le rapporteur sachant que les semences de ferme ne sont pas systématiquement adaptées à des itinéraires économes en intrants.
L'amendement n'est pas adopté.
Je suis saisi de six amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 69 rectifié, présenté par M. Sido, au nom de la commission, est ainsi libellé :
I. - Supprimer l'avant-dernière phrase du septième alinéa (c) de cet article.
II. - Après le dixième alinéa (e) de cet article, insérer quatre alinéas ainsi rédigés :
La politique génétique des semences et races domestiques aura pour objectifs :
- de rénover d'ici fin 2009 le dispositif d'évaluation des variétés et d'en étendre les critères aux nouveaux enjeux du développement durable, notamment la réduction progressive des intrants de synthèse et le maintien de la biodiversité, dont la biodiversité domestique. La France s'emploiera à faire prendre en compte ces nouveaux critères au niveau européen ;
- de définir d'ici 2010 un protocole permettant d'évaluer les variétés en conditions d'agriculture biologique ;
- et d'adapter d'ici fin 2009, par un dispositif d'inscription spécifique, le catalogue des semences aux variétés locales anciennes, y compris les variétés population, et aux variétés menacées d'érosion génétique.
III. - Supprimer le dernier alinéa de cet article.
La parole est à M. le rapporteur.
Il s’agit d’un amendement qui vise simplement à réécrire le texte adopté par l’Assemblée nationale.
Le sous-amendement n° 362 rectifié, présenté par M. Vasselle, est ainsi libellé :
Compléter le dernier alinéa du II de l'amendement n° 69 rectifié. par les mots :
, afin notamment d'en faciliter l'utilisation par les professionnels agricoles
La parole est à M. Alain Vasselle.
Ce sous-amendement tend à compléter l’amendement n° 69 rectifié, en reprenant la référence à l'utilisation facilitée des semences par la profession agricole.
J’aimerais que Mme le secrétaire d’État puisse nous dire si les négociations qui ont été menées sur les produits phytosanitaires lors de la présidence française l’ont été également pour l’ensemble des semences, puisqu’il est précisé que la France s’emploiera à faire prendre en compte ces nouveaux critères au niveau européen. Pour le moment, nous n’avons aucune garantie quant à l’application de ce dispositif à l’ensemble de l’Europe.
Ce qui vaut pour les produits phytosanitaires vaut également, me semble-t-il, pour l’ensemble des semences qui sont elles-mêmes traitées avant leur mise dans le sol.
C’est l’une des raisons pour lesquelles je n’étais pas entièrement opposé à l’appel de notre collègue Jean-Claude Danglot quant à l’utilisation de semences de ferme, dans la mesure où elles étaient fabriquées avec des produits conformes à une réglementation française ou européenne.
Les amendements n° 555 et 556 sont présentés par Mme Blandin, MM. Raoul et Courteau, Mme Herviaux, MM. Raoult, Repentin, Ries et Teston, Mme Bourzai, MM. Guillaume, Antoinette, Gillot, S. Larcher, Lise, Patient, Tuheiava et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
L’amendement n° 555 est ainsi libellé :
Dans l'avant-dernière phase du septième alinéa (c) de cet article, après les mots :
enjeux du développement durable
insérer les mots :
, sans provoquer une augmentation du coût de leur inscription au catalogue, ni un resserrement des critères d'évaluation qui engendrerait une érosion supplémentaire de la biodiversité cultivée,
L'amendement n° 556 est ainsi libellé :
Dans l'avant-dernière phrase du septième alinéa (c) de cet article, remplacer les mots :
aux variétés anciennes, y compris
par les mots :
aux variétés, y compris anciennes et
La parole est à Mme Marie-Christine Blandin, pour présenter les deux amendements.
L’amendement n°555 concerne les surcoûts éventuels qui élimineraient certains produits de l’inscription au catalogue.
Nous voulons faire figurer dans le texte les critères du développement durable – c’est bien louable – et, en premier lieu, la diminutions de l’utilisation des intrants de synthèse et le recours à des excès d’eau.
Cependant, toute évaluation nécessite une multiplication des essais. Plus il y a de critères, plus le coût est élevé et plus il réserve le marché, par simple effet d’économies d’échelle, à quelques variétés à très large diffusion nécessitant un recours important aux intrants de synthèse, pour artificialiser, homogénéiser la diversité des terroirs, et à l’irrigation pour stabiliser la variabilité des climats.
Plus ce coût est élevé, plus il exclut du marché la multiplicité des variétés locales à faible diffusion, parce qu’elles sont naturellement adaptées à tel ou tel terroir et à tel ou tel climat sans recours excessif à l’irrigation ou aux intrants.
Par ailleurs, le meilleur facteur génétique de résistance aux maladies et à la sécheresse, c’est l’adaptation à un terroir, qui repose sur les interactions entre de nombreux gènes et de nombreuses variétés dans les écosystèmes.
Les résistances génétiques spécifiques à une maladie ou à un stress climatique sont valables sur de nombreux territoires différents, sont toutes monogéniques et donc facilement contournées par les agents pathogènes.
Ce n’est donc pas la multiplication de nouveaux critères de résistance monogénique à tel ou tel parasite, maladie ou stress, réservés à une poignée de variétés bien connues dans les promotions et les catalogues, parce qu’elles sont à très large diffusion, qu’il faut favoriser pour s’adapter aux enjeux du développement durable.
Ce qu’il faut encourager, c’est la diversité, le grand nombre de variétés, qui ont chacune une histoire sur des territoires et qui, compte tenu du changement climatique, sont nos atouts pour demain.
L’amendement n°556 apporte une précision. Nous n’avons pas la traçabilité historique de toutes les variétés locales et certaines pourraient se voir exclues par l’expression « variétés anciennes ». Il faudrait pour les protéger faire la preuve qu’elles sont anciennes. Nous voulons conserver cette rédaction, mais nous souhaitons écrire « aux variétés, y compris anciennes » pour ne pas exclure celles qui ne pourraient pas faire la preuve de leur enracinement dans un territoire depuis plusieurs générations.
L'amendement n° 661, présenté par MM. Muller et Desessard et Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet, est ainsi libellé :
Compléter le dernier alinéa de cet article par une phrase ainsi rédigée :
Cette rénovation s'effectue sans provoquer d'augmentation du coût de leur inscription au catalogue ni un resserrement des critères d'évaluation qui engendreraient une érosion supplémentaire de la biodiversité cultivée.
La parole est à M. Jacques Muller.
L'amendement n° 124 rectifié bis, présenté par MM. César, Bizet, Doublet, Laurent, Cornu, Pointereau, Bailly et B. Fournier, Mme Procaccia et MM. Vasselle, Grignon et Lefèvre, est ainsi libellé :
Compléter le dernier alinéa de cet article par une phrase ainsi rédigée :
Elle se fixe pour objectif l'adoption d'une politique visant l'équivalence des exigences environnementales entre les produits français et les produits importés.
La parole est à M. Alain Vasselle.
Cet amendement est tout à fait dans l’esprit des arguments que j’ai développés tout à l’heure.
J’ai cru comprendre que M. le rapporteur et M. le président de la commission des affaires économiques partageaient ce point de vue. Donc, je ne doute pas un seul instant qu’ils seront favorables à cet amendement.
La commission a émis un avis favorable sur le sous-amendement n° 362 rectifié, qui vise à apporter une précision très utile.
Sur l’amendement n° 555, madame Blandin, je ferai deux remarques.
En premier lieu, il prévoit que le coût de l’inscription au catalogue ne devra pas augmenter. Si, en principe, tel devrait être le cas, on ne peut pas non plus écarter a priori une telle possibilité pour toutes les variétés. Ainsi, nous ne devons pas nous empêcher de recourir, dans certains cas précis, à une hausse, si limitée soit-elle.
En second lieu, cet amendement tend à éviter un resserrement des critères d’évaluation, qui « engendrerait une érosion supplémentaire de la biodiversité cultivée ». Or le fait que le catalogue ait provoqué une telle érosion n’a jamais été démontré. La biodiversité variétale des espèces cultivées est, semble-t-il, bonne. Par ailleurs, l’INRA, l’Institut national de la recherche agronomique, a montré que le catalogue ne favorise pas l’agriculture intensive.
La commission vous demande donc de bien vouloir retirer cet amendement. À défaut, elle émettra un avis défavorable.
J’en viens à l’amendement n° 556. Sur la forme, il vise à modifier une partie du texte que la commission a prévu de réécrire entièrement. Sur le fond, nous avons eu quelques difficultés à bien comprendre l’objet et la portée de cet amendement, qui, sous couvert d’une apparente simplicité, est très technique. En conséquence, nous souhaiterions entendre l’avis du Gouvernement sur ce point.
L’amendement n° 661 ayant un objet identique à celui de l’amendement n° 555, nous y sommes également défavorables.
L’amendement n° 124 rectifié bis est déjà satisfait par l’amendement n° 74 rectifié de la commission, qui lui est préféré pour des raisons rédactionnelles. Il vise en effet à modifier la fin d’un alinéa que la commission entend par ailleurs supprimer. En outre, l’amendement de la commission fait référence à la position de la France au sein de l’Organisation mondiale du commerce, qui est l’institution où une telle réciprocité environnementale peut être défendue.
Par conséquent, nous demandons aux auteurs de cet amendement de le retirer au profit de l’amendement n° 74 rectifié de la commission.
Le Gouvernement est favorable à l’amendement n° 69 rectifié, qui vise à clarifier la rédaction de l’article.
Il est également favorable au sous-amendement n° 362 rectifié. Il existe une directive visant à faciliter l’inscription au catalogue. Les règlements de transposition ont été pris au mois de novembre dernier.
Par ailleurs, le Gouvernement, comme la commission, est défavorable à l’amendement n° 555. Des discussions techniques sur les modalités d’évaluation sont en cours et on ne peut pas affirmer a priori qu’il n’y aura pas d’augmentation du coût d’inscription au catalogue.
Madame Blandin, l’amendement n° 556 porte sur les variétés anciennes. Le catalogue des semences est par essence mieux adapté aux variétés récentes, qui sont largement utilisées dans le monde agricole. Ce sont donc les modalités d’inscription des semences des variétés anciennes ou population qui doivent évoluer.
Le Gouvernement considère donc que la réécriture d’une partie de l’article proposée par la commission permet de prendre en compte votre préoccupation. Il a donc émis un avis défavorable sur l’amendement n° 556.
Il est également défavorable à l’amendement n° 661, puisque son objet est identique à celui de l’amendement n° 555.
En revanche, il est favorable à l’amendement n° 124 rectifié bis, même si son objet est en réalité pris en compte dans l’amendement de la commission.
Le sous-amendement est adopté.
L’amendement n° 69 rectifié de la commission visant à réécrire une partie de l’article 28, je souhaite transformer l’amendement n° 556 en un sous-amendement à l’amendement n° 69 rectifié.
Je suis saisi d’un sous-amendement n° 819, présenté par Mme Blandin, et ainsi libellé :
Au dernier alinéa du II de l'amendement n° 69 rectifié,
remplacer les mots :
locales anciennes, y compris les variétés population, et aux variétés menacées
par les mots :
locales, y compris anciennes, de population ou menacées
En conséquence, l’amendement n° 556 est retiré.
Quel est l’avis de la commission sur le sous-amendement n° 819 ?
Le sous-amendement n'est pas adopté.
L'amendement est adopté.
En conséquence, les amendements n° 555, 661 et 124 rectifié bis n'ont plus d'objet.
Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 70, présenté par M. Sido, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Supprimer la dernière phrase du septième alinéa (c) de cet article.
La parole est à M. le rapporteur.
Il s’agit d’un amendement de coordination avec les amendements visant à regrouper l'ensemble des dispositions relatives à la filière apicole après l'article 28.
L'amendement n° 679, présenté par MM. Bizet, Deneux, Doublet, Laurent, Pointereau et Revet, est ainsi libellé :
Après les mots :
et s'appuiera notamment sur
rédiger comme suit la fin de la dernière phrase du septième alinéa (c) de cet article :
les évaluations des risques toxicologiques, pour les abeilles, de l'ensemble des substances chimiques pertinentes effectuées par les instances publiques officielles d'évaluation concernées, ainsi que sur les propositions d'amélioration des pratiques apicoles faites par l'institut scientifique et technique de l'abeille tel que visé à l'article 23 ter.
La parole est à M. Charles Revet.
Tel que rédigé, le septième alinéa de cet article introduit le principe d'une évaluation toxicologique spécifique aux abeilles applicable à l'ensemble des substances chimiques. L'établissement d'un plan d'urgence doit être réalisé en regard de substances chimiques pertinentes, sur la base d'analyses de risque conduites par ailleurs, telles que celles qui sont réalisées par l'AFSSA, l’agence française de sécurité sanitaire des aliments, dans le cadre de la procédure d'évaluation des produits phytopharmaceutiques préalablement à leur mise sur le marché, tout en s'appuyant sur les travaux visant à l'amélioration des pratiques apicoles conduits par l'institut scientifique et technique de l'abeille.
La pertinence du plan d'urgence doit reposer sur l'ensemble de ces paramètres.
L'amendement n° 552, présenté par Mme Blandin, MM. Raoul et Courteau, Mme Herviaux, MM. Raoult, Repentin, Ries et Teston, Mmes Bourzai, Alquier, M. André et Bonnefoy, MM. Guillaume, Rebsamen, Hervé, Daunis, Antoinette, Gillot, Le Menn, S. Larcher, Lise, Patient, Tuheiava et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Compléter la dernière phrase du septième alinéa (c) de cet article par les mots :
en commençant par les neurotoxiques systémiques
La parole est à Mme Marie-Christine Blandin.
Cet amendement tend à modifier les dispositions de l’article 28 relatives aux abeilles.
Toutefois, l’amendement n° 70 de la commission visant à supprimer la dernière phrase du septième alinéa de cet article, pour la réintroduire dans un article additionnel après l’article 28, peut-être serait-il plus pertinent de défendre cet amendement au moment où nous évoquerons ce sujet.
Sourires
En conséquence, l’amendement n° 552 est rectifié et sera examiné ultérieurement.
Quel est l’avis du Gouvernement ?
Le Gouvernement est favorable à l’amendement n°70. En effet, il est important de traiter conjointement toutes les questions relatives aux abeilles. Cela a été souligné à plusieurs occasions, il s’agit d’un sujet prioritaire en termes tant environnementaux qu’économiques.
Monsieur Revet, s’agissant de l’amendement n° 679, qui vise à mettre en place un protocole d’évaluation scientifique, nous sommes absolument d’accord sur les principes qui le sous-tendent. Toutefois, étant très précis, peut-être n’a-t-il pas sa place dans la loi.
J’ai bien compris qu’il me fallait rectifier l’amendement n° 679. Je le présenterai donc de nouveau tout à l’heure, par cohérence avec la proposition de M. le rapporteur.
L'amendement est adopté.
On me fait savoir que l’amendement n° 679 est retiré.
Les amendements n° 658 rectifié et 659 sont présentés par MM. Muller et Desessard et Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet.
L’amendement n° 658 est ainsi libellé :
Compléter le septième alinéa (c) de cet article par une phrase ainsi rédigée :
Cette évaluation s'attachera à mesurer les effets combinés des molécules chimiques sur l'affaiblissement de la résistance des abeilles aux pathologies qui lui sont coutumières.
L'amendement n° 659 est ainsi libellé :
Compléter le septième alinéa (c) de cet article par une phrase ainsi rédigée :
Le plan sera actualisé tous les ans selon les résultats des évaluations.
La parole est à Mme Marie-Christine Blandin, pour présenter ces deux amendements.
Les amendements n° 658 rectifié et 659 concernent également le plan de protection des abeilles. Nous les rectifions, afin de les présenter après l’article 28.
En conséquence, les amendements n° 658 rectifié et 659 sont rectifiés et seront examinés ultérieurement.
Il s’agit d’une transhumance importante, mes chers collègues !
Sourires
L'amendement n° 231, présenté par Mme Didier, MM. Danglot et Le Cam, Mmes Schurch, Terrade et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Après le septième alinéa (c) de cet article, insérer un alinéa ainsi rédigé :
...) De développer fortement les circuits courts et l'incitation directe du consommateur à s'y fournir afin d'encourager les productions agricoles de proximité, de limiter les impacts environnementaux des transports de denrées alimentaires sur de longues distances, et de satisfaire les besoins alimentaires des populations à des prix raisonnables. À cette fin, l'État mettra à l'étude des modalités d'incitations financières pour les consommateurs les plus modestes se fournissant dans ces circuits. L'État et les collectivités territoriales étudieront les différentes formes possibles de soutien aux démarches de mise en place de circuits courts solidaires, et l'installation d'agriculteurs s'intégrant dans ces circuits, notamment dans le secteur du maraîchage.
La parole est à M. Jean-Claude Danglot.
Aujourd’hui, le transport des denrées alimentaires contribue aux bouleversements climatiques de notre planète. L’importation de denrées à des prix dérisoires induit des pratiques nocives au niveau tant de l’environnement que de la santé. Il faut mettre fin à l’importation de produits agricoles issus de pratiques non respectueuses de l’environnement. Il est urgent de nous réorienter vers des circuits de commercialisation courts et vers une agriculture autonome, économe et non polluante. Par ailleurs, pour pouvoir observer une mutation des modes de consommation des produits alimentaires, il est nécessaire de garantir au consommateur des denrées à prix raisonnables.
La mise en place des associations pour le maintien d’une agriculture paysanne, les AMAP, en est un très bon exemple. Ce nouveau mode de partenariat entre des consommateurs et une ferme permet la vente directe par souscription des produits de cette dernière, sans aucun intermédiaire. En 2004, on en dénombrait une cinquantaine en France.
Une relation naît entre le consommateur et le producteur. Ce type de consommation favorise l’échange et assure aux consommateurs des aliments sains, cultivés dans un environnement préservé.
Aujourd’hui, dans les zones urbaines où se sont développées de telles structures, la demande pour ce type de partenariat est supérieure à l’offre. Un tel indicateur témoigne de l’effet positif de cette démarche.
Plus ces structures se développeront, plus les circuits courts coexisteront enfin avec le système général de consommation.
Ces circuits s’organisent selon les axes du développement durable, qui sont une écologie saine, un lien social équitable et, enfin, une économie viable.
Élus politiques locaux et nationaux, nous devons développer et favoriser ce type d’organisation, en soutenant ces démarches auprès tant des consommateurs modestes que des agriculteurs qui décident d’intégrer ce type de structures.
Telles sont les raisons pour lesquelles, mes chers collègues, nous vous demandons de bien vouloir adopter cet amendement.
Cet amendement est long et alourdirait le texte du projet de loi s’il était adopté.
Au-delà de cette considération, je voudrais souligner que, encore confidentiels, notamment dans les zones urbaines, les circuits courts de production et de distribution de produits agricoles doivent aujourd’hui se développer. Leur apport social et environnemental est en effet indéniable.
Néanmoins, trois raisons nous conduisent à émettre un avis défavorable sur cet amendement.
Premièrement, au travers des dispositions encourageant la saisonnalité et le recours à des produits à faible impact environnemental, l’article 28 favorise déjà ce type de mises en marché.
Deuxièmement, l’amendement tel qu’il est rédigé conduit à instaurer une préférence pour les produits les plus proches géographiquement, ce qui est absolument contraire aux règles internationales de libre-échange.
Troisièmement – cet argument est peut-être le plus important – un groupe de travail sur ce thème, rassemblant l’ensemble des acteurs concernés dans le prolongement des assises de l’agriculture et du Grenelle de l’environnement, se réunit jusqu’en mars. Il devrait ensuite présenter ses propositions, sur la base desquelles sera arrêté un plan d’action. Dès lors, il semble préférable de laisser ce groupe de travail examiner la question et d’attendre ses conclusions.
Je vous demande donc de retirer votre amendement. À défaut, notre avis sera défavorable.
Le Gouvernement partage l’ensemble des arguments développés par M. le rapporteur et émet le même avis que la commission.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 423 rectifié bis, présenté par Mmes Herviaux et Blandin, MM. Repentin, Teston, Ries, Raoul, Guillaume, Raoult, Le Menn et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
À la fin du huitième alinéa (c bis) de cet article, remplacer les mots :
et notamment les protéagineux et les légumineuses
par les mots :
notamment en relançant la production des cultures de protéagineux et autres légumineuses
La parole est à Mme Odette Herviaux.
Nous avons déjà eu à plusieurs reprises l’occasion d’évoquer les besoins en protéines végétales destinées à l’alimentation du bétail.
Nous savons que la France importe actuellement environ 4, 8 millions de tonnes de soja chaque année, soit la plus forte consommation en Europe. Son déficit protéique atteint près de 50 % de la consommation.
Cette situation est problématique à plusieurs niveaux.
Sur le plan du développement durable et solidaire, tout d’abord, nous sommes en contradiction avec la notion de solidarité envers les pays du sud ou certains pays qui viennent juste de dépasser le stade de pays émergents, à cause de la déforestation et de la culture intensive du soja.
Par ailleurs, ces importations massives entraînent une croissance du transport et soulèvent des difficultés de traçabilité au niveau des filières, notamment dans les zones d’arrivée du soja où il faut faire cohabiter des filières comprenant des variétés d’organismes génétiquement modifiés et des filières n’en comprenant pas, ce qui engendre un surcoût important.
Enfin, ce système rend plus vulnérable l’élevage français en cas de rupture des approvisionnements.
Nous avons déjà évoqué le cadre réglementaire international, qui découle des accords de Blair House signés en 1992. On peut toujours évoluer et on doit le faire ! Il est souhaitable que la surface maximale d’oléoprotéagineux soit portée au-delà du niveau fixé de 30 % des besoins de l’Union européenne.
Comme l’écrit M. le rapporteur, « il convient désormais, dans une vision stratégique de long terme, de se donner les moyens de reconquérir une indépendance alimentaire et énergétique ». Il me semble qu’une telle évolution entre bien dans cet objectif !
Le redéploiement des cultures protéiques sur le territoire français est d’autant plus nécessaire qu’il permet de limiter l’empreinte écologique de l’agriculture et les risques économiques induits par la dépendance vis-à-vis des états fournisseurs.
Tel est l’objet du présent amendement.
Mme Odette Herviaux apporte une précision très utile au projet de loi et rappelle l’embargo lancé par des gens qui se disent pourtant ultralibéraux. Quand il n’y en a pas assez, on garde évidemment tout pour soi ! C’est cela aussi le libéralisme…
Par conséquent, la commission émet un avis favorable sur cet amendement, tout en soulignant que la relance de la filière protéagineuse passera certainement par une augmentation du prix des produits. Sans hausse tarifaire, les agriculteurs ne peuvent effectivement pas soutenir cette culture.
La relance de la production des protéagineux est une priorité absolue du Gouvernement. Nous émettons donc un avis favorable sur cet amendement.
L'amendement est adopté.
L'amendement n° 182 rectifié ter, présenté par MM. Fortassin, Charasse, Mézard et Milhau, est ainsi libellé :
Après le huitième alinéa (c bis) de cet article, insérer un alinéa ainsi rédigé :
...) De favoriser le maintien et la restauration des prairies et des herbages afin que les producteurs des filières bovines, ovines, équines et caprines puissent nourrir leurs cheptels majoritairement à l'herbe et aux graminées issues des pâturages ;
La parole est à M. François Fortassin.
M. François Fortassin. Mes chers collègues, cet amendement vise à vous proposer d’affirmer qu’il convient que les herbivores mangent de l’herbe !
Sourires
Premièrement, le lait et la viande dépendent en grande partie, pour leur qualité, notamment leur qualité gustative, de la nourriture donnée aux animaux. Or, on le sait, l’herbe et le foin séché restent la meilleure nourriture qu’on peut leur proposer.
Deuxièmement, la pâture permet aussi une bonne qualité d’entretien du paysage pour certains espaces fragiles tels que les alpages et les estives et, plus largement, pour toutes les prairies.
En effet, le pâturage représente la meilleure façon de lutter contre l’enfrichement, l’érosion des sols, les incendies, voire les avalanches.
M. Jacques Muller acquiesce.
S’agissant de l’enfrichement, on a l’habitude de dire que, lorsque l’élevage du mouton disparaît dans certaines régions, seule la friche le remplace. Il faut donc, bien entendu, essayer de le maintenir et de le développer.
Je n’ai pas besoin d’argumenter le cas des incendies. Il en va de même pour l’érosion des sols : de toute évidence, les racines permettent un meilleur maintien du sol dans les zones d’herbages.
Enfin, lorsqu’un espace de montagne n’est pas pâturé, les herbes se couchent dès le premier gel ou la première neige, ce qui crée automatiquement une sorte de tapis roulant favorisant le développement des avalanches. En revanche, l’herbe pâturée forme une brosse sur laquelle viennent s’accrocher les flocons de neige.
Voilà pour l’aspect environnemental de cette question !
Troisièmement, le maintien des prairies et des pâturages permet de garantir la qualité de l’eau des nappes phréatiques car le lessivage des sols est de fait beaucoup moins important.
Quatrièmement, sous l’angle de la santé publique, on peut raisonnablement considérer que le problème de la vache folle n’aurait pas existé si on avait mis les animaux à pâturer dans des prairies.
Entre un pâturage et une auge remplie d’une farine qui n’est pas d’une qualité extraordinaire, l’animal ne se trompera pas. En revanche, il est évident que, privé de pâturage, il mangera ce qu’on lui mettra dans l’auge. Ce problème de santé publique n’est donc pas neutre !
À ces quatre arguments, j’en ajouterai un cinquième, celui de l’image bucolique. Que seraient, par exemple, nos paysages du pays basque sans les petits moutons blancs qui pâturent, les plateaux de l’Aubrac sans les vaches de Salers et d’Aubrac, ceux du Béarn et des Pyrénées sans les troupeaux transhumants, sans parler de la Baie du Mont-Saint-Michel sans les moutons des prés salés ?
Sourires
M. François Fortassin. Voilà pourquoi je milite fortement pour que l’herbe et le pâturage constituent l’essentiel de la nourriture des ovins, des bovins, des caprins, voire des équidés.
MM. Robert del Picchia et François Trucy approuvent.
Le sous-amendement n° 814, présenté par MM. Muller et Desessard et Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet, est ainsi libellé :
Compléter le second alinéa de l'amendement n° 182 rectifié ter par une phrase ainsi rédigée :
Cette réorientation de la production de viande de qualité et respectueuse de l'environnement s'appuie sur un prélèvement sur les crédits européens disponibles au titre du premier pilier de la politique agricole commune.
La parole est à M. Jacques Muller.
Ce sous-amendement s’appuie sur l’excellente démonstration qui vient d’être faite par notre collègue François Fortassin et que je compléterai par trois arguments supplémentaires.
D’abord, les animaux élevés à l’herbe ont une qualité de vie bien meilleure. Cela entre aussi dans notre réflexion.
Ensuite, quand les animaux qui ont été cités ne sont pas nourris avec de l’herbe, ils le sont avec des céréales. Or une telle alimentation engendre un gaspillage de céréales, puisqu’il faut environ sept calories végétales pour produire une calorie animale. Par conséquent, utiliser des céréales pour nourrir des ruminants est une manière de gaspiller nos ressources céréalières.
Enfin, le dernier argument reprend le principe de souveraineté alimentaire, que nous avons évoqué au début de notre débat sur l’article 28. Faire manger de l’herbe à des ruminants revient à leur faire consommer de l’amidon et des protéines, parce que l’herbe, contrairement aux céréales, est riche en protéines. Par conséquent, nous réduisons notre facture de protéines importées lorsque nous valorisons la ressource en herbe.
Si, à un moment donné, nous avons transformé les ruminants en monogastriques, c’est bien parce que la politique agricole commune nous avait amenés dans cette direction.
À une certaine époque, la prime à l’herbe atteignait 60 euros par hectare et celle accordée au maïs fourrage 490 euros. Peut-on jeter la pierre aux éleveurs qui, dans ces conditions, ont changé leurs pratiques agricoles ? Je ne le crois pas !
C’est pourquoi je souhaite remettre ce point à l’ordre du jour dans le cadre de l’amendement n°182 rectifié ter. Nous devons utiliser les moyens existants de la politique agricole commune pour réellement favoriser et encourager l’élevage à l’herbe dès qu’il est possible.
L’amendement n° 182 rectifié ter tend très légitimement à favoriser une alimentation naturelle pour les productions animales herbagères, et les explications données par M. François Fortassin à ce sujet sont très démonstratives.
La commission émet donc un avis favorable sur l’amendement.
S’agissant du sous-amendement n° 814, je voudrais indiquer à M. Jacques Muller que je ne tiens pas à entrer dans des problèmes de tuyauterie institutionnelle et financière, qui n’ont pas à figurer dans une loi concernant l’environnement.
Au demeurant, en analysant plus finement la situation, je constate que, contrairement à ce que l’on pourrait croire, l’addition des aides des deux piliers de la politique agricole commune, tout au moins dans mon département, la Haute-Marne, aboutit à un total qui est plus favorable aux productions laitières et animales qu’aux productions céréalières.
La commission émet donc un avis défavorable sur ce sous-amendement.
Nous sommes tout à fait favorables à l’amendement n° 182 rectifié ter.
Vous avez raison, monsieur Fortassin ! L’herbe est importante, non seulement pour ce qu’elle apporte aux animaux et à leur qualité gustative, mais également parce que les herbages constituent des puits de carbone. Il est donc extrêmement important de préserver nos prairies.
S’agissant du sous-amendement n° 814, mon explication sera la même que celle que j’ai déjà fournie à propos d’autres amendements. Les discussions sur la mise en œuvre du bilan de santé de la politique agricole commune en France sont en cours. On ne peut pas préjuger de leurs résultats. Aussi, nous ne soutenons pas la proposition visant à inscrire dès à présent dans le projet de loi certaines dispositions y faisant référence. L’avis du gouvernement est donc défavorable.
Le sous-amendement n'est pas adopté.
La parole est à M. Alain Vasselle, pour explication de vote sur l'amendement n° 182 rectifié ter.
Je voterai en faveur de cet amendement. Pour autant, ne jouons pas les enfants de chœur, mes chers collègues !
Laisser croire à nos concitoyens qu’il suffit de nourrir les bovins avec de l’herbe pour régler tous les problèmes que nous essayons de traiter à travers ce projet de loi et pour que les producteurs de viande s’en sortent sur le plan économique, c’est faire preuve de naïveté et de crédulité.
On sait en effet que nous importons des animaux d’Argentine ou du Brésil auxquels sont administrés des implants. Sans aller aussi loin, rappelons que certains de nos voisins européens ne sont pas aussi exigeants que nous entendons l’être, demain, en matière d’alimentation animale.
Si l’on veut aller dans le sens de M. Fortassin, il faudrait d’abord, et surtout, que tous les produits alimentaires fassent l’objet d’une stricte traçabilité, notamment la viande bovine et ovine importée, afin de s’assurer qu’ils ont été produits dans les mêmes conditions qu’en France. Et si tel n’est pas le cas, nous devrions les rejeter ou les taxer lourdement afin que nos concitoyens puissent acheter une production française de qualité, protectrice de leur santé. Mais aurons-nous les moyens et le courage politique de mener une telle politique ?
Je voudrais très brièvement rassurer M. Vasselle. J’ai précisé dans l'amendement qu’il s’agissait de favoriser la nourriture du cheptel majoritairement, et non pas exclusivement, à l’herbe. Je suis en effet de ceux qui pensent que les animaux, qu’ils produisent de la viande ou du lait, doivent aussi, parfois, manger des céréales.
Je partage, bien entendu, l’avis de François Fortassin mais je souhaiterais, madame la secrétaire d’État, vous livrer deux réflexions.
Premièrement, l’impact de la politique européenne est considérable. Nous devons, certes, nous préoccuper de ce qui se passe à l’intérieur de nos frontières mais nous ne devons pas oublier non plus que nous faisons partie de l’Europe et que nous sommes engagés dans la mondialisation. Que nous soyons les meilleurs chez nous ne changera rien si nous n’avons pas les moyens d’empêcher les importations ! Je suis Normand et l’image de la Normandie, c’est la verdure. Autrefois, des prairies permanentes existaient dans tous les bassins versants, ce qui présentait le double avantage d’assurer la qualité de la production et d’éviter des inondations.
Mais, dès lors que le maïs fourrage permettait de produire deux fois plus que l’herbe des prairies permanentes et que les aides européennes ont privilégié celui-ci, les agriculteurs ont progressivement supprimé les prairies, car ils doivent bien faire vivre leurs familles ! De ce fait, entre 1995 et 2000, nous avons connu érosion des sols et inondations à répétition. Celles-ci ont, malheureusement, provoqué des décès que l’on aurait pu éviter. Je souhaiterais donc que le Gouvernement français intervienne très vigoureusement au niveau européen pour que les aides accordées tiennent compte de la qualité du produit fini, certes, mais aussi de ces paramètres.
S’agissant, deuxièmement, de la viande, il se trouve, madame la secrétaire d’État, que j’ai été le rapporteur, en 1987, d’un texte de loi sur les anabolisants. Une fois n’est pas coutume, je ne partageais pas l’avis du Gouvernement, que je soutenais pourtant à l’époque. Celui-ci voulait supprimer la loi dite « Rocard » du 31 décembre 1984 alors que je souhaitais, pour ma part, la maintenir. Les mesures ont finalement été prises par décret. Mais, pendant que nous interdisions les anabolisants français d’origine naturelle en 1987, les États-Unis autorisaient leur utilisation. Et, aujourd’hui encore, de la viande américaine fabriquée aux États-Unis avec des anabolisants français entre en France alors que les agriculteurs français n’ont pas le droit d’utiliser ces anabolisants !
Une harmonisation s’avère donc nécessaire. On ne peut pas faire comme si la France vivait dans un bocal, coupée du reste du monde.
Si je souscris donc à l’amendement présenté par M. Fortassin, qui permettra de produire de la viande de qualité, je souhaite également, madame la secrétaire d’État, que vous preniez en compte tous les éléments que je viens de rappeler.
Je serai bref car Charles Revet a déjà presque tout dit !
Nous devons mener une réflexion sur l’équilibre environnement-agriculture ainsi que sur la contradiction qui peut exister entre l’environnement et le caractère intensif de l’agriculture. L’exemple cité par Charles Revet est intéressant. Je pourrais citer le cas, similaire, du parc de l’Avesnois, un territoire de boccages situé dans le nord de la France.
Je comprends qu’un agriculteur ait envie de produire du maïs puisque les rendements comme les primes sont supérieurs.
Il en résulte, en Normandie comme dans ma région, une disparition du boccage, des mises en labour et une perte de la biodiversité.
Pourtant, des solutions existent. Il faut poursuivre le développement de la politique de labellisation afin que le consommateur puisse aisément identifier la viande provenant d’animaux exclusivement nourris avec de l’herbe.
Les mesures agri-environnementales, les MAE, permettent aussi à l’agriculteur qui participe à la préservation de la biodiversité de compenser la perte d’unités fourragères par une prime.
Quant aux produits importés, comment contrôler leur qualité ? Hier soir, en sortant de cette enceinte, j’ai pu constater que l’épicerie près de la place du Panthéon ne vendait que des fruits et des légumes originaires du Chili. Comment ces produits ont-ils été fabriqués ? Quelle dose de pesticides a été pulvérisée sur ces prunes, ces fraises et ces pommes chiliennes ?
Au demeurant, le fait que nos voisins utilisent trop de pesticides ne constitue pas une raison suffisante pour conserver, nous aussi, ces mauvaises pratiques. Nous devons garantir une alimentation correcte à notre population.
À ce stade de nos échanges, je suis frappée de voir à quel point notre attachement à telle ou telle forme d’élevage ou de pratiques culturales dépend de notre territoire d’origine, ce qui est normal, puisque ces pratiques sont adaptées à ces territoires. En outre, cette diversité constitue la richesse de notre pays et, d’une certaine manière, nous sommes tous d’accord.
Je prendrai l’exemple de ma région, la Bretagne. On la critique souvent au motif qu’elle aurait reçu beaucoup d’argent de la PAC. Or, si elle se situe effectivement au cinquième ou sixième rang au titre du premier pilier, elle se classe dans les derniers lorsque les sommes reçues sont rapportées au nombre d’exploitations ou au nombre de salariés.
Nous avons fait le choix du maintien des hommes sur le territoire. Et ce n’est pas parce que la manne provenant du second pilier est faible que notre agriculture ne va pas dans le sens du développement durable. N’oublions pas que le volet social fait aussi partie du triptyque du développement durable !
Nous avons déjà abordé à plusieurs reprises le sujet des importations, dont notre collègue Alain Vasselle parlait à l’instant. Ce problème doit être abordé au niveau mondial. Il faut, bon gré mal gré, clore le cycle de Doha et ouvrir de nouvelles négociations qui prendront enfin en compte les critères de qualité, de traçabilité et de respect de l’environnement, du bien-être animal et des normes sociales. L’Europe devra se montrer très forte et je vous assure que ce sera un autre sport !
Je me réjouis simplement du consensus qui émerge dans cet hémicycle. Il est important de réorienter les politiques agricoles, qui, à leur tour, conditionnent beaucoup de nos pratiques.
L'amendement est adopté.
L'amendement n° 183 rectifié ter, présenté par MM. Fortassin, Mézard et Charasse, Mme Escoffier et M. Milhau, est ainsi libellé :
Après le huitième alinéa (c bis) de cet article, insérer un alinéa ainsi rédigé :
...) De soutenir au plan européen, la mise en œuvre progressive de dispositions relatives aux espaces d'exploitation agricole permettant une croissance harmonieuse des animaux et en particulier dans les filières avicoles et porcines ;
La parole est à M. François Fortassin.
Dans de nombreux élevages, notamment porcins et avicoles, les animaux sont confinés dans des espaces extrêmement contraints. Au-delà des réglementations européennes qui existent sur le sujet, je souhaiterais que l’on permette à ces animaux d’évoluer dans des espaces plus vastes, afin qu’ils puissent développer leur musculature. En effet, si l’on empêche ces animaux de se mouvoir, ils ne pourront pas produire une chair de qualité car la chair, c’est le muscle !
La notion de « croissance harmonieuse des animaux » reste à préciser, monsieur Fortassin. Nous aurons sans doute l’occasion de revenir sur ce point lors d’un prochain débat.
Cela étant dit, l’objectif visé par cet amendement est parfaitement recevable et l’on ne peut qu’être favorable à l’extension des surfaces, c’est-à-dire, en d’autres termes, à l’extensification de l’élevage.
Cependant, les contraintes de productivité rencontrées dans certaines productions animales s’opposent à ce qu’un tel objectif soit proclamé de façon générale pour l’ensemble des filières.
En outre, des directives européennes prévoient déjà des surfaces minimales d’élevage filière par filière : nombre de centimètres carrés pour les poules, nombre de pondeuses, etc.
L’intensification de la production agricole a été favorisée par la volonté de maintenir sur les terres un maximum d’agriculteurs. Les lois sur les structures adoptées au cours des années soixante, que j’évoquais hier soir, ont eu ainsi à opérer un choix entre le maintien sur les terres, et, par conséquent, l’intensification de la production – ce dont parlait Mme Herviaux tout à l’heure – et le refus de toute intensification, au risque de provoquer un exode rural. L’équilibre a été très difficile à trouver.
Pour toutes ces raisons, la commission demande à M. Fortassin de bien vouloir retirer son amendement. À défaut, elle émettra un avis défavorable.
La question du bien-être animal n’entrait pas directement dans le cadre des discussions du Grenelle de l’environnement. Elle a fait l’objet, peu après le Grenelle, de rencontres intitulées « Animal et société ».
Par ailleurs, les directives européennes imposent des conditions relatives à l’intégration des espaces nécessaires au développement des animaux.
Cela dit, sur ce sujet qui est important, le Gouvernement s’en remet à la sagesse du Sénat.
M. François Fortassin. Monsieur le président, je me trouve dans une situation quelque peu embarrassante dans la mesure où le Gouvernement s’est montré plus qu’à moitié favorable à mon amendement
Sourires
Il s’en est remis à la sagesse du Sénat !
… tandis que la commission s’y est montrée défavorable.
Compte tenu du sort très favorable qui a été réservé à mon premier amendement, je serais tenté de retirer celui-ci. Néanmoins, me souciant non seulement du bien-être des animaux, mais aussi de leur croissance harmonieuse, je maintiens cet amendement d’appel, en dépit du risque qu’il ne soit pas adopté.
Votre appel a été entendu, monsieur le sénateur.
Mon cher collègue, je ne suis pas tout à fait d’accord avec vous : il ne suffit pas d’offrir plus d’espace aux animaux dans tel ou tel type d’élevage pour les rendre plus heureux. Au contraire !
Soyons précis : évidemment, dans les élevages sur paille, les animaux sont plus calmes et moins agressifs. Mais peut-on imaginer la généralisation des élevages en plein air ? Pour ma part, je puis vous dire, mes chers collègues, que ce ne serait pas une sinécure. Les nouvelles normes européennes, qui imposent davantage d’espace pour les animaux, soulèvent de nombreuses difficultés. En effet, les animaux sont agressifs, se mordent, se battent entre eux. C’est la loi du plus fort qui prévaut !
Pour avoir étudié attentivement des centres d’expérimentation, je sais que, parfois, le mieux est l’ennemi du bien. Dans certains cas, les animaux sont certainement beaucoup plus malheureux qu’ils ne l’étaient auparavant. Mais il ne faudrait pas, par anthropomorphisme, leur prêter des réactions qui ne sont pas forcément les leurs.
Monsieur Fortassin, je souscris à votre volonté de permettre « une croissance harmonieuse des animaux ». Le député Jean-Pierre Door et moi-même avons, au nom de l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques, rédigé un rapport consacré au risque épidémique. S’agissant de la grippe aviaire, nous y avons démontré que le temps de croissance harmonieuse des animaux favorisait le potentiel immunitaire et évitait ainsi de transformer les élevages en photocopieuse à virus H5N1.
Dernièrement, j’ai pris part, avec le président Jean-Paul Emorine, à une mission au Japon. Sur place, nous avons visité une ferme à Kyoto pratiquant l’élevage en box et produisant du bœuf de Kobe, que nous avons goûté. Comment se fait-il que nous ne puissions pas, en France, imiter ce modèle d’élevage ?
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 497, présenté par M. Dubois et les membres du groupe Union centriste, est ainsi libellé :
Après le huitième alinéa (c bis) de cet article, insérer un alinéa ainsi rédigé :
...) De favoriser la valorisation des effluents organiques d'élevage comme engrais naturel.
La parole est à M. Daniel Soulage.
Les performances écologiques des engrais de ferme et leur valeur agronomique s'avèrent remarquables.
Produits dérivés de l'élevage sur les exploitations mêmes, le recours adapté aux engrais de ferme a pour effet mécanique de permettre leur valorisation, de limiter le recours aux engrais minéraux issus de l'industrie chimique et pétrolière, d'éliminer les pollutions induites par la commercialisation et le transport de ces engrais chimiques, tout en constituant à la fois des amendements et des engrais complets pour les sols.
En effet, non seulement la valeur fertilisante des engrais de ferme est équivalente à celle des engrais minéraux pour la plupart des éléments nutritifs – phosphore, potasse, calcium, magnésium, oligo-éléments et azote –, mais, en outre, l'apport régulier d'engrais de ferme améliore sensiblement le taux de matières organiques des sols, et ce en une dizaine d'années.
Enfin, contrairement à certains préjugés, des études récentes ont démontré que le remplacement total ou partiel des engrais minéraux par des engrais de ferme n'accroît pas l'acidification des sols cultivés, mais, au contraire, permet généralement une alcalinisation des sols ainsi enrichis.
Le présent amendement vise en conséquence à compléter le chapitre « Une agriculture et une sylviculture diversifiées et de qualité productives et durables » en insérant un alinéa explicitant l'intérêt pour l'État de favoriser par tout moyen la valorisation des effluents organiques d'élevage comme engrais naturel.
Le sous-amendement n° 815 rectifié, présenté par MM. Muller et Desessard et Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet, est ainsi libellé :
Compléter le second alinéa de l'amendement n° 497 par une phrase ainsi rédigée :
À cet égard, les élevages sur paille en alternative à ceux sur caillebotis seront favorisés.
La parole est à M. Jacques Muller.
J’approuve tout à fait l’amendement de notre collègue Daniel Soulage. Puisque nous nous efforçons de tracer les contours d’une agriculture durable, j’ajouterai que la question du recours aux engrais est au cœur même de cette réflexion.
En réalité, nous cherchons à diminuer la dépendance des exploitations agricoles, notamment vis-à-vis des cours du pétrole, qui connaissent des variations erratiques. Or chacun sait que la fabrication des produits phytosanitaires ou des engrais est forte consommatrice de pétrole.
En outre, avant d’être épandus, ces produits phytosanitaires et ces engrais, après leur fabrication, doivent être transportés. Aussi, limiter leur utilisation présente un intérêt économique et induit une réduction des émissions de gaz à effet de serre.
J’en viens à mon sous-amendement.
Les élevages sur caillebotis se sont multipliés cependant que d’autres exploitants pratiquent l’élevage sur paille. Sur un plan agronomique, la différence est tout à fait essentielle, parce que les lisiers produisent de l’azote minéral, potentiellement néfaste pour les nappes phréatiques et pour l’environnement. En revanche, l’élevage sur paille génère des déjections qui, une fois compostées, alimentent le sol en azote organique, dont la minéralisation est progressive. Ainsi, ce dernier mode d’élevage est potentiellement bien moins dangereux pour l’environnement.
À travers ce sous-amendement, je souhaite en quelque sorte procurer un avantage comparatif aux agriculteurs qui recourent à l’élevage sur paille dans la mesure où cette pratique entraîne un surcroît de travail par rapport aux autres types d’élevage.
Monsieur Soulage, avez-vous déjà vu des effluents d’élevage abandonnés ne servant pas à amender les champs ? Non ! Par conséquent, la commission estime que votre amendement est parfaitement inutile, parce qu’il est déjà satisfait dans la réalité.
En outre, la rédaction de l’amendement de la commission portant sur le même objet nous paraît plus pertinente, car elle ne se limite pas à la valorisation des effluents organiques d’élevage « comme engrais naturel », ce qui exclut la méthanisation.
Je propose donc à M. Soulage de retirer son amendement, qui n’enrichit aucunement ce projet de loi. À défaut, la commission émettra un avis défavorable.
Quant au sous-amendement de M. Muller, Mme Herviaux, en tant que Bretonne, l’appréciera sûrement, puisqu’il tend à supprimer l’élevage sur caillebotis au profit de l’élevage sur paille.
Monsieur Muller, c’est bien de cela qu’il s’agit ?
Marques de dénégation de M. Jacques Muller.
Écoutez, votre amendement dispose ceci : « À cet égard, les élevages sur paille en alternative à ceux sur caillebotis seront favorisés. ». Cette formulation est explicite ! Vous visez les élevages sur caillebotis bretons !
Permettez-moi de vous poser une question : comment fait-on lorsqu’on ne dispose pas de paille ? Si les Bretons ont eu recours à l’élevage sur caillebotis, c’est bien parce qu’ils voulaient, grâce à cette méthode, économiser de l’énergie.
À vous qui avez fait les foins et chargé des remorques, il n’aura pas échappé, monsieur Muller, que ces tâches sont désormais assurées mécaniquement. Il est donc nécessaire de construire des bâtiments pour mettre ces machines à l’abri, comme il faut des bâches en plastique pour recouvrir la paille. Par conséquent, l’empreinte sur l’environnement de l’élevage sur caillebotis, croyez-en mon expérience, est bien moindre que celle de l’élevage sur paille.
Enfin, vous affirmez que les effluents issus de l’élevage sur caillebotis polluent plus les sols et la mer que ceux qui sont issus de l’élevage sur paille. Vous qui êtes professeur, monsieur Muller, vous savez bien que tout est une question de dosage ! D’ailleurs, les agriculteurs sont tenus de respecter des plans d’épandage extrêmement précis…
… et de procéder à des analyses de leur lisier. Ils doivent s’en tenir au strict nécessaire. Par conséquent, tous vos arguments sont vains.
C’est pourquoi la commission émet un avis défavorable.
S’agissant de l’amendement n° 497, le Gouvernement pense que, au-delà de la valorisation des engrais, la méthanisation appelle, elle aussi, d’immenses progrès.
La rédaction proposée par l’amendement de la commission me semble à la fois répondre à ce dernier objectif et satisfaire vos souhaits, monsieur Soulage.
Aussi, je vous saurais gré de bien vouloir retirer votre amendement.
Le Gouvernement émet un avis défavorable sur le sous-amendement n° 815, parce qu’il estime que ces dispositions ne sont pas du domaine de la loi. En réalité, il conviendrait de répertorier un ensemble de mesures également favorables à l’agronomie et à la culture. Même si je ne connais pas parfaitement ce sujet, je crois pouvoir dire que cette liste serait extrêmement longue.
Aussi, le Gouvernement émet un avis défavorable.
M. Daniel Soulage. Monsieur le rapporteur, vous vous être montré très hostile à mon amendement. Vous affirmez que, si l’on ne trouve pas de fumier au bord des routes, c’est parce qu’il a été utilisé. Cette explication ne me satisfait pas entièrement. Néanmoins, afin d’éviter une « guerre du fumier »
Sourires
L'amendement n° 497 est retiré.
Par conséquent, le sous-amendement n° 815 rectifié n’a plus d’objet.
L'amendement n° 71, présenté par M. Sido, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Compléter le neuvième alinéa (d) de cet article par une phrase ainsi rédigée :
A cet effet, l'État mettre en place un crédit d'impôt pour la réalisation d'un diagnostic énergétique de l'exploitation agricole ;
La parole est à M. le rapporteur.
Cet amendement rédactionnel replace la première phrase du onzième alinéa, qui concerne un crédit d'impôt pour la réalisation d'un diagnostic énergétique, au neuvième alinéa, qui traite déjà de ce sujet.
L'amendement est adopté.
Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 72, présenté par M. Sido, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Supprimer le onzième alinéa de cet article.
La parole est à M. le rapporteur.
Cet amendement de suppression a pour objet de clarifier le texte.
Il est proposé de replacer la première phrase de cet alinéa, qui concerne un crédit d'impôt pour la réalisation d'un diagnostic énergétique, au neuvième alinéa, qui traite déjà de ce sujet.
Quant au reste de l'alinéa, il n'apporte rien de nouveau par rapport audit alinéa et ne fait que reprendre, à titre d'exemple, certaines mesures énumérées par le comité opérationnel « plan de performance énergétique des exploitations agricoles », auquel renvoie ledit alinéa.
L'amendement n° 720, présenté par Mmes Hoarau et Didier, MM. Danglot et Le Cam, Mmes Schurch, Terrade et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit la dernière phrase du onzième alinéa de cet article :
L'État mettra en place des mesures incitatives pour produire et utiliser des énergies renouvelables et économiser de l'énergie, dans les exploitations agricoles (expérimentation, méthanisation, mobilisation de la biomasse agricole et forestière combustible, équipements solaires, adaptation de la fiscalité sur l'énergie, équipements d'économies d'énergie, certificats d'économie d'énergie).
La parole est à M. Jean-Claude Danglot.
Il importe de favoriser la production et l'utilisation d'énergies renouvelables, ainsi que les économies d'énergie dans les exploitations agricoles.
À titre d’exemple, je citerai l’une des orientations du contrat d’objectifs de la chambre d’agriculture de La Réunion qui est d’atteindre l’autonomie énergétique des exploitations agricoles, dans le cadre d’une gestion rationnelle de l’énergie.
Or cette volonté ne peut se concrétiser que par un engagement de l’État, à travers des mesures incitatives, et ce en complément du crédit d’impôt pour la réalisation du diagnostic énergétique.
Il s’agit par là d’aider le monde agricole, secteur diffus d’émissions de gaz à effet de serre, à concilier production agricole et enjeux environnementaux.
L'amendement n° 474, présenté par MM. Courteau, Guillaume et Raoul, Mme Herviaux, MM. Raoult, Repentin, Ries et Teston, Mmes Bourzai et Blandin, MM. Antoinette, Gillot, S. Larcher, Lise, Patient, Tuheiava et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
A la fin du onzième alinéa de cet article, avant le signe :
insérer les mots :
aérogénérateurs de puissance inférieure à 36 kilowatt
La parole est à M. Roland Courteau.
Je ne m’étendrai pas sur cette question, sur laquelle je me suis suffisamment expliqué la semaine dernière. Sachez simplement que, dans mon département, dans le cadre des actions conduites par une association départementale du nom de « Pôle Énergie 11 », nous incitons et aidons les exploitations à produire et à utiliser les énergies renouvelables.
Cela fait plus de deux ans que, par le relais de cette association Pôle Énergie 11, nous encourageons les exploitants à effectuer des diagnostics énergétiques sur leur propre exploitation, dans le double objectif de réaliser des économies d’énergie et de favoriser la production et l’utilisation des énergies renouvelables.
Comme nous avons un peu d’avance dans ce domaine, je ne résiste pas au plaisir de vous en informer.
Le bois-énergie rencontre un vif succès. Les économies réalisées sont importantes. Il en est de même des énergies solaire, photovoltaïque et de la biomasse. En revanche, la situation est différente pour le petit éolien. La procédure réglementaire est si lourde que cette énergie est grandement sous-utilisée.
L’amendement n° 720 porte sur un alinéa que la commission a décidé de supprimer du fait de son caractère vague et non normatif.
Sur le fond, cet amendement alourdit le texte sans rien y apporter, nous semble-t-il. Il existe déjà, dans le présent projet de loi, aux articles 17, 28 et 29, mais aussi dans d’autres textes, des mesures incitatives pour la production et les économies d’énergie dans les exploitations agricoles.
Aussi, la commission sollicite le retrait de cet amendement. À défaut, elle émettra un avis défavorable.
S’agissant de l’amendement n° 474, défendu par notre excellent collègue M. Courteau, je dirai que nous avons déjà évoqué le petit éolien en milieu rural, qu’il faut encourager.
Personnellement, je partage l’opinion des auteurs de l’amendement et j’y suis favorable, encore faut-il prévoir un bon encadrement. Cependant, cet amendement porte sur un alinéa que la commission a décidé de supprimer et, pour les mêmes raisons que précédemment, je sollicite son retrait. À défaut, j’émettrai un avis défavorable.
Le Gouvernement est favorable à l’amendement n° 72.
S’agissant de l’amendement n° 720, nous approuvons sur le fond les mesures qui sont proposées. Simplement, le nombre de celles qui sont envisageables pour développer la maîtrise de l’énergie et la performance énergétique des exploitations agricoles est assez important. D’ailleurs, M. le ministre Michel Barnier a présenté très récemment le plan de performance énergétique des exploitations agricoles qui a été préparé avec l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie, l’ADEME.
Par conséquent, je suggère aux auteurs de cet amendement de le retirer, car il est satisfait par l’objectif général fixé au d) de l’article 28 réécrit par la commission.
L’amendement n° 474 a trait au petit éolien, qui est effectivement très encadré. Mais, vous le savez, les éoliennes de moins de douze mètres ont une production extrêmement faible, puisque, par définition, elles sont plutôt en dessous des limites de vent, et leur fort développement pourrait nuire à l’insertion des éoliennes dans le paysage et développer ce phénomène de mitage qui suscite parfois des controverses. Aussi préférons-nous que soient conservées les procédures actuelles qui encadrent le développement du petit éolien en France.
L'amendement est adopté.
En conséquence, les amendements n° 720 et 474 n'ont plus d'objet.
L'amendement n° 425, présenté par Mmes Herviaux et Blandin, MM. Repentin, Teston, Ries, Raoul, Guillaume, Raoult, Le Menn et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après le onzième alinéa de cet article, insérer un alinéa ainsi rédigé :
L'État réorientera les aides publiques vers les systèmes agricoles les plus respectueux de l'environnement, en utilisant tous les instruments prévus par le bilan de santé de la politique agricole commune.
La parole est à M. Jean-Jacques Mirassou.
Cet amendement, qui est un amendement d’appel, s’inscrit dans la logique d’une réorientation des aides publiques vers un système agricole plus respectueux de l’environnement, en utilisant tous les instruments prévus par le bilan de santé de la politique agricole commune.
D’ailleurs, l’accord sur le bilan de santé de la PAC intervenu le 20 novembre dernier a proposé une nouvelle rédaction pour l’article 68 du règlement sur les régimes de soutien direct en faveur des agriculteurs dans le cadre de la PAC.
Cette réécriture permet une réorientation des aides directes dans le cadre du premier pilier, comme l’indique cet extrait des conclusions du conseil des ministres de l’agriculture, qui précise que les États membres pourront utiliser, à compter de 2010, jusqu’à 10 % de leurs plafonds nationaux, et jusqu’à 4 % de leurs fonds nationaux non utilisés en vue d’octroyer un soutien aux agriculteurs pour certains types d’agriculture revêtant une importance en matière de protection ou d’amélioration de l’environnement, cela pour améliorer la qualité des produits agricoles ou leur commercialisation, ainsi qu’en matière de bien-être et de protection animale.
À la suite de cet accord sur le bilan de santé, chaque État membre doit faire des choix de réorientation des aides pour une application dès 2010. Il est donc d’autant plus urgent de préciser les orientations de la France en la matière que ces choix devront être arrêtés avant mars 2009.
Il conviendra par ailleurs de donner des réalités chiffrées dans le « Grenelle II ».
Cette question du financement est donc, de notre point de vue, d’une importance capitale, tout comme celle qui concerne les choix stratégiques de répartition des aides européennes, comme la régionalisation des aides du premier pilier. Le moteur du soutien aux nouvelles dynamiques régionales qui émerge impose aux pouvoirs publics d’être à la hauteur des demandes des consommateurs dont l’engouement pour tout ce qui est « bio » ne se dément pas.
Or ces demandes sont pour l’instant essentiellement satisfaites par des produits importés issus de pays extra-européens, …
…qui peuvent donc poser des problèmes de contrôle, de certification, d’étiquetage et d’impact écologique liés à leur transport.
J’observe d’ailleurs au passage qu’une réorientation de ce type de production vers une production nationale aurait bien évidemment une incidence économique qui ne serait pas négligeable.
De notre point de vue, il serait donc logique et urgent, pour se mettre en conformité avec les engagements du Grenelle de l’environnement, que notre pays soit très ambitieux dans la réorientation des aides publiques liées aux financements nationaux et européens vers toutes les formes d’agriculture respectueuses de l’environnement.
M. Jean-Jacques Mirassou. Cet amendement, vous l’aurez compris, n’a donc pas d’autre objet que de faire clairement figurer cette ambition dans le texte dont nous débattons aujourd’hui.
M. Roland Courteau applaudit.
Je ferai la même remarque que pour l’amendement n° 748, qui se rapproche très fortement de celui-ci.
Le principe d’éco-conditionnalité des aides accordées au titre de la PAC permet déjà de les distribuer au regard du respect des normes environnementales, et il n’y a pas lieu d’y substituer un nouveau principe de répartition dont la mise en place serait longue, compliquée et coûteuse et les effets incertains.
J’ajouterai que le bilan de santé de la politique agricole commune permettra probablement d’opérer des réorientations, notamment un rééquilibrage entre le premier et le deuxième piliers. Comme cela, M. Muller sera content !
M. Jacques Muller proteste.
Cela étant dit, il ne faut pas se méprendre sur les difficultés que connaissent aujourd’hui les agriculteurs. Vous le savez, lorsqu’un médecin rédige une ordonnance, il est seulement obligé d’inscrire la substance active et son dosage. Dans le domaine de l’agriculture, il nous est interdit d’écrire uniquement la substance active dans les registres parcellaires que nous remplissons. Nous devons déclarer le nom précis du produit commercial : l’information est donc plus complète, puisqu’elle comporte à la fois le dosage et la formulation.
On voit bien que l’agriculture est de plus en plus respectueuse de l’environnement, et je crois qu’il ne faut pas trop charger la barque !
J’ai bien entendu qu’il s’agissait là d’un amendement d’appel. Mon collègue Michel Barnier et moi-même travaillons sur le bilan de santé de la PAC pour intégrer dans le dispositif les objectifs que nous nous fixons aujourd’hui. L’appel a bien été entendu. Aussi, monsieur le sénateur, je vous propose de retirer votre amendement.
Nous entrons dans le subjectif. De notre point de vue, l’amendement, s’il a été écouté, n’a pas été entendu. C’est la raison pour laquelle nous le maintenons.
Je profiterai de cette explication de vote pour répondre à M. le rapporteur, qui m’a posé plusieurs questions.
Favoriser les élevages sur paille ne veut pas dire les imposer. Nous avons voté tout à l’heure l’excellent amendement de notre collègue François Fortassin visant à favoriser l’élevage sur herbe. Il n’était question d’aucune obligation. Je ne comprends pas cette lecture réductrice de l’amendement que j’ai proposé.
Monsieur le rapporteur, puisque vous m’avez interrogé sur ce sujet, je vous répondrai qu’un lisier contenant de l’azote minéral migre plus facilement dans les nappes. C’est une donnée objective. Un lisier composté avec de la paille devient de l’azote organique, qui est libéré progressivement dans le milieu. Je ne donne pas de leçons, je rappelle simplement une réalité.
Mon objectif était de favoriser des pratiques. Je rappelle que, dans ma région, l’Alsace, des éleveurs essaient aujourd’hui de développer des élevages porcins sur paille. Je souhaitais simplement que cela soit reconnu dans la loi. Je comprends parfaitement l’argument de Mme la secrétaire d’État, selon lequel ces dispositions relèvent plutôt du Grenelle II et j’aurais retiré mon sous-amendement, mais la réponse qui m’a été donnée n’était pas satisfaisante.
Pour terminer, je dirai que je préférerais un débat plus scientifique à des allégations ou des observations sur ma capacité à charger des bottes de foin sur des remorques ! J’aimerais que l’on élève un peu le débat.
J’en viens à l’amendement en discussion. Sur le fond, c’est un excellent amendement Il ne vise pas à inscrire dans la loi des détails trop précis, par exemple sur le premier ou le deuxième pilier. Il prône juste une réorientation des aides publiques.
C’est extrêmement important, parce que les aides publiques d’autrefois ont été calculées dans un contexte où l’Europe était déficitaire alors qu’aujourd’hui le contexte est celui du Grenelle, où il s’agit de favoriser une transformation de l’agriculture.
Il est essentiel de pouvoir écrire cela dans la loi. Sinon, nous nous serions payés de mots par rapport à ce que nous écrivions au début.
Il ne s’agit pas de refaire la politique agricole commune : il s’agit, dans le cadre de la PAC actuelle, de réorienter les aides dans un sens plus favorable à l’environnement. Riverain de l’Allemagne, j’entends régulièrement les plaintes des producteurs de fruits et légumes français au sujet des règles de la concurrence, qui permettent à leurs homologues allemands de bénéficier de la prime unique à l’hectare alors qu’eux-mêmes n’y ont pas droit.
Cette réorientation, c’est aujourd’hui qu’il faut l’inscrire dans la loi. Sinon, nous ne le ferons jamais !
L’amendement n’est pas adopté.
L’amendement n° 557, présenté par Mme Blandin, MM. Raoul et Courteau, Mme Herviaux, MM. Raoult, Repentin, Ries et Teston, Mme Bourzai, MM. Guillaume, Antoinette, Gillot, S. Larcher, Lise, Patient, Tuheiava et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Dans la première phrase de l’avant-dernier alinéa de cet article, après les mots :
d’identification
remplacer le mot :
ou
par le mot :
et
La parole est à Mme Marie-Christine Blandin
Cet amendement porte sur un alinéa très intéressant dans lequel il est question de la vente, de la prescription et même de l’application des produits phytopharmaceutiques. J’observe en passant que la dénomination de ces produits évolue au fil des années : de « pesticides », ils sont d’abord devenus « phytosanitaires » pour être aujourd’hui « phytopharmaceutiques », et j’imagine que bientôt ce seront…
Mme Marie-Christine Blandin. … des tisanes. Il faudra faire très attention à ce que l’on boit !
Sourires.
J’en reviens aux choses sérieuses. Il est nécessaire de créer la confiance afin que les conseils que reçoivent les agriculteurs ne soient pas systématiquement entachés de l’intérêt du vendeur. Il s’agit d’un principe très simple : celui de la séparation du conseil et de la vente, séparation comparable à celle qui existe entre la prescription par le médecin et la vente par le pharmacien.
Est également évoqué dans cet alinéa l’encadrement, en particulier grâce à la formation, des professions de distributeur et d’applicateur, qui est indispensable, et ce disant je pense aussi aux jardiniers de nos collectivités, qui sont des applicateurs.
Nous sommes tout à fait en accord avec les deux propositions formulées dans cette phrase, mais nous considérons que ce n’est pas soit l’une, soit l’autre, mais bien les deux. En conséquence, notre amendement a pour objet d’écrire « et » à la place de « ou ».
D’ailleurs, l’alinéa en question commence par la préconisation d’« une combinaison d’actions ». Il n’y a donc pas lieu de présenter cela comme une alternative !
La séparation des activités de conseil et de vente de produits phytosanitaires, ou phytopharmaceutiques, n’a pas fait l’objet d’un débat particulier dans le cadre des COMOP mandatés pour traiter de ces questions.
L’adoption de cet amendement conduirait, me semble-t-il, à l’inverse du but recherché, car elle ouvrirait le champ à la vente « sauvage » non justifiée et au conseil non encadré. En effet, n’importe qui pourrait s’installer comme « conseiller » sans avoir à justifier de la formation ou de l’expérience spécifique actuellement requise.
De plus, il ne serait pas demandé d’assurance en responsabilité civile au conseiller indépendant. Or, la responsabilité civile professionnelle du conseilleur-vendeur qui existe aujourd’hui devrait également être prévue pour le simple conseilleur.
Enfin, l’exploitant agricole est un professionnel maître de ses décisions, et il reste entièrement libre d’accepter ou non les produits qui lui sont préconisés.
Pour toutes ces raisons, la commission demande à Mme Blandin de bien vouloir retirer son amendement. À défaut, elle émettra un avis défavorable.
La question de la séparation des activités de conseil et de vente était à l’origine un sujet hautement difficile.
À l’issue du Grenelle de l’environnement, où, effectivement, des engagements ont été pris – et l’engagement 123 a été cité à juste titre –, un COMOP a travaillé sur ce dossier et a abouti à un accord sur le principe d’une alternative entre, d’une part, la séparation des activités de vente et de conseil et, d’autre part, l’offre de conseil indépendant. Cet accord traduit un réel équilibre entre les parties. Il est donc extrêmement important, car il est essentiel que les professionnels eux-mêmes adhèrent aux dispositions proposées dans la loi.
Aussi, je ne suis pas du tout favorable à ce que l’on revienne dans le projet de loi sur l’équilibre issu des travaux du COMOP.
J’avais vraiment cru que la présence du « et » était une erreur. Je n’avais pas compris qu’il s’agissait d’une alternative, que je considère comme très dommageable.
En conséquence, nous maintenons l’amendement.
L’amendement n’est pas adopté.
L’amendement n° 424, présenté par Mmes Herviaux et Blandin, MM. Repentin, Teston, Ries, Raoul, Guillaume, Raoult, Le Menn et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Dans la première phrase de l’avant-dernier alinéa de cet article, remplacer les mots :
des aides budgétaires pour aider les agriculteurs à développer l’agriculture biologique
par les mots :
surtout une réorientation des aides budgétaires pour aider à la fois les agriculteurs à développer l’agriculture biologique et les structures qui œuvrent au développement de l’agriculture biologique et de l’agriculture durable pour assurer pleinement leur mission
La parole est à M. Roland Courteau.
Comme j’ai déjà eu l’occasion de l’indiquer en défendant un précédent amendement, en matière d’agriculture biologique, la France accuse un retard très important sur les autres pays de l’Union européenne : en 2005, l’Autriche était en tête avec 11, 0 % de la surface agricole utilisée, suivie de l’Italie avec 8, 4 % ; la moyenne européenne se situait aux alentours de 4 %, soit le double du taux français…
Face aux enjeux environnementaux, sanitaires et sociaux, je considère que, pour répondre à la demande croissante des consommateurs et structurer concrètement la filière de l’agriculture biologique – éléments déjà évoqués hier dans la nuit, lors de la défense de l’amendement n° 421 portant sur la restauration collective, et que je souhaite compléter –, il faut réorienter les financements de façon à aider à la fois les agriculteurs à développer l’agriculture biologique et les structures qui œuvrent au développement de l’agriculture biologique et de l’agriculture durable à assurer pleinement leur mission.
Cette réorientation, nécessaire et rendue possible par la révision de l’article 68 du règlement sur les régimes de soutien direct en faveur des agriculteurs dans le cadre de la PAC, doit s’opérer en étroite cohérence avec les orientations de l’engagement 124 du Grenelle, qui, je le rappelle, vise à promouvoir une meilleure organisation de l’ensemble des acteurs pour des pratiques agricoles plus durables.
Bref, il convient de soutenir non pas uniquement la production biologique, mais aussi les associations et les structures qui permettent le développement de ce mode d’agriculture. Ce double appui sera gage d’une organisation efficace de la filière biologique, de la production à la distribution, et contribuera à fixer des prix à la fois rémunérateurs pour l’agriculteur et accessibles au plus grand nombre de consommateurs.
Ne l’oublions pas, les attentes sont très fortes. Selon le cinquième baromètre de l’Agence de promotion de l’agriculture biologique, l’Agence Bio, 42 % des Français consomment un produit bio au moins une fois par mois, et 84 % souhaitent que ce type de production se développe.
Ce n’est qu’à cette double condition – une approche intégrée et une réorientation de nos aides en faveur d’un soutien à l’ensemble de la filière – que nous permettrons à l’agriculture biologique de sortir de la relative marginalité économique qui la caractérise et que nous serons capables de répondre aux objectifs fixés en la matière par le Grenelle de l’environnement.
Puis-je faire remarquer à notre collègue que son amendement est satisfait au moins partiellement par le présent texte, qui prévoit un soutien accru aux structures et aux mécanismes de soutien à une agriculture biologique et durable ?
Aussi, la commission a pensé qu’il serait préférable que cet amendement soit retiré. À défaut, elle émettrait un avis défavorable.
Le Gouvernement partage l’avis de la commission, car ces dispositions sont effectivement déjà intégrées au texte.
Je rappelle en outre que, parmi les nouvelles mesures présentées par Michel Barnier dans le cadre du plan d'action « Agriculture biologique : horizon 2012 » figurent des financements supplémentaires : 15 millions d’euros sur cinq ans pour la structuration de la filière, c’est-à-dire à l’Agence Bio ; 36 millions d’euros sur trois ans dans le cadre des mesures agroenvironnementales « conversion à l’agriculture biologique », qui ont d’ailleurs été déplafonnées ; 2 millions d’euros en 2009 pour l’innovation. Enfin, le crédit d’impôt pour la conversion des agriculteurs bio a été doublé.
J’ose espérer, monsieur le sénateur, que tout cela satisfait votre ambition.
Nous maintenons cet amendement parce que, comme nous avons déjà eu hier soir l’occasion de le souligner, il faut donner des signes.
Il nous semble que cet amendement donne des signes encore plus forts que la rédaction actuelle de l’article 28 : il s’agit de traiter non pas uniquement les agriculteurs biologiques, mais la filière, les circuits, les entreprises.
Ce projet de loi est un texte d’orientation. La phrase que nous proposons d’y ajouter mettrait en exergue la volonté du Gouvernement et de la commission d’aller dans cette direction. Ce n’est pas une fois de plus montrer du doigt, ce n’est pas une fois de plus ne jurer que par le bio, bien au contraire !
L’amendement excellemment présenté par Roland Courteau est équilibré et vise à ajouter du sens, à ajouter des objectifs, bref, à démontrer que le Gouvernement et notre assemblée sont déterminés à développer l’agriculture biologique, certes, mais aussi à contribuer au soutien et au développement de la filière tout entière : nous constatons tous les jours que, si les conversions, si l’agriculture bio fonctionnent plutôt bien et progressent, les difficultés viennent de l’ensemble de la chaîne.
La présence de cette disposition dans le texte démontre que le Gouvernement reconnaît la nécessité de mobiliser des moyens budgétaires et fiscaux pour favoriser le développement de l’agriculture biologique.
Je regrette que l’on n’invoque pas cette même nécessité pour favoriser le développement d’une agriculture plus acceptable sur le plan environnemental. En effet, la réduction des intrants aura inévitablement pour conséquence d’abaisser le niveau de la production agricole et de diminuer le revenu des agriculteurs ; or, pour l’heure, aucune compensation financière n’est prévue hormis pour l’agriculture biologique.
L’agriculture française doit-elle être une agriculture à deux vitesses, avec une agriculture biologique qui serait aidée, soutenue financièrement par la collectivité nationale, et une agriculture traditionnelle à laquelle nous demanderions de faire des efforts qui auront des conséquences économiques pour les entreprises sans les accompagner de mesures fiscales ou de mesures budgétaires ?
Mme Blandin le sait bien, ce serait méconnaître la situation et le fonctionnement des exploitations que de croire que l’économie induite par la diminution des intrants compensera la baisse de la production, donc des revenus des agriculteurs. C’est entièrement faux ! Quand vous faites une économie de 10 et que vous perdez 30, au bout du compte vous perdez quand même 20 ! L’agriculture traditionnelle se trouvera donc dans une situation économique beaucoup plus fragilisée. §
Je tenais à appeler l’attention du Gouvernement sur ce point : les études d’impact économique ne doivent pas se limiter aux effets positifs, elles doivent mesurer également les effets négatifs sur la profession en termes de viabilité économique des entreprises.
Au risque de vous surprendre, mes chers collègues, je dois dire que je partage totalement le point de vue qu’a développé notre collègue Vasselle sur la nécessité d’accompagner l’évolution de l’agriculture conventionnelle vers une agriculture intégrée. Parce que les produits issus d’une agriculture intégrée ne sont pas valorisés sur le marché, il est important que la collectivité soutienne ce mouvement.
Pour autant, lorsqu’on parle d’agriculture biologique, il ne faut pas oublier quelle est la réalité du terrain ! Lorsqu’un agriculteur veut passer d’une agriculture intégrée à l’agriculture biologique, il doit réussir un saut technique difficile, parce que les itinéraires techniques changent, parce que le système de production agricole n’est pas le même, parce que les produits plus doux pour l’environnement peuvent induire des coûts plus élevés, parce que cela consomme plus de travail… Et ce n’est pas là une vue de l’esprit : la ferme expérimentale du lycée agricole de Rouffach, où j’ai passé vingt-cinq ans, travaillait sur ces concepts !
Nous avons travaillé en suivant la méthode IDEA, nous situant dans le cadre de la culture intégrée. Nous ne sommes jamais passés à la culture biologique, car les conséquences techniques en sont très importantes. Il faut donc prévoir un soutien financier spécifique pour pouvoir atteindre les objectifs fixés pour développer cette filière.
J’ai écouté avec attention les chiffres que Mme la secrétaire d'État nous a communiqués, car ils concernent non seulement l’agriculture, mais également toute la filière. Si l’on additionne tous ces chiffres, ce sont 100 millions d’euros qui seront accordés à la filière bio. Certes, c’est bien, mais, dans le projet de loi de finances adopté en fin d’année dernière, c’est 1 milliard d’euros qui a été attribué aux agrocarburants. Cherchez l’erreur !
Pour éviter ce genre de désagrément, il serait souhaitable de mentionner dans la loi que l’agriculture biologique bénéficie d’un soutien qui s’appuie sur une réorientation des aides budgétaires déjà accordées.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 427, présenté par Mmes Herviaux et Blandin, MM. Repentin, Teston, Ries, Raoul, Guillaume, Raoult, Le Menn et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Dans la première phrase de l'avant-dernier alinéa de cet article, remplacer le taux :
Par le taux :
La parole est à Mme Odette Herviaux.
Cet amendement peut être considéré comme étant d’une exigence excessive, mais je crois à la vertu de l’exemple et, depuis dix ou quinze ans, la formation initiale ou continue a été une courroie de transmission importante.
Dans notre région, depuis dix ou quinze ans, les mentalités ont évolué, et donc les pratiques. Toutes ces considérations ont été reprises et développées dans le Grenelle de l’environnement, mais cette révolution, lente, des mentalités ne deviendra réalité qu’à condition de se donner plus encore les moyens de changer.
Le premier d’entre eux concerne la formation de l’ensemble des acteurs de la filière agricole, des producteurs jusqu’aux consommateurs. J’en veux pour preuve le salon international de l’élevage, le SPACE, qui se tient à Rennes, où nombre de professionnels, et autres d’ailleurs, viennent s’enquérir des nouveautés sur l’espace réservé à la recherche appliquée. Les jeunes, mais aussi l’ensemble de la profession, expriment une demande d’information qui doit être valorisée et passer par la formation.
D’ailleurs, les engagements du Grenelle tiennent compte de cet impératif et insistent sur l’enjeu de coordonner la formation et la recherche.
Au demeurant, de nombreuses avancées doivent être d’ores et déjà saluées. Il en va ainsi du lancement, dès 2008, d’un grand programme de recherche appliquée et de formation sur l’ensemble de l’agriculture mobilisant toute la diversité des organismes de recherche, techniques et de coopération et un très large réseau d’agriculteurs, prévu par l’engagement 125, et de son financement grâce à l’affectation de 9 millions d’euros à un programme spécifique de l’Agence nationale de la recherche pour le développement des pratiques respectueuses de l’environnement.
L’engagement 208 prévoit, quant à lui, différentes mesures pour garantir une généralisation rapide des méthodes mises au point de façon expérimentale non seulement pour réduire fortement la consommation d’intrants, mais aussi pour économiser l’énergie, notamment grâce à la mise en place de modules « agriculture et biodiversité » dans les filières agricoles et agronomiques d’enseignement, ainsi que dans celles des jardins et espaces verts.
D’autres pistes de réflexion proposées par le groupe de travail n° 4 du Grenelle de l’environnement dont la thématique s’intitule : « Adopter des modes de production et de consommation durables » mériteraient d’être concrètement étudiées, telles que le remplacement des sanctions réglementaires par des formations alternatives grâce à une adaptation des règles de la conditionnalité sur le plan européen ou encore la mise en place d’une formation en matière de pratiques respectueuses de l’environnement lors de l’accompagnement à l’installation des jeunes ou d’octroi d’aides au développement.
L’objectif fixé par cet engagement concernait 20 % des agriculteurs ayant participé d’ici à 2012 à une formation liée aux nouvelles techniques environnementales. Il me semble nécessaire de revoir nos ambitions à la hausse pour envoyer un message clair en direction du monde agricole et des consommateurs, afin d’accélérer le développement d’autres solutions de formation et d’encourager la diffusion rapide des bonnes pratiques. Au vu de l’évolution, cela me semble possible et réaliste.
Prévoir de former un agriculteur sur cinq, soit 20 %, en moins de trois ans, sur les enjeux de l’agriculture durable est déjà très ambitieux ; passer à 30 %, soit un sur trois, semble peu réaliste.
Le projet de loi prévoit non pas de s’arrêter à 20 %, mais d’aller jusqu’à 20 % en deux ans et demi, ce qui est déjà un bel objectif, le but étant de parvenir un jour à 100 % d’exploitants formés.
Autrement dit, la commission vous demande, ma chère collègue, de bien vouloir retirer votre amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.
Ce dispositif de formation est lourd à mettre en place. L’objectif de 20 %, qui n’est qu’une première étape, est déjà ambitieux. Le porter dès à présent à 30 % ne nous semble pas réaliste.
Effectivement, c’est la lourdeur de la mise en place de la formation qui pose problème. Je suggérais de fixer l’objectif à 30 % pour valoriser les formations qui sont déjà proposées aux agriculteurs ainsi que l’ensemble des actions qui sont déjà menées en ce sens.
Je comprends bien qu’il faille procéder par étape. En conséquence, je retire mon amendement, monsieur le président.
De même que M. le rapporteur a proposé tout à l'heure de supprimer certaines dispositions prévues dans ce texte considérant qu’elles étaient déjà en application, j’estime que la fin de l’avant-dernier alinéa de l’article 28 est quelque peu superfétatoire.
Vous le savez parfaitement, mes chers collègues, l’éco-conditionnalité mise en place dans le cadre de la PAC exige aujourd'hui que des bandes enherbées de cinq mètres de large soient mises en place sur l’ensemble du territoire national. Je ne vois donc pas la nécessité d’alourdir le texte en prévoyant une disposition qui est déjà en vigueur.
De plus, préciser la largeur me semble plus relever du domaine réglementaire.
Telles sont les raisons qui motivent la demande de suppression de cette disposition.
D’ailleurs, d’une manière générale, j’estime que de nombreux éléments et considérants ont été ajoutés dans ce texte en vue de préparer le Grenelle II alors que nous aurions pu en faire l’économie, car ils sont évidents. Ainsi, le débat sur ce texte aurait pu être beaucoup plus bref qu’il ne l’est.
L'amendement n° 73, présenté par M. Sido, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Dans la première phrase de l'avant-dernier alinéa de cet article, après le mot :
locales ;
insérer les mots :
la valorisation des effluents organiques d'élevage ;
La parole est à M. le rapporteur.
Les performances écologiques des engrais de ferme et leur valeur agronomique s'avèrent remarquables. Le recours à ces produits dérivés de l'élevage sur les exploitations permet de les valoriser, de limiter le recours aux engrais minéraux issus de l'industrie chimique et pétrolière, d'éliminer les pollutions induites par la commercialisation et le transport de ces engrais chimiques tout en constituant des amendements et des engrais complets pour les sols.
En effet, non seulement la valeur fertilisante des engrais de ferme est équivalente à celle des engrais minéraux pour la plupart des éléments nutritifs, mais, en outre, l'apport régulier d'engrais de ferme améliore sensiblement le taux de matières organiques des sols en une dizaine d'années.
Par conséquent, le présent amendement donne à l'État pour mission de favoriser, par tout moyen, la valorisation des effluents organiques d'élevage comme engrais naturel. Voilà qui devrait, en outre, satisfaire M. Soulage.
L'amendement n° 660, présenté par MM. Muller et Desessard et Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet, est ainsi libellé :
Après les mots :
l'implantation progressive,
rédiger comme suit la fin de l'avant-dernier alinéa de cet article :
pour améliorer la qualité de l'eau et préserver la biodiversité, de bandes enherbées, zones végétalisées tampons, et productions biologiques éventuellement renforcées par des exigences complémentaires, d'au moins 5 mètres de large le long des cours d'eau et plans d'eau. Ces dispositifs contribuent aux continuités de la trame verte et bleue.
La parole est à M. Jacques Muller.
Cet amendement porte sur la définition de la trame verte qui m’apparaît trop restrictive.
Tel que rédigé, cet article prévoit que cette trame est constituée des bandes enherbées et zones végétalisées tampons. Or on peut estimer que de petites exploitations agricoles, maraîchères ou arboricoles risquent de disparaître parce qu’elles ne correspondent pas à la définition retenue.
Cet amendement vise à intégrer dans la trame verte des exploitations qui sont passées en culture biologique, en renforçant certains critères environnementaux, car l’agriculture biologique ne respecte pas toujours à 100 % l’environnement, utilisant parfois trop de matières organiques, par exemple.
Les dispositions que l’amendement n° 373 tend à supprimer, à savoir la généralisation de la couverture des sols en hiver et l’implantation de bandes enherbées le long des cours et plans d’eau, ont fait l’objet d’engagements très précis du COMOP, le comité opérationnel du Grenelle de l’environnement, et ont été sacralisées dans le Grenelle de l’environnement en vue de rendre l’agriculture plus durable.
En conséquence, la commission demande à M. Vasselle de bien vouloir retirer son amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.
À propos de l’amendement n° 660, je répondrai à M. Muller qu’il n’est pas systématiquement acquis qu’une production biologique à proximité immédiate d’un cours d’eau ne soit pas source de pollution pour ce même cours d’eau. Le retournement des terres, par exemple, relâche des nitrates.
Dès lors, la production biologique ne peut être assimilée aux couverts végétaux qui, eux, sont assurément sans aucun effet néfaste pour l’environnement et doivent être privilégiés à proximité des cours d’eau.
C’est pourquoi la commission demande à M. Muller de bien vouloir retirer son amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.
La couverture des sols et la création de bandes enherbées sont un engagement hautement symbolique du Grenelle de l’environnement et les agriculteurs eux-mêmes y sont très attachés. Aussi, le Gouvernement préfère maintenir ces deux références dans le texte. Il est donc défavorable à l’amendement n° 373,
En revanche, il est favorable à l’amendement n° 73.
Par ailleurs, monsieur Muller, il serait très gênant d’indiquer que les bandes enherbées de cinq mètres de large le long des cours d’eau et plans d’eau peuvent être aussi consacrées à l’agriculture biologique. En effet, ces bandes ont aussi un objectif de biodiversité, voire de stockage du carbone.
En outre, la réglementation européenne nous impose de prévoir, au plus tard en 2012, des bandes enherbées et bandes tampons le long des cours d’eau. Aussi le Gouvernement est-il défavorable à l’amendement n° 660.
M. Alain Vasselle. Je ne resterai pas insensible à l’appel de Mme la secrétaire d’État, qui a été lancé avec tellement de grâce
Exclamations amusées sur les travées de l ’ UMP.
Je comprends bien qu’il s’agit ici d’un texte purement déclaratif ; l’essentiel se retrouvera dans le Grenelle II. On veut montrer à l’opinion publique les engagements que souhaite prendre le Gouvernement en matière environnementale. Même si la disposition visée est déjà mise en pratique, il semble souhaitable qu’elle apparaisse tout de même dans le texte. Dont acte.
Monsieur le rapporteur, vous avez vous-même souligné la nécessité de prendre en considération les accords qui avaient été pratiquement signés entre la profession agricole et le Gouvernement sur ce sujet.
Pour ma part, vous l’avez compris, je souhaitais non pas remettre en cause le fond de cette disposition, mais alléger le texte, puisque celle-ci est déjà en vigueur.
Je vais donc retirer mon amendement, mais, avant d’en terminer, je voudrais faire remarquer – gentiment – à M. le rapporteur que, au début de l’argumentaire qu’il a développé pour convaincre M. Soulage de retirer son amendement, il a demandé à notre collègue s’il connaissait des agriculteurs qui ne valorisaient pas ou n’utilisaient pas leurs effluents d’élevage, ce qui laissait entendre que cette disposition était inutile et n’avait donc pas lieu d’apparaître dans le présent projet de loi.
Certes, monsieur le rapporteur, vous vous êtes aussitôt « rattrapé », puisque, à la fin de cet argumentaire, vous avez engagé M. Soulage à retirer son amendement au bénéfice de l’amendement n 73 de la commission, bien meilleur que le sien, qui introduisait cette même disposition !
On ne peut s’empêcher de ressentir là comme une légère contradiction. Cela dit, n’ayant pas perçu le moindre frémissement en faveur de mon amendement, je ne crois pas utile de le maintenir.
Sourires
Je souscris à la remarque de M. Vasselle.
J’ajouterai seulement, après avoir dit tout à l’heure croire à la vertu de l’exemple dans la formation, qu’il faut aussi rendre hommage à l’esprit d’inventivité des agriculteurs. Je ne parle pas là de recherche expérimentale, mais des efforts que font nombre d’entre eux pour trouver des systèmes leur permettant d’économiser de l’énergie.
Beaucoup d’éleveurs utilisent déjà, on l’a dit, la chaleur fournie par leur propre élevage, notamment par séchage de fiente de volaille ou de lisier. La température à l’intérieur des tas de lisier monte jusqu’à 70 degrés et, comme j’ai pu le constater en visitant plusieurs installations, ils essayent de récupérer cette chaleur.
La valorisation des effluents organiques va donc bien au-delà de la simple valorisation des engrais ; elle englobe tout ce qui peut aller dans le sens des économies d’énergie.
L'amendement est adopté.
J’ai bien entendu que le mot « éventuellement » entachait mon amendement d’un défaut de rédaction, car il laisse planer un doute. Je le retire donc, même si je crois très sincèrement qu’une agriculture biologique, avec des contraintes renforcées sur une bande de cinq mètres, pourrait s’intégrer.
L'amendement n° 660 est retiré.
Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 74 rectifié, présenté par M. Sido, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
La France demandera que l'Organisation mondiale du commerce prenne en compte des exigences environnementales afin d'éviter les distorsions de concurrence entre productions nationale et importée en matière agricole.
La parole est à M. le rapporteur.
Cet amendement, qui reprend l'un des engagements du Président de la République lors de sa conclusion des tables rondes du Grenelle de l'environnement, tend à favoriser d'égales conditions de concurrence entre produits agricoles français et produits agricoles importés.
Les contraintes environnementales importantes imposées aux agriculteurs français se répercutent dans leur coût. Afin que la concurrence ne soit pas faussée avec les produits d'importation, il importe que leurs producteurs soient soumis au même degré d'exigence, d'où la nécessité d'une politique nationale garantissant cette égalité de concurrence, par exemple en taxant les produits importés ne respectant pas un même degré d'exigence.
L'amendement n° 234, présenté par Mme Didier, MM. Danglot et Le Cam, Mmes Schurch, Terrade et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
Enfin, sur le plan international, la France demandera l'exclusion du secteur agricole des négociations commerciales au sein de l'Organisation mondiale du commerce.
La parole est à M. Jean-Claude Danglot.
Cet amendement vise à inviter la France, donc le Gouvernement, à demander l’exclusion du secteur agricole des négociations commerciales au sein de l’OMC.
Nul ne peut se satisfaire aujourd’hui d’un éventuel échec ou succès du cycle de Doha. La mondialisation des échanges « à la sauce » ultralibérale vient de montrer combien il est dangereux de faire confiance à des hommes qui recherchent le profit maximum dans tous les domaines.
La spéculation se déplace au gré des rentabilités. Après le fiasco de l’immobilier aux États-Unis, les spéculateurs se sont tournés vers les denrées alimentaires. La mise en concurrence organisée par l’OMC de toutes les agricultures du monde ne tient pas compte des différences colossales qui existent d’une région à l’autre, d’un pays à l’autre.
La puissance alimentaire de chaque pays ne peut être une monnaie d’échange face aux produits manufacturés ou aux services. L’enjeu est vital pour plus d’un milliard d’individus.
En attendant qu’une autre conception du fonctionnement de l’OMC puisse prévaloir, ce qui risque d’être très long, il est urgent de tenter de sortir l’agriculture à vocation alimentaire des négociations de l’OMC.
Tel est l’objet de cet amendement, que nous vous invitons à adopter.
L’OMC, que les auteurs de l’amendement souhaitent exclure du volet agricole, est justement l’enceinte dans laquelle peuvent être discutées les conditions d’une agriculture plus durable et respectueuse des différences de développement entre pays.
La « sortir » de l’OMC aboutirait à livrer l’agriculture à la jungle, au libre jeu du marché, sans garde-fou, ce qui accentuerait encore les inégalités entre pays producteurs.
Le Gouvernement est tout à fait favorable à l’amendement n° 74 rectifié. Il faut en effet que l’OMC se penche sur les distorsions de concurrence.
Monsieur Danglot, le traitement de l’agriculture par l’OMC pose effectivement un problème et l’approche commerciale ne peut suffire. Ce constat était d’ailleurs bien sous-jacent dans le projet de partenariat mondial pour l’alimentation, porté par le Président de la République.
Cela étant dit, si l’on sort du champ de l’OMC tous les sujets sur lesquels nous souhaiterions qu’elle évolue, il ne restera pas grand-chose. Il faut au contraire pousser l’OMC à évoluer sur ces sujets pour intégrer l’ensemble des enjeux, qu’il s’agisse de l’alimentation, de l’équité ou de l’environnement.
Le Gouvernement est donc défavorable à l’amendement n° 234.
La parole est à Mme Odette Herviaux, pour explication de vote sur l'amendement n° 74 rectifié.
Bien sûr, je soutiendrai cet amendement.
Cependant, comme je l’ai déjà dit tout à l’heure mais il me paraît important d’y insister, il nous a été répété, à la fois par notre ministre de l’agriculture et à Bruxelles, que l’on ne pourrait pas obliger l’OMC à intégrer dans ses négociations, entre autres exigences et notamment sociales, les exigences environnementales tant que le cycle de Doha ne serait pas achevé et un autre cycle entamé. Or il ne faudrait pas, mes chers collègues, que ce cycle de Doha se termine à tout prix et notamment que l’on profite de la fin de cycle pour sacrifier l’agriculture.
Nous devons donc être très attentifs : oui, nous sommes pour intégrer ces exigences dans une négociation à venir, mais pas à n’importe quel prix en attendant qu’elle ait lieu.
J’avais annoncé, n’ayant pu intervenir sur l’amendement n° 124 rectifié bis, que je le ferais sur l’amendement n° 74 rectifié.
Dans cet amendement n°124 rectifié bis, MM. César, Bizet, Doublet, Laurent, plusieurs de nos collègues et moi demandions que soit introduite une disposition visant à « l’équivalence des exigences environnementales entre les produits français et les produits importés ».
M. le rapporteur m’avait alors fait valoir que la commission avait déposé un amendement n° 74 rectifié qui nous donnerait satisfaction et au bénéfice duquel il nous invitait à retirer notre amendement.
Je veux bien, mais je ne souhaiterais pas que nous en restions aux simples déclarations d’intention sur quelque chose qui ne dépend ni de vous ni de moi, monsieur le rapporteur, mais, en partie, du Gouvernement, et le Gouvernement, dans cette affaire, n’est pas tout seul : encore faudra-t-il qu’il réussisse à convaincre l’ensemble des gouvernements européens pour obtenir que notre représentant dans le cadre des négociations au sein de l’OMC puisse peser pour obtenir l’intégration de cette mesure.
Or, pour le moment – Mme Herviaux n’a pas complètement tort – je ne suis pas persuadé que nous soyons dans cette situation.
J’ai eu l’occasion, avec plusieurs de mes collègues, de rencontrer Michel Barnier, qui nous a parlé de l’évolution de la PAC et du rendez-vous de 2013, mais, à aucun moment, je ne l’ai entendu exprimer la volonté du gouvernement français d’introduire dans le cadre des négociations de l’OMC des dispositions de cette nature : il était, non pas sur une autre ligne, mais tourné vers d’autres préoccupations.
On sait bien que, dans les négociations qui sont en cours, notamment avec tous les pays qui accompagnent le Brésil, l’objectif recherché est que des produits agricoles entrent en Europe, en échange de quoi ces pays accepteraient que des produits industriels entrent chez eux. Il y a donc une monnaie d’échange, mais nous risquons en l’acceptant de céder sur des obligations que nous voulons imposer à nos agriculteurs.
Je souhaitais donc, madame la secrétaire d'État, appeler votre attention sur cette situation.
Je me demande d’ailleurs si le Sénat ne ferait pas œuvre utile en votant une résolution dans laquelle il introduirait cette disposition. En effet, l’introduire seulement dans un texte tel que celui-ci ne me paraît pas suffisant pour peser puissamment dans les négociations internationales.
Je vais, bien sûr, voter l’amendement de la commission, mais il ne faudra pas en rester là : il faudra qu’en liaison avec la commission des affaires européennes nous prenions une initiative pour aller plus loin et appeler solennellement les autres pays et nos instances nationales à s’orienter dans la bonne voie.
L’amendement de la commission a l’excellent mérite d’introduire une hiérarchie dans les normes. Il met en effet l’environnement – et nous souhaiterions qu’il en aille de même pour le droit du travail – au-dessus du principe de libre-échange.
Je partage cependant les craintes de M. Vasselle.
La volonté du Gouvernement doit être évaluée. Sa capacité à entraîner l’Union européenne laisse à penser que les choses ne seront pas si faciles et, au final, je reste un peu perplexe.
Pour ma part, j’estime que la prudence serait de dire que l’agriculture est un domaine stratégique ne faisant pas l’objet de marchandage au sein de l’Organisation mondiale du commerce.
Cette dernière a pour priorité le libre-échange, le rôle de l’agriculture n’étant qu’au second plan. C’est pourquoi je m’abstiendrai.
L'amendement est adopté.
En conséquence, l'amendement n° 234 n'a plus d'objet.
L'amendement n° 75 rectifié, présenté par M. Sido, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
Le rapport prévu à l'article 1er comporte une étude spécifiant l'impact des mesures contenues dans la présente loi sur le secteur agricole.
La parole est à M. le rapporteur.
Le secteur primaire occupe une place très importante dans le projet de loi et fait l'objet de nombreuses mesures, dont certaines ont un caractère radicalement novateur.
Or, contrairement à ce qui est le cas dans les domaines du bâtiment, du transport ou de l'énergie, il n'a pas été prévu d'étude d'impact sur les conséquences de ces mesures pour ce secteur.
Le présent amendement se propose de remédier à cette lacune et répond d’ailleurs ce faisant à de multiples questions soulevées par M. Vasselle et plusieurs de nos collègues.
Nous sommes tout à fait favorables au principe d’une évaluation de l’impact des mesures prises dans le cadre de ce projet de loi sur l’ensemble des secteurs. Il est d’ailleurs dans l’esprit même du Grenelle de l’environnement d’évaluer les impacts des mesures qu’il préconise.
Je souhaite répondre aux doutes qui ont été émis sur la capacité de la France à entraîner ses collègues, notamment ses collègues européens.
Je rappelle que, dans le cadre de sa présidence de l’Union européenne, la France est parvenue à un accord sur le paquet énergie-climat, alors même que personne n’y croyait et que l’optimisme ne régnait guère.
Michel Barnier défendra très activement notre position auprès de l’OMC. Notre objectif est commun. Dès lors, l’idée de voter une résolution afin de susciter la mobilisation de l’ensemble des décideurs français autour de cette question me semble excellente.
L'amendement est adopté.
L'article 28 est adopté.
Madame le secrétaire d'État, rassurez-vous, ce rappel au règlement n’a rien à voir avec le débat en cours, même si c’est sans scrupule que je l’interromps.
Le Bulletin quotidien, que l’on appelle aussi « le BQ » – tout le monde le connaît –, qui vient de nous être distribué rend compte, sur deux pages, de la réunion du Bureau du Sénat d’hier matin.
Je passe sur les gamineries consistant à nous faire du mal à nous-mêmes pour faire plaisir à quelques journalistes : réduction des indemnités de fonction du président, des questeurs, suppression des voitures, etc. Tout cela illustre notre démagogie habituelle, laquelle ne nous rapportera rien.
Mais je voudrais en arriver à la désignation de la commission de sélection qui a été chargée par le Bureau de choisir le successeur de M. Elkabbach, et appeler l’attention du Sénat sur les critères qui ont été fixés.
La chaîne parlementaire est une chaîne parlementaire et civique. Elle a été voulue ainsi. C’est pour cette raison d’ailleurs, monsieur le président, que l’Assemblée nationale et le Sénat ont pris la responsabilité de demander aux contribuables de la financer. Elle comporte en fait deux chaînes : une à l’Assemblée nationale, une au Sénat. Son objectif est très précis : rendre compte des travaux et des activités du Parlement, notamment ceux du Sénat, et contribuer à l’instruction civique.
Mes chers collègues, voici les critères de sélection du futur responsable de cette chaîne, selon le BQ de ce matin.
Premier critère : « connaissance approfondie »... des institutions du Sénat ? Non, « des médias » ! D’abord connaître les médias ! §
Deuxième critère : « expérience accomplie de la direction d’une équipe ».
Troisième critère : « capacité de négociation et de définition d’une ligne éditoriale ». Or nul n’est besoin de définir de ligne éditoriale, puisque celle-ci découle du statut de notre chaîne que je viens de rappeler. Je ne vois pas quelle ligne éditoriale on peut imaginer !
Quatrième critère : « sens de l’équilibre politique pour veiller à l’expression pluraliste des courants d’opinion ». Vous traduisez : il faut faire en sorte qu’aucun groupe ne se plaigne parce qu’il se trouverait défavorisé. Ce point est sans importance : il en a toujours été ainsi et cela n’ajoute rien.
Et enfin, à la fin de la fin, cinquième et dernier critère : « intérêt – intérêt, mes chers collègues ! – pour l’activité parlementaire et l’information civique » !
Rires
En d’autres termes, ce qui constitue le fondement du statut de la chaîne parlementaire est renvoyé à la fin et présenté comme accessoire. Circulez, il n’y a rien à voir. Bon, si le candidat manifeste un peu d’intérêt pour cela, cela nous fera plaisir.
Eh bien moi, je souhaite que les collègues qui siègent à cette commission de sélection – je crois que vous n’en faites pas partie, monsieur le président – se rappellent pourquoi nous avons créé cette chaîne et voté cette loi, et qu’ils exigent du candidat des qualités qui correspondent à ce que le Sénat attend de la chaîne qu’il a voulue et pour laquelle les contribuables paient !
Applaudissements sur les travées du RDSE et de l ’ UMP.
M. le président. Je vous donne acte de ce rappel au règlement, monsieur Charasse, même si je ne me souviens plus de l’article du règlement sur lequel vous vous êtes fondé.
Sourires
En tout cas, je vous donne l’assurance que je rapporterai fidèlement vos propos au président du Sénat, sans oublier la manière dont a été reçue votre intervention.
Nous reprenons la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, de programme relatif à la mise en œuvre du Grenelle de l’environnement.
Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus aux amendements tendant à insérer des articles additionnels après l'article 28.
L'amendement n° 770, présenté par M. Sido, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Après l'article 28, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Un plan d'urgence en faveur de la préservation des abeilles sera mis en place en 2009 et s'appuiera notamment sur une évaluation toxicologique indépendante relative aux effets, sur les abeilles, de l'ensemble des substances chimiques.
En outre, une interprofession de la filière apicole sera mise en place en vue de mieux structurer la profession apicole. Elle favorisera la création d'un institut scientifique et technique de l'abeille.
La parole est à M. le rapporteur.
Il s’agit de transférer après l'article 28, dans un article spécifique, les dispositions relatives à la filière apicole qui figurent actuellement à l'article 28.
Par ailleurs, la mise en place d'une interprofession et d'un institut apicoles est opportune, mais sa formulation actuelle, à l'article 23 ter, est insuffisamment prescriptive. Il est donc proposé de la rendre davantage normative, tout en transférant également le texte de cet article dans le nouvel article créé par cet amendement.
Le sous-amendement n° 552 rectifié, présenté par Mme Blandin, MM. Raoul et Courteau, Mme Herviaux, MM. Raoult, Repentin, Ries et Teston, Mmes Bourzai, Alquier, M. André et Bonnefoy, MM. Guillaume, Rebsamen, Hervé, Daunis, Antoinette, Gillot, Le Menn, S. Larcher, Lise, Patient, Tuheiava et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Compléter le deuxième alinéa de l'amendement n° 770 par les mots :
en commençant par les neurotoxiques systémiques
La parole est à Mme Marie-Christine Blandin.
Il s’agit d’une proposition technique faisant suite à l’engagement qu’ont pris le rapporteur et le Gouvernement d’instaurer un plan d’urgence. Si ce plan est véritablement urgent, il importe d’évoquer sans délai ses modalités.
Pourquoi les apiculteurs demandent-t-ils que, dans le cadre de ce plan d’urgence, priorité soit accordée aux effets des neurotoxiques systémiques ? Parce que les dégâts en sont connus, y compris sur l’être humain, même si, heureusement, ces molécules ne sont pas utilisées dans les champs.
Souvenez-vous du Gaucho, insecticide qui a été suspecté, puis suspendu, la pertinence de cette suspension étant encore contestée par certains fabricants.
Alors que l’Allemagne, l’Italie, la Slovénie ont interdit le pesticide Cruiser, eu égard aux dégâts considérables qu’il a provoqués sur les insectes pollinisateurs dans ces pays, le ministre de l'agriculture et de la pêche l’a autorisé, le 20 décembre dernier, malgré l’accord franco-allemand sur le sujet et bien que la firme Syngenta, qui produit le Cruiser, n’ait pas fourni la totalité des études requises par la loi. On ne peut pas, d’une part, mobiliser des moyens et des fonds publics pour le soutien de la filière apicole et, d’autre part, autoriser des irrégularités de cette nature.
Vous le savez, ces insecticides sont utilisés dans le traitement des semences. Des risques sont liés aux poussières émises lors des semis ; celles-ci contaminent non seulement l’environnement mais également des plantes sauvages ou cultivées alentour qui n’étaient pas destinées à être traitées. Certes, une mesure préconisant l’usage de déflecteurs sur les semoirs a été prévue. Malheureusement, sur plus de la moitié des semoirs pneumatiques, une telle adaptation n’est guère possible.
Selon une enquête européenne parue l’année dernière, la molécule du Gaucho, l’imidaclopride, est la plus fréquemment trouvée dans notre alimentation. Manifestement, les molécules circulent !
On peut aussi évoquer la permanence des insecticides.
Ces insecticides perdurent plusieurs années dans le sol et contaminent les plantes non traitées, les eaux et l’ensemble de l’environnement.
La « demi-vie » de dangerosité de la plupart des substances qui composent ces insecticides se situe entre un an et quatre ans. Pour l’une d’entre elles, il a été prouvé que, cinq ans après, elle était toujours active !
Ces insecticides sont très toxiques pour les abeilles, mais aussi pour les auxiliaires des cultures. Ils sont en contradiction fondamentale avec les principes de l’agriculture durable, qui prévoient que la lutte contre les ravageurs doit être intégrée en utilisant des pesticides seulement quand c’est nécessaire.
Nous avons déjà évoqué le refus de certains cultivateurs de pratiquer la rotation des cultures.
Pour l’abeille, la dose létale qui tue la moitié d’une population est comprise, selon les substances, entre 3, 7 nanogrammes et 5 nanogrammes par abeille. Pour information, 5 nanogrammes, c’est : un zéro avant la virgule, puis huit zéros avant le 5 !
Comme ce sont des kilogrammes d’insecticide qui sont répandus par hectare, on peut se douter des effets produits. Ces dernières décennies, un tiers de la production de miel et un tiers des populations d’abeilles ont été perdus.
En Italie, depuis plusieurs années, des milliers de ruches meurent chaque printemps lors des semis de maïs traités. En France, en 2002 et 2003, plusieurs milliers de ruches sont mortes dans le Sud-Ouest. En Allemagne, au printemps 2008, plus de 12 000 ruches ont été exterminées par la clothianidine.
Toutes les informations que je viens de vous transmettre, mes chers collègues, se trouvent sur le site du ministère de l'agriculture et de la pêche. C’est de là que je les tire. Vous pouvez également consulter le site de la DGCCRF.
La situation est très grave. Le plan d’urgence va démarrer rapidement. C'est la raison pour laquelle j’ai souhaité introduire cette précision.
Ce sous-amendement est presque identique au sous-amendement n° 658 rectifié bis : leurs motifs sont les mêmes, mais le second est plus ambitieux que le premier. Je les présenterai donc simultanément.
Les autorités sanitaires, les conseils du ministère de l’agriculture et de la pêche, les laboratoires des fabricants de produits phytopharmaceutiques affirment ne pas avoir démontré le lien de causalité absolue entre telle molécule et la disparition des abeilles.
Dans le même temps, les apiculteurs exhibent leurs ruches dépeuplées.
Des experts, en Europe ou aux États-Unis, fouillent les ruches et y trouvent le varroa ou bien le « virus de Chine ».
Aux dires des apiculteurs, cela fait longtemps que le varroa est un parasite des abeilles, mais jamais la population des abeilles n’a été en péril comme aujourd'hui, et pourtant certains individus contaminés se portent bien. Toujours selon eux, les hécatombes suivent les pulvérisations phytosanitaires, surtout dans les vergers ; après chacune d’elles, ils retrouvent des abeilles désorientées qui errent au sol.
On peut donc tirer de ces constatations l’hypothèse suivante : si l’innocuité d’une molécule isolée est attestée, les alliances de molécules, elles, affaiblissent d’une part le bon fonctionnement neurologique de l’abeille, notamment ses capacités d’orientation, d’autre part les résistances immunitaires à tel ou tel parasite. Encore faut-il le démontrer et, pour cela, mener des recherches.
Tel est l’objet de ces sous-amendements, qui visent à mettre l’accent sur la notion d’effets combinés des molécules chimiques, pour éviter que les expertises ne se consacrent qu’à l’impact d’une molécule isolée.
Le sous-amendement n° 658 rectifié bis, présenté par MM. Muller et Desessard et Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet, est ainsi libellé :
Compléter le deuxième alinéa de l'amendement n° 770 par une phrase ainsi rédigée :
Cette évaluation s'attachera à mesurer les effets combinés des molécules chimiques sur l'affaiblissement de la résistance des abeilles aux pathologies qui lui sont coutumières.
Cet amendement a déjà été défendu.
Le sous-amendement n° 659 rectifié, présenté par MM. Muller et Desessard et Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet, est ainsi libellé :
Compléter le deuxième alinéa de l'amendement n° 770 par une phrase ainsi rédigée :
Le plan sera actualisé tous les ans selon les résultats des évaluations.
La parole est à Mme Marie-Christine Blandin.
Dans le cadre du plan d’urgence proposé par la commission, le sous-amendement n° 658 rectifié bis visait à promouvoir des expertises plus complexes. Le sous-amendement n° 659 rectifié vise à prendre en compte le fait que cette complexité demandera du temps. Si le plan d’urgence peut d’ores et déjà proposer des pistes d’action, il est nécessaire de mentionner dans le projet de loi qu’il devra être régulièrement actualisé, au vu des dernières découvertes.
Le sous-amendement n° 812, présenté par Mme Blandin, MM. Raoul et Courteau, Mme Herviaux, MM. Raoult, Repentin, Ries et Teston, Mmes Bourzai, Alquier, M. André et Bonnefoy, MM. Guillaume, Rebsamen, Hervé, Daunis, Antoinette, Gillot, Le Menn, S. Larcher, Lise, Patient, Tuheiava et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Compléter la seconde phrase du dernier alinéa de l'amendement n° 770 par les mots :
, dont elle assurera le pilotage
La parole est à Mme Marie-Christine Blandin.
L'expertise d'usage de la profession agricole est indispensable pour orienter les travaux. C'est la raison pour laquelle ce sous-amendement tend à prévoir que cette profession assurera le pilotage de ce nouvel institut scientifique et technique de l’abeille.
Si les neurotoxiques systémiques sont un facteur très important de l’état de santé des abeilles, de nombreux autres facteurs ont une influence tout aussi importante.
Aucune raison ne justifie, a priori, de traiter ces substances spécifiquement, l’évaluation du cheptel devant justement montrer quelles sont les causes majeures de la surmortalité constatée.
Par conséquent, la commission vous demande, madame Blandin, de bien vouloir retirer le sous-amendement n° 552 rectifié, faute de quoi elle émettra un avis défavorable.
Le sous-amendement n° 816, quant à lui, me semble apporter une précision à l’amendement n° 770 qui, si elle n’est pas indispensable, n’est cependant pas inutile. Je m’en remettrai donc à l’avis du Gouvernement.
L’argument que j’ai développé lors de l’examen de l’amendement n° 679 s’applique au sous-amendement n° 658 rectifié bis. Les précisions que tend à donner ce sous-amendement sont intéressantes, mais n’ont pas lieu de figurer dans une loi de programme. De plus, le législateur n’a pas à se substituer aux scientifiques en préjugeant les champs d’étude qui doivent être développés pour ce qui concerne l’évaluation des abeilles.
Ma chère collègue, je vous demande donc de bien vouloir retirer le sous-amendement n° 658 rectifié bis, faute de quoi j’émettrai un avis défavorable.
J’en viens au sous-amendement n° 659 rectifié. Le plan « abeilles » devra être révisé dès que les résultats de l’évaluation le commanderont, bien évidemment. Mais ce ne sera pas forcément le cas chaque année. Il n’y a donc pas lieu de prévoir une révision systématique tous les ans.
Ma chère collègue, la commission vous demande également de bien vouloir retirer ce sous-amendement, faute de quoi elle émettra un avis défavorable.
Enfin, il paraît prématuré de décider du mode de gouvernance et du degré d’indépendance de l’institut scientifique et technique de l’abeille. La commission vous demande donc également, madame Blandin, de bien vouloir retirer le sous-amendement n° 812.
Le Gouvernement émet un avis favorable sur l’amendement n° 770.
À propos du sous-amendement n° 552 rectifié, madame Blandin, vous avez vous-même souligné que les raisons de la mortalité des abeilles sont extrêmement complexes. Insister particulièrement sur les neurotoxiques systémiques paraît prématuré, voire réducteur. Par conséquent, je vous demande de bien vouloir retirer ce sous-amendement, faute de quoi j’émettrai un avis défavorable.
Certes, les abeilles pâtissent des cocktails de pollutions ou de substances. Mais une évaluation toxicologique a bien pour objet d’analyser de tels cocktails. La rédaction du sous-amendement n° 658 rectifié me semble donc en cet instant trop ciblée. C'est pourquoi, madame le sénateur, je vous demande de bien vouloir le retirer, faute de quoi j’émettrai un avis défavorable.
Je reprendrai la même argumentation à propos du sous-amendement n° 816 visant les combinaisons de substances chimiques.
Comme l’a dit, monsieur le rapporteur, il est encore prématuré de prévoir une actualisation annuelle du plan d’urgence. Aussi, madame le sénateur, je vous demande de bien vouloir retirer le sous-amendement n° 659 rectifié, faute de quoi j’émettrai un avis défavorable.
Le sous-amendement n° 812 vise le pilotage de l’institut. Il est prématuré d’en décider. Des travaux sont actuellement menés sur le sujet. C'est pourquoi, madame le sénateur, je vous demande de bien vouloir retirer ce sous-amendement, faute de quoi j’émettrai un avis défavorable.
Madame Blandin, les sous-amendements n° 552 rectifié, 816, 658 rectifié bis, 659 rectifié et 812 sont-ils maintenus ?
Le sous-amendement n° 816 étant un sous-amendement de repli, je le retire, monsieur le président. En revanche, je maintiens les quatre autres sous-amendements.
Le sous-amendement n° 816 est retiré.
La parole est à Mme Marie-Christine Blandin, pour explication de vote sur le sous-amendement n° 552 rectifié.
Certes, il ne faut pas seulement cibler les neurotoxiques systémiques. En effet, nous ne savons pas quelles seront les prochaines découvertes. Mais, en France, il n’y a plus un seul chercheur en toxicologie spécialisé en apiculture. Il est donc fait appel à d’autres laboratoires, actuellement surchargés à la suite de l’adoption du règlement Reach, à propos duquel, je le relève incidemment, la France a pris ses responsabilités. Ainsi, les agences, les instituts ou les laboratoires privés sont engorgés à un point tel que de nombreuses pistes de recherche sont délaissées.
Le sous-amendement n° 552 rectifié tend donc non pas à désigner les neurotoxiques comme des coupables potentiels, mais à orienter les recherches vers l’évaluation de leur toxicité sur les abeilles. C’est en raison du faible nombre de toxicologues que je le maintiens.
Le sous-amendement n'est pas adopté.
La parole est à Mme Marie-Christine Blandin, pour explication de vote sur le sous-amendement n° 658 rectifié bis.
Ce sous-amendement est relatif à la méthode. Il ne faut pas se contenter de voir si telle ou telle molécule chimique prise isolément tue les abeilles car, visiblement, les pauvres bêtes ne meurent pas après l’absorption d’une seule molécule. Il n’en demeure pas moins que de nombreuses ruches sont décimées.
Je comprends très bien, mes chers collègues, que vous ne soyez pas sensibles aux abeilles. Je vais donc vous parler d’espèces sonnantes et trébuchantes. Les pertes s’élèvent chaque année à 750 millions d'euros pour l’agriculture, 275 millions d'euros pour la production de miel, et je ne dispose pas des chiffres relatifs aux produits dérivés tels les pains d’épice. La commission des affaires économiques devrait être très sensible à cette perte considérable de revenus.
Par ailleurs, nous savons que, pour les pathologies humaines également, il est indispensable d’étudier les effets combinés des molécules chimiques ; je pense à ce propos à l’analyse de l’air intérieur.
C'est pourquoi je maintiens ce sous-amendement
Le sous-amendement n'est pas adopté.
La parole est à Mme Marie-Christine Blandin, pour explication de vote sur le sous-amendement n° 659 rectifié.
Nous souhaitons que soit actualisé le plan d’urgence au gré des résultats des recherches. Si, après avoir décidé de mener telle ou telle recherche, on s’aperçoit que ce n’est pas la piste à suivre, on doit pouvoir en tirer les conséquences.
J’ai sans doute eu la maladresse de faire figurer dans ce sous-amendement les mots « tous les ans ». M. le rapporteur, a dit qu’il n’était pas certain que les évaluations donnent chaque année de nouveaux résultats. Mais, monsieur Sido, si, une année, il n’y a pas de résultat, on ne changera pas le plan d’urgence ! En revanche, si une recherche établit que telle molécule est innocente, on arrêtera de la désigner comme cible. Je vous trouve donc un peu de mauvaise foi !
Le sous-amendement n'est pas adopté.
La parole est à Mme Marie-Christine Blandin, pour explication de vote sur le sous-amendement n° 812.
La rédaction de ce sous-amendement résulte d’un travail effectué avec l’ensemble des organisations nationales et locales d’apiculture. La création d’un institut scientifique et technique de l’abeille séduit les professionnels. Mais ces derniers craignent d’être tenus à l’écart, alors qu’ils ont une grande expérience. Ils souhaitent donc que soit mentionné dans la future loi qu’ils seront partie prenante au pilotage de cet institut.
Le sous-amendement n'est pas adopté.
La parole est à Mme Odette Herviaux, pour explication de vote sur l'amendement n° 770.
Même si les sous-amendements déposés par les membres du groupe socialiste et apparentés n’ont pas été adoptés, à titre personnel, je voterai en faveur de cet amendement.
En effet, il est très important de développer la recherche sur les produits qui peuvent être dangereux pour les abeilles. Même si je n’ai pas de connaissances techniques et scientifiques sur ces substances, j’ai une certaine pratique des abeilles. Dans ma région, nous avons réussi à faire prendre en charge par le GIE Lait-Viande la structuration de la filière. Tous les acteurs concernés étaient partants, persuadés de l’importance des abeilles et de la nécessité de valoriser l’apiculture.
Il est aussi indispensable de faire prendre conscience à l’ensemble de la profession qu’il ne faut pas faire fi des amateurs. Même si je peux comprendre que les professionnels de la vente de miel ne veulent pas être confrontés à une concurrence déloyale, je pense qu’il faut considérer le problème en dehors de son aspect marchand et reconnaître que les amateurs, qui ont des ruchers déclarés et surveillés, protègent la biodiversité.
Lorsque M. Bussereau était ministre de l’agriculture, j’avais déjà eu l’occasion de faire mon petit couplet sur la nécessité de préserver les abeilles et notamment de réintroduire des espèces résistantes, comme les petites abeilles noires d’Ouessant. Ainsi, dans ma région, nous avons décidé de réintroduire des types d’abeilles plus résistantes dans des endroits où elles avaient disparu, non pas seulement à cause du varroa, mais aussi en raison de certaines pratiques.
L'amendement est adopté.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 28.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quinze heures.
La séance est suspendue.
La séance, suspendue à douze heures cinquante-cinq, est reprise à quinze heures, sous la présidence de Mme Catherine Tasca.