La séance est ouverte à dix heures.
Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n'y a pas d'observation ?...
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d'usage.
L'ordre du jour appelle la suite de la discussion, après déclaration d'urgence, du projet de loi complété par une lettre rectificative de programmation pour la cohésion sociale (n°445 rectifié, (2003-2004), n° 32, 39, 33, 34 et 37).
Je rappelle que la discussion générale a été close hier soir.
Question préalable
Je suis saisi, par Mme Borvo, MM. Ralite, Muzeau, Fischer et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, d'une motion n° 394, tendant à opposer la question préalable.
Cette motion est ainsi rédigée :
En application de l'article 44, alinéa 3, du règlement, le Sénat décide qu'il n'y a pas lieu de poursuivre la délibération sur le projet de loi de programmation pour la cohésion sociale (n° 445 rectifié).
Je rappelle que, en application de l'article 44, alinéa 8, du règlement du Sénat, ont seuls droit à la parole sur cette motion l'auteur de l'initiative ou son représentant, pour quinze minutes, un orateur d'opinion contraire, pour quinze minutes également, le président ou le rapporteur de la commission saisie au fond et le Gouvernement.
En outre, la parole peut être accordée pour explication de vote, pour une durée n'excédant pas cinq minutes, à un représentant de chaque groupe.
La parole est à M. Jack Ralite, auteur de la motion.
Monsieur le ministre, je trouve que vous n'avez vraiment pas de chance !
Voilà des mois qu'il vous est fait réputation d'une politique sociale concernant l'emploi, le logement et l'égalité des chances et, pour ce faire, vous vous déplacez, vous consultez, vous allez même au royaume de Danemark qui, à entendre tous ses visiteurs en cohésion sociale, n'est plus pourri comme au temps d'Elseneur.
Mais demeurent encore des Fortinbras. Je m'explique : vous étiez parvenu à un ensemble dont le Conseil économique et social a dit très fort toutes les limites mais dont personne ne niait l'orientation humanitaire. Je ne dis pas « humaniste ». En effet, votre projet tente de panser des plaies mais ne s'en prend jamais à la racine des choses. Vous parlez du malheur des pauvres mais non pas du mal. Vous traitez le pauvre dans l'homme et non l'homme dans le pauvre.
Eh bien, même cela, les Fortinbras d'aujourd'hui n'en veulent pas ! Ils vous ont encadré par le projet de loi « MEDEF-Larcher », ultradérégulateur pour les licenciements économiques et quasi silencieux sur les licenciements des précaires, et par le rapport Camdessus, qui présente peut-être quelques idées originales, comme votre plan d'origine, mais qui est un document « MEDEF-Camdessus-Sarkozy », un manifeste de politique libérale sur les questions que vous abordez.
Vous avez constaté l'émotion créée, au point que Matignon a enlevé l'aspect le plus provocateur du projet de loi « MEDEF-Larcher » et mis provisoirement dans un tiroir le rapport « MEDEF-Camdessus-Sarkozy ».
Je suis tenté de dire : « les Fortinbras veillent au grain », et les vingt-deux amendements du MEDEF apportés à la commission des affaires sociales avec un blanc que l'on espère voir empli par le nom d'un sénateur le prouvent.
Et pourtant, vous n'alliez pas bien loin au moment où il faut aller jusqu'au bout. Et le « jusqu'au bout » aujourd'hui, c'est l'humain.
Un ami me disait récemment ceci : « l'humanité peut très bien avoir à faire face dans un avenir proche au problème de sa réhumanisation ». Nous y sommes. Ayant participé à la journée du 17 octobre contre la pauvreté dans le monde et rentrant de Stresa, en Italie, où s'est tenu le Forum politique mondial contre la pauvreté, je sais que c'est vrai pour d'innombrables habitants de la planète.
J'ajouterai que ma vie quotidienne à Aubervilliers, où j'habite, où je suis élu, et ma participation aux luttes des techniciens et artistes du spectacle, notamment, me le montrent, dans le cadre de ce qu'il faut bien appeler « le retour de la pauvreté dans les pays riches » dont témoignaient encore, dimanche, les états généraux du social, illustrés par la déclaration d'une participante, professionnelle de la lutte contre la misère sociale : « on nous demande de concilier l'inconciliable, de trouver des solutions qui n'existent pas ».
Soyons clairs, votre projet ne convient pas. Vous ne parviendrez pas à vos objectifs déclarés, parce que vous ne contrez pas la spirale de la pauvreté. Vous irez dans le mur, même en klaxonnant.
Ecoutez ce qu'est pour l'humain la pauvreté dans une banlieue comme celle de la communauté de communes « Plaine-Commune », regroupant huit villes, dont Saint-Denis, La Courneuve et Aubervilliers. Celui qui traverse la Plaine-Saint-Denis, qui se rend au Stade de France, au théâtre de la Commune, à Zingaro, à la basilique de Saint-Denis ou au parc de La Courneuve se dit : ça marche, en tout cas, ça bouge, ça construit, ça travaille, ça se voit.
Un chiffre l'illustre : ces huit communes ont retrouvé, en trois ou quatre ans, pendant lesquels se sont construites ou agrandies 290 entreprises, les chiffres d'emploi de 1970.
Pourtant, qui prend la peine de s'arrêter et d'écouter même les silences découvre ceci : ces huit communes, où les municipalités s'acharnent, souvent de manière novatrice, à développer des politiques sociales, culturelles, éducatives, environnementales, industrielles efficaces, où les responsabilités sont prises à plein, souvent plus qu'ailleurs, sont parmi les 35 dernières des 1 300 communes d'Ile-de-France, si l'on considère la base des revenus imposables des foyers fiscaux, Saint-Denis étant la 1291ème et Aubervilliers la 1299ème, soit l'avant-dernière !
Nous y trouvons un monde multidimensionnel, où la civilisation connaît des fissures liées comme à une « métamorphose », mot plus complexe que celui de « crise ». Cela crée comme un écart lent mais proliférant, une déchirure majeure que nous ne savons pas encore nommer et qui nous met en panne, et le mot « exclusion » est un « mot-sac », qui, pour sembler dire la réalité de ces populations, surfe sur le réel, n'embraye pas, gêne la pensée pour peu qu'on cherche des solutions.
Alors, certains parlent d'« hommes à part », d'« hommes dépréciés », d'« habitants intermédiaires », à propos de qui MC Solar chante :
« A l'heure où la joie laisse place à la douleur,
« Où l'inquiétude laisse place à la peur,
« On abandonne, détruit
« Toute idée de vie.
« Est-ce une philosophie ? »
En tout cas, ce n'est pas une philosophie de l'humain. La banlieue n'est pas une maladie sociale, c'est la société tout entière qui est malade. Ceux qui y souffrent et galèrent ne sont pas des gens à part, ils peuvent même être source d'innovation à la mesure des déchirements dont ils sont victimes.
Allons chercher au fond du sac « exclusion ».
J'y ai trouvé une phrase de M. Ernest-Antoine Seillière :...
... « l'acquis social doit céder devant la nécessité économique ». C'est le règne du profit sans rivage. Cette pratique est galopante à l'ère de la financiarisation dans la mondialisation.
On entend dire, quand les licenciements arrivent : « c'est une page qui se tourne ». Une ouvrière de Daewoo en Lorraine répliquait : « peut-être, mais nous on était sur la page ».
Nous sommes à un « moment brèche » qui nécessite la fonction du refus à l'étage voulu. Dans un livre de François Bon, Temps Machine, un ouvrier déclare ceci : « la maladie qui gagne, c'est celle de notre vengeance de mains noires parce qu'ils ne savent plus quoi faire de nous ». C'est une réaction d'« effacés », d'« engloutis », d'êtres à qui il est demandé de se faire oublier, de rester à quai comme assignés à résidence. Ces êtres se considèrent comme en trop et sont gagnés par une culpabilité profonde jusqu'à la haine de soi. Ils n'ont bientôt plus, pour être indemnisés de leur malheur, que leur vengeance imaginaire. Ils sont entrés dans des histoires closes et privés du « risque de vivre », seul moyen pourtant d'avoir le « risque de guérir ».
La violence est au bout de cette souffrance. Violence contre soi - la drogue et parfois le suicide -, contre autrui - la délinquance et plus, comme à Nanterre, où huit conseillers municipaux ont été tués en séance du conseil municipal. Comment ne pas risquer d'être violent quand on est relégué hors de l'humain ? C'est comme faire disparaître sans tuer. C'est une violence invisible qui trouve sa source non dans une barbarie mais dans la souffrance de celui qui y est acculé.
Ces êtres sont alors suspendus dans le vide, entre « un passé luisant » et « un avenir incolore », disait Apollinaire. Ils cherchent un responsable, et c'est malheureusement souvent celui qui paraît étrange - l'étrange pauvre -, l'étranger - le pauvre étranger -, l'émigré. C'est ainsi que se « racise » la question sociale. Dans le désemparement d'eux-mêmes, les gens se retrouvent dans le « quotidien de leurs haines », et c'est « le dernier jour de se donner la main ». C'est la différence indifférente aux autres différences, c'est l'inhospitalité.
Chacun a des facultés d'étonnement, d'imagination. Or, aujourd'hui, au travail, les conditions mutilent ces capacités et empêchent un dialogue entre les gens et la culture. On peut parler d'« un fantasme patronal rêvant de salariés qui savent, mais qui ne pensent pas », de « boxeurs manchots », pour reprendre l'expression de Tennessee Williams.
Or l'homme est visiblement fait pour penser, c'est toute sa dignité. Là se pose la question centrale du travail - le travail entendu comme activité délibérée de civilisation du réel - et de son traitement, qui ne saurait se limiter à une amélioration du « hors travail ». Il faut pouvoir respirer au travail, sinon ce dernier empoisonne la vie.
Une souffrance est aussi la déliaison du « lien social ». Tout le monde ne peut pas être l'ami de tout le monde, mais le « lien social » n'a jamais nié le conflit ; il en est la conséquence en même temps que le dépassement. Il ne se réduit pas au lien civil ou à la proximité, qui souvent n'est que physique et n'est pas la source d'une proximité sociale.
Dans notre société marquée par le capitalisme international et national, il y a tant d'interdits majeurs que le « lien social » est un immense travail. Il ne saurait s'identifier à la « cohésion sociale », nouvelle tentative de faire consensus, qui, évitant de poser les problèmes, ne fait que les accroître. En fait, la politique du Gouvernement se nourrit par son échec.
A ces êtres, l'Etat et le patronat, avec leur singularité et leur épaulement réciproques, ne proposent que la norme, l'idéal d'un homme dit normal, alors que la normalité, c'est la victoire du moment sur le devenir.
Et l'homme normal existe-t-il ? La vie est mobile et l'on ne peut la mettre entre parenthèses. La norme est devenue l'une des formes majeures de l'exercice du pouvoir dans l'entreprise comme dans la société. C'est un outil essentiel pour la fabrique de subjectivités adéquates au pouvoir.
C'est dessaisir un sujet de son arbitraire qui s'exprime dans ses actes. C'est le refus des actes et l'apologie des protocoles et des schémas de comportement, des évaluations et accréditations, c'est le façonnement manipulateur du « lien social ». C'est l'alignement sur la « performance », dont les illustrations les plus caricaturales, au cours de la dernière période, sont la tentative de l'Etat de contrôler l'intime à travers une organisation rapprochée de la psychanalyse et la déclaration, qu'on ne répétera jamais assez, du PDG de TF1 : « mon travail est de rendre les cerveaux disponibles aux publicitaires ».
A énumérer ces problèmes touchant aux esprits, aux coeurs et aux corps, on est frappé par la corruption du vocabulaire.
La langue devient trompeuse et manipule. Jamais n'ont été inventés tant de mots nouveaux : « insertion par le travail », « emplois inadéquats », « ouvriers employables », « chômeurs à insérer », « chercheurs d'emploi », « activité ».
Les mots deviennent des voiles et facilitent la diffusion opiniâtre de la précarité, de l'insécurité sociale, particulièrement chez les jeunes, c'est-à-dire de la déstabilisation du travail, qui se répercute comme une onde de choc dans toute la vie sociale, jusqu'aux bases même de la vie collective.
Mais la question la plus fondamentale est l'absence, la privation d'avenir, avec ses repliements sur soi, son coin, son pays, sa communauté, et la dérive communautariste.
Il est vrai que, ces dernières années, les chocs internationaux ont été terribles, jusqu'à rendre invisibles les « bougés » sociaux et culturels, qui exigent autant réponse que les attaques et les effondrements.
Si l'on songe aux sans-travail, aux sans-logement, aux sans-papier, aux sans-domicile fixe, aux sans-voix, aux sans-relations, aux sans-espoir, « être au monde », c'est être bousculé, fracturé, parfois bousillé jusqu'à ne plus avoir de terrain commun. C'est le règne de la loterie du marché, de l'arrogance, de l'insensé, de la pollution des rapports humains, de l'analphabétisme social, au mieux d'une pensée restreinte du commun.
Le « commun », ce mot qui a joué un si grand rôle dans l'histoire, est aujourd'hui handicapé, notamment par ce qui est arrivé au mot « communiste », liquidé à la manière du bébé jeté avec l'eau du bain.
Les communistes en ont jeté beaucoup avec l'eau du bain ! Des millions !
Nous avons donc à reconstruire le commun, l'« en-commun », autrement, en le toilettant de ses aberrations possibles - étatisme, communautarisme, nature commune, commun fusionnel -, qui empêchent la reconnaissance des singularités et brouillent le sens à être ensemble pour de l'universel, qui a tant besoin de conscience commune, de « souverain bien » comme disait Spinoza, d' « individualités serviables », de « correspondances avec les autres ».
Nous devons travailler beaucoup plus pour que chacune, chacun puisse faire de nouveaux commencements. Pour cela, s'il faut « se souvenir de l'avenir », s'inspirer du conseil d'un auteur allemand, Heiner Müller - « l'herbe même, il faut la faucher afin qu'elle reste verte » -, il ne faut pas tout évaluer en termes de dégradation, de perte, de déclin, de crise, sources de désenchantement. Il faut surtout oser affronter, avec rigueur et courage, et ne pas dire que le capitalisme est une donnée et non une variable, ce qui nourrit l'impuissance démissionnaire.
On voit ce qu'il en est à l'OMC, à la Banque mondiale, à Bruxelles et dans chaque pays, en France notamment, où l'on est trop souvent adepte du consensus mou ou partisan d'un monde séparé.
René Char avait bien raison : « la réalité ne peut être franchie que soulevée ».
Le RMI, la CMU sont d'excellentes mesures qui concernent des millions de personnes, mais il faut aller beaucoup plus loin.
Je retiendrai l'idée de l'historien britannique Eric Hobsbawm : « le problème politique majeur du monde, et certainement du monde développé, n'est pas comment démultiplier la richesse des nations, mais comment la distribuer au bénéfice de leurs habitants ». « Le sort de l'humanité, dit-il, dépend de la restauration des autorités publiques ».
C'est nécessaire en France surtout, où la politique, qui se faisait essentiellement, et par tradition nationale, dans les institutions et les partis, est aujourd'hui souvent émise par les grandes entreprises financiarisées, imposant leur point de vue, le gouvernement de M. Raffarin obtempérant malheureusement le plus souvent.
C'est un travail inouï de convaincre de cette démarche, mais c'est un travail incontournable et urgent de trajets à tracer, d'actions exploratrices dans ce monde de dédales non repérés, qui connaît le chaos, l'encombrement, la complexité, l'instantanéité, la croyance, la violence, l'impuissance.
Pour cela, la société doit être appréhendée dans son ensemble sans vouloir l'achèvement. On ne joue pas au mécano. L'homme, disait Virgile, est « une pierre vivante dans la construction humaine ».
A Aubervilliers, j'ai trouvé et j'écoute éperdument les cris et les silences, ce qui rassemble et ce qui s'écarte, ce qui se pénètre et ce qui se croise, ce qui fait contact et fait contrat, ce qui efface des certitudes et emporte vers l'ailleurs.
J'ai rencontré de grands déracinements, des lieux de refuge temporaires, le grand écart entre les emplois nouveaux et les populations ancienne et nouvelle, souvent paupérisées.
Comme maire, j'ai été chaque jour une cousette, faisant du tricot social souvent cisaillé l'instant d'après. J'ai essayé - et il faut continuer - tous les microprojets en triant dans la galaxie de trucs prétendument miraculeux.
J'ai refusé de substituer l'utopie technicienne à l'utopie sociale. Je me suis libéré de la manie de l'expertise, qui émiette tout et censure le sens. Je n'ai pas confondu l'humanitaire indispensable au quotidien et l'humanisme incontournable, fondamental. J'ai appris à ne pas revenir mais à venir. J'ai appris que, pour beaucoup de pauvres, le temps et la durée ne sont plus des éléments du raisonnement. J'ai vu le « recul » de la préoccupation de la santé, notamment chez des jeunes. J'ai compris qu'il n'y a pas de petite digue, qu'il faut résister, et que, dans ce mot, se trouvait l'une des sources du construire, ce construire à ne jamais remettre au lendemain.
Il en a été ainsi de la Plaine Saint-Denis, que les villes d'Aubervilliers et de Saint-Denis, dans un vrai partenariat de durée, ont pensée, initiée démarrée, malgré un Etat frileux au début et toujours distant.
Nous avons avancé. Reste une hantise : la coupure, parfois la défiance, qui peut aller jusqu'à une certaine haine silencieuse, entre ceux auxquels cette Plaine Saint-Denis a permis d'aller de l'avant et ceux qu'elle a laissés de côté.
Nous sommes à l'heure exacte de la conscience, et il s'impose à nous de rassembler audacieusement contre la vision commerciale du monde et pour ce que Victor Hugo appelait « la quantité de réel qui est dans ce que les hommes appellent l'impossible ».
Il s'agit non pas de se clore dans un assemblement mais de vivre ensemble, sans doute de manière conflictuelle, avec des contradictions évolutives, pour fabriquer des processus qui mèneront progressivement, en arrachant le chiendent de l'ignorance de l'autre, vers des bornes que l'on voudrait infranchissables pour protéger « l'irréductible humain », que votre projet de loi ne traite pas à la dimension souhaitable.
J'aurais voulu - mais le temps presse - prendre trois exemples relatifs à l'emploi, au logement et à l'égalité des chances.
Protestations sur les travées de l'UMP.
M. Jack Ralite. Je croyais que la gravité des questions traitées permettait que l'on mordît un peu sur le temps !
Nouvelles protestations sur les travées de l'UMP.
Je conclurai ce propos sur la pauvreté, la grande plaie du monde actuel, une sorte de bombe à retardement.
En tout cas, à travers votre projet et la réalité générale de la pauvreté, la preuve est faite de l'incapacité du libéralisme à piloter humainement le monde.
C'est une calamité, mais ce n'est pas une fatalité.
Le mot « désespoir » n'est pas politique et le mot « respect » n'a pas à connaître la pénurie.
Il faut oser sortir dans la rue, la rue d'ici, la rue d'Europe, la rue du monde, et charger sur ses épaules, pour la vérité, la dissonance de la ville.
Il y a là une socialité nouvelle. Nous devons, nous pouvons faire société, une société où le mot « égalité » ne serait plus un gros mot, ...
... où les « rejetés » et les « maintenus » se retrouveraient enfin comme « individus de l'histoire du monde », conscients d'une « communauté qui vient », avec sa « citoyenneté sociale »...
... permettant à chacune et chacun de sortir de la délégation passive, de voir le bout de ses actes, de ne plus se dévaloriser, de prendre la parole, de promouvoir de nouveaux droits et une nouvelle logique sociale dans une nouvelle vie publique.
Nous allons pendant plusieurs jours débattre de ces questions avec nos mots, avec le langage de chacun, ...
...mais c'est d'actes qu'il est besoin. Le langage est arrivé à ses limites, et moi qui suis passionné de théâtre, ...
...je pense à Molière, et comme plusieurs de ses personnages immortels, pour retrouver ou plutôt pour trouver le monde, je crie : « j'enrage » !
M. Jack Ralite. Telle est la saveur, l'éthique, l'exigence, la volonté politique de la motion tendant à opposer la question préalable que le groupe communiste républicain et citoyen m'a demandé de défendre.
Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.
J'ai écouté vos arguments, monsieur Ralite, qui parlent de dégâts et de précarisation de la société. J'ai admiré le ton dramatisant de votre propos.
Cette situation n'est pas apparue voilà deux ans. Le projet de loi que vous dénoncez avec tant d'énergie ne changera rien à la part que le précédent gouvernement doit assumer dans ce bilan.
C'est le résultat de votre politique, mesdames et messieurs de l'opposition !
Ni la loi d'orientation relative à la lutte contre les exclusions ni la loi de modernisation sociale n'ont donné les fruits attendus.
La situation est suffisamment préoccupante pour que nous évitions, les uns et les autres, de nous donner des leçons.
Je vous propose donc de débattre ensemble, de manière constructive, pour porter ce texte, car il est dans l'intérêt de tous qu'il soit mené à son terme et qu'il s'applique dans les meilleures conditions.
Ce projet de loi de cohésion sociale part du constat selon lequel notre République n'est plus très sûre de son modèle d'intégration sociale, ainsi que je l'indiquais hier.
En constituant un grand pôle ministériel, dirigé par Jean-Louis Borloo, le Gouvernement a entendu affirmer que la cohésion sociale entre nos concitoyens est certes une priorité sociale, mais qu'elle est aussi intimement liée à l'évolution de la croissance économique.
En trois mois, cette priorité a pris corps. C'est dire la réactivité du Gouvernement. C'est dire, aussi, l'engagement qui est le sien aux côtés de ceux qui peuvent se croire les oubliés de la République.
On nous annonce le retour de la croissance : elle saura, j'en suis convaincu, porter la cohésion sociale.
Vous comprendrez donc, monsieur Ralite, que la commission des affaires sociales, qui ne partage pas votre vision des choses, n'ait pas émis un avis favorable sur cette motion.
Je voudrais tout d'abord évoquer les propos tenus hier soir par M. Muzeau, au nom de son groupe. Leur importance justifie en effet que nous y revenions ce matin, reposés et détendus.
Monsieur Muzeau, je souscris à toute la première partie de votre déclaration, puisque vous y avez posé un constat, véritable réquisitoire contre les gouvernements français qui se sont succédé ces vingt dernières années.
Dois-je rappeler que la gauche a été aux responsabilités durant la majeure partie, les trois-quarts de cette période ?
Je vous propose que nous assumions ensemble la responsabilité de ce que vous énoncez dans votre réquisitoire, et que nous examinions les voies et moyens pour en sortir.
Venons-en au deuxième aspect de votre propos, sujet assez récurrent, à savoir les cadeaux aux entreprises.
Mon sentiment, à ce propos, est clair : dans une République qui se respecte, on ne doit pas offrir de cadeaux aux entreprises. Les aides aux implantations doivent être fléchées, surveillées, vérifiées. Elles doivent par ailleurs correspondre aux engagements réciproques qui sont pris : c'est le principe même des conventions.
Mais qui, parmi nous, ne cherche pas à accueillir des entreprises ? Quel serait le taux de chômage dans le Valenciennois, plus grande terre d'accueil industriel, sans les Canadiens, les Japonais, les Américains et les Allemands ?
Vous parlez des 16 milliards d'euros de compensation, monsieur Muzeau, et vous avez raison. Cependant, dois-je vous en rappeler l'origine ? Vous la connaissez ! C'est une loi de gauche qui, en gros, a proposé aux salariés français de faire un très gros effort sur leur pouvoir d'achat et l'organisation de leur travail, effort que la collectivité a compensé par une baisse des charges sociales. Ce sont les compensations Aubry.
Non, ces mesures prendront fin début 2005 ! Mais ce n'est pas une critique à votre égard, monsieur Muzeau ! Il s'agit d'être factuel, et j'ai trop de respect pour vos propos pour ne pas l'être.
Un point cependant relève de notre responsabilité. Il est vrai que le Gouvernement a souhaité alléger fortement l'effort très violent demandé depuis des années aux salariés qui perçoivent le SMIC ou un peu plus, et ce en organisant la convergence des SMIC par le haut.
Cette mesure représente pour les salariés concernés quasiment l'équivalent d'un mois de rémunération supplémentaire. Il s'agit du plus grand effort accompli en faveur du SMIC en France depuis trente ans.
Il est également vrai que cet effort, qui aurait été mortel pour l'économie française, est compensé en partie au titre des charges sociales.
Le Gouvernement assume ce coup de pouce majeur et massif en faveur des salariés qui sont au bas de l'échelle des rémunérations et qui connaissaient une situation difficilement tenable. Je ne crois pas, monsieur Muzeau, que, sur le fond, vous puissiez être franchement hostile à une telle mesure.
Enfin, monsieur le sénateur, vous connaissez trop ces affaires-là - c'est de ma part une main tendue dans votre direction -, pour ne pas avoir une réflexion de fond sur les contrats d'avenir. Ceux-ci vont en effet permettre de déboucher sur une augmentation de rémunération, une formation qualifiante obligatoire par le biais de la VAE, la validation des acquis de l'expérience, ou par un diplôme, et sur un véritable travail.
Je suis convaincu que la démocratie aura à s'exprimer un jour sur ces contrats, non pas sur le plan national mais sur le plan local. Je pense pour ma part que les prochaines échéances municipales se joueront en partie sur la capacité des élus à appliquer au mieux ce programme de cohésion sociale dans leurs territoires.
Monsieur le ministre Jack Ralite, on ne peut que partager votre fresque poétique dépeignant une société triste et malheureuse. Certes, elle l'est parfois. J'ai parlé moi-même des oubliés de la République.
Mais enfin, il y a beaucoup d'oubliés de la planète. Et ce phénomène n'est pas forcément lié à un modèle d'organisation étatique, car les Etats ne sont pas la seule forme d'organisation, ou à un problème d'organisation politique, laïque ou religieuse. En effet, vous le savez, il existe une grande diversité d'organisation des groupes humains dans le monde.
Tout en saluant la poésie de vos propos, que je trouve personnellement d'une très grande tenue littéraire, je considère qu'il n'y a rien de nature à nous empêcher d'aborder sereinement le fond du débat qui nous occupe aujourd'hui.
En répondant à M. le ministre, je n'oublie pas qu'il fut maire de Valenciennes. Et si lui-même m'a appelé « monsieur le ministre », il n'oublie pas non plus que j'ai été maire d'Aubervilliers. Nous avons de ce point de vue une expérience quasiment commune : il a connu la crise de la sidérurgie, et j'ai connu la Plaine Saint-Denis en friche.
Incontestablement, monsieur le ministre, dans nos villes respectives, nous avons redressé la situation.
Or, à Aubervilliers, la misère s'accroît - j'ai cité les chiffres -, et ce malgré les solutions que nous avons apportées et qui ressemblent beaucoup aux vôtres.
Nous avons ainsi une Maison de l'emploi, qui travaille en étroite association avec plusieurs organisations, dont une délégation de l'ANPE.
Vous avez dit tout à l'heure que le problème de la santé avait été oublié. Notre Maison Mosaïque reçoit des jeunes qui ne se soignent plus et refusent tout contact en dehors d'un entretien individuel !
De même, notre Maison des pratiques de bien-être et de santé accueille des familles qui ont renoncé à se soigner non pas seulement par manque d'argent, même si c'est le point de départ, mais parce qu'elles ont rayé la question « santé » de leur esprit.
Si toutes ces structures ont permis d'améliorer la situation de ces personnes, ou tout au moins de bloquer son aggravation, elles n'ont pas permis de résoudre les problèmes.
Vous avez parlé, monsieur le ministre, de la poésie de mon propos. Mais si j'« utilise », au bon sens du terme, les mots des artistes, c'est parce qu'en général ils pointent le coeur des problèmes et que leurs métaphores disent le réel comme aucun autre professionnel de l'écriture, un journaliste, par exemple, ne sait le faire.
Ce sont les problèmes fondamentaux qu'il faut régler, sur le plan tant international que national.
Or, sans vouloir être discourtois à votre égard, monsieur le ministre, je constate que votre texte ne règle pas les questions.
Je prendrai l'exemple de l'office HLM d'Aubervilliers. Le 21 août 2000, nous avions signé, avec M. Besson, un très bon contrat, qui a permis à cet organisme de régler ses difficultés financières, et également de traiter un certain nombre de dossiers de PALULOS, les primes à l'amélioration des logements à usage locatif et à occupation sociale.
Nous avions déposé, à la fin de l'année 2001, vingt-trois dossiers de ce type. Neuf d'entre eux ont abouti. Il en reste donc quatorze en instance, qui concernent 2 700 logements.
Or la direction départementale de l'équipement nous répond que c'est désormais l'Agence nationale de rénovation urbaine, l'ANRU, qui est compétente ! Même les dossiers en cours sont envoyés ailleurs !
Si ces demandes ne répondent pas aux critères de l'ANRU, le risque est que nous retournions au régime du droit commun, et que les 40°% de logements sociaux que nous avions obtenus grâce au plan signé avec M. Besson ne se transforment en 20°%. Et la population d'Aubervilliers dont je parlais tout à l'heure n'y peut mais !
En effet, entrent dans le calcul de la dotation de solidarité urbaine, la DSU, nos 40°% de logements HLM, mais pas les 40°% de logements sociaux de fait. Ce manque très important pénalise notre ville ! Il y a donc des questions très graves que le projet de loi n'a pas réglées pour le moment.
J'ai peur que vous ne vous limitiez à des mesures « ambulancières », monsieur le ministre, même si je trouve votre représentation des problèmes - je le dis avec respect - presque géniale. Vous possédez d'indéniables qualités psychologiques, voire de juge de proximité.
Or nous avons besoin d'un médecin, d'un diagnostic fondamental, d'une médication « pensée ensemble » et des moyens afférents, car il s'agit d'une question de société qui nécessite plusieurs lectures.
Lorsque tous ces éléments seront réunis, nous pourrons alors commencer à corriger les erreurs, même si nous savons que cela sera long.
Je crains que les mesures caritatives ou redistributives ne soient de courte durée et n'endiguent pas l'exclusion. Il s'agit de réponses a minima, qui proposent une allocation, un travail et un savoir au rabais. Or le droit, comme le respect, ne se divise pas.
Vous savez bien que le « monde du peu » se satisfait finalement de la « démocratie du petit » : un petit peu plus de sous, un petit peu plus de bonheur, un petit peu plus d'égalité, un petit peu plus de liberté, un petit peu plus d'urbain, un RMI urbain ...
Or la banlieue a une autre ambition !
Que veulent les banlieues ? Tout ! Il faut prendre toute la mesure de cette affirmation : c'est en banlieue que se joue l'avenir de la société française !
Je vous communiquerai, monsieur le ministre, le manifeste d'une journée d'étude qui s'est déroulée à Aubervilliers en 1993, réunissant 700 personnes. Mais nous ne parvenons ni à le faire partager ni à le faire comprendre, car il pose des questions de fond qui ne s'arrêtent pas, elles, à la surface des choses.
Protestations sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.
Ce débat s'engage dans le style « politique réalité », comme il y a la « télé réalité ». Pour ma part, je souhaite une politique du réel, comme il devrait y avoir une télé du réel. Voilà pourquoi nous voterons contre ce projet de loi.
Je regrette vivement que M. Jack Ralite se serve de son immense talent pour s'opposer à ce projet de loi. En effet, nul ne peut penser ici que ce texte ne va pas dans le bon sens. Certes, il ne va pas tout résoudre, monsieur Ralite ! Mais il va dans le bon sens, et je ne comprends donc pas que l'on veuille aller là contre.
Je mets aux voix la motion n° 394, tendant à opposer la question préalable.
Je rappelle que l'adoption de cette motion entraînerait le rejet du projet de loi.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin a lieu.
Il est procédé au comptage des votes.
Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 12 :
Le Sénat n'a pas adopté.
Je suis saisi, par MM. Godefroy et Bel, Mmes Printz et San Vicente, MM. Repentin et Raoul, Mmes Boumediene-Thiery et Blandin, MM. Desessard et Lagauche, Mme Le Texier, MM. Mélenchon et Vezinhet, Mme Voynet et les membres du groupe socialiste et apparentés, d'une motion n° 218, tendant au renvoi à la commission.
Cette motion est ainsi rédigée :
En application de l'article 44, alinéa 5, du règlement, le Sénat décide qu'il y a lieu de renvoyer à la commission des affaires sociales le projet de loi de programmation pour la cohésion sociale (n° 445 rectifié. 2003-2004).
Je rappelle que, en application de l'article°44, alinéa°8, du règlement du Sénat, ont seuls droit à la parole sur cette motion l'auteur de l'initiative ou son représentant, pour quinze minutes, un orateur d'opinion contraire, pour quinze minutes également, le président ou le rapporteur de la commission saisie au fond et le Gouvernement.
Aucune explication de vote n'est admise.
La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy, auteur de la motion.
Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le ministre, mes chers collègues, je souhaite tout d'abord rappeler mes propos d'hier : la nouvelle session du Sénat s'ouvre sous des augures très alarmants.
Je suis sénateur seulement depuis trois ans. C'est peu, mais suffisant pour avoir vu nos conditions de travail se dégrader progressivement. Aujourd'hui, je ne vois pas comment elles pourraient être plus mauvaises. J'oserai dire d'ailleurs, anticipant les critiques que l'on pourrait m'adresser, que, pour ma part, je contesterais de la même façon, le cas échéant, d'éventuels manquements commis dans le passé.
La commission des affaires sociales du Sénat ne chôme pas. C'est tout l'intérêt d'y siéger !
C'est elle déjà qui, fin juillet, avait clôturé les travaux de la précédente session, avec l'examen du projet de loi réformant l'assurance maladie, mais également en participant à plusieurs commissions mixtes paritaires sur la bioéthique ou la politique de santé publique. C'est elle enfin qui, depuis le début du mois d'octobre, entame à marche forcée cette nouvelle session.
Je crois qu'il est nécessaire de rappeler le cours des événements.
Le jeudi 7 octobre, alors qu'un certain nombre de commissaires étaient en phase d'installation, notre commission, à peine constituée, enchaînait avec un rapport de plus de deux heures de M. Dériot sur le projet de loi de simplification du droit dont nombre d'articles la concernait sur des sujets parfois importants : le régime social des indépendants, l'amiante, la modernisation des hôpitaux, etc.
Ce même jeudi 7 octobre, à dix-sept heures trente, la commission des affaires sociales auditionnait longuement Mme Montchamp dans la perspective de l'examen, qui a eu lieu la semaine dernière, du projet de loi pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées.
La semaine suivante, le 12 octobre, M. le ministre Jean-Louis Borloo, ses ministres délégués et ses secrétaires d'Etat avaient droit à une longue audition salle Médicis devant les caméras.
Les partenaires sociaux ont, quant à eux, été entendus au pas de charge. En trois jours à peine, nos deux rapporteurs, Mme Valérie Létard et M. Louis Souvet, ont procédé à une vingtaine d'auditions chacun, parfois en même temps qu'une réunion de notre commission ou que la séance publique, le projet de loi relatif aux ordonnances, qui nous concernait également, étant alors discuté dans l'hémicycle. Les personnes auditionnées ont juste eu droit à une quinzaine de minutes pour exposer leur point de vue sur ce texte, ce qui nous paraît insuffisant.
Bien évidemment, ces auditions ont été gracieusement ouvertes aux membres de notre commission - j'en remercie les rapporteurs -, mais, de fait, il était très difficile à ces derniers d'y assister. J'ai pour ma part participé aux auditions de M. Louis Souvet, et ma collègue Michèle San Vicente à celles de Mme Valérie Létard.
Je pensais donc retrouver dans le bulletin hebdomadaire des commissions le compte rendu des auditions auxquelles je n'avais pu assister. Le compte rendu de l'audition de M. Borloo y figurait bien, mais pas celui des auditions des partenaires sociaux, ce qui ne me paraît pas tout à fait normal.
De plus, pour ceux d'entre nous qui avaient décidé, étant donné l'importance du texte, d'y consacrer leur peu de temps de sommeil, l'information faisait défaut. Comment dès lors se forger valablement une opinion ?
Il y eut ensuite l'arrivée de la lettre rectificative de M. Larcher.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. La lettre du Premier ministre, n'anticipez pas !
Sourires.
Avant d'évoquer le fond des articles proposés dans ce projet de loi, arrêtons-nous sur la forme, sur laquelle il y a beaucoup à dire.
Nous avions interrogé à plusieurs reprises la présidence et le Gouvernement - je l'ai fait pour ma part dans un rappel au règlement, le mardi 19 octobre, et dans une question adressée à M. Jean-Louis Borloo lors de son audition par la commission - sur la rumeur qui annonçait l'arrivée de ces dispositions. Chaque fois, le Gouvernement et la présidence ont rejeté cette hypothèse.
A moins d'une semaine du débat, alors que toutes les commissions saisies au fond ou pour avis avaient rendu leur rapport, pas moins de huit articles modifiant en profondeur notre législation sociale furent ajoutés au texte. Une audition de M. Larcher fut alors programmée en catastrophe le jeudi en début d'après-midi, puis finalement repoussée au mardi martin ; M. Gournac a organisé une série d'auditions des partenaires sociaux ; tous les sénateurs, une fois de plus, y furent conviés, ce dont je remercie M. le rapporteur ; mais ces auditions eurent lieu un lundi, jour où les parlementaires sont censés être dans leur département, leur emploi du temps étant bien souvent fixé plus d'un week-end à l'avance...
Il est difficile de réorganiser tout son emploi du temps en moins de trois jours, vous le savez bien ! J'ajoute que les sénateurs ne sont pas tous domiciliés dans la région parisienne et qu'il faut compter les temps de transport.
Il nous est surtout impossible d'annuler les audiences prévues dans nos permanences ; ce lundi, j'ai justement passé la journée à recevoir des partenaires locaux au sujet du texte de programmation pour la cohésion sociale !
Il est regrettable que, sur un texte d'une telle importance, qui ne fera l'objet que d'une seule lecture, la commission n'ait pas pu procédé aux auditions dans les conditions formelles habituelles et que ces auditions n'aient fait l'objet d'aucune publication.
Notre commission travaille dans des conditions de calendrier anormales. Le dernier exemple en date est celui de l'audition de MM. Douste-Blazy et Bertrand sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2005, jeudi dernier, à huit heures trente du matin.
Monsieur le président de la commission, vous avez été obligé de demander une suspension de la séance publique qui avait commencé alors que la commission était toujours en réunion ! Vous avez vous-même évoqué le respect dû aux ministres, mais aussi aux membres de la commission. On ne peut pas mieux dire, et nous partageons parfaitement vos propos.
Outre ce qui s'est passé en commission, en trois semaines, nous avons dû examiner en séance publique, au pas de charge, une partie du texte de simplification du droit, par lequel le Parlement renonce à une bonne partie de ses prérogatives, le projet de loi pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, en deuxième lecture, très différent du texte de première lecture, et maintenant le projet de loi de programmation pour la cohésion sociale, qui contient déjà plus de soixante-dix articles sur des sujets très divers et pour lequel l'urgence a été déclarée dès le début de la procédure législative. Nous enchaînerons immédiatement avec l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale puis avec celui du budget pour 2005. Il faut, je crois, alerter le Gouvernement et lui demander de ne pas faire preuve d'une telle désinvolture à l'égard de notre assemblée.
On souhaiterait que le Sénat devienne une chambre d'enregistrement que l'on ne s'y prendrait pas autrement : les sénateurs ont à peine le temps de lire les textes, et encore moins les rapports !
Ce n'est pas que nous ne souhaitions pas travailler, bien au contraire ; mais nous sommes amenés à étudier les amendements pendant les suspensions de séances. Ce fut le cas hier soir, ce sera encore le cas au moment du déjeuner et mardi soir. Ce ne sont pas de bonnes conditions de travail et d'étude ! Si l'on veut que l'opposition joue pleinement son rôle, voire accepte un certain nombre de données proposées par le Gouvernement, il faut lui laisser le temps de travailler dans de bonnes conditions.
En agissant ainsi, le Gouvernement contourne les droits du Parlement et, avec eux, les droits de l'opposition. Vous savez bien, monsieur le président, que notre marge de manoeuvre est déjà faible ; dans une telle précipitation, elle se réduit à la portion congrue. Les conditions de travail qui nous sont imposées - à nous sénateurs et à nos collaborateurs à qui chacun se plait à rendre hommage - ne facilitent pas un examen des textes dans la sérénité.
Pour revenir au fond, je dirai, à propos de la lettre rectificative, que nous ne sommes pas dupes de la fausse querelle entre le MEDEF et M. Raffarin. Nous avons parfaitement compris qu'il s'agissait d'un leurre afin de détourner l'attention de l'opinion publique en se donnant une apparence sociale ; nous y reviendrons au cours du débat.
Depuis juin 2002 que le Gouvernement est aux affaires, nous avons déjà eu droit à trois sessions extraordinaires, et tous les textes les plus contestés de sa politique ont fait l'objet d'une déclaration d'urgence : le projet de loi portant réforme des retraites et le projet de loi relatif à l'assurance maladie, bien sûr, mais aussi le projet de loi pour la sécurité intérieure.
Je me souviens que, au tout début de cette législature, le Premier ministre, M. Raffarin, avait annoncé qu'il ne recourrait pratiquement jamais, sinon jamais, à la procédure d'urgence. La précédente session parlementaire s'était déjà achevée sur des critiques sévères concernant les conditions de travail des assemblées, notamment sur le système de la session unique.
Ces critiques viennent non pas seulement de l'opposition, mais aussi de la majorité, en particulier de deux de ses membres les plus importants, les présidents de l'Assemblée nationale et du Sénat, dont nous souhaiterions qu'ils bénéficient d'une meilleure écoute de la part du Premier ministre.
Dans l'hebdomadaire l'Hémicycle du 20 octobre dernier, le président du Sénat déclarait ceci : « le problème n'est pas de moins légiférer mais de légiférer autrement ». On ne saurait mieux dire, mais ce qui se passe actuellement est à l'opposé d'un tel propos.
Légiférer autrement, est-ce faire travailler la commission compétente dans de telles conditions ? Légiférer autrement, est-ce faire du Parlement une chambre d'enregistrement ? Légiférer autrement, est-ce faire adopter à la va-vite des dispositions qui bouleversent des pans entiers de notre législation sociale ?
Je ne le crois pas, nous ne le croyons pas, et je suis sûr que, sur les travées de la majorité sénatoriale, beaucoup ne le croient pas non plus. Je subodore même que M. le ministre Jean-Louis Borloo doute du bénéfice de procéder de cette façon.
C'est vrai qu'il y a urgence quand, selon des sondages récents, l'opinion publique estime, à 72 %, que le gouvernement de M. Raffarin va plutôt dans le mauvais sens en ce qui concerne le chômage et, à 57 %, en ce qui concerne la cohésion sociale.
S'il est vrai que nous contestons la méthode consistant à déclarer l'urgence sur les textes, nous ne contestons pas l'urgence qu'il y a à prendre des mesures alors que notre pays compte 2, 4 millions de demandeurs d'emplois, 1, 2 million de RMIstes, c'est-à-dire 10, 5% de plus que pendant l'été 2003, qu'1, 6 million de nos concitoyens vivent avec moins de 400 euros par mois, que le RMA de M. Fillon a fait un flop tonitruant - à peine 100 contrats signés au mois de juin dernier -, et que le dogme du traitement tout économique du chômage a donc montré sa « réelle efficacité ».
Face à ce bilan social, faut-il rappeler que, pour les entreprises stars du CAC 40, cela se solde par 23 milliards d'euros de profits cumulés sur le premier semestre 2004, soit une hausse de 68 % en un an ?
Nous étions prêts à entamer le dialogue avec vous, monsieur le ministre ; nous le sommes toujours sur tous les points de ce projet de loi, sans détour et avec un état d'esprit constructif, mais nous souhaitons pouvoir le faire dans le calme et avec sérénité.
C'est pourquoi le groupe socialiste vous demande d'adopter cette motion de renvoi à la commission.
La parole à la défense, je ne sais pas, monsieur Muzeau...
Monsieur le président, madame, messieurs les ministres, mes chers collègues, c'est vrai, la commission des affaires sociales a un travail considérable, les conditions de travail en son sein y sont rudes, et les commissaires présents - ils ne sont certes pas toujours tous présents, ce que l'on ne peut que regretter - ont l'occasion de beaucoup oeuvrer, avec assiduité et courage.
Mais, monsieur Godefroy, cela plaide en défaveur de votre motion de renvoi à la commission. Si, en effet, une commission travaille beaucoup et se penche sur les textes qui lui sont soumis avec sérieux et assiduité, il n'y a pas lieu de lui renvoyer le travail effectué, car ce serait nier ce dernier !
Sourires sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.
C'est pourquoi, partageant pourtant la plupart des observations de M. Godefroy, je demande, malheureusement, que la motion de renvoi à la commission soit repoussée.
Je mets aux voix la motion n° 218 tendant au renvoi à la commission.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe socialiste.
Il va être procédé au scrutin public dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin a lieu
Il est procédé au comptage des votes
Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 13 :
Le Sénat n'a pas adopté.
Nous passons à la discussion des articles.
La parole est à M. le président de la commission des affaires sociales.
Monsieur le président, comme je l'ai indiqué hier, je demande la réserve des articles 37-1 à 37-8 jusqu'après l'examen de l'article 66.
En outre, j'observe que les amendements déposés par le groupe CRC et tendant à insérer une division additionnelle ou des articles additionnels avant le chapitre Ier concernent eux aussi les procédures de licenciement. Dans un souci de cohérence, je demande donc également leur réserve, afin qu'ils puissent être examinés à la suite des articles précités de la lettre rectificative. Il s'agit des amendements n° 396, 397, 398, 403, 402, 401, 399 et 400.
Cela me semble la logique même. En effet, nous avons tous été d'accord pour que la lettre rectificative soit examinée après le projet de loi. Il convient donc de renvoyer après la discussion de l'article 37-8 l'examen des amendements tendant à insérer des articles additionnels s'y rapportant.
Il ne peut y avoir de discussion sur ce point, mon cher collègue. Lorsqu'elle est demandée par la commission saisie au fond, la réserve est de droit, sauf opposition du Gouvernement.
Les méthodes de travail s'améliorent ! Je demande la parole pour un rappel au règlement !
Le règlement, en l'occurrence, est appliqué, puisqu'il précise, je le répète, que, lorsqu'elle est demandée par la commission saisie au fond, la réserve est de droit, sauf opposition du Gouvernement. Tout cela est donc parfaitement réglementaire et ne justifie pas que je vous donne la parole pour un rappel au règlement.
M. Roland Muzeau. Je demande la parole pour un rappel au règlement qui portera non pas sur ce point, mais sur l'organisation générale de nos travaux.
Sourires
Je voudrais souligner, à la suite de mon ami Jean-Pierre Godefroy, dont les propos ont été très synthétiques et précis, qu'une véritable anarchie s'instaure dans l'organisation de nos débats.
Cette cacophonie est d'autant plus regrettable que M. le ministre a tenu à rappeler, très longuement et à plusieurs reprises, avec beaucoup d'humanité dans la voix, qu'il fallait prendre le temps de bien étudier ce texte, d'écouter l'opposition, de tenter de déboucher sur un consensus, à tout le moins de se comprendre les uns les autres, de concilier les points de vue.
Or, s'il nous a bien été indiqué hier que la discussion des articles 37-1 à 37-8 de la lettre rectificative serait réservée jusqu'après l'examen de l'article 66, jamais n'a été évoqué le sort des amendements que nous avions déposés tendant à insérer des articles additionnels avant le chapitre Ier. La question que j'ai alors posée sur ce point est restée sans réponse, mais nous constatons ce matin que, sur proposition du président de la commission, il est décidé, sans aucun débat, de reporter l'examen de nos amendements.
Je déplore vivement cette situation, d'autant que MM. Godefroy, Fischer et moi-même avons exposé à plusieurs reprises, à l'occasion de précédents rappels au règlement, les réelles difficultés que rencontrent les groupes qui souhaitent vraiment travailler et s'exprimer sur ce texte, et non pas se borner à une attitude suiviste, à un comportement de « godillots ». Nous avions, pour notre part, organisé notre travail autour de la défense d'amendements tendant à insérer des articles additionnels avant le chapitre Ier, et je trouve donc lamentable que nous soyons privés dès l'entame de nos débats de la possibilité de développer nos arguments.
Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.
On ne peut à la fois se féliciter de la réserve des articles 37-1 à 37-8 jusqu'après l'examen de l'article 66 et s'étonner que la discussion d'amendements tendant à insérer une division additionnelle ou des articles additionnels s'y rapportant soit renvoyée au même stade du débat.
Je rappelle que notre demande de réserve ne concernait pas l'ensemble des amendements tendant à insérer des articles additionnels avant le chapitre Ier ou l'article 1er, puisque l'amendement n° 389 rectifié, déposé notamment par M. Charasse, les amendements n° 219 rectifié bis du groupe socialiste et 362 du groupe de l'Union centriste n'étaient pas visés. La réserve n'affecte que les amendements se rapportant aux articles 37-1 à 37-8 de la lettre rectificative.
Par conséquent, il n'y a là aucune volonté de nuire au groupe CRC.
Je rappelle qu'il me revient de faire respecter le règlement. En l'occurrence, celui-ci précise, je le répète, que, lorsqu'elle est demandée par la commission saisie au fond, la réserve est de droit, sauf opposition du Gouvernement.
L'amendement n° 219 rectifié bis, présenté par MM. S. Larcher, Lise, Gillot et les membres du groupe Socialiste, est ainsi libellé :
Avant le titre Ier, ajouter un article additionnel ainsi rédigé :
Une loi ultérieure adaptera les dispositions de la présente loi aux nécessités spécifiques des régions et départements d'outre-mer pour tenir compte de leurs caractéristiques et contraintes particulières.
La parole est à M. Serge Larcher.
Cet amendement tend à prévoir qu'un projet de loi spécifique en faveur des départements d'outre-mer soit présenté au Parlement.
En effet, les dispositions du projet de loi de programmation pour la cohésion sociale ne prennent pas en compte la situation particulièrement inquiétante des départements d'outre-mer, qu'il s'agisse des mesures relatives à l'emploi et à l'activité ou de celles qui ont trait au logement.
En ce qui concerne l'emploi et l'activité, nos populations subissent de plein fouet, on le sait, les ravages d'un chômage endémique, premier pas vers l'exclusion. A titre d'exemple, à la Martinique, le chômage affecte près de 24 % de la population active, et plus de 31 000 personnes sont allocataires du RMI, pour une population de 390 500 habitants.
C'est d'ailleurs en raison de ces particularités que le législateur avait voté la loi dite Perben du 25 juillet 1994, qui a permis la mise en place d'outils spécifiques dans les DOM, tels que le FEDOM, le Fonds pour l'emploi dans les départements d'outre-mer, et les CIA, les contrats d'insertion par l'activité.
Or je regrette, monsieur le ministre, que le présent projet de loi ne prenne pas compte ces dispositifs, qui ont pourtant fait leurs preuves, et que l'on ne sache pas ce qu'ils vont devenir. Ainsi, quel sera le sort du contrat d'insertion par l'activité, compte tenu de la mise en place du contrat d'avenir, dont les modalités d'application sont très proches ?
De même, s'agissant du secteur marchand, ce projet de loi prévoit la mise en oeuvre d'un contrat initiative-emploi rénové, relevant du budget de l'Etat. Qu'adviendra-t-il, dès lors, du contrat d'accès à l'emploi, financé par le FEDOM ?
En ce qui concerne la question du logement, le projet de loi prévoit un rattrapage en matière de production de logements sociaux destinés à des publics peu fortunés, voire défavorisés. Cependant, comment expliquer l'absence de référence à la LBU, la ligne budgétaire unique, qui constitue le mode de financement du logement social dans les DOM, et de toute garantie quant à l'évolution de cette dernière ? Le texte reste également muet sur les problèmes relatifs à l'amélioration de l'habitat et à l'accession sociale à la propriété, alors que ces opérations représentent 68 % des crédits de la ligne budgétaire unique.
Par ailleurs, afin d'accroître l'attrait de l'exonération de la contribution sur les revenus locatifs pour les bailleurs privés qui remettent sur le marché des logements vacants, il conviendrait d'en porter la période d'application de trois à neuf ans, durée normale des conventionnements de l'ANAH, l'Agence nationale pour l'amélioration de l'habitat.
Enfin, les dispositions de l'article 53 devraient être mises à profit pour tenter de trouver une solution au problème de l'indivision, particulièrement sensible dans les régions d'outre-mer et qui constitue un frein à la mise en oeuvre des politiques d'amélioration de l'habitat et d'accession sociale à la propriété.
Comme vous pouvez le constater, monsieur le ministre, les particularités de l'outre-mer n'ont pas été suffisamment prises en compte. Dans ces conditions, il me semblerait préférable et plus sage qu'un texte ultérieur permette d'adapter les dispositions du présent projet de loi.
En conclusion, monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je tiens à vous faire part de mon étonnement. En effet, la lettre rectificative, contrairement au projet de loi initial, n'a pas été soumise pour avis aux collectivités locales d'outre-mer. Je le regrette vivement.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.
Mon cher collègue, nous savons tous que les départements et les territoires d'outre-mer connaissent une situation difficile. Cela étant, ils bénéficieront, comme l'ensemble des territoires, des dispositions du plan de cohésion sociale.
La commission n'a donc pas cru devoir donner un avis favorable à cet amendement.
Monsieur le sénateur, nous avons eu l'occasion d'évoquer le point que vous avez soulevé hier, lors de la discussion générale.
Bien entendu, le contrat d'accès à l'emploi spécifique sera maintenu, ainsi que le CIA. En l'espèce, le silence du texte est d'or ! Il n'y aura pas de suppression de ces dispositifs, compte tenu des particularités des territoires concernés.
En outre, l'ensemble du complément de dispositif, y compris le contrat d'avenir et les efforts majeurs qui seront consentis en matière de logement, de résorption de l'habitat insalubre et de rénovation urbaine, concernera bien sûr les départements et les territoires d'outre-mer.
Toutefois, comme j'ai déjà eu l'occasion de le dire à M. Virapoullé et à la présidente du conseil général de la Réunion - cela vaut également pour la Guadeloupe, la Martinique et la Guyane -, une difficulté particulière, d'ordre technique, devra être étudiée, compte tenu du passage obligatoire par la ligne budgétaire unique. M. Daubresse se tient à votre disposition à cet effet.
En tout état de cause, le Gouvernement préconise le rejet de cet amendement.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 362, présenté par M. Vanlerenberghe et les membres du groupe de l'Union Centriste, est ainsi libellé :
I - Avant le titre Ier, ajouter un article additionnel ainsi rédigé :
Le citoyen est placé au coeur des politiques de l'emploi, du logement et de lutte contre l'exclusion. Il est représenté dans toutes les instances nationales ou territoriales qui émettent un avis ou adoptent des décisions concernant ces politiques.
II - En conséquence, avant le titre Ier, ajouter une division additionnelle ainsi rédigée :
Titre Ier A
Principes généraux de lutte contre l'exclusion.
La parole est à M. Jean-Marie Vanlerenberghe.
Le groupe de l'Union centriste approuve pleinement la philosophie de ce projet de loi de programmation pour la cohésion sociale, qui met l'homme, le citoyen, au coeur du dispositif.
A cet égard, les politiques visées étant conçues pour le citoyen, il nous a paru nécessaire d'insister sur le fait que celui-ci doit être associé à leur élaboration, par le biais notamment de sa représentation dans toutes les instances nationales ou territoriales.
Je pense que vous approuvez ce principe, monsieur le ministre. Pour notre part, ce que nous voulons, c'est l'inscrire explicitement dans le projet de loi, par le biais de cet amendement tendant à placer le citoyen au coeur des politiques transversales de promotion et de cohésion sociales.
Cet amendement a pour objet de proclamer des principes généraux et généreux. Cela étant, la commission n'a pas jugé bon de le retenir.
Sourires
Monsieur le sénateur, le Gouvernement partage l'avis de la commission.
Toutefois, je crois savoir que votre groupe a déposé des amendements visant à faire participer les citoyens à l'appréciation de la politique d'attribution de logements. Sur de tels cas précis d'application des dispositifs, il nous sera plus facile d'accepter vos propositions.
Pour l'heure, je vous demande de bien vouloir retirer votre amendement.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe. Non, monsieur le président, je le retire.
Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.
L'amendement n° 362 est retiré.
TITRE Ier
MOBILISATION POUR L'EMPLOI
Chapitre Ier
Service public de l'emploi
L'amendement n° 389 rectifié, présenté par MM. Charasse, Massion, Masseret, Angels et Auban, Mme Bricq, MM. Demerliat, Frécon, Haut, Marc, Miquel, Moreigne, Sergent et Repentin, Mmes San Vicente, Voynet et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Avant l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Les dispositions de la présente loi ne peuvent entraîner aucune charge nouvelle obligatoire pour les collectivités territoriales et leurs groupements.
Les textes réglementaires pris pour l'application de la présente loi ainsi que tous les documents relatifs à sa mise en oeuvre, notamment les circulaires et les communications de tous les services de l'Etat en direction des collectivités territoriales et de leurs groupements, devront préciser clairement qu'aucune contribution obligatoire ne leur sera réclamée et que leurs interventions restent facultatives.
Il est interdit aux autorités de l'Etat, notamment par l'intermédiaire de ses représentants dans les régions et les départements et à celle de ses services extérieurs de mettre publiquement en cause les collectivités territoriales et leurs groupements au motif qu'elles refusent de participer au financement facultatif de tout ou partie des actions prévues par la présente loi.
La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy.
Même si le texte ne prévoit pas la contribution obligatoire des collectivités territoriales à la mise en oeuvre du programme de cohésion sociale qui nous est présenté, ces dernières risquent fort d'être soumises à la pression et au chantage des autorités de l'Etat. Elles sont en effet publiquement mises en cause lorsqu'elles refusent de participer aux actions financées et engagées par l'Etat.
Or le programme présenté par le Gouvernement ne pourra trouver sa pleine efficacité qu'avec l'accompagnement des collectivités locales. Etant donné que l'Etat n'a pas voulu s'engager dans cette voie, pour ne pas avoir à compenser, à raison des obligations constitutionnelles, des charges nouvelles imposées aux collectivités décentralisées, il ne lui reste plus que la mise en cause publique directe.
Le présent amendement a donc pour objet de demander à l'Etat de s'en tenir, dans ses commentaires, à ce qui relève de sa compétence.
L'avis de la commission est défavorable. Cet amendement paraît en effet superflu.
Le projet de loi de cohésion sociale ne met pas de dépenses nouvelles obligatoires à la charge des collectivités locales, même s'il les invite à participer à sa mise en oeuvre. De plus, la compensation des transferts de charges est désormais un principe constitutionnel.
Le Gouvernement a le même avis que la commission.
L'amendement n'est pas adopté.
Le code du travail est ainsi modifié :
I. - Le chapitre Ier du titre Ier du livre III du code du travail est intitulé : « Service public de l'emploi ». La section 1 de ce chapitre est intitulée : « Organismes concourant au service public de l'emploi ».
II. - Les articles L. 310-1 et L. 310-2 du même code sont remplacés par les dispositions suivantes :
« Art. L. 310-1. - L'activité de placement consiste à fournir, à titre habituel, des services visant à rapprocher offres et demandes d'emploi, sans que la personne physique ou morale assurant cette activité ne devienne partie aux relations de travail susceptibles d'en découler.
« Art. L. 310-2. - Aucun service de placement ne peut être refusé à une personne à la recherche d'un emploi ou à un employeur pour l'un des motifs énumérés à l'articleL. 122-45. Aucune offre d'emploi ne peut comporter de référence à l'une de ces caractéristiques.
« Sous réserve des dispositions de l'article L. 762-3, aucune rétribution, directe ou indirecte, ne peut être exigée des personnes à la recherche d'un emploi en contrepartie de la fourniture de services de placement. »
III. - L'article L. 311-1 du même code est remplacé par les dispositions suivantes :
« Art. L. 311-1. - Le service public de l'emploi, qui comprend le placement, l'indemnisation, l'insertion, la formation et l'accompagnement des demandeurs d'emploi, est assuré par les services de l'État chargés de l'emploi, l'Agence nationale pour l'emploi, les organismes de l'assurance chômage mentionnés à l'article L. 351-21 et l'Association nationale pour la formation professionnelle des adultes, dans le cadre des dispositions législatives et réglementaires qui lui sont propres.
« Peuvent participer au service public de l'emploi, les organismes publics ou privés dont l'objet consiste en la fourniture de services relatifs au placement, à l'insertion, à la formation et à l'accompagnement des demandeurs d'emploi, les organismes liés à l'État par une convention prévue à l'article L. 322-4-16, les entreprises de travail temporaire ainsi que les agences de placement privé mentionnées à l'article L. 312-1.
« Les collectivités territoriales concourent également au service public de l'emploi dans les conditions prévues aux articles L. 311-9 et suivants.
« Une convention pluriannuelle passée entre l'État, l'Agence nationale pour l'emploi et les organismes de l'assurance chômage mentionnés à l'article L. 351-21 détermine notamment :
« a ) Les principaux objectifs de l'activité du service public de l'emploi pour la période considérée, au regard de la situation de l'emploi ;
« b ) Les conditions dans lesquelles ces objectifs sont précisés et adaptés au plan local par des conventions territoriales de développement de l'emploi ;
« c) Les modalités de coordination des actions respectives des services du ministère chargé de l'emploi, de l'Agence nationale pour l'emploi et des organismes de l'assurance chômage et de transmission mutuelle des informations qui leur sont nécessaires pour réaliser ces actions. À défaut de convention, ces modalités sont fixées par décret en Conseil d'État ;
« d ) Les critères permettant d'évaluer l'efficacité de ces actions ainsi que les modalités de publication de cette évaluation et de diffusion des bonnes pratiques ;
« e ) Les modalités de recueil et de transmission des données relatives aux besoins prévisionnels en ressources humaines. »
IV. - La section 5 du chapitre Ier du titre Ier du livre III du même code est intitulée : « Rôle des collectivités territoriales et des maisons de l'emploi ».
V. - L'article L. 311-10 du même code est remplacé par les dispositions suivantes :
« Art. L. 311-10. - Des maisons de l'emploi, dont le ressort ne peut excéder la région ou en Corse la collectivité territoriale, contribuent à la coordination des actions menées dans le cadre du service public de l'emploi et exercent des actions en matière de prévision des besoins de main d'oeuvre et de reconversion des territoires, notamment en cas de restructurations. Elles peuvent également participer à l'accueil et à l'orientation des demandeurs d'emploi, à l'insertion, à l'orientation en formation, à l'accompagnement des demandeurs d'emploi et des salariés et à l'aide à la création d'entreprise.
« Les maisons de l'emploi peuvent bénéficier d'une aide de l'État dans des conditions prévues par décret en Conseil d'État. »
VI. - Il est inséré dans le code du travail un article L. 311-10-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 311-10-1. - Les maisons de l'emploi peuvent prendre la forme d'un groupement d'intérêt public.
« Ces groupements associent obligatoirement l'État, l'Agence nationale pour l'emploi, les organismes mentionnés à l'article L. 351-21 et au moins une collectivité territoriale ou un établissement public de coopération intercommunale.
« Le groupement est administré par un conseil d'administration composé de représentants de ses membres constitutifs. Ce conseil élit son président en son sein.
« Le directeur du groupement, nommé par le conseil d'administration, assure, sous l'autorité du conseil et de son président, le fonctionnement du groupement. Dans les rapports avec les tiers, le directeur engage le groupement pour tout acte entrant dans l'objet de celui-ci.
« La convention par laquelle est constitué le groupement doit être approuvée par l'autorité administrative, qui en assure la publicité. Elle détermine les modalités de participation, notamment financière, des membres et les conditions dans lesquelles ils sont tenus des dettes du groupement. Elle indique notamment les conditions dans lesquelles ceux-ci mettent à la disposition du groupement des personnels rémunérés par eux.
« Pour l'exercice de leurs missions, les membres du groupement peuvent créer ou gérer ensemble des équipements ou des services d'intérêt commun. Ils s'appuient sur les personnels mis à leur disposition par leurs membres. En tant que de besoin et sur décision de leur conseil d'administration, ils peuvent également recruter des personnels qui leur sont propres, régis par le code du travail.
« Le groupement est soumis au contrôle de la Cour des comptes dans les conditions prévues à l'article L. 133-2 du code des juridictions financières et au contrôle de l'inspection générale des affaires sociales. »
VII. - À l'article L. 322-2 du même code, après les mots : « les organisations professionnelles d'employeurs et de travailleurs », sont insérés les mots : « et des représentants des collectivités territoriales ».
VIII. - Le second alinéa de l'article L. 311-2 et l'article L. 351-26 du même code sont abrogés.
Monsieur le ministre, face au chômage durable, et quelles que soient les caractéristiques, bonnes ou mauvaises, de la conjoncture économique, vous prétendez trouver des solutions techniques pour aider au « retour d'activité » des exclus, faire réaliser des économies au budget de l'Etat dans le domaine de l'emploi, et, surtout, ne rien toucher à la logique capitaliste de l'entreprise.
Pourtant, vous le savez bien, cette logique libérale, sous la houlette des marchés financiers et pour la plus grande satisfaction des gros actionnaires, ne cesse de rejeter vers le chômage nombre de nos concitoyens et de les précariser.
« Ne rien toucher » ? Que dis-je ! Vous consolidez au contraire cette logique libérale en décidant de mobiliser la réserve de main-d'oeuvre, ou du moins une grande partie des quelque sept millions de chômeurs et de salariés précaires, pour satisfaire les objectifs immédiatement rentables de chefs d'entreprise.
Il ne suffit plus de supprimer les freins du droit du travail afin de faciliter la mise en oeuvre de l'idéologie et des pratiques libérales et de constituer un réservoir de chômeurs et de salariés précaires pesant sur les conditions de travail et de rémunération des autres salariés. Avec ce texte, vous intervenez pour obliger ce réservoir de main-d'oeuvre à accepter une activité correspondant aux besoins immédiats de l'entreprise et donc pour aider le patronat à surmonter non seulement les goulets d'étranglement qui se profileront avec le choc démographique lié aux départs massifs à la retraite dès 2007 - c'est ce que vous appelez une « transition démographique inédite » -, mais aussi l'insuffisance criante de formation et le nombre d'emplois offerts très peu qualifiés. Tout cela, bien évidemment, à moindre frais pour l'Etat !
Le glissement est révélateur, et il n'est pas que sémantique : d'un projet de loi relatif au « développement de l'emploi », vous êtes arrivé à un projet de loi visant à une « cohésion sociale », plus performante. On est toujours dans une perspective managériale.
A la place de « cohésion sociale », je parlerai plutôt d' « injustice sociale ». Pour vous, il s'agit d'abord et surtout d'aider le patronat à répondre à « ses besoins en ressources humaines au niveau des bassins d'emploi », en créant, au-delà des politiques libérales menées ces dernières années, les conditions lui permettant la constitution de plus-values.
C'est le sens de votre définition du périmètre et du contenu du service public de l'emploi, et de la création de 300 maisons de l'emploi : une pour trois ANPE, soit à peu près une par bassin d'emploi.
Présentées comme la grande nouveauté de votre dispositif, alors qu'elles existent déjà sur l'initiative de quelques communes ou collectivités, ces maisons auraient pu chercher à fédérer les énergies autour des besoins d'emploi, de formation, de revenu des populations. Or il s'agit plutôt de rendre service au patronat. Du coup, la démarche perd de sa crédibilité en termes d'amélioration de la proximité et de l'efficacité des services de l'emploi.
La disparition du monopole de l'ANPE en matière de placement, avec la voie ouverte à une privatisation, n'est plus une mesure se profilant simplement à l'horizon ; elle est actée dès l'article 1er, puis dans les articles suivants.
Cette fin programmée, sans aucune concertation avec les partenaires sociaux, s'accompagne de l'asservissement de l'offre de formation de l'AFPA aux exigences exclusives du patronat via l'UNEDIC.
Ces maisons serviraient également de bras armé à la mise en pratique effective du PARE, le plan d'aide au retour à l'emploi, dont de récents procès, sur l'initiative des recalculés, ont confirmé qu'il était bien un contrat avec l'obligation, sous menace de sanctions, d'accepter le placement proposé, les conditions de travail et de rémunération imposées par la libre entreprise - responsable du statut de demandeur d'emploi, mais parée de toutes les vertus aux yeux du Gouvernement.
La sanction serait la « contrepartie » de l'offre groupée de services aux chômeurs - en fait, au patronat - dans ces 300 maisons.
Sur le plan national, serait signée une convention tripartite pluriannuelle entre l'Etat, l'ANPE et l'UNEDIC déclinant les objectifs élaborés par le Conseil supérieur de l'emploi. Mais rien n'indique, au contraire, que ce serait des objectifs limités de créations d'emploi et de mises en formation, comme l'urgence de la situation l'exigerait.
Les collectivités territoriales seront obligées de contribuer au fonctionnement de ces maisons et certainement de les piloter, bien évidemment sans aucune contrepartie de l'Etat.
C'est en effet cohérent avec votre volonté de désengagement de l'Etat en matière de politique de l'emploi. Ce sont les collectivités territoriales - communes, départements et régions - qui porteront ainsi la responsabilité du chômage et de la précarité sur leur territoire. Il y a vraiment là un objectif de décentralisation de la responsabilité de l'Etat sur les collectivités territoriales : si le chômage augmente, c'est la faute des communes ; s'il diminue, c'est grâce à l'Etat !
Pour toutes ces raisons, nous proposerons un amendement de suppression de l'article 1er.
Applaudissements sur les travées du groupe CRC.
Avec cet article se pose la question de la raison d'être des maisons de l'emploi.
Des établissements de cette nature existent déjà dans le département du Nord et ailleurs. Dans l'ensemble, ils fonctionnent de manière efficace et proposent aux chômeurs un ensemble de services facilement et rapidement accessibles.
Toutefois, si ces organismes donnent satisfaction, c'est en raison de leur proximité avec les citoyens.
L'expérience, dont la vôtre, monsieur le ministre, montre qu'une aide véritable aux demandeurs d'emploi passe par la proximité. En effet, les chômeurs n'ont pas toujours de moyen de transport personnel et ils disposent de peu d'argent pour se déplacer. Les services doivent donc être situés près de chez eux, et, pour tout dire, dans les quartiers où se trouve la plus grande concentration de difficultés sociales et d'emploi.
Nous nous sommes beaucoup interrogés sur le ressort territorial des maisons de l'emploi. Le texte propose que ce ressort ne puisse excéder la région, ce qui changerait complètement la nature des maisons de l'emploi par rapport à ce que nous connaissons. Cette disposition paraît également difficilement compatible avec ce que vous avez annoncé, monsieur le ministre, et avec le reste du projet de loi.
Vous annoncez la création de 300 maisons de l'emploi ; c'est tout du moins le dernier chiffre que nous avons retenu. C'est pourquoi nous tenons à vous poser clairement plusieurs questions.
Quel sera le rôle exact de la maison de l'emploi ?
S'agira-t-il d'y réunir tous les intervenants de votre service public de l'emploi pour y faire, à l'échelon d'un département ou d'une région, une sorte d'organisme prospectif sur la politique de l'emploi et de l'insertion ? Quelle serait alors la place des directions régionales et départementales du travail et de la formation professionnelle ? Sera-ce une sorte de « super agence » de l'emploi, de la formation et de l'insertion ? Si elle couvre un ressort territorial assez large, comment les chômeurs y auront-ils accès ?
S'agira-t-il de remplacer les agences locales de l'ANPE, ou la maison de l'emploi sera-t-elle un peu tout cela à la fois, avec une plus grande souplesse en fonction des partenaires locaux, de leur volonté politique et de leurs moyens, voire des circonstances en matière d'emploi ?
Monsieur le ministre, qui, concrètement, fera fonctionner les maisons de l'emploi ? On nous parle du recrutement de nombreux agents sous contrats de droit privé. Mais ne prévoyez-vous pas, puisqu'il y aura regroupement de services, le transfert des organismes actuels, comme, par exemple, l'ANPE ? Quelle sera la place des organismes publics et privés que vous voulez faire entrer dans le service public de l'emploi, au sein de ces structures ?
Cette multitude de questions sur le rôle effectif des maisons de l'emploi, et donc sur leur organisation et leur fonctionnement, nous ne sommes pas les seuls à nous les poser. Les élus locaux, que nous représentons, et les personnels du service public vous les posent également. Nous vous demandons instamment d'y répondre.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.
Je suis saisi de 31 amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 469, présenté par MM. Muzeau, Fischer, Autain et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Roland Muzeau.
Cet amendement tend à la suppression de l'article 1er du projet de loi, axe majeur mettant en musique la réforme du service public de l'emploi, comme nous y invitent les orientations définies dans le cadre de la stratégie européenne pour l'emploi. Encore un domaine où, au nom de la modernisation, il faudrait adapter nos services publics assurant l'accès des usagers à leurs droits sociaux au tout libéral !
Nous n'acceptons pas les nouveaux contours du service public de l'emploi ni le rapprochement, pour ne pas dire la mise en concurrence, des prestations qui ne garantissent en rien l'amélioration de l'efficience des politiques en direction des demandeurs d'emploi. De surcroît, elles ne manqueront pas de porter atteinte au principe d'égal accès aux services des usagers.
Si la tendance européenne est effectivement au renforcement des liens, pour parler pudiquement, entre l'indemnisation et le placement ainsi qu'à l'ouverture du marché de placement à des opérateurs privés, sommes-nous obligés de franchir un nouveau cap ? Nous ne le pensons pas !
La boite de Pandore à déjà été ouverte par l'ordonnance de 1986, qui permet au service public de confier les placements à des organisations publiques ou privées. La sous-traitance avec divers partenaires, s'agissant notamment de l'orientation, est pratique courante.
Le rapprochement de l'ANPE et de l'UNEDIC, afin que cette dernière pilote la gestion des chômeurs et les politiques de l'emploi, est réalisé.
Le Gouvernement souhaite-t-il donc que, à terme, comme c'est le cas en Grande-Bretagne, les agences, les maisons de l'emploi ou autres guichets uniques cumulant les fonctions de paiement des indemnités ainsi que le placement et l'information des chômeurs soient gérés comme de véritables entreprises ?
Puisque la perspective se dessine de responsabiliser toujours davantage les chômeurs, comme le prévoit le rapport de l'instance d'évaluation du commissariat général du plan sur les politiques de l'emploi et recours aux opérateurs extérieurs, pourquoi ne pas envisager que ceux-ci deviennent acteurs de leur propre reclassement en choisissant, de manière éclairée et sûre, les opérateurs auxquels ils confient leur sort ?
Nous le redisons avec force : si le service public de l'emploi doit évoluer, ce dont nous ne doutons pas, l'Etat doit garder ses prérogatives particulières, initier et réguler une politique nationale de l'emploi et de l'insertion professionnelle.
Par ailleurs, il importe que l'ANPE voie sa place centrale et son rôle dynamique de maître d'oeuvre de la politique de reconquête de l'emploi réaffirmés.
Voilà autant de conditions que nous ne retrouvons pas dans l'organisation prescrite par l'article 1er du service public de l'emploi.
Sous le bénéfice de ces observations, je vous demande, mes chers collègues, d'adopter notre amendement.
L'amendement n° 473, présenté par MM. Muzeau, Fischer, Autain et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi le second alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 310-2 du code du travail :
« Sous réserve des dispositions de l'article L 762-3, le placement des personnes à la recherche d'un emploi est gratuit. »
La parole est à M. Roland Muzeau.
Actuellement, l'article L. 310-2 du code du travail dispose, en substance, que le placement est gratuit, sous réserve d'un certain nombre d'exceptions.
Cette rédaction a le mérite de poser le principe de la gratuité des services. L'article 1er du projet de loi, qui définit notamment l'activité de placement, fait référence à ce principe, sans pour autant le décliner littéralement.
Pour bien préciser les choses, démarche opportune dans la mesure où, d'une part, le contenu et le concept mêmes du service de l'emploi accessible à tous sur l'ensemble du territoire sont mis à mal par la réforme prescrite et où, d'autre part, l'introduction au coeur des missions de service public de placement d'opérateurs privés répond à d'autres logiques, nous proposons, par le biais de l'amendement n° 473, de réaffirmer simplement - mais fortement - le principe de gratuité.
L'amendement n° 176, présenté par M. du Luart, est ainsi libellé :
Au début du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 3101 du code du travail, remplacer les mots :
L'activité de placement
par les mots :
Donner un emploi
Cet amendement n'est pas soutenu.
L'amendement n° 486, présenté par MM. Muzeau, Fischer, Autain et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Supprimer le III de cet article.
La parole est à M. Roland Muzeau.
Nous ne pouvons nous satisfaire du contenu et du périmètre du service public de l'emploi retenus par le projet de loi.
Tout d'abord, en liant indemnisation et placement, insertion, formation et accompagnement des demandeurs d'emploi, on continue à vouloir prendre en otage les chômeurs et l'on crée les conditions d'une sanction financière. D'ailleurs, lors des débats, personne, à droite, ne s'en est caché. C'est le but visé!
En effet, en cas de refus, par le demandeur, de la proposition d'emploi qui lui est faite, rien n'est prévu qui lui permette de se défendre pour contester l'offre, même si celle-ci est très éloignée de son savoir-faire et des connaissances qu'il a pu acquérir.
C'est toujours la même histoire : le Gouvernement ne pense qu'au système de gestion de l'entreprise et jamais aux individus, tout en prétendant le contraire !
Dans ce cadre ultralibéral, les collectivités territoriales vont être obligées de participer au service public de l'emploi. En clair, l'Etat, sous votre houlette, monsieur le ministre, ne se désengage pas seulement de ses responsabilités politiques : il les transfère aux collectivités territoriales ! Cette conception de la décentralisation, c'est celle du MEDEF !
Par ailleurs, la convention tripartite entre l'Etat, l'ANPE et l'UNEDIC se fixe des objectifs non pas en termes de création d'emploi, mais seulement en termes d'activité du service public de l'emploi au regard « de la situation de l'emploi » ! Avouez que c'est quand même un peu réducteur !
C'est pourquoi cet article, qui remplace une disposition du code du travail mais ne permet pas de progresser dans la résolution du chômage et de la précarité, doit, de notre point de vue, être supprimé.
L'amendement n° 4 rectifié, présenté par M. Souvet, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi le premier alinéa du texte proposé par le III de cet article pour l'article L. 3111 du code du travail :
« Le service public de l'emploi comprend le placement, l'indemnisation, l'insertion, la formation et l'accompagnement des demandeurs d'emploi. Il est assuré par les services de l'Etat chargés de l'emploi, l'Agence nationale pour l'emploi et l'Association nationale pour la formation professionnelle des adultes. Il est également assuré par les organismes de l'assurance chômage mentionnés à l'article L. 35121 dans le cadre des dispositions législatives et réglementaires qui leur sont propres. »
La parole est à M. Louis Souvet, rapporteur.
Cet amendement vise à clarifier la rédaction du premier alinéa de l'article L. 311-1 qui définit le premier cercle du service public de l'emploi.
Tout d'abord, il précise les missions du service public de l'emploi.
Ensuite, il énumère les acteurs institutionnels qui y participent, en l'occurrence les services de l'Etat, par l'intermédiaire du ministère chargé de l'emploi et de l'ANPE, l'Association nationale pour la formation professionnelle des adultes, l'AFPA, ainsi que l'UNEDIC et les ASSEDIC, dans le respect de leurs statuts et des règles qui leur sont propres.
L'amendement n° 220, présenté par Mmes Printz et San Vicente, MM. Godefroy, Repentin et Raoul, Mme Boumediene-Thiery, MM. Desessard et Lagauche, Mme Le Texier, MM. Mélenchon et Vezinhet, Mme Voynet et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Dans le premier alinéa du texte proposé par le III de cet article pour l'article L. 3111 du code du travail, après les mots :
l'Association nationale pour la formation professionnelle des adultes,
insérer les mots :
les missions locales
La parole est à Mme Gisèle Printz.
Notre amendement tend à l'intégration des missions locales parmi les organismes faisant intrinsèquement partie du service public de l'emploi.
Il est d'ailleurs dans la logique du texte qui nous est proposé, lequel mentionne explicitement l'insertion parmi les missions de ce service public.
Chacun sait la compétence que les missions locales ont acquise dans ce domaine depuis leur création sous l'impulsion de M. Bertrand Schwartz, voilà maintenant une vingtaine d'années.
Elles exercent une véritable mission de service public d'insertion, en lien avec les collectivités locales, auprès de 700 000 jeunes sans qualification. Elles sont engagées depuis maintenant quatre ans dans un partenariat avec l'ANPE, fondé sur la complémentarité des compétences et la reconnaissance mutuelle. Ce partenariat se traduit par la co-traitance du programme d'accompagnement personnalisé pour les jeunes.
Aujourd'hui, le Gouvernement déclare qu'il souhaite confier au réseau des missions locales la mise en oeuvre du volet « insertion des jeunes » de son plan de cohésion sociale.
Dans la mesure où cela doit profiter aux jeunes les plus défavorisés, nous n'aurons pas le mauvais goût de critiquer ce revirement gouvernemental. « Mieux vaut tard que jamais », nous dit l'adage.
Le Gouvernement a laissé en déshérence cette population par la baisse drastique des crédits des programmes qui lui étaient consacrés. Qu'il manifeste aujourd'hui l'intention de s'en préoccuper à nouveau est finalement un premier point positif !
Mais s'il souhaite agir efficacement, il lui faut être cohérent, ne serait-ce que dans un souci de cohésion ! Cela implique d'intégrer immédiatement le réseau des missions locales dans le premier cercle du service public de l'emploi.
Nous observons d'ailleurs que M. le rapporteur a lui aussi déposé un amendement sur cette question après l'article 1er, un amendement de « rattrapage », en quelque sorte !
Son amendement vise à introduire de manière formelle dans le code du travail les missions locales et un conseil national des missions locales. Pour autant, il ne les fait pas entrer de plein droit dans le service public de l'emploi, ce qui conduit à les laisser dans une situation instable et, au final, préjudiciable à l'insertion des jeunes sur l'ensemble du territoire.
L'amendement n° 182, présenté par M. Goujon, Mme Hermange et M. Lardeux, est ainsi libellé :
I - Compléter le premier alinéa du texte proposé par le III de cet article pour l'article L.311-1 du code du travail par les mots :
et les missions locales pour l'insertion professionnelle et sociale des jeunes mentionnées à l'article 7 de la loi n°89-905 du 19 décembre 1989 dans le cadre des dispositions législatives et réglementaires qui leur sont propres.
II - En conséquence, dans le premier alinéa du même texte, remplacer les mots :
et l'Association
par les mots :
, l'Association
La parole est à M. Philippe Goujon.
Cet amendement traduit la préoccupation de notre groupe à l'égard des jeunes les plus en difficulté.
Il a pour objet d'intégrer au premier cercle du service public de l'emploi le réseau de ces 400 missions locales pour l'insertion professionnelle et sociale des jeunes de moins de vingt-six ans.
C'est un réseau qui, comme cela a été évoqué, a effectivement acquis une très grande importance dans l'accompagnement personnalisé des jeunes vers l'emploi : 750 000 d'entre eux seraient concernés chaque année, nous dit-on ! Il assure ainsi une véritable mission de service public de proximité.
En 2000, un protocole a été signé entre l'Etat, l'Association des régions de France et le Conseil national des missions locales, afin de mettre en place une professionnalisation des interventions de ce réseau.
J'ajoute que ce réseau agit depuis quatre ans en partenariat avec l'ANPE.
Dans le cadre de ce projet de loi, le choix du réseau comme opérateur principal de l'accompagnement vers l'emploi de 800 000 jeunes en cinq ans se justifie pleinement tant par son efficacité que par la volonté du Gouvernement de réduire prioritairement le chômage des jeunes, objectif auquel nous sommes bien évidemment extrêmement attachés.
L'amendement n° 488, présenté par MM. Muzeau, Fischer, Autain et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Supprimer le second alinéa du texte proposé par le III de cet article pour l'article L 311-1 du code du travail.
La parole est à M. Roland Muzeau.
Ce n'est pas avec l'introduction des entreprises de travail temporaire et des agences de placement privées dans le service public de l'emploi que les situations humainement scandaleuses d'exploitation de l'armée de réserve salariale vont cesser ! Ou alors, si vous pensez cela, ça devient grave !
Même en leur assignant une mission de service public, ces opérateurs privés ont pour objectif et pour raison d'être de se faire reconnaître pour gagner ainsi de l'argent, ce qui paraît d'ailleurs naturel, en étant les meilleurs chasseurs de tête au service des patrons !
Peu importe les problèmes d'adéquation entre l'emploi proposé et le profil du demandeur d'emploi !
Avec le volant de chômeurs existants, les emplois considérés comme non ou peu qualifiés sont occupés de plus en plus par des personnes diplômées. Du coup, les personnes les plus fragilisées se retrouvent rejetées hors de toute forme de travail et vers une exclusion économique et sociale complète.
C'est ainsi que, le pistolet sur la tempe, des jeunes sont contraints d'accepter des emplois très en dessous de leur qualification !
On peut faire confiance aux opérateurs privés pour savoir tenir et agiter le pistolet.
Je vous rappelle ce que je disais dans la discussion générale à propos de l'intérim. Les statistiques indiquent qu'un quart des missions d'intérim correspond à une mission pour une journée. Un quart des contrats égale une journée de travail : je ne sais pas si vous mesurez la précarité de ce système !
C'est pourquoi nous vous demandons d'adopter cet amendement qui, combiné avec les autres que nous déposons, est de nature à rectifier un peu les choses et à dresser quelques barrières pour éviter des dérapages toujours terribles pour la situation des salariés.
L'amendement n° 221, présenté par Mmes Printz et San Vicente, MM. Godefroy, Repentin et Raoul, Mme Boumediene-Thiery, MM. Desessard et Lagauche, Mme Le Texier, MM. Mélenchon et Vezinhet, Mme Voynet et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
A la fin du deuxième alinéa du texte proposé par le III de cet article pour l'article L. 3111 du code du travail, supprimer les mots :
les entreprises de travail temporaire ainsi que les agences de placement privé mentionnées à l'article L. 3121
La parole est à Mme Michèle San Vicente.
La rédaction de cet article pose un réel problème, pour ne pas dire un problème majeur, puisqu'elle introduit les entreprises de travail temporaire et les agences de placement privées dans le service public de l'emploi.
Ce n'est pas une simple contradiction sémantique que ce mélange entre le public et le privé ! Certes, la concession de service public existe dans d'autres domaines depuis fort longtemps. Mais nous ne sommes pas ici dans le même schéma, ni surtout dans la même matière !
La situation de l'emploi est telle après ces deux dernières années - nous n'aurons pas la cruauté de le rappeler - que le nombre de personnes sans emploi déséquilibre totalement le marché du travail.
Dans la précipitation qui caractérise votre action, monsieur le ministre, vous êtes tenté d'aller au plus simple et au plus rapide. Et le plus rapide, c'est de faire le tri pour obtenir le plus vite possible, de préférence avant 2007, des chiffres présentables du chômage.
Pour réaliser un véritable traitement statistique du chômage, vous souhaitez introduire les entreprises de travail temporaire et des agences de placement privées dans le service public de l'emploi.
Vous proposez donc de transformer notre service public actuel en un marché à l'anglo-saxonne ! Déjà, dans plusieurs ANPE, des conventions ont été signées avec des entreprises privées qui se voient confier des quotas de chômeurs - jusqu'à 6000 -, avec pour mission de les placer dans les entreprises de la région.
La somme que perçoivent ces officines varie selon la difficulté de la tâche. Un chômeur de longue durée, un chômeur de plus de cinquante ans, rapporte 6000 euros s'il est reclassé, alors qu'un chômeur de moins de cinquante ans ne rapporte, si j'ose dire, que 4300 euros !
Il y a même un échéancier de paiement : à la prise en charge, à l'embauche, après l'embauche, et ainsi de suite !
Mais le plus grave n'est pas là ! Le plus grave - nous n'avons pas besoin d'extrapoler puisque cela figure en toutes lettres dans les conventions -, c'est cette expression : « la sélection des demandeurs d'emploi se fera en concertation avec la DRA, et l'ASSEDIC et permettra sur différentes cohortes de tester plusieurs critères. »
Il y aura donc bien ce que nous dénonçons avec force, à savoir une sélection et des critères de facilité de placement. Si vous me permettez l'expression, je dirai que les opérateurs se « refileront » les chômeurs en fonction de ce qu'ils pourront rapporter.
Certes, jusqu'à présent, ce procédé est expérimental, mais nous savons trop bien ce que signifie ce genre d'expérimentation.
Sans que cela soit vraiment une surprise, vous nous proposez, avec l'introduction des entreprises de travail temporaire et des bureaux de placement dans un prétendu service public de l'emploi, de généraliser ce dispositif.
Nous sommes assez loin des déclarations humanistes. La réalité est beaucoup plus dure. Il s'agit, avec les cotisations des salariés généreusement distribuées à des bureaux de placement privés, d'organiser la remise dans l'emploi, donc hors des statistiques du chômage, de centaines de milliers de personnes. Et peu importe dans quelles conditions !
Nous sommes avec cet article 1er à la source de tout le dispositif emploi qui va suivre et dont nous aurons maintes fois l'occasion de dénoncer les faux semblants.
Mais je ne terminerai pas sans souligner que cette manière de procéder reflète l'idéologie dominante, qui n'est pourtant pas supposée être la vôtre, monsieur Borloo, mais qui est pourtant, hélas ! bien présente.
L'amendement n° 5, présenté par M. Souvet, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Au début du troisième alinéa du texte proposé par le III de cet article pour l'article L. 311-1 du code du travail, après les mots :
Les collectivités territoriales
insérer les mots :
et leurs groupements
La parole est à M. Louis Souvet, rapporteur.
Il s'agit de faire participer les groupements des collectivités territoriales au service public de l'emploi.
Le sous-amendement n° 319 rectifié, présenté par MM. Seillier, Pelletier, de Montesquiou et Mouly, est ainsi libellé :
Compléter le texte proposé par l'amendement n° 5 par les mots :
les Plans locaux pluriannuels pour l'insertion et l'emploi (PLIE) et les Fonds Locaux Emploi Solidarité (FLES).
La parole est à M. Bernard Seillier.
Cet amendement vise à intégrer les plans locaux pluriannuels pour l'insertion et l'emploi, ou PLIE, et les fonds locaux emploi solidarité, ou FLES, au sein du service public de l'emploi.
En effet, l'existence de ces structures est reconnue par les lois, et elles ont fait la preuve de leur expérience et de leur compétence dans ce genre d'intervention.
Il est donc proposé de les mentionner comme outils auxquels les collectivités locales et les établissements de coopération intercommunale peuvent déléguer leur compétence dans leur concours au service de l'emploi.
L'amendement n° 177, présenté par M. du Luart, est ainsi libellé :
Après le troisième alinéa du texte proposé par le III de cet article pour l'article L. 3111 du code du travail, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Les départements définissent et coordonnent l'ensemble des politiques de l'insertion des personnes défavorisées.
Cet amendement n'est pas défendu.
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 6 est présenté par M. Souvet, au nom de la commission des affaires sociales.
L'amendement n° 471 est présenté par MM. Muzeau, Fischer, Autain et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Au quatrième alinéa du texte proposé par le III de cet article pour l'article L. 311-1 du code du travail, après les mots :
l'Agence nationale pour l'emploi
insérer les mots :
, l'Association nationale pour la formation professionnelle des adultes
La parole est à M. Louis Souvet, rapporteur, pour défendre l'amendement n° 6.
Dans la mesure où le Gouvernement a déposé un amendement qui répond pleinement à nos préoccupations, je retire l'amendement de la commission.
Je défendrai conjointement les amendements n° 471 et 472, qui modifient tous deux les dispositions de l'article 1er ayant trait aux conventions pluriannuelles passées entre l'Etat, l'ANPE et l'UNEDIC.
Si je m'en tiens à l'exposé des motifs, la conclusion desdites conventions est rendue obligatoire afin de favoriser le pilotage du service public de l'emploi et la coordination entre les différents acteurs.
Jusqu'à présent, l'AFPA était considérée comme faisant partie du noyau dur de ce service public.
Même si le Gouvernement, depuis la loi sur les responsabilités locales, a décidé de se désengager du champ de la formation professionnelle et qualifiante des adultes, libéralisant du coup les politiques locales de l'emploi et de l'insertion et mettant également en péril le devenir de nombreux personnels, désormais sous le coup d'un projet de restructuration, lequel porte sur plus de 700 personnes, l'AFPA reste le pilier majeur de la mission de service public de formation.
Comment se fait-il, dans ces conditions, qu'elle ne soit pas partie prenante à des conventions déclinant des objectifs de l'activité de service public ?
Pour remédier à cette incohérence, nous proposons d'associer l'AFPA à la signature de ces conventions pluriannuelles. Tel est l'objet de notre amendement n° 471.
Toujours dans le même souci de cohérence et d'efficience, s'agissant maintenant des actions en direction de l'emploi et de la formation des personnes en situation de handicap, s'inscrivant elles aussi dans les principaux objectifs de l'activité du service public, nous envisageons que l'association pour la gestion du fonds pour l'insertion professionnel des handicapés, l'AGEFIPH, soit signataire des conventions. Tel est l'objet de l'amendement n° 472.
Cette seconde proposition m'amène à regretter que le Gouvernement ait choisi le présent dispositif conventionnel, incomplet et de nature à brouiller un peu plus les pistes, quant au rôle des différentes composantes du service public de l'emploi.
Pourquoi, en effet, ne pas avoir suivi le rapport du Conseil économique et social préconisant plusieurs conventions entre, d'une part, les institutions assurant le service public de l'emploi - l'Etat, l'ANPE, l'UNEDIC, l'AFPA - et, d'autre part, les opérateurs qui y concourent, au sein desquels l'AGEFIPH pourrait trouver sa juste place ?
En outre, je ne peux m'empêcher de craindre, comme l'a souligné le Conseil économique et social, que ce conventionnement pluriannuel tripartite ne masque des transformations plus profondes susceptibles de remettre en cause le fonctionnement de l'UNEDIC. Certes, sa gestion paritaire fait débat, mais doit-on en profiter pour mettre sous tutelle ce régime au travers d'un texte ?
Sur cette question, monsieur secrétaire d'Etat, mais aussi sur nos deux propositions, j'attends de votre part des réponses claires.
L'amendement n° 222, présenté par Mmes Printz et San Vicente, MM. Godefroy, Repentin et Raoul, Mme Boumediene-Thiery, MM. Desessard et Lagauche, Mme Le Texier, MM. Mélenchon et Vezinhet, Mme Voynet et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Dans le quatrième alinéa du texte proposé par le III de cet article pour l'article L. 3111 du code du travail, après les mots :
l'Agence nationale pour l'emploi
insérer les mots :
, l'Association nationale pour la formation professionnelle des adultes, les missions locales
La parole est à Mme Gisèle Printz.
Nous sommes d'accord avec la commission sur la nécessité de réparer un oubli en introduisant l'AFPA dans les signataires de la convention pluriannuelle entre les différents partenaires du service public de l'emploi.
Il ne serait en effet pas concevable que l'AFPA ne soit pas partie prenante d'une convention qui définit les objectifs du service public de l'emploi, lesquels ne peuvent être logiquement séparés d'objectifs de formation.
J'ajouterai seulement que l'AFPA, avec un taux de réussite de 80 % à l'issue des stages pour quelque 150 000 stagiaires en moyenne annuelle, constitue aujourd'hui l'un des meilleurs éléments du service public. Elle est riche d'une expérience qui justifie largement sa pleine participation au service public de l'emploi.
Nous souhaiterions également ajouter les missions locales aux signataires de cette convention pluriannuelle, par le biais d'une meilleure formalisation du conseil national que M. le rapporteur introduit judicieusement dans le code du travail, même si cette mesure reste à notre sens insuffisante.
L'amendement n° 472, présenté par MM. Muzeau, Fischer, Autain et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Dans le quatrième alinéa du texte proposé par le III de cet article pour l'article L 311-1 du code du travail, après les mots :
l'Agence nationale pour l'emploi
insérer les mots :
, l'association mentionnée à l'article L 323-8-3 du code du travail
Cet amendement a déjà été défendu.
L'amendement n° 489, présenté par MM. Muzeau, Fischer et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Après le mot :
informations
rédiger ainsi la fin de la première phrase du septième alinéa (c) du texte proposé par le III de cet article pour l'article L. 3111 du code du travail :
objectives qui leur sont strictement nécessaires pour réaliser ces actions.
La parole est à M. Roland Muzeau.
Le Gouvernement ambitionne de parvenir d'ici à 2006 à la constitution d'un dossier unique du demandeur d'emploi accessible aux différents réseaux.
Présenté comme un outil d'efficacité, ce dossier, comme tout support recevant des données nominatives, peut également se révéler être un formidable moyen de contrôler davantage les demandeurs d'emploi, de normaliser les parcours, les projets, et peut-être même de constituer un frein à l'insertion professionnelle.
Le Gouvernement ouvre par ailleurs largement la consultation de ces informations, tous les partenaires de l'ANPE - et ils seront nombreux désormais : collectivités, opérateurs privés - pouvant accéder au dossier personnel du demandeur d'emploi ; vous comprendrez donc que nous soyons totalement réticents.
Nous ne sommes d'ailleurs pas les seuls puisque ce point ressort dans l'ensemble des auditions que nous avons conduites. Le Conseil économique et social s'est lui aussi penché sur les garanties nécessaires à apporter en matière de confidentialité et d'accès aux données nominatives, et il n'a pas reçu de réponse.
Il est vrai, mes chers collègues, que l'article 1er est muet sur le sujet. D'ailleurs, c'est un trait caractéristique du projet de loi que de se révéler peu disert s'agissant de la sécurisation des parcours, mais en revanche très précis s'agissant des sanctions à l'égard des chômeurs.
Bref, pour éviter tout risque de fichage, nous envisageons de compléter le texte en mentionnant que seules des informations objectives strictement nécessaires à la personne pourront être collectées.
Il serait également bienvenu que le Gouvernement pense à identifier les personnes pouvant accéder aux informations dans les réseaux et qu'il s'assure qu'aucun croisement de fichiers ne sera possible - nous pensons par exemple à des détournements en direction des banques, des organismes de crédit...
M. le ministre est peut-être déjà en mesure de nous répondre sur ces points. Il avait avancé l'idée devant le Conseil économique et social : nous attendons sa réponse.
L'amendement n° 632, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Compléter le texte proposé par le III de cet article pour l'article L. 3111 du code du travail par un alinéa ainsi rédigé :
« Une annexe à la convention, signée par l'Association nationale pour la formation professionnelle des adultes, détermine les conditions dans lesquelles celle-ci participe aux objectifs mentionnés au a), ainsi que les modalités d'évaluation de cette participation. »
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
Le Gouvernement partage l'intérêt du Sénat pour l'AFPA et souhaite lui permettre d'être associée, dans le cadre des principes qui guident l'article 1er, à la définition des conventions tripartites passées entre l'Etat, l'UNEDIC et l'ANPE.
L'objet principal de ces conventions est de coordonner l'action des trois opérateurs principaux du service public de l'emploi que je viens de citer et de permettre la réalisation d'un fichier unifié, donc un suivi personnalisé de complète qualité.
Dès lors, nous rassemblons des personnes qui sont en situation de monopole, puisque l'ANPE a le monopole de l'établissement du fichier des demandeurs d'emplois. C'est la raison pour laquelle il vous est proposé dans cet amendement non pas de faire signer l'AFPA, qui n'a jamais eu le monopole de la formation professionnelle, mais de mettre l'association en situation de signer une annexe lui permettant de se situer dans cette mission de formation, dans le rôle qui lui est reconnu depuis sa création de formateur, certes éminent mais non unique.
L'amendement n° 490, présenté par MM. Muzeau, Fischer, Autain et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Supprimer les paragraphes IV, V et VI de cet article.
La parole est à M. Roland Muzeau.
L'idée de mettre en synergie les différents intervenants du service public de l'emploi en associant les acteurs de terrain de l'insertion, de la formation et de l'accompagnement a déjà trouvé des traductions concrètes sous diverses formes.
On ne peut évidemment pas a priori s'opposer à une démarche de coordination des actions particulières mais nécessairement complémentaires pour la réussite d'un parcours d'insertion. En ce sens, les maisons de l'emploi peuvent séduire. Il n'en demeure pas moins que, pour apprécier cette initiative, il convient de s'assurer des objectifs de ceux qui l'ont prise. Et là, mes chers collègues, je crois une fois de plus que le Gouvernement avance masqué !
Derrière le rideau de fumée - la proximité du service, une porte d'entrée pour les démarches et les actions d'accompagnement et d'insertion - se cache en fait un outil au service de la restructuration voulue du service public de l'emploi et du désengagement de l'Etat en matière de politique de l'emploi.
Par ce biais, le périmètre de gestion du service public de l'emploi est élargi aux collectivités territoriales et aux acteurs privés de placement et de l'entreprise sans pour autant que les chômeurs les plus en difficulté y aient accès.
En outre, le risque est grand de voir subordonné ainsi le rôle du service public de l'emploi aux impératifs du tissu économique local. A cet égard, je ne peux que partager les craintes du Conseil économique et social concernant « la municipalisation des actions en faveur de l'emploi qui irait à l'encontre de l'efficacité de celle-ci en réduisant les champs de recherche des emplois disponibles ».
Mesdames et messieurs les sénateurs maires, réfléchissez bien à cet avis du Conseil économique et social ! Mais peut-être est-ce là votre objectif : alimenter les secteurs d'activité qui peinent à trouver de la main-d'oeuvre en raison du manque d'attractivité des métiers proposés ; faire baisser ainsi la courbe du chômage ; occuper les bénéficiaires de minima sociaux ; viser l'employabilité immédiate et non l'insertion durable dans l'emploi pour garder en réserve le lot de salariés précaires dont les entreprises ont besoin.
Une autre raison nous pousse à nous opposer, cet amendement, aux maisons de l'emploi telles que vous les concevez : je veux parler de la question du financement. Veuillez m'excuser d'être aussi bassement matériel, mais de la réponse à cette interrogation dépend en partie le service de l'ANPE. Pour habiller Paul - les maisons de l'emploi -, n'avez-vous pas prévu de déshabiller Jacques - l'ANPE ?
Le président de la commission avait répondu par l'affirmative.
M. le président de la commission fait un signe de dénégation.
Il sera alors facile de constater que l'Agence et ses agents n'assument pas correctement leurs missions.
Le Gouvernement procédera-t-il, oui ou non, par redéploiements ? Dans la mesure où le projet de loi confie par ailleurs aux missions locales le soin d'accompagner les jeunes, ce qui nécessite là encore des personnels nouveaux spécifiquement formés à l'accueil des personnes fragiles, je ne vois pas comment les moyens adéquats seront dégagés.
Dans ces conditions et pour toutes les raisons évoquées ci-dessus, je vous propose, mes chers collègues, d'adopter l'amendement n° 490.
L'amendement n° 491, présenté par MM. Muzeau, Fischer, Autain et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Dans la première phrase du premier alinéa du texte proposé par le V de cet article pour l'article L. 311-10 du code du travail, après les mots :
prévision des besoins
insérer les mots :
quantitatifs et qualitatifs
La parole est à M. Roland Muzeau.
Nous avons déjà indiqué au sujet des maisons de l'emploi l'une de nos craintes majeures : nous craignons en effet que ces maisons ne servent surtout au retour à l'activité, à la satisfaction des besoins locaux en matière d'emploi, et ne favorisent pas les démarches des demandeurs d'emploi et l'accès à leurs droits.
Afin de « prioriser » le service aux demandeurs d'emploi, nous proposons de préciser que, dans l'estimation des besoins locaux en matière d'emploi et de formation, les maisons de l'emploi prendront en compte la dimension non seulement quantitative mais également qualitative.
Ainsi éviterons-nous peut-être que des réponses non adéquates ne soient apportées aux besoins des entreprises et des demandeurs d'emploi. C'est le sens de notre amendement.
L'amendement n° 223, présenté par Mmes Printz et San Vicente, MM. Godefroy, Repentin et Raoul, Mme Boumediene-Thiery, MM. Desessard et Lagauche, Mme Le Texier, MM. Mélenchon et Vezinhet, Mme Voynet et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Au début de la deuxième phrase du premier alinéa du texte proposé par le V de cet article pour l'article L. 31110 du code du travail, remplacer les mots :
Elles peuvent également participer
par les mots :
Elles participent
La parole est à Mme Michèle San Vicente.
Par cet amendement, nous posons de fait la question du rôle des maisons de l'emploi.
Dans la rédaction du projet de loi, si les maisons de l'emploi sont éloignées des demandeurs d'emploi, il est logique qu'elles ne participent pas obligatoirement et directement à l'accueil, à l'orientation des demandeurs d'emploi, à l'insertion, à l'orientation en formation et à l'accompagnement de ces derniers. Elles deviennent alors des agences vouées à la coordination des actions du service public de l'emploi et, pour faire court, à tout ce qui a trait aux restructurations et aux mouvements de main-d'oeuvre. Dans cette hypothèse, comment s'articulent-elles avec le service public local ?
Nous voyons poindre une énorme opération de démembrement des organismes qui remplissent actuellement une véritable mission de service public. Sur le plan des personnels, il en résultera un détachement des agents actuels dans différentes structures et, à l'avenir, des embauches exclusives d'agents sous contrats de droit privé mais surtout de salariés des organismes et bureaux de placement privés.
Quant au rôle des maisons de l'emploi, nous craignons en effet qu'il ne varie considérablement suivant leur localisation et leur ressort d'activité.
Sur ce point, comme sur beaucoup d'autres, vous nous demandez de voter en vous faisant crédit sur tout, monsieur le secrétaire d'Etat. De plus, la mise en oeuvre de la plupart de vos mesures est renvoyée à des décrets dont nous n'avons pas eu connaissance. Dans le texte, comme dans l'absence de texte, si j'ose dire, il règne l'incertitude la plus totale ; or nous ne pouvons légiférer par supputation.
En toute hypothèse, à ce stade du débat, il nous paraît indispensable, dans l'intérêt des chômeurs, d'inscrire dans le projet de loi que les maisons de l'emploi participeront obligatoirement à l'accueil et à l'orientation, à l'insertion, à l'orientation en formation des demandeurs d'emplois.
C'est la raison pour laquelle, mes chers collègues, je vous demande d'adopter notre amendement.
L'amendement n° 492, présenté par MM. Muzeau, Fischer, Autain et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Dans la seconde phrase du premier alinéa du texte proposé par le V de cet article pour l'article L. 31110 du code du travail, après les mots :
à l'accompagnement
insérer les mots :
professionnel et social
La parole est à M. François Autain.
Si l'on veut que les futures maisons de l'emploi soient utiles, il est nécessaire d'en faire des lieux de vraie construction de projet personnel et de retour à l'emploi stable pour les demandeurs d'emploi et pour les salariés en situation précaire.
C'est pourquoi cet amendement tend à préciser que les structures participent à l'accompagnement « professionnel et social » des demandeurs d'emploi et des salariés.
Une telle précision ne suffirait pas, à elle seule, à régler tous les problèmes. Elle témoignerait néanmoins du souci de prendre en compte des problèmes que nos concitoyens vivent souvent douloureusement.
Selon les chiffres de l'INSEE, près de 2, 5 millions de personnes occupent un emploi à durée limitée - intérimaires, CDD, contrats aidés et apprentis - et plus de 16 % de la population active travaille à temps partiel, les femmes représentant les trois quarts des personnes concernées.
Monsieur le secrétaire d'Etat, nous ne voulons pas que les maisons de l'emploi ne soient qu'un instrument au service d'une logique libérale.
Nous voulons que les dirigeants de ce pays s'attaquent vraiment aux emplois précaires existants et à ceux prévus dans les différents contrats afin de les transformer en emplois statutaires, respectant les normes publiques d'emploi - CDI, SMIC, 35 heures -, les conventions collectives, les accords de branche des institutions publiques et des secteurs marchands.
Il serait souhaitable, mes chers collègues, monsieur le secrétaire d'Etat, d'accepter au moins d'introduire cette précision rédactionnelle dans le texte du projet de loi.
L'amendement n° 224, présenté par Mmes Printz et San Vicente, MM. Godefroy, Repentin et Raoul, Mme Boumediene-Thiery, MM. Desessard et Lagauche, Mme Le Texier, MM. Mélenchon et Vezinhet, Mme Voynet et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Dans le premier alinéa du texte proposé par le VI de cet article pour l'article L. 311101 du code du travail, remplacer les mots :
peuvent prendre
par le mot :
prennent
La parole est à Mme Gisèle Printz.
De nouveau, nous en appelons à davantage de clarté au sujet des maisons de l'emploi, car nous sommes laissés dans l'ignorance totale de la forme qu'elles prendront au final.
La formulation selon laquelle elles « peuvent prendre la forme d'un groupement d'intérêt public » n'est pas satisfaisante dans la mesure où elle ne donne pas aux partenaires, notamment publics, du service public de l'emploi la sécurité juridique dont ils auront besoin.
Si la maison de l'emploi ne prend pas la forme d'un groupement d'intérêt public, quelle forme prendra-t-elle ? Sera-t-elle constituée sous la forme d'une simple association et quels seront exactement ses statuts ? Qui seront les membres de la maison de l'emploi puisque, aux termes du projet de loi, seuls sont énumérés les membres du groupement éventuel ? Comment sera composé le conseil d'administration ?
Monsieur le secrétaire d'Etat, une maison de l'emploi n'est pas un comité des fêtes ! Dans un domaine comme celui-ci, un minimum de clarté et de précision s'impose.
L'amendement n° 363, présenté par M. Vanlerenberghe et les membres du groupe de l'Union Centriste, est ainsi libellé :
Dans le premier alinéa du texte proposé par le VI de cet article pour l'article L. 311101 du code du travail, après les mots :
peuvent prendre la forme
insérer les mots :
d'un conseil local pour l'emploi ou
La parole est à M. Jean-Marie Vanlerenberghe.
Monsieur le secrétaire d'Etat, la création des maisons de l'emploi est une excellente chose. Cependant, le terme de « maison » est quelque peu trompeur.
En effet, la structure qu'il est proposé de créer vise à la mise en relation de toutes les parties prenantes aux politiques de l'emploi. C'est ce réseau d'acteurs qui est au coeur du dispositif, et pas nécessairement leur rassemblement physique ni même leur réunion au sein d'une même entité juridique.
Aux termes du projet de loi les maisons de l'emploi « peuvent prendre » la forme d'un GIP ou choisir de ne pas formaliser leur existence.
Cet amendement tend à entériner cette possibilité de choix en précisant qu'elles peuvent prendre la forme d'un GIP ou rester une structure plus informelle, baptisée « conseil local pour l'emploi », mais répondant exactement à la même ambition.
L'amendement n° 226, présenté par Mmes Printz et San Vicente, MM. Godefroy, Repentin et Raoul, Mme Boumediene-Thiery, MM. Desessard et Lagauche, Mme Le Texier, MM. Mélenchon et Vezinhet, Mme Voynet et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Compléter le premier alinéa du texte proposé par le VI de cet article pour l'article L. 311101 du code du travail par une phrase ainsi rédigée :
Des conventions d'objectifs peuvent être signées avec les structures d'insertion par l'économique visées à l'article L. 322416.
La parole est à Mme Gisèle Printz.
Les maisons de l'emploi ne pourront être une source de progrès que si elles deviennent une instance permettant de pallier le manque de coordination des institutions responsables de la formation des demandeurs d'emploi. Le problème crucial, en fait, est le bouclage du financement de la formation professionnelle.
Il serait donc souhaitable d'associer tous les partenaires de la politique de l'emploi et de l'insertion professionnelle, par un mécanisme de conventions, à ce qui pourra être réalisé par ces structures.
C'est pourquoi nous proposons que la possibilité de conclure des conventions d'objectifs avec les structures d'insertion par l'économique soit explicitement mentionnée dans la loi.
L'amendement n° 225, présenté par Mmes Printz et San Vicente, MM. Godefroy, Repentin et Raoul, Mme Boumediene-Thiery, MM. Desessard et Lagauche, Mme Le Texier, MM. Mélenchon et Vezinhet, Mme Voynet et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Dans le deuxième alinéa du texte proposé par le VI de cet article pour l'article L. 311101 du code du travail, après les mots :
l'article L. 35121
insérer les mots :
, l'Association nationale pour la formation professionnelle des adultes, les missions locales, les organisations syndicales représentatives d'employeurs et de salariés et des associations représentatives des demandeurs d'emploi
La parole est à Mme Michèle San Vicente.
Cet amendement vise à clarifier et à compléter la composition des maisons de l'emploi, parallèle à celle du service public de l'emploi.
Il s'agit d'introduire un peu de cohésion dans la mise en oeuvre du service public et de ses composantes.
Au demeurant, quels que soient le ressort territorial et l'objectif visé par telle ou telle maison de l'emploi, il n'est pas concevable que les membres de droit du service public de l'emploi ne soient pas également membres de droit de ces maisons.
A défaut, même si ces organismes devaient prendre la forme d'un groupement d'intérêt public, mais a fortiori s'ils revêtaient celle d'une association, il conviendrait de s'interroger sur leur finalité.
L'amendement n° 493, présenté par MM. Muzeau, Fischer, Autain et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Dans le deuxième alinéa du texte proposé par le VI de cet article pour l'article L. 311101 du code du travail, après les mots :
à l'article L. 351-21
insérer les mots :
le réseau des missions locales et permanences d'accueil, d'information et d'orientation.
La parole est à M. François Autain.
Roland Muzeau a, tout à l'heure, parfaitement explicité les raisons qui motivent notre opposition au dispositif de l'article 1er et à la logique libérale qui l'a inspiré.
Il n'en reste pas moins que ces maisons de l'emploi se mettront en place et que le service public de l'emploi sera, qu'on le veuille ou non, profondément remodelé, sans que toutefois des partenaires de la politique nationale de l'emploi et de l'éducation, y aient droit de cité, ce que nous regrettons profondément. Je pense, en particulier, au réseau des missions locales et des permanences accueil, orientation, information, les PAIO, étrangement absentes, non reconnues, contrairement aux opérateurs privés.
Cet oubli fâcheux témoigne de la vraie nature des dispositions de cet article qui vise, au travers de la réforme du service public, à tailler la part du lion aux agences d'intérim, organismes privés, et non à respecter la spécificité et le rôle de chacun des pivots actuels.
Désignées comme les pilotes et comme les principaux opérateurs du dispositif d'accompagnement personnalisé des jeunes, les missions locales doivent pouvoir participer de plein droit aux maisons de l'emploi.
Tel est le sens de cet amendement.
J'ajoute, à l'intention du Gouvernement, qui a accepté devant le Conseil national des directrices et directeurs des missions locales et PAIO le principe d'un amendement visant à les inscrire dans le service public de l'emploi, que je n'ai pas trouvé trace de cet amendement dans le dispositif qu'il nous présente !
Je crois cependant que notre rapporteur tout à l'heure nous proposera de reconnaître légalement ces réseaux. Nous soutiendrons ce petit pas en avant et nous vous invitons, mes chers collègues, afin d'avancer davantage encore, de reconnaître législativement que les réseaux des missions locales et PAIO ont vocation à être présents dans les maisons de l'emploi.
L'amendement n° 470, présenté par MM. Muzeau, Fischer, Autain et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Compléter le deuxième alinéa du texte proposé par le VI de cet article pour l'article L. 311 10 1 du code du travail par les mots :
et les partenaires sociaux.
La parole est à M. François Autain.
A propos du volet emploi du projet de loi, tous les syndicats auditionnés, de la CGT à la CFDT, ont regretté l'indigence des mesures proposées pour responsabiliser le patronat. Nous aurons l'occasion de revenir sur ce point lorsque nous entamerons la discussion des articles sur les restructurations, ajoutés à la sauvette par le Gouvernement !
Pour le moment, je concentrerai mon propos sur le second sujet évoqué par les organisations syndicales, à savoir, leur place, celle des partenaires sociaux dans les nouveaux dispositifs.
A l'échelon territorial, les partenaires sociaux ne sont pas associés à la mise en oeuvre de la maison de l'emploi, ni à ses actions. Pas plus que les partenaires sociaux, d'ailleurs, ne sont présentes les associations, notamment celles qui oeuvrent dans le domaine de l'exclusion. Pourtant, ils sont bien des acteurs incontournables de l'accès à l'emploi et à la formation professionnelle.
Aussi discutables que soient la gestion de l'UNEDIC ou la nouvelle convention d'assurance chômage, l'accompagnement personnalisé du demandeur d'emploi, avec le plan d'aide au retour à l'emploi-projet d'action personnalisé, le PARE-PAP, existe pour les demandeurs d'emploi indemnisés. Mais les autres, à savoir les personnes les plus éloignées du monde du travail et les demandeurs d'emploi non indemnisés, doivent également intéresser les syndicats.
Comment un gouvernement axant sa politique sur le dialogue a-t-il pu négliger d'impliquer davantage les partenaires sociaux ?
Si je ne rejoins absolument pas les propositions formulées par d'aucuns et visant à faire jouer aux maisons de l'emploi un rôle stratégique dans le domaine de l'emploi et de l'insertion en leur permettant, notamment, d'intervenir dans l'offre d'emploi et d'insertion pour les adultes et pour les jeunes, je n'en demeure pas moins attaché à ce que les partenaires sociaux aient toute leur place au sein de ces structures.
L'amendement n° 536 rectifié, présenté par MM. Pelletier, de Montesquiou, Laffitte et Seillier, est ainsi libellé :
Compléter le deuxième alinéa du texte proposé par le VI de cet article pour l'article L. 311 10 1 du code du travail est complété par les mots suivants :
ainsi que les organismes visés au deuxième alinéa de l'article L .311-1 du code du travail.
La parole est à M. Pierre Laffitte.
Souhaitant que les maisons de l'emploi soient le plus efficaces possible dans leur action en faveur des demandeurs d'emploi, nous proposons d'élargir leur « périmètre » à l'ensemble des organismes visés au deuxième alinéa de l'article L. 311-1 du code du travail.
L'amendement n° 210, présenté par M. Lardeux, est ainsi libellé :
Supprimer la dernière phrase de l'avant-dernier alinéa du texte proposé par le VI de cet article pour l'article L. 311-10-1 du code du travail.
Cet amendement n'est pas soutenu.
L'amendement n° 227, présenté par Mmes Printz et San Vicente, MM. Godefroy, Repentin et Raoul, Mme Boumediene-Thiery, MM. Desessard et Lagauche, Mme Le Texier, MM. Mélenchon et Vezinhet, Mme Voynet et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le VII de cet article :
VII. - A l'article L. 322 2 du même code, après les mots : « les administrations intéressées », sont insérés les mots : «, des représentants des collectivités territoriales, les organisations professionnelles d'employeurs et de travailleurs et des représentants des associations des chômeurs. »
La parole est à M. Jean Desessard.
Cet amendement, qui complète l'amendement n° 225, a pour objet de permettre aux demandeurs d'emploi d'être associés au fonctionnement des maisons de l'emploi en y étant représentés.
C'est pourquoi il vise à permettre aux associations de chômeurs d'être parties prenantes des maisons de l'emploi.
Les associations de défense des chômeurs et des personnes en situation précaire sont considérées par les demandeurs d'emplois comme des organismes qui leur sont extrêmement utiles pour accomplir leurs démarches. Ces associations leur permettent d'être moins isolés dans leurs relations avec le service public de l'emploi.
L'accompagnement, c'est-à-dire l'aide, le soutien, le conseil, l'information, est un moyen d'aider les demandeurs d'emploi à défendre leurs droits. Il offre donc aux chômeurs la possibilité d'améliorer leur vie quotidienne et d'exercer leur citoyenneté.
A la suite des mouvements de chômeurs de l'hiver 1997, la loi du 29 juillet 1998 avait permis de réaliser des avancées. Elle organisait l'expression des demandeurs d'emploi auprès du service public de l'emploi, répondant ainsi à une attente forte des chômeurs : bénéficier d'un droit d'expression pour une meilleure prise en compte de leurs besoins.
Des comités de liaison furent créés auprès des agences locales pour l'emploi, comités au sein desquels siègent des demandeurs d'emploi.
Ces comités de liaison peuvent être saisis de questions portant sur l'amélioration de la vie quotidienne des demandeurs d'emploi - conditions d'accès aux matériels et aux documents en libre-service -, sur l'amélioration de la qualité des services rendus - horaires d'accès aux services, mise en place de permanences, informations sur la nature des services rendus par l'agence locale.
Ils peuvent également être saisis de questions portant sur les informations relatives au marché local du travail - principales activités, formations, types d'emplois disponibles - et aux mesures pour l'emploi - contrats aidés -, ainsi que sur les informations relatives aux principales actions de l'agence locale pour l'emploi dans les mois à venir - plan de convocation des demandeurs d'emploi, actions propres à une branche professionnelle déterminée.
Ce dialogue entre les services déconcentrés de l'Etat et les organismes d'aide aux chômeurs nous paraît essentiel au renforcement de la cohésion sociale.
L'amendement n° 494, présenté par MM. Muzeau, Fischer, Autain et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Supprimer le VIII de cet article.
La parole est à M. François Autain.
Nous refusons, d'une part, la suppression du Conseil d'orientation et de surveillance des institutions chargées du placement, de l'indemnisation et du contrôle des demandeurs d'emploi et, d'autre part, la suppression, découlant de la libéralisation de l'activité de placement, de l'obligation faite aux entreprises de notifier à l'ANPE les places vacantes. D'où cet amendement de suppression du VIII.
La commission est défavorable à l'amendement n° 469 puisqu'il vise à supprimer l'article 1er.
L'amendement n° 473 est rédactionnel. La commission des affaires sociales y est défavorable dans la mesure où la rédaction du projet de loi paraît plus précise et offre davantage de garanties.
L'amendement n° 486 supprime la définition du service public de l'emploi. La commission émet un avis défavorable.
La préoccupation exprimée au travers de l'amendement n° 220 est satisfaite par un amendement de la commission. Je demande donc le retrait de cet amendement.
L'amendement n° 182 vise à offrir une meilleure reconnaissance aux missions locales en les inscrivant parmi les participants au service public de l'emploi. Cet objectif est satisfait par un amendement de la commission qui tend à inscrire dans le code du travail les deux articles de loi qui ont institué les commissions locales pour l'emploi. Je demande donc aux auteurs de cet amendement de bien vouloir le retirer.
La commission est défavorable à l'amendement n° 488, qui tend à interdire la participation des organismes privés au service public de l'emploi. De toute façon, c'est un amendement de suppression.
En ce qui concerne l'amendement n° 221, je dirai à Mme Printz et à ses collègues que les entreprises de travail temporaire ont déjà une activité très proche de l'activité de placement : elles peuvent donc tout à fait participer au service public de l'emploi. C'est pourquoi la commission émet un avis défavorable.
Le sous-amendement n° 319 vise à mettre sur le même plan les collectivités locales et leurs groupements, d'une part, les plans locaux pluriannuels pour l'insertion et l'emploi, ou PLIE, et les fonds locaux emploi solidarité, ou FLES, d'autre part.
Cette formulation ne paraît pas satisfaisante à la commission dans la mesure où ces plans et ces fonds sont des outils mis à la disposition des collectivités locales. Toutefois, la commission souhaite connaître l'avis du Gouvernement.
L'amendement n° 471 est satisfait par un amendement de la commission ; nous souhaitons donc que ses auteurs acceptent de le retirer.
L'amendement n° 222 est également satisfait par un amendement de la commission et nous en demandons pareillement le retrait.
L'amendement n° 472 tend à faire participer l'AGEFIPH, qui vient en aide aux personnes handicapées, aux conventions passées par l'Etat, l'ANPE et l'UNEDIC, afin de mieux coordonner le service public de l'emploi.
Je partage le souci des auteurs de cet amendement de prendre en compte les besoins particuliers des personnes handicapées, mais la commission se demande s'il est judicieux de multiplier les participants à ces conventions, qui doivent rassembler les principaux acteurs publics de l'emploi au niveau national. Elle souhaite donc connaître l'avis du Gouvernement.
La commission émet un avis défavorable sur l'amendement n° 489, car la précision qu'il apporte semble redondante par rapport aux garanties qui sont prévues par la loi informatique et libertés.
La commission est favorable à l'amendement n° 632, qui tend à faire participer l'Association nationale pour la formation professionnelle des adultes à la convention associant les principaux acteurs du service public de l'emploi.
L'amendement n° 490 est un amendement de suppression et n'entre donc pas dans l'architecture prévue par la commission, qui a donné un avis défavorable.
La précision apportée par l'amendement n° 491 nous est apparue superflue : avis défavorable.
La commission est défavorable à l'amendement n° 223. En effet, les maisons de l'emploi ont pour principale vocation de coordonner au plan local les acteurs du service public de l'emploi, mais elles n'ont pas vocation à rassembler partout sous un même toit les organismes en charge de l'orientation, de l'insertion, de la formation, de l'accompagnement des demandeurs d'emploi. Elles ne sont pas non plus des PAIO. Dans certains cas, elles pourront assumer tout ou partie de ces fonctions, dans d'autres cas elles se contenteront d'orienter le demandeur d'emploi vers le service compétent. La rédaction du projet de loi est donc appropriée.
La vocation des maisons de l'emploi est d'accompagner les chômeurs vers l'emploi ; c'est pourquoi la commission est défavorable à l'amendement n° 492.
La commission est également défavorable à l'amendement n° 224, car il tend à obliger les maisons de l'emploi à prendre la forme de groupement d'intérêt public. Or la commission souhaite, comme le prévoit le projet de loi, laisser une grande liberté de choix de la forme juridique.
S'agissant de l'amendement n° 363, je répète que le projet de loi laisse la plus grande liberté aux acteurs locaux d'organiser la maison de l'emploi selon la forme juridique qui leur paraît la plus adaptée. La référence au conseil local pour l'emploi, proposée dans cet amendement, a paru superflue à la commission. De plus, les contours d'un conseil local pour l'emploi mériteraient d'être mieux définis juridiquement. La commission émet donc un avis défavorable et souhaite que M. Vanlerenberghe accepte de retirer son amendement.
La commission partage l'objectif des auteurs de l'amendement n° 226 de faire travailler les maisons de l'emploi avec les structures d'insertion par l'économique. En revanche, je ne suis pas certain qu'il soit nécessaire de l'inscrire dans la loi pour qu'il soit atteint. La commission s'en remet donc à la sagesse du Sénat.
Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.
L'amendement n° 225 vise à élargir considérablement le nombre des partenaires devant figurer obligatoirement dans la maison de l'emploi. La commission souhaite conserver une grande souplesse au tour de table des maisons de l'emploi, qui doit s'adapter aux réalités locales. Elle a donc émis un avis défavorable sur cet amendement.
Les permanences d'accueil, d'information et d'orientation ont vocation à participer aux maisons de l'emploi, mais il ne nous a pas semblé nécessaire que leur présence soit rendue obligatoire, et la commission est défavorable à l'amendement n° 493.
Les maisons de l'emploi sont destinées à rassembler les professionnels de l'aide aux demandeurs d'emploi et non les partenaires sociaux ; c'est pourquoi nous sommes défavorables à l'amendement n° 470.
L'amendement n° 536 rectifié vise à rendre obligatoire la participation, dans les maisons de l'emploi, d'un très grand nombre d'organismes visés à l'article L. 311-1 du code du travail : organismes publics ou privés, de placement, d'insertion, de formation, d'accompagnement des demandeurs d'emploi, comme les structures d'insertion par l'activité économique, les entreprises de travail temporaire, les organismes de placement privés.
Il ne semble pas raisonnable de rendre obligatoire la participation d'un si grand nombre d'organismes, d'autant que leur définition est parfois assez floue. Le tour de table des maisons de l'emploi doit être ouvert, mais il doit également s'adapter aux réalités locales. Telles sont les raisons pour lesquelles la commission est défavorable à l'amendement n° 536 rectifié.
L'amendement n° 227 vise à faire participer les associations de chômeurs au conseil supérieur de l'emploi ; la commission s'en remet à la sagesse du Sénat et souhaite entendre l'avis du Gouvernement sur ce sujet.
Enfin, la commission est défavorable à l'amendement de suppression n° 494.
Monsieur le président, je souhaite faire quelques remarques liminaires, qui permettront d'éclairer les explications plus rapides que je donnerai sur chaque amendement.
L'article 1er rappelle la définition du placement, précise celle du service public de l'emploi et crée les maisons de l'emploi, dont il fixe le modus operandi.
Tout d'abord le principe de gratuité du placement, principe auquel le Gouvernement est indéfectiblement attaché, est clairement réaffirmé dans l'article 1er ; sous la réserve des dispositions prises dans le champ culturel, eu égard à la particularité de l'emploi culturel.
En ce qui concerne le service public de l'emploi, je ne reviens pas sur ce que j'ai dit à propos de la convention passée entre l'Etat, l'UNEDIC et l'ANPE. L'Etat a souhaité, lors de cette définition du service public de l'emploi, identifier deux cercles.
Un premier cercle obligatoire, une sorte de noyau, comprend les trois entités publiques en situation de monopole de mission : l'Etat, l'UNEDIC et l'ANPE, pour ce qui est de la tenue à jour des fichiers. Nous y ajoutons l'AFPA, signe de l'attachement de l'Etat à cet organisme, même s'il n'a pas le monopole de la formation.
Un deuxième cercle s'ouvre, lui, aux organismes qui souhaitent participer au service public de l'emploi et, bien sûr, aux collectivités locales, dans le respect de leurs compétences et de leur autonomie de gestion.
Enfin, je voudrais rappeler que, aux yeux du Gouvernement, les maisons de l'emploi visent trois objectifs.
Premier objectif : être le support du changement complet opéré dans la politique sociale pour l'emploi par rapport aux pratiques des vingt dernières années. Avant de mobiliser des moyens financiers en formation, en emplois aidés, on souhaite à chaque fois identifier à l'échelle nationale, régionale, et de l'agglomération, les emplois disponibles. Il s'agit de parvenir à une gestion prévisionnelle des emplois privés et publics et, à partir de cette carte des emplois disponibles, de mieux coordonner les interventions, de mieux organiser la mobilisation des moyens de l'emploi.
C'est important, surtout dans un pays qui compte 4 millions de personnes au chômage quand 500 000 offres d'emploi ne trouvent pas preneur.
Deuxième objectif des maisons de l'emploi : aboutir à cette gestion prévisionnelle des emplois de manière contractuelle, conventionnelle, à l'échelle de chaque agglomération.
Cela signifie que la maison de l'emploi, c'est d'abord un tour de table reposant sur la volonté des acteurs locaux. Il ne peut donc exister de maison de l'emploi sans une initiative locale : l'Etat n'a pas sa carte des maisons de l'emploi avec, pour chaque territoire, une idée précise de l'emplacement, du métrage carré, de la couleur des portes, et de la liste exhaustive des acteurs qui peuvent y entrer. L'Etat travaillera, bien sûr, en synergie avec des acteurs locaux qui proposeront le projet. Le but est de réussir ce tour de table et de le faire fonctionner, ce qui ne sera possible que si la volonté de créer existe avant la volonté de faire vivre.
Troisièmement, ces maisons de l'emploi sont également destinées à devenir le réseau d'accueil des demandeurs d'emploi de demain, un lieu d'accueil exemplaire des chômeurs ; Jean-Louis Borloo et Gérard Larcher sont tous deux très attachés à cet aspect.
En effet, nous souhaitons que les collectivités locales puissent développer un accueil innovant des demandeurs d'emploi, afin de traiter les problèmes dans leur globalité, pas seulement l'offre d'emploi, mais aussi l'offre de formation, le bilan de compétence, la détection des motivations et des compétences personnelles, l'intervention sur des problèmes voisins de l'emploi tels que le logement, la santé, la famille, la parentalité, le transport, qui peuvent être des obstacles dans le parcours de recherche d'emploi.
Cela se fera dans la durée, avec un système de référents et d'accompagnants, ce qui signifie, pour répondre concrètement aux interrogations du groupe CRC, notamment, que l'Etat a clairement prévu des moyens, qui viennent d'ailleurs s'additionner aux efforts déjà consentis depuis 2002. Je vous rappelle que, depuis 2002, l'Etat a accompagné les négociations avec les partenaires sociaux dans le cadre de la Convention d'objectifs et de gestion, permettant une augmentation de l'ordre de 25 % du personnel de l'ANPE.
Cette réforme des moyens de la lutte contre le chômage, voulue par les partenaires sociaux, a donc déjà conduit à une augmentation sensible des personnels.
Dans le plan de cohésion sociale, deux lignes de crédits sont prévues afin de permettre le recrutement de 7 500 référents, conseillers, accompagnants, dans les maisons de l'emploi. Nous discuterons agglomération par agglomération, concrètement, de leur affectation, de leur profil.
J'ajoute que 300 millions d'euros sont prévus, dont 120 millions d'euros de crédits de paiement dès 2005, pour financer les investissements.
L'Etat cofinance donc, en association avec les collectivités locales ou en tout cas avec des acteurs locaux, l'investissement dans la création de lieux nouveaux et participe également à des dotations supplémentaires en personnel pour renforcer l'accompagnement et l'accueil.
Cet éclairage préalable étant apporté, j'en viens aux différents amendements.
Sur les amendements n° 469, 473 et 486, qui tendent à la suppression de tout ou partie de l'article 1er, vous comprendrez, bien sûr, que le Gouvernement émette un avis défavorable puisque cet article est fondamental dans la réorganisation de la politique de l'emploi.
En revanche, le Gouvernement est favorable à l'amendement n° 4 rectifié.
S'agissant des amendements n° 220 et 182, je formulerai trois observations sur les missions locales et les PAIO :
Premièrement, le Gouvernement reconnaît, à l'évidence, le bien-fondé des missions locales et des PAIO. Il souhaite même qu'elles soient les porteurs du programme d'accompagnement à l'emploi des jeunes sans qualification. Il prévoit d'ailleurs de permettre à ce réseau de se doter de l'équivalent de 2 000 référents supplémentaires, s'ajoutant aux 800 référents qui ont déjà été créés par le dispositif de trajet d'accès à l'emploi, ou TRACE, que l'Etat consolide. Il n'y a donc pas là seulement un discours, mais bien une programmation de moyens dans le cadre du plan de cohésion sociale.
Deuxièmement, le Gouvernement renforce l'autonomie des missions locales et des PAIO puisqu'il met à leur disposition, sous le contrôle des services déconcentrés, le fonds national d'insertion - 75 millions d'euros dès 2005 et 100 millions d'euros les années suivantes -, de manière que, avec des crédits réactifs, il puisse être répondu à l'ensemble des problèmes que risque de rencontrer le jeune dans son parcours d'insertion, qu'il s'agisse de formation, de logement, de transport, de santé, de famille, de parentalité ou d'hébergement.
Troisièmement, je tiens à souligner que le Gouvernement est heureux de la solution proposée par la commission, qui permet de faire d'une pierre deux coups : elle positionne clairement les missions locales et PAIO dans le service public de l'emploi, de manière économe au regard du droit, ce qui répond à notre souci constant de faire simple. Elle permet également de les intégrer complètement dans le code du travail, ce qui donne une vraie pérennité à ces acteurs essentiels de l'insertion professionnelle des jeunes, qu'une loi dérogatoire leur avait partiellement octroyée.
Je tiens à saluer la démarche de la commission à cet égard. Le Gouvernement s'y rallie complètement et, de ce fait, il sollicite, lui aussi, le retrait des amendements n° 220 et 182. .
Le Gouvernement est défavorable aux amendements n°s 488 et 221.
En revanche, il est favorable à l'amendement n° 5 de la commission.
En ce qui concerne le sous-amendement n° 319 rectifié, le Gouvernement ne mésestime évidemment pas l'intérêt des FLES. Toutefois, il s'agit d'outils à la disposition des partenaires locaux et du réseau d'insertion, et non pas de personnes qui ont la charge de l'ensemble de l'accompagnement des demandeurs d'emploi ou des jeunes en difficulté. Ils interviennent à l'appui de certains dispositifs et contrats, à certaines étapes de la séquence.
Dans un souci de simplicité, le Gouvernement émet un avis défavorable sur ce sous-amendement, d'autant que les FLES peuvent rentrer dans les catégories du deuxième cercle du service public de l'emploi, catégorie générique clairement identifiée. A force de citer chaque organisme, le risque est grand d'en oublier certains, ce qui ne correspondrait pas au souci de concorde qui préside à la nouvelle politique de l'emploi mise en oeuvre par le Gouvernement.
Le Gouvernement sollicite, comme la commission, le retrait de l'amendement n° 471.
Il est défavorable à l'amendement n° 222.
S'agissant de l'amendement n° 472, je dirai que l'AGEFIPH est suffisamment bien positionnée dans le cadre de la co-traitance avec l'ANPE pour qu'il ne soit pas nécessaire d'aller au-delà. Là encore, restons économes au regard du droit et sachons ouvrir des catégories génériques plutôt que de citer des organismes au risque d'en oublier d'autres.
L'avis du Gouvernement est donc défavorable sur cet amendement, de même que sur l'amendement n° 489.
Sur les amendements n°s 490, 491, 223, 492 et 224, l'avis du Gouvernement est défavorable.
Le Gouvernement demande le retrait de l'amendement n° 363 pour les mêmes raisons que celles qui ont été développées par la commission.
Au sujet de l'amendement n° 226, sur lequel la commission s'en remet à la sagesse du Sénat, le Gouvernement émet, pour sa part, un avis défavorable.
En effet, nous avons souhaité articuler le dispositif des maisons de l'emploi de la manière suivante : un socle obligatoire composé des trois acteurs qui ont un monopole dans leurs missions au sein du service public de l'emploi, à savoir l'Etat, l'UNEDIC et l'ANPE, auquel s'adjoint nécessairement, pour transcrire la réalité de l'initiative locale, une collectivité locale ou un groupement de collectivités locales de coopération intercommunale ; autour de ce socle obligatoire s'ajoutent des acteurs facultatifs qui doivent se situer dans une dynamique de partenariat consentie et voulue par tous. Cela signifie que les maisons de l'emploi participent à l'insertion par l'activité économique, mais à condition que l'accord local le permette et le nécessite.
Ma collègue Nelly Olin veillera à ce que, dans toutes les agglomérations, les acteurs de l'insertion par l'économique soient représentés au sein des maisons de l'emploi, un peu comme les missions locales et les PAIO pour ce qui me concerne.
Mme la ministre déléguée à la lutte contre la précarité et l'exclusion fait un signe d'approbation.
Le Gouvernement est défavorable aux amendements n°s 225, 493, 470 et 536 rectifié.
Concernant l'amendement n° 227, sur lequel la commission s'en est remise à la sagesse du Sénat, le Gouvernement, quant à lui, émet un avis défavorable. En effet, nous avons un immense respect - et peut-être même plus que cela - pour les partenaires sociaux et il nous paraît délicat, au moment où ceux-ci font des efforts évidents pour représenter à la fois ceux qui travaillent et ceux qui sont en demande d'emploi, de contester leur représentativité ou leur rôle par la reconnaissance des associations de chômeurs au-delà de ce qui est nécessaire.
Protestations sur les travées du groupe socialiste.
Enfin, le Gouvernement est défavorable à l'amendement n° 494.
Je précise que la commission est également défavorable à l'amendement n° 227 dans la mesure où ses auteurs n'y ont pas apporté la rectification souhaitée pour que la commission émette un avis de sagesse, à savoir qu'il y soit fait référence, non plus aux associations de chômeurs, mais aux associations de demandeurs d'emploi.
La parole est à M. Yves Coquelle, pour explication de vote sur l'amendement n° 469.
J'ai l'impression que, depuis ce matin, nous parlons du traitement du chômage avant d'en examiner les causes. C'est comme si un médecin donnait un traitement au malade avant de l'avoir examiné !
On ne peut pas régler les problèmes de l'emploi par la création de structures, aussi sophistiquées soient-elles, parce qu'elles sont vouées à l'échec face à la dure réalité économique de notre pays.
Je cherche en vain dans ce projet de loi de programmation pour la cohésion sociale, auquel s'est d'ailleurs ajouté à la dernière minute le projet « Larcher », ce qui peut être à même d'inverser la casse de nos industries et la précarisation de l'emploi dans notre pays.
Il contient de belles phrases, de magnifiques envolées lyriques, mais elles ne vont en rien améliorer la situation et encore moins la régler. C'est même tout le contraire qui va se produire !
Il s'agit d'un projet de loi de régression sociale sans précédent !
Après les agressions contre les retraites, contre l'école, contre la protection sociale, après les privatisations, c'est maintenant le code du travail qui est dans le collimateur du Gouvernement.
Grâce à l'abrogation de la loi de notre collègue Robert Hue sur le contrôle des fonds publics versés aux entreprises, grâce au démantèlement de la loi de modernisation sociale, le patronat a les mains libres. Avec la mondialisation capitaliste, il y va de bon coeur, sans retenue, sans pudeur, sans scrupule, pour délocaliser, licencier et jeter à la rue des milliers de salariés !
Au coeur de tout ce système, se trouve la recherche de la rentabilité capitaliste maximale, et peu importe le devenir des salariés d'une région, voire d'un pays.
Le département du Pas-de-Calais compte à ce jour, pour l'année 2004, pas moins de trente-trois entreprises qui, le plus souvent par le biais de délocalisations, ont supprimé près de 6 000 emplois. Mes chers collègues, c'est plus de sept fois Metaleurop pour la seule année 2004, avant même que celle-ci soit achevée !
En 2003, 4 000 emplois ont déjà été supprimés, ce qui fait un total de 10 000 suppression d'emplois en deux ans, dans un département déjà gravement touché par la misère, avec des taux de chômage deux fois plus élevés que la moyenne nationale. Cela est intolérable. Jusqu'où va-t-on aller ? Et l'on parle maintenant, à mots couverts, d'un plan social à Eurotunnel !
Le Pas-de-Calais n'est malheureusement pas un cas isolé, car bon nombre de départements français subissent le même sort.
A lire et relire ce projet de loi, je constate que, derrière les belles phrases et les beaux discours, le Gouvernement poursuit son oeuvre dévastatrice sur le plan social, flexibilisant et précarisant l'emploi, condamnant ainsi des milliers de salariés à une insécurité sans précédent depuis la Seconde Guerre mondiale. Car il s'agit bien de généraliser la précarisation de l'emploi, de remettre en cause les CDI et les droits dont bénéficient les salariés.
La précarisation de l'emploi à très grande échelle est en marche.
Vous prévoyez de casser l'ensemble du système de protection des salariés et les conventions collectives qui régissent les rapports entre employeurs et employés.
Dans le même temps, rien n'est fait pour décourager les entreprises françaises de délocaliser dans les pays où les coûts de la main d'oeuvre sont scandaleusement bas.
Récemment, la cristallerie d'Arques, toujours dans le Pas-de-Calais, vient d'annoncer la suppression de 2 700 emplois !
Voilà un an, grand tapage avait été fait parce que des techniciens de cette verrerie s'étaient rendus en Chine pour, prétendument, développer leur technologie. En fait, il s'agissait plus sournoisement de préparer la délocalisation d'une importante partie de l'entreprise.
Les groupes communistes du Sénat et de l'Assemblée Nationale considèrent qu'il est urgent de mettre fin à ces délocalisations sauvages.
Nous avons élaboré des propositions qui visent à limiter ces délocalisations, notamment en taxant les produits fabriqués dans les pays à moindre coût de main d'oeuvre quand ils reviennent dans notre pays pour y être vendus.
Nos propositions méritaient d'être discutées. Elles sont restées lettre morte et nous n'avons obtenu aucune réponse.
En outre, aujourd'hui, un certain nombre de chefs d'entreprise utilisent le spectre de la délocalisation comme prétexte pour faire pression sur les salaires et sur les conditions de vie et de travail.
Exclamations sur les travées du groupe socialiste.
En réalité, ce projet de loi ainsi que le texte « Larcher », qui tend à supprimer les contrats à durée indéterminés, feront en sorte que, demain, tous les salariés deviendront des travailleurs précaires, aux droits de plus en plus réduits.
Mes chers collègues, ces textes issus d'une vision politique particulièrement réactionnaire §et régressive sur le plan social, ...
... pilotés en coulisse par le MEDEF, vont, s'ils sont adoptés, ramener la France un siècle en arrière en ce qui concerne les droits des salariés.
Sur le plan économique, la multiplication des mesures d'exonération de charges sociales et patronales ne contribue en rien à diminuer le chômage, alors qu'elle a pour effet de tirer vers le bas l'ensemble des coûts et des salaires !
Mon cher collègue, vous avez dépassé les cinq minutes que le règlement vous accorde !
Voilà pourquoi l'ensemble des élus communistes, ici dans cet hémicycle, mais également partout dans le pays, seront aux cotés des populations pour combattre fermement ces textes.
En attendant, nous proposons de supprimer l'article 1er.
Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.
M. Roland Muzeau. J'interviens pour permettre à nos collègues qui doutent encore de leur vote de se faire une idée plus précise.
Rires.
J'ai bien écouté notre collègue Louis Souvet livrer, très fidèlement d'ailleurs, la position de la commission des affaires sociales sur tous les amendements déposés sur l'article 1er. Cela m'autorise à dresser un bilan assez affligeant du dialogue entre nous.
Tout le monde souhaite que ce texte soit consensuel, mais toutes les propositions que nous avançons pour aller dans ce sens sont rejetées, qu'il s'agisse de l'AFPA, des PAIO, des missions locales, de l'AGEFIPH, des partenaires sociaux, des associations de demandeurs d'emploi ou de chômeurs, comme on voudra. Je sais bien que le terme de « chômeur » fait frissonner M. Braye, mais qu'y puis-je ? Les chômeurs existent ! Ils sont même 4 millions !
Exclamations sur les travées de l'UMP.
Bref, aucune de nos propositions - et nos collègues socialistes n'ont guère eu plus de chance ! - n'a été retenue par le rapporteur. Je trouve que, dès l'article 1er, c'est de bien mauvais augure pour la suite ; la suite où nous retrouverons d'ailleurs ce par quoi nous étions censés commencer, et croyez bien que nous continuerons à dire avec coeur et sans relâche ce que nous avons à dire.
Monsieur le secrétaire d'Etat, quant à vous, vous avez tenu à confirmer la volonté du Gouvernement de voir les collectivités territoriales s'afficher plus clairement dans les dispositifs concernant le chômage. Or chacun sait que cela conduira inéluctablement à des transferts de charges. Et il est évident que, face à des situations humainement aussi douloureuses que celles des personnes au chômage, les collectivités locales savent ce qu'elles ont à faire, elles l'ont déjà prouvé.
Or ces transferts de charges ne seront pas compensés par l'Etat. Dès lors, demain, ce sont les maires, les élus locaux, sur le terrain, qui seront considérés comme étant ceux qui réussissent ou non à faire bouger la courbe du chômage dans leur secteur.
Voilà ce qui se profile derrière ce texte et qui a motivé un certain nombre de nos amendements et de nos interventions
En fait, tel est bien l'objectif du Gouvernement : se défausser de sa politique de l'emploi.
Si l'article 1er était voté en l'état, vous parviendriez, de manière particulièrement habile, je vous le concède, monsieur le secrétaire d'Etat, au résultat suivant : les élus locaux en paieraient lourdement les conséquences et, en tout état de cause, sans aucun bénéfice pour les chômeurs.
Applaudissements sur les travées du groupe CRC.
Je mets aux voix l'amendement n° 469.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin a lieu.
Il est procédé au comptage des votes.
Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 14 :
Le Sénat n'a pas adopté.
Je mets aux voix l'amendement n° 473.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement est adopté.
Mon explication de vote s'appuiera sur un exemple concret puisé dans mon département.
Les fusions succèdent aux restructurations, qui succèdent aux délocalisations, qui succèdent aux faillites, au détriment du citoyen et au profit d'une plus grande rentabilité.
Ces diverses opérations assurent aux détenteurs des capitaux des marges de profit accrues tandis que les conditions d'exploitation des travailleurs des pays concernés sont encore aggravées. Des milliers d'emplois sont ainsi menacés en France et dans le reste de l'Europe.
Le département de l'Isère n'est pas épargnés par la casse de l'emploi : Hewlett-Packard, Atofina, SGL Technic, Alstom, Cegelec, SICN, Schneider Electric, Sachs France, Rhodia, Matussière & Forest, Calor, Federal Mogul, Péchiney-Alcan ont annoncé des restructurations et des délocalisations, laissant des centaines de familles dans le désarroi et l'incertitude.
Et cette liste s'allonge malheureusement chaque jour : l'entreprise Stahl, implantée à Saint-Clair-du-Rhône, vient de s'y ajouter. Au retour de leur congé, le 30 août dernier, les 147 salariés de cette entreprise ont appris la fermeture de leur site. Ils font, avec deux membres du comité d'entreprise, l'objet d'une procédure de licenciement. L'annonce est sèche, d'une extrême brutalité. Elle est l'expression la plus nette du caractère inhumain de la gestion libérale.
Stahl a décidé de vendre son activité de production au groupe Albion, qui possède en Grande-Bretagne une usine de production de colorants pour papier, et de transférer son activité d'achat de colorants pour le cuir en Chine, laissant ainsi sur le carreau les 149 salariés et leurs familles.
Chacun d'entre nous le sait, dans la chimie, pour un emploi supprimé, ce sont trois emplois induits qui disparaissent.
Cette entreprise, pourtant rentable, ne l'est pas suffisamment pour les actionnaires du fonds de pension américain Investcorp, qui détient pratiquement 100 % de l'entreprise, et pour le groupe néerlandais propriétaire du site.
Une réunion a eu lieu à la mi-septembre à Lyon avec M. Borloo, que je salue puisqu'il vient de nous rejoindre. Lors de cette réunion, monsieur le ministre, vous avez promis aux salariés un « plan exemplaire ». Cependant, malgré une rencontre avec le ministre néerlandais, la situation est aujourd'hui bloquée, dans l'attente d'une nouvelle réunion du comité d'entreprise, initialement prévue pour le 2 novembre mais reportée au 5 novembre.
La direction semble toujours hostile à un maintien d'activité sur le site et à la sauvegarde de vingt emplois, malgré les propositions du cabinet d'expert économique. De plus, le plan de sauvegarde de l'emploi est des plus décevants.
Je vous indique à ce sujet que, mardi soir, la désespérance dans laquelle se trouvaient les salariés les a poussés à séquestrer leur directeur isérois. Quant au directeur britannique de ce groupe néerlandais, il a préféré prendre la fuite ! Il devait rencontrer la direction générale aux Pays-Bas vendredi dernier et revenir vers les salariés lundi pour apporter des réponses à leurs interrogations. Mais il a brillé par son absence !
Apprenant qu'il ne reviendrait pas avant la réunion du comité d'entreprise prévue initialement le 2 novembre, et devant cette conduite lâche, les salariés ont interpellé le directeur de leur site. Face à l'absence de réponse de ce dernier, ils ont décidé de le retenir, en attendant la reprise de négociation du plan social.
Après obtention d'une rencontre à la préfecture et d'un rendez-vous dans votre ministère, monsieur le ministre, ils ont finalement décidé de le laisser quitter l'entreprise mercredi dernier, en fin de journée.
Monsieur le ministre, malgré votre venue et votre promesse, il n'y a rien eu de plus dans ce plan social pour les salariés. Il n'y a que cette loi, loi minimaliste pour ces femmes et ces hommes dont la moyenne d'âge s'élève à quarante-huit ans et dont l'ancienneté moyenne dans l'entreprise est de vingt-huit ans.
Maintenir le négoce et le mélange des colorants sur le site de Saint-Clair-du-Rhône, obtenir des investissements correspondant à une main d'oeuvre qui a un savoir-faire extraordinaire dans les métiers de la chimie, trouver à chacune et à chacun de ceux pour qui ce sera nécessaire des formations débouchant sur un emploi, ne laisser personne sur la touche : voilà comment, en vérité, vous devez agir pour la sauvegarde de l'emploi dans l'entreprise Stahl et, d'une manière plus générale, dans notre pays.
Vous prétendez lutter contre les délocalisations, monsieur le ministre, mais vous ne faites que les encourager en permettant aux entreprises de s'appuyer sur une nouvelle législation qui leur est favorable, et ce au mépris des droits les plus élémentaires des salariés !
Monsieur le ministre, les salariés de l'entreprise Stahl ont, dans un souci d'apaisement et de dialogue et à la suite de l'engagement pris par le préfet de l'Isère d'organiser deux réunions de concertation, décidé, comme je vous le disais il y a un instant, de ne plus retenir le directeur. Ils vous ont fait confiance, vous n'avez donc pas le droit de les décevoir. Quelles réponses allez-vous leur apporter ?
Il me semble évident que l'amendement n° 488, qui vise à interdire l'introduction au sein du service public de l'emploi d'opérateurs privés, redonne bien toute sa place à l'Etat dans sa mission de maintien de l'emploi et d'aide à un véritable retour à l'emploi.
C'est pour cette raison que je vous demande, mes chers collègues, de voter en faveur de cet amendement.
Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.
Monsieur le président, le Gouvernement reste bien entendu défavorable à cet amendement, mais je voudrais répondre à Mme David.
Madame la sénatrice, je tiens tout d'abord à vous remercier d'avoir rappelé que j'avais tenu à rencontrer personnellement les salariés de Stahl.
Nous voulons justement éviter que des salariés, comme ceux de Stahl, apprennent leur licenciement à leur retour de vacances, sans aucune information préalable, sans aucune discussion dans l'entreprise, sans aucun accord de méthode et sans qu'aucun congé de reclassement soit prévu.
C'est précisément pour éviter que des entreprises agissent de la sorte que nous prévoyons, dans ce projet de loi, une information périodique des salariés pendant l'année et le plus tôt possible avant des licenciements. Je rappelle que nous proposons également, pour tous les salariés, de ce pays des congés de reclassement pendant une période de huit mois.
Madame David, j'espère sincèrement que, au moins sur cette partie du texte, vous nous suivrez.
M. le président de la commission des affaires sociales et M. Braye applaudissent.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quinze heures, pour la séance des questions d'actualité au Gouvernement, avant de revenir à l'examen de ce projet de loi.
La séance est suspendue.
La séance, suspendue à douze heures cinquante-cinq, est reprise à quinze heures, sous la présidence de M. Christian Poncelet.