Séance en hémicycle du 16 octobre 2019 à 15h00

Résumé de la séance

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Sommaire

La séance

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La séance est ouverte à quinze heures.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

L’ordre du jour appelle les réponses à des questions d’actualité au Gouvernement.

Monsieur le Premier ministre, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, je vous rappelle que la séance est retransmise en direct sur Public Sénat et sur notre site internet.

J’appelle chacun de vous à être attentif au respect de son temps de parole – j’espère que ce n’est pas une incantation rituelle – et au respect des uns et des autres.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Requier, pour le groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.

Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Requier

Depuis une semaine, les regards du monde sont une nouvelle fois tournés, hélas ! vers la Syrie depuis que l’armée turque a lancé son offensive contre les forces kurdes des YPG. Officiellement, Ankara souhaite établir le long de sa frontière une zone de sécurité en installant au moins 1 million de réfugiés et en construisant, en un temps record, villes et infrastructures. Mais, dans les faits, ce sont à nouveau des milliers de civils qui sont pris dans l’étau d’une guerre civile qui déchire, depuis 2011, ce pays martyr, avec des conséquences humanitaires terribles : on parle de près de 160 000 déplacés, d’exactions, de règlements de compte nourris par des haines longuement mûries.

L’offensive turque, qui suit le retrait des troupes américaines, s’inscrit dans ce que l’ancien ambassadeur de France en Syrie, Michel Duclos, appelle « la géopolitique des nouveaux autoritaires ». Ou quand la volonté de puissance intérieure et extérieure des dirigeants turcs, russes ou iraniens a fait de la Syrie le terrain de jeu mortifère de leurs ambitions.

Ne nous y trompons pas : ce qui se passe met gravement en cause la stabilité régionale et internationale, avec en toile de fond le retour en force de Bachar al-Assad, le spectre de la résurgence de Daech, que les forces kurdes ont combattu, mais qui, comme l’hydre, n’a jamais totalement disparu, la pantomime pathétique d’une OTAN déchirée, le spectacle désolant d’une Europe militairement impuissante – et nous reconnaissons l’engagement du Président de la République en faveur d’une armée européenne.

Oui, la France entretient des liens d’amitié profonds et anciens avec le peuple turc ! Mais le chantage de ses dirigeants est insupportable. Il appelle de notre part la plus grande fermeté.

Monsieur le Premier ministre, que va faire la France pour faire cesser l’offensive turque et le drame humanitaire qui s’annonce ? Comment agira-t-elle pour empêcher la fuite des djihadistes français aujourd’hui détenus ? Quelles sont nos marges de manœuvre pour tenter de stabiliser cette région ?

Applaudissements sur les travées du groupe RDSE, ainsi que sur des travées des groupes LaREM, UC et Les Républicains.

Debut de section - Permalien
Édouard Philippe

Monsieur le président Requier, vous avez rappelé les faits. Je veux les confirmer dans une certaine mesure.

Le 9 octobre dernier, comme nous le savons tous, la Turquie a décidé, de manière unilatérale – je le dis clairement –, de lancer une offensive en Syrie contre les forces démocratiques syriennes. Cette offensive est d’une ampleur considérable tant par les moyens qu’elle mobilise, avec le soutien massif de supplétifs syriens de l’armée nationale syrienne, que par le périmètre et la profondeur de l’offensive terrestre. Les frappes aériennes se sont étendues à l’ensemble de la frontière, notamment à l’extrême nord-est, très au-delà de la zone d’incursion terrestre réalisée.

Le 13 octobre, les États-Unis ont décidé, là encore de manière unilatérale, de retirer leur dispositif militaire du nord-est syrien.

Ces deux décisions unilatérales emportent des conséquences très lourdes pour nos partenaires kurdes, qui se sont battus à nos côtés contre Daech, hommes et femmes réunis, et à qui je veux rendre une nouvelle fois hommage en notre nom à tous.

Applaudissements.

Debut de section - Permalien
Édouard Philippe

Conséquences très lourdes aussi pour notre sécurité : après cinq années de lutte, le risque d’une résurgence des effectifs et des forces de Daech est quasiment avéré. L’idée que l’État islamique puisse reprendre pied de façon organisée, que ce soit au nord-est syrien ou, le cas échéant, à travers la déstabilisation de la région, au nord-ouest irakien fait peser un risque sécuritaire sur l’ensemble de la région et sur l’ensemble de nos pays pour les raisons que nous n’ignorons pas.

Conséquences très lourdes encore sur le plan humanitaire : 700 000 civils se trouvent aujourd’hui dans cette zone, des familles entières ont pris la route pour fuir les combats. Depuis le début de l’offensive, on dénombre 150 000 déplacés et, bien évidemment, de premières victimes civiles.

Conséquences très lourdes, enfin, sur la recherche d’une solution pérenne dans la région : l’offensive militaire et les menaces de la Turquie de réinstaller, de force, les réfugiés syriens en Turquie, dans la zone des trente kilomètres qui longe la frontière entre la Syrie et la Turquie, ne vont pas faciliter l’avènement d’une solution politique dans la région.

Monsieur le président Requier, vous posez la question de la réaction de la France. Nous avons pris un très grand nombre d’initiatives.

D’abord, la France a, de la façon la plus claire et la plus ferme, condamné cette opération militaire. Nous l’avons dit à l’ambassadeur de Turquie en France, par l’intermédiaire du Quai d’Orsay. Le Président de la République a eu l’occasion de s’entretenir avec le Président Erdogan : il lui a dit clairement quelle était la position de la France et lui a signifié notre condamnation de cette opération militaire.

Nous avons ensuite cherché à mobiliser dans les enceintes internationales, et partout où le multilatéralisme a du sens, l’ensemble de nos partenaires : c’est vrai du Conseil de sécurité de l’ONU, qui s’est réuni en urgence ; c’est vrai de l’Europe, qui s’est exprimée d’une seule voix ; c’est vrai aussi de la coalition. N’oublions pas que la décision unilatérale des États-Unis, au regard de leur importance au sein de la coalition, empêche les autres pays membres de continuer de peser sur le terrain.

Face à l’impact de cette opération militaire sur la sécurité européenne, nous avons décidé, avec d’autres pays, de suspendre nos exportations d’armes vers la Turquie. C’est une décision commune de l’Allemagne, des Pays-Bas, de la Norvège, de la Finlande et du Royaume-Uni. Le Canada a pris la même décision.

Nous souhaitons, avec nos partenaires de l’Union européenne, continuer de prendre toutes les initiatives possibles en vue de conduire la Turquie à mettre un terme à cette opération. Toutefois, compte tenu des décisions turques et de l’unilatéralisme dont ce pays a fait preuve, ne nous voilons pas la face : demander, condamner, inciter, nous le ferons ; obtenir, ce sera beaucoup plus difficile – ce le sera d’autant plus en raison de la décision unilatérale des États-Unis.

Sans jeter l’opprobre sur qui que ce soit, monsieur le président Requier, les conséquences de cette décision unilatérale seront très lourdes : pour les États-Unis, sans doute ; pour la région, c’est certain ; et probablement même pour la façon dont nous nous envisageons les relations avec nos partenaires sur des théâtres d’opérations compliqués.

Applaudissements sur les travées des groupes LaREM, RDSE et Les Indépendants, ainsi que sur des travées des groupes UC et Les Républicains. – M. Simon Sutour applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. Pierre Laurent, pour le groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

L’offensive de la Turquie contre les forces kurdes et démocratiques syriennes soulève l’indignation. Cette agression est un crime contre la paix, contre les combattants kurdes qui se sont battus contre Daech et contre l’expérience d’un Rojava démocratique. Elle offre une opportunité inespérée à Daech de reconstruire ses forces.

Nous avions alerté à de nombreuses reprises sur les risques de voir la Turquie franchir le pas, sur les ambiguïtés de la coalition et sur le rôle trouble joué par la Turquie en son sein. Aujourd’hui, les masques tombent. La Turquie fait la guerre aux Kurdes, et à personne d’autre, au mépris de la sécurité du monde. Et cette guerre a été autorisée par le Président des États-Unis !

La France doit parler d’une voix claire, forte, indépendante, qui ne s’étouffe pas aussitôt dans les coulisses du renoncement. La France doit agir.

Premièrement, au-delà de l’embargo annoncé sur les armes, à quelles sanctions économiques, financières et politiques fortes la France est-elle prête ? La Turquie est un important partenaire commercial, nous avons donc les moyens d’agir.

Deuxièmement, la France continue-t-elle d’agir pour aboutir à la mise en place d’une zone d’exclusion aérienne ? Et comment ?

Troisièmement, que répond la France à l’appel lancé par quinze organisations humanitaires ? Quelle est notre stratégie pour obtenir un cessez-le-feu qui protège le travail humanitaire, qui garantisse son accès en tout lieu, qui protège les populations civiles par l’interdiction de l’utilisation des armes explosives en zones peuplées, qui permette de rapatrier les enfants français détenus dans les camps de prisonniers ?

Enfin, puisque les États-Unis et la Turquie sont au cœur de cette affaire et qu’ils sont membres de l’OTAN, n’est-il pas temps de convoquer un débat parlementaire d’urgence interrogeant le rôle de l’OTAN, notre rôle dans cette alliance et notre place au sein de son commandement intégré ? Le Gouvernement est-il prêt à convoquer d’urgence ce débat parlementaire ?

Applaudissements sur les travées du groupe CRCE, ainsi que sur des travées du groupe SOCR.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. le secrétaire d’État auprès du ministre de l’Europe et des affaires étrangères.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Baptiste Lemoyne

La semaine dernière, la Haute Assemblée appelait déjà l’attention du Gouvernement sur ce qui se préparait. J’avais alors eu l’occasion de répondre à Christine Prunaud.

Depuis lors, non seulement la pression militaire n’a pas faibli, mais elle s’est considérablement accrue. L’émotion n’a pas faibli non plus : elle s’est aussi considérablement accrue, avec la mobilisation de toutes et de tous et les initiatives prises par un certain nombre d’entre vous – je pense notamment à votre proposition de résolution.

Comme le Premier ministre vient de le souligner, la France s’est mobilisée fortement, dans toutes les enceintes. Elle a demandé urgemment, la semaine dernière, la réunion du Conseil de sécurité, lequel reste saisi de cette question et se réunit très régulièrement sur la situation en Syrie.

La France est intervenue activement au sein du Conseil des ministres des affaires étrangères, lundi dernier. C’est parce qu’une voix forte s’y est exprimée, celle de Jean-Yves Le Drian, qu’une condamnation unanime, je crois, a été prononcée ; condamnation que le prochain Conseil européen, nous l’espérons, viendra consacrer.

Vous évoquez les outils économiques, monsieur le sénateur Pierre Laurent. Sachez qu’une commission mixte économique avec la Turquie devait se réunir début décembre. Nous avons fait savoir que sa tenue était impossible dans le contexte actuel.

Soyez sûr que la France a condamné cette intervention dans les termes les plus fermes. Le Président de la République l’a d’ailleurs dit au Président Erdogan.

La France continuera à être mobilisée pour obtenir la cessation de l’offensive turque contre les Kurdes le plus rapidement possible. Ce sujet nous engage chaque heure, chaque jour, chaque semaine, tant que cette situation perdurera.

M. François Patriat applaudit.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

M. le président. La parole est à M. Rémi Féraud, pour le groupe socialiste et républicain.

Applaudissements sur les travées du groupe SOCR.

Debut de section - PermalienPhoto de Rémi Féraud

Ma question porte également sur l’agression militaire de la Turquie dans le nord-est syrien.

L’ensemble des groupes de cette assemblée demande au gouvernement de réagir plus fortement, plus fermement, plus rapidement. Il y va de la fidélité à nos alliés kurdes, bien évidemment, et à nos valeurs, mais aussi de notre propre sécurité, comme le Premier ministre l’a lui-même souligné.

Chacun sait le rôle exceptionnel des combattants kurdes, aux côtés de la coalition internationale, dans l’éradication du califat de Daech. Chacun sait que, les attaquer aujourd’hui, c’est permettre la résurgence du terrorisme islamiste jusque sur notre sol.

Le Président de la République a appelé la société française à faire bloc contre le terrorisme. Or cette lutte est globale : faire bloc en France sera illusoire si nous laissons les djihadistes reprendre pied dans le nord-est syrien.

Vous venez de nous dire, monsieur le secrétaire d’État, que la France agit. C’est vrai ! Mais nous vous disons qu’elle agit trop tard et insuffisamment pour être efficace. Cessons d’intérioriser un sentiment d’impuissance et d’isolement largement exagéré. L’invasion par la Turquie du canton d’Afrin, livré ensuite aux milices djihadistes et où les Kurdes ont été victimes d’un véritable nettoyage ethnique, était un avertissement auquel nous n’avons pas su réagir.

La France va-t-elle enfin se mobiliser à la hauteur des sacrifices réalisés pour nous par les combattants kurdes ?

Applaudissements sur les travées du groupe SOCR, ainsi que sur des travées du groupe CRCE. – MM. Bruno Retailleau et Michel Savin applaudissent également.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. le secrétaire d’État auprès du ministre de l’Europe et des affaires étrangères.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Baptiste Lemoyne

Oui, vous avez raison, monsieur le sénateur Rémi Féraud, le rôle joué par les combattants des forces démocratiques syriennes, les FDS, qui sont notamment composées de Kurdes, a été déterminant dans la défaite territoriale de Daech, avec l’appui de la coalition internationale et de la France. Le courage de ces femmes et de ces hommes appelle notre reconnaissance.

Cette reconnaissance doit naturellement continuer de s’exprimer dans les faits. Il n’y a pas de dosage dans la façon dont nous cherchons à mobiliser tout le monde. Notre engagement est total pour mobiliser la communauté internationale dans toutes les enceintes.

Dès que l’armée turque a franchi cette frontière, nous avons appelé à une réunion du Conseil de sécurité. Nous n’avons pas ménagé notre peine. Les décisions unilatérales évoquées par le Premier ministre sont graves, très graves. Leurs auteurs portent naturellement une responsabilité devant l’histoire.

Monsieur le sénateur, je vous sais très impliqué sur la question kurde, à l’image de la Haute Assemblée et de sa commission des affaires étrangères, qui, ce matin, a auditionné l’ambassadeur de Turquie. Je veux saluer la proposition de résolution qui appelle à un engagement résolu de la France en faveur de toute initiative. Sachez que nous rejoignons complètement cet appel et qu’il en est question en ce moment même, lors du conseil des ministres franco-allemand, à Toulouse. Les prochaines heures, les prochains jours seront également très importants au sein du Conseil européen.

La situation humanitaire étant ce qu’elle est, nous nous préparons d’ores et déjà à une réponse avec notre centre de crise et de soutien. Un afflux de réfugiés risque de se produire au Kurdistan irakien. Une demande d’aide internationale a été formulée pour pouvoir gérer cette situation. Nous devrons être également présents au rendez-vous pour ces frères d’armes dans la lutte contre le terrorisme que sont les Kurdes.

MM. François Patriat et Richard Yung applaudissent.

Debut de section - PermalienPhoto de Rémi Féraud

Je vous remercie de votre réponse, monsieur le secrétaire d’État.

Nous appelons les autorités françaises à s’engager davantage et à sortir de la posture défensive dans laquelle nous nous sommes nous-mêmes placés. Rappelons-nous la phrase de Charb : « Contre le cynisme et la mort, aujourd’hui, il y a le peuple kurde. » Il est de notre devoir et de notre intérêt d’être à ses côtés ; nous serons à vos côtés pour prendre des initiatives beaucoup plus fortes dans les jours qui viennent.

Applaudissements sur les travées des groupes SOCR et CRCE.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

M. le président. La parole est à M. Franck Menonville, pour le groupe Les Indépendants – République et Territoires.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Indépendants.

Debut de section - PermalienPhoto de Franck Menonville

Malgré l’annonce de l’imminence d’un possible accord la nuit dernière entre l’Union européenne et le Royaume-Uni concernant le Brexit, la pression qui pèse sur le Conseil européen de demain reste importante.

Dans ce contexte particulièrement mouvementé et incertain, pouvez-vous nous dire, monsieur le secrétaire d’État, où en sont les négociations sur un accord de sortie du Royaume-Uni ? Que pouvons-nous attendre des prochains jours ?

En effet, pour l’heure – faut-il le rappeler ? –, le Royaume-Uni fait encore partie de l’Union européenne, et les interrogations quant aux relations futures ne cessent de grandir. Ce fut notamment le cas lorsque, le 3 juin dernier, le Président américain, Donald Trump, tweetait : « Un grand accord commercial est possible une fois que le Royaume-Uni se sera débarrassé de ses chaînes. » Il a été très clair quant à ses intentions de créer une future relation privilégiée avec le Royaume-Uni. Un accord bilatéral, dans le cadre du Cloud Act américain, a d’ailleurs été conclu le 3 octobre dernier, non sans remous.

La Commission européenne, saisie de cette question, doit se pencher sur la conformité de tels accords avec le droit communautaire. Beaucoup d’incertitudes demeurent encore, et elles sont plus fortes encore pour nos entreprises.

Nous entendons les craintes et les inquiétudes de nos concitoyens et de nos PME dans nos territoires. Quelles mesures concrètes comptez-vous mettre en place pour préparer l’après-Brexit, à la fois en termes économiques, mais aussi politiques ?

Applaudissements sur les travées du groupe Les Indépendants.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. le secrétaire d’État auprès du ministre de l’Europe et des affaires étrangères.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Baptiste Lemoyne

La France et l’Union européenne se préparent au Brexit depuis plusieurs mois. Vous le savez, monsieur le sénateur Franck Menonville, des textes ont été adoptés par les assemblées, des ordonnances ont été prises pour nous permettre de faire face au mieux à la situation, qu’il y ait ou non un accord. Les préparatifs ont continué à se faire de façon intensive sous la houlette du Premier ministre, qui réunit très régulièrement tous les ministères concernés.

S’agissant des entreprises, dont vous évoquez les inquiétudes, nous avons conduit une action très proactive à leur égard, y compris en appelant individuellement chacune des entreprises exportatrices françaises vers le Royaume-Uni, pour préparer toutes les procédures en cas de non-accord.

Verrons-nous, au cours des heures et jours prochains, un éventuel accord aboutir ? Michel Barnier a estimé la semaine dernière que des garanties suffisantes existaient pour une reprise pleine et entière des négociations, mais l’heure tourne ! Aujourd’hui, nos préoccupations concernant les positions britanniques sur l’Irlande et l’Irlande du Nord n’ont pas tout à fait disparu, il faut le dire. Je pense notamment à l’intégrité du marché unique de l’union douanière ou au maintien des conditions d’une concurrence loyale.

L’Union européenne se montre clairement ouverte à la négociation. Elle est constructive dans les discussions. Mais encore faut-il que le Premier ministre britannique donne l’impulsion politique nécessaire. Son cabinet doit se réunir dans les prochaines heures, nous dit-on. Quelle que soit l’évolution, nous sommes prêts à faire face à tous les scénarios, y compris à celui d’un retrait sans accord. Nous avons adopté des cadres juridiques très complets, la sensibilisation a été conduite, et nous avons organisé une coordination très active avec tous les pays voisins.

Au-delà du 31 octobre prochain, tout restera à faire pour bâtir une relation future. L’histoire est là, la géographie est là : le Royaume-Uni reste un pays européen, au sens large du terme, et nous devrons bâtir une relation qui reste proche, compte tenu de ces liens.

Applaudissements sur des travées des groupes LaREM, RDSE et Les Indépendants.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

M. le président. La parole est à M. Christian Cambon, pour le groupe Les Républicains.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Cambon

Comme les intervenants précédents l’ont souligné, le Levant est de nouveau en feu. L’offensive massive que la Turquie a lancée au nord-est de la Syrie anéantit d’un seul coup tous les efforts menés par la coalition, dont la France est le deuxième contributeur. C’est évidemment un signe très positif pour Daech, qui n’en attendait pas tant.

Le bilan est accablant : déjà près de 1 000 morts à l’heure où nous parlons, 160 000 civils jetés sur les routes, le retour de Daech et le risque, peut-être pire encore, d’évasion de djihadistes, qui viendront faire payer très cher à l’Europe son engagement.

Enfin, les Kurdes, nos alliés, nos amis, qui se sont battus avec tant d’héroïsme pour notre propre sécurité, ce peuple sans patrie, trahi une fois de plus, sont contraints d’appeler au secours leurs ennemis d’hier.

Les Américains ont cru défendre leurs intérêts, mais quelle confiance accordera-t-on demain à leur parole ?

Monsieur le Premier ministre, mes questions sont simples : comment l’OTAN peut-elle rester sans réagir ? Nous étions un certain nombre dimanche dernier à l’Assemblée parlementaire de l’OTAN. À nos questions, fortes – nous avons fait entendre la voix de la France –, le secrétaire général Stoltenberg n’a jamais daigné répondre.

Par ailleurs, que comptez-vous faire face aux milliers de djihadistes qui menacent notre sécurité ? Le départ de M. le ministre des affaires étrangères pour l’Irak a été annoncé. Qu’espère-t-il obtenir là-bas ? Surtout, que comptez-vous faire, ici, en France, pour assurer la sécurité des Français ?

Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC, ainsi que sur des travées du groupe RDSE. – M. Simon Sutour applaudit également.

Debut de section - Permalien
Édouard Philippe

Je n’ai rien à retrancher ou à ajouter au constat que vous venez de dresser, monsieur le président Cambon, s’agissant du caractère unilatéral des décisions qui ont été prises par la Turquie et les États-Unis, s’agissant des conséquences très lourdes sur le plan de la sécurité – je les ai évoquées, mais je me retrouve entièrement dans ce que vous avez vous-même formulé – de la résurgence probable de Daech liée à la déstabilisation, s’agissant de l’impossibilité, ou de la très grande difficulté, à trouver une solution politique dès lors que cette intervention se déroule.

Vous soulevez deux questions distinctes, bien qu’elles soient un peu liées.

La première est relative à l’OTAN. La Turquie, la France, les États-Unis, ainsi qu’un grand nombre – pas tous – de partenaires de la coalition internationale en sont membres.

Vous avez évoqué les questions posées par un certain nombre de parlementaires français à l’Assemblée parlementaire de l’OTAN et l’absence de réponse à laquelle ils ont été confrontés, qui me semble traduire un très grand trouble, pour dire les choses de façon posée. Regardons ce trouble en face.

Si le principe d’une alliance est de permettre à des partenaires de travailler ensemble, les décisions unilatérales ou celles qui s’entrechoquent les unes avec les autres ne me paraissent pas relever d’un bon fonctionnement. Regardons la situation en face et travaillons sérieusement avec nos partenaires. Quiconque prétendrait que l’OTAN fonctionne comme elle a toujours fonctionné – « circulez, il n’y a rien à voir », pardon de le dire trivialement – se tromperait.

Votre seconde question est relative à la sécurité en France, qui se traduit de deux façons. Tout d’abord, il y a la reconstitution d’un espace géographique maîtrisé par Daech, lequel serait propice à l’organisation d’actions à l’extérieur de ce territoire. Nous n’en sommes pas là, même si le risque n’est pas nul. En effet, les détenus sont toujours détenus et les prisons sont situées assez loin, voire très loin, de la zone où ont lieu les combats. Les camps où sont parqués, si j’ose dire, un certain nombre de gens qui s’étaient échappés après les derniers combats, notamment à Baghouz, dans le sud de la région, subsistent encore.

Nous devons évidemment avoir en tête que la résurgence de Daech est possible. Nous devons discuter avec nos partenaires de la région, qui ont les mêmes intérêts que nous, pour éviter la reconstitution de Daech. La discussion s’avérera compliquée, car la situation est profondément déstabilisée.

Qui peut dire, compte tenu de la décision américaine, que nous pourrons compter, demain, sur nos alliés kurdes ?

Quant à la question des retours vers le territoire national, monsieur le président Cambon, l’ensemble du dispositif est prêt. Nous sommes bien évidemment prêts à judiciariser tous ceux qui, s’étant rendus sur zone, se sont rendus complices des actions criminelles qui ont été conduites sur place.

Autrement dit, une grande vigilance s’impose sur le territoire métropolitain, dans l’hypothèse où certains voudraient revenir. Pour autant, nous le savons, un certain nombre de personnes, si elles devaient échapper au contrôle de nos alliés kurdes, ne chercheraient pas forcément à revenir, mais iraient se battre.

Par ailleurs, nous devons travailler avec les pays voisins, notamment avec l’Irak. Vous l’avez dit, monsieur le président Cambon, M. le ministre de l’Europe et des affaires étrangères se rendra dès ce soir en Irak, pour discuter avec son homologue irakien des mesures à mettre en place et, éventuellement, d’un accompagnement en matière de coopération judiciaire. En effet, un certain nombre de ceux qui sont détenus en Syrie par les Kurdes ayant commis des crimes en Irak, ils pourraient, le cas échéant, être judiciarisés sur place.

Applaudissements sur l es travées du groupe LaREM, ainsi que sur des travées du groupe UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

M. le président. La parole est à M. Laurent Lafon, pour le groupe Union Centriste.

Applaudissements sur les travées du groupe UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurent Lafon

Vendredi dernier, le Conseil constitutionnel a jugé que les droits d’inscription appliqués à l’université seraient contraires aux prescriptions du préambule de la Constitution de 1946, aux termes duquel « l’organisation de l’enseignement public gratuit à tous les degrés est un devoir de l’État ». Seuls des tarifs modiques seraient autorisés.

Le jugement répond à une question prioritaire de constitutionnalité sur la possibilité donnée aux universités d’augmenter significativement les droits d’inscription pour les étudiants étrangers, dans le cadre du plan Bienvenue en France, plan pour l’application duquel la commission de la culture, de l’éducation et de la communication du Sénat avait demandé un moratoire. Cependant, la portée de cette décision dépasse la simple question des tarifs appliqués aux étudiants étrangers et s’applique aux droits d’inscription de l’ensemble des étudiants, français et étrangers, dans l’ensemble des établissements publics, universités ou écoles.

Ce jugement, que le Conseil constitutionnel qualifie lui-même d’inédit, crée des incertitudes juridiques, tant il est difficile à ce jour d’en mesurer toutes les conséquences. Il pose un certain nombre de questions qui pourraient avoir un impact sérieux sur le financement de nos établissements.

Le principe d’autonomie financière n’est-il pas atteint par cette décision, qui remet en cause la possibilité pour les établissements de fixer eux-mêmes leurs droits d’inscription ?

La gratuité est-elle réellement un moyen efficace pour garantir l’égal accès aux études supérieures ? Penser que, parce que c’est gratuit, c’est accessible à tous n’est-il pas un leurre ?

Est-il pertinent de financer entièrement par l’argent public, et donc par l’impôt, la formation des étudiants étrangers, qui repartent, pour un grand nombre d’entre eux, dans leurs pays d’origine, une fois leurs études terminées ?

Enfin, monsieur le ministre, pouvez-vous partager avec nous la lecture que fait le Gouvernement de ce jugement ? Quel en sera l’impact sur le financement des établissements de l’enseignement supérieur ? Quelles conséquences entraîne-t-il sur la hausse des frais universitaires pour les étudiants étrangers, décidée dans le cadre du plan Bienvenue en France ?

Applaudissements sur les travées du groupe UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. le ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse.

Debut de section - Permalien
Jean-Michel Blanquer

Monsieur le sénateur Laurent Lafon, je vous prie de bien vouloir excuser l’absence de Mme la ministre de l’enseignement supérieur, Frédérique Vidal, qui est actuellement aux côtés du Président de la République au conseil des ministres franco-allemand.

Vous l’avez rappelé, une question prioritaire de constitutionnalité a été déposée auprès du Conseil constitutionnel à la suite de l’examen d’une requête par le Conseil d’État.

Le Conseil constitutionnel a rendu sa décision le vendredi 11 octobre, selon laquelle le principe de gratuité de l’enseignement supérieur s’applique. Pour autant, des droits d’inscription différenciés peuvent intervenir, dans la mesure où ils restent « modiques ».

Le Conseil a également rappelé que le financement de l’enseignement supérieur devait principalement – mais pas exclusivement – être assuré par l’impôt et qu’il convenait de prendre en compte la situation financière de chaque étudiant.

Le ministère a pris acte de cette décision. Désormais, il reviendra au Conseil d’État de statuer ultérieurement sur le fond de ce litige.

Vous le savez, le plan Bienvenue en France et, de façon plus générale, les enjeux de financement de l’enseignement supérieur font l’objet d’une réflexion collective, dont vous avez rappelé certains tenants et aboutissants.

Pour ce qui concerne le plan Bienvenue en France, la commission de la culture a étudié le sujet en détail voilà quelques mois. Il s’agit de nous donner les moyens d’accueillir mieux un plus grand nombre d’étudiants internationaux. Nous devons améliorer leurs conditions d’accueil, de logement, de suivi de cours de français. Il convient de construire une politique ambitieuse, grâce aux exonérations et aux bourses, parce qu’il s’agit d’un enjeu de rayonnement de la France.

Ce plan conjugue ainsi des droits différenciés, qui sont, il faut le souligner, plafonnés au tiers du coût réel d’une formation, et le triplement des bourses, sans compter les exonérations qui peuvent être décidées directement par les universités – elles ont d’ailleurs été nombreuses à le faire cette année –, dans le cadre du principe d’autonomie que vous avez rappelé.

Chacun pourra le constater, les deux critères dégagés par le Conseil constitutionnel, à savoir la prise en compte des situations individuelles et le financement à titre principal par l’impôt, sont respectés, ce qui peut nous rendre optimistes pour la suite.

Je le rappelle, 324 000 étudiants étrangers poursuivent actuellement leur cursus en France. Notre objectif, c’est de porter ce nombre, en 2027, à 500 000. Les universités du monde se mobilisent, nous devons en faire tout autant, c’est un enjeu essentiel pour la France. Il s’agit d’atteindre le chiffre de 2 % d’étudiants internationaux.

Debut de section - Permalien
Jean-Michel Blanquer

M. Jean-Michel Blanquer, ministre. Le Conseil d’État tranchera dans les prochains mois. Sa décision répondra définitivement aux interrogations qui demeurent à ce stade.

Applaudissements sur l es travées du groupe LaREM.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

M. le président. La parole est à M. Julien Bargeton, pour le groupe La République En Marche.

Applaudissements sur l es travées du groupe LaREM.

Debut de section - PermalienPhoto de Julien Bargeton

Le Président de la République a annoncé en avril un pacte productif, qui a été présenté hier par plusieurs ministres. Il doit fonder un new deal économique, écologique et technologique.

L’industrie française dispose d’atouts, à commencer par ses talents, mais rencontre aussi un certain nombre d’obstacles qui ont été identifiés depuis plusieurs années, comme en témoignent les difficultés anciennes du commerce extérieur.

Si le chômage diminue, …

Sourires ironiques sur les travées du groupe SOCR.

Debut de section - PermalienPhoto de Julien Bargeton

… pour atteindre 8, 5 %, et si l’investissement repart dans les entreprises, …

Mêmes mouvements sur les mêmes travées.

Debut de section - PermalienPhoto de Julien Bargeton

… avec 30 milliards d’euros en deux ans, la bataille de la compétitivité est loin, toutefois, d’être gagnée. Des emplois industriels se créent, mais des sites sont menacés.

Le mérite de ce pacte est de ne pas minimiser les enjeux auxquels nous devons faire face pour répondre à la demande mondiale. Certains secteurs clés doivent devenir exportateurs nets.

Quels sont, selon vous, les leviers principaux pour renforcer notre industrie ? §Ont été évoqués, notamment, les impôts de production, qui sont l’un des sujets à traiter, puisqu’ils représentent – c’est une spécificité française – 70 milliards d’euros. Mais ce n’est pas le seul sujet. Comment l’industrie peut-elle participer au retour au plein emploi à l’horizon de 2025 ? Ce n’est pas une utopie ! En effet, ce sont les salariés qui rendent possible une nation productive.

Debut de section - PermalienPhoto de Julien Bargeton

M. Julien Bargeton. Quelles sont les actions prioritaires, la méthode envisagée et selon quel calendrier ?

Applaudissements sur les travées du groupe LaRE M. – M. Jean-Marc Gabouty applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. le secrétaire d’État chargé du numérique.

Debut de section - Permalien
Cédric O

M. Cédric O, secrétaire d ’ État auprès du ministre de l ’ économie et des finances et du ministre de l ’ action et des comptes publics, chargé du numérique. Monsieur le sénateur Julien Bargeton, je vous remercie de votre question

Rires sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - Permalien
Cédric O

Vous avez eu l’occasion de le dire, effectivement, l’économie française se porte mieux depuis quelques années.

Exclamations ironiques sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - Permalien
Cédric O

C’est ce que disent les chiffres : nous avons aujourd’hui 500 000 chômeurs de moins ; notre croissance est meilleure que celle de nos voisins, notamment de l’Allemagne.

Les exclamations ironiques redoublent.

Debut de section - Permalien
Cédric O

C’est particulièrement vrai dans l’industrie, puisque – je suis heureux que votre assemblée le salue –, pour la première fois depuis dix ans, l’investissement est au plus haut et, pour la première fois depuis dix ans, mesdames, messieurs les sénateurs, nous recréons des emplois industriels. Est-ce suffisant ? Non ! C’est tout l’objet du pacte productif porté par Bruno Le Maire.

Nous vivons aujourd’hui une révolution technologique et industrielle, laquelle, comme les autres révolutions technologiques et industrielles, fera des gagnants et des perdants.

Exclamations sur les travées des groupes SOCR et CRCE.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Taillé-Polian

Et les perdants de l’intérieur, vous en faites quoi ?

Debut de section - Permalien
Cédric O

Tout l’enjeu, c’est de faire en sorte que l’Europe et la France soient au rang des gagnants, notamment dans le domaine numérique, que je connais bien et qui est aujourd’hui en partie dominé par les Américains et les Chinois, même si nous avons des leaders comme Athos Aéronautique ou Dassault Systèmes qui tirent leur épingle du jeu.

Grâce au pacte productif, qui rassemble les collectivités territoriales, les assemblées, les organisations syndicales et patronales, nous voulons travailler sur les stratégies et les leviers qui nous permettront de répondre à la compétition internationale. Ces leviers sont multiples : la fiscalité, avec la question de la baisse des impôts de production ; la nécessité, pour notre pays, de répondre présent dans un certain nombre de secteurs technologiques clés, en particulier l’intelligence artificielle et l’ordinateur quantique ; la formation, question sur laquelle nous travaillons avec Muriel Pénicaud.

Je le répète, l’objectif du pacte productif, en dernier ressort, est de faire en sorte que l’industrie française soit au rendez-vous de la compétition mondiale.

Applaudissements sur les travées du groupe LaREM.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

M. le président. La parole est à Mme Jacqueline Eustache-Brinio, pour le groupe Les Républicains.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Eustache-Brinio

Ma question s’adresse à M. le Premier ministre.

Monsieur le Premier ministre, je souhaite vous interroger à partir de mon expérience, celle d’une élue qui a vu progresser dans nos quartiers le communautarisme

Exclamations sur les travées des groupes SOCR et CRCE.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Eustache-Brinio

Le voile, en 2019, n’est pas anodin, et nous aurions tort de considérer qu’il n’est que l’expression d’une pratique religieuse. D’ailleurs, beaucoup de femmes musulmanes, dans notre pays, ne le portent pas.

Le voile est trop souvent le symbole d’un islam politique, qui considère la femme comme un « objet soumis » plus que comme un « individu émancipé », pour reprendre un qualificatif cher au Président de la République. Nous aurions tort de baisser les yeux et de ne pas voir que le port de signes religieux ostentatoires dans le cadre des sorties scolaires est un instrument de prosélytisme et parfois même de provocation. L’école de la République doit montrer aux petites filles qu’elle ne transige pas avec les principes de laïcité et d’égalité.

Or, sur cette question centrale du respect de la laïcité et de la neutralité religieuse des adultes intervenant dans le cadre de l’école hors les murs, la majorité et le Gouvernement se divisent.

Vous avez tenté, monsieur le Premier ministre, de désamorcer les querelles au sein de votre majorité, mais, une fois de plus, vous avez, en définitive, baissé les bras. Vous ne cessez de dire qu’il faut lutter contre le communautarisme et, en même temps, vous ne cessez de renoncer à agir. Ce n’est pas l’ambiguïté qui contribuera au réarmement moral de notre pays §et au respect des principes qui font la France et qui unissent les Français.

Monsieur le Premier ministre, pouvez-vous nous dire exactement ce que le Gouvernement compte faire vraiment pour lutter contre la communautarisation de notre société et faire respecter les principes de notre République laïque et indivisible ?

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Éliane Assassi

Attendez le débat sur votre proposition de loi !

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. le ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse.

Debut de section - Permalien
Jean-Michel Blanquer

Madame la sénatrice Eustache-Brinio, je vous remercie de votre question, qui porte sur un sujet important : la République. Nous sommes tous très heureux, me semble-t-il, d’avoir en commun l’héritage républicain ; il est ce qui nous unit tous ensemble et ce qui fonde notre contrat social. Nous sommes aussi tous très heureux du principe de laïcité. C’est un trésor qui nous vient de la IIIe République. Cet héritage est extrêmement précieux, d’autant plus qu’il est un outil pour le XXIe siècle.

La laïcité est on ne peut plus moderne ; elle nous est très utile : dans la société d’aujourd’hui, en effet, nous avons besoin d’une République une, de citoyens égaux. Ce point est très important – c’est ce qui nous différencie d’autres pays, y compris de pays voisins. La société anglaise, par exemple, est une société communautariste, avec les dangers que cela représente.

Oui, vous avez raison, donc : la République et la laïcité sont nos outils d’organisation.

Sur le sujet particulier que vous évoquez, qui n’est pas le seul sujet à traiter, tant s’en faut, en matière de laïcité – beaucoup de gens insistent sur celui-là de manière privilégiée, alors que d’autres sont plus importants

Mme Patricia Schillinger applaudit.

Debut de section - Permalien
Jean-Michel Blanquer

D’abord, il y a la radicalisation, contre laquelle le Gouvernement lutte. C’est un sujet très important, sur lequel le Président de la République s’est exprimé en des termes fermes, vous le savez.

Ensuite, il y a la lutte contre le communautarisme, ce dont je viens de parler : l’enjeu républicain d’une société de citoyens égaux veillant en particulier à l’égalité entre les hommes et les femmes.

Enfin, il y a la laïcité, qui s’applique évidemment à toutes les religions et qui est notre bien précieux, parce qu’elle nous permet à tous de vivre ensemble. L’école est la matrice de cette laïcité, et nous devons à chaque enfant, dans sa vie quotidienne, la neutralité politique et religieuse.

La question des sorties scolaires est un enjeu hybride, parce qu’il y va de l’enfant en dehors de l’école, mais dans un cadre qui, en effet, est scolaire. Je l’ai dit, nous ne souhaitons pas une loi, parce qu’une loi créerait plus de problèmes que de solutions : elle serait contre-productive, y compris eu égard à l’enjeu républicain qui consiste à scolariser tous les enfants et à faire en sorte que tous les parents se sentent bienvenus à l’école de la République. En revanche, je l’ai dit aussi, et c’est le sens de l’expression que j’ai utilisée, le voile n’est pas souhaitable. Nous ne souhaitons pas que ce soit un élément qui puisse être interprété comme du prosélytisme dans ces sorties scolaires.

Debut de section - Permalien
Jean-Michel Blanquer

M. Jean-Michel Blanquer, ministre. Et nous sommes capables de mettre en œuvre cette exigence concrètement.

MM. Jean Bizet et Bruno Sido s ’ exclament.

Debut de section - Permalien
Jean-Michel Blanquer

Tout cela me rappelle un adage latin, qui nous vient de la République romaine : in medio stat virtus.

Debut de section - Permalien
Jean-Michel Blanquer

M. Jean-Michel Blanquer, ministre. On peut traduire « virtus » de deux façons : c’est la vertu, mais c’est aussi le courage.

Applaudissements sur les travées des groupes LaREM, RDSE et Les Indépendants.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à Mme Jacqueline Eustache-Brinio, pour la réplique.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Eustache-Brinio

Mme Jacqueline Eustache-Brinio. Je n’ai rien entendu de très concret, mais je ne peux pas croire que, aujourd’hui, vous puissiez rater une occasion de faire montre d’une réelle volonté de lutter contre les velléités de l’islamisme en France, alors que deux Français sur trois sont prêts à soutenir la proposition de loi interdisant le port du voile pendant les sorties scolaires. Franchement, je trouve qu’il y a là un manque de courage !

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

M. le président. La parole est à M. Jérôme Durain, pour le groupe socialiste et républicain.

Applaudissements sur les travées du groupe SOCR.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Durain

Ma question s’adresse au Premier ministre.

Il règne dans ce pays une atmosphère irrespirable.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Pemezec

À cause de vos ambiguïtés et de votre manque de courage !

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Durain

Vendredi dernier, en séance du conseil régional de Bourgogne-Franche-Comté, le président d’un groupe qui n’a rien de républicain a fait dégénérer les échanges, en accusant d’abord les agents de la région d’être touchés par la radicalisation et le communautarisme islamiste, en tweetant ensuite sur la perte d’appétit que provoque chez lui une exposition consacrée à Martin Luther King, en agressant verbalement, enfin, une femme voilée. Des enfants venus découvrir les institutions républicaines sont repartis dans le tumulte et une maman accompagnatrice sous la menace « de l’arrivée des Russes ».

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Durain

M. Jérôme Durain. Certains ont vu dans ces événements une interrogation sur la laïcité. J’y vois surtout la triste expression du racisme.

Exclamations ironiques sur des travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Durain

Que nous croyions au ciel ou que nous n’y croyions pas, nous avons la responsabilité de dénoncer le climat malsain qui règne dans ce pays. Les musulmans, pour ce qu’ils sont, sont pointés du doigt. M. Zemmour, récemment condamné, a son rond de serviette sur les plateaux de télévision. §Dans les universités, des fichages tendancieux commencent à apparaître.

Nous ne tomberons pas dans les pièges tendus par les provocateurs de tous bords.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Durain

M. Jérôme Durain. Notre boussole, c’est la concorde républicaine.

Exclamations sur des travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Durain

Le Président Macron et vous-même, monsieur le Premier ministre, avez rappelé l’état du droit en ce qui concerne la laïcité. Hier encore, quatre-vingt-dix personnalités ont lancé un appel au Président pour condamner les événements de vendredi. Que comptez-vous faire pour endiguer la libération de la parole raciste dans ce pays ?

Vifs applaudissements sur les travées des groupes SOCR et CRCE. – Mme Patricia Schillinger et M. Richard Yung applaudissent également.

Debut de section - Permalien
Édouard Philippe

Une nouvelle fois, notre pays, notre société, cette assemblée se passionnent et se divisent autour d’une question, en l’occurrence celle du voile. Je ne méconnais en rien l’importance de ce sujet, mais, face à ces passions, je me permets de vous répondre, monsieur le sénateur, que ma boussole à moi est le droit et mon cap la lutte contre le communautarisme et la radicalisation.

Le droit est posé depuis longtemps : c’est l’article X de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen et c’est la loi de 1905, qui prévoit deux principes extrêmement exigeants, celui de la neutralité absolue des pouvoirs publics et des agents publics et celui de la liberté de nos concitoyens à croire ou à ne pas croire et à exercer leur culte dans le respect de la loi. Ces principes ne sont pas des petites choses ! Ils sont au cœur de la façon dont nous avons choisi de vivre, et nous y sommes attachés ! Bien entendu, sur ces principes, il arrive que nous ayons des différences d’appréciation.

Nous avons déjà fait évoluer le cadre juridique. En 2004, le Parlement a choisi d’aller plus loin en matière de laïcité, en interdisant le port de signes religieux distinctifs, en l’occurrence du voile, dans les enceintes scolaires : à l’école, au collège et au lycée. Cette loi a été jugée constitutionnelle. C’est donc un principe qui nous oblige. Mais cette loi n’a pas dit que le voile était interdit à l’université, elle n’a pas dit que le voile était interdit lorsque des parents accompagnent bénévolement, volontairement, une sortie scolaire.

Exclamations sur des travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - Permalien
Édouard Philippe

(Mêmes mouvements sur les mêmes travées.) Or il me semble que rappeler la loi de façon précise dans l’hémicycle du Sénat n’est pas inutile et certainement pas critiquable !

Applaudissements sur les travées des groupes LaREM, RDSE, Les Indépendants, SOCR et CRCE, ainsi que sur des travées du groupe UC.

Debut de section - Permalien
Édouard Philippe

Mesdames, messieurs les sénateurs, je rappelle la loi, et la jurisprudence constante qui s’y applique ne dit pas autre chose. §

Ce qu’une loi a fait, une autre loi peut le défaire, …

Debut de section - Permalien
Édouard Philippe

… dans le respect de la Constitution et des principes à valeur constitutionnelle.

J’ai bien compris qu’un certain nombre d’entre vous portait l’idée d’une modification de la loi ; le Parlement aura vocation à en débattre.

La boussole ayant été définie – c’est le droit tel qu’il est aujourd’hui –, le cap me semble devoir être celui de la lutte contre la radicalisation et contre le communautarisme.

Debut de section - Permalien
Édouard Philippe

Or il me semble que, en matière de lutte contre la radicalisation et le communautarisme, il y a des choses incroyablement plus efficaces à faire, incroyablement plus productives, que de légiférer sur l’interdiction du voile lors des sorties scolaires. (Vifs applaudissements sur les travées des groupes LaREM, RDSE, Les Indépendants, SOCR et CRCE, ainsi que sur des travées du groupe UC.)

Je me permets, ce faisant, d’exprimer ma ligne : faire en sorte, suivant ce que le Sénat a proposé par la voie d’une proposition de loi portée par Mme la sénatrice Gatel, d’exercer un contrôle beaucoup plus strict sur les écoles hors contrat au moment de leur création

Applaudissements sur les travées des groupes LaREM, RDSE, Les Indépendants et SOCR, ainsi que sur des travées du groupe UC.

Debut de section - Permalien
Édouard Philippe

Voici ma position : lutte contre la radicalisation, lutte politique contre le communautarisme, lutte à tous les instants, soutien aux enseignants, création des instruments nécessaires. Telle est la position du Gouvernement, la boussole que nous avons choisie, le cap que nous suivons !

Applaudissements sur les travées des groupes LaREM, RDSE, Les Indépendants et SOCR, ainsi que sur des travées des groupes UC et CRCE.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. Jérôme Durain, pour la réplique.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Durain

Il y a ce que vous avez dit, monsieur le Premier ministre ; il y a aussi une forme de racisme, qu’il faut dissiper.

Des vents mauvais soufflent sur notre société. Il faut dissiper la confusion, apaiser les tensions et ramener tous nos concitoyens vers la République.

Applaudissements sur les travées des groupes SOCR et CRCE.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à Mme Isabelle Raimond-Pavero, pour le groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Raimond-Pavero

Monsieur le Premier ministre, c’était au tour des pompiers professionnels, hier, de manifester contre le manque de réponse du Gouvernement. En grève depuis des mois parce qu’ils assurent des missions qui ne sont plus leur cœur de métier, avec une forte augmentation des incendies, ils joignent leurs revendications à celles des personnels des hôpitaux, eux-mêmes débordés par l’explosion de l’ensemble des services hospitaliers, notamment des urgences.

Toutes les professions au cœur des grandes missions de l’État sont en crise profonde.

Les policiers vous ont exprimé récemment leur colère ; le suicide récent d’une directrice d’école, la tentative de suicide d’une principale montrent que l’éducation nationale n’est pas épargnée.

Cette colère généralisée exprime avant tout une crise de l’autorité de l’État, vertu capitale pour une société.

Ces professions qui enseignent, qui soignent, qui nous protègent en ont assez des grands discours qui ponctuent une situation en incessante dégradation, assez de leurs conditions de travail, assez de la violence croissante dont ils sont victimes parce qu’ils représentent l’État.

Lorsque l’on touche à un pompier ou à un enseignant, lorsque l’on insulte un médecin, c’est la République que l’on défie. Cette année, 1 272 agressions de pompiers ont déjà été recensées, et 312 pompiers ont été blessés.

Nous avons le sentiment que vous assistez en spectateur à une situation qui vous échappe. Pourtant, c’est bien une décomposition de l’État républicain qui se produit sous nos yeux – les événements d’hier en témoignent parfaitement. L’État régalien n’assure plus sereinement, comme il le devrait, ses grandes missions de service public.

Comptez-vous, monsieur le Premier ministre, répondre à la colère et aux angoisses des agents qui rendent service au public ? Qu’avez-vous à dire aux pompiers, aux personnels soignants, aux enseignants, aux policiers, dont la situation se dégrade de manière accélérée ?

Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. le secrétaire d’État auprès du ministre de l’intérieur.

Debut de section - Permalien
Laurent Nunez

Les sapeurs-pompiers étaient en effet dans la rue hier, …

Debut de section - Permalien
Laurent Nunez

… pour une manifestation qui visait à exprimer les difficultés qu’ils rencontrent dans l’exercice de leurs missions. Ces difficultés, le Gouvernement les connaît parfaitement, et, vous le savez, madame la sénatrice, nous y travaillons, en concertation avec les organisations syndicales concernées.

Vous avez évoqué la question importante des agressions dont sont victimes les sapeurs-pompiers, souvent du fait même des personnes qu’ils vont secourir, parce qu’elles ont des difficultés psychologiques ou sont sous l’emprise de l’alcool. Il existe bien une montée des violences ; nous la prenons en compte, dans le cadre de conventions de coordination passées avec les policiers et avec les gendarmes et destinées à mieux encadrer l’intervention des sapeurs-pompiers. Comme vous l’avez souhaité, ces derniers interviennent désormais munis de caméras-piétons, et nous allons approfondir ce dispositif afin de faire baisser le niveau des agressions.

Je précise que cette action est menée dans le cadre d’une grande concertation avec les organisations syndicales de sapeurs-pompiers. Celles-ci ont été reçues par le ministre de l’intérieur en marge du congrès de Vannes, puis, hier, au cabinet du ministre. Nous allons poursuivre cette discussion dans les jours qui viennent : des réunions importantes auront lieu les 6 et 14 novembre, réunissant le ministre de l’intérieur, les organisations syndicales et les collectivités employeuses pour traiter, par exemple, la question de la prime de feu ou celles ayant trait au recrutement.

De manière générale, soyez assurée, madame la sénatrice, que ce gouvernement met tout en œuvre pour que l’action des services régaliens, qu’il s’agisse, évidemment, de la sécurité civile, des sapeurs-pompiers, mais aussi de nos policiers et de nos gendarmes, s’effectue dans les meilleures conditions possible. Je pense aux efforts que nous faisons en matière de recrutement, en matière d’équipement, en matière budgétaire, en matière indemnitaire, en direction tant des sapeurs-pompiers que des policiers et des gendarmes. Notre attention est totalement portée vers eux, afin qu’ils puissent exercer leurs missions dans des conditions de sécurité optimales.

Applaudissements sur des travées des groupes LaREM et RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à Mme Isabelle Raimond-Pavero, pour la réplique.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Raimond-Pavero

Mme Isabelle Raimond-Pavero. J’entends votre réponse, monsieur le secrétaire d’État, mais il y a urgence à agir efficacement pour garantir l’unité de la France.

Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour le groupe Union Centriste.

Applaudissements sur les travées du groupe UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Nathalie Goulet

Ma question s’adresse à M. le ministre de l’intérieur. Elle est aux confins de deux sujets que nous avons déjà évoqués : le Brexit et le terrorisme.

Le Brexit, avec ou sans accord, se traduira par un recul significatif de la coopération policière et judiciaire entre les pays de l’Union européenne et la Grande-Bretagne et par une fragilisation de l’acquis des leviers d’action que nous avions mis en place ces dernières années au service de notre sécurité. Une faille majeure est ainsi créée dans la sécurité européenne, d’autant que le Royaume-Uni est l’un des pays les plus touchés par le terrorisme. Il est le deuxième pays occidental, après la France, s’agissant du phénomène des filières syriennes, qui revient au cœur de l’actualité.

Le Royaume-Uni ne pourra plus utiliser le système d’information Schengen, qui permet notamment d’alerter sur les déplacements. Fini également l’accès au PNR, au système européen d’information et d’autorisation concernant les voyages ou à la base de données qui répertorie les empreintes digitales de tous les demandeurs d’asile et immigrés illégaux. De la même façon, il n’y aura plus de mandat d’arrêt européen pour le Royaume-Uni.

Ma question est simple : quelles dispositions sont-elles prévues pour combler les failles qui vont immanquablement résulter du Brexit ?

Applaudissements sur l es travées du groupe UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. le secrétaire d’État auprès du ministre de l’intérieur.

Debut de section - Permalien
Laurent Nunez

Madame la sénatrice Nathalie Goulet, je vous sais très au fait de ces questions. Comme vous le savez, la coopération en matière de lutte antiterroriste est aussi une coopération entre les services de renseignement intérieur.

Cette coopération entre tous les services de renseignement intérieur au sein de l’Union européenne, mais en dehors du cadre de l’Union européenne, a été accentuée depuis les attentats qui nous ont frappés en 2015 ; elle est extrêmement productive et va évidemment se poursuivre. Elle s’exerce à la fois dans un cadre bilatéral, directement entre les services français et britanniques, et dans un cadre multilatéral, mais informel. J’insiste bien : cette coopération se déroule en dehors du cadre du traité de l’Union européenne – aucune difficulté, donc, de ce point de vue – et elle se pratique tous les jours.

Il est tout à fait exact – vous avez raison de le souligner – que, pour partie, cette coopération utilise des outils prévus par des textes européens. Vous avez cité notamment le PNR et le système d’information Schengen, qui comprend notamment un fichier des personnes recherchées. Le Brexit aura nécessairement une conséquence sur l’utilisation de ces outils.

Néanmoins, une sortie sans accord ou avec accord ne dépend pas uniquement de nous. Si accord il doit y avoir, il est bien évident que celui-ci comportera un volet afin de continuer à utiliser ces outils européens. S’il devait ne pas avoir d’accord, nous ouvririons des discussions.

À ce stade, madame la sénatrice, il ne nous appartient pas de nous prononcer sur des décisions qui nous sont imposées. Dans le cadre d’un accord, il y aura un volet sur la sécurité intérieure, mais je ne peux pas vous faire d’autre réponse que de vous renvoyer à nos partenaires britanniques.

M. Olivier Cadic applaudit.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour la réplique.

Debut de section - PermalienPhoto de Nathalie Goulet

Je vous remercie de votre réponse, monsieur le secrétaire d’État.

La délégation parlementaire au renseignement a rendu il y a quelques semaines un rapport alarmiste sur la situation, notamment en ce qui concerne la sécurité et les conséquences du Brexit. Très souvent, dans ce genre de situation, nous sommes dans l’ex post. N’attendons pas le 31 octobre !

Je sais très bien que les services continuent à travailler, mais il devient important de prendre des mesures urgentes. Il faut faire une évaluation des besoins.

Le problème des mandats européens est extrêmement sérieux. Nous risquons d’importantes déconvenues judiciaires avec un certain nombre de personnes indésirables sur notre territoire que nous ne pourrons plus poursuivre faute d’outils. Je vous demande donc de prendre les dispositions qui s’imposent avant qu’il ne soit trop tard.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

M. le président. La parole est à Mme Florence Lassarade, pour le groupe Les Républicains.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Florence Lassarade

La réforme des retraites proposée dans votre rapport, monsieur Delevoye, inquiète les femmes mères de famille. Actuellement, les mères de famille valident huit trimestres dans le secteur privé par enfant né ou adopté et quatre trimestres dans le public. C’est ce qu’on appelle la majoration de durée d’assurance.

La réforme envisagée vise à supprimer les dispositifs actuels pour les remplacer par une majoration retraite de 5 % par enfant dès le premier enfant. Cette bonification pourra éventuellement être transférée au père ou partagée avec lui.

La retraite des femmes est actuellement inférieure de 38 % à celle des hommes. C’est en grande partie dû à la maternité, qui conduit un grand nombre de femmes à prendre du temps pour leur enfant, à renoncer à une promotion, à prendre un temps partiel ou un congé parental. Pour beaucoup de mères n’ayant pas des carrières complètes, l’attribution d’une retraite qui soit le strict reflet de leurs périodes d’activité sera défavorable par rapport au système actuel.

Il est particulièrement injuste de bonifier la retraite d’un parent en pourcentage, en lésant les mères dont les carrières sont incomplètes, mais aussi celles ayant de petits salaires. Il serait particulièrement inéquitable que la réforme des retraites accroisse l’écart de niveau de retraites au détriment des mères.

Monsieur le haut-commissaire, cette majoration de 5 % se substituera-t-elle à la majoration de durée d’assurance, pénalisant ainsi les femmes ayant élevé plusieurs enfants ?

Par ailleurs, cette loi aura-t-elle un effet rétroactif en supprimant les droits acquis par les femmes ayant eu des enfants avant l’entrée en vigueur de la réforme en 2025 ?

Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - Permalien
Jean-Paul Delevoye

Chère madame, je sais tout l’intérêt qu’il faut porter à la situation des femmes dans le futur système universel des retraites. Notre cap est clair : les mêmes règles pour tous, l’universalité et la recherche de l’équité.

Vous l’avez souligné, quand vous êtes maman dans le secteur public ou dans le secteur privé, vous ne bénéficiez pas de la même majoration de durée. C’est injuste ! Par ailleurs, s’il y a une majoration de durée dans le système actuel, il n’y a aucune majoration de pension pour le premier enfant, pour le deuxième enfant, pour le quatrième enfant et pour le cinquième enfant.

Le dispositif a été créé pour compenser les préjudices de carrière. Vous l’avez souligné à juste titre, l’Insee, en 2019, a indiqué qu’il existait une perte de 25 % des revenus salariaux des femmes. Le taux d’activité des hommes et des femmes au troisième enfant avant que celui-ci n’ait trois ans est de 70 % pour les hommes, contre 30 % pour les femmes. Résultat : ce dispositif bénéficie aujourd’hui à deux tiers des hommes !

Nous avons décidé de compenser ce phénomène par une majoration proportionnelle dès le premier enfant, de façon à ce que l’écart de 40 % des pensions entre les hommes et les femmes, qui tombe à 25 % avec la réversion, puisse, dans nos simulations, sur les générations 80-90, augmenter les pensions en moyenne des femmes de 5 % à 10 %.

Debut de section - PermalienPhoto de Ladislas Poniatowski

M. Ladislas Poniatowski. Je n’ai rien compris !

Rires sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Bruno Retailleau opine.

Debut de section - Permalien
Jean-Paul Delevoye

Nous avons réalisé des simulations : nous parlerons chiffres contre chiffres, simulations contre simulations, et nous ne nous contenterons pas de slogans !

Enfin, nous augmentons le minimum contributif à 1 000 euros, ce qui apportera une amélioration pour les femmes, notamment celles à temps partiel.

Le Conseil d’orientation des retraites a indiqué que le dispositif que nous mettions en place était favorable aux carrières heurtées et courtes. Il concerne donc, notamment, les femmes.

Debut de section - Permalien
Jean-Paul Delevoye

M. Jean-Paul Delevoye, haut-commissaire. Voyez-vous, nous avons la prétention d’aller vers davantage de redistribution en faveur des femmes dans le système universel !

Applaudissements sur des travées du groupe LaREM.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. Dominique Théophile, pour le groupe La République En Marche. (Applaudissements sur les travées du groupe LaREM.)

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Théophile

Ma question s’adresse à la ministre des outre-mer.

En Guadeloupe, en Martinique et en Guyane, le journal France-Antilles ou France-Guyane appartient à un groupe de presse en cessation de paiement. L’unique quotidien régional sera bientôt, peut-être dans un mois et demi, en liquidation.

Ces territoires doivent pouvoir conserver une presse vivante et pluraliste, une presse qui a contribué au développement de la citoyenneté, de la liberté d’opinion et de la démocratie dans nos îles. Les mutations technologiques des réseaux sociaux et les changements dans les habitudes de consommation mettent cependant en cause la survie de ce journal. Sa disparition signifierait la perte cumulée de deux cent cinquante-trois emplois à haut niveau de qualification en Guadeloupe, en Martinique et en Guyane. Ces emplois sont occupés en grande partie par des originaires. Leur niveau de spécialisation rendra leur réembauche difficile, voire impossible en cas de liquidation.

Ce quotidien est aujourd’hui constitutif du patrimoine de ces territoires. Depuis plus de cinquante-trois ans, il rythme notre vie quotidienne, il doit être à ce titre préservé. C’est pourquoi il est nécessaire de mobiliser l’ensemble des aides au pluralisme de la presse périodique régionale.

Le Conseil constitutionnel et le Conseil d’État ont consacré, dans leur jurisprudence, la valeur constitutionnelle du pluralisme de la presse écrite. Ils ont également admis qu’un soutien public accru devrait être apporté à la presse d’information politique et générale. Je vous prie, madame la ministre, de nous faire connaître les mesures que le Gouvernement entend prendre pour maintenir une presse quotidienne régionale vivante, ainsi que les nombreux emplois, si importants pour des territoires touchés par un chômage de masse qui en dépendent.

Applaudissements sur l es travées du groupe LaREM.

Debut de section - Permalien
Annick Girardin

Monsieur le sénateur Théophile, vous avez raison, la presse écrite quotidienne en outre-mer connaît malheureusement des difficultés, qu’il s’agisse des Antilles, de la Guyane ou de La Réunion. Cela nous impose de repenser ensemble deux choses : d’abord, le modèle économique du secteur ; ensuite, le renouvellement de l’offre aux lecteurs, dont les pratiques évoluent, nous le savons tous. Il est nécessaire d’envisager la question de l’adaptation dans les territoires d’outre-mer.

Le groupe France-Antilles est l’éditeur du premier quotidien de presse en Guadeloupe, en Martinique et en Guyane. Concrètement, 285 salariés sont répartis entre ces trois territoires – idem à La Réunion pour deux quotidiens.

Le groupe France-Antilles a été placé en redressement judiciaire le 25 juin. Le tribunal de commerce de Fort-de-France se prononcera à la fin du mois de novembre. Des offres de reprise sont d’ores et déjà déposées. Le Gouvernement est mobilisé depuis quelques mois sur ce sujet et a pris trois décisions.

Premièrement, une inspection IGA-IGAC doit formuler des propositions avant la fin de l’année sur le soutien à apporter à ce secteur.

Deuxièmement, des outils pour faciliter la trésorerie sont prévus. Nous avons notamment décidé d’échelonner dans le temps les dettes sociales et fiscales de certains de ces organismes.

Troisièmement, je l’ai défendu devant le CIOM, le comité interministériel des outre-mer, le comité interministériel de restructuration industrielle, le CIRI, qui a pour mission d’aider les entreprises en difficulté avec des solutions définies entre actionnaires et créanciers, doit agir sur ces questions. Le Premier ministre l’a acté et validé. C’est aujourd’hui chose faite. Ces trois engagements seront tenus !

Debut de section - Permalien
Annick Girardin

Mme Annick Girardin, ministre. Comme vous l’avez souligné, le dynamisme d’une presse régionale est fondamental dans nos territoires d’outre-mer comme partout. C’est le droit à l’information, et c’est bien sûr aussi la vie démocratique qu’il nous faut défendre !

MM. Jean-Marc Gabouty et François Patriat applaudissent.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

M. le président. La parole est à M. Didier Mandelli, pour le groupe Les Républicains.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Mandelli

Ma question s’adresse à la fois au ministre de l’économie et à la ministre du travail.

Le 10 octobre dernier, le groupe Michelin, fleuron industriel français, leader mondial du pneumatique, a annoncé la fermeture définitive du site de La Roche-sur-Yon. Après Joué-lès-Tours en 2013 et 730 emplois supprimés, cette décision met fin à la production de pneus destinés aux poids lourds en France.

Six cent dix-neuf hommes et femmes hautement qualifiés sont concernés et vont perdre leur emploi. La moyenne d’âge des salariés est de trente-neuf ans, et beaucoup ont été recrutés ces cinq dernières années dans le cadre du plan Skipper, qui prévoyait 100 millions d’euros d’investissement et 200 recrutements. Ce sont 70 millions qui ont été investis. Des femmes et des hommes ont consenti beaucoup d’efforts pour améliorer la productivité du site. Cela n’a apparemment pas suffi, et le couperet est tombé brutalement.

Michelin propose 120 millions d’euros pour accompagner la reconversion de l’usine, suggère la mobilité interne pour des personnes qui ont construit leur vie familiale et professionnelle en Vendée, pour certains depuis plus de trente ans. C’est une vue de l’esprit !

La présidente de la région Pays de la Loire, Christelle Morançais, et Bruno Retailleau ont obtenu le remboursement des aides régionales accordées à Michelin. Est-ce que l’État fera la même démarche pour une part du CICE ? L’État sera-t-il présent aux côtés des salariés et des élus locaux, dont le maire de La Roche-sur-Yon, Luc Bouard, et le président du département, Yves Auvinet, pour obtenir toutes les garanties et amortir les conséquences de ce drame économique et humain à long terme ?

Cette malheureuse actualité illustre les travers de notre économie. Plus généralement, comment l’État entend-il œuvrer pour préserver et développer l’industrie dans notre pays ?

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. le secrétaire d’État chargé du numérique.

Debut de section - Permalien
Cédric O

Monsieur le sénateur Mandelli, votre question jette une lumière assez vive sur la question posée précédemment par le sénateur Bargeton concernant l’urgence d’un pacte productif.

Le problème de Michelin à La Roche-sur-Yon, c’est l’émergence des concurrents chinois. Ceux-ci émergent dans le numérique, dans l’industrie, mais aussi dans des secteurs comme les pneus, où la France comptait pourtant des entreprises parmi les meilleures du monde. Il est donc nécessaire de mener des actions défensives, mais également des actions offensives pour pouvoir nous battre à la hauteur de la compétition mondiale.

S’agissant du site de La Roche-sur-Yon, le président de Michelin s’est engagé à accompagner l’ensemble des salariés. Je puis vous assurer que, avec Bruno Le Maire et Muriel Pénicaud, nous ferons en sorte de veiller à ce que chacun des 619 salariés du site Michelin soit accompagné jusqu’à ce qu’il trouve un emploi.

Debut de section - Permalien
Cédric O

Le site de La Roche-sur-Yon est un bassin d’emplois industriels dynamique. J’ai eu l’occasion, quand j’étais dans l’industrie, de travailler sur le sujet. Il faut donc que chaque salarié retrouve un emploi dans les semaines et les mois à venir. Le Gouvernement y sera très attentif.

Enfin, monsieur le sénateur, il est aberrant de constater que des pneus moins chers, mais aussi moins durables, se vendent mieux et évincent des technologies françaises plus durables et plus écologiques. C’est également un sujet sur lequel le Gouvernement souhaite se mobiliser. Bruno Le Maire et Agnès Pannier-Runacher ont demandé un contrôle express à la DGCCRF. Nous voulons porter ce débat au niveau européen pour faire respecter à la fois nos ambitions industrielles et nos objectifs écologiques.

Applaudissements sur des travées du groupe LaREM.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. Didier Mandelli, pour la réplique.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Mandelli

Dans le projet de loi Économie circulaire, nous avons intégré l’obligation d’inclure dans la commande publique des pneus issus des filières qualitatives françaises.

Plus généralement, je n’ai pas à être convaincu ou pas par votre réponse, monsieur le secrétaire d’État. Ce sont les salariés qui doivent l’être. Nous le leur demanderons.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à Mme Sylvie Robert, pour le groupe socialiste et républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SOCR.)

Debut de section - PermalienPhoto de Sylvie Robert

Par sa décision du 11 octobre dernier, le Conseil constitutionnel a tiré du treizième alinéa du préambule de la Constitution de 1946 l’exigence constitutionnelle selon laquelle « la gratuité s’applique à l’enseignement supérieur public ». Des frais d’inscription « modiques » peuvent néanmoins être perçus, en tenant compte des « capacités financières des étudiants ».

À travers cette décision, qui fait suite à la volonté du Gouvernement d’augmenter brutalement et de manière importante les droits d’inscription pour les étudiants extracommunautaires, il est rappelé que l’égal accès devant l’instruction, aux fondements du projet émancipateur de la République, ne s’arrête pas aux portes de l’enseignement supérieur public et que ce principe ne peut être entravé pour des motifs pécuniaires.

Dans l’attente de la décision du Conseil d’État, Mme la ministre de l’enseignement supérieur a dit « vouloir garder la stabilité du système d’enseignement supérieur public ». Très bien ! Mais, comme le dit le poète, « être patient, ce n’est pas attendre, c’est agir en attendant ». Comment allez-vous anticiper ces décisions, monsieur le ministre ? Envisagez-vous, par exemple, de revenir sur l’arrêté ministériel relatif aux frais d’inscription différenciés des étudiants étrangers hors Union européenne ? Plus globalement, comment comptez-vous sécuriser et assurer la pérennité du financement de l’enseignement supérieur public, qui risque, on le sait, d’être profondément bouleversé ?

Applaudissements sur les travées du groupe SOCR.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. le ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse.

Debut de section - Permalien
Jean-Michel Blanquer

Madame la sénatrice Sylvie Robert, je répondrai encore une fois en lieu et place de Mme la ministre de l’enseignement supérieur, Frédérique Vidal, et je terminerai l’explication de texte de ce que j’ai commencé tout à l’heure.

N’oubliez pas que j’étais auparavant un professeur de droit constitutionnel. Je n’ignore donc pas la non-contradiction entre la décision du Conseil constitutionnel et le dispositif que le Gouvernement a voulu mettre en place, avec l’approbation du Parlement. En effet, les deux principes que j’ai rappelés tout à l’heure sont parfaitement respectés : d’une part, le principe d’individualisation, qui vise à tenir compte de la situation sociale de chaque étudiant ; d’autre part, le principe de financement prioritairement par l’impôt de l’enseignement supérieur.

En revanche, il existe un besoin de précision. C’est pourquoi nous devons attendre la future jurisprudence du Conseil d’État. Néanmoins, nous sommes sereins, car le terme utilisé par le Conseil constitutionnel est celui de « modique ». Or nous sommes modiques dans nos perspectives, puisque nous avons limité à un tiers le plafond de ce qu’un étudiant étranger pourrait payer. N’oublions pas que, si ce n’est pas l’étudiant qui paye, c’est le contribuable français. Il est légitime que nous soyons attentifs à ce point.

Quoi qu’il en soit, nous respectons le principe de gratuité dès lors que la somme demandée est modique, ce qui est bien le cas. Le Conseil d’État appréciera la chose de façon précise et qui fera autorité. Nous avons donc tout lieu d’être sereins, d’autant que, sur le plan social – j’aurais peut-être une différence de point de vue avec vous –, comme je l’ai rappelé tout à l’heure, la ministre a lancé le plan Bienvenue en France. Ce plan nous permet d’être plus accueillants et d’avoir plus d’étudiants : c’est un enjeu pour la France, pour sa force et sa puissance. Il importe de le faire dans les meilleures conditions.

Aussi bien quantitativement que qualitativement, notre proposition conduit à des améliorations et à plus de justice fiscale. Elle cumule beaucoup d’avantages. Voilà pourquoi nous sommes sereins par rapport à la future jurisprudence.

Applaudissements sur des travées du groupe LaRE M. – M. Jean-Marc Gabouty et Mme Françoise Gatel applaudissent également.

Debut de section - PermalienPhoto de Sylvie Robert

Nous avons bien compris que le débat, même s’il est plus large, tournera autour du terme « modique ». C’est votre prisme. Mais la question doit être également examinée au regard de l’exigence de gratuité et d’égalité. Je ne suis pas certaine que payer plus de 2 000 euros de frais d’inscription pour une formation soit une somme modique pour les étudiants et leur famille.

Debut de section - PermalienPhoto de Sylvie Robert

Mme Sylvie Robert. Nous souhaitons un vrai débat parlementaire, car il s’agit de l’enjeu et du financement de notre enseignement supérieur public demain.

Applaudissements sur les travées des groupes SOCR et CRCE.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

M. le président. La parole est à M. Jean Louis Masson, pour la réunion administrative des sénateurs ne figurant sur la liste d’aucun groupe.

Ah ! sur diverses travées.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Louis Masson

Ma question s’adresse à M. le Premier ministre.

Monsieur le Premier ministre, par le passé, les immigrés qui venaient en France voulaient s’intégrer dans notre société. §trouvent leur vivier de recrutement dans le communautarisme radicalisé. Cette radicalisation recrute elle-même dans le communautarisme ordinaire. Il est urgent de réagir.

J’approuve la ministre des collectivités territoriales, qui suggère d’interdire le port du voile islamique dans les assemblées des collectivités territoriales. J’approuve aussi la position du ministre de l’éducation nationale, qui ne souhaite pas que les parents qui accompagnent les sorties scolaires portent le voile islamique. Cependant, au Gouvernement, d’autres ministres disent le contraire et soutiennent le communautarisme islamique

Exclamations sur les travées du groupe LaREM.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Louis Masson

Monsieur le Premier ministre, oui ou non êtes-vous favorable au port du voile islamique dans les assemblées des collectivités territoriales ? Oui ou non êtes-vous favorable au port du voile islamique par les parents qui accompagnent les enfants dans les écoles ?

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à Mme la secrétaire d’État auprès du Premier ministre, porte-parole du Gouvernement.

Debut de section - Permalien
Sibeth Ndiaye

Mme Sibeth Ndiaye, secrétaire d ’ État auprès du Premier ministre, porte-parole du Gouvernement. Monsieur le sénateur, je crois comprendre, aux murmures qui se sont élevés sur ces travées, que vous êtes manifestement habitué à toutes les formes d’outrance.

Applaudissements sur des travées du groupe SOCR. – Exclamations sur des travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - Permalien
Sibeth Ndiaye

Il est important, comme le Premier ministre l’a fait, de rappeler quels sont les fondements de notre République et la manière dont le fait religieux est encadré dans l’espace de la République française. La loi de 1905, le Premier ministre l’a rappelé, fixe ce cadre et détermine le fait que, en France, c’est l’État qui est laïque et non pas la société. Cela signifie que l’État laïque a un devoir de neutralité, qui s’incarne dans les agents de la fonction publique. C’est la raison pour laquelle un professeur ne peut pas porter la kippa ou le voile à l’école.

Ce cadre juridique a été complété il y a quelques années, en 2004, afin que l’école soit un espace sacré, si j’ose dire, un espace de protection, qui permette aux enfants d’être éduqués dans les valeurs de notre pays. Voilà pourquoi les signes religieux ostentatoires sont interdits pour les élèves mineurs à l’école.

Le législateur de 2004 a également fait le choix d’autoriser le voile pour les parents accompagnateurs de sorties scolaires dans la mesure où ces adultes ne font pas de prosélytisme à l’égard des élèves. Comme le Premier ministre l’a souligné, nous sommes extrêmement résolus à lutter contre toutes les formes de communautarisme religieux et contre toutes les formes de radicalisation religieuse.

Nous sommes, monsieur le sénateur, tout aussi fermes pour dénoncer toutes les stigmatisations à l’intention de nos compatriotes en raison de leur appartenance à une religion, en particulier à la religion musulmane. Nous sommes une nation ouverte, mais une nation ferme dans ses principes et qui lutte sans relâche contre la radicalité et le communautarisme.

Applaudissements sur les travées du groupe LaREM, ainsi que sur des travées du groupe SOCR.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. Jean Louis Masson, pour la réplique.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Louis Masson

M. Jean Louis Masson . C’est aux gens qui viennent dans notre pays de s’adapter à nos règles de vie et non à nous de subir les leurs !

Vives exclamations sur les travées des groupes SOCR et CRCE.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Louis Masson

Voilà où nous en sommes ! C’est la négation de la laïcité !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Louis Masson

M. Jean Louis Masson. Selon moi, le conseiller régional du Rassemblement national qui a posé le problème mériterait une décoration, car il a raison !

Mme Christine Herzog applaudit. – Protestations sur diverses travées.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

Nous en avons terminé avec les questions d’actualité au Gouvernement.

Les prochaines questions d’actualité au Gouvernement auront lieu mercredi 23 octobre, à quinze heures.

Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux quelques instants.

La séance est suspendue.

La séance, suspendue à seize heures vingt-cinq, est reprise à seize heures trente-cinq, sous la présidence de M. Jean-Marc Gabouty.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Gabouty

La parole est à M. Jean Louis Masson, pour un rappel au règlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Louis Masson

Mon rappel au règlement concerne le déroulement des réunions en commission.

Il arrive que les délais prévus pour débattre au sein des commissions ne soient pas suffisants. Ainsi m’a-t-on dit ce matin lors d’une de ces réunions – ce n’est pas la première fois que ça arrive, raison pour laquelle je soulève le problème – que, l’ordre du jour étant très long, ce n’était pas la peine que je défende des amendements, car je pourrai le faire lors de la séance publique.

Si des réunions en commission sont prévues, c’est bien pour qu’on puisse y défendre des amendements, et non pour qu’on nous dise de le faire en séance ! J’ai quitté cette réunion de la commission des lois, considérant que ce n’était pas correct.

Je voudrais qu’on veille à ce que, comme le règlement du Sénat nous y oblige, les dossiers à l’ordre du jour soient traités complètement lors des réunions en commission et que nous ne soyons pas tributaires de telle ou telle contrainte liée à l’ordre du jour ou aux délais de discussion !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Gabouty

Acte vous est donné de votre rappel au règlement, monsieur Masson.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Gabouty

L’ordre du jour appelle la désignation des 37 membres de la commission spéciale chargée d’examiner le projet de loi relatif à la bioéthique.

En application de l’article 8 bis, alinéa 3, de notre règlement, les listes des candidats présentés par les groupes ont été publiées.

Ces candidatures seront ratifiées si la présidence ne reçoit pas d’opposition dans le délai d’une heure prévu par notre règlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Gabouty

L’ordre du jour appelle l’examen des conclusions de la commission mixte paritaire chargée d’élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion de la proposition de loi relative à la création du Centre national de la musique (texte de la commission n° 725 [2018-2019], rapport n° 724 [2018-2019]).

Dans la discussion générale, la parole est à M. le rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Raymond Hugonet

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous sommes réunis aujourd’hui pour donner la touche finale à la proposition de loi créant le Centre national de la musique, qui, plus qu’attendu, était espéré par toute la profession depuis 2011, date à laquelle un certain député Franck Riester l’avait évoqué pour la première fois dans un rapport. Il aura fallu attendre que ce député accède à la fonction de ministre de la culture pour que ce véritable serpent de mer englué dans les sables politiques et administratifs voie enfin le jour. Comme quoi, la persévérance et la continuité paient !

Il a cependant été nécessaire – je tiens à le rappeler – de joindre à vos efforts, monsieur le ministre, ceux de l’Assemblée nationale. La proposition de loi déposée par Pascal Bois et plusieurs députés, elle-même précédée d’un important travail d’analyse mené avec Émilie Cariou, à laquelle je voudrais également rendre hommage, a permis à ce projet de trouver enfin une forme concrète, précise, et de vaincre les scepticismes et les oppositions, et ils furent nombreux.

Le Sénat, qui a toujours soutenu la filière musicale et les artistes, notamment du côté de sa commission de la culture, a bien volontiers choisi de jouer le jeu. C’est donc très naturellement que notre commission a travaillé, consciente de la fragilité des équilibres atteints avec la profession, mais déterminée à faire progresser les thèmes qui lui sont chers.

Je veux citer comme étant des apports fondamentaux de notre assemblée : l’inscription des notions d’égale dignité des répertoires ainsi que celle, si importante pour nous et notre présidente Catherine Morin-Desailly, de droits culturels au sein même du corpus de règles qui doivent présider au fonctionnement du CNM ; le renforcement de la mission transversale de développement territorial, en octroyant au CNM la possibilité de conclure des contrats et de nouer des partenariats avec les collectivités territoriales et les acteurs de la filière musicale ; l’élargissement de la composition du conseil professionnel à l’ensemble des organisations concernées par l’action du CNM, afin de permettre aux collectivités territoriales et aux structures publiques de la musique en régions d’y siéger.

Le très large accord recueilli en commission, puis en séance publique au Sénat, sur la proposition de loi permettait d’espérer une commission mixte paritaire conclusive. Celle-ci s’est réunie le 17 septembre dernier, et je suis heureux de dire qu’elle s’est achevée assez rapidement par un accord qui conserve l’intégralité des apports du Sénat. Il semble d’ailleurs, depuis quelque temps, régner en matière culturelle une heureuse convergence de vue entre les deux assemblées. Cela marque, j’en suis intimement persuadé, que, en matière de création et de soutien aux artistes, les députés et les sénateurs sont liés par une vision commune et, surtout, partagée de l’intérêt général. Je suis d’ailleurs heureux de pouvoir souligner la qualité de nos échanges avec Pascal Bois, auteur de la proposition de loi et rapporteur, ainsi qu’avec vous-même et vos services, monsieur le ministre : vous avez contribué à faire de cette proposition de loi de l’Assemblée nationale un texte qui nous rassemble.

Maintenant, nous n’allons pas nous contenter d’avoir adopté une belle loi bien écrite. Derrière le texte, il y a la réalité de cette structure à créer et à faire vivre au service de la musique. Il reste encore quelques écueils sur le chemin, et pas des moindres.

Premier écueil : la question des moyens, et tout d’abord ceux attribués par l’État.

Le projet de loi de finances pour 2020 a levé une partie des doutes, en affectant 7, 5 millions d’euros au CNM, auxquels il faut ajouter un demi-million d’euros en provenance du CNV.

Sans déflorer un débat budgétaire que nous aurons dans quelques semaines, et qui sera mené par notre rapporteure Françoise Laborde, je tiens, à titre personnel, à exprimer ma satisfaction quant à ce montant, qui correspond à environ un tiers de l’objectif cible de 20 millions d’euros. Cette somme devrait permettre au CNM d’amorcer ses travaux lors de sa première année de fonctionnement. Ainsi, le CNM ne devrait pas passer du statut peu enviable de serpent de mer à celui, encore moins enviable, de coquille vide !

Ma satisfaction est toutefois tempérée, car je ne trouve nulle trace d’un quelconque engagement pour les années à venir. Et si les mots ont un sens, leur absence est parfois tout aussi éloquente…

Sachez donc, monsieur le ministre, que nous serons vigilants à ce que l’État assume bien sa part au long cours et dans des proportions propres à susciter l’enthousiasme et joue un rôle incitatif à l’égard des financeurs privés.

Parlons-en, justement, des opérateurs privés.

Certaines craintes ont été émises sur la capacité et la volonté des organismes de gestion collective à abonder le CNM. Le conflit, maintenant porté devant les tribunaux, qui oppose deux d’entre eux – et pas des moindres – pourrait menacer a minima les premiers pas du Centre.

Je regrette personnellement ce conflit qui oppose, pour schématiser, « petits producteurs » et « majors », au moment même où la maison commune qu’est le CNM se constitue. Sur cette affaire, monsieur le ministre, je serai heureux d’avoir votre sentiment.

Après la question des moyens, le second écueil est la participation des professionnels.

Nous le savons, tout n’est pas dans la loi. Tout le monde attend avec intérêt – avec angoisse, devrais-je dire – la parution du fameux décret prévu à l’article 2 sur la composition du conseil d’administration et du conseil professionnel. Je sais que les concertations ont d’ores et déjà été lancées, mais il ne faut pas que le délai entre l’accord en CMP et l’adoption définitive du texte accentue la méfiance. En la matière, il vous faudra aller vite au risque de peiner certains, pour ne pas lester de rancœur la création du CNM.

Cette question est d’autant plus sensible que, je le rappelle, les acteurs de la filière musicale sont aujourd’hui globalement majoritaires dans la composition des conseils d’administration des cinq organismes qui devraient disparaître au profit du CNM. Il est absolument essentiel que les différents acteurs de la filière musicale n’aient pas le sentiment d’un marché de dupes en intégrant cette maison commune, faute de quoi le risque serait que certaines des associations de droit privé refusent in fine de rejoindre le CNM, ce qui ferait perdre beaucoup de son intérêt au projet.

De même, je vous invite à prendre tout particulièrement en considération la place éminente des collectivités territoriales, qui sont directement intéressées par l’action du Centre.

Les défis sont donc nombreux !

Le futur CNM pourra cependant s’appuyer sur la mission confiée à Catherine Ruggeri, qui me paraît tout à fait en ligne avec les ambitions élevées que nous nourrissons, que vous nourrissez, monsieur le ministre, pour le Centre. Catherine Ruggeri effectue un travail remarquable de rassemblement de tous. Je tiens à saluer ici son engagement et à souhaiter que ses compétences ainsi que ses qualités de diplomatie et d’indépendance puissent continuer à bénéficier au secteur.

Pour conclure, je voudrais donner les trois orientations qui, selon moi, devraient présider à la naissance du CNM.

Première orientation : l’unité. Cette maison doit être celle de toutes les musiques, de tous les musiciens, et ne pas hésiter au passage à aller vers un monde amateur si riche et vivant.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Raymond Hugonet

Or, comme nous le savons, l’unité est un combat qui suppose, pour être remporté, de l’écoute – d’autant plus en matière musicale – et le respect des autres. J’adresse donc solennellement aux futurs responsables du CNM et à ses grands acteurs un avertissement : le succès sera celui de tous ! Si échec il y a, il sera lourd de conséquences pour tous, car l’effort que fait aujourd’hui l’État pourrait ne pas se retrouver avant plusieurs longues années.

Deuxième orientation : la conscience des défis à venir. Le CNM devra rapidement se saisir des lourds dossiers qui préoccupent la filière musicale. Je veux en citer trois qui me paraissent particulièrement d’actualité.

Il s’agit, tout d’abord, de la défense de la conception européenne du droit d’auteur, régulièrement attaquée, pour lui substituer la notion anglo-saxonne de copyright et le partage de la valeur entre les différents intervenants. Le futur projet de loi audiovisuel sera, je pense, l’occasion pour nous de réaffirmer notre vision et, pour le Centre, d’élaborer avec la profession une position commune.

Vient, ensuite, la concentration dans le secteur de la musique. Sur ce point, qui relève aujourd’hui davantage de l’intuition, nous avons cruellement besoin de données. C’est l’une des raisons pour lesquelles la création du CNM était si importante, car elle devrait enfin permettre le lancement de l’observatoire de l’économie de la musique, prévu par la loi LCAP, mais jamais mis en place depuis. Cet observatoire permettra enfin d’avoir une meilleure connaissance du secteur, une connaissance que je juge indispensable pour définir des politiques publiques plus adaptées, comme le souhaite l’ensemble des acteurs de la filière musicale.

N’oublions pas que les questions de concentration agitent aujourd’hui particulièrement le secteur des festivals musicaux. C’est une question urgente si nous voulons préserver le dynamisme de nos festivals, déjà mis à mal par la hausse des coûts de sécurité et des normes en la matière de plus en plus élevées.

Enfin, le dernier dossier de cette liste, bien entendu non exhaustive, est l’impact sur la diversité culturelle des algorithmes mis en œuvre par les services de streaming.

Ce dernier point, et le nécessaire dialogue qui devra se nouer avec les plateformes, nécessitera la capacité d’expertise du Centre et son rôle de relais des positions de la filière.

Troisième orientation : l’enthousiasme. Au-delà de ce qui vient d’être évoqué, des écueils, des craintes, nous devrions tous nous réjouir sincèrement d’assister à la naissance de ce « CNM à la française », promis à un grand avenir. Cet enthousiasme doit infuser dans le milieu professionnel, qui ne pourra pas dire que l’État, gouvernement et parlement réunis, a été sourd à leurs demandes.

Mes chers collègues, vous l’aurez compris, je suis déjà dans « l’après » et dans ces beaux défis que nous abordons avec bonheur, lucidité et détermination. En attendant, je vous propose d’adopter ce texte issu des travaux de la commission mixte paritaire. Longue vie au Centre national de la musique !

Applaudissements.

Debut de section - Permalien
Sébastien Lecornu

Monsieur le président, madame la présidente de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication, chère Catherine Morin-Desailly, monsieur le rapporteur, cher Jean-Raymond Hugonet, mesdames, messieurs les sénateurs, rassurez-vous, il n’y a pas eu de remaniement ministériel dans la nuit, pas plus que d’initiative quasiment gaulliste visant à me nommer ministre en charge du Sénat, comme cela s’était produit au début de la Ve République. Je représente simplement mon collègue et ami Franck Riester, qui est actuellement en déplacement avec le Président de la République dans le cadre du conseil des ministres franco-allemand, qui se tient en ce moment même à Toulouse. J’ai bien sûr accepté, étant depuis une semaine en résidence avec vous, …

Debut de section - Permalien
Sébastien Lecornu

… d’assurer la présence du Gouvernement lors du débat consacré aux conclusions de cette commission mixte paritaire attendue et, si j’ai bien compris, conclusive.

Conformément à l’article 45 de la Constitution, le Gouvernement soumet à votre approbation la proposition de loi relative à la création du Centre national de la musique. Je me réjouis, au nom du Gouvernement, de l’obtention de cet accord trouvé par les députés et les sénateurs.

Les membres de la commission mixte paritaire ont apporté deux clarifications qui assurent une meilleure intelligibilité de la loi.

En premier lieu, la disposition qui prévoit un conseil professionnel adjoint au conseil d’administration a été modifiée afin d’éviter une confusion possible avec la notion d’instance représentative du personnel, reconnue en tant que telle par le code du travail. Or, au cas d’espèce, il s’agit bien de faire du conseil professionnel une instance réunissant des représentants des organisations concernées par l’action de l’établissement.

En second lieu, il est apparu plus pertinent de mentionner les « données », plutôt que la « donnée », en ce qui concerne l’observatoire du Centre national de la musique. Vous savez combien l’enjeu de la connaissance et de la transparence du secteur est primordial, que ce soit pour mieux comprendre les mutations à l’œuvre ou bien pour améliorer les dispositifs de soutien ou la régulation du secteur.

Le Gouvernement soutient ces modifications.

Cet accord témoigne des attentes extrêmement fortes concernant la création d’un établissement public dont la mission principale est de soutenir le secteur de la musique.

Le ministre de la culture l’a rappelé ici même devant vous, durant l’examen du texte en première lecture, la création du CNM intervient à un moment crucial pour le secteur de la musique : après la « crise » des années 2000, le retour de la croissance et notamment ses effets pour les créateurs et les entreprises en France ne sont pas acquis de manière définitive. En effet, le marché est mondial, très compétitif et marqué par les rapidités de l’innovation, en particulier la transition numérique.

Or la musique est un écosystème fragile en perpétuelle mutation, qui se heurte à certains phénomènes de concentration préoccupants. Le soutien et l’accompagnement de ce secteur par la puissance publique sont donc fondamentaux.

Le CNM doit par conséquent contribuer à améliorer et adapter l’action publique en faveur de la musique.

La musique est la première pratique culturelle des Françaises et des Français, la deuxième industrie culturelle du pays. L’absence d’un opérateur unique capable de fédérer les acteurs de la musique, d’accompagner et de soutenir les professionnels, d’encourager la création relevait de l’étrangeté. Le texte qui est soumis à votre approbation y remédie. C’est pourquoi la première de ces adaptations est la création du CNM.

Un tel accord a été rendu possible par le dialogue nourri et fécond auquel le texte a donné lieu, tant à l’Assemblée nationale qu’au Sénat.

Le Gouvernement se félicite de l’enrichissement du texte, qui a été substantiellement modifié lors de son examen par le Parlement. Outre de nombreuses évolutions rédactionnelles, celui-ci a renforcé les missions et le rôle du CNM, ce qui traduit un sens du dialogue et de l’écoute qu’il convient de souligner. J’en suis témoin sur un autre texte, en cours d’examen…

La responsabilité sociale de l’établissement a été renforcée, que ce soit en faveur de l’environnement et du développement durable, ou encore de l’égalité entre les femmes et les hommes. Le CNM a ainsi désormais pour mission de favoriser un égal accès des femmes et des hommes aux professions musicales. En outre, la parité au sein de ses instances de gouvernance est pleinement consacrée. On ne peut que s’en réjouir collectivement.

Par ailleurs, les missions du CNM ont été élargies. Je pense à l’ajout explicite de la création musicale, en faisant référence à la composition, l’interprétation et la production, qui est pleinement conforme à la volonté du ministre de la culture de placer les artistes au cœur du projet du CNM et, plus largement, de l’action gouvernementale en matière de culture.

Ce centre devra être consacré au service de l’ensemble de la filière musicale dans toutes ses nuances et tourné vers les créateurs. Les soutiens économiques qu’il mettra en œuvre seront conçus de manière à promouvoir la diversité culturelle et à favoriser l’innovation. Il placera la dimension territoriale au cœur de son action.

Je pense également à la mission de valorisation du patrimoine musical dont les Français sont fiers. Il s’agit là d’un aspect important de la politique culturelle en faveur de la musique, en lien avec les missions de rayonnement et de transmission.

Concernant l’enjeu essentiel de la connaissance du secteur et de ses mutations, des avancées notables ont été acquises. On peut ainsi saluer le renforcement des missions d’observation du CNM, que ce soit en matière de recueil des informations utiles – notamment commerciales et financières – et de diffusion de l’information économique et statistique.

Enfin, le CNM a été inscrit dans une démarche de concertation permanente, notamment en prévoyant la création d’un conseil professionnel auprès du conseil d’administration. Cette instance de gouvernance est de nature à favoriser le rassemblement, le dialogue et la concertation.

Mesdames, messieurs les sénateurs, en adoptant la proposition de loi qui est soumise à votre vote aujourd’hui, vous permettez la création du Centre national de la musique et, avec lui, la mise en œuvre d’une politique ambitieuse en faveur de la musique. Je n’ignore pas que ce travail de réflexion et de documentation est le fruit d’une concertation avec l’ensemble des acteurs de la filière.

Parallèlement à la future loi, une mission de préfiguration travaille activement, en lien avec les structures qui doivent rejoindre le CNM, leurs salariés et les professionnels du secteur – entreprises, organismes de gestion collective, associations, syndicats –, en vue de faire aboutir les chantiers qui assureront le bon fonctionnement de l’établissement. Cette méthode et le calendrier qui lui est associé vous ont été présentés, je crois, par le ministre de la culture.

Afin de concrétiser les ambitions portées par le Gouvernement, le budget du ministère de la culture, qui sera prochainement soumis au Parlement dans le cadre de l’examen du projet de loi de finances pour 2020, comprend 7, 5 millions d’euros de moyens nouveaux pour lancer le Centre en 2020. Il affecte également au CNM les ressources autrefois dédiées au CNV et aux autres organismes et dispositifs qui ont vocation à rejoindre le nouvel établissement, dont les recettes de la taxe sur les spectacles de variétés, portant le total des ressources publiques mises à la disposition du CNM à 50 millions d’euros.

Telles sont les informations que le Gouvernement souhaitait porter à votre attention.

Mme la présidente de la commission et M. André Gattolin applaudissent.

Debut de section - PermalienPhoto de Mireille Jouve

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous voici au bout d’un long cheminement.

Edvard Grieg, compositeur et pianiste norvégien, disait que, si les mots ont parfois besoin de musique, la musique, elle, n’a besoin de rien. Nous ferons tout de même œuvre utile en créant, enfin, une maison commune à la filière musicale, dont le chiffre d’affaires global est supérieur dans notre pays à celui de la filière cinématographique.

Le secteur musical, animé par une multitude de chapelles, est aujourd’hui encore profondément éclaté. Dans sa grande sagesse, la Haute Assemblée s’évertue généralement à reconnaître les mérites de chacun. Il convient donc de rendre un légitime hommage à l’implication constante et profonde de M. le ministre de la culture, tout d’abord comme législateur, puis désormais comme membre de l’exécutif, dans l’aboutissement de ce projet.

Nous ne doutons pas que ce dévouement indéfectible à la cause du CNM continuera de l’animer dans les prochaines semaines, lorsque les deux grands « silences » de cette proposition de loi devront faire l’objet de réponses.

Comme l’a rappelé en première lecture ma collègue Françoise Laborde, qui est aujourd’hui à Toulouse avec M. le ministre de la culture, la présente proposition de loi, même si elle a été enrichie dans le cadre de la navette parlementaire, comporte tout de même des zones d’ombre significatives sur le fonctionnement du futur établissement public : tout d’abord, en termes de gouvernance ; ensuite, en termes de financement disponible et d’un éventuel abondement de l’État. De ces deux points dépendent très largement la présence et l’engagement des acteurs concernés au sein de la future structure et la réussite du projet.

Sans revendiquer l’ambition budgétaire de 100 millions d’euros du premier projet bâti en 2011, dont on connaît le sort funeste, nous souhaitons voir mobilisées des ressources « modernes ». Le CNM peut en effet légitimement s’appuyer sur des modes de financement innovants, notamment issus du numérique, comme la taxe YouTube ou la taxe Copé.

Constitué à partir du futur ex-CNV le 1er janvier prochain, le CNM se verra ensuite consolidé par sa fusion avec l’IRMA – le Centre d’information et de ressources sur les musiques actuelles –, le Bureau export de la musique française, le Fonds pour la création musicale et le Calif, le Club action des labels et des disquaires indépendants français.

Même si les cellules constitutives du Centre national de la musique sont plutôt issues du monde des musiques actuelles, le CNM devra être la maison commune de toutes les musiques. Cette structure ne saurait limiter son intérêt aux secteurs marchands les plus pertinents. Il ne s’agit pas d’arroser là où il pleut déjà !

Profondément affectée par la révolution numérique – la musique enregistrée a vu son chiffre d’affaires divisé par trois entre 2002 et 2015 –, la filière a su se réinventer. Le CNM devra participer de la consolidation de ce nouveau modèle, qu’il soit économique ou productif.

Mes chers collègues, attaché à la création d’une maison commune et à la structuration de la filière musicale en France, le groupe du RDSE soutiendra le texte élaboré par la commission mixte paritaire.

Applaudissements sur la plupart des travées.

Debut de section - PermalienPhoto de André Gattolin

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, au moment où nous nous apprêtons à célébrer en fanfare, si j’ose dire, les soixante ans d’existence du ministère de la culture, l’approbation après la commission mixte paritaire conclusive du 17 septembre dernier de cette proposition de loi ouvrant création du Centre national de la musique est particulièrement bienvenue. Je pourrais dire qu’elle tombe à point s’il n’avait fallu attendre pas moins de huit années pour que ce projet puisse enfin prendre forme. Il faut saluer ici l’opiniâtreté du Gouvernement, en particulier de l’actuel ministre de la culture, Franck Riester, qui a finalement porté sur les fonts baptismaux ce que d’autres, avant, avaient promis, mais n’avaient pu ou su mettre en œuvre…

Le Centre national de la musique verra donc le jour le 1er janvier prochain, et ceux qui, il y a encore quelques semaines, émettaient des réserves quant à la volonté de l’État d’y mettre les moyens verront – je l’espère – leur scepticisme viscéral, surtout lorsqu’ils sont dans l’opposition, apaisé par les annonces budgétaires très concrètes contenues dans le projet de loi de finances que nous étudierons très prochainement.

Nous réparons, par cet acte, par cette création, une anomalie qui sévissait jusque-là parmi nos instruments, pourtant nombreux, de la politique culturelle de l’État. La musique est en effet de tous les arts notre première muse, notre muse quotidienne ; celle qui fait, comme le chantait Charles Trenet, que « longtemps après que les poètes ont disparu leurs chansons courent encore dans les rues »…

On l’oublie souvent, mais c’est la musique qui fut historiquement la première pierre de l’édifice de toutes les politiques publiques de la culture mises en œuvre dans notre pays. C’est en effet Louis XIV, « patron des arts », qui, tout juste après l’avoir fait naturaliser, nomma le jeune et brillant musicien florentin Jean-Baptiste Lully, en 1661, au titre très exceptionnel de surintendant de la musique du roi. Un véritable ministère de la culture musicale avant l’heure… Par la volonté du Roi-Soleil, la musique devenait ainsi plus qu’un simple divertissement privé au service du roi ; elle était désormais élevée au rang d’instrument public de diffusion de la splendeur de son règne, et accessoirement de la France, par l’entremise de la Cour, sur tout le territoire français de l’époque.

Pourtant, au fil des siècles, l’État, en France, contrairement à nombre de nos pays voisins, s’est trop peu préoccupé de politique publique en matière de musique. Là où les Allemands, les habitants des ex-pays de l’Est et ceux des pays scandinaves encensent leurs grands compositeurs et favorisent sans limites la pratique amateur de la musique, notre pays a toujours donné la priorité à ses écrivains et à la lecture publique, à ses cinéastes et à la fréquentation des salles. Les politiques en faveur de la musique ont surtout été le fruit de l’attention toute particulière – ce n’est pas le ministre chargé des collectivités territoriales qui me contredira –…

Debut de section - Permalien
Sébastien Lecornu

M. Sébastien Lecornu, ministre. Jamais !

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de André Gattolin

… portée par nos villes et nos collectivités locales.

Debut de section - PermalienPhoto de André Gattolin

À la différence du cinéma et du livre, qui ont pu, dès 1946, bénéficier de la création quasi concomitante du Centre national de la cinématographie et de la Caisse nationale des lettres, ancêtre du Centre national du livre, il manquait jusqu’à présent une grande institution nationale consacrée à la promotion de la musique et de la chanson sous toutes leurs formes.

Je parlais à l’instant des soixante ans du ministère de la culture. L’impulsion donnée par André Malraux au développement des politiques publiques dans le domaine des arts et de la culture fut déterminante. Mais, il faut bien le constater, il aura fallu attendre plus de sept ans après la création du ministère pour que celui-ci se dote enfin d’une direction de la musique, confiée à l’excellent compositeur altoséquanais et boulonnais Marcel Landowski, et deux ans supplémentaires avant que ne soit annoncé en 1969 son fameux plan décennal pour la musique, visant à doter chacune des vingt-deux régions de l’époque de son conservatoire, son orchestre et son théâtre lyrique. Pour Marcel Landowski, il s’agissait, d’une part, de « former des musiciens de haut niveau » et, d’autre part, de « rendre l’enseignement musical accessible à tous ».

Cette volonté résonne encore aujourd’hui quand le ministre de l’éducation nationale, Jean-Michel Blanquer, veut développer l’apprentissage de la musique dans les établissements scolaires en faisant en sorte qu’il y ait des chorales dans toutes les écoles et tous les collèges et en encourageant les pratiques instrumentales.

Cette incitation est indispensable, mais si nous voulons que l’industrie musicale française puisse se développer et son poids économique, actuellement estimé à 8, 7 milliards d’euros et à quelque 240 000 emplois, augmenter, il est nécessaire qu’elle parle d’une seule voix. Le Centre national de la musique sera cette voix, en regroupant en son sein le CNV, le FCM et l’IRMA. Le Bureau export, le fameux « Burex », et le Calif devraient d’ailleurs très prochainement le rejoindre.

Alors, oui, ce qui est fait là aurait dû l’être il y a déjà bien longtemps. C’est cette évidence, laquelle a pourtant eu bien du mal à s’imposer, qui fait sans doute que nous sommes aujourd’hui presque unanimes pour saluer la création du Centre national de la musique. Alors, ne boudons pas notre plaisir ! C’est pourquoi, monsieur le ministre, mes chers collègues, je vous annonce, sans fausse note, que le groupe La République En Marche votera bien évidemment en faveur de ce texte.

Applaudissements sur des travées des groupes LaREM, Les Indépendants et UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Céline Brulin

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, plusieurs orateurs l’ont dit, cela fait maintenant bien des années qu’une large partie des acteurs du secteur réclame la création d’une maison commune de la musique ou, à tout le moins, une clarification des dispositifs existants.

Notre groupe soutiendra, comme il l’a fait en première lecture, cette proposition de loi de création du Centre national de la musique.

Debut de section - PermalienPhoto de Céline Brulin

Je suis surprise de votre étonnement, madame la présidente de la commission. Nous soutenons toujours les initiatives qui vont dans le bon sens.

Debut de section - PermalienPhoto de Céline Brulin

Mais, à mon tour, je souhaiterais faire part de plusieurs inquiétudes ou réserves.

La première concerne la place du ministère de la culture dans le processus. Celui-ci se met lui-même en retrait de son cœur de mission. S’engager économiquement pour promouvoir le secteur et sécuriser ses professionnels est évidemment une bonne chose, mais, si vous m’y autorisez, monsieur le ministre, signer le chèque ne suffit pas à parler d’engagement ferme dans le secteur de la création.

Pour ne prendre qu’un exemple, l’abandon de la mission d’agrément, ouvrant droit à des crédits d’impôt, est préjudiciable et prête le flanc aux mêmes débats sur l’objectivité des aides attribuées que ceux qui touchent aujourd’hui le Centre national du cinéma.

En outre, ce désengagement risque d’entraîner une perte du contrôle parlementaire sur les stratégies déployées par le Centre national de la musique.

La deuxième réserve tient justement au fonctionnement du CNM, réserve par ailleurs renforcée par les craintes d’une partie des organisations professionnelles d’être exclues ou sous-représentées dans sa gouvernance.

Cette question de la représentation a été l’objet de débats en première lecture, mais il me semble que nous n’avons pas encore trouvé de solution parfaitement satisfaisante. La même question se pose d’ailleurs pour les collectivités – je ne doute pas, monsieur le ministre, que vous y serez attentif –, …

Debut de section - Permalien
Sébastien Lecornu

M. Sébastien Lecornu, ministre. Toujours !

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Céline Brulin

… dont il est assuré qu’elles auront une place dans le conseil d’administration et dans le conseil professionnel, sans en préciser pour autant l’importance. C’est là un enjeu central sur lequel – soyez-en certain – nous resterons vigilants.

Les premiers échos que nous avons concernant la stratégie voulue par le comité opérationnel de lancement du CNM interrogent aussi.

L’objectif à court terme et la réponse absolue à la crise de la musique seraient le développement du streaming pour l’écoute et les concerts. Il s’agirait donc de reproduire la stratégie du choc qui avait présidé au règlement de la crise de la fin des années soixante-dix, résolue par la généralisation du CD. Il me semble cependant qu’il faut réinterroger ce modèle, qui conduit concrètement à la concentration des moyens de la musique entre les mains de quelques artistes stars en asséchant progressivement le nombre d’artistes et de ventes.

Le choix du streaming rend en effet difficile l’émergence de nouveaux artistes. Il crée en outre une dépendance vis-à-vis de plateformes qui restent financièrement instables et qui généralisent un modèle de rémunération extrêmement faible des artistes, en éliminant par là même une grande partie d’entre eux dont la musique ne serait pas jugée « rentable ».

Le streaming exclut également de fait une partie importante des artistes qui ne produisent pas de musique directement commercialisable, comme c’est le cas des œuvres accompagnant les supports cinématographiques, et affaiblit plus généralement les artistes éloignés du monde des musiques actuelles.

Notre troisième réserve concerne évidemment – vous n’en serez pas surpris, et d’autres intervenants l’ont déjà évoqué – le financement.

Il y a quelques mois, on nous laissait entendre que ce financement serait de l’ordre de 78 millions d’euros, répartis entre des crédits d’impôt, des taxes, des dotations et des subventions. Vous venez d’évoquer le chiffre de 50 millions d’euros, monsieur le ministre. En termes d’apport de l’État, le montant de 20 millions d’euros avancé par notre commission ne sera pas au rendez-vous, puisque le projet de loi de finances prévoit des chiffres très différents qui nous inquiètent.

On doit en effet s’attendre à ce que le CNM ne soit pas pleinement opérationnel dès sa création si, comme nous le croyons, il bénéficie d’un apport de moins de 8 millions d’euros, ce qui est beaucoup trop faible pour permettre un démarrage correct. Pourtant, le recrutement d’agents pour arriver à 111 personnes, contre 35 au CNV, augurait d’une ambition bienvenue.

J’espère que nos craintes seront apaisées et, surtout, que les professionnels du secteur et les élus locaux seront rassurés.

Comme je le disais en préambule, au regard de l’urgence, nous voterons cette proposition de loi. Mais il faudra évidemment par la suite améliorer considérablement le fonctionnement du CNM.

Applaudissements sur les travées du groupe CRCE. – Mme Maryvonne Blondin applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Fouché

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, d’ici à quelques mois, le Centre national de la musique verra le jour, fédérant l’ensemble des acteurs de la filière musicale française. Je me réjouis de l’écoute du Gouvernement, en particulier du ministre de la culture et de son implication dans ce dossier.

La commission mixte paritaire s’est mise d’accord sur un texte volontairement général. La gouvernance de l’établissement sera précisée par décret, et son financement de 50 millions d’euros sera prévu par le prochain projet de loi de finances.

Il s’agit d’accompagner à la fois le développement des forces institutionnelles, des lieux de musique et le rayonnement des artistes, qui interprètent et enrichissent un vaste répertoire, classique ou moderne. Il s’agit aussi de promouvoir toutes les formes de musique, dont la chanson française, qui n’est pas assez mise en valeur. Elles constituent un patrimoine musical dont nous pouvons être fiers !

Cette première sphère d’artistes et de créateurs est accompagnée de maisons de disque, de journalistes, de professeurs, d’ingénieurs du son, de luthiers, de facteurs de pianos et d’orgues, sans lesquels aucun disque, aucune représentation, ne pourrait voir le jour.

La diversité et la complémentarité entre les structures permettront à chaque musicien de trouver les ressources dont il a besoin pour développer sa carrière.

Il s’agit, aussi, de réduire les fractures géographiques, sociales, culturelles au travers de la diffusion de la musique, sous toutes ses formes, sur l’ensemble du territoire.

L’accès à la pratique musicale dès le plus jeune âge est toujours une réussite. C’est ce que j’ai fait dans ma ville, monsieur le ministre !

Debut de section - Permalien
Sébastien Lecornu

J’en suis persuadé !

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Fouché

Je vous le dis, car c’est important.

Le « plan de dix ans » élaboré par André Malraux a permis la création d’un réseau d’institutions décentralisées poursuivant cet objectif de rendre la musique accessible à tous. Jack Lang a poursuivi cette politique de démocratisation. Aujourd’hui, pas une région n’est sans orchestre, sans festival, sans salle de concert.

La vitalité de la scène musicale exerce une force d’attraction sur les plus grands artistes étrangers. Les services culturels des ambassades sont une vitrine de la création musicale française. Je prendrai l’exemple de l’année culturelle France-Égypte, lancée à l’opéra du Caire en début d’année. Autre exemple : La Folle journée de Nantes, qui accueille plus de 130 000 visiteurs chaque année, s’est exportée en Espagne, au Japon, en Russie. La politique des quotas de diffusion, renforcée en juillet 2016, est une réussite.

Un renouveau de la politique musicale s’est manifesté avec l’ouverture de la philharmonie de Paris en 2015 et la signature d’un protocole d’accord pour un développement équitable de la musique en ligne.

La filière reste fragile, malgré une récente reprise de la croissance du secteur de la production musicale. Le streaming représente désormais plus de 50 % des ventes globales…

L’accompagnement de la numérisation de la filière est un enjeu majeur pour assurer la compétitivité de l’économie de la musique à l’échelle mondiale. C’est une mission essentielle du futur Centre national de la musique.

Cette excellente proposition de loi est un premier jalon des discussions parlementaires et des décisions gouvernementales qui vont se poursuivre avec deux temps forts.

Lors de la discussion du projet de loi de finances pour 2020, notre groupe soutiendra le financement du Centre national de la musique tel qu’annoncé par le ministre de la culture, ainsi que la préservation du crédit d’impôt en faveur de la production phonographique.

Enfin, le projet de loi sur l’audiovisuel est très attendu par les acteurs de la filière, avec notamment le renforcement de la lutte contre le piratage.

Monsieur le ministre, mes chers collègues, l’ouverture de la culture au plus grand nombre reste au cœur des préoccupations qui animent la rue de Valois et le Sénat. Par conséquent, le groupe Les Indépendants soutient ce projet.

Charles Trenet, qui a été évoqué précédemment, était un grand artiste. Je me remémore une de ses chansons §

Je chante, je chante soir et matin

Je chante sur mon chemin…

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Fouché

M. Alain Fouché. Je m’arrête là, car le cachet n’est pas suffisant.

Sourires et applaudissements.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Gabouty

Elle est accompagnée par notre collègue Gilbert-Luc Devinaz, président du groupe d’amitié France-Arménie.

Cette visite s’inscrit dans le cadre des échanges interparlementaires approfondis entre nos deux assemblées. Elle intervient alors que l’Arménie est engagée dans un vaste champ de réformes, notamment dans le domaine de la justice.

Outre des entretiens organisés au Sénat, la délégation se déplacera pour rencontrer des élus locaux et divers spécialistes de l’aménagement local.

Nous souhaitons à nos amis arméniens un séjour et des échanges fructueux, en formulant le vœu que cette visite réponde utilement à leurs préoccupations. Nous leur souhaitons la bienvenue au Sénat français !

Applaudissements.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Gabouty

Dans la suite de la discussion générale, la parole est à Mme Sonia de la Provôté.

Debut de section - PermalienPhoto de Sonia de La Provôté

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous arrivons aujourd’hui au terme de l’examen de cette proposition de loi dont l’adoption permettra la naissance, le 1er janvier prochain, du Centre national de la musique. Les deux assemblées sont logiquement parvenues à s’accorder sur ce texte, qui est resté un projet pendant plus de huit ans. La musique va enfin avoir sa maison commune !

Dans l’idéal, le CNM a vocation à fédérer les structures de la filière afin de soutenir les professionnels du secteur musical sur l’ensemble de la chaîne de valeur. Il doit répondre aux attentes de la filière et être un outil efficace, une instance de dialogue et de cohésion entre les acteurs du secteur de la musique et des variétés dans un contexte de révolution numérique. Il aidera aussi à porter notre musique dans le monde demain, mieux qu’aujourd’hui en tout cas. Il sera aussi un lieu d’observation privilégié qui nous fait aujourd’hui cruellement défaut. Bref, il devra apporter de l’harmonie à ce qui représente actuellement la première pratique culturelle des Français et la deuxième industrie culturelle de notre pays.

En effet, le monde de la musique avait face à lui de nombreux organismes – cinq principalement. Leur séparation nuisait à la lisibilité de nos politiques publiques, était source de complexité pour les professionnels et limitait les interactions créatrices entre des secteurs jusqu’à présent artificiellement séparés. Cependant, la fusion en une seule et unique instance ne doit pas être synonyme de concentration – nous l’avons dit en première lecture –, alors que les inégalités culturelles sont nombreuses, trop nombreuses, en France.

C’est ainsi que, toujours dans un cadre idéal, l’accompagnement des initiatives locales et des collectivités territoriales devra être renforcé par l’intermédiaire du CNM, afin de garantir les droits culturels. Le Sénat a d’ailleurs substantiellement enrichi la proposition de loi de l’Assemblée nationale, en particulier avec l’inscription de l’égale dignité des répertoires et des droits culturels comme principes de fonctionnement du CNM.

Ainsi, le ton est donné : le Centre aura pour mission d’assurer le respect des droits culturels, la liberté et la diversité de l’expression musicale ainsi que de ses acteurs, professionnels comme amateurs et leur intégrale accessibilité. En tant qu’établissement public, le futur CNM sera, et devra toujours être, au service de l’intérêt général.

Il faudra au moins maintenir la vie, et la développer au mieux, des labels indépendants qui font la vie de nos territoires, mais aussi l’effervescence liée aux festivals qui ne présentent pas seulement des blockbusters. Tous les territoires et tous les genres musicaux doivent avoir leur place au sein du Centre national de la musique, et c’est ce à quoi nous avons veillé avec notre formidable rapporteur Jean-Raymond Hugonet et la non moins formidable présidente de la commission Catherine Morin-Desailly, que je remercie chaleureusement, tout au long du parcours législatif de ce texte.

Diversité sur le territoire, diversité des acteurs et diversité culturelle : c’est uniquement avec cette volonté que le CNM pourra devenir une véritable « maison commune de la musique » bien orchestrée.

Debut de section - PermalienPhoto de Sonia de La Provôté

Je souhaite cependant, de nouveau, appeler votre attention sur la problématique du financement de ce nouveau centre national.

Les documents budgétaires rendus publics par le ministère prévoient que 7, 5 millions d’euros seront mobilisés l’an prochain sur le programme 334, sommes qui viendront s’ajouter aux moyens publics déjà consacrés au secteur. Un bémol cependant : nous voyons bien que nous sommes encore loin de la somme de 20 millions d’euros supplémentaires nécessaires au nouveau centre pour la bonne conduite de ses missions, telle que préconisée par le rapport Bois-Cariou et sur laquelle s’accordent l’ensemble des acteurs. Nous touchons là la corde sensible du projet. Nous serons donc très vigilants sur ce point lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2020.

Les modalités de l’administration des crédits d’impôt en faveur de la production phonographique et du spectacle vivant ne me paraissent pas non plus tout à fait résolues, tout comme le devenir du Fonpeps, le Fonds national pour l’emploi pérenne dans le spectacle. Ces deux sujets sont loin d’être superfétatoires et sont source de beaucoup d’inquiétude et d’insécurité.

Au-delà, la dotation du CNM met en exergue les contradictions du financement de la musique en France, dans lequel les grandes plateformes, qui sont quasiment des monopoles, sont celles qui recueillent le plus fort taux d’écoute sans pour autant être taxées pour financer la création musicale. Le CNM devra les mettre à contribution.

Enfin, je veux saluer le travail effectué par notre chambre pour renforcer la mission transversale de développement territorial du CNM, en lui octroyant la capacité de conclure des contrats et de nouer des partenariats avec les collectivités territoriales et les acteurs de la filière musicale. Renforcer les actions de développement dans les territoires marque une véritable avancée.

Dans la même mesure, conformément au vœu du Sénat, nous souhaitons élargir la composition du conseil professionnel aux collectivités territoriales. Cet élément est essentiel : le CNM a besoin de ces dernières pour déployer toutes ses compétences, et ce dans tous les territoires.

Debut de section - PermalienPhoto de Sonia de La Provôté

Pour bien connaître sa partition, le nouveau centre devra agir de concert avec ceux-ci.

Debut de section - PermalienPhoto de Sonia de La Provôté

Monsieur le ministre, je vous laisse dire à votre collègue de la culture, qui, je le sais, y est particulièrement attentif, que la création du Centre national de la musique est une avancée importante pour la vitalité culturelle, et pas uniquement musicale, de notre pays. Nous lui sommes reconnaissants d’avoir ainsi porté, avec tant d’autres, ce projet, de l’avoir mené à la baguette, d’abord comme député puis aujourd’hui comme ministre.

Il reste cependant encore du chemin à parcourir pour que cette structure soit pleinement efficiente. C’est pourquoi nous n’irons pas plus vite que la musique : la mise en place effective du CNM dans les mois qui viendront fera l’objet de toute notre vigilance. Nous avancerons pas à pas avec les musiciens et les acteurs qui composeront le CNM. Nous suivrons attentivement sa mise en œuvre.

Le groupe Union Centriste soutiendra donc les conclusions de la commission mixte paritaire pour la création du Centre national de la musique. Vive la musique et vive sa maison commune !

Applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Sylvie Robert

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, « enfin ! », serais-je tentée de dire… Après une décennie à esquisser les ébauches d’une maison commune de la musique, ses fondations sortent finalement de terre. Il reste des questionnements substantiels à régler, en particulier son financement et sa gouvernance, mais nous aurons l’occasion d’en débattre prochainement.

En attendant, réjouissons-nous que tous les acteurs de la filière, dans leur entière diversité, puissent échanger, partager leurs analyses et réfléchir collectivement aux mutations constantes qui traversent le secteur au sein d’un même forum. Au regard des changements qui bouleversent le monde de la musique, établir un espace de dialogue commun était devenu impérieux.

Dès lors, le Sénat a pleinement œuvré à ce projet. D’ailleurs, presque la totalité des apports validés en première lecture ont été confirmés au cours de la commission mixte paritaire. Je voudrais remercier notre rapporteur, qui, dans un esprit constructif, a effectué un important travail et a permis de dégager une unanimité autour de cette proposition de loi.

Ainsi, le texte a été enrichi à de multiples endroits. Je ne ferai pas une liste à la Prévert, mais j’aimerais néanmoins insister sur plusieurs points.

En premier lieu, dans la continuité de la loi NOTRe et de la loi LCAP, la mention des droits culturels et le renvoi à la convention de l’ONU me paraissent fondamentaux. Outre l’accent mis sur la promotion de la diversité culturelle, il s’agit aussi de reconnaître le rôle émancipateur de la musique par la pratique et la participation de toutes et tous à la sphère musicale.

En deuxième lieu, il était inconcevable que l’artiste soit complètement invisible dans cette proposition de loi. Au travers du « soutien à l’écriture, à la composition et à l’interprétation », qui figure désormais à l’alinéa 4 de l’article 1er, nous revenons aux sources de la création et marquons notre profond attachement aux auteurs, compositeurs et interprètes sans qui nulle création musicale ne serait possible.

Vous savez que, à titre personnel, j’aurais aimé aller plus loin, en proposant une expérimentation, via un fonds de soutien. J’espère que cela se fera plus tard.

Enfin, le numérique impactant massivement le secteur musical, la prise en compte des usages et de la valeur de la donnée est essentielle. À cet égard, la mission de l’observatoire de l’économie sera décisive, car elle favorisera l’innovation et l’adaptation permanente des acteurs aux mutations socio-économiques, mais aussi aux comportements des usagers.

Maintenant que le CNM devient réalité, plusieurs paramètres me semblent cardinaux afin de garantir sa réussite.

Tout d’abord, sa représentativité, à tous niveaux, doit être assurée. Je pense singulièrement au conseil professionnel, « instance réunissant des représentants des organisations directement concernées par l’action du Centre national de la musique », en vertu de l’article 2. Cette représentativité doit également intégrer des critères de nature et de taille des structures, incluant des entités publiques comme privées, certaines de taille modeste, d’autres constituant un réseau plus important. En somme, elle doit témoigner de la diversité du secteur. En parallèle, la représentativité fait écho à la pluralité des esthétiques, soulignée par la très belle expression d’« égale dignité des répertoires » qui composeront nécessairement le futur CNM.

Par ailleurs, comme je l’ai spécifié précédemment, je crois que les missions du CNM doivent dépasser les attributions originelles du CNV, sous peine de manquer le changement d’envergure que nous prônons collectivement. Par-delà la fonction de soutien financier au secteur musical, des préoccupations « d’intérêt général » devraient l’animer – d’ailleurs, cette conception se reflète dans ses missions.

Sans aucunement se substituer à l’action menée par le ministère de la culture, le CNM n’en demeure pas moins une enceinte où l’État sera majoritaire et garant de cette mission de service public. Par conséquent, nous attendons de l’État qu’il joue un rôle actif, qu’il soit force de propositions à destination de la filière, mais aussi très mobilisateur sur les dossiers épineux du moment et stratège sur les grands enjeux.

Finalement, le CNM sera ce que les acteurs du secteur décideront d’en faire. Ces derniers se l’approprieront, établiront leurs priorités, feront émerger des problématiques nouvelles et renforceront probablement son action sur certaines questions majeures. Je pense au soutien à la diversité musicale, à l’émergence de nouveaux artistes, au partage de la valeur, à la mise en œuvre du pass culture, à l’égalité entre les femmes et les hommes ou encore à la formation professionnelle.

En outre, la place et le positionnement du CNM seront déterminés par les coopérations qu’il entendra mener avec ses différents partenaires. Je souhaite que celles-ci, ouvertes par l’alinéa 15 de l’article 1er, qui dispose qu’il « associe les collectivités territoriales et leurs groupements à l’exercice de ses missions », soient le plus larges possible. La possibilité de conclure des contrats et de nouer des partenariats avec les collectivités est un formidable levier pour conférer un ancrage territorial au CNM.

Au final, la concrétisation du CNM arrive à point nommé. Nombreux sont les chantiers qui l’attendent. J’en citerai quelques-uns, et d’abord le soutien public à la production et à la création musicales, à travers la pérennisation et la montée en charge des crédits d’impôt production phonographique et spectacle vivant. M. le ministre de la culture devra s’assurer que, contrairement à l’année dernière, il n’y ait pas de tentative de rabotage sur ces deux crédits d’impôt, dont l’impact social et économique est extrêmement positif, car ils participent de la vitalité et de la structuration de notre paysage musical.

Debut de section - PermalienPhoto de Sylvie Robert

Une autre réflexion qui me tient à cœur porte sur le statut de l’artiste-auteur, en lien avec la mission confiée à Bruno Racine et en complément de celle-ci. Aujourd’hui, le paradoxe entre la reconnaissance témoignée par la société à l’égard de l’artiste-auteur et la paupérisation croissante de ce dernier est à la fois saisissant et insupportable. Si nous plaçons la culture au cœur de notre projet sociétal et éducatif, nous ne pouvons tolérer cet état de fait. Je pense que le CNM devra apporter sa contribution au sujet.

Pour finir, j’évoquerai un problème vital – M. le rapporteur l’a déjà abordé –, qui me tient à cœur : le phénomène de concentration dans le secteur musical. Si nous en percevons nettement les contours, si nous en pressentons l’emprise, nous avons encore besoin de l’objectiver. Nous avons besoin de comprendre ses origines et ses ramifications. Il convient d’imaginer les instruments d’une éventuelle régulation par la puissance publique, à laquelle pourraient prendre part les acteurs de la filière, afin d’éviter tout abus de position dominante et en vue de contrecarrer les effets pervers qui se font déjà sentir en termes de diversité musicale.

Monsieur le ministre, mes chers collègues, au fond, ce qui est implicitement en jeu, c’est une forme d’identité culturelle revendiquée par la France dans le monde, une « marque de fabrique », dans la droite ligne de notre exception culturelle, si je puis m’exprimer ainsi. Je ne doute pas que le CNM sera de cette bataille, porteur, pour paraphraser le titre d’un célèbre roman de Romain Gary, de sa propre « promesse de l’aube ».

Applaudissements sur les travées du groupe SOCR, ainsi que sur des travées des groupes RDSE et UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Gabouty

M. le président. La parole est à Mme Céline Boulay-Espéronnier.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Céline Boulay-Espéronnier

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je me réjouis que l’idée d’une maison commune de soutien à la création musicale, véritable serpent de mer de la politique culturelle française, puisse enfin se concrétiser dans le texte que nous allons adopter aujourd’hui. En effet, si la musique est la première pratique culturelle et la deuxième industrie culturelle dans notre pays, elle sera la dernière filière artistique à disposer d’un centre national.

Je rappelle que le projet a été lancé par le Président Sarkozy, à l’issue d’une mission dont l’actuel ministre de la culture était le rapporteur, au moment où l’industrie musicale traversait le plus fort d’une crise liée aux nouveaux modes d’écoute, au développement du streaming et au piratage de masse. L’alerte était lancée alors que le chiffre d’affaires de la filière avait baissé de 60 % en quinze ans. On comprend donc l’inquiétude qui fut celle des acteurs concernés lorsque le projet a été délaissé sous le quinquennat de François Hollande.

Depuis, l’industrie musicale connaît un nouvel essor. Les acteurs français ont finalement su tirer parti du streaming et la fréquentation des concerts a augmenté. Toutefois, cet équilibre reste fragile. La crise a bien montré le danger, pour l’industrie musicale, de demeurer une filière morcelée. Il est aujourd’hui essentiel que celle-ci puisse défendre ses intérêts collectifs, dans une stratégie de long terme. À cet égard, ce texte est particulièrement attendu.

Le Centre national de la musique jouera un rôle important d’observation du fonctionnement de la filière, afin de déterminer les actions politiques à mener. Il pourra justifier auprès de l’administration l’impact de concours financiers bien souvent remis en cause. Son rôle sera majeur en matière de diversité culturelle.

Je me réjouis que la Haute Assemblée ait pu préciser et élargir ses missions lors de l’examen de la proposition de loi. Je citerai notamment le rôle du CNM dans la collecte d’informations économiques et statistiques au sein de la filière musicale, le soutien qu’il apportera à l’exportation des productions françaises et à la mobilité des artistes ou encore l’introduction du « respect de l’égale dignité des répertoires ».

Surtout, en tant que représentants des territoires, nous nous sommes attachés à mieux reconnaître la place des collectivités dans la mise en œuvre de la politique musicale : il est mentionné expressément qu’elles pourront conclure des contrats et nouer des partenariats avec le CNM et qu’elles seront associées au comité professionnel.

Je tiens à remercier le rapporteur Jean-Raymond Hugonet de son travail constructif et de son investissement personnel sur cette proposition de loi.

Un texte commun ayant été élaboré avec l’Assemblée nationale, le CNM devrait être juridiquement fonctionnel au 1er janvier 2020.

Il restera cependant plusieurs points à préciser pour l’avenir : d’abord, la gouvernance du Centre national, qui sera définie dans un décret statutaire, en cours de préparation, dont nous souhaitons qu’il respecte la présence des différents acteurs de la filière ; ensuite, le budget alloué au CNM pour mener à bien ses missions, qui devra comporter des moyens nouveaux.

Je rappelle que ceux-ci ont été estimés par la mission de préfiguration à 20 millions d’euros en année pleine. Par conséquent, monsieur le ministre, je m’associe aux préoccupations exprimées par notre rapporteur concernant la somme de 7, 5 millions d’euros qui a été annoncée pour 2020.

Le CNM sera le fer de lance et la vigie de la diversité musicale. Encore faut-il qu’on lui en accorde les moyens…

Je veux, pour terminer, évoquer la question du piratage. Si une enquête de la Fédération internationale de l’industrie phonographique a relevé une progression de la consommation de musique, 27 % des consommateurs utilisent des moyens frauduleux. L’écosystème illicite se complexifie, avec l’apparition d’une pluralité d’acteurs intervenant en amont ou en aval des pratiques de piratage pour mieux les organiser et le perfectionnement des mesures de contournement.

Dans ce contexte, il faut revoir notre système de protection. J’espère que nous aurons prochainement des précisions sur les mesures envisagées par le Gouvernement, puisqu’une fusion du CSA et de la Hadopi a été annoncée dans le cadre de la réforme de l’audiovisuel, sans que nous connaissions les aménagements que cette décision induira pour la protection des droits d’auteur.

La musique est un secteur particulièrement soumis aux évolutions technologiques. Dans ce contexte, le législateur doit savoir adapter rapidement notre droit. La présente proposition de loi contribuera à garantir l’équilibre de la filière.

En dehors des points de vigilance que j’ai indiqués, les membres de notre groupe adhèrent bien évidemment aux dispositions de ce texte et lui apporteront tout leur soutien.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Gabouty

La discussion générale est close.

Nous passons à la discussion du texte élaboré par la commission mixte paritaire.

Je rappelle que, en application de l’article 42, alinéa 12, du règlement, lorsqu’il examine après l’Assemblée nationale le texte élaboré par la commission mixte paritaire, le Sénat se prononce par un seul vote sur l’ensemble du texte.

Je donne lecture du texte élaboré par la commission mixte paritaire :

Il est créé un établissement public à caractère industriel et commercial placé sous la tutelle du ministre chargé de la culture et dénommé Centre national de la musique.

Dans le cadre d’un processus permanent de concertation avec l’ensemble du secteur, il exerce, dans le domaine de la musique et des variétés, sous formes d’enregistrement et de spectacle vivant, les missions suivantes :

1° Soutenir l’ensemble du secteur professionnel, dans toutes ses pratiques et dans toutes ses composantes, et en garantir la diversité, dans le respect de l’égale dignité des répertoires et des droits culturels énoncés par la convention de l’Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture sur la protection et la promotion de la diversité des expressions culturelles du 20 octobre 2005 ;

2° Soutenir l’écriture, la composition, l’interprétation, la production, l’édition, la promotion, la distribution et la diffusion de la musique et des variétés sous toutes leurs formes et auprès de tous les publics, aux niveaux national et territorial, en complémentarité des dispositifs directement déployés par le ministère chargé de la culture ;

2° bis

Supprimé

3° Favoriser le développement international du secteur de la musique et des variétés, en accompagnant et en soutenant l’exportation des productions françaises, le rayonnement des œuvres et la mobilité des artistes ;

bis Favoriser un égal accès des femmes et des hommes aux professions musicales ;

ter Favoriser la contribution du secteur de la musique et des variétés à la politique de l’État en matière de protection de l’environnement et de développement durable ;

4° Gérer un observatoire de l’économie et des données de l’ensemble du secteur et, à ce titre, recueillir toutes informations utiles, notamment commerciales et financières, et diffuser une information économique et statistique, dans le respect des législations relatives à la protection des données à caractère personnel et au secret des affaires ;

5° Assurer une fonction d’information pédagogique, d’orientation et d’expertise sur le secteur ;

6° Assurer un service de formation professionnelle à destination des entrepreneurs ou des porteurs de projets du secteur ainsi qu’une fonction d’ingénierie en formation professionnelle s’appuyant sur une activité de prospective, d’innovation et de développement des compétences ;

7° Assurer une veille des technologies et des usages et soutenir l’innovation en accompagnant le secteur dans ses transformations ;

8° Valoriser le patrimoine musical ;

9° Participer au développement de l’éducation artistique et culturelle dans son champ de compétences, en complément du rôle joué par l’État et les collectivités territoriales en la matière.

Il associe les collectivités territoriales et leurs groupements à l’exercice de ses missions. Il peut conclure des contrats et nouer des partenariats avec ces collectivités et groupements ainsi qu’avec les différents acteurs de la filière musicale.

Le ministre chargé de la culture peut confier au Centre national de la musique, par convention, l’instruction et la gestion de dispositifs d’aides pour la sécurité des sites et manifestations culturelles du spectacle vivant, y compris ceux n’entrant pas dans son champ de compétences.

Le Centre national de la musique est administré par un conseil d’administration dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État. Il est dirigé par un président nommé par décret sur proposition du ministre chargé de la culture. Les modalités de désignation des membres du conseil d’administration assurent l’égale représentation des femmes et des hommes.

Il est adjoint au conseil d’administration un conseil professionnel, instance réunissant des représentants des organisations directement concernées par l’action du Centre national de la musique, dans des conditions fixées par décret. Les modalités de désignation des membres du conseil professionnel assurent l’égale représentation des femmes et des hommes.

Les organismes de gestion collective peuvent verser une partie des sommes mentionnées aux 1° et 2° de l’article L. 324-17 du code de la propriété intellectuelle au Centre national de la musique. L’établissement utilise alors ces sommes en conformité avec les objectifs mentionnés au premier alinéa du même article L. 324-17.

(Supprimés)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Gabouty

Sur les articles du texte élaboré par la commission mixte paritaire, je ne suis saisi d’aucun amendement.

Quelqu’un demande-t-il la parole sur l’un de ces articles ?…

Le vote est réservé.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Gabouty

Avant de mettre aux voix l’ensemble de la proposition de loi dans la rédaction résultant du texte élaboré par la commission mixte paritaire, je donne la parole à Mme la présidente de la commission.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Morin-Desailly

Au terme de son parcours législatif, je veux exprimer ma grande satisfaction de voir cette proposition de loi sur le point d’être votée. Voilà dix ans que nous attendions ce moment ! Nous sommes très heureux d’avoir pu contribuer à la concrétisation de ce projet, qui a connu une parenthèse législative, grâce à l’excellent travail de notre rapporteur Jean-Raymond Hugonet, mais aussi à la mobilisation de l’ensemble des groupes, qui ont été très actifs dans la recherche du meilleur texte possible pour faire émerger l’outil ambitieux que doit être le CNM.

Monsieur le ministre, pourrez-vous répéter à M. le ministre de la culture – je sais qu’il est en train de nous écouter – que les acteurs de la filière, les artistes, les publics sont dans l’attente d’une concrétisation réelle de l’ambition affichée ?

Le Sénat aura pour rôle de suivre l’application de la loi et de ses décrets d’application, la mise en place du conseil d’administration et du conseil professionnel, mais aussi, et surtout, le vote de la loi de finances, car d’aucuns craignent que ce nouvel outil ne soit qu’une coquille vide. Nous aurons, mes chers collègues, à veiller de manière très précise et très concrète à ce que ce ne soit pas le cas.

Enfin, comme je l’ai déjà dit dans mon propos conclusif lors de l’examen du texte en première lecture, je souhaite aussi que nous veillions ensemble à ce que la totalité de la filière musicale soit prise en compte dans le cadre de cette ambition pour la politique musicale : orchestres installés et indépendants, établissements d’enseignement artistique, scènes, théâtres, opéras, salles de concert… Ces acteurs ont été quelque peu abandonnés ces dernières années. Je tiens absolument à ce que cela change !

Je conclurai par une citation d’Oscar Wilde, qui, je le crois, correspond assez bien à l’état d’esprit ayant présidé à nos travaux : « La musique met l’âme en harmonie avec tout ce qui existe. » De fait, c’est bien la recherche d’harmonie qui nous a guidés. Nous ne pouvons que nous en réjouir, mes chers collègues. Je vous remercie de votre investissement aux côtés de notre rapporteur.

Merci, monsieur le ministre, d’avoir participé à ce petit bout de travail législatif, qui va se concrétiser par un vote dont nous allons tous ici nous satisfaire.

Applaudissements sur la plupart des travées.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Gabouty

Personne ne demande plus la parole ?…

Conformément à l’article 42, alinéa 12, du règlement, je mets aux voix, dans la rédaction résultant du texte élaboré par la commission mixte paritaire, l’ensemble de la proposition de loi relative à la création du Centre national de la musique.

Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.

La séance est suspendue.

La séance, suspendue à dix-sept heures quarante-cinq, est reprise à dix-sept heures cinquante.

Debut de section - PermalienPhoto de Sylviane Noël

Monsieur le président, je souhaite que soit consigné au compte rendu que je soutenais l’amendement n° 399 rectifié, examiné hier après-midi.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Gabouty

Acte vous est donné de cette mise au point, ma chère collègue.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Gabouty

L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, modifié par lettre rectificative, relatif à l’engagement dans la vie locale et à la proximité de l’action publique (projet n° 677 rectifié [2018-2019], texte de la commission n° 13, rapport n° 12).

La procédure accélérée a été engagée sur ce texte.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Gabouty

La parole est à M. le président de la commission des lois, pour un rappel au règlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

Ce matin, la commission des lois a adopté un amendement très important, visant à ce qu’une personne handicapée qui devient maire ne perde pas le bénéfice de l’allocation aux adultes handicapés, l’AAH.

Pensant à la grande loi de 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, les membres de la commission des lois se sont étonnés que cette mesure n’ait pas été prise plus tôt. En réalité, ce n’est qu’en 2018 qu’une circulaire a prévu qu’il fallait traiter l’indemnité du maire ou de l’adjoint comme un revenu et donc en tenir compte dans l’attribution de l’AAH.

La situation est tout de même très singulière, alors que nous tous pensons de bonne foi que les personnes handicapées ne devraient pas être dissuadées de devenir maire – vous le premier, monsieur le ministre, qui ne faites pas mystère de vos convictions humanistes. Ainsi, vous avez déclaré, dans un entretien paru dans l’édition de Ouest-France datée du 15 juillet dernier, qu’il fallait « faire en sorte que les futurs conseils municipaux ressemblent à ce qu’est la société aujourd’hui, avec des élus plus jeunes, des femmes, des personnes en situation de handicap… ». Je ne vous fais donc pas de procès d’intention.

Notre amendement présente la caractéristique de ne pas avoir de coût. Cependant, son adoption empêcherait l’État de réaliser une économie, les élus handicapés ne pouvant plus se voir supprimer tout ou partie de leur AAH. Ce motif ne nous paraît pas suffisant pour justifier son rejet, mais, fidèle à son devoir, la commission des finances a opposé à notre amendement l’irrecevabilité financière prévue par l’article 40 de la Constitution. Je ne saurais lui en vouloir.

Néanmoins, monsieur le ministre, je me tourne vers vous : j’attends du Gouvernement qu’il lève l’article 40 pour que nous puissions conforter l’engagement citoyen des personnes handicapées à l’approche des élections municipales, en leur évitant l’application de la regrettable interprétation qui prévaut depuis 2018 et à laquelle il faut couper le cou. §Je suis sûr qu’il n’y a aucune matière à tension entre nous sur un sujet aussi évident, simple et de bon sens.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Gabouty

Mes chers collègues, je vois plusieurs mains se lever pour demander la parole. Or, dans le cadre d’un rappel au règlement, il ne peut pas y avoir de débat. Si vous voulez intervenir sur le sujet, il faudra le faire en vous inscrivant sur un article, par exemple. Je ne donnerai donc la parole qu’à ceux qui veulent faire un rappel au règlement et non à ceux qui veulent prolonger le débat, que M. le président de la commission des lois a soulevé à juste titre.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Gabouty

La parole est à Mme Cécile Cukierman, pour un rappel au règlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Cécile Cukierman

Par ce rappel au règlement, je veux dire que je souscris aux propos de M. le président de la commission des lois.

Je ne reviendrai pas maintenant sur ce que nous pouvons penser de l’article 40 et de son application. Nous savons que certains peuvent parfois trouver celle-ci abusive, quand d’autres la considèrent comme tout à fait respectueuse de notre règlement.

En tout état de cause, on peut d’abord légitimement s’interroger sur la réalité de la dépense supplémentaire qu’engendrerait le vote d’un tel amendement. Le maire handicapé bénéficiait déjà de l’AAH. Il ne fait que conserver son droit. L’interprétation de la commission des finances ne me paraît pas fidèle à la logique de l’article 40.

Quoi qu’il en soit, j’appelle le Gouvernement à lever le gage pour que l’amendement puisse être débattu et adopté.

En outre, nous enverrions un très mauvais signal aux personnes handicapées, dont nous souhaitons tous ici l’inclusion, ainsi que le montrent nos initiatives législatives et nos interventions, dans cet hémicycle comme dans nos circonscriptions, en permettant que, demain, des personnes handicapées s’interdisent de candidater à la plus belle fonction qui puisse être, celle de maire, pour des considérations matérielles légitimes, qui engagent leur quotidien.

Pour ces raisons, je m’associe à la demande, exprimée par M. le président de la commission des lois, que vous puissiez faire en sorte, monsieur le ministre, que cet amendement soit débattu.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Gabouty

Madame Cukierman, votre intervention ne constituait pas un rappel au règlement, mais, comme je ne vous ai pas interrompue, je suis désormais obligé de donner la parole à tous ceux qui l’ont demandée.

Je rappelle que nous sommes totalement en dehors du cadre du rappel au règlement, mais, compte tenu des circonstances, si vous en êtes d’accord, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission des lois, je laisserai intervenir ceux qui ont demandé la parole sur le sujet.

La parole est à Mme Jocelyne Guidez.

Debut de section - PermalienPhoto de Jocelyne Guidez

Je vais être très brève, parce que je ne vais pas répéter ce que viennent de dire le président de la commission et ma collègue. Je veux simplement appuyer leur demande.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Marc

Après tout, monsieur le président, il me paraît normal qu’un rappel au règlement soit effectué par tous les groupes.

Il est vrai que nous ne comprenons pas pourquoi le Gouvernement ne lève pas le gage sur cet amendement, évincé au nom de l’article 40. Nous sommes en 2019, bientôt en 2020. Nous ne pouvons pas comprendre que des personnes en situation de handicap exerçant une fonction municipale rencontrent des problèmes matériels parce que leur AAH aurait été supprimée. Je trouve cette situation complètement anormale et vraiment déplorable. J’espère que nous allons la corriger.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Gabouty

Je le répète, il ne s’agit toujours pas d’un rappel au règlement.

La parole est à M. Philippe Mouiller.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Mouiller

Je veux à mon tour, au nom du groupe Les Républicains, insister sur le rappel au règlement effectué par M. le président de la commission.

Je tiens à rappeler un certain nombre de grands débats que nous avons eus dans cet hémicycle, notamment sur le droit de vote des personnes handicapées. Je me souviens notamment des interventions de Mme la garde des sceaux, de Mme Agnès Buzyn et de Mme Sophie Cluzel, qui estimaient que la prochaine étape après cette avancée fondamentale devait être la mobilisation des personnes handicapées dans la perspective des élections à venir.

Je crois en la constance de la parole du Gouvernement, et je sais, monsieur le ministre, que vous trouverez une solution pour aller au bout de la démarche, au moment même où nous discutons d’un texte concernant l’engagement des élus.

Très concrètement, comme cela a été expliqué en commission ce matin, l’élu d’une commune de 1 000 à 1 500 habitants perçoit, au titre de ce mandat, une indemnité de 770 euros. S’il est handicapé, l’AAH dont il est bénéficiaire est diminuée du même montant. Autrement dit, il ne perçoit aucune indemnité liée à sa fonction d’élu, alors que celle-ci a justement pour objet de compenser les frais liés à ses missions. J’estime, comme M. le président de la commission des lois, que cette situation est incohérente. Si le manque à gagner reste modique, l’occasion nous est offerte d’envoyer un signe important. La mobilisation des membres de cet hémicycle doit être constante.

Monsieur le ministre, je vous remercie par avance des solutions que vous trouverez à ce problème.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Raison

Mon rappel au règlement concerne l’application de l’article 40 et le filtre opéré par la commission des finances.

Pour ma part, j’avais déposé un amendement relatif à un autre type de handicap. Il a lui aussi été écarté par la commission des finances au titre de l’article 40.

Cet amendement concernait les maires qui sont agriculteurs dans les zones présentant des handicaps naturels. Une grande partie de ces élus perdent le bénéfice de l’indemnité compensatoire de handicaps naturels en raison de leurs indemnités, qui sont intégrées dans leurs revenus. Cette situation aura pour conséquence de diminuer encore le nombre de maires agriculteurs, alors qu’il n’y en a déjà plus beaucoup…

Vous devez, monsieur le ministre, régler ce problème.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Durain

Je m’associe aux intervenants précédents sur ce rappel au règlement, qui n’en est pas un.

Sur ce sujet extrêmement important qu’est l’engagement des personnes en situation de handicap, il est étrange que le gage ne soit pas levé par le Gouvernement, alors que, de facto, la situation est anormale. Cela ne rend pas justice à l’engagement dont font preuve ces élus, voire cela les pénalise davantage. Or, depuis le début de ce texte, nous sommes réunis pour favoriser l’engagement.

Je souhaite donc que le Gouvernement puisse trouver la meilleure solution pour faciliter l’engagement des élus en situation de handicap.

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Cartron

Comme l’a indiqué le président Bas, j’ai déposé cet amendement pour résoudre ce problème. Il me semble que cela s’inscrit dans les grands objectifs de ce projet de loi qui veut favoriser l’engagement.

Cela a été dit, une personne en situation de handicap qui siège dans un conseil municipal en tant qu’adjointe est la seule à ne pas percevoir d’indemnité. Or il faut favoriser la place des handicapés, leur engagement et leur citoyenneté. Le fait de percevoir une allocation de handicap l’empêche de bénéficier de ce qui n’est qu’une indemnité visant à compenser les frais liés à l’exercice de son mandat : elle se trouve donc pénalisée à une certaine hauteur de revenus qui n’a rien de scandaleux.

L’adjoint que je connais se demande s’il ne va pas quitter ses fonctions. Il vit cette situation comme une discrimination et, du fait de son handicap, ne se sent pas reconnu comme un citoyen à égalité avec les autres. C’est la raison pour laquelle j’ai déposé cet amendement, qui a été déclaré irrecevable au titre de l’article 40, ce dont je suis très déçue.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Bascher

Cependant, monsieur le ministre, je suis sûr qu’un coup de fil à un ami, …

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Bascher

… au ministre de l’action et des comptes publics, permettrait qu’un amendement du Gouvernement puisse être déposé. Cela vous honorerait et vous pourriez en récolter les fruits. Ainsi, on ne violerait pas l’article 40 tout en agissant en faveur de l’inclusion.

Debut de section - PermalienPhoto de Vivette Lopez

Je tiens à remercier le président de la commission des lois, M. Philippe Bas, de ce rappel au règlement. J’ai moi-même déposé un amendement allant dans le même sens. C’est pourquoi je partage tout ce qui vient d’être dit.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Requier

Au nom de mon groupe, je remercie moi aussi Philippe Bas de cette heureuse initiative. Un maire handicapé n’a pas à subir une double peine. Je soutiens entièrement cette démarche.

Je ne serai pas plus long, mes chers collègues, car je vous rappelle qu’il nous reste 324 amendements à examiner !

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Gatel

Je remercie également le président Bas de nous permettre, alors même que nos débats sont un peu longs, d’avoir ce moment particulier, extrêmement grave, qui est un moment d’humanité où nous traitons de l’une de nos valeurs, l’égalité de tous les citoyens.

Monsieur le ministre, moi non plus, je ne vous ferai pas de procès d’intention. Nous avons eu l’occasion de parler de cet amendement, et je suis empreinte tout à la fois de gravité et d’espérance, car je ne doute pas que, pendant que nous poursuivrons la discussion des amendements, le Gouvernement trouvera une solution qui l’honorera, d’autant qu’il défend et prône une société de l’inclusion.

Au moment où je m’adresse à vous, j’ai entre les mains la lettre d’Alain Lacorne, maire des Brulais, commune de mon département qui compte 500 habitants. Au mois de septembre dernier, il m’écrivait ceci : « Ma requête est simple, madame la sénatrice : » – je dirai à mon tour : ma requête est simple, monsieur le ministre – « alors que, le Gouvernement comme nous tous, nous nous inquiétons pour 2020 d’un manque de volontaires pour prendre des responsabilités, souvent dans nos petites communes, cette loi, qui s’appelle Engagement, est l’occasion de donner la chance à tous les citoyens qui le souhaitent de pouvoir jouer un rôle important dans la cité.

« Par ailleurs, quelle place veut-on donner aux personnes handicapées ? Elles ont toute leur place parmi nous. »

Je vous remercie, monsieur le ministre, d’œuvrer pour que nous trouvions avant la fin de nos débats une solution dont nous serions tous fiers.

Debut de section - Permalien
Sébastien Lecornu

Je vous remercie, monsieur le président de la commission des lois de cette prise de parole. Reste que nous nous sommes quittés hier à une heure du matin après une discussion sur les pouvoirs de police des maires, à l’occasion de l’examen des amendements à l’article 13. Or les questions que vous soulevez correspondent aux articles 26 à 36. Je le précise, car nous assistons à une succession de non-rappels au règlement – je découvre le Sénat –, qui sont en quelque sorte des rappels au règlement d’appel, qui peuvent être un appel à toute autre chose, non pas à un ami, mais plutôt au Gouvernement.

Ces non-rappels au règlement portent sur un amendement qui n’a pas pu être déposé…

Debut de section - Permalien
Sébastien Lecornu

… en séance pour les raisons que vous avez indiquées, monsieur le président de la commission – c’est d’ailleurs l’objet même de votre intervention –, et qui porte sur un article que nous n’examinerons ni tout de suite, ni certainement ce soir, puisqu’il nous reste beaucoup d’amendements et qu’il est plus de dix-huit heures, ni même demain matin.

J’en viens au fond. Je vois bien l’emballement que suscite ce sujet, mais je veux qu’on le règle dans le calme, car il est grave.

Dans la discussion générale – c’est-à-dire, comme nous passons nos journées et nos nuits tous ensemble, voilà plus d’une semaine –, j’ai évoqué cette question. Je me tourne d’ailleurs vers le sénateur Kerrouche, parce que nous avons travaillé ensemble sur un point très précis de ce problème, à savoir les frais de déplacement, notamment dans les intercommunalités.

Lors de la discussion générale, j’ai indiqué deux choses.

D’une part, tel qu’il était rédigé, l’amendement du sénateur Kerrouche sur les frais de déplacement était un bon amendement, dont je permettais la discussion. Je crois d’ailleurs, monsieur le sénateur Kerrouche, que vous avez pu le déposer. Voilà le premier cas de figure très précis et très concret.

D’autre part, sur le second cas de figure, la question de l’AAH, j’ai dit à la tribune – je me le rappelle d’autant plus que j’avais noté sur un petit papier les points que je devais aborder en plus du discours que j’avais préparé – qu’il fallait me laisser du temps, au mieux jusqu’à la fin de la discussion de ce texte au Sénat, au pire jusqu’à l’Assemblée nationale.

Je sais que Sophie Cluzel se trouvait ici hier matin pour répondre à vos questions orales, je l’ai croisée salle des conférences. Nos services respectifs continuent de se parler pour vous proposer un amendement gouvernemental qui, au-delà de l’opportunité, soit sérieux dans sa rédaction juridique, mais aussi, puisque nous en avons parlé à l’instant en aparté, monsieur le président Bas, à même de bien cibler la seule question des revenus liés aux indemnités. Disons les choses : d’autres groupes d’intérêt nous interpellent aussi pour ouvrir cette question à d’autres types de revenus et pour aller au-delà. Or c’est la question des indemnités qui est ici posée.

Après ces non-rappels au règlement ou rappels au règlement d’appel, mesdames, messieurs les sénateurs, je vous propose de continuer l’examen des amendements.

Monsieur le sénateur Marc, vous êtes allé un peu loin ! Vous me connaissez, nous avons travaillé ensemble sur votre proposition de loi et vous commencez maintenant à saisir la manière dont je travaille avec le Sénat, j’y prends d’ailleurs beaucoup de plaisir. Vous entendre me dire que, tout d’un coup, il y aurait une intention du Gouvernement, pour être honnête avec vous, je le prends à moitié bien. Je pense être attentif et à l’écoute de tous les groupes depuis le début de la discussion.

Si vous me faites confiance, à défaut de faire confiance au Gouvernement, au sens politique et juridique du terme, c’est-à-dire si vous faites confiance à l’homme qui le représente devant vous, je vous propose de continuer la discussion des amendements et de vous soumettre un amendement gouvernemental d’ici à la fin de l’examen de ce texte. J’aimerais vraiment pouvoir le présenter d’abord au Sénat – je dois faire attention à ce que je dis. Je veux que l’on puisse avancer sur cette question qui me tient à cœur.

Monsieur le président de la commission des lois, vous avez rappelé mes propos dans Ouest-France. Vous avez de bonnes et saines lectures normandes, je vous reconnais bien là ! §Je le répète, je souhaite avancer sur cette question. Il faut la traiter au calme, avec un amendement robuste et sérieux, qui montre bien ce que nous souhaitons faire. Permettez que je travaille en temps masqué avec l’Assemblée nationale pour être sûr que la navette parlementaire soit fructueuse et que l’on aboutisse à un large consensus sur ce sujet qui n’appelle aucune forme d’opposition politique. Merci de votre bienveillance sur cette question fondamentale !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Gabouty

Non, monsieur le président de la commission, ce n’était pas un rappel au règlement. Nous reprenons maintenant l’examen du texte de la commission.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Gabouty

L’amendement n° 581 rectifié, présenté par MM. H. Leroy, Meurant, Laménie et Frassa, Mmes Deromedi, Sittler et Bruguière et M. Guerriau, est ainsi libellé :

Après l’article 13

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l’article L. 2212-2-2 du code général des collectivités territoriales, il est inséré un article L. 2212-2-… ainsi rédigé :

« Art. L. 2212 -2-… – Le maire est chargé de la protection de l’environnement et des populations et peut, à ce titre, édicter des mesures de police spéciale environnementale destinées à limiter toute forme de pollution.

« Dans ce cadre, le maire est autorisé à édicter des mesures spéciales destinées à limiter les nuisances environnementales générées par la circulation des véhicules ainsi que des navires mouillant dans les baies maritimes. »

La parole est à M. Marc Laménie.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laménie

Voici ce que vous aurait dit mon collègue Henri Leroy, qui est le premier signataire de cet amendement.

« Notre maison brûle et nous regardons ailleurs ». Le 2 septembre 2002, l’ancien Président de la République Jacques Chirac, à qui nous avons rendu hommage, prononçait ces mots au sommet de la Terre à Johannesburg.

Dix-sept ans après, les Français mesurent tous l’importance du défi environnemental. Il est de notre responsabilité, dans cette assemblée, de nous préoccuper de la terre que nous voulons transmettre à nos enfants et aux générations futures.

En la matière, nous avons beaucoup à attendre des chefs d’État, à commencer par notre Président de la République, et nous devons à leur égard être exigeants.

Reste que préserver notre environnement et notre planète commence d’abord devant sa porte. C’est l’affaire de chaque Français, de chaque élu.

Mes chers collègues, nous devons donner aux maires de nouveaux pouvoirs, pour qu’ils puissent, à l’échelon territorial le plus élémentaire, participer à la sauvegarde de notre planète. C’est pourquoi cet amendement vise à autoriser le maire à édicter des mesures spéciales destinées à limiter les nuisances environnementales générées par la circulation des véhicules ainsi que par les navires mouillant dans les baies maritimes.

Debut de section - PermalienPhoto de Mathieu Darnaud

Je reprends la discussion sous le même angle que celui sous lequel nous avons conclu celle d’hier.

Cet amendement est, dans l’esprit comme au sens de la loi, satisfait. Je l’ai dit hier à Henri Leroy, qui a déposé des amendements sur d’autres polices spéciales du maire. Le droit actuel suffit, puisque le maire bénéficie de plusieurs pouvoirs de police lui permettant de prendre des mesures destinées à prévenir les atteintes à l’environnement.

Par conséquent, la commission demande le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laménie

Dans la mesure où notre collègue tient particulièrement à cet amendement, je le maintiens, monsieur le président.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Gabouty

La parole est à M. le président de la commission des lois.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

Monsieur le président, j’ai souhaité mettre un peu de souplesse dans nos travaux et n’ai donc pas insisté pour prendre la parole au moment où je l’ai demandée, mais je rappelle que le règlement prévoit que, quand le président de la commission qui est au banc demande la parole, il doit la prendre.

Monsieur le ministre, je vous donne acte de votre propos. Pour autant, nous ne laisserons pas sortir le texte du Sénat sans que ce problème ait été résolu. Vous demandez la confiance à l’égard du Gouvernement. Je demande la confiance à l’égard du Sénat. En d’autres termes, si vous n’êtes pas sûr que notre amendement remplisse toutes les conditions pour être validé, nous préférons néanmoins qu’il soit adopté et transmis à l’Assemblée nationale, ce qui vous laissera largement le délai nécessaire pour lever tous les éventuels inconvénients que vous redoutez.

Il me paraît très important que, à défaut d’une réponse du Gouvernement sur le fond d’ici à l’examen de l’article 28 de ce projet de loi, le Gouvernement prenne l’engagement de lever l’article 40, ce qui, naturellement, ne l’engage pas définitivement dans la suite du processus législatif. Si cette disposition avait besoin d’être améliorée, nous serions à l’écoute du Gouvernement pour agir en ce sens jusqu’à la commission mixte paritaire.

Sortir du Sénat sans avoir réglé ce problème au moins à titre conservatoire, alors que c’est une demande générale et que vous en partagez, je crois, l’intention, monsieur le ministre, serait tout simplement pour notre assemblée inacceptable. Si vous voulez que la confiance soit réciproque, vous devez accepter cette exigence, qui n’est nullement exorbitante.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - Permalien
Sébastien Lecornu

Monsieur le président de la commission des lois, je me suis engagé devant vous, avant même que ce texte ne débute, à m’inspirer des travaux du Sénat et à faire acte de coproduction.

Je l’ai fait d’autant plus que nous nous connaissons depuis longtemps et que, avant de nous retrouver sur ces bancs, nous avons eu une autre vie, notamment comme présidents de nos départements respectifs.

Je l’ai fait, parce que j’ai donné ma parole à Gérard Larcher.

Je l’ai fait lorsque j’ai reçu tous les présidents de groupe du Sénat – un certain nombre d’entre eux sont présents et peuvent en témoigner, notamment Bruno Retailleau. À chaque fois, je me suis engagé à tendre vers la solution la plus consensuelle possible. Je pense en avoir fait la démonstration depuis le début, même si je ne suis pas d’accord avec tout – preuve en est, il m’arrive d’être encore plus ruraliste que le Sénat !

Monsieur le président de la commission des lois, pour avoir occupé des fonctions éminentes comme secrétaire général de l’Élysée et comme ministre de la santé, vous savez que, lorsque l’on n’est pas ministre en titre d’une question ou chef de file, la dimension interministérielle entre en ligne de compte. Quand bien même on n’a pas d’expérience de cette nature, on peut deviner comment cela fonctionne : il faut faire travailler la machine interministérielle. L’ancien ministre Karoutchi et, quelle que soit leur place dans les travées, ceux qui ont été membres d’un gouvernement savent qu’il faut consolider un certain nombre de dispositions ou de dispositifs.

Mesdames, messieurs les sénateurs, vous ne vous en êtes pas rendu compte – ce n’est pas votre affaire, et vous avez bien raison –, mais, la semaine dernière, à la suite d’un certain nombre d’interventions, j’ai complètement changé les avis du Gouvernement, parce que nous étions sur une matière dont j’étais le chef de file politique et que le Président de la République et le Premier ministre m’ont confié la responsabilité des collectivités territoriales. En tant que chef de mon administration, il est de ma responsabilité de donner la parole du Gouvernement sur des sujets liés à l’intercommunalité, au code général des collectivités territoriales.

Or nous parlons là d’une matière à la fois sociale et fiscale. D’ailleurs, c’est bien pour cela que la Constitution et les règlements des assemblées prévoient un certain nombre de dispositifs qui peuvent entraver ; vos rappels au règlement d’appel sur ce sujet en attestent.

Je travaille actuellement à l’échelon interministériel à une solution que je vous proposerai.

Que tout monde y mette du cœur est une bonne chose, mais ne doutez pas de ma sincérité ! Lever ou non le gage sur l’article 40 n’a rien à voir. Je tiens à le dire, car je pense l’avoir exprimée à de nombreuses reprises depuis le début de la semaine dernière.

Pour ma part, ce que je veux sur ce sujet important, c’est que le Gouvernement se présente devant vous avec une proposition que vous amenderez à votre guise et vous voterez ou non. Je le dis à l’ancien ministre de la santé : sur cette question importante, je trouve juste que le Gouvernement se présente avec une proposition qui, dans l’économie globale de ce projet de loi, sera le fruit d’une coproduction entre, d’un côté, l’Assemblée nationale et le Sénat et, de l’autre, dans une autre mesure et à leur place, les associations d’élus, quand elles ont bien voulu nous aider, et le Gouvernement.

Je n’ai qu’un seul vœu, c’est d’aboutir à un résultat.

J’espère que mes propos auront rassuré l’ensemble des membres du Sénat.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Gabouty

L’amendement n° 561 rectifié, présenté par MM. Temal et Iacovelli, Mmes Ghali et Conway-Mouret, MM. Joël Bigot et M. Bourquin, Mme Lepage, MM. Vaugrenard, Manable, Todeschini et P. Joly, Mme Blondin et M. Daudigny, est ainsi libellé :

Après l’article 13

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le 11° de l’article L. 251-2 du code de la sécurité intérieure, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« … La constatation des infractions définies aux articles R. 632-1 et R. 635-8 du code pénal. »

La parole est à M. Xavier Iacovelli.

Debut de section - PermalienPhoto de Xavier Iacovelli

Les dépôts sauvages coûtent tous les ans entre 340 millions et 420 millions d’euros aux contribuables. Cela concerne non seulement leur retrait, mais aussi la dépollution. C’est énorme !

À Boissy-l’Aillerie, ville située dans le département de Rachid Temal, qui est à l’origine de cet amendement, ce sont 4 500 mètres cubes de déchets ménagers et gravats qui ont dû être retirés. La remise en état du terrain agricole aura coûté pas moins de 320 000 euros à la commune.

Avec cet amendement, il est proposé de faire le choix de la sécurité juridique pour les maires qui font déjà un usage répressif de la vidéoprotection au titre de la protection des bâtiments et installations publics et leurs abords. À cette occasion, il s’agit d’assurer nos communes du soutien que nous leur apportons dans la guerre qu’elles mènent contre les dépôts sauvages.

Debut de section - PermalienPhoto de Mathieu Darnaud

Le dispositif prévu par cet amendement va dans le bon sens, d’autant plus que, dans le cadre des pouvoirs de police et des pouvoirs d’amende qui lui sont confiés, le maire doit démontrer le caractère récurrent ou la continuité de l’infraction. Cela améliore donc le constat.

Pour autant, un dispositif totalement similaire a été voté dans le projet de loi Économie circulaire, et nous ne souhaitons pas que cet amendement vienne concurrencer ce texte.

La commission demande donc le retrait de cet amendement, qui paraît largement satisfait ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.

Debut de section - Permalien
Sébastien Lecornu

Même avis que la commission.

Debut de section - PermalienPhoto de Xavier Iacovelli

Nous avions une petite idée de la position de la commission et du Gouvernement sur cet amendement, mais nous attendions l’engagement du Gouvernement que nous n’aurons pas à revenir en deuxième lecture sur l’amendement adopté par la grande majorité du Sénat lors de l’examen du projet de loi Économie circulaire. C’est d’ailleurs pour cette raison que nous avons déposé cet amendement.

Si M. le ministre me confirme que l’Assemblée nationale ne proposera pas la suppression de cette disposition, nous retirons l’amendement.

Le titre VIII du livre IV du code de l’urbanisme est ainsi modifié :

1° L’intitulé est ainsi rédigé : « Dispositions relatives aux contrôles, aux sanctions et aux mesures administratives » ;

2° Au début, il est ajouté un chapitre préliminaire intitulé : « Constat des infractions et sanctions pénales et civiles » qui comprend les articles L. 480-1 à L. 480-17 ;

3° Il est ajouté un chapitre Ier ainsi rédigé :

« CHAPITRE I ER

« Mise en demeure, astreinte et consignation

« Art. L. 481 -1. – I. – Lorsque des travaux mentionnés aux articles L. 421-1 à L. 421-5 ont été entrepris ou exécutés en méconnaissance des obligations imposées par les titres Ier à VII du présent livre et les règlements pris pour leur application ainsi que des obligations mentionnées à l’article L. 610-1 ou en méconnaissance des prescriptions imposées par un permis de construire, de démolir ou d’aménager ou par la décision prise sur une déclaration préalable et qu’un procès-verbal a été dressé en application de l’article L. 480-1, indépendamment des poursuites pénales qui peuvent être exercées pour réprimer l’infraction constatée, l’autorité compétente mentionnée aux articles L. 422-1 à L. 422-3-1 peut, après avoir invité l’intéressé à présenter ses observations, le mettre en demeure, dans un délai qu’elle détermine, soit de procéder aux opérations nécessaires à la mise en conformité de la construction, de l’aménagement, de l’installation ou des travaux en cause aux dispositions dont la méconnaissance a été constatée, soit de déposer, selon le cas, une demande d’autorisation ou une déclaration préalable visant à leur régularisation.

« L’autorité compétente peut également mettre en demeure l’intéressé de suspendre la réalisation de la construction, de l’aménagement, de l’installation ou des travaux qui font l’objet d’un procès-verbal établi en application de l’article L. 480-1.

« II. – Le délai imparti par la mise en demeure est fonction de la nature de l’infraction constatée et des moyens d’y remédier. Il peut être prolongé, pour une durée qui ne peut excéder un an, par l’autorité compétente pour tenir compte des difficultés que rencontre l’intéressé pour s’exécuter.

« III. – L’autorité compétente peut assortir la mise en demeure d’une astreinte au plus égale à 500 € par jour de retard.

« L’astreinte peut également être prononcée, à tout moment, après l’expiration du délai imparti par la mise en demeure, le cas échéant prolongé, s’il n’y a pas été satisfait, après avoir invité l’intéressé à présenter ses observations.

« Son montant est modulé en tenant compte de l’ampleur des mesures et travaux prescrits et des conséquences de la non-exécution.

« Le montant total des sommes demandées ne peut être supérieur à 25 000 €.

« Art. L. 481 -2. – I. – L’astreinte court à compter de la date de la notification de l’arrêté la prononçant et jusqu’à ce qu’il ait été justifié de l’exécution des opérations nécessaires à la mise en conformité ou des formalités permettant la régularisation. Le recouvrement de l’astreinte est engagé par trimestre échu.

« II. – Les sommes dues au titre de l’astreinte sont recouvrées, dans les conditions prévues par les dispositions relatives aux produits communaux, au bénéfice de la commune sur le territoire de laquelle est implanté l’immeuble ayant fait l’objet de l’arrêté. Dans le cas où l’arrêté a été pris par le président d’un établissement public de coopération intercommunale, l’astreinte est recouvrée au bénéfice de l’établissement public concerné.

« III. – L’autorité compétente peut, lors de la liquidation trimestrielle de l’astreinte, consentir une exonération partielle ou totale de son produit si le redevable établit que la non-exécution de l’intégralité de ses obligations est due à des circonstances qui ne sont pas de son fait.

« Art. L. 481 -3. – I. – Indépendamment des poursuites pénales qui peuvent être exercées, lorsque la mise en demeure prévue à l’article L. 481-1 est restée sans effet au terme du délai imparti, l’autorité compétente mentionnée aux articles L. 422-1 à L. 422-3-1 peut obliger l’intéressé à consigner entre les mains d’un comptable public une somme répondant du montant des travaux à réaliser, laquelle sera restituée à l’intéressé au fur et à mesure de l’exécution des mesures prescrites.

« Pour le recouvrement de cette somme, il est procédé comme en matière de créances étrangères à l’impôt et au domaine et l’État bénéficie d’un privilège de même rang que celui prévu à l’article 1920 du code général des impôts.

« II. – L’opposition à l’état exécutoire pris en application d’une mesure de consignation ordonnée par l’autorité compétente devant le juge administratif n’a pas de caractère suspensif. »

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Gabouty

L’amendement n° 773 rectifié, présenté par Mmes Assassi et Cukierman, M. Savoldelli, Mmes Gréaume et Benbassa, M. Bocquet, Mmes Apourceau-Poly, Brulin et Cohen, MM. Gay, Gontard et P. Laurent, Mmes Lienemann et Prunaud et M. Ouzoulias, est ainsi libellé :

Alinéa 10

Remplacer le nombre :

par le nombre :

La parole est à Mme Michelle Gréaume.

Debut de section - PermalienPhoto de Michelle Gréaume

Par cet amendement, nous restons cohérents avec deux de nos amendements précédents, en refusant d’augmenter le montant du plafond de l’astreinte pouvant être donnée par les autorités compétentes, dont le maire, en cas de constructions irrégulières. En effet, dans le projet de loi initial, ce montant était fixé à 200 euros ; la commission des lois l’a porté à 500 euros.

Comme nous l’avons déjà expliqué, nous ne souhaitons pas faire de ce texte un moyen de consacrer des mesures trop répressives, dont l’efficacité reste douteuse, et qui ajoutent bien des responsabilités sur le dos des élus locaux.

Debut de section - PermalienPhoto de Mathieu Darnaud

Il ne faut confondre répressif et dissuasif. Ce sont deux notions différentes.

L’augmentation de 200 à 500 euros de l’astreinte, étant entendu que nous avons prévu un plafond – cette astreinte ne peut pas s’appliquer à l’infini –, est de nature à avoir un caractère dissuasif, sans tomber dans le tout-répressif.

J’en suis certain, nous aurons ce débat à plusieurs reprises dans cet hémicycle, ce soir : nous donnons aux maires qui le souhaitent les moyens d’agir. C’est une capacité et non une obligation. J’insiste sur ce point, sinon on va s’opposer toujours les mêmes arguments. Tel est le but de ce texte.

J’entends votre crainte, madame Gréaume : l’objectif n’est surtout pas de mettre le maire devant des responsabilités excessives ou de l’exposer davantage encore. Il s’agit seulement de proposer un dispositif un peu plus dissuasif sur certains sujets.

La commission demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.

Debut de section - Permalien
Sébastien Lecornu

Sur le fond, je ne peux pas être contre cet amendement, parce que c’est la rédaction initiale du Gouvernement, mais je comprends ce que la commission a voulu faire. C’est pourquoi je m’en remets à la sagesse du Sénat.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Gabouty

La parole est à M. Joël Labbé, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Joël Labbé

J’interviens à titre personnel, n’ayant pas eu de débat avec mon groupe sur ce sujet.

Je suis extrêmement dérangé par ce genre de mesure. Lors de l’examen de la loi ALUR, nous avons eu une véritable discussion sur les questions d’habitats alternatifs, d’habitats précaires, yourtes, etc. Il y a ceux qui les choisissent et ceux qui les subissent, mais il y a aussi une partie grandissante de la population qui estime que notre modèle de société nous emmène dans le mur – et on le sait ! – et qui choisit un habitat alternatif respectueux de la ressource, du climat et de la biodiversité.

Dans ces conditions, donner aux maires la possibilité de sanctionner plus lourdement est tout simplement incompréhensible et incompatible avec l’air du temps, même s’il faut bien régler certaines situations.

Il faudrait entreprendre un vrai travail de fond sur ce sujet pour avancer, car ces mesures sont en somme absolument incompréhensibles, d’autant que la population qui fait des choix alternatifs va aller grandissant.

Évidemment, je ne parle pas de l’habitat sauvage sur des terrains privés, mais, dès l’instant qu’il y a accord du propriétaire ou que le terrain est en propriété, on se doit de se poser différemment la question.

Debut de section - PermalienPhoto de Mathieu Darnaud

Je redis ce que j’ai déjà dit.

Nous partageons tous l’idée qu’il faut faire confiance à l’élu. D’ailleurs, la philosophie de ce texte, c’est de remettre l’élu au cœur de la prise de décision, en lui donnant les moyens de traiter les questions qui se posent à lui. Certes, certains les utiliseront peut-être de façon abusive, mais on ne pourra jamais avancer sur ces questions si on n’accorde pas un minimum de confiance.

Monsieur Labbé, il s’agit surtout de ne pas parvenir à ce que vous décrivez. Nous sommes ici pour faire le droit et nous sommes avant tout animés par la volonté de répondre aux problèmes dont nous avons largement évoqué les impacts négatifs pour les maires lors des préconisations et du bilan de la consultation engagée par le Sénat et la commission des lois sur les atteintes à la sécurité des élus et des maires. Certaines situations, à l’instar de celles que nous venons d’évoquer, sont de nature à leur poser des problèmes au quotidien.

Je le répète, je ne voudrais pas que la question de l’astreinte ou de l’amende soit systématiquement interprétée comme une volonté abusive de la part du Sénat de porter atteinte à un mode de vie. En effet, vous l’avez rappelé, des règles existent, qui tiennent au droit de la propriété et à certains usages.

Sans entrer dans ce débat, je crois que l’on doit admettre un principe fondamental, c’est la confiance que nous devons avoir dans les élus et dans leur capacité de discernement face à ce type de problème.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

L ’ article 14 est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Gabouty

L’amendement n° 686 rectifié, présenté par MM. Maurey, Longeot, L. Hervé, Cigolotti, Médevielle et Capo-Canellas, Mmes Morin-Desailly, Perrot et Billon, M. Prince, Mmes Sollogoub et Vérien, M. Mandelli, Mme Duranton, MM. Mizzon, de Nicolaÿ et Canevet, Mme de la Provôté, M. Lefèvre, Mmes Ramond et Vermeillet, M. Guerriau, Mme Sittler et MM. Duplomb et H. Leroy, est ainsi libellé :

Après l’article 14

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le code de l’urbanisme est ainsi modifié :

1° L’article L. 332-6 est complété par six alinéas ainsi rédigés :

« 6° La cession gratuite, à l’autorité qui délivre un permis de construire ou un permis d’aménager portant sur un lotissement, de terrains destinés à être affectés à l’élargissement, au redressement ou à la création des voies publiques.

« Cette cession ne peut porter que sur la superficie strictement nécessaire à la réalisation de ces opérations et ne peut représenter plus de 10 % de la surface du terrain faisant l’objet de la demande.

« L’autorité publique bénéficiaire notifie au titulaire du permis de construire ou du permis d’aménager la demande de cession à titre gratuit ainsi que les parcelles et la superficie faisant l’objet de cette cession.

« En cas de désaccord, les parcelles et la superficie de terrain cédés à titre gratuit sont fixées par un juge désigné, pour chaque département, parmi les magistrats du siège appartenant à un tribunal de grande instance.

« En l’absence de saisine du juge dans les deux mois suivants la notification, la cession à titre gratuite est réputée être acceptée.

« Toutefois, cette possibilité de cession gratuite est exclue lorsque le permis de construire concerne un bâtiment agricole autre qu’un bâtiment d’habitation » ;

2° Au troisième alinéa de l’article L. 331-15, après les mots : « rectificative pour 2014, », sont insérés les mots : « ainsi que le 6° de l’article L. 332-6 ».

La parole est à M. Jean-François Longeot.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Longeot

Cet amendement de bon sens, qui a été déposé par Hervé Maurey et cosigné par un grand nombre de collègues, vise à réintroduire la possibilité pour les communes de bénéficier à titre gratuit de la cession de terrains par les bénéficiaires d’autorisations de construire. Un permis de construire peut en effet être accordé à un propriétaire en contrepartie de la cession à la commune d’une bande de terrain afin d’y effectuer un certain nombre d’aménagements, le plus souvent d’ordre sécuritaire.

Cette disposition a été censurée par le Conseil constitutionnel, non pour la disposition en elle-même, mais au motif que le législateur a méconnu sa propre compétence.

Il apparaît opportun d’autoriser à nouveau cette facilité bien connue et appréciée des élus. Elle permet de libérer du foncier pour réaliser les travaux d’aménagement d’une voirie dans un lotissement sans pour autant créer une taxe.

L’amendement vise à tirer les conclusions de la décision du Conseil constitutionnel en précisant de manière claire les usages publics des terrains cédés à titre gratuit aux communes et en encadrant cette pratique. Je rappelle que cette disposition avait été adoptée par le Sénat en 2012, dans le cadre du projet de loi relatif à la mobilisation du foncier public en faveur du logement et au renforcement des obligations de production de logement social, puis supprimée par l’Assemblée nationale.

J’espère que le bon sens l’emportera aujourd’hui et que nous répondrons à l’attente légitime des élus, qui souhaitent améliorer la sécurité dans leur collectivité.

Debut de section - PermalienPhoto de Mathieu Darnaud

Je n’ai nullement l’intention de contester le bon sens de cet amendement. À titre personnel, j’y suis en fait assez favorable.

Pour autant, vous le savez, et il en ira de même pour d’autres amendements, nous veillons à avoir une approche fine de ces sujets. Or il n’est pas toujours aisé d’expertiser les effets secondaires ou les effets de bord de ce type d’amendement. Pour cette raison, nous nous en remettons à l’avis du Gouvernement.

Debut de section - Permalien
Sébastien Lecornu

Je comprends l’intérêt de cet amendement. Néanmoins, de notre point de vue, le risque de censure constitutionnelle demeure, en dépit de la rédaction proposée.

Par ailleurs, lorsque l’on attribue un permis de lotir, une fiscalité est prélevée.

Je demande donc le retrait de cet amendement, craignant les effets de bords réels auxquels le rapporteur Darnaud a fait référence. Ce qui était possible avant ne l’est plus du fait de la censure. On sait désormais où se situe la limite.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Gabouty

La parole est à M. Ladislas Poniatowski, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Ladislas Poniatowski

Je regrette de ne pas avoir cosigné cet amendement, mais je vais me rattraper en le votant !

Je m’aperçois en lisant l’amendement en détail que j’ai été hors la loi pendant les dix ans durant lesquels j’ai présidé le syndicat d’électricité de mon département, que vous connaissez un peu, monsieur le ministre. §J’avais besoin de terrains pour y installer des transformateurs. Il m’arrivait de temps en temps de les acheter. Très souvent, les communes m’en donnaient quand elles en étaient propriétaires. Des particuliers m’en faisaient don également, et heureusement, car lorsque nous effectuons des renforcements électriques, c’est non pas pour le plaisir de construire, mais pour apporter de l’électricité dans les lotissements, dans les maisons, chez les commerçants, dans les PME.

J’ai eu recours à cette pratique sans interruption, sans jamais rencontrer de problème. Or je découvre en lisant l’objet de l’amendement que le Conseil constitutionnel considère qu’elle est illégale.

Monsieur le ministre, j’ai bien compris vos observations, mais je pense qu’il faut tout de même voter cet amendement. Allons-y ! On verra bien…

Nous parlons de pratique, de gestion quotidienne. Cet amendement vise ainsi typiquement la voirie. Pour la voirie, il faut des bordures de 1 ou 2 mètres de profondeur et de 40, 50 ou 60 mètres de longueur. On est bien content que des particuliers ou des communes jouent le jeu et fassent don de terrains à la communauté de communes, parfois au département. Le conseil général que vous présidiez alors – votre département est aussi le mien – était ainsi bien content de pouvoir bénéficier de rétrocessions de terrains. J’aimerais bien que cela continue.

Debut de section - Permalien
Sébastien Lecornu

M. Sébastien Lecornu, ministre. Monsieur le sénateur de l’Eure, alors que nous examinons un amendement de Hervé Maurey, lui aussi sénateur de l’Eure, je vous remercie de mettre en lumière mon conflit d’intérêts dans cette affaire.

Sourires.

Debut de section - Permalien
Sébastien Lecornu

Lorsque vous présidiez ce syndicat d’électricité, j’étais en effet président du conseil départemental, et nous bénéficions de rétrocessions de terrains. Dès lors, je me retire sur la pointe des pieds, sans émettre d’avis.

Je vous l’ai dit, je comprends l’intérêt de cet amendement, dont on me dit qu’il pourrait ne pas être constitutionnel. Puisque j’en ai la possibilité en tant que ministre, je m’en remets totalement à la sagesse du Sénat.

Sourires et applaudissements sur des travées des groupes UC et Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Gabouty

La parole est à M. Joël Guerriau, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Joël Guerriau

Je ne reviendrai pas sur les arguments qui viennent d’être avancés, que je partage. Nous avons tous une expérience sur le terrain au sein d’un exécutif ou d’un autre.

Le Sénat serait bien sage d’adopter cette mesure de bon sens. Le groupe Les Indépendants soutiendra cet excellent amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Gabouty

La parole est à M. Éric Kerrouche, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Kerrouche

Nous voterons également cet amendement, qui concerne notre pratique de tous les jours. On a tous eu besoin de cette facilité pour telle voirie ou telle voie verte. Il s’agit donc ici de simplifier la tâche des élus et de leur permettre de faire des choses.

L ’ amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Gabouty

En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 14.

Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 689 rectifié, présenté par MM. Maurey, Longeot, L. Hervé, Cigolotti, Médevielle et Capo-Canellas, Mmes Morin-Desailly, Perrot et Billon, M. Prince, Mme Sollogoub, M. Mandelli, Mme Duranton, MM. Mizzon, Joyandet, de Nicolaÿ, Canevet et P. Martin, Mmes de la Provôté et Létard, M. Lefèvre, Mme Ramond, M. Delcros, Mme Vermeillet, M. Guerriau, Mme Sittler et MM. Chasseing, Duplomb et H. Leroy, est ainsi libellé :

Après l’article 14

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

À l’article L. 2212-2-2 du code général des collectivités territoriales, les mots : « des voies communales » sont remplacés par les mots : « de la voie ou du domaine public ».

La parole est à M. Jean-François Longeot.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Longeot

Cet amendement porte sur les pouvoirs de police du maire en matière d’élagage.

La possibilité pour une commune d’effectuer elle-même les travaux d’élagage est appréciée par les élus. C’est un dispositif efficace, qui permet en outre d’assurer la sécurité. Obtenir de certains administrés qu’ils coupent leurs haies qui débordent sur la route nécessite des mesures administratives longues.

Le pouvoir de police des maires était limité aux chemins ruraux, il a été étendu aux voies communales dans le cadre de la loi de simplification et d’amélioration de la qualité du droit, par voie d’amendement, reprenant une proposition de loi déposée par M. Maurey. Une telle disposition pour la voirie départementale avait été adoptée par les deux assemblées lors du vote de la proposition de loi relative à la simplification du fonctionnement des collectivités territoriales en 2013, mais ce texte n’a jamais été définitivement adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Gabouty

L’amendement n° 690 rectifié, présenté par MM. Maurey, Longeot, L. Hervé, Cigolotti, Médevielle et Capo-Canellas, Mmes Morin-Desailly, Perrot et Billon, M. Prince, Mmes Sollogoub et Vérien, M. Mandelli, Mme Duranton, MM. Mizzon, Joyandet, de Nicolaÿ et Canevet, Mmes de la Provôté et Létard, M. Lefèvre, Mme Ramond, M. Delcros, Mme Vermeillet, M. Guerriau, Mme Sittler et MM. Chasseing, Duplomb et H. Leroy, est ainsi libellé :

Après l’article 14

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

À l’article L. 2212-2-2 du code général des collectivités territoriales, le mot : « communales » est remplacé par les mots : « sur lesquelles il exerce la police de la circulation en application de l’article L. 2213-1 ».

La parole est à M. Jean-François Longeot.

Debut de section - PermalienPhoto de Mathieu Darnaud

Puisque nous nageons dans le bon sens, nous sommes plutôt favorables à l’amendement n° 690 rectifié, dont la rédaction nous paraît plus appropriée.

Debut de section - Permalien
Sébastien Lecornu

Monsieur le sénateur Longeot, je vous invite à retirer l’amendement n° 689 rectifié, au profit de l’amendement n° 690 rectifié, dont la rédaction me paraît plus solide d’un point de vue juridique et sur lequel j’émets un avis favorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Longeot

Non, je le retire : je partage tout à fait le point de vue du ministre et du rapporteur.

L ’ amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Gabouty

En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 14.

L’amendement n° 546 rectifié, présenté par Mme Conconne, MM. Antiste, Todeschini, Lalande et Vaugrenard, Mme G. Jourda, M. Montaugé, Mmes Conway-Mouret, Perol-Dumont, Ghali et Artigalas et MM. Manable, Daudigny et Raynal, est ainsi libellé :

Après l’article 14

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Les articles L. 2243-2 et L. 2243-3 du code général des collectivités territoriales sont complétés par un alinéa ainsi rédigé :

« Lorsque le bien concerné fait l’objet d’une procédure de péril imminent telle que définie à l’article L. 511-3 du code de la construction et de l’habitation, le délai mentionné au premier alinéa du présent article est réduit à un mois. »

La parole est à Mme Catherine Conconne.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Conconne

Une fois de plus, je vais tenter de faire adapter au mieux les dispositions de la loi aux territoires que je connais le mieux, en particulier au mien.

Nous avons adopté ici il y a quelques mois une proposition de loi issue de l’Assemblée nationale sur l’indivision. Pour la première fois, une loi était votée pour les seuls pays d’outre-mer, afin de répondre à une situation particulière – c’est le cas dans beaucoup de secteurs – qu’on ne retrouve nulle part ailleurs.

Je tiens à vous faire part, et c’est l’une des conséquences de l’indivision, de la difficulté des maires aujourd’hui à faire adopter des arrêtés de péril ou des arrêtés d’abandon manifeste, compte tenu du nombre de dossiers à traiter et de la longueur des procédures.

Pendant toute la durée de la procédure, qui est encadrée par la loi – et c’est tant mieux, car il faut respecter le droit de propriété, qui est l’un des piliers de la République –, la gêne, le trouble continuent, et c’est le maire qui est pointé du doigt. Ce sont des balcons, des murs qui s’effondrent, des maisons qui deviennent insalubres, qu’envahissent les salissures, les déchets variés, et qu’on livre aux squatteurs.

Les procédures sont longues. Vous savez bien que, pour faire adopter un arrêté d’abandon manifeste, il faut emprunter un véritable labyrinthe. Au final, la décision du tribunal arrive beaucoup trop lentement, souvent trop tard.

Les maires que nous avons réunis avant l’examen du présent projet de loi nous ont fortement priés de relayer leur demande : ils souhaitent que le délai de publication du procès-verbal définitif constatant l’état d’abandon, qui est actuellement de trois mois, soit réduit à un mois, compte tenu du nombre de maisons et d’immeubles concernés et de la longueur des procédures par la suite.

Qui peut le plus peut le moins : il serait bien d’accélérer également les procédures en amont et de réduire à un mois le délai de réalisation du procès-verbal provisoire.

Debut de section - PermalienPhoto de Mathieu Darnaud

M. Mathieu Darnaud, rapporteur. Je comprends tout à fait les motivations de notre collègue Conconne. Cela étant, on touche là au droit de propriété, et je ne parlerai même pas du caractère inconstitutionnel d’une telle mesure, compte tenu de l’audace dont nous pouvons parfois faire preuve dans cet hémicycle.

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Mathieu Darnaud

En l’espèce, même si je comprends votre préoccupation et si je mesure l’importance de ce sujet pour votre territoire, je vous demande de retirer votre amendement. À défaut, j’émettrai un avis défavorable.

Debut de section - Permalien
Sébastien Lecornu

La situation m’est connue, vous aviez d’ailleurs eu la gentillesse de m’en parler lorsque j’étais venu dans votre département.

Même si le président Bas nous a invités la semaine dernière à braver la censure constitutionnelle de manière parfois très courageuse, je dois bien avouer qu’il n’est pas utile ici, à mon avis, de tenter l’aventure concernant le droit de propriété. Depuis la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, le droit de propriété a été consacré dans bien des textes fondamentaux et dans de nombreuses décisions.

Il nous faut donc trouver d’autres solutions que celle que tend à proposer votre amendement. J’en demande donc le retrait.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Conconne

Je le retire, la mort dans l’âme.

Il ne faut pas oublier que la France est le pays des procédures, des procédures longues, et de la paperasserie. Or, aujourd’hui, avec les moyens dont nous disposons, en particulier les moyens numériques et ceux que nous offre internet pour accélérer les procédures, nous pourrions réduire les délais à un mois sans porter atteinte au droit de propriété.

J’ai été adjointe au maire à la sécurité et à la tranquillité publiques pendant quatorze ans. Je peux vous dire qu’il m’est souvent arrivé d’avoir à forcer le temps pour accélérer un certain nombre de procédures dans des cas qui posaient lourdement problème.

La paperasserie nous envahit et devient une sorte de tradition. Le président de la commission des lois nous a dit tout à l’heure qu’il fallait oser braver la Constitution. On appelait chez nous ceux qui osaient braver la Constitution des « nègres marrons ». Pour ma part, je n’aurai pas la chance aujourd’hui d’être une négresse marron.

Mme Lana Tetuanui s ’ esclaffe et applaudit.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Gabouty

L’amendement n° 546 rectifié est retiré.

L’amendement n° 634 rectifié bis, présenté par MM. Chaize et Brisson, Mme Bonfanti-Dossat, M. Daubresse, Mme Deroche, MM. Lefèvre et Mouiller, Mmes Ramond et Deromedi, MM. D. Laurent, Saury, de Nicolaÿ et Genest, Mme Lassarade, M. Piednoir, Mmes Sittler, Morhet-Richaud et Gruny, MM. Bascher et Sido, Mmes Duranton et Bories, MM. Savary, Vaspart, Charon, Mandelli, Chevrollier, Laménie, Bonhomme, Rapin et Bonne, Mmes A.M. Bertrand, Chain-Larché et Thomas et MM. Bouloux, Gremillet et Poniatowski, est ainsi libellé :

Après l’article 14

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

La section 1 du chapitre II du titre III du livre Ier du code de la sécurité intérieure est complétée par un article L. 132-7-… ainsi rédigé :

« Art. L. 132 -7-…. – Sans préjudice des dispositions de l’article L. 512-1, des communes recourant à un système de vidéoprotection régi par le titre V du livre II peuvent, dans le respect des conditions de fonctionnement prévues aux articles L. 252-1 à L. 252-7, confier le visionnage des images pour l’ensemble de leurs territoires à une ou plusieurs personnes qu’elles emploient en commun ou dans le cadre d’une mise à disposition de ces personnes par la commune qui les emploie.

« Une convention, conclue entre l’ensemble des communes intéressées, précise les modalités d’organisation et de financement de l’emploi en commun ou de la mise à disposition de ces personnes et, le cas échéant, des équipements de vidéoprotection.

« Les modalités d’application du présent article sont fixées par décret en Conseil d’État. »

La parole est à M. Patrick Chaize.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Chaize

Cet amendement vise à favoriser la mutualisation en personnels et en équipements des missions de vidéosurveillance.

Aujourd’hui, une commune qui met en place sur son territoire un dispositif de vidéosurveillance mandate un officier habilité à exercer ce rôle de surveillance. Chaque commune peut effectuer cette démarche, mais il n’y a pas de possibilité de mutualisation des agents et des équipements.

Par cet amendement, une personne habilitée sur une commune à assurer la surveillance pourrait le faire pour le compte d’autres communes dès lors que les élus le décideraient, par convention ou par mandat. Dans le même esprit, les équipements pourraient eux aussi être mutualisés.

Une telle mesure permettrait de réaliser des économies substantielles en centralisant l’exercice de la mission de surveillance sur plusieurs communes. Plusieurs départements ayant des projets de cette nature sont bloqués pour des motifs juridiques.

Debut de section - PermalienPhoto de Mathieu Darnaud

L’amendement de notre collègue Patrick Chaize est doublement satisfait par le droit en vigueur. Cette mutualisation est tout à fait possible.

Depuis la loi du 5 mars 2007 relative à la prévention de la délinquance, les groupements de communes peuvent ainsi mettre en œuvre des systèmes de vidéoprotection et les mettre à disposition de leurs communes membres.

Par ailleurs, comme le rappelle une circulaire du ministre de l’intérieur du 12 mars 2009, plusieurs communes « peuvent, par voie de convention, charger l’une d’elles de gérer le centre de supervision urbaine pour le compte de chacune d’entre elles ».

Je ne vois pas l’intérêt qu’il y aurait à légiférer de nouveau sur ce sujet. Je demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, j’émettrai un avis défavorable.

Debut de section - Permalien
Sébastien Lecornu

Je demande également le retrait de cet amendement, qui est satisfait.

Sachez néanmoins que le ministre de l’intérieur réfléchit actuellement sur ce sujet. Certains présidents de conseil départemental l’ont saisi, et m’ont saisi, sur l’opportunité de créer des syndicats départementaux afin de traiter de toutes les questions de sécurité, qu’il s’agisse de la police municipale ou de la vidéoprotection. L’enjeu est toujours le même : mutualiser les moyens. Nous ne sommes bien sûr pas favorables aux délégations des pouvoirs de police des maires. Il faut en rester au périmètre de la commune, sur lequel le maire est compétent pour donner des instructions.

Tout cela ne se crée pas en droit en cinq minutes. Le Livre blanc sur la sécurité est en cours de mise à jour. Les questions territoriales seront au cœur de cette démarche.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Chaize

Non, je le retire, même si je ne suis pas convaincu par la réponse du rapporteur, qui me dit qu’on peut mutualiser les moyens au sein d’un même groupement. Ma question portait plus précisément sur la mutualisation des moyens par plusieurs communes ne faisant pas forcément partie d’un même groupement.

Plusieurs départements importants ont engagé une réflexion sur ce sujet, mais n’ont malheureusement pas les réponses juridiques leur permettant de mettre en œuvre leurs projets. Je pense aux départements des Yvelines, de l’Oise et à d’autres. Or une mutualisation pourrait à mon sens être tout à fait intéressante d’un point de vue à la fois économique et opérationnel.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Gabouty

L’amendement n° 634 rectifié bis est retiré.

L’amendement n° 94 rectifié bis, présenté par Mme N. Delattre, MM. Artano et Cabanel, Mme M. Carrère, MM. Castelli, Collin et Corbisez, Mme Costes, MM. Gabouty, Guérini et Jeansannetas, Mme Jouve et MM. Léonhardt, Requier, Roux et Vall, est ainsi libellé :

Après l’article 14

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au début de l’article L. 341-4 du code forestier, il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« L’autorité administrative compétente de l’État notifie dès sa réception le dépôt de toute demande d’autorisation au maire de la commune sur laquelle se situe le terrain dont le défrichement est envisagé. »

La parole est à Mme Nathalie Delattre.

Debut de section - PermalienPhoto de Nathalie Delattre

Le défrichement, qui est la destruction de l’état boisé d’un terrain, est réglementé par la loi du 13 octobre 2014 d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt. Les permis sont délivrés par les préfets, qui ne consultent pas les maires des communes concernées et ne leur notifient même pas leurs décisions, sauf lorsque les projets dépassent 0, 5 hectare et que l’autorité environnementale exige une étude d’impact. Une consultation est alors lancée, qui fait l’objet d’un affichage sur les lieux du projet et dans les mairies des communes dont le territoire est censé être affecté. C’est le plus souvent de cette façon que nos maires sont informés. Ce n’est pas normal !

Cet amendement vise à impliquer le maire dans le processus de décision et de consultation en créant un droit d’information pour ce dernier. L’amendement a été rectifié en lien avec la commission des lois. Il vise donc finalement à prévoir que le maire doit être informé lorsqu’une demande d’autorisation de défrichement est déposée auprès de l’autorité compétente de l’État par l’un des administrés de sa commune. Ce droit s’exercerait avant que l’autorisation ne soit octroyée, puisque la notification au maire interviendrait à la réception par l’autorité compétente de la demande d’autorisation, et non à l’issue de son instruction, comme c’est le cas aujourd’hui.

Debut de section - Permalien
Sébastien Lecornu

Je suis un peu ennuyé, car, même si je comprends bien le sens de l’amendement, je trouve qu’il alourdirait la procédure. Il faut l’avoir en tête.

N’ayant pas envie de vous être désagréable, madame la sénatrice, j’émettrai un avis de sagesse défavorable. Encore une fois, l’idée est sympathique et heureuse, mais l’exécution pourrait à mon avis se révéler un peu délicate.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Gabouty

La parole est à Mme Nathalie Delattre, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Nathalie Delattre

La procédure serait lourde pour les préfets, mais le but est que les maires soient informés, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui, qu’un défrichement va être effectué dans leur commune, alors que, bien souvent, ils ne sont pas d’accord avec cette mesure.

Alors, oui, la procédure serait alourdie pour les préfets, mais elle serait une grande avancée pour l’information des maires !

L ’ amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Gabouty

En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 14.

Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.

La séance est suspendue.

La séance, suspendue à dix-huit heures cinquante, est reprise à dix-neuf heures.

I. – L’article L. 2212-2-1 du code général des collectivités territoriales est ainsi rétabli :

« Art. L. 2212 -2 -1. – I. – Dans les conditions prévues au II, peut donner lieu à une amende administrative d’un montant maximum de 500 €, lorsqu’il présente un risque pour la sécurité des personnes, tout manquement à un arrêté du maire :

« 1° En matière d’élagage et d’entretien des arbres et des haies, donnant sur la voie ou le domaine public ;

« 2° Ou ayant pour effet de bloquer ou d’entraver la voie ou le domaine public, en y installant ou en y laissant sans nécessité ou sans autorisation tout matériel ou objet, ou en y déversant toute substance ;

« 3° Ou consistant, au moyen d’un bien mobilier, à occuper la voie ou le domaine public soit sans droit ni titre lorsque celui-ci est requis en application de l’article L. 2122-1 du code général de la propriété des personnes publiques, soit de façon non conforme au titre délivré en application du même article L. 2122-1, lorsque cette occupation constitue un usage privatif de ce domaine public, excédant le droit d’usage appartenant à tous.

« II. – Le manquement mentionné au I du présent article est constaté par procès-verbal d’un officier de police judiciaire, d’un agent de police judiciaire ou d’un agent de police judiciaire adjoint.

« Le maire notifie par écrit à la personne intéressée les faits qui lui sont reprochés, les mesures nécessaires pour faire cesser le manquement ainsi que les sanctions pénales et administratives encourues. Cette notification mentionne la possibilité de présenter des observations, écrites ou orales, dans un délai de quinze jours, le cas échéant assisté par un conseil ou représenté par un mandataire de son choix. Une copie du procès-verbal d’infraction et de cette notification est transmise au procureur de la République.

« À l’expiration de ce délai de quinze jours, si la personne n’a pas pris les mesures nécessaires pour faire cesser le manquement, le maire la met en demeure de se conformer à la réglementation dans un nouveau délai qui ne peut être inférieur à quinze jours.

« À défaut d’exécution des mesures prescrites dans le délai fixé par la mise en demeure et en l’absence de notification par le procureur de la République de son souhait d’engager des poursuites pénales, le maire peut, par une décision motivée qui indique les voies et délais de recours, prononcer l’amende administrative prévue au I. Le montant de l’amende est fixé en fonction de la gravité des faits reprochés, de la personnalité et de la situation personnelle de l’auteur des faits.

« La décision du maire prononçant l’amende est notifiée par écrit à la personne intéressée. Elle mentionne les modalités et le délai de paiement de l’amende. Cette décision est soumise aux dispositions de l’article L. 2131-1.

« Le recours formé contre la décision prononçant l’amende est un recours de pleine juridiction.

« L’amende administrative est recouvrée au bénéfice de la commune dans les conditions prévues par les dispositions relatives aux produits communaux.

« Le délai de prescription de l’action du maire pour la sanction d’un manquement mentionné au I du présent article est d’un an révolu à compter du jour où le manquement a été commis.

« III. – L’action publique est éteinte par le prononcé, par le maire, d’une amende administrative en application du présent article. »

II. – Le deuxième alinéa du 2° de l’article L. 2131-2 du code général des collectivités territoriales est complété par les mots : «, à l’exception des sanctions prises en application de l’article L. 2212-2-1 ».

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Gabouty

La parole est à Mme Christine Lavarde, sur l’article.

Debut de section - PermalienPhoto de Christine Lavarde

L’article 15 et les articles suivants ajoutés par la commission des lois visent à donner de nouveaux pouvoirs ou de nouvelles facultés aux élus locaux, notamment pour réglementer différents dispositifs en matière d’occupation et d’encombrement du domaine public.

À ce titre, je souhaiterais formuler deux remarques. Tout d’abord, je regrette que le dispositif de l’article 15 quinquies ne puisse pas s’appliquer aux établissements publics territoriaux, l’article L. 512-2 du code de la sécurité intérieure permettant aux établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre de recruter des agents pour verbaliser ou constater des infractions sur le domaine public ne s’appliquant pas, par nature, aux établissements publics territoriaux, puisque ces derniers ne sont pas dotés de la fiscalité propre.

Pour autant, l’article L. 5219-5 du code général des collectivités territoriales pose le principe d’une compétence des EPT en matière de gestion des déchets ménagers et assimilés. Ainsi, les EPT ont pu élaborer un règlement de collecte, mais ils ne peuvent pas le faire appliquer, en raison de l’absence d’agents compétents pour constater et réprimer les infractions aux dispositions des articles R. 632-1, R. 633-6, R. 635-8 et R. 644-2 du code pénal. Aujourd’hui, seul le Gouvernement pourrait corriger cette imperfection de la loi NOTRe, nos amendements ayant subi le couperet de l’article 40.

Le ministre va me répondre que la métropole du Grand Paris et les établissements publics territoriaux feront l’objet d’un prochain texte de loi. En l’espèce, il ne s’agit pas de revenir sur le partage des compétences, mais uniquement de leur donner un pouvoir qu’ils auraient pu avoir si, au moment de la rédaction de la loi NOTRe, cette petite subtilité concernant la compétence en matière de gestion des déchets avait été relevée.

Enfin, je suggère au Gouvernement d’étendre par la voie réglementaire les pouvoirs des agents de surveillance de la voie publique, les ASVP, au constat et à la verbalisation des infractions d’abandon de déchets ou de matériaux. Cette possibilité existe déjà pour les gardes champêtres et les agents de surveillance de Paris. Pourquoi ne pas la donner aux ASVP, qui sont déjà agréés par le procureur de la République pour constater, en application des dispositions de l’article L. 130-4 du code de la route ou de l’article L. 1312-1 du code de la santé publique, certaines contraventions tant au code de la route qu’à la propreté de l’espace public ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Gabouty

L’amendement n° 612 rectifié, présenté par MM. Bonhomme, Sido et H. Leroy, Mme Deromedi et MM. Mandelli, Laménie, Saury, Piednoir, Mouiller et Houpert, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

I. – L’article L. 2212-2-1 du code général des collectivités territoriales est ainsi rétabli :

« Art. L. 2212 -2 -1. – I. – Dans les conditions prévues au II, peuvent donner lieu à une amende administrative d’un montant maximum de 500 € les manquements à un arrêté du maire :

« 1° En matière d’élagage et d’entretien des arbres et des haies, donnant sur la voie ou de domaine public ;

« 2° Ou ayant pour effet de bloquer ou d’entraver la voie ou le domaine public, en y installant ou en y laissant sans nécessité tout matériel ou objet, ou en y déversant toute substance ;

« 3° Ou ayant pour effet, au moyen d’un bien mobilier, d’occuper la voie ou le domaine public sans droit ni titre lorsque celui-ci est requis, ou de façon non conforme au titre délivré sur le fondement de l’article L. 2122-1 du code général de la propriété des personnes publiques, et lorsque l’occupation constitue un usage privatif de ce domaine public, excédant le droit d’usage appartenant à tous.

« II. – Ces manquements sont constatés par procès-verbal d’un officier de police judiciaire, dont le maire, d’un agent de police judiciaire ou d’un agent de police judiciaire adjoint.

« Le maire notifie à la personne intéressée les faits qui lui sont reprochés, les mesures nécessaires pour faire cesser le manquement, les sanctions encourues ainsi que la possibilité de présenter des observations, écrites ou orales, dans un délai de quinze jours, le cas échéant assisté par un conseil ou représenté par un mandataire de son choix. Il met également en demeure le contrevenant d’effectuer les opérations nécessaires au respect de cette réglementation dans un délai de quinze jours débutant au lendemain du délai contradictoire susmentionné.

« Le maire informe le contrevenant qu’à l’expiration de cette procédure contradictoire, il ordonne le versement d’une amende administrative dont le montant, le délai de paiement et ses modalités sont précisés dans la mise en demeure.

« Si le contrevenant met en œuvre l’intégralité des opérations prescrites avant la fin du délai fixé dans la mise en demeure, il doit produire un document justifiant que les opérations ont été réalisées en conformité avec la réglementation en vigueur. À défaut un rapport des services techniques compétents constatant la réalisation de ces opérations et leur date d’achèvement permet de prononcer la mainlevée de l’arrêté. Seuls ces justificatifs peuvent permettre l’interruption de la procédure de sanctions administratives.

« À l’expiration du délai fixé par la mise en demeure, si les opérations prescrites n’ont pas été réalisées ou si elles l’ont été partiellement, le maire ordonne le versement d’une astreinte journalière jusqu’à mise en œuvre de l’intégralité des opérations exigées par la mise en demeure.

« Si l’inaction du contrevenant est à l’origine d’un trouble du bon ordre, de la sûreté, de la sécurité et de la salubrité, le maire fait procéder à l’exécution d’office des opérations prescrites par la mise en demeure, aux frais du contrevenant. Le montant mis à la charge du contrevenant est calculé, à la convenance de la commune, soit sur la base des frais réels, soit par application de forfaits établis en fonction la quantité et de la difficulté des travaux.

« Le recouvrement des frais engagés par la collectivité s’effectuera par l’émission d’un titre de recette auprès du comptable public.

« Le recours formé contre la décision prononçant ces sanctions est un recours de pleine juridiction.

« Le délai de prescription de l’action du maire pour la sanction d’une méconnaissance ou d’un manquement mentionné au premier alinéa est d’un an révolu à compter du jour où le premier manquement a été commis ou la méconnaissance a été constatée dans les conditions du cinquième alinéa. »

II. – Le deuxième alinéa du 2° de l’article L. 2131-2 du code général des collectivités territoriales est complété par les mots : «, à l’exception des sanctions prises en application de l’article L. 2212-2-1 ».

La parole est à M. François Bonhomme.

Debut de section - PermalienPhoto de François Bonhomme

Dans le cadre de l’exercice de leurs pouvoirs de police, les maires se trouvent souvent démunis pour sanctionner le non-respect de la réglementation. La voie pénale n’est pas toujours adaptée, notamment en raison des classements sans suite, et n’apporte aucune solution pour la réparation des dommages. Or, dans le cas des manquements aux pouvoirs de police du maire, il est nécessaire d’intervenir assez rapidement, l’absence de sanction pendant une longue période, en raison notamment de la durée de la procédure, confirmant les contrevenants dans leur sentiment d’impunité.

C’est pourquoi l’amendement tend à supprimer la condition selon laquelle le comportement doit être répétitif ou continu, et complète le mécanisme de l’amende administrative par celui des astreintes et de l’exécution d’office, aux frais du contrevenant.

Concernant l’exécution d’office, plutôt que d’opter pour la consignation d’une somme entre les mains du comptable public avant l’exécution d’office, l’amendement prévoit que les travaux soient réalisés et que la somme soit ensuite réclamée aux contrevenants. Cette procédure présente l’avantage d’être plus rapide et plus adaptée à des montants de travaux susceptibles d’être réglés par des particuliers. La consignation préalable relève davantage de dommages et de travaux importants. L’amendement permet donc de mieux graduer la sanction administrative dans le temps, tout en préservant les droits des contrevenants à présenter des observations.

Debut de section - PermalienPhoto de Mathieu Darnaud

Notre collègue François Bonhomme, dont je comprends les motivations, propose une nouvelle rédaction de l’article 15 qui soulève deux difficultés majeures.

Il nous paraît tout d’abord disproportionné de supprimer la condition relative au risque pour la sécurité des personnes, qui reste un élément essentiel et permet de limiter la procédure de l’amende aux manquements les plus graves.

Par ailleurs, l’ajout d’une procédure d’astreinte et d’exécution d’office n’apparaît pas utile en l’espèce, car le maire dispose d’un pouvoir d’exécution d’office en matière d’élagage et de dépôts sauvages.

C’est pourquoi la commission formule une demande de retrait. À défaut, l’avis serait défavorable.

Debut de section - Permalien
Sébastien Lecornu

Comme je l’ai dit lors de la discussion générale et encore hier soir, nous expérimentons un renforcement des pouvoirs de police administrative des maires, soit en leur transférant un certain nombre de prérogatives du préfet au maire, soit en facilitant l’exécution, en relevant les seuils ou en augmentant les amendes pour des pouvoirs qu’ils détiennent déjà.

Lors de nos travaux préparatoires, y compris sur le terrain juridique, il nous a fallu fixer un cadre. Le système ne peut ainsi fonctionner s’il n’y a une séparation claire entre police administrative et police judiciaire. Le maire peut constater en tant qu’officier de police judiciaire, mais il n’engage pas la procédure, sauf en matière de contravention.

Telle que nous l’avons travaillée avec le Conseil d’État, la mention en apparence anodine du caractère continu ou répétitif des faits borne le pouvoir des maires, pour le rendre acceptable socialement. Vous n’êtes pas sans savoir, en effet, qu’une partie des élus sont inquiets de ce renforcement de ce pouvoir. L’encadrer, c’est le rendre effectif et solide en cas de recours devant les juridictions administratives.

La rédaction initiale permettait d’écarter les contrevenants de bonne foi, pour ne viser que les récalcitrants. Je n’emploie pas la notion de récidive, qui a un caractère judiciaire.

L’équilibre est important. La référence au caractère continu ou répétitif des faits devrait permettre d’éviter certaines dérives. J’ajoute que nous ne savons pas qui seront les maires de demain… C’est pourquoi certains encadrements que nous proposons méritent selon moi d’être regardés avec bienveillance. Dans quelques années, il faudra peut-être aller plus loin, mais l’équilibre que nous avons trouvé, même si je milite en faveur du renforcement des pouvoirs de police des maires, est le gage de l’acceptabilité sociétale du dispositif par nos concitoyens et par les maires eux-mêmes, qui ne veulent pas apparaître comme des shérifs. Les dispositions que nous avons prévues sont marquées par une certaine audace, mais elles apportent une protection juridique.

C’est donc une demande de retrait que je formule à l’égard de votre amendement, monsieur le sénateur.

Debut de section - PermalienPhoto de François Bonhomme

Je comprends les arguments du rapporteur et du ministre, mais le point d’équilibre proposé n’est pas satisfaisant. J’entends que certains maires pourraient peut-être, à l’avenir, abuser de ces prérogatives nouvelles. Pour autant, monsieur le ministre, vous n’avez de cesse de répéter qu’il faut faire confiance aux élus…

Admettant la fragilité juridique de mon dispositif, je retire l’amendement, mais la situation actuelle appelle d’autres réponses.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Gabouty

L’amendement n° 612 rectifié est retiré.

Je suis saisi de six amendements et d’un sous-amendement faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 774 rectifié, présenté par Mmes Assassi et Cukierman, M. Savoldelli, Mmes Gréaume et Benbassa, M. Bocquet, Mmes Apourceau-Poly, Brulin et Cohen, MM. Gay, Gontard et P. Laurent, Mmes Lienemann et Prunaud et M. Ouzoulias, est ainsi libellé :

Alinéa 2

Après le montant :

rédiger ainsi la fin de l’alinéa :

les manquements à un arrêté du maire présentant un risque pour la sécurité des personnes et ayant un caractère répétitif et continu :

La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly.

Debut de section - PermalienPhoto de Cathy Apourceau-Poly

Par cet amendement, nous souhaitons revenir sur la suppression, en commission des lois, de la possibilité pour le maire de sanctionner par des amendes des manquements aux arrêtés municipaux.

Nous proposons de prévoir que les manquements aux arrêtés du maire visés par le présent article devront avoir un caractère répétitif et continu pour pouvoir être sanctionnés par une amende administrative. En effet, s’il nous paraît légitime de donner au maire des outils plus efficaces pour faire respecter les arrêtés pris en vertu de ses pouvoirs de police, il nous semble nécessaire d’encadrer cette nouvelle possibilité afin de limiter et de proportionner son caractère répressif.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Gabouty

L’amendement n° 831 rectifié, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 2

Remplacer les mots :

, lorsqu’il présente un risque pour la sécurité des personnes, tout manquement à un arrêté du maire

par les mots :

tout manquement à un arrêté du maire présentant un risque pour la sécurité des personnes et ayant un caractère répétitif ou continu

II. – Alinéa 4

Supprimer les mots :

ou sans autorisation

III. – Alinéa 5

Rédiger ainsi cet alinéa :

« 3° Ou ayant pour effet, au moyen d’un bien mobilier, d’occuper la voie ou le domaine public, sans droit ni titre lorsque celui-ci est requis, ou de façon non conforme au titre délivré sur le fondement de l’article L. 2122-1 du code général de la propriété des personnes publiques, et lorsque l’occupation constitue un usage privatif de ce domaine public, excédant le droit d’usage appartenant à tous.

IV. – Alinéa 7

1° Première phrase

Supprimer les mots :

pénales et administratives

2° Dernière phrase

Supprimer cette phrase.

V. – Alinéa 9

Rédiger ainsi cet alinéa :

« À l’issue de ce second délai et à défaut d’exécution des mesures prescrites, le maire peut, par une décision motivée qui indique les voies et délais de recours, prononcer l’amende administrative prévue au premier alinéa. Le montant de l’amende est fixé en fonction de la gravité des faits reprochés.

VI. – Alinéas 13 et 14

Remplacer ces alinéas par un alinéa ainsi rédigé :

« Le délai de prescription de l’action du maire pour la sanction d’un manquement mentionné au premier alinéa est d’un an révolu à compter du jour où le premier manquement a été commis. »

La parole est à M. le ministre.

Debut de section - Permalien
Sébastien Lecornu

Cet amendement vise à revenir à la rédaction initiale du projet de loi, modifiée cependant par le sous-amendement de Mme Schillinger, auquel je suis favorable.

Des associations particulièrement investies dans la promotion du droit au logement ou la protection des personnes sans abri ont saisi mon collègue Julien Denormandie et moi-même pour nous faire part de leur crainte, légitime, que la disposition ne permette à un maire de prendre un arrêté contre les sans-abri. Je me suis engagé sur ce point en indiquant que la rédaction initiale du Gouvernement, par la référence à la nécessité d’un caractère « répétitif ou continu » des faits, pose une première borne juridique. Je m’empresse de préciser que Droit au logement et les autres associations n’avaient pas encore alerté le Sénat et le Gouvernement sur le sujet lorsque la commission a établi son texte.

Le sous-amendement n° 956 de Mme Schillinger complète le dispositif d’amende administrative proposé par le Gouvernement en précisant qu’il ne pourra sanctionner que les actes d’occupation sans titre du domaine public ayant des fins commerciales. Par exemple, avec cette rédaction, le maire pourra intervenir en cas d’abus de droit de terrasse, mais il ne pourra en aucun cas s’agir de s’en prendre à des personnes, sans abri ou non.

Je vous demande instamment d’adopter l’amendement du Gouvernement et le sous-amendement, parce que l’audace dont nous faisons preuve pour renforcer les pouvoirs de police des maires ne saurait souffrir d’une ambiguïté ou d’une équivoque quant aux intentions des maires de France. Il ne faut pas que les arrêtés illégaux et inhumains pris par un ou deux maires entretiennent le doute. Avec cette rédaction, on a un dispositif robuste sur le plan juridique, qui nous permettra d’aider les maires à avancer et rassurera les associations et, plus largement, toutes les personnes ayant des convictions humanistes. Ce sujet a fait l’objet de nombreuses discussions hors cet hémicycle.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Gabouty

Le sous-amendement n° 956, présenté par Mme Schillinger, MM. de Belenet, Amiel, Bargeton et Buis, Mme Cartron, M. Cazeau, Mme Constant, MM. Dennemont, Gattolin, Hassani, Haut, Karam, Lévrier, Marchand, Mohamed Soilihi, Patient, Patriat et Rambaud, Mme Rauscent, MM. Richard, Théophile, Yung et les membres du groupe La République En Marche, est ainsi libellé :

Amendement n° 831, alinéa 11

Après le mot :

d’occuper

insérer les mots :

, à des fins commerciales,

La parole est à Mme Patricia Schillinger.

Debut de section - PermalienPhoto de Patricia Schillinger

M. le ministre a été très éloquent. J’ajouterai simplement qu’il peut s’agir d’un élagage ou d’un entretien des arbres qui dure et empiète vraiment sur la voie publique, du dépôt de détritus, de gravats ou d’encombrants.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Gabouty

L’amendement n° 15 rectifié, présenté par Mme Lavarde, MM. Rapin et Guerriau, Mmes N. Goulet et Eustache-Brinio, MM. Meurant, Lefèvre, Karoutchi, Piednoir, D. Laurent, Savary et Mandelli, Mmes Malet, Sittler et Lamure, MM. Pemezec, Capus, Grosperrin et Husson, Mme Noël, MM. Savin et Chasseing, Mmes Lassarade et Garriaud-Maylam, MM. Poniatowski, Perrin et Raison, Mmes M. Mercier et Imbert et MM. Le Gleut, H. Leroy et Laménie, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 2

Après le mot :

sécurité

insérer les mots :

ou une atteinte à la tranquillité

II. – Après l’alinéa 5

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« …° Ou ayant pour effet de porter atteinte à la tranquillité publique lors de regroupement ou d’attroupement de manière répétée sur le domaine public, excédant le droit d’usage appartenant à tous.

La parole est à Mme Christine Lavarde.

Debut de section - PermalienPhoto de Christine Lavarde

Cet amendement vise également à donner le pouvoir au maire de sanctionner des occupations sans titre du domaine public par des personnes. J’ai en tête l’exemple d’une école privée hors contrat qui n’a pas de cour de récréation et dont les élèves, tous les jours, passent la récréation dans un parc public. Manifestement, il s’agit là d’une occupation abusive du domaine public à des fins commerciales et, aujourd’hui, il n’y a aucun moyen de pouvoir la sanctionner.

Si la commission ou le Gouvernement me dit que cet amendement est satisfait par l’amendement n° 831 rectifié, je le retirerai.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Gabouty

L’amendement n° 775 rectifié, présenté par Mmes Assassi et Cukierman, M. Savoldelli, Mmes Gréaume et Benbassa, M. Bocquet, Mmes Apourceau-Poly, Brulin et Cohen, MM. Gay, Gontard et P. Laurent, Mmes Lienemann et Prunaud et M. Ouzoulias, est ainsi libellé :

Alinéas 4 et 5

Supprimer ces alinéas.

La parole est à Mme Michelle Gréaume.

Debut de section - PermalienPhoto de Michelle Gréaume

L’article 15 prévoit, dans sa rédaction actuelle, de sanctionner d’une amende de 500 euros les entraves ou les occupations du domaine public. Cela ouvre la possibilité de sanctionner des personnes sans-abri qui installent leur tente ou leur abri de fortune sur la voie publique ou le domaine public, par exemple sur le trottoir ou dans un square, ou qui stockent leurs biens dans un recoin ou les transportent dans un chariot. Au passage, je rappelle qu’aujourd’hui nous n’avons pas suffisamment d’hébergements d’urgence.

Nous nous opposons à ce que le maire puisse sanctionner par des amendes des blocages, entraves ou occupations du domaine public, car cela ouvre la voie à l’aggravation de la répression, notamment envers les personnes sans domicile fixe, les gens du voyage et, surtout, les participants à des mouvements comme celui des « gilets jaunes ». Il est à noter que cette disposition pourrait également viser les tentes distribuées par les associations humanitaires, les manifestations déclarées, toute personne sans-logis habitant un véhicule immobilisé.

Néanmoins, j’ai entendu, monsieur le ministre, votre proposition. Elle peut en effet répondre à notre préoccupation.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Gabouty

L’amendement n° 582 rectifié bis, présenté par Mme Schillinger, M. Buis, Mme Cartron, MM. Gattolin, Lévrier et Marchand, Mme Rauscent et M. Yung, est ainsi libellé :

Alinéa 5

Après le mot :

occuper

insérer les mots :

à des fins commerciales,

La parole est à Mme Patricia Schillinger.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Gabouty

L’amendement n° 740 rectifié, présenté par Mme Guillemot, MM. Kerrouche, Durain, Marie, Kanner et Jacques Bigot, Mme de la Gontrie, M. Fichet, Mme Harribey, MM. Leconte, Sueur et Sutour, Mme Blondin, MM. Montaugé, Courteau, Daunis, Bérit-Débat, Antiste et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 14

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« …. – Ne peut faire l’objet de l’amende administrative prévue au premier alinéa du I le fait pour une personne sans domicile fixe d’avoir installé sur la voie ou le domaine public les objets nécessaires à la satisfaction de ses besoins élémentaires. »

La parole est à Mme Annie Guillemot.

Debut de section - PermalienPhoto de Annie Guillemot

Nous maintiendrons cet amendement, parce que celui du Gouvernement ne nous convient pas tout à fait. Monsieur le ministre, les maires qui prennent des arrêtés illégaux et inhumains continueront à le faire. L’ajout de la mention « à des fins commerciales » ne nous rassure pas. Certains maires prétendront que la mendicité est une forme d’activité commerciale, par exemple. Nous avons beaucoup travaillé sur cet amendement avec la Fondation Abbé Pierre et Droit au logement.

Concernant la lutte contre la pauvreté, j’indique que les associations sont vent debout contre l’inclusion de l’AAH et des APL dans le revenu universel d’activité, le RUA. Il faut mener une réflexion sur ce sujet.

Debut de section - PermalienPhoto de Mathieu Darnaud

L’amendement n° 774 rectifié vise à rétablir le caractère continu ou répété pour les manquements pouvant être sanctionnés d’une amende administrative. Notre commission a jugé nécessaire de supprimer cette condition, qui lui paraissait difficile à caractériser pour le maire. L’avis est défavorable.

On peut comprendre les motivations des auteurs de l’amendement n° 15 rectifié, qui tend à étendre le périmètre de la procédure de l’amende administrative en vue de sanctionner les regroupements ou attroupements répétés sur le domaine public, mais nous devons, me semble-t-il, veiller à ce que cette procédure ne s’applique qu’à des faits objectifs facilement caractérisables pour le maire et ne pouvant donner lieu à interprétation. Je demande le retrait de cet amendement ; à défaut, l’avis sera défavorable.

Monsieur le ministre, nous sommes animés du même humanisme. Il serait à mon sens préférable de retirer l’amendement n° 582 rectifié bis au profit de l’amendement n° 740 rectifié, plus explicite et plus complet. Cependant, ce dernier mériterait d’être récrit, car sa rédaction actuelle pose un problème juridique. À cette condition, l’avis est favorable. La vérité est à mi-chemin entre les deux amendements.

Debut de section - Permalien
Sébastien Lecornu

Nous sommes tous d’accord sur le fond, mais il faut déterminer la rédaction adéquate.

Je demande le retrait de l’amendement n° 774 rectifié au profit des suivants.

Le caractère répétitif et continu des manquements ne constitue pas du tout une entrave pour les maires ; au contraire, c’est une protection. Qu’il ne soit pas mentionné dans votre amendement me gêne, madame Guillemot. Il faut aussi garder la mention des fins commerciales.

Madame Lavarde, le dispositif de l’amendement n° 15 rectifié risque de porter atteinte à la liberté constitutionnelle d’aller et venir. En l’absence de risque avéré pour la sécurité des personnes, il est difficile de suspendre cette liberté, y compris d’ailleurs pour l’autorité préfectorale. Je le dis avec prudence, mais cet amendement pourrait la remettre en cause de manière excessive. En tout cas, c’est l’avis de nos juristes.

L’avis est défavorable sur l’amendement n° 775 rectifié, car celui-ci est déjà satisfait, de même que l’amendement n° 582 rectifié bis.

Madame Guillemot, la notion de personne sans domicile fixe n’existe pas vraiment en droit. L’inscrire dans la loi aurait le mérite de clarifier les choses : les bonnes âmes ne pourront faire de procès d’intention au Sénat ou au Gouvernement. Cependant, je le redis, je tiens à ce que l’on conserve le caractère répétitif et continu. Je propose d’adopter l’amendement du Gouvernement, le sous-amendement de Mme Schillinger et votre amendement, madame Guillemot ; nous améliorerions ensuite l’écriture du dispositif au cours de la navette.

Debut de section - PermalienPhoto de Mathieu Darnaud

Je voudrais repréciser que nous sommes favorables aux amendements n° 582 rectifié bis et 740 rectifié, et défavorables à l’amendement du Gouvernement et au sous-amendement.

Debut de section - Permalien
Sébastien Lecornu

Comme la notion de personne sans abri n’existe pas en droit, je suis attaché au maintien du caractère répétitif et continu des faits. Un jeune garçon ou une jeune fille qui fugue peut être amené à dormir une nuit dans la rue, mais il ou elle n’est pas pour autant sans domicile fixe.

Je ne veux pas partir à l’aventure sur ces questions, qui ne sont pas simples. C’est la raison pour laquelle je maintiens l’amendement du Gouvernement. On pourra s’il le faut le récrire au cours de la navette, mais, j’y insiste, le dispositif constitué par cet amendement, celui de Mme Guillemot et le sous-amendement fonctionne juridiquement. Je le dis à l’adresse des associations qui nous regardent.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Gabouty

La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Gabouty

Les amendements n° 774 rectifié et 775 rectifié sont retirés.

La parole est à Mme Christine Lavarde, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Christine Lavarde

Monsieur le ministre, pourriez-vous demander à vos services juridiques d’apporter une réponse aux élus qui sont confrontés à la situation concrète que j’ai évoquée ? Quand les faits se produisent cinq jours par semaine, trente-six semaines dans l’année, ils présentent bien un caractère répétitif et continu. Cela étant dit, je retire mon amendement.

Debut de section - Permalien
Sébastien Lecornu

Madame la sénatrice, je m’engage à ce que mes services prennent contact avec vous dans la semaine ou en début de semaine prochaine pour regarder ce point.

Debut de section - PermalienPhoto de Mathieu Darnaud

Je crois que les attentes des associations sont totalement satisfaites, même au-delà. Il y a un petit problème de rédaction. Je fais confiance au ministre et à la navette pour le régler. Nous sommes d’accord sur le fond, mais l’adoption de l’amendement du Gouvernement aurait pour effet de supprimer l’autre partie du dispositif. C’est un problème rédactionnel. La solution envisagée au travers de l’amendement n° 740 rectifié me semble satisfaire tout le monde.

Le sous-amendement n ’ est pas adopté.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

L ’ amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Patricia Schillinger

Pourquoi compliquer ainsi les choses au lieu d’adopter l’amendement du Gouvernement modifié par mon sous-amendement ? C’est une censure politique ! Je ne le supporte pas !

L ’ amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Gabouty

L’amendement n° 120 rectifié, présenté par MM. Dallier, Bascher et Bazin, Mme Berthet, M. Bonhomme, Mme Boulay-Espéronnier, M. Brisson, Mme Bruguière, MM. Cambon, Chaize, Courtial et Danesi, Mme L. Darcos, MM. Daubresse, de Legge et de Nicolaÿ, Mmes Deroche et Deromedi, M. Dufaut, Mme Eustache-Brinio, M. Grosperrin, Mme Gruny, M. Husson, Mme Lassarade, M. D. Laurent, Mme Lavarde, MM. Lefèvre et Longuet, Mme Malet, MM. Mandelli, Milon et Mouiller, Mme Noël, MM. Paul, Pellevat, Piednoir, Savary, Savin, Schmitz et Sol, Mme Troendlé, MM. Charon et del Picchia, Mmes Garriaud-Maylam et Imbert, MM. Karoutchi et H. Leroy, Mmes Procaccia et Chain-Larché, M. Cuypers, Mme Duranton, MM. B. Fournier, Gilles, Guené, Hugonet et Laménie, Mme Lamure, MM. Rapin et Segouin, Mmes Thomas et Delmont-Koropoulis et M. Gremillet, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 5

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« …° En matière de non-respect d’un arrêté de restrictions horaires pour la vente d’alcool à emporter sur le territoire de la commune, au sens de l’article L. 2213-34 du présent code.

La parole est à Mme Christine Lavarde.

Debut de section - PermalienPhoto de Christine Lavarde

Cet amendement vise à étendre le pouvoir des maires en matière d’amende administrative aux cas de non-respect des horaires d’interdiction de vente d’alcool à emporter arrêtés par la commune.

Debut de section - PermalienPhoto de Mathieu Darnaud

Cette nouvelle procédure ne nous semble pas totalement adaptée aux cas visés par notre collègue.

Le prononcé d’une amende sera conditionné à l’existence d’un risque pour la sécurité des personnes. Or, selon nous, il sera quasiment impossible au maire d’établir que le non-respect des restrictions horaires imposées par un arrêté est de nature à créer un risque pour la sécurité des personnes. Il s’agit d’un enjeu de tranquillité publique.

En outre, le fait de contrevenir à la réglementation, y compris municipale, en matière de vente d’alcool peut d’ores et déjà être puni par une amende forfaitaire. Cela garantit une réponse pénale immédiate.

La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.

Debut de section - Permalien
Sébastien Lecornu

Concernant les amendements précédents, je prends l’engagement devant Mmes Assassi, Cukierman et Schillinger – cela figurera au Journal officiel – d’affiner le dispositif au cours de la navette.

Certes, les associations verront que le texte adopté par le Sénat fait référence aux personnes « sans domicile fixe » du fait de l’adoption de l’amendement n° 740 rectifié. Mais les professionnels du droit, eux, noteront que la rédaction retenue ne produit pas les effets juridiques escomptés et n’empêchera pas un maire de s’en prendre, le cas échéant, à des sans-abri. À ce stade, le texte voté par la Haute Assemblée n’atteint pas les objectifs annoncés.

Le Gouvernement émet un avis défavorable sur l’amendement n° 120 rectifié.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Gabouty

L’amendement n° 122 rectifié, présenté par MM. Dallier, Bascher et Bazin, Mme Berthet, M. Bonhomme, Mme Boulay-Espéronnier, M. Brisson, Mme Bruguière, MM. Cambon, Chaize, Courtial et Danesi, Mme L. Darcos, MM. Daubresse, de Legge et de Nicolaÿ, Mmes Deroche et Deromedi, M. Dufaut, Mme Eustache-Brinio, M. Grosperrin, Mme Gruny, M. Husson, Mme Lassarade, M. D. Laurent, Mme Lavarde, MM. Lefèvre et Longuet, Mme Malet, MM. Mandelli, Milon et Mouiller, Mme Noël, MM. Paul, Pellevat, Piednoir, Savary, Savin, Schmitz et Sol, Mme Troendlé, MM. Charon et del Picchia, Mme Imbert, MM. Karoutchi et H. Leroy, Mme Chain-Larché, MM. Cuypers, B. Fournier, Gilles, Guené, Hugonet, Laménie et Rapin, Mmes Thomas et Delmont-Koropoulis et M. Gremillet, est ainsi libellé :

Alinéa 7, deuxième phrase

Supprimer les mots :

ou orales

La parole est à Mme Christine Lavarde.

Debut de section - PermalienPhoto de Christine Lavarde

Cet amendement vise à supprimer la possibilité, pour le contrevenant, d’émettre des observations à la notification de son infraction de manière orale.

Debut de section - PermalienPhoto de Mathieu Darnaud

Une telle modification ne nous semble pas souhaitable. Les dispositions légales générales applicables aux décisions administratives prévoient que le principe du contradictoire doit pouvoir s’exercer soit de manière écrite, soit de manière orale. C’est le cas pour toutes les mesures de sanction administrative. Il n’y a pas ici de raison d’introduire une exception.

Par ailleurs, dans la mesure où l’amende administrative constitue une décision ayant valeur de sanction, il convient de lui appliquer les principes du droit pénal, notamment en matière de droits de la défense. Dans ce contexte, limiter les conditions du contradictoire présente un risque sur le plan constitutionnel.

La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.

Debut de section - Permalien
Sébastien Lecornu

Il y a de grands fondamentaux dans la définition du contradictoire, qui doit pouvoir s’exercer à l’oral comme à l’écrit. Si nous acceptons une telle restriction, pourquoi ne pas en accepter également d’autres, par exemple s’agissant des procédures judiciaires ?

Au demeurant, tous nos concitoyens n’écrivent pas forcément. Il faut la souplesse que permet l’oral. Ne changeons pas le droit.

Le Gouvernement sollicite donc le retrait de cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Gabouty

L’amendement n° 122 rectifié est retiré.

L’amendement n° 121 rectifié, présenté par MM. Dallier, Bascher et Bazin, Mme Berthet, M. Bonhomme, Mme Boulay-Espéronnier, M. Brisson, Mme Bruguière, MM. Cambon, Chaize, Courtial et Danesi, Mme L. Darcos, MM. Daubresse, de Legge et de Nicolaÿ, Mmes Deroche et Deromedi, M. Dufaut, Mme Eustache-Brinio, M. Grosperrin, Mme Gruny, M. Husson, Mme Lassarade, M. D. Laurent, Mme Lavarde, MM. Lefèvre, Longuet et Mandelli, Mme Malet, MM. Milon et Mouiller, Mme Noël, MM. Paul, Pellevat, Piednoir, Savary, Savin, Schmitz et Sol, Mme Troendlé, MM. Charon et del Picchia, Mmes Garriaud-Maylam et Imbert, MM. Karoutchi et H. Leroy, Mmes Procaccia et Chain-Larché, MM. Cuypers, B. Fournier, Gilles, Guené, Hugonet et Laménie, Mme Lamure, MM. Rapin et Segouin, Mmes Thomas et Delmont-Koropoulis et M. Gremillet, est ainsi libellé :

I. - Alinéa 7, deuxième phrase

Remplacer le mot :

quinze

par le mot :

dix

II. – Alinéa 8

1° Remplacer les mots :

de quinze

par les mots :

de dix

2° Remplacer les mots :

qui ne peut être inférieur à quinze jours

par les mots :

de dix jours

La parole est à Mme Christine Lavarde.

Debut de section - PermalienPhoto de Christine Lavarde

Dans sa rédaction actuelle, l’article 15 donne quinze jours au contrevenant pour formuler des observations à la notification qu’il a reçue du maire. Une fois ce délai passé, le maire met en demeure le contrevenant qui doit se conformer dans un nouveau délai de quinze jours. Ainsi, si un individu ne prête pas attention aux demandes du maire, il pourra se passer un mois avant que l’amende ne lui soit infligée. Cet amendement vise donc à réduire chacun de ces deux délais à dix jours.

Debut de section - PermalienPhoto de Mathieu Darnaud

Cette fois, le contradictoire est tout à fait respecté, et cet amendement nous paraît aller dans le bon sens. L’avis de la commission est donc favorable.

L ’ amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Gabouty

L’amendement n° 65 rectifié ter, présenté par Mme Vermeillet, MM. Joyandet, Cuypers, Lefèvre, L. Hervé, Bouchet et Piednoir, Mme Férat, M. Janssens, Mmes N. Goulet et Ramond, MM. Cigolotti, Mandelli et Médevielle, Mme A.M. Bertrand, MM. Laménie, Houpert, Chasseing, Bonhomme, Karoutchi et Vanlerenberghe, Mme Billon, MM. Longeot et Détraigne, Mme Saint-Pé, MM. Maurey, H. Leroy et Henno, Mmes Létard et Vullien, MM. de Nicolaÿ, Paccaud, Canevet, Lafon et Laurey, Mmes C. Fournier, Berthet, Vérien et Sollogoub, MM. Fouché, Grosperrin, Panunzi, Louault, Le Nay, P. Martin et Bonne et Mme Bories, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

…. – Le code pénal est ainsi modifié :

1° L’article 222-13 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Conformément aux articles L. 2122-24 et L. 2122-31 et dans les conditions prévues à l’article L. 2212-1 et suivants du code général des collectivités territoriales, pour le délit prévu au premier alinéa du présent article, lorsque l’infraction est commise à l’encontre d’un maire ou d’un de ses adjoints dans des circonstances prévues au 4° du présent article, y compris en cas de récidive, l’action publique peut être éteinte dans les conditions prévues aux articles 495-17 à 495-25 du code de procédure pénale, par le versement d’une amende forfaitaire d’un montant de 800 euros. Le montant de l’amende forfaitaire minorée est de 640 euros et le montant de l’amende forfaitaire majorée est de 1 600 euros. » ;

2° L’article 322-1 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Conformément aux articles L. 2122-24 et L. 2122-31 et dans les conditions prévues à l’article L. 2212-1 et suivants du code général des collectivités territoriales, pour le délit prévu au deuxième alinéa du présent article, y compris en cas de récidive, l’action publique peut être éteinte, dans les conditions prévues aux articles 495-17 à 495-25 du code de procédure pénale, par le versement d’une amende forfaitaire d’un montant de 500 euros. Le montant de l’amende forfaitaire minorée est de 330 euros et le montant de l’amende forfaitaire majorée est de 1 300 euros. » ;

3° L’article 322-3 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Conformément aux articles L. 2122-24 et L. 2122-31 et dans les conditions prévues à l’article L. 2212-1 et suivants du code général des collectivités territoriales, lorsque l’infraction définie aux premier et deuxième alinéas de l’article 322-1 du présent code est commise dans des circonstances prévues au 8° du présent article, y compris en cas de récidive, l’action publique peut être éteinte, dans les conditions prévues aux articles 495-17 à 495-25 du code de procédure pénale, par le versement d’une amende forfaitaire d’un montant de 800 euros. Le montant de l’amende forfaitaire minorée est de 640 euros et le montant de l’amende forfaitaire majorée est de 1 600 euros. » ;

4° L’article 322-3-1 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Conformément aux articles L. 2122-24 et L. 2122-31 et dans les conditions prévues à l’article L. 2212-1 et suivants du code général des collectivités territoriales, pour le délit prévu au premier alinéa et lorsque l’infraction est commise dans des circonstances prévues aux 3° et 4° du présent article, y compris en cas de récidive, l’action publique peut être éteinte, dans les conditions prévues aux articles 495-17 à 495-25 du code de procédure pénale, par le versement d’une amende forfaitaire d’un montant de 800 euros. Le montant de l’amende forfaitaire minorée est de 640 euros et le montant de l’amende forfaitaire majorée est de 1 600 euros. » ;

5° L’article 433-5 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Conformément aux articles L. 2122-24 et L. 2122-31 et dans les conditions prévues à l’article L. 2212-1 et suivants du code général des collectivités territoriales, pour le délit prévu au premier alinéa et commis dans les circonstances prévues au deuxième alinéa du présent article, y compris en cas de récidive, l’action publique peut être éteinte dans les conditions prévues aux articles 495-17 à 495-25 du code de procédure pénale, par le versement d’une amende forfaitaire d’un montant de 500 euros. Le montant de l’amende forfaitaire minorée est de 330 euros et le montant de l’amende forfaitaire majorée est de 1 300 euros. »

La parole est à Mme Sylvie Vermeillet.

Debut de section - PermalienPhoto de Sylvie Vermeillet

Cet amendement, cosigné par de très nombreux collègues, répond à une demande forte des maires.

Partout en France, ces élus éprouvent le même sentiment de ras-le-bol face à la multiplication des incivilités et des agressions verbales ou physiques dont ils font l’objet dans l’exercice de leur mandat.

Les maires, premiers représentants de l’État dans nos communes, doivent être mieux protégés dans leurs fonctions, tout particulièrement dans les territoires ruraux.

En tant qu’officier de police judiciaire, un maire ou un adjoint au maire peut disposer d’un carnet à souche d’amendes forfaitaires, afin de verbaliser lui-même les contraventions susceptibles d’être sanctionnées par le système de l’amende forfaitaire.

Toutefois, les maires sont impuissants lorsqu’il s’agit de réprimer des infractions ne relevant pas de la simple contravention auxquelles ils sont pourtant directement confrontés ou dont ils sont les victimes : violences physiques, violences verbales, outrages, destruction, dégradation ou détérioration de biens appartenant au domaine public mobilier ou immobilier.

Ces délits sont actuellement uniquement réprimés par une peine de prison ou une forte amende. On le sait, les peines sont peu prononcées, donc peu dissuasives. Il y a un décalage entre l’arsenal théoriquement très répressif et une réponse pénale concrètement peu dissuasive, qui ne permet pas d’enrayer la progression des incivilités.

Cet amendement vise donc à donner aux maires la possibilité de sanctionner ces infractions directement dans le cadre de leur pouvoir de police par une procédure d’amende forfaitaire d’un montant de 500 euros ou 800 euros, selon la nature du délit. La mise en place d’amendes forfaitaires délictuelles permet une réponse plus rapide, plus effective, donc plus dissuasive.

Debut de section - PermalienPhoto de Mathieu Darnaud

Je comprends parfaitement les motivations des auteurs de cet amendement, mais le dispositif proposé présente un danger majeur.

Une telle mesure pourrait se révéler totalement contre-productive, car elle conduirait à exclure le prononcé d’une peine d’emprisonnement, aboutissant à l’extinction de l’action publique, ce qui peut être grave s’agissant de tels délits.

La commission sollicite donc le retrait de cet amendement, faute de quoi l’avis serait défavorable.

Debut de section - Permalien
Sébastien Lecornu

Je demande le retrait de cet amendement, qui porte sur du droit pénal. À défaut, l’avis serait défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Gabouty

La parole est à Mme Sylvie Vermeillet, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Sylvie Vermeillet

Je maintiens mon amendement. En effet, comme les sanctions pénales ne sont pas prononcées, les maires, qui n’ont aucune autre solution, ne sont pas respectés et continuent d’être agressés.

Debut de section - PermalienPhoto de Mathieu Darnaud

Je ne suis pas sûr qu’un carnet à souche permette d’éviter les coups de mitraillette !

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

L ’ article 15 est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Gabouty

Je suis saisi de quatre amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

Les deux premiers sont identiques.

L’amendement n° 93 rectifié est présenté par Mme N. Delattre, MM. Arnell, Artano, A. Bertrand, Cabanel, Castelli, Collin et Corbisez, Mme Costes, MM. Gabouty, Gold et Guérini, Mme Guillotin, M. Jeansannetas, Mme Jouve et MM. Léonhardt, Requier, Roux et Vall.

L’amendement n° 611 rectifié est présenté par MM. Bonhomme, Sido et H. Leroy, Mme Deromedi et MM. Mandelli, Laménie, Bonne et Piednoir.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Après l’article 15

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l’article L. 581-24 du code de l’environnement, il est inséré un article L. 581-24-… ainsi rédigé :

« Art. L. 581 -24 -…. – Nonobstant l’application des articles L. 581-29 et L. 581-31, lorsque l’auteur de la publicité ou du marquage au sol a délibérément procédé à l’apposition ou l’installation d’une publicité, enseigne ou préenseigne sur un immeuble, un mobilier urbain ou au sol, le président du tribunal de grande instance, statuant en la forme des référés peut, sur requête de la commune dans laquelle est située la publicité irrégulièrement apposée ou marquée sur l’immeuble, le sol ou le mobilier urbain, condamner le contrevenant au paiement d’une amende civile dont le montant ne peut excéder 50 000 € par préenseigne, publicité ou enseigne illicitement apposée.

« Lorsque le contrevenant est une personne morale ayant une activité commerciale le montant de l’amende prononcée peut atteindre 5 % du chiffre d’affaires hors taxes réalisé en France, lors du dernier exercice clos depuis l’exercice précédant celui au cours duquel la publicité a été apposée ou installée.

« Le produit de l’amende est intégralement versé à la commune dans laquelle est installée la publicité. »

La parole est à M. Éric Gold, pour présenter l’amendement n° 93 rectifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Gold

Un régime de contraventions pénales et d’amendes administratives est aujourd’hui prévu pour lutter contre les publicités ne respectant pas la réglementation, mais ces sanctions sont rarement appliquées.

Pour plus d’efficacité, il est proposé d’instituer un système d’amendes civiles en matière de publicité sauvage sur le mobilier urbain et sur le sol. Prononcée par le préfet, l’amende civile pourrait, par son coût plus élevé, avoir un caractère plus dissuasif que le dispositif actuel. La procédure s’en trouverait aussi simplifiée. Contrairement à la contravention pénale, l’amende civile ne nécessite pas l’intervention du parquet pour diligenter les poursuites.

Cet amendement vise donc à doter les communes d’un véritable outil de lutte contre de telles pratiques par le prononcé d’une amende civile.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laménie

L’amende civile est prononcée par une juridiction judiciaire pour des faits qui ne sont pas constitutifs d’une infraction pénale et ne requièrent donc pas l’intervention du parquet pour diligenter les poursuites. Si notre amendement est adopté, les communes pourront agir pour obtenir le prononcé d’une telle amende.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Gabouty

L’amendement n° 703 rectifié, présenté par M. Karoutchi, est ainsi libellé :

Après l’article 15

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l’article L. 581-24 du code de l’environnement, il est inséré un article L. 581-24-… ainsi rédigé :

« Art. L. 581 -24 - … . – Nonobstant l’application des articles L. 581-29 et L. 581-31, lorsque l’auteur de la publicité ou du marquage au sol a délibérément procédé à l’apposition ou l’installation d’une publicité, enseigne ou préenseigne sur un immeuble, un mobilier urbain ou au sol, le président du tribunal de grande instance, statuant en la forme des référés peut, sur requête de la commune dans laquelle est située la publicité, condamner le contrevenant au paiement d’une amende civile dont le montant ne peut excéder 50 000 € par préenseigne, publicité ou enseigne illicitement apposée.

« Le produit de l’amende est intégralement versé à la commune dans laquelle est installée la publicité. »

La parole est à M. Roger Karoutchi.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

Dans le même esprit que les précédents, cet amendement vise à mettre en place un système d’amende civile pour lutter contre l’affichage publicitaire ne respectant pas la réglementation.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Gabouty

L’amendement n° 741 rectifié, présenté par Mme de la Gontrie, MM. Féraud, Assouline, Jomier, Kerrouche, Durain, Marie, Kanner, Jacques Bigot et Fichet, Mme Harribey, MM. Leconte, Sueur et Sutour, Mme Blondin, MM. Montaugé, Courteau, Daunis, Bérit-Débat, Antiste et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Après l’article 15

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l’article L. 581-24 du code de l’environnement, il est inséré un article L. 581-24-… ainsi rédigé :

« Art. L. 581 -24 -…. – Sans préjudice des articles L. 581-29 et L. 581-31, lorsque l’auteur de la publicité ou du marquage au sol a délibérément procédé à l’apposition ou l’installation d’une publicité, enseigne ou préenseigne sur un immeuble, un mobilier urbain ou au sol, le président du tribunal de grande instance, statuant en la forme des référés peut, sur requête de la commune dans laquelle est située la publicité, l’enseigne ou la préenseigne condamner le contrevenant au paiement d’une amende civile dont le montant ne peut excéder 3 500 € par préenseigne, publicité ou enseigne illicitement apposée, et 7 500 € lorsque le contrevenant est une personne morale ayant une activité commerciale.

« Le produit de l’amende est intégralement versé à la commune concernée. »

La parole est à Mme Marie-Pierre de la Gontrie.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Pierre de La Gontrie

Notre amendement est un peu différent de ceux qui viennent d’être présentés, même si nous partageons l’objectif de sanctionner plus efficacement les contrevenants.

Nous proposons un dispositif moins coûteux pour les contrevenants : l’amende serait de 3 500 euros par infraction, ce montant étant porté à 7 500 euros lorsqu’il s’agit d’une personne morale. Nous savons bien, en effet, que les entreprises incluent dans leur budget le coût éventuel d’une sanction.

L’amende civile est plus efficace, puisque les parquets ne poursuivent pas. Quel que soit l’amendement adopté, il importe que l’amende civile soit à la diligence de la commune.

Debut de section - PermalienPhoto de Mathieu Darnaud

Les auteurs de ces quatre amendements proposent un mécanisme assez innovant, intéressant sur le fond, mais, d’un point de vue juridique, la répression d’une faute relève quasi exclusivement d’une amende pénale. C’est d’ailleurs pourquoi le recours à la procédure de l’amende civile est aujourd’hui limité à certains contentieux dans lesquels les fautes commises sont très lucratives, principalement en matière de pratiques restrictives de concurrence et d’atteinte au droit de la propriété incorporelle.

L’extension de l’amende civile devrait être à l’ordre du jour de la réforme annoncée de la responsabilité civile. Dans l’attente, il n’apparaît pas souhaitable de l’étendre au cas par cas à des infractions de plus faible ampleur sans vision d’ensemble.

Par conséquent, la commission émet un avis défavorable sur ces quatre amendements.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Gabouty

La parole est à Mme Marie-Pierre de la Gontrie, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Pierre de La Gontrie

Il y a, me semble-t-il, une confusion dans l’esprit de M. le rapporteur et de M. le ministre.

Si nous avons fait le choix de réduire le montant envisagé de l’amende civile – dans un premier temps, nous proposions de le fixer à la même hauteur que les auteurs des autres amendements –, c’est précisément pour ne pas encourir le reproche d’être dans le champ de la sanction pénale.

Par ailleurs, M. le rapporteur a indiqué que la répression relevait « quasi exclusivement » de l’amende pénale. Tout est dans le « quasi ». Il peut y avoir amende civile lorsque l’infraction est en lien avec une activité lucrative. C’est le cas en l’espèce : les publicités sont réalisées aux frais de la collectivité ; elles ne coûtent donc rien à leurs bénéficiaires, mais sont très lucratives.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Gabouty

La parole est à M. Jacques Bigot, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Bigot

M. le rapporteur a fait référence à la réflexion sur la réforme de responsabilité civile qui est en cours à la Chancellerie. En réalité, cette réflexion est très critiquée, tant par les entreprises que par le Syndicat de la magistrature.

Il me paraît donc inutile d’attendre les conclusions de ces travaux pour instituer une amende civile. Mieux vaut tenter aujourd’hui cette option sur un sujet précis. Les juges n’ont pas l’habitude de prononcer de telles amendes. Cela pourrait être un premier pas. Mettons dès aujourd’hui en place ce mécanisme, dont nous approuvons tous, semble-t-il, le principe, et nous verrons bien quelle sera la pratique.

Nous devons répondre aux attentes des maires et de nos concitoyens face aux abus qui ont été évoqués.

Les amendements ne sont pas adoptés.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Gabouty

Je suis saisi de quatre amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

Les deux premiers sont identiques.

L’amendement n° 610 rectifié est présenté par MM. Bonhomme, Sido et H. Leroy, Mme Deromedi et MM. Mandelli et Laménie.

L’amendement n° 702 rectifié est présenté par M. Karoutchi.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Après l’article 15

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au premier alinéa de l’article L. 581-27 et au premier alinéa de l’article L. 581-28 du code de l’environnement, les mots : « quinze jours » sont remplacés par les mots : « quarante-huit heures ».

La parole est à M. Marc Laménie, pour présenter l’amendement n° 610 rectifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laménie

Le délai de quinze jours prévu pour enlever des affichages et marquages nuisant au paysage urbain va à l’encontre de l’objectif de célérité. Nous proposons donc de le réduire à quarante-huit heures.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Gabouty

La parole est à M. Roger Karoutchi, pour présenter l’amendement n° 702 rectifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

Cet amendement vise à ramener de quinze jours à quarante-huit heures le délai d’application d’un arrêté ordonnant la suppression ou la mise en conformité de dispositifs publicitaires.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Gabouty

L’amendement n° 726 rectifié, présenté par Mme de la Gontrie, MM. Féraud, Assouline, Jomier, Kerrouche, Durain, Marie, Kanner et Jacques Bigot, Mme Harribey, MM. Leconte, Fichet, Sueur et Sutour, Mme Blondin, MM. Montaugé, Courteau, Daunis, Bérit-Débat, Antiste et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Après l’article 15

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au premier alinéa de l’article L. 581-27, à la première phrase de l’article L. 581-28 et à la première phrase du premier alinéa de l’article L. 581-30 du code de l’environnement, le mot : « quinze » est remplacé par le mot « cinq ».

La parole est à Mme Marie-Pierre de la Gontrie.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Pierre de La Gontrie

Dans le cadre des échanges comme toujours très intéressants que nous avons eus en commission, il est apparu qu’un délai de quarante-huit heures – que nous avions également envisagé dans un premier temps – était trop bref et ne permettait pas l’exercice du contradictoire. Nous proposons donc un délai de cinq jours. Je suis certaine que cela emportera la conviction de la commission et – qui sait ? – de la majorité du Sénat.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Gabouty

L’amendement n° 92 rectifié, présenté par Mme N. Delattre, MM. Artano, A. Bertrand et Cabanel, Mme M. Carrère, MM. Castelli, Collin et Corbisez, Mme Costes, MM. Gabouty, Gold et Guérini, Mme Guillotin, M. Jeansannetas, Mme Jouve et MM. Labbé, Léonhardt, Requier et Roux, est ainsi libellé :

Après l’article 15

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au premier alinéa de l’article L. 581-27 et à la première phrase de l’article L. 581-28 du code de l’environnement, le mot : « quinze » est remplacé par le mot : « cinq ».

La parole est à Mme Nathalie Delattre.

Debut de section - PermalienPhoto de Nathalie Delattre

Le groupe RDSE avait proposé un délai de cinq jours. Or c’est le consensus qui s’est dégagé en commission. Nous avons visiblement convaincu nos collègues du groupe socialiste !

Debut de section - PermalienPhoto de Mathieu Darnaud

Nous avons ici la preuve que des échanges nourris peuvent permettre de convaincre la commission. Nous étions sur un délai de dix jours, mais nous avons entendu l’impérieuse nécessité qu’il y avait à réduire ce délai, pour des raisons que chacun ici comprendra. Pour autant, nous voulions garantir le respect du contradictoire. Chacun a fait un pas en direction de l’autre.

J’émets donc un avis de sagesse très favorable sur l’abaissement du délai à cinq jours, en sollicitant le retrait des amendements identiques n° 610 rectifié et 702 rectifié au profit de cette solution.

Debut de section - Permalien
Sébastien Lecornu

Je n’ai pas assisté aux travaux de la commission des lois, mais je me rattrape en rejoignant M. le rapporteur : avis favorable sur les amendements tendant à ramener le délai à cinq jours et demande de retrait des deux autres amendements. La convergence proposée par la commission me semble être une bonne chose.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Gabouty

La parole est à M. Roger Karoutchi, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

M. Roger Karoutchi. Je retire mon amendement au nom de la convergence démocratique, afin que les socialistes cessent de nous croire sectaires !

Exclamations amusées.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Gabouty

L’amendement n° 702 rectifié est retiré.

Qu’en est-il de l’amendement n° 610 rectifié, monsieur Laménie ?

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laménie

Je le retire également, monsieur le président.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Gabouty

L’amendement n° 610 rectifié est retiré.

Je signale que l’adoption de l’amendement n° 726 rectifié aurait pour effet de rendre sans objet l’amendement n° 92 rectifié.

La parole est à Mme Nathalie Delattre, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Nathalie Delattre

Je souhaite savoir quelle rédaction, la mienne ou celle de Mme de la Gontrie, est la meilleure. Je suis prête à retirer mon amendement dans le second cas.

Debut de section - PermalienPhoto de Mathieu Darnaud

À nos yeux, la meilleure rédaction est celle qui est proposée au travers de l’amendement n° 726 rectifié. Je propose donc d’adopter cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Gabouty

Madame Delattre, souhaitez-vous rectifier votre amendement pour le rendre identique à celui de Mme de la Gontrie ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Gabouty

Je suis donc saisi d’un amendement n° 92 rectifié bis, présenté par Mme N. Delattre, MM. Artano, A. Bertrand et Cabanel, Mme M. Carrère, MM. Castelli, Collin et Corbisez, Mme Costes, MM. Gabouty, Gold et Guérini, Mme Guillotin, M. Jeansannetas, Mme Jouve et MM. Labbé, Léonhardt, Requier et Roux, et ainsi libellé :

Après l’article 15

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au premier alinéa de l’article L. 581-27, à la première phrase de l’article L. 581-28 et à la première phrase du premier alinéa de l’article L. 581-30 du code de l’environnement, le mot : « quinze » est remplacé par le mot « cinq ».

Je mets aux voix les amendements identiques n° 726 rectifié et 92 rectifié bis.

Les amendements sont adoptés.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Gabouty

En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 15.

L’amendement n° 19 rectifié, présenté par Mme L. Darcos, MM. Bascher et Bazin, Mme Berthet, MM. Bizet et Bonnecarrère, Mme Boulay-Espéronnier, M. Brisson, Mme Bruguière, MM. Cambon et Cardoux, Mme Chain-Larché, MM. Chaize, Charon, Courtial, Cuypers, Dallier, Daubresse, Decool et Delahaye, Mme Deromedi, M. Dufaut, Mmes Dumas, Estrosi Sassone et Eustache-Brinio, MM. B. Fournier et Genest, Mme N. Goulet, MM. Grosdidier et Grosperrin, Mme Gruny, MM. Guerriau, Husson, Karoutchi, Kennel, Kern et Laménie, Mme Lamure, MM. D. Laurent et Lefèvre, Mmes Lherbier et Lopez, MM. Malhuret, Mandelli et Mayet, Mmes M. Mercier et Micouleau, MM. Milon et Moga, Mme Noël, MM. Paccaud, Pellevat, Pemezec, Perrin et Pierre, Mmes Procaccia et Puissat, MM. Raison, Rapin, Regnard, Savary, Savin, Schmitz, Sido et Sol, Mme Thomas et MM. Vaspart et Vogel, est ainsi libellé :

Après l’article 15

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au début du II de l’article L. 541-46 du code de l’environnement, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« En cas de constatation de l’infraction mentionnée au 4° du I du présent article, le maire et les adjoints peuvent, avec l’autorisation préalable du procureur de la République donnée par tout moyen, faire procéder à l’immobilisation et à la mise en fourrière du véhicule. En cas de condamnation prononcée pour l’infraction mentionnée au même 4°, le véhicule n’est restitué au condamné qu’après sa remise en liberté ou le paiement de l’amende. Les frais d’enlèvement et de garde en fourrière sont à la charge de ce dernier. »

La parole est à Mme Laure Darcos.

Debut de section - PermalienPhoto de Laure Darcos

La lutte contre les dépôts sauvages de déchets est devenue une priorité des élus locaux, de plus en plus confrontés à ce type d’incivilités, qui portent non seulement atteinte à l’environnement, mais pèsent également lourdement sur les budgets des collectivités locales.

Le présent amendement vise à autoriser les maires et les adjoints, qui ont la qualité d’officier de police judiciaire, conformément à l’article 16 du code de procédure pénale, à faire procéder, après autorisation du procureur de la République, à l’immobilisation et à la mise en fourrière du véhicule ayant servi à transporter les déchets, matériaux et autres objets abandonnés, jetés ou déversés illégalement.

Monsieur le ministre, j’ai entendu vos déclarations sur un amendement de M. Temal relatif à l’économie circulaire. Pour ma part, j’ai fait adopter un amendement en la matière prévoyant une confiscation en cas de récidive après condamnation à une amende. Le dispositif que je propose ici n’est pas redondant ; il est au contraire complémentaire : je souhaite donner au maire le pouvoir de police pour saisir un véhicule et le mettre en fourrière avant décision de justice.

Debut de section - PermalienPhoto de Mathieu Darnaud

Cet amendement, dont nous approuvons totalement les objectifs, nous semble déjà satisfait par le droit actuel. L’article R. 635-8 du code pénal et l’article L. 325-1-1du code de la route permettent aux officiers de police judiciaire et aux agents de police judiciaire d’immobiliser et de mettre en fourrière, après accord du procureur, un véhicule ayant servi à réaliser un dépôt sauvage d’ordures. Or le maire et ses adjoints ont un statut d’officier de police judiciaire.

La commission sollicite donc le retrait de cet amendement. À défaut, l’avis serait défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Laure Darcos

Non, monsieur le président : à la déception générale des cosignataires, je le retire. Je suis très heureuse qu’il soit satisfait !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Gabouty

L’amendement n° 19 rectifié est retiré.

Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente.

La séance est suspendue.

La séance, suspendue à vingt heures, est reprise à vingt-et-une heures trente, sous la présidence de M. Thani Mohamed Soilihi.