La séance est ouverte à neuf heures trente.
Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.
L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi pour le développement économique de l’outre-mer, déclaré d’urgence (projet n° 496, 2007-2008, texte de la commission n° 233, rapports n° 232, 240, 243, et 244).
Dans la discussion des articles, nous poursuivons l’examen des amendements tendant à insérer un article additionnel après l’article 15.
L'amendement n° 292 rectifié, présenté par Mme Payet et les membres du groupe Union centriste, est ainsi libellé :
Après l'article 15, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - L'article 295 du code général des impôts est complété par un paragraphe ainsi rédigé :
« ... - Dans les départements de la Guadeloupe, de la Martinique et de la Réunion, sont exonérées de taxes sur la valeur ajoutée pendant une durée de 2 ans à compter de la promulgation de la loi n° du pour le développement économique de l'outre-mer les prestations relatives à la fourniture de logement et du prix de pension ou de demi-pension dans les établissements d'hébergement. Ce taux s'applique aux locations meublées dans les mêmes conditions que pour les établissements d'hébergement. »
II. - La perte de recettes pour l'État résultant de l'exonération temporaire de taxe sur la valeur ajoutée sur les prestations d'hébergement dans les départements d'outre-mer est compensée à due concurrence par la création de taxes additionnelles aux tarifs prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Anne-Marie Payet.
Cet amendement a pour objet de prévoir une exonération temporaire de TVA de deux ans pour les prestations hôtelières et les locations d’hébergement dans les départements d'outre-mer où cet impôt s’applique.
En effet, contrairement à la métropole, les départements d'outre-mer sont en prise directe avec la concurrence des pays moyennement avancés, où les prix très nettement inférieurs – le rapport est de un à dix entre l’île de la Réunion et l’île Maurice, et même de un à cinquante avec Madagascar – et les normes inexistantes faussent totalement la concurrence.
Cette mesure – temporaire, je le répète – a pour objet de restaurer la compétitivité du secteur hôtelier et des locations meublées, dans une conjoncture extrêmement dégradée et face à une concurrence régionale débridée.
Cette exonération ne paraît pas justifiée, le dispositif de TVA étant particulièrement favorable dans les départements d’outre-mer. En outre, elle serait très coûteuse pour les finances publiques.
La commission souhaite le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettrait un avis défavorable.
Le Gouvernement est sensible aux difficultés du secteur du tourisme. Nous travaillons, avec Hervé Novelli, à un plan de relance de l’activité touristique comportant toute une série de mesures rapidement applicables, qui sera annoncé dans les semaines qui viennent.
Le message de Mme Payet en faveur du tourisme ayant été entendu, le Gouvernement, comme la commission, sollicite le retrait de l’amendement.
L'amendement n° 63, présenté par Mme Beaufils, MM. Foucaud et Vera, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Avant l'article 16, insérer une division additionnelle et son intitulé ainsi rédigés :
Titre...
Dispositions relatives aux collectivités locales
La parole est à Mme Odette Terrade.
Le projet de loi qui nous est soumis comporte peu de mesures intéressant directement les collectivités locales, qui sont pourtant des acteurs de premier plan en matière de développement, si ce n’est au début du texte pour remettre en cause une partie de leurs ressources fiscales.
L’inquiétude croît, notamment à la suite de l’annonce de la suppression prochaine de la taxe professionnelle. Les taxes foncières, d’un montant de 648 millions d’euros l’an passé, constituent actuellement la principale recette fiscale des collectivités locales ultramarines, nonobstant la situation spécifique de l’octroi de mer.
Comme en France métropolitaine, on assiste outre-mer à des transferts de compétences sans que les recettes nouvelles soient mises à la disposition des collectivités pour y faire face, et à des phénomènes identiques de contraction des dotations budgétaires.
Ainsi, la mise en place anticipée du revenu de solidarité active en Guadeloupe, à la suite de l’accord dit « Jacques Bino », est sans doute le signal de la généralisation de ce dispositif. Le coût sera, à n’en pas douter, lourd à supporter pour les départements ultramarins, particulièrement au moment où la conjoncture économique internationale et ses traductions régionales commencent à peser sur la situation de l’emploi outre-mer.
Les collectivités locales d’outre-mer exercent, de par la loi organique, des missions plus importantes que les collectivités locales de métropole. Pour autant, elles ne disposent que de ressources d’un montant réduit en termes de potentiel fiscal par habitant, ce qui démultiplie toute incidence négative sur l’enveloppe des concours budgétaires de l’État aux collectivités locales.
Par ailleurs, la matière fiscale n’est pas connue avec suffisamment de certitudes, faute d’évaluation des biens imposables à leur juste valeur.
Pour toutes ces raisons, il nous semble essentiel que des mesures fortes, comme celles que nous proposons d’introduire avant l’article 16, soient prises en faveur des collectivités locales. La résorption de l’emploi précaire au sein des collectivités, d’une part, et l’urgence d’investissements significatifs dans les domaines de la voirie, de l’assainissement, du traitement des déchets ou du logement, d’autre part, peuvent nécessiter cet effort.
Les collectivités locales supportant 85 % des investissements publics dans les départements d’outre-mer, l’adoption de cet amendement nous paraît justifiée.
Pour une meilleure compréhension des débats, je vais appeler maintenant les amendements n° 62 et 64.
L'amendement n° 62, présenté par Mme Beaufils, MM. Foucaud et Vera, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Avant l'article 16, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Le II de l'article L. 1615-6 du code général des collectivités territoriales est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les dispositions des deux alinéas précédents ne sont pas applicables aux collectivités d'outre-mer. »
II. - Les pertes éventuelles de recettes pour l'État résultant du I ci-dessus sont compensées à due concurrence par un relèvement des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Odette Terrade.
Cet amendement porte sur l’attribution des aides du fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée.
Dans la première loi de finances rectificative pour 2009, les conditions d’attribution de ces aides à l’investissement des collectivités locales ont été modifiées.
L’article 1er de ce premier collectif budgétaire disposait notamment : « Pour les bénéficiaires du fonds qui s’engagent, avant le 15 avril 2009 et, après autorisation de leur assemblée délibérante, par convention avec le représentant de l’État dans le département, sur une progression de leurs dépenses réelles d’équipement en 2009 par rapport à la moyenne de leurs dépenses réelles d’équipement de 2004, 2005, 2006 et 2007, les dépenses à prendre en considération sont, à compter de 2009, celles afférentes à l’exercice précédent. En 2009, pour ces bénéficiaires, les dépenses réelles d’investissement éligibles de 2007 s’ajoutent à celles afférentes à l’exercice 2008 pour le calcul des attributions du Fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée.
« Si les dépenses réelles d’équipement constatées au titre de l’exercice 2009, établies par l’ordonnateur de la collectivité bénéficiaire avant le 15 février 2010 et visées par le comptable local, sont inférieures à la moyenne de celles inscrites dans les comptes administratifs 2004, 2005, 2006 et 2007, cette collectivité est à nouveau soumise, dès 2010, aux dispositions du premier alinéa du présent II ; elle ne perçoit alors aucune attribution au titre du Fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée en 2010 au titre des dépenses réelles d’investissement de 2008 ayant déjà donné lieu à attribution. »
En clair, les collectivités locales se trouvent contraintes de procéder à la passation d’une convention comportant des engagements précis en montant de travaux entrepris avec l’État pour bénéficier d’un remboursement anticipé de la taxe sur la valeur ajoutée.
Nous proposons que ces conditions ne soient pas mises en œuvre pour les collectivités d’outre-mer. Deux raisons plaident, d’après nous, en ce sens : les besoins en équipements collectifs portent, en outre-mer, sur une quotité particulièrement importante ; les attentes et les nécessités, en termes de voirie, d’équipement scolaire, d’infrastructures de transport, d’assainissement collectif, de valorisation des déchets, par exemple, sont d’un tout autre ordre qu’en métropole.
Que l’on songe simplement que la Guyane, le plus étendu des départements français, occupe une superficie de plus de 80 000 kilomètres carrés, répartis entre dix-neuf communes, dont la plus vaste couvre une superficie de 18 360 kilomètres carrés ! Et on pourrait tout aussi bien évoquer la situation de communes réunionnaises comme La Possession, Saint-Paul ou encore Saint-Pierre.
Il suffit de garder à l’esprit ces réalités pour prendre pleinement conscience de la justesse de la mesure que nous préconisons. Nous vous invitons à adopter cet amendement, afin de répondre à la situation des collectivités locales ultramarines d’une façon positive et adaptée.
L'amendement n° 64, présenté par Mme Beaufils, MM. Foucaud et Vera, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Avant l'article 16, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - L'article L. 3443-1 du code général des collectivités territoriales est ainsi rédigé :
« Art. L. 3443 -1 - La quote-part de péréquation des départements mentionnés à l'article L. 3334-4 perçue par les départements d'outre-mer est déterminée par application au montant total de la dotation de péréquation du triple du rapport, majoré de 20 % entre la population des départements d'outre-mer, telle qu'elle résulte du dernier recensement général, et la population nationale totale, sous réserve des dispositions du cinquième alinéa de l'article L. 3334-4. »
II. - La dotation prévue à l'article L. 3334-4 du code général des collectivités territoriales est relevée à due concurrence des conséquences du I ci-dessus.
III. - Pour compenser les pertes de recettes résultant pour l'État des I et II ci-dessus, il est procédé au relèvement des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Odette Terrade.
Cet amendement vise à accroître de manière significative la dotation globale de fonctionnement perçue par les départements d’outre-mer.
Il s’agit concrètement de placer ces départements en mesure de répondre aux impératifs de développement du territoire et aux missions de grande importance qui leur sont confiées.
Le simple fait de rappeler que les départements d'outre-mer ont en charge le développement des infrastructures scolaires du second degré et qu’ils seront sans doute appelés à intervenir sur le revenu de solidarité active peut largement motiver la mise en œuvre d’une démarche adaptée.
Il convient donc de renforcer les moyens des budgets départementaux, qui sont particulièrement sensibles aux aléas de la situation économique et sociale ultramarine. Nous aurions d’ailleurs parfaitement pu proposer dans cet amendement un effort supplémentaire en faveur des communes, qui bénéficient elles aussi d’une quote-part de la dotation globale de fonctionnement.
Ce qui nous importe, dans un premier temps, c’est d’acter le principe d’un renforcement des moyens dévolus aux collectivités d’outre-mer. Il est entendu que cet effort nécessaire serait réalisé en faisant abstraction de l’encadrement des dotations budgétaires de l’État dans une enveloppe normée.
Par coordination avec nos avis défavorables sur les articles destinés à figurer dans ce titre, nous sommes défavorables à l’amendement n° 63.
L’amendement n° 62, qui vise à exclure les collectivités territoriales d’outre-mer du dispositif de versement anticipé du FCTVA, n’est pas justifié. C’est pourquoi la commission est défavorable à cet amendement.
En ce qui concerne l’amendement n° 64, le dispositif actuel est déjà favorable aux départements d’outre-mer, qui bénéficient d’une quote-part de dotation de péréquation égale au double du rapport, majoré de 10 %, entre leur population et la population totale nationale. Par ailleurs, cet amendement serait très coûteux pour les finances de l’État. La commission y est donc défavorable.
Le Gouvernement est également défavorable à ces trois amendements.
Je regrette vivement que ces trois amendements, qui répondaient à une vraie préoccupation de nos compatriotes ultramarins, aient reçu un avis défavorable.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
Le chapitre III du titre Ier du livre VI de la première partie du code général des collectivités territoriales est complété par une section 3 ainsi rédigée :
« Section 3 : Fonds exceptionnel d'investissement outre-mer
« Art. L. 1613-7. - Il est créé un fonds exceptionnel d'investissement outre-mer dont le montant est fixé chaque année par la loi de finances.
« L'objet du fonds est d'apporter une aide financière de l'État aux personnes publiques qui réalisent, dans les départements d'outre-mer, dans les collectivités d'outre-mer ou en Nouvelle-Calédonie, des opérations portant sur des équipements publics collectifs lorsque ces opérations participent de façon déterminante au développement économique et social local.
« Cette aide peut être attribuée :
« - dans les départements d'outre-mer, aux régions, aux départements, aux communes ou aux organismes de coopération intercommunale responsables de tels équipements ;
« - dans les collectivités d'outre-mer relevant de l'article 74 de la Constitution, à ces collectivités, aux communes, aux organismes de coopération ou, à Wallis et Futuna, aux circonscriptions responsables de tels équipements ;
« - en Nouvelle-Calédonie, à la Nouvelle-Calédonie, aux provinces, aux communes ou aux organismes de coopération responsables de tels équipements.
« Pour chacune de ces personnes publiques, l'aide est cumulable avec celles dont elle peut bénéficier de la part de l'État ou d'autres collectivités publiques, ou au titre des fonds structurels ou du Fonds européen de développement. L'aide apportée par le fonds exceptionnel d'investissement outre-mer ne peut toutefois bénéficier aux équipements faisant l'objet, à un autre titre, de conventions de financement conclues entre l'État et ces collectivités.
« Les modalités d'attribution des aides apportées par le fonds exceptionnel d'investissement outre-mer sont fixées par décret. »
En décembre 2008, j’avais salué la création du fonds exceptionnel d’investissement comme une innovation intéressante pour l’outre-mer dans la loi de finances pour 2009, tout en regrettant que cette mesure ait été aussi timide, pour ne pas dire timorée.
Depuis, cette enveloppe a été augmentée en fonction des événements survenus en Guyane d’abord, puis en Guadeloupe, en Martinique et aujourd’hui à la Réunion.
Finalement, ce fonds ne serait-il qu’une variable de régulation ou d’ajustement budgétaire pour l’outre-mer, lorsque, par ailleurs, tous les dispositifs mis en place par l’État le sollicitent fortement, conditionnant même ainsi les apports financiers de l’État ?
La création du fonds exceptionnel d’investissement est intéressante, je le confirme. J’émets cependant quelques réserves sur la sincérité de cette initiative en tant que véritable outil de développement économique lorsque je constate la manière dont s’opèrent d’ores et déjà la mobilisation de ce fonds ou les annonces faites ici et là.
Le texte du projet de loi affiche clairement son objectif : « apporter une aide financière de l’État […] à des opérations portant sur des équipements publics collectifs lorsque ces opérations participent de façon déterminante au développement économique et social local », et lorsque ces équipements ne sont pas déjà financés au titre des conventions existant entre l’État et les collectivités locales.
Je l’entends bien, il ne s’agit pas simplement d’apporter un plus pour relancer le secteur du bâtiment et des travaux publics en outre-mer ou de soutenir la commande publique, il s’agit d’aider les collectivités dans leur politique d’aménagement du territoire ou de développement culturel, social ou éducatif et dans des projets « déterminants » pour le développement qui ne sont pas intégrés dans les contrats de plan ou les conventions déjà existantes.
Cependant, à ce jour, je n’ai pas une vision claire de ce fonds, qu’il s’agisse des critères d’éligibilité des opérations pouvant y prétendre ou des modalités de mobilisation.
En regardant la liste des premiers chantiers de la relance en outre-mer, établie par M. le secrétaire d’État, je me demande si nous ne sommes pas encore en train de créer un texte fourre-tout, qui sera bientôt accusé d’avoir généré des effets pervers, d’entraîner des abus ou d’être détourné de son objet d’origine.
Quant à l’enveloppe, sa variabilité n’est pas non plus rassurante. En effet, dans la démarche d’équilibre budgétaire de l’État, pour habiller Pierre, on déshabille Paul !
Prudence étant mère de sureté, face à l’importance des contributions que l’État attend des collectivités – on le verra avec la question du logement, par exemple –, tout en gelant les bases d’imposition de la fiscalité locale pour une dizaine d’années, je voterai cet article. Je proposerai néanmoins un amendement qui, s’il est accepté, permettra aux collectivités locales d’outre-mer de retrouver des marges de manœuvre pour investir, et d’accompagner le dispositif du fonds exceptionnel d’investissement, puisqu’il faut une contrepartie financière des collectivités locales.
Ne l’oublions pas, en outre-mer, les collectivités contribuent pour 80 % à la commande publique ; elles sont un acteur économique important. Par ces temps de crise, il importe de ne pas les affaiblir et, au contraire, de conforter leurs capacités d’investissement. Sinon, les entreprises auront beau être exonérées et défiscalisées, elles n’auront pas les marchés leur permettant de bénéficier des dispositifs qui leur sont dédiés.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.
Avant d’être inscrit dans la loi, le fonds exceptionnel d’investissement a suscité des convoitises dès ses premières utilisations. Certains auraient souhaité qu’il finance, par exemple, les stations d’épuration ou encore la politique que l’on pourrait mener pour le grand ou le petit commerce.
Or, avant même que nous débattions de ce fonds, il a déjà été utilisé ! Une partie de ces crédits – dix millions d’euros – servira à financer la baisse du prix des carburants en Guyane.
Ce fonds est ensuite devenu la source essentielle de financement du plan de relance de l’économie pour les départements d’outre-mer. C’est par lui que devrait transiter l’essentiel des crédits qui seront utilisés dans le cadre du plan de relance des départements d’outre-mer face à la crise.
La Réunion devrait bénéficier de crédits d’un peu plus de 25 millions d’euros pour une douzaine de projets. Dans le même temps, une ligne budgétaire de 20 millions d’euros est ouverte pour la Corse. Tant mieux pour elle ! Mais, si on fait jouer le rapport de populations, la Réunion est désavantagée.
Le recours à ce fonds ne réduit-il pas d’autant nos possibilités d’émarger aux autres crédits disponibles ? Ainsi, sur les quatre milliards d’euros de crédits supplémentaires de l’État, combien la Réunion obtiendra-t-elle ? Et ce qu’elle obtiendra – on parle de 5, 6 millions d’euros – ne servira-t-il pas à éponger les dettes accumulées par l’État au titre de l’année 2008 à la Réunion ?
Des éclaircissements doivent être apportés.
Il faut préciser les financements exacts dont bénéficie ce fonds. Il a été doté de 40 millions d’euros, puis de 75 millions de crédits supplémentaires et enfin de 50 autres millions d’euros. À quoi serviront exactement tous ces financements ?
Quels sont les critères d’éligibilité ? Entre ceux fixés par la loi, ceux proposés par la préfecture de la Réunion ou ceux définis dans le plan de relance par le secrétaire d’État, beaucoup d’interprétations sont possibles.
La définition précise de critères est une nécessité, compte tenu des expériences désastreuses que nous avions eues avec le fonds d’investissement des départements d’outre-mer, le FIDOM, où le saupoudrage a été la règle.
Le Gouvernement voulait utiliser ce fonds dans une démarche de « rattrapage » en « équipements publics collectifs structurants ». Or les premières utilisations des crédits de ce fonds s’orientent dans une autre direction. Il aurait donc fallu définir au préalable les notions utilisées pour marquer ce fonds.
Nous sommes partisans d’un effort de « rattrapage ». Nous l’avons même souvent dit, après la réalisation de l’égalité individuelle, il nous faut aller vers l’égalité collective. Ce concept signifie pour nous un rattrapage, en équipements et en ressources humaines, du niveau moyen national. De fait, nous adaptons au contexte national un principe décidé par l’Union européenne pour les régions ultrapériphériques, ou RUP : les amener, par des politiques adaptées, au niveau moyen des régions continentales.
Nous invitons le Gouvernement à se concerter avec les forces vives de nos pays pour déterminer de quel rattrapage nous avons besoin. Ces préconisations permettront de déterminer le niveau de financement du fonds et sa programmation pluriannuelle. Ce serait le meilleur moyen d’éviter le saupoudrage sinon une utilisation clientéliste de ce fonds.
Enfin, par le biais de plusieurs réformes – celle de l’indemnité temporaire de retraite, celle de la TVA dite « non perçue récupérable », la TVA NPR – le Gouvernement réalisera des économies substantielles outre-mer. Il a souvent été demandé à l’État de remettre ces économies au service d’actions collectives menées dans les départements d’outre-mer.
Nous proposons qu’après évaluation les économies réalisées viennent alimenter ce fonds, la condition préalable étant que l’on définisse précisément l’usage qui sera fait des crédits.
Les amendements que j’ai déposés vont dans ce sens.
Monsieur le président, je m’associe à l’ensemble des arguments développés par ma collègue Gélita Hoarau.
Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 411, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit cet article :
Il est créé un fonds exceptionnel d'investissement outre-mer, dont le montant est fixé chaque année par la loi de finances.
L'objet du fonds est d'apporter une aide financière de l'État aux personnes publiques qui réalisent, dans les départements d'outre-mer, dans les collectivités d'outre-mer ou en Nouvelle-Calédonie, des opérations portant sur des équipements publics collectifs, lorsque ces opérations participent de façon déterminante au développement économique, social et environnemental local.
Cette aide peut être attribuée :
- dans les départements d'outre-mer, aux régions, aux départements, aux communes ou à leurs groupements ;
- dans les collectivités d'outre-mer relevant de l'article 74 de la Constitution, à ces collectivités, aux communes ou à leurs groupements, ou, à Wallis et Futuna, aux circonscriptions ;
- en Nouvelle-Calédonie, à la Nouvelle-Calédonie, aux provinces, aux communes ou à leurs groupements.
Pour chacune de ces personnes publiques, l'aide est cumulable avec celles dont elle peut bénéficier de la part de l'État ou d'autres collectivités publiques, ou au titre des fonds structurels ou du fonds européen de développement.
La parole est à M. le secrétaire d'État.
Par cet amendement, le Gouvernement a pour objectif d’assouplir le fonctionnement du fonds exceptionnel d’investissement et, au moins pour cette année, d’en faire un des outils de la relance de l’activité afin de répondre aux besoins des chantiers prêts à être mis en œuvre.
Certains craignent le saupoudrage ; nous devons effectivement concentrer les ressources de ce fonds sur des actions fortes de rattrapage. Mais on ne doit pas dénigrer le saupoudrage dans l’hémicycle et le pratiquer dans sa commune ou dans sa collectivité ! En effet, ce sont le plus souvent des collections de petits projets qui parviennent aux bureaux des préfets !
Cela dit, ces petits projets ont des vertus ; ils offrent du travail, produisent de l’activité et des équipements et sont structurants pour l’économie d’une région.
Par ailleurs, il n’y a pas de surprise, les financements de ce fonds sont très clairement établis. L’enveloppe mise à la disposition du fonds exceptionnel d’investissement est constituée de 40 millions d’euros, auxquels s’ajoutent 115 millions et 50 millions d’euros supplémentaires.
Nous avons déjà engagé 115 millions d’euros au titre de la programmation, pour agir vite et non pour désavantager qui que ce soit. Nous avons annoncé les premiers chantiers dans chacun des départements ; nous avons agi dans la concertation avec le souci de retenir les chantiers prêts à commencer. En effet, retenir un chantier qui ne démarrera que l’année prochaine ou l’année suivante, n’a pas beaucoup d’intérêt.
Aujourd’hui, la Réunion est le premier département de France en matière d’investissement de l’État. Nous lui attribuons plusieurs milliards d’euros pour l’investissement. C’est la région où l’État investit proportionnellement le plus. On ne peut que se réjouir de cet effort.
En outre, ce fonds a été utilisé en Guyane pour financer non pas le prix de l’essence, les sénateurs de Guyane le savent, mais les investissements de la région et du département, ce qui est très important.
Je retiens aussi de l’intervention des orateurs la nécessité, pour l’avenir, que nous puissions travailler en coopération avec les collectivités locales. Il faudra définir des stratégies pour que ce fonds, qui sera pérennisé, serve à financer à long terme des projets structurants.
Cette année 2009 est particulière à double titre : d’une part, il a fallu établir les conditions du démarrage du fonds ; d’autre part, il a fallu déterminer les investissements de relance dont nous avions besoin. C’est pourquoi nous avons défini des critères très clairs pour prendre en compte les travaux susceptibles de commencer cette année. Ce fonds peut financer jusqu’à 75 % de l’investissement. On ne peut pas faire plus simple en termes de méthode !
Je suis prêt à travailler en concertation avec les collectivités et à créer un groupe d’études pour définir dans les années qui viennent les modalités d’utilisation de ce fonds, de manière à le rendre le plus rationnel possible.
Vous l’admettrez, il était préférable de rester très souple pour l’année 2009, qui est une année de crise. Cet outil doit pouvoir être utilisé de manière intelligente pour lutter contre la crise économique, même s’il est appelé à subsister bien au-delà de cette crise et de cette année.
Le Gouvernement présente donc un amendement de souplesse.
Le sous-amendement n° 60 rectifié, présenté par Mme Hoarau, M. Vera, Mme Beaufils, M. Foucaud et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Après le troisième alinéa de l'amendement n° 411, insérer un alinéa ainsi rédigé :
La liste de ces investissements est arrêtée après concertation avec les collectivités concernées.
La parole est à Mme Gélita Hoarau.
Monsieur le président, je retire ce sous-amendement, auquel M. le secrétaire d’État a apporté des réponses.
Le sous-amendement n° 60 rectifié est retiré.
L'amendement n° 199, présenté par MM. Patient, Antoinette, S. Larcher, Lise, Gillot, Tuheiava et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Avant le dernier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 1613-7 du code général des collectivités territoriales, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Au cours de la première année de la réalisation d'un investissement, l'aide apportée par le fonds exceptionnel d'investissement outre-mer peut bénéficier aux dépenses de fonctionnement induites par ledit investissement.
La parole est à M. Georges Patient.
Je salue bien sûr la mise en place de ce fonds, qui est la reconnaissance par l’État de la nécessité de faire un important effort de rattrapage en faveur des collectivités ultramarines.
Comme je le disais à l’instant à M. le secrétaire d’État, tout investissement a des effets sur le fonctionnement. Vous le savez, les collectivités de Guyane, comme toutes celles d’outre-mer, ont du mal à faire face à leurs dépenses de fonctionnement résultant d’investissements importants.
Par exemple, en Guyane, beaucoup d’efforts de rattrapage sont faits pour les équipements scolaires, qui peuvent être réalisés grâce à des apports de la collectivité, de l’État ou à des emprunts.
Mais les conséquences sur le fonctionnement sont très fortes. Ainsi, la réalisation de tout nouvel équipement scolaire entraîne immédiatement un surcroît de dépenses de fonctionnement correspondant à 15 % au moins du montant de l’investissement.
Dès lors, il serait, nous semble-t-il, important de consacrer une partie des ressources de ce fonds aux dépenses de fonctionnement des collectivités locales lors de la mise en place de tels équipements.
L’amendement n° 411 vise à rédiger intégralement l’article 16, ce qui a pu susciter chez nous quelques interrogations, car la rédaction initiale de cet article nous satisfaisait.
Nous l’avons constaté, aux termes de la nouvelle rédaction proposée pour l’article 16, le renvoi à un décret pour la définition des modalités d’attribution des aides, la clause interdisant l’attribution d’une aide aux projets pour lesquels l’État et les collectivités ont déjà conclu une convention de financement et l’intégration d’un tel dispositif au sein du code général des collectivités territoriales seraient supprimés.
Nous nous sommes interrogés sur ces trois points, estimant notamment que la clause relative à l’attribution des aides aux projets faisant déjà l’objet d’une convention entre l’État et les collectivités locales ou l’inscription au code général des collectivités territoriales pouvaient être des mesures intéressantes.
Dès lors, nous serions plutôt tentés d’émettre un avis de sagesse positive. À cet égard, monsieur le secrétaire d’État, j’ai bien entendu les arguments que vous avez invoqués pour défendre votre amendement.
L’amendement n° 199 témoigne de la satisfaction suscitée par la création du fonds exceptionnel d’investissement. D’ailleurs, monsieur le secrétaire d’État, si un tel dispositif était étendu à certains départements métropolitains, je pense que nombre de nos collègues seraient tout à fait disposés à le soutenir.
Sourires
Encore faudrait-il que la situation de nos finances publiques nous le permette !
M. Éric Doligé, rapporteur. Je vous l’accorde, mon cher collègue. Comme nous avons bien compris qu’elle ne nous le permettait pas, nous n’irons tout de même pas jusqu’à déposer un sous-amendement en ce sens.
Nouveaux sourires.
Sur le fond, nous comprenons bien que tout investissement entraîne en général des frais de fonctionnement. D’ailleurs, à titre personnel, je regrette que certaines collectivités locales décident parfois de réaliser des investissements sans anticiper les frais de fonctionnement supplémentaires. Cela peut causer bien des surprises !
Quoi qu’il en soit, mon cher collègue, il n’est pas possible de déroger à la règle. Il s’agit bien d’un fonds d’investissement et nous ne pouvons pas l’étendre aux dépenses de fonctionnement.
Par conséquent, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
Je confirme les propos que j’ai tenus en présentant l’amendement n° 411.
Nous voulons introduire plus de souplesse dans le dispositif, notamment pour permettre à des opérations faisant déjà l’objet d’un contrat entre l’État et les collectivités locales de bénéficier du fonds, dans la limite, bien sûr, des crédits accordés par l’État. À mon sens, en cette période de relance, nous avons effectivement besoin de souplesse dans l’utilisation de tels crédits. On rencontre toujours des personnes qui ont des idées, mais il est parfois plus difficile de trouver des projets concrets susceptibles d’être mis en œuvre dans l’année !
Par ailleurs, je suis sensible aux difficultés soulevées par les auteurs de l’amendement n° 199. C’est notamment dans cet esprit que nous avons proposé la création d’une agence de vie scolaire, afin d’essayer de mutualiser certains frais de fonctionnement des collectivités locales, en l’occurrence en matière d’établissements scolaires.
Pour autant, il serait effectivement très compliqué de réserver une partie des ressources du fonds d’investissement à des dépenses de fonctionnement, ne serait-ce que pour des raisons de coût. Contrairement aux dépenses d’investissement, les dépenses de fonctionnement doivent être renouvelées chaque année. À terme, le fonds finirait par être exclusivement consacré aux frais de fonctionnement.
Par conséquent, le Gouvernement sollicite le retrait de cet amendement. À défaut, l’avis serait défavorable.
Néanmoins, je souhaite insister sur le travail que nous avons engagé avec les collectivités locales. Nous avons ainsi mis en place un groupe d’études afin de trouver des recettes pour les collectivités locales de Guyane. Il s’agit notamment de desserrer l’étau qui pèse sur elles, car elles n’arrivent plus, aujourd'hui, à assumer leurs dépenses de fonctionnement.
Enfin, monsieur le rapporteur, si vous souhaitez étendre le bénéfice de ce fonds aux départements métropolitains, il faudrait également prendre les difficultés qui ont justifié sa création.
Sourires
Je pense notamment à la terrible pression migratoire à laquelle la Guyane est confrontée – l’augmentation de la population de ce département est l’une des plus fortes au monde – ou aux 22 % de chômeurs de l’outre-mer ! Je ne suis pas certain que les départements métropolitains auraient à y gagner !
Je suggère donc de réserver les outils spécifiques à des difficultés spécifiques, en l’occurrence celles de l’outre-mer.
La parole est à M. Georges Patient, pour explication de vote sur l'amendement n° 411.
Le dispositif que je propose pour les dépenses de fonctionnement concerne uniquement l’aide au démarrage. Il n’est pas question de le pérenniser sur toute la durée de vie d’un équipement.
C’est surtout une fois l’investissement réalisé, donc après la mise en place de l’équipement concerné, que l’on observe les conséquences les plus fortes sur les frais de fonctionnement, au moins pendant la première année. La disposition que je suggérais avait donc vocation à s’appliquer juste après la réalisation de l’investissement.
Mais j’attendrai des mesures plus spécifiques.
La parole est à M. Jean-Pierre Fourcade, pour explication de vote sur l'amendement n° 411.
Monsieur le secrétaire d’État, le groupe de l’UMP votera évidemment cet amendement. La nouvelle rédaction proposée pour l’article 16 est très assouplie et permet d’intervenir dans des conditions rapides pour financer des investissements importants. J’ai bien noté l’expression que vous avez employée.
À cet égard, je souhaite former un vœu. Pour sortir les départements et les collectivités d’outre-mer d’un certain nombre de difficultés, les décisions relatives au financement des investissements devraient respecter les cinq priorités que nous avons évoquées au début de l’examen du présent projet de loi.
Compte tenu de la situation géographique de ces départements et collectivités, il est clair que nous pouvons insister sur les problèmes d’énergie, d’environnement et de nouvelles technologies.
De notre point de vue, l’aide que le fonds apportera à l’ensemble des départements doit s’inscrire dans une telle ouverture vers l’avenir. Les véritables solutions résident bien plus dans les nouvelles technologies que dans des allégements fiscaux. Ce qu’il faut à présent, c’est s’orienter clairement vers les technologies du développement durable et de la protection de l’environnement.
L'amendement est adopté.
En conséquence, l'article 16 est ainsi rédigé, et l'amendement n° 199 n'a plus d'objet.
L'amendement n° 103, présenté par Mme Michaux-Chevry, est ainsi libellé :
Après l'article 16, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans le cadre d'un marché public, lorsque la valeur de la fourniture, du service ou des travaux est inférieure à 90 000 euros hors taxe, le pouvoir adjudicateur ou l'entité adjudicatrice fixe un nombre minimum d'entreprises dont l'activité relève de la liste mentionnée à l'annexe du décret n° 98-246 du 2 avril 1998 relatif à la qualification professionnelle exigée pour l'exercice des activités prévues à l'article 16 de la loi n° 96-603 du 5 juillet 1996 relative au développement et à la promotion du commerce et de l'artisanat et qui seront admises à présenter une offre.
La parole est à Mme Lucette Michaux-Chevry.
Cet amendement vise à faciliter l’accès des petites entreprises, qui connaissent un certain nombre de difficultés, aux procédures d’appel d’offres.
Nous demandons la fixation d’un nombre minimal d’entreprises exerçant une activité artisanale dans les procédures d’appel d’offres de fournitures, de services ou de travaux pour les marchés de faible importance. Il s’agit en fait de relever le taux.
Nous pouvons parfaitement, me semble-t-il, comprendre la volonté de notre collègue Lucette Michaux-Chevry de permettre à des petites entreprises artisanales de participer à des marchés d’une valeur inférieure à un certain seuil.
En revanche, le dispositif proposé nous paraît particulièrement complexe à mettre en œuvre. En outre, nous estimons qu’une telle mesure, si elle devait entrer en vigueur, devrait s’appliquer sur l’ensemble du territoire national, ce qui créerait un certain nombre de difficultés.
En fait, le présent projet de loi n’est peut-être pas le cadre adapté pour régler le problème soulevé par notre collègue. Compte tenu de la complexité du sujet, la commission sollicite le retrait de cet amendement.
Mme Lucette Michaux-Chevry pointe une véritable difficulté : l’accès des très petites entreprises à l’activité et aux marchés publics.
Toutefois, comme l’a excellemment souligné M. le rapporteur, il s’agit d’un sujet national, qui dépasse les seuls territoires ultramarins. Nous ne parviendrons donc pas à régler une telle question avec cet amendement, même s’il est très précis.
En revanche, madame la sénatrice, un certain nombre de mesures répondant aux préoccupations qui sont les vôtres figurent déjà dans le projet de loi.
Je pense d’abord aux dispositions du plan de relance, dont nous venons d’évoquer certains éléments, à commencer par le fonds exceptionnel d’investissement. Ce dispositif permettra de faire travailler des petites entreprises.
Je mentionne également le travail que nous avons engagé avec les chambres consulaires pour les inciter à soutenir des groupements d’entreprises. À mon sens, l’une des clés de l’accès des petites entreprises aux marchés publics réside dans leur capacité à créer des groupements, même temporaires. À défaut, même si la loi fixe des obligations, il est souvent impossible pour une toute petite entreprise ne serait-ce que de satisfaire aux demandes minimales à remplir pour être présent dans un appel d’offres. Un groupement d’entreprises peut donc permettre de mutualiser le savoir.
Comme je l’ai indiqué aux présidents des chambres consulaires, je suis prêt à financer une expertise pour les aider à monter ces groupements d’entreprises susceptibles de répondre à des appels d’offres. Il est nécessaire de se donner les moyens en administration partagée, ne serait-ce que pour remplir les dossiers. Il y a là une voie qui, je le crois, est extrêmement intéressante et permettra de fortifier les entreprises.
Enfin, le Gouvernement a réintroduit la défiscalisation de la réhabilitation des logements en mettant une barre qui était non plus à quarante ans, mais à vingt ans. Cela apportera directement du travail aux entreprises artisanales : quand on réhabilite son logement privé en profitant d’une défiscalisation, on le fait évidemment non pas avec des entreprises générales, mais avec les artisans. Selon nous, cette mesure réintroduira plusieurs millions d’euros en faveur de l’artisanat.
Pour ma part, j’interprète cet amendement comme ayant vocation à indiquer une orientation. D’ailleurs, cela rejoint la volonté du Président de la République d’envisager, y compris à l’échelon européen, un « small business act à la française », afin de permettre l’accès des petites entreprises aux marchés publics. C’est le même débat.
Dans ces conditions, le retrait de l’amendement n° 103 n’enlèverait rien à la force des arguments de Mme la sénatrice, mais éviterait au Gouvernement d’émettre un avis défavorable.
Monsieur le secrétaire d’État, lorsque vous vous êtes rendu sur le terrain, vous avez entendu une revendication qui est juste.
Il y a de nombreuses sociétés qui bénéficient en métropole de tarifs bancaires bien plus intéressants que les petites entreprises locales.
Nombre d’élus, qu’ils soient maires ou présidents d’un exécutif local, ont essayé d’engager des procédures de sous-traitance directe pour faciliter l’accès des petites entreprises, qui sont ainsi sûres d’être payées sans être exploitées.
Or vous avez entendu des grosses entreprises, qui ont parfois seulement un bureau chez nous, faire pression pour que les petites entreprises n’acceptent pas la sous-traitance directe.
Aussi, je retire mon amendement, mais j’aborderai de nouveau le sujet lors des états généraux.
Je n’accepte pas l’argument selon lequel ce problème devrait être traité de la même manière sur l’ensemble du territoire national. Vous le savez bien, monsieur le secrétaire d’État, nous avons beaucoup plus de petites entreprises performantes qui font l’effort de recruter des jeunes et de prendre en charge des formations très orientées. Or ces petites entreprises se trouvent écartées du marché des commandes publiques, qui constituerait tout de même une promotion pour elles.
L'amendement n° 103 est retiré.
L'amendement n° 118, présenté par MM. Gillot, S. Larcher, Lise, Patient, Antoinette, Tuheiava et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 16, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I.- Les entreprises dont l'objet principal est, en Guadeloupe, Martinique et Guyane ou à la Réunion, d'effectuer la première transformation du pétrole brut ou de distribuer les carburants doivent acquitter, à compter du 31 mai 2009, une taxe exceptionnelle.
Le montant de cette taxe est fixé l'État.
II. - Le produit de cette taxe vient abonder le fonds exceptionnel d'investissement outre-mer.
La parole est à M. Jacques Gillot.
Le prélèvement sur les profits pétroliers créé par l’article 67 de la loi du 25 décembre 2007 de finances rectificative pour 2007 pour financer l’aide à la cuve a été prorogé en 2008.
Les profits pétroliers réalisés par les sociétés monopolistiques que sont aux Antilles et en Guyane la Société anonyme de la raffinerie des Antilles, ou SARA, filiale de Total, qui a d’ailleurs annoncé des profits records de 13, 9 milliards d’euros, et la Société réunionnaise de produits pétroliers, ou SRPP, à la Réunion sont considérables et résultent en partie d’enrichissement sans cause. Nous proposons donc d’instaurer le même type de prélèvement et d’affecter son produit au fonds exceptionnel d’investissement outre-mer.
Le taux de cette taxe sera fixé par l’État en fonction des informations recueillies par la mission interministérielle et par la mission d’information parlementaire de l’Assemblée nationale.
Le sous-amendement n° 444, présenté par Mme Hoarau, M. Vera, Mme Beaufils, M. Foucaud et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le second alinéa du I de l'amendement n° 118 :
Le tarif de cette taxe est fixé par l'État, en concertation avec les collectivités locales.
La parole est à Mme Gélita Hoarau.
Les profits de l’industrie pétrolière, depuis plusieurs années, sont indécents.
La situation de monopole en matière de distribution de produits pétroliers en outre-mer vient encore renforcer cet effet de prédation.
Les mouvements sociaux qui se sont amplifiés en Guadeloupe, en Martinique et à la Réunion ont largement fait l’écho des prix trop élevés à la pompe et des profits scandaleux des opérateurs de ce secteur.
En plus de favoriser l’autonomie énergétique des territoires, notamment par le développement de l’éolien, du solaire ou de la biomasse, nous devons nous attacher, dans un principe de justice sociale, à taxer les profits exorbitants de ces sociétés, comme la SARA aux Antilles-Guyane ou la SRPP à la Réunion.
Nous appuyons donc la proposition du groupe socialiste, visant à prélever une partie des profits pour abonder le fonds exceptionnel d’investissement.
On comprend facilement l’objet de cet amendement, qui est de prélever une taxe exceptionnelle sur les profits exceptionnels, dont le produit serait utilisé à d’autres fins utiles dans les départements d’outre-mer.
La commission estime que la création d’une taxe exceptionnelle pesant sur les entreprises de première transformation risquerait de conduire à une augmentation des prix.
Comme vous le savez, ce sujet fait l’objet actuellement d’une réflexion. Il fait partie des points importants qui seront abordés prochainement par une mission sénatoriale sur l’outre-mer qui vient d’être mise en place, ainsi que par les États généraux de l’outre-mer.
La commission a émis un avis défavorable sur l’amendement n° 118, qui ne lui semble pas opportun, ainsi que sur le sous-amendement n° 444 tendant à le compléter.
À titre personnel, je suis favorable à cet amendement, car la formation des prix de l’essence aux Antilles et à la Réunion soulève un certain nombre d’interrogations.
On ne peut se plaindre à la fois de la faillite de certaines entreprises et des profits réalisés par d’autres. C’est plutôt une bonne nouvelle d’avoir des grandes entreprises, y compris pétrolières, qui dégagent des bénéfices !
J’essaie d’avoir un discours équilibré !
Le Gouvernement a mis en place au mois de décembre dernier une mission interministérielle d’inspection sur la formation des prix des carburants outre-mer.
Dans son rapport, qui fera l’objet d’une publication prochainement, il est indiqué que certaines entreprises – comme celle que vous avez citée, madame la sénatrice, et qui est bien connue aux Antilles – dégagent des marges substantielles.
Des entreprises, comme la SARA, nous ont expliqué qu’elles avaient été structurées de façon à ne pas avoir la taille suffisante pour survivre. Quand on voit les marges, entre 18 millions et 50 millions d’euros, qu’elles dégagent, on peut se demander ce que seraient leurs critères de rentabilité ! Telle est la réalité !
À des fins de régulation, les formules d’établissement des prix de l’essence sont, pour l’instant, fixes.J’aspire à les transformer, à faire évoluer le dispositif, à permettre le prélèvement d’une partie des marges.
Mais, ne l’oublions pas, les marges – celle de la SARA représente deux centimes par litre d’essence vendu – sont partiellement répercutées dans les prix payés par le consommateur.
J’aspire à ce que ces marges puissent venir abonder soit le fonds exceptionnel d’investissement, soit un fonds de formation professionnelle, comme nous l’avions évoqué ensemble.
Je crains que, si nous adoptions aujourd’hui cet amendement en l’état, l’entreprise ne fasse financer la taxe par le consommateur en augmentant le prix de l’essence.
Je souhaite donc que cet amendement soit réexaminé, peut-être lors de la discussion du projet de loi de finances, une fois que nous aurons mis à plat le système de formation du prix de l’essence, dans une transparence totale voulue par le Gouvernement.
Nous devons, d’abord, engager des discussions sérieuses, et peut-être difficiles, avec les pétroliers, pour voir comment le passé peut être soldé dans de bonnes conditions.
Nous pourrions, ensuite, prévoir ce prélèvement, tout en nous assurant qu’il ne soit pas à la charge du consommateur, ce qui serait, vous l’avouerez, quelque peu antinomique avec l’objectif visé.
Pour être complet, je précise que, actuellement, le prix de l’essence, hors taxes, aux Antilles est inférieur à celui pratiqué en métropole, puisque le litre de super hors taxes s’élève à 54 centimes en Martinique et en Guadeloupe et à 60 centimes en Guyane.
On le voit, les dérives constatées l’année dernière sont en train de se corriger.
Pour me résumer, je donne aujourd’hui, au nom au Gouvernement, un avis défavorable à cet amendement, dans les modalités qui sont proposées, au motif qu’il présenterait beaucoup plus d’inconvénients que d’avantages et aboutirait à un résultat inverse à ce qui est souhaité.
Mais, à titre personnel, je maintiens que cet amendement, dont l’objet devrait être partagé sur l’ensemble de ces travées, pourrait être réexaminé lors de la discussion du projet de loi de finances, dès lors que nous y verrons plus clair et, surtout, que nous aurons un système devenu sain.
Au nom du Gouvernement, je suis donc défavorable à l’amendement n° 118 et, par voie de conséquence, au sous-amendement n° 444 qui s’y rattache, mais très favorable à l’idée de ne pas lâcher cette affaire.
Monsieur le rapporteur, tout d’abord, je vous rappelle que l’aide à la cuve n’a pas été suivie d’une flambée des prix.
Ensuite, cet amendement, s’il était adopté, permettrait d’encadrer la formation des prix des produits pétroliers. Par conséquent, l’argument que vous avez avancé à ce sujet ne tient pas.
Monsieur le secrétaire d’État, vous nous dites que l’amendement est vertueux, mais qu’il ne serait pas opportun de l’appliquer dès maintenant parce qu’il conduirait à une flambée de prix.
Permettez-moi de vous répondre que, si nous en avons la volonté, nous pourrions encadrer la formation des prix. Par conséquent, rien ne nous empêche de voter cet amendement aujourd’hui, dans l’intérêt des consommateurs notamment guadeloupéens.
Comme vous l’avez dit, nous avons eu des discussions au sujet de la SARA, lors de la semaine où vous étiez en Guadeloupe. La Réunion sera également concernée par le problème.
Cet amendement, s’il était adopté, serait un signal fort du Sénat en direction des sociétés monopolistiques pétrolières afin que cesse leur « profitation ».
S’agissant de la SARA, je considère, pour ma part, qu’une grosse opération doit être réalisée. Nous ne pouvons nous contenter de bricoler.
En 2000, le conseil régional de la Guadeloupe a adressé au secrétaire d’État à l’outre-mer un rapport qui dénonçait une situation scandaleuse au sujet de cette société.
Il indiquait que l’essence était raffinée en Martinique et distribuée en Guadeloupe, et qu’il n’y avait pas de raffinement de l’essence sur les îles de Marie-Galante, où l’on faisait payer aux usagers le traitement de l’essence.
Par ailleurs, la Guadeloupe payait l’octroi de mer sur l’essence et la SARA vendait du carburant aux distributeurs avec un taux d’octroi de mer à 100 %, sans tenir compte de l’évaporation, alors que cette même société bénéficiait, notamment de la part de la région Guadeloupe, d’une exonération de l’octroi de mer sur l’évaporation. Puis la Guadeloupe a vu s’installer sur son territoire une multiplicité de cuves sur lesquelles elle n’exerçait aucun contrôle.
Enfin, j’en viens au prix normal d’importation, ou PNI, qui permet de fixer le prix de l’essence. Or, la douane en Guadeloupe a été dans l’incapacité de nous indiquer le prix d’importation par hectolitre. En effet, alors qu’il s’élève à 44 000 euros en Guyane, il atteint 64 000 euros en Guadeloupe et en Martinique !
Compte tenu de tous ces éléments, mon cher collègue Jacques Gillot, et je soutiens votre amendement, ne croyez-vous pas que le moment est venu de tout mettre à plat dans ce secteur ?
Il convient d’ajouter que la SARA compte au moins deux cent cinquante employés en Martinique et cinquante en Guadeloupe. Ce sont les Guadeloupéens qui paient les employés, le logement et le fonctionnement de la société en Martinique, sans aucune péréquation.
Je suis en mesure de citer encore d’autres éléments, car la Guadeloupe a mené des combats pendant dix ans contre la fixation nébuleuse des prix du carburant.
Nous les avons découverts ensemble, monsieur le secrétaire d’État, et je tiens à le souligner devant la Haute Assemblée, vous avez eu le courage de crever l’abcès.
Je n’ignore pas que des mesures de rétorsion ont déjà été prises par la SARA à l’encontre de certaines entreprises de la Guadeloupe.
Mais la Haute Assemblée doit aller jusqu’au bout de ce dossier, parce que toute l’économie des départements et collectivités d’outre-mer est liée au problème du carburant.
Ce serait peut-être le moment, mes chers collègues, de décider de la création d’une société d’économie mixte, avec une participation de nos collectivités locales au sein de la SARA, afin de nous permettre de gérer nous-mêmes les prix du carburant, qui conditionnent la vie économique chez nous.
Je le répète, je soutiens l’amendement de M. Gillot, tout en soulignant la nécessité de réaliser ensemble une vaste opération dans l’intérêt de nos départements.
Nous avons connu, à Mayotte, ce problème de carburant. À l’époque, c’était l’armée qui nous approvisionnait et non pas une société pétrolière.
Nous avons aujourd'hui un opérateur, la société Total, désigné à la suite d’un appel d’offres lancé voilà trois ans. Le contrat passé avec cette compagnie pose comme condition que les stations-service desservies puissent embaucher du personnel au lieu de recourir à la formule du libre-service.
Ne pourrait-on généraliser ce moyen pour essayer de diminuer le chômage ?
Le groupe socialiste soutient pleinement cet amendement.
Monsieur le secrétaire d’État, vous nous avez dit qu’il fallait rechercher une solution d’équilibre. Mais, si l’on met en place un dispositif de taxation visant à faire payer plus les consommateurs, la mesure ne servira à rien.
Ce raisonnement ne vaut que si les lois du marché sont appliquées. En revanche, s’il y a une situation de monopole, comme plusieurs intervenants l’ont souligné, un tel raisonnement ne tient plus, et il appartient aux autorités de régulation de trouver les règles permettant d’instaurer un juste équilibre.
Tel est le fond du problème. On voit bien aujourd’hui que la SARA réalise des profits substantiels.
Total, la société mère, jouit aujourd’hui d’une situation excessivement florissante, au point qu’il serait légitime de lui demander de rembourser un certain nombre d’aides publiques qui lui ont été octroyées. Des profits de 14 milliards d’euros, le chiffre est considérable !
Mais nous discutons en ce moment d’une problématique plus locale. Si nous ponctionnons partiellement les bénéfices de la SARA, qui s’élèvent à 60 millions d’euros, et si nous instituons une régulation et un contrôle satisfaisants de la part des autorités publiques, le consommateur ne sera pas amené à supporter le coût de cette mesure en dernier ressort.
La SARA est en situation de monopole et nous pouvons très légitimement prétendre la soumettre à un contrôle afin de répondre aux exigences du présent et doter le fonds exceptionnel d’investissement outre-mer de ressources supplémentaires.
Cet amendement est tout à la fois raisonnable dans le contexte actuel et légitime du point de vue économique, car les entreprises visées jouissent d’une situation de monopole.
Je voudrais éviter toute confusion.
Le raisonnement tiendrait si le prix des carburants n’était pas administré.
Si cet amendement est voté aujourd’hui et si une taxe est prélevée sur la SARA, elle sera automatiquement répercutée sur les prix à la pompe, tant que nous n’aurons pas changé le système d’administration des prix – nous sommes en train de le faire, mais il faut bien respecter une certaine méthode.
Il ne suffit pas de déposer des amendements !
S’il est adopté, cet amendement aura donc pour résultat, demain, l’inverse de ce que souhaitent ses auteurs, compte tenu de la réglementation en vigueur, qui n’est pas bonne, mais que l’actuel gouvernement n’a pas inventée – aucun des groupes présents dans cette assemblée ne l’a remise en cause pendant les quinze dernières années. Nous avons donc tous notre part de responsabilité dans la situation actuelle : la SARA existe depuis longtemps et Lucette Michaux-Chevry a rappelé qu’elle avait remis à Christian Paul un rapport, resté sans suites, sur les dérives de cette société. Ne faisons donc pas de cette question un combat politique !
Je propose d’agir avec méthode.
La mission d’inspection, au terme d’un travail de quatre mois, nous rend son rapport. Un comité de suivi du prix de l’essence a été mis en place ; les présidents des collectivités départementales et régionales y participent, ainsi que les maires et des représentants de l’intergroupe parlementaire. Nous allons prendre des décisions pour mettre fin au système actuel dans lequel le préfet administre les prix.
Mais, si cet amendement était adopté aujourd’hui, la taxe qu’il a pour objet de créer serait, en vertu de la réglementation actuelle, immédiatement prélevée dans la poche du consommateur, car le préfet serait obligé d’appliquer la formule – je ne la développerai pas maintenant parce qu’elle est complexe – qui permet à la SARA de répercuter automatiquement et en toute légalité cette taxe sur ses prix, donc sur les prix à la pompe.
Permettez-moi d’observer qu’il n’est pas si fréquent qu’un membre du Gouvernement suive aussi attentivement les débats. Jacques Gillot et ceux qui soutiennent son amendement ont raison de dénoncer la situation actuelle, mais, si nous agissons sans méthode, nous risquons d’obtenir le résultat inverse de celui qui est ici recherché.
Le souhait du Gouvernement, une fois que le rapport de la mission d’inspection sera publié, est de définir, en concertation avec la commission de suivi, un nouveau mode de fixation des prix qui pourrait, je l’espère, être opérationnel avant l’été. Une fois que la contrainte du prix administré sera levée, nous pourrons alors faire évoluer le monopole et envisager une taxation, afin qu’une partie des bénéfices des sociétés pétrolières soit réinvestie outre-mer.
Je suis favorable au principe d’une telle mesure mais, si elle était adoptée aujourd’hui – bien que je comprenne le souhait des élus d’outre-mer de revenir avec ce trophée, car ce sujet était au cœur de la crise que nous venons de traverser –, elle aurait pour effet paradoxal de faire augmenter les prix des carburants dans les semaines qui viennent, sans que nous puissions agir contre !
M. François Marc manifeste sa désapprobation.
Vous n’avez pas l’air de me croire, monsieur le sénateur, mais faites-moi la grâce d’admettre que je me suis plongé dans ce dossier comme personne ne l’avait fait depuis des années : nous sommes en train de soulever des questions que personne n’a jamais posées. Nous sommes animés par une vraie volonté de transparence absolue et de remise à plat du système. Cependant, si nous agissons sans méthode, non seulement nous en subirons les conséquences, mais tout le combat mené en commun pour imposer la transparence et trouver des réponses aura été vain si les consommateurs s’aperçoivent que le prix de l’essence augmente et que le prélèvement imposé à la SARA ne change rien à son fonctionnement. En somme, nous aurons tout chamboulé pour rien !
Prenons le temps de changer le mode d’administration des prix et, d’ici à l’été, nous introduirons une taxation, soit par la négociation, soit par une loi de finances rectificative – si je l’ai évoquée, c’était pour bien montrer ma volonté de ne pas renvoyer le règlement de cette question aux calendes grecques – en ayant soigneusement soupesé les avantages et les inconvénients des solutions possibles pour choisir in fine la plus juste.
Je tiens à vous convaincre de ma sincérité dans ce combat : je ne veux protéger personne ! Je me réjouis que les compagnies pétrolières ne soient pas en faillite et réalisent des bénéfices, mais je pense aussi que, lorsqu’un tel niveau de rentabilité est atteint, les bénéfices doivent être partagés pour que chacun s’y retrouve.
J’ajoute enfin que la SARA occupe quatre cents salariés en Martinique.
Il faut aussi y penser afin que toute évolution imposée à cette société prenne en compte l’aspect social de la situation : je ne voudrais pas que certains petits malins profitent de la création d’une nouvelle taxe pour justifier un plan social. L’actualité récente nous montre suffisamment d’exemples de cette nature…
On peut le regretter et pousser des cris d’orfraie, mais cela arrive !
Avec de la méthode, du consensus et de la transparence, nous serons plus efficaces que si chacun essaie de jouer tout seul sa propre carte, sans cohérence. Ce dossier représente l’une des préoccupations majeures du Gouvernement, qui vous assure de sa volonté d’avancer en toute transparence.
L’adoption de cet amendement, si elle exprime une revendication que j’ai bien entendue, risquerait d’aboutir, je le répète, à un résultat contraire à celui qui est visé.
Mesdames, messieurs les sénateurs, les propos que j’ai tenus sur cette question démontrent que nous sommes tout à fait en phase et que nous partageons la volonté de progresser dans le même sens. Alors, faisons-le avec méthode !
Je m’associe, au nom de la Guyane, aux propos tenus par Lucette Michaux-Chevry et par Jacques Gillot, sénateurs de la Guadeloupe. J’ajouterai deux observations.
En premier lieu, il faut compléter cette analyse, en ce qui concerne la Guyane, par la prise en compte du coût du transport entre la Martinique et la Guyane.
En effet, le coût du transport entre la Martinique et la Guadeloupe est assumé par l’ensemble des consommateurs martiniquais et guadeloupéens. En revanche, les consommateurs guyanais supportent seuls le coût du transport entre la Martinique et leur département.
En second lieu, je voudrais revenir sur le concept même de prix administré, qui ne peut se réduire, monsieur le secrétaire d’État, à suivre de manière linéaire l’évolution des coûts. Il s’agit également de contrôler les différentes données qui entrent dans la détermination de ces coûts. Or ce travail n’a pas été réalisé de manière satisfaisante par les services déconcentrés de l’État, d’où les conclusions des divers rapports.
La logique du prix administré consiste, d’une part, à vérifier quel est le vrai prix et, d’autre part, à établir le niveau du juste prix. Si nous considérons que le juste prix est inférieur au vrai prix, compte tenu de l’étroitesse du marché, il s’agit de déterminer qui doit payer la différence pour que l’économie puisse fonctionner normalement. En l’occurrence, il me semble que nous n’avons jamais appliqué le véritable prix administré.
M. Jean-Paul Virapoullé. Cet amendement est bon, mais le contexte législatif et réglementaire nous est hostile. La réglementation sur les prix des hydrocarbures en vigueur date du Moyen Âge, ou presque
Sourires
Dans ces conditions, deux hypothèses sont à envisager : soit nous votons contre cet amendement parce que, bien que nous soyons favorables à l’idée, le contexte ne s’y prête pas ; soit, après cette discussion, ses auteurs le retirent. Je souhaiterais que nous parvenions à un consensus en faveur du retrait, car il ne serait pas bon que nos collègues subissent un vote négatif.
J’ai été désigné par l’intergroupe parlementaire pour siéger à la commission sur les produits pétroliers – elle s’est réunie lundi, en présence de M. le secrétaire d’État et des représentants des quatre départements d’outre-mer. Cette réunion m’inspire plusieurs réflexions.
En premier lieu, les compagnies pétrolières sont, plus que des citadelles, quasiment des États dans l’État. Nous ne pourrons pas fonder le dialogue avec elles sur des illusions – mes illusions se sont totalement évanouies, mais mes convictions sont renforcées. Nous devrons nous armer d’arguments pour que, soit par l’application du droit européen de la concurrence, soit par une législation qui reste à forger – il y faudra du temps, monsieur le secrétaire d’État, et l’année 2009 n’y suffira pas, à mon avis –, nous parvenions à mettre en place un dispositif de vérité et de transparence des prix dans ce secteur.
En second lieu, les données, telles qu’elles nous ont été présentées, sont complexes et diverses : il existe non pas une série de données mais plusieurs. Prenons l’exemple de l’approvisionnement : pourquoi la SARA s’approvisionne-t-elle en pétrole brut acheté à Rotterdam, alors que la région compte de nombreux producteurs de pétrole ? Voilà une question à éclaircir, que le rapport des experts que nous avons entendus n’aborde pas : ils ont simplement justifié cette source d’approvisionnement par le fait que le pétrole vendu sur le marché de Rotterdam était conforme aux normes européennes. C’est une blague ! Le pétrole brut, lorsqu’il jaillit, n’est pas aux normes européennes ou aux normes mondiales ! Il va donc falloir clarifier cette question, car nous ne pourrons plus nous satisfaire de justifications aussi fantaisistes.
Il faut également prendre en compte d’autres paramètres, la raffinerie, les procédures d’achat, les marges, le trading, etc. Si nous prenons donc le temps, mes chers collègues, de créer les conditions d’un consensus général et de nous rassembler au-delà des clivages politiques – nos forces ne suffiront peut-être pas forcément à la tâche – nous parviendrons peut-être à établir la transparence et la vérité dans ce dossier. Ce n’est qu’ensuite que nous pourrons définir le remède pour imposer un prix compatible avec les normes du marché et les souhaits de la population.
Je serais gêné de voter contre cet amendement, car cela signifierait que je ne suis pas d’accord avec ses auteurs, mais, si je vote pour, j’apporte de l’eau au moulin de ces compagnies qui nous exploitent !
Nous devrions donc trouver aujourd’hui un consensus pour dire au Gouvernement : banco ! Puisqu’il nous propose de relever un défi, qu’il nous communique les données, comme l’a dit Lucette Michaux-Chevry, pour que nous nous fassions une opinion sur cette question complexe. Quand nous aurons tout remis à plat, nous pourrons nous armer législativement et réglementairement pour remettre de l’ordre dans ce dossier dont la valeur symbolique est considérable. La « profitation » existe, notamment dans ce domaine : si nous voulons y mettre fin, nous devons nous donner les moyens d’une réflexion approfondie !
Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.
Je souhaitais formuler deux observations. La première portait sur le fond, mais notre collègue Virapoullé l’a déjà exposée avec brio, je n’y reviendrai donc pas. La seconde porte sur la forme.
Monsieur le secrétaire d’État, vous nous avez dit tout à l’heure que vous exprimiez un avis personnel avant de nous donner l’avis du Gouvernement. Non ! Au Sénat, seuls les sénateurs peuvent émettre un avis personnel. Le représentant du Gouvernement n’exprime que l’avis du Gouvernement. Vos propos ont entraîné une certaine confusion : il faudra y remédier !
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Depuis le début de cette discussion sur le développement économique de l’outre-mer, nous butons sur la question de la formation des prix. M. le secrétaire d’État a pris des engagements au nom du Gouvernement : il va vraiment falloir créer outre-mer des brigades spéciales au sein de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes
M. Jean-Paul Virapoullé applaudit
, et veiller à ce que leurs agents ne fassent pas carrière trop longtemps dans ces territoires !
Applaudissements
Cependant, monsieur Gillot, ce n’est pas en créant une taxe supplémentaire que vous allez régler la question. François Marc est venu à votre secours, mais c’est vraiment la fausse bonne idée : si vous multipliez les taxes, vous ne faites qu’accroître le prix demandé au consommateur. Et vous êtes pris dans une fuite en avant qui conduira à un système économique dans lequel, demain, seuls gagneront de l’argent ceux qui mettent sur le marché et ceux qui sont agents de la fonction publique. Tous ceux qui produisent auront disparu, et tout cela se traduira par des déficits publics, du moins aussi longtemps qu’il y aura des personnes prêtes à les financer !
De grâce, sortons de cette chimère et renoncez à votre amendement, mon cher collègue.
Je comprends les arguments du Gouvernement, et M. Virapoullé les a bien résumés : oui sur le principe ; non dans le contexte et alors que nous ne disposons pas des résultats de toutes sortes de travaux en cours. J’ai entendu également Mme Michaux-Chevry, qui pointe du doigt le problème essentiel, dont nous avons débattu il y a à peine deux jours : la situation monopolistique.
Je comprends aussi les arguments du président de la commission des finances quand il nous dit qu’il faut des brigades d’agents de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes. Mais notre collègue Joël Bourdin a raison de rappeler aussi que le Gouvernement doit parler d’une seule voix, car, en l’occurrence, il ne faudrait pas que, concomitamment, on assiste à un démantèlement de la DGCCRF, qui est tout de même, en matière d’enquête sur des fraudes, le principal acteur sur le terrain. Voilà pourquoi je comprends tout à fait nos amis qui défendent cet amendement.
Je tiens à ajouter que la société de raffinage dont nous parlons est la filiale d’un grand groupe. Je ne veux pas ouvrir de polémiques inutiles sur les bénéfices ou sur la situation de l’emploi de cette entreprise, mais on pourrait le faire. Je me contenterai de faire observer qu’une filiale participe à la consolidation des bénéfices de sa holding.
L’État a les moyens de compenser l’éventuelle hausse de prix consécutive à la répercussion, sur le consommateur, de la taxe envisagée, d’autant plus qu’il taxe lui-même les carburants. Il y a donc des solutions.
Enfin, monsieur le secrétaire d’État, j’ai bien compris qu’un travail était en cours et qu’il ne serait achevé que dans quelques semaines. Mais le présent texte, bien que l’urgence ait été déclarée, passera devant l’Assemblée nationale. Dans cette perspective, le vote de l’amendement de notre collègue Jacques Gillot permettra de prolonger au Palais-Bourbon le débat sérieux que nous avons ce matin.
Je pense que cette affaire du prix du carburant a été un élément central et déclencheur de la lutte menée sur le terrain. Pendant plusieurs semaines, des personnes ont dit : « Ça suffit ! ». §Et nous souhaiterions, à travers cet amendement, leur adresser un message. Vous avez raison, monsieur le président de la commission des finances, de dire que cela ne règle pas le problème, mais permettez que nous défendions cette position.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, je crois que nous sommes unanimes dans cette assemblée à reconnaître le bien-fondé et la légitimité de l’amendement de notre collègue Jacques Gillot. Cependant, lorsque j’écoute les débats et que je lis le texte de l’amendement, je m’interroge : s’agit-il de suivre la formation des prix avec comme objectif avoué de les faire baisser ou bien d’abonder le fonds exceptionnel d’investissement ?
S’il s’agit de faire baisser les prix, je pense que l’instauration d’une taxe n’est pas la solution pertinente. S’il s’agit d’abonder le fonds exceptionnel d’investissement, je crois qu’il faudrait être beaucoup plus clair et préciser dans l’amendement que la taxe en question doit s’appliquer exclusivement sur les profits réalisés, ce qui n’est pas dit dans la rédaction actuelle. Car, si la taxe intervient dans le processus de formation des prix, elle contribuera forcément à une augmentation des prix à la pompe, et sera donc supportée par le consommateur. Si, en revanche, elle intervient a posteriori sur les bénéfices, il me semble que le consommateur n’en fera pas les frais.
Ces questions ont suscité un long débat, et elles le méritaient.
Monsieur Bourdin, je suis désolé que vous ayez vu de la confusion dans un propos qui n’avait précisément d’autre ambition que la clarté. Je me suis appuyé sur ce que j’ai pu entendre aux Antilles lors de mes nombreux déplacements, ainsi que sur les travaux de la mission, qui nous ont aidés à mieux appréhender ce dossier extraordinairement complexe. Cette complexité et cette opacité expliquent d’ailleurs sans doute que, depuis plus de trente-cinq ou quarante ans que la SARA et ces pratiques existent, personne n’a changé le système.
C’est ce qui justifie la méthode qu’a employée le Gouvernement, en menant tout d’abord une mission d’inspection. De plus, je confirme que j’ai saisi la Haute Autorité de la concurrence, pour qu’elle travaille elle aussi sur ce sujet et me remette, en toute indépendance, ses conclusions avant l’été.
Éclairés de ces deux avis, nous pourrons alors mettre en place les meilleurs dispositifs possibles pour aller dans le sens souhaité par tous : un approvisionnement fluide de l’outre-mer en carburant, à un prix tout à fait raisonnable pour le consommateur. Je rappelle, d’ailleurs, qu’aujourd’hui le prix du carburant aux Antilles, en tout cas en Martinique et en Guadeloupe, est inférieur à celui qui est pratiqué en métropole, ce dont nous ne pouvons que nous réjouir. Voilà pourquoi je ne voudrais pas qu’une initiative de notre part vienne changer la donne, car cela ne serait pas compris.
Je comprends évidemment parfaitement que Jacques Gillot défende son amendement avec toute sa conviction, mais il doit pouvoir reconnaître que le Gouvernement met, de son côté, toute sa force pour faire la transparence dans cette affaire complexe de la formation des prix de l’essence, et pour agir avec méthode tout en respectant un calendrier raisonnable.
J’espère qu’après ce long débat le Parlement et, au-delà, nos compatriotes d’outre mer seront éclairés sur la volonté des uns et des autres, et sur l’ambition que je crois commune d’aller dans le sens d’un progrès.
Comme dans une autre vie j’ai dirigé l’administration du contrôle des prix, je voudrais dire que la vraie solution à ce problème est l’ouverture à la concurrence de ce marché captif. C’est votre seul argument de négociation sérieux avec Total et ses filiales, monsieur le secrétaire d’État. Vous devez leur dire que nous allons ouvrir le marché, que l’on pourra introduire des produits raffinés, de l’essence super ou du gazole, dans des conditions tout à fait normales.
C’est la raison pour laquelle, avec mes collègues du groupe UMP, à l’exception peut-être de Mme Michaux-Chevry, dont je respecte la position, nous ne voterons pas l’amendement de M. Gillot, si jamais il le maintenait.
Mes chers collègues, la création d’une taxe dans un système monopolistique ne peut avoir qu’un effet de majoration des prix. L’objectif dans la négociation entamée et dans la remise à plat qui est réclamée de toutes parts est d’ouvrir à la concurrence les Antilles, la Réunion et la Guyane, qui ne doivent pas rester des marchés captifs. C’est à cette condition que l’on pourra avoir une régulation et une baisse des prix.
Je suis d’accord avec M. le secrétaire d‘État pour dire qu’il faut une méthode. Nous prévoyons d’ailleurs dans notre argumentaire que le taux de la taxe sera fixé par l’État, en fonction des informations recueillies par la mission interministérielle et par la mission d’information parlementaire de l’Assemblée nationale.
Nous avons ici même voté un certain nombre de dispositions pour le présent projet de loi lors de la discussion de la loi de finances pour 2009. Nous avons notamment mis en place plusieurs dispositifs pour la défiscalisation ainsi que les zones franches d’activités, avant même qu’elles ne soient créées. Nous avons de même voté un certain nombre de dispositions pour ce fonds exceptionnel d’investissement, avant même qu’il n’existe. Et nous étions d’accord pour dire qu’il s’agissait de donner un signal fort à nos entreprises.
C’est ce que je voudrais faire encore aujourd’hui. Je souhaite adresser un signal fort en disant que la SARA est effectivement dans une situation monopolistique et que les gouvernements successifs n’ont pas pris en charge ce dossier, ce que le secrétaire d’État chargé de l’outre-mer, M. Jégo, a eu le courage de le reconnaître lors de son passage en Guadeloupe.
Il serait dommage de retirer mon amendement uniquement pour des raisons techniques, alors que cette taxe est juste par rapport à la « profitation » de la SARA. Aussi, monsieur le président, je préfère subir le vote négatif de mes collègues plutôt que de renoncer à adresser, comme il convient de le faire en certaines occasions, des signaux forts aux acteurs, sur le terrain, quitte à mettre des bémols à certains moments.
Je maintiens donc mon amendement.
Le sous-amendement n'est pas adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 119, présenté par MM. Gillot, S. Larcher, Lise, Patient, Antoinette, Tuheiava et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 16, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l'article 31-1 du code minier, il est inséré un article ainsi rédigé :
« Art. ... - Pour la zone économique exclusive ou le plateau continental français au large des régions d'outre-mer, une redevance spécifique, due par les titulaires de concessions de mines hydrocarbures liquides ou gazeux, est établie au bénéfice de la région d'outre-mer concernée.
« Le barème de la redevance spécifique est, à compter du 1er janvier 2010, établi selon les tranches de production annuelle prévues à l'article 31, le taux applicable à chaque tranche étant toutefois fixé par le conseil régional, dans la limite des taux prévus audit article. »
La parole est à M. Georges Patient.
Cet amendement vise à instaurer une redevance due par les titulaires de concessions de mines hydrocarbures liquides ou gazeux, au profit de la région outre-mer concernée.
En effet, des permis exclusifs de recherche de mines hydrocarbures ont été délivrés pour des activités sises dans la zone économique exclusive au large des départements français d’Amérique, conduisant à prendre en compte la perspective de l’existence de ressources hydrocarbures exploitables au large de ces régions. Dans ce cas, le code minier prévoit le paiement d’une redevance progressive, mais il précise qu’elle ne s’applique pas aux gisements en mer. Dans l’hypothèse de l’exploitation de telles mines, cette disposition a pour effet de priver les collectivités régionales d’outre-mer de toute participation au produit de l’exploitation, laquelle bénéficierait par ailleurs d’un régime fiscal anormalement avantageux par rapport à celui qui est généralement appliqué dans les situations comparables.
L’amendement a pour objet d’étendre aux régions d’outre-mer, notamment à la Guadeloupe, à la Guyane et à la Martinique, le dispositif spécifique qui avait été adopté par le législateur en faveur de Saint-Pierre-et-Miquelon dans le cadre de la loi de finances pour 1999.
Nous venons d’avoir un débat approfondi sur les hydrocarbures. Pour les raisons de méthode déjà explicitées, et dans la perspective du travail que nous allons mener dans les semaines et les mois qui viennent, la commission est défavorable à cet amendement.
Je voudrais dire au président de la commission des finances, pour en revenir au contrôle des prix, à la DGCCRF et au contrôle en général, qu’il ne faudrait pas en profiter pour former des brigades supplémentaires. Bien souvent, en effet, les contrôleurs passent du temps sur des broutilles au niveau national, effectuent des contrôles qui ne sont pas toujours nécessaires au niveau des collectivités locales et des sociétés, en exigeant des brouettées de documents. Quand, à certains endroits, le contrôle est vraiment nécessaire et qu’il est difficile, en général, on n’y va pas et, quand c’est facile, on y va ! J’aimerais bien que l’on réoriente un peu les contrôleurs sur de vrais sujets.
Le Gouvernement partage l’avis de la commission.
Les ressources des collectivités d’outre-mer sont vraiment l’un des sujets des États généraux. Il doit s’inscrire dans le débat plus général de la gouvernance des collectivités, de la forme de responsabilité qui doit leur être accordée. Ce sera l’occasion d’aborder ces questions.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 120, présenté par MM. S. Larcher, Lise, Gillot, Patient, Antoinette, Tuheiava et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 16, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. L'article 44 de la loi n° 2004-639 du 2 juillet 2004 relative à l'octroi de mer est abrogé.
II. La perte de recettes résultant pour l'État de la suppression du prélèvement pour frais d'assiette et de recouvrement sur le produit de l'octroi de mer, est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Serge Larcher.
Mon amendement vise à supprimer la part que l’État récupère sur l'octroi de mer pour gestion et frais de fonctionnement de cette taxe.
L’octroi de mer est un dispositif qui assure une fonction complexe en termes de ressources locales, de soutien à la production et d’autonomie fiscale.
C’est une taxe sur les produits, une taxe spécifique, propre aux départements d’outre-mer et dont les conseils généraux fixent les taux. Son produit alimente, à titre principal, les budgets des communes des départements d’outre-mer, ainsi que celui du département de la Guyane. Les budgets des régions sont également, depuis 1994, bénéficiaires du droit additionnel à l’octroi de mer.
On sait que l’octroi de mer et le droit additionnel constituent des ressources financières essentielles pour les petites collectivités, ainsi que pour les entreprises locales que les régions peuvent soutenir grâce à ces exonérations totales ou partielles qui compensent les handicaps structurels des DOM : éloignement, insularité, petitesse du marché, chômage, environnement concurrentiel des voisins, et j’en omets.
Conformément à l’article 44 de la loi du 12 juillet 2004 relative à l’octroi de mer, l’État a la possibilité de percevoir des frais d’assiette et de recouvrement pour ses opérations sur l’octroi de mer d’un pourcentage inchangé de 2, 5 % du montant procuré par l’octroi de mer.
Or, en réduisant la part des frais d’assiette et de recouvrement, on augmentera la part de l’octroi de mer effectivement utilisée pour ces publics.
Monsieur le secrétaire d'État, vous allez certainement dire, comme hier, que c’est une petite affaire. Je vous répondrai par un proverbe créole : « Sé grenn di ri ou ka plen sac di ri », autrement dit : « Ce sont les petites économies qui font les grandes fortunes ».
Sourires
La fortune, nos communes en ont grand besoin pour payer les salaires. Vous le savez, les communes ont commencé, conformément à la loi, une opération de régularisation des personnels non titulaires, ce qui coûte très cher, d’autant qu’il y a un bonus de 40 %. Donc, il est très important que nous soyons suivis sur cette question.
Il serait aussi intéressant de connaître exactement ce que coûtent à l’État les frais de gestion de l’octroi de mer - frais d’assiette et de recouvrement -, afin de comparer ce coût aux prélèvements effectués par l’État sur le produit de cette taxe.
Nous comprenons bien la philosophie de cet amendement, déjà développée dans les amendements précédents qui visaient à créer une taxe pour financer la région. Là, il s’agit de supprimer une taxe pour permettre à la région de réduire ses charges.
En effet, mais la finalité est la même : il s’agit de permettre aux collectivités d’avoir, d’un côté, moins de charges et, de l’autre, plus de recettes.
La commission n’est pas favorable à cet amendement. Un large débat va avoir lieu sur l’octroi de mer, et la proposition que vous formulez, cher collègue, pourra être examinée à cette occasion.
D’abord, je rappellerai que cette taxe sur l’octroi de mer a été ramenée de 4 % à 2 %. Ensuite, l’octroi de mer fait partie des sujets majeurs qui seront examinés lors des États généraux puisque, selon Bruxelles, il faudra, en 2014, se poser la question de son devenir.
Permettez-moi à mon tour de citer un proverbe : « On n’achète pas chat en sac ».
Sourires
Comme la commission, le Gouvernement est défavorable à cet amendement, pour cette seule raison.
Monsieur Larcher, permettez-moi de vous poser une question : qui va percevoir et gérer l’octroi, si l’État ne le fait plus ? Le taux de la taxe sur l’octroi de mer était fixé à 4 %, il a été ramené à 2 %. Les fonctionnaires assermentés des douanes ont la possibilité de mener des investigations que le privé ne pourra pas faire. Ce ne sont pas les fonctionnaires de la région qui iront dans les ports contrôler l’arrivée des marchandises ou qui pénétreront dans les dépôts ou dans les magasins.
Or, en ce domaine, l’intérêt des collectivités, justement, c’est de ne pas perdre de ressources et de ne pas avoir de scandales liés à des problèmes de perception.
Je crois donc qu’il vaut mieux laisser à l’État le soin de percevoir cette taxe. Ainsi, nous sommes assurés de la bonne rentrée de nos recettes puisque, jusqu’à preuve du contraire, les douanes s’acquittent très sérieusement de leur tâche ; c’est d’ailleurs une vertu que nous devons leur reconnaître.
Monsieur le secrétaire d'État, nous aimerions savoir ce que coûtent à l’État les frais de gestion de l’octroi de mer. Je ne vous demande pas de me répondre aujourd'hui, mais peut-être pourrez-vous me faire parvenir un document sur ce sujet.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 121 rectifié, présenté par MM. Lise, Gillot, S. Larcher, Patient, Antoinette, Tuheiava et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 16, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
À compter de la promulgation de la présente loi, un prélèvement sur les sommes engagées dans les départements d'outre-mer dans les courses et les jeux mentionnés aux articles 919, 919 A, 919 B et 919 C du code général des impôts est créé au profit des conseils généraux des départements d'outre-mer.
Le taux est fixé à 10 %.
Ce prélèvement est assis, recouvré et contrôlé dans les mêmes conditions et sous les mêmes garanties et sanctions que les droits de timbre visés à ces articles.
La parole est à M. Claude Lise.
Cet amendement vise à accroître les ressources des collectivités d’outre-mer, notamment des conseils généraux.
Les propos que j’entends depuis un moment me montrent que certains de mes collègues ont du mal à comprendre les différences objectives qui existent entre les départements d’outre-mer et ceux de la métropole. Ainsi, je suis surpris en écoutant M. Doligé, un collègue par ailleurs bien sympathique, mais qui a tendance à considérer toutes nos demandes comme abusives en ne manquant pas de réclamer à chaque fois la parité pour les départements de l’Hexagone !
Cela témoigne, comme je l’ai dit dans la discussion générale, d’un certain aveuglement, d’une certaine surdité, qui expliquent d’ailleurs la situation dans laquelle nous nous trouvons aujourd'hui. Tant que l’on ne changera pas d’attitude, on aura les mêmes problèmes et l’on ne pourra pas bâtir de bonnes stratégies de développement pour les départements de l’outre-mer.
Je demande à mes collègues de faire les mêmes efforts que le secrétaire d'État chargé de l’outre-mer. Je n’ai pas pour habitude d’être complaisant dans mes relations avec les membres du Gouvernement en général et avec M. le secrétaire d'État en particulier, bien que nos rapports soient tout à fait cordiaux, mais je dois reconnaître qu’il est allé au contact des réalités et qu’il a le courage de dresser un certain nombre de constats. Je suis donc choqué que certains veuillent le museler. Mais, n’étant pas sûr de lui rendre service en disant cela, je ne m’étends pas sur le sujet !
Sourires
Je voudrais tout de même souligner que les conseils généraux d’outre-mer doivent faire face à des dépenses considérables, d’abord en investissements. Ces investissements, d’une manière générale, sont beaucoup plus importants que ceux, déjà très élevés, que réalisent les conseils généraux de l’Hexagone ; ils dépassent 80% à 85 %.
Certains de mes collègues se demandent si des moyens supplémentaires ne risquent pas de se traduire par un saupoudrage ; je les invite à se rendre sur place. Puisqu’il a été décidé de constituer une mission, ils pourront, à cette occasion, voir ce que nous faisons.
Lorsque je fais construire une usine d’eau potable à ultrafiltration, avec des technologies européennes, et que l’on vient la visiter de toute la Caraïbe, je ne crois pas que ce soit une réalisation secondaire.
Lorsque je fais réaliser un grand chantier pour un port de désenclavement dans le nord, cela peut avoir des conséquences importantes en matière de développement.
Lorsque le conseil général met au point un système d’étude et de suivi des catastrophes naturelles, qu’il veut en faire un pôle de compétitivité, cela prouve qu’il est actif et que l’aide qu’il demande pour continuer dans cette voie est légitime. Je le dis pour M. Fourcade qui tient à nous voir nous investir de plus en plus dans les technologies nouvelles. Nous le faisons, cher collègue, et je vous invite à venir sur place voir les initiatives que nous prenons et qui sont trop souvent ignorées ici.
Outre l’investissement, il y a aussi le fonctionnement, et tous les problèmes sociaux que nous avons à prendre en charge compte tenu de la situation locale. Je rappelle que les taux de chômage sont, outre-mer, deux à trois fois plus importants qu’en métropole, que le nombre de RMIstes y est cinq fois plus élevé en moyenne, que le taux des ménages vivant en dessous du seuil de pauvreté est deux fois supérieur à celui de la métropole.
Par ailleurs, un certain nombre de recettes de l’État sont calculées sans tenir compte des situations réelles.
Ainsi, pour prendre l’exemple de l’allocation personnalisée d’autonomie, l’APA, en Martinique, 27 % des personnes de plus de soixante ans sont bénéficiaires des minima sociaux, contre 7 % en métropole. Alors, quand on calcule la dotation APA sur les mêmes bases, vous voyez la situation ! Quant au RMI, n’en parlons pas…
Il est donc normal que nous essayions de trouver des ressources supplémentaires.
J’avais fait inscrire une recette dans la loi d’orientation pour l’outre-mer, la taxe additionnelle sur les tabacs. Je n’avais guère été soutenu à l’époque, notamment par certains collègues de la Réunion qui, pourtant, tirent aujourd'hui de cette taxe plus de 130 millions d'euros. Nous en retirons beaucoup moins aux Antilles, pour des raisons que je ne développerai pas en cet instant.
J’ai plusieurs fois proposé d’instaurer une taxe sur les jeux, d’autres l’ont également fait. Je reviens sur cette proposition à travers cet amendement, qui vise à instaurer un prélèvement de 10 % sur le produit des jeux de hasard.
Je signale qu’en 2006, par exemple, la Française des Jeux a réalisé un chiffre d’affaires supérieur au budget du conseil régional de Martinique et même à celui du conseil général ; donc, ce sont des sommes considérables.
Dans une délibération de janvier 1995, le conseil général de la Martinique, sur le fondement d’un décret d’avril 1960 qui nous le permettait à l’époque - depuis, un texte de loi a confirmé cette possibilité -, avait déposé une proposition de loi sur ce sujet.
J’insiste vivement pour qu’une réponse nous soit apportée sur la possibilité de ce prélèvement. Les ressources nouvelles qui en découleraient nous aideraient à assumer l’ensemble de nos missions. Elles nous permettraient également, comme nous le faisons en ce moment, de continuer à aider l’État à répondre au problème de l’augmentation des salaires, notamment dans le privé, décidée lors des négociations récentes en Guadeloupe et en Martinique.
Monsieur Lise, contrairement à ce que vous pensez, nous connaissons les chiffres ! Nous savons que le taux de chômage et le nombre de personnes bénéficiant de l’APA, sont, dans vos départements, trois à quatre fois supérieurs à ceux de la métropole. Comme nous avons déjà du mal à équilibrer les budgets de nos conseils généraux, nous pouvons sans peine mesurer les difficultés que vous rencontrez et nous nous demandons même parfois comment vous faites pour assumer de telles surcharges. Nous ne voudrions pour rien au monde nous retrouver dans votre situation, car nous serions alors dans l’incapacité de boucler nos budgets !
Mais, si nous connaissons vos difficultés, nous savons aussi que l’État a un budget et qu’un certain nombre de propositions ne permettront pas de résoudre le problème de fond.
Si la LODEOM peut apporter aujourd'hui un certain nombre d’aménagements et d’améliorations, nous espérons que les États généraux de l’outre-mer seront l’occasion d’aborder la question, véritablement problématique, des recettes des collectivités des DOM.
En ce qui concerne l’amendement tendant à créer un prélèvement de 10 % sur les montants engagés dans les DOM pour les courses et les jeux de hasard, la commission des finances a émis un avis défavorable.
Cher Claude Lise, vous avez mis le doigt sur un sujet majeur pour l’outre-mer : les recettes des collectivités locales. J’en ai parlé tout à l’heure au sujet de la Guyane, je sais quelles sont les difficultés structurelles rencontrées par de nombreuses collectivités, notamment le conseil général de la Martinique.
Mesdames, messieurs les sénateurs, je souhaite que la mission commune d’information du Sénat sur la situation des départements d’outre-mer, dont je salue la mise en place, puisse s’emparer notamment de ce sujet.
On va peut-être me rétorquer que l’avis que j’émets au nom du Gouvernement est trop personnel, mais, après tout, autant parler avec sincérité : si cette mission pouvait élaborer un projet de nature à apporter une réponse durable, elle ferait véritablement œuvre de progrès. Cela permettrait de prendre en compte des spécificités que l’on ne comprend bien que lorsque l’on discute avec les parlementaires de l’outre-mer. Monsieur Lise, nous devons nous emparer de ce problème, et je suis prêt à mettre à votre disposition l’expertise de la Rue Oudinot.
En ce qui concerne la taxe sur les jeux, une opportunité s’offre à nous avec le projet de loi sur les jeux de hasard qui va être présenté très prochainement, à la fin du mois de mai.
Nous devons poursuivre l’expertise, car deux questions n’ont pas été réglées. Premièrement, cette taxe s’applique-t-elle sur la totalité des sommes engagées au niveau national ou uniquement sur les sommes engagées outre-mer ? Il me semble que cette dernière solution correspondrait mieux à ce que vous souhaitez. Dans ce cas, il faut s’assurer qu’il est possible de distinguer dans les recettes de la Française des Jeux ou du PMU les paris ou les jeux réalisés outre-mer.
Deuxièmement, quid de la concurrence des jeux en ligne ? Il faut veiller à ce qu’une taxe plus importante sur les jeux outre-mer n’entraîne pas une perte des recettes et ne favorise pas les jeux en ligne.
Le Gouvernement est prêt à examiner la proposition contenue dans votre amendement lors de la discussion du prochain texte sur les jeux, qui fournit un cadre technique plus approprié que le projet de loi pour le développement économique de l’outre-mer. Si un groupe de travail se constituait autour de vous, nous pourrions vous fournir une expertise et mobiliser nos moyens, afin qu’une réponse forte puisse être apportée sur ce sujet.
Si vous maintenez votre amendement, le Gouvernement s’alignera sur l’avis de la commission. Mais, sur le fond, nous devons aller dans le sens que j’ai indiqué : il reviendra à la mission parlementaire qui – je l’espère – sera rapidement mise en place, de faire des propositions sur la question majeure des recettes des collectivités locales. Venant du terrain et des élus, elles auront, à mon avis, plus de chances de prospérer que si elles sont préparées par la seule Rue Oudinot.
Je comprends très bien les préoccupations de M. Lise, mais il intervient en tant que président du conseil général de la Martinique. Je voudrais simplement lui rappeler que les maires sont également confrontés à la nécessité de mener des actions sociales extrêmement importantes.
Pendant les quarante-cinq jours de grève, nous avons dû assurer deux cents paniers-repas aux personnes isolées de Basse-Terre qui ne pouvaient pas se déplacer et qui n’avaient plus de quoi se nourrir. Si une action sociale, que nous ne mésestimons pas, est menée par les départements, il ne faut pas perdre de vue que les communes en font de même de façon récurrente, sans aucune recette pour financer les centres communaux d’action sociale, les CCAS.
Je voterai cet amendement. La Française des Jeux est installée en Polynésie française et y paye des taxes. Je ne vois pas pourquoi ce qui est accepté pour les pays d’outre-mer ne le serait pas pour les départements d’outre-mer, d’autant moins que cette société enregistre des bénéfices considérables et qu’elle transfère en métropole environ 50 millions d’euros par an.
Ceux de nos collègues qui se sont exprimés sur l’éventualité de taxer à l’avenir les jeux en France, en métropole ou dans les territoires d’outre-mer, doivent tout de même prendre conscience du fait que, lors de la discussion, dans quelques mois, du projet de loi sur les jeux de hasard, il sera extrêmement difficile de ménager tout à la fois les intérêts de l’État et ceux des collectivités locales.
Monsieur Lise, je comprendrai très bien votre déception si votre amendement n’est pas voté, mais il ne faut pas penser qu’il sera aisé de « saupoudrer » le produit des jeux et de donner à tout le monde, en particulier si l’on veut garantir les recettes de l’État.
Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, adopte l'amendement.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 16.
L'amendement n° 122, présenté par MM. Lise, S. Larcher, Gillot, Patient, Antoinette, Tuheiava et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 16, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. Un prélèvement sur recettes exceptionnel est institué au profit des départements et collectivités d'outre-mer tendant à compenser financièrement le surplus des charges transférées à ces collectivités, dans le cadre de la loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales et de la loi n° 2003-1200 du 18 décembre 2003 portant décentralisation en matière de revenu minimum d'insertion et créant un revenu minimum d'activité.
Le montant alloué à chaque département ou collectivité d'outre-mer est égal à la différence entre le montant des charges transférées réellement constaté dans les comptes administratifs de ces départements et collectivités d'outre-mer et le montant de la compensation qu'ils ont perçu en vertu des règles de compensations financières prévues dans les lois citées au premier alinéa.
II. - Les pertes de recettes résultant pour l'État du I ci-dessus sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Claude Lise.
J’espère que l’amendement que le Sénat vient d’adopter va prospérer à l'Assemblée nationale. Si tel n’était pas le cas, j’ai bien retenu que cette question serait un sujet fort des États généraux de l’outre-mer qui – souhaitons-le ! – n’auront pas le même avenir que ceux qui se sont tenus il y a quelques années.
Madame Michaux-Chevry, même si je n’en ai pas parlé expressément, je n’oubliais pas les communes lorsque j’ai évoqué les ressources des collectivités.
J’en viens au présent amendement, par lequel je demande tout simplement le respect de la Constitution. Je souhaite en effet la compensation intégrale des charges transférées notamment par les lois du 18 décembre 2003 et du 13 août 2004. Je ne vais pas répéter les propos que j’ai tenus sur les difficultés rencontrées par nos collectivités : il serait tout à fait normal de les aider en assurant une compensation intégrale.
Je prendrai un exemple : le RMI représente, à l’heure actuelle, 160 millions d’euros pour le budget du conseil général de la Martinique. Or l’État nous doit environ 30 millions d’euros, ce qui est considérable. Depuis que nous avons la responsabilité du versement du RMI, cette dette chronique tourne toujours plus ou moins autour de ce montant.
J’insiste, un effort doit vraiment être accompli pour compenser intégralement le transfert de charges qui accompagnent des compétences que nous n’avons quelquefois pas réclamées.
Monsieur Lise, je comprends votre demande. L’APA pourrait même être rajoutée à la liste des compétences pour lesquelles les collectivités se demandent toujours si elles sont compensées à l’euro près.
Il n’en reste pas moins que l’État a satisfait à ses obligations constitutionnelles de compensation et a même mis en place des outils supplémentaires de compensation tels que le Fonds de mobilisation départementale pour l’insertion.
La commission a donc émis un avis défavorable sur cet amendement, qui ne lui semble pas opportun.
Le Gouvernement est du même avis que la commission.
J’ai bien compris la force de cet amendement, d’autant plus que Claude Lise m’a expliqué, à de nombreuses reprises, les difficultés qu’il rencontrait. Je le redis, la mission commune d’information sénatoriale doit faire des propositions précises pour recaler les recettes des collectivités locales. Nous ne devons pas nous contenter de « bricoler » des solutions.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 201, présenté par MM. Gillot, S. Larcher, Lise, Patient, Antoinette, Tuheiava et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 16, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans un délai de six mois après la promulgation de la présente loi, le Gouvernement présente un rapport au Parlement, définissant les modalités d'élaboration et de financement d'un plan pour l'outre-mer en faveur de la formation et de l'emploi des jeunes.
La parole est à M. Jacques Gillot.
Le taux de chômage des jeunes outre-mer dépasse largement celui de la métropole. Le Président de la République l’a lui-même reconnu à l’issue de l’entretien du 19 février 2009 avec les élus d’outre-mer : « Comment justifier que le chômage y soit si important ? », s’interrogeait-il à cette occasion.
Il est donc primordial d’orienter les efforts de réflexion et de soutien de l’État en faveur de la jeunesse ultramarine par l’élaboration d’un rapport qui permettra d’aborder, indépendamment des États généraux de l’outre-mer et du Conseil interministériel de l’outre-mer, la problématique de la formation et de l’emploi des jeunes outre-mer.
La question de la formation et de l’emploi des jeunes sera l’un des sujets majeurs qui seront traités dans le cadre des États généraux de l’outre-mer. Dans ces conditions, la proposition paraît inutile. La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
Je m’aligne sur l’avis de la commission : ce n’est pas un rapport de plus qui nous permettra de définir une politique. Plus de la moitié des jeunes sont au chômage : c’est un enjeu majeur.
En matière d’égalité des chances et d’insertion professionnelle des jeunes, nous avons une action commune à mener. Ce sera d’ailleurs l’un des huit sujets abordés lors des États généraux.
D’ores et déjà, il est prévu de dégager 15 millions d’euros dans le cadre de la LODEOM afin d’obliger les entreprises à réaffecter une partie des baisses d’impôt sur les sociétés à la formation professionnelle.
Le Président de la République s’est également engagé à doubler le nombre de jeunes accueillis au titre du service militaire adapté pour les années budgétaires 2009, 2010 et 2011, c'est-à-dire de le porter de 3 000 à 6 000. Chacun conviendra qu’il s’agit d’une mesure importante, qui montre que l’insertion professionnelle des jeunes est une priorité.
Cependant, la formation doit répondre à des besoins professionnels et correspondre aux projets des territoires. Il ne s’agit pas de faire de la formation pour la formation. Dans cette optique, nous allons réformer l’Agence nationale pour l’insertion et la promotion des travailleurs d’outre-mer afin de la rendre plus efficace.
J’accueillerai volontiers les propositions de Jacques Gillot s’il souhaite travailler sur cette thématique. En effet, avec les finances des collectivités locales, c’est l’un des sujets majeurs de l’avenir de l’outre-mer.
Je vais répondre à l’appel du Gouvernement et renvoyer cette réflexion aux États généraux. Je retire donc mon amendement.
L’amendement n° 201 est retiré.
L'amendement n° 256, présenté par MM. Antoinette, Patient, S. Larcher, Gillot, Lise et Tuheiava, est ainsi libellé :
Après l'article 16, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. Les sur-rémunérations versées par les départements, les collectivités d'outre-mer et la Nouvelle-Calédonie, aux agents de la fonction publique territoriale sont exonérées de cotisations sociales et patronales.
II. Le Gouvernement dépose devant le Parlement, avant le 1er octobre 2012, un rapport d'évaluation de l'efficacité de la mesure visée au I et de l'opportunité de sa prolongation.
III. Les conséquences financières pour les organismes de sécurité sociale résultant du I ci-dessus sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Jean-Étienne Antoinette.
Avant d’en venir à mon amendement, je voudrais dire que les inquiétudes que nous avions exprimées lors de la discussion générale au sujet de l’enchevêtrement de ce projet de loi et des États généraux se confirment.
En effet, depuis que nous avons abordé l’article 16 et les finances des collectivités locales, on nous renvoie systématiquement aux États généraux, alors qu’il avait été annoncé que l’on essaierait de trouver une solution juste pour rééquilibrer une politique fondée exclusivement sur l’exonération et la défiscalisation en faveur des entreprises.
Nous avions également pointé l’insuffisance de l’effort en matière de formation, et M. le secrétaire d’État nous avait rétorqué qu’il s’élevait à 5 %. Or que représentent 5 % par rapport au déficit de formation d’une jeunesse qui sort malheureusement trop tôt du système scolaire et qui est frappée par l’illettrisme ? Ce projet de loi n’est donc malheureusement pas à la hauteur de l’enjeu, d’où les amendements que nous proposons pour combler cette lacune.
En l’occurrence, j’espère qu’on ne me renverra pas une nouvelle fois aux États généraux, car mon amendement apporte un élément supplémentaire par rapport à la politique d’exonération et de défiscalisation. Il offre en effet la possibilité aux collectivités locales d’outre-mer d’accompagner les deux dispositifs.
Nous savons tous que le fonds exceptionnel d’investissement sera financé à 75 % par l’État et à 25 % par les collectivités locales. Ce sont d’ailleurs les mêmes critères qui ont été retenus dans le cadre du plan de relance. Or il faudra bien trouver les financements.
La commission ne pourra pas me répondre qu’il faudrait également prévoir une exonération pour les communes, les départements et les régions de la France hexagonale, car ces collectivités n’ont pas à financer la sur-rémunération de 40 % des fonctionnaires. Certes, cette sur-rémunération est prévue par la loi, mais elle n’entre pas en compte dans le calcul de la péréquation sur le plan national. Elle est considérée comme une prime, exclusivement à la charge des collectivités locales d’outre-mer.
Dans l’esprit de défiscalisation qui imprègne ce texte – je rappelle les chiffres du Gouvernement : 1, 5 milliard d’euros d’exonération –, ne pourrait-on pas faire un effort particulier pour exonérer les collectivités locales de cette surcharge de 40 %, à condition qu’elles réinvestissent les sommes ainsi économisées dans le cadre du plan de relance ou pour apporter leur contribution de 25 % au fonds d’investissement exceptionnel ?
La commission a écouté avec beaucoup d’attention M. Antoinette et comprend son souhait d’exonérer de charges sociales la sur-rémunération.
Néanmoins, la commission considère qu’il n’est pas opportun d’encourager ce dispositif. Elle a donc émis un avis défavorable.
Il est injuste de dire que tout est renvoyé aux États généraux. Nous avons agi sans attendre pour porter de 3 000 à 6 000 le nombre de jeunes pour le service militaire adapté et nous mobilisons dans la LODEOM 15 millions d’euros pour la formation professionnelle, notamment des plus jeunes.
Monsieur le sénateur, je veux bien accorder une exonération de taxe, mais encore faut-il qu’une telle taxe existe. Or la sur-rémunération des fonctionnaires est une prime ! Les collectivités locales ne paient donc que la CSG et la CRDS, qui sont dues par tous sur tous les revenus.
Par ailleurs, votre amendement méconnaît la spécificité de la Nouvelle-Calédonie, qui fixe librement les rémunérations et les taxes qui pèsent sur les salaires.
Votre combat trouve donc une issue positive avant même d’être mené : d’une part, votre amendement est satisfait par avance et, d’autre part, il vise des collectivités sur lesquelles l’État n’a pas de pouvoir de décision. Il serait donc plus raisonnable de le retirer. À défaut, le Gouvernement émettrait un avis défavorable.
Monsieur le secrétaire d’État, comme nous l’avons indiqué à vos services, les charges sociales et patronales, calculées en fonction de la sur-rémunération, représentent à peu près 5 millions d’euros pour l’ensemble des collectivités de la Guyane. Ces chiffres ont été confirmés par les services déconcentrés de l’État.
Comme je l’ai dit récemment au président de la commission des finances, la sur-rémunération de 40 % est appliquée aussi bien aux fonctionnaires de l’État qu’à ceux des collectivités territoriales. Or ce ne sont pas les collectivités territoriales qui ont inventé cette prime, comme on peut le vérifier dans les décrets d’application.
Je suis donc tout à fait prêt à discuter de l’opportunité de ces 40 %.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 293 rectifié, présenté par Mme Payet et les membres du groupe Union centriste, est ainsi libellé :
Après l'article 16, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le troisième alinéa de l'article L. 750-1-1 du code de commerce est complété par une phrase ainsi rédigée :
« La gestion des crédits du Fonds d'intervention pour les services, l'artisanat et le commerce est déconcentrée afin d'assurer une meilleure adaptation aux réalités locales, en particulier dans les collectivités d'outre-mer. »
La parole est à Mme Anne-Marie Payet.
J’ai déjà présenté cet amendement lors de l’examen du projet de loi de modernisation de l’économie. La réponse qui m’avait alors été apportée par Mme Lamure, rapporteur, ne m’avait pas vraiment convaincue.
Selon Mme le rapporteur, « la gestion des dossiers du FISAC est d’ores et déjà déconcentrée, puisqu’elle se fait au niveau des directeurs régionaux du commerce et de l’artisanat. Quant à la gestion des crédits, elle demeure centralisée » afin de « garantir la neutralité de l’affectation des crédits et la capacité du FISAC à répondre aux évolutions du nombre de dossiers par région ».
Soit, mais comment expliquez-vous le mauvais fonctionnement du FISAC, monsieur le secrétaire d’État, et, surtout, le nombre insignifiant de dossiers retenus ? À la Réunion, par exemple, nous avons même connu des années blanches, aucun dossier n’étant retenu.
Pour motiver son refus, Mme le rapporteur avait proposé de nommer des représentants des DOM à la commission d’orientation dont la création était prévue par la LME. J’aimerais savoir si cette commission est opérationnelle et si elle compte des ultramarins parmi ses membres.
Ma chère collègue, j’ai bien peur que ma réponse soit assez proche de celle du rapporteur du projet de loi de modernisation de l’économie…
On ne peut que souscrire à vos intentions, mais, en principe, la gestion des crédits du FISAC est d’ores et déjà déconcentrée. La commission aimerait cependant connaître l’avis du Gouvernement.
Madame la sénatrice, vous avez parfaitement raison de dénoncer le mauvais fonctionnement du FISAC outre-mer. C’est la raison pour laquelle le Gouvernement proposera par amendement d’affecter 8 millions d’euros à une sorte de FISAC pour l’outre-mer. Je pense que cette mesure devrait pleinement répondre à l’objectif que vous visez.
Ce fonds de 8 millions d’euros sera géré de façon plus intelligente et non avec une vision trop métropolitaine, car je sais que c’est là votre inquiétude. Notre volonté est d’apporter des moyens – 8 millions d’euros –, mais aussi de la souplesse afin que la gestion de ces moyens soit au maximum déconcentrée.
En attendant, la rédaction de votre amendement ne nous semble pas la plus adaptée. Je vous invite donc à vous rapprocher de mes services afin de mettre au point un texte, d’ici à la fin de la discussion de ce projet de loi, qui puisse vous apporter toutes les garanties.
Je vous demande, pour l’heure, de bien vouloir retirer votre amendement. À défaut, le Gouvernement émettrait un avis défavorable.
L’amendement n° 293 rectifié est retiré.
L'amendement n° 295 rectifié, présenté par Mme Payet et les membres du groupe Union centriste, est ainsi libellé :
Après l'article 16, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans le délai d'un an à compter de la promulgation de la loi n° du relative au développement économique de l'outre-mer, le Gouvernement déposera un rapport sur le bureau des assemblées visant à faciliter l'écoulement des productions agricoles locales ultramarines dans les départements d'outre-mer, et ce notamment par la modification du code des marchés publics.
La parole est à Mme Anne-Marie Payet.
Les agriculteurs ultramarins se sont depuis plusieurs années engagés dans des démarches de qualité, et leurs produits peuvent désormais rivaliser avec les productions métropolitaines. Toutefois, nos agriculteurs souffrent d’une insuffisance de débouchés. C’est pourquoi il convient d’encourager l’efficacité commerciale des organisations de producteurs et d’accroître leurs possibilités d’accéder aux marchés publics.
Ainsi, il faut ouvrir aux agriculteurs la possibilité de répondre aux appels d’offres des marchés publics, tels que la restauration scolaire ou les hôpitaux. Ces marchés devraient comprendre des lots particuliers, comme la production locale de fruits et de légumes, indépendamment de lots provenant nécessairement de l’importation, car formés de produits non cultivés dans les départements d’outre-mer.
Je ne citerai qu’un exemple : dans la plupart des cantines scolaires de la Réunion, les fruits cultivés sur l’île ne sont pas servis aux élèves. C’est pourquoi il est proposé que le Gouvernement dépose un rapport sur le bureau des assemblées visant à faciliter l’écoulement des productions agricoles ultramarines dans les départements d’outre-mer, et ce notamment par la modification du code des marchés publics.
Comme vous le savez, ma chère collègue, le Gouvernement a proposé d’augmenter la prestation de restauration scolaire en contrepartie d’un approvisionnement renforcé des cantines en produits locaux.
Vous avez souligné que tel n’était pas le cas actuellement et vous demandez un rapport sur ce sujet. C’est un point sur lequel la commission aimerait connaître l’avis du Gouvernement.
M. Yves Jégo, secrétaire d'État. Le Gouvernement, dont l’avis est décidément très sollicité ce matin
Sourires
L’une des propositions issues de la crise sociale était précisément d’augmenter de 20 % l’aide aux cantines scolaires. J’ai souhaité que cette aide soit conditionnée et ait pour contrepartie l’obligation pour les cantines scolaires qui en bénéficieront de se fournir auprès de producteurs locaux.
Je suis en effet, comme vous, stupéfait de constater que l’on fait manger aux enfants des écoles de Martinique des kiwis de Nouvelle-Zélande ! C’est compréhensible à Montereau, où le climat n’est pas aussi propice, mais cela l’est beaucoup moins là où les fruits poussent en abondance.
Le Gouvernement a la volonté – réaffirmée par le Président de la République – de nous faire progresser vers l’autosuffisance alimentaire, et l’agriculture doit en être l’un des moteurs. C’est la raison pour laquelle il laisse à la Haute Assemblée le soin, dans sa sagesse, de décider des suites qu’il convient de donner à l’amendement n° 295 rectifié.
Monsieur le secrétaire d’État, à l’issue de leur rencontre avec vous, les agriculteurs de Basse-Terre ont été frappés par votre proposition de soutenir la consommation locale. En effet, il est inacceptable que les enfants des Antilles ne mangent plus de mangues, de bananes, d’ananas, alors que la production locale est excellente et de qualité.
Un problème fondamental se pose : le commerçant qui vend ses poires en conserve peut peut-être attendre trois à quatre mois le paiement, mais l’agriculteur de nos régions ne peut pas se permettre de patienter pendant un tel délai avant d’être payé.
Monsieur le secrétaire d'État, il faudrait que vos services cherchent, avec le fonds d’investissement que vous avez mis en place, la solution permettant aux communes qui gèrent les cantines scolaires de rémunérer très rapidement les agriculteurs. La même remarque vaut pour les marins pêcheurs : le poisson local est de très bonne qualité, et les enfants mangent de la sole… Ce n’est pas pensable ! Mais encore faut-il payer très rapidement les agriculteurs et les pêcheurs, qui ont besoin de ce revenu pour vivre.
L'amendement est adopté.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 16.
L'amendement n° 297 rectifié, présenté par Mme Payet et les membres du groupe Union centriste, est ainsi libellé :
Après l'article 16, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Compléter la première phrase du troisième alinéa de l'article 50 de la loi n° 2003-721 du 1er août 2003 pour l'initiative économique par les mots :
et tient compte du positionnement géographique des collectivités d'outre-mer et de leurs ressources d'expertise mobilisables dans leur zone.
La parole est à Mme Anne-Marie Payet.
L’efficacité et l’utilité d’UBIFRANCE ne sont plus à prouver. La loi de modernisation de l’économie a renforcé le rôle de cette structure, en lui transférant certaines compétences des missions économiques.
Toutefois, il est indispensable de rationaliser les liens entre UBIFRANCE et les DOM. À l’heure actuelle, il n’existe pas de liaison entre cet établissement public industriel et commercial et les DOM, si bien que l’on aboutit parfois à des situations cocasses. Ainsi, pour une intervention à Madagascar organisée à partir de la métropole, il a été fait appel à des experts réunionnais qui ont dû transiter par Paris !
C’est pourquoi nous proposons que l’agence UBIFRANCE tienne compte du positionnement géographique des collectivités d’outre-mer et de leurs ressources d’expertise mobilisables dans la zone.
Pour cela, il est indispensable que cet établissement dispose de relais sur place, au niveau des services déconcentrés de l’État déjà présents dans les collectivités d’outre-mer.
Madame Payet, en évoquant tout à l’heure le FISAC et maintenant UBIFRANCE, vous donnez le sentiment que ces organismes ne fonctionnent pas comme ils le devraient.
La commission estime cependant qu’il n’est pas nécessaire de modifier la loi pour régler le problème posé, à savoir une gestion non rationnelle des ressources de l’Agence. Par conséquent, elle vous demande de bien vouloir retirer votre amendement.
Pour la première fois depuis le début de l’examen des amendements, le Gouvernement n’est pas en phase avec la commission des finances et émet un avis favorable.
Monsieur le secrétaire d’État, si le Gouvernement n’est pas capable de régler cette question autrement que par la voie législative, c’est à désespérer !
L'amendement est adopté.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 16.
L'amendement n° 300 rectifié bis, présenté par Mme Payet et les membres du groupe Union centriste, est ainsi libellé :
Après l'article 16, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le premier alinéa de l'article L. 3511-3 du code de la santé publique est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Pour l'application du présent alinéa, la vente dans les comptoirs de vente situés dans l'enceinte des aéroports des produits du tabac en franchise de droits et taxes aux personnes voyageant entre la France métropolitaine et un département d'outre- mer est considérée comme effectuée à un prix de nature promotionnelle contraire aux objectifs de santé publique. »
La parole est à Mme Anne-Marie Payet.
Cet amendement vise à interdire la vente de tabacs en duty free aux voyageurs en partance et à destination des DOM.
J’ai déjà présenté un tel amendement - le Sénat avait alors eu la sagesse de l’adopter -, mais il n’a pas survécu à la commission mixte paritaire. Le poids des lobbies est trop fort !
Quand il s’agit d’aider les productions locales – le foie gras, la charcuterie, les fruits et légumes –, il est tout à fait normal que des groupes de travail soient constitués pour trouver des solutions législatives, mais, quand il s’agit de protéger des industriels dont les produits sont responsables de 60 000 décès par an en France, le Parlement ne joue pas son rôle ; sa mission est déviée. Les populations que nous représentons auraient le droit de nous réclamer des comptes.
Monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, j’ai dû contrer des arguments un peu fantaisistes.
Certains jouent sur les mots. On m’a soutenu que le duty free n’est pas une vente promotionnelle. Or Maurice Cohen, grand économiste politique, a défini cette vente promotionnelle comme un avantage provisoire offert aux consommateurs, limité soit dans le temps, soit dans un espace géographique. Cette définition correspond, selon moi, au duty free.
On m’a également affirmé que le duty free attire les touristes. J’espère, monsieur le secrétaire d’État, que ceux qui se rendent à la Réunion n’y vont pas majoritairement pour acheter du tabac à bas prix, voire à très bas prix, pour nous enfumer et enterrer leurs mégots dans le sable de Saint-Gilles.
Sourires
On m’a également dit que la loi européenne prime dans les régions ultrapériphériques. Certes, mais tel n’est pas le cas en matière de santé publique, surtout lorsqu’une loi interdit des pratiques dangereuses.
Par ailleurs, l’amendement n° 300 rectifié bis n’est pas un cavalier. Il est bien question de développement économique. Selon des études réalisées, supprimer le duty free appliqué au tabac uniquement sur la ligne reliant la Réunion à Paris rapporterait au conseil général de l’île près de 20 000 euros de recettes fiscales par jour. Cette somme pourrait être consacrée à des aides aux petites entreprises, surtout en cette période de crise.
Un collègue et ami sénateur me racontait hier que son grand-père, bien qu’ayant fumé toute sa vie, est mort à quatre-vingt-quinze ans. Soit, mais, à cette époque, le tabac ne contenait peut-être pas autant d’additifs qu’actuellement – plus de quatre cents ! –, qui visent uniquement à renforcer l’addiction et qui sont presque tous cancérigènes. D’ailleurs, un haut responsable d’une grande marque de tabac, que je ne citerai pas, a tenu ces propos : « Nous ne fumons pas cette cochonnerie ; nous la laissons aux pauvres, aux noirs et aux imbéciles. »
Monsieur le secrétaire d’État, pourquoi une telle différence entre l’outre-mer et la métropole ? Cela n’a aucun sens. Jusqu’à quand allons-nous tolérer cette absurdité ? Le chlordécone n’a-t-il pas suffisamment servi de leçon ? La santé des ultramarins serait-elle moins importante que celle des métropolitains aux yeux du Gouvernement ? Si ce n’est pas mon sentiment personnel, monsieur le secrétaire d’État, je sais que cela risque d’être interprété ainsi.
Pour toutes ces raisons, je vous demande, mes chers collègues, de bien vouloir adopter cet amendement.
La commission avait émis un avis positif sur un amendement similaire lors de l’examen du projet de loi de finances. Malheureusement, ce texte n’a pas été retenu par la commission mixte paritaire.
Le sujet que vous venez d’évoquer, madame Payet, relève tout à fait de la loi de finances. Par conséquent, la commission serait tentée de vous demander de bien vouloir retirer l’amendement n° 300 rectifié bis et de le redéposer ultérieurement.
J’avoue cependant avoir quelque difficulté à me prononcer, étant donné le sort que le Gouvernement a réservé à un amendement précédent. M. le secrétaire d’État a en effet considéré qu’il fallait adopter un texte spécifique pour la Réunion afin de régler un problème concernant UBIFRANCE qu’il n’arrive pas à régler au niveau national... Par conséquent, je laisse le soin à M. le secrétaire d’État de nous orienter sur ce sujet.
J’ai écouté Mme Michaux-Chevry avec beaucoup d’intérêt et j’ai noté que les produits achetés par les cantines sont payés au bout de trois ou quatre mois.
Mais il y a tout de même des règles en la matière, et elles doivent être respectées ! Je ne comprends pas que des collectivités puissent se laisser aller à de tels délais de paiement !
Par ailleurs, j’ai déjà fait remarquer que les ignames qui sont consommées outre-mer, par exemple, sont produites dans ma région. Fort bien pour les agriculteurs concernés, mais c’est complètement aberrant !
Madame Payet, tout le monde apprécierait de percevoir 20 000 euros de recettes fiscales par jour. Mais si le duty free est supprimé, il n’y aura probablement plus d’achats et donc plus d’assiette ! J’attends l’avis très éclairé du Gouvernement sur ce sujet.
Madame Payet, je salue la constance dont vous faites preuve dans votre combat.
Le régime des franchises douanières et fiscales des marchandises contenues dans les bagages personnels des voyageurs en provenance de pays tiers et de territoires fiscalement tiers a été modifié, à compter du 1er décembre 2008, par la réglementation communautaire.
Pour ce qui concerne les tabacs, la directive communautaire fixe des limites supérieure – 200 unités pour les cigarettes, soit une cartouche – et inférieure – 40 unités pour les cigarettes, soit deux paquets – et laisse aux États membres le choix du seuil qu’ils souhaitent retenir. Madame Payet, les franchises que vous proposez correspondent aux plus basses prévues par ladite directive.
La transposition en droit national des textes communautaires doit faire l’objet d’un arrêté soumis à la double signature des ministres de l’économie et du budget. En l’espèce, un tel arrêté, qui définira une philosophie nationale globale, est en cours de signature. Le montant des franchises qui sera ensuite retenu s’appliquera de plein droit dans les échanges avec les départements d’outre-mer. De ce fait, il n’est pas possible de prévoir des limites quantitatives spécifiques pour les échanges entre la métropole et les seuls départements d’outre-mer.
Madame Payet, je suis sûr que vous ne manquerez pas de contacter très rapidement les deux ministres concernés pour leur faire part de vos arguments.
Le Gouvernement étant opposé à toute spécificité ultramarine en ce domaine, il émet un avis défavorable sur l’amendement n° 300 rectifié bis.
Monsieur le secrétaire d’État, il me semble que les explications que vous venez de me fournir concernent la première version de mon amendement, lequel a été rectifié.
Selon les renseignements qui m’ont été communiqués, l’arrêté relatif à la directive européenne est actuellement à la signature mais, apparemment, la France n’a pas la volonté de changer quoi que ce soit.
Madame le sénateur, je vous confirme que le texte est en ce moment à la signature. Par conséquent, vous disposez encore d’un certain laps de temps pour convaincre les deux ministres concernés de la justesse de votre combat !
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 342, présenté par MM. Lise, S. Larcher, Gillot, Patient, Antoinette, Tuheiava et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 16, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Les petites entreprises de moins de dix salariés installées et exerçant leur activité au 1er janvier 2009 dans les départements d'outre-mer peuvent demander, dans un délai de six mois à compter de la publication de la présente loi, aux caisses de sécurité sociale compétentes de leur département, un étalement pour le règlement de leurs créances, antérieures au 1er juillet 2009, relatives aux cotisations patronales de sécurité sociale, ainsi qu'aux pénalités et majorations de retard correspondantes. Cette demande entraîne de plein droit une suspension de douze mois des poursuites afférentes auxdites créances, ainsi que la suspension du calcul des pénalités et majorations de retard durant cette période.
Durant ce délai de six mois, un plan permettant l'étalement des créances peut être signé entre l'entreprise et la caisse compétente. Sa durée est au maximum de trois ans.
Les dispositions du présent article s'appliquent aux entrepreneurs et travailleurs indépendants, y compris dans les secteurs de l'agriculture et de la pêche, pour les contributions et les cotisations obligatoires de sécurité sociale.
Les modalités d'application du présent article sont déterminées, en tant que de besoin, par décret en Conseil d'État.
II. - Les pertes de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I ci-dessus sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Claude Lise.
Pour faire face aux conséquences sur l’emploi des très importants mouvements sociaux que connaissent les Antilles depuis quelques semaines, il convient d’éviter que les petites entreprises, qui représentent, je le rappelle, près de 90 % du tissu économique antillais, ne se trouvent en grande difficulté financière.
Ces sociétés ayant été obligées de fermer pendant plusieurs semaines, on peut craindre que nombre d’entre elles ne soient contraintes de déposer leur bilan.
Leurs difficultés sont aggravées par la crise mondiale, qui touche plus fortement les économies insulaires déjà fragiles et en état de « mal-développement ». De surcroît, même avant les récentes grèves, de nombreux carnets de commandes étaient peu remplis.
Il est trop tôt pour réaliser un état des lieux complet. Plus particulièrement, je n’ai pu obtenir de chiffres précis concernant la Martinique, où les négociations, vous le savez, sont toujours en cours. Les pertes d’emplois risquent d’y être relativement importantes. D'ores et déjà, 9 700 salariés d’environ 800 entreprises sont concernés par les procédures de chômage partiel ou de chômage technique engagées auprès des tribunaux de commerce. Je suppose que cela doit être au moins aussi important en Guadeloupe.
Il y a donc urgence à protéger et à sauvegarder l’emploi en favorisant la mise en place de procédures permettant d’accorder aux petites entreprises un étalement de leurs dettes sociales et fiscales.
Je veux rappeler que j’avais obtenu, dans le cadre la loi d’orientation de décembre 2000, non seulement un étalement des dettes sociales et fiscales, mais même des remises de dettes totales ou partielles, alors même que nous ne connaissions pas une crise aussi aiguë.
L’amendement n° 342 prévoit pour sa part un étalement. Je crois cette mesure absolument indispensable dans la situation actuelle.
L’amendement n° 343 procède de la même logique.
Nous comprenons tout à fait, sur le fond, votre analyse, monsieur Lise. Les entreprises de moins de dix salariés connaissent effectivement des difficultés, que vous avez rappelées.
Sur la forme, la commission estime cependant qu’il n’est pas nécessaire de prendre de nouvelles mesures législatives.
En effet, est normalement présente dans chaque département – mais cela peut ne pas fonctionner correctement - une commission des chefs des services financiers et des organismes de sécurité sociale dont la mission est d’accorder un moratoire de vingt-quatre voire trente-six mois pour les dettes fiscales et sociales.
L’île de la Réunion a par ailleurs choisi de faciliter la saisine de cette commission en mettant en place une procédure accélérée et un dossier simplifié, afin de permettre plus aisément l’étalement des dettes des entreprises.
Le dispositif actuel présente un double avantage par rapport à l’amendement : d’une part, il évite tout effet d’aubaine - diagnostic individuel -, d’autre part, il concerne l’ensemble des entreprises.
Pour ces raisons, nous pensons que les textes actuels permettent de résoudre les difficultés évoquées par M. Lise. La commission émet donc un avis défavorable, à moins qu’une réécriture de certains passages de l’amendement ne nous permette d’émettre un avis moins négatif.
M. le président du conseil général de la Martinique a tenu, par cet amendement, à nous alerter sur une situation très sérieuse.
Le Gouvernement partage l’analyse de la commission, mais souhaite que cet amendement, symbolique, de sortie de crise puisse prospérer. Il s’en remet donc à la sagesse de la Haute Assemblée, estimant possible de construire un dispositif sur la base de l’amendement n° 342, sous les réserves évoquées par M. le rapporteur.
Si le Gouvernement agit déjà dans le sens voulu, cet amendement n’en est pas moins important pour montrer la mobilisation de tous en faveur des petites entreprises à l’heure d’une sortie de crise.
Le Gouvernement s’en remet donc à la sagesse de la Haute Assemblée et lève le gage.
Il s'agit donc de l’amendement n° 342 rectifié.
La parole est à Mme Lucette Michaux-Chevry, pour explication de vote.
Je ne comprends plus !
La commission se réunit déjà en Guadeloupe et accorde des délais de manière habituelle. Cela se fait régulièrement, par exemple à la suite du passage d’un cyclone. Faut-il légiférer chaque fois que se pose un problème ?
La commission est intervenue en Guadeloupe. Je suis moi-même intervenue auprès des entreprises.
Cette jurisprudence est constante. Chaque année, à la suite de cyclones, nous réglons les problèmes qui se posent avec la sécurité sociale. Je ne vois pas pourquoi nous devrions légiférer, d’autant que l’on peut craindre un allongement des délais si l’on doit apporter des justificatifs.
Je doute, moi aussi, de la nécessité de légiférer, même si je peux voter cet amendement par principe. Des commissions existent effectivement qui répondent déjà au problème posé.
Par ailleurs, nous serons probablement en mai lorsque cette loi sera définitivement adoptée. Il n’est pas raisonnable d’envisager une application effective de ce dispositif avant juin.
Que cet amendement soit finalement adopté ou rejeté, je tiens tout de même à attirer votre attention sur un point, selon moi, important : c’est aujourd'hui, au sortir de cette crise, que les entreprises rencontrent de graves difficultés, les petites entreprises étant plus particulièrement touchées.
C’est la raison pour laquelle je souhaite, quel que soit le sort de cet amendement, que des directives soient données pour que banques et organismes sociaux comprennent très rapidement que nous sortons d’une situation extrêmement difficile et qu’il convient de faire preuve d’une certaine souplesse avec les entreprises concernées. Après cette période d’interruption de leur activité, elles connaissent de plus en plus de difficultés pour redémarrer.
Je comprends bien la préoccupation de notre collègue Claude Lise.
La pratique n’en est pas moins bien établie : lorsque des entreprises sont confrontées à des difficultés pour s’acquitter de leurs obligations sociales et fiscales, des instances consentent les délais nécessaires au règlement. La loi doit-elle devenir le réceptacle de souhaits, de vœux et d’incantations ? Ne confondons pas, mes chers collègues, littérature et normes juridiques !
Le souci exprimé par Claude Lise se situe bien au cœur de nos préoccupations. Il n’est cependant pas nécessaire de voter une disposition législative spécifique pour donner satisfaction à notre collègue. Sinon, les lois deviendront des catalogues, à l’image du Grenelle I.
Je ne suis pas de ceux qui souhaitent que l’on légifère en permanence. Je n’en remarque pas moins que l’on s’adonne allègrement à cette pratique. Entre autres textes, M. le président de la commission des finances a lui-même évoqué le Grenelle I.
Je pourrais vous citer des passages entiers de notre législation qui mériteraient la même critique !
Il me semble en tout cas important de donner un signal fort. Nous sortons à peine d’une situation extrêmement grave. Je ne suis pas sûr que les administrations compétentes examineront les dossiers dans l’état d’esprit que nous souhaitons ; peut-être cela fonctionne-t-il très bien en Guadeloupe, mais je ne suis pas certain qu’il en aille de même en Martinique. Un signal fort adressé aujourd'hui pourrait donc avoir une très grande importance. Comme le disait mon collègue Daniel Marsin, il n’est pas question d’attendre que le texte soit promulgué.
Je sais bien que nous sommes là dans l’ordre du symbole.
Cependant, il s’agit peut-être de davantage que cela : si la Haute Assemblée exprime sa volonté, cela ne manquera pas d’avoir un impact sur le traitement des dossiers.
J’insiste donc pour que mes collègues comprennent la nécessité de voter cet amendement. Il ne s’agit pas de faire adopter des quantités de texte dénuées de réelle visée normative.
Monsieur le président de la commission des finances, vous ne m’avez pas souvent entendu faire des propositions de nature symbolique : cela n’est pas dans mes habitudes. Je crois cependant possible d’envoyer un signal de temps en temps, surtout lorsque l’on en fait par ailleurs beaucoup dans d’autres domaines…
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 343, présenté par MM. Lise, S. Larcher, Gillot, Patient, Antoinette, Tuheiava et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 16, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Les petites entreprises industrielles, commerciales, artisanales, agricoles, ou du secteur de la pêche, de moins de dix salariés, ainsi que les contribuables exerçant des professions non commerciales installés et exerçant leur activité au 1er janvier 2009 dans un département d'outre-mer peuvent demander, dans un délai de six mois à compter de la publication de la présente loi, un étalement de leurs dettes fiscales au 30 juillet 2009.
Pendant une période de six mois à compter du dépôt de la demande, les mesures de recouvrement forcé sont suspendues
Les modalités d'application du présent article sont déterminées, en tant que de besoin, par décret en Conseil d'État.
II. - Les pertes de recettes résultant pour l'État du I ci-dessus sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Claude Lise.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 368, présenté par Mme Payet, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Avant l'article 17, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article L. 351-3 du code de la construction et de l'habitation est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Le montant forfaitaire des charges est calculé en pourcentage du montant moyen des charges réellement payées par les résidents. Ce pourcentage est identique pour l'ensemble du territoire national. »
La parole est à Mme Anne-Marie Payet, rapporteur pour avis.
Il s'agit d’un amendement d’appel concernant le forfait de charges locatives, qui est une part de l’aide au logement.
Le 1er janvier dernier, le Gouvernement a déjà revalorisé ce forfait de 30 % pour les bénéficiaires ultramarins. Il subsiste cependant une inégalité importante entre métropole et outre-mer. Pour une famille avec deux enfants, ce forfait s’élève, par exemple, à 72 euros en métropole et à 32, 95 euros seulement en outre-mer. Ainsi le forfait couvre-t-il en moyenne 55 % des charges payées en métropole, contre seulement 34 % en outre-mer.
Le Gouvernement a annoncé qu’il allait procéder à la revalorisation de ce forfait, mais quel est, monsieur le secrétaire d’État, le calendrier précis et à quelle date cette rupture d’égalité aura-t-elle disparu ?
Le « forfait charges » est la part des aides au logement qui vise à couvrir les charges payées par les résidents. Il est inférieur en outre-mer à ce qu’il est en métropole.
Toutefois, le Gouvernement a déjà majoré le « forfait charges » ultramarin pour le rapprocher de son niveau métropolitain.
Nous souhaitons entendre le Gouvernement sur les initiatives qu’il compte prendre pour poursuivre ce rapprochement entre les aides ultramarines et les aides métropolitaines.
Le Gouvernement confirme que le « forfait charges » a été revalorisé de 30 % le 1er janvier 2009 et que son taux de couverture sera aligné sur celui de la métropole, le forfait devant couvrir 56 % des charges réelles.
Cela représente une économie réelle, environ 50 euros par mois pour – rendez-vous compte ! – 170 000 familles des plus modestes occupant des logements sociaux outre-mer. Voilà une mesure gouvernementale qui ne manque pas de soutenir fortement le pouvoir d’achat.
Le texte réglementaire tendant à cet alignement est en cours de rédaction. Nous souhaitons pouvoir appliquer cette mesure dès cette année 2009. Elle s’inscrit dans le cadre de la réponse apportée aux questions sociales en général et à la question du pouvoir d’achat en particulier.
Nous avons bien entendu l’appel qui était lancé par cet amendement. Nous souhaiterions que ce dernier soit retiré, faute de quoi le Gouvernement émettrait un avis défavorable, pour des raisons strictement juridiques.
I. - Après l'article L. 472-1-7 du code de la construction et de l'habitation, il est inséré un article L. 472-1-8 ainsi rédigé :
« Art. L. 472-1-8. - En Guadeloupe, en Guyane, en Martinique ou à La Réunion, les sociétés anonymes d'habitation à loyer modéré et les sociétés anonymes coopératives d'habitations à loyer modéré peuvent acquérir des parts ou actions de sociétés civiles immobilières dont l'objet est de construire ou d'acquérir des logements respectant des loyers maximum fixés par décret et destinés à la résidence principale des personnes dont les revenus sont inférieurs à des plafonds fixés par décret. »
II. - L'article L. 661-1 du même code est ainsi rédigé :
« Art. L. 661-1. - Le présent livre ne s'applique pas en Guadeloupe, en Guyane, en Martinique et à La Réunion, à l'exception des chapitres III et IV du titre Ier, du chapitre II du titre II et du titre IV. Les articles L. 631-7 à L. 631-9, L. 651-1, L. 651-2 et L. 651-4 sont toutefois applicables dans ces départements. Ils ont un caractère d'ordre public.
« Le présent livre ne s'applique pas à Saint-Pierre-et-Miquelon, à l'exception de l'article L. 613-3. »
L’article 17 de ce projet de loi prévoit d’ouvrir aux sociétés anonymes d’habitation à loyer modéré et aux sociétés anonymes coopératives d’habitation à loyer modéré la possibilité d’accéder au capital des sociétés immobilières ayant pour objet la construction de logement social ou intermédiaire, dans le but de leur permettre de bénéficier des exonérations fiscales auxquelles elles ne pouvaient accéder jusqu’à présent du fait de leur statut.
De l’avis du rapporteur de la commission des finances, les mesures de défiscalisation telles que les dispositions de la loi Girardin n’ont pas eu un impact favorable sur l’accès au logement des habitants des départements d’outre-mer. Elles ont favorisé la construction de logements haut de gamme, alors que 80 % de la population des départements d’outre-mer se trouvent à un niveau de ressources relevant du logement social.
L’ouverture de cette possibilité aux SAHLM serait donc un moyen de contrer les effets pervers des défiscalisations qui ont été constatés.
Pourquoi orienter les SAHLM vers l’investissement dans le logement privé plutôt que de supprimer des dispositions fiscales inefficaces qui profitent seulement à quelques propriétaires ? Quels sont, en outre, les possibles effets pervers d’une réorientation des fonds des SAHLM vers le logement privé ?
Mes chers collègues, permettez-moi de revenir sur les dispositions de la loi dite « de mobilisation pour le logement et la lutte contre l’exclusion », qui a été présentée au Parlement voilà quelques mois par Mme Boutin et que nous avons votée.
Ce texte abaisse les plafonds d’accès au logement social tout en lançant une chasse aux « profiteurs » qui vivraient dans le logement social et dépasseraient les plafonds de ressources, mais dont on sait qu’ils n’ont pas, pour autant, les moyens de se loger dans le privé.
Comme nous l’avons souligné lors de la discussion de ce projet de loi, il s'agit d’un moyen détourné de réduire le nombre de nos concitoyens qui peuvent prétendre accéder au logement social, sans pour autant répondre au manque criant de logements en France.
Nous avons également dénoncé la volonté affichée par Mme Boutin d’intégrer au logement social l’accession à la propriété, une mesure qui permet, de fait, de revenir sur l’article 55 de la loi SRU, c'est-à-dire la loi relative à la solidarité et renouvellement urbains.
Le présent texte s’inscrit donc dans la logique qui sous-tendait la loi dite « de mobilisation pour le logement et la lutte contre l’exclusion » : réduire l’investissement des pouvoirs publics dans le logement social et le réorienter vers le logement privé, en faisant confiance à la « régulation » du marché, selon le bon vieux principe de l’offre et de la demande, afin que les problèmes du logement soient résorbés. Pour notre part, nous n’y croyons pas !
Il y a, tout de même, une différence notable ici : la volonté de faire bénéficier de défiscalisations les opérateurs de logement social.
En effet, nous étions intervenus lors de la discussion de la loi Boutin pour que les SAHLM, au même titre que les propriétaires privés, puissent accéder aux dispositifs de défiscalisation favorisant les normes dites à « haute qualité écologique », afin que ces dernières soient également applicables aux opérateurs de logement social. Malheureusement, une telle mesure n’a pas été considérée utile.
La logique suivie est simple : la réorientation des fonds du logement social vers le privé est acceptable, les cadeaux fiscaux et « incitatifs », sans garantie de contrepartie sociale, sont permis pour le logement privé, mais l’investissement financier direct de l’État dans le logement social est exclu !
La commission des finances reconnaît elle-même que la mise en œuvre du nouveau dispositif prévu par l’article 20 de ce texte, que nous examinerons tout à l'heure, soulève des difficultés :
« [Dans] la mise en œuvre du nouveau dispositif, [les organismes] ne disposent pour le moment d’aucun savoir-faire.
« Par ailleurs, de nombreux organismes de logement social sont dans des situations financières difficiles, ce qui pourrait constituer un obstacle à l’application du dispositif prévu par le présent article. »
Quant à nous, nous nous interrogeons sur l’effet réel de ce dispositif et sur les bénéfices que les SAHLM pourraient en tirer. Utiliseront-elles ce régime, étant donné les contraintes de gestion qu’il impliquera ?
La seule motivation de ces sociétés sera certainement la disparition des financements de l’État, qui, en les privant des moyens de financer des projets immobiliers de logement social, les obligera à prendre des parts dans les SCI et à se limiter à ce rôle !
Elles deviendraient alors une nouvelle source de financement pour le logement privé, et voilà tout. Mais qu’adviendra-t-il si la SCI décide d’augmenter ses loyers et de sortir du cadre du logement social ?
Je veux rappeler quel est aujourd'hui l’état financier des SAHLM dans les départements d’outre-mer. Dans cette perspective, je présenterai seulement la situation de la SAHLM de Guyane, évoquée dans le rapport pour avis de la commission des affaires économiques, qu’a rédigé notre collègue Daniel Marsin.
La SAHLM de Guyane est propriétaire d’environ 4 000 logements. Un premier plan de redressement a été mis en place au début des années quatre-vingt-dix. En 2004, le « 1% logement » est intervenu, via un pacte d’actionnaires qui a été rompu peu après. En 2008, un nouveau plan de redressement a été mis en œuvre, sous l’égide de la Caisse de garantie du logement locatif social, la CGLLS, et de l’Union d’économie sociale pour le logement, l’UESL, qui visait à accorder une aide de 85 millions d’euros sous forme de subventions et de prêts.
Dans la conclusion de leur encadré consacré à la situation de la SAHLM de Guyane, les auteurs du rapport précité affirment que :
« La SAHLM de Guyane vit donc sous la menace d’une saisine du tribunal de commerce par le commissaire aux comptes.
« La fédération des SAHLM devrait demander au ministère du logement la désignation d’un “administrateur provisoire”. Cette situation pèse sur les locataires, aucune rénovation d’immeubles ne pouvant avoir lieu. »
Dans ces conditions, et à la lumière de cet exemple, ne vaudrait-il pas mieux attribuer aux SAHLM les moyens de fonctionnement et les personnels nécessaires, plutôt que de leur confier de nouvelles missions sans pouvoir garantir qu’elles les assumeront ?
Je crains, pour ma part, que l’impact d’une telle mesure sur le logement social dans les départements d’outre-mer ne soit très limité.
Enfin, en ce qui concerne les mesures de réquisition des logements vacants prévues par l’ordonnance n° 45-2394 du 11 octobre 1945, le groupe CRC-SPG défend la mise en œuvre de ces dispositions et leur extension aux départements d’outre-mer, où elles ne s’appliquaient pas, mettant fin ainsi à une exception historique.
Nous ne pouvons donc que saluer cette disposition, même si, pour l’heure, elle ne concerne qu’un petit nombre de logements, hélas.
Je suis saisi de cinq amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
Les amendements n° 253, 280, 355 rectifié et359 sont identiques.
L'amendement n° 253 est présenté par MM. Gillot et Repentin.
L'amendement n° 280 est présenté par M. Virapoullé.
L'amendement n° 355 rectifié est présenté par Mme Payet et les membres du groupe Union centriste.
L'amendement n° 359 est présenté par M. Marsin.
Ces quatre amendements sont ainsi libellés :
I. - Rédiger comme suit le texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 472-1-8 du code de la construction et de l'habitation :
« Art. L. 472-1-8. - 1. En Guadeloupe, en Guyane, en Martinique, à la Réunion, à Saint-Martin et à Mayotte, les sociétés anonymes d'habitation à loyer modéré et les sociétés anonymes coopératives d'habitations à loyer modéré peuvent acquérir des parts ou actions de sociétés civiles immobilières, de sociétés civiles de promotion immobilière ou de toute entreprise dont l'objet est de construire ou d'acquérir des logements si les conditions suivantes sont réunies :
« 1° Les logements sont loués nus à des personnes physiques qui en font leur résidence principale ou à des sociétés anonymes d'habitations à loyer modéré ou à des sociétés anonymes coopératives d'habitations à loyer modéré qui les sous-louent à des personnes physiques qui en font leur résidence principale ;
« 2° Le loyer et les ressources du locataire ou, le cas échéant, du sous-locataire n'excèdent pas des plafonds fixés par décret.
« 2. Ces sociétés peuvent, en qualité de prestataires de services, construire, vendre ou gérer des logements à usage d'habitation pour le compte des sociétés civiles, mentionnées au 1 et dans les conditions de plafonds de ressources et de loyers définies au 2° du 1. »
II. - Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... - L'article 81 de la loi n° 2006-872 du 13 juillet 2006 portant engagement national pour le logementest abrogé.
La parole est à M. Jacques Gillot, pour présenter l’amendement n° 253.
Il s'agit d’un amendement technique.
Les compétences des SAHLM et des coopératives d’HLM sont encadrées par le code de la construction et de l’habitation. L'article 81 de la loi portant engagement national pour le logement permet actuellement à ces sociétés d’HLM d’assurer des prestations de services, de construction, de vente et de gestion de logement.
L’article 17 du présent projet de loi a pour objet d’autoriser ces sociétés d’HLM à acheter des parts et des actions de sociétés civiles immobilières, ou SCI, dont l’objet est de construire ou d’acquérir des logements destinés à la résidence principale des personnes physiques qui respectent certaines conditions de ressources et de loyer.
Cet amendement vise à confirmer et compléter les dispositions de l’article 81 de la loi portant engagement national pour le logement, tout en précisant les conditions des nouvelles dispositions de l’article 17 du projet de loi.
Il tend ainsi à préciser que ces logements pourront être loués à des sociétés d’HLM ou à des sociétés coopératives d’HLM, qui les sous-loueront au titre de la résidence principale à des ménages dont les ressources et le loyer sont inférieurs aux plafonds requis.
La parole est à M. Jean-Paul Virapoullé, pour présenter l'amendement n° 280.
La parole est à Mme Anne-Marie Payet, pour présenter l'amendement n° 355 rectifié.
Monsieur le président, si vous le permettez, mon intervention aura moins pour objet de présenter mon amendement, qui est défendu, que de souligner deux points.
Tout d'abord, même si nous sommes favorables au dispositif de défiscalisation et souhaitons que les sociétés d’HLM puissent pleinement en bénéficier, nous avons voulu obtenir un certain nombre de garanties, et je réponds ici à Mme Terrade.
Ainsi, nous avons souhaité que la ligne budgétaire unique soit le principal mode de financement du logement social, et cela pendant au moins trois ans ; ce point figure dans le rapport de la commission des affaires économiques.
Ensuite, il est vrai que le dispositif de défiscalisation pourra susciter quelques difficultés, comme l’ont montré également les auteurs du rapport de la commission des affaires économiques. Pour autant, je tiens à le souligner, une fois qu’il aura été rodé, ce dispositif fonctionnera de façon efficace et satisfaisante.
En effet – ce point n’a peut-être pas été assez souligné au cours de notre débat –, les sociétés qui s’associeront aux SAHLM, notamment, ne pourront pas facilement sortir du dispositif, tout simplement parce qu’elles sont tenues par la loi d’y rester pendant au moins cinq ans et de répercuter 60 % de l’avantage fiscal sur le montant des loyers.
À l’issue de cette période de cinq ans, elles seront obligées de céder le bien aux sociétés d’HLM en rétrocédant, là encore, 60 % de l’avantage fiscal.
Par conséquent, s’il est exact que la mise en place du dispositif risque d’être quelque peu difficile, nous disposons tout de même d’un certain nombre de garanties, ne serait-ce que sur ce point précis.
L'amendement n° 65, présenté par Mme Beaufils, MM. Foucaud, Vera et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du Parti de gauche, est ainsi libellé :
I. - Dans le texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 472-1-8 du code de la construction et de l'habitation, après les mots :
maximum fixés
insérer les mots :
par référence aux loyers de programmes sociaux thématiques
II. - Dans le même texte, remplacer les mots :
plafond fixé par décret
par les mots :
plafonds d'accès au logement social majorés de 20 %
La parole est à Mme Odette Terrade.
Cet amendement a pour objet de préciser le cadre dans lequel s’appliquera l’article L. 472-1-8 du code de la construction et de l’habitation.
En effet, la participation des SAHLM et des coopératives d’HLM au capital des SCI se trouve pour l’instant soumise à un « loyer maximum fixé par décret ».
Les loyers des logements sociaux sont déjà fixés par la loi. Pourquoi ne pas y faire référence ici, au lieu de passer par un décret ?
Nous proposons donc, à travers cet amendement, d’inscrire dans le projet de loi une référence explicite aux loyers des programmes sociaux thématiques. Ainsi, il sera clair que les organismes d’HLM peuvent participer au capital des SCI à la condition que les logements appartenant à ces sociétés respectent les loyers fixés par la loi dans le domaine du logement social.
La même logique de précision inspire le II de cet amendement. Il s'agit, cette fois, de déterminer clairement les plafonds de ressources qu’il faut respecter pour accéder à ces logements, en tenant compte de la situation particulière de la demande de logement dans les départements d’outre-mer.
Pour rappel, quelque 80 % de la population outre-mer entrent dans les critères d’accès au logement social, car, compte tenu du niveau actuel des loyers dans le logement privé, il est encore plus difficile de se loger dans ces départements qu’en métropole.
Nous proposons donc de remplacer les mots : « plafond fixé par décret » par les mots : « plafonds d’accès au logement social majorés de 20 % ».
C’est à ces conditions, selon nous, que la participation des organismes d’HLM au capital des SCI pourra être utile au logement et aux habitants, et ne pas se résumer à une injection d’argent public dans le logement privé, sans résultat social garanti pour les populations des départements d’outre-mer !
La commission est favorable à l’harmonisation opérée par l’article 17 du projet de loi.
S'agissant de l’extension de cette disposition à Mayotte et à Saint-Martin, elle souhaite obtenir du Gouvernement la confirmation que ce champ correspond bien aux collectivités qui ne disposent pas de la compétence « ». Si tel est le cas, elle émettra un avis favorable sur les amendements identiques n° 253, 280, 355 rectifié et 359.
En ce qui concerne l’amendement n° 65, il semble préférable, de même que pour l’ensemble des dispositifs de défiscalisation applicables au logement outre-mer, de continuer à fixer les plafonds par décret, ce qui offre davantage de souplesse, étant donné la situation sociale spécifique de ces territoires, notamment en matière de logement.
La commission émet donc un avis défavorable.
Les amendements identiques n° 253, 280, 355 rectifié et 359 s’inscrivent dans la logique qui vient d’être évoquée. À cet égard, je confirme que l’article 17 du projet de loi prend également en compte le nouveau statut de Saint-Martin. En revanche, il ne couvre pas Saint-Barthélemy, car cette collectivité dispose de la compétence « logement ».
Le Gouvernement émet donc un avis favorable sur les amendements identiques n° 253, 280, 355 rectifié et 359, maisest défavorable à l’amendement n° 65.
Je mets aux voix les amendements identiques n° 253, 280, 355 rectifié et 359.
Les amendements sont adoptés à l'unanimité des présents.
L'article 17 est adopté.
Après l'article 815-5 du code civil, il est inséré un article 815-5-1 ainsi rédigé :
« Art. 815-5-1. - Toutefois, en Guadeloupe, en Guyane, en Martinique ou à La Réunion, lorsqu'un immeuble indivis à usage d'habitation est inoccupé depuis plus d'une année civile, et que le consentement de tous les co-indivisaires ne peut être obtenu, tout indivisaire diligent peut exécuter les travaux d'amélioration, de réhabilitation et de restauration de l'immeuble indivis, et accomplir tous les actes d'administration et les formalités de publicité y afférents à l'exclusion de tous autres actes de disposition, si ces travaux, actes et formalités ont pour objet la location de l'immeuble à une ou plusieurs personnes physiques, pour en faire leur résidence principale, et s'il y a été préalablement autorisé dans les conditions prévues aux articles 813-1 à 813-9. »
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, je me réjouis d’avoir été entendu – une fois n’est pas coutume ! – sur la question de l’indivision.
Lors de la réforme des successions et des libéralités, discutée au Sénat voilà bientôt trois ans, j’avais déposé un amendement tendant à faciliter la gestion des indivisions dans les départements d’outre-mer, grâce à la création d’un GIP, groupement d’intérêt public.
Or la création d’un GIP a été acceptée pour la Corse, qui connaît exactement les mêmes problèmes, mais repoussée pour ce qui concerne les départements d’outre-mer, dans les deux cas par voie d’amendement. Mais c’est là une situation à laquelle nous sommes habitués, comme l’a rappelé Mme Lucette Michaux-Chevry !
En effet, si la règle de la majorité des deux tiers retenue dans la loi portant réforme des successions et des libéralités constituait une véritable avancée par rapport à celle de l’unanimité, cette nouvelle majorité qualifiée risquait de ne pas être plus satisfaisante, compte tenu de la complexité de certains dossiers dus à des successions non réglées depuis des générations, à un nombre important de co-indivisaires ou à l’absence de titre de propriété.
Les ravages que la non-gestion des successions peut faire dans nos villes sont considérables. Je le rappelle, en 1999, le dernier recensement général de la population, mené notamment par l’INSEE, faisait état de 18 700 logements vacants à la Martinique, dans la majorité des cas pour cause d’indivision, soit un taux de vacance de 12 %, sur un parc total de 156 000 logements.
Or, parce qu’ils se dégradent, ces immeubles posent de graves problèmes de salubrité et de sécurité, surtout dans les centres-bourgs. Ils contribuent également à ternir l’image de nombreux quartiers.
De surcroît, ce phénomène urbain, très répandu, connaît une forte progression. Malheureusement, un grand nombre de ces logements échappent à toute politique de réhabilitation ou de restauration, laquelle constitue pourtant un outil indispensable pour faire face à la crise du logement que subissent les départements d’outre-mer et que le Gouvernement connaît bien, monsieur le secrétaire d'État ; en tout cas, ce n’est pas faute pour moi de l’en avoir averti !
Cet article va donc permettre de résoudre plus facilement, plus rapidement et, ainsi, plus fréquemment, des cas dans lesquels les indivisaires ont abandonné toute gestion.
Ce qui compte, c’est de trouver une solution pour des indivisaires qui souhaitent que leur bien ne perde pas de valeur et, pour cela, sont contraints de contourner des indivisaires minoritaires « dormants et inconscients ».
Pour eux et pour notre paysage urbain, je vous remercie.
Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L'amendement n° 242, présenté par M. Virapoullé, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit cet article :
Après l'article 815-7 du code civil, il est inséré un article 815-7-1 ainsi rédigé :
« Art. 815-7-1.- En Guadeloupe, en Guyane, en Martinique, à la Réunion, à Saint-Barthélemy et à Saint-Martin, lorsqu'un immeuble indivis à usage d'habitation ou à usage mixte d'habitation et professionnel est vacant ou n'a pas fait l'objet d'une occupation effective depuis plus de deux années civiles, un indivisaire peut être autorisé en justice, dans les conditions prévues aux articles 813-1 à 813-9, à exécuter les travaux d'amélioration, de réhabilitation et de restauration de l'immeuble ainsi qu'à accomplir les actes d'administration et formalités de publicité, ayant pour seul objet de le donner à bail à titre d'habitation. »
La parole est à M. Jean-Paul Virapoullé, rapporteur pour avis.
La commission des lois propose, par cet amendement, tout d’abord, d’étendre à Saint-Martin et à Saint-Barthélemy le bénéfice de la disposition qui est prévue ; de l’étendre aux locaux « à usage d’habitation ou à usage mixte d’habitation et professionnel » ; de porter le délai de vacance à deux années civiles au lieu d’une année, d’exiger une occupation effective afin de garantir le droit des indivisaires, ce qui est la moindre des choses, et, enfin, d’insérer cette disposition au bon endroit du code civil.
Le sous-amendement n° 435, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
I. - Dans le texte proposé par l'amendement n° 242 pour l'article 815-7-1 du code civil, remplacer les mots :
plus de deux années civiles
par les mots :
plus d'une année civile
II. - Compléter ce même texte par le mot :
principale
La parole est à M. le secrétaire d'État.
Le Gouvernement sera favorable à l’amendement n° 242 sous réserve de l’adoption du présent sous-amendement, qui vise notamment à ce que ne soit prise en compte qu’une seule année civile au lieu de deux années civiles, ce qui lui semble plus raisonnable.
L'amendement n° 123, présenté par MM. Patient, Antoinette, S. Larcher, Lise, Gillot, Tuheiava et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Dans le texte proposé par cet article pour l'article 815-5-1 du code civil, remplacer les mots :
d'une année civile
par les mots :
de deux années civiles
La parole est à M. Georges Patient.
Cet amendement vise à prolonger d'une année le délai d'inoccupation d'un immeuble indivis à usage d'habitation au terme duquel des travaux d'amélioration, de réhabilitation et de restauration de cet immeuble peuvent être entrepris par un indivisaire diligent.
La commission est favorable à l’amendement n° 242, d’autant que les modifications proposées rejoignent en partie les remarques qu’elle a elle-même formulées.
Sur le sous-amendement n° 435 et l’amendement n° 123, la commission des finances souhaite, dans la mesure où elle s’est ralliée à l’amendement n° 242, entendre l’avis de la commission des lois.
Par cohérence avec la réponse que vous a faite M. le secrétaire d’État, selon laquelle la collectivité de Saint-Barthélemy est compétente en matière de logement, je vous suggère, monsieur le rapporteur pour avis, de rectifier l’amendement n° 242 en supprimant les mots « et à Saint-Barthélemy ».
Monsieur le rapporteur pour avis, consentez-vous à rectifier votre amendement dans le sens suggéré par M. Magras ?
Je suis donc saisi de l'amendement n° 242 rectifié, présenté par M. Virapoullé, au nom de la commission des lois, qui est ainsi libellé :
Rédiger comme suit cet article :
Après l'article 815-7 du code civil, il est inséré un article 815-7-1 ainsi rédigé :
« Art. 815-7-1.- En Guadeloupe, en Guyane, en Martinique, à la Réunion et à Saint-Martin, lorsqu'un immeuble indivis à usage d'habitation ou à usage mixte d'habitation et professionnel est vacant ou n'a pas fait l'objet d'une occupation effective depuis plus de deux années civiles, un indivisaire peut être autorisé en justice, dans les conditions prévues aux articles 813-1 à 813-9, à exécuter les travaux d'amélioration, de réhabilitation et de restauration de l'immeuble ainsi qu'à accomplir les actes d'administration et formalités de publicité, ayant pour seul objet de le donner à bail à titre d'habitation. »
La parole est à Mme Lucette Michaux-Chevry, pour explication de vote.
Je suis favorable au délai d’un an proposé par le Gouvernement, d’autant que les logements inoccupés sont squattérisés par des étrangers.
Cependant, je ne comprends pas très bien pourquoi la précision suivante est apportée dans l’amendement n° 242 rectifié : « un indivisaire peut être autorisé en justice […] à exécuter les travaux ». Si, en effet, il est indivisaire, il est autorisé à faire les travaux, puisqu’il doit préserver son patrimoine.
M. Jean-Paul Virapoullé, rapporteur pour avis, s’exclame.
J’insiste, monsieur le rapporteur pour avis : un indivisaire peut faire les travaux ; c’est son immeuble, cela va de soi ! Il peut, certes, en demander l’autorisation au juge, mais pourquoi chercher à préciser, par voie d’amendement, ce qui est déjà possible de par la loi ? Je ne comprends pas.
L’explication est la suivante : un indivisaire tout seul ne peut pas faire les travaux.
C’est partout pareil : il faut qu’une majorité d’indivisaires l’y autorise.
La parole est à Mme Lucette Michaux-Chevry, pour répondre à M. le rapporteur pour avis.
Il peut le demander en justice, mais c’est la loi : pourquoi, alors, le préciser dans cet amendement ?
Pour avoir plaidé pendant quarante-cinq ans, je puis affirmer que c’est tous les jours qu’un copropriétaire, estimant que son immeuble est en danger, demande au juge de l’autoriser à faire des travaux. Le juge l’autorise parfois à dire d’expert pour éviter, justement, que les autres indivisaires ne contestent sa décision. Je ne vois pas pourquoi nous serions obligés d’écrire dans la loi ce qui se pratique déjà de façon régulière et en toute légalité.
M. Jean-Paul Virapoullé, rapporteur pour avis. Il existe deux cas de figure. Vous avez raison sur un cas, ma chère collègue, et nous avons raison sur l’autre.
Sourires
Vous avez raison s’agissant du cas où il s’agit de faire des travaux pour maintenir la maison debout, faire en sorte qu’elle ne tombe pas en ruine, mais nous avons raison, nous, en affirmant que l’indivisaire ne peut pas faire réaliser des travaux pour remettre un logement en état afin de le louer : il faut alors réunir une majorité d’indivisaires ou demander à la justice l’autorisation de le faire.
Monsieur le rapporteur pour avis, me permettez-vous de vous interrompre ?
La parole est à Mme Lucette Michaux-Chevry, avec l’autorisation de M. Jean-Paul Virapoullé, rapporteur pour avis.
Je ne peux pas laisser la Haute Assemblée introduire des précisions inutiles dans la loi.
Si l’immeuble est en ruine, l’indivisaire saisit le juge pour, à dire d’expert, constater le délabrement dudit immeuble et donner l’autorisation de faire effectuer les travaux nécessaires à la remise en état.
On est là dans une compétence judiciaire, et je ne vois pas pourquoi le législateur serait obligé d’écrire dans le présent projet de loi ce qui existe déjà.
Je le répète : le juge, par référé, ordonne la nomination d’un expert qui vérifie l’état de l’immeuble et décide d’autoriser les travaux nécessaires. Pourquoi l’écrire ici ?
Ma chère collègue, vous avez partiellement raison, mais ce que vous évoquez ne correspond pas au cas visé par ce texte.
Cet amendement vise le cas spécifique d’un logement qui n’est pas en ruine mais qui n’est pas habitable.
Mme Lucette Michaux-Chevry proteste.
On me confirme, de source autorisée, que cet amendement vise bien le cas précis d’une maison que l’on peut rénover afin de la rendre habitable en vue d’un bail à usage d’habitation principale, ce qui nécessite l’autorisation d’une majorité d’indivisaires.
Je souhaiterais entendre le Gouvernement sur ce sujet.
Je tiens à apporter une précision : la commission des finances s’est ralliée à l’amendement de la commission des lois et est donc défavorable à la réduction du délai de vacance proposée dans le I du sous-amendement n° 435.
En revanche, il pourrait être opportun, compte tenu de l’objet de cet article, de mentionner que cette remise sur le marché locatif ne concerne que des baux à usage d’habitation principale; elle est donc favorable au II du sous-amendement du Gouvernement.
Enfin, M. Patient pourrait retirer l’amendement n° 123, pour se rallier à l’amendement n° 242 rectifié de la commission des lois, qui lui donne satisfaction.
Nous maintenons qu’il est plus raisonnable de ramener le délai de vacance à un an.
Nous pourrions essayer de trouver un compromis en réponse au différend juridique entre Maître Michaux-Chevry
Sourires
Si ma mémoire est bonne, en l’état actuel du droit, la loi n’autorise pas un indivisaire non majoritaire à pouvoir ester en justice simplement pour remettre un bien en état et le louer. Un indivisaire seul – en tout cas, j’ai connu quelques cas de cette nature dans la commune dont je suis le maire – ne peut agir ainsi que si le bien est menacé de ruine et se révèle donc dangereux.
En apportant cette précision, nous ne sommes donc pas redondants ; au contraire, nous offrons au juge la possibilité de pouvoir automatiquement accepter la requête d’un indivisaire seul quand il s’agit de remettre un logement en état afin de le louer.
Nous faisons non pas une loi bavarde, mais une loi plus précise, qui fournira peut-être un outil de plus sur ce sujet.
Il reste ce conflit sur la durée du délai : un an ou deux ans ? La meilleure manière de le régler serait peut-être de négocier un an et demi ?
Sourires
M. Jean- Étienne Antoinette. Je partage l’avis de M. Virapoullé. Toutefois, je souhaiterais qu’il me rassure : tout à l’heure, il a été reproché à M. Lise de vouloir faire adopter un amendement relatif uniquement à la Guadeloupe et à la Martinique ; j’espère que, maintenant, nous ne légiférons pas pour un cas particulier ?
Sourires.
Par ailleurs, il me semble nécessaire d’en rester à une période de deux ans : compte tenu de la longueur des procédures, une année sera insuffisante, monsieur le secrétaire d’État.
Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, n'adopte pas le I du sous-amendement.
Le II du sous-amendement est adopté.
Le sous-amendement est adopté.
L’amendement est adopté.
En conséquence, l’article 18 est ainsi rédigé et l’amendement n° 123 n’a plus d’objet.
I. - Est autorisée la création d’un groupement d’intérêt public, chargé de rassembler tous les éléments propres à reconstituer les titres de propriété dans les départements d’outre-mer pour les biens fonciers et immobiliers qui en sont dépourvus, dans les conditions prévues aux articles L. 341-1 à L. 341-4 du code de la recherche. À cet effet, il peut prendre toute mesure permettant de définir ces biens et d’en identifier leurs propriétaires et créer ou gérer l’ensemble des équipements ou services d’intérêt commun rendus nécessaires pour la réalisation de son objet.
II. - Le groupement d’intérêt public est constitué de l’État, titulaire de la majorité des voix au sein de l’assemblée générale et du conseil d’administration, des régions d’outre-mer concernées ainsi que d’associations d’élus locaux et de représentants des officiers publics ministériels intéressés des régions concernées.
Toute autre personne morale de droit public ou privé peut être admise comme membre du groupement dans les conditions fixées par la convention constitutive. La représentation de chacun de ces membres au conseil d’administration du groupement est déterminée par la même convention.
III. - Le président du conseil d’administration est désigné après avis des présidents des conseils régionaux de Guadeloupe, de Guyane, de Martinique et de La Réunion.
IV. - Le personnel du groupement est constitué de personnes mises à disposition du groupement par ses membres par application de l’article L. 341-4 du code de la recherche. Le groupement peut par ailleurs recruter, en tant que de besoin, des agents contractuels de droit public ou de droit privé.
V. - Le groupement d’intérêt public, ainsi que les personnes déléguées par lui peuvent se faire communiquer de toute personne, physique ou morale, de droit public ou de droit privé, tous documents et informations nécessaires à la réalisation de la mission du groupement, y compris ceux contenus dans un système informatique ou de traitement de données à caractère personnel, sans que puisse leur être opposé le secret professionnel.
Les agents du groupement et les personnes déléguées par lui sont tenus de respecter la confidentialité des informations recueillies au cours de leur mission sous peine des sanctions prévues aux articles 226-13, 226-31 et 226-32 du code pénal.
Toutefois, ces informations peuvent être communiquées aux officiers publics ministériels quand elles sont nécessaires à l’exercice de leurs missions.
VI. - Un décret en Conseil d’État détermine les conditions d’application du présent article.
Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 68, présenté par Mme Beaufils, MM. Foucaud, Vera et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du Parti de gauche, est ainsi libellé :
I. - Après le mot :
locaux
supprimer la fin du premier alinéa du II de cet article.
II. - Dans la première phrase du second alinéa du même II, supprimer les mots :
ou privé
III. - Après le mot :
public
supprimer la fin de la seconde phrase du IV de cet article.
IV. - Supprimer le dernier alinéa du V de cet article.
La parole est à M. Bernard Vera.
J’appelle donc en discussion les amendements n° 66 et 67, présentés par Mme Beaufils, MM. Foucaud, Vera et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du Parti de gauche.
L’amendement n° 66 est ainsi libellé :
I. - Après les mots :
associations d’élus locaux
supprimer la fin du premier alinéa du II de cet article
II. - Dans la première phrase du second alinéa du même II, supprimer les mots :
ou privé
L’amendement n° 67 est ainsi libellé :
Supprimer la seconde phrase du IV de cet article.
Veuillez poursuivre, mon cher collègue.
L’amendement n° 66 vise à modifier la composition du groupement d’intérêt public, ou GIP, qui, créé à l’article 19, sera chargé de la reconstitution des titres de propriété dans les départements d’outre-mer.
Le rapport de la commission des finances est explicite à ce sujet, les titres de propriété et l’évaluation des valeurs locatives existant dans les départements d’outre-mer posent de réels problèmes. Je ne reviendrai pas ici sur les raisons historiques de cet état de fait. Nous partageons le constat, et il faut pallier au plus vite de telles carences.
L’article 19 prévoit donc la création d’un groupement d’intérêt public pour effectuer ce travail rendu nécessaire.
Je tiens à le rappeler, ce rôle aurait dû échoir au service du cadastre, qui, d’ailleurs, à la suite des réformes, réorganisations et autres démantèlements du service public, se retrouve si limité dans ses moyens humains et matériels qu’il n’est plus en mesure de remplir sa mission.
Les compétences et expertises du service du cadastre sont aujourd’hui en voie de disparition. Cette situation laisse aux cabinets privés d’expertise le loisir de fixer les prix des biens en fonction des intérêts de leurs clients.
Ce rappel de la situation du cadastre éclaire les raisons de notre amendement, car il est prévu à cet article de faire entrer dans la composition du groupement d’intérêt public ayant pour mission de reconstituer les titres de propriétés et, donc, de procéder à l’évaluation des valeurs locatives, des « officiers publics ministériels intéressés des régions concernées », c’est-à-dire, entre autres, les notaires et les huissiers. Ce faisant, on introduit dans cette instance des représentants des intérêts des propriétaires privés.
Il semble donc que leur participation au groupement d’intérêt public fasse courir un risque de conflit d’intérêt.
C’est pour ces raisons que nous proposons de supprimer la participation des « officiers publics ministériels » au GIP et de supprimer le mot « privé » de la phrase : « Toute autre personne morale de droit public ou privé peut être admise comme membre du groupement dans les conditions fixées par la convention constitutive. »
La commission émet un avis défavorable sur l’amendement n° 68, la modification proposée n’étant pas opportune. Il nous semble en effet nécessaire de laisser une certaine souplesse au GIP afin de lui permettre de fonctionner dans des conditions optimales. Cela implique qu’il puisse admettre en son sein certaines personnes morales à ce jour non identifiées.
La commission est également défavorable à l’amendement n° 66, la modification proposée n’étant pas non plus opportune.
Elle émet le même avis sur l’amendement n° 67 : il n’est pas souhaitable de supprimer la souplesse de recrutement pour le GIP.
Monsieur Vera, le Gouvernement émet le même avis défavorable que la commission sur ces trois amendements. Quelle idée saugrenue, tout de même, que de considérer inopportune la présence de notaires dans un GIP chargé précisément de régler les problèmes d’indivisions ! Une telle présence constitue, au contraire, l’assurance de pouvoir trouver une solution. Si les professionnels ne sont pas représentés, comment voulez-vous que le GIP puisse avancer ?
Faisons confiance aux professionnels concernés et ne voyons pas des conflits d’intérêt partout : les officiers ministériels sont, par nature, des personnes qui savent distinguer l’intérêt général des intérêts plus particuliers. Leur présence est indispensable pour démêler ces dossiers extraordinairement compliqués. Ces derniers nécessitent l’expertise des professionnels du droit, qui, je le répète, ont évidemment toute leur place dans ce GIP.
L’amendement n’est pas adopté.
L’amendement n’est pas adopté.
L’amendement n’est pas adopté.
L’amendement n° 124, présenté par MM. Patient, Antoinette, S. Larcher, Lise, Gillot, Tuheiava et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Remplacer VI de cet article par deux paragraphes ainsi rédigés :
VI. - Pour l’accomplissement de sa mission, le groupement peut créer un fichier de données à caractère personnel dans les conditions définies par la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés.
VII. - Un décret en Conseil d’État détermine les conditions d’application du présent article, après avis de la Commission nationale de l’informatique et des libertés en ce qui concerne les dispositions d’application des V et VI.
La parole est à M. Georges Patient.
Cet amendement vise à compléter les dispositions créant un groupement d’intérêt public chargé de reconstituer les titres de propriétés dans les départements d’outre-mer. Nous souhaitons apporter des garanties quant à la création d’un fichier de données à caractère personnel et à la saisine de la Commission nationale de l’informatique et des libertés.
Mon cher collègue, la commission partage tout à fait votre souci et a elle-même souligné que, contrairement à ce qui avait prévalu pour la création du GIP en Corse, le projet de loi ne prévoyait ni la constitution d’un fichier ni le recours à la CNIL.
La commission émet donc un avis favorable sur cet amendement.
L’amendement est adopté.
L’article 19 est adopté.
L’amendement n° 125, présenté par MM. Gillot, S. Larcher, Lise, Patient, Antoinette, Tuheiava, Repentin et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Avant l’article 20, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le financement du logement social outre-mer est principalement assuré par la ligne budgétaire sur la base d’une programmation pluriannuelle des crédits de paiement et d’engagement.
La parole est à M. Jacques Gillot.
La ligne budgétaire unique doit rester le socle principal du financement du logement social outre-mer, avec une programmation pluriannuelle tant en autorisations d’engagement qu’en crédits de paiement à la hauteur des importants besoins outre-mer.
Le dispositif de défiscalisation proposé dans le projet de loi est une ressource aléatoire dépendant de la dynamique des investisseurs et ne peut être le seul moyen de financement du logement social.
Mon cher collègue, la commission partage votre souci. Comme vous l’avez souligné, la LBU doit rester le socle principal du financement du logement social outre-mer.
Cela étant, il ne semble pas nécessaire de faire apparaître explicitement cette volonté dans le projet de loi. La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
Monsieur Gillot, le Gouvernement est évidemment favorable à ce que la LBU reste le « socle principal du financement du logement social outre-mer ». Il l’a d’ailleurs répété à maintes reprises et a pris des mesures budgétaires sur trois années : la LBU a ainsi été portée de 190 millions d’euros à 254 millions d’euros.
Il n’y a rien, dans le texte proposé, qui puisse faire penser que ce ne soit pas le cas. Pour que la loi soit la plus efficace et la moins bavarde possible, le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.
Il va sans dire que votre message a été entendu, et ce depuis fort longtemps. Le fait d’inscrire une telle précision dans la loi n’apporte rien à l’engagement très fort du Gouvernement en la matière.
Cet amendement de nos collègues du groupe socialiste présente, sous certains aspects, le caractère d’une déclaration d’intention qu’il conviendrait, en pratique, d’affirmer. Il reprend par ailleurs l’esprit d’un amendement que nous avions nous-mêmes déposé et qui a subi – c’est fort regrettable ! – les foudres de l’article 40 de la Constitution.
En tout état de cause, nous sommes effectivement partisans de la « sanctuarisation » des ressources de la ligne budgétaire unique destinées au logement outre-mer. La situation sur place en la matière est suffisamment préoccupante pour que nous soyons attentifs à ce que des moyens soient réservés et mis en œuvre pour y répondre.
La ligne budgétaire unique pour l’outre-mer intervient d’ailleurs dans des domaines très complexes, ressortissant de la construction de logements sociaux, de la résorption de l’habitat insalubre, du financement de l’accession sociale à la propriété et de tous sujets de même nature.
Au demeurant, l’extension, prévue par le projet de loi, des compétences des organismes d’HLM outre-mer, qui sont, pour certains, déjà confrontés à des difficultés particulières, pose effectivement la question de l’abondement de la LBU. D’autant que, on le sait, certaines contraintes de construction, comme le respect de normes antisismiques ou anticycloniques, viennent s’ajouter aux coûts de réalisation déjà rendus élevés par les charges liées au transport des matériaux.
M. Jacques Gillot. Monsieur le président, la commission et le Gouvernement sont favorables au principe de mon amendement, et c’est suffisamment rare pour que je m’en contente !
Sourires
L’amendement n° 125 est retiré.
La parole est à M. le président de la commission des finances.
Mes chers collègues, je souhaite faire le point sur l’avancement de nos travaux.
Lorsque la séance a été levée, la nuit dernière, nous étions sur un rythme qui accréditait l’hypothèse que la discussion pourrait se terminer ce soir.
Nous avons eu ce matin des débats tout à fait intéressants, mais nous avons examiné trente-six amendements en trois heures et demie, soit à peu près neuf amendements par heure.
Si nous maintenons ce rythme cet après-midi, mieux vaut nous organiser pour être présents demain en séance. Si, en revanche, nous retrouvons le rythme d’hier, nous pouvons nourrir l’espoir d’achever nos travaux cette nuit.
Marques d’approbation sur l'ensemble des travées
M. le président. Monsieur le président de la commission des finances, permettez-moi d’apporter un léger rectificatif, d’ordre mathématique, à vos propos : le rythme depuis ce matin est non pas de neuf amendements par heure, mais de dix !
Sourires.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quinze heures.
La séance est suspendue.
La séance, suspendue à douze heures cinquante-cinq, est reprise à quinze heures, sous la présidence de M. Guy Fischer.