Séance en hémicycle du 10 février 2011 à 14h45

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

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  • d’asile
  • l’ofpra
  • prioritaire
  • rétention
  • suspensif
  • séjour
  • transposition

La séance

Source

La séance, suspendue à douze heures trente-cinq, est reprise à quatorze heures quarante.

Photo de Monique Papon

La séance est reprise.

Nous poursuivons la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, relatif à l’immigration, à l’intégration et à la nationalité.

Debut de section - PermalienPhoto de Monique Papon

L'amendement n° 457, présenté par MM. Yung, Anziani et Sueur, Mmes Boumediene-Thiery et Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat et C. Gautier, Mme Klès, MM. Michel, Antoinette, Assouline et Badinter, Mmes Blondin, Cerisier-ben Guiga et Ghali, M. Guérini, Mme Khiari, M. Lagauche, Mme Lepage, MM. Madec, Mermaz, Patient et Ries, Mme Tasca et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Après l'article 72, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l'article L. 611-11 du même code, il est inséré un article L. 611-12 ainsi rédigé :

« Art. L. 611 -12. - Le Gouvernement présente chaque année au Parlement un rapport d'information sur les objectifs et les moyens alloués à la police aux frontières. Le rapport fera notamment mention de l'évolution des effectifs de la police aux frontières et de la formation des agents en vue d'améliorer leurs spécialisations.

« Le Gouvernement présente chaque année au Parlement un rapport d'information sur la coopération européenne en matière de démantèlement des filières d'exploitation et de traite humaine. Ce rapport fixe les objectifs à atteindre et dresse des propositions faites à la Commission européenne pour la création d'un groupe d'intervention européen de lutte contre l'exploitation et la traite humaine. »

La parole est à M. Richard Yung.

Debut de section - PermalienPhoto de Richard Yung

… le sujet les justifiant amplement, et nous savons que le Gouvernement a une certaine prédilection pour les rapports…

Le premier concernerait la police aux frontières tandis que le second se rapporterait plus particulièrement à la coopération européenne en matière de démantèlement des filières d’exploitation et de traite humaine.

Plus sérieusement, notre idée, derrière cette demande de rapports, serait de faire avancer la réflexion sur le fonctionnement de la police aux frontières ; nous savons que se posent en particulier des problèmes de formation et d’effectifs. Le second sujet, quant à lui, est suffisamment explicite puisqu’il s’agit des filières d’exploitation de la traite humaine pour lesquelles une coopération européenne est absolument nécessaire.

Telles sont les raisons pour lesquelles nous demandons deux rapports.

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

S’agissant d’une demande de rapports supplémentaires, la commission émet un avis défavorable.

Debut de section - Permalien
Marie-Luce Penchard, ministre auprès du ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration, chargée de l'outre-mer

Monsieur Yung, je comprends l’esprit de votre amendement, mais il s’agit encore de rapports supplémentaires alors que le code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, le CESEDA, prévoit la remise au Parlement de rapports annuels et globaux sur tous les aspects de la politique d’immigration. Ce rapport présente d’importants éléments qui permettent de mesurer les décisions qui sont prises en matière de lutte contre le travail illégal et les filières d’immigration illégale. Il n’est donc pas nécessaire d’ajouter de nouveaux rapports.

Le Gouvernement émet par conséquent un avis défavorable sur l’amendement n° 457.

L'amendement n'est pas adopté.

(Non modifié)

Le premier alinéa de l’article L. 624-1 du même code est ainsi rédigé :

« Tout étranger qui se sera soustrait ou qui aura tenté de se soustraire à l’exécution d’une mesure de refus d’entrée en France, d’un arrêté d’expulsion, d’une mesure de reconduite à la frontière ou d’une obligation de quitter le territoire français ou qui, expulsé ou ayant fait l’objet d’une interdiction judiciaire du territoire, d’une interdiction de retour sur le territoire français ou d’un arrêté de reconduite à la frontière pris moins de trois ans auparavant en application de l’article L. 533-1, aura pénétré de nouveau sans autorisation en France, sera puni d’une peine de trois ans d’emprisonnement. »

Debut de section - PermalienPhoto de Monique Papon

L'amendement n° 83 rectifié, présenté par MM. Mézard et Collin, Mme Escoffier, MM. Baylet et Fortassin, Mme Laborde et MM. Milhau, Plancade, Tropeano, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :

Alinéa 2

Supprimer les mots :

, d’une interdiction de retour sur le territoire français

La parole est à M. François Fortassin.

Debut de section - PermalienPhoto de François Fortassin

Par cet amendement de coordination, nous entendons manifester de nouveau notre opposition aux modalités d’interdiction de séjour.

Debut de section - Permalien
Marie-Luce Penchard, ministre

Défavorable.

L'amendement n'est pas adopté.

L'article 73 est adopté.

(Supprimé)

L’article L. 731-2 du même code est ainsi modifié :

1° Au second alinéa, après les mots : « l’informe », sont insérés les mots : « dans une langue dont il est raisonnable de supposer qu’il la comprend » ;

2° Il est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Le bénéfice de l’aide juridictionnelle ne peut pas être demandé dans le cadre d’un recours dirigé contre une décision de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides rejetant une demande de réexamen, lorsque le requérant a, à l’occasion d’une précédente demande, été entendu par l’office ainsi que par la Cour nationale du droit d’asile, assisté d’un avocat désigné au titre de l’aide juridictionnelle. »

Debut de section - PermalienPhoto de Monique Papon

Je suis saisie de trois amendements identiques.

L'amendement n° 84 rectifié est présenté par MM. Mézard et Collin, Mme Escoffier, MM. Baylet et Fortassin, Mme Laborde et MM. Milhau, Plancade, Tropeano, Vall et Vendasi.

L'amendement n° 229 est présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche.

L'amendement n° 458 est présenté par MM. Yung, Anziani et Sueur, Mmes Boumediene-Thiery et Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat et C. Gautier, Mme Klès, MM. Michel, Antoinette, Assouline et Badinter, Mmes Blondin, Cerisier-ben Guiga et Ghali, M. Guérini, Mme Khiari, M. Lagauche, Mme Lepage, MM. Madec, Mermaz, Patient et Ries, Mme Tasca et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à M. François Fortassin, pour présenter l'amendement n° 84 rectifié.

Debut de section - PermalienPhoto de François Fortassin

Cet article tend à interdire à un demandeur d’asile de solliciter l’aide juridictionnelle dans le cadre d’un recours dirigé contre une décision de l’OFPRA rejetant sa demande de réexamen, lorsque le requérant a déjà bénéficié de cette aide devant le même office ou la CNDA.

Ainsi, une nouvelle fois, comme à l’article 34 du projet de loi, est instituée une restriction du droit au recours effectif garanti à la fois par nos principes de valeur constitutionnelle et par l’article 13 de la Convention européenne des droits de l’homme. Cette restriction est d’autant plus inacceptable que la directive du 1er décembre 2005 relative à des normes minimales concernant la procédure d’octroi et de retrait du statut de réfugié dans les États membres vise non pas les réexamens, mais les recours devant d’autres juridictions.

Debut de section - PermalienPhoto de Monique Papon

La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat, pour présenter l'amendement n° 229.

Debut de section - PermalienPhoto de Josiane Mathon-Poinat

Madame la présidente, je défendrai en même temps l'amendement n° 230.

Deux ans à peine après la généralisation de l’aide juridictionnelle à la CNDA, est instituée une restriction de ce droit sans que cela soit d’une véritable efficacité pour la juridiction. Selon les auteurs de l’amendement à l’origine de cet article, cette restriction serait justifiée par le fait que les demandes d’aide juridictionnelle présentées après enrôlement seraient à l’origine de 20 % des renvois.

La demande d’aide juridictionnelle à l’audience n’est pas la cause principale des renvois : c’est le nombre trop important d’affaires inscrites au rôle qui conduit les formations de jugement à renvoyer les affaires pour audience tardive, ce qui est tout à fait différent. D’autres renvois sont justifiés par l’absence de l’avocat qui en avait pourtant dûment averti la Cour, ou par l’absence d’une partie ou d’une totalité d’un dossier.

Par ailleurs, les avocats désignés par le bureau d’aide juridictionnelle le sont, de façon récurrente, très tardivement et sont dans l’obligation de solliciter le report de l’affaire soit parce qu’ils n’ont pu rencontrer leur client avant l’audience, soit parce qu’ils n’ont pas été en mesure de produire avant le délai de clôture les pièces du dossier. Ce qui est en cause, c’est davantage l’organisation de la Cour qu’une prétendue manœuvre dilatoire du demandeur.

Aussi prévoir l’exclusion des demandeurs de l’ensemble de recours est-il contraire au droit positif français et non conforme avec la directive n° 2005/85/CE du Conseil du 1er décembre 2005.

En effet, la jurisprudence du Conseil d’État a encadré la procédure de réexamen et fixé des critères précis pour la recevabilité d’une demande de réexamen. Elle reconnaît que le demandeur d’asile qui soumet des faits nouveaux a le droit de voir sa demande réexaminée et qu’il doit bénéficier d’une admission au séjour et des conditions matérielles d’accueil. Le priver d’un conseil au titre de l’aide juridictionnelle serait une atteinte au droit au recours effectif.

D’autre part, le 4° de l’article 32 de la même directive indique clairement que « si des éléments ou des faits nouveaux apparaissent ou sont présentés par le demandeur et qu’ils augmentent de manière significative la probabilité que le demandeur remplisse les conditions requises pour prétendre au statut de réfugié en vertu de la directive 2004/83/CE, l’examen de la demande est poursuivi conformément aux dispositions du chapitre II. ».

Priver les demandeurs d’asile dont la demande est recevable d’un réexamen de l’aide juridictionnelle est donc injustifiable. C’est la raison pour laquelle nous demandons la suppression de l’article 74 bis dans l’amendement n° 229 et l’extension de l’aide juridique à tous les demandeurs d’asile dans l'amendement n° 230.

Debut de section - PermalienPhoto de Monique Papon

La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery, pour présenter l'amendement n° 458.

Debut de section - PermalienPhoto de Alima Boumediene-Thiery

Mon propos ira dans le même sens que celui de mes collègues. Depuis le 1er décembre 2008, l’aide juridictionnelle peut être octroyée à tous les requérants qui remplissent les conditions exigées, comme le plafond de ressources, quelle que soit la régularité de leur entrée sur le territoire national.

La suppression de l’exigence d’entrée régulière sur le territoire français pour demander l’aide juridictionnelle date de la dernière loi sur l’immigration votée en 2006, et déjà vous nous demandez de légiférer en sens inverse !

L’article 74 bis, avant que la commission des lois du Sénat n’y apporte quelques sages, quoique insuffisantes, modifications, interdisait qu’un migrant puisse bénéficier de l’aide juridictionnelle dans le cadre d’un recours contre la décision de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides rejetant la demande de réexamen de sa demande d’asile.

On le comprend bien, cet article laissait entendre que toute nouvelle demande de protection était par nature abusive. Pourtant, après le rejet définitif d’une première demande d’asile, seule la présentation d’éléments nouveaux permet le réexamen d’une demande. Cette mesure était donc une atteinte grave au droit d’asile.

Les modifications apportées par la commission des lois ne sont pas de nature à garantir le fait que les demandeurs d’asile puissent bénéficier d’un recours effectif devant la juridiction en étant défendus.

En effet, avec le nouveau dispositif adopté par la commission, l’aide juridictionnelle ne pourrait pas être accordée devant la CNDA dans le cas d’une demande de réexamen dès lors que le requérant a, à l’occasion d’une précédente demande, été entendu par 1’OFPRA ainsi que par la Cour, assisté d’un avocat désigné au titre de l’aide juridictionnelle.

Selon le rapporteur, le fait de refuser à certains demandeurs d’asile la possibilité de demander l’aide juridictionnelle serait justifié par l’article 15 de la directive 2005/85/CE relative à des normes minimales concernant la procédure d’octroi et de retrait du statut de réfugié dans les États membres.

Il semble que l’on peut faire dire tout et son contraire au droit communautaire. Je ne veux pas entrer dans une querelle d’interprétation de la directive, je laisse cela à la Cour de justice de l’Union européenne, qui, vous ne manquerez pas de l’avoir remarqué, rend depuis quelques années des arrêts qui vont tous dans le sens d’une amélioration du niveau de protection des migrants, et en particulier des demandeurs d’asile, tandis que la sensibilité aux intérêts nationaux paraît plus circonstancielle.

Je souligne simplement que cette directive fixe des normes « minimales » concernant la procédure d’octroi et de retrait du statut de réfugié dans les États membres. Selon le principe de l’harmonisation minimale, largement utilisé dans le cadre de la construction européenne, les États sont libres d’adopter ou de conserver des normes plus protectrices.

C’est pourquoi nous proposons de conserver dans notre droit national la possibilité pour tous les demandeurs d’asile de demander l’aide juridictionnelle, d’autant que la loi de finances pour 2011 est déjà venue rogner ce droit en limitant à un mois le délai pour demander cette aide.

Pour toutes ces raisons, je vous propose, mes chers collègues, de supprimer l’article 74 bis.

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

La commission des lois est défavorable aux trois amendements identiques.

L’article 74 bis a été introduit dans le projet de loi par les députés. Il vise à encadrer et rationaliser l’octroi de l’aide juridictionnelle devant la CNDA. Nos collègues ont souhaité exclure du bénéfice de l’aide juridictionnelle les requérants sollicitant le réexamen de leur demande d’asile, car ils ont considéré que la plupart de ces demandes avaient un caractère dilatoire.

La commission des lois du Sénat a atténué ces dispositions en réservant l’hypothèse d’un demandeur d’asile qui n’aurait pas été entendu en première demande par un officier de protection ou par la CNDA. Il me semble que, ainsi définies, ces conditions permettent de définir un équilibre entre la nécessaire rationalisation de l’accès à l’aide juridictionnelle devant la CNDA et les garanties essentielles apportées aux demandeurs d’asile.

Au demeurant, ces dispositions paraissent conformes à l’article 15 de la directive du 1er décembre 2005.

Debut de section - Permalien
Marie-Luce Penchard, ministre

Il est important de rappeler que le projet de loi prévoit de supprimer l’aide juridictionnelle non pas pour l’examen de la demande d’asile, mais pour les recours présentés sur les décisions de l’OFPRA rejetant le réexamen d’une demande d’asile.

La commission des lois a d’ailleurs amendé cette disposition en prévoyant deux conditions : le requérant doit avoir été entendu par l’OFPRA et avoir comparu la première fois devant la Cour nationale du droit d’asile assisté d’un avocat désigné au titre de l’aide juridictionnelle.

Le Gouvernement et la commission des lois partagent donc l’objectif de restreindre l’accès à l’aide juridictionnelle lors des procédures de réexamen, dans le respect du droit communautaire, c’est-à-dire de la directive Procédure du 1er décembre 2005. Cette réforme poursuit un double objectif : améliorer le fonctionnement de la Cour et réduire son délai de traitement – près de quinze mois –, que tous s’accordent à considérer comme excessif ; et prévenir les recours abusifs.

C’est la raison pour laquelle le Gouvernement est défavorable à ces amendements de suppression.

Les amendements ne sont pas adoptés.

Debut de section - PermalienPhoto de Monique Papon

L'amendement n° 230, présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Alinéa 4

Rédiger ainsi cet alinéa :

« Sont soumis au bénéfice de l'aide juridictionnelle tous les demandeurs d'asile, tant devant l'Office français de protection des réfugiés et apatrides qu'en cas de recours devant la Cour nationale du droit d'asile. »

Cet amendement a déjà été défendu.

Quel est l’avis de la commission ?

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

L’aide juridictionnelle n’est possible que devant une juridiction. Or l’OFPRA est un établissement public administratif. L’avis est donc défavorable.

Debut de section - Permalien
Marie-Luce Penchard, ministre

Défavorable.

L'amendement n'est pas adopté.

L'article 74 bis est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Monique Papon

Je suis saisie de deux amendements identiques.

L'amendement n° 243 rectifié est présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche.

L'amendement n° 472 rectifié est présenté par MM. Yung, Anziani et Sueur, Mmes Boumediene-Thiery et Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat et C. Gautier, Mme Klès, MM. Michel, Antoinette, Assouline et Badinter, Mmes Blondin, Cerisier-ben Guiga et Ghali, M. Guérini, Mme Khiari, M. Lagauche, Mme Lepage, MM. Madec, Mermaz, Patient et Ries, Mme Tasca et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Après l'article 74 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le second alinéa de l'article L. 723-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est supprimé.

La parole est à Mme Éliane Assassi, pour présenter l’amendement n° 243 rectifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Monique Papon

La parole est à Mme Bariza Khiari, pour présenter l'amendement n° 472 rectifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

Le présent amendement vise à supprimer l’examen des demandes d’asile selon la procédure dite « prioritaire ».

Cette procédure accélérée est utilisée pour les demandeurs d’asile provenant de « pays d’origine sûrs », pour les personnes considérées comme représentant une menace pour l’ordre public et pour celles dont la demande est jugée frauduleuse, abusive ou seulement destinée à empêcher la mise en œuvre d’une mesure d’éloignement. Elle est également utilisée lorsque des demandeurs d’asile déboutés saisissent l’OFPRA afin de faire réexaminer leur demande sur le fondement d’informations nouvelles. Par ailleurs, les demandeurs d’asile placés en rétention et en instance d’éloignement sont aussi soumis à la procédure prioritaire.

En 2009, plus de 22 % des demandes d’asile ont été examinées selon la procédure dite « prioritaire ».

La limitation des droits découlant de cette procédure est dénoncée par toutes les associations de défense des droits de l’homme, qui affirment que ce système est « injuste et dangereux ».

L’ancien commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe, M. Álvaro Gil-Robles, souligne dans son rapport sur le respect effectif des droits de l’homme en France que « la procédure prioritaire est loin d’offrir les mêmes garanties que la demande d’asile de droit commun. En définitive, elle ne laisse qu’une chance infime aux demandeurs ».

L’existence de cette procédure prouve que la France n’est pas, contrairement à ce que le Gouvernement laisse croire, le pays le plus généreux en matière d’asile. Afin que la France puisse réellement mériter ce statut exemplaire, il apparaît nécessaire et urgent de supprimer la procédure dite « prioritaire ».

Telles sont les raisons pour lesquelles, je vous invite, mes chers collègues, à adopter cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

Ces deux amendements identiques visent à supprimer le dispositif de procédure prioritaire, qui permet à l’OFPRA de traiter assez rapidement un certain nombre de dossiers spécifiques.

À l’heure actuelle, je le rappelle, le délai moyen d’examen d’une demande en procédure normale est de dix-neuf à vingt mois environ, en incluant le recours devant la CNDA. Il est donc indispensable de conserver une procédure accélérée.

J’ajoute que le principe même de la procédure prioritaire a été validé par le Conseil constitutionnel dans sa décision du 13 août 1993 et qu’il est conforme à nos engagements communautaires.

Debut de section - Permalien
Marie-Luce Penchard, ministre

Défavorable.

Les amendements ne sont pas adoptés.

Le 4° de l’article L. 741-4 du même code est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Constitue une demande d’asile reposant sur une fraude délibérée la demande présentée par un étranger qui fournit sans motif légitime de fausses indications, dissimule des informations concernant son identité, sa nationalité ou le pays dans lequel il avait sa résidence habituelle ou les modalités de son entrée en France afin d’induire en erreur les autorités. »

Debut de section - PermalienPhoto de Monique Papon

Je suis saisie de trois amendements identiques.

L'amendement n° 85 rectifié est présenté par MM. Mézard, Collin et Detcheverry, Mme Escoffier, MM. Baylet et Fortassin, Mme Laborde et MM. Milhau, Plancade, Tropeano, Vall et Vendasi.

L'amendement n° 233 est présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche.

L'amendement n° 461 est présenté par MM. Yung, Anziani et Sueur, Mmes Boumediene-Thiery et Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat et C. Gautier, Mme Klès, MM. Michel, Antoinette, Assouline et Badinter, Mmes Blondin, Cerisier-ben Guiga et Ghali, M. Guérini, Mme Khiari, M. Lagauche, Mme Lepage, MM. Madec, Mermaz, Patient et Ries, Mme Tasca et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à M. François Fortassin, pour présenter l’amendement n° 85 rectifié.

Debut de section - PermalienPhoto de François Fortassin

En ajoutant un nouveau cas justifiant l’examen d’une demande d’asile selon la procédure prioritaire, cet article restreint encore la possibilité pour le demandeur d’asile d’obtenir une autorisation provisoire de séjour.

Selon le droit en vigueur, il revient à l’administration de démontrer que la dissimulation constitue une fraude délibérée. Or cet article inverse en quelque sorte la charge de la preuve, puisque, par exemple, la fraude pour dissimulation d’informations concernant l’identité devient la norme, à charge pour le demandeur d’asile d’apporter la justification que cette dissimulation répond à des motivations légitimes.

Songez aux personnes persécutées dans leur pays, qui, pour des raisons de sécurité, sont obligées de dissimuler leur véritable identité ! En outre, les délais particuliers de procédure ainsi que la complexité de cette dernière alourdiront les obligations du demandeur d’asile, au risque d’affaiblir sa demande.

J’ajoute que la procédure prioritaire est en elle-même une réelle restriction des droits des demandeurs d’asile qu’il conviendra de réaménager dans un sens plus respectueux du principe du contradictoire.

Debut de section - PermalienPhoto de Monique Papon

La parole est à Mme Mireille Schurch, pour présenter l'amendement n° 233.

Debut de section - PermalienPhoto de Mireille Schurch

Madame la présidente, je défendrai en même temps l’amendement n° 236 rectifié.

Cette disposition résulte d’une décision du Conseil d’État, qui a qualifié de frauduleuse la demande d’une personne dont les empreintes dactyloscopiques n’ont pu être relevées dans le cadre du système EURODAC, en application du règlement Dublin II.

Cette réforme intervient surtout dans un contexte où la gestion expéditive des demandes d’asile ne cesse d’augmenter. Désormais, plus de la moitié des demandes examinées selon la procédure prioritaire sont des premières demandes d’asile.

Dans ce contexte d’absence de contrôle réel et efficace du recours à la procédure prioritaire et compte tenu de l’intérêt qu’elle représente pour le Gouvernement d’un point de vue budgétaire, les craintes de dérives sont bien réelles.

L’application de la procédure prioritaire prive en effet le demandeur d’une instruction effective de sa requête, sans possibilité de recours suspensif devant la Cour nationale du droit d’asile, tout en le contraignant, lorsqu’il n’est pas mis en rétention administrative, à vivre dans des conditions de grande précarité avec des droits sociaux et économiques fortement minorés.

La nouvelle précision comporte, d’une part, un élément matériel, à savoir la fourniture de fausses indications, la dissimulation d’informations concernant l’identité, la nationalité, les modalités d’entrée sur le territoire, et, d’autre part, un élément intentionnel, à savoir la volonté d’induire en erreur les autorités.

Dans cette nouvelle hypothèse de refus d’admission au séjour, le préfet devra donc démontrer qu’il a en sa possession des indications et des informations permettant d’établir que les déclarations de l’intéressé sont erronées ou avaient été dissimulées et que la personne avait réellement l’intention d’induire en erreur l’administration.

Avec la mise en œuvre de ce nouveau mécanisme, le demandeur sera exposé, dès ses premières démarches, à un service public préfectoral guidé par une logique de contrôle, alors qu’il a en général fui des persécutions ou a pu subir des actes de tortures ou des traitements cruels, inhumains ou dégradants d’agents étatiques sans être protégé en raison de la défaillance des autorités du pays d’où il vient.

Or, dans une situation d’extrême vulnérabilité, psychologiquement fragilisé, le demandeur a souvent perdu toute confiance dans ce qui, à ses yeux, ressemble à l’autorité. Il peut, dans un premier temps, ne pas vouloir ou ne pas pouvoir révéler des informations au stade de son admission au séjour, alors que ses craintes de persécution en cas de retour sont fondées.

Par ailleurs, du fait d’un usage de la procédure prioritaire par les services préfectoraux, non réglementé en pratique mais régulièrement dénoncé par les associations, il est à craindre que l’invocation de cette nouvelle disposition ne devienne trop systématique, comme c’est déjà le cas aujourd’hui pour d’autres motifs légaux de refus d’autorisation de séjour provisoire.

Ainsi, par exemple, une personne pourrait-elle être soumise à la procédure prioritaire sur ce fondement lorsqu’elle se déclarera sous son identité réelle aux services d’une préfecture, mais que le fichage EURODAC révélera une identité différente, et donc fausse, fournie précédemment dans un autre État membre.

Il est à craindre que, dans le doute, les services préfectoraux préfèrent appliquer ce motif de refus d’admission au séjour et arguent de l’impossibilité de déterminer l’identité réelle de la personne.

C’est la raison pour laquelle nous demandons non seulement la suppression de cet article, mais aussi la suppression de la présomption de recours abusif prévue par le 4° de l’article L. 741-4.

Debut de section - PermalienPhoto de Monique Papon

La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, pour présenter l'amendement n° 461.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

La France est très profondément attachée au respect du droit d’asile. Accueillir les personnes persécutées, martyrisées dans leur pays, quel que soit celui-ci, fait partie de l’identité de notre pays.

Tout le monde l’aura compris, M. Fortassin et Mme Schurch ont d’ailleurs été extrêmement précis sur ce point, l’article 75 vise indirectement à élargir l’application de la procédure prioritaire. Or cette procédure accélérée prive les candidats à l’asile de tout titre provisoire de séjour et autorise l’administration à les expulser avant même l’examen par la Cour nationale du droit d’asile de la décision de rejet de la demande d’asile.

Je sais, monsieur le rapporteur, que la procédure prioritaire a été validée par le Conseil constitutionnel. Il n’empêche qu’il s’agit d’une procédure expéditive, qui se traduit par l’absence de recours suspensif pour les personnes invoquant des risques de persécution en cas de renvoi dans leur pays.

Pour nous, cette mesure n’est pas satisfaisante. D’ailleurs, le Conseil constitutionnel devra prochainement dire si l’absence de recours suspensif devant la CNDA est conforme à l’article XVI de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, qui dispose : « Toute société dans laquelle la garantie des droits n’est pas assurée, ni la séparation des pouvoirs déterminée, n’a point de Constitution ». Hier, la Cour de cassation a en effet décidé de transmettre au Conseil constitutionnel une question prioritaire de constitutionnalité.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

M. le rapporteur a proposé d’exclure du dispositif prévu à l’article 75 les personnes qui dissimulent les éléments sur leur identité ou les modalités de leur entrée en France pour des motifs légitimes. Mais, vous le savez bien, des étrangers peuvent faire l’objet de menaces de la part de passeurs et peuvent ne pas dire la vérité précisément à cause de ces menaces. Voilà pourquoi nous demandons que les règles générales du droit s’appliquent et qu’un recours suspensif puisse être possible.

Pour toutes ces raisons, nous pensons qu’il serait sage de supprimer cet article. Les procédures expéditives ne présentent en effet pas les garanties nécessaires par rapport à un principe aussi important que celui du droit d’asile.

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

Stricto sensu, l’article 75 du projet de loi n’étend pas le champ des hypothèses justifiant l’examen d’une demande d’asile selon la procédure prioritaire, mais il précise la notion de « demande d’asile reposant sur une fraude délibérée », notion qui figure déjà à l’article L. 741-4 du CESEDA.

Son objet est de prévenir les pratiques de certains demandeurs d’asile tendant à altérer leurs empreintes digitales afin d’empêcher leur identification par le dispositif EURODAC ou à taire sciemment certains éléments de leur parcours tels que des séjours antérieurs dans d’autres États membres de l’Union européenne. De telles pratiques sont déjà sanctionnées par le juge administratif. L’article 75 du projet de loi permettra d’unifier la pratique des préfectures en la matière.

La commission des lois a toutefois souhaité réserver l’hypothèse où l’altération des empreintes ou le silence sur certains éléments du parcours relèverait d’un « motif légitime », par exemple lorsque la sécurité du demandeur d’asile est menacée. Sur ce point, il me semble que le projet de loi est parvenu à un bon équilibre.

Telles sont les raisons pour lesquelles la commission a émis un avis défavorable sur ces trois amendements identiques.

Debut de section - Permalien
Marie-Luce Penchard, ministre

Le Gouvernement est également défavorable à ces trois amendements de suppression. En effet, comme vient de l’expliquer M. le rapporteur, l’article 75 est nécessaire.

Je précise simplement que l’application de cette disposition est encadrée. L’utilisation de la procédure prioritaire n’est pas automatique et résulte d’un examen individuel. Cette procédure ne sera d’ailleurs utilisée que si l’étranger dissimule délibérément des informations dans le but de tromper les autorités françaises.

J’ai entendu parler à plusieurs reprises de « procédure expéditive ». Je rappelle que le traitement d’une demande d’asile devant l’OFPRA est actuellement de 145 jours et de 445 jours devant la CNDA. Le projet de loi prévoit donc de permettre de consacrer plus de temps aux demandes qui ne sont pas abusives et de réduire globalement les délais.

Cette disposition ne prive nullement les personnes ni du droit à demander l’asile ni du droit à obtenir une protection, mais elle se limite à aménager les modalités procédurales d’examen de leur demande d’asile en la soumettant à la procédure prioritaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Monique Papon

La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Je suis très surpris par votre déclaration, madame la ministre.

Vous nous expliquez qu’il existe deux procédures, l’une rapide et l’autre plus longue, et qu’il vaut mieux consacrer plus de temps aux demandes qui ne sont pas abusives.

Mais, en ce jour où de nombreux magistrats sont inquiets, …

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

M. Jean-Pierre Sueur. … peut-être serait-il plus sage de ne pas faire de nouvelles déclarations qui posent problèmes.

Protestations sur les travées de l’UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Mes chers collègues, si vous n’êtes pas d’accord, …

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

… dites-nous pourquoi !

Si Mme la ministre dit qu’il faut accorder plus de temps aux demandes qui ne sont pas abusives qu’aux demandes abusives, cela signifie que, dès le départ, elle sait que certaines demandes sont abusives. Or quel est justement l’objet de la procédure ?Il est précisément de déterminer si la demande est abusive ou non. C’est d’une totale évidence !

Madame la ministre, si vous dites que, a priori, certaines demandes d’asile sont abusives, contrairement à d’autres, et qu’elles doivent être examinées rapidement, cela signifie que vous les jugez avant même le début de la procédure.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Mais bien sûr que si ! Mon cher collègue, si vous n’êtes pas d’accord avec moi, expliquez-moi pourquoi. Je serais très heureux de vous entendre.

Madame la ministre, cette déclaration étant particulièrement maladroite, j’espère que vous aurez à cœur de la rectifier !

Je le répète : si l’on considère dès le départ que certaines demandes sont abusives, cela signifie qu’on les a jugées avant de les examiner.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Mon cher collègue, alors que l’objet de la procédure est de savoir si une demande d’asile est pertinente, recevable ou abusive, si on dit dès le départ que la procédure accélérée est nécessaire, cela signifie que la demande est déclarée abusive avant même d’avoir été examinée.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

M. Jean-Pierre Sueur. Il me semble qu’un membre du Gouvernement ne peut pas déclarer que certaines demandes d’asile sont, a priori, avant même leur examen, abusives.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.

Les amendements ne sont pas adoptés.

Debut de section - PermalienPhoto de Monique Papon

Je suis saisie de onze amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 482 rectifié, présenté par MM. Yung, Anziani et Sueur, Mmes Boumediene-Thiery et Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat et C. Gautier, Mme Klès, MM. Michel, Antoinette, Assouline et Badinter, Mmes Blondin, Cerisier-ben Guiga et Ghali, M. Guérini, Mme Khiari, M. Lagauche, Mme Lepage, MM. Madec, Mermaz, Patient et Ries, Mme Tasca et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

Les articles L. 741-4, L. 742-2, L. 742-4, L. 742-5, L. 742-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sont abrogés.

La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Madame la ministre, j’aurais aimé que vous me fassiez l’honneur de me répondre et je regrette que ce ne soit pas le cas.

Le Conseil constitutionnel et le Conseil d’État ont consacré le principe de l’admission au séjour des demandeurs d’asile jusqu’à la décision de la Cour nationale du droit d’asile.

Quatre exceptions à ce principe sont prévues par l’article L.741-4 du CESEDA. Il s’agit, premièrement, des personnes dont la demande d’asile relève de la compétence d’un autre état membre de l’Union européenne en application du règlement Dublin II ; deuxièmement, des personnes originaires d’un pays considéré comme « sûr » ; troisièmement, des personnes qui représentent une menace grave pour la société ; quatrièmement, des personnes dont la demande reposerait sur une fraude délibérée. Cela fait au total beaucoup de monde !

Or les personnes relevant de ces quatre exceptions voient leur demande d’asile examinée selon la procédure dite « prioritaire », c’est-à-dire qu’elles ne bénéficient pas d’un droit au séjour, que l’OFPRA statue de manière accélérée sur leur cas et surtout que le recours devant la CNDA n’a pas aujourd'hui d’effet suspensif. L’étranger peut donc être reconduit à la frontière dès que la décision de rejet de l’OFPRA lui a été notifiée ! Je tiens à souligner que, pour l’année 2010, la procédure prioritaire a concerné un quart des demandes.

Par cet amendement, nous proposons de garantir à tous les demandeurs d’asile un titre de séjour, le droit à un recours effectif et le bénéfice des conditions matérielles d’accueil. À cette fin, nous réclamons donc la suppression des quatre exceptions de refus de séjour décrites à l’article L.741-4, car la procédure prioritaire est selon nous inéquitable et injuste. Elle ne garantit pas suffisamment le respect du droit d’asile, si fondamental pour la République française.

Debut de section - PermalienPhoto de Monique Papon

L'amendement n° 234, présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

L'article L. 741-4 du même code est abrogé.

La parole est à Mme Mireille Schurch.

Debut de section - PermalienPhoto de Mireille Schurch

Nous estimons, à l’instar de nombreuses instances internationales et européennes, que la procédure dite « prioritaire » ne présente pas les garanties suffisantes et qu’elle ne tient pas compte de la particularité de la situation des demandeurs d’asile.

La Cour européenne des droits de l’homme est actuellement saisie de sept requêtes dirigées contre la France, chacune se fondant sur l’absence de recours systématiquement suspensif devant la CNDA, en violation des articles 3 et 13 de la Convention.

Lors de l’examen en mai 2010 du rapport périodique de la France, le Comité contre la torture des Nations unies a déclaré qu’il n’était « pas convaincu que la procédure prioritaire offre des garanties suffisantes contre un éloignement emportant un risque de torture » et recommandait que la France mette en place un recours suspensif pour ces demandes.

Le Comité des droits de l’homme a considéré en 2008 que la France devrait veiller à ce que la décision de renvoyer un étranger, y compris un demandeur d’asile, soit prise à l’issue d’une procédure équitable qui permette d’exclure effectivement tout risque réel de violations graves des droits de l’homme dont l’intéressé pourrait être victime à son retour, tout en s’assurant qu’il puisse exercer un droit de recours avec effet suspensif.

Le Commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe a considéré en 2006 que cette procédure était « loin d’offrir les mêmes garanties que la demande d’asile de droit commun » et qu’elle ne laissait « qu’une chance infime aux demandeurs ».

L’Agence des Nations unies pour les réfugiés a pour sa part affirmé que « la procédure prioritaire ne présente pas toutes les garanties requises pour assurer un respect effectif du principe de non-refoulement ».

Enfin, la Cour de cassation a déposé une question préalable de constitutionnalité sur l’absence de recours suspensif en procédure prioritaire, sur laquelle les Sages ne se sont pas encore prononcés.

Compte tenu des condamnations dont cette procédure fait l’objet et alors que les préfectures en font un usage abusif et systématique afin d’atteindre les objectifs chiffrés de reconduite à la frontière du Gouvernement, nous demandons la suppression de l’article L. 741-4 du CESEDA.

Debut de section - PermalienPhoto de Monique Papon

L'amendement n° 459 rectifié, présenté par MM. Yung, Anziani et Sueur, Mmes Boumediene-Thiery et Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat et C. Gautier, Mme Klès, MM. Michel, Antoinette, Assouline et Badinter, Mmes Blondin, Cerisier-ben Guiga et Ghali, M. Guérini, Mme Khiari, M. Lagauche, Mme Lepage, MM. Madec, Mermaz, Patient et Ries, Mme Tasca et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

I. - L'article L. 741-4 du même code est ainsi rédigé :

« Art. L. 741 -4. - Sous réserve du respect des stipulations de l'article 33 de la convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés, l'admission au séjour en France d'un étranger qui demande à bénéficier de l'asile ne peut être refusée que si l'examen de la demande d'asile relève de la compétence d'un autre État en application des dispositions du règlement (CE) n° 343/2003 du Conseil du 18 février 2003 établissant les critères et mécanismes de détermination de l'État membre responsable de l'examen d'une demande d'asile présentée dans l'un des États membres par un ressortissant d'un pays tiers, ou d'engagements identiques à ceux prévus par ledit règlement avec d'autres États.

« Les dispositions du présent article ne font pas obstacles au droit souverain de l'État d'accorder l'asile à toute personne qui se trouverait dans ce cas. »

II. - L'article L. 742-2 du même code est ainsi rédigé :

« Art. L. 742 -2. - Lorsqu'il apparaît, postérieurement à son admission au titre de l'asile, que l'étranger se trouve dans le cas prévu à l'article L. 741-4, le document provisoire de séjour peut être retiré ou son renouvellement refusé. »

III. - L'article L. 742-4 du même code est ainsi rédigé :

« Art. L. 742 -4. - Dans le cas où l'admission au séjour a été refusée pour le motif mentionné à l'article L. 741-1, l'intéressé n'est pas recevable à saisir la Cour nationale du droit d'asile. »

IV. - Au second alinéa de l'article L. 723-1 du même code, après les mots : « a été refusé ou retiré pour », la fin de cet alinéa est ainsi rédigée : « le motif mentionné à l'article L. 741-4, ou qui se sont vu refuser pour ce motif le renouvellement de ce document. »

La parole est à M. Ronan Kerdraon.

Debut de section - PermalienPhoto de Ronan Kerdraon

Mon intervention sera complémentaire de celle de Jean-Pierre Sueur.

Depuis 1993, les quatre exceptions au principe du droit au séjour pour les demandeurs d’asile prévues par l’article L. 741-4 du CESEDA n’ont cessé de prendre de l’ampleur. En 2010, environ un quart des demandes d’asile ont été examinées selon les modalités prévues par la procédure dite « prioritaire ».

Or cette procédure, qui devrait d’ailleurs plutôt être appelée procédure « accélérée », est profondément injuste et véritablement inéquitable. Le demandeur d’asile placé en procédure prioritaire ne bénéficie pas d’un droit au séjour, mais surtout, et j’insiste sur ce point, il peut être reconduit à la frontière dès que la décision de rejet de sa demande par l’OFPRA lui a été notifiée, car le recours devant la CNDA n’a pas d’effet suspensif. De plus, ce demandeur d’asile n’a pas accès aux centres d’accueil pour demandeurs d’asile, ses droits sociaux et économiques sont minorés.

En conséquence, nous demandons qu’un minimum de personnes soient concernées par cette procédure prioritaire afin de garantir au mieux le respect du droit d’asile. Par ailleurs, nous proposons qu’elle ne s’applique qu’aux personnes relevant du règlement Dublin II.

Cet amendement vise donc à réserver les décisions de refus d’admission au séjour provisoire aux situations dans lesquelles la France n’est pas responsable de l’examen d’une demande d’asile qui lui est présentée, cette dernière relevant de la responsabilité d’un autre État membre de l’Union européenne.

Debut de section - PermalienPhoto de Monique Papon

L'amendement n° 235 rectifié, présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

L'article L. 741-4 du même code est ainsi rédigé :

« Art. L. 741-4. - Sous réserve du respect des stipulations de l'article 33 de la convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés, l'admission au séjour en France d'un étranger qui demande à bénéficier de l'asile ne peut être refusée que si l'examen de la demande d'asile relève de la compétence d'un autre État. »

La parole est à Mme Mireille Schurch.

Debut de section - PermalienPhoto de Mireille Schurch

Cet amendement vise à reprendre les dispositions du règlement CE n° 343/2003 établissant les critères et mécanismes de détermination de l’État membre responsable de l’examen d’une demande d’asile présentée dans l’un des États membres par un ressortissant d’un pays tiers.

Ces dispositions ne font pas obstacle au droit souverain de l’État d’accorder l’asile à toute personne qui se trouverait dans ce cas.

Je vous invite, mes chers collègues, à adopter cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Monique Papon

Les amendements n° 86 rectifié, 236 rectifié et 460 sont identiques.

L'amendement n° 86 rectifié est présenté par MM. Mézard et Collin, Mme Escoffier, MM. Baylet et Fortassin, Mme Laborde et MM. Milhau, Plancade, Tropeano, Vall et Vendasi.

L'amendement n° 236 rectifié est présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche.

L'amendement n° 460 est présenté par MM. Yung, Anziani et Sueur, Mmes Boumediene-Thiery et Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat et C. Gautier, Mme Klès, MM. Michel, Antoinette, Assouline et Badinter, Mmes Blondin, Cerisier-ben Guiga et Ghali, M. Guérini, Mme Khiari, M. Lagauche, Mme Lepage, MM. Madec, Mermaz, Patient et Ries, Mme Tasca et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Rédiger ainsi cet article :

Le 4° de l’article L. 741-4 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile est abrogé.

La parole est à M. Jacques Mézard, pour présenter l’amendement n° 86 rectifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Cet amendement a pour objet d’abroger le refus de séjour, lequel est pour nous constitutif d’une exception au principe de l’admission au séjour des demandeurs d’asile, jusqu’à la décision de la Cour nationale du droit d’asile, principe consacré à la fois par le Conseil constitutionnel et le Conseil d’État.

Des exceptions, aujourd’hui au nombre de quatre, ont été introduites depuis 1993 dans notre droit. Elles aboutissent à ce qu’un tiers des demandeurs soient aujourd’hui placés sous le régime de la procédure dite « Dublin II » ou de la procédure prioritaire.

Or le droit à un recours effectif, que nombre d’entre nous n’ont cessé de défendre tout au long de nos débats, exige que soit mis fin à ce traitement inéquitable en abrogeant le refus de séjour.

De plus, ce dispositif donne lieu à une application extrêmement hétérogène sur l’ensemble du territoire, ce qui renforce le caractère tout à fait inégalitaire de la procédure.

Telles sont les raisons pour lesquelles nous demandons l’abrogation de l’article L. 741-4 du CESEDA.

Debut de section - PermalienPhoto de Monique Papon

La parole est à Mme Éliane Assassi, pour présenter l’amendement n° 236 rectifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Monique Papon

La parole est à M. Ronan Kerdraon, pour présenter l'amendement n° 460.

Debut de section - PermalienPhoto de Ronan Kerdraon

L’article L. 741-4 du CESEDA énonce les conditions dans lesquelles l’admission en France d’un étranger demandant à bénéficier de l’asile peut être refusée. Il s’agit de refuser l’accès au territoire avant même que l’étranger n’ait déposé sa demande.

Le 4° de cet article prévoit que l’admission en France du demandeur d’asile peut être refusée dans trois circonstances : lorsque sa demande repose sur une fraude délibérée – ce qui est normal –, lorsqu’elle constitue un recours abusif aux procédures d’asile, lorsqu’elle n’est présentée qu’en vue de faire échec à une mesure d’éloignement prononcée ou imminente.

Nous proposons de supprimer le 4° de l’article L. 741-4 du CESEDA.

En effet, lors de son admission en France pour déposer une demande d’asile, l’étranger est exposé, dès sa première démarche, aux services préfectoraux, lesquels sont guidés par une logique de contrôle.

Or cette personne a peut-être fui des persécutions ou subi des actes de tortures ou des traitements cruels, inhumains ou dégradants par des agents de l’État dans son pays d’origine. Dans une situation d’extrême vulnérabilité et alors qu’il est psychologiquement fragilisé, le demandeur a souvent perdu toute confiance dans ceux qui, à ses yeux, représentent l’autorité. Il peut, dans un premier temps, au stade de son admission au séjour, ne pas vouloir ou ne pas pouvoir révéler des informations alors que ses craintes de persécution en cas de retour sont fondées.

Cet amendement vise à ce que les motifs de « fraude délibérée », de « recours abusif » ou de « demande d’asile présentée en vue de faire échec à une mesure d’éloignement » ne puissent plus être invoqués par le préfet pour refuser l’admission en France d’un étranger au titre de l’asile.

M. Guy Fischer remplace Mme Monique Papon au fauteuil de la présidence.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Les amendements n° 16 et 238 rectifié bis sont identiques.

L'amendement n° 16 est présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet et M. Desessard.

L'amendement n° 238 rectifié bis est présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Rédiger ainsi cet article :

L'article L. 741-4 du même code est ainsi modifié :

1° La deuxième phrase du 2° est ainsi rédigée :

« Un pays est considéré comme tel lorsque, sur la base de la situation légale, de l'application du droit dans le cadre d'un régime démocratique et des circonstances politiques générales, il peut être démontré que, d'une manière générale et uniformément, il n'y est jamais recouru à la persécution, ni à la torture ni à des peines ou à des traitements inhumains ou dégradants et qu'il n'y a pas de menace en raison de violences dans des situations de conflit armé international ou interne. »

2° Le 4° est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Toutefois, ne peut être considérée comme un recours abusif ou frauduleux, la demande d'asile présentée par un étranger qui invoque des circonstances susceptibles de lui permettre de se voir reconnaître, le cas échéant, la qualité de réfugié ou la protection subsidiaire. »

La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery, pour présenter l'amendement n° 16.

Debut de section - PermalienPhoto de Alima Boumediene-Thiery

Il s’agit d’un amendement de repli.

Si l’article 75 n’est pas supprimé, au moins sa rédaction devrait permettre la transposition, à l’article L 741-4 du CESEDA, des critères de l’annexe II de la directive européenne 2005/85/CE permettant de fixer la liste des pays d’origine sûrs. Cette liste, vous le savez, mes chers collègues, pose de nombreux problèmes. Elle n’existe pas à l’échelon européen. En outre, les critères sont différents d’un pays à l’autre.

Cette circulaire devait faire l’objet d’une transposition avant le 1er décembre 2007. Nous avons déjà plus de trois ans de retard.

La définition actuellement donnée par la loi ne prend en compte que certains éléments. Ainsi, elle ne prend pas en compte des éléments tels que l’existence d’un conflit armé ou d’une guerre civile. Cela pose un problème.

Conformément à la jurisprudence du Conseil d’État, il s’agit de circonscrire l’application de la notion de recours frauduleux ou abusif aux seules demandes manifestement dilatoires. Si l’intéressé invoque les éléments permettant de le rattacher à une demande d’asile, il doit être, dans l’attente de l’examen de sa nouvelle demande d’asile, admis au séjour.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

La parole est à Mme Éliane Assassi, pour présenter l’amendement n° 238 rectifié bis.

Debut de section - PermalienPhoto de Éliane Assassi

Il s’agit également d’un amendement de repli par lequel nous souhaitons préciser la notion de « pays sûr ». Il semble impératif de modifier les termes de l’article L. 741-4 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile et d’introduire dans la loi les critères de l’annexe II de la directive 2005/85/CE – afin de fixer la liste des pays d’origine sûrs – qui aurait dû être transposée avant le 1er décembre 2007.

La définition donnée par la loi ne prend pas en compte certains éléments tels que, comme cela a été dit, l’existence d’un conflit armé.

De surcroît, la jurisprudence du Conseil d’État rappelle qu’il faudrait circonscrire l’application de la notion de recours frauduleux ou abusif aux seules demandes manifestement dilatoires. Si l’intéressé invoque les éléments permettant de le rattacher à une demande d’asile, il doit être admis au séjour.

Tel est le sens de cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Les amendements n° 237 rectifié et 477 rectifié bis sont identiques.

L'amendement n° 237 rectifié est présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche.

L'amendement n° 477 rectifié bis est présenté par MM. Yung, Anziani et Sueur, Mmes Boumediene-Thiery et Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat et C. Gautier, Mme Klès, MM. Michel, Antoinette, Assouline et Badinter, Mmes Blondin, Cerisier-ben Guiga et Ghali, M. Guérini, Mme Khiari, M. Lagauche, Mme Lepage, MM. Madec, Mermaz, Patient et Ries, Mmes Tasca, Printz et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Rédiger ainsi cet article :

Le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est ainsi modifié :

1° Après le mot : « office », la fin de la première phrase du deuxième alinéa de l'article L. 722-1 est supprimée ;

2° À la première phrase du 2° de l'article L. 741-4, après le mot : « susmentionnée », la fin de la phrase est supprimée.

La parole est à Mme Éliane Assassi, pour présenter l’amendement n° 237 rectifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Éliane Assassi

Cet amendement n’entre pas en contradiction avec le précédent. Il vise simplement à démontrer que la liste des pays d’origine sûrs devrait être supprimée.

En effet, la présence d’un État sur la liste des pays d’origine sûrs exclut ses ressortissants d’un certain nombre de droits et, surtout, autorise leur renvoi dans leur pays avant même que la Cour nationale du droit d’asile, la CNDA, ait statué sur leur requête. La décision du Conseil d’État du 23 juillet 2010, qui a conduit au retrait de cette liste de l’Arménie, de Madagascar, de la Turquie et, pour les ressortissants de sexe féminin, du Mali, montre toute la difficulté de l’établissement d’une telle liste. Aucun accord communautaire n’a d’ailleurs été possible sur les pays devant être retenus.

Cette liste empêche un grand nombre de ressortissants de ces pays d’être reconnus réfugiés ou de bénéficier de la protection « subsidiaire » car, aujourd’hui, beaucoup de leurs demandes sont rejetées en première instance par l’office français de protection des réfugiés et apatrides, l’OFPRA, et acceptées seulement au niveau du recours par la Cour nationale du droit d’asile

Ils estiment ainsi que ce principe est contraire au principe de non-discrimination en raison du pays d’origine, et permet de tirer d’une situation générale prévalant dans un État des conséquences qui s’imposent à des situations individuelles.

Pour ces raisons, nous demandons la suppression de cette liste.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

La parole est à M. Ronan Kerdraon, pour défendre L'amendement n° 477 rectifié bis.

Debut de section - PermalienPhoto de Ronan Kerdraon

Depuis la loi du 10 décembre 2003, le préfet peut refuser d’admettre au séjour des étrangers originaires d’un pays estimé sûr.

En vertu de l’alinéa 2° de l’article L. 741-4 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, un pays est considéré comme sûr « s’il veille au respect des principes de la liberté, de la démocratie et de l’état de droit, ainsi que des droits de l’homme et des libertés fondamentales ».

Or, la liste des pays d’origine sûrs, établie à partir des critères précités, est profondément insatisfaisante. Cela a été précédemment rappelé par ma collègue. Pour cette raison, depuis son arrêt du 13 février 2008, le Conseil d’État accepte de contrôler la légalité interne de cette liste.

Dans un récent arrêt du 23 juillet 2010, le Conseil d’État a franchi une étape supplémentaire en invalidant la présence du Mali, de Madagascar, de l’Arménie et de la Turquie dans cette liste. La fréquence des pratiques d’excision, la persécution des opposants au régime ou encore l’instabilité politique et sociale interne de ces États ont été autant de raisons invoquées par la plus haute juridiction administrative.

Aujourd’hui encore, il est possible de s’interroger sur la cohérence et le bien-fondé de cette liste. En effet, comment des pays pratiquant la peine de mort – le Bénin, la Tanzanie, la Mongolie ou le Ghana – peuvent-ils être considérés comme sûrs alors même qu’ils menacent la vie de leurs ressortissants ?

Nous sentons bien que cette liste n’a aucune légitimité en soi. D’ailleurs, à l’échelle communautaire, aucun accord sur l’élaboration d’une telle liste n’a été trouvé. Cette liste sert bien plus les intérêts diplomatiques de la France qu’elle ne protège les demandeurs d’asile. En effet, la « liste des pays d’origine sûrs » permet d’appliquer la procédure prioritaire au demandeur d’asile. Or, cette procédure est une entrave aux droits des demandeurs d’asile.

Dans cette hypothèse, les demandeurs ne bénéficient pas d’un droit au séjour et, s’ils peuvent saisir l’office français de protection des réfugiés et des apatrides, le recours devant la Cour nationale du droit d’asile n’est pas suspensif.

Autrement dit, dès que l’OFPRA a notifié sa décision de rejet, l’étranger peut être expulsé.

En fait, nous percevons parfaitement la logique que sous-tend la liste des « pays d’origine sûrs » : elle permet d’accélérer les reconduites à la frontière, en déclenchant la procédure prioritaire.

Si le zèle du Gouvernement en la matière n’est plus à démontrer, il doit cependant être combattu avec acharnement quand les droits fondamentaux des demandeurs d’asile ne sont pas respectés et qu’il n’existe pas de garanties quant aux risques de persécutions et d’exactions à leur encontre.

Le Gouvernement fait preuve – il faut le dire – d’une hypocrisie honteuse en prétendant protéger la vie et les droits des demandeurs d’asile, tout en déclenchant la procédure prioritaire.

Ainsi, l’amendement que nous proposons vise à supprimer la liste des pays d’origine sûrs, par essence difficile à établir. Les demandeurs d’asile seront alors véritablement protégés, et leurs droits certainement mieux respectés.

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

La commission est défavorable aux amendements n° 482 rectifié et 234.

Par l’amendement n° 459 rectifié, est demandée la suppression des examens des demandes d’asile selon la procédure prioritaire, à l’exception toutefois de celles nécessaires à l’application du règlement Dublin II. La commission est défavorable à cet amendement.

La commission est également défavorable à l’amendement n° 235 rectifié.

Les amendements n° 86 rectifié, 236 rectifié et 460 visent à supprimer les dispositions permettant d’examiner en procédure prioritaire une demande d’asile reposant sur une fraude délibérée ou constituant un recours abusif aux procédures d’asile. La commission des lois rappelle qu’il est essentiel de conserver ce cas d’examen d’une demande d’asile selon la procédure prioritaire, afin d’empêcher que des demandes manifestement dilatoires ne fassent échec à l’exécution d’une procédure d’éloignement. La commission est donc défavorable à ces amendements.

Les amendements identiques n° 16 et 238 rectifié bis proposent, d’une part, d’introduire dans notre droit la définition de la notion de pays d’origine sûr retenue par le droit communautaire, et, d’autre part, d’exclure du champ de la procédure prioritaire les demandes entrant dans le champ de la convention de Genève ou de la protection subsidiaire.

La commission des lois est favorable au 1° de ces amendements, qui introduirait dans notre droit la définition du concept de pays sûr qui figure dans la directive 2005/85/CE du 1er décembre 2005. Cette définition paraît en effet plus explicite que celle qui figure à l’article L. 741-4 du code des étrangers. En particulier, en visant la notion de « peines ou traitements inhumains ou dégradants », elle permet de prendre explicitement en compte les mauvais traitements tels que l’excision ou les mariages forcés.

La commission des lois est en revanche plus réservée sur le 2° de ces amendements. Si elle en comprend bien la logique, elle craint toutefois qu’il n’empêche de placer en procédure prioritaire les étrangers qui sollicitent l’asile de façon manifestement dilatoire, quelques heures avant l’exécution de leur reconduite à la frontière, par exemple. Or, même si les demandes formulées dans de telles circonstances comportent des moyens valables, elles n’en sont pas moins dilatoires.

En tout état de cause, je rappelle que l’examen d’une demande d’asile selon la procédure prioritaire ne fait pas obstacle à ce que l’OFPRA entende le demandeur. Les délais d’examen sont toutefois réduits. Néanmoins, le demandeur en procédure prioritaire ne peut pas être éloigné tant que l’OFPRA ne s’est pas prononcé sur sa demande, conformément aux principes posés par le Conseil constitutionnel.

La commission est par conséquent favorable aux 1° des amendements n° 238 rectifié bis et 16, et défavorable aux 2° de ces mêmes amendements.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Permettez-moi de vous interrompre, monsieur le rapporteur, pour faire remarquer qu’il sera opportun de mettre aux voix ces amendements par division.

Veuillez poursuivre, mon cher collègue.

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

J’ajouterai, monsieur le président, que, si le 1° de ces amendements est adopté, il devra compléter l’article 75 du projet de loi, et non s’y substituer.

Enfin, la commission des lois est défavorable aux amendements n° 237 rectifié et 477 rectifié bis. En effet, ces amendements proposent de supprimer les dispositions du code des étrangers relatives à la notion de pays d’origine sûr.

La notion de pays d’origine sûr est issue du droit communautaire. Le protocole annexé au traité d’Amsterdam du 2 octobre 1997 prohibe en principe les demandes d’asile entre États membres de l’Union européenne. Selon la directive du 29 avril 2004, un pays est considéré comme sûr s’il veille au respect des principes de liberté, de démocratie et d’état de droit, ainsi qu’au respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales. L’article 23 de la directive du 1er décembre 2005 permet d’examiner les demandes présentées par les ressortissants de ces pays selon la procédure prioritaire.

Je ferai toutefois trois remarques.

Tout d’abord, cette notion de pays sûr n’induit qu’une présomption de sécurité et ne fait pas obstacle, évidemment, à une reconnaissance de la qualité de réfugié par l’OFPRA ou la Cour nationale du droit d’asile.

Par ailleurs, la liste des pays sûrs est établie par le conseil d’administration de l’OFPRA sous le contrôle du juge administratif, qui, comme le relèvent les auteurs de l’amendement, examine attentivement si les conditions sont réunies.

Enfin, et en toutes hypothèses, un demandeur d’asile ressortissant d’un pays d’origine sûr ne peut pas être éloigné avant que l’OFPRA ne se soit prononcé sur sa demande, je l’ai déjà expliqué.

L’utilisation de cette notion est donc entourée de nombreuses garanties.

Debut de section - Permalien
Marie-Luce Penchard, ministre

Le Gouvernement est défavorable aux amendements n° 482 rectifié, 234, 459 rectifié, 235 rectifié, 86 rectifié, 236 rectifié et 460. En effet, ces amendements visent à supprimer la procédure prioritaire. Le Gouvernement considère justement que la procédure prévue par la loi assure un juste équilibre entre les exigences du droit d’asile et la nécessité de parer aux demandes d’asile manifestement étrangères à une problématique de protection.

S’agissant des amendements n° 16 et 238 rectifié bis, le Gouvernement souhaite le maintien de la rédaction initiale de l’article. En l'occurrence, il ne suit donc pas l’avis de la commission. En effet, le Gouvernement considère que la définition d’un pays d’origine sûr est déjà donnée par le code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile et qu’il n’est aucunement nécessaire de modifier cette définition, et ce d’autant que cette définition est conforme au droit communautaire, notamment à la directive du 1er décembre 2005.

S’agissant des amendements n° 237 rectifié et 477 rectifié bis, qui visent à supprimer la liste des pays d’origine sûrs, le Gouvernement considère que leur objet n’est pas acceptable. Il souhaite en effet conserver cette liste et appliquer aux ressortissants des pays d’origine sûrs la procédure prioritaire. Ce dispositif, jugé conforme à la Constitution par le Conseil constitutionnel, est autorisé par le droit communautaire. Le Gouvernement est donc défavorable à ces deux amendements.

L'amendement n'est pas adopté.

L'amendement n'est pas adopté.

L'amendement n'est pas adopté.

L'amendement n'est pas adopté.

Les amendements ne sont pas adoptés.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, pour explication de vote sur les amendements identiques n° 16 et 238 rectifié bis.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Nous prenons acte de la position de M. le rapporteur, qui est favorable au 1° de ces deux amendements identiques.

Pour autant, le 2° de ces deux amendements, qui tend à compléter le 4° de l’article L. 741-4 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, nous paraît également important.

En effet, il s’agit de préciser que l’examen individuel pourra être pris en compte de manière sérieuse et bénéficier à un certain nombre de personnes issues de pays considérés comme « sûrs ».

De mon point de vue, il serait regrettable que notre beau pays de France n’offre l’asile qu’à des personnes venant de pays non sûrs.

En effet, les critères de définition des « pays sûrs » ne sont pas toujours adaptés aux exigences du droit d’asile. Par exemple, au temps du maccarthysme, nous nous sommes enorgueillis d’accueillir nombre d’artistes, d’écrivains ou de cinéastes américains ; les États-Unis étaient pourtant considérés comme un pays sûr ! De même, le Royaume-Uni devait probablement considérer la France comme un pays sûr lorsque Victor Hugo s’est exilé à Jersey… Gardons cela en tête lorsque nous discutons des pays sûrs et non sûrs !

À mon sens, le droit d’asile doit faire l’objet d’un examen individuel. Sinon, pourraient être placées dans la même catégorie des personnes qui ne pourraient pas prétendre au droit d’asile, alors qu’elles essaieraient d’en bénéficier par un biais quelconque, et d’autres qui demanderaient l’asile parce que dans leur pays elles se verraient empêchés d’exercer leur métier. Jusqu’à une période très récente, nombre d’avocats ou d’enseignants tunisiens ne pouvaient pas exercer leur profession parce qu’ils étaient opposants. Pourtant, le gouvernement français considérait la Tunisie comme un pays sûr. Il faut donc faire attention à certaines qualifications.

Par ailleurs, je constate que les pays européens n’arrivent pas à se mettre d’accord sur une liste. C’est la méthode qui a été retenue, mais nous devrions peut-être y réfléchir.

Le 2° des deux amendements identiques vise à préciser que « ne peut être considérée comme un recours abusif ou frauduleux, la demande d’asile présentée par un étranger qui invoque des circonstances susceptibles de lui permettre de se voir reconnaître, le cas échéant, la qualité de réfugié ou la protection subsidiaire. » Cela a le mérite de clarifier les choses !

Ainsi, un individu empêché d’exercer son activité professionnelle dans un pays considéré chez nous comme « sûr » aurait tout de même la possibilité d’aller travailler ailleurs. N’oublions pas qu’il y a aussi des ouvriers qui sont dans cette situation.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

La parole est à M. le président de la commission des lois.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

Certes, la commission pense que la définition de « pays d’origine sûr » doit faire l’objet de précisions, conformément à l’évolution du droit. Mais c’est extrêmement subtil.

Or, madame Borvo Cohen-Seat, le dispositif que Mme Boumediene-Thiery et vous proposez au 2° de vos amendements respectifs revient à détruire la procédure prioritaire. Vous cherchez à revenir à ce que vous avez défendu auparavant, ce qui est d’ailleurs logique. Vos amendements sont extrêmement bien construits, mais on ne peut pas les adopter dans leur intégralité sous peine de remettre en cause la procédure prioritaire.

C’est pourquoi la commission souhaite un vote par division, monsieur le président. Nous sommes d'accord pour modifier la définition du pays d’origine sûr, mais pas pour adopter le 2° des deux amendements identiques et détruire la procédure prioritaire. J’espère que c’est bien clair dans l’esprit de nos collègues.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Alima Boumediene-Thiery

Je souscris aux arguments qui ont été avancés par Mme Borvo Cohen-Seat.

Toutefois, je prends acte de la proposition qui nous a été adressée. Même si la mesure que nous proposons au 2° de nos deux amendements identiques me semble également importante, l’adoption du 1° dans le cadre d’un vote par division serait déjà une première étape positive.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Je rappelle que la commission a souhaité qu’il soit procédé à un vote par division sur les amendements identiques n° 16 et 238 rectifié bis.

Il n’y a pas d’opposition ?...

Il en est ainsi décidé.

Je mets aux voix le 1° des amendements identiques n° 16 et 238 rectifié bis.

Ce texte est adopté.

Ce texte n’est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Je mets aux voix les amendements identiques n° 16 et 238 rectifié bis, modifiés, qui tendent désormais à compléter l’article 75 en s’insérant avant le premier alinéa.

Les amendements sont adoptés.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

En conséquence, les amendements n° 237 rectifié et 477 rectifié bis n’ont plus d’objet.

Je mets aux voix l'article 75, modifié.

L'article 75 est adopté.

(Non modifié)

Au I de l’article 6 de la loi n° 2010-873 du 27 juillet 2010 relative à l’action extérieure de l’État, après le mot : « étrangères », sont insérés les mots : «, du ministre chargé de l’immigration ».

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Je suis saisi de trois amendements identiques.

L'amendement n° 5 est présenté par MM. Kergueris et Duvernois.

L'amendement n° 92 est présenté par MM. Arthuis et Gouteyron.

L'amendement n° 464 est présenté par Mme Cerisier-ben Guiga, MM. Yung, Anziani et Sueur, Mmes Boumediene-Thiery et Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat et C. Gautier, Mme Klès, MM. Michel, Antoinette, Assouline et Badinter, Mmes Blondin et Ghali, M. Guérini, Mme Khiari, M. Lagauche, Mme Lepage, MM. Madec, Mermaz, Patient et Ries, Mme Tasca et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Louis Duvernois, pour présenter l'amendement n° 5.

Debut de section - PermalienPhoto de Louis Duvernois

Alors que la loi du 27 juillet 2010 relative à l’action extérieure de l’État a prévu une double tutelle du ministre des affaires étrangères et européennes et du ministre chargé de l'enseignement supérieur et de la recherche sur le nouvel établissement public Campus France, cet article, issu d'un amendement adopté par l'Assemblée nationale, vise à modifier le texte voté par le Parlement l'été dernier, en ajoutant la tutelle du ministre chargé de l'immigration sur cet établissement, ce qui aboutirait à une triple tutelle.

La multiplicité des tutelles est par principe à proscrire, afin de simplifier les relations de l’établissement public avec l’État et de renforcer son pilotage stratégique.

La question de la tutelle sur le nouvel établissement public Campus France avait été longuement étudiée au sein de la commission des affaires étrangères, saisie au fond, et de la commission de la culture, saisie pour avis, dans le cadre de l'examen du projet de loi relatif à l'action extérieure de l'État. Les deux commissions sénatoriales avaient estimé qu'une tutelle partagée entre trois ministères ne serait pas gage d'efficacité et pourrait contribuer à un déficit de pilotage stratégique sur le nouvel opérateur.

Suivant cette logique, il me semble souhaitable, dans un souci de clarté et d’efficacité, de limiter les ministères de tutelle aux deux ministères directement et significativement impliqués dans la définition des orientations stratégiques, la gouvernance et le financement de l’établissement.

En outre, les compétences du ministère de l’intérieur en matière de visas ne sauraient à elles seules constituer une raison valable de lui conférer la tutelle de l’établissement.

En effet, une proportion importante des étudiants étrangers en France, notamment les étudiants originaires de l'espace Schengen, échappent à la procédure des visas, qui n'est pas en vigueur avec leur pays d'origine.

Mes chers collègues, je vous propose donc, par cet amendement, de supprimer la tutelle du ministère de l’intérieur sur Campus France et de revenir aux dispositions que nous avions adoptées au mois de juillet 2010 dans un climat consensuel.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

La parole est à M. Jean Arthuis, pour présenter l'amendement n° 92.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

Louis Duvernois vient d’exposer l’objet de son amendement, qui est identique au nôtre.

Mes chers collègues, Adrien Gouteyron et moi nous sommes interrogés sur l’opportunité d’inscrire une disposition confiant la tutelle de Campus France au ministère de l’intérieur, chargé de l’immigration, dans un projet de loi relatif à l’immigration.

Je parle sous le contrôle de M. le rapporteur, ainsi que du président et des membres de la commission des lois : nous sommes, me semble-t-il, à la limite du cavalier législatif.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

Adrien Gouteyron et moi-même avons déposé cet amendement parce que, dans le cadre des travaux de contrôle de la commission des finances, nous avions sollicité de la Cour des comptes une enquête sur l’association Égide, qui était, je le rappelle, une des structures dont est issu Campus France.

À l’occasion de cette audition, nous nous étions interrogés sur l’opportunité de mettre en place une triple tutelle. Le débat que nous avons eu le 13 octobre 2010 était parfaitement clair : il fallait s’en tenir à la double tutelle issue de la loi de 2010.

Je ne reviendrai pas sur les arguments présentés par Louis Duvernois ; ils sont les nôtres.

En conséquence, nous demandons au Sénat de supprimer l’article 75 bis A.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

La parole est à M. Richard Yung, pour présenter l'amendement n° 464.

Debut de section - PermalienPhoto de Richard Yung

L’opérateur Campus France a été créé par la loi du 27 juillet 2010, soit il y a un peu plus de six mois. Cela montre de quelle façon nous travaillons…

Debut de section - PermalienPhoto de Richard Yung

Tout à fait !

Le Sénat, dans toute sa sagesse, a débattu longuement du problème de la tutelle au mois de juillet dernier. Or voilà que, six mois après, un « objet législatif non identifié » vient se « poser » sur ce texte ! C’est dire la mauvaise qualité de nos travaux et la mauvaise organisation du Gouvernement. Si nous travaillions moins et que nous faisions du travail de meilleure qualité, le pays s’en porterait mieux !

Cet amendement est un vrai cavalier législatif. Le député Jean-François Mancel, je ne sais pour quelle raison, s’est soucié de multiplier les tutelles de Campus France. Chacun sait qu’une tutelle, ça va, que deux tutelles, c’est plus difficile, mais que trois tutelles, …

Debut de section - PermalienPhoto de Richard Yung

… c’est impossible ! Il n’est pas besoin d’avoir fait HEC pour le savoir !

Je ne reprendrai pas les arguments qui ont été excellemment développés par mes collègues. Pour les mêmes raisons, mon groupe demande, lui aussi, la suppression de cet article.

Debut de section - Permalien
Marie-Luce Penchard, ministre

Qu’il me soit permis de resituer un peu le contexte.

C’est lors de l’examen en première lecture du projet de loi que la commission des lois de l’Assemblée nationale, par la voix de Jean-Luc Warsmann, a introduit cette disposition pour placer la tutelle de Campus France sous l’autorité du ministère de l’immigration.

Cette proposition pourrait se justifier par le fait que le ministère de l’immigration est chargé de la politique d’entrée et de séjour, et de l’exercice d’une activité professionnelle. En l’occurrence, cette mission inclut les étudiants étrangers. Le ministère de l’immigration aura évidemment un rôle déterminant. C'est la raison pour laquelle cette proposition a été formulée.

Pour autant, le Gouvernement s’en remet à la sagesse de la Haute Assemblée sur ces amendements.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

La parole est à M. Christian Cointat, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Cointat

Je serai très bref puisque Mme la ministre s’en est remise à la sagesse du Sénat.

Néanmoins, je veux souligner combien il est important de ne pas multiplier les tutelles. Je suis tout à fait d’accord avec Richard Yung : avec une tutelle, on sait qui est responsable ; à partir de deux tutelles, la responsabilité commence à se déliter ; à trois tutelles, plus personne n’y comprend rien !

Instaurer plusieurs tutelles, c’est multiplier et diluer la responsabilité, mais c’est aussi accroître les blocages. Voilà pourquoi il convient d’éviter les multiplications.

Je voterai donc les amendements de suppression.

Les amendements sont adoptés.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Je constate que ces amendements ont été adoptés à l’unanimité des présents.

L'article 75 bis A est supprimé.

(Non modifié)

Les six premiers alinéas de l’article L. 252-1 du code de l’action sociale et des familles sont remplacés par un alinéa ainsi rédigé :

« La demande d’aide médicale de l’État est déposée auprès de l’organisme d’assurance maladie du lieu de résidence de l’intéressé. Cet organisme en assure l’instruction par délégation de l’État. »

Debut de section - PermalienPhoto de Richard Yung

Je souhaite profiter de l’examen de l’article 75 bis pour condamner une nouvelle fois la remise en cause de l’aide médicale d’État, l’AME.

La création, par la loi de finances pour 2011, d’un droit d’entrée annuel par adulte bénéficiaire de l’AME est injuste, dangereuse et contreproductive, à la fois sur le plan médical et sur le plan financier.

Présentées comme des mesures d’économies – Sainte RGPP ! –, les restrictions d’accès à l’AME risquent de produire l’effet inverse, à savoir un alourdissement des dépenses. Cette crainte a d’ailleurs été récemment formulée par l’inspection générale des finances, l’IGF, et l’inspection générale des affaires sociales, l’IGAS, au terme d’une enquête.

D’après cette enquête, la mise en place d’un droit d’entrée, censé rapporter 6 millions d’euros par an, risque de « conduire à de lourds effets pervers », sans avoir « d’effet de responsabilisation des assurés ».

Sans se prononcer directement sur le forfait de 30 euros, les inspecteurs de l’IGAS ont souligné que toute contribution, même modeste, dissuadera certains malades de se faire soigner, ce qui multipliera les « recours tardifs à l’hôpital, nettement plus coûteux ».

Si 10 % des malades retardent leur prise en charge, les dépenses de soins s’alourdiront de 20 millions d’euros, soit trois fois plus que les économies attendues !

Dans ces conditions, je regrette profondément que l’amendement n° 465, déposé par mon groupe, ait été déclaré irrecevable par la commission des finances en application de l’article 40 de la Constitution, sorte d’épée de Damoclès suspendue au-dessus de nos têtes.

Debut de section - PermalienPhoto de Richard Yung

D’après le président de la commission des finances, la suppression du droit d’entrée aurait risqué d’étendre le champ des bénéficiaires de l’AME.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

L'amendement n° 240, présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Marie-Agnès Labarre.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Agnès Labarre

Cet article vise à créer un guichet unique pour la demande d’aide médicale d’État, à savoir l’organisme d’assurance maladie, afin d’éviter les prétendues fraudes.

La demande d’aide médicale d’État destinée aux étrangers résidant depuis plus de trois mois en France et ayant des revenus inférieurs à 634 euros par mois peut, actuellement, être déposée auprès de quatre organismes : l’assurance maladie, le centre communal d’action sociale, les services sanitaires et sociaux du département, et les associations à but non lucratif agrées par le préfet.

Rappelons, cependant, qu’il s’agit simplement d’offrir une facilité d’accès géographique pour le dépôt de la demande. En effet, quel que soit l’organisme choisi, le dossier sera instruit par la caisse primaire d’assurance maladie, la CPAM ! Ainsi, cet article augmentera les difficultés pour entrer dans le dispositif en réduisant considérablement le nombre de points de réception de dépôt des demandes.

Cette disposition est donc parfaitement inutile et repose sur un soupçon permanent et infondé de fraudes des étrangers.

En outre, M. Yung l’a souligné, l’aide médicale d’État a déjà fait l’objet de modifications dans le projet de loi de finances pour 2011.

La raison d’être de cet article se trouve dans le rapport de l’IGAS, qui avait pointé une forte hausse des dépenses d’AME en 2009, et dans la volonté de réduire le montant de celles-ci qui en avait résulté.

Dans cet esprit, la loi de finances pour 2011 a déjà créé un dispositif inadmissible de droit annuel d’entrée pour l’AME qui s’élève à 30 euros. C’est inacceptable au regard des droits des malades, en général, et de ceux des étrangers les plus démunis, en particulier.

C’est pourquoi nous souhaitons la suppression de cet article.

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

La commission des lois est tout à fait favorable à la création d’un guichet unique pour l’aide médicale d’État. Elle est donc défavorable à l’amendement n° 240.

Debut de section - Permalien
Marie-Luce Penchard, ministre

Défavorable.

L'amendement n'est pas adopté.

L'article 75 bis est adopté.

L’article L. 733-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile est complété par deux alinéas ainsi rédigés :

« Afin d’assurer une bonne administration de la justice et de faciliter la possibilité ouverte aux intéressés de présenter leurs explications à la cour, le président de cette juridiction peut prévoir que la salle d’audience de la cour est reliée, en direct, par un moyen de communication audiovisuelle qui garantit la confidentialité de la transmission avec une salle d’audience spécialement aménagée à cet effet, ouverte au public et située dans des locaux relevant du ministère de la justice plus aisément accessibles par le demandeur, dans des conditions respectant les droits de l’intéressé prévus par le premier alinéa. Une copie de l’intégralité du dossier est mise à sa disposition. Si l’intéressé est assisté d’un conseil, ce dernier est physiquement présent auprès de lui. Ces opérations donnent lieu à l’établissement d’un procès-verbal dans chacune des salles d’audience ou à un enregistrement audiovisuel ou sonore. Le requérant qui refuse d’être entendu par un moyen de communication audiovisuelle est convoqué, à sa demande, dans les locaux de la cour.

« Un décret en Conseil d’État fixe les modalités d’application du deuxième alinéa. »

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Je suis saisi de trois amendements identiques.

L'amendement n° 87 rectifié est présenté par MM. Mézard et Collin, Mme Escoffier, MM. Baylet et Fortassin, Mme Laborde et MM. Milhau, Plancade, Tropeano, Vall et Vendasi.

L'amendement n° 241 est présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche.

L'amendement n° 466 est présenté par MM. Yung, Anziani et Sueur, Mmes Boumediene-Thiery et Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat et C. Gautier, Mme Klès, MM. Michel, Antoinette, Assouline et Badinter, Mmes Blondin, Cerisier-ben Guiga et Ghali, M. Guérini, Mme Khiari, M. Lagauche, Mme Lepage, MM. Madec, Mermaz, Patient et Ries, Mme Tasca et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Jacques Mézard, pour présenter l'amendement n° 87 rectifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Cet amendement de suppression dépasse le simple cadre de ce projet de loi. Il est pour nous le moyen de signaler notre grande réticence à l’utilisation de la visioconférence dans l’exercice des droits de la défense.

Le recours aux moyens de communication audiovisuelle dans les enceintes judiciaires semble être la nouvelle panacée pour « moderniser » le procès. Ce problème avait déjà été soulevé lors de l’examen de la loi d’orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure, la LOPPSI. Les arguments opposables à ce dispositif restent aujourd'hui les mêmes puisqu’ils touchent au principe même du procès équitable.

À l’instar du recours systématique à la vidéosurveillance, le développement du recours aux nouvelles techniques dans l’administration de la justice est inquiétant à partir du moment où l’on se refuse à tout recul objectif et à toute analyse rétrospective. Nos collègues Anne-Marie Escoffier et Yves Détraigne nous avaient pourtant invités à engager une telle réflexion lors de l’examen de la proposition de loi visant à mieux garantir le droit à la vie privée à l’heure du numérique.

Cet article touche une question essentielle au regard de l’impératif de protection de l’équilibre de la procédure et de la garantie des droits de la défense. Initialement, le dispositif devait être réservé aux requérants situés outre-mer, mais la commission, sur proposition du Gouvernement, en a étendu l’application à l’ensemble du territoire en l’assortissant, certes, de certaines garanties importantes que je tiens à saluer. Je me félicite, en particulier, du dernier paragraphe de l’article 75 ter aux termes duquel « le requérant qui refuse d’être entendu par un moyen de communication audiovisuelle est convoqué, à sa demande, dans les locaux de la cour ». C’est une garantie essentielle, mais nous savons que, dans la pratique, ce refus ne sera pas forcément vu favorablement et pourra entraîner des conséquences négatives pour le requérant.

L’arrêt Marcello Viola c/Italie de la Cour européenne des droits de l’homme du 5 octobre 2006 a posé pour principe que, « si la participation de l’accusé aux débats par vidéoconférence n’est pas en soi contraire à la Convention, il appartient à la Cour de s’assurer que son application dans chaque cas d’espèce poursuit un but légitime ».

À partir du moment où le recours aux nouvelles techniques est la norme, le contrôle du but légitime dans chaque espèce est sans objet.

Nous considérons que, lorsqu’il y a un débat en matière pénale, le contact, la vision par le juge quel qu’il soit, y compris au niveau de la Cour nationale du droit d’asile, la CNDA, de la personne qui risque d’être visée par une mesure contraignante et négative est absolument indispensable. Le recours à la visioconférence dans de tels cas doit être exceptionnel et motivé.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

La parole est à Mme Marie-Agnès Labarre, pour présenter l'amendement n° 241.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Agnès Labarre

Cet article est une grave entrave à l’égalité de traitement de tous les étrangers demandeurs d’asile. Il introduit, en effet, la possibilité d’utiliser la visioconférence pour la tenue d’audiences de la Cour nationale du droit d’asile. À l’origine, l’article ne prévoyait cette possibilité que pour les demandeurs d’asile d’outre-mer, mais il est désormais question de l’étendre à tous les requérants : ceux de province n’ayant pas les moyens de se rendre en région parisienne et ceux dont les frais de transport ne sont pas pris en charge.

Si un tel dispositif semble se soucier de l’intérêt des demandeurs d’asile, puisqu’il permet à ces derniers de ne pas avoir à se déplacer à Montreuil-sous-Bois, siège de la CNDA, c’est pourtant loin d’être le cas. En effet, jusqu’alors, la Cour organisait des missions foraines dans les principaux territoires d’outre-mer accueillant des demandeurs d’asile : en Guadeloupe, en Guyane, à Mayotte.

La visioconférence aura pour conséquence la suppression de ces missions, suppression essentiellement motivée par la diminution des dépenses dont le coût se situe actuellement entre 33 000 euros et 44 000 euros par mission. Or, quel que soit son coût, la présence de la Cour est nécessaire : la visioconférence, encadrée de toutes les garanties que l’on peut imaginer, ne remplacera pas la véritable audience qui permet de réaliser une instruction, avec un véritable dialogue. Il s’agit d’un droit pour le requérant, d’une garantie qu’il ne faut en aucun cas lui ôter ; pourtant, l’adoption de cet article aboutira à ce résultat concernant les demandeurs se trouvant outre-mer qui, la possibilité de visioconférence existant, ne disposeront plus d’aucune solution de rechange.

Le Conseil constitutionnel, dans sa décision du 20 novembre 2003, avait d’ailleurs affirmé que le recours à la visioconférence devait être subordonné au consentement de l’étranger. Tel ne sera plus le cas outre-mer, car la visioconférence sera la seule solution proposée.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

La parole est à Mme Bariza Khiari, pour présenter l’amendement n° 466.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

Les raisons justifiant la demande de suppression de l’article 75 ter ont été parfaitement exposées par mes collègues et je n’ai rien à ajouter. Je considère donc que mon amendement est défendu.

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

La commission des lois a émis un avis défavorable sur les trois amendements identiques n° 87 rectifié, 241 et 466. En effet, ces amendements vont à l’encontre de la position de la commission, qui a adopté un amendement du Gouvernement tendant, au contraire, à permettre à la Cour nationale du droit d’asile, la CNDA, de recourir très largement à la visioconférence, et pas uniquement pour les requérants situés outre-mer.

En effet, le recours à la visioconférence permettra de faciliter l’accès à la CNDA aux requérants qui n’ont pas les moyens de se rendre en région parisienne ; ce point mérite, à mon sens, d’âtre souligné. Il favorisera également l’implication des avocats de province dans le contentieux de l’asile ; pour l’instant, ces avocats n’effectuent pas le déplacement devant la Cour pour défendre la cause de leur client.

La commission a toutefois apporté un certain nombre de garanties. En particulier, elle a précisé qu’un requérant qui refuserait d’être entendu par un tel procédé serait, de plein droit, convoqué à sa demande pour être entendu dans les locaux de la Cour ; il lui appartiendra ensuite de s’y rendre ou non.

Debut de section - Permalien
Marie-Luce Penchard, ministre

Mon analyse est identique à celle de M. le rapporteur ; j’émets donc un avis défavorable.

Les amendements ne sont pas adoptés.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

L’amendement n° 467, présenté par MM. Antoinette, Patient, Gillot, S. Larcher, Lise, Tuheiava, Yung, Anziani et Sueur, Mmes Boumediene-Thiery et Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat et C. Gautier, Mme Klès, MM. Michel, Assouline et Badinter, Mmes Blondin, Cerisier-ben Guiga et Ghali, M. Guérini, Mme Khiari, M. Lagauche, Mme Lepage, MM. Madec, Mermaz et Ries, Mme Tasca et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Alinéa 2

I. - Troisième phrase

Rédiger ainsi cette phrase :

Si l’intéressé est assisté d’un conseil et, le cas échéant, d’un interprète, ces derniers sont physiquement présents auprès de lui ou bien dans les locaux de la Cour nationale du droit d’asile selon le choix de l’intéressé.

II. - Quatrième phrase

Remplacer les mots :

d’audience ou

par les mots :

d’audience et

La parole est à Mme Bariza Khiari.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

Je défends cet amendement à la demande de mes collègues de l’outre-mer, car ils y attachent une importance particulière.

Le principe de la visioconférence va s’appliquer aux audiences de la Cour nationale du droit d’asile : vous considérez donc que l’humanité de la justice passe davantage par la rapidité de la décision que par la relation entre le demandeur et les juges.

Deux points restent toutefois à prendre en compte dans le projet de loi qui nous est présenté. Le premier concerne la place des auxiliaires de justice lors de l’audience, le second le compte rendu de l’audience audiovisuelle.

Concernant le premier point, le projet de loi amendé place obligatoirement le conseil auprès du demandeur d’asile. La qualité des avocats de province ou d’outre-mer n’est pas mise en cause par cet amendement, qui tend avant tout à garantir la dignité et la responsabilité des demandeurs : quelle justice oblige l’intéressé à user d’une tactique de défense ?

Le demandeur d’asile, souvent assisté juridiquement et psychologiquement par une association, peut vouloir que son avocat se trouve auprès des juges et soit, ainsi, plus à même d’apprécier dans quelle atmosphère se déroulent les travaux de la Cour. Évidemment, le décret en Conseil d’État qui fixera les modalités d’application de cette mesure devra prévoir une disposition permettant à l’avocat de s’entretenir avec son client.

Il manque également une disposition concernant l’interprète. En effet, l’audition de nombreux demandeurs d’asile nécessite un interprète. Comme pour l’avocat, ce dernier doit pouvoir humaniser l’audience audiovisuelle par sa présence auprès du demandeur ou respecter la pudeur du réfugié en se trouvant du côté du juge. Il est par contre impensable de placer systématiquement l’interprète, qui est souvent le premier à recueillir le témoignage d’un parcours douloureux, du côté du juge, comme lors des audiences audiovisuelles de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides, l’OFPRA, afin de limiter toute relation entre ces personnes partageant la même langue.

Je crois donc nécessaire que toutes les options soient ouvertes au demandeur d’asile concernant la présence de son avocat et de l’interprète, lorsque le recours à ce dernier s’avère nécessaire.

Le second point qui mérite d’être corrigé dans ce dispositif concerne le rapport de l’audience ou son enregistrement. Il est prévu que l’audience fasse l’objet soit d’un enregistrement sonore, soit d’un enregistrement audiovisuel, soit encore d’un compte rendu écrit par procès-verbal dans chacune des salles d’audience. Or les magistrats administratifs de la CNDA travaillent sur dossier. On ne peut laisser à la disposition du juge qu’un enregistrement pour reprendre le témoignage du demandeur. Le dossier, pour être complet, doit être facilement accessible. Il est évidemment plus simple de prendre connaissance d’un procès-verbal écrit que d’utiliser un enregistrement, analogique ou numérique.

Jean-Étienne Antoinette et tous nos collègues d’outre-mer demandent donc que ces modifications soient prises en compte, afin non d’améliorer ce dispositif, mais pour que soient au moins respectées les conditions d’accès du demandeur d’asile au juge.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

La commission a émis un avis défavorable sur cet amendement qui vise à permettre à l’interprète d’être présent auprès de l’étranger, en cas d’audience réalisée par visioconférence, et à préciser que l’audience donne lieu à la rédaction d’un procès-verbal et d’un enregistrement, alors que le texte du projet de loi prévoit que le recours à l’un ou l’autre de ces procédés est suffisant. Cet amendement appelle trois observations.

Premièrement, l’assistance d’un interprète est déjà prévue par le droit en vigueur, il est donc inutile de le préciser de nouveau.

Deuxièmement, dans un souci d’efficacité, il est préférable de permettre à la Cour d’avoir recours aux interprètes présents dans ses locaux, plutôt qu’à des interprètes qui seraient recrutés en province ou outre-mer, dans des conditions qu’il conviendrait d’ailleurs de préciser.

Troisièmement, il ne paraît pas nécessaire d’établir à la fois un procès-verbal des audiences et un enregistrement audiovisuel ou sonore de celles-ci. J’attire votre attention, mes chers collègues, sur le fait qu’en matière pénale le code de procédure pénale n’oblige pas de cumuler les deux modes de compte rendu.

En toute hypothèse, le demandeur aura accès à l’intégralité de son dossier avant l’audience, comme le spécifie le texte adopté par la commission.

Debut de section - Permalien
Marie-Luce Penchard, ministre

Même avis.

L’amendement n’est pas adopté.

L’article 75 ter est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Je suis saisi de deux amendements identiques.

L’amendement n° 244 est présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du parti de gauche.

L’amendement n° 469 est présenté par MM. Yung, Anziani et Sueur, Mmes Boumediene-Thiery et Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat et C. Gautier, Mme Klès, MM. Michel, Antoinette, Assouline et Badinter, Mmes Blondin, Cerisier-ben Guiga et Ghali, M. Guérini, Mme Khiari, M. Lagauche, Mme Lepage, MM. Madec, Mermaz, Patient et Ries, Mme Tasca et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Après l’article 75 ter, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

À la dernière phrase de l’article L. 551-3 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, le mot : « cinq » est remplacé par le mot : « dix ».

La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat.

Debut de section - PermalienPhoto de Josiane Mathon-Poinat

Nous souhaitons étendre le délai dont disposent les étrangers placés en centre de rétention pour formuler une demande d’asile. Ce délai est actuellement de cinq jours, et nous proposons de le prolonger à dix jours, pour une raison très simple : une fois ces cinq jours passés, la demande d’asile n’est plus recevable. Or les conditions dans lesquelles les étrangers sont placés en centre de rétention administrative ne permettent pas toujours d’assurer au mieux la garantie de leurs droits, pas plus que leur application. Le surpeuplement et le trop faible nombre d’agents en poste ne permettent pas non plus d’assurer la diligence nécessaire à la notification des droits dans une langue compréhensible par chacun.

En outre, les étrangers se trouvent souvent dans des situations de détresse lors de leur placement en centre de rétention ; il est important de leur laisser un délai plus long pour exercer effectivement les droits qui leur sont garantis. Un délai de dix jours devrait permettre de rendre pleinement effectif l’exercice de ce droit.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery, pour présenter l’amendement n° 469.

Debut de section - PermalienPhoto de Alima Boumediene-Thiery

À son arrivée en centre de rétention, un étranger se voit notifier l’ensemble des droits dont il peut se prévaloir en matière de demande d’asile et dispose d’un délai de cinq jours pour formuler sa demande ; au-delà de ce délai, cette demande n’est plus recevable.

Cet amendement a pour objectif d’allonger à dix jours la période pendant laquelle une demande d’asile peut être valablement formulée par un étranger placé en centre de rétention. En effet, aujourd’hui, effectuer une demande d’asile en rétention est particulièrement difficile, pour ne pas dire illusoire. La CIMADE, que l’on rencontre souvent lorsque l’on se rend dans ces centres de rétention, parle même d’un « droit virtuel ».

Il est évident que le délai imparti pour formuler la demande d’asile, dont le cœur est le récit de l’étranger, est insuffisant. En si peu de temps, il est matériellement impossible de réunir les éléments, témoignages et autres documents nécessaires pour attester le récit et justifier ainsi la demande, notamment lorsqu’il s’agit d’interpréter ces documents.

Par ailleurs, cette barrière se conjugue à d’autres obstacles ; en effet, il est obligatoire de rédiger en français la demande d’asile, document de seize pages, et ce sans l’assistance gratuite d’un interprète. En outre, dans certains centres de rétention, il est interdit de posséder un stylo, objet considéré comme dangereux !

Dans ce contexte, il n’est pas surprenant que le Commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe, après sa visite en France du 21 mai au 23 mai 2008, ait souligné que « la procédure impose un délai extrêmement bref pour la formulation de la demande d’asile », avant de conclure que « l’ensemble de la procédure d’asile dans les centres de rétention apparaît donc comme expéditive, laissant implicitement présumer que la demande est abusive ». Pour notre part, nous considérons que ce sont votre volonté et votre détermination à porter atteinte aux droits de l’étranger qui, aujourd’hui, deviennent abusives !

Telles sont les raisons qui motivent notre amendement n° 469. Grâce à son adoption, l’effectivité du droit d’asile en centre de rétention sera rétablie, conformément aux recommandations du Comité européen pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants du Conseil de l’Europe.

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

La commission a émis un avis défavorable sur ces deux amendements identiques, au motif que le délai actuel de cinq jours est suffisant, notamment pour permettre à l’étranger de recevoir l’aide d’une des associations intervenant dans les centres de rétention administrative.

Debut de section - Permalien
Marie-Luce Penchard, ministre

Même avis.

Les amendements ne sont pas adoptés.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Je suis saisi de deux amendements identiques.

L’amendement n° 247 est présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du parti de gauche.

L’amendement n° 474 est présenté par MM. Yung, Anziani et Sueur, Mmes Boumediene-Thiery et Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat et C. Gautier, Mme Klès, MM. Michel, Antoinette, Assouline et Badinter, Mmes Blondin, Cerisier-ben Guiga et Ghali, M. Guérini, Mme Khiari, M. Lagauche, Mme Lepage, MM. Madec, Mermaz, Patient et Ries, Mme Tasca et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Après l’article 75 ter, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l’article L. 553-6 du code de l’entrée et de séjour des étrangers et du droit d’asile, il est inséré un article L. 553-7 ainsi rédigé :

« Art. L. 553 -7. - L’administration tient à jour et publie l’inventaire des locaux de rétention administrative prévus à l’article R. 551-3. »

La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat.

Debut de section - PermalienPhoto de Josiane Mathon-Poinat

Cet amendement concerne les locaux de rétention administrative. Ces derniers permettent de retenir les étrangers et sont également des lieux de privation de liberté, comme les centres de rétention administrative, à la seule différence qu’ils sont temporaires au lieu d’être fixes et permanents.

Au demeurant, cette caractéristique ne saurait justifier qu’ils soient si mal connus. À l’heure actuelle, l’administration ne possède pas de liste exhaustive des lieux de rétention administrative sur le territoire français. Cette carence prive les associations d’accompagnement juridique des informations susceptibles de leur permettre de jouer leur rôle, mais elle empêche également tout contrôle.

Étant donné les déficiences relevées dès 2008 par le contrôleur général des lieux de privation de liberté, notamment concernant le local de rétention de Choisy-le-Roi, dont l’aménagement a été qualifié d’« attentatoire à la dignité humaine », il est indispensable de donner aux associations les moyens d’intervenir afin qu’elles jouent pleinement leur rôle de contrôle.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery, pour présenter l’amendement n° 474.

Debut de section - PermalienPhoto de Alima Boumediene-Thiery

À ce jour, il n’existe pas de liste exhaustive des locaux de rétention administrative existant sur le territoire français. Or cette absence de transparence est d’autant plus condamnable qu’elle induit un véritable préjudice pour les étrangers.

À titre d’exemple, elle empêche les associations, notamment celles qui se chargent de l’accompagnement juridique, d’assurer une présence effective dans ces lieux. Les étrangers retenus se voient donc privés d’une aide, d’un conseil précieux et particulièrement utiles, étant donné la situation extrêmement précaire dans laquelle ils se trouvent. Par ailleurs, sans liste exhaustive, il est impossible de mettre en œuvre des contrôles dans l’ensemble des locaux de rétention administrative.

À cet égard, il convient de rappeler que, en novembre 2008, le premier contrôleur général des lieux de privation de liberté, M. Delarue, avait souligné que l’aménagement du local de rétention administrative de Choisy-le-Roi était « attentatoire à la dignité humaine » et qu’« aucune prescription de sécurité ne saurait [le] justifier ».

Il ne s’agit pas là d’un simple feu de paille : cette question ne cesse de faire écho à toutes les turpitudes qui sont à l’origine des convulsions que connaissent les locaux de rétention administrative.

Nous souhaitons donc que ces locaux soient soumis à l’impératif de transparence, car l’opacité est la marque de ceux qui ont quelque chose à se reprocher.

C’est pourquoi nous proposons que l’administration tienne à jour et publie un inventaire des locaux de rétention administrative. Les droits et la dignité humaine des étrangers n’en seront que mieux respectés et protégés.

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

Avant de se prononcer, la commission souhaite connaître l’avis du Gouvernement sur ces amendements identiques.

Debut de section - Permalien
Marie-Luce Penchard, ministre

Les locaux de rétention administrative sont créés soit à titre permanent, soit pour une durée définie par arrêté préfectoral. Une copie de l’arrêté portant création de tout local de rétention est transmise sans délai au procureur de la République, au directeur de l’Agence régionale de santé et au contrôleur général des lieux de privation de liberté.

De plus, ces lieux sont accessibles, comme les centres de rétention permanents, à l’autorité judiciaire, au contrôleur général des lieux de privation de liberté et aux parlementaires. Ils seront également ouverts à des associations humanitaires, qui y exerceront une mission d’observation distincte de l’action des associations habilitées à aider les personnes retenues à exercer leurs droits.

Le contrôle des conditions de vie des personnes retenues est donc pleinement assuré avec les dispositifs existants.

Pour l’ensemble de ces raisons, le Gouvernement émet un avis défavorable sur ces amendements.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

La parole est à M. le président de la commission des lois.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

Je me permets d’indiquer aux auteurs de ces deux amendements que ceux-ci comportent une bizarrerie : il n’est tout de même pas très orthodoxe que la loi vise un article réglementaire. C’est même impossible ! C’est pourquoi, même si je soutenais cette proposition sur le fond, je ne voterais pas les amendements.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Alima Boumediene-Thiery

Monsieur le président de la commission, moi, je considère que votre objection est un prétexte !

Debut de section - PermalienPhoto de Alima Boumediene-Thiery

Même s’il y a probablement une anomalie dans la forme, il y a surtout une réalité de fond !

J’ai l’habitude de me rendre dans les centres de rétention administrative. Ceux-ci sont certes difficiles d’accès, mais, au moins, nous les connaissons. Le problème que nous rencontrons avec les locaux de rétention administrative, c’est que nous ne les connaissons pas !

Je suis persuadée que beaucoup de mes collègues parlementaires sont souvent appelés par des familles ou des associations et découvrent à cette occasion, comme cela m’est arrivé récemment, que tel local a été décrété local de rétention.

Si vraiment on n’a rien à se reprocher, si vraiment on considère que la France est un État de droit où les choses doivent se faire dans la transparence, pourquoi a-t-on peur de dresser une liste de ces locaux ?

Les amendements ne sont pas adoptés.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Je suis saisi de deux amendements identiques.

L'amendement n° 242 est présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche.

L'amendement n° 471 est présenté par MM. Yung, Anziani et Sueur, Mmes Boumediene-Thiery et Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat et C. Gautier, Mme Klès, MM. Michel, Antoinette, Assouline et Badinter, Mmes Blondin, Cerisier-ben Guiga et Ghali, M. Guérini, Mme Khiari, M. Lagauche, Mme Lepage, MM. Madec, Mermaz, Patient et Ries, Mme Tasca et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Après l'article 75 ter, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article L. 723-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Toutefois, l'office peut, au vu des éléments présentés à l'appui de la demande d'asile, décider que l'instruction de la demande se fera selon la procédure normale. Dans ce cas, l'office informe l'étranger et l'autorité administrative compétente qui lui délivre le titre provisoire de séjour prévu à l'article L. 742-1. »

La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat, pour présenter l’amendement n° 242.

Debut de section - PermalienPhoto de Josiane Mathon-Poinat

En l’état actuel du droit, l’OFPRA est tenu, lorsqu’un préfet refuse le séjour à un demandeur d’asile, d’examiner sa demande en procédure prioritaire. La procédure est donc accélérée, ce qui ne laisse pas le temps à l’office de statuer sur une demande d’asile présentant une situation complexe et nécessitant, de ce fait, une instruction particulière.

C’est le cas des demandes d’asile émanant d’étrangers originaires de pays considérés comme sûrs – ma collègue Nicole Borvo Cohen-Seat a tout à l'heure bien montré ce qu’on pouvait penser de cette notion ! – ou bien d’étrangers placés en rétention.

Notre amendement tend donc à permettre à l’OFPRA de revenir à la procédure normale de demande d’asile lorsqu’il le juge nécessaire, afin de disposer du temps utile à l’instruction de tous les dossiers dans les meilleures conditions.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

La parole est à Mme Patricia Schillinger, pour présenter l'amendement n° 471.

Debut de section - PermalienPhoto de Patricia Schillinger

Venus se réfugier dans notre pays, les demandeurs d’asile ont en principe le droit d’y rester pendant tout le temps que prendra l’examen de leur requête par l’OFPRA ou par la Cour nationale du droit d’asile. Les demandeurs d’asile sont donc « admis provisoirement au séjour ». Ils disposent en principe d’un titre de séjour, valable pendant trois mois et renouvelé jusqu’à ce qu’une décision définitive soit prise quant à leur demande de protection.

Il existe néanmoins trois cas dans lesquels le préfet peut refuser cette admission provisoire au séjour : le demandeur d’asile est originaire d’un pays désigné comme sûr ; sa présence en France constitue une menace grave pour l’ordre public ; sa demande d’asile est considérée comme abusive. Dans tous ces cas, les demandeurs d’asile sont placés en procédure dite « prioritaire ».

Contrairement à ce que cette qualification de « prioritaire » pourrait laisser penser, cette procédure est loin d’être avantageuse. Les demandeurs d’asile qu’elle concerne ne bénéficient d’aucun droit : ni logement, ni allocation temporaire d’attente, ni couverture maladie universelle...

Si la réponse de l’OFPRA est négative, le recours devant la Cour nationale du droit d’asile n’est pas suspensif. La personne peut alors être renvoyée vers son pays d’origine même si son recours n’a pas été examiné.

J’ajoute que, selon la Commission nationale consultative des droits de l’homme, le recours excessif aux procédures prioritaires, appliquées à près d’un quart des demandes d’asile, n’est pas assorti de toutes les garanties requises pour un examen équitable des dossiers, notamment l’assurance d’un délai raisonnable d’instruction et le droit au recours suspensif.

C’est pourquoi nous proposons, par cet amendement, d’octroyer plus de souplesse à l’OFPRA dans l’examen des dossiers. L’office devrait pouvoir décider, au regard des éléments matériels, que l’instruction de la demande se fera selon la procédure normale, et non selon la procédure prioritaire.

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

Ces amendements tendent à permettre à l’OFPRA de décider qu’une demande d’asile examinée en procédure prioritaire passera en procédure normale, ce qui permettrait de délivrer une autorisation provisoire de séjour au demandeur.

La décision d’admission au séjour des demandeurs d’asile relève de l’autorité préfectorale, et non de l’OFPRA. L’autorité préfectorale ne peut toutefois refuser l’admission au séjour du demandeur que dans quatre hypothèses limitativement énumérées, sous le contrôle du juge administratif saisi, le cas échéant, par la voie d’un référé-liberté.

Des mécanismes de contrôle existent donc bien et la commission est défavorable à ces deux amendements.

Debut de section - Permalien
Marie-Luce Penchard, ministre

Défavorable.

Les amendements ne sont pas adoptés.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

L'amendement n° 470, présenté par MM. Yung, Anziani et Sueur, Mmes Boumediene-Thiery et Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat et C. Gautier, Mme Klès, MM. Michel, Antoinette, Assouline et Badinter, Mmes Blondin, Cerisier-ben Guiga et Ghali, M. Guérini, Mme Khiari, M. Lagauche, Mme Lepage, MM. Madec, Mermaz, Patient et Ries, Mme Tasca et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Après l'article 75 ter, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le quatrième alinéa (c) de l'article L. 723-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est supprimé.

La parole est à Mme Patricia Schillinger.

Debut de section - PermalienPhoto de Patricia Schillinger

Les demandeurs d'asile sont auditionnés par l'OFPRA. Néanmoins, quatre exceptions sont prévues par la loi, à l'article L. 723-3 du CESEDA.

S'il paraît justifié que l'étranger ne soit pas convoqué à une audition du fait de son état de santé ou si « l'office s'apprête à prendre une décision positive à partir des éléments en sa possession », il devrait pouvoir bénéficier d'un entretien dans les autres cas. En effet, les éléments écrits transmis à l'OFPRA, souvent dans des conditions difficiles – je pense notamment à leur rédaction –, ne peuvent remplacer un entretien individuel.

Par conséquent, il convient de supprimer la disposition excluant de l'entretien individuel les étrangers dont la demande écrite apparaît infondée à ce stade de la procédure.

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

Cet amendement vise à supprimer les dispositions permettant à l’OFPRA de se dispenser de convoquer pour un entretien le demandeur dont la demande paraît manifestement infondée.

Il faut préciser que ces dispositions incluent notamment les demandes n’entrant pas dans le champ de la convention de Genève ou de la protection subsidiaire : par exemple, une demande formulée pour des motifs économiques tels que l’obtention d’un emploi.

D’après les chiffres qui nous ont été communiqués, le taux de convocation à un entretien est toutefois très élevé : il atteint 97% en première demande, dont 94 % pour les procédures prioritaires. J’ajoute qu’une personne qui n’aurait pas été convoquée par l’OFPRA peut toujours, en cas de recours, être entendue par la Cour nationale du droit d’asile.

L’avis de la commission est donc défavorable.

Debut de section - Permalien
Marie-Luce Penchard, ministre

Défavorable.

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Je suis saisi de deux amendements identiques.

L'amendement n° 250 est présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche.

L'amendement n° 476 est présenté par MM. Yung, Anziani et Sueur, Mmes Boumediene-Thiery et Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat et C. Gautier, Mme Klès, MM. Michel, Antoinette, Assouline et Badinter, Mmes Blondin, Cerisier-ben Guiga et Ghali, M. Guérini, Mme Khiari, M. Lagauche, Mme Lepage, MM. Madec, Mermaz, Patient et Ries, Mme Tasca et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Après l'article 75 ter, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article L. 742-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Le titre provisoire de séjour autorise à travailler selon les conditions fixées par décret en Conseil d'État. »

La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat, pour présenter l'amendement n° 250.

Debut de section - PermalienPhoto de Josiane Mathon-Poinat

Cet amendement a pour objet d’ouvrir un droit au travail aux demandeurs d’asile, en précisant que le titre provisoire de séjour autorise à travailler.

Accorder ce droit est important puisqu’il conditionne l’intégration, mais surtout les conditions de vie – pour ne pas dire de survie – des étrangers demandeurs d’asile sur le territoire français. II permet à chacun de subvenir à ses propres besoins et d’acquérir une indépendance financière indispensable.

Dans le cas où la demande d’asile est en cours d’instruction à l’OFPRA depuis moins de six mois, une autorisation préalable serait délivrée et, si la demande d’asile dépasse le délai de six mois ou si un recours est déposé contre la décision de rejet de la demande d’asile, cette autorisation serait délivrée de manière automatique.

Rien ne saurait justifier le refus d’accorder ce droit au travail, notamment au regard des délais évoqués.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

La parole est à Mme Patricia Schillinger, pour présenter l'amendement n° 476.

Debut de section - PermalienPhoto de Patricia Schillinger

Lorsqu’un étranger est admis à séjourner en France pour déposer une demande d’asile, il dispose de vingt et un jours pour transmettre son dossier à l’OFPRA. L’article R. 742-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile prévoit la délivrance d’un titre provisoire de séjour au demandeur d’asile dans l’attente de la décision de l’office.

Durant cette période, sous certaines conditions, le demandeur peut toucher l’allocation temporaire d’attente, qui équivaut à 10, 83 euros par jour. Par ailleurs, il n’a pas le droit de travailler. Certains des demandeurs d’asile travaillent donc illégalement ou vivent grâce à l’aide de tiers. En tout cas, cette interdiction maintient les demandeurs d’asile dans une précarité extrême.

C’est pourquoi notre amendement tend à prévoir qu’est délivrée au demandeur d’asile une autorisation de travail pour la période d’attente de la décision de l’OFPRA.

Debut de section - Permalien
Marie-Luce Penchard, ministre

Mme Marie-Luce Penchard, ministre. Les auteurs de ces amendements souhaitent donner aux demandeurs d’asile le droit au travail. Le Gouvernement n’est pas favorable à cette proposition.

Exclamations sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.

Debut de section - Permalien
Marie-Luce Penchard, ministre

Le demandeur d’asile peut solliciter la délivrance d’une autorisation provisoire de travail dans deux hypothèses : lorsque l’OFPRA n’a pas statué dans un délai d’un an suivant l’enregistrement de sa demande de reconnaissance de la qualité de réfugié pour des raisons qui ne lui sont pas imputables ; lorsqu’il a formé un recours devant la CNDA, la Cour nationale du droit d’asile, contre une décision de rejet de l’OFPRA.

Les demandeurs d’asile pouvant être déboutés, leur insertion par le travail est susceptible de créer de fausses attentes…

Debut de section - Permalien
Marie-Luce Penchard, ministre

… et rendrait systématiques les demandes de régularisation par le travail.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Alima Boumediene-Thiery

Je souhaite vous rappeler, madame la ministre, que ces demandeurs d’asile ont besoin de vivre. Ils sont donc obligés de travailler, au moins un peu. Cela signifie tout simplement que, par votre politique, vous encouragez le travail au noir.

Les amendements ne sont pas adoptés.

Le chapitre III du titre III du livre VII du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile est complété par un article L. 733-3 ainsi rédigé :

« Art. L. 733-3. – Avant de statuer sur un recours soulevant une question de droit nouvelle, présentant une difficulté sérieuse et se posant dans de nombreux litiges, la Cour nationale du droit d’asile peut, par une décision qui n’est susceptible d’aucun recours, transmettre le dossier de l’affaire au Conseil d’État, qui examine dans un délai de trois mois la question soulevée. Il est sursis à toute décision au fond jusqu’à l’avis du Conseil d’État ou, à défaut, jusqu’à l’expiration de ce délai.

« Un décret en Conseil d’État précise les conditions d’application du présent article. » –

Adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

L'amendement n° 232 rectifié, présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Après l'article 75 quater A, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article L. 213-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est ainsi modifié :

1° Aux premier et septième alinéas, les mots : « quarante-huit heures » sont remplacés par les mots : « deux jours ouvrés ».

2° Le troisième alinéa est supprimé.

3° Les deuxième et troisième phrases du sixième alinéa sont supprimées.

4° À la première phrase du neuvième alinéa, les mots : « de quinze jours » sont remplacés par les mots : « d'un mois ».

La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

La France a été condamnée le 26 avril 2007 par la Cour européenne des droits de l’homme, dans son arrêt Gré, en raison de l’absence de recours suspensif pour les procédures de refoulement du territoire.

Cet arrêt a reconnu que l’absence d’un recours juridictionnel de plein droit suspensif ouvert aux étrangers dont la demande d’asile à la frontière a été rejetée méconnaît les articles 3 et 13 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.

À la suite de cette condamnation, la France s’est retrouvée dans l’obligation de légiférer et de créer un recours effectif et suspensif, ce qu’elle a fait partiellement dans la loi du 20 novembre 2007 relative à l’immigration, à l’intégration et à l’asile. Les sénateurs du groupe CRC-SPG avaient ensuite déposé une proposition de loi visant à garantir un droit au recours effectif aux étrangers demandeurs d’asile : cela reste d’actualité.

Le texte de la loi de 2007 est loin de se conformer aux obligations issues de la Convention européenne des droits de l’homme et rappelées dans l’arrêt de la CEDH d’avril 2007, qui exige que tout recours soit réellement effectif en droit, mais également en pratique.

Tout d’abord, ce texte a limité le droit à un recours suspensif aux seuls demandeurs d’asile, sans rien prévoir pour les autres étrangers maintenus en zone d’attente. Nous pensons, pour notre part, qu’il convient d’étendre ce droit à tous les étrangers maintenus en zone d’attente.

La loi de 2007 dispose également que l’étranger demandeur d’asile dispose d’un délai de quarante-huit heures pour déposer un recours contre son refus d’admission sur le territoire au titre de l’asile. Or ce délai est trop court compte tenu de la difficulté d’aider les personnes concernées en quarante-huit heures, l’association habilitée à être présente en zone d’attente n’étant pas sur place tous les jours. Nous souhaitons donc porter ce délai à deux jours ouvrés, afin de garantir l’effectivité du recours.

De même, il ne nous semble pas acceptable que ce recours soit exclusif de tout autre recours, ce qui prive les personnes concernées de la possibilité d’exercer un autre recours, tel un référé-liberté, fondé sur une autre liberté fondamentale.

Enfin, s’agissant des voies de recours contre la décision de refus d’entrée sur le territoire du tribunal administratif, la loi a posé deux restrictions qui en limitent considérablement la portée. Le délai de recours est de quinze jours, ce qui tend à le rendre ineffectif, d’autant qu’il n’est pas suspensif. Aussi souhaitons-nous non seulement porter ce délai de recours à un mois, mais encore prévoir que l’appel est suspensif.

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

Cet amendement vise à modifier le régime juridique du recours exercé contre le refus d’entrée sur le territoire au titre de l’asile en portant de quarante-huit heures à deux jours ouvrés le délai pour former ce recours, en supprimant la possibilité d’utiliser la visioconférence et en instaurant un appel suspensif dans un délai d’un mois.

Le recours suspensif en matière d’asile à la frontière a été introduit en 2007, afin d’assurer la conformité de notre droit avec les exigences posées par la CNDA.

Il ne paraît pas souhaitable d’aller au-delà de ce que prévoit le code des étrangers. Je rappelle que, pendant le temps de cette procédure, l’étranger est maintenu en zone d’attente.

La commission émet un avis défavorable.

Debut de section - Permalien
Marie-Luce Penchard, ministre

Défavorable.

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Je suis saisi de quatre amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 462 rectifié, présenté par MM. Yung, Anziani et Sueur, Mmes Boumediene-Thiery et Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat et C. Gautier, Mme Klès, MM. Michel, Antoinette, Assouline et Badinter, Mmes Blondin, Cerisier-ben Guiga et Ghali, M. Guérini, Mme Khiari, M. Lagauche, Mme Lepage, MM. Madec, Mermaz, Patient et Ries, Mme Tasca et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Après l'article 75 quater A, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est ainsi modifié :

1° L'article L. 742-3 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« En conséquence, aucune mesure d'éloignement mentionnée au livre V du présent code ne peut être mise à exécution avant la notification de la décision de la Cour nationale du droit d'asile. » ;

2° Les articles L. 742-5 et L. 742-6 sont abrogés ;

3° Le second alinéa de l'article L. 731-2 est complété par les mots : « ou, si le requérant est maintenu en rétention, au plus tard le dix-huitième jour qui suit cette notification » ;

4° Après l'article L. 733-2, il est inséré un article L. 733-3 ainsi rédigé :

« Art. L. 733-3. - Le président et les présidents de section examinent par priorité, sans respecter l'ordre chronologique d'enregistrement des recours, les requêtes déposées par les requérants dans le cadre de la procédure décrite à l'article L. 731-2. » ;

5° Après l'article L. 554-3, il est inséré un article L. 554-4 ainsi rédigé :

« Art. L. 554-4. - Il est mis fin au maintien de l'étranger en rétention lorsque la demande d'asile présentée par celui-ci a été rejetée et qu'il a exercé un recours devant la Cour nationale du droit d'asile dans les conditions prévues à l'article L. 731-2.

« Dans ce cas, l'autorité administrative peut décider de l'assigner à résidence dans les conditions prévues à l'article L. 552-5. »

La parole est à Mme Raymonde Le Texier.

Debut de section - PermalienPhoto de Raymonde Le Texier

Par cet amendement, nous vous interpellons une nouvelle fois sur les problèmes liés au placement de très nombreux demandeurs d’asile en procédure prioritaire, car cette procédure accélérée les prive de nombreux droits, dont le droit à un recours suspensif.

Cet amendement vise donc à consacrer le caractère suspensif de toute mesure d’éloignement lors du recours formé devant la CNDA et de supprimer deux articles qui deviennent donc sans objet.

Cet amendement prévoit également la fin du maintien en rétention administrative en cas de dépôt d’un recours devant la CNDA. Il est alors prévu d’assigner à résidence le requérant libéré, dans les conditions de droit commun.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

L'amendement n° 249 rectifié, présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Après l'article 75 quater A, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article L. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est ainsi rédigé :

« Art. L. 742 -3. - L'étranger admis à séjourner en France bénéficie du droit de s'y maintenir et ne peut faire l'objet d'aucune mesure d'éloignement jusqu'à la notification de la décision de l'Office français de protection de réfugiés et des apatrides ou, si un recours a été formé, jusqu'à la notification de la décision de la Cour nationale du droit d'asile. »

La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Nous avons déjà eu maintes fois l’occasion de vous exposer nos positions sur la procédure appliquée aux étrangers : elle doit améliorer leur protection et se dérouler avec la garantie du respect de leurs droits fondamentaux.

Ici, nous abordons la procédure relative aux mesures d’éloignement.

Il s’agit d’interdire qu’une mesure d’éloignement soit prise à l’encontre d’un étranger admis à résider régulièrement en France avant que l’OFPRA n’ait notifié sa décision ou lorsqu’un recours a été formé, jusqu’à la notification de la décision de la CNDA.

Plusieurs conventions internationales, dont la convention de 1951 relative au statut des réfugiés et le Pacte international relatif aux droits civils et politiques, affirment l’interdiction du refoulement des demandeurs d’asile, au regard des risques encourus.

D’autre part, la Convention européenne des droits de l’homme, dans son article 13, reconnaît le droit à un recours effectif, ce qui est particulièrement important considérant que certaines personnes sont susceptibles de subir des sévices lors de l’éloignement.

Notre amendement vise donc à mettre en conformité le droit français avec ces deux principes consacrés par le droit international.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Les amendements n° 245 rectifié et 473 rectifié sont identiques.

L'amendement n° 245 rectifié est présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche.

L'amendement n° 473 rectifié est présenté par MM. Yung, Anziani et Sueur, Mmes Boumediene-Thiery et Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat et C. Gautier, Mme Klès, MM. Michel, Antoinette, Assouline et Badinter, Mmes Blondin, Cerisier-ben Guiga et Ghali, M. Guérini, Mme Khiari, M. Lagauche, Mme Lepage, MM. Madec, Mermaz, Patient et Ries, Mme Tasca et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Après l'article 75 quater A, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article L. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« En conséquence, aucune mesure d'éloignement mentionnée au livre V du présent code ne peut être mise à exécution avant la notification de la décision de la Cour nationale du droit d'asile si un recours a été formé auprès de celle-ci. »

La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, pour présenter l’amendement n° 245 rectifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

L’article 13 de la Convention européenne des droits de l’homme prévoit que le droit à un recours effectif doit passer par un recours suspensif ; c’est ce que la Cour européenne des droits de l’homme a affirmé concernant la France en 2007 dans l’arrêt Gebremedhin.

Comme le droit français n’a toujours pas intégré ces injonctions, nous proposons de l’inscrire dans la loi afin qu’aucune mesure d’éloignement ne puisse être effectuée avant que la CNDA n’ait pu notifier sa décision lorsqu’un recours a été effectué auprès d’elle.

Contre toute logique, la France permet actuellement la reconduction des étrangers avant que la CNDA n’ait pu rendre sa décision, ce qui limite grandement l’intérêt de la décision rendue comme de la possibilité de former un recours.

Nous proposons donc de rétablir les droits des étrangers, en conformité avec le droit international.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

La parole est à Mme Raymonde Le Texier, pour présenter l'amendement n° 473 rectifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Raymonde Le Texier

Nous proposons de consacrer le fait que le recours formé devant la CNDA est suspensif de toute mesure d’éloignement.

En effet, les demandeurs d’asile placés en procédure prioritaire peuvent être éloignés à tout moment du territoire lorsque leur demande a été rejetée par l’OFPRA.

Certes, un recours suspensif contre la mesure d’éloignement peut être exercé devant le juge administratif, celui-ci devant alors examiner les risques de torture ou de mauvais traitements en cas de renvoi dans le pays d’origine du demandeur d’asile débouté. Cependant, la pratique démontre que le juge administratif n’a ni le temps ni les moyens d’opérer un examen approfondi des risques invoqués. Le juge a donc tendance à s’en remettre à l’appréciation négative qui a été faite par l’OFPRA. En conséquence, les annulations des mesures d’éloignement sur la base de ce recours devant le juge administratif sont rares.

Pour ces raisons, nous considérons que le droit à un recours effectif garanti par l’article 13 de la Convention européenne des droits de l’homme est dénié aux demandeurs d’asile placés en procédure prioritaire.

Il est donc essentiel que tous les demandeurs d’asile puissent interjeter un recours suspensif devant la CNDA, car celle-ci, contrairement au juge administratif, est spécialisée pour traiter des questions d’asile.

Notons que la CNDA annule un très grand nombre de décisions de l’OFPRA. Cela signifie donc que, en l’absence de ce recours, des personnes déboutées par l’OFPRA auraient pu être renvoyées dans leur pays d’origine alors que la CNDA a ensuite reconnu qu’ils y étaient en danger.

Nous n’avons pas le droit de prendre le risque, par simple mesure d’économie, de renvoyer des personnes dans leur pays alors que la mort, la torture et les mauvais traitements les y attendent.

C’est pourquoi, conformément aux recommandations de la Cour européenne des droits de l’homme et du Haut Commissariat aux réfugiés, nous vous demandons de consacrer le caractère suspensif de toute mesure d’éloignement du recours formé devant la CNDA.

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

Je rappelle que l’amendement n° 462 rectifié tend à instaurer un recours suspensif devant la CNDA contre les décisions de rejet de l’OFPRA lorsque la demande d’asile fait l’objet d’un examen selon la procédure prioritaire. Il prévoit notamment d’obliger la CNDA à statuer dans un délai maximal de dix-huit jours à compter de la notification de la décision de rejet de l’office.

Sur cette question importante, la commission a formulé plusieurs remarques.

Premièrement, en 2007, notre droit a été modifié afin d’introduire un recours suspensif contre le refus d’entrée sur le territoire au titre de l’asile, à la suite de la condamnation de la France par la Cour européenne des droits de l’homme dans l’affaire « Gebremedhin » : désormais, un étranger qui sollicite l’asile à la frontière ne peut pas être refoulé avant que le juge administratif se soit prononcé sur le caractère manifestement infondé de sa demande.

Deuxièmement, l’absence de caractère suspensif du recours devant la CNDA, s’agissant des demandes formulées sur le territoire, a été validée par le Conseil constitutionnel dans sa décision du 13 août 1993.

Troisièmement, dans les faits, d’après les informations que nous avons recueillies au cours de nos auditions, les préfectures s’abstiennent déjà, la plupart du temps, d’éloigner un étranger dont le recours est pendant devant la CNDA, en métropole tout du moins.

Quatrièmement, l’adoption de cet amendement, qui crée une procédure d’urgence devant la Cour, risquerait de désorganiser fortement cette dernière, qui doit statuer aujourd'hui sur un nombre important de dossiers ; cela ressort également des auditions que nous avons menées.

J’attire toutefois l’attention sur le fait que, postérieurement à notre dernière réunion, la Cour de cassation a transmis une question prioritaire de constitutionnalité au Conseil constitutionnel sur ce point.

Telle est la raison pour laquelle nous souhaitons connaître l’avis du Gouvernement sur l’amendement n° 462 rectifié.

Les amendements n° 249 rectifié, 245 rectifié et 473 rectifié ne sont pas de même nature puisqu’ils ne prévoient pas de délai pour la réponse de la Cour. Sur ces trois amendements, la commission émet un avis défavorable.

Debut de section - Permalien
Marie-Luce Penchard, ministre

Pour compléter les propos de M. le rapporteur, je rappelle que cette procédure prioritaire n’est pas arbitraire, mais qu’elle correspond à des cas objectifs. Elle s’applique en effet aux demandes émanant des ressortissants de pays considérés comme sûrs ou qui reposent sur une fraude, qui constituent un recours abusif ou visent à faire échec à une mesure d’éloignement.

Par ailleurs, le dispositif actuel est protecteur puisqu’il a été validé par le Conseil constitutionnel, M. le rapporteur l’a rappelé, et il est autorisé par la directive Procédure du 1er décembre 2005. L’étranger qui a vu sa demande d’asile refusée par l’OFPRA en procédure prioritaire dispose, de plus, d’un recours suspensif contre la mesure d’éloignement devant le tribunal administratif, qui examine la question de savoir s’il existe des risques pour la vie de la personne en cas de retour dans son pays d’origine. En l’état, cela nous paraît suffisant.

Telle est la raison pour laquelle le Gouvernement émet un avis défavorable sur l’amendement n° 462 rectifié.

Il en va de même s’agissant des amendements n° 249 rectifié, 245 rectifié et 473 rectifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Alima Boumediene-Thiery

Madame la ministre, je me permets de revenir à la charge.

Nous le savons bien, une expulsion ou une reconduite à la frontière présentent un caractère irréversible. Or il faut laisser les différentes procédures qui ont été engagées, y compris les recours, aller à leur terme, faute de quoi les droits de la défense – car c’est bien de cela qu’il s’agit ! – se trouvent amputés.

Par ailleurs, madame la ministre, vous dites que la procédure prioritaire n’est pas arbitraire. Or elle est déclarée prioritaire avant toute instruction. À mon sens, l’aspect prioritaire est, lui aussi, arbitraire.

J’ajoute que la Cour européenne des droits de l’homme a tout de même condamné la France en 2007.

Ainsi que M. le rapporteur l’a rappelé, toutes les associations qui interviennent dans ce domaine et que nous avons auditionnées nous ont confié que le recours suspensif devait pouvoir aller jusqu’à son terme, mais que la France était, malheureusement, l’un des seuls pays à ne pas l’accepter.

Chers collègues de l’opposition, j’en suis sûre, vous ne sauriez admettre qu’une procédure de justice ne puisse aller jusqu’à son terme. Dès lors, vous accepterez, en votant cet amendement, de consacrer le caractère suspensif de toute mesure d’éloignement dans l’attente de la décision de justice.

L'amendement n'est pas adopté.

L'amendement n'est pas adopté.

Les amendements ne sont pas adoptés.

(Non modifié)

L’article L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales est complété par un 9° ainsi rédigé :

« 9° Le soin de faire respecter les symboles républicains lors des célébrations de mariage se tenant dans les locaux de la mairie. S’il l’estime nécessaire, le maire ou l’un de ses adjoints officiants peut, à cette occasion, user verbalement du rappel à l’ordre prévu à l’article L. 2212-2-1 et suspendre, en tant que de besoin, la célébration. »

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

L'amendement n° 251, présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Éliane Assassi.

Debut de section - PermalienPhoto de Éliane Assassi

L’article 75 quater n’a rien à voir avec l’ensemble de ce projet de loi, qui porte sur l’immigration, l’intégration et la nationalité. Cet article dispose en effet que le soin de faire respecter les symboles républicains lors des cérémonies de mariage fait partie des pouvoirs de police du maire et est de nature à permettre au maire, notamment, de faire un rappel à l’ordre verbal en cas de troubles, faculté dont, au demeurant, il dispose déjà.

Il s’agit donc ici d’un véritable cavalier législatif, qui ne trouve sa justification que dans les amalgames incessants que certains se complaisent à établir entre immigration et opposition à la République, entre mariage mixte et « mariage gris ». Bref, il s’inscrit dans la vision fantasmagorique et dangereuse d’une « identité nationale » en péril, construite en opposition à l’étranger.

Debut de section - Permalien
Marie-Luce Penchard, ministre

Sur le fond, le Gouvernement partage l’objectif de cet article, issu d’un amendement adopté en séance publique par l'Assemblée nationale et qui vise à faire respecter les symboles de la République.

Toutefois, il considère que les dispositions actuelles relatives aux pouvoirs de police du maire suffisent…

Debut de section - Permalien
Marie-Luce Penchard, ministre

… à permettre à ce dernier de mettre fin à tout trouble.

C'est la raison pour laquelle le Gouvernement s’en remet à la sagesse de la Haute Assemblée.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

La parole est à M. Richard Yung, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Richard Yung

Je dois dire que le libellé de cet article me laisse songeur :

« … Le soin de faire respecter les symboles républicains lors des célébrations de mariage se tenant dans les locaux de la mairie. »

Debut de section - PermalienPhoto de Richard Yung

« S’il l’estime nécessaire, le maire […] peut, à cette occasion, user verbalement du rappel à l’ordre […) et suspendre, en tant que de besoin, la célébration. »

Mais tous ces droits existent déjà !

Bien sûr, je n’ai pas, en la matière, l’expérience de la plupart d’entre vous, mes chers collègues, car nous autres sénateurs représentant les Français établis hors de France, nous ne pouvons pas être responsables d’une mairie à l’étranger. Enfin, pas encore !

Sourires

Nouveaux sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Richard Yung

Mais vous, qui avez tous une longue carrière d’élu local derrière vous, savez fort bien que le maire a tous les pouvoirs de police nécessaires, surtout à l’intérieur de la mairie.

Il s’agit donc vraiment ici d’une stigmatisation pure et simple.

C’est pourquoi nous voterons cet amendement visant à supprimer cet article inutile et ridicule.

L'amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

L'amendement n° 483, présenté par MM. Antoinette, Patient, Gillot, S. Larcher, Lise, Tuheiava, Yung, Anziani et Sueur, Mmes Boumediene-Thiery et Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat et C. Gautier, Mme Klès, MM. Michel, Assouline et Badinter, Mmes Blondin, Cerisier-ben Guiga et Ghali, M. Guérini, Mme Khiari, M. Lagauche, Mme Lepage, MM. Madec, Mermaz et Ries, Mme Tasca et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Après l'article 75 quater, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le deuxième alinéa de l'article L. 2334-2 du code général des collectivités territoriales, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Cette population est également la population totale majorée de la population estimée selon les indicateurs prévus au treizième de l'article L. 111-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. »

La parole est à Mme Bariza Khiari.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

Madame la ministre, j’attire tout particulièrement votre attention sur cet amendement, car ce sont notamment nos collègues d’outre-mer qui ont pris l’initiative de le déposer.

Il s’agit d’adapter le calcul de la DGF, la dotation globale de fonctionnement, à la réalité à laquelle peuvent être confrontées les communes dans lesquelles résident de nombreux étrangers en situation irrégulière.

Nous le savons, la DGF est répartie en fonction de la démographie de chaque commune. Or, dans le recensement réalisé dans chaque commune, on ne prend pas en compte le phénomène évidemment difficile à mesurer qu’est la présence d’étrangers en situation irrégulière. Nous connaissons évidemment les nombreuses missions assignées aux collectivités municipales et nous savons que la présence massive d’étrangers en situation irrégulière augmente de manière exponentielle les charges qui pèsent sur elles.

En effet, l’installation de centaines de personnes en situation irrégulière dans des bidonvilles provoque une charge considérable au regard des missions de police administrative que le maire doit assumer, qu’il s’agisse de la sécurité, de la tranquillité ou encore de la salubrité.

Par ailleurs, le système éducatif connaît une pression considérable. Or, aux termes de la loi, il revient à ces communes de construire des locaux scolaires, de procéder à toute réparation ou extension, d’en assurer l’équipement et le fonctionnement, de loger le corps enseignant, d’engager du personnel complémentaire, etc.

Il y a deux ans, le recteur de l’académie de Guyane affirmait que pratiquement 75 % des élèves scolarisés dans les communes frontalières du Suriname ou du Brésil étaient issus d’une immigration irrégulière.

Autre illustration du phénomène : le maire de Papaïchton s’occupe de 4 000 habitants, et non pas des 1 650 habitants recensés.

Il est donc évident que la DGF, calculée à partir des recensements de l’INSEE, auxquels échappe cette population irrégulière, ne correspond pas à la réalité que vivent ces communes, ce qui revient à les condamner davantage encore à une situation financière intenable.

Dans son rapport sur l’immigration clandestine déposé en 2006, M. François-Noël Buffet recommandait, à la suite du directeur des affaires économiques, sociales et culturelles au ministère de l’outre-mer, de prendre en compte le nombre des étrangers en situation irrégulière pour la dotation globale de fonctionnement des collectivités locales afin qu’elles puissent faire face aux dépenses effectivement mises à leur charge.

À cet égard, je rappelle que ce n’est pas aux collectivités de réaliser ce recensement complémentaire. En effet, il revient au Gouvernement de commander cette mission à l’INSEE, en liaison avec l’OFPRA, le Haut Conseil à l’intégration et l’Office français de l’immigration et de l’intégration.

Je vous invite donc, mes chers collègues, à adopter cette disposition pour les communes qui sont le plus durement touchées.

Debut de section - Permalien
Marie-Luce Penchard, ministre

Madame la sénatrice, vous me permettrez de vous répondre avant tout en ma qualité de ministre chargée de l’outre-mer.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

C’est à ce titre que j’ai tout spécialement attiré votre attention, madame la ministre !

Debut de section - Permalien
Marie-Luce Penchard, ministre

Le Gouvernement a émis un avis défavorable sur cet amendement. Cela ne signifie pas pour autant qu’il ne prend pas en compte la situation particulière de la Guyane.

Même si ce n’est pas l’objet du débat, je tiens à rappeler que le Gouvernement a soutenu, en plusieurs occasions, les demandes des collectivités de Guyane concernant les équipements scolaires, eu égard à la pression migratoire et au fait que bon nombre d’enfants ne sont pas scolarisés. Outre la dotation qui lui est attribuée en vertu du droit commun, ce département bénéficie, dans le cadre du Fonds exceptionnel d’investissement, d’une dotation exceptionnelle de l’ordre de 5 millions d'euros.

Ainsi, nous épaulons la collectivité pour lui permettre de réaliser de nombreux équipements structurants, notamment en matière d’assainissement et d’alimentation en eau potable, pour tenir compte de la présence de ces familles qui sont, vous l’avez rappelé, en situation irrégulière.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Selon les études les plus sérieuses, 300 000 étrangers sont en situation non régulière en France. Et c’est sans compter les personnes qui ont lancé une procédure de demande d’asile ou de droit de séjour. Sans compter non plus celles qui sont dans des situations parfois inextricables, ne pouvant pas bénéficier du droit au séjour ni être reconduites à la frontière, ce que, du reste, elles ne souhaitent pas !

Par ailleurs, il est clair que les procédures habituelles ne permettent pas de réaliser le recensement de ces personnes. De plus, cette population n’est pas répartie de manière homogène sur le territoire.

Le cas de la Guyane est tout à fait emblématique, et vous savez très bien, madame la ministre, en raison de vos fonctions, que, nonobstant l’aide que vous avez évoquée, certaines communes de Guyane connaissent de grandes difficultés financières.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

De même, en métropole, dans les départements de Seine-Saint-Denis, du Val-de-Marne, dans la région Nord-Pas-de-Calais, dans le sud de la France, ailleurs encore, une population très importante n’est pas, de fait, prise en compte dans le recensement. Or les communes doivent impérativement faire face à l’obligation de scolarisation, laquelle s’applique à tout enfant présent sur le territoire. Elles sont également amenées à prendre en charge ces populations sur le plan social et en matière de logement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Comme vous le savez, monsieur le président de la commission des lois, nous sommes opposés à toute idée de « délit de solidarité ». Ces communes font, très souvent, ce qu’elles peuvent, avec leurs services sociaux, pour apporter l’assistance nécessaire à ces populations.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

C'est pourquoi nous estimons qu’il serait juste de tenir compte de la réalité de ces communes dans le calcul de la DGF.

De toute façon, la DGF est le fruit de nombreux calculs, dont certains sont, pour le moins, très contestables. Le jour où l’on a cristallisé la DGF, on n’a pas hésité à introduire dans la dotation forfaitaire de la DGF, qui était le produit de l’existant, des sous-dotations à caractère touristique – il y en a même eu deux ! –, et toutes sortes de correctifs. Au total, la DGF est très peu péréquatrice.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

M. Jean-Pierre Sueur. Certes ! Je vous remercie, monsieur le président de la commission, de suivre toujours mon propos avec beaucoup d’attention !

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

M. Jean-Pierre Sueur. J’y suis tout de même extrêmement sensible !

Nouveaux sourires.

Nouveaux sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Mais cela ne m’empêchera pas de dire que la DGF est très inégalitaire !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Le fait de ne pas prendre en compte les populations étrangères que certaines communes doivent accueillir, ce qui les place dans une situation difficile, ne fait que renforcer ce caractère inégalitaire.

C'est pour cette raison que l’amendement présenté par Mme Bariza Khiari est tout à fait pertinent.

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 246 rectifié, présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Après l'article 75 quater, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Un rapport est remis annuellement au Parlement par le Gouvernement sur les locaux de rétention administrative et notamment le nombre de personnes retenues et leur durée de rétention ainsi que les conditions de rétention.

La parole est à Mme Éliane Assassi.

Debut de section - PermalienPhoto de Éliane Assassi

Eu égard aux conditions de rétention constatées dans les lieux de privation de liberté destinés aux étrangers, tels les locaux de rétention administrative, le Gouvernement se doit à tout le moins d'étudier, via un rapport annuel remis au Parlement, l'état de ces locaux, les conditions de rétention, le nombre de personnes retenues ainsi que la durée de rétention.

Le contrôleur général des lieux de privation de liberté a en effet dénoncé, à la suite d’une visite de contrôle du local de rétention administrative de Choisy-le-Roi, en juillet 2008, des conditions d’hébergement attentatoires à la dignité humaine. Il avait notamment constaté un manquement au respect de l'intimité, qui n'était justifié par aucune règle de sécurité ; ainsi, pour accéder aux sanitaires, les hommes retenus devaient passer devant les chambres des femmes, séparées du couloir par une paroi entièrement vitrée.

Ce cas n'est malheureusement qu'un exemple parmi tant d'autres qui montrent que le droit des étrangers à la dignité, notamment, n’est pas nécessairement respecté. On pourrait aussi évoquer les chambres privées de toute lumière… La liste est malheureusement bien longue !

Il est donc indispensable que le Gouvernement se saisisse de ces problèmes, les évalue et fasse respecter les droits élémentaires de chaque personne au sein des locaux de rétention administrative.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

L'amendement n° 248 rectifié, présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Après l'article 75 quater, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Un rapport est remis annuellement au Parlement par le Gouvernement sur les conditions de privation de liberté en centre de rétention administrative et en zones d'attente, et, plus spécifiquement, sur la santé des retenus.

La parole est à Mme Éliane Assassi.

Debut de section - PermalienPhoto de Éliane Assassi

Cet amendement s'inscrit dans la ligne du précédent : il s’agit cette fois du contrôle des conditions de détention dans les centres de rétention administrative et les zones d'attente, qui sont des lieux où la privation de liberté peut durer longtemps. L'évaluation des conditions de santé des étrangers retenus, ainsi que leur possibilité réelle d'accéder aux soins, est primordiale.

Le Contrôleur général des lieux de privation de liberté, après sa visite du centre de rétention administrative de Bordeaux, en janvier 2009, a fait état d’« une impression de spirale infernale de la violence, dans un climat de tension et de répression », où « la personne retenue est considérée comme un individu a priori dangereux ». Il s’agit de locaux placés en sous-sols, sans autre accès à l'air libre qu'une ancienne issue de secours grillagée, ne respectant ni les normes imposées par le CESEDA ni les conditions de respect de la dignité humaine des personnes retenues.

D'autre part, la Commission nationale de déontologie de la sécurité et le commissaire aux droits de l'homme du Conseil de l'Europe ont tous deux critiqué ces lieux d'enfermement en dénonçant « l'aggravation des conditions d'hébergement, la surpopulation et l'aspect déshumanisé de certains centres, causés par une multiplication du recours au placement en rétention ».

Il est dans le rôle de Gouvernement de se soucier de ces conditions de rétention et de les faire évoluer en diligentant, dans un premier temps, une évaluation sérieuse et globale des conditions de rétention.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

L'amendement n° 468 rectifié, présenté par MM. Yung, Anziani et Sueur, Mmes Boumediene-Thiery et Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat et C. Gautier, Mme Klès, MM. Michel, Antoinette, Assouline et Badinter, Mmes Blondin, Cerisier-ben Guiga et Ghali, M. Guérini, Mme Khiari, M. Lagauche, Mme Lepage, MM. Madec, Mermaz, Patient et Ries, Mme Tasca et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Après l'article 75 quater, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Un rapport est remis annuellement au Parlement par le Gouvernement sur les conditions de privation de liberté en centre de rétention administrative et en zone d'attente. Ce rapport mentionnera la liste des locaux de rétention administrative et fera état des conditions de rétention. Par ailleurs, une partie du rapport devra porter sur la santé des retenus.

La parole est à Mme Bariza Khiari.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

Je considère que cet amendement est défendu, car je fais miens les arguments énoncés par Mme Assassi.

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

Sur ces trois amendements, qui tendent à l’établissement de rapports, la commission émet un avis défavorable.

Debut de section - Permalien
Marie-Luce Penchard, ministre

Défavorable.

L'amendement n'est pas adopté.

L'amendement n'est pas adopté.

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

L'amendement n° 478 rectifié, présenté par MM. Yung, Anziani et Sueur, Mmes Boumediene-Thiery et Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat et C. Gautier, Mme Klès, MM. Michel, Antoinette, Assouline et Badinter, Mmes Blondin, Cerisier-ben Guiga et Ghali, M. Guérini, Mme Khiari, M. Lagauche, Mme Lepage, MM. Madec, Mermaz, Patient et Ries, Mme Tasca et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Après l'article 75 quater, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Un rapport est remis au Parlement par le Gouvernement avant le 31 mai 2011 sur les possibilités d'établissement d'une convention entre l'Office français de l'immigration et de l'intégration et le secteur bancaire, afin de faciliter la gestion des comptes des étrangers placés en centre de rétention administrative et de s'assurer, pour ceux qui sont éloignés du territoire, qu'ils pourront disposer de l'intégralité des sommes déposées en France.

L'amendement n° 479 rectifié, présenté par MM. Yung, Anziani et Sueur, Mmes Boumediene-Thiery et Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat et C. Gautier, Mme Klès, MM. Michel, Antoinette, Assouline et Badinter, Mmes Blondin, Cerisier-ben Guiga et Ghali, M. Guérini, Mme Khiari, M. Lagauche, Mme Lepage, MM. Madec, Mermaz, Patient et Ries, Mme Tasca et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Après l'article 75 quater, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Un rapport est remis au Parlement par le Gouvernement avant le 31 mai 2011 sur l'application en France du Règlement (CE) n° 343/2003 du Conseil du 18 février 2003 établissant les critères et mécanismes de détermination de l'État membre responsable de l'examen d'une demande d'asile présentée dans l'un des États membres par un ressortissant d'un pays tiers, dit « Dublin II », et les coûts de sa mise en œuvre.

La parole est à Mme Bariza Khiari, pour présenter ces deux amendements.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

Je les retire, monsieur le président. Ils avaient toute leur justification mais, connaissant le sort qui est réservé aux amendements tendant à demander des rapports, je ne vais pas insister…

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Les amendements n° 478 rectifié et 479 rectifié sont retirés.

Titre VI

DISPOSITIONS RELATIVES À L’OUTRE-MER

(Non modifié)

Sont abrogés :

1° Le second alinéa de l’article 17-1 ainsi que les IV et VI de l’article 18 de l’ordonnance n° 2000-371 du 26 avril 2000 relative aux conditions d’entrée et de séjour des étrangers dans les îles Wallis et Futuna ;

2° Le deuxième alinéa de l’article 18-1 ainsi que les IV et VI de l’article 20 de l’ordonnance n° 2000-372 du 26 avril 2000 relative aux conditions d’entrée et de séjour des étrangers en Polynésie française ;

3° Les IV et VI de l’article 18 de l’ordonnance n° 2000-373 du 26 avril 2000 relative aux conditions d’entrée et de séjour des étrangers à Mayotte ;

4° Le deuxième alinéa de l’article 18-1 ainsi que les IV et VI de l’article 20 de l’ordonnance n° 2002-388 du 20 mars 2002 relative aux conditions d’entrée et de séjour des étrangers en Nouvelle-Calédonie.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

L'amendement n° 252, présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Mireille Schurch.

Debut de section - PermalienPhoto de Mireille Schurch

Cet amendement est le premier d’une série d’amendements qui visent à supprimer la plupart des articles composant le titre VI.

En effet, étant opposés à la dégradation des droits des immigrés en métropole, nous le sommes a fortiori lorsqu’il s’agit de l’outre-mer, où le recul des droits des étrangers est d’ores déjà très marqué.

Un droit dérogatoire s’applique aux étrangers, principalement à Mayotte, en Guyane et en Guadeloupe, où ils sont livrés à des contrôles expéditifs et à des reconduites sans recours suspensif d’exécution. En Guyane, à Saint-Martin et à Mayotte, la police aux frontières peut légalement interpeller et reconduire les étrangers sans aucun contrôle, détruire ou immobiliser des véhicules ayant servi à l’entrée ou au séjour irrégulier. Or le projet de loi consolide, prolonge et pérennise ces régimes d’exception, ou encore précarise la procédure de demande d’asile en outre-mer.

C’est pourquoi nous demandons la suppression des articles concernant l’outre-mer qui, soit étendent l’application des dispositions du projet de loi auxquelles nous sommes opposés, soit prolongent et aggravent les dispositifs exceptionnels portant atteinte aux droits des étrangers. Quoi qu’il en soit, ils dégradent les droits fondamentaux de ces derniers.

Ces explications, monsieur le président, valent pour nos amendements n° 252, 254 à 257 rectifié, 259 et 260.

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

L’article 76 est un article de coordination nécessaire et la commission émet un avis défavorable sur l’amendement comme sur tous les amendements de suppression des articles du titre VI.

Debut de section - Permalien
Marie-Luce Penchard, ministre

Même avis.

L'amendement n'est pas adopté.

L'article 76 A est adopté.

(Non modifié)

À la fin du premier alinéa de l’article L. 111-2 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, les mots : « et à Saint-Pierre-et-Miquelon » sont remplacés par les mots : «, à Saint-Pierre-et-Miquelon, à Saint-Barthélemy et à Saint-Martin ».

L'amendement n° 254, présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

Cet amendement a déjà été défendu, et l’avis de la commission comme celui du Gouvernement ont été présentés.

Je le mets aux voix.

L'amendement n'est pas adopté.

L'article 76 est adopté.

(Non modifié)

À l’article L. 111-3 du même code, les mots : « et de Saint-Pierre-et-Miquelon » sont remplacés par les mots : «, de Saint-Pierre-et-Miquelon, de Saint-Barthélemy et de Saint-Martin ».

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

L'amendement n° 255, présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

Cet amendement a déjà été défendu, et l’avis de la commission comme celui du Gouvernement ont été présentés.

Je le mets aux voix.

L'amendement n'est pas adopté.

L'article 76 bis est adopté.

(Non modifié)

L’intitulé du chapitre IV du titre Ier du livre V du même code est ainsi rédigé : « Dispositions propres à la Guyane, à la Guadeloupe, à Saint-Barthélemy et à Saint-Martin ».

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

L'amendement n° 256, présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

Cet amendement a déjà été défendu, et l’avis de la commission comme celui du Gouvernement ont été présentés.

Je le mets aux voix.

L'amendement n'est pas adopté.

L'article 77 est adopté.

(Non modifié)

I. – L’article L. 514-1 du même code est ainsi modifié :

1° Au 1°, les mots : « la mesure de reconduite à la frontière » sont remplacés par les mots : « l’obligation de quitter sans délai le territoire français » ;

2° Au 2°, les mots : « ou d’une mesure administrative de reconduite à la frontière » sont supprimés ;

3° Au dernier alinéa, la référence : « et L. 512-2 à » est remplacée par la référence : «, L. 512-3 et ».

II. – À l’article L. 514-2 du même code, les mots : « n° 2006-911 du 24 juillet 2006 relative à l’immigration et à l’intégration » sont remplacés par les mots : « n° … du … relative à l’immigration, à l’intégration et à la nationalité ».

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

L'amendement n° 257 rectifié, présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

Les articles L. 514-1, L. 514-2 et L. 532-1 du même code sont abrogés.

Cet amendement a déjà été défendu, et l’avis de la commission comme celui du Gouvernement ont été présentés.

Je le mets aux voix.

L'amendement n'est pas adopté.

L'article 78 est adopté.

(Non modifié)

I. – L’article L. 611-11 du même code est ainsi rédigé :

« Art. L. 611 -11. – Les articles L. 611-8 et L. 611-9 sont applicables en Guadeloupe dans une zone comprise entre le littoral et une ligne tracée à un kilomètre en deçà, ainsi que sur les routes nationales 1 et 4.

« Il en est de même à Saint-Barthélemy et Saint-Martin dans une zone comprise entre le littoral et une ligne tracée à un kilomètre en deçà. »

II. – Au début du premier alinéa de l’article 10-2 de l’ordonnance n° 2000-373 du 26 avril 2000 précitée, les mots : « Pendant cinq ans à compter de la publication de la loi n° 2006-911 du 24 juillet 2006 relative à l’immigration et à l’intégration » sont supprimés.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

L'amendement n° 259, présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

Cet amendement a déjà été défendu, et l’avis de la commission comme celui du Gouvernement ont été présentés.

Je le mets aux voix.

L'amendement n'est pas adopté.

L'article 79 est adopté.

(Non modifié)

Au II de l’article L. 622-10 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, après le mot : « Guadeloupe », sont insérés les mots : «, à Saint-Barthélemy, à Saint-Martin ».

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

L'amendement n° 260, présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

Cet amendement a déjà été défendu, et l’avis de la commission comme celui du Gouvernement ont été présentés.

Je le mets aux voix.

L'amendement n'est pas adopté.

L'article 80 est adopté.

(Non modifié)

L’article L. 741-5 du même code est complété par les mots : «, Saint-Barthélemy et Saint-Martin ». –

Adopté.

(Non modifié)

Le titre VI du livre VII du même code est complété par un chapitre VI ainsi rédigé :

« Chapitre VI

« Dispositions applicables à Saint-Barthélemy et à Saint-Martin

« Art. L. 766 -1. – Le présent livre est applicable à Saint-Barthélemy sous réserve des adaptations suivantes :

« 1° À l’article L. 741-1, les mots : “sur le territoire français” et “en France” sont respectivement remplacés par les mots : “sur le territoire de Saint-Barthélemy” et “dans la collectivité de Saint-Barthélemy” ;

« 2° À l’article L. 741-2, les mots : “à l’intérieur du territoire français” sont remplacés par les mots : “sur le territoire de Saint-Barthélemy” ;

« 3° À l’article L. 741-4 :

« a) Au premier alinéa, les mots : “en France” sont remplacés par les mots : “dans la collectivité de Saint-Barthélemy” ;

« b) Le 1° n’est pas applicable ;

« c) Aux 3° et 4°, les mots : “en France” sont remplacés par les mots : “sur le territoire de la République” ;

« 4° À la première phrase de l’article L. 742-1, les mots : “en France” sont remplacés par les mots : “dans la collectivité de Saint-Barthélemy” ;

« 5° À la première phrase de l’article L. 742-3, les mots : “en France” sont remplacés par les mots : “dans la collectivité de Saint-Barthélemy” et les mots : “s’y maintenir” sont remplacés par les mots : “se maintenir sur le territoire de Saint-Barthélemy ” ;

« 6° À l’article L. 742-6 :

« a) À la première phrase du premier alinéa, les mots : “sur le territoire français” et “en France” sont respectivement remplacés par les mots : “sur le territoire de Saint-Barthélemy” et “dans la collectivité de Saint-Barthélemy” ;

« b) Après la deuxième phrase, il est ajouté une phrase ainsi rédigée :

« “Si l’office décide d’entendre le demandeur d’asile hors de la collectivité de Saint-Barthélemy, celui-ci reçoit les autorisations nécessaires.” ;

« c) La dernière phrase est ainsi rédigée :

« “Il délivre sans délai un titre de séjour dans les conditions prévues par le titre Ier du livre III du présent code ou la carte de séjour temporaire prévue par le 10° de l’article L. 313-11.” ;

« 7° À l’article L. 742-7, les mots : “le territoire français” sont remplacés par les mots : “la collectivité de Saint-Barthélemy” ;

« 8° À la première phrase du premier alinéa de l’article L. 751-1, les mots : “sur le territoire français” sont remplacés par les mots : “sur le territoire de Saint-Barthélemy”.

« Art. L. 766 -2. – Le présent livre est applicable à Saint-Martin sous réserve des adaptations suivantes :

« 1° À l’article L. 741-1, les mots : “sur le territoire français” et “en France” sont respectivement remplacés par les mots : “sur le territoire de Saint-Martin” et “dans la collectivité de Saint-Martin” ;

« 2° À l’article L. 741-2, les mots : “à l’intérieur du territoire français” sont remplacés par les mots : “sur le territoire de Saint-Martin” ;

« 3° À l’article L. 741-4 :

« a) Au premier alinéa, les mots : “en France” sont remplacés par les mots : “dans la collectivité de Saint-Martin” ;

« b) Le 1° n’est pas applicable ;

« c) Aux 3° et 4°, les mots : “en France” sont remplacés par les mots : “sur le territoire de la République” ;

« 4° À la première phrase de l’article L. 742-1, les mots : “en France” sont remplacés par les mots : “dans la collectivité de Saint-Martin” ;

« 5° À la première phrase de l’article L. 742-3, les mots : “en France” sont remplacés par les mots : “dans la collectivité de Saint-Martin” et les mots : “s’y maintenir” sont remplacés par les mots : “se maintenir sur le territoire de Saint-Martin ” ;

« 6° À l’article L. 742-6 :

« a) À la première phrase du premier alinéa, les mots : “sur le territoire français” et “en France” sont respectivement remplacés par les mots : “sur le territoire de Saint-Martin” et “dans la collectivité de Saint-Martin ” ;

« b) Après la seconde phrase du premier alinéa, il est ajouté une phrase ainsi rédigée :

« “Si l’office décide d’entendre le demandeur d’asile hors de la collectivité de Saint-Martin, celui-ci reçoit les autorisations nécessaires.” ;

« c) La dernière phrase du second alinéa est ainsi rédigée :

« “Elle délivre sans délai un titre de séjour dans les conditions prévues par le titre Ier du livre III du présent code ou la carte de séjour temporaire prévue par le 10° de l’article L. 313-11.” ;

« 7° À l’article L. 742-7, les mots : “le territoire français” sont remplacés par les mots : “la collectivité de Saint-Martin” ;

« 8° À l’article L. 751-1, les mots : “sur le territoire français” sont remplacés par les mots : “sur le territoire de Saint-Martin”. »

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

L'amendement n° 262, présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Cet article a pour objet de rendre applicable le livre VII du CESEDA, relatif au droit d’asile à Saint-Barthélemy et à Saint-Martin, tirant ainsi conséquence du changement de statut de ces territoires.

Sur le fond et sur la forme, nous y sommes opposés, d’autant que cet article a été modifié par l’Assemblée nationale sur proposition du ministre de l’immigration de l’époque, qui justifiait ainsi son amendement : « Cet amendement technique est important. Il revient au droit actuel pour éviter qu’un étranger admis à séjourner sur le territoire de Saint-Barthélemy ou sur celui de Saint-Martin en tant que demandeur d’asile puisse se rendre en Guadeloupe, en violation des règles de circulation entre un territoire à statut spécial et un département. »

Ainsi, un étranger qui demande l’asile en Guadeloupe est demandeur d’asile en France et bénéficie éventuellement du droit de séjour en France, donc dans l’espace dit « CESEDA ». En revanche, celui qui fait sa demande à Saint-Barthélemy ou à Saint-Martin voit sa démarche et son éventuel droit au séjour limités à ces deux territoires. L’autorisation de séjour s’y transformerait-elle en assignation à résidence ?

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

L’article 82 est absolument nécessaire puisqu’il permet de tenir compte du changement de statut de Saint-Barthélemy et de Saint-Martin. Nous émettons évidemment un avis défavorable sur cet amendement.

Debut de section - Permalien
Marie-Luce Penchard, ministre

Bien que les collectivités d’outre-mer aient un statut particulier, on ne doit pas pour autant en faire des zones de non-droit. Dès lors que la loi est applicable sur ces questions, elle doit s’appliquer aussi dans ces collectivités. Il devient donc nécessaire de permettre cette cohérence et de procéder aux adaptations nécessaires. Le Gouvernement émet également un avis défavorable sur cet amendement, dont le sens m’échappe.

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

L'amendement n° 512, présenté par M. Buffet, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Alinéa 18

Remplacer les mots :

il délivre

par les mots :

elle délivre

La parole est à M. le rapporteur.

Debut de section - Permalien
Marie-Luce Penchard, ministre

Favorable.

L'amendement est adopté.

L'article 82 est adopté.

(Non modifié)

Les articles L. 311-9 et L. 314-2 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, dans leur rédaction issue de l’article 5 de la présente loi, l’article L. 314-9 du même code, dans sa rédaction issue de l’article 20 de la présente loi, ainsi que l’article L. 213-1, les I et II de l’article L. 511-1, les articles L. 511-3-1, L. 511-4, L. 512-1 à L. 512-5, L. 513-1 à L. 513-4, L. 523-3 à L. 523-5, L. 531-1, L. 531-3, L. 533-1, L. 541-2, L. 541-3, L. 551-1, L. 551-2, L. 552-1 à L. 552-4, L. 552-6, L. 552-7 et L. 552-8, L. 552-9-1, L. 552-10, L. 553-1, L. 553-3, L. 555-1, L. 561-1 à L. 561-3, L. 571-1 et L. 571-2, L. 624-4, L. 742-3 et L. 742-6 du même code et les articles L. 222-2-1, L. 776-1 et L. 776-2 du code de justice administrative, l’article L. 729-2 du code de procédure pénale et l’article 3 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l’aide juridique, dans leur rédaction issue des articles 23, 25, 26, 28 à 45 et 47 à 56 de la présente loi, sont applicables à Saint-Barthélemy et Saint-Martin.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

L'amendement n° 263, présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Cet amendement est défendu, monsieur le président.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Je suppose que la commission et le Gouvernement confirment leurs avis défavorables ?...

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

L'amendement n° 513, présenté par M. Buffet, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Remplacer les mots :

les I et II de l'article L. 511-1

par les mots :

l'article L. 511-1 à l'exception du deuxième alinéa du III

La parole est à M. le rapporteur.

Debut de section - Permalien
Marie-Luce Penchard, ministre

Favorable.

L'amendement est adopté.

L'article 83 est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

L'amendement n° 485 rectifié, présenté par MM. Antoinette, Patient, Gillot, S. Larcher, Lise, Tuheiava, Yung, Anziani et Sueur, Mmes Boumediene-Thiery et Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat et C. Gautier, Mme Klès, MM. Michel, Assouline et Badinter, Mmes Blondin, Cerisier-ben Guiga et Ghali, M. Guérini, Mme Khiari, M. Lagauche, Mme Lepage, MM. Madec, Mermaz et Ries, Mme Tasca et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Après l'article 83, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au titre III du livre Ier du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il est inséré un article L. 131-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 131-1. - Sauf si sa présence constitue une menace à l'ordre publique :

« 1° un résident de la ville d'Albina, au Suriname, n'est pas soumis aux obligations de l'article L. 211-1 pour entrer sur le territoire de la commune de Saint-Laurent ;

« 2° un résident de la ville d'Oiapoque, dans l'État de l'Amapa, au Brésil, n'est pas soumis aux obligations de l'article L. 211-1 pour entrer sur le territoire de la commune de Saint-Georges. »

La parole est à M. Richard Yung.

Debut de section - PermalienPhoto de Richard Yung

Cet amendement, bien qu’il soit au premier abord de nature un peu locale, soulève un problème bien réel, qui, pensons-nous, mérite d’être débattu au Sénat.

Debut de section - PermalienPhoto de Richard Yung

Il ne se pose peut-être pas en Seine-et-Marne, monsieur le président de la commission, mais je répète qu’il s’agit bien d’un vrai problème !

Cet amendement vise à réconcilier la Guyane et ses voisins en ne soumettant pas les habitants de deux villes, l’une surinamienne, l’autre brésilienne, situées à quelques centaines de mètres de la frontière, sur l’autre rive d’un fleuve – le Maroni, dans le premier cas, l’Oyapock, dans le second –, à l’obligation de visa pour rentrer sur le territoire de la commune française respectivement concernée.

La ville d'Oiapoque, au Brésil, est située juste en face de Saint-Laurent-du-Maroni et celle d'Albina, au Suriname, juste en face de Saint-Georges-de-l'Oyapock. Tous les jours, des centaines de ressortissants brésiliens, d’un côté, et surinamiens, de l’autre, traversent le fleuve sur leurs embarcations et viennent s’approvisionner en Guyane, rencontrer leurs amis, échanger avec nos compatriotes. Le trafic est considérable et il est clair qu’il perdurera.

En réalité, à l’occasion de ces visites quotidiennes, le droit ne s’applique pas puisque ces personnes sont en situation irrégulière.

En effet, il leur faut un visa d’entrée pour être reçues légalement sur le territoire guyanais. Or, pour l’obtenir, elles doivent se rendre au consulat français le plus proche, distant de plusieurs centaines de kilomètres dans le cas des habitants d’Oiapoque, et qui n’est guère susceptible d’être le but d’une promenade matinale pour ceux d’Albina, même si la capitale du Suriname, Paramaribo, n’est pas aussi éloignée ; je vous renvoie à vos atlas habituels. Bref, ces personnes ne vont pas chercher de visa pour cette simple visite frontalière.

À l’évidence, cette obligation juridique est en totale contradiction avec la proximité réelle des habitants des rives de ces deux fleuves.

C’est pourquoi nous proposons, avec notre collègue Jean-Étienne Antoinette, que les habitants de ces deux villes, Albina et Oiapoque, soient dispensés de visa pour entrer sur le territoire des communes de Saint-Laurent-du-Maroni et de Saint-Georges-de-l’Oyapock.

Certes, dans son règlement n° 574/1999 du Conseil du 12 mars 1999, la Commission européenne a dressé une liste des États dont les ressortissants doivent être munis d’un visa pour entrer sur le territoire européen. Le Suriname y figure. Mais, dans le sixième considérant, la Commission énonce également « que, dans des cas particuliers qui justifient une exception au principe de l’obligation de visa, les États membres peuvent dispenser certaines catégories de personnes de l’obligation de visa ». Il existe donc un fondement juridique pour prendre cette disposition.

Je rappellerai deux éléments de réflexion complémentaires concernant le Brésil, État qui ne figure pas dans la liste de la Commission.

D’abord, les ressortissants français n’ont pas besoin de visa pour se rendre non seulement dans la belle ville d’Oiapoque, où nous voudrions tous aller, mais aussi dans le grand État brésilien d’Amapá, comme dans l’ensemble du Brésil !

Ensuite, la suspension de l’obligation de visa pour les Brésiliens qui se rendent en France est une demande réitérée de l’ambassadeur du Brésil.

Nous savons tous que la France mène une politique dynamique, et tout à fait justifiée, à l’égard du Brésil. C’est un élément à prendre en considération.

Alors que, sur le fleuve Oyapock, que je vous invite à aller voir, ...

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Procaccia

Mme Catherine Procaccia. On voudrait bien, mais, en ce moment, les voyages à l’étranger...

Rires

Debut de section - PermalienPhoto de Richard Yung

M. Richard Yung. Si vous payez votre billet d’avion, il n’y a pas de problème !

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. De toute façon, la Guyane, c’est la France ! Mais il ne faudra pas traverser le fleuve !

Nouveaux sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Richard Yung

M. Richard Yung. Alors que s’achève la construction du pont sur l’Oyapock qui permet de relier Oiapoque, au Brésil, et Saint-Georges-de-l’Oyapock, en Guyane, il paraît particulièrement bienvenu de résoudre ce problème comme le souhaite notre collègue Jean-Étienne Antoinette.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

Cet amendement tend à exonérer de l’obligation de posséder les documents et visas nécessaires à l’entrée en France, d’une part, les résidents de la ville d’Albina, au Suriname, qui souhaitent se rendre à Saint-Laurent-du-Maroni, en Guyane, et, d’autre part, les résidents de la ville d’Oiapoque, au Brésil, qui souhaitent se rendre dans la commune de Saint-Georges-de-l’Oyapock, en Guyane également, mais à sa frontière orientale.

Une telle exonération n’étant pas opportune, la commission est défavorable à cet amendement.

Debut de section - Permalien
Marie-Luce Penchard, ministre

La réflexion menée outre-mer conduit à penser qu’il faut permettre l’intégration de ces territoires dans leur environnement régional. La législation relative aux visas a déjà été assouplie, puisque les cent cinquante mesures décidées lors du conseil interministériel de l’outre-mer sont entrées en application.

Cela dit, en Guyane, la pression migratoire étant très forte, il n’est pas possible de traiter cette question au détour d’un amendement. Il convient de le faire par un accord entre les deux pays. C’est ce à quoi nous nous employons puisque, à la suite de l’ouverture du pont sur le fleuve Oyapock, nous avons entamé avec les Brésiliens des discussions sur un éventuel accord bilatéral relatif au statut des frontaliers. Les négociations sont en cours.

S’agissant de la circulation des personnes entre Saint-Laurent-du-Maroni et Albina, la question a été abordée lors de la réunion d’un conseil du fleuve. Votre collègue M. Georges Patient aurait pu vous le préciser…

Dans ces conditions, le Gouvernement émet un avis défavorable.

L'amendement n'est pas adopté.

M. Roger Romani remplace M. Guy Fischer au fauteuil de la présidence.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

L'amendement n° 484, présenté par MM. Yung, Anziani et Sueur, Mmes Boumediene-Thiery et Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat et C. Gautier, Mme Klès, MM. Michel, Antoinette, Assouline et Badinter, Mmes Blondin, Cerisier-ben Guiga et Ghali, M. Guérini, Mme Khiari, M. Lagauche, Mme Lepage, MM. Madec, Mermaz, Patient et Ries, Mme Tasca et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Après l'article 83, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Les articles L. 514-1, L. 514-2 et L. 532-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sont abrogés.

La parole est à M. Richard Yung.

Debut de section - PermalienPhoto de Richard Yung

M. Richard Yung. C’est notre dernier amendement... Nous avons un petit pincement au cœur !

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Nous n’irons peut-être pas jusqu’à observer une minute de silence ! (Nouveaux sourires.)

Debut de section - PermalienPhoto de Richard Yung

Avec cet article additionnel, nous souhaitons rétablir le caractère suspensif des recours contre les arrêtés préfectoraux de reconduite à la frontière et les obligations de quitter le territoire français, en Guyane, à Saint-Martin, en Guadeloupe et à Saint-Barthélemy.

Ce projet de loi s’applique sur les terres ultramarines, où le nombre de migrants est relativement élevé.

Toutefois, nous regrettons l’existence d’un régime dérogatoire au droit commun pour la Guyane, la Guadeloupe, Saint-Martin et Saint-Barthélemy. Dans ces quatre territoires, les migrants sont déjà privés des quelques protections existantes en métropole en cas de contrôle policier ou de mesure d’éloignement. Par exemple, seule une intervention de l’autorité consulaire peut imposer le respect d’un jour franc avant l’exécution d’une mesure de reconduite. Aucune des procédures contentieuses de droit commun suspensives d’exécution ne s’applique !

Nous souhaitons mettre fin à ce régime dérogatoire.

Debut de section - Permalien
Marie-Luce Penchard, ministre

Défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

La parole est à Mme Lucienne Malovry, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Lucienne Malovry

Je suis quelque peu étonnée par cet amendement. En effet, dans le rapport intitulé « La Guyane : une approche globale de la sécurité » et cosigné par M. Jean-Étienne Antoinette, on peut lire que la population « comprend 30 % d'illégaux. ».

L'amendement n'est pas adopté.

(Non modifié)

Les dispositions de la présente loi applicables aux obligations de quitter sans délai le territoire français sont également applicables aux arrêtés de reconduite à la frontière prononcés en application du II de l’article L. 511-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile dans sa rédaction antérieure à la présente loi.

Les dispositions applicables aux arrêtés de reconduite à la frontière prononcés en application de l’article L. 533-1 du même code sont également applicables aux arrêtés de reconduite à la frontière prononcés en application du 8° du II de l’article L. 511-1 du même code dans sa rédaction antérieure à la présente loi. Toutefois, les dispositions de l’article L. 213-1 du même code relatives aux arrêtés prononcés en application de l’article L. 533-1 du même code moins de trois ans auparavant ne sont applicables qu’aux seuls arrêtés de reconduite à la frontière prononcés en application dudit 8° moins d’un an auparavant.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Je suis saisi de deux amendements identiques.

L'amendement n° 88 rectifié est présenté par MM. Mézard et Collin, Mme Escoffier, MM. Baylet et Fortassin, Mme Laborde et MM. Milhau, Plancade, Tropeano, Vall et Vendasi.

L'amendement n° 264 est présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Jacques Mézard, pour présenter l’amendement n° 88 rectifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

M. Jacques Mézard. Pour moi aussi, c’est le dernier amendement que j’aurai l’honneur de défendre, sur ce texte du moins !

Sourires et exclamations amusées

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

L’article 84 A, qui est issu d’un amendement du Gouvernement adopté à l’Assemblée nationale, a pour objet d’assurer la continuité des procédures d’éloignement en cours au moment de la publication de la loi qui, je le crains, va être votée.

Cet article prévoit que les procédures entamées sous le régime des anciennes mesures d’éloignement vont se poursuivre sous le régime de celles qui les ont remplacées.

Or il s’agit tout de même de procédures qui ont des effets sur les libertés et il existe en droit pénal un principe selon lequel on ne doit appliquer les nouvelles procédures que dans la mesure où elles sont plus favorables à ceux qu’elles visent.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

La parole est à Mme Éliane Assassi, pour présenter l’amendement n° 264.

Debut de section - PermalienPhoto de Josiane Mathon-Poinat

Mme Josiane Mathon-Poinat. Il ne s’agit que de notre avant-dernier amendement, mais mes explications vaudront également pour l’amendement n° 265, qui sera bien le dernier et sur lequel nous n’aurons donc pas à reprendre la parole.

Marques de satisfaction sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Josiane Mathon-Poinat

Je dirai simplement que ces deux amendements s’inscrivent bien sûr dans la logique des positions que nous avons défendues sur ce texte.

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

M. François-Noël Buffet, rapporteur. Ce n’est pas la dernière fois que j’émettrai un avis défavorable !

Sourires

Debut de section - Permalien
Marie-Luce Penchard, ministre

Défavorable.

Les amendements ne sont pas adoptés.

L'article 84 A est adopté.

(Non modifié)

Les articles 13 à 16, 22 à 30, 32 à 37, 40 à 46, 48, 49, 52 à 56, 57 à 67 et 78 entrent en vigueur à compter d’une date fixée par décret en Conseil d’État et au plus tard le dernier jour du troisième mois suivant le jour de la publication de la présente loi.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

L'amendement n° 265, présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

Cet amendement a été défendu.

Quel est l’avis de la commission ?

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

La commission estime que ce délai de trois mois pour l’entrée en vigueur paraît raisonnable. Aussi est-elle défavorable à cet amendement.

Debut de section - Permalien
Marie-Luce Penchard, ministre

Défavorable.

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

L'amendement n° 514, présenté par M. Buffet, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Remplacer les mots :

par les mots :

et les mots :

par les mots :

La parole est à M. le rapporteur.

Debut de section - Permalien
Marie-Luce Penchard, ministre

Favorable.

L'amendement est adopté.

L'article 84 est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Avant de mettre aux voix l'ensemble du projet de loi, je donne la parole à M. Yves Détraigne, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Détraigne

Monsieur le président, monsieur le ministre de l’intérieur, mes chers collègues, le texte que le Sénat s’apprête à voter a une physionomie bien différente du texte issu de l’Assemblée nationale !

Une fois n’est pas coutume, nos collègues députés avaient adopté un texte excessif par certains aspects. Je pense notamment aux dispositions concernant la déchéance de nationalité, la carte de séjour « étranger malade » ou l’intervention du juge des libertés et de la détention au cours de la rétention.

Sur ces trois sujets, notre groupe s’est exprimé de manière unanime et cette unanimité est le reflet de nos convictions sur deux thèmes fondamentaux : l’humanisme et le respect des libertés individuelles de chacun.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Détraigne

S’agissant de l’extension de la déchéance de nationalité, notre position sur le fond a déjà été largement exprimée, notamment par la voix de notre collègue Nathalie Goulet. Je m’en tiendrai donc à un simple rappel.

Selon nous, cette mesure aurait, de fait, conduit à créer deux catégories de Français. Je suis conscient que nous parlions de criminels. Pour autant, il y aurait bien eu ceux qui, pour des faits similaires, auraient pu se voir retirer leur nationalité française et ceux qui l’auraient conservée. Lorsqu’on est Français, que ce soit par la naissance ou parce qu’on l’est devenu, on l’est pleinement !

S’agissant de la carte de séjour accordée à un étranger malade, les députés ont craint que les évolutions de la jurisprudence récente du Conseil d’État ne fassent peser une charge déraisonnable sur le système de soins français. C’est pourquoi ils avaient souhaité revenir au droit antérieur.

Cette démarche nous est apparue comme inopportune. Ainsi, nous partageons totalement les préoccupations liées à la santé publique exprimées par la commission des lois à propos de la modification proposée par l’Assemblée nationale. Nous sommes donc satisfaits que les dispositions en question ne figurent pas dans le texte que nous nous apprêtons à voter.

S’agissant de l’intervention du juge judicaire dans la procédure de rétention, nous avons eu hier soir un débat intéressant, ce qui nous a permis d’entendre les arguments des uns et des autres. Pour autant, notre position n’a pas évolué : nous restons convaincus que la solution qui nous était proposée entre grandement en contradiction avec plusieurs principes posés par notre droit, en particulier par la Constitution elle-même.

Le fait, d’une part, qu’un étranger puisse être renvoyé sans même qu’un juge ait pu examiner le recours qu’il a déposé sur ses conditions d’arrestation ou de détention et, d’autre part, que ce recours devant le juge des libertés et de la détention n’intervienne plus qu’au terme d’un délai de cinq jours nous paraît inacceptable en l’état.

Les arguments brillamment avancés hier soir par M. Gérard Longuet et relatifs à l’indépendance et à l’impartialité des juges administratifs ne nous ont pas fait oublier l’article 66 de la Constitution, selon lequel le juge judiciaire est le gardien de la liberté individuelle.

Le projet de loi que nous avons examiné a d’abord pour objet de transposer dans notre droit trois directives européennes créant un cadre juridique pour une politique européenne de l’immigration. Nous avons naturellement soutenu cette démarche. Nous avons également soutenu plusieurs propositions du Gouvernement qui allaient certes au-delà de la simple transposition, mais qui nous semblaient nécessaires.

C’est pour moi l’occasion de saluer le travail considérable accompli sur ce projet de loi par la commission des lois et, notamment, par son rapporteur, François-Noël Buffet. Sur de nombreux points importants, il a su revenir à une position plus raisonnable et plus conforme aux principes généraux de notre droit, tout en cherchant à favoriser une meilleure maîtrise des flux migratoires, condition essentielle de la sauvegarde de nos valeurs.

Puisque ce projet de loi prévoit, d’une part, des moyens pour favoriser une intégration accrue des étrangers que nous accueillons sur notre territoire et, d’autre part, de nouveaux outils permettant de renforcer l’indispensable lutte contre l’immigration clandestine, le groupe de l’Union centriste le votera.

Applaudissements sur les travées de l ’ Union centriste et de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Richard Yung

Nous voici donc parvenus à la fin d’un débat qui nous aura occupés près de six jours entiers, au cours desquels nous avons examiné environ cinq cents amendements. On peut dire que le Sénat a bien travaillé !

Je veux d’ailleurs, à mon tour, rendre hommage à M. le rapporteur, qui, bien que nous soyons en désaccord sur de nombreux points, a adopté une attitude d’ouverture tout au long de la discussion.

Comme nous l’avions affirmé d’emblée, ce texte va bien au-delà de la simple transposition des trois directives relatives, respectivement, à la « carte bleue » européenne, au retour des étrangers et à l’emploi irrégulier. En réalité, il sert de support pour introduire certaines mesures que le Gouvernement avait en tête et qui n’ont rien à voir avec lesdites directives.

Une telle manière de procéder est au fond assez logique, ce texte s’inscrivant dans une politique que nous connaissons bien puisqu’elle est à l’œuvre depuis un certain nombre d’années et qui consiste à instrumentaliser le thème de l’immigration sans se préoccuper de résoudre le problème.

En effet, nous constatons que, à cet égard, la situation ne bouge pas, malgré les grandes envolées où l’on brandit toutes sortes de chiffres : on compte toujours en France entre 300 000 et 400 000 travailleurs irréguliers, la même pression démographique s’exerçant aux frontières du territoire français. Mais ce qui compte, c’est d’en parler, pour que le journal de vingt heures s’ouvre sur ce sujet… Bref, ce qui compte, c’est de montrer que le discours de Grenoble se traduit dans les faits !

À l’issue de nos débats, je note un certain nombre de points positifs, et importants : l’article 3 bis visant à étendre les cas de déchéance de la nationalité française a été supprimé, tout comme l’article 17 ter, relatif aux conditions de délivrance de la carte de séjour temporaire accordée pour raisons de santé, ainsi que l’article 37, qui introduisait une inversion du contentieux administratif et du contentieux judiciaire et la mise à l’écart éventuelle du juge judiciaire.

Grâce à la suppression de ces trois dispositions centrales, le texte qui sera examiné par l’Assemblée nationale est d’une autre nature que celui qui nous avait été transmis. Nous serons évidemment attentifs à ce que les députés feront en deuxième lecture. En effet, il ne faudrait pas que l’ensemble des mesures que le Sénat a supprimées soient réintroduites, non pas subrepticement, mais par un groupe de députés très marqués à droite.

Par ailleurs, l’adoption d’une dizaine d’autres amendements a également permis d’améliorer le texte, notamment pour ce qui concerne la délivrance des documents d’identité et le caractère suspensif du recours dans le cadre du règlement Dublin II.

Malheureusement, nombre de points négatifs subsistent, à commencer par le parcours du combattant que suppose l’acquisition de la nationalité française. Je pense aussi à l’allongement des délais permettant le retrait de la nationalité et à l’extension du délai pendant lequel l’administration peut refuser d’enregistrer une déclaration de nationalité. Ainsi, l’étranger souhaitant accéder à la nationalité française est confronté à des obstacles de plus en plus élevés.

Les dispositions relatives au « mariage gris » – expression peu élégante ! – sont maintenues et l’article 23 prévoit une OQTF sans délai de départ volontaire, en vertu de ce que nous considérons comme une interprétation abusive de la notion communautaire de risque de fuite. Pourtant, la directive Retour établit clairement que le délai de départ volontaire doit constituer la règle. L’absence de délai emportera des conséquences graves, notamment la soumission de l’étranger à une mesure que nous persistons à appeler le bannissement, même si le terme fait frémir un certain nombre d’entre vous, mes chers collègues.

Parallèlement est créée une interdiction de retour sur le territoire français, dont nous avons demandé à de nombreuses reprises la suppression.

En outre, un certain nombre d’articles de ce projet de loi visent à restreindre et à transposer a minima les droits de libre circulation des ressortissants communautaires, ce qui ne manquera pas de poser certains problèmes avec nos partenaires d’Allemagne, de Belgique, de Suède – j’allais évoquer le Liechtenstein, mais ce n’est pas un bon exemple ! –, alors que ce sont deux pays précis qui sont ici visés !

Sourires sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Richard Yung

J’évoquerai également, monsieur le ministre, l’allongement de la durée de la rétention de 32 à 45 jours, malgré votre engagement – ou ce que nous avions interprété comme tel – de ne pas œuvrer en ce sens. Vous allez sans doute nous répondre qu’il s’agit de la durée la plus courte, mais ce n’est pas en soi un argument.

Quant à la procédure de « purge des nullités », elle vise tout simplement à entraver le travail du juge judiciaire, tandis que la procédure prioritaire est étendue au droit d’asile.

Voilà une liste assez longue, mais qui est loin d’être exhaustive, de points négatifs qui continuent d’entacher ce projet de loi. Ce dernier s’avère donc non seulement inutile – les cinq lois qui l’ont précédé n’ont pas été mises en œuvre ou se sont révélées inefficaces –, mais aussi dangereux.

Je le répète, nous serons très attentifs au débat qui s’ouvrira à l’Assemblée nationale et tirerons les conséquences des positions qui seront adoptées par les députés. Notre attention se portera tout particulièrement sur les articles susceptibles d’être soumis au Conseil constitutionnel. Bien que nous soyons assez prudents en la matière, nous pouvons dire qu’au moins une demi-douzaine d’articles suscitent des doutes quant à leur conformité au bloc de constitutionnalité.

Pour toutes ces raisons, nous ne voterons pas ce texte.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

M. Jacques Mézard. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le groupe du RDSE, dans sa très grande majorité, ne votera pas ce texte. Je vois que M. le ministre est surpris, voire stupéfait !

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

M. le président. C’est en raison de votre proximité régionale… et culturelle !

Nouveaux sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Certes, si l’on considère le côté positif des choses, on peut souligner que le Sénat a rejeté des dispositions particulièrement choquantes concernant la déchéance de nationalité, la saisine du juge des libertés et de la détention et la dualité des procédures administratives et judiciaires en matière de rétention administrative. J’ai d’ailleurs relevé à plusieurs reprises les observations objectives formulées par le rapporteur et me suis réjoui des quelques avancées relatives à la protection des travailleurs sans titre de séjour.

Toutefois, ce texte, le cinquième traitant de l’immigration depuis 2002, est d’abord, nous le savons tous, quelles que soient les travées sur lesquelles nous siégeons, un texte à effet médiatique. Il faut se souvenir aussi qu’il fait suite au débat catastrophique sur l’identité nationale !

Ce texte ne correspond pas, en outre, à une transposition correcte des directives européennes.

L’accumulation des lois sur ce même thème au cours des dernières années montre, d’une part, que les textes que vous faites voter n’ont pas d’effet concret et sont donc inefficaces et, d’autre part, que vous cherchez à entretenir dans l’opinion publique des réactions contre l’étranger sous toutes ses formes : tantôt c’est l’Europe qui est la cause de tous les maux ; tantôt, c’est l’immigration qui explique la crise. Un tel discours de rupture n’est pas constructif, quand notre pays a au contraire besoin de rassemblement et de confiance.

Par conséquent, je le répète, très majoritairement, nous ne voterons pas ce projet de loi.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Éliane Assassi

D’emblée, je tiens à dire que je partage l’idée émise par M. Yung selon laquelle nous avons bien et longuement travaillé.

Malgré le rejet, dont nous nous félicitons, de certaines mesures emblématiques, relatives notamment à l’extension de la déchéance de la nationalité, au droit au séjour des étrangers malades et à la saisine du juge des libertés et de la détention, il demeure que ce projet de loi est encore émaillé d’articles d’une extrême gravité, dont la mise en œuvre portera atteinte aux droits, aux libertés et à la dignité de l’être humain.

J’avoue que je suis toujours inquiète quand j’entends M. Mariani, le « Monsieur Loyal » de ce projet de loi, nous annoncer avec une légèreté indécente que la culture de la xénophobie sera la pièce maîtresse de la campagne présidentielle. S’ensuit évidemment une caricature poussée à l’extrême des étrangers, tous accusés d’être des pilleurs invétérés de notre système social.

Ainsi, après la réutilisation originale de la fameuse formule « la France, tu l’aimes ou tu la quittes », a-t-on vu fleurir d’autres jeux de mots douteux et de bien mauvais goût, des amalgames entre intégration et assimilation ou encore entre immigration et délinquance.

Vous justifiez l’ensemble de ces mesures par la nécessité de transposer plusieurs directives européennes, mais vous avez fait le choix d’une transposition partielle, après avoir procédé à des choix draconiens. En l’occurrence, l’Europe a bon dos !

Vous feignez, dans le même temps, d’oublier que les instances et les juridictions communautaires ont condamné la France à plusieurs reprises, en raison du mépris affiché à l’égard de certains ressortissants de l’Union, en violation des traités que la France a ratifiés.

Je le dis avec force : il serait de bon ton de cesser d’instrumentaliser la France, de brader son identité à votre convenance, sous couvert de la définir, et de vous servir de l’Europe comme alibi.

Aujourd’hui, dès que vous vous sentez fragilisés sur des questions sociales, vous tentez de dévier la trajectoire des colères, à l’instar de celle qui s’exprime aujourd’hui en particulier chez les magistrats et dans le monde de l’éducation, en stigmatisant, au sein de la population, des catégories de personnes pour les livrer en pâture à l’opinion.

Cette manière de procéder est extrêmement dangereuse parce qu’elle nourrit les extrêmes, qui en profitent pour bomber le torse. On ne le répétera jamais assez : en général, les gens préfèrent l’original à la copie !

Aimé Césaire disait, à la suite de Senghor, qu’un raciste est un homme qui se trompe de colère – et je profite de cette occasion pour rendre hommage à Édouard Glissant, qui vient de disparaître. Or, avec ce texte, vous donnez aux racistes de quoi nourrir leur colère envers l’autre, celui qui serait différent, étranger, immigré.

Vous l’avez compris, nous voterons contre ce texte et nous suivrons avec attention son examen en deuxième lecture par l’Assemblée nationale, au début du mois de mars. Bien entendu, nous prendrons toute notre part aux débats lorsqu’il reviendra ensuite devant notre assemblée.

Je le réaffirme, nous sommes pour le respect inconditionnel de la dignité humaine et c’est la raison primordiale pour laquelle nous sommes opposés à ce texte.

Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste. – Mme Bernadette Dupont et M. Alain Gournac s’exclament.

Debut de section - PermalienPhoto de Alima Boumediene-Thiery

Monsieur le ministre, comme vous vous en doutez certainement, je ne voterai pas ce projet de loi. Je combats fermement la logique de suspicion, d’enfermement et d’éloignement. Or, malheureusement, ce texte crée la suspicion, enferme et éloigne.

De surcroît, après avoir suscité le mécontentement des magistrats de l’ordre administratif, il agace désormais les magistrats de l’ordre judiciaire.

Comme j’ai eu l’occasion de le faire lors de l’examen des conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi d’orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure, j’apporte tout mon soutien aux personnels du milieu judiciaire et aux forces de l’ordre, sur lesquels le Président de la République et le Gouvernement tentent de faire peser depuis quelques jours des responsabilités qui n’incombent pourtant qu’à eux.

Quant aux magistrats de l’ordre administratif, dont les organisations syndicales ont appelé à manifester hier contre ce projet de loi, ils craignent, à juste titre, que trois dispositions procédurales ne menacent leurs conditions de travail : la possibilité de tenir des audiences dans les centres de rétention ; la volonté sans cesse affichée d’inverser l’ordre d’intervention des juges de l’ordre administratif et de l’ordre judiciaire ; enfin, la possibilité de statuer par la voie d’un juge unique sur l’interdiction de retour sur le territoire français lorsque l’étranger est placé en rétention.

Les magistrats de l’ordre administratif insistent sur le fait que cette dernière disposition constitue un véritable recul des garanties apportées au justiciable alors qu’aucune situation d’urgence ne justifie, dans ce cas, l’absence de collégialité.

Ce projet de loi porte donc sans aucun doute atteinte à nos droits fondamentaux et à nos libertés individuelles en stigmatisant une fois de plus les étrangers et en suscitant des peurs.

Comment pourrions-nous, par exemple, accepter ce concept nauséabond de « mariage gris » et l’aggravation injustifiée des sanctions pénales encourues en la matière ? Pourquoi faire peser la suspicion sur la seule personne de l’étranger, le conjoint français étant nécessairement présumé de bonne foi ? C’est une véritable présomption de culpabilité qui s’attache ainsi à l’étranger !

Comment avez-vous pu, monsieur le ministre, songer à ce que de nombreuses associations et plusieurs juristes qualifient de « Guantanamo à la française » ? Vous souhaitez en effet enfermer jusque pour une durée de dix-huit mois les étrangers condamnés pour terrorisme ayant déjà purgé leur peine, en les plaçant en rétention administrative. Qu’est-ce, sinon une double peine ?

La seule vocation de la rétention administrative est d’organiser le départ d’un étranger ; elle n’est pas de mélanger mesure de sûreté et sanction d’un comportement passé.

Et que dire des droits de la défense quand vous empêchez qu’une procédure aille à son terme en refusant le recours suspensif des demandeurs d’asile placés en procédure prioritaire, alors même que plusieurs associations, mais aussi la Cour européenne des droits de l’homme ont demandé que ce recours soit suspensif ?

Vous l’aurez compris, les sénateurs écologistes s’opposent fermement à ce projet de loi discriminatoire, liberticide et répressif à l’égard de l’étranger. S’il est adopté in fine, j’espère que le Conseil constitutionnel ou la Cour européenne des droits de l’homme le condamneront.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Gautier

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous sommes donc parvenus au terme de l’examen en première lecture de ce projet de loi, dont l’objectif est tout simplement de poursuivre dans la voie ouverte en 2007, en adaptant notre législation aux évolutions européennes et en recherchant de nouveaux moyens pour lutter contre des filières en constante mutation.

La France a une longue tradition d’accueil et d’intégration, à laquelle nous sommes tous attachés. Pour autant, il est important de continuer à lutter contre l’immigration irrégulière. Cette tradition d’hospitalité nous amène et même nous oblige à rester une terre d’intégration, où l’immigration puisse être choisie et réussie, sous peine de mettre en péril notre cohésion nationale.

La France a le droit, comme tous les pays, de décider qui elle veut ou qui elle peut accueillir sur son territoire. Car tout laxisme en matière d’immigration ne peut qu’engendrer le développement de tous les racismes.

Le projet de loi que nous allons voter, et ce n’est une surprise pour personne, s’inscrit dans cette continuité : ce double défi d’intégration et de lutte contre l’immigration illégale.

Il répond également aux exigences de l’évolution du droit européen. Nous participons donc modestement et progressivement à la construction d’une politique européenne de l’immigration et de l’asile.

Je tiens en cet instant à saluer le travail minutieux et équilibré mené par notre rapporteur, François-Noël Buffet, et par la commission des lois, sous le regard attentif de son président, Jean-Jacques Hyest.

Vous l’aurez compris, mes chers collègues, le groupe UMP votera ce texte, en espérant que la navette parlementaire permettra encore de poursuivre cette réflexion collective s’agissant de certaines autres mesures importantes.

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, au cours des débats qui vont s’achever, le Sénat est revenu sur plusieurs mesures inacceptables à nos yeux, et c’est tant mieux.

Je tiens à saluer le travail de la commission des lois, en particulier sur les articles 17 ter et 26, relatifs à la santé des étrangers, sur les articles 37 et 40, relatifs à la place du juge administratif et du juge judiciaire dans la procédure de rétention des étrangers.

Ces sujets sont complexes eu égard à l’enchevêtrement des procédures administratives et civiles qu’a souligné hier le président Longuet. Nous sommes conscients du problème, mais nous estimons que le dispositif prévu par le texte comportait de graves risques d’inconstitutionnalité et soulevait plus de difficultés qu’il n’en résolvait.

Le juge des libertés doit intervenir dans les plus brefs délais, car, qu’on le veuille ou non, si la rétention n’est pas une garde à vue, elle reste une privation de liberté.

Ces avancées notables par rapport au texte initial ont été obtenues en commission et réaffirmées en séance. Aussi, je remercie notre rapporteur, dont la rigueur fait honneur à la commission des lois.

Nous avons également pris acte avec satisfaction de la suppression, à l’article 3 bis, de la mesure portant déchéance de la nationalité. Nous souhaitions qu’il ne se trouvât pas, dans notre hémicycle, de majorité pour la voter ; nous avons été entendus, notamment par nos collègues centristes. Cet article représentait un recul de nos valeurs, portait atteinte à notre Constitution, stigmatisait une énième fois les étrangers naturalisés. Cette mesure ouvrait la porte à des dérives que nul ici ne souhaite à l’évidence, mais que nous ne pouvons pas prévoir.

Grâce à ces modifications, le texte s’en trouve amélioré. Il n’en reste pas moins un mauvais texte.

Ainsi, vous persistez à inscrire dans la loi le délit de solidarité. Nous ne pouvons l’accepter, parce que venir en aide à une personne qui en a besoin ne saurait constituer le motif d’une incrimination. Monsieur le ministre, vous avez essayé de distinguer, parmi les différents motifs, le motif humanitaire. Pour ma part, je ne vois pas comment on peut établir une distinction entre les motifs d’aide : ils sont toujours humanitaires.

Cet article, à lui seul, révèle la philosophie profonde de ce texte : l’étranger est d’abord un profiteur potentiel avant d’être un être humain. Ceux qui lui viennent en aide ne devraient pas le faire. Seuls comptent les étrangers diplômés, les étrangers « de qualité », les « bons » étrangers.

Je reviens sur le « mariage gris », typique de cet esprit de suspicion. Selon vous, il est le fait d’étrangers qui se marient à des Français ou à des Françaises pour avoir des papiers et une carte de séjour. Il n’est pas un vrai mariage parce que l’un des deux conjoints a trompé l’autre sur les motifs de l’union.

J’avoue que, si ce genre de situation peut éventuellement exister, nous sommes bien en peine d’intervenir, en tant que législateur. Quels outils juridiques proposer pour juger de la véracité du consentement de quelqu’un, de la validité de ses sentiments ? Comment diable un juge va-t-il pouvoir décider qu’un étranger a dissimulé ses intentions à son conjoint, pour reprendre les termes de votre projet de loi ? À mon sens, on entre là dans le tréfonds des cœurs, dans l’intime, et il est très difficile de trancher.

On se trompe parfois avec les sentiments : on croit aimer et l’on finit par se rendre compte qu’on se leurre. On change alors d’avis, on demande le divorce. Nombre de couples vivent ces situations ; c’est même assez fréquent chez des couples « franco-français ». Ces mariages ne sont pas pour autant considérés comme frauduleux. Pourquoi une telle suspicion dès que le mariage implique des étrangers ?

Cela ferait presque rire si les peines encourues n’étaient pas si lourdes : sept ans de prison, 30 000 euros d’amende, soit autant que pour le proxénétisme et la traite d’êtres humains.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

Croyez-vous, mes chers collègues, que cette peine soit en adéquation avec le délit constaté ? Quel pouvoir met-on ainsi dans les mains du conjoint français, qui pourra disposer aisément d’une arme contre son compagnon en cas de difficulté de couple ? Cette inégalité dans le couple me paraît dangereuse et porteuse de conflits assez malsains.

Laissons au contraire nos compatriotes faire preuve de discernement sur leurs relations ; ils sont adultes et doués de raison. Si on leur accorde le droit de vote, c’est précisément parce que l’on estime qu’ils sont capables de réfléchir avant de s’engager. Cela est aussi valable en amour.

Je n’ajouterai rien à ce qu’a fort bien dit Richard Yung sur la purge des nullités et sur d’autres sujets.

En conclusion, monsieur le ministre, je m’étonne qu’un grand nombre de textes importants pour le quotidien de nos concitoyens aient été examinés selon la procédure accélérée, cependant que ceux qui portent sur la sécurité et l’immigration le sont selon la procédure classique, à savoir deux lectures dans chaque chambre, comme si l’on voulait poser, par cet étalement dans le temps, les thèmes de la prochaine campagne électorale et surenchérir sur les thèses de Mme Le Pen, qui stigmatise, elle, les musulmans.

Qu’y a-t-il là d’étonnant après, notamment, le funeste débat sur l’identité nationale, le texte sur la burqa, le déchaînement sur les minarets ou la viande halal et, aujourd’hui, ce texte sur les étrangers et les immigrés ? Souhaite-t-on ainsi distiller encore et toujours la peur de l’autre, de l’étranger ?

C’est la raison pour laquelle nous dénonçons une fois de plus cette stigmatisation constante. Qu’on cesse de faire des immigrés les boucs émissaires de tous nos problèmes et les otages réguliers de nos élections en refusant d’aborder les problèmes de fond que sont le chômage, la pauvreté, la précarité, le logement, l’éducation ou la désindustrialisation de la France.

Ce grand auteur qu’est Milan Kundera disait il y a déjà quelque temps : « L’immigré, c’est le grand souffrant de notre siècle. » Il parlait bien entendu du XXe siècle. C’est malheureusement toujours le cas au XXIe !

Vous comprendrez, monsieur le ministre, que je me prononce contre ce texte.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Monsieur le ministre, le Gouvernement aurait dû s’abstenir, c’est-à-dire retirer ce texte : c’était le projet de M. Besson et il manifestait la volonté du Président de la République, au-delà d’une cinquième discussion sur l’immigration – et au moins d’une sixième sur la sécurité – de s’adresser à une partie de son électorat de 2007, celle qui avait sans doute tendance à s’éloigner et qu’il fallait entretenir dans ses idées sur les étrangers, après les avoir largement alimentées.

D’ailleurs, nous pouvions penser que le chef de l’État en avait pris conscience puisqu’il a décidé de supprimer le ministère de l’identité nationale. Il a dû se rendre compte que l’existence d’un tel ministère n’était pas tellement « payante » dans la mesure où cette partie de son électorat ne semblait pas lui être particulièrement fidèle.

Eh bien non ! Nous avons eu droit au discours de Grenoble, puis à des attaques intolérables contre les Roms !

Tous ces discours sont extrêmement dangereux, car, s’ils ne sont pas forcément rentables électoralement – c’est à vous d’en juger ! –, ils ont cependant des effets très négatifs.

Je ne sais pas à qui tout cela profite mais, à force d’attiser des peurs, les propos se lâchent !

On a vu des choses très étranges, par exemple un hebdomadaire qui a titré : « La France envahie par les Chinois ! ». Sans doute voulait-il parler d’une invasion économique, mais on a eu l’impression de voir tout à coup ressurgir cette vieille lune du « péril jaune » !

Ensuite, on a vu un camp de Roms, près de Marseille, attaqué et mis à sac par des bandes. Voilà encore des gens qui se lâchent, non pas verbalement mais par des actes !

Tout cela est très grave, et si vous aviez retiré cet énième texte, monsieur le ministre, vous auriez montré que vous ne vouliez pas continuer à vous servir de ces peurs. La peur est particulièrement mauvaise conseillère en politique.

Vous pouviez au contraire jouer la carte de la confiance, et il y a fort à faire en la matière. Je pense bien entendu à la confiance sur le plan économique et social. Vous en êtes bien loin, mais vous auriez pu donner l’exemple en Europe, par exemple en ratifiant la convention internationale sur la protection des droits des travailleurs migrants et des membres de leurs familles. Vous pouviez aussi transposer les directives, mais en ne reprenant que les mesures communes les plus protectrices à l’égard des migrants.

Vous auriez ainsi prouvé que nous n’avons pas peur des étrangers, pas peur des migrations, qui sont de toute façon inéluctables dans un monde ouvert. Vous ne pouvez pas libérer partout les capitaux et considérer que les individus doivent être cantonnés dans leur lopin, sinon dans leur ghetto.

Mais vous avez voulu encore et toujours afficher, sans mesurer les désastres que vous provoquez.

Majoritairement, le Sénat – la commission des lois, en particulier son président et son rapporteur, a indiscutablement joué un rôle – a refusé les abus les plus manifestes qui figuraient dans le texte venant de l’Assemblée nationale et qui plaçaient la France dans une position passablement honteuse. Je pense surtout à la déchéance de nationalité, une notion qui nous rappelle de bien mauvais souvenirs et que nous voudrions voir oubliée, en tout cas bannie – encore une notion que vous prisez ! – de notre législation et de notre vocabulaire.

Néanmoins, ce texte reste un texte d’affichage très négatif, avec des mesures qui auront des conséquences tout à fait désastreuses sur la vie réelle des migrants et leur situation en France.

Par conséquent, nous voterons, bien sûr, contre ce projet de loi, mais en émettant tout de même le vœu qu’on n’aille pas agiter certains esprits de manière à revenir finalement au texte initial. J’espère au moins que la majorité sénatoriale aura emporté l’adhésion de l’ensemble des parlementaires.

Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Personne ne demande plus la parole ?...

Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi.

Le projet de loi est adopté.

Debut de section - Permalien
Brice Hortefeux, ministre

Au terme de ces débats, je voudrais dire que j’ai été attentif aux positions exprimées par les uns et les autres.

Je me tourne tout d’abord vers Mmes Assassi et Borvo Cohen-Seat pour saluer la constance du groupe CRC-SPG.

Je dirai ensuite à Mme Bariza Khiari que je suis toujours très sensible à ses propos, mais que, cette fois, son intervention m’a vraiment semblé, à bien des égards, terriblement caricaturale.

Les arguments que M. Yung a invoqués tout à l’heure ne m’ont pas semblé très honnêtes – qu’il ne m’en veuille pas –, car il a dit que ce texte ne se limitait pas à la simple transposition de directives européennes, laissant entendre que, si cela avait été le cas, la position de son groupe aurait été différente. Or nous connaissons la réalité : de toute façon, les socialistes auraient voté contre !

Protestations sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - Permalien
Brice Hortefeux, ministre

Mais je crois que je présume assez bien !

C’est d’ailleurs pourquoi je tiens à rendre hommage à Mme Boumediene-Thiery : elle, au moins, est totalement cohérente. Elle est pour l’immigration, qu’elle soit régulière ou irrégulière : tout le monde peut entrer chez nous, s’y installer, y circuler, tout cela n’a aucune importance !

Debut de section - Permalien
Brice Hortefeux, ministre

M. Brice Hortefeux, ministre. Cette position est moins hypocrite que celle du groupe socialiste, qui prétend officiellement vouloir lutter contre l’immigration irrégulière, mais qui, dans la pratique, ne vote aucune des mesures qui permettent de promouvoir l’immigration légale. Pas une seule de ces mesures n’a trouvé grâce à leurs yeux !

Applaudissementssur les travées de l’UMP. – Protestations sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Richard Yung

Évidemment, vous dites cela à un moment où nous ne pouvons pas répondre !

Debut de section - Permalien
Brice Hortefeux, ministre

Je remercie Yves Détraigne des propos qu’il a tenus, même si je regrette – j’y reviendrai – certaines positions ou certains votes qui ont été ceux de l’Union centriste.

Je remercie également Jacques Gautier de son analyse, qui reflète la lucidité qui a été celle de l’UMP, nous procurant ses encouragements à l’occasion de cette discussion.

Enfin, je sais gré à la Haute Assemblée, et plus particulièrement à M. le président de la commission et M. le rapporteur, d’avoir approuvé un certain nombre de mesures importantes : je pense aux dispositions destinées à lutter contre l’immigration clandestine, à encourager l’immigration professionnelle - notamment la « carte bleue » européenne –, à renforcer nos outils de contrôle des étrangers terroristes en voie d’expulsion, qui pourront désormais être placés en centre de rétention – très honnêtement, cela me paraît le minimum !

J’encourage d’ailleurs les sénateurs qui ont approuvé cette dernière mesure à se souvenir que certains ne l’ont pas votée. Les électeurs, grands, petits ou moyens, sont assez sensibles à cette absence de responsabilité…

Je mesure néanmoins que des nuances importantes se sont exprimées concernant certaines dispositions proposées par le Gouvernement et adoptées par les députés. Je pense à la réforme du contentieux de l’éloignement. Je pense aussi à la possibilité de retirer la nationalité française à des assassins de policiers et de gendarmes. Ces mesures ont été approuvées par l’Assemblée nationale et par la majorité de la majorité au sein de la Haute Assemblée.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

M. Jean-Pierre Sueur. C'est-à-dire une minorité !

Sourires sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - Permalien
Brice Hortefeux, ministre

M. Brice Hortefeux, ministre. Le Gouvernement, qui est attaché à ces mesures, veillera à ce que la suite du débat parlementaire permette, conformément à nos règles constitutionnelles, de mener à bien cette réforme nécessaire et indispensable.

Applaudissementssur les travées de l’UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

M. Jean-Pierre Sueur. J’aime beaucoup cette formule : « la majorité de la majorité » ! Mais ce n’est pas la majorité au carré : c’est la minorité !

Sourires sur les travées du groupe socialiste.

(Texte de la commission)

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

L’ordre du jour appelle la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, portant diverses dispositions d’adaptation de la législation au droit de l’Union européenne en matière de santé, de travail et de communications électroniques (projet n° 225, texte de la commission n° 257, rapports n° 256, 252 et 275).

Dans la discussion générale, la parole est à M. le ministre.

Debut de section - Permalien
Patrick Ollier, ministre auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement

Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, j’ai aujourd’hui l’honneur de vous présenter au nom du Gouvernement le projet de loi portant diverses dispositions d’adaptation de la législation au droit de l’Union européenne en matière de santé, de travail et de communications électroniques.

Ce titre dit assez la variété des sujets abordés. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle plusieurs ministres porteront le texte : Xavier Bertrand, retenu à l’Assemblée nationale par la discussion du projet de loi relatif à la bioéthique, et dont je vous prie de bien vouloir excuser l’absence, mais également Nora Berra, qui devrait nous rejoindre dans quelques instants, Roselyne Bachelot, Frédéric Mitterrand et Éric Besson. Chacun d’entre eux est compétent sur un certain nombre de dispositions du projet de loi. Éric Besson sera d’ailleurs au banc des ministres pour vous présenter la partie du projet relative aux communications électroniques.

Debut de section - Permalien
Patrick Ollier, ministre

C’est pour faire honneur au Sénat, monsieur le sénateur !

Toutefois, cette variété ne doit pas masquer notre objectif commun : nous devons mettre notre droit national en conformité avec les obligations résultant du droit de l’Union européenne. Nous devons combler les retards de notre pays en matière de transposition de plusieurs directives. Il est clair que nous ne pouvons plus attendre !

D’abord, ces retards ont un coût pour nos finances publiques : comme vous le savez, le traité de Lisbonne a renforcé les sanctions financières dans ce domaine. Je tiens à préciser que, si les dispositions en cause ne sont pas transposées, le risque est extrêmement fort que nous ayons à payer une amende qui se chiffrerait à 90 millions d’euros environ.

Ensuite, ces retards nous mettent dans une forte insécurité juridique puisque les citoyens de l’Union européenne peuvent désormais attaquer un État pour déficit de transposition.

Surtout, ces retards ne sont pas sans conséquences sur l’image de notre pays et sur sa crédibilité en Europe. Pour que la France soit forte dans les négociations européennes, pour qu’elle puisse peser sur les choix politiques faits lors de l’adoption des directives, nous devons être exemplaires dans la transposition de ces directives.

Or nous sommes, en ce domaine, au quinzième rang des États de l’Union européenne : cela n’est pas acceptable. C’est la raison pour laquelle le Gouvernement a décidé de demander au Parlement de combler ce retard en accélérant la transposition de plusieurs directives : tel est l’objet de ce projet de loi.

Celui-ci va nous permettre d’achever la transposition de plusieurs directives qui revêtent une importance majeure. Il s’agit en particulier de la directive Services et de la directive Reconnaissance des qualifications professionnelles, dont j’ai d’ailleurs eu à connaître lorsque, dans une autre vie, je présidais la commission des affaires économiques de l’Assemblée nationale.

Mesdames, messieurs les sénateurs, je rappellerai brièvement les objectifs de la directive Services.

Dans sa version finale, elle vise à libérer le potentiel de croissance des marchés de services en Europe, en éliminant les obstacles juridiques et administratifs injustifiés qui freinent les échanges dans ce secteur.

Elle doit notamment permettre de simplifier l’établissement de petites et moyennes entreprises ou de prestataires de services de part et d’autre des frontières intra-européennes, et ainsi d’élargir le choix des consommateurs.

Il n’est en aucun cas question d’inciter au moins-disant social. Les exigences de qualifications et de conditions de travail sont celles du pays d’accueil. Ce principe est clairement affirmé.

Les durées de travail, le salaire minimum ou les conditions d’hygiène et de sécurité sont donc entièrement garantis, notamment dans notre pays.

Par ailleurs, un certain nombre de services de portée régalienne ou d’intérêt général sont exclus du champ de la directive, notamment la sécurité privée, les services judiciaires, certains services sociaux, le transport ou la radiodiffusion.

Une grande partie des dispositions de la directive ont déjà été transposées dans le cadre de différents textes de loi, comme la loi du 4 août 2008 de modernisation de l’économie – que nous avons ensemble bien connue ! –, ou la loi du 22 juillet 2009 de développement et de modernisation des services touristiques.

D’autres dispositions n’ont pas pu faire l’objet d’une adaptation législative définitive. C’est ce à quoi nous travaillons aujourd’hui.

Or, nous avons depuis longtemps dépassé la date butoir du 28 décembre 2009. À défaut d’une transposition complète de la directive Services, nous risquons une condamnation pour manquement entraînant une amende de plusieurs millions d’euros.

C’est la raison pour laquelle ce projet de loi, nécessaire, est également indispensable. Je reviendrai rapidement sur son contenu, que l’Assemblée nationale a très peu modifié.

Afin de transposer la directive Services, l’article 1er modifie la réglementation des débits de boissons. Il prévoit une déclaration administrative unique qui encadrera, de manière harmonisée, l’ensemble des lieux de vente de boissons alcooliques, dans le souci de garantir la santé et l’ordre publics. Cette déclaration n’entraînera aucun coût supplémentaire pour les mairies.

L’article 2 simplifie la réglementation relative à la revente des dispositifs médicaux d’occasion, tout en prévoyant que chaque dispositif devra avoir reçu un certificat de conformité.

L’article 2 bis fait de même s’agissant des dispositifs médicaux de diagnostic in vitro d’occasion. Il s’agit, là encore, de garantir d’abord la sécurité sanitaire.

L’article 3 aménage le dispositif d’évaluation de l’activité des établissements et services sociaux et médico-sociaux.

L’article 4 simplifie l’accès aux activités de contrôle des installations techniques funéraires.

L’article 6, relatif aux entrepreneurs de spectacles, simplifie les procédures applicables aux opérateurs communautaires intervenant, à titre temporaire et occasionnel, sur le territoire national.

L’article 7 facilite l’activité en France des sociétés d’architecture d’un État membre de l’Union européenne. Il maintient cependant les conditions de qualifications requises pour l’exercice de la profession d’architecte.

L’article 8, relatif aux agences de mannequins, introduit un régime déclaratif pour les agences intervenant dans le cadre de la libre prestation de services. Il supprime également les incompatibilités professionnelles applicables aux salariés, dirigeants et associés des agences, car celles-ci sont contraires à la directive Services. Il prévoit cependant l’obligation pour ces agences de prendre toute mesure nécessaire pour garantir la défense des intérêts des mannequins qu’elles emploient et pour éviter les situations de conflit d’intérêts.

Enfin les articles 9 et 10 viennent transposer la directive du 7 septembre 2005 relative à la reconnaissance des qualifications professionnelles pour les professeurs de danse et les assistants de service social.

Mesdames, messieurs les sénateurs, la transposition n’est pas faite de manière aveugle. Nous veillons à préserver nos intérêts, ainsi que les garanties qui peuvent être légitimement exigées pour les professions concernées.

Je prendrai un seul exemple. Sans doute un photographe pourra-t-il, demain, exercer les fonctions d’agent de mannequins, ce qui lui était auparavant interdit. Mais il le fera de façon encadrée. Il devra non seulement déposer une demande en vue d’obtenir une licence, en apportant des garanties morales, administratives, juridiques et financières, mais aussi déclarer publiquement ses autres activités professionnelles, ainsi que les mesures qu’il prend pour garantir la défense des intérêts des mannequins qu’il emploie et éviter les conflits d’intérêts. De plus, s’il veut employer un mannequin âgé de moins de seize ans, il lui faudra obtenir une autorisation préalable spécifique.

Nous maintenons donc, dans ce projet de loi, de fortes garanties de nature à empêcher toute dérive.

Ce texte nous permet également de compléter l’adaptation de notre droit à d’autres dispositions du droit européen. Cette fois encore, il s’agit d’éviter de nous exposer à des condamnations financières.

Ainsi l’article 5, que je n’ai pas cité tout à l’heure, complète-t-il la transposition de la directive du 31 mars 2004 relative aux médicaments traditionnels à base de plantes, en nous permettant de tenir les délais prévus. Il va de soi que l’objectif n’est pas d’autoriser la mise sur le marché sans autorisation de nouveaux médicaments de ce type.

Je souhaite m’attarder un instant sur l’article 5 bis, qui adapte notre droit national au règlement du 13 novembre 2007 relatif aux médicaments de thérapie innovante. Je sais en effet qu’il a fait l’objet de longues discussions devant la commission des affaires sociales, ce dont Nora Berra a eu l’occasion de s’entretenir avec vous, madame la rapporteur.

Debut de section - Permalien
Patrick Ollier, ministre

Vous avez manifesté certaines réserves, s’agissant notamment de la possibilité offerte aux établissements hospitaliers de créer en leur sein un établissement pharmaceutique.

Pour tenir compte de vos remarques, madame la présidente, madame la rapporteur, tout en répondant aux besoins des malades, le Gouvernement proposera un amendement visant à mettre en place un encadrement conforme à celui que votre commission a appelé de ses vœux. J’espère que cette solution vous donnera satisfaction.

L’article 5 ter complète la transposition de la directive du 15 février 2006 concernant la gestion de la qualité des eaux de baignade.

L’article 5 quinquies habilite le Gouvernement à mettre en cohérence les dispositions nationales avec celles qui sont prévues par le règlement du 30 novembre 2009 relatif aux produits cosmétiques.

L’article 14 habilite le Gouvernement à transposer la directive du 6 mai 2009 relative au comité d’entreprise européen. Cette directive doit être transposée avant le mois de juin prochain. C’est la raison pour laquelle le vote de ce projet de loi revêt un caractère d’urgence, même s’il va de soi que nous travaillerons en concertation avec les partenaires sociaux.

Enfin, le chapitre III, que mon collègue Éric Besson viendra présenter devant vous, est relatif aux communications électroniques. Il nous permettra en particulier de transposer le nouveau cadre réglementaire européen dit « paquet télécoms », que nous sommes ici un certain nombre à bien connaître.

Debut de section - Permalien
Patrick Ollier, ministre

Mesdames, messieurs les sénateurs, Éric Besson m’a chargé de vous dire qu’il répondrait lui-même, à l’occasion de la discussion des articles, à toutes les questions que vous aurez soulevées lors de la discussion générale.

J’ai dit que ces transpositions étaient urgentes. Le présent projet de loi portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne apporte une réponse efficace à une telle situation. Il nous permet de tenir nos engagements sur le plan du droit communautaire, dans le respect de notre modèle social.

Avant de vous céder la parole, madame la rapporteur, je tiens à vous remercier chaleureusement pour la qualité de votre travail, hommage auquel j’associe Mme et M. les rapporteurs pour avis. Je veux aussi féliciter l’ensemble des membres de la commission des affaires sociales, au premier rang desquels sa présidente, car leur tâche était difficile, compte tenu de la diversité des sujets abordés.

Applaudissements sur les travées de l’UMP, ainsi qu’au banc des commissions.

Debut de section - PermalienPhoto de Colette Giudicelli

Monsieur le président, madame la secrétaire d’État chargée de la santé, mes chers collègues, le projet de loi qui nous est soumis vise à adapter notre législation au droit de l’Union européenne en matière de santé, de travail et de communications électroniques.

Je me bornerai, dans mon intervention, à évoquer ceux des volets du texte qui sont consacrés à la santé et au travail.

En effet, l’examen au fond des articles consacrés aux communications électroniques a été délégué à la commission de l’économie ; celle-ci a désigné Bruno Retailleau comme rapporteur pour avis.

Catherine Morin-Desailly nous présentera ensuite l’avis qu’elle a établi au nom de la commission de la culture, dont l’expertise, en matière de communications et de professions artistiques, enrichira sans nul doute nos débats.

Pour introduire notre discussion, je crois qu’il n’est pas inutile de rappeler le cadre institutionnel dans lequel nous agissons.

Vous savez qu’un État membre ne transposant pas une directive s’expose à être condamné à des amendes et des astreintes dont le montant peut atteindre plusieurs dizaines de millions d’euros.

Malheureusement, la France a accumulé un retard important en matière de transposition. Elle risque d’être condamnée si elle ne remédie pas rapidement à cette situation. M. le ministre Ollier nous a rappelé que l’ensemble du processus devrait être achevé avant le mois de juin 2011, c’est-à-dire dans un peu plus de trois mois.

Le retard concerne tout d’abord la directive Services, dont la transposition aurait dû être achevée dès le mois de décembre 2009. Cette directive vise deux objectifs principaux : lever les obstacles à la liberté d’établissement au sein de l’Union européenne et favoriser la libre prestation de services à l’intérieur du marché unique.

Les mesures de transposition qui doivent encore être adoptées présentent un caractère sectoriel. Le ministre a déjà mentionné les principales activités concernées : les débits de boissons, les organismes de certification des dispositifs médicaux, les entrepreneurs de spectacles vivants, les agences de mannequins et les organismes d’évaluation des établissements sociaux et médico-sociaux.

La directive Services impose, pour plusieurs professions, de remplacer un régime d’autorisation a priori par un régime déclaratif, qui s’accompagnera bien entendu de contrôles.

Les débats animés que nous avons eus en commission des affaires sociales démontrent que les inquiétudes que la directive Services avait fait naître sont loin d’être entièrement dissipées.

Dans sa version définitive, la directive est pourtant bien différente du projet initialement élaboré par la Commission européenne. Le principe du pays d’origine a été abandonné et des garanties ont été apportées pour préserver nos propres services publics.

Néanmoins, la perspective de faciliter l’accès au marché français à des prestataires de services étrangers suscite encore craintes et interrogations. Il en sera question lors de l’examen des amendements. Je ne doute pas que les précisions que vous aurez l’occasion d’apporter, madame la secrétaire d’État, répondront à bien des préoccupations.

J’insiste cependant sur le fait que l’allègement des formalités administratives imposées aux prestataires de services européens devra s’accompagner d’un véritable renforcement tant des contrôles sur le terrain que de la coopération entre administrations nationales, afin d’assurer le maintien du meilleur niveau de sécurité et de qualité pour les consommateurs.

Plusieurs articles du projet de loi visent à achever la transposition dans notre droit d’autres directives. C’est ainsi qu’un article modifie le calendrier d’enregistrement simplifié des médicaments traditionnels à base de plantes. Deux autres sont destinés à parfaire la transposition de la directive du 7 septembre 2005 relative à la reconnaissance des qualifications professionnelles.

Le projet de loi a été substantiellement enrichi au cours de son examen par l’Assemblée nationale, souvent d’ailleurs sur l’initiative du Gouvernement.

Je ne m’attarderai pas sur les mesures très ponctuelles qui ont été adoptées, et sur lesquelles nous aurons l’occasion de nous pencher lors de la discussion des articles.

Je souhaite en revanche mentionner les deux articles d’habilitation que l’Assemblée nationale a introduits dans le texte sur le fondement de l’article 38 de la Constitution.

Le premier permet de légiférer par ordonnance en vue d’harmoniser notre droit avec le règlement européen du 30 novembre 2009 relatif aux produits cosmétiques. Le second autorise la transposition, par voie d’ordonnance, de la directive du 6 mai 2009 réformant le régime du comité d’entreprise européen.

Je sais que certains de mes collègues sont, par principe, opposés au recours aux ordonnances. Je sais aussi que la qualité de la loi pâtit souvent de l’absence d’intervention du législateur.

Toutefois, la commission a jugé que ces deux demandes d’habilitation étaient acceptables, compte tenu du caractère ponctuel, et assez consensuel, des mesures devant être prises. J’ajoute que l’encombrement de l’ordre du jour parlementaire plaide également en faveur d’une telle solution.

Outre ces deux mesures d’habilitation, l’Assemblée nationale a adopté un article visant à adapter au droit communautaire l’encadrement des médicaments issus de technologies innovantes.

Pour le dire franchement, cet article, dans sa rédaction initiale, ne nous avait pas vraiment convaincus : il allait bien au-delà de ce que l’adaptation au règlement exigeait et il aurait autorisé les établissements de santé à se livrer à des activités de production, de prescription, d’utilisation et de commercialisation de médicaments de thérapies innovantes.

En d’autres termes, les établissements de santé auraient pu se transformer en laboratoires pharmaceutiques, alors que, jusqu’à présent, notre législation distingue nettement ces deux activités. Il nous a semblé peu rassurant qu’une même personne puisse fabriquer, commercialiser et prescrire des médicaments, surtout dans le contexte actuel de doute sur la sécurité sanitaire.

Le ministère de la santé a, fort heureusement, entendu nos arguments, de sorte que l’amendement déposé par le Gouvernement permet de répondre à nos objections : il vise à interdire aux établissements de santé de devenir des laboratoires pharmaceutiques, tout en tenant compte du cas particulier d’organismes à but non lucratif comme le Généthon ; il tend à encadrer rigoureusement la fabrication de médicaments de thérapie innovante « à façon », c’est-à-dire pour un malade particulier dans le cadre des établissements de santé. À mon sens, nous pourrons donc finalement trouver un point d’accord sur cette question.

En conclusion, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, je soulignerai que ce projet de loi, en dépit du caractère technique d’un grand nombre de ses dispositions, consolide deux grands principes, affirmés avec force tout au long de la construction de l’Union européenne : la libre prestation de services et la liberté de circulation des travailleurs en Europe. Il aura pour effet de simplifier les formalités devant être remplies par les prestataires européens qui souhaitent s’établir en France ou y proposer leurs services de façon temporaire et occasionnelle.

Naturellement, cette liberté doit être encadrée. La suite de nos débats montrera, pour chaque secteur, l’équilibre qui a été trouvé, entre l’obligation pour la France de se conformer à ses engagements européens et la nécessité d’offrir à nos concitoyens toutes les garanties qu’ils sont en droit d’attendre en matière de santé, de sécurité, de qualité de services ou de normes sociales.

Applaudissements sur les travées de l’UMP, ainsi qu’au banc des commissions.

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Retailleau

Madame la secrétaire d’État, je ne doute pas que le sujet des communications électroniques vous passionne. Je vais m’efforcer, au nom de la commission de l’économie, d’être synthétique.

Comme l’a dit Mme le rapporteur, en règle générale, les parlementaires sont toujours un peu méfiants lorsqu’il s’agit d’autoriser un gouvernement, quel qu’il soit, à prendre par ordonnance des dispositions législatives, puisque celui-ci se substitue en définitive au pouvoir législatif.

Pour ce projet de loi de transposition, notamment pour ce qui concerne les dispositions relatives aux communications électroniques, l’utilisation de cette procédure ne me choque absolument pas. En effet, de bonnes raisons le justifient et de vraies garanties ont été posées.

Au rang des bonnes raisons, figure d’abord le fait qu’il s’agit d’un texte très technique.

La deuxième raison est le délai très court fixé pour la transposition, puisqu’il s’achèvera le 25 mai prochain.

Enfin, la troisième raison est le peu de marge de manœuvre laissée aux États membres pour la transposition en ce qui concerne cette partie du texte.

Dans le même temps, des garanties ont été prises dans la mesure où, , il y aura le projet de loi de ratification : nous aurons toujours le pouvoir de l’amender et nous vérifierons scrupuleusement ce qui aura été fait par le Gouvernement entre-temps.

C’est donc le troisième « paquet télécoms » qui nous est proposé.

Le premier, dans les années quatre-vingt-dix – certains s’en souviennent sans doute – avait ouvert à la concurrence ce secteur important pour notre économie, la libéralisation du marché étant intervenue le 1er janvier 1998. C’était un texte de rupture.

Le deuxième paquet télécoms avait posé le cadre juridique de l’économie numérique. La France l’avait transposé au travers de la loi du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique. C’est une loi très importante, et pas seulement pour les spécialistes, une loi fondatrice pour l’économie numérique, à l’image de ce que fut, pour les médias, la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication.

Ce troisième paquet télécoms, pour ce qui concerne la partie relative aux communications électroniques, ne constitue pas – loin de là – une rupture. Il s’agit plutôt d’un approfondissement, même si ce texte aborde des sujets nouveaux qui, pour autant, n’en sont pas moins importants.

Au titre de l’approfondissement, je voudrais essentiellement souligner le renforcement des pouvoirs du régulateur.

D’abord, il y a l’affirmation d’une meilleure coordination à l’échelon européen, dans le cadre d’une fédération des régulateurs nationaux. Elle aura beaucoup plus de poids que celle qui pouvait prévaloir auparavant dans le cadre de l’Organe des régulateurs européens des télécommunications, l’ORET.

Ensuite, de nouveaux pouvoirs seront confiés au régulateur en matière de sanction et de régulation asymétrique. J’évoquerai également ces nouveaux pouvoirs à propos de la neutralité des réseaux, sujet fondamental à mes yeux.

Enfin, il y a aussi une exigence rehaussée en matière d’indépendance et d’impartialité, et je sais que, à l’article 13, mes chers collègues, nous ne manquerons pas d’en discuter.

Sur la régulation, il faut se féliciter, car c’est important, de ce que l’objectif de la concurrence ne soit plus l’alpha et l’oméga, et que ce paquet télécoms propose en même temps comme objectif au régulateur de garantir la capacité des entreprises à investir. En cela, il conforte ce que j’appellerai la « régulation à la française », dont la finalité dépasse le seul droit de la concurrence et prend en compte d’autres objectifs de politique publique. Outre l’investissement, cela peut être aussi l’aménagement du territoire.

Je ne dresserai pas la liste exhaustive de tous les sujets nouveaux abordés dans ce projet de loi, me bornant à en évoquer trois.

Le premier est la sécurité des réseaux. Au fur et à mesure de l’évolution vers la maturité de l’économie numérique, cette préoccupation est devenue fondamentale.

Le deuxième sujet qui s’impose est la protection des consommateurs, absente du premier paquet télécoms, peu présente lors de la transposition du deuxième paquet et très présente sur ce troisième paquet, signe des temps et d’une évolution qui est, là encore, extrêmement forte.

Il convient de noter l’obligation faite aux opérateurs de donner une meilleure information aux usagers, aux consommateurs.

Il importe aussi de souligner la facilitation du changement d’opérateur avec la fameuse portabilité du numéro, rendue possible pour la téléphonie mobile et qui devrait normalement l’être un jour – mais j’en doute encore – pour le téléphone fixe.

Il faut en outre remarquer le renforcement de l’obligation du consentement préalable pour les internautes – c’est le problème des cookies –, notamment pour tout ce qui concerne la prospection commerciale.

Le troisième sujet nouveau, je le disais tout à l’heure, est fondamental, c’est la neutralité d’internet. C’est une vraie question, largement débattue, sur laquelle le Gouvernement a rendu cet été un rapport important. L’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes, l’ARCEP, a formulé dix recommandations. Des initiatives parlementaires ont été prises, notamment par la commission de la culture et la commission de l’économie du Sénat. Mme Catherine Morin-Desailly et moi-même avons organisé une table ronde à l’automne dernier, et la Commission européenne doit prochainement remettre un Livre blanc sur le sujet.

Il s’agit donc d’une question fondamentale et porteuse d’avenir, mais deux risques symétriques sont présents.

Le premier est la congestion, voire l’embolie des réseaux, compte tenu de l’explosion extraordinaire du trafic. Le trafic par utilisateur double environ tous les deux ans. Ainsi, en 2009, au niveau planétaire, le surcroît de capacité que les opérateurs ont apporté sur le marché est l’équivalent de toutes les capacités qui existaient en 2007.

L’autre risque est le verrouillage de l’accès aux contenus, aux services, aux applications puisque, sous prétexte de gestion du trafic, certains pourraient être tentés par des mesures qui ne seraient ni plus ni moins que du blocage ou, en tout cas, qui ne faciliteraient pas l’accès à internet. Internet, selon moi mais c’est aussi le point de vue de la commission, doit rester un bien stratégique collectif et, en ce sens, demeurer un réseau ouvert.

Il faut se féliciter de ce que le troisième paquet télécoms innove à plusieurs titres sur le sujet de la neutralité.

Premièrement, le principe de la neutralité est consacré comme objectif de régulation.

Deuxièmement, le régulateur se voit attribuer de nouveaux moyens pour faire respecter le principe de la « Net-neutralité ». Des obligations de transparence sont fixées aux opérateurs pour ce qui concerne les pratiques de gestion du trafic. Par ailleurs, le régulateur aura un double pouvoir : celui de fixer une exigence minimale de qualité de service, et il conviendra de s’interroger, par exemple, sur le sens de l’expression « offre illimitée » ; celui de régler par arbitrage les différends opposant opérateurs de réseaux, fournisseurs d’accès, à des fournisseurs de contenus, des prestataires de services internet.

Ces mesures sont nécessaires, elles ne sont pas suffisantes. C’est la raison pour laquelle la commission de l’économie a souhaité introduire une disposition majeure pour conforter la neutralité des réseaux, en ajoutant aux objectifs de régulation de l’ARCEP le principe essentiel de la non-discrimination. C’est une mesure simple, plutôt consensuelle, ce qui est rare lorsque l’on traite de ce sujet, mais elle est susceptible de régler, nous le pensons, une très large partie des problèmes relatifs à la Net-neutralité.

Enfin, la commission a beaucoup travaillé sur le régime des noms de domaine pour répondre à la censure du Conseil constitutionnel. Ce dernier a en effet considéré, à la suite d’une question prioritaire de constitutionnalité, que le législateur n’avait pas suffisamment encadré les règles d’attribution des noms de domaine.

En conclusion, mes chers collègues, ce texte n’est pas une révolution. La vraie révolution, vous le savez, c’est la révolution numérique, qui a toujours un temps d’avance sur les directives et sur les lois nationales. Cela doit nous inciter à être bien sûr modestes, mais en même temps volontaristes, afin que notre pays puisse tirer le meilleur profit en termes d’emploi, d’économie et de culture de cette belle révolution du numérique.

Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Morin-Desailly

Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, si le projet de loi qui nous est présenté aujourd’hui contient essentiellement des dispositions à caractère social, il concerne la commission de la culture, de l’éducation et de la communication à plusieurs titres.

D’abord, il complète la transposition de deux directives ayant une incidence sur deux professions qui nous intéressent.

L’article 7 du projet de loi vise ainsi à permettre aux architectes établis dans un État membre de l’Union européenne ou de l’Espace économique européen d’exercer leur profession en France en tant qu’associés d’une société d’architecture. Cette modification de la loi du 3 janvier 1977 sur l’architecture a aussi été introduite dans la proposition de loi de simplification et d’amélioration de la qualité du droit sur l’initiative de la commission de la culture, qui reste favorable à son adoption.

La seconde directive dont il s’agit de compléter la transposition est celle du 7 septembre 2005 relative à la reconnaissance des qualifications professionnelles et qui concerne ici la profession de professeur de danse. Il s’agit d’autoriser les professeurs de danse ressortissants d’un autre État membre de l’Union européenne à exercer en France sans avoir à justifier de deux ans d’expérience professionnelle lorsqu’ils ont suivi une formation réglementée. C’est une simple mise en conformité du droit français et la commission ne voit pas, là non plus, de difficulté à l’adoption de cette mesure.

Ensuite, le projet de loi habilite le Gouvernement à transposer par voie d’ordonnance le troisième paquet télécoms, les dispositions intégrées dans ces directives devant en effet être applicables en droit français avant le 25 mai 2011.

Aussi étonnant que ce véhicule législatif puisse paraître, il paraît donc nécessaire de l’utiliser. Je tiens malgré tout à souligner qu’il s’agit de l’énième directive que l’on a tardé à transposer et que la pratique du Gouvernement est encore très largement perfectible en la matière.

Cette habilitation se justifie néanmoins, d’une part, parce que le paquet télécoms n’a pas été révolutionné mais simplement aménagé, et, d’autre part, parce que la marge de manœuvre laissée aux États membres est limitée.

En outre, reconnaissons que le Gouvernement a adopté une démarche transparente sur la question, avec une consultation publique et la diffusion de l’avant-projet d’ordonnance.

Celui-ci modifie notamment l’article 42 du code des postes et des communications électroniques, le CPCE, afin de prévoir que l’ARCEP puisse prendre en compte pour l’assignation des fréquences dont elle a la responsabilité « la promotion de la diversité culturelle ou linguistique ainsi que, après avis conforme du Conseil supérieur de l’audiovisuel, le pluralisme des médias ».

Je ne vois pas comment cette disposition pourrait être appliquée, mais, madame la secrétaire d’État, vous pourrez certainement nous donner des précisions à cet égard. En tout cas, nous pouvons nous réjouir que des objectifs culturels puissent être pris en compte par l’ARCEP dans le cadre de sa compétence d’attribution de fréquences.

La commission de la culture, de l’éducation et de la communication sera néanmoins attentive, lors du dépôt du projet de loi de ratification, à ce que le texte contienne toujours la limitation de cette compétence de l’ARCEP aux fréquences dédiées aux télécommunications et l’avis conforme du Conseil supérieur de l’audiovisuel lorsqu’il s’agit d’assurer la réalisation de l’objectif de pluralisme des médias. Plus généralement, elle fera preuve de vigilance pour que les médias conservent une place de choix dans l’attribution globale des fréquences.

Le projet d’ordonnance prévoit également une modification de l’article 34-2 de la loi du 30 septembre 1986, afin d’imposer de nouvelles obligations aux distributeurs de services audiovisuels au profit des personnes aveugles ou malvoyantes. Cette disposition a été déjà été adoptée au Sénat et, je le rappelle, la commission y était favorable.

Bref, la transposition du troisième paquet télécoms par l’article 11 ne pose pas de difficultés à la commission de la culture, qui a donné un avis favorable à son adoption.

Toutefois, dans la mesure où la directive n° 2009/136/CE modifie la directive concernant le traitement des données à caractère personnel et la protection de la vie privée dans le secteur des communications électroniques, la commission a considéré que le présent projet de loi constituait aussi un vecteur intéressant pour faire passer des dispositions qui lui sont chères. Nous en reparlerons au cours de la discussion des articles.

Par ailleurs, la commission de l’économie, par l’intermédiaire de son rapporteur pour avis, qui m’a associée à sa démarche – je l’en remercie –, a introduit dans le texte une disposition fixant dans le CPCE le principe de la neutralité du Net. Bruno Retailleau vient d’en donner la définition tout en rappelant l’enjeu d’une telle mesure. Notre assemblée s’est récemment penchée sur ces sujets : nos deux commissions et le groupe d’études Médias et nouvelles technologies ont en effet organisé une table ronde qui fournira un rapport utile à notre réflexion.

Madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, si le Sénat, comme c’est probable, adopte cet article, il se montrera à la fois réactif et innovant. La commission de la culture a donc été amenée à émettre un avis favorable à l’adoption du projet de loi, sous réserve du vote de son amendement portant article additionnel après l’article 14.

Applaudissements sur les travées de l’Union centriste et de l’UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Mireille Schurch

Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, ma première observation concernant l’examen de ce projet de loi portant diverses dispositions d’adaptation de la législation au droit de l’Union européenne en matière de santé, de travail et de communications électroniques portera sur la forme, laquelle n’est d’ailleurs pas très éloignée du fond.

En effet, je tiens à regretter, avec l’ensemble des sénatrices et sénateurs du groupe CRC-SPG, que, une fois encore, il faille attendre que la France soit pressée de toutes parts par la Commission européenne, que cette dernière la menace de sanctions financières importantes – cela a été dit –, pour que le Gouvernement se décide à transposer dans notre droit interne des mesures contenues dans différentes directives européennes.

Cette réalité ne vous a d’ailleurs pas échappé, madame la secrétaire d’État, puisque, lorsque vous avez présenté ce projet de loi à l’Assemblée nationale, vous avez reconnu : « [Nous] devons mettre notre droit national en conformité avec les obligations résultant du droit communautaire. Nous devons combler les retards de notre pays en matière de transposition de plusieurs directives. Et nous savons bien que nous ne pouvons plus attendre. » M. Ollier vient de nous répéter les mêmes propos.

Et vous avez ajouté, comme pour contraindre les parlementaires à adopter ce texte : « D’abord, ces retards ont un coût pour nos finances publiques [plusieurs dizaines de millions d’euros] Ensuite, ces retards nous mettent dans une forte insécurité juridique, puisque les citoyens de l’Union européenne peuvent désormais attaquer un État pour déficit de transposition. » Tout cela est très juste, mais ne constitue pas pour autant un argument en faveur de l’adoption du projet de loi.

Nous ne devrions pas faire l’économie d’une réflexion d’ampleur sur les causes qui conduisent à de tels retards, lesquels placent, rappelons-le, la France au quinzième rang des pays de l’Union européenne en matière de transposition. En effet, le Parlement ne peut aujourd’hui jouer pleinement son rôle dans ce domaine, comme l’atteste le recours important aux ordonnances prévues par l’article 38 de la Constitution : comme vous l’avez signalé, madame la rapporteur, ces dernières privent les législateurs de la possibilité d’intervenir comme ils le feraient dans un cadre normal.

Madame la secrétaire d’État, je vous accorde que les projets d’ordonnance ont, pour certains d’entre eux, été communiqués. Cela rend d’autant plus critiquable le recours à de tels mécanismes puisque nous aurions pu imaginer que, en lieu et place de cette communication, le Gouvernement intègre ces dispositions par voie d’articles, voire d’amendements, dans le projet de loi. Une transposition plus rapide nous aurait permis d’éviter le recours à de telles mesures.

C’est la raison pour laquelle les sénatrices et sénateurs du groupe CRC-SPG ont déposé un amendement de suppression sur chacun des articles prévoyant le recours aux ordonnances de l’article 38 de la Constitution.

Une meilleure transposition nous aurait d’ailleurs permis d’éviter un autre écueil, celui d’un projet de loi transposant des éléments de directives très diverses. Or, force est de constater que le texte que nous examinons aujourd’hui est quelque peu « fourre-tout ». Il aborde simultanément la question des ventes de boissons à emporter, la réglementation des eaux de baignade, les comités d’entreprises européens ou encore le troisième paquet télécoms. Cette approche disparate n’est pas de nature à garantir un travail parlementaire serein, et je crois que nous sommes nombreux à le regretter.

Si cette situation résulte des retards pris par le Gouvernement en matière de transposition, elle est aussi la conséquence du choix politique de transposer, petit bout par petit bout, la directive n° 2006/123/CE du 12 décembre 2006 relative aux services dans le marché intérieur, plus connue sous le nom de directive Services.

Vous avez en effet fait le choix d’une transposition sectorielle plutôt que transversale. Il résulte de cette situation que vous transposez la directive Services métier par métier. Cette méthode permet d’éviter une transposition unique qui aurait l’inconvénient de devoir faire assumer par votre majorité la contestation par de pans entiers de professionnels d’une directive dont l’unique objectif est de supprimer les entraves actuelles aux principes de la libre concurrence, fondement théorique de votre conception de l’Union européenne.

Pour reprendre vos propres termes, madame la secrétaire d’État, la directive « vise à libérer le potentiel de croissance des marchés de services en Europe en éliminant les obstacles juridiques et administratifs injustifiés qui freinent les échanges dans ce secteur ».

En réalité, derrière cette formule, il s’agit d’adapter les législations nationales à la loi du marché, à faire primer l’économie et ses caprices sur les besoins humains et sociaux. C’est d’ailleurs ce constat qui nous avait conduits à nous opposer en son temps à la directive Services et à refuser, comme la majorité des Français, le projet de Constitution européenne que vous avez imposé et qui consacrait cette prédominance de l’économie.

Cette méthode de transposition est sans doute destinée à éviter que les mécontentements exprimés à l’occasion du référendum de 2005 ne ressurgissent. Vous comprendrez donc que nous ne puissions pas vous accompagner dans ce qui est pour nous la suite du déni de démocratie que constitue la ratification du traité constitutionnel européen par le Gouvernement français, et ce contre la volonté de son peuple.

Lors de l’examen de ce projet de loi à l’Assemblée nationale, vous avez affirmé que la volonté du Gouvernement n’était pas de construire une Europe du « moins-disant social ». Nous ne partageons évidemment pas ce constat, tant les mauvais coups se succèdent dans le secteur privé comme à l’encontre de nos grands services publics nationaux.

Il suffit, pour s’en convaincre, d’observer les différences de réglementations qui existent au sein de l’Union européenne. En effet, la violation ou le défaut de transposition dans un temps donné d’une directive européenne entraîne systématiquement des sanctions financières à l’encontre des pays. Or, vous en conviendrez, les directives en question ont très souvent une dimension économique et visent précisément à consacrer la logique de la libre concurrence et de la sacralisation du monde marchand.

En revanche, la non-mise en conformité d’une législation nationale par rapport aux principes contenus dans la charte des droits sociaux fondamentaux ou la non-adaptation d’un droit interne à la suite d’une décision du Comité européen des droits sociaux, le CEDS, n’entraînent jamais de sanction, et ce pour une simple et bonne raison : ceux qui ont construit cette Europe n’ont pas cru nécessaire de donner une force contraignante à la charte. C’est dire que celle-ci n’a que peu de valeur et qu’elle n’a en réalité qu’une simple portée esthétique, destinée à teinter votre Europe libérale d’une touche de social.

D’un côté, des sanctions financières à l’encontre des États qui entravent votre conception, libérale, de l’économie et, de l’autre, l’absence de mesures à l’encontre des pays dont la législation n’est pas conforme au minimum commun que constitue la charte : comment croire, dans ces conditions, que vous ne souhaitez pas l’instauration d’une Europe du moins-disant social ?

Si j’aborde cette question, madame la secrétaire d’État, c’est à dessein. Vous le savez, à la suite d’une procédure engagée par la Confédération générale du travail conformément au système dit de « réclamation collective », le Comité européen des droits sociaux a estimé, dans une décision en date du 23 juin 2010, que la législation française n’était pas, sur plusieurs points, en conformité avec la charte sociale européenne révisée.

Le CEDS a ainsi précisé, à l’unanimité des membres qui le composent, que le « régime du forfait en jours sur l’année » et les mécanismes assimilant les périodes d’astreintes à des périodes de repos contrevenaient respectivement aux alinéas 1 et 5 de l’article 2 de la charte révisée, ainsi qu’à l’alinéa 2 de son article 4.

Or, en huit mois, le Gouvernement n’a rien fait pour mettre en conformité notre droit avec la décision rendue par le CEDS. La présidente de notre groupe, Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, a adressé à M. le ministre du travail, de l’emploi et de la santé un courrier, le 30 janvier dernier, pour savoir quand et comment le Gouvernement entendait agir. Depuis cette date, il ne s’est passé qu’un délai relativement court et je comprends qu’il n’ait pas encore eu le temps de répondre. Je profite donc de l’occasion pour vous interroger : de quelle manière et quand entendez-vous agir pour que le code du travail soit enfin conforme avec la charte des droits sociaux fondamentaux ?

Tout cela confirme nos craintes quant à ce texte dont l’objectif est, je le rappelle, de transposer des éléments de la directive Services. Sous les apparences d’une entreprise de simplification du droit, cette directive ne recherche que la libéralisation de l’économie et la dérégulation des règles protégeant actuellement les salariés, les acteurs de l’économie, notamment sociale, et les consommateurs.

La meilleure démonstration en est encore donnée par les articles de ce projet de loi visant à réduire les exigences à l’égard des assistants sociaux, quitte à ce que cela ait des conséquences sur la qualité des services proposés, ou bien par l’article 3 qui tend à autoriser les organismes d’évaluation des établissements sociaux et médico-sociaux établis dans un autre État de l’Union européenne à exercer leur activité en France.

Madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, pour toutes ces raisons, et pour celles que nous développerons au cours de la discussion des articles et lors de la défense de nos amendements de suppression, le groupe CRC-SPG votera contre ce projet de loi.

Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Patricia Schillinger

Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, nous examinons aujourd’hui un projet de loi portant diverses dispositions d’adaptation de la législation au droit de l’Union européenne en matière de santé, de travail et de communications électroniques.

Comme d’habitude lorsqu’il s’agit de transposition de directives, le Gouvernement utilise la procédure accélérée et avance la nécessité d’adopter au plus vite le texte, sous peine de sanctions financières. Or c’est en raison de son inaction que la France affiche aujourd’hui un retard important dans la transposition de directives ; comme à chaque fois, c’est dans l’urgence que nous examinons des textes « fourre-tout », qui nuisent à la lisibilité et à la clarté des débats.

Il s’agit donc ici de transposer en droit interne des textes européens, dont la directive Services, dite Bolkestein, très controversée et que nous avons été nombreux à dénoncer. En effet, cette entreprise de simplification des législations nationales a surtout pour but la libéralisation et la dérégulation des services au sens large. Nous serons donc conduits à proposer la suppression de nombreux articles de ce projet de loi.

Mes chers collègues, je souhaite appeler votre attention sur la manière dont procède le Gouvernement.

Contrairement à la majorité des États, qui ont opté pour l’adoption d’une loi « horizontale », c’est-à-dire d’une loi-cadre, d’une loi « globale », la France transpose cette directive européenne secteur par secteur. Parmi les très nombreux textes qui reprennent des éléments de la directive Services, on peut notamment citer la loi de modernisation de l’économie, la loi de développement et de modernisation des services touristiques, la loi portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires, dite loi HPST ou la loi relative aux réseaux consulaires, au commerce, à l’artisanat et aux services, sans oublier la réforme du statut de la société privée européenne.

Le gouvernement français a décidé de ne pas faire une transposition globale pour ne pas relancer le débat sur la libéralisation des services dans leur ensemble. Il nous présente donc une transposition compliquée, quasiment illisible et qui n’a fait l’objet d’aucune concertation. Ainsi, c’est dans l’opacité que se poursuit la révision des textes nationaux. Comme l’indiquait notre ancien collègue Hubert Haenel cité dans le rapport d’information de M. Bizet : « Les modalités de transposition des directives posent un problème de contrôle parlementaire et donc de démocratie. »

Une loi-cadre aurait été nécessaire, car la méthode retenue par le Gouvernement, qui consiste à transposer ce texte par morceaux, constitue un déni de démocratie. On évite le grand débat et on se retrouve avec des textes « fourre-tout », comme celui qui nous est présenté aujourd’hui.

Il est surprenant de voir que le Gouvernement ne propose ni débat politique ni campagne d’information générale, alors que sont en jeu des sujets aussi importants que la santé, le travail et les communications électroniques. Oui, ce sont des sujets essentiels et qui nous concernent tous ! N’oublions pas en effet que cette directive inclut les services fournis aux entreprises et aux consommateurs, les services publics, les services de santé et les services sociaux.

D’une manière générale, presque toutes les directives que vous transposez sont moins protectrices pour nos concitoyens que ne l’est le droit national et elles ne servent pas l’intérêt général. L’Europe devrait protéger. Or on s’aperçoit que le droit communautaire s’impose, déréglemente, prive de protection les citoyens.

Il est difficile de s’y retrouver dans ce texte. On mélange différents sujets, et il est donc impossible d’avoir un débat cohérent, une vue d’ensemble. Cependant, une tendance revient régulièrement : la déréglementation dans tous les secteurs. Cette déréglementation, dont l’objectif théorique est de favoriser la concurrence sur les marchés, peut, comme vous le savez, nuire à l’intérêt général au profit de certaines entreprises, mais elle est surtout cause d’instabilité économique.

À l’article 6 de ce texte, au nom de la libre prestation de services, la transposition de la directive créera une inégalité de traitement entre les entrepreneurs de spectacles établis en France, qui passeront toujours par un régime d’autorisation, et les entrepreneurs de spectacles européens établis hors de France, qui auront seulement à se soumettre à un régime déclaratif. On assiste ici à une concurrence déloyale et, je le répète, on introduit une inégalité de traitement. Ce n’est pas raisonnable ! Sachez en effet que la licence d’entrepreneur de spectacles sert avant tout à empêcher le travail illégal dans le spectacle vivant.

Au nom de la libre prestation de services, l’article 3 vise à modifier le régime d’habilitation des évaluations des établissements sociaux et médico-sociaux pour permettre à des prestataires européens d’exercer de manière temporaire et occasionnelle en France. Ainsi, les organismes établis dans un autre État membre n’auront pas besoin de fournir une habilitation, une simple déclaration d’activité suffira. Comment peut-on être assuré que les organismes d’évaluation des autres États membres affichent le même degré d’exigence que la législation et la réglementation françaises en direction de ces publics fragiles ?

Autre exemple : en matière de reconnaissance des qualifications professionnelles pour les assistants de service social, la déréglementation assouplit, là encore, le régime de qualification. La transposition de la directive abaisse donc le niveau de qualification requis pour exercer cette profession, alors même que ce métier a beaucoup évolué et demande de plus en plus de compétences.

Désormais, tout demandeur ressortissant d’un État membre, détenteur d’un titre de formation, sera dispensé de justifier de deux années d’expérience en tant qu’assistant de service social. Un certain nombre de garanties jusqu’alors exigées ne le seront plus, ce qui fait évidemment peser un risque non négligeable sur les publics pris en charge par les assistants de service social.

La déréglementation présente dans cet article ainsi qu’à l’article 2 relatif aux dispositifs médicaux se fait au détriment de la sécurité des patients. D’une certaine manière, elle organise le désengagement et la déresponsabilisation de l’État.

Concernant la directive Services, on peut dire : sorti par la porte, Bolkestein revient par la fenêtre ! En effet, le principe du pays d’origine, sorti par la grande porte, revient par la fenêtre.

Force est de constater qu’il existe aujourd’hui un grand décalage entre la vision d’une économie intégrée pour l’Union européenne et la réalité vécue par les citoyens européens et les prestataires de services. Triste constat de voir que l’Union européenne « ultralibérale » est devenue une destructrice de la protection sociale.

Le désenchantement des citoyens à l’égard de l’Europe va croissant. On ne peut que les comprendre. Comment convaincre de l’intérêt de l’Europe lorsque celle-ci, sous prétexte de garantir une meilleure concurrence, précarise les travailleurs et les entreprises ?

Tant que les citoyens entendront les mots déréglementation, libéralisation des marchés, restructuration, délocalisation, concurrence accrue, emplois précaires, licenciements, démantèlement des services publics, l’Union européenne ne restera qu’une chimère. D’ailleurs, l’OMC a fait le constat suivant : la libération totale des échanges commerciaux n’a pas empêché la crise financière mondiale ; au contraire, elle semble l’avoir aggravée, notamment en privant les pays de leur protection douanière qui leur permettait de corriger les imperfections du marché de l’import-export.

Les citoyens européens se désintéresseront de l’Europe tant qu’ils auront le sentiment que celle-ci ne les protège pas et que leurs droits sociaux sont menacés. En effet, ils ne trouvent pas leur place dans cette Europe ultralibérale. Et ce texte ne les protège pas sur le plan de la santé et du travail !

Madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, afin que cette Europe puisse être acceptée, nous devons parallèlement construire une Europe sociale. Celle-ci est indispensable pour corriger les injustices de l’économie de marché, dont le but ultime est la recherche absolue du profit, lequel profit se fait la plupart du temps au détriment des intérêts des citoyens. Il est de notre devoir, en tant que parlementaires, de protéger les citoyens !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Marsin

Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, le projet de loi portant diverses dispositions d’adaptation de la législation au droit de l’Union européenne en matière de santé, de travail et de communications électroniques vise à combler le retard de la France dans la transposition de plusieurs directives. En effet, dans ce domaine, notre pays n’est pas un très bon élève puisqu’il se situe au quinzième rang des États membres de l’Union européenne.

Ces retards de transposition ne sont pas sans conséquences. D’autres l’ont rappelé avant moi. Ils créent une forte insécurité juridique, multiplient les risques de procédures contentieuses et, à terme, les risques de sanctions financières lourdes. Surtout, ils fragilisent la position de la France vis-à-vis de la Commission et de nos partenaires.

Quel signal en effet envoyons-nous aux pays candidats ou à ceux qui ont récemment rejoint l’Union européenne et qui ont dû faire des efforts considérables pour absorber l’acquis communautaire afin de satisfaire aux exigences de l’intégration ?

Comment peser dans la négociation d’une nouvelle directive quand la précédente, sur le même sujet, n’est pas encore totalement transposée ?

Ces retards incitent aussi le Gouvernement à recourir aux ordonnances pour transposer rapidement des textes à caractère législatif, sans les garanties qu’apporte bien évidemment l’examen parlementaire. Nous avons eu, dans le passé, à adopter des projets de loi d’habilitation. Le texte que nous examinons aujourd’hui n’échappe malheureusement pas à ce travers, comme en témoigne d’ailleurs l’article 11 sur le troisième paquet télécoms, mais nous y reviendrons.

Dysfonctionnement des administrations placées au service de l’État, manque de volonté politique du Gouvernement ou encombrement chronique de l’ordre du jour des assemblées parlementaires : chacun explique à sa manière les mauvaises performances de notre pays en matière de transposition du droit communautaire. Quoi qu’il en soit, il conviendrait de formuler quelques propositions pour y remédier de manière durable. Pas plus que les ordonnances, le recours aux projets de loi portant diverses dispositions d’adaptation au droit communautaire ou la transposition fragmentée dans plusieurs textes ne sont des solutions satisfaisantes.

Je rappelle d’ailleurs que le Sénat avait adopté en 2001, sur l’initiative de notre collègue Aymeri de Montesquiou, deux propositions de loi, l’une imposant au Gouvernement de transmettre au Parlement une étude d’impact sur les projets d’actes de l’Union européenne, ainsi qu’un échéancier de transposition des directives, l’autre visant à réserver une séance par mois à ces transpositions, dont l’ordre du jour serait fixé par le Gouvernement ou, à défaut, par chaque assemblée. Ces textes répondaient à la fois à des obligations juridiques impérieuses et à des considérations pratiques. Il est dommage qu’ils n’aient pas rencontré un écho favorable à l’Assemblée nationale.

J’en viens au projet de loi que nous examinons aujourd’hui. Il est l’exemple même de ce que je viens de regretter. Il s’agit d’un texte « fourre-tout », achevant la transposition de directives d’importance majeure et aussi diverses que la directive Services, la directive Reconnaissance des qualifications professionnelles, la directive Médicament, le troisième paquet télécoms, auxquels s’ajoutent des dispositions qui ne semblent pas être imposées par le droit communautaire. Difficile pour un néophyte de suivre ! Néanmoins, j’aimerais faire quelques remarques.

Sur la directive Services, je mesure le travail considérable réalisé par les administrations concernées pour recenser toutes les réglementations qui n’étaient pas compatibles avec cette directive et concevoir les mesures d’adaptation appropriées. Mais j’avoue que cette transposition interminable, fragmentée dans plusieurs textes, comme la loi de modernisation de l’économie, la loi HPST, ou, plus récemment, la loi relative aux réseaux consulaires, au commerce, à l’artisanat et aux services, conduit à noyer le débat sur un texte pourtant particulièrement sensible.

Chacun se souvient ici des conditions difficiles dans lesquelles la directive a été adoptée et des craintes qu’elle a suscitées chez nos concitoyens. Loin d’être un simple exercice technique, la transposition du texte dans notre droit aurait dû être l’occasion de poser clairement un certain nombre de questions, notamment sur le périmètre concret des services d’intérêt général. Une loi-cadre eût peut-être été préférable pour la tenue d’un tel débat.

Sur le fond, le groupe RDSE a également des réserves. Comme l’a relevé Mme le rapporteur elle-même, certains articles du projet de loi peuvent susciter des craintes parfaitement légitimes. C’est le cas notamment des articles 2, 2 bis et 3, sur lesquels nous avons déposé des amendements de suppression.

Il s’agit de permettre à des organismes établis dans un autre État membre de venir exercer en France pour la certification des dispositifs médicaux et l’évaluation des établissements et services sociaux et médico-sociaux, lesquelles sont aujourd’hui exclusivement le fait d’organismes habilités par l’ANESM, l’Agence nationale de l’évaluation et de la qualité des établissements et services sociaux et médico-sociaux, ou l’AFSSAPS, l’Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé.

Loin de nous l’idée de jeter l’opprobre sur quelque organisme que ce soit ou de nous opposer par principe à la libre prestation de services, mais nous sommes soucieux, dans le domaine social, sanitaire et médical, de garder un haut niveau de qualité, de compétence et de sécurité. Comment nous assurer que les organismes établis dans un autre État membre répondent aux mêmes exigences ?

Nous estimons que la France aurait pu invoquer les « raisons impérieuses d’intérêt général » prévues dans la directive. Nous regrettons donc vivement que les services sociaux d’intérêt général ne soient pas exclus du champ de la directive.

Le Gouvernement nous propose également, madame la secrétaire d’État, la transposition par voie d’ordonnance du troisième paquet télécoms. Certes, il a transmis le projet d’ordonnance. Il n’en demeure pas moins que le Parlement en est réduit à se défaire de ses prérogatives législatives, ce qui est loin d’être satisfaisant.

Notre assemblée a effectué un travail important sur le sujet, comme en témoigne notamment l’adoption en mars 2010 par le Sénat de la proposition de loi visant à mieux garantir le droit à la vie privée à l’heure du numérique et, en décembre dernier, sur mon initiative et celle de mes collègues du groupe RDSE, de la proposition de loi relative aux télécommunications.

Le troisième paquet télécoms contient de nombreuses dispositions qui rejoignent nos préoccupations. Je pense en particulier au principe de neutralité des réseaux, qui vise à empêcher les opérateurs de brider ou limiter l’accès de leurs clients à internet. Je pense aussi à la protection des consommateurs, de leur vie privée.

Tous ces sujets méritaient une véritable discussion, que ne permet pas le recours à une ordonnance. Je reviendrai naturellement sur cette question, comme sur celle de la présence d’un commissaire du Gouvernement auprès de l’ARCEP, au moment de l’examen des articles.

Madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, le groupe RDSE sera très attentif aux évolutions qui résulteront de nos débats et au sort qui sera réservé à certains de nos amendements pour déterminer son vote final.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente.

La séance est suspendue.

La séance, suspendue à dix-neuf heures trente, est reprise à vingt-et-une heures trente, sous la présidence de M. Roland du Luart.