Jean-Pierre Sueur, Mmes Virginie Klès, Catherine Tasca, Eliane Assassi, MM. Jean-Jacques Hyest, François Pillet et François Zocchetto sont désignés comme candidats titulaires et MM. Jean-Paul Amoudry, Alain Anziani, Christophe Béchu, Mme Esther Benbassa, MM. Gaëtan Gorce, Jacques Mézard et André Reichardt sont désignés comme candidats suppléants, pour faire partie de la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion de la proposition de loi visant à instaurer un service citoyen pour les mineurs délinquants.
Catherine Tasca est nommée rapporteur sur le projet de loi n° 784 (2010-2011) relatif à l'accès à l'emploi titulaire et à l'amélioration des conditions d'emploi des agents contractuels dans la fonction publique, à la lutte contre les discriminations et portant diverses dispositions relatives à la fonction publique.
Monsieur le Ministre, c'est un honneur de vous accueillir. Je vous remercie de votre présence... Nous procèderons aux nominations inscrites à l'ordre du jour après votre audition.
Je suis toujours à votre disposition !
Je le sais, nous avons pu échanger récemment.
J'ai eu l'occasion de dire -et c'est un avis que je crois largement partagé- que la convivialité n'exclut pas la franchise ; au contraire, la franchise me paraît être une des conditions de la convivialité !
Monsieur le Ministre, pouvez-vous nous présenter votre budget avant que nous ouvrions le débat ?
Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs les rapporteurs, Mesdames et Messieurs les Sénateurs, je vous remercie de votre accueil. Je suis fort heureux de pouvoir présenter le budget de la justice devant la commission des lois du Sénat.
Ce budget est le dernier de la législature et doit nous permettre de faire le point sur tout ce qui s'est fait au cours de ce mandat. Il répond, autant qu'il est possible dans le contexte tendu de nos finances publiques, aux priorités de ce ministère. Avant d'aborder le contenu de ce budget, je voudrais m'arrêter un instant sur son architecture.
Vous aurez remarqué que la mission justice s'est enrichie d'un sixième programme, le programme n° 335 qui porte les crédits du Conseil supérieur de la magistrature et dont la responsabilité est confiée au Premier président de la Cour de Cassation. J'insiste sur ce point : il s'agissait d'une demande forte du CSM que d'avoir son autonomie financière.
Dès lors que le CSM le souhaitait, je n'avais aucune raison de le refuser ; le Gouvernement est favorable à un CSM indépendant. Bien entendu, cette indépendance financière entraînera pour le CSM une responsabilité financière : lorsque le budget sera épuisé, il sera épuisé !
La création de ce programme consacre ainsi l'autonomie budgétaire du CSM. Je me souviens que la commission des lois du Sénat, l'an dernier, avait plaidé en faveur de ce point. J'avais reçu une lettre de M. Hyest me demandant d'aller en ce sens. C'est donc fait !
J'en reviens maintenant au contenu du budget pour 2012 et voudrais distinguer trois lignes de force.
Tout d'abord, ce budget poursuit l'effort de rattrapage engagé depuis plusieurs années, qui s'est accéléré depuis 2007 : cet effort de rattrapage était nécessaire pour donner au ministère de la Justice et des Libertés les moyens de répondre aux attentes croissantes des Français en matière de justice.
Ainsi, en 2012, les crédits du ministère de la Justice augmenteront à nouveau de 4 %, alors que le budget de l'Etat dans son ensemble, hors charges de la dette et des pensions, sera gelé en valeur.
Les seuls crédits de fonctionnement et d'investissement -hors crédits de masse salariale- augmenteront de 5,6%. Au sein de cet ensemble, les crédits immobiliers augmenteront même de 20%, ce qui illustre bien l'effort engagé par le ministère pour construire et rénover établissements pénitentiaires et palais de justice.
En termes d'emplois, le ministère de la Justice sera, cette année encore, le seul à afficher des créations nettes, comme c'est le cas depuis 2007. Le budget triennal 2011-2013 prévoyait que le ministère serait autorisé à créer 200 emplois en 2012, contre 400 en 2011. Ce sont finalement 512 emplois qui seront créés en 2012. Pour bien mesurer l'effort que ces créations d'emplois représentent pour le budget de l'Etat, gardons à l'esprit que si la règle du non-remplacement d'un fonctionnaire partant à la retraite sur deux lui était appliquée, ce ministère devrait supprimer près de 1.000 emplois en 2012. A ces 512 créations d'emplois, il faut en outre ajouter 250 transferts d'emploi du ministère de l'Intérieur au titre de la reprise progressive des missions d'extractions judiciaires par l'administration pénitentiaire.
Sur l'ensemble de la législature, nous pouvons mesurer l'effort de rattrapage accompli. Depuis 2007, les crédits du ministère de la justice ont été accrus de près de 20%, passant de 6,25 milliards d'euros à 7,42 milliards d'euros, et de 15% pour les seuls services judiciaires.
En termes d'emplois, si l'on regarde ce qui s'est passé en exécution, en tenant compte de la résorption des emplois vacants, ce sont plus de 6.000 emplois qui auront été créés dont 1.400 environ pour les services judiciaires. Sur la même période, ce sont plus de 600 emplois d'éducateurs de la PJJ qui ont pu être créés, en remplacement d'emplois administratifs affectés aux fonctions « support », grâce aux réformes de structure qui ont été menées. Quant aux effectifs des services d'insertion et de probation, ils sont passés d'un peu moins de 3.000 en 2007 à près de 4.100 aujourd'hui, soit une augmentation de plus d'un tiers.
Ces chiffres parlent d'eux-mêmes : en cinq ans, l'espace d'une mandature, c'est bien un véritable plan de rattrapage qui aura été accompli !
Seconde ligne de force : ce budget 2012 donne pleinement au ministère de la Justice et des Libertés les moyens de mettre en oeuvre ou de déployer les nombreuses réformes que j'ai eu l'honneur de porter cette année au nom du Gouvernement, qu'il s'agisse de l'introduction des citoyens assesseurs dans les juridictions correctionnelles et dans les juridictions d'application des peines, de la réforme de l'hospitalisation sans consentement, de la réforme de la justice des mineurs ou encore de la réforme de la garde à vue.
Il n'y a pas de nouvelle réforme sans nouveaux moyens pour faire face aux nouvelles charges. Ces nouveaux moyens, je les ai obtenus du Premier ministre, dans le contexte budgétaire que vous connaissez tous.
Au total, sur le budget 2012, ce sont 315 emplois qui sont créés au titre de ces nouvelles réformes : 140 au titre de la réforme de l'hospitalisation d'office, 115 au titre de la réforme des citoyens assesseurs, 60 au titre de la réforme de la justice des mineurs. Cet effort sera poursuivi en 2013.
En termes de crédits, la réforme des citoyens assesseurs et celle de la justice des mineurs s'accompagnent chacune d'une enveloppe de 30 millions d'euros de crédits d'investissement immobilier : ces crédits serviront respectivement à construire de nouvelles salles d'audience ou à agrandir celles qui existent et à transformer vingt foyers d'hébergement classiques en centres éducatifs fermés.
Quant à la réforme de la garde à vue et à celle de l'hospitalisation sans consentement, elles se traduisent par une augmentation de 90 millions d'euros des fonds consacrés à l'aide juridictionnelle, principalement grâce à la contribution pour l'aide juridique instituée par la loi de finances rectificative de juillet 2011 dont le produit attendu est de 85 millions d'euros.
J'aurai sans doute l'occasion de revenir tout à l'heure, lors de nos échanges, sur la mise en place de cette contribution pour l'aide juridique. Je me contenterai ici de souligner qu'elle ne traduit nullement un quelconque désengagement du budget de la justice du financement de l'aide juridictionnelle : pour preuve, les crédits qui y seront consacrés augmenteront de près de 8% en 2012, passant de 312 millions d'euros à 336 millions d'euros en 2013.
Mais, le coût de la réforme de la garde à vue -85 millions d'euros- ne pouvait raisonnablement pas être absorbé par le budget de l'aide juridictionnelle du ministère de la justice qui a déjà augmenté de plus de 50% depuis 2002. Il fallait trouver d'autres ressources.
Enfin, troisième orientation, ce budget 2012 met l'accent sur les moyens nécessaires à une exécution effective et rapide des peines prononcées par les juridictions, dont j'ai fait une de mes priorités dès mon arrivée à la Chancellerie.
Ce budget 2012 ouvre ainsi 1,8 milliard d'euros de crédits d'autorisations d'engagement pour les investissements prévus dans le cadre du nouveau programme immobilier que j'ai annoncé au printemps en matière pénitentiaire.
L'effort est également porté sur les aménagements de peines : les crédits relatifs au bracelet électronique sont accrus de 20% et passeront à 23,3 millions d'euros pour permettre à l'administration pénitentiaire d'atteindre l'objectif ambitieux de 12.000 bracelets pour 2012 : je rappelle que le nombre de bracelets électroniques n'était que d'environ 2.000 en 2007.
Enfin, pour renforcer la prise en charge des mineurs délinquants, 60 emplois d'éducateurs seront créés et 30 millions d'euros d'investissements engagés pour ouvrir vingt nouveaux centres éducatifs fermés.
En outre, j'ai obtenu du Premier ministre que sur les 140 emplois « support » que l'achèvement des réformes de structures engagées à la PJJ devrait permettre d'économiser en 2012, 50 soient redéployés pour créer des emplois d'éducateurs supplémentaires et contribuer ainsi à réduire les délais de prise en charge des mesures éducatives.
Mais il faudra incontestablement aller plus loin si l'on veut doter notre pays des moyens nécessaires à une exécution rapide et effective des peines prononcées et remédier de manière durable à la surpopulation carcérale.
C'est tout l'objet du projet de loi de programmation sur l'exécution des peines qui sera délibéré en conseil des ministres avant la fin du mois de novembre. Ce projet de loi de programmation vise à intensifier et à accélérer l'effort de rattrapage qui reste nécessaire pour nous doter d'un parc carcéral correspondant à nos besoins et offrant aux détenus de dignes conditions de détention.
L'objectif fixé par le Président de la République le 13 septembre dernier à Réau est de porter la capacité du parc carcéral à 80.000 places d'ici fin 2017 en privilégiant des structures adaptées aux courtes peines, qui représentent aujourd'hui plus de la moitié des peines qui ne peuvent être exécutées.
Je vous donne donc rendez-vous dans quelques semaines pour l'examen de ce texte.
Ces moyens supplémentaires doivent être mis au service d'un effort de modernisation des méthodes et de l'organisation du ministère, pour atteindre une meilleure efficacité collective, avec la plus grande économie de moyens possible. C'est une ardente obligation, tant vis-à-vis du justiciable que du contribuable.
Moderniser, c'est d'abord simplifier les procédures, pour alléger la charge de travail des magistrats, greffiers et fonctionnaires. Tel est l'objectif poursuivi par le projet de loi dit de répartition des contentieux qui vise à donner une traduction concrète aux préconisations qu'avait formulées la commission présidée par le recteur Guinchard et qui sera définitivement adopté dans les prochaines semaines.
Les allégements procéduraux qu'il prévoit permettront de libérer des emplois de magistrats et surtout de greffiers et de fonctionnaires qui pourront être redéployés dans les juridictions, là où des besoins sont avérés.
Moderniser, c'est aussi clarifier les missions, pour que chacun puisse se recentrer sur son coeur de métier.
Je voudrais prendre rapidement quelques exemples.
Tout d'abord, recruter des greffiers, c'est permettre aux magistrats de se concentrer sur leurs missions juridictionnelles. A cet égard, le mouvement de rattrapage engagé l'an dernier sera poursuivi : en 2012, 395 emplois de greffiers -dont 25 greffiers en chef- seront créés, soit autant que l'an dernier. A ce rythme, en 2013, nous devrions atteindre la parité entre magistrats et greffiers.
Quant à l'administration pénitentiaire, elle s'est engagée depuis plusieurs années déjà dans un mouvement d'externalisation des fonctions « support » des établissements pénitentiaires -maintenance, alimentation, blanchisserie- pour se recentrer sur ses missions régaliennes de surveillance et d'accompagnement des détenus.
Mais cette clarification des missions vaut aussi vis-à-vis des autres ministères. Il s'agit surtout des transfèrements des personnes placées sous main de justice dont la responsabilité incombera désormais, selon un schéma progressif sur une base géographique, à l'administration pénitentiaire.
Sur le fond, cette réforme est sans aucun doute justifiée. Elle est d'ailleurs bien accueillie en interne car elle conforte l'administration pénitentiaire comme troisième force de sécurité du pays et offre des opportunités de diversification à ses agents.
Encore faut-il que les moyens transférés du ministère de l'Intérieur soient suffisants pour permettre à l'administration pénitentiaire d'assurer pleinement cette mission. L'arbitrage actuel qui porte sur 800 équivalents temps plein (ETP) ne me semble pas le garantir à l'échelle nationale. Je pense donc qu'il faudra y revenir tôt ou tard.
En attendant, j'ai donné instruction à l'administration pénitentiaire de faire tout son possible pour assumer les missions d'extractions judiciaires dans les deux et bientôt trois régions déjà passées sous la responsabilité de l'administration pénitentiaire mais sans prélever d'agents de l'administration pénitentiaire dans les coursives ni dégarnir les établissements.
Moderniser, c'est aussi recourir aux nouvelles technologies quand elles représentent un levier de gain de temps, d'efficacité, de simplification de la vie des usagers. Je ne citerai que le développement de la visioconférence qui nous permettra d'assurer le contrôle des gardes à vue et de limiter le nombre des extractions judiciaires, le projet de la plateforme nationale d'interceptions judiciaires qui verra le jour en 2013 ou encore le développement de la dématérialisation et la numérisation des procédures. Pour développer ces projets, le ministère bénéficiera d'un budget informatique de 80 millions d'euros en 2012.
Moderniser, c'est enfin faire évoluer nos structures et nos modes de gestion, pour rationaliser les coûts, mutualiser les fonctions, professionnaliser les pratiques.
Parmi ces chantiers, je veux souligner celui de la carte judiciaire. Sa refonte a permis d'adapter la géographie des juridictions aux réalités démographiques et d'améliorer l'adéquation des effectifs de magistrats et de greffiers à l'activité des tribunaux. Je pourrais vous parler aussi de la réforme qui a été conduite depuis 2008 au sein de la PJJ.
Ces efforts de rationalisation des moyens méritent d'être poursuivis chaque fois que cela est possible, notamment en recherchant les mutualisations envisageables entre les directions du ministère, en respectant la spécificité de chacun.
J'ai à ce titre relancé deux projets de mutualisation entre les directions, qui avaient été initiés par mes prédécesseurs mais qui n'ont pu aboutir. Il s'agit d'abord des plateformes interrégionales de services, qui mutualiseront notamment la fonction de soutien informatique, la fonction immobilière et la fonction comptable au service des directions régionales de l'administration pénitentiaire et de la PJJ.
S'agissant de la fonction comptable, j'ai toutefois veillé à tenir compte de la spécificité des services judiciaires : les centres de traitement comptable Chorus des services judiciaires seront rationalisés, tout en gardant leur autonomie.
Il s'agit ensuite du projet de site unique qui a vocation à regrouper sur un même site parisien les services centraux du secrétariat général et des trois directions de réseau du ministère -DSJ, DAP et DPJJ.
Vous le savez, fin 2010, le projet porté par mon prédécesseur a dû être abandonné à la suite des critiques émises par le conseil immobilier de l'Etat et des commissions des finances des deux assemblées.
J'ai relancé une consultation en accord avec le ministère du budget, avec un cahier des charges respectant la norme interministérielle de 400 euros par mètre carré. Plus de cinquante propositions ont été reçues à l'été 2011. Ces offres ont été examinées avec le concours d'un conseil spécialisé et quatre sites ont été retenus, avec lesquels les négociations ont débuté. Mon objectif est d'arrêter un choix avant la fin 2011. Je présenterai naturellement l'ensemble de ce dossier au Conseil immobilier de l'Etat et au Parlement.
Il nous faut enfin -et j'en terminerai par là- professionnaliser nos pratiques de gestion. Je citerai par exemple les pratiques de gestion en matière de frais de justice. L'an dernier, la dotation des frais de justice avait bénéficié d'une importante et nécessaire mise à niveau, passant de 393 millions d'euros à 460 millions d'euros. Cette année, l'enveloppe sera consolidée, avec un montant de 470 millions d'euros mais ce sont surtout des chantiers plus structurels que j'entends ouvrir en la matière, à la suite, en particulier, de la mission conjointe que l'inspection générale des services judiciaires et l'inspection générale des finances ont menée à ma demande.
Tout d'abord, la simplification du circuit de paiement me semble indispensable. Il faut alléger le travail considérable engendré dans les juridictions par la masse actuelle des mémoires de frais et raccourcir par là même les délais de paiement des prestataires et fournisseurs qui travaillent pour les juridictions.
Par ailleurs, nonobstant les facteurs qui poussent tendanciellement à la hausse les dépenses de frais de justice -augmentation du contentieux, multiplication des dispositions normatives impliquant des frais de justice, recours accru à la preuve scientifique, nouveaux droits ouverts aux victimes- tous les efforts doivent être entrepris pour mieux maîtriser l'évolution de cette dépense et réaliser des économies, dans le respect de la liberté de prescription des magistrats et surtout des OPJ, principaux prescripteurs des frais de justice.
Dès 2011, nous avons d'ailleurs obtenu des résultats encourageants en ce sens. La passation de marchés nationaux pour les analyses génétiques a ainsi permis de faire près de 2 millions d'euros d'économies. Il faut maintenant s'attaquer à la question de la tarification des frais de justice. Ainsi que le relève le rapport des inspections, il convient de diminuer certains tarifs, notamment les frais de réquisition des opérateurs téléphoniques, sachant que d'autres devront au contraire être revalorisés, en particulier les expertises psychiatriques.
Beaucoup reste à faire aussi pour appliquer aux frais de justice les méthodes destinées à professionnaliser l'achat public. Je pense à la définition de cahiers des charges par type de prestation, à des dispositifs d'information systématique des fournisseurs et des prescripteurs pour favoriser l'alignement sur les meilleures performances, à une veille centralisée sur les fournisseurs. Ce chantier est résolument engagé aujourd'hui.
Sur les pratiques d'achat en général, un plan ministériel est par ailleurs en cours de mise en oeuvre. Il aura permis 11 millions d'euros d'économies en 2011 et doit encore monter fortement en puissance. L'objectif est d'atteindre 100 millions d'euros d'économies en masse sur l'ensemble de la période 2010-2013. Ce sont autant de marges de manoeuvre qu'il sera possible de mobiliser, notamment pour les juridictions qui ont vu globalement leurs crédits de fonctionnement se stabiliser ces deux dernières années, hors crédits exceptionnels dédiés à la réforme de la carte judiciaire.
Voici, Mesdames et Messieurs les Sénateurs, Monsieur le Président, l'état dans lequel se présente le projet de budget que j'ai l'honneur de défendre devant vous.
Merci, Monsieur le Ministre, pour toutes ces explications.
Mes chers collègues, compte tenu du fait que le menu de notre matinée est assez copieux, je vous propose de donner d'abord la parole aux trois rapporteurs puis à l'ensemble des collègues qui voudront s'exprimer. Je proposerai à M. le ministre, s'il en est d'accord, de faire ensuite une réponse d'ensemble.
Cela vous convient-il ?
La parole est à Mme Catherine Tasca, rapporteur pour la justice judiciaire.
Monsieur le Garde des Sceaux, je voudrais vous interroger sur plusieurs points qui me semblent essentiels.
Tout d'abord, pouvez-vous dire où en est l'état d'avancement de la révision des 800.000 mesures de tutelle en cours au 1er janvier 2009. Cette révision doit en principe être achevée au 1er janvier 2014. Quels sont les moyens mis en oeuvre pour la garantir sachant que, depuis 2009, de nouvelles mesures de tutelle sont prononcées ?
Ma seconde question concerne les frais de justice. La Cour des comptes a maintes fois souligné le problème de la sous-budgétisation chronique des frais de justice qui provoquent des retards de paiement considérables et imposent chaque année des abondements de plusieurs dizaines de millions d'euros en virements de crédits et décrets d'avance. Les cours sont amenées à établir des priorités dans le règlement, ce qui place certains prestataires en grandes difficultés. Quelles mesures envisagez-vous non seulement pour maîtriser les frais de justice mais aussi pour remédier à cette sous-budgétisation chronique ?
Ma troisième préoccupation a trait à l'aide juridictionnelle. Le financement de celle-ci est une question cruciale. La création de la nouvelle contribution pour l'aide juridique suscite un certain nombre d'inquiétudes. Pourquoi cette contribution est-elle versée directement aux CARPA et pourquoi ne figure-t-elle plus dans ce budget ?
Pouvez-vous par ailleurs nous dire où en est l'audit conduit en 2010 par vos services sur la rationalisation et la simplification de l'aide juridictionnelle ? Quelle leçon avez-vous tiré ou comptez-vous tirer de cet audit ?
Enfin, une remarque concernant le CSM et son nouveau budget, signe de son autonomie. Je crois savoir que, même si les engagements des dépenses restent dans la main du CSM, le règlement de ces dépenses ne suit pas techniquement, ce qui met le CSM dans une position moins bonne que celle qu'il occupait antérieurement. J'aimerais que vous apportiez des éclaircissements sur ce point.
La parole est à M. Jean-René Lecerf, rapporteur pour l'administration pénitentiaire.
Je souhaiterais tout d'abord exprimer une inquiétude à propos des conditions de mise en oeuvre de la loi pénitentiaire. Ce texte a été voté voici deux ans. C'est un texte que nous avons voulu comme un texte de rupture, comme un texte fondateur et les inquiétudes sont nombreuses.
Vous avez fait observer que le budget était un budget difficile dans la période que nous connaissons aujourd'hui. Nous avons constaté la volonté d'augmenter de manière importante le nombre de places dans l'univers carcéral. Le nouveau programme immobilier parlait de passer de 56.800 places, soit à peu près le nombre de places actuelles, à 70.000 places. Le Président de la République a souhaité que nous soyons dotés de 80.000 places de prison à l'horizon 2017 et quelques collègues députés ont même envisagé une augmentation de 25 à 30.000 places du parc pénitentiaire.
Tout cela va provoquer des coûts importants en termes de construction, de fonctionnement, de recrutement indispensable du personnel de surveillance. Ma première question porte donc sur ce problème : quel sera le nombre effectif de places supplémentaires créées et à quel rythme cette création se fera-t-elle ? Le coût d'investissement et de fonctionnement des nouveaux établissements dits à « réinsertion active » sera-t-il identique à celui des établissements du programme « 13.200 » ? A combien s'élèvent les effectifs de surveillants supplémentaires qui seront nécessaires ?
Ces questions me sont aussi inspirées par le caractère fondamental que revêtent les conseillers d'insertion et de probation pour la réussite de la loi pénitentiaire.
Vous avez fait observer l'augmentation importante du nombre des personnels des SPIP, qui sont passés de 3.000 à 4.100 personnes environ. Il n'en reste pas moins que l'étude d'impact de la loi pénitentiaire prévoyait que, pour que les aménagements de peine soient une réussite, il fallait recrutement 1.000 emplois au minimum. Or, nous en sommes encore loin !
D'autre part, la loi pénitentiaire a provoqué -et c'est une bonne chose- une augmentation du recours au placement sous surveillance électronique qui va désormais aussi concerner les fins de peine. Nous avons donc sur ce point un besoin considérable si l'on ne veut pas que ces placements se concluent par des échecs ou des récidives, compromettant ainsi ce qui n'est jamais qu'un outil. Le bracelet électronique n'a en effet de sens que si, à côté de l'outil, on trouve du personnel d'accompagnement.
Deux autres questions plus simples et plus ponctuelles auxquelles vous avez déjà en partie répondu...
La première porte sur le bilan du transfert de la charge des escortes judiciaires des services de police et de gendarmerie vers l'administration pénitentiaire. Vous avez fait part de votre inquiétude, seuls 800 ETP sur 1.200 affectés à cette mission permettant une compensation. On se rend compte, dans les expérimentations, de l'impossibilité pour l'administration pénitentiaire de faire face au transfert de la charge des escortes judiciaires dans ces conditions. Quel nombre vous paraîtrait-il satisfaisant pour qu'il puisse s'opérer normalement ?
Enfin, j'ai visité il y deux ans le centre de rétention de sûreté de Fresnes ; j'ai constaté la mise en place d'un certain nombre d'hébergements assez confortables sans qu'on puisse les qualifier de luxueux. J'aimerais savoir ce qu'il en est aujourd'hui. Ce centre a-t-il commencé à fonctionner ? Est-il toujours vide ? Si c'est le cas, ne serait-il pas opportun que des personnes détenues en situation de handicap, parfois accueillies dans des conditions extrêmement difficiles dans les établissements pénitentiaires, puissent y avoir accès le temps que le centre de détention se mette en place ?
J'ai, depuis deux ans, attiré l'attention de vos services sur les effets de la diminution constante des crédits de la PJJ. On constate cette année une augmentation sensible, 4,6 % étant prévus en autorisations d'engagement et 2 % en crédits de paiement. Vous consacrez cependant ces crédits au développement de 20 CEF (centres éducatifs fermés) supplémentaires, grâce à la transformation d'établissements classiques de placement éducatif.
Le rapport d'information de nos collègues François Pillet et Jean-Claude Peyronnet, notamment dans sa proposition n° 13, a attiré l'attention du ministère sur la nécessité d'éviter la suppression des foyers classiques. Compte tenu de la diversité qui est celle de la PJJ, il serait opportun de conserver un nombre de places constant dans ces foyers. A combien évaluez-vous donc la diminution du nombre de foyers classiques ? Leur coût est moins élevé que les centres éducatifs fermés. Cette préoccupation nous paraît essentielle...
En second lieu, en juillet dernier, le Conseil constitutionnel a considéré que le juge des enfants qui avait instruit une affaire ne pourrait plus désormais présider l'audience du tribunal pour enfants chargé de juger cette même affaire. Dans les réponses au questionnaire budgétaire, il apparaît que des expérimentations ont eu lieu. Quelles conséquences en tirez-vous ? Ne pourrait-on pas envisager, comme certains juges des enfants l'ont suggéré, la création de « binômes », par exemple ?
Enfin, s'agissant des mineurs isolés étrangers, le préfet de Seine-Saint-Denis a estimé, compte tenu des charges supportées par certains départements -essentiellement Paris, la Seine-Saint-Denis et le Nord- qu'il conviendrait d'envisager des péréquations pour faire supporter cette charge par d'autres départements. L'Etat pourrait-il envisager une prise en charge de ces mineurs étrangers isolés ?
Monsieur le Ministre, je voudrais revenir sur la question qu'a posée M. Lecerf concernant la politique pénitentiaire. J'ai bien noté une augmentation des crédits immobiliers de plus de 20 %. Je commencerai par une incidente : la prison de Draguignan bénéficiera-t-elle cette année des crédits permettant sa reconstruction, celle-ci ayant été inopportunément édifiée en zone inondable ? Cela commence à poser de sérieux problèmes : a-t-on une idée du calendrier ?
Plus généralement, je voudrais vous interroger sur la multiplication des textes qui favorisent l'embastillement et la construction de places dans les établissements pénitentiaires. Je constate que la loi de finances conduit à séparer la politique judiciaire et pénale de la politique pénitentiaire. Or, il existe une incidence de l'une sur l'autre : si on favorise les dispositifs contraignants pour que les magistrats multiplient les peines de prison, il faut bien faire quelque chose en face ! A-t-on une idée du moment où la courbe des incarcérations va croiser celle de la construction d'établissements permettant de recevoir les condamnés ?
Enfin, pourriez-vous nous dire quelques mots sur l'état des partenariats public-privé en matière de construction d'établissements pénitentiaires ? On a vu récemment, s'agissant d'hôpitaux, que cette merveilleuse invention n'apportait peut-être pas toutes les satisfactions qu'on en attendait. Peut-être tout fonctionne-t-il bien dans le domaine pénitentiaire : nous en serions ravis mais nous aimerions recueillir votre avis sur cette question.
Sans vouloir allonger la discussion, je voudrais, en tant qu'ancien rapporteur pour avis du budget de la justice judiciaire, me réjouir de voir que cette année encore, l'augmentation des crédits consacrés à la justice est positive, non seulement en matière pénitentiaire mais également pour l'ensemble des secteurs de l'action de la justice.
Je suis en particulier heureux de constater qu'on a enfin entendu notre demande -formulée de longue date- visant à reconnaître l'autonomie du CSM au travers de la maquette budgétaire !
Par ailleurs, Monsieur le Garde des Sceaux, pouvez-vous nous dire quelques mots sur la médiation et plus généralement sur les modes alternatifs de règlement des litiges ?
Enfin, le budget me semble intéressant : il permet de mettre en oeuvre un certain nombre de dispositions nouvelles et d'aboutir à des objectifs fixés depuis longtemps, comme la parité entre greffiers et magistrats. Cela étant, ce budget ne sera durablement satisfaisant que si l'on fait une pause législative, beaucoup de crédits nouveaux étant destinés à mettre en place des dispositions nouvelles. Une pause législative est-elle donc prévue dans le domaine de la justice ?
Monsieur le Ministre, les magistrats de liaison présents dans certains pays sont des relais essentiels à la bonne coopération judiciaire internationale.
Capables d'intervenir en France ou dans leur pays de résidence, ils facilitent, grâce à leur connaissance du terrain, la résolution de contentieux internationaux spécifiques -mineurs étrangers, divorces internationaux, tutelles à l'étranger, gestation pour autrui...
Malheureusement, dans les pays que je connais, le ministère s'est progressivement désengagé de ces sujets. Les problèmes les plus criants sont aujourd'hui transmis à l'administration consulaire qui n'a pas les moyens de les gérer, ni les compétences pour cela. Quelle politique menez-vous en la matière ? Développez-vous ce type d'outil ?
Monsieur le Ministre, la commission des lois du Sénat a souhaité pour la première fois cette année se saisir pour avis du programme n° 137 du budget 2012 relatif à l'égalité entre les hommes et les femmes. J'ai eu l'honneur d'être désignée rapporteur et j'ai décidé, pour ce premier rapport, de concentrer mes travaux sur les violences faites aux femmes. Dans ce cadre, j'ai l'intention de tirer un premier bilan de la loi du 9 juillet 2010 qui prévoyait notamment la création d'une ordonnance de protection pour les victimes de violences conjugales, l'introduction d'un délit de violence psychologique dans le code pénal ou encore la mise en place d'une formation spécifique pour les professionnels concernés.
A ce sujet, un rapport aurait dû être remis au Parlement le 30 juin 2011. Nous l'attendons toujours. Je profite donc de l'occasion qui m'est donnée pour vous interroger sur le bilan que vous tirez de cette loi et de sa mise en application. Considérez-vous qu'aucun problème ne se pose et qu'il n'existe plus de difficultés ou pensez-vous qu'il y en ait encore ?
Deux questions, Monsieur le Ministre. La première tient à la réforme de la représentation devant les cours d'appel, adoptée l'année dernière : des mesures devraient être prises pour le reclassement des personnels d'avoués ; des postes devaient leur être réservés dans les greffes des tribunaux, etc. Où en est-on précisément aujourd'hui ?
Ma seconde question est d'une actualité beaucoup plus récente : on a parlé la semaine dernière de la proposition de loi sur l'encadrement militaire des mineurs délinquants et de leur affectation au sein des centres de l'EPIDe. Quid des 2 millions d'euros que le ministère de la justice doit apporter à ce dispositif ? Sur quels crédits seront-ils pris ? Les 41 ETP promis à l'EPIDe dans le cadre de l'accueil de ces mineurs délinquants seront-ils pris sur le quota du ministère de la justice, sur celui du ministère de la ville, du ministère du travail ou du ministère de la défense, tous quatre sollicités pour participer au dispositif ?
Monsieur le Ministre, j'attire votre attention sur les conséquences de la diminution des moyens de la PJJ, qui a pour conséquence d'orienter des jeunes relevant en principe d'une prise en charge au pénal, vers des foyers de protection de l'enfance, entraînant des difficultés de fonctionnement considérables et un malaise des personnels qui ne sont pas formés pour accueillir des jeunes délinquants. Cela pose des problèmes de violences, comme ceux que nous avons pu connaître dans mon département au cours de l'été.
Ma seconde préoccupation a été évoquée par M. Alfonsi : il s'agit des mineurs étrangers isolés. Face à la montée du nombre de jeunes concernés, notamment sur certains territoires, vous avez pris la décision de répartir les moyens sur d'autres départements. On comprend la difficulté de la Seine-Saint-Denis où l'on compte plus de 1.000 mineurs étrangers isolés mais le seul moyen que vous ayez trouvé pour remédier à ce problème a été de les renvoyer chez le voisin ! Dans le Val-de-Marne, où nous en comptons 300, on nous donne l'ordre d'accueillir ces jeunes dans les structures du conseil général. Tout cela pose des problèmes de moyens extrêmement importants mais, au-delà, soulève également un problème de principe, la politique des mineurs isolés relevant totalement de la politique d'immigration de l'Etat et non de la politique d'aide sociale à l'enfance des conseils généraux. Quels moyens spécifiques votre ministère entend-il mettre en oeuvre pour faire face à cette situation, qui s'est aggravée au cours des dernières années ?
Monsieur le Ministre, les commissions départementales d'accès au droit sont toutes aujourd'hui dans des situations qui paraissent délicates, au point que les magistrats en sont à écrire aux élus pour leur demander d'accroître leur contribution pour faire vivre un dispositif qui, à tous égards, paraît utile au regard de la justice de proximité. J'aimerais connaître la politique de votre ministère sur ce sujet et la manière dont vous entendez répondre à cette demande.
J'en profite pour vous poser une question en lien très lointain avec le budget. L'un de vos collègues du Gouvernement a estimé légitime de légiférer sur les « fadettes ». Partagez-vous ce sentiment ?
J'insiste en reprenant ce qu'a dit M. Collombat à propos des partenariats public-privé. Vous vous souvenez sans doute des propos de Philippe Séguin devant le Sénat, lors de la présentation de son rapport au titre de la Cour des comptes -je cite : Les partenariats public-privé sont le crédit revolving de l'Etat et des collectivités locales !. On parle beaucoup du développement durable -et on a bien raison de le faire- mais, dans la même logique, il serait fâcheux de laisser à nos enfants et à nos petits-enfants un endettement durable.
Avez-vous évalué l'effet à moyen et long terme du recours au partenariat public-privé ? Au départ, le système est bien sûr fort intéressant, personne ne payant rien, ni l'Etat, ni les collectivités locales. D'ailleurs, des collectivités locales de toutes tendances y ont recours. Ce n'est donc pas une question partisane. Mais il s'agit de savoir si l'économie virtuelle ne va pas se traduire par des ardoises très importantes pour les générations à venir. Il me semble que c'est une question que nous ne pouvons pas ignorer !
Je voudrais commencer par répondre à la question sur le partenariat public-privé.
Les partenariats public-privé destinés à équiper notre pays ne datent pas d'aujourd'hui. De tout temps, on a eu recours à des formules de partenariats public-privé, sous des formes diverses, concessions ou autres. Si nous avons un réseau SNCF dans notre pays, c'est bien grâce au partenariat public-privé, je le rappelle à M. Collombat !
Le partenariat public-privé consiste à trouver des partenaires privés qui investissent dans la création de services publics et qui se font rémunérer pour cela ! La concession demeure la base et c'est ce qui a permis d'équiper le pays !
Dans ce cas, pourquoi faire des textes particuliers ? Cela n'a pas de sens !
C'est une évidence : lorsqu'il existe un partenariat public-privé, le partenaire privé investit en fonction de ce que lui demande l'Etat et se rémunère. Il n'y a aucune raison qu'il ne se rémunère pas !
La question du Président Sueur est d'une toute autre nature et tout à fait d'actualité : le partenariat public-privé permet d'aller plus vite mais il faut ensuite payer des loyers sous une forme ou sous une autre. Je suis entièrement d'accord avec la formule du Président Séguin mais il convient d'utiliser le partenariat public-privé quand on a un retard très important à combler. C'était le cas dans le domaine pénitentiaire. Il fallait construire un grand nombre de places ; seul le partenariat public-privé permettait de le faire, les ressources budgétaires de l'Etat n'étant pas suffisantes pour cela.
Le partenariat public-privé présente des avantages juridiques : il transfère le risque de construction en termes de délais et de coût, délègue la maintenance du bâtiment et surtout lisse la charge budgétaire. C'est une formule utile, notamment dans le cas d'opérations complexes.
On va par exemple reconstruire le TGI de Paris. Si on ne recourt pas au partenariat public-privé, tout sera bloqué ! Quel Gouvernement n'y recourrait pas pour éviter de bloquer l'ensemble des autres projets, compte tenu du coût même de l'opération ? Il y a trop longtemps qu'on attend un nouveau TGI pour Paris. Il en va de même lorsqu'il s'agit d'un vaste programme pénitentiaire.
C'est l'Etat qui fixe toutes les règles, comme vous le savez sans doute.... Beaucoup de constructions ont été faites en ce sens ; ainsi que l'a dit le Président Sueur, le vrai risque est de trop recourir au partenariat public-privé et de voir le prix des loyers bloquer totalement le budget. C'est pourquoi je souhaite que l'on puisse alterner les modes de financement, notamment en matière de nouveaux programmes pénitentiaires. Pour les prisons que l'on avait décidé de détruire mais que l'on va conserver et dans lesquelles on va faire des travaux, on ne recourra pas au partenariat public-privé mais aux crédits budgétaires habituels. Chaque fois qu'on le pourra, on mixera ces deux modes de financement, de façon à éviter un blocage dans quelques années.
Je note cette volonté d'alterner les modalités de financement. Cette indication est importante. Je pense qu'elle n'avait jamais été fournie auparavant.
On ne pourra pas réaliser certaines choses sans partenariat public-privé, comme le TGI de Paris, mais il en existe d'autres qu'il faut financer directement par le budget.
J'ajoute qu'à titre personnel, je suis favorable à la mise en concurrence permanente des divers modes opératoires de l'Etat. Il faut essayer de construire le mieux et le moins cher possible. Tous les opérateurs doivent se sentir en concurrence car c'est le contribuable qui paye. On a 300 opérations pour ce qui est des palais de justice. On ne pourra tout confier à un seul système, qu'il s'agisse de partenariat public-privé ou de régie directe. On n'a pas les moyens d'y faire face. On va donc alterner.
Je voudrais reprendre le cours des questions et répondre à Mme Tasca s'agissant des tutelles. Comme vous l'avez dit, la loi de 2007 a prévu la caducité des mesures de protection des majeurs non renouvelées dans les cinq ans, soit au 1er janvier 2014. Fin 2010, le taux de renouvellement était de 25 %. Ce n'est guère satisfaisant, je le reconnais ! Nous sommes là pour mettre les problèmes sur la table et dire les choses comme elles sont.
S'agissant des moyens de mise en oeuvre, une trentaine de postes de magistrats ont été spécifiquement localisés en 2008 dans les tribunaux d'instance pour faire face à cette réforme.
Dans le même temps, des missions nouvelles sont venues alourdir l'activité des tribunaux d'instance, notamment le redéploiement vers ces tribunaux du contentieux du surendettement et de l'exécution.
En outre, le transfert de compétences en matière de tutelle des mineurs du tribunal d'instance vers les juges aux affaires familiales rattachés au TGI, qui aurait dû alléger la charge des tribunaux d'instance, est souvent resté sans effet utile puisqu'il s'est accompagné en retour de délégations de cette compétence du TGI aux juges d'instance.
Quelles sont les solutions envisagées ? Tout d'abord, la localisation des postes pour l'année 2012 devra davantage tenir compte de cette priorité. Deux des modifications législatives ou réglementaires visant à simplifier la procédure et à alléger les tâches du magistrat et du greffe sont en cours de mise en oeuvre.
Un décret en cours de publication permettra aux greffiers d'être assistés par un huissier de justice dans le contrôle des comptes de tutelle. La possibilité de faire enregistrer le PACS chez le notaire et non plus au tribunal d'instance sera mise en oeuvre à la suite de la loi « Guinchard » sur la répartition des contentieux.
Une action de sensibilisation et de communication est à mener pour mieux faire connaître le mandat de protection future afin de déjudiciariser au maximum les mesures de protection et alléger le contentieux devant le juge des tutelles.
Il importe aussi de relancer, en concertation avec les conseils généraux, l'utilisation des mesures d'accompagnement social personnalisé pour faire baisser le nombre de saisines du juge des tutelles.
Je vous réponds donc de la façon la plus claire possible : il existe un vrai retard dans la mise en oeuvre de cette réforme, compte tenu des réformes secondaires qui sont intervenues.
Quelles sont les solutions mises en oeuvre pour faire face à la sous-budgétisation chronique des frais de justice ? La première mesure prise est naturellement d'augmenter les crédits budgétaires pour faire face aux frais de justice. La dotation budgétaire, en 2010, était de 393 millions d'euros ; elle est passée à 460 millions d'euros en 2011. Elle passera à 470 millions d'euros en 2012. Il s'agit donc d'une remise à niveau budgétaire.
Ce ne sera pas suffisant pour de nombreuses raisons. On s'aperçoit que la dépense en frais de justice est spontanément dynamique. Les causes en sont connues : augmentation du contentieux, multiplication des dispositions normatives impliquant des frais de justice, recours accru à la preuve scientifique, progrès techniques avec la géolocalisation et nouveaux droits ouverts aux victimes.
L'effort de maîtrise de la dépense doit être une priorité mais il faut respecter la liberté de prescription des magistrats et surtout celle des OPJ, principaux prescripteurs en matière de frais de justice. La mission conjointe menée à ma demande par les deux inspections générales, formule un certain nombre de propositions.
Tout d'abord, il est recommandé de passer des marchés chaque fois que possible. Cette préconisation a été mise en oeuvre dès 2011, avec des résultats encourageants. La passation de marchés nationaux pour les analyses génétiques a permis de faire près de 2 millions d'euros d'économies.
En second lieu, les inspections conseillent d'appliquer aux frais de justice les méthodes destinées à professionnaliser l'achat public -cahier des charges par prestation, information des prescripteurs pour favoriser l'alignement sur les meilleures performances, veille fournisseurs, etc.
Il conviendrait aussi de diminuer certains tarifs, notamment les frais de réquisition des opérateurs téléphoniques, qui provoquent une inflation énorme des frais de justice.
Dans certains cas, les inspections préconisent de laisser à la charge des parties une part des frais de justice. C'est en 2012 que la plupart de ces préconisations pourront être mises en oeuvre. La maîtrise des frais de justice constitue un chantier prioritaire : c'est là que l'on peut trouver des marges de manoeuvre.
Vous avez également posé des questions sur l'aide juridictionnelle et sur le droit de 35 euros. L'aide juridictionnelle ne change pas. Elle continue à progresser. On nous dit très souvent que la justice française est classée au 37ème rang mondial. On oublie toujours de dire qu'elle est première pour ce qui est de la gratuité d'accès. C'est une de ses principales qualités que personne ne relève jamais ! C'est d'autant plus important que 60 % du contentieux traité par l'ensemble des tribunaux relève du contentieux familial. En France, on paie son avocat mais on ne paye pas pour accéder à la justice. Ce n'est pas le cas dans les pays voisins !
Il s'agit de cas spécifiques. Tous ceux qui bénéficient de l'aide juridictionnelle ne paient pas les 35 euros. Or, ceux qui ont droit à l'aide juridictionnelle sont en majorité ceux qui ont recours au juge en matière de contentieux familial. Il faut dire les choses telles qu'elles sont !
Il est vrai qu'on a créé un droit de 35 euros pour financer la garde à vue, dont on a estimé qu'elle coûterait 100 millions d'euros. Nous allons faire le point. J'attends les décisions du Conseil constitutionnel dans les quinze jours, deux questions prioritaires de constitutionnalité ayant été déposées sur la garde à vue. La loi sera ainsi purgée dans un sens ou dans un autre ! Dès qu'on aura cette décision, on verra s'il faut modifier la loi ou non et l'on fera le point sur la pratique en matière de demandes d'aide juridictionnelle. Peut-être les gens font-ils moins appel aux avocats qu'on ne l'avait pensé au départ. Cela dépend des lieux géographiques. On verra alors où on en est.
Pourquoi verse-t-on la somme aux CARPA et non au budget de l'Etat, qui la reverserait directement à chaque avocat ? C'est une affaire quelque peu compliquée sur laquelle je voudrais revenir. C'est d'abord un problème de gestion de l'opération. Le savoir-faire des CARPA est éprouvé. Il fallait faire intervenir les représentants des avocats à travers le CNB et les CARPA. On a donc choisi ce système. Compte tenu de toutes les incertitudes techniques, la prudence a voulu que l'on aligne le produit de la contribution sur l'aide juridictionnelle au sens strict. C'est ainsi que l'on a choisi de ne pas verser ces sommes dans la caisse générale de l'Etat mais aux CARPA.
Vous avez demandé les raisons du retard de règlement du budget du CSM. Elles sont liées à la mise en oeuvre du logiciel budgétaire et comptable Chorus. Compte tenu de la taille minimale requise par tous les centres Chorus des services de l'Etat, on a choisi de regrouper sur un même centre l'administration centrale, la Cour de cassation et le CSM. Des retards de paiement -raisonnables- ont été constatés pour la Cour de cassation et non pour le CSM. Sur proposition du Premier président de la Cour de cassation, la Chancellerie étudie la possibilité de regrouper la Cour de cassation et le CSM sur un pôle Chorus autonome, ce qui devrait limiter les retards de paiement et apporter une grande tranquillité au Garde des Sceaux ! Je suis donc très favorable à ce qu'on les réunisse et qu'ils soient véritablement autonomes.
Je voudrais répondre à présent à M. Lecerf, qui m'a interrogé sur l'administration pénitentiaire. Je l'ai dit souvent depuis que je suis en poste : les magistrats, en France, appliquent la loi. Ils ne sont pas laxistes : la loi est votée par le Parlement, les magistrats l'appliquent ! On peut le vérifier tous les jours et il n'y a là rien à dire.
J'ai assisté il y a trois ou quatre jours à une commission d'exécution des peines à Evry. Je puis vous garantir que les juges ne sont pas laxistes. Le travail est fait dans le détail ; tous les dossiers sont vus un par un, même s'il y en a beaucoup, du fait de la présence de Fleury-Mérogis dans le ressort du tribunal d'Evry.
Aujourd'hui, on a 56.800 places de prison et 64.500 personnes détenues. C'est donc une surpopulation carcérale forte. C'est le premier facteur qui empêche la bonne application de la loi pénitentiaire. Quand on ne sait plus où mettre les gens, qu'on les entasse dans les cellules, on ne peut pas appliquer la loi pénitentiaire dans son esprit.
Un peu plus de 80.000 condamnations ne sont pas exécutées. Le but est donc de trouver comment résoudre la question au mieux. On a tout d'abord décidé de conserver certaines prisons anciennes dont la démolition avait été envisagée. Il faudra donc faire des travaux dans les prisons que l'on a conservées. On les a conservées pour diverses raisons, très souvent, pour des questions d'aménagement du territoire fort respectables.
Cela aura quand même un certain nombre de conséquences, notamment sur les extractions. Ces prisons, souvent petites -une centaine de places maximum- sont loin des tribunaux ou des cours d'appel. Je pense notamment à Aurillac. Pour aller à Riom, il faut compter la journée...
Je voulais replacer le problème dans sa globalité. Il n'en demeure pas moins qu'il nous faut mettre en oeuvre la loi pénitentiaire. Nous progressons. J'invite la commission des lois du Sénat à envoyer des représentants dans les établissements. Plus les parlementaires iront dans les établissements pénitentiaires, mieux ce sera.
On a progressé en matière de parloirs, même si ce n'est pas partout satisfaisant -loin de là. Pour ce qui est des nouveaux établissements pénitentiaires, il n'est pas utile d'avoir le même établissement pour une personne condamnée à quelques mois de prison et pour une personne condamnée à plusieurs années. Il faut donc construire des prisons pour courtes peines ; ce sera une part importante du nouveau programme annoncé dans la loi de programmation.
Ainsi que vous l'avez noté, il faudra que l'on crée des emplois. Le nouveau programme immobilier impliquera la création de 3.000 postes de surveillants supplémentaires, qui figureront dans la loi de programmation, toutes catégories de personnels confondues.
Vous avez évoqué les conseillers d'insertion et de probation, dont on aurait le plus grand besoin avec la mise en oeuvre du bracelet électronique mais surtout pour assurer à la fois la préparation de la sortie d'un établissement pénitentiaire et le suivi des personnes libérées.
La gestion du bracelet électronique mobilise aujourd'hui 685 agents contre 110 fin 2008. 270 surveillants, 315 conseillers d'insertion et de probation et 100 personnels administratifs travaillent sur le bracelet électronique. Cet effectif devrait nous permettre d'atteindre un objectif de 12.000 bracelets électroniques en 2012. La loi de programmation prévoira également la création de conseillers pénitentiaires d'insertion et de probation.
S'agissant du transfert de la charge des escortes judiciaires et des services de police et de gendarmerie vers l'administration pénitentiaire, il est vrai que 800 ETP ne nous permettront pas de fonctionner. Nous avons donc lancé une expérimentation dans le ressort de trois cours d'appel et de deux régions administratives, la Lorraine et l'Auvergne, cette dernière connaissant une géographie très particulière. Nous allons mener une expérimentation la plus proche possible de la réalité. Les postes nouvellement créés ne sortiront de l'école d'Agen que fin mars. Jusqu'à début avril, on fera avec les moyens que l'on a : on utilisera les ERIS pour faire face.
On a en quelque sorte « déproratisé » les 800 ETP. La première intention était de les répartir entre les diverses directions interrégionales de la pénitentiaire, en fonction du nombre d'extractions. On a renoncé à cette idée. On recourt au nombre d'emplois nécessaires pour faire fonctionner le système tout en gardant les dispositions du code de procédure pénale qui n'ont pas été abrogées et qui permettent aux chefs de cours et de tribunaux de recourir aux forces de gendarmerie et de police lorsqu'il n'y a pas d'autre moyen pour exécuter le transfèrement.
Les choses se passent de manière très tendue et l'administration pénitentiaire n'arrive pas à réaliser toutes les extractions à ce jour. On a donc un accord avec le ministère de l'intérieur pour continuer à utiliser les forces de police et de gendarmerie dans le cadre d'une programmation des extractions qui se met en place peu à peu.
A partir du mois de mars, on aura une idée exacte de ce qu'il nous faut dans ces deux régions ainsi qu'en Haute-Normandie, qui va bientôt entrer dans l'expérimentation. On fera alors le point.
Quant au centre de rétention de Fresnes, comme vous le savez, il ne fonctionne pas encore. Aucun condamné n'y a été affecté par les magistrats. Faut-il supprimer les places ou non ? Aujourd'hui, on a prévu d'accueillir quelques détenus handicapés dans tous les nouveaux établissements. Pour l'instant, dix places ne sont pas utilisées dans ce centre de rétention.
Je voudrais répondre à M. Alfonsi, qui a indiqué que l'essentiel des crédits supplémentaires devrait financer la création de centres éducatifs fermés et qui a demandé à combien on pouvait évaluer le nombre de fermetures d'établissements de placement éducatif depuis 2008. L'idée de base est simple : il s'agit de donner aux magistrats toute une palette de réponses. Je dois dire que l'on parle d'un petit nombre d'établissements comme d'un petit nombre de places.
Les établissements de placement éducatif regroupent désormais des foyers d'action éducative, des centres de placement immédiat et des centres éducatifs renforcés. On en comptait 111 en 2008 ; ils sont aujourd'hui au nombre de 86, recouvrant au total 140 unités éducatives. Le nombre de places disponibles n'a pas pour autant diminué. Des structures trop petites et inadaptées ont été fermées. La capacité minimale des établissements a été portée à 12 places -ce qui n'est pas un chiffre très élevé. Les centres éducatifs fermés gérés par la PJJ sont quant à eux au nombre de dix.
Dix sur 44 ! Les nouveaux centres relèveront-ils du secteur public ou seront-ils confiés à des associations ?
Par le secteur public de la PJJ... Je pense qu'il est normal de recourir au secteur associatif mais pas exclusivement. Il faut aussi que le secteur public soit présent et que des comparaisons puissent être faites entre un établissement géré entièrement sous forme publique et un établissement géré sous forme associative.
Quid des instructions données à ces centres éducatifs fermés afin de restreindre leur taux d'encadrement et réaliser des économies en matière d'ETP ?
Un centre éducatif fermé géré par le service associatif compte 12 mineurs et actuellement 27 ETP. Nous allons passer à 24, soit deux personnes pour un mineur, ce qui constitue un taux d'encadrement remarquable !
M. Alfonsi a évoqué la décision du Conseil constitutionnel. Le Conseil constitutionnel a eu dans cette affaire le grand avantage de définir ce qui est le principe fondamental reconnu par les lois de la République en matière de justice des mineurs. Il nous a indiqué ce qui était constitutionnel et ce qui ne l'était pas. Il a également précisé ce qui était anticonstitutionnel. Il a estimé non conforme à la Constitution et au principe d'impartialité des juridictions le fait de faire présider la formation de jugement par un magistrat ayant instruit l'affaire.
Même si on ne lui demande pas, le Conseil constitutionnel répond ce qu'il veut ! Une fois qu'il l'a dit, ses décisions s'imposent à tous -c'est l'article 62 de la Constitution...
On doit donc appliquer la décision du Conseil constitutionnel. C'est ce que le Gouvernement essaye de faire, dans les formes que je vous ai indiquées. Je dois dire que j'ai quelques réserves à propos du binôme. Nous allons l'expertiser mais je pense que c'est quelque peu compliqué et surtout artificiel. Je ne vois pas en quoi, lorsque deux magistrats ont suivi une affaire, le fait qu'un seul signe puisse permettre à l'autre de présider. Ce serait contraire à la décision même du Conseil constitutionnel.
Vous m'avez également interrogé sur les mineurs isolés. Je répondrai en même temps à M. Favier. La loi de mai 2007 a confié aux départements le soin de s'occuper des mineurs étrangers isolés, mais ce sont les procureurs de la République qui prennent les décisions de placement. On s'est aperçu que certains départements étaient plus affectés que d'autres par les mineurs étrangers isolés. Le premier département est celui de Paris, qui compte 1.600 mineurs étrangers isolés. A la vérité, c'est aussi le seul à percevoir de l'Etat une dotation dite Fonds Versini de 3 millions d'euros par an pour cela. Les autres ne perçoivent rien du tout !
Le second département le plus touché est celui de la Seine-Saint-Denis. La proximité de Roissy n'explique pas tout, Roissy étant à cheval sur plusieurs départements. Tous les étrangers ne viennent pas par avion -moins de 40 % en fait. Beaucoup d'étrangers viennent en Seine-Saint-Denis pensant y retrouver quelqu'un qu'ils connaissent.
Nous avons essayé de lancer une mutualisation de façon pragmatique. Cela nécessite bien entendu l'accord des présidents de conseils généraux pour être solidaires face aux dépenses et pas seulement en matière de péréquation des recettes. Dans le cas contraire, nous serons obligés de laisser les mineurs isolés là où ils sont.
J'ai obtenu l'accord du Premier ministre pour créer un groupe de travail avec les ministères concernés et l'Assemblée des départements de France afin de trouver une solution -mais ce ne sera pas simple. Pour le moment, nous avons débloqué l'affaire en Seine-Saint-Denis ; à titre exceptionnel, j'ai fait prendre en charge par l'Etat dix-huit mineurs que l'on a placés dans les foyers de la PJJ. Nous allons travailler tous ensemble pour trouver une solution.
J'ai déjà répondu à la seconde question de M. Collombat. Pour ce qui est de la prison de Draguignan, la reconstruction est décidée. On a trouvé un terrain. Le nouvel établissement, avec 100 places supplémentaires, sera livré en 2017.
M. Détraigne a conseillé une pause législative : c'est le Parlement qui vote la loi, non le Gouvernement !
Pour ce qui est du développement de la médiation, je suis d'accord : je voudrais d'abord la développer autour du contentieux familial.
Monsieur Leconte, vous avez raison pour ce qui est des magistrats de liaison. Ce sont, pour le ministre de la justice et pour la France, des magistrats qui jouent un rôle essentiel ! On n'en a absolument pas diminué le nombre. Nous allons même en créer au Brésil et au Sénégal.
J'ai reçu la semaine dernière le magistrat de liaison en poste à Moscou. Nous sommes d'accord avec vous et nous allons transformer un poste d'attaché technique en magistrat de liaison en Roumanie. Je suis prêt à en discuter avec vous après la commission.
S'agissant des violences faites aux femmes, Madame Bonnefoy, vous avez rappelé que la loi a institué un dispositif anti-rapprochement avec un système de surveillance électronique du coupable et une protection de la victime. Le marché a été signé et l'expérimentation va débuter le 1er janvier 2012 dans les TGI d'Amiens, de Strasbourg et d'Aix-en-Provence. Nous sommes actuellement en phase de formation informatique pour les personnels concernés et les associations.
Madame Klès, concernant la suppression des avoués, la Chancellerie, comme elle s'y est engagée, met en oeuvre toute une série de mesures pour accompagner cette réforme -procédures d'indemnisation, recrutements d'avoués en qualité de magistrats au titre des articles 22 et 23 du statut de la magistrature.
Pour les salariés des études, on compte 15 recrutés par contrat de catégorie A, un recruté par concours à l'école des greffes ; pour la catégorie C, 46 ont été admis en 2010. Treize ont accepté de rejoindre leur poste. 81 ont été admis en 2011. Le choix des postes aura lieu dans les jours qui viennent.
S'agissant de la diminution des moyens de la PJJ, je veux dire à M. Favier qu'aucun poste d'éducateur n'a été supprimé. On en a même créé 600. Cependant, il est vrai que, pour cela, nous avons dû supprimer un certain nombre de postes administratifs et techniques affectés aux fonctions « support ».
M. Gorce m'a interrogé sur les conseils départementaux d'accès au droit. En 2012, le soutien du ministre de la justice aux commissions départementales d'accès au droit sera de 4,55 millions d'euros, contre 4,45 millions d'euros en 2011. Il n'y a pas désengagement de l'Etat mais on demande aussi aux collectivités publiques de participer.
Quant à votre autre question, plusieurs affaires étant pendantes devant les tribunaux, il n'appartient pas au Garde des Sceaux de se prononcer sur des procédures en cours !
Où sont les 2 millions d'euros destinés à l'EPIDe, Monsieur le Ministre ?
Comme vous l'avez compris, les conséquences de la proposition de loi de M. Ciotti sont estimées à 8 millions d'euros, répartis à hauteur de 2 millions d'euros pour le ministère de la défense, 2 millions d'euros pour le ministère de la ville, 2 millions d'euros pour celui du travail, 2 millions d'euros pour celui de la justice. Les 2 millions d'euros du budget de la justice destinés à financer l'accueil des mineurs délinquants dans les EPIDe seront pris sur le budget de la PJJ.
Concernant les 41 ETP supplémentaires qui seraient utiles à l'adaptation de l'encadrement au sein de l'EPIDe, ils relèvent uniquement de l'EPIDe. On ne va pas donner 2 millions d'euros et créer en outre des postes !
Merci beaucoup, Monsieur le Ministre. Vous nous avez apporté de nombreuses précisions et fait preuve d'une cursive efficacité !
La commission va maintenant examiner les amendements au texte de la commission sur la proposition de loi tendant à préserver les mandats en cours des délégués des établissements publics de coopération intercommunale menacés par l'application du dispositif d'achèvement de la carte de l'intercommunalité. Suivant l'usage, nous commencerons par les amendements que le rapporteur vous propose de présenter au nom de la commission en séance publique.
EXAMEN DES AMENDEMENTS DU RAPPORTEUR
Le groupe communiste, républicain et citoyen s'abstiendra sur cet amendement.
L'amendement n° 7 est adopté.
L'amendement n° 10 doit permettre de rétablir le principe de la révision du schéma départemental de coopération intercommunale tous les six ans, que nous avions par erreur supprimé dans le texte de la commission en adoptant un amendement de Mme Gourault.
Je m'interroge sur la liaison entre cet amendement qui prévoit qu'il faut réviser tous les six ans et l'amendement n° 9 dans lequel on pose le principe d'une révision en 2016.
Il y a une disposition permanente, la révision tous les six ans, et une disposition particulière pour le premier mandat, celle dont l'amendement n° 9 fait l'objet. Dans cet amendement, je vous propose de prévoir une évaluation à l'issue de laquelle la CDCI déciderait ou non la révision du schéma. Si elle ne le fait pas, la révision se fait l'antépénultième année du mandat.
Ma question est de savoir ce qui se passe si on révise le schéma en 2015. La révision suivante intervient-elle en 2021 ou revient-on au principe initial de la révision deux ans avant la fin du mandat ?
Dans le système que je propose, c'est la CDCI qui en dispose pour le mandat municipal prochain. En revanche, la loi permanente est que c'est l'avant-dernière année avant la fin du mandat qu'intervient la révision.
L'amendement n° 10 est adopté.
Article 6
L'amendement n° 6 est un amendement de précision.
L'amendement n° 6 est adopté.
Article 7
L'amendement n° 8 est une précision rédactionnelle.
L'amendement n° 8 est adopté.
L'amendement n° 9 est celui dont nous venons de parler avec M. Béchu. Son objet est de prévoir dès l'automne 2015 une clause de revoyure qui permettra à la commission départementale de la coopération intercommunale d'évaluer le fonctionnement des intercommunalités résultant du schéma départemental. La commission pourrait, le cas échéant, anticiper la révision du schéma prévue au moins tous les six ans à compter de son adoption - la première interviendrait au plus tard en 2019 au vu du calendrier retenu par l'article 7 du texte adopté par la commission des lois.
Ce n'est donc que par exception qu'il devrait y avoir un remaniement de la carte de l'intercommunalité en début de mandat. L'amendement proposé par certains de nos collègues et qui avait la préférence de l'Association des maires de France prévoyait un système de révision automatique, alors que ce n'est pas nécessaire.
Je reconnais que le système que vous évoquez serait trop automatique, mais le dispositif de l'amendement n° 9 est trop compliqué.
Cet amendement vise à concilier les positions de tout le monde, mais je constate que c'est impossible !
L'amendement n° 9 est adopté.
Article 8
L'amendement n° 4 est une précision rédactionnelle.
L'amendement n° 4 est adopté.
Article 9
L'amendement n° 5 est une amélioration rédactionnelle.
L'amendement n° 5 est adopté.
Article 11
L'amendement n° 3 a pour objet de modifier le délai accordé au président de l'EPCI pour renoncer au transfert partiel des pouvoirs de police des maires, afin que ce délai débute lors de la réception de la première notification par laquelle le maire de l'une des communes membres refuse le transfert.
L'amendement n° 3 est adopté.
EXAMEN DES AMENDEMENTS EXTÉRIEURS
Motion tendant au renvoi en commission
Nous avons déposé cette motion car le texte, qui était initialement constitué d'un article unique clair et simple, a grossi de façon considérable. C'est une mauvaise technique de législation. A partir d'un article intelligent, on essaie de faire plaisir à tout le monde, et le texte n'a plus aucun sens. C'est un mélange, un ensemble, qui remet en cause beaucoup de choses. Je préfère qu'on revoie ce texte et qu'on l'amincisse.
Il ne s'agit pas de faire plaisir à tout le monde mais de répondre aux demandes des élus locaux. Alain Richard a veillé à ce qu'il n'y ait pas de débordements par rapport aux demandes qui lui ont été adressées. C'est un texte équilibré qui pourrait être appliqué avant la fin de l'année. Nous voudrions voter ce texte dans les meilleurs délais afin de répondre aux attentes des élus.
En tant qu'auteur de la proposition de loi, je dois préciser que ce texte répondait à une question pratique. Les quelques articles ajoutés en nombre limité sont essentiellement des articles simples, pratiques, qui apportent des réponses à des problèmes réels. Il serait sage de pouvoir l'adopter rapidement.
J'ajoute que nous avons dissocié le débat sur le conseiller territorial, grâce à la proposition de loi de Mme Borvo Cohen-Seat qui sera examinée ultérieurement. Nous apportons ainsi une réponse à des questions urgentes et pratiques par l'adoption du texte présent, avant de supprimer les apports contestables de la loi du 16 décembre (comme, par exemple, lors de l'examen de la proposition de loi sur l'abrogation du conseiller territorial), et enfin un débat sur le troisième acte de la décentralisation.
La commission émet un avis défavorable à la motion tendant au renvoi en commission.
Article additionnel avant l'article 1er
Nous sommes favorables à la modification partielle de la loi mais nous pensons que la véritable question est celle de travailler au plus tôt sur une nouvelle loi de réforme des collectivités territoriales. C'est la raison pour laquelle nous avons déposé l'amendement n° 7 d'abrogation de la loi du 16 décembre 2010.
Voter l'amendement empêcherait la discussion sur le reste du texte, je demanderai donc son retrait. A défaut, avis défavorable pour permettre d'examiner la proposition de loi.
La commission émet une demande de retrait de l'amendement n° 7.
Je précise pour la compréhension globale de la discussion que je donnerai un avis défavorable aux amendements qui reviennent sur les choix de la commission concernant le processus d'adoption du schéma. En revanche, je proposerai un avis favorable pour les amendements qui peuvent compléter les ajustements limités aux dispositions sur l'intercommunalité. Je demanderai enfin le retrait des amendements qui portent sur un autre objet que l'intercommunalité, pour ne pas aboutir à une expansion excessive du texte.
L'amendement n° 10 de M. Pointereau est contraire au dispositif adopté par la commission la semaine dernière, je proposerai donc un avis défavorable.
La commission émet un avis défavorable pour l'amendement n° 10.
L'amendement n° 36 de suppression de l'article 1er est contraire à la position de la commission.
La commission émet un avis défavorable pour l'amendement n° 36.
Pour la même raison, l'avis sur l'amendement n° 17 est défavorable car la proposition de notre collègue Jean-Jacques Hyest ne règle qu'une partie du problème, alors que la position de la commission répond à la question du maintien du mandat dans toutes les situations.
La commission émet un avis défavorable pour l'amendement n° 17.
L'amendement n° 9 de M. Pointereau va plus loin que la position de la commission puisqu'il dispose que la répartition des sièges ne peut se faire que par un accord local. Or, je pense qu'il convient de prévoir qu'en l'absence d'accord local, la répartition se fait conformément au tableau prévu par la loi.
En tant qu'ancien rapporteur de la loi de réforme des collectivités territoriales, je me souviens que sur cette partie, nous avions mis du temps à parvenir à un accord. Nous avons finalement obtenu une quasi-unanimité sur ce point. Il ne me semble donc pas opportun de revenir sur cet accord global. Il ne faut pas le modifier, celui-ci était d'ailleurs intervenu à l'issue de nombreuses auditions. Je voterai donc contre cet amendement.
La commission émet un avis défavorable pour l'amendement n° 9.
Je vais prendre un risque en soutenant l'amendement n° 44, car il comporte une faculté supplémentaire pour les communes de répartir les sièges par accord. Cette faculté tend à répondre à la situation des communautés composées quasi exclusivement de petites communes.
Beaucoup de collègues ont des réserves car ils craignent un alourdissement des conseils communautaires si on prévoit la possibilité d'avoir un minimum de deux délégués par commune. Pourtant, dans beaucoup de situations, cette faculté peut être un facteur positif, facilitant notamment les fusions de communautés.
La proposition que je fais est d'insérer dans le dispositif consensuel décrit par M. Courtois la possibilité d'ajouter à la majorité qualifiée des deux tiers, en fin de processus, un délégué supplémentaire par commune. On passerait alors d'un minimum d'un délégué par commune à un minimum de deux délégués par commune. Ce système fait donc appel à la sagesse des communes intéressées.
Ce dispositif ne répond qu'à une fraction des situations mais je trouve qu'il serait dommage de priver les communes de cette possibilité.
Je comprends la position du rapporteur et je suis à peu près d'accord avec lui sur le fond. Cependant, nous avions un accord global qu'il ne faut pas commencer à remettre en cause, sous peine de rouvrir le débat considérable que nous avions eu sur le projet de loi de réforme des collectivités territoriales, notamment avec M. Collomb. Pour cette raison, je suis défavorable à l'amendement.
C'est un amendement emblématique du détournement de la proposition de loi, qui justifie le renvoi en commission. Je suis sensible à la démonstration du rapporteur mais ce sont des dispositions de fond sur l'intercommunalité que nous ne pouvons pas trancher en seulement quelques minutes de débat en commission.
Notre objectif à tous est que l'intercommunalité soit conclue en 2013 avec le maximum d'accords. Nous n'aurons pas d'autres occasions législatives avant l'automne 2012 de prévoir ce type de dispositif. Dans les cas où il y a une fusion de communautés rurales, il y a une forte demande pour une disposition de cette nature. Ne pas l'adopter serait de nature à faire échouer certaines fusions.
La commission n'adopte pas cet avis et n'émet pas d'avis sur l'amendement n° 44.
Prétendre qu'il y a eu un accord lors de la discussion de la loi de réforme des collectivités territoriales sur les dispositions qu'évoquait M. Courtois est d'autant plus surprenant que je n'ai personnellement pas voté ce texte. Je rappelle ensuite à M. Béchu qu'il y a véritablement une urgence à légiférer dans la mesure où certains articles du texte actuellement en vigueur disposent que le préfet fera ce qu'il veut jusqu'au 30 juin 2013.
Selon moi, l'intercommunalité est l'affaire des communes. Je pense que le carcan qui a été prévu pour la fixation du nombre de vice-présidences n'est pas pertinent. Tout le monde sait que les vice-présidences sont très importantes car c'est au sein des bureaux des conseils communautaires que se crée le consensus. J'ai donc essayé de faire une proposition un peu plus libérale dans mon amendement n° 6.
La commission émet un avis favorable pour l'amendement n° 6.
L'amendement n° 22, le sous-amendement n° 58 et l'amendement n° 23 seront, dans l'esprit, satisfaits en cas d'adoption de l'amendement n° 6 de M. Collombat. Si ce dernier amendement n'était pas adopté, je proposerai par coordination un avis défavorable.
La commission émet un avis défavorable pour l'amendement n° 22, le sous-amendement n° 58 et l'amendement n° 23.
L'amendement n° 24 consiste à donner un délai allongé dans le cas d'une fusion de deux communautés qui n'avaient pas les mêmes compétences pour la reprise par les communes des compétences non retenues par la communauté. C'est un dispositif sage, car cette situation suppose des négociations et éventuellement des transferts de personnels qui justifient l'allongement du délai. Je proposerai donc un avis favorable.
Je tiens à faire remarquer qu'il est tout de même illogique de demander un renvoi en commission et de déposer ensuite une série d'amendements.
La commission émet un avis favorable à l'amendement n° 24.
Examen des amendements du rapporteur
Examen des amendements extérieurs
Article additionnel après l'article 1er
Je suis assez gêné car j'essaye de donner un avis favorable aux amendements qui facilitent les intégrations d'intercommunalités. En même temps, on ne peut pas rouvrir tous les débats relatifs à l'intercommunalité. Celui sur le seuil de population pour créer une communauté d'agglomération a été tranché à 50 000 habitants. Je rappelle qu'actuellement une communauté d'agglomération doit être constituée par un ensemble de plus de 50 000 habitants, autour d'une ou plusieurs communes centres de plus de 15 000 habitants. Il peut être dérogé à ce principe dans deux hypothèses : on peut avoir une commune centre de moins de 15 000 habitants si la communauté d'agglomération comprend le chef lieu de canton ou la commune la plus peuplée et on peut avoir une population de communauté d'agglomération abaissée à 30 000 habitants si celle-ci comprend le chef-lieu du département. Notre collègue Teston propose une nouvelle dérogation aux critères démographiques de création d'une communauté d'agglomération à 30 000 habitants, si celle-ci est constituée non pas autour du chef lieu, mais autour de le commune la plus peuplée. Cette nouvelle dérogation me semble aller trop loin dans la modification du texte proposé, c'est la raison pour laquelle je suis défavorable à cet amendement.
Vous pourriez peut-être demander à Monsieur Teston s'il ne souhaite pas retirer son amendement.
Je l'avais fait, il m'avait initialement donné son accord et puis la nuit porte conseil...
Alors je mets aux voix l'avis défavorable de Monsieur le rapporteur sur cet amendement.
La commission émet un avis défavorable sur l'amendement n° 1.
Nous passons ensuite à l'examen de l'amendement n° 57 de Mlle Joissains.
Il n'y a pas d'opposition à l'avis du rapporteur ? Je n'en vois pas et M. Gélard souligne que c'est un cavalier.
La commission émet un avis défavorable sur l'amendement n° 57.
Article 2
L'amendement n° 37 est contraire à la position de la commission, donc j'émets un avis défavorable.
La commission émet un avis défavorable sur l'amendement n° 37.
Nous avons déjà fait une tentative de modification du barème du nombre de vice-présidents de l'EPCI, qui n'a pas été acceptée. Celle-ci serait une modification beaucoup plus prononcée.
Je pense donc que par parallélisme des formes, tout le monde suit l'avis défavorable du rapporteur.
La commission émet un avis défavorable sur l'amendement n° 21 rectifié.
Sur l'amendement n° 4, nous écoutons M. Collombat, auteur de l'amendement.
Je vous propose d'émettre un avis défavorable par symétrie à la position qui a été prise par la commission la semaine dernière.
La commission émet un avis défavorable sur l'amendement n° 4.
L'amendement n° 38 de Monsieur Hyest est toujours défendu par Monsieur Gélard.
Je vous propose d'émettre un avis défavorable car cet amendement est contraire à l'avis de la commission.
La commission émet un avis défavorable sur l'amendement n° 38.
Article additionnel après l'article 3
Cet amendement vise à limiter le nombre de demandes de retrait d'un EPCI qu'une même commune peut soumettre chaque année civile.
Je propose un avis favorable, c'est une mesure de bon sens pour éviter les manoeuvres.
La commission émet un avis favorable sur l'amendement n° 25.
Article 4
Pour l'amendement n° 39 de M. Hyest, défendu par M. Gélard, je propose que le sort de cet amendement soit le même que pour les précédents amendements de M. Hyest, donc que l'avis défavorable du rapporteur soit suivi par la commission.
La commission émet un avis défavorable sur l'amendement n° 39.
Sur l'amendement n° 5 de M. Collombat, c'est la poursuite du débat sur le seuil démographique de 5000 habitants pour constituer un EPCI. La commission s'est déjà mise d'accord pour conserver ce seuil, avec possibilité, pour la CDCI, d'y déroger de manière motivée. Je pense donc que l'amendement de M. Collombat, qui vise à supprimer ce seuil, est écarté par la position antérieure de la commission, donc j'émets un avis défavorable.
La commission émet un avis défavorable sur l'amendement n° 5.
L'amendement n° 12 de M. Maurey propose de déroger au seuil des 5 000 habitants, dans une limite de 500 habitants, ce qui crée donc un nouveau plancher de 4 500 habitants. En raison de la géographie des territoires concernés, ce seuil parait encore inadapté, j'émets donc un avis défavorable.
La commission émet un avis défavorable sur l'amendement n° 12.
L'amendement n°40 de M. Hyest est défendu de la même manière, éloquente, par M. Gélard. Il reçoit donc le même avis et le vote est le même que pour les précédents amendements de M. Hyest.
La commission émet un avis défavorable sur l'amendement n° 40.
Je pense qu'on peut écarter l'amendement n° 49 de Mme Létard car il est déjà satisfait puisque la CDCI conduit l'élaboration du schéma départemental à la majorité des deux-tiers.
La commission considère que l'amendement n° 49 est satisfait par son texte.
On a ensuite une discussion commune sur les amendements n°3 de M. Mézard et n° 53 de Mme Gourault, dont l'objet est analogue En l'absence de M. Mézard, Mme Gourault peut défendre les deux amendements.
Sur la proposition du rapporteur, nous avions intégré la notion de compétence dans l'adoption du schéma. Je pense qu'en l'état actuel des choses, cela complique la mise en place des intercommunalités, donc je pense qu'il vaut mieux le supprimer.
Je pense que je n'ai pas été suffisamment clair, ou du moins suffisamment convaincant. Nous avons envisagé un processus en deux temps pour la CDCI. Un premier temps consiste en une ouverture de débats. Les communes répondent donc à un schéma indicatif sans se lier. Il ne leur est pas demandé de statuer. Dans les cas où il y a des difficultés, on sait bien que cela concerne le plus souvent les compétences. Ce n'est donc pas un facteur de complication, car ne pas ouvrir le débat aux compétences dès le début c'est un risque de retrouver ce débat dans la deuxième phase.
Je ne partage pas le point de vue du rapporteur. Je trouve illusoire de faire statuer la commission départementale sur les compétences qui pourraient être exercées sur les différents territoires. Dans la plupart des départements, les membres de la commission départementale n'ont pas une connaissance suffisamment approfondie de tous les territoires pour se prononcer sur les éventuelles compétences des uns et des autres.
Le schéma définitif, qui ne fixe pas les compétences, sur lequel les communes se seront prononcées, dans le système que nous avons adopté, s'impose au préfet. Il n'y a plus le deuxième tour à l'initiative du préfet qui peut changer le schéma dans le cadre de l'article 60 de la loi de 2010. Il faut donc que la commission départementale puisse indiquer aux communes quels sont les syndicats qui vont devoir être maintenus ou non. Comment peut-elle le faire si personne ne lui a jamais parlé des compétences ?
J'émets un avis défavorable sur l'amendement n° 50 car il s'agit de revenir sur le principe que nous avons ratifié selon lequel le projet de schéma est adopté par la CDCI, dont chacun se rappelle qu'elle est présidée par le préfet.
Il me semble que l'amendement de Mme Létard est plutôt un amendement de clarification sur le vocabulaire utilisé, car on parle de proposition, puis de projet.
Il y a trois étapes. C'est sur la proposition finale que l'on recueille ou non la majorité des communes. Lorsque cette majorité qualifiée a été atteinte, le schéma est adopté. Le vote final sur le schéma ne porte que sur les secteurs où il n'y aura pas eu de majorité qualifiée des communes, donc le terme de proposition finale est bien celui qui convient.
La commission émet un avis défavorable sur l'amendement n° 50.
Dans la fin du processus que nous avons décrit avec la nouvelle procédure d'adoption, M. Jarlier propose d'ajouter une précision avec cet amendement n°55 : le préfet, lorsqu'il se substitue à la CDCI ne peut pas reprendre une proposition qui n'a pas recueilli une majorité qualifiée des communes auparavant. Je suis favorable à cette proposition.
La commission émet un avis favorable sur l'amendement n° 55.
Article additionnel après l'article 5
Mme Goulet propose qu'en plus de sa composition actuelle, on ajoute les parlementaires à la composition de la CDCI. Je pense que cela n'est pas cohérent avec l'objet de la CDCI. Je rappelle en outre que les séances de la CDCI sont publiques. Tout parlementaire peut donc assister, au moins à titre personnel, aux débats. Je suis donc défavorable à cette proposition.
Ce n'est pas forcément un cadeau à faire aux parlementaires et puis ils peuvent être là à un autre titre.
Cela bouleverserait complètement les équilibres de la CDCI. Dans le département du Nord, cela concernerait 36 parlementaires.
La commission émet un avis défavorable sur l'amendement n° 8.
Nous arrivons à l'amendement n°41 de M. Hyest présenté par M. Gélard, qui recueille le même avis du rapporteur, et, si vous en êtes d'accord, le même vote que sur les précédents amendements de M. Hyest.
La commission émet un avis défavorable sur l'amendement n° 41.
La commission émet un avis défavorable sur l'amendement n° 42.
À ma connaissance, tout le monde est d'accord sur le fait, à quelques notables exceptions, qu'il faut que tout soit fini le 31 décembre 2013. Il me parait peu opportun de rouvrir le débat au début d'un nouveau mandat municipal. Or cet amendement aurait pour conséquence de reporter au-delà du 31 mars 2014 l'achèvement de la carte intercommunale tel que prévu par la loi du 16 décembre 2010. J'émets donc un avis défavorable.
La commission émet un avis défavorable sur l'amendement n° 43.
Il y a deux positions possibles sur l'adoption du schéma. Soit on reste dans la logique de l'article L. 5210-1-1 actuel, c'est-à-dire qu'il y a d'abord un schéma et ensuite des opérations locales faites par un préfet pendant toute l'année 2012 et au début de l'année 2013. L'amendement de Mme Létard que nous examinons se situe dans cette logique-là. Il y a une autre cohérence, qui est celle qu'une majorité de la commission a retenue jusque là : la CDCI garde le pilotage de l'achèvement de la carte jusqu'au bout. Je suis donc défavorable à cet amendement.
La commission émet un avis défavorable sur l'amendement n° 47.
La commission émet un avis défavorable sur l'amendement n° 51.
La commission émet un avis défavorable sur l'amendement n° 11.
L'amendement n° 52 se situe dans le cadre du schéma que nous avons adopté. Le pouvoir que nous donnons à la CDCI, en cas de consensus, est d'adopter la proposition finale sans procéder aux consultations préalables. Simplement, nous souhaitons que le consensus soit réel, d'où ce seuil des trois quarts, qui ne doit pas être abaissé. J'émets donc un avis défavorable à cet amendement qui vise à abaisser le seuil aux deux tiers.
La commission émet un avis défavorable sur l'amendement n° 52.
S'agissant des amendements n°s 46 et 48, ils ne sont pas cohérents avec la procédure adoptée par la commission. J'émets donc un avis défavorable.
La commission émet un avis défavorable sur l'amendement n° 34.
S'agissant de l'amendement n° 13 de M. Maurey, c'est la même logique que l'amendement n° 34 de M. Hyest, donc, là aussi, j'émets un avis défavorable.
La commission émet un avis défavorable sur l'amendement n° 13.
M. Richard sera sensible au parallélisme des formes. Cet amendement n° 2 lui donnera l'occasion de sauver les communes de Luquet, Séron et Gardères.
Je considère que cet amendement est satisfait car nous avons déjà adopté un amendement analogue la semaine dernière.
Vous pourrez donc expliquer aux communes de Luquet, Séron et Gardères que nous les soutenons.
La commission considère que l'amendement n° 2 est satisfait par le texte de la commission.
L'amendement n° 56 reprend l'amendement de Mme Gourault que nous avons adopté la semaine dernière, mais répond mieux sur le plan de l'enchainement à la question de la recréation d'un syndicat en matière scolaire ou en matière d'action sociale en essayant de préserver les ressources financières de ces syndicats. C'est donc un changement de rédaction par rapport à l'amendement de Mme Gourault de la semaine dernière. J'émets un avis favorable.
La commission émet un avis favorable sur l'amendement n° 56.
Amendement n° 45
La compétence « petite enfance » est rarement prise en charge par un établissement public de coopération intercommunale. C'est pourquoi cet amendement complète l'amendement n° 56 en prévoyant que cette compétence puisse faire l'objet d'un syndicat intercommunal.
Cet amendement devrait être transformé en sous-amendement de l'amendement 56.
La commission émet un avis favorable à l'amendement n° 45 à transformer en sous-amendement de l'amendement n° 56.
Amendement n° 14
Le pouvoir de police des maires peut être transféré au président de l'établissement public de coopération intercommunale en matière d'assainissement, de gestion des aires des gens du voyage et de collecte des ordures ménagères. L'amendement n° 14 rappelle que le transfert du pouvoir de police dans ce troisième cas ne bénéficie pas automatiquement au président du groupement de communes auquel appartient la commune mais au président du syndicat intercommunal qui exerce cette compétence, et effectue les coordinations nécessaires.
Cette disposition me paraît dangereuse dans la mesure où elle risque de brouiller l'exercice du pouvoir de police entre différentes autorités, le maire conservant son pouvoir de police générale. Par ailleurs, je ne comprends pas pourquoi le président d'un syndicat intercommunal, qui ne dispose pas de la même légitimité qu'un président d'EPCI, pourrait bénéficier de cette faculté. Enfin, au sein de ma communauté d'agglomération, les maires des dix-sept communes ont refusé de transférer leur pouvoir de police au président de l'EPCI.
Le présent amendement préserve la possibilité dont disposent les maires de s'opposer au transfert de leur pouvoir de police. Si les communes sont favorables au transfert de leur pouvoir de police en matière de collecte des déchets, ce transfert doit bénéficier à la structure intercommunale qui en a la compétence, qui n'est pas obligatoirement un EPCI à fiscalité propre mais peut être un syndicat intercommunal créé à cet effet.
L'application de cet amendement peut conduire à une superposition de l'exercice de différents pouvoirs de police entre ceux du maire, de l'EPCI et du syndicat intercommunal, ce qui nécessite un partage rationnel entre eux.
La commission émet un avis favorable à l'amendement n° 14.
Article additionnel après l'article 11
Amendement n° 35
Cet amendement est incompatible avec celui que nous venons d'approuver.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 35.
Article 12
Amendement n° 15
Cet amendement propose de modifier l'article 12 qui prévoit une obligation de conseil des administrations déconcentrées de l'État en faveur des communes au moment de la mise en place des groupements de communes. Le présent amendement propose de durcir cette obligation afin que les administrations apportent les analyses nécessaires avant la délibération des communes sur le projet. Il ne paraît pas réaliste de demander, dans un tel délai, aux administrations de l'État de répondre à l'ensemble des interrogations des communes dans le cadre d'une fusion, d'une extension ou d'une création d'EPCI.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 15.
Article additionnel après l'article 12
Amendements n°s 33, 26, 30, 31, 27, 32, 28, 29
Ces amendements reprennent des dispositions adoptées à l'unanimité par le Sénat dans la proposition de loi de notre collègue Bernard Saugey relative à l'attractivité des mandats locaux.
Je tiens à souligner la contradiction entre vos arguments présentés dans le cadre de votre motion de renvoi en commission et ces propositions d'amendements.
Seul l'amendement n° 29 a un lien direct avec le sujet de la proposition de loi puisqu'il porte sur les conditions d'exercice du mandat de conseiller communautaire. Toutefois, le dépôt de l'ensemble de ces amendements sera l'occasion d'interroger le Gouvernement sur ses intentions quant à l'inscription de ces dispositions dans un prochain texte.
La commission émet un avis favorable à l'amendement n° 29.
Amendements n°s 19, 18 et 20
M. Jean-Jacques Hyest propose un abaissement du seuil d'élection directe des délégués communautaires. Ces amendements sont prématurés, mais pourront être l'occasion d'interroger le Gouvernement sur l'inscription à l'ordre du jour de ces questions que nous ne pourrons pas repousser indéfiniment.
Amendement n° 54
Cet amendement vise à permettre à un EPCI d'exercer la totalité de ses compétences sur une partie seulement de son territoire, ce qui correspond à une situation de complexité excessive. Cette possibilité existe déjà pour les syndicats. Il ne me paraît pas utile d'appliquer cette disposition aux communautés de communes et aux communautés d'agglomération afin d'aboutir à une intercommunalité à la carte.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 54.
La commission examine ensuite les amendements au texte n° 40 (2011-2012) de la commission sur la proposition de loi n° 39 (2011-2012), adoptée par l'Assemblée nationale, relative à la protection de l'identité.
Nous allons maintenant examiner les amendements extérieurs sur la proposition de loi relative à la protection de l'identité.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 2.
L'objet de ce texte est la lutte contre l'usurpation d'identité. Or, avec le texte adopté par le Sénat en première lecture, il est possible d'y parvenir en utilisant toutes les données inscrites au fichier à l'exclusion des empreintes digitales. Leur conservation au-delà de six mois ne se justifie pas.
La raison d'être de la base centrale biométrique est de garantir que, passé le délai de délivrance du titre d'identité, seul son détenteur légitime pourra en demander le renouvellement. Or, pour ce faire, il est nécessaire que les empreintes digitales soient enregistrées dans la base tout le temps que le titre est en circulation. À défaut, la fraude redevient possible.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 3 rect.
L'amendement n° 4 du gouvernement signerait le retour à la version d'origine de l'article 5 sur le fichier biométrique. Notre commission a rétabli le texte adopté par le Sénat en première lecture, que l'Assemblée nationale avait elle-même supprimé. Par cohérence avec la position que nous défendons depuis le début, l'avis ne peut être que défavorable.
J'ajoute que notre position se trouve confortée, depuis la semaine dernière, par la note d'observation de la CNIL sur la proposition de loi dont nous discutons ainsi que par la décision du Conseil d'État relative au fichier du passeport biométrique. Non seulement le Conseil a censuré le recueil de huit empreintes digitales dans ce fichier, alors que le passeport n'en contient que deux, mais il a aussi rappelé les exigences conventionnelles dont le respect s'impose à l'État en matière de fichier biométrique.
Même si je soutiens le texte de la commission, je voterai l'amendement du gouvernement qui rétablit, sur ce point, la proposition de loi que j'avais déposée.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 4.
Article 5 ter
Il ne faut pas que les opérateurs économiques puissent consulter le fichier central biométrique.
La consultation prévue au présent article porte uniquement sur la validité, ou non, du titre d'identité présenté. Elle ne peut porter sur aucune donnée à caractère personnel, ce qui exclut toutes les autres données enregistrées dans le fichier, en particulier les éléments biométriques.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 1.
Tableau des amendements extérieurs
Enfin, la commission procède à l'examen du rapport et établit le texte qu'elle propose pour la proposition de loi n° 745 (2010-2011), présentée par Mme Evelyne Didier et plusieurs de ses collègues, visant à répartir les responsabilités et les charges financières concernant les ouvrages d'art de rétablissement des voies.
EXAMEN DU RAPPORT
Mes chers collègues, nous allons maintenant procéder à l'examen du rapport de M. Christian Favier et établir notre texte pour la proposition de loi présentée par Mme Evelyne Didier et plusieurs de ses collègues, visant à répartir les responsabilités et les charges financières concernant les ouvrages d'art de rétablissement des voies.
La proposition de loi qu'il nous revient d'examiner répond à une attente très forte de la part des collectivités territoriales, puisqu'elle vise à clarifier la répartition des charges de gestion des ouvrages de rétablissement des voies lorsqu'une voie est interrompue en raison de la réalisation d'une nouvelle infrastructure de transport.
En l'absence de règles législatives ou réglementaires, les principes régissant cette matière ont été définis par la jurisprudence. En 1906, le Conseil d'État a jugé que les ouvrages d'art de rétablissement de voies interrompues par la construction d'une nouvelle infrastructure de transport sont incorporés à l'infrastructure dont ils relient les deux parties.
En d'autres termes, il incombe à la collectivité gestionnaire des voies supportées par l'ouvrage d'en assurer l'entretien, la surveillance et les éventuels travaux de rénovation et de renouvellement.
Les collectivités territoriales ignorent souvent les obligations qui leur incombent, et qui représentent une charge importante. A titre d'exemple, une commune du Calvados de 360 habitants s'est vue imposer une remise en état de deux ponts uniquement utilisés par la SNCF et Réseau Ferré de France (RFF), pour un montant de 61 000 euros, représentant les deux tiers de son budget d'équipement annuel. Les collectivités territoriales ne disposent pas toujours des ressources budgétaires suffisantes pour assumer leurs obligations ; elles sont par ailleurs désarmées face aux grands établissements publics nationaux, qu'il s'agisse de RFF ou de Voies Navigables de France (VNF). Leur responsabilité pénale peut être engagée en raison de leur inaction.
Ce constat apparaît d'autant plus alarmant que les collectivités se voient imposer la gestion d'un ouvrage d'art de rétablissement de leur voirie, alors qu'elles ne disposent d'aucun pouvoir de décision sur les projets de réalisation d'une nouvelle infrastructure de transport comme sur ceux visant à effectuer des travaux de rétablissement.
Il convient toutefois de rappeler que la jurisprudence et le pouvoir réglementaire ont défini des aménagements à ce principe général, notamment pour les autoroutes concédées et les infrastructures ferroviaires, pour lesquelles la gestion des ouvrages et la prise en charge financière n'incombent pas nécessairement au propriétaire.
En effet, pour les ouvrages franchissant les autoroutes concédées, deux directives ministérielles de 1974 et 1976 imposent aux concessionnaires d'être maîtres d'ouvrage des ouvrages de rétablissement au-dessus du domaine public autoroutier concédé.
Pour les voies ferrées, dès 1859, le Conseil d'État a jugé que « le tablier du pont reliant les deux tronçons de la rue de Stockholm à Paris relevait des dépendances du Chemin de Fer qui devait en assurer l'entretien, à l'exception de la chaussée, qui est de la compétence de la collectivité ». Cette obligation d'entretien, qui incombait à la SNCF, n'a pas été remise en cause lors de la nationalisation de celle-ci en 1937. Pourtant, une circulaire de 1985 a mis fin à cette règle de répartition de gestion, sauf pour le cas du croisement d'une voie ferrée et d'une route nationale. En d'autres termes, l'État a maintenu une règle de répartition ancienne en sa faveur mais au détriment des collectivités territoriales.
C'est pourquoi une réflexion sur le sujet s'est imposée et a conduit à la mise en place d'un groupe de travail, en 2009-2010, par l'ancien secrétaire d'État aux transports, M. Dominique Bussereau. Ce groupe a réuni l'AMF, l'ADF, VNF, RFF et les administrations centrales concernées. Deux de nos collègues participaient également à ces travaux : Mme Evelyne Didier, auteur de la présente proposition de loi et M. Francis Grignon.
La proposition de loi de Mme Didier définit un principe général de répartition des charges et des responsabilités selon lequel il incombe aux collectivités territoriales la prise en charge et la gestion des trottoirs, du revêtement routier et des joints qui en assurent la continuité. Les gestionnaires de l'infrastructure de transport nouvelle doivent, quant à eux, assurer la prise en charge de l'étanchéité, de la surveillance, de l'entretien et de la reconstruction de la structure de l'ouvrage.
En d'autres termes, la proposition de loi vise à reprendre le principe qui régit actuellement les concessions d'autoroutes et celui qui régissait, jusqu'en 1985, celui des voies ferrées. Il a également pour mérite de pouvoir s'appliquer à la diversité des situations qui peuvent intervenir entre collectivités territoriales ou entre collectivités et gestionnaires d'infrastructures de transport.
L'application de ce principe général s'accompagne de la négociation d'une convention destinée à prendre en compte les spécificités attachées à chaque ouvrage d'art. Les orientations des conventions seraient définies dès le dossier préalable à la déclaration d'utilité publique afin de permettre aux gestionnaires des infrastructures de transport nouvelles de réfléchir aux conditions de gestion de l'entretien de l'ouvrage.
Ce principe général et la négociation de la convention ne s'appliquent qu'aux futurs ouvrages d'art. La question des ouvrages d'art déjà existants est plus complexe à appréhender : l'obligation de négocier des conventions ne semble pas adaptée et le statu quo n'est pas non plus satisfaisant. C'est pourquoi la proposition de loi prévoit, d'une part, que les conventions déjà existantes continuent de s'appliquer. En cas de dénonciation par l'une des parties, une nouvelle convention devrait être négociée selon les principes et les modalités présentées précédemment. Dans le cas où aucune convention n'a été signée et en cas de litige, une convention devrait être signée selon les modalités précédentes.
La question de la négociation, en cas de désaccord, est également délicate. Le groupe de travail mis en place par M. Bussereau avait proposé, avant la saisine du juge, l'existence d'une phase précontentieuse avec l'intervention du préfet qui aurait eu une mission de médiation. Toutefois, force est de constater que le préfet, bien que garant de l'intérêt général, peut également apparaître comme partie prenante dans les litiges opposant les collectivités territoriales et les établissements publics nationaux. C'est pourquoi la phase contentieuse a été préférée sans passer par une phase de médiation et de conciliation.
La proposition de loi de Mme Didier envisage également de poser le principe d'une compensation financière, par dérogation au principe général, selon laquelle les collectivités territoriales pourraient demander de transférer la gestion de leur voirie aux gestionnaires des nouvelles infrastructures de transport. Cette dérogation apparaît contraire aux principes mêmes de la décentralisation selon lesquels les collectivités territoriales doivent assurer la gestion de leur voirie. C'est pourquoi je vous propose la suppression de cette disposition.
L'article 2 est l'article de gage financier. Enfin, l'article 3 vise à protéger les collectivités territoriales des éventuelles conséquences issues de l'application du principe général. En effet, afin de réduire leurs charges d'entretien, les gestionnaires des nouvelles infrastructures de transport pourraient être tentés de construire des ouvrages d'art « a minima » sans souci de la sécurité. Je vous propose de supprimer cet article et d'intégrer ces dispositions dans l'article 1er. Plus précisément, les dossiers préalables aux déclarations d'utilité publique pourraient être le réceptacle de ces orientations et permettre à la collectivité d'apprécier la qualité de l'ouvrage.
Les différences avec la proposition de loi de notre collègue Francis Grignon sont nombreuses. Tout d'abord, cette dernière pose le principe selon lequel chaque propriétaire doit assurer la charge d'entretien et de reconstruction de son ouvrage même s'il n'a pas décidé de le construire, une compensation financière, restant à définir, pouvant accompagner ce transfert de gestion. Ensuite, elle propose d'introduire une exception pour les collectivités territoriales de moins de 3 500 habitants : lorsque ces dernières seraient concernées par la gestion d'un ouvrage de rétablissement, le gestionnaire de la nouvelle infrastructure de transport devrait prendre en charge l'entretien, la gestion et la reconstruction de la structure de l'ouvrage. Enfin, elle propose de confier au préfet une mission de médiation, avant que le juge soit saisi, en cas d'échec de la négociation de la convention.
L'Association des maires de France et l'Assemblée des départements de France, qui représentent les collectivités principalement concernées par cette problématique, m'ont indiqué, lors de leurs auditions, être largement favorables à l'adoption de la proposition de loi de Mme Didier.
Les deux amendements que je vous propose d'adopter visent, d'une part, à réécrire les dispositions de l'article 1er afin de corriger certaines maladresses rédactionnelles, réorganiser les différents articles et y intégrer les dispositions de l'article 3.
Il s'agit d'une problématique à laquelle sont confrontés de nombreux élus ; comme vous l'avez dit, la jurisprudence a longtemps fixé les règles régissant cette matière, faute de dispositions législatives claires. Il s'agit là d'un véritable problème que cette proposition de loi a le mérite de traiter.
Nous sommes très satisfaits de cette proposition de loi. Je suis moi-même confrontée à des cas similaires dans mon département où des petites communes rurales ne peuvent faire face à leur obligation d'entretien sur des tabliers de pont de voies ferrées. Cela conduit à des situations dangereuses pouvant engager la responsabilité pénale des maires, question à ne pas négliger. Mon collègue M. Yves Détraigne, me disait il y a un instant que, sur le trajet de la nouvelle ligne TGV qui traverse la Marne, de nombreux cas vont entrer dans le champ d'application de cette proposition de loi. C'est pourquoi nous la soutiendrons.
Il s'agit d'un texte important destiné à préserver la neutralité financière des rapports entre les collectivités territoriales et les établissements publics de l'Etat, à l'image de RFF ou de VNF. Dès lors, ce texte apporte des clarifications nécessaires dans un domaine qui devenait le prétexte à de nombreux chantages.
Je me réjouis de l'unanimité qui se dégage de notre discussion. Je crois effectivement que ce texte va sécuriser la situation des collectivités territoriales, aujourd'hui en difficulté dans le cadre de travaux importants de rénovation ou de renouvellement qu'elles doivent réaliser sur des ouvrages parfois anciens et dont elles n'ont pas toujours mesuré les conséquences, tant d'un point de vue financier pour leurs propres budgets, que d'un point de vue juridique à travers la mise en cause de la responsabilité pénale des exécutifs locaux. Il est donc important de sortir aujourd'hui des solutions jurisprudencielles et d'apporter une clarification législative des responsabilités de chaque acteur. A ce titre, cette proposition de loi parait équilibrée, surtout dans le cadre des nombreux projets à venir : je pense notamment aux futures lignes de TGV. Cette proposition est aussi le résultat d'un travail collectif du groupe de travail mis en place par le ministère chargé des transports, auquel les élus avaient été largement associés.
EXAMEN DES AMENDEMENTS
Au-delà des améliorations rédactionnelles et de la restructuration de la structure de l'article qu'il propose, l'amendement n° COM- 1 tend à supprimer les dispositions de l'article L. 2123-12 du code général de la propriété des personnes publiques qui, dans la rédaction actuelle, prévoient un transfert de compétences entre les collectivités territoriales gestionnaire d'une voirie et les collectivités publiques gestionnaires des ouvrages d'art de rétablissement. Or, selon les dispositions des articles L. 2321-2 pour les communes et L. 3321-1 du code général des collectivités territoriales pour les départements, les collectivités territoriales doivent assumer l'entretien de leur voirie. Il ne leur est donc pas permis de transférer à une autre collectivité publique leurs compétences obligatoires.
Si la présente proposition de loi ne propose pas de délai de signature des conventions dans le cadre des nouveaux ouvrages de rétablissement des voies, le cas des ouvrages déjà existants mérite la fixation d'un délai qui pourrait être fixé à trois ans, à compter de la saisine du juge.
Enfin, cet amendement prévoit d'intégrer les dispositions de l'article 3 de la présente proposition de loi dans le I du nouvel article L. 2123-9.
L'amendement n° COM- 1 est adopté.
L'article 1er est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
L'amendement n° COM-2 supprime l'article 3 de la proposition de loi dans la mesure où ses dispositions ont été intégrées dans le paragraphe I du nouvel article L. 2123-9 du code général de la propriété des personnes publiques.
L'amendement de cohérence n° COM-2 est adopté ; en conséquence, l'article 3 est supprimé.
L'ensemble de la proposition de loi est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.