La séance est ouverte à quatorze heures trente.
Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.
L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, de financement de la sécurité sociale pour 2019 (projet n° 106, rapport n° 111 [tomes I à III], avis n° 108).
Dans la discussion des articles, nous poursuivons, au sein du chapitre Ier du titre Ier de la troisième partie, l’examen de l’article 8.
TROISIÈME PARTIE
DISPOSITIONS RELATIVES AUX RECETTES ET À L’ÉQUILIBRE DE LA SÉCURITÉ SOCIALE POUR L’EXERCICE 2019
TITRE Ier
DISPOSITIONS RELATIVES AUX RECETTES, AU RECOUVREMENT ET À LA TRÉSORERIE
Chapitre Ier
Mesures en faveur du soutien à l’activité économique et des actifs
I. – Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° A
1° Le second alinéa du I de l’article L. 133-1 est ainsi modifié :
a) À la fin de la deuxième phrase, les mots : « ou par l’agent chargé du contrôle mentionné à l’article L. 724-7 du code rural et de la pêche maritime » sont supprimés ;
b) La dernière phrase est complétée par les mots : « ou par l’agent chargé du contrôle mentionné à l’article L. 724-7 du code rural et de la pêche maritime » ;
2° L’article L. 241-2-1 est ainsi modifié :
a) Les mots : « mentionnées au 1° du II l’article L. 241-2 » sont remplacés par les mots : « d’assurance maladie » ;
b) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« La réduction est également applicable aux rémunérations des salariés mentionnés aux 3° ou 6° de l’article L. 5424-1 du code du travail affiliés à un régime mentionné à la section 1 du chapitre Ier du titre Ier du livre VII du présent code. » ;
3° À la seconde phrase du deuxième alinéa de l’article L. 241-5, après le mot : « mentionnée », sont insérés les mots : « au III de l’article L. 241-10 et » ;
4° L’article L. 241-6-1 est ainsi modifié:
a) Les mots : « mentionnées au 1° de l’article L. 241-6 » sont remplacés par les mots : « d’allocations familiales » ;
b) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« La réduction est également applicable aux rémunérations des salariés mentionnés au 3° de l’article L. 5424-1 du code du travail affiliés à un régime mentionné à la section 1 du chapitre Ier du titre Ier du livre VII du présent code. » ;
5° L’article L. 241-6-4 est abrogé ;
6° Le III de l’article L. 241-10 est ainsi modifié :
a) Après le 3°, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :
« Les structures mentionnées aux 1° et 3°, lorsqu’elles constituent des employeurs de droit privé, sont en outre exonérées, pour les rémunérations versées aux aides à domicile employées dans les conditions définies au premier alinéa du III, de la contribution mentionnée au 1° de l’article L. 14-10-4 du code de l’action sociale et des familles, des contributions mentionnées à l’article L. 834-1 du présent code, des cotisations dues au titre des accidents du travail et des maladies professionnelles à hauteur du taux fixé par l’arrêté mentionné à la seconde phrase du deuxième alinéa de l’article L. 241-5, des cotisations à la charge de l’employeur dues au titre des régimes de retraite complémentaire et des contributions à la charge de l’employeur dues au titre de l’assurance chômage prévues à l’article L. 5422-9 du code du travail.
« Pour les structures mentionnées au cinquième alinéa du présent III, lorsque la rémunération est inférieure à un seuil égal au salaire minimum de croissance annuel majoré de 20 %, le montant de l’exonération est égal au montant des cotisations et contributions à la charge de l’employeur. À partir de ce seuil, la part de la rémunération sur laquelle est calculée l’exonération décroît et devient nulle lorsque la rémunération est égale au salaire minimum de croissance annuel majoré de 60 %. » ;
b) Au cinquième alinéa, les mots : « Cette exonération s’applique » sont remplacés par les mots : « Ces exonérations s’appliquent » ;
7° L’article L. 241-11 est abrogé ;
8° Le VII de l’article L. 241-13 est complété par deux alinéas ainsi rédigés :
« Pour les salariés expatriés mentionnés au a de l’article L. 5427-1 du code du travail et les salariés mentionnés au e du même article L. 5427-1, le montant de la réduction s’impute en outre, selon les mêmes règles, sur les cotisations recouvrées par l’institution mentionnée à l’article L. 5312-1 du même code.
« Pour les salariés mentionnés à l’article L. 133-9 du présent code, le montant de la réduction s’impute en outre, selon les mêmes règles, sur les cotisations recouvrées par l’organisme de recouvrement habilité par l’État en application du même article L. 133-9. » ;
9° Au début du II de l’article L. 243-6-1, les mots : « Le I est également applicable lorsque le cotisant » sont remplacés par les mots : « La procédure d’arbitrage prévue au I est également applicable lorsque le cotisant, qu’il possède un ou plusieurs établissements, » ;
9° bis
9° ter
10° L’article L. 752-3-2 est ainsi modifié :
a) Les I à IV sont ainsi rédigés :
« I. – En Guadeloupe, en Guyane, en Martinique, à La Réunion, à Saint-Barthélemy et à Saint-Martin, les employeurs, à l’exclusion des entreprises publiques et établissements publics mentionnés à l’article L. 2233-1 du code du travail et des particuliers employeurs, sont exonérés du paiement des cotisations et contributions mentionnées au I de l’article L. 241-13 du présent code dans les conditions définies au présent article.
« II. – L’exonération s’applique :
« 1° Aux employeurs occupant moins de onze salariés. Si l’effectif vient à atteindre ou dépasser le seuil de onze salariés, le bénéfice intégral de l’exonération est maintenu dans la limite des onze salariés précédemment occupés ou, en cas de départ, remplacés. Un décret fixe les conditions dans lesquelles le bénéfice de l’exonération est acquis dans le cas où l’effectif passe au-dessous de onze salariés ;
« 2° Quel que soit leur effectif, aux employeurs des secteurs du bâtiment et des travaux publics, de l’industrie, de la restauration, de la presse, de la production audiovisuelle, de l’environnement, de l’agronutrition, des énergies renouvelables, des nouvelles technologies de l’information et de la communication et des centres d’appel, de la pêche, des cultures marines, de l’aquaculture, de l’agriculture, du tourisme, de la restauration de tourisme y compris les activités de loisirs s’y rapportant, de l’hôtellerie, de la recherche et du développement, ainsi qu’aux entreprises bénéficiaires du régime de perfectionnement actif défini à l’article 256 du règlement (UE) n° 952/2013 du Parlement européen et du Conseil du 9 octobre 2013 établissant le code des douanes de l’Union ;
« 3°
« a) La liaison entre la métropole et la Guadeloupe, la Guyane, la Martinique, La Réunion, Saint-Barthélemy et Saint-Martin ;
« b) La liaison entre ces départements ou collectivités, ainsi qu’entre La Réunion et Mayotte ;
« c) La desserte intérieure de la Guadeloupe, de la Guyane, de la Martinique, de La Réunion, de Saint-Barthélemy ou de Saint-Martin.
« Seuls sont pris en compte les personnels des employeurs concourant exclusivement aux dessertes mentionnées au c du présent 3° et affectés dans des établissements situés dans l’un de ces départements, à Saint-Barthélemy ou à Saint-Martin ;
« 4°
« III. – A. – Pour les employeurs mentionnés aux 1°, 3° et 4° du II et ceux mentionnés au 2° du même II relevant des secteurs du bâtiment et des travaux publics, de la presse et de la production audiovisuelle, lorsque le revenu d’activité de l’année tel qu’il est pris en compte pour la détermination de l’assiette des cotisations définie à l’article L. 242-1 est inférieur à un seuil égal au salaire minimum de croissance annuel majoré de 30 %, le montant de l’exonération est égal au montant des cotisations et contributions à la charge de l’employeur, mentionnées au I de l’article L. 241-13. À partir de ce seuil, la part du revenu d’activité annuel sur laquelle est calculée l’exonération décroît et devient nulle lorsque le revenu d’activité est égal au salaire minimum de croissance annuel majoré de 100 %.
« B. – Pour les employeurs, quel que soit leur effectif, relevant des secteurs mentionnés au 2° du II, à l’exception des secteurs du bâtiment et des travaux publics, de la presse et de la production audiovisuelle, et pour les entreprises bénéficiaires du régime de perfectionnement actif défini à l’article 256 du règlement (UE) n° 952/2013 du Parlement européen et du Conseil du 9 octobre 2013 précité, lorsque le revenu d’activité de l’année est inférieur à un seuil égal au salaire minimum de croissance annuel majoré de 40 %, le montant de l’exonération est égal au montant des cotisations et contributions à la charge de l’employeur mentionnées au I de l’article L. 241-13. À partir de ce seuil, la part du revenu d’activité annuel sur laquelle est calculée l’exonération décroît et devient nulle lorsque le revenu d’activité est égal au salaire minimum de croissance annuel majoré de 140 %.
« IV. – Le montant de la réduction est calculé chaque année civile, pour chaque salarié et pour chaque contrat de travail, en fonction des revenus d’activité tels qu’ils sont pris en compte pour la détermination de l’assiette des cotisations définie à l’article L. 242-1.
« Pour les salariés qui ne sont pas employés à temps plein ou qui ne sont pas employés sur toute l’année, la valeur du salaire minimum de croissance prise en compte pour la détermination de l’exonération est celle qui correspond à la durée de travail prévue au contrat au titre de la période pendant laquelle ils sont employés.
« Lorsque les exonérations mentionnées au III sont décroissantes, le montant de celles-ci est déterminé par l’application d’une formule de calcul définie par décret. La valeur maximale du taux de l’exonération est fixée par décret, dans la limite de la somme des taux des cotisations mentionnées au I pour une rémunération égale au salaire minimum de croissance. » ;
b) Le VIII est abrogé.
I bis
II. – Le chapitre Ier du titre IV du livre VII du code rural et de la pêche maritime est ainsi modifié :
1° L’article L. 741-5 est abrogé ;
2°
a) Le I est ainsi modifié :
– le premier alinéa est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :
« I. – Les employeurs relevant du régime de protection sociale des professions agricoles sont exonérés des cotisations mentionnées au I de l’article L. 241-13 du code de la sécurité sociale pour les travailleurs occasionnels qu’ils emploient.
« Pour l’application du premier alinéa du présent I, les cotisations à la charge de l’employeur dues au titre des régimes de retraite complémentaire légalement obligatoires mentionnés à l’article L. 921-4 du code de la sécurité sociale figurant à l’article L. 241-13 du même code sont remplacées par les cotisations de la retraite complémentaire obligatoire des salariés versées aux institutions de retraite complémentaire mentionnées à l’article L. 727-2 du présent code. » ;
– après le deuxième alinéa, sont insérés trois alinéas ainsi rédigés :
« Cette exonération est déterminée conformément à un barème dégressif linéaire fixé par décret.
« Pour les cotisations dues au titre des rémunérations versées à compter du 1er janvier 2019, l’exonération est totale pour une rémunération mensuelle inférieure ou égale au salaire minimum de croissance majoré de 15 % et devient nulle pour une rémunération mensuelle égale ou supérieure au salaire minimum de croissance majoré de 60 %.
« Pour les cotisations dues au titre des rémunérations versées à compter du 1er janvier 2020, l’exonération est totale pour une rémunération mensuelle inférieure ou égale au salaire minimum de croissance majoré de 10 % et devient nulle pour une rémunération mensuelle égale ou supérieure au salaire minimum de croissance majoré de 60 %. » ;
– la première phrase du troisième alinéa est supprimée ;
b) Au VII, les mots : « l’exonération prévue à l’article L. 741-5 du présent code et de » sont supprimés ;
3° Le même article L. 741-16 est abrogé le 1er janvier 2021 ;
4° L’article L. 741-16-1 est abrogé.
III. – L’article L. 5553-11 du code des transports est ainsi modifié :
1° Les mots : « battant pavillon français » sont remplacés par les mots : « dirigés et contrôlés à partir d’un établissement stable situé sur le territoire français, battant pavillon français ou d’un autre État membre de l’Union européenne, d’un État partie à l’accord sur l’Espace économique européen ou de la Confédération suisse, et » ;
2° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Le bénéfice des exonérations prévues au premier alinéa est conditionné au fait que les membres de l’équipage des navires sur lesquels des marins sont concernés par l’exonération sont, dans une proportion d’au moins 25 %, des ressortissants d’un État membre de l’Union européenne, d’un État partie à l’accord sur l’Espace économique européen ou de la Confédération suisse. Cette proportion est calculée sur la base de la fiche d’effectif et s’apprécie sur l’ensemble de la flotte composée des navires embarquant au moins un marin pour lequel l’employeur bénéficie de l’exonération prévue au présent article. »
IV. – Le code du travail est ainsi modifié :
1° Au début du 1° de l’article L. 5134-31, les mots : « Des cotisations » sont remplacés par les mots : « Pour les personnes morales mentionnées aux 1° et 2° de l’article L. 5134-21, des cotisations » ;
2° Après le mot : « prévus », la fin du premier alinéa de l’article L. 5134-59 est ainsi rédigée : « à l’article L. 241-13 du code de la sécurité sociale. » ;
3° À la fin de la seconde phrase de l’article L. 6227-8, la référence : « au second alinéa du II de l’article L. 6243-2 » est remplacée par la référence : « à l’article L. 6243-3 » ;
4° Après le même article L. 6227-8, il est inséré un article L. 6227-8-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 6227 -8 -1. – L’employeur de l’apprenti est exonéré de la totalité des cotisations sociales d’origine légale et conventionnelle qui sont à sa charge, à l’exclusion de celles dues au titre des accidents du travail et des maladies professionnelles. » ;
5° L’article L. 6243-2 est ainsi rédigé :
« Art. L. 6243 -2. – L’apprenti est exonéré de la totalité des cotisations salariales d’origine légale et conventionnelle pour la part de sa rémunération inférieure ou égale à un plafond fixé par décret. » ;
6° Les quatre premiers alinéas de l’article L. 6243-3 sont supprimés ;
7° L’article L. 6261-1 est abrogé ;
8° La section 5 du chapitre V du titre II du livre III de la sixième partie est abrogée ;
9°
IV bis
V. – L’article 20 de la loi n° 2013-1203 du 23 décembre 2013 de financement de la sécurité sociale pour 2014 est ainsi modifié :
1° Le II est abrogé ;
2° Au début du 1° du A du IV, les mots : « Des cotisations » sont remplacés par les mots : « Pour les employeurs publics mettant en place des ateliers et chantiers d’insertion conventionnés par l’État en application de l’article L. 5132-15 dudit code, des cotisations ».
VI. – A. – Pour les rémunérations dues au titre des salariés relevant de l’article L. 241-13 du code de la sécurité sociale, la valeur maximale du coefficient mentionné au troisième alinéa du III du même article L. 241-13 est limitée, pour l’année 2019, à la somme des taux des cotisations et des contributions mentionnées au I dudit article L. 241-13, à l’exception des contributions à la charge de l’employeur dues au titre de l’assurance chômage prévues à l’article L. 5422-9 du code du travail.
Pour les rémunérations de ces salariés, un coefficient limité au taux des contributions à la charge de l’employeur dues au titre de l’assurance chômage prévues au même article L. 5422-9 s’ajoute, pour la période du 1er octobre au 31 décembre 2019, au coefficient mentionné au premier alinéa du présent A.
Chacun des coefficients mentionnés aux deux premiers alinéas du présent A est calculé, en fonction de la rémunération annuelle totale prise en compte pour la détermination de l’assiette des cotisations définie à l’article L. 242-1 du code de la sécurité sociale.
B. – Le A n’est pas applicable aux rémunérations dues pour des salariés employés :
1° Par les associations intermédiaires mentionnées à l’article L. 5132-7 du code du travail et par les ateliers et chantiers d’insertion mentionnés à l’article L. 5132-15 du même code ;
2° Au titre des contrats d’apprentissage mentionnés à l’article L. 6221-1 du code du travail et des contrats de professionnalisation mentionnés à l’article L. 6325-1 du même code conclus avec des demandeurs d’emploi de quarante-cinq ans et plus ou conclus par les groupements d’employeurs pour l’insertion et la qualification mentionnés à l’article L. 1253-1 dudit code ;
3° Par les employeurs occupés aux activités mentionnées aux 1° à 4° de l’article L. 722-1 du code rural et de la pêche maritime ;
4° Par les employeurs localisés en Guadeloupe, en Guyane, en Martinique, à La Réunion, à Saint-Barthélemy et à Saint-Martin.
VII. – Le présent article entre en vigueur le 1er janvier 2019. L’article L. 243-6-1 du code de la sécurité sociale dans sa rédaction résultant du 9° du I s’applique aux contrôles engagés à compter du 1er janvier 2019.
Par dérogation au premier alinéa du présent VII, les dispositions de l’article L. 5553-11 du code des transports dans sa rédaction résultant du III entrent en vigueur dès lors que la Commission européenne a confirmé que celles-ci sont compatibles avec le droit de l’Union européenne.
Je suis saisi de quinze amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L’amendement n° 123 rectifié bis est présenté par MM. Kennel, Grosperrin et Pellevat, Mme Puissat, MM. Bizet, Bazin et Bascher, Mme Bruguière, M. Mouiller, Mmes Lopez et Bonfanti-Dossat, M. Danesi, Mme Deromedi, M. Pierre, Mmes Bories et Thomas, MM. Huré, de Nicolaÿ, Chatillon et Brisson et Mme Keller.
L’amendement n° 389 rectifié est présenté par Mme Grelet-Certenais, MM. Daudigny et Kanner, Mmes Féret et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lubin, Meunier et Rossignol, M. Tourenne, Mmes Van Heghe et Blondin, M. Fichet, Mmes G. Jourda et Artigalas, M. Dagbert, Mmes Perol-Dumont, Préville et Guillemot, M. Magner, Mmes S. Robert et Monier, MM. Kerrouche, Tissot, Antiste, J. Bigot, P. Joly, Mazuir et Jacquin, Mme Bonnefoy, M. Duran et les membres du groupe socialiste et républicain.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
I. – Alinéas 47 à 61
Supprimer ces alinéas.
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
III. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Cyril Pellevat, pour présenter l’amendement n° 123 rectifié bis.
La parole est à Mme Nadine Grelet-Certenais, pour présenter l’amendement n° 389 rectifié.
L’actuel dispositif « travailleurs occasionnels-demandeurs d’emploi », ou TO-DE, permet aux employeurs qui embauchent, en CDD, des travailleurs saisonniers de bénéficier d’une exonération de cotisations patronales de sécurité sociale.
Bien que ce dispositif ait été modifié par l’Assemblée nationale grâce à l’adoption d’un amendement du Gouvernement visant à instaurer un dispositif dit « d’atténuation » et transitoire sur 2019 et 2020, nous proposons purement et simplement de revenir au régime pérenne dont bénéficiait jusqu’ici le secteur agricole, notamment l’arboriculture, le maraîchage ou encore la viticulture, qui emploient massivement des travailleurs saisonniers.
Il serait facile de reprendre les termes de notre cher ministre de l’agriculture, qui critiquait en septembre dernier, sur ces mêmes travées, cette « mesure technocratique et mortifère » lors d’une question d’actualité au Gouvernement !
Car le compte n’y est toujours pas.
Monsieur le ministre, votre disposition, en l’état, déstabilisera de nombreuses exploitations, d’autant que le coût de la main-d’œuvre correspond pour ces cultures à plus de 60 % du coût de production, et ce même si l’Assemblée nationale a décidé de réintroduire l’exonération jusqu’à 1, 15 SMIC avec un point de sortie à 1, 6 SMIC. Comment, en effet, régler le problème de l’important recours aux heures supplémentaires ? Nous savons tous qu’en raison de la courte saisonnalité de ces produits les semaines sont très chargées et dépassent allègrement les trente-cinq heures légales.
Il est tout de même étonnant de constater que le Gouvernement souhaite ici saper une mesure favorable à la compétitivité de nos agriculteurs.
Nous souhaitons donc maintenir le dispositif TO–DE dans son régime actuel et de façon pérenne, pour permettre à nos agriculteurs de faire face à la concurrence internationale et au dumping. Le système a fait la preuve de son efficacité pour lutter contre le travail clandestin. En restant sur vos positions, monsieur le ministre, vous risquez de fragiliser, voire de mettre en péril nombre d’exploitations agricoles qui n’ont vraiment pas besoin de cela.
C’est aussi prendre le risque d’accroître, ici et là, le malaise agricole en remettant en question l’un des piliers de l’emploi dans nos territoires ruraux. Pour 40 millions d’euros, qui, rapportés au budget total du projet de loi de financement de la sécurité sociale, semblent bien dérisoires, le Gouvernement s’accroche et ne veut pas concéder son erreur, au mépris des réalités profondes et complexes du travail et du secteur agricoles.
Après la très décevante loi ÉGALIM, la loi pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous, c’est un nouveau signal négatif que vous envoyez à nos agriculteurs.
C’est pourquoi je vous demande, mes chers collègues, de bien vouloir voter le retour au dispositif actuel d’exonération pour les travailleurs saisonniers.
M. Laurent Duplomb et Mme Martine Filleul applaudissent.
L’amendement n° 623, présenté par M. Vanlerenberghe, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 47
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…° Au premier alinéa du I de l’article L. 712-1, la référence : « L. 741-5 » est remplacée par la référence : « L. 741-7 » ;
La parole est à M. le rapporteur général.
Les quatre amendements suivants sont identiques.
L’amendement n° 160 rectifié bis est présenté par MM. Vaspart, Babary et Vogel, Mme Berthet, MM. Perrin, Raison, Darnaud et Courtial, Mme Gruny, M. J.M. Boyer, Mme Bruguière, MM. Magras, Sido, de Nicolaÿ et Paul, Mmes Duranton, Deromedi et Bonfanti-Dossat et MM. Brisson, H. Leroy, Mouiller et Gremillet.
L’amendement n° 308 rectifié est présenté par M. Antiste, Mmes Conconne et Jasmin, M. P. Joly, Mme G. Jourda, M. Tourenne, Mme Ghali, M. Lalande, Mmes Conway-Mouret, Grelet-Certenais, Artigalas et Perol-Dumont, M. Mazuir et Mme Guillemot.
L’amendement n° 324 est présenté par M. Montaugé.
L’amendement n° 573 rectifié bis est présenté par Mme N. Delattre, MM. Arnell et A. Bertrand, Mme M. Carrère, MM. Castelli, Collin, Corbisez, Gabouty, Gold et Guérini, Mmes Guillotin et Jouve, MM. Menonville, Requier, Roux et Vall et Mme Costes.
Ces quatre amendements sont ainsi libellés :
I. – Alinéa 52
Après les mots :
professions agricoles
insérer les mots :
et les entreprises mentionnées au 1° de l’article L. 722-2 du code rural et de la pêche maritime
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Michel Vaspart, pour présenter l’amendement n° 160 rectifié bis.
Il s’agit de corriger une injustice.
L’objet du présent amendement est en effet de rétablir l’exonération de cotisations patronales pour l’emploi de travailleurs occasionnels et de demandeurs d’emploi pour les entreprises réalisant des travaux agricoles en tant que prestataires extérieurs.
Les entreprises de travaux agricoles sont exclues de ce dispositif depuis 2015 et cette perte n’a jamais été atténuée par le recours au dispositif « bas salaire » – réduction dite « Fillon » –, malgré les projections du gouvernement de l’époque.
Ces entreprises ne comprennent pas pourquoi l’exonération ne s’appliquerait pas aux travaux agricoles qu’elles réalisent pour le compte des exploitants agricoles.
La parole est à Mme Catherine Conconne, pour présenter l’amendement n° 308 rectifié.
Je présente l’amendement au nom de son premier signataire, mon collègue Maurice Antiste. Même argumentaire que pour l’amendement précédent, même combat, même débat, mêmes besoins.
Les agriculteurs méritent également notre attention. Monsieur le ministre, cher Didier Guillaume, vous ne pouvez pas rester insensible à cette demande, au vu de leurs difficultés quotidiennes et de la pression qui est exercée sur le monde agricole.
La parole est à M. Franck Montaugé, pour présenter l’amendement n° 324.
C’est un amendement de justice et d’équité, que je défendrai avec les mêmes arguments que ceux qu’ont développés mes collègues.
Sur certains territoires, c’est le cas du mien, les entreprises de travaux agricoles se développent. Elles participent de la stratégie de certaines exploitations. C’est une forme de mutualisation sur certains territoires et pour certains types de travaux. Leur coût, évidemment, est répercuté dans celui des exploitations qui font appel à elles. Au bout du compte, tout cela constitue le revenu de l’exploitant agricole qui en est le commanditaire et l’utilisateur.
Il y a quelque temps, nous avons débattu ici d’une loi dont l’objectif premier était de redonner du revenu aux producteurs.
Si la mesure que nous appelons ici de nos vœux était adoptée, cela constituerait, même si ce n’est qu’à la marge – il faut le dire aussi –, un petit surcroît de revenus pour les producteurs.
Voilà pourquoi je vous appelle à voter cet amendement.
La parole est à Mme Nathalie Delattre, pour présenter l’amendement n° 573 rectifié bis.
Il y a plusieurs sujets sur les travailleurs saisonniers ou occasionnels. Nous en avons parlé hier longuement et je me suis déjà exprimée sur ce sujet.
L’amendement que je vous propose ici vise à loger tout le monde à la même enseigne : entreprises agricoles et entreprises de prestations agricoles. La situation actuelle de ces dernières est particulièrement injuste : elles réalisent des travaux semblables, ont recours bien souvent au même type de main-d’œuvre, mais elles ne sont pas éligibles au même dispositif.
En 2015, le Gouvernement sortait ces entreprises du dispositif conçu pour les TO-DE en avançant des projections qui se sont révélées erronées, le raisonnement étant que le dispositif « bas salaires » - la réduction « Fillon » - allait prendre le relais et compenser. Cela n’a pas été le cas.
Je propose donc que nous soyons cohérents en adoptant cet amendement.
Les trois amendements suivants sont identiques.
L’amendement n° 195 rectifié bis est présenté par M. Duplomb, Mme Férat, MM. D. Laurent, J.M. Boyer, Babary, Bazin et Bas, Mmes Berthet et Billon, M. Bonhomme, Mme Bonfanti-Dossat, M. Bonnecarrère, Mme Bories, M. Brisson, Mme Bruguière, MM. Buffet et Canevet, Mme Chain-Larché, MM. Cardoux, Charon, Chatillon, Chevrollier, Cigolotti, Cornu, Courtial, Cuypers, Dallier et Darnaud, Mme de la Provôté, M. de Nicolaÿ, Mme Deseyne, M. Détraigne, Mmes Deromedi et Di Folco, M. D. Dubois, Mme Duranton, M. Émorine, Mme Estrosi Sassone, M. Genest, Mme Goy-Chavent, MM. Gremillet et Grand, Mmes Gatel, N. Goulet et Gruny, M. Guené, Mme Guidez, MM. Henno, L. Hervé, Houpert, Hugonet et Husson, Mmes Imbert et G. Jourda, MM. Kern et Laménie, Mmes Lamure et Lassarade, M. Laugier, Mmes Létard, Lherbier et Loisier, MM. Longeot, Longuet et Louault, Mmes M. Mercier et Morin-Desailly, M. Magras, Mme Malet, MM. Marseille, Maurey, Médevielle, Meurant et Moga, Mme Morhet-Richaud, MM. Morisset, Mouiller et Pellevat, Mme Perrot, MM. Pillet, Poniatowski et Pointereau, Mmes Primas, Puissat et Raimond-Pavero, MM. Priou, Savary, Savin, Segouin et Sol, Mmes Sollogoub et Thomas, MM. Vaspart et Vogel et Mme Vullien.
L’amendement n° 379 est présenté par Mme Cukierman.
L’amendement n° 458 rectifié bis est présenté par M. Cabanel, Mme Espagnac, M. Courteau, Mme Monier, MM. Montaugé et Fichet, Mme Bonnefoy, MM. Duran et J. Bigot, Mmes Blondin, Harribey, G. Jourda, Préville et Taillé-Polian, MM. Tissot, Vaugrenard, Daudigny et Kanner, Mmes Féret, Grelet-Certenais et Jasmin, M. Jomier, Mme S. Robert, MM. Magner, Lurel et Kerrouche, Mmes Guillemot, Conconne et Van Heghe, M. Tourenne, Mmes Rossignol, Meunier, Lubin et M. Filleul, MM. P. Joly, Mazuir, Jacquin et Bérit-Débat, Mme Artigalas, MM. Antiste, Botrel, M. Bourquin et Carcenac, Mme Conway-Mouret, MM. Dagbert, Daunis, Durain, Houllegatte, Lalande, Leconte, Lozach, Madrelle, Manable et Marie, Mme Perol-Dumont, M. Roger, Mme Tocqueville, M. Todeschini et les membres du groupe socialiste et républicain.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
I. – Alinéas 54 à 58
Supprimer ces alinéas.
II. – Alinéa 60
Supprimer cet alinéa.
III. – Pour compenser la perte de recettes résultant des I et II, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
…. – La perte de recettes pour les organismes de sécurité sociale résultant du maintien du profil de l’exonération actuellement définie à l’article L. 741-16 du code rural et de la pêche maritime est compensée à due concurrence par la majoration des droits mentionnés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Laurent Duplomb, pour présenter l’amendement n° 195 rectifié bis.
Monsieur le président, monsieur le ministre, je n’ai pas le sentiment que tous ces amendements en discussion commune aient exactement la même portée. Ils ne peuvent être tenus pour identiques. L’amendement de Michel Vaspart n’est pas contradictoire avec le mien ; il pourrait même être complémentaire.
L’amendement n° 195 rectifié bis que je présente est simple : il vise à supprimer les différents alinéas qui correspondent à la dégressivité et à la suppression, à terme, après 2021, du dispositif TO-DE. Nous faisons bien attention à maintenir l’alinéa rédigé par le Gouvernement correspondant à la compensation de 4 points du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, le CICE, qui en comportait 6.
Monsieur le ministre, je comprends que vous ayez négocié après les discussions que vous avez pu avoir et que votre position ait pu changer depuis votre intervention lors des questions d’actualité au Gouvernement consacré au dispositif TO-DE. Néanmoins, de quoi nos agriculteurs ont-ils besoin ?
Tout d’abord, ils ont besoin d’une certaine forme de clarté et de pérennité dans les dispositifs. On ne peut le nier aujourd’hui, la compétitivité d’un verger polonais par rapport à celle d’un verger français est sans commune mesure : tous ceux qui font leurs courses le savent, et l’exemple est typique, le prix au kilo des pommes françaises s’élève à 2, 50 euros, contre 99 centimes chez nous pour les pommes polonaises.
Il faut aussi être logique. Lors de la discussion de la loi ÉGALIM, citée par notre collègue, nous avons assisté en direct au lynchage du modèle agricole français. Il fallait changer de modèle, faire plus de bio, utiliser moins de produits phytosanitaires et moins de pesticides, supprimer le glyphosate, etc. Monsieur le ministre, c’est totalement contradictoire ! Supprimer le TO-DE aujourd’hui ou le faire de façon biaisée dans deux ans ou dans deux ans et demi, cela revient exactement au même ! Comment voulez-vous que les agriculteurs se préparent en si peu de temps ? C’est impossible !
Le coût de la main-d’œuvre en France est 75 % plus élevé qu’en Pologne, 37 % plus élevé qu’en Italie et 27 % plus élevé qu’en Allemagne. Nos agriculteurs sont donc pris au piège. Soit on décide de ne plus manger un seul fruit français à l’avenir, soit on arrête cette politique destructrice qui consiste à dire tout et son contraire dans la même phrase !
M. Laurent Duplomb. On ne peut pas dire aux agriculteurs qu’il faut changer de modèle et les assassiner le lendemain en leur annonçant que le modèle qu’ils pourraient suivre ne sera pas soutenu par le Gouvernement, notamment en ce qui concerne les TO-DE.
Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.
La parole est à Mme Cécile Cukierman, pour présenter l’amendement n° 379.
En introduction, je souhaite, après mon collègue André Chassaigne à l’Assemblée nationale, rappeler mon opposition, qui peut parfois paraître de principe, aux exonérations de cotisations mettant à mal, lorsqu’elles sont exagérées, notre modèle de sécurité sociale, d’autant que les allégements de cotisations ont pratiquement doublé avec ce projet de loi de financement de la sécurité sociale.
Toutefois, nous ne pouvons que constater l’échec des politiques de soutien à notre agriculture. Comme cela vient d’être rappelé, la fameuse loi ÉGALIM, qui devait renverser la tendance et assurer un revenu décent aux agriculteurs, n’a finalement été qu’un formidable gâchis – nous nous sommes longuement exprimés sur le sujet, avec mes collègues, lors de l’examen de ce texte.
À cet égard, je rappelle que tous nos amendements, du coefficient multiplicateur à la mise en place d’indices publics de construction du prix ou encore de prix plancher par production, ont été rejetés. Et que dire du sort qui a été fait par le Gouvernement à la proposition de loi de l’Assemblée nationale visant à assurer la revalorisation des pensions de retraite agricoles ?…
Aussi, faute d’actions d’envergure concrètes et pérennes, nous en arrivons à des mesures de sauvetage comme celles qui sont proposées aujourd’hui.
C’est pourquoi je défends cet amendement, comme d’autres dans l’hémicycle, qui vise à préserver de manière exceptionnelle les allégements de cotisations spécifiques dont sont bénéficiaires actuellement les exploitants agricoles employant de la main-d’œuvre saisonnière.
Nous le savons, dans un certain nombre de productions agricoles, le recours à la main-d’œuvre saisonnière est une nécessité dans le temps pour assurer la qualité de la production, y compris pour sortir parfois de modèles productivistes.
Cet allégement de charges spécifique aux salariés saisonniers agricoles permet également de faire face au dumping social de nos concurrents européens, notamment l’Espagne, l’Italie ou l’Allemagne, dans des filières que vous connaissez très bien, monsieur le ministre : la viticulture, l’arboriculture, le maraîchage, l’horticulture, les pépinières viticoles, et nous pourrions élargir le propos aux semences et à la polyculture.
C’est pourquoi, pour l’heure, nous proposons de maintenir ce dispositif, en attendant des mesures équivalentes plus acceptables et un véritable statut du travailleur saisonnier, afin de ne pas favoriser le retour à une pratique trop largement répandue, dans ce secteur comme dans d’autres, de travail dissimulé.
La parole est à M. Henri Cabanel, pour présenter l’amendement n° 458 rectifié bis.
Je ne reviendrai pas sur les arguments développés par mes collègues Laurent Duplomb et Cécile Cukierman : nous défendons le même amendement.
En tout état de cause, je vous remercie, monsieur le ministre, d’avoir fait reculer le gouvernement auquel vous appartenez. En effet, une erreur énorme avait été faite en supprimant le TO-DE sans donner de perspectives aux agriculteurs. Vous avez ardemment défendu, avec la volonté qui est la vôtre et que je connais bien, l’idée de revenir sur ce système. Mais je sais que vos collègues de Bercy s’arrêtent à une vision strictement budgétaire de la chose, sans regarder au-delà, sans considérer l’humain.
Mes collègues l’ont rappelé, les agriculteurs ont besoin de perspectives. Ils doivent pouvoir voir loin. Une étude d’impact aurait été utile sur la réalité des territoires et les conséquences d’une telle mesure. Même si nous ne sommes pas d’accord avec vous sur les taux – 1, 10 SMIC, 1, 15 SMIC, 1, 20 SMIC, 1, 25 SMIC – nous avons une certitude : en 2020, dans deux ans, il n’y aura plus de dispositif, ce qui entraînera la disparition de tout un tas de filières.
Je prendrai l’exemple, dans mon territoire, de la pomme, qui représente, pour la seule société d’intérêt collectif agricole de Mauguio, une production de 20 000 tonnes, avec quarante-cinq équivalents temps plein. La production nationale de la pomme, c’est 1, 6 million de tonnes. Si la filière disparaissait, 3 600 emplois resteraient sur le carreau. Ne me dites pas, monsieur le ministre, que si, demain, une entreprise devait licencier 3 600 personnes, le Gouvernement ne réagirait pas et ne trouverait pas la solution !
Il est donc important que les agriculteurs puissent avoir cette lisibilité qu’ils n’ont pas afin de leur permettre de continuer à vivre dignement de leur métier.
Voilà pourquoi je vous appelle à soutenir cet amendement.
Les deux amendements suivants sont identiques.
L’amendement n° 16 est présenté par M. Joyandet, au nom de la commission des finances.
L’amendement n° 281 rectifié bis est présenté par MM. Fouché, Capus, Guerriau, Wattebled, Chasseing, Decool, Maurey et Bouloux, Mmes Goy-Chavent et Vullien, M. Moga, Mme Morin-Desailly, MM. Vogel et Chatillon, Mme Vérien et MM. Malhuret et Cambon.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
I. – Alinéa 56
Remplacer le taux :
par le taux :
II. – Alinéa 57
Remplacer le taux :
par le taux :
III. – Alinéa 60
Supprimer cet alinéa.
IV. – Pour compenser la perte de recettes résultant des I, II, et III, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
L’amendement n° 16 n’est pas soutenu.
La parole est à M. Alain Fouché, pour présenter l’amendement n° 281 rectifié bis.
Il s’agit d’un amendement de repli dans l’hypothèse où le dispositif d’exonérations de cotisations patronales pour l’emploi de travailleurs occasionnels et de demandeurs d’emploi ne serait pas rétabli.
L’article 8 du projet de loi supprime ce dispositif TO-DE au motif qu’il serait moins attractif que l’allégement général de charges envisagé avec la suppression du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, le CICE. Conscient de la difficulté que poserait cette suppression pour certaines exploitations, le Gouvernement a fait adopter un amendement visant à atténuer les effets de la suppression du dispositif TO-DE au titre des années 2019 et 2020.
En l’état actuel, la mesure d’atténuation proposée ne compense pas intégralement la suppression du CICE et du dispositif TO-DE.
Aussi, dans l’hypothèse où toute idée de rétablissement intégral du dispositif TO-DE serait rejetée, il conviendrait à tout le moins de modifier les mesures d’atténuation introduites par le Gouvernement en modifiant le seuil de dégressivité prévu à l’article 8, pour le porter à 25 % pour 2019 et 2020. Une telle modification laisserait deux ans aux différentes parties prenantes pour trouver une solution pérenne.
L’amendement n° 162 rectifié ter, présenté par Mmes Berthet et Deromedi, MM. Dériot, Panunzi et Revet, Mmes Raimond-Pavero et Micouleau, M. Ginesta, Mme Noël, MM. Chaize, Paccaud et Magras, Mmes Lavarde et Gruny, MM. Brisson, de Nicolaÿ et Bonhomme, Mme Delmont-Koropoulis, MM. Genest et Laménie et Mme Malet, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 56
Remplacer le taux :
par le taux :
II. – Alinéa 57
Remplacer le taux :
par le taux :
III. – Pour compenser la perte de recettes résultant des I et II, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – La perte de recettes pour les organismes de sécurité sociale résultant du passage de 115 à 125 % du salaire minimum de croissance en 2019, et de 110 à 125 % de ce salaire en 2020, des rémunérations pour lesquelles l’exonération définie à l’article L. 741-16 du code rural et de la pêche maritime est totale, est compensée, à due concurrence, par une majoration des droits mentionnés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Martine Berthet.
Cet amendement vise à assouplir le dispositif voté à l’Assemblée nationale au regard des grandes difficultés dans lesquelles se trouvent bon nombre d’exploitations agricoles, difficultés accentuées par la période d’intense sécheresse qu’elles viennent de subir.
Ainsi, l’exonération des rémunérations versées aux travailleurs saisonniers serait totale jusqu’à une rémunération de 1, 25 SMIC en 2019 et en 2020, tout comme dans le régime actuel.
L’amendement n° 134 rectifié bis, présenté par MM. Menonville, Arnell et A. Bertrand, Mme M. Carrère, MM. Castelli, Collin et Corbisez, Mmes Costes et N. Delattre, MM. Gabouty et Gold, Mmes Guillotin et Jouve et MM. Requier, Roux et Vall, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 56
Remplacer le taux :
par le taux :
II. – Alinéa 57
Supprimer cet alinéa.
III. – Pour compenser la perte de recettes résultant des I et II, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Franck Menonville.
Le dispositif TO-DE prévoit un taux d’exonération de charges patronales de 33 % pour les salaires compris entre 1 et 1, 25 SMIC.
Ces exonérations sont cruciales pour les filières agricoles - arboricole, viticole, maraîchère et horticole. Elles leur permettent de conserver de la compétitivité face à des pays aux coûts salariaux plus faibles.
Le Gouvernement veut supprimer le TO-DE en le remplaçant par un renforcement immédiat de l’allégement général des charges, mais force est de constater que le compte n’y est pas encore, et ce malgré les avancées obtenues lors du débat en séance publique à l’Assemblée nationale, où a été prévu un plateau d’exonération à 1, 15 SMIC.
En effet, le dispositif actuel ne permet pas de compenser suffisamment le basculement des exonérations spécifiques.
Avec mes collègues du groupe du RDSE, après nous être pleinement mobilisés pour le maintien du TO-DE, nous défendons cet amendement d’appui et de consensus, qui illustre surtout notre volonté de maintenir une application pérenne du TO-DE à 1, 20 SMIC – c’est l’objet de mon amendement. Nous souhaitons un maintien linéaire du dispositif et non une dégressivité préinscrite : comme je l’ai dit en introduction, ces exonérations apportent de la compétitivité aux filières les plus exposées.
Je suis d’ailleurs un peu inquiet : tels que les débats se profilent, je crains que les amendements adoptés ici ne soient in fine rejetés par l’Assemblée nationale.
Notre amendement permet de concilier les intérêts de la filière agricole avec les objectifs du Gouvernement en prolongeant les avancées obtenues lors du débat à l’Assemblée nationale. Notre Haute Assemblée pourrait apporter une fois de plus sa plus-value dans ce débat parlementaire.
L’amendement n° 622, présenté par M. Vanlerenberghe, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 61
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…° Les articles L. 741-17 et L. 751-20 sont abrogés.
La parole est à M. le rapporteur général.
Je précise que ces quinze amendements en discussion commune ne sont en effet pas identiques. Seule l’adoption des deux premiers, qui sont des amendements de suppression, rendrait sans objet les autres.
Quel est l’avis de la commission ?
La défense de tous ses amendements et l’émoi qu’a suscité la proposition du Gouvernement montrent à quel point il était important que nous ayons un débat sur le dispositif TO-DE.
Le Sénat essaie aujourd’hui d’adopter, et ce sur l’ensemble des travées, une position plutôt favorable au maintien, autant que faire se peut, du dispositif antérieur, tout en respectant les dispositifs de financement du projet de loi de financement de la sécurité sociale. Car exonérer, c’est décider une perte de recettes pour la sécurité sociale.
Nous avons toujours essayé de maintenir cet équilibre en commission, et nous vous demandons de réfléchir à ces deux aspects : celui qui est propre à la profession agricole, que nous ne mésestimons pas ; et celui de l’équilibre des comptes de la sécurité sociale, pour lequel nous sommes réunis aujourd’hui.
J’avais d’ailleurs proposé un amendement visant à maintenir pour cette année l’exonération à 1, 25 SMIC, afin de procéder en douceur à une extinction progressive dans les années qui viennent, notamment en passant par un taux à 1, 20 SMIC. Le groupe La République En Marche a déposé un amendement en ce sens qui prévoyait un taux à 1, 20 SMIC pour 2020, …
… mais il n’a pas été retenu par la commission, qui en a longuement débattu et a préféré finalement préserver ce régime dans ses paramètres actuels, c’est-à-dire une exonération totale à 1, 25 SMIC si nécessaire – et ça me paraît l’être – pour des filières comme les fruits et légumes et la viticulture.
Par ailleurs, nous avons voulu, en termes d’assiette, adapter ce dispositif à la suppression du CICE. Enfin, nous avons souhaité le pérenniser dans le temps. Voilà les positions qui ont été déterminées en commission.
En conséquence, la commission a émis un avis favorable sur les amendements identiques n° 195 rectifié bis, 379 et 458 rectifié bis. Par cohérence, elle demande le retrait des autres amendements au profit de ce dispositif, qui, plus complet, paraît refléter le mieux les aspirations de la majorité de notre assemblée.
Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste et du groupe Les Républicains.
Ce débat est important pour le Sénat, l’assemblée représentant les territoires. Car qui pourrait mieux que les sénatrices et les sénateurs être proche des territoires ruraux, proche des agriculteurs ?
Aussi je ne peux que me réjouir du débat ouvert ici à l’occasion de ces amendements.
Nous entamerons l’examen du projet de loi de finances d’ici quelques jours. Néanmoins, je veux d’ores et déjà vous dire que le Gouvernement et moi-même sommes tout à fait mobilisés, monsieur Duplomb, pour la promotion de notre agriculture et la défense de nos agriculteurs.
Je l’ai déjà dit à plusieurs reprises, je veux être comme un bouclier face à l’agri-bashing et je défendrai toujours les agriculteurs, qui ne sont ni des empoisonneurs ni des producteurs de denrées de mauvaise qualité. Bien au contraire, car l’agriculture est montée en gamme. Cette montée en gamme, nous devons la maintenir. Je tenais à le réaffirmer ici et je le ferai également devant l’Assemblée nationale.
Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.
Pour en revenir au débat qui nous occupe et à l’article 8 du projet de loi de financement de la sécurité sociale, j’avais posé au Sénat une question d’actualité, quelques jours avant d’être nommé au Gouvernement, dans laquelle je soulignais que la suppression du TO-DE me paraissait être une erreur…
Sourires sur les travées du groupe Les Républicains.
… tant ce dispositif, créé par Bruno Lemaire et amélioré par lui à plusieurs reprises, était utile pour les agriculteurs, notamment en matière de baisse des charges sur les travailleurs saisonniers et de lutte contre les distorsions de concurrence.
Certaines filières agricoles utilisent très peu de travailleurs saisonniers et sollicitent surtout des travailleurs permanents. D’autres y ont beaucoup plus recours. Lors de cette fameuse séance de questions d’actualité au Gouvernement, j’avais dit que je n’accepterais pas la suppression du TO-DE.
Lorsque le Président de la République m’a proposé de devenir ministre, j’ai accepté, mais à la condition que l’on ne me demande pas, en tant que ministre, de renier la position que j’avais défendue sur cette question en tant que sénateur ! Soutenir la suppression du TO-DE, ce n’était pas possible pour moi, car cela n’aurait pas été cohérent, et qui veut réhabiliter la politique doit tout de même s’attacher à un minimum de cohérence.
La stratégie économique du Président de la République est assez simple. Sa ligne est claire : elle consiste à transformer le CICE en baisse de charges et à diminuer les charges durablement pour tous les secteurs.
D’ailleurs, dès le mois d’octobre dernier, les Françaises et les Français ont pu constater, sur leur bulletin de salaire, une augmentation de leur pouvoir d’achat, parce que les baisses des charges ont été mises en place. C’est une réalité objective que l’on ne saurait nier.
Il en est de même pour l’agriculture : cette année, grâce aux mesures fiscales, et je parle devant le grand argentier du Gouvernement qu’est Gérald Darmanin
M. le ministre de l ’ action et des comptes publics sourit.
Toutefois, une partie des agriculteurs employant des travailleurs saisonniers ne sont pas bénéficiaires, car les exploitations agricoles n’y gagnent qu’à condition de ne pas employer, grosso modo, sept travailleurs saisonniers pour un travailleur permanent. Dès lors qu’elles emploient huit salariés saisonniers pour un salarié permanent, les exploitations agricoles sont perdantes. C’est la baisse des charges pour les salariés permanents qui est vraiment très importante.
Par ailleurs, cette baisse de charge sera appliquée, comme toutes les autres, dès le 1er janvier 2019, et non au 1er octobre 2019. Bien évidemment, la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques, la TICPE, n’est pas touchée – nous en avons discuté. Aujourd’hui, le Gouvernement n’entend pas revenir sur le TO-DE dans son ensemble, puisque la volonté est de baisser les charges.
C’est la raison pour laquelle le Gouvernement a accepté un « tampon », qui assure une compensation intégrale, pour les deux années qui viennent, jusqu’à 1, 15 SMIC, ce qui bénéficiera à environ 90 % des salariés concernés.
Pour ces raisons, mesdames, messieurs les sénateurs, je suis contraint d’émettre un avis défavorable sur les amendements identiques de M. Duplomb, de M. Cabanel et de Mme Cukierman, dont je pense, du reste, qu’ils seront votés et qu’ils rendront tous les autres sans objet.
Par ailleurs, permettez-moi de vous le dire, en votant ces amendements, le Sénat, qui est l’assemblée des territoires et de l’agriculture, laissera le dernier mot à l’Assemblée nationale, et nous en resterons donc vraisemblablement à 1, 15 SMIC.
Protestations sur les travées du groupe socialiste et républicain, du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, du groupe Les Indépendants – République et Territoires, du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen, du groupe Union Centriste et du groupe Les Républicains.
Mêmes mouvements.
Pour ma part, je ne fais que dérouler tranquillement mon argumentation. Je dis simplement que les amendements présentés par M. Vanlerenberghe ou par M. Fouché, qui tendent à faire passer l’exonération à 1, 20 ou 1, 25 SMIC, étaient davantage en cohérence avec la volonté du Gouvernement de baisser les charges que le maintien du dispositif TO-DE. Du reste, le Gouvernement n’acceptera pas ce dernier.
Ma position est claire : je suis contraint d’émettre un avis défavorable à la suppression de la suppression du TO-DE ! Au final, l’Assemblée nationale conservera une exonération jusqu’à 1, 15 SMIC, si bien que le dispositif concernera 90 % des salariés, et non la totalité.
Madame Delattre, les entreprises agricoles que vous avez évoquées au travers de votre amendement ne sont vraiment pas concernées, dans la mesure où elles recourent à très peu de salariés saisonniers. Étant donné qu’elles bénéficient de la baisse des charges liées à la suppression du CICE, elles sont globalement bénéficiaires de ces mesures.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur l’ensemble de ces amendements.
M. Alain Milon, président de la commission des affaires sociales. J’ai écouté avec beaucoup d’attention ce qu’a dit M. le ministre de l’agriculture, qui est un ancien sénateur : il a affirmé que le Sénat n’avait aucun pouvoir sur les mesures qui seront votées à l’Assemblée nationale. Je regrette que le ministre de l’agriculture ne dispose pas non plus du pouvoir d’essayer d’influencer la majorité de l’Assemblée nationale…
Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, du groupe Union Centriste, du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen, du groupe Les Indépendants – République et Territoires, du groupe socialiste et républicain et du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Monsieur le ministre, j’espère que vous parviendrez tout de même, avec vos collègues du Gouvernement, à convaincre les députés que l’Assemblée nationale pourrait s’inspirer des mesures votées par le Sénat. En effet, quand nous siégions ensemble sur les travées de cet hémicycle, nous étions d’accord pour estimer que la sagesse du Sénat devait dominer l’excitation de l’Assemblée nationale.
Je compte donc sur vous pour convaincre nos collègues députés que l’Assemblée nationale n’a pas toujours raison.
Mes chers collègues, je serai à présent un peu moins consensuel. Hier, les chambres consulaires ont été défendues avec beaucoup de ferveur. Hier soir, ce sont les Ultramarins qui l’ont été.
En effet, monsieur le ministre.
Cet après-midi, ce sont les agriculteurs qui bénéficient de cette ferveur. Je compte sur vous pour défendre de la même manière, demain et jeudi, l’ensemble des amendements qui visent directement la santé, l’amélioration des hôpitaux et la lutte contre la désertification médicale !
Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, du groupe Union Centriste, du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen, du groupe Les Indépendants – République et Territoires et du groupe socialiste et républicain.
Sur ce sujet, la commission des finances avait adopté un amendement qui avait pour objet le maintien d’une exonération intégrale jusqu’à 1, 25 SMIC et la pérennisation du dispositif, d’une manière qui n’était pas complètement satisfaisante, après 2021. Hier, nous avons décidé de soutenir l’amendement de notre collègue Laurent Duplomb, qui nous a paru complet et qui nous donnait entière satisfaction.
C’est pour respecter les accords que nous avons passés que je n’ai pas défendu l’amendement de la commission des finances.
Monsieur le ministre, permettez-moi de vous dire que j’ai rarement entendu un exposé qui procède autant de la pirouette – vous voyez que j’essaie de ne pas être désagréable… En effet, vous avez tout de même réussi à vous faire applaudir par les sénateurs de tous les groupes politiques au milieu de votre intervention, parce que nous avons alors cru à une conclusion inverse de celle que vous avez finalement annoncée.
M. le ministre de l ’ agriculture sourit.
On peut dire que vous avez géré au mieux votre franchissement du Rubicon ! Il faut dire que, maintenant que vous siégez sur le banc réservé aux membres du Gouvernement, vous êtes obligé de tenir un autre discours que celui que vous prononciez quand vous étiez assis dans les travées.
Si l’on veut que tout le monde s’y retrouve, il faut maintenir l’exonération maximale jusqu’à 1, 25 SMIC.
Je puis vous emmener dans une entreprise de fabrication de plants de vigne de mon département. Je m’y suis rendu voilà quinze jours, et j’ai fait les comptes avec le viticulteur : si l’on en reste à 1, 15 SMIC, il manquera 150 euros par salarié. J’ignore d’où vous tenez vos statistiques, mais je puis vous assurer que, si vous pensez donner satisfaction à 90 % ou 95 % des exploitants, vous êtes loin du compte.
Quoi qu’il en soit, je regrette vraiment votre position et j’espère que nous soutiendrons tous ardemment l’amendement qui a été soutenu par la commission des affaires sociales. En effet, on ne peut pas dire tout et son contraire !
Il faut vraiment soutenir notre agriculture. Sa situation est trop grave pour que l’on joue sur les mots ou avec les démonstrations, avec les conséquences financières que vous connaissez bien, monsieur le sénateur devenu ministre.
Notre collègue Cécile Cukierman a très bien défendu l’amendement n° 379. Elle a d’ailleurs montré les contradictions existant en matière d’exonérations et d’allégements de cotisations spécifiques.
Comme ils l’ont exprimé depuis le début des débats, les membres du groupe CRCE sont inquiets de constater que, face à une situation économique et sociale difficile pour bon nombre de territoires et dans maints secteurs, les propositions se sont multipliées pour priver notre système de sécurité sociale de cotisations versées par les entreprises, toujours dans un souci affiché de préserver l’emploi, monsieur le ministre.
Vous devez tout de même être satisfait, car la petite musique que vous jouez depuis votre prise de fonctions, même si vous n’êtes pas ministre depuis longtemps, s’insinue dans les esprits. Cette petite musique reprend les mêmes partitions que vos prédécesseurs : il faut diminuer le coût du travail et fiscaliser la sécurité sociale, et il est hors de question de chercher des recettes nouvelles.
Toutes nos propositions sont rejetées, qui pourtant tendraient à redresser la barre, même quand il s’agit de faire respecter la loi relative à l’égalité salariale entre les femmes et les hommes. Alors, allons-y, ouvrons la boîte de Pandore, et que chacun et chacune formulent des propositions d’allégements de cotisations sociales !
Qu’en est-il de la situation spécifique des travailleurs saisonniers ? Le travail saisonnier, sur lequel mes anciens collègues Annie David et Dominique Watrin s’étaient investis, connaît effectivement des problèmes particuliers.
Je souscris à ce que mes collègues ont dit à son sujet : la grande précarité des travailleuses et des travailleurs saisonniers nécessite de prendre des mesures positives, comme le versement de la prime de précarité, la reconduction des contrats pour les salariés volontaires, le droit au logement, l’accès à la formation et l’augmentation des moyens donnés à l’inspection du travail pour lutter contre le travail non déclaré – Cécile Cukierman en a parlé.
Sur ce dernier point, je veux rappeler que, malgré les exonérations de cotisations, le travail non déclaré est extrêmement répandu chez les saisonniers agricoles. Pour certains gros agriculteurs qui ne recherchent que la productivité et la flexibilité de la main-d’œuvre, la concurrence entre les travailleuses et les travailleurs est un moyen de pression des salaires et des droits sociaux vers le bas.
Ce n’est pas en réduisant les moyens de l’inspection du travail que les choses s’amélioreront. Or, par exemple, plus d’une vingtaine de postes d’agents contrôleurs ont été supprimés dans la région Grand Est en 2018. Cette situation est complexe et dramatique. Nous ne pouvons rester sans rien faire dans l’immédiat, compte tenu des choix, essentiellement politiques, que vous continuez à porter.
C’est la raison pour laquelle nous voterons cet amendement, en attirant votre attention sur le fait que son adoption n’est une solution durable ni pour les saisonniers ni pour notre système de protection sociale.
Je souhaite tout de même rappeler quelques chiffres.
Comme nous le savons tous, près de 900 000 contrats saisonniers sont signés tous les ans. La main-d’œuvre saisonnière représente environ 70 % de l’ensemble des salariés agricoles et 22 % de volume du travail. Le secteur viticole est sans conteste le premier employeur de travailleurs saisonniers. En 2016, la masse salariale des 452 283 contrats TO-DE signés s’élevait à plus de 600 millions d’euros.
Monsieur le ministre, la suppression du dispositif signifierait de nouvelles cotisations supplémentaires pour l’agriculture.
Dès l’annonce de ce projet, nous avons sensibilisé votre prédécesseur – vous siégiez alors sur les travées de notre Haute Assemblée. Je rappelle que, lors de l’examen du texte à l’Assemblée nationale, un dispositif compensant partiellement la suppression du TO-DE a été adopté, permettant une exonération des cotisations patronales – totale jusqu’à 1, 15 SMIC, puis dégressive jusqu’à 1, 10 SMIC – pour les années 2019 et 2020.
C’est une avancée, mais celle-ci ne suffira pas à compenser intégralement le coût supplémentaire induit par la suppression du TO-DE et la fin du CICE. De plus, ce dispositif n’est que transitoire. Les pertes sont estimées à 39 millions d’euros pour l’ensemble de l’agriculture et à 12, 8 millions d’euros pour la viticulture en cas d’application du dispositif proposé par l’Assemblée nationale.
C’est pourquoi je vous demande, mes chers collègues, de soutenir sans réserve l’amendement de Laurent Duplomb, lequel vise à exonérer les charges sociales jusqu’à 1, 25 SMIC et, surtout, à le faire de manière pérenne, ce qui constitue une grande différence sur le plan financier.
Monsieur le ministre, j’espère que nos deux assemblées parviendront à trouver un compromis qui soit acceptable. Vous avez évoqué l’Assemblée nationale : nous savons bien comment les choses fonctionnent…
Il y va de la compétitivité des exploitants et de l’emploi rural, que vous dites défendre – en réalité, j’ai l’impression que vous ne les défendez pas !
Tout d’abord, je considère que nous sommes confrontés à un véritable problème.
Comme j’ai eu l’occasion de l’évoquer dimanche dernier avec les arboriculteurs de mon département présents à la quarantième fête de la pomme du Pilat, le besoin de main-d’œuvre est réel, y compris si l’on veut accompagner les secteurs recourant à la main-d’œuvre saisonnière de manière importante. Outre l’arboriculture, c’est également vrai dans la viticulture notamment.
Si l’on veut sortir dans les délais d’un modèle qui recourt à l’hypermécanisation et à un certain nombre de produits pesticides, au-delà de ce que l’on peut penser de ces derniers, une présence humaine est nécessaire. Il faut donc accompagner les différents exploitants pour leur permettre d’avoir recours à une main-d’œuvre saisonnière le temps de la récolte et lors d’un certain nombre de travaux agricoles.
Ensuite, j’ai bien entendu l’argument selon lequel le vote de notre amendement reviendrait à une exonération de recettes pour le projet de loi de financement de la sécurité sociale et, plus largement, pour notre pays.
Toutefois, le travail dissimulé constitue lui aussi une perte de recettes pour le projet de loi de financement de la sécurité sociale et pour notre pays ! La concurrence sans limites, qui conduit, chaque année, à la fermeture d’exploitations dans nos départements et à la transformation en friches d’espaces agricoles qui ne sont plus entretenus, avec des conséquences désastreuses pour nos territoires, y compris en termes de sécurité en période de sécheresse et d’incendies, a, elle aussi, un coût énorme pour la France.
Oui, nous pouvons faire en sorte d’équilibrer les recettes et les dépenses. Cela se planifie ! Nous devons être en situation d’aménager le territoire.
Je veux répéter très tranquillement que nous n’avons jamais été opposés à ce qu’une aide soit versée aux entreprises, dès lors que cette aide se met au service de l’intérêt général, de l’emploi et de l’aménagement du territoire. Oui, nous soutiendrons une exonération allant dans ce sens.
Franchement, monsieur le ministre, comment osez-vous nous dire ici que le vote de cet amendement serait la fin de tout, parce qu’il ne sera pas repris à l’Assemblée nationale ? De qui se moque-t-on ?
Les députés de la majorité présidentielle ne sont-ils pas capables d’entendre la voix unanime s’exprimant sur les travées du Sénat, de Laurent Duplomb à Cécile Cukierman, qui ont déposé le même amendement ? Ne sont-ils pas capables de comprendre que, dans ce pays, certaines choses méritent d’être défendues au nom de l’intérêt général et que nous faisons de la politique non pas « hors-sol », mais ancrés dans nos mandats et nos territoires ?
Bravo ! et vifs applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, du groupe socialiste et républicain, du groupe Union Centriste et du groupe Les Républicains.
Effectivement, monsieur le ministre, votre intervention avait très bien commencé. Toutefois, je n’arrive pas à comprendre comment elle a pu se terminer de cette manière.
Sourires sur les travées du groupe Les Républicains.
La situation est simple : nous sommes en train d’évoquer l’emploi de femmes et d’hommes qui travaillent sur nos territoires. On sait que l’enjeu, pour ces filières, est stratégique : soit nous les gardons, soit nous les perdons. Or, sur le plan économique, ces femmes et ces hommes renflouent et alimentent, par leur travail, notre système si précieux de sécurité sociale.
Monsieur le ministre, vous savez très bien que votre position tend à fragiliser un certain nombre de filières et que votre proposition d’exonérer jusqu’à 1, 15 SMIC laisse de côté un certain nombre d’exploitations et met en dehors du travail un certain nombre de femmes et d’hommes.
Je veux formuler une autre remarque. Je remercie notre président de la commission des affaires sociales et notre rapporteur de leur position et de leur propos. À l’heure actuelle, il est fondamental de tracer des perspectives. Monsieur le ministre, vous devez mettre en œuvre la feuille de route décidée lors des états généraux et par la loi ÉGALIM, dans sa version votée par le Sénat – nous savons tous le sort que, par méconnaissance, l’Assemblée nationale a réservé ensuite à nos amendements.
Monsieur le ministre, l’unanimité que vous entendez ici, par-delà les sensibilités politiques, doit vous interroger. Elle doit aussi vous rassurer sur le fait que c’est la vérité qui est en train de s’exprimer au Sénat : il est nécessaire de maintenir ces richesses et ce travail dans nos territoires et, surtout, d’abandonner un schéma conduisant à l’arrêt d’un certain nombre de productions, pour d’ailleurs importer ensuite les mêmes produits. Si nous avons été élus, c’est pour offrir des perspectives et, surtout, pour donner confiance.
Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe Union Centriste.
Il faut savoir que le passage de 1, 10 à 1, 15 SMIC représente une perte d’à peu près 40 millions d’euros. Je comprends que cela puisse faire grincer les dents du ministre de l’économie et de celui du budget !
Si le dispositif a été mis en place sur la base de 1, 25 SMIC, c’est pour une bonne raison : c’est parce que la rémunération des travailleurs occasionnels dans les vergers ou le maraîchage passe vite à 1, 25 SMIC, compte tenu des heures supplémentaires qu’ils effectuent. Il s’agit donc, dans certaines filières qui font faire à leurs saisonniers des heures supplémentaires, du taux idéal pour bénéficier de l’exonération de charges.
Il y a donc là un enjeu de compétitivité.
Comme je l’ai dit précédemment, vous devez changer de méthode dans vos politiques ! Pour l’heure, votre vision est purement budgétaire. Vous annoncez la suppression du TO-DE sans rien proposer pour remplacer ce dispositif. Mais vous savez très bien que, dans ces conditions, ce sont des filières entières qui disparaîtront, parce qu’elles ne seront pas compétitives !
Outre la Pologne, qui a été citée, d’autres pays européens, comme l’Allemagne, l’Italie et l’Espagne, sont bien plus compétitifs que nous. C’est justement pour permettre à nos filières arboricoles, maraîchères et viticoles d’être compétitives que le TO-DE avait été institué.
Monsieur le ministre, quand vous dites que c’est l’Assemblée nationale qui aura le dernier mot si nous ne sommes pas raisonnables, vous semblez vous méprendre sur les élus du territoire que nous sommes. Nous défendons le même amendement que M. Duplomb et Mme Cukierman : cette unanimité s’explique par notre connaissance des enjeux des territoires.
Je comprends que le discours que vous teniez en tant que sénateur ait quelque peu évolué depuis que vous êtes ministre. Cependant, je sais aussi que vous êtes un homme de terrain et que, dans votre département, l’arboriculture et le maraîchage sont très développés.
Vous devez être conscient que, si rien n’est fait et, surtout, si l’on supprime le TO-DE au bout de deux ans, on fera disparaître tout un pan de nos filières agricoles !
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain, du groupe Union Centriste et du groupe Les Républicains.
Je suis très favorable aux amendements identiques défendus par M. Duplomb, Mme Férat, Mme Cukierman et M. Cabanel, que j’ai d’ailleurs déjà soutenus en commission des affaires sociales.
Les différents groupes politiques y ont réfléchi, notamment le nôtre. Nous avons souhaité trouver des compensations à la diminution des recettes du PLFSS qui résultera de son adoption. Cette baisse, nous l’avons estimée, mesurée, évaluée, et l’on sait que cette disposition, tout à fait importante pour les territoires, n’aura pas de répercussions sur la santé, le médico-social ou les autres actions menées au travers du PLFSS, car nous proposerons, le moment venu, des mesures permettant de garantir l’équilibre de ce dernier. Je tenais à le souligner.
Par ailleurs, vous avez affirmé, monsieur le ministre, que 90 % des emplois saisonniers étaient rémunérés au niveau du SMIC. Non ! Je ne sais pas d’où vous tenez vos statistiques.
Je veux citer le territoire que je connais, notamment la Champagne, qui est à cheval sur deux régions, Grand Est et Hauts-de-France, où le chômage est singulièrement élevé et où la situation n’est pas particulièrement facile : 60 % des 200 000 emplois saisonniers y sont rémunérés au-dessus du SMIC.
En Champagne, cette proportion monte à 97 %.
La disposition adoptée par l’Assemblée nationale ne doit pas inciter les employeurs à moins bien rémunérer les emplois saisonniers : leur salaire supérieur au SMIC se justifie par la pénibilité particulière de leur métier !
Permettez-moi d’attirer votre attention, monsieur le ministre : la réussite de votre mission passe par la solution présentée dans l’objet des amendements identiques, à savoir la suppression de la suppression de l’exonération.
La viticulture va être confrontée à un autre problème majeur, celui du cuivre. Là aussi, le risque est celui de la transformation, demain, de la viticulture raisonnée, écologique.
Si vous ne donnez pas de signes forts au travers des dispositions du PLFSS, c’est l’ensemble de ces filières qui risquent d’être mises à mal.
Exactement ! sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Monsieur le ministre, je suis très triste, et nous sommes très inquiets. J’en veux pour preuve les différentes interventions de mes collègues, de toutes sensibilités politiques, et tous ces amendements, largement cosignés.
Je souhaite vraiment que vous ayez à l’esprit que la suppression du TO-DE condamnerait nos exploitations, qu’il s’agisse de l’horticulture, de la viticulture ou de la filière des fruits et légumes – cela a été dit très largement. L’exemple de la pomme, que notre collègue Laurent Duplomb a donné, en est une parfaite illustration. Il convient de voter notre amendement en l’état.
Monsieur le ministre, quelle déception m’inspirent vos propos ! Que se passera-t-il dans deux ans ? Je me pose une question essentielle : le Gouvernement a-t-il bien mesuré les conséquences de cette suppression ? Pour ma part, je réponds non !
Je me souviens de votre intervention lors de la séance de questions au Gouvernement et des trémolos que vous aviez alors dans la voix. Je vous avais d’ailleurs félicité – je ne sais pas si vous vous en souvenez. Quelle désillusion ! Vous vous posez en bouclier. Hélas, vous avez suscité beaucoup d’espoir, mais je crains que vous ne puissiez faire mieux que vos collègues.
Demain, les cinq fruits et légumes que l’on nous recommande de consommer chaque jour, nous les achèterons hors de France, au bout du monde, dans des pays dont nous ne connaissons pas les pratiques culturelles. Je vous passe les détails ; il ne s’agit pas de débattre des pesticides à cet instant. Je n’insisterai pas davantage sur le bilan carbone, qui, vous en conviendrez, est parfaitement d’actualité.
Je vous le dis, monsieur le ministre, si vous ne soutenez pas ces amendements identiques aujourd’hui, demain, à l’Assemblée nationale, c’est la mort annoncée pour nombre de nos exploitations et de nos filières.
Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste et du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe socialiste et républicain.
Je rappelle que, l’année dernière, j’attirais déjà l’attention sur le dispositif TO-DE.
Dans les Bouches-du-Rhône, on compte de nombreux maraîchers, arboriculteurs, serristes et viticulteurs. Or, pour ces derniers, le coût du travail ne représente rien de moins que le tiers de leurs dépenses ! De plus, ils sont en concurrence directe avec leurs homologues d’Espagne, où le travail, on l’a dit et répété, est de 30 % moins cher qu’en France, ou même d’Italie, où il est de 35 % moins cher.
Il faut également savoir, alors que l’on met souvent en avant les produits issus de l’agriculture bio, que cette dernière nécessite encore plus de main-d’œuvre.
Selon moi, il est vraiment incompréhensible de ne pas préserver le dispositif TO-DE à 1, 25 SMIC. Vous savez très bien, monsieur le ministre, que, en l’établissant à 1, 15 SMIC, vous écarterez à peu près 60 % des exploitants agricoles, parce que, par définition, le travail saisonnier implique de nombreuses heures supplémentaires au moment de la récolte.
Le dispositif TO-DE permet à de nombreux agriculteurs de survivre. Vous savez qu’ils ont fait beaucoup de progrès en ce qui concerne la qualité. Si nous continuons ainsi, si nous fermons beaucoup d’exploitations agricoles, la sécurité alimentaire ne sera plus garantie pour ces produits.
Je soutiens donc ces trois amendements identiques, dont l’adoption permettrait à nos agriculteurs de voir au-delà de 2020. Car – faut-il le rappeler ? – comme tous les entrepreneurs, les agriculteurs ont besoin de visibilité.
Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste.
Indépendamment du fait que les positions de M. le ministre aient pu varier depuis l’époque où il était sénateur, je ne comprends pas le sens d’une telle suppression. Le discours de Rungis du Président de la République se caractérisait pourtant par une volonté sincère de rendre de la valeur aux producteurs.
Dans certains départements, comme le mien, le Gers, la mesure représentera une double peine pour les producteurs, notamment les viticulteurs. Nombre de communes gersoises sont dans des zones défavorisées. Elles sont confrontées à d’énormes difficultés de subsistance liées à l’extinction des activités d’élevage. Certaines sont en polyculture et font de la viticulture. Alors qu’elles sont particulièrement touchées par la suppression de l’indemnité compensatoire de handicaps naturels, l’ICHN, on les pénalise encore avec la suppression du dispositif TO-DE.
Monsieur le ministre, cette suppression est à la fois un contresens économique au regard des enjeux de compétitivité qui ont été évoqués, une faute morale, puisque les agriculteurs vont subir une double peine, et une erreur politique à l’égard du monde agricole et de la ruralité dans son ensemble !
Nous savons que vous avez besoin de vous réconcilier avec le monde rural. Nous sommes prêts à y contribuer et à nous montrer constructifs, car c’est un enjeu d’intérêt national. Mais, avec les décisions que vous vous apprêtez à prendre, vous allez aboutir à l’effet inverse de ce que vous souhaitez !
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain, ainsi que sur des travées du groupe Union Centriste et du groupe Les Républicains.
Ce que vous avez répondu ne vous ressemble pas et n’est pas à la hauteur des enjeux, monsieur le ministre.
Vous nous exhortez à ne pas voter une mesure que vous approuvez par ailleurs, de peur de voir l’Assemblée nationale retenir un dispositif moins favorable. En d’autres termes, vous vous déclarez incapable de convaincre les députés d’adopter un amendement que vous soutenez.
Vous valez mieux que cela, et vous allez faire mieux. Comprenez-le bien : une telle suppression porte atteinte au pouvoir d’achat des plus modestes. Elle obligera à embaucher à 1, 15 SMIC, donc, le cas échéant, à faire venir des travailleurs des pays de l’Est au lieu de recruter des travailleurs français que nous sommes prêts à payer au bon tarif. Nous comptons sur vous pour changer d’opinion.
Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste, ainsi que sur des travées du groupe socialiste et républicain.
Monsieur le ministre, dans la première partie de votre intervention, vous vous êtes montré extrêmement désireux d’accompagner le monde rural. Nos agriculteurs, qui connaissent de grandes difficultés dans plusieurs filières, ont des attentes fortes à cet égard.
Jusqu’à présent, 90 % des contrats saisonniers étaient en TO-DE. En Limousin, le secteur de la pomiculture, qui – cela a été rappelé – est confronté à une forte concurrence, notamment polonaise, représente plus de 3 000 emplois.
Dans la première mouture, la perte était de 144 millions d’euros. Dans la deuxième mouture, avec l’amendement, la perte est encore de 40 millions d’euros. Il faut absolument que le dispositif TO-DE s’applique. Les salariés estivaux sont payés entre 1, 2 SMIC et 1, 5 SMIC, parfois plus.
Il est donc absolument nécessaire de maintenir l’emploi et la compétitivité dans ces secteurs agricoles en grande difficulté, comme l’arboriculture ou la viticulture. L’exonération doit être jusqu’à 1, 25 SMIC.
C’est pourquoi je soutiendrai ces amendements identiques.
Je soutiens également cette proposition. Le fait que M. Cabanel, Mme Cukierman et M. Duplomb aient déposé des amendements identiques montre qu’il y a une très large majorité dans l’hémicycle pour réclamer l’annulation de la suppression du dispositif TO-DE.
Monsieur le ministre, je ne doute pas que vous ayez à cœur à la fois de renforcer la compétitive de notre agriculture et de rendre leur fierté à nos territoires ruraux. Vous l’avez démontré lorsque vous présidiez le département de la Drôme. Mais votre action passée, en tant que sénateur et président de conseil général, se heurte à la politique que vous mettez aujourd’hui en œuvre comme membre du Gouvernement.
La solution envisagée par les auteurs des amendements me semble être à la seule à même de maintenir la compétitivité de certaines filières, comme la filière arboricole. Je pense par exemple aux producteurs de pommes du nord de la Dordogne et du Limousin. Dans mon département, nous avons également de la viticulture et du maraîchage ; la fraise de Dordogne est assez réputée.
Si le dispositif TO-DE n’est pas rétabli, comme le souhaitent les auteurs de ces amendements, nombre d’exploitations seront obligées de mettre la clef sur la porte, car elles ne seront plus compétitives face à l’Espagne, sans parler de la Pologne ; les prix de la main-d’œuvre seront nettement supérieurs.
Je considère donc l’adoption de ces amendements comme le seul moyen de sauver les filières concernées.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.
Monsieur le ministre, entendez nos appels ! Nous voulons mettre nos filières à l’abri des distorsions de concurrence, du travail clandestin ou encore des prestations de services réalisées par des sociétés étrangères. À défaut, notre agriculture ne sera pas compétitive et des pans entiers du secteur disparaîtront.
Au départ, le coup de rabot était énorme. Puis le Gouvernement a utilisé un rabot plus petit. Mais, même réduit, le coup de rabot aggrave toujours les distorsions de concurrence. Le Gouvernement doit encore faire un effort. Sinon, ce sont des milliers de contrats saisonniers qui risquent d’en faire les frais.
Monsieur le ministre, mes chers collègues, nous parlons de 0, 008 % du projet de loi de financement de la sécurité sociale. Est-ce une somme démentielle ?
Par ailleurs, on ne peut pas affirmer que l’adoption de ces amendements entraînerait une perte de recettes importante pour l’État tout en indiquant qu’aucun saisonnier ne perçoit de salaire égal à 1, 25 SMIC ; car, dans ce cas, l’adoption des amendements n’aurait aucune conséquence financière…
Monsieur le ministre, vous avez eu des paroles d’amour à l’égard des agriculteurs ; pour bien vous connaître, je sais qu’elles étaient sincères. Il suffit à présent que vous leur en donniez quelques preuves !
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.
Les exploitations alsaciennes sont en général plus petites que la moyenne nationale. Beaucoup d’entre elles ont dû diversifier leur production : maraîchage, arboriculture, viticulture… Naturellement, la main-d’œuvre saisonnière est forte ; elle représente 40 % du coût de production.
La suppression envisagée représente un véritable coup de massue pour ces exploitations, auxquelles elle ôte toute compétitivité, surtout dans notre région frontalière : les coûts salariaux allemands peuvent être beaucoup plus bas. Avec cette mesure, nos exploitations seront carrément étouffées ! Je voterai donc ces amendements identiques ; j’ai d’ailleurs cosigné celui de M. Duplomb.
Monsieur le ministre, je vous demande de défendre devant l’Assemblée nationale la position qui était jadis la vôtre et qui, j’en suis convaincu, l’est toujours en votre for intérieur.
Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste et du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe socialiste et républicain.
Monsieur le ministre, vous l’avez bien compris : aujourd’hui, nous ne parlons pas de budget ou de projet de loi de financement de la sécurité sociale ; nous parlons des territoires, du cœur de la France ! Les fraises, les asperges, les pommes du Pilat… nous avons un beau panorama de la France, qui montre l’attachement du Sénat à notre pays.
L’union sacrée qui prévaut aujourd’hui dans cet hémicycle tient au fait que la mesure envisagée dans le PLFSS touche à l’identité de nos territoires et à notre modèle social.
On nous parle d’« extinction douce » du dispositif TO-DE. Une « extinction douce » est effectivement possible… à condition que les Espagnols, les Italiens, les Polonais, les Belges et les autres aient tous la même volonté d’harmonisation fiscale et sociale ! Monsieur le ministre, je vous engage à prendre votre baluchon et à aller négocier cette harmonisation fiscale et sociale en Europe !
Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste.
Pour l’instant, on prend le problème à l’envers, en mettant des boulets aux pieds de nos agriculteurs, sans compter qu’une telle mesure favorisera le travail détaché et le travail au noir. Je pense que nous ne voulons pas de cela, sur aucune travée.
Par ailleurs, monsieur le ministre, je voudrais attirer votre attention sur le fait – c’est un peu mon dada en ce moment ! – qu’une réforme portant sur les contrats courts est actuellement en préparation. Attention ! Si vous supprimez le dispositif TO-DE tout en taxant les contrats courts, on pourra vraiment fermer les exploitations de la ferme France.
Enfin, j’apprécie peu votre dernier argument : le Sénat ne devrait pas adopter un tel dispositif sous prétexte l’Assemblée nationale risque de voter autre chose… Que les députés prennent leurs responsabilités ! Pour notre part, nous prenons les nôtres. Laissons les députés aller expliquer aux agriculteurs de leur circonscription pourquoi ils auront voté la fin du dispositif TO-DE.
Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, du groupe Union Centriste, du groupe Les Indépendants – République et Territoires, du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen, du groupe socialiste et républicain et du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
M. Laurent Duplomb. Monsieur le ministre, je pourrais citer Edgar Faure : « Ce n’est pas la girouette qui tourne ; c’est le vent. »
Sourires.
Je pourrais également rapporter ce que j’ai entendu ce matin de la part de notre collègue Robert Navarro sur la nécessité de ne pas ajouter de nouvelles dépenses. Tout le monde est d’accord sur le principe de faire des économies, mais dès lors qu’il s’agit de les mettre en œuvre concrètement, c’est plus compliqué…
M. Gérard Longuet approuve.
Je me bornerai à rappeler les chiffres. Le fait de ramener le dispositif à 1, 15 SMIC – c’est ce qui a été voté à l’Assemblée nationale –, représente un coût de 100 millions d’euros. D’ailleurs, cette somme ne figure dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale. Elle fera partie d’une compensation prévue dans le projet de loi de finances. Ainsi, 70 millions d’euros proviennent des comptes de l’État et 30 millions d’euros seront prélevés sur le budget de l’agriculture.
Monsieur le ministre, ayant entendu la première partie de votre discours – à l’instar de M. Adnot, j’ai été sourd sur la seconde… §–, je souhaite vous faire une proposition.
Vous indiquez avoir compris la réalité du problème. Dans ce cas, acceptons 1, 25 SMIC. Cessons de prendre les agriculteurs pour ce qu’ils ne sont pas. Garantissons-leur la pérennité du dispositif. Et donnons-nous rendez-vous lors de l’examen du projet de loi de finances pour trouver comment financer le delta entre 1, 15 SMIC et 1, 25 SMIC, soit 30 millions d’euros.
Les 100 millions d’euros que vous avez déjà trouvés sont liés au passage à 1, 15 SMIC et à la compensation des quatre points de CICE, qui était de six points au départ. Je vous suggère de revenir au 1, 25 SMIC et de garder les quatre points. Cela représente 30 millions d’euros. Nous verrons ensemble où les prendre lors de l’examen du projet de loi de finances.
L’an dernier, votre prédécesseur avait inscrit une réserve de 300 millions d’euros sur le budget de l’agriculture. Il s’en est servi pour payer 176 millions d’euros d’apurement budgétaire, face à ce que je qualifierais volontiers d’errements de l’administration française. Dire aux agriculteurs que l’on ne peut pas trouver 30 millions d’euros quand on est capable de couvrir les erreurs de l’administration pour 176 millions d’euros, c’est tout simplement leur manquer de respect !
Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste.
Monsieur le ministre, j’ai pris la parole hier sur l’article 8. Comme l’a souligné notre collègue Cécile Cukierman, dans cet hémicycle, nous sommes tous mobilisés sur ce dossier, car il est majeur.
Je m’adresse à vous avec la tempérance qui sied au Sénat, mais nous sommes face à une crise. C’est même une crise majeure ! Vous devez donc nous proposer une sortie de crise.
J’ai défendu un amendement ayant pour objet le 1, 25 SMIC en général, qui est tombé dans les méandres de l’irrecevabilité. Vous m’avez indiqué que le dispositif aurait peu d’effet sur les grosses structures. Je crois que nous ne parlons pas du même monde rural ! Pour ma part, je parle des petites exploitations et des petites entreprises agricoles qui travaillent aussi avec des emplois saisonniers.
Hier, j’ai pris l’exemple des pépiniéristes viticoles. Ils sont 600. À la force des bras, ils sont devenus l’année dernière leaders mondiaux. Ils sont touchés par le dispositif que vous proposez. En l’état, cela représente 5 millions d’euros pour eux en moins, soit 8 000 euros en moins par pépinière. Cela peut vous paraître dérisoire, mais ce ne l’est pas pour eux ni pour nous, élus locaux. Nous nous battons depuis des années pour sauver nos territoires et nos exploitations agricoles, qui font le socle de notre économie locale. Ces exploitations embauchent, emploient nos concitoyens et font parfois survivre des familles de nos communes. Nous leur devons ce combat. Et vous nous le devez !
En une seule décision, vous allez briser la dynamique que nous avons mis des années à engager ; vous allez casser ce que nous avons gagné de haute lutte pour nos territoires !
J’ai tout de même une pensée pour nombre de collègues qui sont au bord du gouffre. Pour ma part, je leur dirais que, ensemble, nous avons voté un sursis pour eux aujourd’hui. Mais vous, qu’allez-vous leur dire ? Ce que vous disiez dans cet hémicycle voilà quelques jours à peine, alors que vous étiez encore sénateur, à savoir que l’adoption d’une telle mesure serait « la fin de l’agriculture » ?
Prenez vos responsabilités, monsieur le ministre. Vous devez nous proposer quelque chose ce soir !
Applaudissements sur les travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen, du groupe Union Centriste et du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe socialiste et républicain et du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Les trois amendements identiques dont nous sommes saisis sont politiquement « transcourants », ce qui montre leur importance capitale.
Monsieur le ministre, je vous fais tout à fait confiance. Lors de votre prise de fonction, vous avez déclaré que le suicide des agriculteurs ne devrait plus exister. Vous êtes donc face à vos responsabilités.
Le président du Sénat est venu dans mon département accompagné de Sophie Primas et d’Anne-Catherine Loisier, alors rapporteur sur le projet de loi pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et une alimentation saine et durable. Les centres de gestion d’économie rurale ont présenté les résultats de notre agriculture, qui étaient négatifs dans presque tous les secteurs : céréales, élevage allaitant… Seules la viticulture et la production laitière dégageaient quelques marges.
À un moment donné, la Mutualité sociale agricole a publié le revenu des agriculteurs : un tiers d’entre eux gagnent moins de 360 euros par mois et encore un tiers ont moins de 1 000 euros par mois. Ces amendements sont donc tout à fait symboliques compte tenu de la situation de notre agriculture. La crise est structurelle ; elle n’est plus conjoncturelle, la sécheresse ayant encore aggravé les choses.
Monsieur le ministre, vous avez suffisamment d’expérience de la vie parlementaire. Vous étiez à mes côtés lorsque je présidais une commission permanente du Sénat. Vous avez indiqué que l’Assemblée nationale risquait d’opter pour 1, 20 SMIC. Mais vous vous doutez bien que si le Président de la République se prononce en faveur d’une exonération à 1, 25 SMIC, l’Assemblée nationale le suivra !
Soyez attentif à la situation très délicate de notre agriculture. C’est son avenir qui est en jeu. D’ailleurs, le budget de l’agriculture est en baisse. Certes, M. le ministre a dit qu’il fallait aussi tenir compte de la forêt et de la ruralité. Mais les crédits baissent tout de même de 268 millions d’euros dans le projet de loi de finances.
L’agriculture doit être soutenue aujourd’hui si nous voulons défendre nos territoires ruraux, en particulier nos paysages et nos productions de qualité.
Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste.
Avec mon collègue Philippe Mouiller, nous ne voulons pas que notre département, les Deux-Sèvres, subisse une double peine. Comme cela a été évoqué, 1 200 exploitants ne vont plus bénéficier de l’ICHN ; seules treize exploitations de notre département continueront à en bénéficier. On nous a annoncé voilà quelques mois les conséquences d’une telle mesure sur le travail saisonnier, par exemple dans l’arboriculture et la production de melons.
J’ai eu beaucoup d’espoir en lisant les déclarations des députés La République En Marche de notre département, selon lesquelles l’Assemblée nationale avait voté le maintien de l’exonération en commission. Ils indiquaient notamment : « Cette décision est le fruit d’un travail collectif […] et le signe que les députés de la majorité demeurent résolus au quotidien à soutenir notre monde agricole. »
Toutefois, ils ajoutaient vouloir rester vigilants quant à la nouvelle copie qui devait être rendue prochainement. Force est de constater qu’ils ne sont pas restés bien vigilants ! L’agriculture de notre département ne se retrouve pas dans la décision qui a été prise à l’Assemblée nationale.
Comme l’a souligné notre collègue Laurent Duplomb, le manque sera de 39 millions d’euros en 2019, de 64 millions d’euros en 2020 et de 144 millions d’euros en 2021. Vous comprenez bien que nous ne puissions plus entendre de tels messages.
En Nouvelle-Aquitaine – vous savez qu’il s’agit d’une grande région –, 175 930 contrats saisonniers, cela représente un manque de 8 millions d’euros pour la seule année 2019. Soyons raisonnables : dans un contexte de concurrence entre les territoires européens, chaque euro compte !
Le coût du travail saisonnier est inférieur de 27 % en Allemagne, de 35 % en Espagne et de 37 % en Italie. Mettez-vous à la place des arboriculteurs des Deux-Sèvres et du territoire français en général ; ils ne peuvent pas admettre de telles décisions !
Monsieur le ministre, nous comptons sur vous pour faire en sorte que nos territoires ruraux puissent continuer à vivre et que nos agriculteurs ne subissent pas de double peine.
Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste.
Monsieur le ministre, voilà quelques semaines, alors que vous étiez encore sénateur, vous déclariez ceci : « Lorsqu’un ministre de Bercy répond à une question sur l’agriculture, je m’inquiète terriblement. » Cela vous avait valu d’être très applaudi dans cet hémicycle. Applaudi, vous l’avez encore été voilà quelques minutes après votre vibrant plaidoyer en faveur de l’agriculteur. Malheureusement, ce fut un peu plus compliqué au moment de la chute…
Lorsqu’un amendement déposé par notre collègue Laurent Duplomb et par des sénateurs d’autres groupes politiques est unanimement soutenu et devient, en quelque sorte, l’amendement du Sénat, il convient d’y porter une attention toute particulière. Il y va tout simplement de l’avenir de notre agriculture.
La proposition de notre collègue Laurent Duplomb, qui vous donne rendez-vous lors de l’examen du projet de loi de finances pour trouver les millions d’euros manquants, me semble particulièrement intéressante. Monsieur le ministre, montrez-nous que votre plaidoyer pour l’agriculture saura convaincre les députés de la majorité ! Montrez-nous que vous êtes un ministre de l’agriculture qui sait tenir tête à Bercy !
Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste.
L’amendement de repli que j’ai déposé a été signé par un certain nombre de parlementaires de mon groupe, du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste.
Monsieur le ministre, je vous ai entendu. Je sais l’intérêt que vous portez au milieu rural et à l’agriculture. J’ai pour vous beaucoup de respect et d’estime. Vous avez été, comme un certain nombre d’entre nous, président de département, donc tout près de la ruralité.
Je considère qu’un certain nombre de mes arguments sont repris dans le dispositif proposé par M. Duplomb. Je soutiendrai donc son amendement, que je trouve meilleur pour les agriculteurs. Une telle mesure permettrait d’apporter des aides et d’éviter les problèmes de compétitivité dus aux charges excessives, aux travailleurs étrangers, au travail au noir… Je suis disposé à retirer mon amendement pour voter le sien.
Applaudissements sur les travées du groupe Les Indépendants – République et Territoires et du groupe Les Républicains.
Je ne reviens pas sur les arguments qui ont déjà été défendus avec précision, conviction et souvent même émotion. À ce grand cri de désespoir qui provient de tous les territoires de France et qui s’exprime aujourd’hui au Sénat, je veux ajouter la voix de mon département.
L’économie agricole du département de l’Aisne se développe surtout sur de grandes plaines céréalières et betteravières. Mais elle comporte, dans les vallées et dans certains secteurs, une activité de viticulture, avec la production de 10 % du champagne français, ainsi que différentes activités maraîchères : légumes, fruits, aromates, safran bio… Ces activités seraient bien évidemment durement touchées par les mesures envisagées si celles-ci devaient demeurer en l’état.
Je voterai donc évidemment en faveur des amendements qui nous sont proposés.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.
J’entends des représentants de chaque territoire décrire la même réalité. Dans mon département, le Tarn-et-Garonne, les arboriculteurs et les maraîchers sont dans la même situation. Nous savons très bien que la fin de l’exonération va créer des problèmes majeurs et déstabiliser des filières entières.
Monsieur le ministre, le 26 septembre dernier, ici même, nous avons tous applaudi sincèrement vos propos lorsque vous avez, en tant que sénateur, interpellé le ministre. C’était Mme Gény-Stephann qui vous répondait, et vous aviez eu, comme l’a dit notre collègue Mathieu Darnaud, des mots très clairs sur ce sujet. Vous aviez même ajouté qu’en supprimant l’exonération de charges du dispositif TO-DE, on signait la fin de la petite agriculture, celle que précisément nous voulons aujourd’hui préserver.
Très franchement, je trouve votre réponse dilatoire eu égard au sujet. Vous dites à tout propos – c’est bienvenu – que vous voulez défendre les agriculteurs ; vous l’avez encore dit hier devant la commission. Or vous avez là l’occasion rêvée, si j’ose dire, de mettre vos actes en conformité avec vos propos et aussi, me semble-t-il, avec vos convictions. J’aimerais que, comme ministre, aujourd’hui, vous retrouviez toute la lucidité qui était la vôtre lorsque vous siégiez ici, comme sénateur, il y a six semaines encore.
Vous dites aujourd’hui qu’il faut prendre ses responsabilités et que vous ne serez peut-être pas en mesure de convaincre les députés. Mais, parmi les députés, il s’en trouve sans doute quelques-uns qui demeurent « en pleine terre » et qui sont capables, en tant que parlementaires, de mesurer les effets que produira sur leur territoire l’application d’une telle disposition.
De toute façon, nous attendons d’un ministre, sur un sujet majeur comme celui-ci, qu’il mette tout son pouvoir de conviction dans l’exercice de sa pleine responsabilité.
Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, du groupe Union Centriste et du groupe socialiste et républicain.
Monsieur le ministre, auditionné, hier soir, par la commission de la culture, vous nous avez « boostés ». En sortant, nous quittions un ministre à la fois remonté et heureux, qui nous avait donné beaucoup d’espoir. Aujourd’hui, c’est une petite douche froide que nous recevons.
Sourires.
Nous représentons des territoires pour la plupart agricoles. Le mien est dominé par la vigne et par le maraîchage. J’ai déjà eu l’occasion d’en parler, à propos des melons : six cents ouvriers viennent de pays étrangers pour ramasser des melons parce que nous n’avons personne ici pour le faire.
Le plus difficile, c’est de les loger. Mais le problème dont nous sommes saisis, aujourd’hui, n’est pas celui du logement ; le problème est de maintenir le dispositif, comme l’ont demandé mes collègues Laurent Duplomb, Cécile Cukierman et Henri Cabanel.
Le Sénat est la maison des territoires. Si nous ne sommes pas capables, ici, de défendre la viticulture, qui le fera ? Il faut rappeler qu’un viticulteur se suicide tous les deux jours ; il faut dire combien sont grandes les difficultés de ces agriculteurs ; mais cela ne suffit pas.
Ce n’est pas l’Assemblée nationale qui les défendra : les députés en sont incapables. Ce ne sont pas des gens de territoire ! Ils sont élus depuis peu de de temps. Enfin, pardonnez-moi de le dire, ils sont un peu aux ordres.
Si nous, ici, ne nous battons pas, qui se battra ? Monsieur le ministre, nous comptons vraiment sur vous et nous sommes convaincus que nous ne serons pas déçus.
Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe Union Centriste.
Je voudrais à mon tour relayer les très vives inquiétudes des agriculteurs, ceux de Bretagne en particulier.
La Bretagne, comme chacun sait, est un grand territoire agricole ; l’agriculture y occupe une place prépondérante. L’ensemble des professionnels est aujourd’hui extrêmement inquiet : d’une part, l’agriculture a connu des périodes très difficiles, avec des cours historiquement bas pesant sur l’équilibre économique des exploitations ; d’autre part, les agriculteurs qui ont recours à des travailleurs occasionnels ont du mal à trouver de la main-d’œuvre – je pense en particulier aux maraîchers du nord du Finistère.
Il est important qu’ils bénéficient de toutes les dispositions leur permettant de recruter cette main-d’œuvre qui est absolument nécessaire à la récolte des produits à maturité.
J’attire donc l’attention du Gouvernement sur cette difficulté, sur les attentes extrêmement fortes des agriculteurs bretons à l’égard de ce dispositif et sur la nécessité de les accompagner, pour que leur avenir, c’est-à-dire l’équilibre économique de leur activité, soit assuré.
Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste.
Je me souviens d’un sénateur qui, en son temps, défendait les agriculteurs en toute occasion : c’était l’actuel ministre de l’agriculture.
Monsieur le ministre, nous avons participé ensemble à des réunions dans le département de la Drôme, premier département bio, ô combien défendu par l’ex-sénateur et désormais ministre que vous êtes. Lors de tables rondes avec les agriculteurs, nous avons pris l’engagement de défendre le TO-DE ; je ne comprendrais donc pas que vous reveniez sur cet engagement.
Je suis convaincu que l’actuel ministre est et sera un très bon ministre de l’agriculture
Oh ! sur diverses travées.
Il faut absolument défendre l’amendement déposé par Laurent Duplomb et nos autres collègues. C’est important : il y va de la survie de nos agriculteurs.
M. Gérard Longuet applaudit.
Comme je l’ai dit en défendant mon amendement, qui vise à ce que l’exonération de cotisation soit totale jusqu’à 1, 20 SMIC, la suppression du TO-DE n’est plus d’actualité : l’Assemblée nationale a voté un seuil de 1, 15 SMIC.
Quant à moi, j’ai proposé un seuil de 1, 20 ; quoi qu’il en soit, nous sommes tous mobilisés, ici, pour maintenir le TO-DE. Le véritable enjeu, plus que le chiffre proprement dit, 1, 20 ou 1, 25, c’est la pérennisation du dispositif dans le temps. C’est extrêmement important !
Ces précisions étant apportées, je retire mon amendement.
Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains. – Mme Nathalie Delattre applaudit également.
L’amendement n° 134 rectifié bis est retiré.
La parole est à M. Jean-Noël Cardoux, pour explication de vote.
M. Jean-Noël Cardoux. Je ne souhaitais pas allonger le débat, mais il faut tout de même compléter le tour de France !
Sourires.
La région Centre est elle aussi fortement concernée par ce problème, avec la Sologne, territoire pauvre remis partiellement en valeur par le maraîchage et la culture biologique, les vergers de l’Orléanais, l’arboriculture, la vigne, j’en passe et des meilleurs. Toutes ces activités seront fortement touchées si le Gouvernement va au bout de son raisonnement. Je voulais simplement le signaler, pour que le tour de France soit complet.
Le cœur de mon intervention sera d’ordre financier. J’ai écouté Laurent Duplomb, qui nous a expliqué que la proposition finale du Gouvernement représente, par rapport à la sienne, 30 millions d’euros de charges supplémentaires.
Monsieur le ministre, vous avez le temps ; demandez à Bercy, puisque le ministre des comptes publics est dans nos murs, de faire un petit calcul – celui-ci, certes, comporte toujours une marge d’erreur – et comparez ces 30 millions d’euros avec la fraude sociale que suscitera le dispositif du Gouvernement.
Il est évident, en effet, que la plupart des exploitations, confrontées à ce problème, décideront de payer au noir ; et, par définition, ce travail dissimulé ne produira plus de cotisations sociales. In fine, le montant de cette perte de cotisations sera très probablement largement supérieur aux 30 millions d’euros dont nous discutons.
Mme Marie-Thérèse Bruguière, M. François Bonhomme et M. Gérard Longuet applaudissent.
Brièvement, je retiens deux choses de ce débat.
La plus large unanimité se fait ici – il n’y manque pas une voix, me semble-t-il –, pour soutenir le maintien du dispositif TO-DE. Bien sûr, nous n’avons aucun pouvoir sur l’Assemblée nationale. Notre seul pouvoir consiste à tenter d’influencer et de convaincre le ministre ; en l’occurrence, si j’ai bien compris, il n’a pas besoin d’être convaincu. Vous l’avez tous entendu, mes chers collègues : M. le ministre est convaincu, comme nous, de l’intérêt du maintien de ce dispositif.
Que pouvons-nous encore faire ? Il n’est pas nécessaire de mobiliser les organisations agricoles ; elles le sont déjà. Mais nous pouvons peut-être exercer notre pouvoir d’influence sur nos collègues députés, dans nos départements, en particulier dans les départements les plus concernés – mais je crois que nous sommes tous concernés, peu ou prou, par les cultures maraîchères, par les fruits et les légumes.
Je vous invite donc tous, afin de donner l’élan dont elle a besoin à l’agriculture – je n’ose dire la petite agriculture – française, qui est présente sur l’ensemble de nos territoires, à vous mobiliser, dans les quinze prochains jours, pour convaincre nos collègues députés.
C’est ce qu’il nous reste à faire, après avoir voté, bien sûr, les trois amendements identiques n° 195 rectifié bis, 379 et 458 rectifié bis.
Ah ! sur les travées du groupe Les Républicains.
Mesdames, messieurs les sénateurs, je voudrais vous remercier de l’engagement qui est le vôtre au service de l’agriculture et des convictions que vous défendez. Nous nous connaissons bien, et je suis sûr que vous poursuivrez cet engagement lorsque nous discuterons du budget que je vous présenterai d’ici quelques jours.
Ce budget est légèrement en augmentation ; il devrait donc vous convenir – mais nous aurons l’occasion d’en débattre. Surtout, madame Férat, il augmente beaucoup s’agissant de l’enseignement agricole – il en a été question en commission –…,
… mais nous n’en sommes pas là.
Je dirai deux choses. J’ai parlé de l’Assemblée nationale, et vous avez pris mes propos de façon quelque peu polémique.
Toutefois, il y a un mois, le TO-DE était supprimé, et – passez-moi l’expression – les travailleurs saisonniers étaient totalement plantés ! J’étais opposé à cette suppression, monsieur Darnaud – je l’ai dit. Le dispositif tel qu’il vous est présenté aujourd’hui représente un coût de 105 millions d’euros – c’est ce qu’a voté l’Assemblée nationale.
Protestations sur les travées du groupe socialiste et républicain.
Si vous souhaitez aller plus loin, rien ne vous empêche de faire un pas de plus. Mais, je l’ai dit, la démarche du Gouvernement, c’est la baisse des charges. Et, en la matière, la ferme France gagne plus de 70 millions d’euros. Si l’on fait le compte des baisses de charges, je connais beaucoup d’agriculteurs, y compris de leaders agricoles, qui, eux, sont très bénéficiaires – encore faut-il ajouter au tableau l’exemption d’augmentation de la TICPE. C’est une réalité !
Nous avons une divergence. Doit-on baisser les charges ou non ? Le choix de ce gouvernement est de les baisser. Mais cette baisse exige d’en passer par des phases de transition.
J’en viens à mon deuxième argument : monsieur Savary, je n’ai jamais dit que les travailleurs saisonniers étaient payés au SMIC. En moyenne, ils sont payés 1, 1 SMIC. C’est une moyenne : autrement dit, il y en a autant au-dessus qu’au-dessous.
Dans l’arboriculture, 70 % des salariés saisonniers sont étrangers ; dans l’ensemble des autres cultures, 63 % des travailleurs saisonniers résident en France, qu’ils soient Français ou non, et 37 % résident à l’étranger – ces chiffres sont ceux d’aujourd’hui, avec le TO-DE.
Enfin, le problème de compétitivité qu’évoquait M. Kern à propos de l’Alsace se produit alors que le TO-DE est en place. La vraie question est de savoir comment nous nous battons face à l’Espagne et, pire, face à l’Allemagne, qui nous taille des croupières sur les légumes. C’est cela, le sujet.
Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.
Quant à moi, jamais je ne proposerai de supprimer le SMIC en France au nom du dumping social et de la concurrence avec les Allemands et les Espagnols. Tel n’est tout simplement pas mon choix.
C’est la raison pour laquelle je maintiens mon avis défavorable sur ces amendements, tout en vous remerciant du débat que nous avons eu cet après-midi.
Nous allons à présent passer au vote de ces amendements en discussion commune.
Monsieur Pellevat, l’amendement n° 123 rectifié bis est-il maintenu ?
Compte tenu de l’argumentation de M. le rapporteur général, je le retire au profit de l’amendement n° 195 rectifié bis, que j’ai également cosigné, monsieur le président.
L’amendement n° 123 rectifié bis est retiré.
Madame Grelet-Certenais, l’amendement n° 389 rectifié est-il maintenu ?
L’amendement de M. Duplomb ayant vocation à être adopté, je retire également le mien, monsieur le président.
L’amendement n° 389 rectifié est retiré.
Monsieur le ministre, pouvez-vous rappeler l’avis du Gouvernement sur l’amendement n° 623 ?
L’avis du Gouvernement est favorable sur cet amendement de coordination.
L ’ amendement est adopté.
L’amendement n° 160 rectifié bis est retiré.
Madame Conconne, l’amendement n° 308 rectifié est-il maintenu ?
L’amendement n° 308 rectifié est retiré.
Madame Delattre, l’amendement n° 573 rectifié bis est-il maintenu ?
L’amendement n° 573 rectifié bis est retiré.
La parole est à M. Franck Montaugé, pour explication de vote sur l’amendement n° 324.
Cet amendement, qui est identique aux deux qui viennent d’être retirés, a pour objet les entreprises de travaux agricoles. Son adoption serait cohérente avec le maintien du dispositif TO-DE, dont nous venons de discuter.
Surtout, il n’y a pas d’incompatibilité entre le maintien du dispositif et son extension aux entreprises de travaux agricoles.
Ce n’est pas sûr ! Il serait plus prudent de ne pas voter cet amendement…
Chacun votera comme il l’entend, mais je pense qu’il y a là un vrai sujet. C’est l’équité qui est en jeu, ainsi que l’intérêt de tous les exploitants agricoles ayant recours aux services d’entreprises de travaux ruraux. J’en suis intimement convaincu, jusqu’à preuve du contraire !
Pour la clarté de nos débats, monsieur le rapporteur général, pouvez-vous rappeler l’avis de la commission sur l’amendement n° 324 ?
Monsieur le ministre, pouvez-vous rappeler l’avis du Gouvernement sur ce même amendement ?
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
Je mets aux voix les amendements identiques n° 195 rectifié bis, 379 et 458 rectifié bis.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe socialiste et républicain.
Je rappelle que l’avis de la commission est favorable et que celui du Gouvernement est défavorable.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
Le scrutin a lieu.
Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
Il est procédé au dépouillement du scrutin.
Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 16 :
Nombre de votants341Nombre de suffrages exprimés339Pour l’adoption320Contre 19Le Sénat a adopté.
Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, du groupe Union Centriste, du groupe socialiste et républicain et du groupe communiste républicain citoyen e
En conséquence, les amendements n° 281 rectifié bis et 162 rectifié ter n’ont plus d’objet.
Mes chers collègues, M. le ministre de l’agriculture a dû quitter notre hémicycle, non par crainte du résultat du scrutin
Sourires.
Il est remplacé au banc du Gouvernement par deux ministres que je salue, M. le ministre de l’action et des comptes publics et Mme la ministre des solidarités et de la santé.
Je mets aux voix l’amendement n° 622.
L ’ amendement est adopté.
L’amendement n° 14 rectifié, présenté par Mme N. Delattre, MM. Arnell, A. Bertrand, Castelli, Collin et Corbisez, Mme Costes, MM. Gabouty, Gold et Guérini, Mme Guillotin et MM. Léonhardt, Menonville, Requier, Roux et Vall, est ainsi libellé :
I. – Après l’alinéa 58
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
- À la fin de la seconde phrase du dernier alinéa, les mots : « dans leur rédaction en vigueur au 31 décembre 2010 » sont supprimés ;
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Nathalie Delattre.
J’aimerais que nous puissions aller au bout de la logique que nous avions engagée à l’article 8, devenu article 18, de la loi pour un État au service d’une société de confiance, où nous avons consacré le principe du bulletin de paie unique.
Qu’est-ce qu’un bulletin de paie unique ? Il s’agit pour l’employeur de n’émettre qu’un seul bulletin de paie lorsque la durée du contrat de travail est inférieure à un mois, mais à cheval sur deux mois distincts.
À titre de complément, si l’on veut être cohérent, je pense qu’il faut caler sur ce modèle les définitions qui sont données des notions de SMIC et de rémunération mensuelle pour calculer la réduction de charges patronales dont nous venons de parler.
Le texte actuellement en vigueur du code rural et de la pêche maritime s’appuie sur le code de la sécurité sociale dans sa rédaction en vigueur au 31 décembre 2010. Dans cette rédaction, le calcul de la réduction ne se fait pas sur la totalité du contrat de travail, mais sur chaque mois civil.
Je vous propose donc, mes chers collègues, d’uniformiser ces dispositions.
Il s’agit de modifier les modalités de calcul de la rémunération et du SMIC pour l’application du dispositif TO-DE.
Le texte de cet amendement présente selon nous un vrai problème rédactionnel, l’article du code rural et de la pêche maritime modifié par l’amendement visant des phrases d’un article du code de la sécurité sociale qui n’existent plus…
Il me semble donc que nous ne pouvons pas l’adopter, mais je souhaite entendre l’avis du Gouvernement.
Visiblement, sa rédaction pose problème. Je le retire donc, monsieur le président.
L’amendement n° 14 rectifié est retiré.
L’amendement n° 624, présenté par M. Vanlerenberghe, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 65
Insérer un paragraphe ainsi rédigé :
…- À la seconde colonne de la soixante-troisième ligne du tableau constituant le second alinéa du I de l’article L. 5785-1 du code des transports, la référence : « loi n° 2016-816 du 20 juin 2016 » est remplacée par la référence : « loi n° … du … de financement de la sécurité sociale pour 2019 ».
La parole est à M. le rapporteur général.
L ’ amendement est adopté.
L’amendement n° 240 rectifié quater, présenté par M. Laugier, Mme Morin-Desailly, M. Marseille, Mmes Delmont-Koropoulis et Duranton, MM. Lafon, del Picchia et Moga, Mme Puissat, M. Paccaud, Mme Guidez, M. B. Fournier, Mme L. Darcos, M. Courtial, Mme Loisier, M. Joyandet, Mme Billon, M. Grand, Mmes Vullien et de Cidrac, MM. Chasseing et Kern, Mme A.M. Bertrand, MM. Détraigne, Schmitz et Janssens, Mme Boulay-Espéronnier, M. Cadic et Mme Vérien, est ainsi libellé :
I. – Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – Le VI de l’article L. 241-13 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° Le premier alinéa est complété par les mots : « ainsi qu’avec l’application du dispositif d’assiette forfaitaire résultant du IV de l’article 22 de la loi n° 91-1 du 3 janvier 1991 tendant au développement de l’emploi par la formation dans les entreprises, l’aide à l’insertion sociale et professionnelle et l’aménagement du temps de travail, pour l’application du troisième plan pour l’emploi pour l’intégralité des revenus tirés de l’activité de portage de presse » ;
2° Au second alinéa, les mots : « du cas » sont remplacés par les mots : « des cas ».
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Michel Laugier.
Cet amendement a pour objet le portage de la presse à domicile.
En 2017, quelque 54 % de la presse quotidienne régionale et 13 % de la presse quotidienne nationale recourent au portage pour la distribution des titres, soit 800 millions d’exemplaires par an. Le portage emploie 12 000 porteurs. Il représente un enjeu crucial pour le débat démocratique, pour la presse, notamment locale, et pour la diffusion de l’information dans l’ensemble des territoires.
Comme tous les secteurs économiques, le portage a bénéficié du CICE, qui lui a permis de recruter et d’investir dans des outils d’amélioration des performances. Or, en l’état actuel, la transformation du CICE en allégements de charges ne pourra pas bénéficier aux entreprises de portage de presse, qui supporteraient donc, au 1er janvier 2019, une hausse des coûts de quelque 4 millions d’euros.
L’absence de compensation pourrait en outre se cumuler avec la baisse de 5 millions d’euros de l’aide au portage prévue dans le projet de loi de finances pour 2019. La perte serait donc, au total, en 2019, de 9 millions d’euros, ce qui causerait de très forts risques pour l’équilibre économique du portage.
La volonté du législateur étant de compenser intégralement la suppression du CICE, il serait incohérent que les entreprises de portage soient privées d’une telle compensation. Il convient donc de préciser la portée de l’interdiction de principe du cumul fixée à l’article L. 241-13 du code de la sécurité sociale et d’ajouter que la réduction générale des cotisations patronales sur les bas salaires s’applique à l’ensemble de la rémunération issue de l’activité du portage de presse.
Il s’agit d’autoriser le cumul des allégements généraux avec l’application d’un dispositif d’assiette forfaitaire propre au secteur du portage de presse.
Ce dispositif ne coûte pas très cher – de l’ordre de 4 millions d’euros. Il concerne un secteur à la fois fragile économiquement et sensible – chacun en conviendra – du point de vue de la liberté d’expression.
Nous y sommes donc plutôt favorables, mais nous souhaitons entendre l’avis du Gouvernement.
Monsieur Laugier, depuis 1991, les vendeurs, colporteurs et porteurs de presse bénéficient de la possibilité de calculer les cotisations et contributions de sécurité sociale sur une assiette forfaitaire.
En outre, depuis 2009, les employeurs sont exonérés de cotisations patronales sur les rémunérations versées aux vendeurs, colporteurs et porteurs de presse. L’exonération est applicable aussi bien sur l’assiette forfaitaire que lorsque les cotisations sont calculées sur le montant des rémunérations réelles.
Ainsi, le cumul de ces dispositifs aboutit à un coût du travail extrêmement faible. Permettre le cumul de ces dispositifs avec les allégements généraux reviendrait à accorder auxdits employeurs un avantage exorbitant. C’est pour éviter ces situations que le cumul des allégements généraux de cotisations sociales avec un autre type d’avantage, comme les assiettes forfaitaires, est totalement proscrit.
Bien entendu, l’employeur est exigible aux allégements généraux de cotisations sociales dès lors qu’il renonce à l’application de l’assiette forfaitaire. Or, compte tenu de leur renforcement substantiel, les allégements généraux deviendront en 2019 plus favorables que le dispositif spécifique qui s’applique aux porteurs de presse, jusqu’à un niveau de salaire correspondant à environ 1, 1 SMIC, ce qui concerne un grand nombre des emplois du secteur.
Le cumul avec l’assiette forfaitaire ne nous semble pas justifié. L’avis du Gouvernement est donc défavorable sur cet amendement.
L ’ amendement est adopté.
L ’ article 8 est adopté.
L’amendement n° 491, présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly, Lienemann et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 8
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Aux cinquième et neuvième alinéas de l’article L. 137-11-1 du code de la sécurité sociale, le taux : « 21 % » est remplacé par le taux : « 34 % ».
La parole est à M. Fabien Gay.
Nous proposons, au travers de cet amendement, de procéder à une sensible augmentation de la contribution due par les bénéficiaires d’un certain nombre de retraites à prestations définies, versées notamment aux cadres dirigeants de plusieurs entreprises importantes.
Je nous invite collectivement à ouvrir les pages de ce que l’on appelle un « document de référence », c’est-à-dire le document de promotion que les grands groupes inscrits à la cote officielle de la bourse mettent en circulation pour narrer le roman de leur entreprise.
Regardons de près le document de Danone, celui d’Engie ou de n’importe quelle autre entreprise : un chapitre y est toujours consacré à la gouvernance, notamment au dispositif mis en place pour fidéliser les administrateurs de ce type d’entreprise. Nul doute qu’entre les plans d’achat, les plans d’action de performance, les jetons de présence, les éléments de rémunération variable, les plans de retraite à prestations définies et les rémunérations annuelles à six zéros derrière le premier chiffre, nous sommes fort loin de la situation des retraités ayant subi une baisse de revenus du fait de l’augmentation de la CSG.
Prenons un seul exemple, celui du PDG de Danone, Emmanuel Faber, dont la retraite sera calculée sur la base de plus de 2 millions d’euros. Voilà qui est assez éloigné, nous en conviendrons toutes et tous, de ce qui est pratiqué par la Caisse nationale d’assurance vieillesse. Nous proposons donc que ces personnes contribuent un tant soit peu à l’effort national, en vue d’une traduction plus nette de l’égalité républicaine.
Ces rentes subissant déjà, outre ce prélèvement, les impositions et contributions « classiques », il ne convient pas de basculer au-delà de la taxation cumulée, qui est considérée comme confiscatoire par le Conseil constitutionnel.
Je précise, par ailleurs, qu’il s’agit de contributions spécifiques s’appliquant à des personnes spécifiques, et non à des entreprises.
L’avis de la commission est donc défavorable.
Monsieur le sénateur, vous proposez d’augmenter à hauteur de 34 % le taux de contribution.
Nous rappelons que le Conseil constitutionnel avait déjà censuré une contribution établie à 21 % pour la part des rentes supérieure à 24 000 euros par mois. En effet, le cumul entre l’impôt sur le revenu, les prélèvements sociaux et la contribution salariale spécifique au taux de 21 % pour la fraction des retraites chapeau excédant 24 000 euros, aboutissait à un taux d’imposition de 75 %, jugé confiscatoire par le Conseil.
Au regard de cette jurisprudence, nous sommes défavorables à l’amendement.
J’entends bien la réponse de M. le rapporteur général et de Mme la ministre, mais nous parlons budget…
J’ai bien compris aussi qu’il existait une jurisprudence en la matière : lorsque nous demandons aux plus riches de ce pays de contribuer un peu plus à l’effort national, on nous répond à chaque fois : « Attention, c’est confiscatoire ! » Or je n’entends pas cet argument quand on augmente la CSG des petits retraités ou quand le Gouvernement taxe l’essence, le fioul domestique ou le gaz, ce qui pèse lourdement sur le budget des familles populaires et des classes moyennes. Dans ce cas, j’y insiste, on ne nous dit pas que c’est confiscatoire ! Nous connaissons la jurisprudence qui a été invoquée, mais nous voulions avoir ce débat dans l’hémicycle.
On entend répéter qu’il n’y a pas d’argent ; un de nos collègues le disait encore ce matin en commission des affaires économiques. Mais si, mes chers collègues, il y a de l’argent, et même beaucoup, dans ce pays, mais il est accaparé par une minorité ! Et cette réalité est de plus en plus criante aujourd’hui.
Nous faisons, ici, des choix politiques. Avec ce gouvernement, ces choix sont toujours les mêmes : protéger les plus riches, les nantis, et taper sur les classes populaires et moyennes.
J’entends donc bien l’argument du caractère confiscatoire de la mesure que nous proposons, mais je voudrais qu’il soit invoqué, aussi, s’agissant des politiques que vous menez depuis dix-huit mois dans ce pays !
Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 128 rectifié quater, présenté par MM. Segouin, Bonhomme et Courtial, Mme Garriaud-Maylam, MM. Paccaud, Grosdidier et Brisson, Mme Bonfanti-Dossat, M. Mandelli, Mmes Gruny et de Cidrac, M. Charon, Mme Boulay-Espéronnier, MM. Darnaud, Genest et Laménie, Mmes Delmont-Koropoulis et Procaccia, MM. Babary, Sido et Gremillet et Mme Noël, est ainsi libellé :
Après l’article 8
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Après l’article L. 161-22-1 A du code de la sécurité sociale, il est inséré un article L. 161- 22-1 … ainsi rédigé :
« Art. L. 161 -22 -1 … – L’article L. 161-22 ne fait pas obstacle à l’exercice par un médecin retraité d’une activité de remplacement dans une zone définie sous-dense par l’agence régionale de santé, pour une durée cumulée n’excédant pas vingt-quatre mois. Les revenus perçus par le médecin retraité au titre de son activité de remplacement sont exonérés de la totalité des cotisations sociales et de retraite dès lors qu’ils n’excèdent pas 50 000 euros nets annuels. »
II. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Max Brisson.
Pour faire face à la désertification médicale, qui progresse partout, la transmission médicale représente un véritable défi pour lequel il faut trouver des solutions.
L’association entre un médecin retraité et un médecin en activité ou un médecin en recherche d’installation en est une. Elle permet d’apporter une réponse au problème de la transmission et d’avoir une prise en charge continue entre un médecin et son successeur sur des territoires fragiles en termes de couverture. Pour cela, l’amendement vise à mettre en place une exonération fiscale à hauteur de 50 000 euros nets annuels pour le médecin retraité.
D’autres amendements visent à aller plus loin. Le chiffre proposé dans le présent amendement, qui correspond à la moitié des bénéfices non commerciaux moyens des médecins en 2016 paraît, à la fois, attractif et raisonnable.
L’amendement n° 7 rectifié, présenté par M. Cardoux, Mme Morhet-Richaud, M. Huré, Mme Puissat, M. Bascher, Mmes Micouleau, Bruguière et Deseyne, M. Charon, Mmes Deromedi, Di Folco et Procaccia, MM. Morisset et Mouiller, Mme Lopez, M. Brisson, Mmes Bonfanti-Dossat, Lassarade et Estrosi Sassone, MM. Calvet et del Picchia, Mmes Delmont-Koropoulis et Duranton, MM. Kennel, Pierre, Schmitz, Retailleau, B. Fournier, Cuypers, J.M. Boyer, Chaize et Bouchet, Mmes F. Gerbaud et Imbert, M. Saury, Mmes L. Darcos et Garriaud-Maylam, MM. Priou et Lefèvre, Mme M. Mercier, MM. Pointereau et Revet, Mme Gruny, MM. Dufaut et Mayet, Mmes Thomas, Bories et Deroche, MM. Regnard, Gilles, Rapin, de Nicolaÿ, Chatillon, Husson, Laménie, Darnaud et Genest, Mmes Lanfranchi Dorgal et Lamure et MM. Sido et Gremillet, est ainsi libellé :
Après l’article 8
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Après l’article L. 161-22-1 A du code de la sécurité sociale, il est inséré un article L. 161-22-1 … ainsi rédigé :
« Art. L. 161 -22 -1 – L’article L. 161-22 ne fait pas obstacle à l’exercice par un médecin retraité d’une activité de remplacement dans une zone définie sous-dense par l’agence régionale de santé pour une durée cumulée n’excédant pas vingt-quatre mois. Les revenus perçus par le médecin retraité au titre de son activité de remplacement sont exonérés de la totalité des cotisations sociales et de retraite dès lors qu’ils n’excèdent pas 90 000 euros annuels. »
II. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Jean-Noël Cardoux.
Madame la ministre, avec mon collègue Yves Daudigny, je vous avais présenté il y a quelque temps un rapport sur la désertification médicale, dans lequel nous formulions un certain nombre de propositions. À notre grande satisfaction, vous avez fait avancer les choses ; je citerai ainsi la pratique des auxiliaires médicaux et la tarification de la télémédecine.
Nous avions aussi proposé d’exonérer de charges sociales – je signale d’ailleurs une erreur de rédaction figurant dans l’amendement : il s’agit bien de charges sociales, et non fiscales – les médecins retraités qui reprennent une activité partielle, dans la mesure où ces cotisations ne produisent pas de retraite.
Vous avez porté, au 1er janvier dernier, à 40 000 euros le plafond en deçà duquel les médecins retraités reprenant une activité partielle ne payaient pas de cotisations à une caisse de retraite. Cette mesure, qui va dans le bon sens, est néanmoins insuffisante compte tenu du besoin urgent qui existe dans les territoires, notamment ruraux.
L’amendement que je présente est tout à fait voisin du précédent. En portant le plafond à 90 000 euros, nous espérons frapper un grand coup, afin d’inciter les médecins retraités à reprendre une activité partielle et à accompagner de jeunes médecins qui souhaiteraient exercer en milieu rural. Ce plafond est élevé, car il représente la contrepartie de la limitation de cette possibilité à vingt-quatre mois, durée qui permet de reprendre une activité et de donner un « coup de collier » pour le suivi d’un jeune médecin. Je considère que ce coût est relativement limité.
Le plafond de 50 000 euros ne nous a pas paru suffisamment incitatif, contrairement à celui de 90 000 euros pendant vingt-quatre mois. Par ailleurs, cette mesure favorisera l’activité dans les territoires ruraux.
Nous avons beaucoup parlé d’agriculture, notamment de maraîchage. Si nous voulons maintenir l’activité dans les territoires ruraux, il faut impérativement que des médecins s’y installent. C’est une solution parmi des dizaines d’autres, mais elle mérite d’être retenue.
L’amendement n° 168 rectifié quater, présenté par MM. Longeot et Détraigne, Mmes Vullien et Loisier, M. Médevielle, Mme Goy-Chavent, MM. Le Nay, Maurey, Cigolotti et Kern, Mme Vermeillet, M. Janssens, Mme Férat, M. Louault, Mme Guidez, M. Delahaye, Mme Gatel, M. Delcros, Mme de la Provôté, M. Moga, Mmes Morin-Desailly et Vérien, MM. Lafon, Marseille et Henno et Mme Létard, est ainsi libellé :
Après l’article 8
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – L’article L. 642-3 du code de la sécurité sociale est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Sont exonérés par moitié du paiement des cotisations citées à l’article L. 642-1, les médecins bénéficiant de leur retraite qui continuent à exercer leur activité ou qui effectuent des remplacements en zone en tension. »
II. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Jean-François Longeot.
Les dispositions de cet amendement vont dans le même sens que celles des deux précédents.
On consacre beaucoup d’énergie et de réflexion à la question des déserts médicaux. Ont été mis en place, outre les maisons de santé, un certain nombre de dispositifs. Le Gouvernement préconise également de lever le numerus clausus.
On constate qu’aujourd’hui un peu plus de trois millions de nos concitoyens ne se font pas soigner, non parce qu’ils n’ont pas de couverture sociale ou de mutuelle, mais tout simplement parce qu’ils n’ont pas de médecin. Il y a donc des praticiens qui poursuivent leur activité après l’âge du départ en retraite et qui parviennent ainsi à maintenir un léger équilibre en termes de couverture médicale dans les territoires. Il me semblerait intéressant de les exonérer partiellement des cotisations liées à la retraite.
On me rétorquera que l’on cotise à un régime de retraite non pour soi-même, mais pour ceux qui prendront leur retraite après nous. C’est évident, mais je crois qu’il est important de faire ce geste pour maintenir une offre de soins intéressante sur l’ensemble du territoire. Je ne suis pas certain que ce dispositif soit très coûteux ; il rendrait, en revanche, de grands services.
Si ces amendements ne sont pas tout à fait identiques, ils ont tous trois été inspirés par une proposition émanant de la mission d’évaluation et de contrôle de la sécurité sociale, la MECSS.
Les auteurs de l’amendement n° 168 rectifié quater du groupe Union Centriste ne prévoient pas de plafond pour ces exonérations. Ceux de l’amendement n° 128 rectifié quater prévoient un plafond de 50 000 euros, et ceux de l’amendement n° 7 rectifié, les plus généreux, un plafond de 90 000 euros.
La commission ayant décidé de soutenir l’amendement n° 7 rectifié présenté par M. Jean-Noël Cardoux, je demande aux auteurs des deux autres amendements de bien vouloir les retirer.
Nous avons déjà eu ce débat important l’année dernière. Il s’agit de favoriser la poursuite de l’activité de certains médecins généralistes qui souhaiteraient partir à la retraite ou reprendre une activité, en leur donnant la possibilité du cumul emploi-retraite.
L’an passé, nous avons, par arrêté, quadruplé le plafond du cumul emploi-retraite, en le faisant passer de 11 000 euros à 40 000 euros de revenus annuels, soit 3 600 euros par mois. Vous proposez d’augmenter ce plafond, et je l’entends, mais le cadre réglementaire existe d’ores et déjà, puisque, encore une fois, nous l’avons prévu par voie réglementaire.
Le présent débat est la conséquence du rapport des délégués nationaux à l’accès aux soins, votre collègue Mme Élisabeth Doineau et M. le député Thomas Mesnier, qui, lors du périple qu’ils ont effectué afin de trouver quelles mesures pourraient favoriser la persistance de temps médical dans les territoires sous-dotés, ont fait émerger cette proposition d’une augmentation du plafond du cumul emploi-retraite.
Il convient de ne pas fragiliser la Caisse autonome de retraite des médecins de France, la CARMF. Nous vous proposons donc de réfléchir avec l’ensemble des professionnels à une augmentation de ce plafond. Aussi, dans la mesure où il existe déjà un cadre législatif, nous demandons le retrait des amendements.
Le Gouvernement s’engage cependant à augmenter ce plafond, tout en ouvrant le débat sur l’équilibre de la Caisse.
Un plafond de 90 000 euros de cumul emploi-retraite a été proposé. On parle là de médecins qui cumuleraient, avec leur retraite, 90 000 euros de revenus par an, c’est-à-dire quasiment 8 000 euros par mois en plus de leur retraite.
M. René-Paul Savary fait un signe de dénégation.
Des médecins généralistes de secteur 1 ne sont pas fréquemment dans ce cas, malheureusement pour eux, dirais-je !
Je demande, encore une fois, le retrait des trois amendements. Je le répète, le Gouvernement proposera aux professionnels d’ici à la fin de l’année une augmentation du plafond, puisqu’il s’y est engagé.
Monsieur Brisson, l’amendement n° 128 rectifié quater est-il maintenu ?
Non, monsieur le président, avec l’accord de Vincent Segouin, je le retire.
L’amendement n° 128 rectifié quater est retiré.
Monsieur Longeot, l’amendement n° 168 rectifié quater est-il maintenu ?
Cet amendement est différent des deux autres. S’il ne tend pas à prévoir un plafond, il vise toutefois à proposer une exonération partielle des cotisations de retraite, ce qui est important.
Nous avons rencontré un certain nombre de professionnels, notamment les représentants de l’Ordre des médecins, qui mène également une réflexion sur ce sujet.
Encore une fois, ce geste serait important ; aussi, je souhaite maintenir mon amendement. Peut-être sera-t-il sans objet si celui de Jean-Noël Cardoux est adopté, mais, quoi qu’il en soit, ces propositions ne sont pas identiques : nous visons, quant à nous, je le répète, une exonération des cotisations salariales relatives à la retraite.
Je maintiens donc mon amendement, monsieur le président.
Je suis étonnée de votre réponse, madame la ministre.
En effet, pour en revenir à l’amendement de Jean-François Longeot, une mesure d’exonération partielle des cotisations de retraite est d’ores et déjà prévue à l’article 22 de la loi montagne du 28 décembre 2016, qui dispose : « L’article L. 642-3 du code de la sécurité sociale est complété par un alinéa ainsi rédigé : Sont exonérés par moitié du paiement des cotisations mentionnées à l’article L. 642-1 les médecins bénéficiant de leur retraite qui continuent à exercer leur activité ou qui effectuent des remplacements en zone de montagne. Les médecins bénéficient de cette exonération s’ils exercent dans une zone de montagne caractérisée par une offre de soins insuffisante ou des difficultés dans l’accès aux soins, mentionnée à l’article L. 1434-4 du code de la santé publique. »
À chaque fois que nous vous avons rencontrée, madame la ministre, vous nous avez indiqué que la pénurie de médecins s’étendait désormais à l’ensemble du territoire national et qu’il n’existait plus de zones dans lesquelles les patients accédaient facilement aux soins. Je ne vois donc pas pourquoi cette mesure ne pourrait pas, dans un esprit d’égalité, être élargie à l’ensemble du territoire.
Les auteurs de ces amendements posent la question du cumul emploi-retraite, sur lequel il va nous falloir réfléchir. Nous sommes tout de même à l’aube d’une réforme systémique des retraites ! Cette situation des médecins à la retraite susceptibles de continuer à travailler est une bonne illustration d’un dispositif en passe d’être modifié.
Aujourd’hui, le médecin retraité qui travaille paie des cotisations qui ne lui apportent aucune prestation supplémentaire. Tel est le système, que nous connaissons, de retraite par répartition à prestations définies. Demain, avec le régime de retraite par points qui est proposé – il a été esquissé par le Gouvernement et par le Haut-commissaire à la réforme des retraites –, on passera à un système à cotisations définies : à tout euro cotisé correspondra une prestation.
Le système actuel de retraite repose sur une solidarité dite « implicite » : les cotisations acquittées ne rapportent rien, mais servent à assurer la solidarité avec les autres pensionnés. Il faudra bien poser le problème ! Il convient, dès à présent, d’ancrer un certain nombre de dispositifs.
On peut penser que la loi ne sera pas plus avantageuse qu’aujourd’hui. Si l’on n’ancre pas ces dispositifs, il n’y aura pas d’amélioration, demain, pour ce qui concerne le cumul emploi-retraite. C’est la raison pour laquelle je soutiendrai les amendements proposés.
Madame la ministre, je profite de cette occasion pour vous interroger sur une mesure que vous aviez présentée l’an dernier, lorsque nous avions discuté de la désertification : la cotisation des médecins remplaçants à la CARMF en vue d’améliorer leur couverture sociale.
Comment cette mesure s’est-elle traduite dans les territoires ? En raison du montant prohibitif de cette cotisation, qui s’élève à 3 000 euros, les étudiants ne se sont pas inscrits à la Caisse et n’ont pas effectué de remplacements. Il y a donc encore moins de médecins remplaçants pendant la saison estivale et lors des congés des médecins.
Il faut donc être attentif aux mesures que l’on prend ! Celle qui est proposée, on sait qu’elle marche. Aussi, mieux vaudrait élargir la mesure existante, plutôt que de créer des dispositifs dont l’intérêt n’a pas été démontré.
J’apporte mon soutien à l’amendement présenté par Jean-Noël Cardoux. En d’autres circonstances, j’avais déposé des amendements de même nature, qui n’avaient pas prospéré.
Je suis de ceux qui pensent que des mesures coercitives visant à l’obligation ou à l’interdiction d’installation sur certains territoires ne sont pas applicables dans la société que nous connaissons. Elles seraient, en tout état de cause, très mal acceptées par les jeunes qui achèvent leurs études médicales.
Vous avez présenté, madame la ministre, un panel de mesures qui sont aujourd’hui appliquées dans les territoires et qui complètent les dispositifs mis en place par le précédent gouvernement.
La mesure qui permet aux médecins retraités de travailler sur une période plus longue peut certainement améliorer la situation pendant une période transitoire, en attendant que des dispositifs plus importants ne produisent leurs effets et que les déserts médicaux ne viennent à disparaître.
Je suis favorable à ces trois amendements, qui sont cependant différents.
L’amendement n° 7 rectifié, présenté par Jean-Noël Cardoux, vise à prévoir un plafond d’exonération de 90 000 euros, et l’amendement n° 128 rectifié quater de Vincent Segouin un plafond de 50 000 euros. L’amendement n° 168 rectifié quater de Jean-François Longeot est encore différent : lorsqu’un médecin retraité perçoit des revenus au titre de remplacements, il devra acquitter des cotisations de retraite, alors que sa retraite est liquidée et que sa pension n’augmentera plus.
Il convient de retenir l’amendement de Jean-François Longeot, qui est modeste, puisqu’il ne vise qu’une exonération partielle de cotisations sociales, tandis que les deux autres vont plus loin. Cette mesure, déjà prévue pour les zones de montagne, pourrait être étendue à l’ensemble du territoire.
Nadia Sollogoub a rappelé que cette exonération était déjà applicable aux zones de montagne. Il est vrai que l’on applique à ces territoires de nouveaux dispositifs plus facilement qu’à d’autres zones défavorisées. Il est temps d’étendre cette mesure.
Je voterai donc l’amendement n° 7 rectifié de Jean-Noël Cardoux. Une lecture attentive montre que le plafond de 90 000 euros correspond au chiffre d’affaires, non pas au bénéfice, et aux revenus perçus, non pas forcément aux revenus nets. Déduction faite des cotisations et des charges, ce sera sans doute un peu différent…
Comme mon collègue Hervé Maurey, j’ai toujours été une fervente partisane des mesures coercitives. Depuis plus de dix ans, nous avons voté en ce sens dans cet hémicycle, mais nous avons compris qu’il n’existait malheureusement aucune baguette magique législative permettant d’installer des médecins en zone rurale.
Les dispositifs que vous avez mis en place, madame la ministre, sont extrêmement importants. Ils seront très bien complétés par les dispositions de ces amendements. Il faudra donner ce signal, car il est important, et faire en sorte qu’il demeure dans le texte définitif – ce n’est pas là le moindre des défis à relever.
Au travers de ces amendements, c’est le problème de la désertification médicale que nous essayons de régler, ou tout au moins d’atténuer.
La proposition que vous nous faites de travailler plus en profondeur sur les retraites est intéressante, madame la ministre, même si l’on pourrait aussi évoquer les situations des médecins non titulaires de thèse et des médecins remplaçants.
Cela a été dit, les jeunes médecins renoncent aujourd’hui aux gardes, aux astreintes et aux remplacements ; économiquement, les internes qui n’ont qu’un petit salaire n’y ont plus intérêt. Les prélèvements ne les incitent pas à effectuer des remplacements, et il y a donc moins de médecins dans les territoires.
Un troisième sujet pourrait être ajouté à la réflexion globale, celui du double cabinet, dispositif qui permet à des médecins ayant un cabinet principal d’exercer dans les territoires sous-dotés.
Ces réflexions prendront du temps. Or il y a aujourd’hui urgence. Mon groupe est plutôt d’avis de soutenir dans un premier temps, dans le cadre du PLFSS, les amendements de MM. Cardoux et Longeot, au motif qu’il s’agit de mesures d’urgence.
J’ai un regret : la première fois que le Sénat a voté en faveur de l’exonération des cotisations de retraite dans le cadre du cumul emploi-retraite, c’était en 2014. Cela fait tout de même quatre ans ! Nous en avons parlé de nouveau l’année dernière, mais aucun dispositif satisfaisant n’émerge, ce qui est dommage.
Je voterai ces amendements tout en ayant à l’esprit qu’il faudra modifier les règles, puisque nous allons changer de système de retraite. Je les voterai, car, à l’heure actuelle, l’incitation est insuffisante. Bien que cela soit difficile à évaluer, il y a probablement un gisement de temps médical mal exploité. J’entends bien, cependant, ce que dit Mme la ministre sur les niveaux actuels autorisés, qui sont relativement élevés.
Véronique Guillotin a eu raison de rappeler que la caisse de retraite des médecins n’incitait pas à l’activité des jeunes médecins remplaçants. Ce problème aussi n’a que trop duré, et il ne sera pas réglé dans la réforme des retraites.
Sur la question du travail et de l’incitation à l’activité des médecins retraités, il faudra que la future réforme des retraites intègre un dispositif adapté. Il s’agit d’anticiper le fait que les médecins souhaiteront continuer, pour différentes raisons, tenant notamment à leur bonne forme physique et à leur envie de ne pas cesser brutalement de travailler, à exercer leur profession, par exemple à temps partiel ou de façon décroissante. Ils doivent être incités à le faire aussi longtemps qu’ils le souhaitent.
Je souhaite préciser un point au sujet des revenus et du chiffre d’affaires. Aux termes du dispositif de ces amendements, « les revenus perçus par le médecin retraité au titre de son activité de remplacement sont exonérés de la totalité des cotisations sociales et de retraite […] ».
Or je n’ai pas le souvenir qu’un chiffre d’affaires soit soumis à cotisations sociales. Il s’agit donc de revenus. Et lorsque l’on parle de 90 000 euros de revenus, cela correspond à 7 500 euros par mois en plus de la retraite. J’ai tout de même le sentiment que l’on va un peu loin en demandant aux médecins d’apporter leur aide dans des secteurs désertiques.
Je voudrais compléter mon propos et expliquer comment nous fonctionnons. Dès l’année dernière, nous avons souhaité augmenter le plafond et l’avons, à notre arrivée, multiplié par quatre, justement pour ne pas freiner les médecins qui souhaiteraient continuer leur activité. Nous l’avons donc relevé à 40 000 euros par an.
Aujourd’hui, le dispositif de cumul emploi-retraite monte en charge. Chaque mois, un nombre important de médecins s’y inscrivent. Actuellement, il concerne 20 % des médecins retraités. Je ne pense pas que ceux-ci soient freinés par le plafond de 40 000 euros. Néanmoins, j’entends de la part des territoires qu’un certain nombre d’entre eux préféreraient que le plafond soit plus élevé pour qu’ils soient davantage encore incités à poursuivre leur activité.
Cette remontée des territoires me parvient par les trois délégués à l’accès aux soins – Mme la sénatrice Élisabeth Doineau, M. le député Thomas Mesnier et Mme Sophie Augros, médecin généraliste – qui vont sur le terrain voir comment le plan d’accès aux soins se met en place.
Un comité de suivi des trente ou quarante mesures du plan d’accès aux soins se réunit tous les six mois. Il comprend toutes les fédérations hospitalières, tous les ordres des professionnels de santé et tous les syndicats, notamment de médecins. Nous avons décidé de faire évoluer ce plan en fonction des remontées du terrain des trois délégués, qui viennent de nous présenter leur rapport. Nous sommes en train d’instruire leurs recommandations, qui portent évidemment sur le cumul emploi-retraite, mais aussi sur ces trente ou quarante autres mesures du plan d’accès aux soins.
Nous avons considéré que c’était dans le cadre de ce comité de suivi, avec l’ensemble des parties prenantes, que nous prendrions les décisions quant à l’évolution des dispositifs visant à faciliter l’accès à du temps médical sur les territoires.
Je trouve quelque peu bizarre que la Haute Assemblée se saisisse d’une seule mesure, décide seule d’un plafond, alors que nous avons une instance de concertation, de suivi, et des parlementaires qui remettent un rapport tous les six mois.
J’estime que ce n’est pas le bon endroit pour discuter de l’amélioration de l’accès aux soins. Nous avons mis en place un comité de suivi très robuste, qui s’est engagé à faire évoluer les mesures. Il me semble plus légitime que les professionnels eux-mêmes, les parties prenantes elles-mêmes, s’emparent des mesures qu’il semble important de mettre en œuvre.
Le Gouvernement s’est engagé à suivre les recommandations du comité de suivi, et nous le faisons. Là, je m’engage à travailler sur le cumul emploi-retraite pour le faire évoluer. Nous avons un comité pour cela.
Je vous propose donc de retirer vos amendements, de faire confiance à la méthode initiée par le Gouvernement, qui s’appuie sur la concertation et la coconstruction pour améliorer l’accès aux soins de nos compatriotes.
Madame la ministre, j’entends bien vos arguments, selon lesquels on est dans la concertation et la réflexion. Nous y avons d’ailleurs participé, comme je l’ai souligné précédemment.
J’ai aussi entendu M. Jomier, qui a parfaitement raison, nous dire que, depuis 2014, le Sénat vote sans discontinuer le même type de mesures et qu’il a fallu attendre le 1er janvier 2018 pour en voir un début d’application… Nous avons, me semble-t-il, des raisons non pas de nous méfier – je n’emploierai pas ce terme –, mais d’être prudents. Voilà pourquoi je maintiendrai mon amendement.
Je veux aussi corriger certaines affirmations qui ont été émises. Nathalie Goulet a évoqué le « chiffre d’affaires », mais je ne vois vraiment pas où elle est allée chercher ce terme, et je réponds par la même occasion à M. Lévrier. Lisez mon amendement : je vise non pas le « chiffre d’affaires », mais les « revenus » – il s’agit bien de 90 000 euros de revenus annuels. C’était ma première mise au point.
Deuxième comparaison, l’amendement de M. Longeot ne porte que sur les cotisations de retraite, alors que le mien, qui est différent, concerne l’ensemble des cotisations sociales. Ce n’est pas tout à fait la même chose, puisque c’est beaucoup plus favorable. Surtout, l’amendement de M. Longeot n’est pas limité dans le temps, alors que le mien prévoit une durée ne devant pas excéder vingt-quatre mois. Un médecin retraité peut certes reprendre son activité pour plus de vingt-quatre mois s’il a une forte constitution, mais donner à un amendement une pérennité sans limites n’a, dans le cas présent, pas beaucoup de sens.
Pourquoi le plafond est-il de 90 000 euros ? Précisément parce que la mesure est limitée dans le temps. Prenons l’exemple d’un médecin retraité qui se rend compte des problèmes auxquels sont confrontées tant sa profession que les zones rurales, et décide de reprendre du collier. Soit dit en passant, s’agissant du cumul emploi-retraite, vous savez que les médecins ne bénéficient pas à l’âge de la retraite de pensions vraiment élevées ; pour eux, continuer leur activité est quelque chose d’assez significatif.
Ces médecins qui veulent retravailler pendant deux mois en aidant des jeunes à s’installer et en leur faisant part de leur expérience ne doivent pas en permanence se demander s’ils ne devraient pas s’arrêter pour ne pas dépasser le plafond. Ce n’est pas une bonne façon de concevoir l’exercice.
Par ailleurs, si mon amendement prévoit un plafond de confort pour permettre aux médecins d’avoir l’esprit libre, je ne pense pas que, dans les zones rurales, ils seront nombreux à l’atteindre.
Mme Laure Darcos applaudit.
Je trouve dommage de réduire l’amendement à un problème de plafond, alors que la reprise d’une activité est une question beaucoup plus globale.
Je vais vous faire un aveu : en tant que médecin retraité en pleine forme – croyez-moi ! –, avec un tel plafond, le cumul emploi-retraite me ferait gagner davantage qu’en pleine activité !
Tout compte fait – c’est le cas de le dire ! –, je ne voterai pas cet amendement.
M. Alain Joyandet s ’ exclame.
Mes chers collègues, je vous précise que, suivant l’avis de la commission, les amendements n° 7 rectifié et 168 rectifié quater sont incompatibles entre eux en raison de leurs différences de périmètre et de durée d’application : si le premier est adopté, le second « tombera » et ce n’est donc que si le premier n’est pas adopté que le second pourra être voté.
L ’ amendement est adopté.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 8, et l’amendement n° 168 rectifié quater n’a plus d’objet.
Effectivement. Mais, comme je viens de l’indiquer, mon cher collègue, ce ne sont pas les mêmes périmètres ni les mêmes durées d’application, l’adoption des deux amendements les rendrait inapplicables.
L’amendement n° 490, présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly, Lienemann et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 8
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au 1° du I de l’article L. 221-3 du code de la sécurité sociale, les mots : « et de représentants d’employeurs désignés par les organisations professionnelles nationales d’employeurs représentatives » sont supprimés.
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Mme Laurence Cohen. Avec cet amendement, quelque peu provocateur – je l’avoue –, nous proposons de supprimer la représentation patronale au sein du conseil de la caisse primaire d’assurance maladie.
Exclamations sur des travées du groupe Les Républicains.
Je vous avais prévenus, mes chers collègues ! C’est pour réveiller l’hémicycle !
En effet, nous tirons les conséquences de la transformation du CICE en baisse de charges patronales et de la réduction générale de cotisations patronales étendant le dispositif Fillon aux contributions de retraite complémentaire dès le 1er janvier 2019 et aux cotisations d’assurance chômage à compter du 1er octobre 2019.
Actuellement, les cotisations patronales d’assurance maladie s’élèvent à 13 % ; demain, c’est-à-dire en 2019, les employeurs bénéficieront d’un taux réduit de 7 %.
Avec l’annonce de la suppression des cotisations patronales au niveau du SMIC, il y a un véritable danger de voir les cotisations patronales disparaître totalement du financement de la sécurité sociale.
Madame, monsieur les ministres, notre amendement de repli pousse la logique du Gouvernement jusqu’au bout. Puisque l’orientation de ce projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2019 est l’augmentation des exonérations de cotisations patronales, qu’est-ce qui justifie la présence des organisations professionnelles d’employeurs au sein des conseils de la sécurité sociale – soyez logiques ! – et, en premier lieu, du conseil de la caisse primaire d’assurance maladie ?
D’un côté, le patronat demande la suppression des « charges sociales » et, de l’autre, il continue de codiriger les caisses de la sécurité sociale, alors même qu’il y participe de moins en moins.
Ce n’est pas logique et notre objectif est – entendez bien, mes chers collègues ! – non pas de remettre en cause le paritarisme, …
Mme Laurence Cohen. … mais de lancer un appel au Gouvernement. C’est un amendement taquin !
M. Philippe Dallier s ’ exclame.
Ce que vous faites aujourd’hui en supprimant totalement les cotisations patronales sera non seulement inefficace pour la création d’emplois, mais surtout très dangereux pour le maintien du paritarisme. C’est la raison pour laquelle nous défendrons plus loin, à l’article 19, un amendement visant à rétablir les élections des caisses de la sécurité sociale.
Rien ne justifie que le patronat, qui refuse de financer la caisse de l’assurance maladie, participe aux prises de décision la concernant, si l’on suit votre raisonnement, madame, monsieur les ministres.
Je vous l’ai déjà dit, madame Cohen, votre amendement me paraît curieux parce que les employeurs continuent à verser des cotisations patronales à l’assurance maladie, à l’inverse des salariés. Vous êtes donc contre le paritarisme ?… Cela me paraît étrange venant de votre part et de votre groupe.
La commission a donc émis un avis défavorable, parce que nous croyons au paritarisme.
Sourires sur les travées du groupe Les Républicains.
Monsieur Karoutchi, j’adore votre humour !
On peut effectivement désapprouver notre amendement, qui visait plutôt à montrer quelle était la logique du Gouvernement.
Monsieur le rapporteur général, arguer que le groupe communiste pourrait être contre le paritarisme est également assez provocateur… En effet, j’ai pris la précaution de dire que nous présenterions plus loin un amendement visant à la défense du paritarisme.
Mais, je le redis, on peut désapprouver notre amendement – il n’y a pas de souci ! – et passer au vote.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
L’amendement n° 291 rectifié, présenté par Mmes Dindar, Malet, Guidez et C. Fournier et MM. Henno et Mizzon, est ainsi libellé :
Après l’article 8
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Au 3° du I bis de l’article L. 241-10 du code de la sécurité sociale, le montant : « 3, 70 € » est remplacé par le montant : « 6, 20 € ».
II. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Jocelyne Guidez.
Comme les entreprises ultramarines qui cumulent différents soutiens à l’emploi tels que la transformation du CICE en allégement de charges, le particulier employeur bénéficie actuellement d’un dispositif fiscal lui permettant de réduire le coût de l’emploi à son domicile, mais aussi d’allégements de charges sociales. Parmi ces dernières figurent celles qui sont prévues à l’article L. 735–3–2 du code de la sécurité sociale que le PLFSS pour 2019 entend supprimer.
Cette suppression entraîne une augmentation du coût de l’emploi d’un salarié à domicile de 11 % pour les 60 000 particuliers employeurs. Elle risque de conduire à une augmentation drastique du travail non déclaré et à des suppressions d’emploi.
Ainsi, cet amendement prévoit de porter la déduction de charges par heure déclarée de 3, 70 euros aujourd’hui à 6, 20 euros. Cette hausse significative a notamment pour objectif de rééquilibrer le coût de l’emploi à la suite de cette suppression d’allégements de charges prévues à l’article L. 735-3-2.
De plus, ces employeurs ultramarins disposeraient de cette incitation pour recourir au dispositif du CESU et ainsi déclarer leurs salariés au réel.
Cette mesure offre notamment l’occasion d’exprimer la confiance à l’égard des employeurs et de leur capacité à créer de l’emploi.
Madame Guidez, vous proposez de relever de 3, 70 euros à 6, 20 euros le montant de la déduction forfaitaire pour les emplois à domicile en outre-mer.
Je le rappelle, le niveau de déduction actuel est sensiblement supérieur à celui qui est en vigueur en métropole, lequel est de 2 euros par heure. Il est également de nature à prévenir le travail illégal, ce qui est le fondement même de votre argumentation, que j’ai également entendue hier et en commission lors du fameux débat sur l’outre-mer.
La commission souhaite le retrait de cet amendement, car nous estimons que l’effort déjà consenti est important et supérieur à celui qui a été fait en faveur de la métropole ; à défaut, l’avis sera défavorable.
L’amendement n° 291 rectifié est retiré.
L’amendement n° 492, présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly, Lienemann et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 8
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le II de l’article L. 241-13 du code de la sécurité sociale est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Cette réduction n’est pas applicable aux entreprises d’au moins cinquante salariés qui emploient plus de 50 % de salariés dont la rémunération est inférieure au salaire minimum de croissance majoré de 60 %. »
La parole est à Mme Laurence Cohen.
L’orientation politique du Gouvernement en matière d’emploi, comme celle d’ailleurs des gouvernements antérieurs, se polarise sur le coût du travail. Je l’ai déjà dit : pour nous, le travail n’est pas un coût.
Quand on procède à l’allégement des cotisations sociales, c’est la rémunération du travail elle-même qui baisse – faut-il le rappeler ici ? Par voie de conséquence, la contribution apportée par le travail au financement de la sécurité sociale constitue une amélioration du pouvoir d’achat.
Les exonérations de cotisations sociales patronales mettent en péril le financement durable de la sécurité sociale, faisant de nos lois de financement des parcours d’austérité permanente. L’équilibre ne se finance que par la réduction des droits et ouvre en grand toutes les « trappes à bas salaires » qui engloutissent chaque année un peu plus les salariés, les femmes d’abord – je l’ai déjà dit dans cet hémicycle –, les aspirations des plus jeunes, le respect de leur formation et bien d’autres choses.
Il faut donc réduire la part des exonérations accordées aux entreprises qui font des bas salaires, en quelque sorte, leur viatique et l’essence de leur politique de rémunération.
Madame Cohen, comme nous l’avons déjà dit en commission, la rémunération est très différente suivant les secteurs. Votre amendement, quant à lui, est général.
J’entends bien et je peux comprendre ce que vous dites, mais certains secteurs et certains métiers seraient gravement pénalisés, voire en difficulté, si l’on appliquait votre amendement.
La commission émet donc un avis défavorable.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
L’amendement n° 177 rectifié quater, présenté par MM. Karoutchi, Hugonet, Poniatowski et Cambon, Mmes Gruny et Garriaud-Maylam, M. Mayet, Mme Micouleau, MM. Sol et Daubresse, Mme Berthet, MM. Courtial, Bascher, Revet, Bas, Lefèvre et Ginesta, Mme Thomas, MM. Huré, de Legge, Genest, Joyandet et Dallier, Mmes Raimond-Pavero, Renaud-Garabedian et Di Folco, MM. B. Fournier, Calvet et de Nicolaÿ, Mme Deromedi, M. Magras, Mme Malet, MM. Mandelli, Meurant, Sido, Vaspart, Vogel, Regnard, Brisson et Guené, Mme Lherbier et MM. Buffet et Gremillet, est ainsi libellé :
Après l’article 8
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le second alinéa du I de l’article 19 de la loi n° 2007-1786 du 19 décembre 2007 de financement de la sécurité sociale pour 2008 est supprimé.
II. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Roger Karoutchi.
M. Roger Karoutchi. Madame, monsieur les ministres, je vais essayer, comme hier, de convaincre. Si j’ai autant de succès, cela ne va pas être terrible !
Sourires.
En 2007, a été mis en place un système d’exonération des cotisations employeurs pour les associations et les organismes d’intérêt général, notamment dans les zones de revitalisation rurale. En 2013, ce dispositif a été revu et considérablement restreint : l’exonération était intégrale pour les rémunérations jusqu’à 1, 5 SMIC, puis dégressive, et s’éteignait à partir de 2, 4 SMIC.
Cet amendement est d’une simplicité biblique : revenons à 2007, période bénie pendant laquelle, par définition, on faisait en sorte que l’activité soit meilleure. Je suis sûr, monsieur le rapporteur général, que vous vous préparez à m’annoncer le coût de ma mesure. Je redoute le chiffre que vous allez me donner, d’autant que le ministre va naturellement le moduler à la hausse, ce qui me conduit à craindre encore davantage son estimation.
Franchement, le dispositif n’a-t-il pas bien fonctionné entre 2007 et 2012 ? La révision de la fin de 2013 était liée aux difficultés financières et économiques de l’époque. Pourrait-on revenir à la conception de 2007 ?
Monsieur Karoutchi, je vais vous décevoir une fois de plus, mais je n’ai pas de chiffre à vous apporter quant au coût de cette mesure. Peut-être M. le ministre en a-t-il ?
C’est parfait alors, nous voilà rassurés !
Vous proposez de déplafonner un dispositif instauré en 2007 dont l’extinction est prévue. Nous sommes donc véritablement dans un pur effet d’aubaine puisque le dispositif est déjà en place, ne peut plus être ouvert et va s’éteindre. Vous souhaitez supprimer le système dégressif, pour prévoir un dispositif déplafonné, à l’envi. Vous comprendrez que la commission ne puisse donner un avis favorable sur cet amendement, que nous vous demandons donc tout simplement de retirer.
M. Gérald Darmanin, ministre. Monsieur le ministre Karoutchi, vous n’êtes pas un homme d’argent, mais depuis hier j’ai des doutes, comme dirait Raymond Devos. Le coût de votre amendement s’élève à 90 millions d’euros. Il est vrai que vous avez fait des efforts : nous nous sommes quittés sur 7 milliards d’euros, vous revenez avec 90 millions… J’espère que nous aurons l’occasion de discuter demain encore !
Sourires.
Plus sérieusement, c’est un triple « non » du Gouvernement, d’abord pour les excellents arguments avancés par le rapporteur général sur l’extinction du dispositif.
Ensuite, je rappelle que vous avez voté, ici comme à l’Assemblée nationale, le principe d’une évaluation destinée à faire le point en 2021 sur l’ensemble de ces « zones » et de leur fiscalité propre, dont on peut souligner, après un premier acte qui avait peut-être été différent, sa non-efficacité sur l’emploi. Chacun peut le constater, que ce soit pour les villes ou pour les campagnes, cette fiscalité a créé des effets de bord inquiétants, qui ont parfois nécessité la création d’autres zones à fiscalité particulière pour compenser ces effets. Tous les gouvernements ont péché dans cette affaire, et nous aurons donc l’occasion de mener une évaluation.
Enfin, autre point qui me semble rendre encore plus efficace mon argumentation, l’allégement de charges que prévoit le Gouvernement est plus généreux, si je peux me permettre cette expression, plus efficace que ce que vous proposez. En effet, les zones de revitalisation rurale, les ZRR, auraient pu fonctionner comme vous le souhaitez, nonobstant ce qu’évoquait M. le rapporteur général sur l’effet d’aubaine, s’il n’y avait pas eu d’allégement général du CICE transformé en baisse de charges. En effet, cette dernière mesure, générale, donnera davantage aux entreprises et aux zones que vous voulez aider que le dispositif que vous présentez dans votre amendement.
Je crois donc que, pour ces quatre raisons – le coût et les trois autres arguments que j’ai avancés –, vous pourriez retirer avantageusement votre amendement ; à défaut, l’avis sera défavorable.
Monsieur Karoutchi, l’amendement n° 177 rectifié quater est-il maintenu ?
M. Roger Karoutchi. Que voulez-vous que je vous dise ? Passer de 7 milliards à 90 millions d’euros ?... Je refuse d’être mis à l’encan : je retire mon amendement !
Rires.
I. – Au 3° de l’article L. 137-15 du code de la sécurité sociale, après le mot : « emploi », sont insérés les mots : « et des indemnités mentionnées au 7° de l’article L. 1237-18-2 du code du travail et aux 5° et 7° de l’article L. 1237-19-1 du même code, ».
II. – Par dérogation à l’article L. 131-7 du code de la sécurité sociale, le présent article ne donne pas lieu à compensation par le budget de l’État.
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 56 est présenté par M. Vanlerenberghe, au nom de la commission des affaires sociales.
L’amendement n° 493 est présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly, Lienemann et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. le rapporteur général, pour présenter l’amendement n° 56.
L’amendement tend à déplacer les dispositions de cet article relatives au forfait social au sein de l’article 11 ter. Nous aurons l’occasion de reparler de ces dispositions lors de la discussion de l’amendement que j’ai déposé sur ce dernier article.
La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly, pour présenter l’amendement n° 493.
Cet amendement vise à supprimer l’article 8 bis, inséré dans le PLFSS à la suite de l’adoption d’un amendement à l’Assemblée nationale.
Cet article exclut de l’assiette du forfait social les indemnités de rupture du contrat de travail dans le cadre d’une rupture conventionnelle collective ou d’un congé de mobilité.
Je le rappelle, le forfait social est une contribution à la charge de l’employeur, qui a été instaurée initialement afin de réduire le déficit de la sécurité sociale, à la suite d’une recommandation de la Cour des comptes.
Puisque tout ce projet de financement de la sécurité sociale est fondé sur l’idée de désendettement, il nous paraît peu opportun de supprimer cette contribution.
Alors que les prestations sociales ne sont que peu revalorisées, alors que la hausse de la CSG pour les retraités est maintenue, alors qu’un certain nombre d’aides pour les personnes en situation de handicap ont été supprimées, les entreprises, elles, bénéficient de cadeaux fiscaux.
Au titre de l’année 2018, elles reçoivent 20 milliards d’euros de crédit d’impôt compétitivité et emploi. En 2019, la transformation du CICE en allégements de cotisations leur permettra d’économiser là encore 20 milliards d’euros. Les entreprises n’ont pas besoin d’allégements supplémentaires de leurs charges.
Le Gouvernement demande aux plus précaires de mettre la main à la poche et de participer aux restrictions afin de permettre le désendettement de la sécurité sociale. Il nous paraît normal que les entreprises fassent de même et continuent de participer au désendettement de la sécurité sociale.
Pour ces raisons, nous demandons la suppression de l’article 8 bis et le maintien du forfait social.
Les deux amendements qui sont identiques visent à supprimer l’article, mais pas pour les mêmes raisons : l’un, celui qui a été présenté par Mme Apourceau-Poly, pour des raisons de fond et l’autre, celui qu’a proposé M. le rapporteur général, pour des raisons de forme, si j’ose dire.
Sur le fond, vous ne vous étonnerez pas, madame la sénatrice, que nous ayons des différences d’appréciation. Nous pensons, au contraire de vous, que les dispositions fiscales que nous présentons ici et qui sont le miroir de la loi PACTE de Bruno Le Maire, sont tout à fait bénéfiques pour les salariés et les ouvriers, dans la nouvelle manière dont on pourrait imaginer le lien entre le capital et le travail, une vieille idée gaulliste mais pas seulement.
Nous avons un désaccord de fond et vous ne serez pas vexée si je donne un avis défavorable à votre amendement, qui vise à supprimer la disposition en tant que telle pour ne plus jamais la revoir.
Monsieur le rapporteur général, je suis quelque peu embêté par votre proposition de forme, même si je suis sensible à vos arguments sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale.
D’abord, vous voulez tout regrouper dans un même article, alors qu’il s’agit de deux dispositions différentes. C’est un peu dommage pour nos débats.
Ensuite, si l’on devait supprimer ces dispositions – on voit bien, d’ailleurs, que les suppressions ne se font pas toujours pour les bonnes raisons, en tout cas pas pour les mêmes motifs… – et ne pas les voir revenir à l’article 11 ter, nous supprimerions une mesure très importante du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour les ouvriers et employés de notre pays.
Monsieur le rapporteur général, je vous propose soit de retirer votre amendement, soit de faire d’ores et déjà le débat que nous pourrions avoir à l’article 11 ter. À moins que vous ne puissiez m’assurer – le rapporteur général n’est toutefois pas toujours suivi par sa majorité, comme j’ai pu le constater depuis le début de nos débats, même si on peut parfois le déplorer – que votre avis positif pour rétablir, à l’article 11 ter, les dispositions supprimées de cet article 8 bis sera bien suivi…
Dans cette attente, il serait préférable de rejeter votre amendement pour que le Sénat puisse confirmer cette disposition fiscale favorable aux salariés et aux ouvriers.
Monsieur le ministre, notre amendement visant à rédiger l’article 11 ter reprend les dispositions que nous voulons supprimer à l’article 8 bis.
Je suis bien d’accord.
Pour le moment, nous proposons la suppression de l’article 8 bis. Je rappelle qu’il s’agit de l’avis de la commission ; le Sénat se prononcera après.
Puisque la simplification est le but du Gouvernement, la commission propose de simplifier les dispositifs sur le forfait social pour les entreprises. C’est ce que nous avons essayé de faire, en complément des efforts que vous avez déjà réalisés dans ce domaine. Nous tentons d’aller à votre rencontre !
L’objet de notre amendement est non pas de s’opposer à vos propositions, mais de trouver un point de compromis qui soit favorable aux entreprises, à l’actionnariat salarié et à la participation.
Nous verrons ce que dit le Sénat et puis nous nous adapterons.
Nous maintenons donc notre amendement.
Monsieur le ministre, vous avez totalement raison : nos deux visions de la société s’opposent complètement.
Vous taxez les plus pauvres ; pour notre part, nous préférons taxer les grosses entreprises. Ce sont bien deux visions qui s’opposent.
Les amendements sont adoptés.
En conséquence, l’article 8 bis est supprimé, et l’amendement n° 385 rectifié n’a plus d’objet.
L’amendement n° 385 rectifié, présenté par MM. Daudigny et Kanner, Mmes Féret, Grelet-Certenais et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lubin, Meunier et Rossignol, M. Tourenne, Mmes Van Heghe et Blondin, M. Fichet, Mme Guillemot, M. Magner, Mmes S. Robert et Monier, MM. Kerrouche, Tissot, Antiste, J. Bigot, P. Joly, Mazuir et Jacquin, Mme Bonnefoy, M. Duran et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. Yves Daudigny.
Dans la mesure où l’amendement n° 385 rectifié concerne des dispositions déplacées à l’article 11 ter, la logique voudrait qu’il soit examiné lors de la discussion de ce même article plutôt que considéré comme sans objet.
Monsieur Daudigny, l’article 8 bis ayant été supprimé, il vous faudra redéposer cet amendement sous la forme d’un sous-amendement à l’amendement de la commission lors de l’examen de l’article 11 ter.
L’article 16 de la loi n° 2017-1836 du 30 décembre 2017 de financement de la sécurité sociale pour 2018 est ainsi modifié :
1° Le I est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, la date : « 30 avril 2018 » est remplacée par la date : « 31 mars 2019 » ;
b) Au second alinéa, la date : « 31 octobre 2018 » est remplacée par la date : « 30 juin 2019 » ;
2° À la fin de la deuxième phrase du premier alinéa du II, la date : « 1er novembre 2018 » est remplacée par la date : « 1er juillet 2019 » ;
3° Le III est ainsi modifié :
a) Après la première phrase du premier alinéa, est insérée une phrase ainsi rédigée : « Pour les employeurs du régime général et du régime agricole et les travailleurs indépendants et exploitants agricoles des collectivités d’outre-mer de Saint-Martin et de Saint-Barthélemy qui justifient d’une baisse de leur chiffre d’affaires majeure et durable directement imputable aux événements climatiques exceptionnels survenus entre le 5 septembre et le 7 septembre 2017, au titre de leur activité réalisée sur ces deux territoires, ce plan peut comporter un abandon, qui est total ou partiel selon l’ampleur de la baisse et sa durée, des cotisations et contributions sociales dues par les employeurs pour la période comprise entre le 1er août 2017 et le 31 décembre 2018 ou à titre personnel par les travailleurs indépendants ou les exploitants agricoles au titre des exercices 2017 et 2018. » ;
b) Sont ajoutés trois alinéas ainsi rédigés :
« Le bénéfice de l’abandon des créances de cotisations et contributions sociales est ouvert aux employeurs et travailleurs indépendants qui adressent à l’organisme chargé du recouvrement des cotisations et contributions, au plus tard le 30 avril 2019, une demande conforme à un modèle fixé par arrêté du ministre chargé de la sécurité sociale et, le cas échéant, en cas d’interruption totale d’activité sur une période, une attestation sur l’honneur ou tout élément probant. Les organismes chargés du recouvrement des cotisations de sécurité sociale sont habilités à vérifier, dans le cadre des contrôles auprès des demandeurs ou dans le cadre notamment des échanges avec l’administration fiscale qu’ils réalisent, la réalité des déclarations.
« Le bénéfice d’un abandon total ou partiel des créances est subordonné au fait, pour l’employeur, d’être à jour de ses obligations déclaratives, de ses obligations de paiement à l’égard de l’organisme de recouvrement pour les cotisations salariales dues au titre de la période comprise dans le champ de l’abandon prévu au quatrième alinéa du présent III, ainsi que pour les cotisations dues au titre des périodes qui ne sont pas comprises dans ce champ.
« La condition de paiement est considérée comme remplie dès lors que l’employeur, d’une part, souscrit et respecte un plan d’apurement des cotisations restant dues et, d’autre part, acquitte les cotisations en cours à leur date normale d’exigibilité. » ;
4° Au IV, la date : « 31 décembre 2018 » est remplacée par la date : « 31 août 2019 » ;
5° Au dernier alinéa du VII, après le mot : « partielle », sont insérés les mots : « ou totale ». –
Adopté.
Le II de l’article L. 131-6-4 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° À la troisième phrase du deuxième alinéa, après la référence : « 50-0 », est insérée la référence : « ou de l’article 64 bis » ;
2° À la première phrase du dernier alinéa, après la référence : « L. 613-7 », sont insérés les mots : « du présent code ou relevant du régime prévu à l’article L. 722-1 du code rural et de la pêche maritime » et, après la référence : « 50-0 », est insérée la référence : «, 64 bis ». –
Adopté.
L’amendement n° 242 rectifié ter, présenté par Mme Jasmin, M. Lurel, Mme Conconne, M. Cabanel, Mmes G. Jourda et Conway-Mouret, M. Duran, Mme Monier, M. Kerrouche, Mme Ghali et MM. Vaugrenard et Antiste, est ainsi libellé :
Après l’article 9
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
À compter du 1er janvier 2020 au 1er janvier 2029, un arrêté des ministres chargés de la santé et des outre-mer fixe chaque année, les dispositions de l’article L. 758-1 du code de la sécurité sociale, après concertation avec les parlementaires et les employeurs locaux concernés.
La parole est à Mme Victoire Jasmin.
Cet amendement portant article additionnel concerne les filières canne, sucre, rhum, mais aussi la prévention que souhaite Mme la ministre. Il vise à favoriser le dialogue et la concertation entre les différents acteurs.
Comme vous le savez, les filières canne, sucre, rhum, bagasse sont confrontées, comme d’autres, à des mises aux normes en matière de protection de l’environnement – la plupart des usines et des distilleries ont été contraintes de mettre en place des méthaniseurs et il a aussi été question de traitement des effluents –, ce qui engendre des surcoûts.
Ces mises en conformité visent, certes, à leur permettre de conserver leur caractère d’excellence, mais ces secteurs demeurent fragiles.
L’absence de préparation et de concertation avec les acteurs concernés me gêne considérablement. Étant moi-même professionnelle de santé, je sais combien il est important de faire de la prévention.
Toutefois, les mesures que vous préconisez et les réponses que vous avez apportées à l’Assemblée nationale sont-elles adaptées à la situation économique et sociale de nos territoires ? Entre le vieillissement de la population et le taux de chômage élevé, beaucoup de nos jeunes sont obligés de venir dans l’Hexagone. Seules les filières agricoles retiennent encore quelques jeunes saisonniers.
Il faut donc mener une réflexion sur ces questions. C’est pourquoi je vous propose, madame la ministre, ainsi qu’à Mme la ministre des outre-mer, de prendre les dispositions nécessaires pour mener une concertation et aboutir à un consensus avant toute mesure unilatérale qui contribuerait encore davantage à l’exode – je dis bien à l’exode ! – de nos jeunes vers les banlieues de métropole, vers le Canada ou vers d’autres contrées. Ce n’est plus supportable.
Madame Jasmin, vous proposez de renvoyer au Gouvernement le soin de fixer le montant de cette contribution par voie de concertation.
Il me semble dommage de renoncer à cette compétence législative.
Par ailleurs, l’adoption de l’amendement du Gouvernement visant à l’alignement progressif en six ans de la fiscalité ultramarine sur les alcools forts ménage, à mon sens, suffisamment de temps aux entreprises de la filière sucrière pour s’adapter.
La commission demande le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.
Madame la sénatrice Jasmin, la concertation a eu lieu au moment du Livre bleu sur les outre-mer et ce sujet a été largement partagé.
En outre, il s’agit d’une taxation, ce qui relève du domaine de la loi.
Le Gouvernement vous demande donc de bien vouloir retirer votre amendement ; à défaut, il émettra un avis défavorable.
Non, monsieur le président.
Je souhaite vraiment que le Gouvernement travaille avec les opérateurs et toutes les personnes concernées avant d’aller plus loin. Il me semblait important de signifier que cette façon de faire ne convenait pas forcément.
Nous allons revenir sur cette question dans quelques instants : j’ai déposé un autre amendement, que je maintiendrai…
Mais je retire celui-ci.
I. – À l’article L. 758-1 du code de la sécurité sociale, le montant : « 0, 04 euro » est remplacé par le montant : « 0, 088 € ».
II. – À compter du 1er janvier 2020, à l’article L. 758-1 du code de la sécurité sociale, le montant : « 0, 088 € » est remplacé par le montant : « 0, 136 € ».
III. – À compter du 1er janvier 2021, à l’article L. 758-1 du code de la sécurité sociale, le montant : « 0, 136 € » est remplacé par le montant : « 0, 184 € ».
IV. – À compter du 1er janvier 2022, à l’article L. 758-1 du code de la sécurité sociale, le montant : « 0, 184 € » est remplacé par le montant : « 0, 232 € ».
V. – L’article L. 758-1 du code de la sécurité sociale est abrogé le 1er janvier 2023.
dont je ferais partie. Que l’on se garde de me faire ce mauvais coup !
Comme l’écrivait Maupassant, le regard moderne sait voir la gamme infinie des nuances.
Exclamations sur plusieurs travées du groupe Les Républicains.
La France a protégé sa production viticole, son vin, qu’elle taxe très faiblement pour des raisons que l’on comprend. J’ai du respect pour les viticulteurs. La France, c’est le vin ; dans nos pays, c’est le rhum. Nous tenons à cette protection patrimoniale.
J’ai diffusé largement aux différentes catégories socioprofessionnelles et à tous les gens de mon pays un amendement voté récemment par l’Assemblée nationale : ce fut un tollé !
Comme moi, ils se sont tous demandé de quel pays il était question. Comment était-il possible de parler de nous dans des termes aussi atroces : addiction, alcoolisme… Vous-même, madame la ministre, comment avez-vous pu dire qu’il était nécessaire d’augmenter très vite les taxes pour éviter l’alcoolisation fœtale, les violences faites aux femmes, les violences routières, les cirrhoses, les cancers…
Vous dites aussi avoir entendu les députés ultramarins expliquant qu’il s’agit d’une monoculture dans certains territoires, comprendre qu’on ne peut changer toute une économie locale en une ou deux années et qu’il faut modifier les pratiques. Mais qui, madame la ministre, vous a dit que nous voulions arrêter la production de canne à sucre ?
Mme Nathalie Goulet et M. Roger Karoutchi applaudissent.
Il manque 2 000 hectares, madame, à mon seul pays. Il manque 2 000 hectares en Martinique : le rhum est exporté à 80 % dans une centaine de pays et seuls 8 % sont consommés par la population locale. Et on veut me faire croire que, de l’autre côté de l’Atlantique, tous les Martiniquais sont couchés sous des cocotiers, boivent du rhum toute la journée §– plus que les Français ne boivent de vin ! – et que nous sommes victimes de toutes les pathologies et de toutes les dérives comportementales liées à l’alcoolisation.
Madame la ministre, si j’avais une suggestion à vous faire, ce serait d’augmenter la taxe sur le vin, ce qui permettrait à la sécurité sociale d’empocher des milliards et des milliards d’euros, et de me donner le conseiller parlementaire qui vous a suggéré une telle intervention. Je pars derechef avec lui en mission pour lui expliquer ce que vous méconnaissez tellement : la réalité de nos pays !
Applaudissements sur des travées du groupe socialiste et républicain et du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Le sujet qui nous préoccupe est important : s’il est bien un patrimoine que nous partageons tous, quel que soit l’endroit où l’on se trouve, c’est notre population.
La question est de savoir quels ravages commet l’alcool sur nos différents territoires et comment lutter contre ce fléau. Pour y répondre, il faut partir de la réalité des faits : la consommation quotidienne d’alcool fort est deux fois plus élevée dans les DOM qu’en métropole. La réalité, c’est que l’Agence nationale de santé publique constate les dégâts en termes de santé sur la population.
Je ne vais pas en dresser la liste complète. Je reprendrai simplement le rapport de l’Agence sur le syndrome d’alcoolisation fœtale, publié en septembre dernier : les enfants à naître sont cinq fois plus touchés à La Réunion qu’en métropole et ce syndrome est en hausse forte en Guadeloupe.
Soit on décide que ces enfants à naître sont un patrimoine perdu, soit on regarde les choses de près et on cherche comment lutter contre l’alcoolisation fœtale.
Je ne fais pas partie de ceux qui pensent que la santé publique se construit à partir des taxes, mais il est clair aussi qu’il s’agit d’un outil à notre disposition. Mme la ministre en a souligné les résultats dans la lutte contre le tabac. Bien évidemment, cet outil doit s’insérer dans une politique globale. Il faut lancer un plan de prévention.
À cet égard, on ne peut que saluer la campagne d’information lancée par Santé publique France après la publication de ces données sur le syndrome d’alcoolisation fœtale. Il s’agit d’une campagne particulièrement bien conçue présente dans les médias et sur internet et s’appuyant sur les professionnels de santé.
À l’Assemblée nationale, le Gouvernement a amendé, nous en reparlerons dans le cours de la discussion, l’article 38 relatif au fonds sur les addictions en prévoyant des actions spécifiques pour l’outre-mer. Il faudra que l’investissement soit à la hauteur.
Il est clair qu’on ne peut en rester à cette taxation dix fois moins importante qui met, à faibles coûts, les alcools forts à la disposition directe de la population.
La proposition du Gouvernement qui vise à étaler la convergence tarifaire sur six ans – en fait, plutôt sur sept ou huit ans – me paraît raisonnable : elle tient compte des intérêts économiques des filières tout en préservant le cap de santé publique, raison pour laquelle je la soutiendrai.
Cette affaire a été introduite à l’Assemblée nationale par un amendement quelque peu tardif et, là encore – c’est décidément la marque de votre gouvernement –, sans concertation.
On peut comprendre le problème, voire approuver la solution proposée. C’est la méthode et le délai qui posent problème. Il me semble que votre ADN, c’est principalement la défense des entreprises.
Il s’agit ici d’entreprises productrices d’alcool fort. Mais enfin, passer de 40 euros par hectolitre d’alcool pur à 557 euros, c’est tout de même beaucoup !
Vous vous êtes rendu compte de la brutalité de la mesure et, après que votre collègue des outre-mer a proposé dix ans et vous-même quatre, vous proposez maintenant un étalement sur six ans. Je ne vous cacherai que je proposerai la même durée dans un amendement de repli, mais les socioprofessionnels espèrent revenir à la première proposition de dix ans.
Il s’agit de petites distilleries : une dizaine en Guadeloupe, treize en Martinique sans compter celles de Guyane et de La Réunion. En sus de la TVA, il y a les droits d’accises, les cotisations sociales, mais aussi l’octroi de mer. Aujourd’hui, les régions peuvent décider, avec l’agrément de l’Europe, d’une exonération sur dix ans pour la production locale. Mais la fiscalité s’accumule.
Monsieur Jomier, je ne cherche pas à excuser une consommation frénétique d’alcool, mais on consomme moins d’alcools forts, et en particulier moins de rhum, en Guyane, en Guadeloupe, à la Martinique et à La Réunion qu’en métropole. La Réunion rencontre un problème plus spécifique de syndrome d’alcoolisation fœtale, qui commence à apparaître également en Guadeloupe. Chez les jeunes de 17 ans, l’usage régulier d’alcool concerne 5 % des Réunionnais, 7 % des Guadeloupéens, 9 % des Martiniquais et 12 % des Hexagonaux. Ces chiffres datent de 2014.
Les épisodes d’ivresse sont moins fréquents qu’en métropole et les étudiants et jeunes de 17 ans s’alcoolisent moins fréquemment que leurs alter ego de l’Hexagone.
Bien sûr, les phénomènes de violences sexuelles évoqués par Catherine Conconne sont une réalité. Peut-on concilier les deux ?
Le premier réflexe des ministres de mettre en place un lissage sur dix ans me semblait pertinent.
Nous attendons toujours le rapport promis dans la loi relative à l’égalité réelle outre-mer sur la remise à plat de la fiscalité. De même, lors des assises de l’outre-mer, le Gouvernement avait décidé de créer un fonds de financement pour lutter contre les addictions : nous ne voyons rien venir…
Il me semble que cette mesure s’apparente davantage à une mesure de rendement qu’à une mesure de fiscalité comportementale.
Mme Catherine Conconne applaudit.
Je demanderai aux orateurs de bien vouloir respecter leur temps de parole, et ce d’autant qu’ils pourront encore intervenir sur les amendements en discussion.
La parole est à M. Michel Magras, sur l’article.
La question que pose l’augmentation de la fiscalité sur les alcools outre-mer me semble être celle du juste équilibre entre, d’une part, l’impératif de santé publique de prévention et de traitement des addictions et, d’autre part, la préservation d’un secteur économique stratégique pour nos économies locales. Madame, monsieur les ministres, mes chers collègues, je suis certain que vous en conviendrez également.
L.es producteurs de rhum sont bien conscients des effets ravageurs et des addictions alcooliques qu’implique leur production. Pour cette raison, ils se sont unanimement – tout du moins ceux qui m’ont contacté – prononcés pour une contribution au financement des mesures de prise en charge des effets pervers de l’alcool dans le rhum.
Toutefois, si la fiscalité pouvait, à elle seule, prévenir toutes les formes de consommation excessive, nous n’aurions pas ce débat, même s’il est certain qu’un prix trop accessible ne contribue pas à les enrayer. En d’autres termes, si les taxes permettaient de lutter contre l’alcoolisme ou le tabagisme, cela se saurait.
Il s’agit en effet d’aligner la fiscalité locale sur celle de la métropole qui n’a pourtant pas permis – est-ce bien utile de le préciser ? – d’éradiquer l’alcoolisme.
Partant de ce constat, la motivation de santé publique justifie que le surplus de la taxe soit affecté à un fonds dédié au financement de la prévention de l’alcoolisme et de la prise en charge de ses conséquences outre- mer.
La place stratégique du rhum dans les économies ultramarines n’est plus à exposer. C’est dans cet esprit que j’évoquais l’idée d’un équilibre, ce qui nous amène à la problématique de l’étalement du surplus de la fiscalité.
Un échelonnement sur dix ans permettrait en effet à la production de contribuer dès 2020, tout en bénéficiant d’un temps d’adaptation suffisamment long pour ajuster son modèle économique qui n’avait sans doute pas intégré la suppression d’une différenciation fiscale visant notamment à garantir un avantage comparatif au rhum.
Cette question de temporalité m’amène d’ailleurs, madame la ministre, à vous interroger sur l’amendement que vous allez présenter et dont la rédaction me laisse penser que vous proposez un étalement sur cinq ans. Pouvez-vous me confirmer que telle est bien votre intention ? Je vous remercie par avance de votre réponse.
La commission des affaires sociales s’est montrée plutôt favorable à l’amendement du Gouvernement qui permet de concilier le devoir d’aide avec nos obligations en matière de santé.
Les chiffres ont été rappelés ; il s’agit de réalités vécues à La Réunion. À Saint-Louis, avec Anne-Marie Payet, alors sénatrice de l’île, nous avons eu l’honneur d’accueillir Simone Weil, ancienne ministre de la santé, qui fut la marraine d’un projet de lutte contre l’alcoolisation fœtale.
Autre réalité : neuf affaires pénales sur dix et neuf affaires de violences faites aux femmes sur dix sont liées à l’excès d’alcool, souvent en lien avec d’autres addictions, notamment ce que nous appelons le « zamal », c’est-à-dire le haschich. Il est donc important d’envoyer un signal fort contre les addictions.
Ce matin, en commission, nous avons voté l’ouverture à l’ensemble des DOM du fonds contre les addictions – dont j’avoue que j’ignorais l’existence. Il s’agit d’un fonds assez important. Cette mesure me semble d’assez bon augure et témoigne d’une vision un peu plus globale en matière de santé publique, de lutte contre les addictions et de tout ce qui touche à la prévention.
À La Réunion aussi nous avons été alertés sur les enjeux économiques qu’évoquait M. Magras. Les alcooliers n’ont pas été suffisamment préparés à cette mesure et demandent du temps. L’amendement du Gouvernement qui vise à étaler cet alignement sur six ans permettrait de concilier leurs attentes avec la nécessaire lutte contre les addictions, l’alcoolisme et les violences qui en découlent.
Mme Catherine Deroche applaudit.
Je ne voudrais pas vous assommer de chiffres, mais la première cause de mortalité, et notamment de la mortalité précoce, c’est-à-dire avant l’âge de 65 ans, est l’association du tabac et de l’alcool. Cette situation ne concerne pas que les territoires d’outre-mer, il s’agit d’un constat général.
Les taxes ne sont pas la seule solution pour lutter contre l’alcoolisme, elles font partie des solutions. En ce qui concerne la lutte contre le tabac, par exemple, des études menées dans d’autres pays ont montré que l’augmentation du prix du tabac entraînait une baisse substantielle de la consommation.
Le vrai problème, c’est l’éducation à la santé et la prévention. Fort de cette mise en perspective, il me semble que l’amendement du Gouvernement visant à étaler sur six ans – plus un an – l’alignement de la fiscalité permet d’en lisser les effets dans le temps.
Voilà trente-cinq ans, lorsque je faisais mes études de médecine, on ne parlait pas du syndrome d’alcoolisation fœtale. C’est quelque chose de nouveau et d’extrêmement grave. Il n’est pas possible d’éluder les questions liées à l’alcool et à la taxation en matière de santé publique.
Madame la ministre, nous sommes conscients des ravages qu’occasionne l’alcool.
Mais l’addiction au rhum n’est pas le problème le plus marquant outre-mer. Nous souffrons davantage de la consommation de substances addictives telles que le cannabis et le crack, par exemple, qui détruisent non pas une personne, mais des familles entières.
Je me rappelle la levée de boucliers contre la taxation du vin, dans cet hémicycle même. Je me souviens de nos collègues qui défendaient des amendements pour soutenir la production française. Nous aimons le vin, dans la modération.
Nous consommons beaucoup plus d’alcools à bas prix, outre-mer. Chez moi, sur mon territoire, ce sont la bière, la vodka et le whisky qui font des ravages. Ils sont importés impunément. Les taxera-t-on aussi ?
L’alcool le plus consommé en Guadeloupe et en Martinique – j’ignore ce qu’il en est à La Réunion –, c’est le champagne.
Exclamations sur plusieurs travées du groupe Les Républicains.
Madame la ministre, la concertation est un élément fort de la négociation. Il est fondamental d’étaler cette mesure dans le temps pour ne pas mettre nos entreprises en difficulté.
Souvenez-vous, madame Dindar, de ce qui a été fait pour les entreprises de sucres spéciaux à La Réunion.
Pourquoi décider, de manière unilatérale, de mettre en difficulté nos entreprises locales ? La profession est d’accord pour participer à cet effort, elle vous demande simplement de l’étaler dans le temps. Nous espérons que vous saurez entendre ces doléances.
Mon propos fera également office d’explication de vote.
On ne peut nier aujourd’hui les effets délétères de l’alcool, notamment sur les maladies tumorales ou sur le fœtus. L’alcoolisation fœtale emporte des conséquences irréversibles sur l’enfant, sur son développement physique et psychologique.
L’adoption de cet amendement me semble donc très importante. La fiscalité est-elle la seule réponse à ce problème ? La réponse est bien évidemment non. Elle doit s’accompagner de mesures éducatives, thérapeutiques et de prévention, mais elle reste un levier important : la fiscalité a permis, par exemple, l’effondrement de la consommation de prémix. De même, l’augmentation du prix du tabac s’accompagne d’une chute importante de consommation.
Certes, on ne peut balayer d’un revers de main le volet économique qui se trouve derrière. Des acteurs économiques et toute une population vivent de ce produit. Pour autant, un délai de dix ans me semble énorme au regard des dégâts que l’alcool peut causer : dix ans, c’est quasiment toute une génération.
Les six années que propose le Gouvernement me semblent être la bonne solution. La majorité de mon groupe la soutiendra.
L’amendement n° 241 rectifié ter, présenté par Mme Jasmin, M. Lurel, Mme Conconne, M. Cabanel, Mmes G. Jourda et Conway-Mouret, M. Duran, Mme Monier, M. Kerrouche, Mme Ghali et MM. Vaugrenard et Antiste, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Victoire Jasmin.
Je propose de supprimer cet article, parce qu’il n’y a pas eu de concertation.
Je ne suis pas opposée à la prévention. Comme je le précise dans le deuxième alinéa de l’objet de mon amendement, s’il est bien sûr louable en matière de santé publique de lutter contre les ravages de l’addiction à l’alcool et de l’addiction à toutes les substances licites ou illicites psychoactives, et on ne peut que se féliciter de l’intention d’une telle démarche, force est de constater que malheureusement rendre effective une telle taxation supplémentaire du rhum ne changera pas forcément grand-chose au phénomène de l’alcoolisme.
Il faut bien évidemment faire de la prévention dans nos territoires. Nous avons déjà commencé à le faire. J’ai d’ailleurs présenté, dans le cadre du plan régional de santé publique, en tant que présidente d’une fédération de parents d’élèves, un projet de prévention dans les lycées, et à destination des parents. Je suis très favorable à la prévention.
Pour autant, il ne faut pas déstabiliser complètement une filière économique locale, traditionnelle et d’excellence en outre-mer, sans aucune concertation.
De même que l’argent récolté dans le cadre du loto du patrimoine n’est pas allé au patrimoine, je crains très fortement que le produit de ces taxes ne profite pas à nos territoires.
Je suis vraiment très sensible à cette mesure. Il me semble que les études menées stigmatisent La Réunion. Peut-être faudrait-il dresser un tableau du syndrome d’alcoolisation fœtale sur l’ensemble du territoire français sans stigmatiser nos territoires.
Toutes les régions sont concernées par la violence faite aux femmes. Voilà quelques jours, un homme a tué sa femme, en pleine rue, dans une ville de l’Hexagone.
À y regarder de près, il y a effectivement beaucoup de problèmes un peu partout sur le territoire, de violence, d’alcoolisme ou autre, mais j’ai l’impression qu’on met en concurrence le développement économique et les problématiques liées à l’alcoolisme et au syndrome d’alcoolisation fœtale. Je ne suis pas d’accord !
Je souhaite donc que l’on supprime l’article ou que l’on revienne sur les délais. J’ai déposé un amendement de repli, mais je ne veux pas qu’on parle de nous comme des personnes qui boivent !
Mme Catherine Conconne applaudit.
Une concertation avec les rhumiers est nécessaire. À ceux d’entre vous qui pensent que six ans sont suffisants, je dis que j’en ai assez de voir nombre de jeunes venir ici en métropole, pas toujours par choix, simplement parce que certaines filières ne sont pas organisées.
Je vais conclure, monsieur le président.
Je tiens à rappeler que j’ai présenté ici un amendement au projet de loi pour la liberté de choisir son orientation professionnelle visant à organiser les filières et que Mme Pénicaud m’a demandé de le retirer, tout en reconnaissant qu’il n’y avait pas de filières organisées. Elle a alors proposé que l’on se voie. C’était au mois de septembre dernier. Aujourd’hui, nous sommes mi-novembre, mais rien n’a été fait !
Faut-il que nous continuions à tendre la main ? §Devons-nous laisser perdurer l’exode de nos jeunes et les laisser venir en masse en métropole ? Devons-nous nous résigner au vieillissement de nos populations ? Je dis : non ! Ce ne sont pas les bons choix !
Je le répète, il faut une concertation, madame la ministre. Je sais que vous comprendrez mon message. Monsieur le ministre, vous avez besoin de recettes, mais on peut en trouver ailleurs !
Mme Catherine Conconne et M. Roland Courteau applaudissent.
La commission est défavorable à la suppression de cet article. Vous l’aurez compris, nous entendons bien poursuivre la discussion sur ce sujet qui est essentiel, si l’on en juge par la passion qu’il suscite.
La suppression de l’alignement progressif de la fiscalité sur les alcools forts dans les outre-mer sur celle qui est en vigueur dans l’Hexagone ne tient pas compte des enjeux de santé publique posés par la consommation de tels produits dans ces territoires, laquelle entraîne une alcoolodépendance chez les jeunes et surtout des syndromes d’alcoolisation fœtale.
L’allongement de la période transitoire proposée par le Gouvernement nous paraît préférable à une suppression pure et simple de ce dispositif.
J’aimerais que l’on comprenne bien de quoi il s’agit. Pardonnez-moi de le rappeler, n’y voyez aucune prétention de ma part : on distingue deux volumes de spiritueux. L’un fait l’objet d’un contingent, agréé par l’Europe, d’une définition, d’une fiscalité ; l’autre est la consommation sur place. C’est de lui que nous parlons. Il représente 20 % ou 25 % du volume.
Je ne suis pas sûr que le délai proposé – six, sept ou dix ans – permette de régler le problème de l’addiction. Guillaume Arnell et Catherine Conconne l’ont dit, les substances psychoactives et addictives les plus consommées sont le cannabis, la bière et le champagne.
Tel qu’il est rédigé, l’amendement que vous présenterez tout à l’heure, madame la ministre, vise les rhums « produits et consommés sur place ». Je vous concède que l’article du code de la sécurité sociale que votre amendement tend à modifier était déjà rédigé en ces termes et que la douane en faisait son affaire.
Cela étant dit, que se passera-t-il pour les alcools consommés mais non produits sur place ? Nous pourrions avoir un problème de concurrence. Je rappelle que, en vertu de la sixième directive de l’Europe, nous sommes un territoire ouvert. Toutes sortes de rhums peuvent y entrer. C’est déjà le cas du champagne, ce qui est normal, nous faisons partie de la République française. Nous avons aujourd’hui en fait un problème d’écart de compétitivité.
Si nous souhaitons porter à dix ans le délai, c’est non pas pour laisser se développer abusivement la consommation d’alcool, mais pour donner aux petites distilleries le temps de combler cet écart de compétitivité.
Par ailleurs, madame la ministre, pourriez-vous prendre l’engagement ici, comme vous l’avez dit lors des assises de l’outre-mer, qu’un fonds dédié sera consacré à la prévention ? L’article 41 de la loi de programmation relative à l’égalité réelle outre-mer prévoyait qu’une remise à plat de toute la fiscalité des spiritueux devait être effectuée. Cela n’a pas été fait.
Il me paraît un peu précipité de prendre la mesure que vous nous proposez, même si on comprend qu’il faille lutter contre les addictions.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
Je suis saisi de neuf amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
Les trois premiers sont identiques.
L’amendement n° 26 rectifié bis est présenté par MM. Théophile, Arnell, Karam et Patient.
L’amendement n° 197 rectifié est présenté par MM. Magras, Darnaud et Gremillet, Mmes Deromedi, Garriaud-Maylam et Lopez, MM. Chaize et Grosdidier, Mme Gruny, MM. Grand, Mandelli et de Nicolaÿ, Mmes A.M. Bertrand, Lamure et Boulay-Espéronnier et MM. Genest et Dallier.
L’amendement n° 243 rectifié ter est présenté par Mme Jasmin, M. Lurel, Mme Conconne, M. Cabanel, Mmes G. Jourda et Conway-Mouret, M. Duran, Mme Monier, M. Kerrouche, Mme Ghali et MM. Vaugrenard et Antiste.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Rédiger ainsi cet article :
I. – À compter du 1er janvier 2020, à l’article L. 758-1 du code de la sécurité sociale, le montant : « 0, 04 euro » est remplacé par le montant : « 0, 061 euro ».
II. – À compter du 1er janvier 2021, à l’article L. 758-1 du code de la sécurité sociale, le montant : « 0, 061 euro » est remplacé par le montant : « 0, 083 euro ».
III. – À compter du 1er janvier 2022, à l’article L. 758-1 du code de la sécurité sociale, le montant : « 0, 083 euro » est remplacé par le montant : « 0, 104 euro ».
IV. – À compter du 1er janvier 2023, à l’article L. 758-1 du code de la sécurité sociale, le montant : « 0, 104 euro » est remplacé par le montant : « 0, 125 euro ».
V. – À compter du 1er janvier 2024, à l’article L. 758-1 du code de la sécurité sociale, le montant : « 0, 125 euro » est remplacé par le montant : « 0, 147 euro ».
VI. – À compter du 1er janvier 2025, à l’article L. 758-1 du code de la sécurité sociale, le montant : « 0, 147 euro » est remplacé par le montant : « 0, 168 euro ».
VII. – À compter du 1er janvier 2026, à l’article L. 758-1 du code de la sécurité sociale, le montant : « 0, 168 euro » est remplacé par le montant : « 0, 189 euro ».
VIII. – À compter du 1er janvier 2027, à l’article L. 758-1 du code de la sécurité sociale, le montant : « 0, 189 euro » est remplacé par le montant : « 0, 211 euro ».
IX. – À compter du 1er janvier 2028, à l’article L. 758-1 du code de la sécurité sociale, le montant : « 0, 211 euro » est remplacé par le montant : « 0, 232 euro ».
X. – À compter du 1er janvier 2029, l’article L. 758-1 du code de la sécurité sociale est abrogé.
XII. – Le montant de la taxe au-delà de 0, 04 euro par décilitre ou fraction de décilitre est affecté à un fonds de prévention et lutte contre l’alcoolisme outre-mer.
La parole est à M. Guillaume Arnell, pour présenter l’amendement n° 26 rectifié bis.
Cet amendement, déposé par notre collègue Dominique Théophile, et que j’ai cosigné, car j’y suis particulièrement sensible, ainsi qu’Antoine Karam et Georges Patient, tous membres de votre majorité, madame la ministre, vise à aligner en dix ans la fiscalité des spiritueux en outre-mer sur celle qui est applicable dans l’Hexagone.
L’article introduit dans le texte par le rapporteur général en commission des affaires sociales prévoit un alignement que nous jugeons trop rapide, sans concertation avec les producteurs, et sans préavis.
Pour rappel, les quatre territoires concernés ne regroupent pas moins de 23 distilleries. Au total, ce sont près de 15 000 emplois, directs et indirects, en Guadeloupe, en Guyane, en Martinique et à La Réunion qui en dépendent. Compte tenu du marasme économique et du taux de chômage deux fois plus élevé dans ces territoires que dans l’Hexagone, il est indispensable de protéger cette filière et d’en sécuriser les emplois.
Par ailleurs, et c’est le point important, il est à noter que les spiritueux ultramarins sont en concurrence avec ceux des producteurs des pays tiers et des États d’Afrique, des Caraïbes et du Pacifique, les ACP. Ces dernières années, les producteurs français de spiritueux ont perdu des parts de marché en France en toute illégalité.
Madame la ministre, si l’argument de santé publique – la lutte contre l’alcoolisme en outre-mer – est légitime et si nous l’acceptons, il y a lieu de s’interroger sur le lien entre le prix des boissons et la consommation d’alcool.
Le présent amendement a pour objet d’allonger le délai prévu dans l’article tel qu’il est proposé par le rapporteur général pour l’alignement de cette fiscalité afin de préserver l’équilibre entre les enjeux économiques et les enjeux de santé publique.
La parole est à M. Michel Magras, pour présenter l’amendement n° 197 rectifié.
L’amendement que je défends est identique à celui qui vient d’être présenté. Il vise à reporter d’un an l’entrée en vigueur de la mesure, soit 2020, à prévoir son étalement sur dix ans, conformément à ce qu’avait proposé la ministre des outre-mer en première lecture à l’Assemblée nationale, ainsi que l’affectation d’une partie du montant de la taxe à un fonds destiné à lutter contre l’alcoolisme.
Je considère que mon amendement est défendu.
Enfin, j’aimerais que Mme la ministre nous précise, lorsqu’elle présentera l’amendement du Gouvernement, si elle prévoit un étalement de la mesure sur cinq ans ou sur six ans. Je comprends qu’il est prévu un étalement sur cinq ans, plus une année de déphasage.
La parole est à Mme Victoire Jasmin, pour présenter l’amendement n° 243 rectifié ter.
Je déplore qu’il n’y ait pas eu de concertation, mais je ne reviens pas sur ce que j’ai dit.
Je propose, comme mes collègues – nous savions très bien que l’article ne serait pas supprimé – de porter à dix ans la durée de la période transitoire, ce qui n’empêchera pas de faire de la prévention par ailleurs.
Il s’agit de permettre à nos entreprises de s’adapter. Je rappelle que nos distilleries sont en concurrence dans la Caraïbe en raison des fortes contraintes qui leur sont imposées par les normes européennes et françaises relatives à l’utilisation de certains produits. Alors que, malgré leurs difficultés financières, nos agriculteurs se conforment à toutes ces règles, de telles normes, et par voie de conséquence, de telles difficultés financières n’existent malheureusement pas dans les pays avoisinants.
Je vous demande donc d’accepter de porter le délai à dix ans afin de permettre aux distilleries de se mettre en conformité, de continuer à investir et à installer des méthaniseurs, tout en payant leurs salariés, lesquels ne travaillent pas tous à temps plein. Il faut savoir que les distilleries emploient beaucoup de saisonniers, les usines dépendant des périodes de coupe de la canne à sucre et ne fonctionnant donc pas toute l’année.
L’amendement n° 569 rectifié, présenté par Mme Conconne, M. Antiste, Mme Jasmin, MM. Lurel et Iacovelli, Mme G. Jourda, M. Durain, Mme Conway-Mouret, M. Lalande, Mme N. Delattre et MM. Manable et P. Joly, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
I. – À compter du 1er janvier 2020, à l’article L. 758-1 du code de la sécurité sociale, le montant : « 0, 04 euro » est remplacé par le montant : « 0, 061 euro ».
II. – À compter du 1er janvier 2021, à l’article L. 758-1, du code de la sécurité sociale, le montant : « 0, 061 euro » est remplacé par le montant : « 0, 083 euro ».
III. – À compter du 1er janvier 2022, à l’article L. 758-1 du code de la sécurité sociale, le montant : « 0, 083 euro » est remplacé par le montant : « 0, 104 euro ».
IV. – À compter du 1er janvier 2023, à l’article L. 758-1 du code de la sécurité sociale, le montant : « 0, 104 euro » est remplacé par le montant : « 0, 125 euro ».
V. – À compter du 1er janvier 2024, à l’article L. 758-1 du code de la sécurité sociale, le montant : « 0, 125 euro » est remplacé par le montant : « 0, 147 euro ».
VI. – À compter du 1er janvier 2025, à l’article L. 758-1 du code de la sécurité sociale, le montant : « 0, 147 euro » est remplacé par le montant : « 0, 168 euro ».
VII. – À compter du 1er janvier 2026, à l’article L. 758-1 du code de la sécurité sociale, le montant : « 0, 168 euro » est remplacé par le montant : « 0, 189 euro ».
VIII. – À compter du 1er janvier 2027, à l’article L. 758-1 du code de la sécurité sociale, le montant : « 0, 189 euro » est remplacé par le montant : « 0, 211 euro ».
IX. – À compter du 1er janvier 2028, à l’article L. 758-1 du code de la sécurité sociale, le montant : « 0, 211 euro » est remplacé par le montant : « 0, 232 euro ».
X. – À compter du 1er janvier 2029, l’article L. 758-1 du code de la sécurité sociale est abrogé.
La parole est à Mme Catherine Conconne.
Je reviens avec mes arguments !
Je trouve qu’il se passe ici des choses très tristes. De façon caricaturale, on prend un fusil pour tuer un moustique ! C’est exactement ce que l’on est en train de faire ! On sort des armes de destruction massive pour tuer une petite production qui commence à prendre son envol, et dont 80 % est exportée.
De plus, on stigmatise des populations. Le syndrome d’alcoolisation fœtale, c’est chez nous, et pas ailleurs ! Les cirrhoses, c’est chez nous et pas ailleurs ! Seul le rhum est à l’origine de pathologies, les autres alcools, non. Le vin, non ; le whisky, non ; la bière, non ! Dans mon pays, la Martinique, 16 millions de litres de rhum sont produits, contre des milliards de litres de vin en France, mais cela ne pose pas de problème.
On peut boire deux litres de vin, cela ne pose aucun problème de santé ! En revanche, si on boit un punch, on devient tout de suite un alcoolique ! Quelle caricature !
Pis, regardez la liste des amendements : tous ont été déposés par des élus des outre-mer, autrement dit par ceux qui connaissent le mieux leur territoire. Or ils se font battre par des gens qui parfois n’y ont jamais mis le moindre orteil.
Nous serions donc non pas des citoyens à part entière, mais des citoyens entièrement à part. J’en prends acte.
Mon amendement vise à prévoir que le pays que je connais le mieux, chers collègues, madame la ministre, puisse bénéficier d’une période de dix ans pour s’adapter dans l’univers extrêmement concurrentiel qu’est celui des spiritueux.
S’il suffisait d’augmenter de 1, 2 ou 3 euros le prix d’une bouteille de rhum pour régler les problèmes d’addiction, cela se saurait, comme l’a dit Michel Magras.
Comme j’aime savoir de quoi je parle, je me suis rendue à l’Agence régionale de santé de la Martinique avant de venir, madame la ministre. J’ai ici les statistiques sur la consommation d’alcool. §L’alcool le plus consommé est d’abord la bière, dont 61 % est importé en Martinique, suivie du champagne, qui représente 20 % de la consommation, bien avant le rhum.
J’ai aussi les statistiques sur les addictions. Elles m’ont été données par le centre hospitalier spécialisé en psychiatrie. La première des addictions, caracolant en tête, loin devant les autres, c’est l’addiction au cannabis.
Je demande donc une fois de plus l’étalement sur dix ans de l’alignement de la fiscalité sur le rhum.
Les deux amendements suivants sont identiques.
L’amendement n° 116 rectifié est présenté par Mme Conconne, M. Antiste, Mme Jasmin, MM. Lurel et Iacovelli, Mme G. Jourda, MM. Durain et Duran, Mme Conway-Mouret, M. Lalande, Mme N. Delattre et MM. Manable et P. Joly.
L’amendement n° 258 rectifié bis est présenté par M. Lurel, Mmes Jasmin et Conconne, MM. Antiste et J. Bigot, Mme Conway-Mouret, M. Lalande, Mme G. Jourda, M. Cabanel et Mme Ghali.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Rédiger ainsi cet article :
I. – À compter du 1er janvier 2020, à l’article L. 758-1 du code de la sécurité sociale, le montant : « 0, 04 euro » est remplacé par le montant : « 0, 064 euro ».
II. – À compter du 1er janvier 2021, à l’article L. 758-1 du code de la sécurité sociale, le montant : « 0, 064 euro » est remplacé par le montant : « 0, 088 euro ».
III. – À compter du 1er janvier 2022, à l’article L. 758-1 du code de la sécurité sociale, le montant : « 0, 088 euro » est remplacé par le montant : « 0, 112 euro ».
IV. – À compter du 1er janvier 2023, à l’article L. 758-1 du code de la sécurité sociale, le montant : « 0, 112 euro » est remplacé par le montant : « 0, 136 euro ».
V. – À compter du 1er janvier 2024, à l’article L. 758-1 du code de la sécurité sociale, le montant : « 0, 136 euro » est remplacé par le montant : « 0, 16 euro ».
VI. – À compter du 1er janvier 2025, à l’article L. 758-1 du code de la sécurité sociale, le montant : « 0, 16 euro » est remplacé par le montant : « 0, 184 euro ».
VII. – À compter du 1er janvier 2026, à l’article L. 758-1 du code de la sécurité sociale, le montant : « 0, 184 euro » est remplacé par le montant : « 0, 208 euro ».
VIII. – À compter du 1er janvier 2027, à l’article L. 758-1 du code de la sécurité sociale, le montant : « 0, 208 euro » est remplacé par le montant : « 0, 232 euro ».
IX. – À compter du 1er janvier 2028, l’article L. 758-1 du code de la sécurité sociale est abrogé.
La parole est à Mme Catherine Conconne, pour présenter l’amendement n° 116 rectifié.
La parole est à M. Victorin Lurel, pour présenter l’amendement n° 258 rectifié bis.
L’amendement n° 328 rectifié, présenté par Mme Conconne, M. Antiste, Mme Jasmin, MM. Lurel et Iacovelli, Mme G. Jourda, MM. Durain et Duran, Mme Conway-Mouret, M. Lalande, Mme N. Delattre et MM. Manable et P. Joly, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
I. – L’article L. 758-1 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° Les mots : « En Guadeloupe, en Guyane, à La Réunion, en Martinique, à Mayotte, à Saint-Barthélemy et à Saint-Martin » sont remplacés par les mots : « En Martinique et en Guadeloupe » ;
2° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« En Guyane, à La Réunion, à Mayotte, à Saint-Barthélemy et à Saint-Martin, ce tarif est fixé à 0, 088 euro par décilitre ou fraction de décilitre. »
II. A. – À compter du 1er janvier 2020, au premier alinéa de l’article L. 758-1 du code de la sécurité sociale, le montant : « 0, 04 euro » est remplacé par le montant : « 0, 064 euro ».
B. – À compter du 1er janvier 2021, au premier alinéa de l’article L. 758-1 du code de la sécurité sociale, le montant : « 0, 064 euro » est remplacé par le montant : « 0, 088 euro ».
C. – À compter du 1er janvier 2022, au premier alinéa de l’article L. 758-1 du code de la sécurité sociale, le montant : « 0, 88 euro » est remplacé par le montant : « 0, 112 euro ».
D. – À compter du 1er janvier 2023, au premier alinéa de l’article L. 758-1 du code de la sécurité sociale, le montant : « 0, 112 euro » est remplacé par le montant : « 0, 136 euro ».
E. – À compter du 1er janvier 2024, au premier alinéa de l’article L. 758-1 du code de la sécurité sociale, le montant : « 0, 136 euro » est remplacé par le montant : « 0, 16 euro ».
F. – À compter du 1er janvier 2025, au premier alinéa de l’article L. 758-1 du code de la sécurité sociale, le montant : « 0, 16 euro » est remplacé par le montant : « 0, 184 euro ».
G. – À compter du 1er janvier 2026, au premier alinéa de l’article L. 758-1 du code de la sécurité sociale, le montant : « 0, 184 euro » est remplacé par le montant : « 0, 208 euro ».
H. – À compter du 1er janvier 2027, au premier alinéa de l’article L. 758-1 du code de la sécurité sociale, le montant : « 0, 208 euro » est remplacé par le montant : « 0, 232 euro ».
I. – Au 1er janvier 2028, l’article L. 758-1 du code de la sécurité sociale est abrogé.
III. A. – À compter du 1er janvier 2020, au second alinéa de l’article L. 758-1 du code de la sécurité sociale, le montant : « 0, 088 euro » est remplacé par le montant : « 0, 136 euro ».
B. – À compter du 1er janvier 2021, au second alinéa de l’article L. 758-1 du code de la sécurité sociale, le montant : « 0, 136 euro » est remplacé par le montant : « 0, 184 euro ».
C. – À compter du 1er janvier 2022, au second alinéa de l’article L. 758-1 du code de la sécurité sociale, le montant : « 0, 184 euro » est remplacé par le montant : « 0, 232 euro ».
D. – Au 1er janvier 2023, le second alinéa de l’article L. 758-1 du code de la sécurité sociale est supprimé.
La parole est à Mme Catherine Conconne.
Je reviens !
Je souhaite mettre à l’aise mes collègues de La Réunion. Leur auto-flagellation m’a rendue triste, mais bon, chacun connaît et assume son territoire. Je respecte.
Je veux bien croire qu’il existe une pathologie particulière à La Réunion, les Réunionnais eux-mêmes ayant dit ici ce soir qu’elle augmentait de manière exponentielle. Je suis allée une seule fois à La Réunion, j’y suis restée quatre jours, je n’y ai pas bu une goutte de rhum, …
… je ne connais donc pas la question du rhum à La Réunion.
Deux pays dans l’Atlantique sont de gros producteurs de rhum. J’aime bien sortir du « vrac outre-mer » et jouer la différenciation. La Réunion n’est pas la Martinique. De même, la Polynésie n’est pas la Martinique. On a voulu mettre dans le même sac informe tous les bronzés de la République, mais, pour ma part, je suis martiniquaise, et non outre-mérienne ou ultramarine. Mes particularités sont celles de la Martinique. Elles sont proches de celles de la Guadeloupe, qui ressemblent aux nôtres.
Cet amendement vise à prévoir que La Réunion puisse choisir un délai de six ans et la Martinique, un délai de dix ans. Il s’agit d’un amendement de repli visant à mettre tout le monde à l’aise.
La Martinique et la Guadeloupe font le bonheur de la France avec la Route du Rhum – n’est-ce pas, mon ami Victorin Lurel ? Sous cette appellation courent les plus grands navigateurs du monde, en particulier les Français, pour rejoindre les plus beaux pays du monde de l’autre côté de l’Atlantique. On fait la fête au nom du rhum, on fait du commerce au nom du rhum !
Que l’on accorde donc à ces deux pays, dont le rhum, production d’excellence, est exporté dans plus d’une centaine de pays, dix années pour lisser leur fiscalité !
L’amendement n° 259 rectifié bis, présenté par M. Lurel, Mmes Jasmin et Conconne, MM. Antiste et J. Bigot, Mme Conway-Mouret, M. Lalande, Mme G. Jourda, M. Lozach et Mme Ghali, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi l’article :
I. – À compter du 1er janvier 2020, à l’article L. 758-1 du code de la sécurité sociale, le montant : « 0, 04 euro » est remplacé par le montant : « 0, 078 euro ».
II. – À compter du 1er janvier 2021, à l’article L. 758-1 du même code, le montant : « 0, 078 euro » est remplacé par le montant : « 0, 117 euro ».
III. – À compter du 1er janvier 2022, à l’article L. 758-1 du même code, le montant : « 0, 117 euro » est remplacé par le montant : « 0, 155 euro ».
IV. – À compter du 1er janvier 2023, à l’article L. 758-1 du même code, le montant : « 0, 155 euro » est remplacé par le montant : « 0, 194 euro ».
V. – À compter du 1er janvier 2024, à l’article L. 758-1 du même code, le montant : « 0, 194 euro » est remplacé par le montant : « 0, 232 euro ».
VI. – À compter du 1er janvier 2025, l’article L. 758-1 du même code est abrogé.
La parole est à M. Victorin Lurel.
Cet amendement prévoyant un délai de six ans, avec une année d’amorçage, doit-il être présenté à cet instant ?
Vous comprenez ma gêne, alors que je demandais, avec mes collègues, un délai de dix ans…
Madame la ministre, j’y insiste : un fonds dédié sera-t-il bien consacré aux actions de prévention et à la lutte contre l’alcoolisme et les différentes pathologies résultant de la consommation d’alcool ? Pour le moment, on ne le sait pas très bien. J’ai cru comprendre qu’une sous-section serait créée au sein de je ne sais quel fonds de financement. Nous aimerions avoir des assurances à cet égard.
Je pense que, pour le moment, les motifs qui sont invoqués sont légitimes et respectables, mais la solution que vous proposez est un peu brutale. Vous ne donnez pas suffisamment de temps aux entreprises pour s’adapter.
Je voterai donc d’abord en faveur d’une période de transition de dix ans ; si celle-ci ne devait pas recueillir l’assentiment de notre assemblée, je me replierai sur une période de six ans.
L’amendement n° 611, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
I. - L’article L. 758–1 du code de la sécurité sociale est ainsi rédigé :
« Art. L. 758–1. - En Guadeloupe, en Guyane, à La Réunion, en Martinique, à Mayotte, à Saint-Barthélemy et à Saint-Martin, le tarif de la cotisation sur les boissons alcooliques, prévu à l’article L. 245–9 pour les rhums, tafias et spiritueux composés à base d’alcool de cru produits et consommés sur place est fixé à :
« 1° 168 euros par hectolitre d’alcool pur à compter du 1er janvier 2020 ;
« 2° 246 euros par hectolitre d’alcool pur à compter du 1er janvier 2021 ;
« 3° 325 euros par hectolitre d’alcool pur à compter du 1er janvier 2022 ;
« 4° 403 euros par hectolitre d’alcool pur à compter du 1er janvier 2023 ;
« 5° 482 euros par hectolitre d’alcool pur à compter du 1er janvier 2024. »
II. - L’article L. 758-1 du code de la sécurité sociale est abrogé à compter du 1er janvier 2025.
La parole est à Mme la ministre, pour présenter cet amendement et pour donner l’avis du Gouvernement sur les autres amendements faisant l’objet de la discussion commune.
J’indique dès à présent que je demande, au titre de l’article 44 du règlement du Sénat, le vote par priorité de l’amendement du Gouvernement.
Cet amendement vise à étaler sur six ans, à compter de 2020, l’alignement de la cotisation de sécurité sociale pesant sur les boissons alcooliques produites et consommées dans les départements d’outre-mer. Il tend à adapter le calendrier de convergence de la cotisation sur celle qui est applicable en métropole, en tenant compte à la fois des objectifs de santé publique et des nécessités d’adaptation du secteur de production.
Je répondrai maintenant aux interpellations et aux inquiétudes qui se sont exprimées sur notre capacité à travailler sur nos deux jambes en termes de prévention des addictions, notamment des addictions à l’alcool.
Madame Conconne, vous mettez en doute les chiffres que j’ai cités. J’ai évidemment tous les dossiers qui montrent que la consommation d’alcools forts dans les départements d’outre-mer, notamment dans le vôtre, est plus de trois fois supérieure à la moyenne nationale. Ce n’est pas vrai pour le vin, la bière et les autres alcools.
En outre, en Martinique, 34 % des accidents corporels sont en lien avec l’alcool, contre 10 % en moyenne à l’échelon national.
Vous avez raison, ces chiffres peuvent être stigmatisants, mais ils ne concernent que quelques personnes, et non la totalité de la population.
Cela étant dit, je ne peux pas accepter l’idée, et c’est la preuve du profond respect que je porte aux citoyens de ces territoires, que nous fassions moins bien aujourd’hui en termes de prévention et en matière de santé publique pour nos concitoyens des départements d’outre-mer que pour ceux des territoires métropolitains.
La perte de chances d’un certain nombre de nos concitoyens dans les départements d’outre-mer en raison d’un accès trop facile aux alcools forts me pose problème en tant que ministre de la santé, car je dois être garante de la santé de la totalité des citoyens français. Veiller à faciliter l’accès de l’ensemble des citoyens des départements d’outre-mer aux mesures de prévention me paraît donc être une marque de respect.
Je reviens sur les chiffres que vous avez cités. Certes, la taxation n’est pas le seul levier, le seul axe sur lequel nous pouvons travailler. Vous dites que 80 % des volumes produits sont exportés et que seuls 20 % sont consommés localement. Or la taxation ne vise que la consommation locale, et non l’exportation. La production ne devrait donc être en réalité que très peu touchée. C’est un argument supplémentaire qui démontre que nous prenons uniquement une mesure de santé publique. Il ne s’agit pas de punir les producteurs de rhum puisque 80 % de leur production est exportée.
Monsieur Magras, vous me demandez de vous prouver que les taxes fonctionnent pour limiter les addictions. Toutes les études de santé publique montrent que la taxation est l’un des leviers, même s’il n’est pas le seul. Elle fonctionne pour le tabac, pour l’alcool évidemment, pour le sucre également, comme on l’a vu après le vote l’année dernière de la taxation du sucre dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale. La consommation de sucre est en train de diminuer.
Enfin, je tiens à vous rassurer sur la prévention. Nous faisons un effort particulier en la matière dans les départements d’outre-mer. Le plan « Priorité prévention » présenté par le Gouvernement contient un volet spécifique pour les départements d’outre-mer afin de faire face à certaines de leurs particularités.
Dans le programme 204 de mon ministère, 44 millions d’euros sont prévus pour la prévention dans les départements d’outre-mer. Les crédits du Fonds d’intervention régional utilisé par les ARS pour la prévention vont passer de 47 millions d’euros à 49 millions d’euros. Il faut savoir que les ARS dans les départements d’outre-mer consacrent 23 % de ce fonds aux mesures de prévention, contre 15 % en moyenne pour les ARS de métropole.
Les crédits du Fonds de lutte contre les addictions seront portés de 30 millions d’euros à 100 millions d’euros dans le projet de loi de finances que nous examinerons ensemble dans une semaine ou deux. Ce fonds contient également un volet spécifique pour les départements d’outre-mer. Le produit de l’augmentation des droits ira à ce fonds et sera fléché dans une section spécifique pour l’outre-mer, conformément à ce qui est prévu dans le Livre bleu outre-mer.
Mme Catherine Conconne s ’ exclame.
Nous tiendrons évidemment nos engagements, comme vous pourrez le vérifier. Le produit attendu de ces taxes s’élèvera à 30 millions d’euros au terme des six ans. Nous travaillons sur la totalité de la politique de santé publique. Notre amendement vise à aligner la taxation en six ans, à partir de 2020, mais il tient évidemment compte de la nécessité pour ces territoires de s’organiser en termes de filières.
M. François Patriat applaudit.
L’amendement du Gouvernement prévoit une période transitoire de six ans à partir de 2020 afin d’aligner progressivement la fiscalité outre-mer sur les alcools forts sur celle qui en vigueur dans l’Hexagone. Il uniformise aussi le mode de calcul de cette contribution de sécurité sociale en l’appliquant à un volume d’alcool pur par hectolitre, et non plus à une fraction de la boisson.
Ces deux dispositions me paraissent satisfaisantes. Elles répondent en grande partie aux préoccupations des auteurs des amendements qui ont été déposés.
En accord avec le président Alain Milon et la commission, je demande le retrait de ces amendements, au profit de celui du Gouvernement, qui me semble constituer une synthèse.
J’ai bien entendu ce qu’a dit Mme Conconne, qui souhaite une différenciation. Il est vrai, comme vous le dites, que l’industrie du rhum à la Martinique et en Guadeloupe, dans les îles antillaises de façon générale, est plus développée qu’ailleurs. C’est juste, nous n’allons pas le contester. Il n’en demeure pas moins que les territoires d’outre-mer sont tous touchés par les syndromes que nous avons évoqués.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. À cet égard, je ne citerai qu’un chiffre. Le syndrome d’alcoolisation fœtale a connu une plus forte progression en Guadeloupe entre 2006 et 2013, selon les données de santé publique, ce que peut nous confirmer Mme la ministre.
Mme la ministre acquiesce.
J’ai été saisi, par le Gouvernement, d’une demande de priorité de vote de l’amendement n° 611.
Selon l’article 44, alinéa 6 de notre règlement, la priorité est de droit quand elle est demandée par le Gouvernement, sauf opposition de la commission saisie au fond.
Quel est l’avis de la commission sur cette demande de priorité formulée par le Gouvernement ?
J’ai été saisi, par le Gouvernement, conformément à l’article 44, alinéa 6, de notre règlement, d’une demande de priorité de vote de l’amendement n° 611.
Quel est l’avis de la commission sur cette demande de priorité formulée par le Gouvernement ?
La priorité est ordonnée.
Je vais donc mettre aux voix l’amendement n° 611.
La parole est à Mme Catherine Conconne, pour explication de vote.
Je ne peux pas plus État que ça !
Vous nous parlez ensuite de fonds dédiés à la prévention, madame la ministre. Les statistiques de la Fédération française des spiritueux Repères 2017, non contestées par le Gouvernement, montrent que 0, 2 % seulement des sommes collectées va vraiment à la prévention.
Et qu’en est-il de la fiscalisation du vin, dont il semblerait que la consommation n’entraîne aucune pathologie ? Le vin, au même titre que la bière, reste très faiblement taxé. Après les « gilets jaunes », avez-vous peur d’une manifestation des « bidons rouges » ?
Sourires.
En revanche, pour nous, qui sommes si loin de la métropole, aucun problème, aucun doute, on conservera la taxation !
Les arguments employés pour justifier cette hausse brutale étalée sur six ans – pourquoi pas sept ans, pourquoi pas huit, pourquoi pas neuf ? – ne tiennent pas la route…
… et témoignent d’une méconnaissance chronique de nos territoires. Cela me conforte dans l’idée que je suis une citoyenne entièrement à part !
Toutes les interventions montrent qu’un travail doit être mené outre-mer, sans faire pour autant d’amalgame entre les différents territoires. Cette discussion n’est pas nouvelle, et nos débats d’hier et d’aujourd’hui sont importants.
J’entends aussi que la concertation fait défaut et qu’elle doit être renforcée.
Le groupe communiste républicain citoyen et écologiste n’a pas l’habitude d’être particulièrement complaisant avec le Gouvernement, mais, en l’occurrence, il nous semble que sa proposition, qui vise à aligner progressivement la fiscalité sur une période de six ans, à partir de 2020, peut faire consensus. En effet, si je ne m’abuse, mes chers collègues, six plus deux font huit…
Sourires.
Nous examinons le PLFSS, et l’alcoolisation est un problème national, dans l’Hexagone et en dehors. Il me semble que la proposition gouvernementale permet de répondre à la problématique, sans pour autant stigmatiser certains territoires.
Vous avez raison, la puissance des lobbies est très importante. Je me souviens d’ailleurs d’une discussion, sous un précédent gouvernement, où les défenseurs des alcools produits sur les différents territoires montaient au créneau les uns après les autres…
En l’occurrence, le Gouvernement a entendu les arguments exposés dans cet hémicycle, et c’est pourquoi notre groupe votera en faveur de l’amendement n° 611.
Nous voterons également l’amendement du Gouvernement, même si je veux féliciter Mme Conconne pour sa combativité – en tant qu’élue d’un département qui produit du Calvados, j’ai une certaine solidarité envers les producteurs d’alcools forts.
En 2012, les droits d’accises sur la bière ont augmenté de 160 % en une seule fois, passant de 13, 75 euros à 36 euros. Le Gouvernement a raison de vouloir, cette fois, étaler l’augmentation sur plusieurs années. Avons-nous d’ailleurs, madame la ministre, des statistiques sur l’évolution de la consommation de bière depuis que ces droits ont été augmentés ?
Les producteurs de rhum n’ont pas forcément la structure économique des grands brasseurs pour supporter cette hausse des taxes. L’amendement du Gouvernement me semble prudent sur la capacité « d’absorption » de cette augmentation par les producteurs, et c’est pourquoi nous le voterons.
Je vous ai écoutée avec attention, madame la ministre. Vos paroles ont l’art de la séduction et vos intentions sont parfaitement louables.
Je veux toutefois rappeler trois points.
Premièrement, j’ai eu à défendre ici une décision unilatérale du Gouvernement, qui n’est pourtant pas venu en soutien lors de la suppression du quota de rhum.
Deuxièmement, on a attribué au Vietnam un quota sur les sucres spéciaux, alors que ce pays n’était pas demandeur.
Troisièmement, s’agissant du sucre, il a fallu que Victorin Lurel et moi-même nous battions pour que la teneur en sucre des produits destinés aux outre-mer soit alignée sur celle des produits destinés à la métropole. Nous avons aussi bataillé pour qu’un décret d’application soit pris, sans certitude qu’il le soit à l’heure actuelle.
Cherchez l’erreur, madame la ministre ! Vous battez-vous contre l’obésité, le diabète et l’hypertension quand vous laissez fabriquer sur le territoire national, exclusivement à destination des outre-mer, des produits plus sucrés, au prétexte que nous sommes beaucoup plus sensibles que le reste de la population au sucre ? Pourquoi agir différemment pour le rhum ?
Il doit y avoir une forme de cohérence dans l’action.
S’agissant de la mesure que vous proposez, l’étalement est possible, mais on comprend bien qu’il est préférable d’accepter une durée de transition de sept ou huit ans plutôt que rien du tout !
La demande de priorité est de droit, mais j’avais moi-même proposé, dans l’amendement que j’ai soutenu, une durée de six ou sept ans. La ministre nous garantit qu’une sous-section du fonds de prévention sera spécialement consacrée à la lutte contre les addictions. Nonobstant la déception que l’on peut ressentir, je demande à nos collègues de faire confiance au Gouvernement et de voter en faveur de l’amendement n° 611.
Guillaume Arnell l’a rappelé : nous avons dû nous battre au Parlement, et singulièrement au Sénat, pour lutter contre toutes les addictions, y compris le sucre. À l’époque, j’ai eu tous les lobbies du sucre contre moi, j’ai même reçu des tracts chez moi à l’occasion d’une campagne pour les élections régionales.
Aujourd’hui, il n’y a toujours pas de contrôle sur la production locale, le taux de sucre dépasse très largement la moyenne nationale et on a attendu deux ans la parution des décrets et arrêtés interministériels.
Le problème ne concerne pas uniquement l’alcool, mais toutes les substances psychoactives. Il faut vraiment un plan de lutte général.
Enfin, il nous faudra aussi revenir, dans le PLFSS puis le PLF, sur le chlordécone, les organochlorés et les produits phytopharmaceutiques en général, sur lesquels il faut agir au plus vite.
Notre débat est particulièrement intéressant et permet de rappeler un certain nombre de vérités.
Compte tenu de la demande de priorité formulée par le Gouvernement – la priorité est de droit -, je choisis de retirer l’amendement n° 197 rectifié et de me rallier à la position de la commission.
L’amendement n° 197 rectifié est retiré.
La parole est à Mme Viviane Malet, pour explication de vote.
Je voterai l’amendement du Gouvernement. Il me semble nécessaire du point de vue de la santé publique et permet aux acteurs économiques de s’adapter à moyen terme.
En revanche, il ne dit rien du fonds consacré à la lutte contre les addictions présenté dans le Livre bleu outre-mer. Je le déplore, même si vous vous êtes engagée oralement, madame la ministre.
Les données sanitaires montrent que les phénomènes d’addiction sont bien réels à La Réunion, avec en particulier un problème d’alcoolisation fœtale. Ce n’est faire injure à personne de le reconnaître, et je le dis en toute amitié à notre collègue.
Les personnes qui sont en situation de précarité risquent davantage de souffrir d’addiction au jeu, à l’alcool ou à d’autres drogues. Pour autant, il n’y a pas de sous-Français, ni de sous-Domiens. Chacun a sa part d’humanité, qu’il boive, qu’il joue, qu’il mange du sucre ou qu’il consomme de la bière.
L ’ amendement est adopté.
En conséquence, l’article 9 bis est ainsi rédigé, et les amendements n° 26 rectifié bis, 243 rectifié ter, 569 rectifié, 116 rectifié, 258 rectifié bis, 328 rectifié et 259 rectifié bis n’ont plus d’objet.
L’amendement n° 460 rectifié bis, présenté par MM. Jomier, Daudigny et Kanner, Mmes Féret, Grelet-Certenais, Jasmin, Lubin, Meunier et Rossignol, M. Tourenne, Mmes Van Heghe et Blondin, MM. Fichet, Antiste, J. Bigot et Cabanel, Mme Guillemot, MM. Kerrouche, Magner et Montaugé, Mme S. Robert, M. Tissot, Mme M. Filleul, MM. P. Joly, Mazuir et Jacquin, Mme Bonnefoy, M. Duran et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 9 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Après le chapitre Ier du titre III de la première partie du livre premier du code général des impôts, il est inséré un chapitre Ier bis ainsi rédigé :
« Chapitre I er …
« Produits alimentaires à référence alcoolique
« Art. 520 B. – Pour l’application des dispositions du présent code, sont dénommés produits alimentaires à référence alcoolique l’ensemble des produits destinés à la consommation alimentaire dont la composition n’indique pas de produits soumis à la taxe prévue au même article.
« Art. 520 C. I. – Est instituée, à compter du 1er janvier 2019, une taxe sur les produits alimentaires à référence alcoolique, définis à l’article 520 B.
« II. – Sont redevables de cette taxe les personnes produisant, important ou distribuant en France les produits alimentaires à référence alcoolique définis à l’article 520 B.
« III. – La taxe est assise sur le chiffre d’affaires réalisé sur les produits définis à l’article 520 B.
« IV. – Le taux de la taxe est fixé à 5 % du montant mentionné au III.
« V. – La taxe est déclarée et liquidée sur l’annexe à la déclaration des opérations du mois de mars de l’année au titre de laquelle la taxe est due, déposée en application de l’article 287.
« Elle est acquittée au plus tard lors de cette déclaration.
« VI. – La taxe est constatée, recouvrée et contrôlée selon les mêmes procédures et sous les mêmes sanctions, garanties et privilèges que la taxe sur la valeur ajoutée.
« Les réclamations sont présentées, instruites et jugées selon les règles applicables à cette même taxe.
« VII. – Le produit de la taxe est affecté à la branche mentionnée au 1° de l’article L. 200-2 du code de la sécurité sociale. »
La parole est à M. Bernard Jomier.
Cet amendement ne prévoit aucune taxation du vin, j’en suis désolé, mais il repose, tout comme l’amendement n° 459 rectifié bis, sur l’analyse de l’émergence d’un marketing publicitaire absolument inacceptable visant les 12-15 ans.
Notre société ne peut tolérer que de jeunes adolescents soient incités à consommer des substances psychoactives. Or, depuis quelques années, un certain marketing incite les jeunes, qui ont naturellement le goût du sucré, à faire progressivement la transition vers l’alcool à travers différents produits qui leur sont proposés.
Cet amendement vise la vente de produits alimentaires à référence alcoolique. On connaît tous les bonbons Pina Colada ou Mojito et les autres substances alimentaires qui contiennent une référence à un produit alcoolique. Elles sont clairement destinées à faire basculer ensuite les jeunes vers une consommation d’alcool.
Je ne peux pas accepter, en termes de santé et de responsabilité des adultes envers la jeunesse, qu’on laisse ce marketing publicitaire se développer. Un amendement de même nature avait été présenté à l’Assemblée nationale, mais son champ était trop large, puisqu’il aurait également inclus, par exemple, une moquette couleur bordeaux…
Nous avons donc retravaillé, en lien avec la commission, pour resserrer l’objet de l’amendement et envoyer un message très clair à ceux qui pensent pouvoir utiliser cette stratégie pour toucher les enfants et les jeunes adolescents.
Je ne reprendrai pas les excellents développements de notre collègue Bernard Jomier sur le contenu de cet amendement, mais je lui proposerai toutefois, afin de mieux définir le champ des produits concernés, la rédaction suivante pour le nouvel article 520 B du code général des impôts : « Pour l’application des dispositions du présent code, sont dénommés produits alimentaires à référence alcoolique l’ensemble des produits dont la composition n’indique pas de produit mentionné à l’article 401 mais dont l’étiquetage des unités de conditionnement ou l’emballage extérieur comprennent des éléments ou dispositifs qui contribuent à la promotion d’un produit mentionné au même article 401. »
Cette rédaction peut sembler complexe, mais il est nécessaire de définir précisément ces ersatz d’alcool.
Sous réserve de cette modification, je confirme l’avis favorable de la commission.
Mme Agnès Buzyn, ministre. Nous partageons bien évidemment votre préoccupation, monsieur Jomier, mais nous ne sommes pas sûrs que la voie de la taxation soit la plus logique.
Mme Catherine Conconne applaudit.
Je pense que nous devons travailler à une interdiction pure et simple des bonbons dont le nom évoque l’alcool. Ce phishing des industriels à l’égard de nos jeunes leur laisse penser que l’alcool est sans danger dans des produits de consommation courante. C’est donc un vrai sujet de santé publique.
En revanche, ma réponse sera la même qu’à l’Assemblée nationale : je ne pense pas que la taxation soit la bonne méthode et je vous propose plutôt de travailler à une interdiction pure et simple.
Quand pensez-vous pouvoir interdire ces produits, madame la ministre : aujourd’hui, demain, après-demain ?
Nous avons présenté un plan interministériel « Priorité prévention » en février dernier. Un comité assure le suivi de ce plan et, si nous voyons apparaître de nouveaux sujets de santé publique, rien n’interdit de proposer de nouvelles mesures.
En l’occurrence, il s’agirait de mesures sans impact budgétaire, qui relèveraient du champ réglementaire, et non du PLFSS. Je compte y travailler dans le courant de l’année.
Nous travaillons aussi à un plan de santé concernant les 0-6 ans : nous ne manquerons donc pas de vecteurs pour introduire une mesure de ce type.
Quoi qu’il en soit, il me semble important de montrer la détermination de l’ensemble des élus et du Gouvernement sur ce sujet qui touche notre jeunesse.
En revanche, le problème de la définition des produits se posera pour l’interdiction comme pour la taxation. Si l’on votait aujourd’hui une taxation de ces produits alimentaires à destination de la jeunesse, on ne serait sans doute pas en mesure de l’appliquer. Nous devons travailler sur l’identification des produits que nous souhaitons cibler.
Je vous propose donc d’aller tout simplement vers une interdiction de ce type de produits, mesdames, messieurs les sénateurs, et vous pourrez m’interroger dans quelques mois pour savoir si j’ai avancé sur le sujet.
Monsieur Jomier, acceptez-vous de rectifier votre amendement dans le sens souhaité par la commission ?
Je remercie le rapporteur de sa proposition de précision, que j’accueille volontiers.
Quant à l’interdiction, madame la ministre, elle me semble plutôt relever du niveau législatif que du niveau réglementaire. Il vous faudra donc trouver un véhicule législatif.
Si vous nous donnez l’assurance que vous introduirez cette interdiction dans le projet de loi Santé, que vous présenterez en juin prochain au Parlement, j’accepte, en accord avec le rapporteur, de retirer cet amendement.
Sinon, il me semble que son adoption dans le cadre du PLFSS aurait le mérite d’adresser un message clair aux fabricants
Mme Nassimah Dindar opine.
Ce qui peut leur faire peur, ce n’est pas tant le montant de la taxe que la volonté forte du législateur de mettre un terme à ces pratiques.
Il serait dommage de se priver de ce message pour une hypothétique interdiction, dont on ne sait pas aujourd’hui quand elle pourra être inscrite à notre calendrier législatif.
Marques d ’ approbation sur des travées du groupe Les Républicains.
Un projet de loi sera présenté l’an prochain autour de la stratégie de transformation du système de santé, la STSS.
Je ne sais pas si nous serons prêts pour introduire une telle mesure d’interdiction dans ce projet de loi. En revanche, rien n’empêche de déposer une proposition de loi sur ce sujet, dans le cadre d’une niche parlementaire. Je suis prête à soutenir une initiative du Sénat allant dans ce sens.
Vos annonces sont intéressantes, madame la ministre, et me semblent de nature à répondre à l’objet de l’amendement de notre collègue Bernard Jomier.
Avec une proposition de loi, l’argument selon lequel l’interdiction pourrait être retardée n’est plus pertinent. Encore faut-il savoir dans quelle niche parlementaire et quand cette proposition pourra être déposée…
Il me semble toutefois que le groupe socialiste et républicain dispose de niches parlementaires §et que ses membres sont suffisamment nombreux pour pouvoir la présenter dans des délais relativement courts.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Mme la ministre ne semble pas pouvoir garantir l’introduction de cette mesure dans le projet de loi Santé qu’elle présentera au printemps prochain. Une proposition de loi pourrait donc être un excellent vecteur
On le conteste sur de nombreuses travées.
Une proposition de loi est un outil complexe. Il faut trouver la niche.
Il me semble plus simple d’adopter l’amendement que j’ai présenté dans le cadre du PLFSS
Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains. – M. Rachid Temal et Mme Victoire Jasmin applaudissent également.
… en attendant que Mme la ministre propose d’inscrire l’interdiction dans la loi.
L’un n’empêche pas l’autre : on peut parfaitement voter cet amendement aujourd’hui et déposer par la suite une proposition de loi, ou insérer l’interdiction dans le projet de loi Santé.
À la suite de la proposition de modification de M. le rapporteur, acceptée par M. Jomier, je suis donc saisi d’un amendement n° 460 rectifié ter, présenté par MM. Jomier, Daudigny et Kanner, Mmes Féret, Grelet-Certenais, Jasmin, Lubin, Meunier et Rossignol, M. Tourenne, Mmes Van Heghe et Blondin, MM. Fichet, Antiste, J. Bigot et Cabanel, Mme Guillemot, MM. Kerrouche, Magner et Montaugé, Mme S. Robert, M. Tissot, Mme M. Filleul, MM. P. Joly, Mazuir et Jacquin, Mme Bonnefoy, M. Duran et les membres du groupe socialiste et républicain, et ainsi libellé :
Après l’article 9 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Après le chapitre Ier du titre III de la première partie du livre premier du code général des impôts, il est inséré un chapitre Ier bis ainsi rédigé :
« Chapitre I er …
« Produits alimentaires à référence alcoolique
« Art. 520 B. – Pour l’application des dispositions du présent code, sont dénommés produits alimentaires à référence alcoolique l’ensemble des produits dont la composition n’indique pas de produit mentionné à l’article 401 mais dont l’étiquetage des unités de conditionnement ou l’emballage extérieur comprennent des éléments ou dispositifs qui contribuent à la promotion d’un produit mentionné au même article 401.
« Art. 520 C. – I. – Est instituée, à compter du 1er janvier 2019, une taxe sur les produits alimentaires à référence alcoolique, définis à l’article 520 B.
« II. – Sont redevables de cette taxe les personnes produisant, important ou distribuant en France les produits alimentaires à référence alcoolique définis à l’article 520 B.
« III. – La taxe est assise sur le chiffre d’affaires réalisé sur les produits définis à l’article 520 B.
« IV. – Le taux de la taxe est fixé à 5 % du montant mentionné au III.
« V. – La taxe est déclarée et liquidée sur l’annexe à la déclaration des opérations du mois de mars de l’année au titre de laquelle la taxe est due, déposée en application de l’article 287.
« Elle est acquittée au plus tard lors de cette déclaration.
« VI. – La taxe est constatée, recouvrée et contrôlée selon les mêmes procédures et sous les mêmes sanctions, garanties et privilèges que la taxe sur la valeur ajoutée.
« Les réclamations sont présentées, instruites et jugées selon les règles applicables à cette même taxe.
« VII. – Le produit de la taxe est affecté à la branche mentionnée au 1° de l’article L. 200-2 du code de la sécurité sociale. »
La parole est à Mme Patricia Schillinger, pour explication de vote.
Il est difficile d’appliquer aux zones frontalières les interdictions que l’on prononce en France.
J’étais rapporteur de la loi interdisant le bisphénol A, et je constate les difficultés au niveau européen, les consommateurs ne s’arrêtant pas à la frontière franco-allemande.
Je suis donc plutôt favorable à une taxation dans un premier temps, ou sinon à une interdiction dans toute l’Europe. Une interdiction sur le seul territoire français ne servirait strictement à rien. Nos jeunes traversent la frontière pour aller en boîte de nuit et ils consommeront à l’étranger ces produits dont le nom évoque des boissons alcoolisées.
Je remercie Bernard Jomier d’avoir maintenu cet amendement.
On nous demande souvent d’attendre le prochain véhicule législatif… Quant aux propositions de loi, elles reçoivent souvent un avis défavorable du Gouvernement, et, parmi celles qui sont adoptées au Sénat, beaucoup ne franchissent jamais le seuil de l’Assemblée nationale. Voilà cinq ans, par exemple, qu’on parle des seuils sociaux.
La taxation n’empêchera pas d’engager le travail de réflexion proposé par Mme la ministre. En adoptant cet amendement, nous enverrons un signal à tous ceux qui, de façon irresponsable, mettent en danger la santé de nos enfants.
Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.
Vous avez déclaré être plutôt favorable à une interdiction, madame la ministre. C’est une annonce forte.
Toutefois, une grande confiance n’exclut pas une petite méfiance, comme on le dit dans mon bocage normand…
Si notre collègue avait retiré son amendement, d’autres sénateurs l’auraient sans doute repris.
Catherine Deroche a raison s’agissant des propositions de loi qui ne sont jamais examinées par l’Assemblée nationale.
Si l’on vote la taxation aujourd’hui, elle a peu de chance d’être maintenue lors de la commission mixte paritaire. Mais il est vrai aussi que si les deux chambres l’adoptaient, il serait sans doute très difficile de prononcer une interdiction l’an prochain.
Il me semble toutefois que l’adoption de cet amendement constituerait un signal fort, qui rejoindrait votre souhait d’interdire ces produits, madame la ministre.
Nous éprouvons souvent de grandes difficultés pour faire prospérer les textes : ce n’est jamais le bon endroit et le bon moment. Aujourd’hui, c’est, me semble-t-il, le bon endroit et le bon moment pour voter cet amendement. Nous le soutiendrons donc des deux mains !
Mon propos sera proche de celui de Catherine Deroche, avec laquelle j’ai travaillé sur la question de la fiscalité comportementale. Je soutiens sans réserve l’amendement proposé par Bernard Jomier.
La fiscalité comportementale a plusieurs cibles.
Elle peut s’adresser aux consommateurs : dans ce cas, son effet est souvent ambigu et l’on constate que les catégories sociales les moins aisées sont celles qui sont les premières sanctionnées et les moins sensibles aux arguments présentés.
Elle peut également s’adresser aux industriels, qui pour leur part y sont très attentifs. Nous avons de multiples exemples dans l’histoire récente, où la fiscalité comportementale a amené des industriels à modifier la composition de leurs produits – je pense notamment à des fabricants français de boissons sucrées, qui ont diminué le taux de sucre dans le produit qu’ils mettent en vente.
Cet amendement nous permet de donner dès aujourd’hui un signal très important.
Si une mesure d’interdiction est ultérieurement adoptée, que ce soit sur l’initiative de parlementaires ou du Gouvernement, tant mieux ! Mais ne manquons pas l’occasion d’adresser aux industriels un message très fort, parce que les procédés mis en exergue par Bernard Jomier sont absolument intolérables et inadmissibles en termes de santé publique.
Mme Catherine Conconne. Compte tenu des débats que nous avons eus précédemment et qui étaient très spécifiques à mon territoire, j’ai obtenu la liberté de vote sur cet amendement. J’ai donc le bonheur de dire à Mme la ministre que je suivrai sa position : elle a raison, taxer n’a jamais changé le cours des choses !
Sourires sur plusieurs travées.
Je voudrais remercier Bernard Jomier pour cette initiative. C’est une question, certes spécifique, mais très importante, parce qu’elle concerne l’enfance et l’initiation précoce à l’alcool que peuvent entraîner les pratiques qu’il a mentionnées. On l’a vu, la taxation fonctionne, que ce soit pour l’alcool ou pour le tabac. Pourquoi ne marcherait-elle pas sur ce type de produits ? Par conséquent, le groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen votera cet amendement.
Ce matin, la commission des affaires sociales a donné, à l’unanimité, un avis favorable à l’amendement présenté par Bernard Jomier.
Nous étions donc très favorables à la taxation avant d’entendre Mme la ministre proposer l’interdiction de ces produits, ce qui me semble être une meilleure formule encore que la taxation. Cependant, comme l’interdiction ne viendrait que dans un second temps, il nous faut d’abord, en votant immédiatement la taxation proposée par Bernard Jomier, envoyer un signal fort à ceux qui seraient tentés de mettre de tels produits sur le marché.
Ce signal sera d’autant plus fort que, si le Sénat vote aujourd’hui la taxation, l’Assemblée nationale devra se prononcer dans les semaines à venir sur ce sujet et elle devra se positionner soit pour la taxation, soit pour l’interdiction.
Madame la ministre, quel est l’avis du Gouvernement, à la suite de ces débats ?
Marques d ’ approbation sur plusieurs travées. – Mmes Patricia Schillinger et Nadine Grelet-Certenais applaudissent.
L ’ amendement est adopté.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 9 bis.
Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 292 rectifié ter, présenté par Mmes Guidez, C. Fournier et Dindar, MM. Henno, Mizzon et les membres du groupe Union Centriste, est ainsi libellé :
Après l’article 9 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le b du I de l’article 1613 bis du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Les mots : «, définis aux articles 401, 435 et au a du I de l’article 520 A qui ne répondent pas aux définitions prévues aux règlements modifiés n° 1576/89 du Conseil du 29 mai 1989, n° 1601/91 du Conseil du 10 juin 1991 et n° 1493/99 du Conseil du 17 mai 1999, au 5° de l’article 458 du code des impôts, » sont supprimés ;
2° Le mot : « communautaire » est remplacé par les mots : « de l’Union européenne ».
La parole est à Mme Jocelyne Guidez.
Les boissons mélangeant alcool fort et boisson non alcoolisée très sucrée, telles que les prémix, Alcopops ou autres Coolers, masquent la dangerosité de l’alcool et leur forte teneur en sucre par un packaging festif, coloré et racoleur, particulièrement à l’égard des jeunes.
Le propriétaire de la marque Rosé Sucette a notamment précisé : « Ces bouteilles, à moins de 3 euros sur linéaire, seront un tremplin permettant aux néophytes d’accéder aux vins plus classiques, notamment pour un public plutôt jeune et féminin ».
À ce titre, les pouvoirs publics se sont intéressés à ce problème de santé publique dès la loi de finances pour 1997, en taxant ces boissons. Les chiffres de l’office français des drogues et des toxicomanies témoignent de l’efficacité de cette désincitation fiscale : en 1997, les ventes tombent à 100 000 litres contre 950 000 en 1996.
Ce dispositif de politique fiscale a été renforcé en 2004 et a entraîné en 2005 une baisse de 40 % des ventes de prémix. C’est ainsi que les trois leaders du marché – Boomerang, Smirnoff Ice et Eristoff Ice – ont vu leurs ventes reculer respectivement de 26, 4 %, 34, 6 % et 44, 9 %.
Mais ces industriels se sont adaptés, en exploitant une faille de la loi de 2004 renforçant ce dispositif. En effet, cette dernière excluait du champ d’application de la taxe les vins aromatisés. Ainsi, des vins-coca ou des cidres aromatisés sont apparus sur le marché, ces derniers étant clairement adressés à la consommation des jeunes en raison notamment de leur marketing et de la politique de prix bas.
C’est pour ces raisons de santé publique que le présent amendement prévoit d’étendre la taxe dite prémix aux boissons aromatisées à base de vin.
L’amendement n° 459 rectifié bis, présenté par MM. Jomier, Daudigny et Kanner, Mmes Féret, Grelet-Certenais, Jasmin, Lubin, Meunier et Rossignol, M. Tourenne, Mmes Van Heghe et Blondin, MM. Fichet, Antiste, J. Bigot et Cabanel, Mme Guillemot, MM. Kerrouche, Magner et Montaugé, Mme S. Robert, M. Tissot, Mme M. Filleul, MM. P. Joly, Mazuir et Jacquin, Mme Bonnefoy, M. Duran et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 9 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au b du I de l’article 1613 bis du code général des impôts, la référence : «, n° 1601/91 du Conseil du 10 juin 1991 » est supprimée.
La parole est à M. Bernard Jomier.
Sans répéter ce que vient de dire Jocelyne Guidez ou ce que ne manquera pas d’indiquer Chantal Deseyne en présentant l’amendement suivant, les produits que nous visons ici relèvent de la même thématique que notre débat précédent : il s’agit uniquement de marketing publicitaire en direction des 12-15 ans.
Comme le propriétaire de la marque Rosé Sucette l’a lui-même indiqué, ce sont les jeunes femmes qui sont particulièrement visées : veut-il s’assurer qu’au moment de la grossesse elles aient pris l’habitude de consommer de l’alcool ? C’est d’un épouvantable cynisme ! D’ailleurs, quand on y pense, il faut vraiment oser pour appeler un produit Rosé Sucette…
Le même procédé avait été tenté avec des alcools forts. C’est la loi qui y a mis le holà par une taxation qui a fait chuter les ventes – elles sont passées de 950 000 litres à 100 000 litres par an. De ce simple fait, les coûts liés à ces produits étaient trop élevés par rapport aux volumes vendus et ils ont disparu.
Nous devons indiquer clairement aux fabricants qu’ils doivent cesser de mettre ce type de produits sur le marché.
Il existe une légère différence entre notre amendement et ceux de Mmes Guidez et Deseyne : le nôtre n’englobe pas les cidres aromatisés. En effet, il me semble qu’il faut cibler les vins aromatisés, qui – j’en profite pour le dire – sont très largement fabriqués à partir de vins importés. Je ne souhaite pas opposer le vin et le cidre ; l’élargissement au cidre risque simplement de rendre l’application de la taxation plus difficile.
Sous cette nuance, la philosophie de nos amendements est exactement la même.
L’amendement n° 103 rectifié ter, présenté par Mmes Deseyne, Deromedi et Lavarde, MM. Grosdidier et Mouiller, Mme A.M. Bertrand, MM. Mayet, Cambon et Sol, Mmes Gruny et L. Darcos, MM. Cuypers, Huré et Rapin, Mmes Thomas, Chain-Larché et Renaud-Garabedian, MM. Mandelli, Husson, Piednoir et Laménie, Mme Lanfranchi Dorgal, M. Buffet, Mme Duranton et MM. Segouin et Pierre, est ainsi libellé :
Après l’article 9 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le I de l’article 1613 bis du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Un ou plusieurs produits alcooliques, qui ne bénéficient pas d’indications géographiques protégées ou d’attestations de spécificité au sens de la réglementation communautaire, et qui contiennent plus de 35 grammes de sucre ou une édulcoration équivalente par litre exprimée en sucre inverti, font l’objet d’une taxe perçue au profit de la Caisse nationale de l’assurance maladie des travailleurs salariés, dès lors que la boisson obtenue présente un titre alcoométrique acquis de plus de 1, 2 % vol. et inférieur à 12 % vol. »
La parole est à Mme Chantal Deseyne.
Cet amendement, qui s’inscrit dans le même esprit que les deux précédents, vise à dénoncer les pratiques d’industriels qui cherchent à banaliser la consommation d’alcool par les jeunes. Les noms évocateurs de Rosé Sucette, Rouge Cola ou Bonbon Mojito prêtent à confusion et laissent croire que ces boissons sont anodines, ce qui est parfaitement irresponsable et inacceptable.
Il ne s’agit évidemment pas d’entrer en guerre contre les vins et les apéritifs, ils font partie de la culture française. Des marques comme Vermouth ou Noilly-Prat ne me gênent pas du tout.
Ce qui me gêne, c’est d’inciter les jeunes, en particulier les jeunes femmes, à boire de l’alcool. Nous entendons combattre les pratiques d’industriels peu scrupuleux, qui s’engouffrent dans une niche commerciale et utilisent généralement des vins de piètre qualité, bien souvent importés. Faire la promotion de tels produits n’est pas une bonne publicité pour les viticulteurs français !
Ces boissons s’adressent particulièrement à un public jeune. Or l’incitation à l’alcool est tout à fait inadmissible. Cet amendement constitue d’abord un message de prévention.
Sans revenir sur l’objet de ces amendements, qui ont été parfaitement présentés par leurs auteurs, je crois qu’il faut insister sur l’efficacité de la taxe sur les prémix qui n’est plus à démontrer. Ainsi, ses renforcements successifs ont permis de tirer les ventes à la baisse.
Toutefois, les marques qui se partagent ce marché exploitent dorénavant une faille du dispositif, en utilisant des mélanges à base de vin ou de cidre, et ces amendements entendent la combler.
L’amendement présenté par M. Jomier exclut les cidres, ce qui permet selon lui de rendre le champ d’application de la taxe plus efficace.
Néanmoins, la commission a émis un avis favorable sur l’amendement n° 292 rectifié ter présenté par Mme Guidez et demande par conséquent le retrait des amendements n° 459 rectifié bis et 103 rectifié ter de M. Jomier et de Mme Deseyne. Les amendements n° 292 rectifié ter et 103 rectifié ter sont très proches, mais il nous semble que la rédaction du premier est légèrement plus précise que celle du second.
Je ne peux évidemment qu’être d’accord avec l’objectif de réduire la consommation de prémix par les jeunes et mon avis sera de nature principalement technique.
En ce qui concerne les amendements présentés par Mme Guidez et par Mme Deseyne, ils pourraient aboutir à assujettir d’autres liqueurs de terroir, ou des cidres, ce qui irait au-delà de l’objectif initial de la taxe.
Sur l’amendement de M. Jomier, les paramètres retenus – titrage compris entre 1, 2 % et 12 % – laissent ouverte la possibilité pour les industriels de contourner très facilement le dispositif, en montant par exemple à 13 %. Or, on le sait, certains vins ont un fort titrage alcoolique.
Une éventuelle modification du périmètre de cette taxe me semble devoir être précédée d’un travail en profondeur sur tous les paramètres. Comme je l’ai indiqué à l’Assemblée nationale, je suis d’accord pour travailler sur ces dispositifs et les améliorer, de façon que nous touchions un maximum de prémix.
Aujourd’hui, tels qu’ils sont rédigés, ces amendements sont relativement incompatibles avec le présent projet de loi de financement de la sécurité sociale et leur efficacité n’est pas certaine. C’est pourquoi je suis défavorable à ces amendements en l’état actuel, mais je m’engage devant vous à travailler à une amélioration du dispositif en vigueur en vue du prochain projet de loi de financement.
Madame la ministre, vous avez parlé du cidre, mais ces amendements concernent bien les boissons aromatisées à base de cidre, pas le cidre lui-même.
L ’ amendement est adopté.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 9 bis, et les amendements n° 459 rectifié bis et 103 rectifié ter n’ont plus d’objet.
Chapitre II
Des règles de cotisations plus claires et plus justes
I. – L’article L. 380-2 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° A
1° À la première phrase du quatrième alinéa, les mots : « fixée en pourcentage du » sont remplacés par les mots : « assise sur le » et, à la fin, les mots : «, qui dépasse un plafond fixé par décret » sont supprimés ;
2° Après le même quatrième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« L’assiette de la cotisation fait l’objet d’un abattement fixé par décret. Cette assiette, avant application de l’abattement, ne peut excéder un montant fixé par décret. » ;
3° Le cinquième alinéa est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :
« Pour les personnes mentionnées à l’article L. 611-1 du présent code ainsi que pour les personnes mentionnées à l’article L. 722-1 du code rural et de la pêche maritime, les revenus d’activité pris en compte pour l’application du cinquième alinéa du présent article ne peuvent être inférieurs à la plus faible des assiettes minimales retenues pour le calcul des cotisations sociales de ces personnes dans les conditions prévues aux articles L. 621-1 et L. 633-1, à l’avant-dernier alinéa de l’article L. 635-1, au dernier alinéa de l’article L. 632-1, à l’avant-dernier alinéa de l’article L. 642-1 et, le cas échéant, aux articles L. 644-1 et L. 644-2 du présent code ou à l’article L. 731-11 du code rural et de la pêche maritime.
« Le montant de la cotisation est égal au produit de l’assiette et d’un taux dont la valeur, fixée par décret, décroît linéairement à proportion des revenus d’activité et devient nul lorsque ces revenus atteignent le seuil mentionné au 1°. » ;
4° À la fin de l’avant-dernier alinéa, les mots : « du Conseil d’État » sont remplacés par les mots : « en Conseil d’État ».
II. – Le présent article s’applique aux cotisations dues au titre des périodes courant à compter du 1er janvier 2019. –
Adopté.
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 117 rectifié est présenté par Mme Conconne, M. Antiste, Mme Jasmin, MM. Lurel et Iacovelli, Mme G. Jourda, M. Duran, Mme Conway-Mouret, MM. Lalande et Tissot, Mme N. Delattre, MM. Manable et P. Joly et Mme Artigalas.
L’amendement n° 316 rectifié bis est présenté par Mme Berthet, M. Dériot, Mme Lamure, M. Laménie, Mmes Lassarade et Malet, M. Magras, Mmes Delmont-Koropoulis, Deromedi et Raimond-Pavero, M. Revet, Mmes Noël, Micouleau et Gruny, MM. Ginesta, Chaize et Paccaud, Mme Lavarde et MM. Brisson, de Nicolaÿ, Bonhomme, Genest et Gremillet.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 10
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – La troisième phrase de l’avant-dernier alinéa de l’article L. 642-1 du code de la sécurité sociale est supprimée.
II. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Catherine Conconne, pour présenter l’amendement n° 117 rectifié.
Cet amendement vise à dispenser les professionnels libéraux pluriactifs de la cotisation forfaitaire minimale et à leur appliquer, ce qui me semble plus juste, une cotisation proportionnelle au premier euro.
En effet, depuis l’entrée en vigueur de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2016, ces professionnels, et particulièrement ceux qui exercent une activité saisonnière, ont subi une augmentation très significative de leur cotisation d’assurance vieillesse, alors même que beaucoup d’entre eux ne dégagent que peu de bénéfices sur leur activité temporaire.
Il existe même des cas où la cotisation forfaitaire inciterait à ne pas travailler. Le secteur touristique est tout particulièrement touché par cette mesure, notamment les personnels appelés en renfort lors de la haute saison.
La parole est à Mme Martine Berthet, pour présenter l’amendement n° 316 rectifié bis.
Cet amendement vise également à revenir sur la situation défavorable dans laquelle se trouvent les professionnels libéraux pluriactifs, plus particulièrement les moniteurs de ski occasionnels, au regard du principe de cotisation forfaitaire minimale mis en place en 2015, qui a engendré une augmentation très importante de leur cotisation d’assurance vieillesse.
Ce dispositif est particulièrement néfaste pour le tourisme de montagne et dissuade fortement les renforts temporaires, dont peuvent bénéficier les écoles de ski français aux périodes de pointe et dont elles ont besoin.
Les moniteurs de ski occasionnels ont l’obligation d’être affiliés à la caisse interprofessionnelle de prévoyance et d’assurance vieillesse, qu’ils exercent cette activité quelques jours, voire quelques heures durant la saison ou à temps complet. Ils doivent ainsi payer 461 euros de forfait retraite, quel que soit le temps travaillé. Ce coût s’ajoute à la cotisation qu’ils payent au titre de leur première activité.
Mon amendement prévoit de supprimer cette cotisation, qui est néfaste au tourisme sous toutes ses formes, afin de mettre en place une cotisation proportionnelle. Je rappelle que le secteur du tourisme est générateur de belles recettes de TVA.
La question soulevée à travers cet amendement me semble légitime, mais je n’ai pas pu obtenir de chiffrage sur son impact financier.
L’article 10 bis de ce projet de loi demande au Gouvernement de remettre un rapport au Parlement sur les régimes sociaux applicables aux activités saisonnières de courte durée des travailleurs indépendants, ce qui est l’objet même de ces amendements.
C’est pourquoi je vous propose de retirer vos amendements dans l’attente de la remise de ce rapport, qui nous permettra d’avoir une vue globale sur cette question. Nous en tirerons alors les conséquences le plus vite possible. Madame la ministre, j’espère que la remise de ce rapport n’est pas renvoyée aux calendes grecques… Quand pourrons-nous en disposer ?
Oui, mais nous ne connaissons pas l’impact financier d’une telle mesure.
Comme le précisait M. Vanlerenberghe, le Gouvernement a proposé à l’Assemblée nationale de remettre au Parlement un rapport, avant le 1er juin 2019, sur la question de la cotisation minimale d’assurance vieillesse pour les travailleurs indépendants à activité saisonnière. Ce rapport, prévu à l’article 10 bis, a notamment pour objectif d’améliorer le dispositif, tout en mesurant l’impact des éventuelles évolutions.
Si ces amendements étaient adoptés aujourd’hui, ils viendraient modifier des dispositions liées à l’assurance vieillesse, alors que nous sommes en plein travail sur la réforme systémique du régime de retraite.
C’est un sujet d’importance, nous en sommes conscients. D’ailleurs, la question revient tous les ans dans nos débats sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale. C’est pourquoi nous prenons l’engagement de remettre le rapport prévu à l’article 10 bis avant le 1er juin 2019.
Dans ces conditions, je vous propose de retirer vos amendements. À défaut, l’avis du Gouvernement sera défavorable.
Je vais voter l’amendement de Martine Berthet et je la remercie de l’avoir déposé et maintenu… Nous sommes au mois de novembre et la saison va démarrer. Je me souviens que, l’année dernière déjà, nous avons eu ce débat.
Madame la ministre, c’est bien de demander d’attendre la remise d’un rapport et d’invoquer la réforme systémique des retraites, mais il est préférable d’agir sur le terrain et de lever dès maintenant un frein aux activités touristiques, qui sont, je le rappelle, créatrices d’emplois.
Dans le contexte général de la situation de l’emploi en France, il me paraît important de voter cet amendement et je le ferai de très bon cœur.
Monsieur le rapporteur général, les amendements étant maintenus, quel est l’avis de la commission ?
Je mets aux voix les amendements identiques n° 117 rectifié et 316 rectifié bis.
Les amendements sont adoptés.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 10.
Avant le 1er juin 2019, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur les effets des différentes dispositions du droit en vigueur qui prévoient des montants minimaux de cotisations sociales pour les travailleurs indépendants applicables à une activité saisonnière de courte durée qu’ils exercent ou le paiement de cotisations par des personnes ayant déjà liquidé leur pension de retraite. Ce rapport évalue notamment l’intérêt de recourir au régime de la micro-entreprise pour ces travailleurs indépendants et présente les différentes évolutions légales ou réglementaires de nature à simplifier ou clarifier leurs obligations et leurs démarches, tout en respectant leurs droits à la retraite ainsi que l’équité entre assurés.
L’amendement n° 450 rectifié, présenté par Mme Rossignol, MM. Daudigny et Kanner, Mmes Féret, Grelet-Certenais et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lubin et Meunier, M. Tourenne, Mmes Van Heghe et Blondin, MM. Fichet, Antiste, J. Bigot et Cabanel, Mme Guillemot, MM. Kerrouche et Magner, Mme Monier, M. Montaugé, Mme S. Robert, M. Tissot, Mme M. Filleul, MM. P. Joly, Mazuir et Jacquin, Mme Bonnefoy, M. Duran et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Compléter cet article par deux phrases ainsi rédigées :
Ce rapport s’attache à prendre en compte l’intégralité des variables liées aux inégalités entre les femmes et les hommes, en particulier en intégrant les spécificités liées aux femmes au sein du régime des indépendants. Il propose des recommandations de nature à éliminer les éventuelles inégalités de sexe diagnostiquées.
La parole est à Mme Laurence Rossignol.
C’est un amendement de précision, qui vise à ce que le rapport prévu à cet article prenne en compte les variables liées aux inégalités, notamment professionnelles, d’assurance maladie et de retraite, entre les femmes et les hommes.
Il est probable que le rapport intégrera effectivement ce type d’analyses, mais il me semble préférable de l’indiquer explicitement dans la loi.
Madame la ministre, je sais que vous êtes sensible aux questions d’égalité entre les femmes et les hommes, mais je suis frappée par le fait que, depuis le début de l’examen de ce projet de loi de financement de la sécurité sociale, cette question n’avance pas.
Malgré la situation que nous connaissons tous, il n’y a aucun progrès, par exemple pour pénaliser les entreprises contrevenantes. Les parlementaires ont peu de marges de manœuvre pour proposer des mesures : lorsque nos propositions ne sont pas suivies d’effets, car nous sommes minoritaires – je pense notamment à celle que je viens de citer –, nous essayons d’obtenir des évaluations plus précises afin de voir comment faire bouger les lignes.
Je le répète – c’est toujours pédagogique ! –, la question de l’égalité professionnelle, notamment salariale, n’avance qu’à petits pas, voire stagne, ou même recule dans certains secteurs, malgré le nombre de lois qui ont été adoptées sur ce sujet.
Il est donc nécessaire de nous poser la question de la responsabilité de la représentation nationale ! L’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale est un moment opportun pour cela, puisque nous pouvons faire des propositions.
Je sais que les demandes de rapport sont souvent mal vues – on nous dit que les rapports ne servent à rien, s’entassent… –, mais elles constituent aussi des formes d’appel. C’est pour cela que je soutiens cet amendement.
Nous ne sommes quand même pas dans une situation idyllique : je rappelle par exemple que seulement 0, 2 % des entreprises ont été sanctionnées.
À chaque fois que je parle de ce sujet, l’écoute est plutôt bienveillante – ce fut le cas avec Mme Pénicaud –, mais les mesures volontaristes à même de faire progresser les choses sont bien peu nombreuses.
Je suis tout de même surprise par l’avis défavorable un peu sec, sans autres explications, donné par Mme la ministre.
Un rapport est bien prévu à l’article 10 bis sur l’assurance vieillesse des travailleurs indépendants. Or chacun sait qu’en matière de retraite les inégalités entre les femmes et les hommes sont patentes. Pour reprendre vos termes, vous travaillez à une réforme systémique du système de retraite et, pour cette réflexion, tous les indicateurs pertinents seront les bienvenus.
Avec mes collègues du groupe socialiste, je propose simplement d’apporter une précision. J’ai dit il y a un instant de manière un peu ironique – peut-être n’aurais-je pas dû l’être ? – que le rapport ne manquerait pas d’aborder la question des inégalités entre les femmes et les hommes. En fait, l’expérience m’a appris qu’il est préférable de bien identifier les spécificités liées à ces inégalités dans les demandes faites à l’administration, car elles ne sont pas systématiquement évaluées.
Nous demandons simplement de bien préciser que, dans le rapport qui sera rendu en 2019, les inégalités entre les femmes et les hommes seront prises en compte. Je pense que cela ne peut que vous aider dans le cadre de la réforme systémique que vous préparez !
Pourquoi montrer tant de fermeté ? Et comment envisager une coconstruction du projet de loi de financement de la sécurité sociale entre le Parlement et le Gouvernement, puisque rien ne trouve grâce à vos yeux ? Pour vous, soit nos propositions sont coûteuses, soit elles n’ont pas leur place dans ce texte, soit elles sont en cours d’examen par le Gouvernement, soit elles aboutiront l’année prochaine… Et quand nous proposons un amendement de simple précision, cela ne va toujours pas… Nous sommes perplexes devant votre méthode !
Il est évidemment très tentant d’utiliser une cause à laquelle nous sommes tous extrêmement sensibles et de proposer un amendement qui semble s’y rattacher. Le problème, c’est que votre proposition n’a rien à voir avec le sujet du rapport ! Vous pourriez faire la même chose avec les personnes handicapées, les familles monoparentales ou toute autre cause à laquelle chacun est légitimement attaché.
Je vous rappelle que ce rapport vise à étudier la question de l’application des cotisations minimales de l’assurance vieillesse aux travailleurs indépendants exerçant une activité saisonnière de courte durée. Votre proposition n’a donc juste rien à voir avec le schmilblick !
Je ne refuse évidemment pas de m’intéresser à l’égalité entre les femmes et les hommes, mais je n’utilise pas chaque article de loi pour cela. Il se trouve que le Gouvernement, que ce soit Marlène Schiappa, Muriel Pénicaud ou moi-même, est très investi sur la question de l’égalité entre les femmes et les hommes, qui est la grande cause du quinquennat, et nous avons fait des propositions extrêmement ambitieuses. Vous ne pouvez donc pas nous faire ce procès !
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
L ’ article 10 bis est adopté.
L’amendement n° 494, présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly, Lienemann et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 10 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – L’article L. 136-8 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° Le I est ainsi modifié :
a) Au 1°, le taux : « 9, 2 % » est remplacé par le taux : « 7, 5 % » ;
b) Au 2°, le taux : « 9, 9 % » est remplacé par le taux : « 8, 2 % » ;
c) Au 3°, le taux : « 8, 6 % » est remplacé par le taux : « 6, 9 % » ;
2° Au 2° du II, le taux : « 8, 3 % » est remplacé par le taux : « 6, 6 % ».
II. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly.
La hausse de la CSG est une mesure dont l’injustice est particulièrement criante pour les retraités de notre pays. C’est à juste titre qu’elle a provoqué beaucoup de colère dans notre pays.
Dans la rue comme dans les médias, les retraités proclament partout leur malaise. Alors que les salariés vont voir leur salaire net un peu augmenter à la fin du mois d’octobre, grâce à la baisse des cotisations, eux se disent oubliés, condamnés à voir leur pouvoir d’achat s’éroder.
Votée l’année dernière, la baisse de cotisations sociales pour les salariés a eu pour contrepartie une hausse de 1, 7 point de CSG, qui pénalise particulièrement les retraités, et le Gouvernement y ajoute pour 2019 et 2020 une sous-indexation des pensions. Celles-ci n’augmenteront que de 0, 3 % par an, quel que soit le niveau d’inflation. C’est un coup de rabot qui représente une économie pour l’État de 3 milliards d’euros en 2019.
Ces nouvelles mesures s’ajoutent à de nombreux coups de canif déjà infligés ces dernières années au pouvoir d’achat des retraités : moindre revalorisation des retraites complémentaires, cotisation supplémentaire sur les pensions, décalage des dates de revalorisation… La liste est longue et d’autant plus mal vécue que les retraités ne peuvent espérer compenser ces coupes par de futures augmentations de salaire.
Selon Pierre Madec, économiste à l’OFCE : « À l’horizon 2020, les mesures du Gouvernement, y compris la suppression de la taxe d’habitation, vont améliorer le pouvoir d’achat d’environ 20 % des retraités. Mais pour quatre ménages de retraités sur cinq, elles aboutiront à une perte de 700 euros en moyenne, dont 600 euros du fait de la sous-revalorisation ».
Conscient de la colère d’une partie grandissante des retraités, vous avez décidé de lâcher un peu de lest, mais ce n’est pas l’exclusion de 300 000 retraités qui va redonner de la justice à cette mesure.
Nous proposons donc de revenir au taux de CSG antérieur à cette augmentation.
L’avis est défavorable, puisque l’adoption de cet amendement aurait pour effet de revenir sur la réforme de l’année dernière. La commission va faire d’autres propositions sur le pouvoir d’achat des retraités à l’occasion de l’examen d’un article qui suit.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
L’amendement n° 495, présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly, Lienemann et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 10 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 245-16 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa le taux : « 4, 5 % » est remplacé par le taux : « 7, 9 % » ;
2° Au troisième alinéa le taux : « 1, 38 % » est remplacé par le taux : « 3, 08 % » ;
3° Au dernier alinéa le taux : « 3, 12 % » est remplacé par le taux : « 4, 82 % ».
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Dans la continuité de notre amendement précédent, nous proposons de revenir sur la fiscalisation de recettes de la sécurité sociale, en rétablissant les cotisations salariales supprimées dans le cadre du PLFSS 2018, afin d’assurer un financement solidaire et contributif des prestations sociales.
En fait, les Françaises et les Français ont du mal à être convaincus qu’avec cette suppression ils voient leur salaire augmenter. Pourtant, le Gouvernement a redoublé d’efforts pour essayer de les convaincre. Mais ils voient plutôt les baisses d’impôts accordées aux plus aisés – impôt sur la fortune, flat tax –, 70 % d’entre eux estimant que leur pouvoir d’achat a plutôt diminué depuis la dernière élection présidentielle, et 84 % pensant que la politique du Gouvernement ne permettra pas de l’améliorer d’ici à la fin du quinquennat.
Madame la ministre, votre politique ne s’adresse pas à l’ensemble des Français, mais bien à 1 % de nos compatriotes, ceux qui sont plutôt aisés, et qui vont connaître une augmentation de 6 % de leurs revenus en deux ans. Dans le même temps, le pouvoir d’achat des 20 % de Français les plus modestes va reculer de 0, 5 % à 1 %, parce qu’ils ne paient pas d’impôts locaux, parce que le Gouvernement a décidé de revaloriser les allocations familiales et l’aide au logement de 0, 3 %, soit en deçà de l’inflation, et parce que les taxes sur le tabac et les carburants vont connaître au 1er janvier une nouvelle hausse.
Nous proposons donc de compenser la hausse de la contribution sociale généralisée sur les revenus d’activité et de remplacement de 1, 7 % par la hausse de 3, 4 % de la contribution sur les revenus du patrimoine et les produits de placements.
L’avis est défavorable. Vous proposez d’augmenter les prélèvements sociaux sur le patrimoine, alors que ceux-ci seront supprimés pour être fondus dans un prélèvement au profit de l’État à l’article 19.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente.
La séance est suspendue.
La séance, suspendue à dix-neuf heures trente-cinq, est reprise à vingt-et-une heures trente, sous la présidence de Mme Catherine Troendlé.