La séance est ouverte à quatorze heures trente.
Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.
M. le président du Conseil constitutionnel a informé le Sénat, le mardi 6 juillet 2010, que, en application de l’article 61-1 de la Constitution, la Cour de cassation a adressé au Conseil constitutionnel trois décisions de renvoi d’une question prioritaire de constitutionnalité (2010-34 QPC, 2010-35 QPC et 2010-36 QPC).
Le texte de ces décisions de renvoi est disponible au bureau de la distribution.
Acte est donné de cette communication.
(Texte de la commission)
L’ordre du jour appelle la suite de la discussion en deuxième lecture du projet de loi, modifié par l’Assemblée nationale, de réforme des collectivités territoriales (projet de loi n° 527, texte de la commission n° 560, rapports n° 559, 573, 574 et 552).
La parole est à M. le président de la commission des lois.
Permettez-moi, monsieur le président, de vous faire part d’une demande qui émane, non pas de la commission des lois – celle-ci, comme vous le savez, est toujours à la disposition du Sénat ! –, mais de certains de nos collègues, qui souhaiteraient une suspension de séance de quelques minutes.
Je ne vois pas pourquoi, monsieur le président ! Ils ont eu toute la nuit et la matinée pour se concerter…
Je sais bien, monsieur Sueur, que vous rêvez de me remplacer, voire de remplacer le président du Sénat… Quoi qu’il en soit, cette demande est formulée avec tant de courtoisie et de gentillesse que je ne peux que l’accepter.
La séance est suspendue.
La séance, suspendue à quatorze heures trente-cinq, est reprise à quatorze heures quarante.
La séance est reprise.
Nous poursuivons la discussion des articles.
TITRE IER
RÉNOVATION DE L’EXERCICE DE LA DÉMOCRATIE LOCALE
Chapitre IER
Conseillers territoriaux
Nous en sommes parvenus, au sein du chapitre Ier du titre Ier, à l’examen des articles précédemment réservés.
Avant l’article L. 3113-1 du code général des collectivités territoriales, il est inséré un article L. 3113-1 A ainsi rédigé :
« Art. L. 3113 -1 A. – Le département est divisé en territoires.
« Le territoire est une circonscription électorale dont les communes constituent un espace géographique, économique et social homogène.
« Le découpage territorial du département respecte sa diversité géographique, économique et sociale.
« Le conseiller territorial est le représentant du territoire au sein du conseil général. »
M. Michel Teston. Mes chers collègues, je débuterai mon intervention en rappelant que les membres de notre groupe sont opposés à la création du conseiller territorial.
Exclamations sur les travées de l ’ UMP.
Un sénateur du groupe socialiste. Vous ne le saviez peut-être pas encore !
Sourires
En effet, la mise en place d’élus siégeant à la fois au conseil général et au conseil régional laisse à penser qu’il s’agit d’une première étape vers une fusion entre ces deux collectivités.
La création du conseiller territorial opérerait une quasi-fusion, mais les deux échelons de collectivité subsisteraient, formant deux personnes morales distinctes, avec des budgets et des compétences distincts.
Ce projet de loi ne respecte donc pas pleinement la lettre de l’article 72 de la Constitution. En effet, soit on fusionne les deux échelons pour créer une collectivité nouvelle gérée par un « conseil territorial », soit on respecte la séparation en deux personnes morales distinctes et, partant, l’existence de deux assemblées d’élus.
J’estime, en outre, et je l’ai déjà dit hier, que cette disposition porte atteinte au principe, reconnu dans la Constitution, d’absence de tutelle d’une collectivité sur une autre.
Ce principe constitutionnel est tellement ancré dans notre droit qu’en cas de coopération entre collectivités, seule est autorisée l’existence d’un « chef de file ». Or la mission des conseillers territoriaux pourrait leur permettre d’orienter la prise de décision régionale en fonction d’intérêts départementaux ou la prise de décision départementale dans un sens favorable à la région. Ainsi, la tutelle est inhérente au dispositif qui découlerait de cette réforme institutionnelle, si, par malheur, elle était adoptée.
En outre, l’extrême difficulté du Gouvernement à proposer un mode de scrutin adapté démontre, s’il en est encore besoin, que le problème réside dans l’instauration même du conseiller territorial.
Le Gouvernement veut imposer la création de ce conseiller territorial, alors qu’aucune association d’élus ne s’est jamais prononcée en ce sens. Officiellement, il s’agirait de réduire le nombre d’élus afin de faire des économies ; nous ne sommes pas dupes de ce discours, opportun en période de crise.
En réalité, ce texte n’est pas dépourvu d’arrière-pensées. L’objectif n’est-il pas d’empêcher que les assemblées des collectivités départementales et régionales soient majoritairement à gauche ?
La création du conseiller territorial ne respecte pas un certain nombre de principes essentiels de la vie démocratique : la proximité, la parité, ou encore la juste représentation des territoires. Pourquoi supprimer le mode de scrutin actuellement retenu pour les élections régionales, qui donne satisfaction en assurant, tout à la fois, une majorité, la parité et la représentation des minorités ?
Comment ne pas rappeler, d’ailleurs, qu’après avoir été adopté à l’Assemblée nationale et rejeté par la commission des lois du Sénat, un tableau des effectifs des conseillers territoriaux réapparaît sous la forme d’un amendement déposé par M. le rapporteur ?
Ainsi, dans le département de l’Ardèche, le nombre des conseillers territoriaux passerait de 18, selon le texte de l’Assemblée nationale, à 19, soit en moyenne 25 % de moins que l’effectif prévu dans des départements dont la population est pourtant sensiblement moins élevée. Je rappelle que l’Ardèche compte actuellement 33 conseillers généraux et 10 conseillers régionaux ; le nombre de ces élus serait donc réduit de plus de 50 %. Avec une telle répartition, où est la juste représentation des citoyens et des territoires ?
Les diverses péripéties survenues lors des débats témoignent de la difficulté du Gouvernement à structurer son projet. Il serait donc judicieux de ne pas modifier le dispositif existant pour les élections régionales et de maintenir les conseillers généraux, qui pourraient devenir des conseillers départementaux élus dans des circonscriptions plus équilibrées que les actuels cantons.
Cette analyse nous conduit à réaffirmer avec force notre opposition à la création du conseiller territorial, qui s’inscrit dans une logique à peine dissimulée de remise en cause de la décentralisation, d’abandon de la parité et de renoncement à une juste représentation des territoires.
Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.
Ah ! sur les travées de l ’ UMP.
Pour ma part, je ferai une analyse inverse de cette disposition : je tiens à féliciter la commission, notamment le président et le rapporteur, ainsi que les auteurs de l’amendement grâce auquel cet article a été introduit dans le projet de loi !
En effet, il est capital de définir le territoire, qui se caractérise non pas par une population, mais, selon les termes mêmes du texte, par « un espace géographique, économique et social homogène ». Ainsi, nous sortons des débats, par ailleurs légitimes, entre représentation territoriale et représentation démographique, et nous faisons un choix délibéré – ce point me semble essentiel, en particulier vis-à-vis du Conseil constitutionnel ! – en faveur d’un élu qui sera accroché à un territoire, selon des modalités sur lesquelles nous reviendrons.
Chers collègues de l’opposition, de grâce, ne soyons pas en permanence dans le psychodrame ! Il est légitime que des modalités électorales fassent débat. Accepter de telles discussions, c’est d’ailleurs respecter les uns et les autres.
En revanche, ce qui constitue la philosophie même de cet article, c’est que le conseiller sera ancré sur un territoire et qu’il appartiendra, à la fois, au conseil général et au conseil régional ; ce dernier point n’est pas précisé dans le texte, mais M. le rapporteur nous expliquera peut-être pourquoi il en est ainsi…
Mes chers collègues, il s’agit ici de reconnaître que les élus de l’assemblée régionale doivent être ancrés dans les territoires. Je connais un peu la région, …
… pour avoir présidé pendant dix-huit ans le Languedoc-Roussillon. Or j’ai la faiblesse de penser qu’en dehors du président et des autres membres de l’exécutif, personne ne connaît les conseillers régionaux ! En effet, les listes qui sont fabriquées par les partis politiques, de droite comme de gauche, ne créent pas ce lien avec les électeurs.
Demain, le conseiller territorial apportera au conseil régional, à la fois, une connaissance intime du terrain et une proximité avec les citoyens. Comme ce seront les mêmes élus qui siégeront au conseil général et au conseil régional, un certain nombre de divergences ou d’oppositions disparaîtront. D’ailleurs, il ne s’agit pas ici de fusionner le département ou la région, pas plus que de supprimer l’un ou l’autre de ces échelons.
M. Jacques Blanc. Je n’ai qu’un regret, c’est que personne n’ait osé déposer un amendement – pas même moi, car je savais que cette proposition ne serait pas acceptée
Exclamations sur les travées du groupe socialiste
Le président du conseil général, oui, le président du conseil régional, non !
Ainsi, cet élu porterait un message clair. Toutefois, dès lors que je suis le seul à défendre cette idée, je savais que je ne parviendrais pas à convaincre mes collègues et je n’ai donc pas défendu cette proposition.
Il faudra trouver un équilibre, qui se dégagera peu à peu. Toutefois, dès aujourd’hui, nous affirmons à travers cet article que les conseillers territoriaux sont bien les représentants de territoires. Peu importe le nombre d’habitants et les différences qui peuvent exister en la matière. Si la Lozère compte 15 conseillers territoriaux, …
… et j’espère même qu’elle pourra en obtenir 17, ce sera mieux qu’un seul. Ces conseillers représenteront leur territoire et ils porteront, à l’échelon régional, une exigence d’aménagement équilibré et harmonieux du territoire.
Ce sera là un changement fondamental, me semble-t-il ; il permettra de compenser le poids des métropoles, qui est réel dans toutes les régions.
Le présent article est donc essentiel : il place la proximité au cœur de cette réforme et il permettra de créer des dynamiques nouvelles entre les départements et les régions.
Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.
M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Mirassou, sur l’article.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.
Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, notre discussion d’hier, hormis quelques « piques » lancées sur un registre parfois passionné, témoigne que les membres de la majorité ont dépassé leur manque d’enthousiasme initial et s’enferment désormais dans une forme de résignation. Cela vaut aussi pour les membres du Gouvernement, qui, dans le meilleur des cas, distillent une petite musique destinée non pas à bercer la misère humaine, comme aurait dit Jaurès, mais à endormir le Sénat.
Il est de mon devoir de rappeler, comme l’a fait hier soir Jean-Pierre Sueur, que notre groupe était disposé à mener un véritable débat permettant de lancer le troisième acte de la décentralisation et d’adapter notre paysage institutionnel aux enjeux du XXIe siècle.
Malheureusement, pour jouer cette partition, il fallait être plusieurs ! Or, nous avons pu le constater, le débat n’existait que dans les rangs de l’opposition.
En réalité, le but, sinon avoué, du moins visé, du Gouvernement est non pas d’avancer dans cette direction, mais, au contraire, de revenir sur trente ans de décentralisation, d’ailleurs en tournant le dos aux élus. Ces derniers, pendant toute cette période, ont donné le meilleur d’eux-mêmes, avec succès. Manifestement, ils n’en seront pas récompensés et resteront sur leur faim : malgré de nombreuses et évidentes expressions publiques de leur désaccord, vous avez refusé de les entendre ; vous persistez et signez aujourd’hui.
L’article 1er AA consacre l’avènement du « duo infernal »…
… composé du conseiller territorial et du territoire, qui est chargé d’incarner la fusion-absorption des départements et des régions, l’une de ces deux structures étant, fatalement, appelée à disparaître.
Paradoxalement, et sur ce point je suis en désaccord avec Jacques Blanc, au moment même où, par un artificiel souci de modernité, on raye de la carte le canton – pour des raisons essentiellement démographiques, qui font que cette circonscription est disqualifiée au titre de l’exode rural ! –, et où l’on crée un territoire censé mettre en adéquation une zone géographique avec une population et un bassin d’emplois, on conserve, sur le plan administratif, ces mêmes cantons. Comprenne qui pourra !
Par ailleurs, messieurs les ministres, l’énorme difficulté que vous éprouvez à définir le conseiller territorial constitue déjà une forme de disqualification de ce nouvel élu, avant même qu’il ait vu le jour. En outre, je le répète, personne n’est capable, au moment où nous parlons, de dire quelles seront ses compétences !
Comment pouvez-vous prétendre engager à travers ce texte une clarification des compétences alors que, comme Michel Teston vient de le souligner, la plus grande confusion régnera entre les régions et les départements, dont les compétences sont jusqu’à présent parfaitement distinctes ?
À travers ce texte, vous entendiez également réduire le nombre des élus, par souci d’économie... On me pardonnera d’évoquer à ce sujet le cas de la Haute-Garonne, que je connais bien : ce département comptera à l’avenir 91 conseillers territoriaux, qui siégeront eux-mêmes parmi les 255 que comprendra la région Midi-Pyrénées ! Voilà un nombre, on l’avouera, qui ne plaide pas en faveur des intentions affichées par le Gouvernement en matière d’économies.
En réalité, et pour conclure, à travers la création du conseiller territorial, vous prenez le risque d’organiser la fracture entre les territoires, en imposant, de surcroît, confusion et austérité aux collectivités. Dès lors, on le comprendra aisément, la détermination du groupe socialiste à combattre ce projet de loi sort renforcée du cours de nos débats.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.
Hier, je me suis laissée convaincre assez facilement par M. le président de la commission des lois qu’il n’était pas possible de défendre la suppression du chapitre Ier, au motif que le conseiller territorial avait été accepté, à la fois, par l’Assemblée nationale et par le Sénat. Or je crois que j’ai eu tort.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Naturellement, ce n’est pas très grave, parce que vous n’auriez pas adopté cette proposition, chers collègues de la majorité ; du moins je le suppose, car on ne sait plus très bien ce que vous votez…
Sourires sur les travées du groupe CRC-SPG.
Si je me suis laissée convaincre, c’est parce que, je le reconnais, le Sénat et l’Assemblée ont accepté, en gros, le principe du conseiller territorial.
Toutefois, vous avouerez que ma demande de suppression des mots « conseillers territoriaux », formant l’intitulé du chapitre Ier du titre Ier, trouve tout son sens avec nos débats d’aujourd’hui ! En effet, cet objet, qui n’était déjà pas bien identifié au départ, l’est manifestement de moins en moins, puisque à l’heure actuelle il n’y a d’accord ni sur le mode de scrutin, ni sur les circonscriptions, ni même d’ailleurs sur la nature du conseiller régional ; et je dis « régional » à dessein ! On aurait donc pu, tout de même, accepter un vote sur un titre qui, pour l’instant, se trouve en quelque sorte en suspension, faute de contenu réel.
Le libellé de cet article 1er AA me semble destiné, avant tout, à asseoir l’existence de ce conseiller territorial, qui, de fait, n’est pas encore précise. Tel est son objectif !
Compte tenu des votes que nous avons émis hier, et sachant que la réalité du conseiller territorial n’est pas effective, Le titre de l’article 1er AA ne convient absolument pas. Certes, celui-ci vise à asseoir l’existence du conseiller territorial ; nous l’avons bien compris, mais un tel objectif aurait pu être atteint grâce à une phrase évoquant les « conseillers territoriaux » !
La rédaction de cet article est donc d’une imprécision totale. Elle pourra être contredite ultérieurement par le mode de scrutin ou par les découpages électoraux, qu’il faudra bien déterminer. Sur la forme donc, cette disposition ne signifie pas grand-chose. Sur le fond, bien entendu, notre désaccord est complet. Mais c’est un autre sujet ; nous avons d’ailleurs déposé un amendement de suppression de cet article.
Honnêtement, « le département est divisé en territoires » est une formule qui veut dire tout et son contraire. Quant à la phrase « le territoire est une circonscription électorale dont les communes constituent un espace géographique, économique et social homogène », elle ne signifie pas grand-chose non plus.
L’article dispose également : « Le découpage territorial du département respecte sa diversité géographique, économique et sociale ». Mais pourrait-on faire le contraire ? Pourrait-on découper le département autrement ? Je trouve tout de même cette précision curieuse !
On nous dit, enfin, que « le conseiller territorial est le représentant du territoire au sein du conseil général ». Or, dans votre conception, il est aussi un élu régional !
Le libellé de cet article, qui est destiné à faire passer à tout prix le conseiller territorial – le titre du chapitre n’était pas suffisant, et j’aurais donc dû me battre pour que l’on vote sur ce point ! – est donc contre-productif.
Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, je souhaite intervenir pour répondre à mon excellent collègue Jacques Blanc, mais surtout pour le plaisir de défendre le concept de conseiller territorial, qui constitue une véritable innovation et donne tout son sens à ce projet de loi.
Même si ce texte connaît une progression difficile, je le reconnais, le conseiller territorial apporte une véritable valeur ajoutée à notre organisation territoriale. Pourquoi ?
La France est une république décentralisée, mais non fédérale. Les régions et les départements, contrairement aux Länder allemands ou aux États américains, ne possèdent donc pas de pouvoir normatif. La vocation de ces collectivités est de rendre des services au quotidien, dans le cadre de leur territoire et des compétences qui leur sont conférées par la loi. Si un pouvoir normatif leur était accordé, il faudrait que les conseillers territoriaux soient des conseillers « démographiques », c’est-à-dire élus en fonction du nombre d’habitants de leur circonscription. En effet, lorsqu’on édicte une norme générale, qui s’applique à tous, il est préférable que les élus soient représentatifs de la population.
Nos régions et nos départements ont pour mission de veiller, par exemple, à ce que les collèges couvrent la totalité du territoire départemental, ou à ce que le ramassage scolaire desserve les cantons en compensant les inégalités territoriales tenant, entre autres, à la distance, au parcours et à l’enneigement. L’important est que les élus représentent les territoires, qui ont chacun des problèmes spécifiques, même si l’égalité démographique entre ces territoires n’est pas strictement respectée.
Vous nous proposez, monsieur le secrétaire d’État, un compromis acceptable, avec des écarts de population de plus ou moins 20 % ; il permet la représentation d’une certaine diversité des espaces au sein d’un département. Dans la mesure où ces conseillers territoriaux seront compétents pour gérer, à la fois, le premier cycle du secondaire, c’est-à-dire l’enseignement dispensé dans les collèges, et le deuxième cycle du secondaire, soit la scolarité au niveau du lycée, il n’est pas anormal que leur représentation respective soit comparable d’un département à l’autre.
Vous avez donc mis en place un système intelligent, qui permet la représentation de la diversité territoriale et démographique.
Cher Jacques Blanc, un département de petite taille, même s’il jouit d’une réputation prestigieuse – je songe au département tel que l’imaginait La Fayette ! –, ne saurait être surreprésenté au sein de l’assemblée régionale, au risque de s’attirer les foudres des autres conseillers régionaux. Ce n’est pas un territoire de 70 000 habitants qui peut faire la loi…
Le conseiller territorial siégera donc, à la fois, au conseil général et au conseil régional. C’est la raison pour laquelle, chers amis du groupe centriste, nous avons défendu une répartition des compétences dans laquelle les communes disposent d’une clause de compétence générale, tandis que les départements et région se voient attribuer des compétences spécialisées.
Grâce à l’existence de cet élu siégeant au département et à la région, il sera possible d’obtenir une répartition optimale des compétences, en fonction des problématiques régionales, qui sont toutes différentes. J’avais même défendu l’idée, mais sans grand succès, d’une organisation structurée des compétences à chaque échelon territorial.
Monsieur Jacques Blanc, l’élection au suffrage universel du président de la région aurait pour conséquence de privilégier le seul poids démographique, au détriment des territoires. Avec ce système, jamais un élu de Lozère, cette terre de sagesse, d’expérience et de solidité, n’aurait pu présider la région Languedoc-Roussillon.
Elle aurait toujours eu à sa tête, comme c’est le cas aujourd’hui, un élu du territoire le plus peuplé.
C’est en vertu de la diversité des territoires et du droit des populations à être représentées équitablement qu’il faut défendre le conseiller territorial. Je note, au passage, que la proposition de Jacques Blanc n’a été reprise par personne !
Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.
En tant qu’élu d’un département rural, je souhaite, une nouvelle fois, me faire le porte-parole de nombreux élus de diverses sensibilités, qui dénoncent l’absurdité du conseiller territorial, dont on ne sait s’il est le résultat du rêve éveillé d’un président de la République en panne d’imagination, ou du cauchemar d’un technocrate en mal d’innovation.
Les compétences n’étant pas modifiées, pour l’instant, le conseiller territorial devra, tout à la fois, s’occuper des horaires des transports scolaires et de la veille hivernale des routes départementales, être une super-assistante sociale, et avoir une vision prospective de l’évolution stratégique, sociologique et économique de la région. Il devra siéger dans d’innombrables conseils d’administration et commissions, et multiplier les représentations.
Si ce conseiller territorial existe un jour, car son mode d’élection n’a pas encore été décidé, il fera perdre sa spécificité à chacun des deux niveaux de collectivités territoriales. C’est bien la preuve que la voie est ouverte pour la fusion des collectivités et la suppression du département.
La suppression de la spécificité de chaque collectivité fera perdre à l’action publique sa force et son efficacité : le département perdra la proximité, la région son pouvoir d’impulsion et de coordination.
Le département perdra, au sein de ces vastes cantons ruraux, voués au redécoupage, ce qui constituait l’essence même de son action publique : la proximité avec les citoyens et les élus, mais aussi l’écoute des habitants, des maires et des conseillers municipaux.
Quant aux régions, qui ressembleront aux anciens établissements publics régionaux, elles fonctionneront de façon obsolète et s’inscriront dans un système bien éloigné de leur vocation actuelle.
Le conseiller territorial, je le répète, n’est en aucun cas un moyen de simplifier le dispositif existant ou d’améliorer la visibilité du citoyen. En revanche, vous détruisez une organisation territoriale, certes perfectible, mais patiemment construite sur la base de deux blocs : d’une part, le bloc de la proximité et de la solidarité, formé par les communautés de communes et les départements, et, d’autre part, le bloc de la stratégie, du développement et de la prospection, formé par la région, l’État et l’Union européenne. Pourquoi déstabiliser cet édifice construit progressivement, qui a fait la preuve de son efficacité ?
La réduction annoncée du nombre d’élus, nous le savons, a pour seul but d’affaiblir l’action publique et de réduire les services publics, au détriment de la cohérence et de la solidarité des territoires.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.
Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, la création du conseiller territorial, qui a été adoptée en termes identiques par l’Assemblée nationale et par le Sénat, nous semble une hérésie. Loin de constituer une innovation, c’est une régression recentralisatrice.
Le postulat qui est à la base de la création du conseiller territorial me fait un peu peur, car il a des relents de populisme.
Protestations sur les travées de l ’ UMP.
Cela n’est pas, à mon sens, le bon angle pour aborder cette question. Il eût été préférable de parler d’efficacité !
Telle qu’elle est définie, la circonscription des conseillers territoriaux marque la fin de la ruralité et de la démocratie en milieu rural.
M. Bruno Sido s’exclame.
Pouvez-vous m’expliquer comment il serait possible, avec un conseiller territorial élu dans une circonscription de 20 000 à 25 000 habitants, de maintenir le lien essentiel avec les citoyens ?
Hier, vous avez voulu débattre de cette question durant toute la soirée. Or ce problème est réglé : ce lien n’existe plus !
Comment maintenir ce lien, alors que le conseiller territorial devra siéger dans les conseils d’administration des collèges, des lycées et assister à toutes les assemblées générales qui auront lieu sur le territoire de nos régions ?
Comme vous le savez, monsieur le ministre Mercier, puisque nous habitons la même région, pour aller en voiture du sud de mon département, la Drôme, jusqu’au siège du conseil régional, il faut deux heures et demie !
Il n’est pas possible, dans une région comptant 5 millions d’habitants, de travailler le matin au conseil général et l’après-midi au conseil régional. Un seul et même élu ne pourra pas traiter des dossiers aussi différents et résoudre les problèmes spécifiques de chaque territoire ; et je ne parle pas des conflits d’intérêts qui ne manqueront pas d’apparaître…
Lorsque les conseillers généraux siégeront au conseil régional, ils auront tendance à défendre leur territoire départemental. Cela pose un véritable problème !
Nous contestons l’architecture administrative que vous voulez mettre en place, car elle induit une régression, et non une innovation. Avec un conseiller territorial incapable d’assumer sereinement ses fonctions, il ne sera pas possible d’aller de l’avant !
En Rhône-Alpes, dans ma région, il y a 157 conseillers régionaux. Il y en aura 296 demain, si l’on en croit le tableau qui nous a été présenté. Il faudra donc construire un deuxième hémicycle ! Certes, cela donnera du travail aux entreprises de travaux publics…
Nous constatons, objectivement, que la création du conseiller territorial est irréaliste, car cet élu ne pourra pas assumer, à la fois, ses fonctions locales et ses fonctions régionales. Pire, ce dispositif est un retour en arrière, une sorte de recentralisation !
Le groupe socialiste aurait préféré le maintien des conseillers généraux et des conseillers régionaux, ainsi que le rééquilibrage des cantons ; sur ce dernier point, nous sommes d’accord avec vous. On ne peut, en effet, maintenir des cantons dont les écarts vont de 1 à 40.
Des circonscriptions de 20 000 à 25 000 habitants, c’est tout simplement la mort des territoires ruraux !
Protestations sur les travées de l ’ UMP. – Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.
Protestations sur les travées de l ’ UMP.
Je ne serais pas intervenu si Gérard Longuet n’avait pas tenté, de façon brillante et intelligente, de sauver le conseiller territorial.
Monsieur Longuet, j’ai le plus grand respect pour les militants, pour ceux qui défendent des causes ; après tout, c’est aussi notre cas. Vous avez été courageux de défendre ce conseiller territorial, aujourd’hui quelque peu en souffrance, dont nul ne sait comment il sera élu ni quelles seront ses compétences, monsieur Jacques Blanc. Je vous admire de vous être employé à soutenir cet élu désormais esseulé, tel un drapeau au milieu de la mer, ou un radeau risquant à tout moment de sombrer. Cette tentative méritait d’être saluée !
Vous devriez cependant, mon cher collègue, vous reporter à l’excellent article – vous voyez que je ne suis pas négatif ! – que vous avez publié dans Les Échos, et dans lequel vous vilipendiez « la République des ronds-points ». Vous y dénonciez ces élus qui siègent dans les assemblées pour défendre leurs ronds-points. On pourrait dire aussi « leurs cantons », « leurs territoires », ou encore « les projets du territoire dont ils sont les élus ».
Dans votre intervention, monsieur Longuet, vous avez insisté sur ce qui différencie les Länder allemands et les régions françaises : ces dernières n’ont pas de pouvoir législatif.
Toutefois, ce raisonnement présente une faille : dans la mesure où les régions françaises ne détiennent aucun pouvoir législatif, il est impossible d’exiger que l’élu du département et celui de la région soient une seule et même personne. Leurs fonctions n’ont strictement aucun rapport ! De fait, l’argument tombe, comme tombent parfois les amendements ou les feuilles mortes, en automne. (Sourires.)
... je crains que le localisme, qui est d’ailleurs tout à fait respectable – après tout, nous nous honorons de défendre les collectivités territoriales ! –, ne l’emporte à l’échelon régional, comme l’ont fait remarquer mes collègues Didier Guillaume et Yves Daudigny. Or, dans le contexte européen que nous connaissons, nous avons besoin de régions fortes, …
… plus grandes, dotées de davantage de moyens et pourvues d’élus qui ont le désir de défendre l’Université, la science et la recherche chevillé au cœur et au corps.
Monsieur Jacques Blanc, il serait pertinent de défendre, dans votre région, un grand projet méditerranéen avec une perspective européenne et mondiale rayonnante !
C’est ce que j’ai fait, mais le maire de Montpellier a tout mis en l’air ! Le Lozérien avait plus d’ambition que le Méditerranéen…
M. le président. Ne vous énervez pas, monsieur Jacques Blanc, nous en avons encore pour un moment…
Sourires
J’achèverai mon propos, comme je l’ai commencé, par un éloge de Gérard Longuet, dont vous ne manquerez pas de lui faire part : les chants désespérés sont les chants les plus beaux…
Il n’est pas désespéré ! Et le Lozérien que je suis ne l’est pas non plus…
M. le président. Nous apprécions, pour notre part, que M. Sueur n’ait ni le souffle court ni la démonstration rapide.
Sourires. – Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.
Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, j’ai écouté attentivement les différents intervenants, et c’est avec prudence, modération et humilité que je rappellerai que les trois quarts des Français vivent dans des agglomérations urbaines.
Or, dans ces agglomérations, et surtout dans les plus importantes d’entre elles, ni le conseiller général ni le conseiller régional ne sont connus.
M. Jean-Pierre Fourcade. Nos concitoyens ne connaissent guère que leur maire !
Exclamations sur les travées du groupe socialiste.
C’est pourquoi, grâce à la réforme dont nous débattons, et à condition que le nombre de conseillers territoriaux soit le plus restreint possible...
... – deux, trois ou quatre au maximum par circonscription électorale, car les députés tiennent beaucoup à ce qu’ils soient élus à l’intérieur des circonscriptions législatives ! –, ...
... à cette condition, dis-je, le conseiller territorial deviendra un personnage politique connu, ...
M. Jean-Pierre Fourcade. ... avec lequel nos concitoyens pourront dialoguer.
Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.
En outre, si le conseiller territorial est élu selon des modalités électorales simples, que tout le monde connaît, et non pas selon un mode de scrutin compliqué faisant la part trop belle aux partis politiques, nous aurons créé, au-dessus des maires et en dessous des députés, un élu connu de l’ensemble de nos concitoyens, qui pourra arbitrer entre les compétences exclusives de la région et celles du département, et qui pourra participer à des conventions de gestion commune pour un certain nombre de services publics d’importance.
Je considère, de ce point de vue, que la création du conseiller territorial est une réforme très importante. C’est la raison pour laquelle je ne voterai aucun des amendements de suppression qui nous seront proposés.
Très bien ! et applaudissements sur les travées de l ’ UMP.
Comme je l’ai dit hier, je suis un partisan de la création des conseillers territoriaux. Cela étant dit, je formulerai deux remarques.
Tout d’abord, Jean-Pierre Fourcade vient d’affirmer qu’il fallait créer ces territoires à l’intérieur des circonscriptions législatives. J’y suis radicalement opposé, car je sais ce qu’il en est des charcutages…
Dans certains départements, notamment en Moselle, nous avons assisté à des charcutages honteux au moment du redécoupage électoral !
Marques d’approbation sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.
Ensuite, même en étant favorable à la création des conseillers territoriaux, je ne vois pas très bien l’intérêt de l’article 1er AA ! Il serait plus pertinent de voter d’abord l’article relatif au mode de scrutin.
Ainsi rédigé, cet article, qui est en quelque sorte isolé dans le désert, ne sert strictement à rien.
C’est la raison pour laquelle, tout en étant favorable à la réforme des conseillers territoriaux, je voterai la suppression de cet article.
M. Jean-René Lecerf. Je suis étonné, pour ne pas dire consterné, d’entendre certains de mes collègues qui sont, à la fois, sénateurs, présidents de conseil général, pour certains d’entre eux maires de communes de moins de 3 500 habitants, voire présidents d’intercommunalité – et qui paraissent assez satisfaits de l’action qu’ils mènent ! –, juger leurs collègues conseillers généraux ou conseillers régionaux incapables d’assumer, en même temps, ces deux responsabilités !
Bravo ! et applaudissements sur les travées de l ’ UMP. – M. David Assouline proteste.
M. Jean-René Lecerf. Mes chers collègues, quelle belle opinion vous avez de vous-mêmes, et en quelle piètre estime vous tenez vos collègues conseillers généraux et conseillers régionaux !
Nouveaux applaudissements sur les mêmes travées.
J’en viens à la ruralité, car il est extrêmement intéressant de se pencher sur ce sujet. Peut-être auriez-vous pu vous demander comment elle était représentée, aujourd’hui, à l’échelon de la région, et comment nos partis politiques respectifs l’appréhendaient !
Le texte que nous examinons et tel que nous allons le voter, et qui finira bien par être adopté, permettra, par le biais des conseillers territoriaux, une représentation de la ruralité dans les régions sans commune mesure avec ce qu’elle est aujourd’hui.
Pour ma part, je suis conseiller général depuis vingt-deux ans d’un canton de plus de 50 000 habitants, qui compte six collèges : trois établissements publics et trois établissements privés. Jusqu’à présent, je ne me suis pas senti incapable d’assumer en parallèle, des années durant, d’abord les fonctions de conseiller général et celles de maire d’une ville de 40 000 habitants, puis les fonctions de conseiller général et celles de sénateur.
J’ai écouté avec beaucoup d’intérêt l’intervention du président du conseil général de l’Aisne, non sans quelque honte. En ce qui me concerne, jamais je ne me suis promené sur les routes départementales avec ma brouette et mon seau de goudron pour réparer les dégâts provoqués par le gel hivernal !
Sourires sur les travées de l ’ UMP.
À mon sens, le conseiller général a davantage un rôle de conception, de perspective et de prospective. Dans cette optique, il me semble tout à fait possible d’assumer cette fonction à l’échelon tant départemental que régional.
Il est temps de redevenir sérieux !
Bravo ! et applaudissements sur les travées de l ’ UMP.
J’ai exposé, à plusieurs reprises, les raisons pour lesquelles je considérais que le système proposé dans ce texte aurait des difficultés à fonctionner.
Je vais sortir des terres du Languedoc-Roussillon, où l’on marche facilement sur les cadavres politiques de ses adversaires ; fort heureusement, tout le monde est encore vivant… D’ailleurs, en politique, seule la mort physique est irrémédiable !
Sourires
Nouveaux sourires.
Il est fondamental que les élus des collectivités locales puissent conserver leur activité professionnelle, s’ils le souhaitent.
J’imagine mal, demain, des élus de l’Aveyron ou des Hautes-Pyrénées s’occuper des affaires du département et de la région et, parallèlement, exercer une profession.
Le véritable problème est là, me semble-t-il. Nous sommes un certain nombre à avoir choisi d’assumer, à la fois, les fonctions de conseiller général et celles de conseiller régional. Il est donc possible de le faire. Dire le contraire reviendrait à défendre ardemment le mandat unique ; mais je ne partage pas cette conviction.
Mais il est un autre écueil, à mon sens. La région Midi-Pyrénées compte environ 260 élus. J’en plains le futur président : il aura, face à lui, huit présidents de conseil général, qui arriveront avec leurs bataillons, ...
... ainsi que le président de la métropole toulousaine, qui fera de même. J’ignore quelle politique cohérente il pourra mener, s’il parvient à échapper à la territorialisation !
Par ailleurs, une assemblée de quelque 200 membres n’est en rien un problème lorsqu’il s’agit de légiférer ; c’est un peu moins pratique lorsqu’il faut traiter des dossiers techniques. Dans les faits, des grandes messes seront organisées, deux ou trois fois par an, et c’est la commission permanente qui réglera l’essentiel des problèmes. Cette difficulté mérite d’être signalée.
Pour le reste, le conseiller territorial existe sur le papier, certes, mais tant que nous ignorons quel sera son territoire ou comment il sera élu, il demeure encore relativement virtuel.
M. Claude Bérit-Débat applaudit.
Mes chers collègues, je ne saurais conclure sans rappeler qu’en politique la sérénité doit toujours l’emporter. Et si nous pouvons y ajouter un brin d’humour, ce n’est pas plus mal !
Mme Anne-Marie Escoffier applaudit.
Mes chers collègues, quatre orateurs sont encore inscrits sur l’article, et le débat dure déjà depuis une heure ! Peut-être faudrait-il en venir à l’examen des amendements…
La parole est à M. Jean-Claude Peyronnet, sur l’article.
Protestations sur les travées de l ’ UMP.
Je n’avais pas l’intention d’intervenir, monsieur le président, mais les propos de Jean-René Lecerf m’incitent à le faire. Je serai bref, car je fais miens les arguments que vient de développer François Fortassin.
Jean-René Lecerf s’est exprimé de façon brillante et véhémente, mais il a fait preuve d’une certaine mauvaise foi. Que nous le voulions ou non, nous sommes des professionnels de la politique, en ce sens que la plupart d’entre nous n’exercent que cette activité.
Non ! Nombreux sont ceux qui continuent à exercer une activité professionnelle…
Sourires sur les travées du groupe socialiste.
Certes, mais ils ne devraient pas le faire…
Comme l’a souligné François Fortassin, il sera absolument impossible pour les conseillers territoriaux d’exercer un métier. Cela entraîne un certain nombre de conséquences : dans la mesure où ce seront des professionnels de la politique, il leur faudra, pour pouvoir assumer ce mandat, une indemnité d’un montant convenable, des droits à la retraite, la sécurité sociale, une assurance complémentaire, etc. C’est indispensable ! Par ailleurs, il faudra prévoir le retour à l’emploi.
En d’autres termes, il faudra organiser le statut de l’élu. C’est d’ailleurs plutôt une bonne nouvelle. Quoi qu’il en soit, si vous voulez qu’une certaine diversité professionnelle existe, vous devrez résoudre ce problème rapidement.
Dans cette perspective, où sont les économies ? La création du conseiller territorial n’a pas du tout été chiffrée ! Je suis persuadé, pour ma part, qu’elle entraînera un surcoût important.
Je souhaite aborder quelques points particuliers, notamment à la suite de l’intervention de M. Lecerf.
En premier lieu, s’agissant de cette question des territoires, quand on voit la difficulté pour nos concitoyens à identifier la pertinence des circonscriptions, parfois même des cantons, on doit s’interroger sur les efforts et les situations très singulières qui ont permis, à certains moments, de créer des territoires ayant un sens pour la nation. Dois-je rappeler l’effort gigantesque, qui a été mené de façon drastique, durant un court laps de temps, seul moment où un tel effort a eu lieu et sur lequel nous nous fondons encore aujourd'hui ? Il se situe après la Révolution française.
Pourquoi à ce moment-là ? Parce qu’il existait alors tout à la fois une vision, un projet et une nécessité sociale aussi bien qu’économique, de développement, de cohérence politique, d’unité de la nation, qui donnaient ce souffle.
Aujourd’hui, comment nous faire croire que le territoire dont on envisage la création sera un identifiant quelconque pour les Français ? Où est le projet ? Où sont le souffle et le dynamisme ? Où est l’ambition ?
M. David Assouline. S’il s’agit de reprendre à la gauche les collectivités locales, c’est un peu minable !
Vives exclamations sur les travées de l ’ UMP.
Sourires.
Quand on a si peu d’ambition, quand la démarche est à ce point politicienne, c’est la porte ouverte à n’importe quoi !
En deuxième lieu, M. Lecerf soulève un vrai problème, mais il faut pousser le raisonnement jusqu’au bout.
Oui, dans cette enceinte, nous sommes des privilégiés. Nous pouvons, en effet, pour ceux qui veulent se consacrer pleinement à la tâche, cesser d’exercer une activité professionnelle tout en conservant une sécurité, même si cela représente parfois, pour certains, un léger risque.
Mais pour le conseiller territorial, pour la majorité de nos élus locaux aujourd'hui, une telle situation est inenvisageable au risque de se couper de leur réalité quotidienne, mais aussi de se priver d’un minimum de sécurité pour les années qui suivent.
Or, en l’occurrence, vous les mettez dans cette situation.
Dès lors, je lance un défi à M. Lecerf, qui a évoqué le cas de ceux qui sont présidents de conseil général et d’autres instances locales, et je lui annonce – il le sait probablement déjà s’il lit la presse – que nous allons déposer, et à l’Assemblée et au Sénat, une proposition de loi qui s’attaquera au cumul des mandats
Exclamations sur les travées de l ’ UMP.
… mais dans laquelle sera proposé un statut de l’élu, pour sécuriser l’ensemble des élus de France, afin que leur situation soit reconnue, stable et juste.
En troisième et dernier lieu, je formulerai une remarque qui a un lien avec les travaux que nous menons ici même. Tout à l'heure, une dépêche de l’AFP, qui a retenu mon attention précisément parce que M. Fourcade intervenait, indiquait que, s’agissant de la Société du Grand Paris, un décret venait d’être publié aux termes duquel une dérogation permettra à un élu de plus de soixante-dix ans d’être le président de cette structure.
Or je me souviens du débat sur le Grand Paris qui a eu lieu dans cet hémicycle et auquel j’ai participé, en particulier, de notre longue discussion au cours de laquelle nous avons échangé des arguments contradictoires sur cette mesure qui faisait l’objet d’une disposition figurant dans le projet de loi, et non pas d’un projet de décret.
Le Sénat a supprimé l’article en question, parce qu’il a jugé collectivement qu’il n’était pas bon de le maintenir. Ni l’Assemblée nationale lors de l’examen du texte ni la commission mixte paritaire ne l’ont rétabli. En d’autres termes, le Parlement dans son ensemble a dit que ce n’était pas bien de prévoir une telle disposition.
Or, aujourd'hui, un décret précise qu’une personne de plus de soixante-dix ans peut présider l’organisme !
M. Alain Fauconnier applaudit.
Cette disposition ne tombe pas du ciel, puisqu’elle nous avait été soumise. Autrement dit, le décret vient dire : « Je m’en fous du Parlement ! »
M. Alain Fauconnier s’esclaffe.
Nous découvrons à quel point le Gouvernement peut « s’en foutre » des discussions parlementaires…
… et des décisions adoptées par consensus dans les deux assemblées. Nous le soulignons et le dénonçons, car c’est inadmissible !
En effet, une seule raison explique tout cela : il s’agit de mettre une personnalité à la tête de cet organisme et elle est âgée de plus de soixante-dix ans. Cette décision n’a donc rien à voir avec l’intérêt général. En outre, elle renvoie à beaucoup de choses en ce moment.
Applaudissements sur plusieurs travées du groupe socialiste.
M. le ministre du Grand Paris est présent et c’est une chance, il va pouvoir nous expliquer le décret !
Monsieur Sueur, je vous en prie.
Toujours sur l’article, la parole est à M. François Patriat, et à lui seul.
M. François Patriat. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, nous voyons bien, depuis plus d’une semaine que nous travaillons sur ce texte, qu’il a pour but non pas de réformer les collectivités, de simplifier, de faire des économies, mais seulement de créer enfin ce conseiller territorial, dont le mode d’élection putatif permettra effectivement, comme vient de le dire mon collègue David Assouline, de reconquérir des territoires perdus dans les urnes.
M. Jean Desessard s’exclame.
J’ai entendu votre argumentation, monsieur Lecerf. Vous avez raison, on peut être conseiller général et conseiller régional aujourd'hui. Je l’ai été moi-même à une époque où existait l’EPR, l’établissement public régional, mais je me souviens de son mode de fonctionnement, et c’est précisément pourquoi je ne souhaite pas revenir à cette méthode ancestrale et à ce mode de fonctionnement inique.
En fin de compte, ce qui est contestable, ce n’est pas le conseiller territorial, c’est l’architecture qui l’entoure, car elle l’empêchera de bien fonctionner.
En effet, les conflits d’intérêts entre les collectivités ayant des étiquettes différentes ne permettront pas demain au président du conseil régional d’avoir toute autorité et, par là même, toute efficacité pour mener les missions qui sont les siennes. Elles concernent notamment la perspective, l’orientation, la formation, l’innovation et l’enseignement supérieur.
M. Jean-René Lecerf s’exclame.
Je ne vous ai pas interrompu, monsieur Sido, permettez-moi de poursuivre mon propos !
Écoutez ce que dit notre collègue Philippe Adnot : comment pourrait être efficace, demain, un président de conseil régional, qui aura, dans son conseil régional, quatre, six ou sept présidents de conseils généraux, …
… dont les intérêts ne seront pas identiques, dont l’étiquette politique sera différente et qui viendront faire leurs courses à la région ?
M. François Patriat. Ce que nous contestons, je le répète, c’est non pas le conseiller territorial en soi, mais le fait qu’il va introduire la négation même du fonctionnement des deux assemblées.
M. Alain Vasselle s’exclame.
La logique du conseiller territorial, c’est le territoire unique, c'est-à-dire la suppression d’un échelon. Mais vous ne l’avez pas supprimé, car vous ne le pouvez pas. Aussi, vous essayez, par la « bande », de façon un peu cynique, de reconquérir des territoires par le biais de cet objet magique que serait le conseiller territorial.
Bien sûr qu’on peut être conseiller général, maire, président d’une communauté de communes, et même exercer parallèlement un métier.
Le problème n’est pas là. Il réside dans le fait que le système ne pourra pas fonctionner, à moins que le conseil régional ne devienne un conseil général bis, où le rond-point l’emportera sur l’innovation, …
… ou, inversement, que les départements ne s’y fondent mais la proximité ne sera plus assurée.
Telles sont les raisons qui justifient notre démarche.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et sur quelques travées du groupe CRC-SPG.
Vous le voyez, on ne parle jamais aussi bien que de ce qui est virtuel !
Mes chers collègues, je veux attirer votre attention sur trois points.
Tout d’abord, calculez comme vous le voulez, vous ne pouvez pas éviter de faire disparaître massivement des élus de proximité là où ils sont le plus nécessaires, c'est-à-dire dans les territoires ruraux, pour augmenter le nombre d’élus là où ils le sont un peu moins, autrement dit dans les territoires urbains.
Si j’applique le dispositif à ma région, je constate que les deux départements alpins vont perdre la moitié de leurs conseillers généraux, c’est-à-dire trente, que concernant certains départements comme les Alpes-Maritimes, le Var et le Vaucluse certains vont en gagner, tandis que d’autres en perdront, ce qui fera match nul, et que les Bouches-du-Rhône vont gagner dix-huit conseillers territoriaux.
Et combien de conseillers territoriaux vont gagner les départements alpins ? Ils vont passer de 3 à 15 !
Permettez-moi de poursuivre, monsieur le secrétaire d'État.
Encore faudra-t-il que le Conseil constitutionnel avalise cela.
Nous avons pris nos précautions !
Sur ces cas très particuliers, même si je compte sur vous, ce n’est pas encore gagné !
Ensuite, pour répondre à l’argumentation de M. Marleix, au titre de l’année 2008, le total des dépenses des budgets, dans le compte administratif, s’élève à 63, 6 milliards d’euros pour les départements, contre 24 milliards d’euros pour les régions. Par conséquent, quels que soient vos calculs, il n’en reste pas moins vrai que les départements gèrent des budgets à peu près deux fois et demie supérieurs à ceux de la totalité des régions.
Nos conseillers territoriaux ruraux seront donc peut-être plus présents à la région, mais c’est plutôt dans les départements que l’on trouve l’argent et de quoi gérer la proximité.
C’est bien !
Enfin, pour en revenir aux propos tenus par notre collègue tout à l’heure, le conseiller territorial sera-t-il plus visible en zone urbaine que ne le sont, à présent, le conseiller général et le conseiller régional réunis ?
Ce n’est pas sûr du tout ! Si on en était resté là, on pourrait pinailler. Et dans les métropoles ? Les conseillers territoriaux n’auront pas la compétence pour les compétences transférées, puisque ce seront les conseillers métropolitains qui l’auront ! Soyez donc un petit peu réalistes !
Voilà donc quelques bons arguments pour que l’on nous prive de cette innovation qu’est le conseiller territorial ! Et j’en resterai là, car les grandes douleurs sont muettes !
M. Alain Fauconnier applaudit
Je suis saisi de trois amendements identiques.
L'amendement n° 85 est présenté par Mmes Borvo Cohen-Seat, Assassi, Mathon-Poinat et Beaufils, M. Voguet et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche.
L'amendement n° 268 est présenté par Mmes Voynet, Blandin et Boumediene-Thiery et MM. Desessard et Muller.
L'amendement n° 480 rectifié est présenté par MM. Collin, Chevènement, Alfonsi, Baylet et Detcheverry, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Mézard, Milhau, Plancade, Tropeano, Vall et Vendasi.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat, pour défendre l’amendement n° 85.
Monsieur le président, beaucoup de choses, souvent fort pertinentes, ayant été dites, je serai brève.
Nous proposons la suppression de l’article 1er AA, qui a été inséré sur l’initiative d’un membre de la commission des lois, M. Hugues Portelli.
Tout d’abord, sur la forme, nous dénonçons cet article, parce qu’il anticipe, en premier lieu, sur le devenir de la réforme territoriale.
Le conseiller territorial sera-t-il finalement adopté ?
Il nous coûtera cher, si tel est le cas !
En tout état de cause, il se pourrait bien que ce texte finisse très mal !
Le texte anticipe, en second lieu, sur le futur projet de découpage électoral. En effet, je distingue clairement votre vœu, douce illusion d’ailleurs, de détruire les contre-pouvoirs que sont les collectivités locales et d’essayer, sans doute, de reprendre la main sur les régions.
Ensuite, sur le fond, que vous dire de plus, …
M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur, et plusieurs sénateurs de l’UMP. Rien !
Riressur les travées de l’UMP.
… – permettez-moi de poursuivre tout de même ! –, si ce n’est que l’examen de ce texte nous a réservé de nombreuses surprises et que cet article s’inscrit dans la confusion que vous instaurez et risque de perturber gravement la démocratie locale.
La création d’une nouvelle circonscription territoriale, comme l’a proposé M. Portelli, non seulement épaissira le millefeuille, puisque de toute façon le canton demeure, d’un point de vue administratif, mais conduira – c’est bien votre volonté sous-jacente – à la suppression, à terme, du département.
L’article 1er AA annonce donc un vrai recul démocratique si l’instauration du conseiller territorial qu’il tend à créer est votée. §
Sourires et exclamations sur les travées de l ’ UMP.
Sourires.
Cet amendement vise à supprimer l’article 1er AA.
Après la première lecture au Sénat, nous avons entendu le Gouvernement parler d’un texte « prometteur ».
Où en sommes-nous aujourd’hui, après l’émiettement d’un texte mal élaboré, sans dessein clairement annoncé, sans parité, sans simplification administrative, sans transparence ni démocratie, face à un élu zombi, qui n’existe que par son nom ?
Car pour introniser ce dernier, que de coups d’essai et d’erreurs !
Tout d’abord, le Gouvernement évoque un scrutin uninominal à un tour ; il fallait oser ! Ensuite, il promet une dose de proportionnelle.
Sourires.
M. Henri de Raincourt, ministre. Il a osé !
M. le ministre de l'espace rural et de l'aménagement du territoire sourit.
Puis, ultime suspense, un vote est organisé et maintenant le débat est différé !
Aujourd’hui, pour introniser le conseiller territorial, il ne reste plus rien, plus aucune modalité de désignation.
Cet amendement en tire les conséquences : il vise à supprimer l’article 1er AA et la notion de territoire qui sous-tend ce dernier.
Messieurs les ministres, monsieur le secrétaire d’État, ce spectacle d’équilibriste n’intéresse pas la population, …
… dont le quotidien s’aggrave et à laquelle vous promettez une rigueur inégalitaire.
Ces débats brouillent le peu de lisibilité qu’avait l’électeur, espèce qui sera en voie de disparition si nous continuons à perdre du temps avec des réformes non souhaitées et illisibles. Aujourd’hui, l’idéal serait donc que le Gouvernement cesse de s’obstiner et renonce au conseiller territorial.
Tel que prévu par ce texte, cet élu sera surchargé et « surnotabilisé », ce qui le situe à l’opposé des attentes de la population, qui voudrait des élus disponibles, modestes, et facilement accessibles afin de pouvoir aborder les vrais problèmes.
C’est la raison pour laquelle nous proposons de supprimer cet article et, avec lui, le terme de « conseiller territorial ».
Applaudissements sur plusieurs travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.
La parole est à M. Yvon Collin, pour présenter l'amendement n° 480 rectifié.
Nous demandons, par cet amendement, la suppression de l’article 1er AA, qui substitue l’appellation de territoire à celle de canton.
Tout d’abord, cet amendement est en cohérence avec celui que nous avons défendu avant l’article 1er AA et qui prévoyait de faire des intercommunalités les briques du découpage cantonal.
Ensuite, nous nous opposons une nouvelle fois – nous sommes têtus – à la création du conseiller territorial, puisque l’article 1er AA prend acte de la création de ce dernier alors que nous en contestons toujours la pertinence.
De plus, les éléments développés dans cet article – respect de la diversité géographique, économique et sociale du département – nous paraissent être en totale contradiction avec ce que sous-tend la présente réforme. Peut-on en effet parler d’équilibre de la représentation et de prise en compte des bassins de vie dans les départements ruraux quand la création de seulement quinze sièges dans nombre d’entre eux entraînera une sous-représentation patente de la population, dictée uniquement par des impératifs comptables ?
Pour l’ensemble de ces raisons, nous vous demandons, mes chers collègues, de supprimer l’article 1er AA en vous ralliant à notre amendement.
Il convient de revenir à l’origine d’une telle opération.
C’est au moment de l’examen par la commission des lois du texte transmis par l’Assemblée nationale à l’issue de la première lecture que notre collègue Hugues Portelli a eu l’excellente idée de déposer un amendement visant à définir la circonscription du conseiller territorial. Cette définition consiste à indiquer que « le territoire est une circonscription électorale ».
Une telle précision sera d’ailleurs très utile pour la suite du débat, car, comme vous pourrez le constater, mes chers collègues, la notion de canton, qui est très ancrée dans l’esprit de nos concitoyens, demeure. Certaines fonctions administratives sont en effet associées au canton – la gendarmerie, la poste, la perception –, et notamment à son chef-lieu, qui, je le rappelle, est tout à fait important.
Notre volonté est d’affirmer que le canton sera maintenu en tant que circonscription administrative, tandis que le territoire constituera une circonscription électorale dont les communes formeront un espace géographique, économique et social homogène, ce qui est extrêmement important à nos yeux, puisque nous voulons défendre les communes.
La commission des lois ayant adopté l’amendement de M. Hugues Portelli, elle a fait sienne cette proposition de rédaction
Mlle Sophie Joissains applaudit.
Je le répète, ce dernier sera extrêmement important, dans la mesure où il permettra que le tableau du nombre de conseillers territoriaux ne soit pas le résultat de données essentiellement démographiques ; il sera intéressant de mentionner ce point lorsque nous aborderons la discussion sur ledit tableau. Et ceux qui parmi vous sont attachés à l’instauration d’un coefficient correctif permettant de prendre en compte le territoire devraient être satisfaits de cette définition, car si la loi est déférée au Conseil constitutionnel, nous pourrons justifier du fait que le découpage territorial doit tenir compte des communes, d’un espace géographique et d’un espace démographique.
Cet article 1er AA revêt donc une importance particulière, et je vous invite, chers collègues, à rejeter les trois amendements identiques de suppression, sur lesquels la commission émet un avis défavorable.
La situation me paraît quelque peu paradoxale. Mesdames, messieurs les sénateurs, nous venons de passer une heure et demie à discuter des amendements portant sur un texte introduit par votre propre commission des lois !
Cette initiative émanait de M. Hugues Portelli.
C’est un effet une très bonne proposition, un enrichissement important du texte du Gouvernement par le Sénat.
L’article qu’il est proposé de supprimer est motivé par la nécessité de conserver globalement les cantons actuels, qui sont issus de lois très anciennes remontant à 1789…
Sourires.
… et qui sont restés pour l’essentiel, depuis cette date, la circonscription de base de nos départements. À la fois circonscription administrative de l’État, siège de la gendarmerie – dans la plupart des cas –, de la perception – dans de très nombreux cas – et de collèges, le canton est également circonscription électorale puisqu’il est le lieu d’élection du conseiller général. Il ne doit donc pas perdre cette fonction et cette dimension administratives auxquelles nous tenons tous. Étant moi-même conseiller général, je tiens à ce que cette notion soit toujours prise en compte.
Par ailleurs, ce nouvel article 1er AA, en instaurant de nouvelles circonscriptions électorales propres aux départements servant pour l’élection des conseillers territoriaux, permet de préserver à la fois la qualité de circonscription administrative des actuels cantons et celle de chef-lieu de canton pour les communes qui la possèdent aujourd’hui. Pour ces dernières, auxquelles nous sommes également attachés, cela constitue tout de même un avantage important.
Le Gouvernement ne peut donc que s’opposer à une suppression qui priverait le projet de loi de réforme des collectivités territoriales d’un ajout tout à fait utile. Il serait en outre paradoxal que cette suppression soit effectuée par le Sénat.
Monsieur le président, je souhaite simplement obtenir une précision. Nous avions quatre amendements en discussion commune, et dès que le troisième a été présenté, vous avez donné la parole au rapporteur puis au Gouvernement, sans indiquer si le quatrième, l’amendement n° 547, avait été retiré.
Quand les amendements ne sont pas appelés c’est qu’ils ont été retirés !
Je souhaite simplement m’enquérir de ce qu’il est advenu de l’amendement n° 547.
M. le président. Monsieur Daunis, l’amendement que vous avez évoqué a été retiré avant le début de la séance.
Ah ! sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.
Le « dérouleur » qui nous a été remis a donc été élaboré avec un petit décalage ne permettant pas de faire figurer cette information. Très bien !
Je vous remercie, monsieur le président, de la précision que vous venez de m’apporter.
M. Jacques Mézard. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, je croyais que nous examinions une loi de simplification.
Sourires sur les travées du groupe socialiste.
Or, l’article 1er AA précise que, concomitamment à la création des territoires, les cantons subsisteront comme circonscriptions administratives.
Monsieur Mézard, j’ai déposé un amendement qui a pour objet de préciser ce point !
Monsieur Sido, laissez-moi terminer mon explication, qui confirmera notre demande de suppression de l’article.
Alors que ce texte est présenté comme une loi de simplification, nos concitoyens se retrouveront, dans la pratique, avec à la fois un territoire électoral et un canton administratif. M. le secrétaire d’État Alain Marleix rappelait qu’il est conseiller général. Dans sa circonscription, dont les limites électorales évolueront, …
M. Jacques Mézard. … peut-être, ses concitoyens connaîtront la situation que je viens de décrire. Selon nous, c’est vraiment la démonstration de la complexification du système.
Applaudissements sur plusieurs travées du groupe socialiste.
Nous examinons le premier article d’un chapitre intitulé « Conseillers territoriaux ». Et nous abordons ce sujet alors que nous ne savons pas combien seront ces derniers, …
… quelles seront leurs compétences, comment ils seront élus. Ils n’existent pas !
Or, dès le premier article, on veut attribuer à ces conseillers territoriaux, qui n’existent pas, un territoire !
Cela me semble un peu surréaliste !
Je voterai bien sûr ces amendements de suppression, mais auparavant je souhaiterais revenir sur les arguments qui ont été avancés voilà quelques instants.
Il est vrai que, aujourd’hui, certains élus sont à la fois conseiller général et conseiller régional.
Et cela n’entraîne pas la confusion qu’il pourrait y avoir avec la création des conseillers territoriaux, car, pour ces derniers, le cumul des deux fonctions serait généralisé, …
J’aimerais pouvoir poursuivre mon propos sans être interrompu, monsieur le président.
Bien sûr, monsieur Domeizel, mais nous avons déjà eu une heure et demie de discussion sur ce point.
Monsieur Vasselle, je n’ai pas pour habitude de vous interrompre lorsque vous prenez – très souvent – la parole ; merci d’en faire autant !
Comme je le disais, l’un des premiers inconvénients de la création des conseillers territoriaux tient au fait que tous les présidents de conseil général seront membres du conseil régional. Croyez-moi : une telle situation ne sera pas facile à gérer pour le président du conseil régional !
Et la situation sera encore plus compliquée si l’un des conseillers généraux est en même temps président du conseil régional.
Monsieur le président Gaudin, nous avons connu une situation similaire dans notre région à l’époque des établissements publics régionaux.
Les présidents de conseil général n’avaient alors aucune obligation d’être conseiller régional de l’EPR ; ils avaient le choix.
Dans notre région, tous les présidents de conseil général étaient membres de l’EPR. Je faisais alors moi-même partie du conseil régional, et je peux vous affirmer que son président – je ne préciserai pas de qui il s’agissait – faisait valoir son autorité sur le groupe constitué autour des présidents de conseil général, ce qui ne facilitait aucunement la tâche des uns et des autres.
C’est une des raisons pour lesquelles a été décidée, en 1986, la création de deux collectivités territoriales
M. Michel Teston opine.
Or, avec cet article, il y aura un « méli-mélo » et une osmose entre les deux types d’assemblées, ce qui sera nuisible au bon fonctionnement de nos institutions.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste. – Mme Évelyne Didier applaudit également.
M. le président. M. Domeizel aurait pu ajouter que, à l’époque, celui qui présidait le faisait seul et réglait en dix minutes et pour tout le bureau les questions. Personne ne disait rien, pas plus vous, monsieur Domeizel, que moi !
Applaudissements sur plusieurs travées de l ’ UMP.
Rires.
En effet.
La parole est à Mme Marie-France Beaufils, pour explication de vote.
L’argumentaire en faveur de la création des territoires m’étonne quelque peu.
Il est intéressant à cet égard de revenir à l’exposé des motifs du projet de loi, d’où il ressortait clairement que la création du conseiller territorial dans le cadre de cette réforme découlait du fait qu’il n’avait pas été possible de supprimer les conseils généraux.
Aujourd'hui, on nous propose d’instituer des territoires qui seront des bassins de vie recoupés, pour en faire des ensembles, par des circonscriptions, dans lesquelles les communes resteront donc ce qu’elles sont.
Qu’est-ce que cela préfigure ? À y regarder de plus près, on ne peut pas éviter de penser que cette évolution est cohérente avec les dispositions du projet de loi qui prévoient le regroupement d’établissements publics de coopération intercommunale et la création de nouvelles communes, qui pourraient constituer les nouvelles structures chargées de la gestion.
Dès lors, on peut concevoir que les territoires que crée l’article 1er AA, les nouvelles communes et les futures métropoles sont une première étape en vue de la disparition progressive des conseils généraux dans l’ensemble de notre pays.
On aura ainsi complètement réformé l’organisation territoriale et, à l’échelon national, ne seront conservés que les régions et des établissements de coopération intercommunale qui seront probablement tellement bien encadrés qu’ils ne seront plus en mesure d’avoir une gestion démocratique et que les électeurs seront privés de la capacité de peser sur les choix mis en œuvre dans les territoires.
Sur le fond, c’est cela que vous entendez faire, mais vous ne voulez pas le dire.
La cohérence aurait voulu que la commission accepte notre amendement de suppression complète du chapitre Ier, dont je ne comprends d’ailleurs toujours pas pourquoi il est irrecevable, mais peut-être des explications nous seront-elles données, à un moment ou à un autre…
Non, vous avez parlé de la création du conseiller territorial ; moi, je parle de l’ensemble du chapitre Ier, et non pas nécessairement de l’article qui le crée.
Je suis donc convaincue, mes chers collègues, que nous devons voter massivement les amendements de suppression de l’article 1er AA.
Je mets aux voix les amendements identiques n° 85, 268 et 480 rectifié.
J’ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC-SPG.
Je rappelle que la commission a émis un avis défavorable, de même que le Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin a lieu.
Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
Il est procédé au dépouillement du scrutin.
Voici le résultat du scrutin n° 256 :
Nombre de votants339Nombre de suffrages exprimés333Majorité absolue des suffrages exprimés167Pour l’adoption155Contre 178Le Sénat n'a pas adopté.
Applaudissements sur plusieurs travées de l ’ UMP.
L'amendement n° 312, présenté par MM. Sueur, Peyronnet, Bel, Anziani, Bérit-Débat et Berthou, Mme Blondin, MM. Botrel et Boutant, Mmes Bonnefoy, Bourzai et Bricq, M. Caffet, Mme Cartron, MM. Collombat, Daunis, Daudigny et Domeizel, Mme Durrieu, MM. Fichet, Frimat, Guillaume et Jeannerot, Mmes Khiari et Klès, MM. Krattinger, Le Menn, Lozach, Marc, Mauroy, Mazuir, Miquel et Mirassou, Mme Nicoux, MM. Patriat, Povinelli, Rebsamen, Repentin, Ries, Signé, Teston, Teulade et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Avant l'alinéa 1
Insérer un paragraphe ainsi rédigé :
... - L'article L. 3121-1 du code général des collectivités territoriales est ainsi rédigé :
« Art. L. 3121 -1. - Il y a dans chaque département un conseil départemental composé de conseillers départementaux. »
La parole est à M. le président de la commission des lois.
Monsieur le président, comme l’amendement n° 315, cet amendement, identique d’ailleurs à un amendement qui a déjà été déposé dans le corps du texte et rejeté par le Sénat, est contraire à l’article 1er puisqu’il vise à créer des conseillers départementaux. Or, nous sommes convenus hier qu’il n’était pas possible d’adopter une position différente de celle qui a déjà été adoptée en termes identiques par les deux assemblées.
L’amendement n° 312 n’a en effet plus d’objet.
Je suis saisi de quatre amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 10 rectifié bis, présenté par MM. Sido, Doligé, Leroy, Poncelet, Trillard, Dufaut et Pointereau, est ainsi libellé :
I. - Alinéa 2
Remplacer le mot :
territoires
par le mot :
cantons
II. - Alinéas 3 et 5
Remplacer le mot :
territoire
par le mot :
canton
La parole est à M. Bruno Sido.
Avant de défendre cet amendement, qui me semble très important, je veux revenir sur l’amendement qui n’a pas été défendu…
Je peux tout de même m’exprimer, monsieur le président de la commission, sur cet amendement qu’en ce qui me concerne j’attendais depuis une heure et demie !
Je le dis gentiment, il est tout de même assez surprenant que ceux-là mêmes qui défendent depuis une heure et demie aujourd'hui les départements et les conseils généraux puissent vouloir supprimer l’expression de « conseil général », connue depuis longtemps. Est-il nécessaire de rappeler que cette institution est en effet plus vieille que la République puisque c’est Louis XVI qui a signé le décret de création des départements ?
Sourires sur les travées du groupe socialiste.
Quoi qu’il en soit, j’en viens à l’amendement que plusieurs de mes collègues ont cosigné avec moi, et je les en remercie.
On l’a vu dans la discussion qui vient d’avoir lieu, il y a une confusion sur les territoires et les cantons comme sur les limites administratives et les circonscriptions électorales.
Le canton, je le rappelle, n’a jamais été qu’une circonscription électorale, et ce n’est pas parce que c’est au chef-lieu de canton que se tenait le conseil de révision ou que la gendarmerie était présente dans chaque canton que cela en faisait autre chose.
C’est vrai, mais ce n’est plus le cas depuis longtemps.
Le canton est par conséquent, à ce jour, une circonscription électorale. On voudrait que, demain, la nouvelle circonscription électorale soit dénommée « territoire ».
Pour que nos concitoyens ne perdent pas leurs repères, je propose donc tout simplement que, dans l’article 1er AA, on remplace le mot « territoire » par le mot « canton ».
Ce n’est en effet pas au changement d’appellation que tient la portée de cet article et, mes chers collègues, il me paraît inutile, au-delà de la réforme majeure à laquelle nous procédons, de brouiller l’image en modifiant des appellations auxquelles nos concitoyens sont très attachés.
Mlle Sophie Joissains ainsi que MM. Nicolas About et Bruno Retailleau applaudissent. – Applaudissements sur quelques travées du groupe CRC-SPG.
L'amendement n° 573, présenté par M. Adnot, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Le territoire est constitué par la réunion de deux cantons.
Cet amendement n'est pas soutenu.
L'amendement n° 33, présenté par M. Dallier, est ainsi libellé :
Alinéa 3
Supprimer cet alinéa.
Cet amendement n'est pas soutenu.
L'amendement n° 315, présenté par MM. Sueur, Peyronnet, Bel, Anziani, Bérit-Débat et Berthou, Mme Blondin, MM. Botrel et Boutant, Mmes Bonnefoy, Bourzai et Bricq, M. Caffet, Mme Cartron, MM. Collombat, Daunis, Daudigny et Domeizel, Mme Durrieu, MM. Fichet, Frimat, Guillaume et Jeannerot, Mmes Khiari et Klès, MM. Krattinger, Le Menn, Lozach, Marc, Mauroy, Mazuir, Miquel et Mirassou, Mme Nicoux, MM. Patriat, Povinelli, Rebsamen, Repentin, Ries, Signé, Teston et Teulade, Mme Voynet et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Alinéa 5
Remplacer le mot :
territorial
par le mot :
départemental
et le mot :
général
par le mot :
départemental
Cet amendement n’a plus d’objet.
Quel est l’avis de la commission sur l’amendement n° 10 rectifié bis ?
Je comprends la logique de M. Sido, mais je voudrais que nous en examinions ensemble les conséquences.
Un conseiller territorial est élu sur une circonscription électorale qui, très logiquement, porte le nom de « territoire ».
Le canton est une notion administrative et électorale.
L’aspect électoral « tombe » puisque, par définition, seront désormais élus des conseillers territoriaux, mais l’aspect administratif doit subsister.
Je rappelle en effet que, dans les cantons, il y a des chefs-lieux de canton, auxquels sont attachés certains avantages, par exemple, pour prendre un exemple tout simple, la majoration des indemnités du maire.
Sourires.
Par ailleurs, et sur ce point je suis tout à fait d’accord avec M. Sido, les gens sont très attachés aux cantons : si on supprime ces derniers, ils devront se situer sur des territoires beaucoup plus grands.
Après de nombreuses réflexions, la commission des lois s’est aperçu des conséquences que pourrait avoir le maintien de l’appellation « canton » en tant que circonscription électorale. Elle a jugé préférable de retenir la dénomination « territoire » pour la circonscription électorale et de maintenir la notion de canton pour les fonctions administratives. Certains chefs-lieux de canton, en raison du bassin de vie, sont très contents de garder ce titre et nous ont fait part de leur attachement à cette notion.
M. Alain Fauconnier s’exclame.
J’ai pris l’exemple de l’indemnité, car c’était le plus mauvais qui puisse être retenu.
Sourires.
Pour toutes ces raisons, monsieur Sido, la commission des lois vous demande de bien vouloir retirer l’amendement n° 10 rectifié bis, faute de quoi elle émettra un avis défavorable.
Je souhaite également que M. Sido retire son amendement.
J’approuve le présent amendement, même si je ne l’ai pas cosigné. Cela ne me gêne pas du tout que le nouveau territoire soit considéré comme l’équivalent du canton.
La réforme qui nous est soumise a pour objet de créer le conseiller territorial. Mais pour quelle raison le territoire considéré ne pourrait-il pas être dénommé « canton » ? Il s’agit d’une question de pure sémantique. Pourquoi avoir des états d’âme ou se déchirer pour une question de nom ?
Par ailleurs, selon moi, le canton n’est pas une circonscription administrative, malgré l’existence du chef-lieu de canton. Pour cela, il faudrait que des services administratifs fonctionnent à l’échelon du canton. Or tel n’est pas le cas. Comme l’a dit Bruno Sido, autrefois il y avait les juges de paix. Mon grand-père exerçait d’ailleurs cette fonction lorsqu’il était conseiller général du canton dont je suis élu. Aujourd’hui, cela n’a plus de sens. Allons jusqu’au bout de la réforme ! Soit la notion de territoire est retenue et celle de canton disparaît, soit, eu égard à l’attachement à la notion de canton, le nouveau territoire est l’équivalent du canton. Je ne vois pas pourquoi le Gouvernement a des états d’âme sur ce sujet !
Sourires sur les travées du groupe socialiste.
Je souhaite revenir sur la notion de canton du point de vue de l’aménagement des territoires ruraux.
Le canton est non seulement une circonscription électorale, mais également une circonscription d’action de l’État.
Actuellement, nous essayons d’élaborer une charte avec l’ensemble des opérateurs de service public assurant la présence de services publics, comme la gendarmerie, la perception, dans le canton.
M. Michel Mercier, ministre. Monsieur Assouline, peut-être n’êtes-vous pas spécialiste de ces questions, mais ça peut venir un jour…
Souriressur les travées de l’UMP.
Supprimer le canton en tant que circonscription d’action administrative reviendrait à priver de base tout maintien des services publics en territoire rural.
Nous vous prenons aux mots, monsieur le ministre ! Nous allons désormais exiger que tous les services de l’État soient maintenus à l’échelon du canton !
Monsieur Vasselle, comme vous êtes un éminent représentant de l’État, je suis certain de toujours pouvoir compter sur vous !
Monsieur Sido, je comprends votre remarque relative à la circonscription électorale, à savoir le maintien du nom « canton », car celui-ci a une signification pour nos concitoyens. Mais ne privons pas les territoires ruraux de la notion de canton comme base d’action des services publics et des services rendus au public, au risque de voir ces derniers s’éloigner de la population rurale.
M. David Assouline s’exclame.
Il faut tout de même le rappeler, lors de leur redécoupage vers 1800 les cantons n’étaient que des circonscriptions judiciaires justifiées par l’existence des juges de paix.
M. Jean Louis Masson. En 1833, ont été créés les conseils généraux, dont les membres étaient désormais élus dans le cadre des cantons. Puis les juges de paix ont été supprimés. Par conséquent, le canton n’est plus qu’une circonscription électorale.
M. Gérard Longuet opine.
Je suis surpris que d’aucuns, dans cette enceinte, soutiennent que le canton est une circonscription administrative alors qu’il n’est qu’une circonscription électorale ! C’est une pure illumination ! J’en veux pour preuve le fait qu’au cours des trente dernières années ont été créés, à tour de bras, des cantons par redécoupages successifs, sans que la vie administrative soit modifiée.
Pourquoi parler de circonscriptions administratives qui n’existent pas ? Cela démontre une analyse juridique insuffisante du problème !
Quoi qu’il en soit, dans la mesure où sont créés des conseillers territoriaux, il est normal et logique que ces derniers soient élus dans une circonscription appelée « territoire ». Soyons cohérents du point de vue de la terminologie ! L’actuel débat ne sert à rien !
L’argument avancé par le Gouvernement ne tient pas ! L’amendement n° 10 rectifié bis n’est pas très cohérent. Le bon sens veut que l’on élise un conseiller régional dans une circonscription régionale et un conseiller territorial dans une circonscription territoriale.
MM. Jacques Gautier et Pierre Bernard-Reymond applaudissent.
Je partage totalement les propos de M. Masson. Je rappelle que, indépendamment de l’existence du juge de paix, le découpage du canton était lié à la nécessité de pouvoir effectuer le trajet à cheval aller-retour dans la journée entre toutes les communes et le chef-lieu de canton, et entre les cantons et l’arrondissement…
… en montagne, effectivement.
Dans mon département, le nombre de conseillers territoriaux sera, paraît-il, identique à celui des élus actuels, soit 31.
Mais certains cantons comprennent 1 050 habitants, tandis que d’autres en comportent 20 000. Il est bien évident que les cantons moins peuplés disparaîtront. De fait, les chefs-lieux de canton n’existeront plus. Il y aura un territoire.
Je comprends le souci du Gouvernement mais peut-être devrait-il négocier avec le directeur de La Poste, avec la gendarmerie pour faire en sorte que dans les anciens chefs-lieux de canton demeure une poste ou une gendarmerie.
M. David Assouline s’exclame.
Je comprends parfaitement l’initiative de Bruno Sido et de quelques autres collègues ainsi que l’intervention de M. Masson.
Jusqu’à présent, le mot « territoire » était, en quelque sorte, générique : il pouvait remplacer les appellations « pays », « communauté de communes », « canton ». Je vous prédis un certain nombre de difficultés, mes chers collègues.
Par ailleurs, trois appellations – communauté de communes, canton et territoire – désigneront des espaces géographiques sensiblement identiques qui se recouvriront plus ou moins. Le citoyen aura bien du mal à comprendre ! Tel mot sera employé lors de la désignation d’un conseiller, tel autre concernera les questions électorales. En matière de DGF, de surcroît, les chefs-lieux de canton ne sont pas anodins.
Les auteurs de l’amendement n° 10 rectifié bis voulaient clarifier la situation. Or le défaut initial est bien la création des conseillers territoriaux par le présent projet de loi.
M. Alain Fauconnier applaudit.
Compte tenu des propos que vient de tenir ma collègue Évelyne Didier, je serai brève.
Vous voulez garder la fiction des chefs-lieux de canton car vous avez bien du mal à faire accepter par les élus des territoires ruraux la création du conseiller territorial, véritable OVNI. Vous affirmez que les chefs-lieux sont attachés à la notion de canton. Vous soutenez que les services de l’État sont encore organisés au sein des cantons. Mais tel n’est pas le cas !
Non, ce n’est pas le cas ! En raison de la réforme de l’État engagée à toute vitesse, les services publics sont de moins en moins organisés ainsi.
Votre attitude est source de confusion pour nos concitoyens. Le territoire est un terme générique : tout est territoire.
Voilà un certain temps, vous nous avez annoncé que les conseillers territoriaux seraient élus dans des cantons élargis, dans une circonscription correspondant à la circonscription législative. Vous avez déjà modifié les cantons électoraux je ne sais combien de fois ! Vous justifierez un tel élargissement par la disparition du cheval et de la charrette… Ce n’est plus un millefeuille, c’est un embrouillamini ! Personne ne s’y retrouvera !
Quant à l’argument relatif à l’organisation de l’État, vous avez oublié la réforme de La Poste ! Toutes les agences postales sont à la charge des collectivités locales : tout dépendra de leur bon vouloir ! Où est votre logique ? §
Dans un premier temps, nous avions déposé un amendement de suppression. Mais l’amendement n° 10 rectifié bis est excellent et règle mieux le problème.
L’article 1er AA dispose : « Le territoire est une circonscription électorale dont les communes constituent un espace géographique économique et social homogène. » Comment imaginer alors le maintien des autres circonscriptions ? On peut créer ces nouveaux espaces – on restructure bien les cantons régulièrement –, quelle que soit leur dénomination !
M. David Assouline s’exclame.
Monsieur Paul Blanc, c’étaient non pas les chefs-lieux de canton mais les chefs-lieux de département qui devaient pouvoir être atteints en une journée à cheval. Sinon, on aurait pu aller prendre le thé et rentrer chez soi trois ou quatre fois dans la journée !
Sourires.
Comme le territoire est créé, théoriquement, ses élus devraient être dénommés « conseillers territoriaux ». Mais, aujourd’hui, l’élu des cantons est le conseiller général, et non un conseiller cantonal. Lorsqu’on parle de canton, nos concitoyens comprennent.
Je soutiendrai l’amendement de M. Sido.
Certes, il nous faut, dans cette maison, ménager la courtoisie nécessaire à nos échanges et respecter les nuances de la langue française, mais, pour parodier Louis-Ferdinand Céline, j’ai l’impression que le présent débat s’apparente à de la sodomisation de diptères !
Sourires
Je ne partage pas tout à fait l’analyse de mon collègue et ami Bruno Sido.
Nous allons créer de nouveaux territoires, regroupant un, deux ou trois cantons, en fonction de leur taille actuelle. Pour conserver à cette nouvelle entité le nom de canton, il nous faudrait sacrifier les autres dénominations ? Je ne suis pas d’accord !
Il faut maintenir l’appellation des cantons actuels. Si l’on crée de nouveaux territoires, il faudra les baptiser autrement et cela simplifiera les choses !
Exclamations ironiques sur les travées du groupe socialiste.
Hier soir, M. Gérard Longuet, président du groupe UMP, nous tançait, nous reprochant aux et aux autres de mener un débat de commission et nous invitant à nous reprendre.
Chers collègues, monsieur Longuet, n’avez-vous pas le sentiment que vos rangs mêmes sont parcourus d’une certaine contradiction en la matière ?
Nous sommes en pleine caricature et nos débats sont l’illustration parfaite de ce qu’est ce projet de loi.
Rappelons-nous, quel était l’objectif du Gouvernement ? Simplifier et clarifier. On voit le résultat : nous en sommes à discuter des voies et moyens pour tenter d’ancrer sur un lopin de terre un conseiller territorial dont on ne sait pas ce qu’il fera ni comment il sera élu ! Et nous avons même des difficultés à donner un nom à ce lopin de terre !
Hier, on nous appelait à la modernité. Il y avait, disait-on, d’un côté, les archaïques et, de l’autre, les modernes.
Et voilà qu’aujourd’hui, pour toute défense, le rapporteur nous déclare qu’il ne faut pas désespérer les chefs-lieux de canton… Je sens là en effet une grande modernité dans le propos !
À l’instant où nous parlons, nous avons donc, dans le cadre de la simplification du millefeuille, supprimé le pays - et encore, quand je dis « supprimé »… -, et ajouté, toujours pour simplifier, les communes nouvelles, les métropoles, le pôle métropolitain, tout cela sans la moindre certitude quant à la définition des périmètres des métropoles.
Si le millefeuille est au moins un objet identifié dans une pâtisserie, le résultat de la simplification tel que nous le constatons maintenant n’est même plus identifiable !
Même un flan ou un pudding ont une forme connue !
Je le dis non sans une certaine tristesse parce que, derrière ce débat, il y a une réalité concrète, celle de la gestion souvent difficile de nos territoires, celle d’élus locaux qui portent ces territoires avec passion, celle de populations qui sont attachés à leurs élus avec lesquels elles tissent des liens de proximité.
Nous donnons aujourd’hui du Sénat une image qui n’est pas forcément la meilleure. Il serait peut-être préférable que nous abrégions les souffrances. Je lance donc un appel à certains de nos collègues : si nous pouvions supprimer certains articles et ne pas changer d’avis à la faveur de la nuit, nous aurions la possibilité de conserver une certaine cohérence au texte, du moins à ce qu’il en restera.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.
Ils dureront le temps des contrats, mais ils ne seront pas renouvelés.
Ces structures donnaient satisfaction, ne coûtaient pas cher et ont permis un certain nombre d’initiatives. Sur ce point, je ne suis donc pas tout à fait d’accord avec le Gouvernement.
Je trouve la proposition de M. Bruno Sido très bonne. L’aménagement du territoire ne doit pas relever de la technocratie et le bon sens doit prévaloir.
La dénomination « territoire » pose un problème de lisibilité, car elle ne signifie rien de précis, rien de concret pour nos concitoyens. On pourra bien dire que l’on est du territoire de Tours ou de La Rochelle, personne n’en saura plus pour autant !
Qu’est-ce qu’un territoire ? un quartier, une ville ? Le terme n’est ni précis ni concret.
À l’inverse, le canton est compréhensible et se réfère à une réalité connue. Même un « canton élargi », tout le monde comprend ce que cela signifie.
Je trouve donc la proposition de M. Bruno Sido très judicieuse.
Je soutiendrai également l’excellente initiative de notre collègue Bruno Sido.
D’abord, le canton est une circonscription électorale.
Ensuite, puisqu’il y aura des conseillers territoriaux, rien ne s’oppose à ce que l’on retienne le terme « territoire ». Simplement, comme l’a fait remarquer François Fortassin, de même qu’aujourd’hui le conseiller général, bien qu’élu dans le canton, n’est pas un conseiller « cantonal », de même, demain, le conseiller « territorial » gérera non pas son « territoire » mais un département ou une région.
Parce qu’il n’y a pas de corrélation exacte entre un terme et un autre, rien n’est obligatoire.
Enfin, « territoire » est un terme générique. Il est source de confusion.
La modernité ne se limite pas aux mots ni à la sémantique. Il y a parfois des éléments de permanence et une histoire qu’il faut savoir conserver comme références, d’autant que les Français y sont attachés.
Nous serions bien inspirés de conserver cette excellente dénomination de « canton ». Vive les cantons de France !
M. Alain Dufaut applaudit.
Lorsque j’ai fait part d’une légère incompréhension, sentiment partagé d’ailleurs par beaucoup de mes collègues – le brouillard s’est encore épaissi depuis –, on m’a interpellé en me rappelant que je n’étais pas spécialiste.
Il est vrai que je souffre d’un travers que devraient d’ailleurs avoir tous ceux qui, comme moi, exercent une fonction politique, je veux dire le souci d’expliquer. Or, on explique bien quand on comprend bien.
Mon métier était d’enseigner l’histoire, l’art, mais aussi l’éducation civique. Et j’ai toujours eu du mal à expliquer à des enfants la partie du programme consacrée à l’organisation territoriale - avec les notions de « commune », de « département » - et, surtout, à leur faire comprendre pourquoi les élus des « cantons » étaient des conseillers « généraux ».
Mais il fallait expliquer, car c’est avec de tels repères inculqués au plus jeune âge qu’une nation se saisit d’une organisation politique et administrative. C’est très important pour savoir plus tard à quelle porte frapper, comment s’orienter, voter en connaissance de cause, sans confondre les scrutins !
Eh bien, quand j’entends ce débat, je me demande comment je ferais aujourd’hui mon cours ! Et j’invite chacun à s’imaginer dans cette situation pour savoir comment il s’y prendrait.
Pour ma part, j’expliquerais aux enfants le conseil municipal, la commune, la communauté de communes, mais aussi les agglomérations ; j’essaierais de leur faire comprendre que le conseil régional et le conseil général sont maintenus mais que leurs membres sont de nouveaux et singuliers élus nommés « conseillers territoriaux » ; que les cantons subsistent comme entités administratives mais sans aucune prérogative administrative. Et j’irais jusqu’à préciser que ces cantons sont maintenus parce que M. Michel Mercier, ministre, négocie la présence de bureaux de poste dans les chefs-lieux de canton !
Alors, non, en effet, je ne suis pas spécialiste mais, très franchement, et la question mérite d’être posée après un si long débat, de quoi serait-on spécialiste, dans ce tripatouillage qui n’a d’autre cohérence et d’autre ambition que d’essayer de reprendre des territoires à la gauche plutôt que de rationaliser l’organisation de la France ?
J’interviendrai non pas sur le fond mais sur la forme et je répondrai à notre collègue Marc Daunis.
Il y a, dans cet hémicycle, de véritables trésors d’intelligence et de bonne volonté au service du travail législatif, mais l’expérience prouve qu’il vaut mieux avoir des règles pour travailler et pour progresser.
M. Gérard Longuet. L’amendement de M. Bruno Sido suscite l’intérêt et la passion. J’aurais moi aussi souhaité contribuer au débat, surtout en apprenant que Louis XVI a signé l’ordonnance créatrice des cantons : cela me donnait une base légitimiste pour intervenir !
Sourires
Mais enfin, mes chers collègues, soyons un peu responsables !
Cet amendement a été déposé en commission, et je prends à témoin notre rapporteur, M. Jean-Patrick Courtois. Il a été examiné par nos collègues membres de la commission, qui ont débattu de cette hypothèse et ont pris position.
On peut, sur chaque amendement, reprendre le travail de la commission. Mais nous risquons, d’une part, de décourager les collègues membres de la commission, qui conduisent leur travail avec sérieux et profondeur en y consacrant tout le temps nécessaire, et, d’autre part, de dénaturer jusqu’à la caricature les travaux de l’hémicycle en faisant ici du travail de commission.
Je me garderai bien de parler au nom de l’ensemble de mes collègues. Je suggère néanmoins aux membres du groupe UMP, quel que soit l’intérêt qu’ils portent à ce débat, de suivre, par respect pour les travaux de la commission, les conclusions du rapporteur, qui a organisé le débat au sein de la commission et qui a établi le texte qu’elle nous propose.
Monsieur Sido, vous anticipez. En effet, si, comme je le souhaite profondément, les « territoires » finissent par s’imposer, je suis persuadé qu’il y aura un nouveau rendez-vous législatif, pour faire de ces « territoires » ce qu’étaient les anciens cantons. Et, comme nous sommes un pays conservateur, chacun aura à cœur de créer une association pour la défense de la mémoire du canton de Criquebœuf-le-Petit !
Sourires
Autrement dit, gardons les territoires et gardons le travail de la commission, sinon nous risquons la paralysie pour nos débats et le ridicule pour notre assemblée !
Applaudissements sur quelques travées de l ’ UMP.
Il se passe cette chose stupéfiante depuis quelques jours : le débat, loin de contribuer à la clarification et de permettre, par le vote d’amendements bien formatés, l’amélioration du texte, l’obscurcit davantage encore, au point de faire douter de ce qui apparaissait quelques instants auparavant comme solidement établi.
J’ai été troublée par l’intervention de M. Michel Mercier, qui a affirmé de façon très martiale que le canton devait être considéré comme une circonscription d’action de l’État.
Je n’avais pas l’impression que la répartition des services de santé et des hôpitaux sur le territoire, la répartition des collèges et de lycées, celle des gendarmeries et des commissariats, celle des bureaux de poste ou des réseaux de haut débit étaient organisées sur la base des cantons.
Si !
S’il s’agit, comme le ministre nous l’a dit, de priver de services publics les territoires ruraux, l’heure est très grave, chers collègues, et il faut poursuivre ce débat.
Si ce n’est pas le cas, s’il s’agit de faire avaler à ceux qui sont encore attachés à la définition traditionnelle des cantons, circonscriptions électorales, un nouveau redécoupage avec élargissement, pour y faire élire cet animal hybride que vous souhaitez de toutes vos forces, le conseiller territorial, alors, c’est autre chose.
Je demande donc aux ministres de nous apporter les clarifications nécessaires le plus rapidement et le plus précisément possible.
M. Jean-Claude Peyronnet applaudit.
En venant ici, je ne pensais pas que je serais obligé de défendre le chef-lieu de canton. Il me paraissait tellement évident qu’un consensus se dégagerait sur ce texte au Sénat et que tous, dans cet hémicycle, seraient partisans du maintien des chefs-lieux de canton…
Je vous rappelle qu’une circonscription législative – vous avez voté le découpage, comme l’Assemblée nationale, pour l’élection des députés – est constituée d’une addition de cantons. Or le chef-lieu de canton a bien entendu un rôle important pour l’État.
La gendarmerie nationale vient de passer, de par la loi, sous la coupe du ministère de l’intérieur. Les gendarmeries en milieu rural, c’est-à-dire en zone gendarmerie, sont organisées en brigades de cantons ; il existe même des secondes brigades de cantons.
Il convient également de citer la présence de nombreuses perceptions dans les chefs-lieux de canton et des bureaux de postes dans chacun d’entre eux.
Les chefs-lieux de canton sont aussi une base importante pour les conseils généraux, notamment en investissement. Un collège y est toujours implanté, et de plus en plus souvent une maison d’accueil pour personnes âgées dépendantes, une MAPAD.
Il me paraît donc tout à fait paradoxal d’être obligé de défendre cette notion de chef-lieu de canton ici, au Sénat. Je ne serai pas candidat aux élections sénatoriales en 2011, mais, si je devais l’être, mesdames, messieurs les sénateurs, je vous assure que je ne prendrais pas une telle position.
Monsieur le président, je ne pensais pas susciter un tel débat, et je remercie toutes celles et tous ceux qui ont bien voulu y prendre part.
Ma réponse tiendra en deux points.
Tout d’abord, je partage tout à fait la position de mon président de groupe, que je respecte infiniment : à partir du moment où un amendement déposé par un membre de la majorité pour être intégré dans le texte de la commission n’est pas retenu, il ne faut pas le représenter.
Il s’agit de respecter une déontologie de groupe et une certaine discipline, madame Borvo Cohen-Seat.
Or, en l’espèce, je n’ai pas présenté cet amendement pour qu’il soit intégré au texte de la commission ; je l’ai déposé après. La commission l’a examiné, comme il se doit §et a émis son avis. Le Gouvernement a fait de même.
Je ne pense pas devoir m’appliquer une discipline de groupe, sinon, j’aurais présenté cet amendement pour qu’il soit éventuellement intégré au texte de la commission.
Vous nous expliquerez, monsieur le président de la commission, pour quelle raison c’est impossible et pourquoi je viens de dire une bêtise de plus… (Sourires.)
J’en viens maintenant au fond de la question, mon deuxième point.
J’ai été maire d’un chef-lieu de canton, et je dois dire que M. Mercier aurait eu raison si la situation n’avait pas évolué. Il est vrai que le maire d’un chef-lieu de canton avait beaucoup plus de travail que les maires des autres communes.
Par exemple, c’était le maire du chef-lieu de canton qui organisait les élections de la mutualité sociale agricole, la MSA, les élections associées aux prud’hommes. Mais tout cela a disparu avec Internet et la généralisation du vote par correspondance.
Par ailleurs, monsieur le secrétaire d’État, il n’y a jamais eu de collège dans tous les cantons. Quant aux gendarmeries et aux perceptions, elles sont de moins en moins nombreuses.
Exclamations sur les travées du groupe socialiste.
C’est la réalité, et c’est d’ailleurs la raison pour laquelle, messieurs les ministres, monsieur le secrétaire d’État, cette réforme était nécessaire.
Aujourd’hui, un canton n’est quasiment plus un territoire administratif. Il reste néanmoins la base de la circonscription électorale des députés. Mais le canton étant lui-même une somme de communes, les circonscriptions électorales des députés auraient pu être définies comme une somme de communes, et non comme une somme de cantons. C’est évident !
Cela étant dit, si l’on maintient le canton comme circonscription administrative, d’une part, et que l’on crée le « territoire », d’autre part, sans supprimer le département, la région ou les pays, ne croyez-vous pas, mes chers collègues, que nous ajoutons au millefeuille administratif ?
Dans mon département, par exemple, nous avons immédiatement parlé de « nouveaux cantons » pour les territoires. Le terme est important pour la lisibilité de la réforme et pour que nos concitoyens comprennent bien que les territoires, circonscriptions électorales des conseillers territoriaux, sont les « nouveaux cantons ».
Je veux bien que ces nouveaux cantons soient appelés « territoires », mais c’est comme les nouveaux francs, ils deviendront à terme les francs.
Les « nouveaux cantons » d’aujourd’hui seront bien vite les « cantons » tout court !
D’ailleurs, les Français sont tellement conservateurs dans l’âme que vous aurez beau leur demander de les appeler « territoires », ils continueront de parler de « cantons ».
Par conséquent, monsieur le président, je maintiens mon amendement, parce que c’est une bonne mesure à adopter.
MM. Alain Dufaut et Bruno Retailleau applaudissent.
Apparemment, les dernières dispositions constitutionnelles n’ont pas encore été complètement assimilées.
Effectivement, monsieur Sido, vous ne pouviez pas déposer un sous-amendement sur un article qui n’existait pas encore, lorsque la commission a été amenée à examiner le texte venant de l’Assemblée nationale.
Puis M. Portelli a déposé un amendement visant à donner une définition du territoire ; la commission l’a examiné, a émis un avis favorable et l’a intégré à son texte. C’est seulement à partir de ce moment-là que des amendements ou des sous-amendements pouvaient être déposés sur l’article qui était ainsi intégré au texte de la commission.
Monsieur Sido, nous avons longtemps débattu de votre proposition, mais nous avons estimé que nous ne devions pas vous suivre, pour des raisons qui ont été longuement expliquées.
La question n’est peut-être pas fondamentale, mais le fait d’utiliser le terme « canton » risque de perturber nos concitoyens. Il existe bien des circonscriptions législatives. En l’espèce, il s’agit d’une circonscription et non d’un canton.
Si l’amendement est adopté, je n’en mourrai pas.
De toute façon, monsieur Sido, je suis toujours l’avis de la commission.
Absolument !
Donc, je ne voterai pas votre amendement, même si, je le répète, ce point n’est pas essentiel.
Je rappelle simplement à nos collègues qu’il reste encore beaucoup d’amendements à examiner. Cette discussion est tout à fait légitime, et je veux bien que l’on rouvre sans cesse les débats, mais il ne faudrait pas revenir sur ce qui a été voté, d’autant que cela fait tout de même déjà dix jours que nous sommes occupés par ces sujets et que nous avons déjà débattu des points essentiels.
Je vous signale aussi que tous les groupes s’étaient engagés à achever l’examen de ce texte ce soir. Autrement, nous aurions siégé hier toute la nuit.
Je vous le dis solennellement, en tant que président de la commission des lois, quand nous passons un accord, nous le respectons toujours.
J’invite donc chacun à respecter l’accord passé.
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Bien ! Mon intervention aura au moins servi à quelque chose cet après-midi !
Rires et applaudissementssur les travées de l’UMP et de l’Union centriste, ainsi que sur quelques travées du groupe socialiste.
Si j’ai proposé de définir le territoire, c’est pour une raison très simple : à partir du moment où la loi créait un conseiller territorial, il valait mieux dire de quoi il était le représentant. Le territoire était bien la base électorale de ce nouveau conseiller.
Pourquoi n’avons-nous pas été plus avant ? Pour deux raisons.
Première raison, la loi ne s’appliquera, si elle s’applique, qu’en 2014. Jusque-là, le canton continuera à exister politiquement et électoralement ; des conseillers généraux seront même élus l’année prochaine. On ne peut pas faire comme si le canton n’existait plus, alors qu’il survivra encore pendant trois ans.
La seconde raison est plus pragmatique encore.
Nous voyons bien, avec ce texte, que les périmètres actuels des intercommunalités vont bouger. Par conséquent, ce qui nous apparaît aujourd’hui comme une évidence éternelle ne le sera peut-être pas dans deux ans, et encore moins dans quatre ans.
Je suis l’élu d’une commune qui est une ville-canton, tandis que les villes avoisinantes sont divisées entre plusieurs cantons : nous sommes dans une société complètement urbanisée.
Je comprends et je respecte tout à fait ceux de nos collègues qui vivent en zone rurale avec des cantons et des chefs-lieux de canton. Mais je peux vous dire que, dans mon département, les gens ignorent tout de ce qu’est un canton et ce à quoi il correspond. Et cela fait des dizaines d’années que nos concitoyens ne savent plus ce qu’est le canton.
Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.
Je respecte tout cela, mais rappelez-vous que nous travaillons pour l’avenir de notre société : or, aujourd’hui, 80 % des habitants vivent en zone urbaine, et les zones rurales ne représentent finalement qu’une petite minorité de la population.
Marques de satisfaction sur les travées de l ’ UMP.
L'amendement n'est pas adopté.
Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 317, présenté par Mmes Nicoux et Bourzai, MM. Teston, Sueur, Peyronnet, Bel, Anziani, Bérit-Débat et Berthou, Mme Blondin, MM. Botrel et Boutant, Mmes Bonnefoy et Bricq, M. Caffet, Mme Cartron, MM. Collombat, Daunis, Daudigny et Domeizel, Mme Durrieu, MM. Fichet, Frimat, Guillaume et Jeannerot, Mmes Khiari et Klès, MM. Krattinger, Le Menn, Lozach, Marc, Mauroy, Mazuir, Miquel, Mirassou, Patriat, Povinelli, Rebsamen, Repentin, Ries, Signé et Teulade, Mme Voynet et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Après le mot :
diversité
Rédiger ainsi la fin de cet alinéa :
économique, sociale et géographique, notamment sa superficie et son relief
La parole est à M. Alain Fauconnier.
Cet amendement vise, comme l’amendement n° 316, à mieux prendre en compte la spécificité des territoires de montagne.
Un département de montagne caractérisé par une faible densité démographique, des handicaps naturels importants et une superficie très étendue doit pouvoir bénéficier d’un nombre suffisant de conseillers départementaux afin qu’il soit tenu compte de ces spécificités.
L'amendement n° 188 rectifié, présenté par MM. J. Blanc, Jarlier, Hérisson, B. Fournier, Bernard-Reymond, J. Boyer, Bailly et Pierre, Mme Payet et MM. Faure et Juilhard, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Après le mot :
géographique,
insérer les mots :
notamment sa superficie et son relief,
La parole est à M. Jacques Blanc.
Cet amendement va dans le même sens que le précédent. Il tend à introduire une référence à la superficie et au relief ; incontestablement, l’homogénéité du territoire est importante. Il s’agit de donner un sens encore plus grand à la réalité de ces territoires dans les zones de montagne.
Mes chers collègues, le terme « géographique » couvre bien évidemment la montagne. Quant à introduire la précision : « notamment sa superficie et son relief », elle vous contraint à user de ce « notamment » auquel vous savez combien la commission des lois est hostile.
En outre, si l’on suit votre logique, il faudrait mentionner également le littoral, la plaine, le périurbain, et même les îles ! Non, ce n’est pas possible !
Par conséquent, je demanderai aux auteurs de ces amendements de bien vouloir les retirer. À défaut, la commission émettra un avis défavorable.
Comme ce que nous disons ici permet ensuite d’interpréter les textes, s’il est entendu clairement que les notions de superficie et de relief sont bien contenues dans le mot « géographique », et si nous sommes tous convaincus que le nombre des conseillers et l’organisation des territoires diffèrent selon la superficie et le relief, …
… alors, je veux bien retirer mon amendement, parce que ce que nous disons ici fait foi.
Je souhaite donc que l’on me confirme que l’incidence de la superficie et du relief sera prise en considération par la suite.
M. Michel Mercier, ministre. Monsieur Jacques Blanc, la géographie, c’est toute la géographie
Exclamations amusées sur certaines travées du RDSE et de l’Union centriste
, y compris donc la montagne, la superficie, la distance, et le relief !
Sourires
L’amendement n° 188 rectifié est retiré.
Monsieur Fauconnier, l’amendement n° 317 est-il retiré ?
L'amendement n'est pas adopté.
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 187 rectifié est présenté par MM. J. Blanc, Jarlier, Hérisson, Amoudry, J. Boyer, Bailly, Bernard-Reymond et B. Fournier, Mme Payet et MM. Pierre, Faure et Juilhard.
L'amendement n° 316 est présenté par Mmes Nicoux et Bourzai, MM. Teston, Sueur, Peyronnet, Bel, Anziani, Bérit-Débat et Berthou, Mme Blondin, MM. Botrel et Boutant, Mmes Bonnefoy et Bricq, M. Caffet, Mme Cartron, MM. Collombat, Daunis, Daudigny et Domeizel, Mme Durrieu, MM. Fichet, Frimat, Guillaume et Jeannerot, Mmes Khiari et Klès, MM. Krattinger, Le Menn, Lozach, Marc, Mauroy, Mazuir, Miquel, Mirassou, Patriat, Povinelli, Rebsamen, Repentin, Ries, Signé et Teulade, Mme Voynet et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l'alinéa 4
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Dans les départements comprenant des zones de montagne au sens de l’article 3 de la loi n° 85-30 du 9 janvier 1985 relative au développement et à la protection de la montagne, le découpage territorial tient compte de la superficie et du relief.
La parole est à M. Jacques Blanc, pour présenter l’amendement n° 187 rectifié.
Il s’agissait d’un amendement de repli qui tendait à prévoir – je souhaiterais que l’on puisse en tenir compte tout à l’heure, car je prépare d’autres amendements ! – que, dans les départements comprenant des zones de montagne, le découpage territorial tient compte de la superficie et du relief.
Si vous me le confirmez, monsieur le ministre, je retire l’amendement !
M. Michel Mercier, ministre. Je confirme à M. Jacques Blanc que tout ce qui fait l’identité de la France selon Fernand Braudel sera pris en considération pour définir les territoires !
Rires et applaudissementssur certaines travées du RDSE.
L’amendement n° 187 rectifié est retiré.
La parole est à Mme Françoise Cartron, pour présenter l'amendement n° 316.
Cet amendement est dans le droit fil de ceux que nous venons d’évoquer.
Nous voudrions réaffirmer la nécessité de prendre en considération les spécificités des territoires de montagne, caractérisés notamment par une faible densité démographique, des handicaps naturels considérables et une superficie très importante.
Ces territoires doivent pouvoir être représentés par un nombre suffisant de conseillers départementaux pour que ces spécificités soient prises en compte. Il faut donc aller au-delà des garanties minimales déjà prévues par le texte.
Au lieu d’assurances orales, il vaut mieux écrire et fixer dans le texte que le problème sera pris en compte.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 203 rectifié bis, présenté par MM. Collomb, Sueur, Peyronnet, Bel, Anziani, Bérit-Débat et Berthou, Mme Blondin, MM. Botrel et Boutant, Mmes Bonnefoy, Bourzai et Bricq, M. Caffet, Mme Cartron, MM. Daunis, Daudigny et Domeizel, Mme Durrieu, MM. Fichet, Frimat, Guillaume et Jeannerot, Mmes Khiari et Klès, MM. Krattinger, Le Menn, Lozach, Marc, Mauroy, Mazuir, Miquel et Mirassou, Mme Nicoux, MM. Patriat, Povinelli, Rebsamen, Repentin, Ries, Signé, Teston et Teulade, Mme Voynet et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'alinéa 4
Insérer quatre alinéas ainsi rédigés :
« Dans chaque département, la délimitation des cantons est effectuée selon les règles suivantes :
« - la population de chaque canton ne peut s'écarter de moins ou de plus de 10 % de la population moyenne des cantons du département ;
« - les limites des cantons doivent respecter les limites des arrondissements pour Lyon et Marseille ;
« - le territoire de chaque canton doit être d'un seul tenant.
La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.
Exclamations ironiques sur les travées de l ’ UMP.
L’amendement n° 203 rectifié bis est retiré.
L'amendement n° 539, présenté par M. Retailleau, est ainsi libellé :
Après l'alinéa 4
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Dans le cadre du découpage territorial, toute île comptant plus de 3 500 habitants constitue un territoire tel que défini au premier alinéa de cet article.
La parole est à M. Bruno Retailleau.
Cet amendement, monsieur le président, n’est pas retiré !
Il concerne l’insularité. La France, en effet, possède une façade maritime extraordinaire, ainsi que des îles. Cet amendement vise à indiquer que les îles constituent des territoires, c'est-à-dire des unités géographiques, historiques et économiques très homogènes.
Je pense que les îles françaises peuplées d’au moins 3 500 habitants doivent être représentées au moins par un conseiller territorial. Il y va de la cohérence avec la définition de cette circonscription électorale, mais aussi de la reconnaissance des problèmes propres à l’insularité, des problèmes économiques, mais aussi de continuité du territoire et d’intercommunalité.
Certaines îles sont à la fois une commune et un canton. L’intercommunalité leur est pratiquement interdite : faute de continuité territoriale, elles ne peuvent s’associer à d’autres communes au sein d’une intercommunalité, ce qui complique la vie quotidienne des populations et l’organisation de nombreux services publics.
Cette notion d’insularité doit être spécifiquement prise en compte. Sinon, c’est la diversité de nos territoires et leur nécessaire représentation qui risquent d’en pâtir.
La commission a longuement débattu de l’amendement présenté par M. Retailleau. Le seuil de 3 500 habitants qu’il introduit pose un petit problème ; cependant, la commission est amenée à considérer que l’insularité est bien une notion spécifique.
C’est pourquoi nous nous en remettons à la sagesse de la Haute Assemblée.
L’amendement déposé par M. Retailleau soulève des questions importantes, à commencer par celle des particularités insulaires, notamment en métropole, où les îles se trouvent dans des situations administratives et électorales variées.
Cet amendement, je le rappelle, prévoit que toute île comptant plus de 3 500 habitants constitue un territoire, et est donc représentée à l’avenir par un conseiller territorial.
Aujourd’hui, les îles de Ré et d’Oléron comptent deux cantons ; les îles d’Yeu, de Belle-Île, de Groix et d’Ouessant, un seul canton; les îles d’Hyères sont, quant à elles, rattachées au canton de Hyères-Est.
Le principe introduit par cet amendement – toute île de plus de 3 500 habitants est un territoire – pourrait mettre gravement en cause le principe d’une délimitation sur des bases essentiellement démographiques.
En effet, il interdirait toute partition en plusieurs cantons d’une île dont la population serait supérieure à 3 500 habitants, partition qui se justifie pourtant pleinement pour les îles très peuplées. Par exemple, l’île d’Oléron, qui compte environ 21 000 habitants, se situe dans un département dont les cantons auront en moyenne 11 700 habitants.
En tout état de cause, il n’est pas possible d’appliquer ce critère à la Réunion ou à la Guadeloupe. En outre, sa mise en œuvre systématique pourrait conduire à la création de territoires sur des îles dont la population serait très éloignée de la moyenne départementale, en contradiction donc avec l’impérieuse nécessité de réduire les écarts démographiques existants.
Ces précisions peuvent, je le crois, rassurer le M. Retailleau. L’île d’Yeu pourra conserver son statut de canton, justifié par la prise en considération de la carte cantonale actuelle, parce que la population satisfait tout à fait au critère démographique. Mais l’amendement, tel qu’il est libellé, ne peut s’appliquer à l’île d’Oléron, à la Réunion ou à la Guadeloupe.
Je demande donc à M. Retailleau, compte tenu des précisions que je viens d’apporter, de bien vouloir retirer son amendement.
M. Bruno Retailleau. Monsieur le président, l’île d’Yeu a certes toute son importance ; d’ailleurs, plusieurs d’entre nous le savent bien…
Sourires
Loin de moi l’idée de priver l’île d’Oléron ou l’île de Ré de conseillers territoriaux : ce n’est pas le but ! Je veux simplement m’assurer que, dans le cas d’îles plus petites, l’insularité sera représentée en tant que telle, parce que les problèmes, incontournables, qui s’y posent ne peuvent être réduits à ceux du continent.
Si vous nous donnez cette assurance, je retirerai mon amendement.
M. Josselin de Rohan. M. Retailleau m’a poussé au crime, monsieur le président !
Sourires
La Bretagne comporte effectivement un certain nombre d’îles, dont certaines ont moins de 3 500 habitants. Si votre définition était acceptée, mon cher collègue, ni l’île de Groix ni l’île d’Ouessant ne seraient considérées comme des territoires. Or ces îles, au-delà de leur caractéristique insulaire et des problèmes qui sont liés à cette insularité, ont aussi le droit d’être représentées dans une assemblée territoriale.
C’est donc non plus un critère de population qu’il faut prendre en compte, mais l’intérêt que ces îles présentent, notamment sur les plans économique ou touristique.
Je vous accorde donc, cher collègue, que les îles doivent être représentées ; mais je ne peux pas accepter votre seuil, parce qu’il exclurait un certain nombre d’îles de la représentation territoriale.
M. Michel Mercier, ministre. Pour répondre à M. Retailleau, je peux lui assurer que l’insularité aura naturellement toute sa place parmi les critères géographiques.
M. Jean-Pierre Sueur ironise.
Qu’en est-il en définitive, monsieur Retailleau, de l’amendement n° 539 ?
L’amendement n° 539 est retiré.
L'amendement n° 49 rectifié, présenté par MM. Bailly, P. Blanc, Pierre, Bécot, Revet et César, est ainsi libellé :
Alinéa 5
Compléter cet alinéa par les mots :
et régional
La parole est à M. Gérard Bailly.
J’ai été surpris par cet article 1er AA, qui fait du conseiller territorial le représentant du territoire uniquement au sein du conseil général.
Lorsque j’étais à la fois conseiller régional et conseiller général, j’ai bien vu qu’il était très opportun qu’une même personne puisse représenter un territoire à deux échelons. Cela améliore beaucoup la lisibilité de notre organisation. Personnellement, je suis également favorable au scrutin uninominal à deux tours, qui permet de bien identifier une personne et un territoire.
D’ailleurs, un territoire, qu’est-ce que c’est ? Lorsque j’ai commencé à siéger dans cette assemblée, j’avais l’impression d’être un peu chauvin. Or, je me suis bien vite aperçu que nous étions tous ici viscéralement attachés à nos parcelles de territoire, et prêts à les défendre.
Ces territoires, ce ne sont pas seulement des hommes ; il y a aussi des ouvrages, un environnement spécifique, des zones humides, de la voirie. Bref, un conseiller territorial est certes le représentant de la population, mais il me semble qu’il devrait aussi se faire l’avocat de ces diverses causes, au sein du conseil général comme du conseil régional. C’est pourquoi j’estime qu’il faut veiller à inscrire dans la définition du conseiller territorial qu’il est le représentant du territoire au sein du conseil général mais aussi du conseil régional.
Certains ont fait observer qu’il aurait ainsi beaucoup de travail. J’en suis bien conscient, pour avoir été moi-même en même temps conseiller général et conseiller régional, comme beaucoup d’autres dans cette assemblée. Nombre d’entre nous ont aussi exercé d’autres responsabilités en plus.
Quand on sait que certains élus, comme cela a été dit tout à l’heure, cumulent un poste de président d’une intercommunalité de plusieurs centaines de milliers d’habitants avec un siège de parlementaire tout en restant maires, on comprend que tout cela va bien au-delà de la question du conseiller territorial.
Il me paraît très important qu’une même personne puisse représenter ces territoires au sein des deux échelons de collectivités. C’est pourquoi je vous demande de voter cet amendement.
C’est une coordination opportune. D’un point de vue purement juridique, cette précision n’est pas vraiment nécessaire ; néanmoins, je crois qu’elle rend le dispositif encore plus clair.
J’y suis donc favorable.
L'amendement est adopté.
L’amendement n° 313, présenté par MM. Sueur, Peyronnet, Bel, Anziani, Bérit-Débat et Berthou, Mme Blondin, MM. Botrel et Boutant, Mmes Bonnefoy, Bourzai et Bricq, M. Caffet, Mme Cartron, MM. Collombat, Daunis, Daudigny et Domeizel, Mme Durrieu, MM. Fichet, Frimat, Guillaume et Jeannerot, Mmes Khiari et Klès, MM. Krattinger, Le Menn, Lozach, Marc, Mauroy, Mazuir, Miquel et Mirassou, Mme Nicoux, MM. Patriat, Povinelli, Rebsamen, Repentin, Ries, Signé, Teston et Teulade, Mme Voynet et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... - Sous réserve des dispositions de la présente loi, dans toutes les dispositions législatives, les mots : « conseil général » sont remplacés par les mots : « conseil départemental » et les mots : « conseils généraux » sont remplacés par les mots : « conseils départementaux ».
La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.
L'amendement n'est pas adopté.
L'article 1 er AA est adopté.
L'amendement n° 325 rectifié, présenté par MM. Sueur, Peyronnet, Bel, Anziani, Bérit-Débat et Berthou, Mme Blondin, MM. Botrel et Boutant, Mmes Bonnefoy, Bourzai et Bricq, M. Caffet, Mme Cartron, MM. Daunis, Daudigny et Domeizel, Mme Durrieu, MM. Fichet, Frimat, Guillaume et Jeannerot, Mmes Khiari et Klès, MM. Krattinger, Le Menn, Lozach, Marc, Mauroy, Mazuir, Miquel et Mirassou, Mme Nicoux, MM. Patriat, Povinelli, Rebsamen, Repentin, Ries, Signé, Teston et Teulade, Mme Voynet et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l’article 1er AA, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans un même département, l'écart entre la population du canton le plus peuplé et celle du canton le moins peuplé ne peut excéder 10 % par rapport à la moyenne départementale.
Ce pourcentage ne s'applique pas dans les départements comportant des zones de montagne ou des îles.
La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.
L’amendement n° 325 rectifié est retiré.
Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 326 rectifié, présenté par Mme M. André, MM. Sueur, Peyronnet, Bel, Anziani, Bérit-Débat et Berthou, Mme Blondin, MM. Botrel et Boutant, Mmes Bonnefoy, Bourzai et Bricq, M. Caffet, Mme Cartron, MM. Collombat, Daunis, Daudigny et Domeizel, Mme Durrieu, MM. Fichet, Frimat, Guillaume et Jeannerot, Mmes Khiari et Klès, MM. Krattinger, Le Menn, Lozach, Marc, Mauroy, Mazuir, Miquel et Mirassou, Mme Nicoux, MM. Patriat, Povinelli, Rebsamen, Repentin, Ries, Signé, Teston et Teulade, Mme Voynet et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 1er AA, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :
1° Au deuxième alinéa de l'article L. 3122-5, après les mots : « les nominations prennent effet immédiatement », sont insérés les mots : « sous réserve que l'écart entre le nombre des candidats de chaque sexe ne soit pas supérieur à un » ;
2° Le troisième alinéa de l'article L. 3122-5 est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Chaque liste est composée alternativement d'un candidat de chaque sexe. » ;
3° L'article L. 3122-8 est complété par une phrase ainsi rédigée :
« L'écart entre le nombre de membres de chaque sexe ne peut être supérieur à un. »
La parole est à Mme Françoise Cartron.
Cet amendement, qui traite de la parité, est extrêmement important.
S’il y a bien un sujet qui peut faire consensus, c’est celui-là.
Il est permis de rêver !
La loi du 31 janvier 2007 a imposé la parité dans les exécutifs des conseils régionaux et des conseils municipaux des communes de plus de 3 500 habitants.
Elle n’a en revanche pas imposé cette obligation aux exécutifs des conseils généraux, dont la composition restait de toute façon trop masculinisée pour rendre applicable une semblable règle.
Aujourd’hui, nous sommes dans l’incertitude quant au mode d’élection du futur conseiller territorial. En visant à introduire une obligation de parité dans la composition de la commission permanente et dans celle du bureau du conseil général, le présent amendement entend toutefois traduire la recommandation n° 9 adoptée par la délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes, à l’unanimité des présents, lors de sa réunion du 10 juin.
L'amendement n° 566, présenté par M. Adnot, est ainsi libellé :
Après l'article 1er AA, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au sein du territoire, les candidatures se feront obligatoirement sous forme de binômes homme/femme avec indication de celle ou celui des deux candidats qui sera conseiller territorial appelé à siéger à la fois au conseil général et au conseil régional. Le nombre total de conseillers territoriaux siégeant au conseil régional ne peut, en aucun cas, excéder la moitié du nombre total des conseillers territoriaux siégeant au conseil général.
L'amendement n° 565, également présenté par M. Adnot, est ainsi libellé :
Après l'article 1er AA, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La présente loi crée le mandat de conseiller territorial.
Le conseiller territorial siégeant au conseil général est élu au scrutin uninominal à deux tours au sein d'une circonscription électorale qui est le canton.
Le conseiller territorial qui siège également au conseil régional est désigné à la proportionnelle au sein des conseillers territoriaux siégeant au conseil général.
Le nombre total de conseillers territoriaux siégeant au conseil régional ne peut, en aucun cas, excéder la moitié du nombre total des conseillers territoriaux siégeant au conseil général.
Monsieur Adnot, ces deux amendements sont devenus sans objet, en vertu des dispositions que le Sénat a précédemment adoptées.
M. Philippe Adnot manifeste son mécontentement.
Monsieur le président de la commission des lois, pouvez-vous éclairer M. Adnot ?
Vous le savez bien, monsieur Adnot, les amendements qui sont similaires, par l’objet ou par le libellé, à ceux que le Sénat a déjà repoussés deviennent sans objet.
M. Philippe Adnot. Je voulais simplement vous sauver la mise : créer un conseiller territorial sans prévoir son mode d’élection pose quand même un vrai problème !
Marques d’approbation sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.
Je vous rappelle, monsieur Adnot, qu’en première lecture nous avions décidé de renvoyer les modes de scrutin et de désignation des conseillers territoriaux au projet de loi n° 61, lequel avait déjà été déposé au Sénat.
Le Gouvernement s’était engagé auprès du Sénat à agir en deux temps. Ce qui a perturbé un peu les choses, c’est que nous avons introduit un certain nombre de principes relatifs au mode de scrutin en première lecture, ce que nous n’aurions pas dû faire.
Il me semble que ces amendements, que je n’ai pas défendus hier soir, méritent d’être examinés à cet instant du débat.
Ils prévoient en effet un système électoral fort différent de celui que nous avons repoussé et, d’une certaine manière, leur adoption pourrait rendre service à tout le monde.
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Ces amendements sont contraires à l’article 1er que nous avons voté !
M. Philippe Adnot marque son étonnement
Monsieur Adnot, vous avez eu la possibilité de vous exprimer, mais il n’en reste pas moins que ces amendements sont devenus sans objet.
Je vous remercie de votre compréhension, monsieur le président. Je saisirai une autre occasion pour défendre mes propositions.
Les amendements n° 566 et 565 n’ayant plus d’objet, quel est l’avis de la commission sur le seul amendement n° 326 rectifié ?
Comme vient de le préciser M. le président de la commission des lois, le régime électoral est renvoyé au projet de loi n° 61.
Cet amendement arrive trop tôt. Imaginez qu’avec le mode de scrutin retenu aucun homme ne soit élu…
Exclamations ironiques sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.
Sourires
M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Si vous prévoyez dès à présent que l’exécutif devra être composé à parité d’hommes et de femmes, comment ferez-vous ?
Protestations sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.
Votre amendement arrive donc trop tôt, puisque nous n’avons pas encore déterminé le régime électoral.
Non, vous ne pouvez pas ! Imaginez que tous les élus soient du même sexe… La Constitution se contente de préciser que la loi « favorise l’égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux », chère madame.
En conséquence, la commission demande le retrait de cet amendement. À défaut, elle émettra un avis défavorable.
L'amendement n'est pas adopté.
M. le président. Comme dans les Évangiles : il y a beaucoup d’appelés, mais peu d’élus !
Sourires. – Applaudissements sur quelques travées de l’Union centriste.
Nouveaux sourires.
L'amendement n° 12 rectifié bis, présenté par MM. Sido, Doligé, Leroy, du Luart, Trillard, Dufaut et Pointereau, est ainsi libellé :
Après l'article 1er AA, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans chaque département, le nombre de conseillers territoriaux est impair.
La parole est à M. Rémy Pointereau.
Nous souhaitons, à travers cet amendement, que les conseillers territoriaux soient en nombre impair, pour éviter que les présidents, surtout dans les assemblées départementales, ne soient élus au bénéfice de l’âge, ce qui sera possible dans quarante-deux départements, selon le tableau préparé par le Gouvernement.
Ce dispositif n’est pas en phase avec une démocratie moderne et ne contribue ni au renouvellement des assemblées départementales ni à la prise en compte des résultats des cantonales.
Il convient donc de prévoir un nombre impair, afin d’éviter de recourir à ce dispositif de la présidence au bénéfice de l’âge.
Cet amendement reprend une revendication de l’Assemblée des départements de France, l’ADF, qui repose sur des motifs pratiques évidents.
Il est cependant d’ores et déjà satisfait par le tableau que j’ai déposé à l’amendement n° 208, qui, modifié par le sous-amendement de Mme Troendle, a été intégré au texte de la commission.
Je demande donc le retrait de cet amendement.
L'amendement n° 12 rectifié bis est retiré.
L'amendement n° 327, présenté par MM. Gillot, Sueur, Peyronnet, Bel, Anziani, Bérit-Débat et Berthou, Mme Blondin, MM. Botrel et Boutant, Mmes Bonnefoy, Bourzai et Bricq, M. Caffet, Mme Cartron, MM. Collombat, Daunis, Daudigny et Domeizel, Mme Durrieu, MM. Fichet, Frimat, Guillaume et Jeannerot, Mmes Khiari et Klès, MM. Krattinger, Le Menn, Lozach, Marc, Mauroy, Mazuir, Miquel et Mirassou, Mme Nicoux, MM. Patriat, Povinelli, Rebsamen, Repentin, Ries, Signé, Teston et Teulade, Mme Voynet et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 1er AA, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :
1° L'article L. 3121-1 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les conseils généraux de la Guadeloupe et de La Réunion font exception à la règle du conseiller territorial. » ;
2° L'article L. 4131-1 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les conseils régionaux de la Guadeloupe et de La Réunion font exception à la règle du conseiller territorial. »
La parole est à M. Jacques Gillot.
Cet amendement prévoit que les conseils généraux et régionaux de la Guadeloupe et de la Réunion font exception à la règle du conseiller territorial pour deux raisons, l’une constitutionnelle, l’autre institutionnelle.
D’abord, je rappelle qu’il existe une exception constitutionnelle pour les départements d’outre-mer, par référence à l’article 73 de la Constitution, qui prévoit que la création par la loi d’une collectivité se substituant à un département et une région d’outre-mer ne peut intervenir sans que la population locale ait été consultée.
En janvier dernier, les élus de la Martinique et de la Guyane ont fait ce choix, en consultant par référendum les Martiniquais et les Guyanais sur l’évolution statutaire de leur département. Le résultat de cette consultation a abouti à la mise en place progressive d’une collectivité unique.
En ce qui concerne la Guadeloupe, une consultation de la population est prévue avant l’été 2011, avec l’assentiment du chef de l’État.
La deuxième exception est de nature institutionnelle. En effet, nos départements ont pour particularité d’être des régions monodépartementales. La réforme du conseiller territorial revient donc à créer une assemblée unique, à la différence de la métropole, où les régions regroupent plusieurs départements.
Or, s’il en a été décidé ainsi pour la Martinique et la Guyane à la suite du vote des électeurs concernés, nous ne pouvons présumer aujourd’hui du choix qui sera fait par les Guadeloupéens ou les Réunionnais.
Appliquer la règle des conseillers territoriaux à ces départements d’outre-mer reviendrait à anticiper les résultats des consultations locales qu’il reste à organiser et à se substituer au choix des populations.
Il s’agit donc d’un amendement de cohérence, visant à corriger l’application de la règle du conseiller territorial pour les départements d’outre-mer n’ayant pas encore consulté leurs populations.
Cet amendement prévoit que les dispositions relatives aux conseillers territoriaux ne seront pas appliquées à la Réunion et en Guadeloupe. Or il s’agirait d’une dérogation au principe d’identité législative prévu par l’article 73 de la Constitution, auquel les Réunionnais ont récemment réaffirmé leur attachement.
Cet amendement préjuge également des réflexions actuellement en cours en Guadeloupe, dont les élus ont demandé à réfléchir à d’éventuelles évolutions institutionnelles.
En outre, la mise en place des conseillers territoriaux en Guadeloupe et à la Réunion n’implique pas la création d’une assemblée unique : un conseil général et un conseil régional distincts seront maintenus.
En conséquence, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
L’avis est également défavorable.
Puisqu’il s’agit d’un problème récurrent, cet amendement me donne l’occasion de clarifier la position du Gouvernement et d’apporter quelques précisions.
Lors des consultations de janvier 2010, les électeurs de Guyane et de Martinique se sont clairement prononcés pour une évolution statutaire vers une collectivité unique relevant du fameux article 73 de la Constitution. Ils ne sont donc pas concernés par la réforme et feront prochainement l’objet d’une loi mettant en application la collectivité unique.
Il n’y a en revanche aucune raison d’exclure de la réforme les départements de la Réunion et de la Guadeloupe. La Réunion a fait le choix d’une évolution conforme à celle des collectivités de métropole. Le projet de loi, dans la rédaction issue des travaux de l’Assemblée nationale, respecte ce choix, en prévoyant son application sans adaptation particulière, sauf si une ordonnance prévue par l’article 40 du texte en dispose autrement, pour les seules questions relatives au conseiller territorial.
Pour ce qui concerne la Guadeloupe, monsieur le sénateur, les élus régionaux et départementaux ont souhaité, en 2009, avec l’assentiment du chef de l’État, qu’un délai de dix-huit mois leur soit donné pour mener à bien leurs réflexions propres sur cette évolution.
Si, au terme de cette réflexion, les propositions exprimées par les élus devaient s’écarter des dispositions du projet de loi de réforme des collectivités territoriales, par exemple si elles tendaient à la création d’une collectivité ou d’une assemblée unique, les électeurs guadeloupéens seraient alors bien évidemment consultés, conformément à la Constitution.
Dans le cas inverse, si les élus de Guadeloupe faisaient le choix d’une évolution identique à celle des collectivités de métropole, à l’instar de ceux de la Réunion, la loi portant réforme des collectivités territoriales s’y appliquerait, là encore sous réserve, le cas échéant, des adaptations que le Gouvernement pourrait arrêter dans l’ordonnance prévue à l’article 40 du projet de loi.
La solution retenue, parfaitement conforme au texte de la Constitution, permet donc en réalité de laisser le libre choix aux élus des deux départements concernés.
C’est pourquoi le Gouvernement est défavorable à cet amendement n° 327.
Je voudrais encore obtenir quelques précisions de la part de M. le secrétaire d’État.
Si, en juin 2011, la population de Guadeloupe fait le choix d’une collectivité unique, est-ce, une fois encore, une ordonnance qui fera la loi ? Serons-nous logés à la même enseigne que les Martiniquais et les Guyanais aujourd’hui ?
Monsieur le président, quand on demande une explication à un ministre, on peut s’attendre à ce qu’il la donne…
Si, en juin 2011, la population de la Guadeloupe opte pour une collectivité unique, y aura-t-il une loi organique – ce système sera mis en place en 2014 – ou sera-t-on encore sous le régime des ordonnances ?
C’est tout ce que je demande, car je ne pense pas avoir obtenu de réponse sur ce point.
Je pensais avoir été clair : il y aura une loi organique, comme pour les autres départements concernés. Telle est la réponse que je suis en mesure de vous apporter.
L’amendement n° 327 est retiré.
Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 9 rectifié, présenté par MM. Bernard-Reymond, Bizet, J. Blanc et Carle, Mme B. Dupont, M. Faure, Mme G. Gautier, MM. Houel, Lefèvre et Milon, Mme Malovry et MM. Saugey, Gilles et Vestri, est ainsi libellé :
Après l'article 1er AA, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Les départements classés en totalité en zone de montagne ne peuvent avoir un nombre de conseillers territoriaux inférieur à 17.
La parole est à M. Jacques Blanc.
J’ai retiré certains de mes amendements à la suite des engagements qui ont été pris ; il s’agit ici de traduire ces engagements.
Certains départements sont classés en totalité en zone de montagne : les Hautes-Alpes et la Lozère.
Il y en a d’autres, le Cantal, par exemple !
La spécificité de ces départements en termes de relief et de climat nécessite une spécificité en termes de représentation.
On a bien dit que les conseillers territoriaux représentaient d’abord les territoires et non pas le nombre d’habitants. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle on a créé les conseillers territoriaux et défini les territoires.
Par conséquent, je propose de garantir que le nombre de conseillers territoriaux pour ces départementaux ne peut être inférieur à dix-sept.
L'amendement n° 189, présenté par MM. J. Blanc, Jarlier, Hérisson, Amoudry, J. Boyer, Bailly et Bernard-Reymond, Mme Payet et M. Pierre, est ainsi libellé :
Après l’article 1er AA, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans les départements comprenant des zones de montagne au sens de l’article 3 de la loi du 9 janvier 1985 relative au développement et à la protection de la montagne, aucune assemblée départementale ne peut avoir un nombre de conseillers territoriaux inférieur à 25 % par rapport au nombre de conseillers généraux existant avant l’entrée en vigueur du présent article.
La parole est à M. Jacques Blanc.
Cet amendement va dans le même sens, mais il fait référence au nombre de conseillers généraux actuel. Il ne peut y avoir, nous semble-t-il, un nombre de conseillers territoriaux de 25 % inférieur au nombre de conseillers généraux existants avant l’entrée en vigueur de l’article.
Il s’agit d’une diminution limitée, ce qui me paraît légitime. On peut perdre jusqu’à 25 % du nombre de conseillers généraux, mais, en deçà, les conseillers territoriaux risquent de rencontrer une difficulté majeure dans l’exercice de leur mandat.
L'amendement n° 527 rectifié bis, présenté par M. Jarlier, Mme Payet, Mlle Joissains et MM. Vestri, Houpert, J. Boyer, Ferrand, Hérisson et Milon, est ainsi libellé :
Après l’article 1er AA, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« Dans les départements comprenant des zones de montagne au sens de l’article 3 de la loi du 9 janvier 1985 relative au développement et à la protection de la montagne, aucune assemblée départementale ne peut avoir un nombre de conseillers territoriaux inférieur à 20. »
La parole est à M. Pierre Jarlier.
Cet amendement est de même inspiration que celui qui vient d’être défendu par Jacques Blanc.
Il vise à indiquer qu’aucune assemblée départementale ne peut avoir un nombre de conseillers territoriaux inférieur à vingt. Il paraît essentiel, en effet, que les territoires ruraux de montagne, souvent isolés, puissent continuer à bénéficier de la présence d’un nombre suffisant d’élus de proximité que seront les conseillers territoriaux, proximité à laquelle la population est très attachée.
Ces amendements traitent du nombre de conseillers territoriaux par département.
Il convient d’être relativement prudent sur cette question, tout en comprenant parfaitement les problèmes des départements de montagne et leur spécificité.
Mes chers collègues, le nombre de conseillers territoriaux d’un département influe directement sur sa puissance au sein de la région puisque, je le rappelle, les conseillers territoriaux sont en même temps conseillers généraux et conseillers régionaux. Par conséquent, si vous augmentez artificiellement le nombre de conseillers territoriaux d’un département peu peuplé, vous donnez à ce département, au sein de la région, une importance supérieure à son véritable poids démographique et vous prenez un risque constitutionnel important.
Quand nous avons établi le tableau, nous avons retenu un certain nombre de critères, au nombre desquels la fixation d’un nombre minimum de quinze conseillers territoriaux pour les départements les moins peuplés. Pourquoi ? Tout simplement parce que c’est le dispositif qui existe déjà aujourd’hui pour les conseils généraux des départements les moins peuplés, en l’occurrence le Territoire de Belfort, et que le Conseil d’État et le Conseil constitutionnel se sont déjà prononcés.
On apporte donc une garantie constitutionnelle plus sûre en fixant le nombre à quinze. On aurait pu le fixer à dix-sept, mais nous n’aurions pas la même garantie, faute de référence à un dispositif existant.
Quant au taux de 25 %, il revient au même. Que vous partiez de dix-sept ou que vous baissiez de 25 %, vous arrivez au même résultat, le nombre est supérieur à quinze et, par là même, vous prenez un risque constitutionnel important.
Au demeurant, monsieur Jarlier, le nombre doit être impair. De ce fait, votre amendement n° 527rectifié bis n’a plus d’objet si vous maintenez votre minimum à vingt.
Indépendamment de ce problème de forme, sur le fond, imaginez que l’on retienne un nombre supérieur et que le Conseil constitutionnel censure la disposition en formulant une réserve. Quand le texte reviendra devant la Haute Assemblée, il faudra bien que les tableaux correspondent à la réserve formulée par le Conseil constitutionnel…
… et là, ce peut être une catastrophe.
Le risque est minimum, me semble-t-il, avec le nombre de quinze. Je note, d’ailleurs, que, si l’on appliquait dans certains départements une base purement démographique, on arriverait à un nombre bien inférieur.
C’est donc déjà un « surplus » qui est donné à ces départements.
Or, je le rappelle également, on ne doit pas créer de rupture d’égalité trop importante au sein du conseil régional. Tant que l’on est au sein du conseil général, que le nombre soit de quinze, dix-sept, dix-neuf ou vingt et un, cela ne pose pas de problème.
En revanche, les conseillers territoriaux siégeant au conseil régional, vous aurez un écart démographique trop important entre les conseillers territoriaux des différents départements.
C’est d’ailleurs la raison pour laquelle – mais je m’exprimerai plus longuement sur le tableau, en remerciant d’ores et déjà les services du Gouvernement qui m’ont aidé à l’établir – il avait été décidé, au départ, de raisonner non pas sur l’ensemble du territoire national, mais région par région, afin de ménager le maximum de souplesse.
Je pense très objectivement que l’on est allé au maximum de ce que l’on pouvait faire.
Compte tenu de ces explications, je vous demande de retirer les amendements, chers collègues, au risque, sinon, de prendre un risque, qu’il faudra assumer !
Je partage l’avis de M. le rapporteur, ce qui est logique, car nous avons travaillé ensemble sur ce dossier.
Mesdames, messieurs les sénateurs, attention au retour de bâton du Conseil constitutionnel !
Je vous rappelle que, lors de la refonte de la carte électorale des députés, nous avions laissé deux députés à la Lozère, conformément à une tradition constante depuis la IIIe République, et deux à la Creuse. Le Conseil constitutionnel a été saisi, il nous a censurés, nous imposant un seul député pour la Lozère et un seul pour la Creuse !
Pour le présent seuil de quinze, nous avons procédé à un certain nombre de vérifications et nous nous sommes fondés – M. le rapporteur l’a rappelé – sur le plus petit département et sa gouvernance actuelle.
Le plus petit département, c’est le Territoire de Belfort et le seuil y est de quinze. Il était d’ailleurs beaucoup plus bas, mais c’est sous l’impulsion de M. Chevènement, qui, vous en conviendrez, est une autorité morale importante, …
… dans cette assemblée et dans le pays, et également de Michel Dreyfus-Schmidt, que l’effectif du conseil général du Territoire de Belfort, qui était inférieur à dix, a été porté, voilà quelques années, à quinze.
Lors du congrès de l’Association nationale des élus de la montagne, au mois de septembre, à L’Argentière-la-Bessée, le problème a été soulevé et j’ai proposé ce minimum de quinze représentants, pour les territoires de montagne qui comptent peu d’habitants, mais qui ont une très grande superficie, en moyenne plus de 500 000 hectares et des secteurs très montagneux et difficiles d’accès. Cette formule a d’ailleurs été acceptée par les participants à ce congrès de l’ANEM.
Aujourd’hui, on risque de « surjouer ». Il est vrai que la situation actuelle est tout à fait inadmissible pour vous. En effet, avec le mode de scrutin actuel – on vient de le voir encore lors des élections régionales – vous n’êtes plus représentés à Montpellier, chef-lieu de région, que par un seul conseiller régional. En d’autres termes, ce conseiller régional représente entre 78 000 et 80 000 habitants – il y a beaucoup d’inscrits parce que la population est assez âgée -, contre moins de 25 000 habitants en moyenne pour les conseillers régionaux de Languedoc-Roussillon.
Le seul et unique conseiller régional de Lozère pèse trois fois plus qu’un conseiller régional de Languedoc-Roussillon !
Une telle injustice est tout à fait inadmissible.
Le seuil de quinze conseillers territoriaux proposé pour la Lozère mais aussi pour d’autres départements, notamment les Hautes-Alpes et les Alpes-de-Haute-Provence, me paraît être une solution intermédiaire légitime et qui ne risque pas l’inconstitutionnalité.
Ne tentons pas l’aventure : quinze conseillers territoriaux, au lieu d’un seul conseiller régional, pour représenter une population de 80 000 habitants et un territoire de 550 000 hectares me paraît être une bonne évolution.
Je ne tenais pas forcément à m’exprimer sur cette question des conseillers territoriaux, car, après tout, nous voulons les supprimer, ce n’est donc pas vraiment mon souci.
Cependant, je ne peux m’empêcher, après ce que je viens d’entendre, d’en appeler au bon sens.
Je ne savais pas que l’on avait créé une nouvelle catégorie de départements, ceux qui seraient exclusivement classés en zones de montagne et pour lesquels Jacques Blanc demande, au titre d’une discrimination positive, deux conseillers territoriaux supplémentaires.
Cela voudrait dire que mon département, qui est largement plus peuplé que celui de M. Jacques Blanc, aurait moins de conseillers territoriaux sous prétexte qu’un seul de ses cantons n’est pas classé en zone de montagne. Un peu de bon sens !
Quant à l’obligation de fixer un nombre impair de conseillers territoriaux dans chaque département, permettez-moi de vous faire remarquer qu’elle ne règle en rien le problème ! En effet, certaines régions comprenant deux, quatre, six départements, au bout du compte, impair plus impair, cela fait toujours pair !
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.
J’ai regretté de ne pas pouvoir présenter mes amendements et M. le secrétaire d’État pourrait peut-être l’entendre parce que le président de la commission des lois de l’Assemblée nationale s’était engagé à reprendre intégralement le dispositif. Dans notre assemblée, les sénatrices, par la voix de Mme André, ont présenté quelque chose d’assez approchant.
Il y a un problème dans votre système électoral, et l’Assemblée nationale y reviendra peut-être : vous organisez des assemblées régionales aux effectifs considérables mais vous avez fait disparaître la présence des femmes.
Dans l’un des deux amendements que je n’ai pas pu présenter, je propose un système qui permet à la fois aux femmes d’être représentées à 50 % dans les départements, puisque je voudrais faire élire des binômes homme-femme sur deux cantons, un seul élu siégeant au conseil régional. Les assemblées ne seraient pas pléthoriques et nous aurions 50 % de femmes dans les départements.
M. About m’a fait l’amitié de me dire tout à l’heure que, si cet amendement avait l’heur de vous intéresser, il le voterait. Je vous propose donc d’y réfléchir.
Puisque l’on parle des femmes, permettez-moi de dire que la Lozère est un département qui a eu la chance d’avoir une femme de qualité à la présidence du conseil général : notre ancienne collègue Janine Bardou.
J’ai bien écouté M. le rapporteur et M. le secrétaire d’État. J’ai besoin de deux sécurités.
D’une part, le minimum de quinze nous met-il à l’abri de toute remise en cause par le Conseil constitutionnel ?
C’est que nous avons été « vaccinés » lors de la réforme du nombre de députés, et je regrette que nous n’ayons pas inscrit dans la Constitution un minimum de deux députés par département métropolitain.
Peut-être d’ailleurs sera-t-il possible de revenir sur ce point, et je demande au Gouvernement, en cas de nouvelle révision constitutionnelle, d’être mobilisé dans cette perspective…
Mais ici – cela rejoint ce que je disais dans la défense de l’article 1erAA –, il s’agit bien de représentation de territoires : le Conseil constitutionnel ne peut donc pas nous opposer de trop fortes inégalités de représentativité.
Je voudrais donc obtenir des assurances sur cet autre point et souhaiterais que le rapporteur comme le Gouvernement – il peut aussi y avoir une commission mixte paritaire ! – me donnent l’engagement formel que le chiffre de quinze restera bien inscrit dans le tableau final.
Je vais retirer cet amendement – il est vrai aussi que j’ai fait mes comptes et qu’il a bien peu de chances d’être adopté –, convaincu que ce minimum de quinze conseillers territoriaux ne créera pas plus de problèmes avec le Conseil constitutionnel qu’ici même.
Ainsi, un département comme la Lozère, qui a eu jusqu’à trois conseillers régionaux, puis deux, et n’en a plus qu’un – le système actuel, reconnaissons-le, est tout à fait inadapté –, pourra avoir quinze représentants au conseil régional de Languedoc-Roussillon.
Avec l’ensemble des conseillers territoriaux des zones rurales et de montagne, on aura rétabli l’équilibre si nécessaire dans une région comme la nôtre, entre la métropole et les territoires ruraux, en particulier de montagne.
Je retire donc l’amendement n° 189, monsieur le président.
L’amendement n° 189 est retiré.
La parole est à M. Pierre Jarlier, pour explication de vote sur l’amendement n° 527 rectifié bis.
Pour tenir compte de ce que j’ai entendu tout à l’heure et puisque, effectivement, il faut que les conseillers territoriaux soient en nombre impair, je souhaite tout d’abord rectifier mon amendement en y remplaçant le chiffre « 20 » par le chiffre « 21 », monsieur le président.
Il s’agit donc de l’amendement n° 527 rectifié ter, présenté par M. Jarlier, Mme Payet, Mlle Joissains et MM. Vestri, Houpert, J. Boyer, Ferrand, Hérisson et Milon, qui est ainsi libellé :
Après l’article 1er AA, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« Dans les départements comprenant des zones de montagne au sens de l’article 3 de la loi du 9 janvier 1985 relative au développement et à la protection de la montagne, aucune assemblée départementale ne peut avoir un nombre de conseillers territoriaux inférieur à 21. »
Veuillez poursuivre, mon cher collègue.
Je voudrais également préciser à nos collègues qui se sont exprimés tout à l’heure que mon amendement concerne non seulement les départements entièrement classés en zones de montagne, mais tout département « comprenant des zones de montagne ».
Enfin, monsieur le secrétaire d’État, un débat important a effectivement eu lieu sur ce sujet au congrès de l’ANEM. Cependant, les amendements que Jacques Blanc et moi-même présentons émanent de l’ANEM, et je ne sache pas qu’elle ait validé ce minimum de quinze lors de ce congrès.
Il est assurément important de fixer un nombre minimal de conseillers territoriaux dans certains départements – je pense à mon département, le Cantal, auquel ce projet de loi ferait perdre pratiquement 25 % de ses conseillers généraux. Il me semble également prudent d’inscrire ce minimum dans la loi pour les départements qui comprennent des zones de montagne. En effet, si l’amendement n° 580, que nous allons examiner bientôt, prévoit effectivement vingt et un conseillers territoriaux pour le Cantal, il prévoit aussi, pour certaines régions, des effectifs pléthoriques : je ne sais pas ce qu’il adviendra de cet amendement tout à l’heure !
Je peux, au nom du Gouvernement, m’engager solennellement sur le minimum de quinze, mais je ne peux pas m’engager sur l’issue des éventuelles saisines du Conseil constitutionnel !
M. Alain Marleix, secrétaire d'État. Ce sera votre responsabilité !
Exclamations sur les travées du groupe socialiste.
Ce sera votre responsabilité, comme cela a été la vôtre quand vous avez formé un recours sur le découpage des circonscriptions pour les élections législatives, puisque c’est au terme de ce recours que la Creuse et la Lozère ont perdu un député !
Non, je le retire, monsieur le président, au bénéfice de l’amendement n° 527 rectifié ter de notre collègue Pierre Jarlier.
L'amendement n° 9 rectifié est retiré.
La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, pour explication de vote sur l'amendement n° 527 rectifié ter.
Je voudrais rassurer, si je puis dire, nos collègues : je pense pour ma part que, effectivement, le Gouvernement tiendra ses engagements. Simplement, il ne sait pas du tout ce que le Conseil constitutionnel fera des quatre départements qui n’entrent pas dans le « tunnel ».
Or, si l’on en juge par ce qui s’est passé précisément au moment de la réduction de deux à un du nombre minimal de députés par département, il y a tout de même des risques plus que sérieux – c’est d’ailleurs l’argument que j’avais développé en défendant la question préalable – que cette partie du tableau soit annulée.
Alors, le Gouvernement, la mort dans l’âme, bien sûr – mais c’est encore à l’âme que la mort fait le moins mal –, se résoudra à modifier le tableau, et vous n’aurez pas vos quinze conseillers territoriaux.
Je le déplore, mais c’est la technique utilisée qui rend presque inévitable cette conclusion !
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 481 rectifié, présenté par M. Collin, Mmes Escoffier et Laborde et MM. Milhau, Vall, Alfonsi et Vendasi, est ainsi libellé :
Avant l'article 1er B, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Par dérogation aux dispositions de l'article L. 192 du code électoral, le mandat des conseillers généraux élus en mars 2004 expire en mars 2014.
La parole est à Mme Anne-Marie Escoffier.
Dans le droit fil de l’intervention de notre collègue M. Portelli, qui expliquait tout à l’heure que les conseillers territoriaux, en tout état de cause, ne verraient le jour qu’en 2014, nous proposons que le mandat des conseillers généraux élus en 2004 puisse être prolongé jusqu’en 2014.
Notre seul souci est la cohérence, et nous nous situons d’ailleurs dans la continuité des positions que nous avions déjà défendues à l'occasion de l’examen d’un précédent projet de loi qui organisait la concomitance des renouvellements des conseils généraux et des conseils régionaux, en refusant que les conseillers généraux qui seraient élus en 2011 ne le soient que pour trois ans.
Il s’agit là, me semble-t-il, d’une mesure de bon sens et, qui plus est, d’une mesure d’économie, puisqu’elle permettrait d’éviter les dépenses liées à l’organisation d’élections.
Cet amendement est contraire à la loi que nous avons déjà votée et qui est publiée. Dès lors, la commission des lois ne peut pas se déjuger et émet un avis défavorable.
Même avis, monsieur le président : l’amendement est contraire à la loi organisant la concomitance des renouvellements des conseils généraux et des conseils régionaux.
Il y a pourtant des lois qui sont publiées mais qui ne sont pas appliquées, non ?
Au huitième alinéa de l’article L. 210-1 du code électoral, le taux : « 10 % » est remplacé par le taux : « 12, 5 % ».
Monsieur le président, cette intervention vaudra également défense de l’amendement n° 86.
L’article 1er B limite la possibilité d’accéder au second tour des élections cantonales aux seuls candidats ayant obtenu lors du premier tour un nombre de suffrages au moins égal à 12, 5 % des électeurs inscrits.
Les sénateurs du groupe CRC-SPG proposent de supprimer cet article, qui a été introduit par l’Assemblée nationale sur l’initiative de M. Perben, rapporteur, avec, bien entendu, l’accord du Gouvernement.
Cet article doit être supprimé d’abord pour son inconstitutionnalité. Il s’agit en effet, de toute évidence, d’un cavalier législatif, car il ne respecte pas le premier alinéa de l’article 45 de la Constitution, pourtant modifié en juillet 2008 par l’actuelle majorité, qui dispose notamment que « tout amendement est recevable en première lecture dès lors qu’il présente un lien, même indirect, avec le texte déposé ou transmis. »
Or le rehaussement du seuil pour l’élection des conseillers généraux en 2011 n’a rien à voir, directement ou indirectement, avec la création du conseiller territorial ni même avec son mode d’élection.
Alors que nous discutons d’un chapitre consacré aux futurs conseillers territoriaux, on nous demande d’adopter un article d’application immédiate qui ne concerne que l’élection des conseillers généraux, et cela dès 2011, avant même toutes les autres dispositions du projet de loi !
La lecture du rapport de notre collègue M. Courtois est pour le moins édifiante. Vous cherchez, monsieur le rapporteur, à justifier ce cavalier en arguant d’un lien avec le futur conseiller territorial, alors que le mode d’élection de ce dernier n’est pas encore décidé, et loin s’en faut, depuis le vote de la nuit dernière par lequel nous avons repoussé les propositions du Gouvernement contenues dans l’amendement n° 576 rectifié !
La réalité, c’est que l’UMP est très inquiète du prochain renouvellement des conseils généraux, en mars 2011, et qu’elle craint un vote sanction encore amplifié par rapport aux récentes élections régionales. Elle a d’ailleurs raison de le craindre !
Le Gouvernement et l’UMP redoutent les triangulaires et les conséquences d’une montée du Front national qu’ils ont eux-mêmes favorisée par un discours sécuritaire agressif, lié à une situation sociale dégradée et à une désespérance généralisée.
La solution magique retenue consiste donc à relever les seuils déterminant le maintien des candidats au second tour, ce qui, inévitablement, et vous le savez, portera un coup au pluralisme dans son ensemble.
C’est la raison pour laquelle, mes chers collègues, nous vous proposons de maintenir le seuil actuel, qui au demeurant devrait même être abaissé, en rejetant cet article « cavalier ».
Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG.
Je suis saisi de quatre amendements identiques.
L'amendement n° 86 est présenté par Mmes Borvo Cohen-Seat, Assassi, Mathon-Poinat et Beaufils, M. Voguet et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du Parti de gauche.
L'amendement n° 328 est présenté par MM. Collombat, Sueur, Peyronnet, Bel, Anziani, Bérit-Débat et Berthou, Mme Blondin, MM. Botrel et Boutant, Mmes Bonnefoy, Bourzai et Bricq, M. Caffet, Mme Cartron, MM. Daunis, Daudigny et Domeizel, Mme Durrieu, MM. Fichet, Frimat, Guillaume et Jeannerot, Mmes Khiari et Klès, MM. Krattinger, Le Menn, Lozach, Marc, Mauroy, Mazuir, Miquel et Mirassou, Mme Nicoux, MM. Patriat, Povinelli, Rebsamen, Repentin, Ries, Signé, Teston et Teulade, Mme Voynet et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
L'amendement n° 482 rectifié est présenté par MM. Collin, Alfonsi, Chevènement et Detcheverry, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Mézard, Milhau, Tropeano, Vall et Vendasi.
L'amendement n° 552 est présenté par M. About et les membres du groupe Union centriste.
Ces quatre amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
L'amendement n° 86 a été précédemment défendu.
La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, pour présenter l’amendement n° 328.
Même si le Gouvernement a fait le choix d’étendre à la région le mode de scrutin actuellement en vigueur pour les départements, pourquoi relever le seuil actuel de 10 % à 12, 5 % ?
J’ai bien une petite idée…
Je pense que c’est une forme de compromis entre ceux qui voulaient en rester là et ceux qui voulaient transformer les élections cantonales en élection présidentielle. On a même entendu des déclarations assez bouffonnes sur le sujet, certains membres de la majorité expliquant que le mode de scrutin pour l’élection présidentielle était si merveilleux qu’il fallait l’étendre, apothéose du conseiller territorial, aux élections cantonales !
Nous ne pensons pas que ce soit une bonne idée ni que cela ajoute quoi que ce soit à la décision qui a été prise d’élargir l’usage du scrutin actuel. Déjà, le mode de scrutin majoritaire ne permet pas une très grande expression de la diversité ; si, en plus, nous plaçons la barre trop haut pour le second tour, cette expression sera tout simplement impossible.
Pouvoir se maintenir au second tour, ou au moins pouvoir dire qu’elles le feront, c’est, pour les petites formations, une façon d’exister. Aussi, même si cela n’est pas forcément l’idéal pour mon parti, je crois qu’il faut conserver la possibilité de cette expression.
Nous souhaitons donc, chers collègues, que vous reveniez sur cette décision.
La parole est à M. Nicolas Alfonsi, pour présenter l'amendement n° 482 rectifié.
Cet amendement de suppression est totalement justifié dans la mesure où l’article 1er B ne repose en réalité sur aucune cause, quand bien même un mode de scrutin aurait été adopté !
Je rappelle que le présent projet de loi ne recevra d’application qu’en 2014. Dès lors, pour quels motifs retiendrait-on le seuil de 12, 5 % pour l’organisation des élections cantonales de 2011 ?
Mais n’y aurait-il pas d’effet mécanique que rien, encore une fois, ne justifierait, non pas au nom du principe d’égalité, mais au nom du simple bon sens, un dispositif qui se retrouve plaqué ici à la suite du vote intervenu par l'Assemblée nationale. Et je passe sur les considérations subalternes qui peuvent éventuellement inciter la majorité à considérer que ce seuil lui sera plus favorable…
C’est pourquoi nous demandons la suppression de cet article.
L’article 1er B a été introduit en séance publique par l'Assemblée nationale à la suite de l’adoption d’un amendement de M. Perben. Je m’interroge sur la raison qui a conduit les députés à adopter cette modification, car, même si celle-ci doit s’appliquer à partir de 2014 pour l’élection des conseillers territoriaux, elle a d’abord vocation à s’appliquer dès les prochaines élections cantonales.
Pourquoi avoir proposé une telle disposition dans un projet de loi de réforme des collectivités territoriales et, plus précisément, au sein d’un chapitre consacré aux conseillers territoriaux, alors qu’elle concerne bel bien les conseillers généraux, singulièrement ceux qui seront élus en 2011 lors des prochaines élections cantonales ?
Nous ne sommes d’accord ni sur le fond ni sur la forme.
Sur le fond, nous sommes opposés à cet article, car ce nouveau seuil ne nous paraît pas pertinent ; sur la forme, ses dispositions n’ont pas leur place dans le texte que nous examinons aujourd'hui.
C’est pourquoi je vous demande, mes chers collègues, d’adopter notre amendement de suppression afin de maintenir le seuil actuel.
La commission des lois a émis un avis favorable sur la disposition visant à fixer un seuil de 12, 5 % introduite, sur l’initiative de M. Perben, par l'Assemblée nationale. En l’espèce, la commission n’envisage pas de changer d’avis et émet donc un avis défavorable sur ces quatre amendements identiques de suppression.
Le Gouvernement a le même avis que la commission.
Mes chers collègues, vous aurez sans doute maintenant compris notre refus de créer le conseiller territorial ; après que le président de notre groupe l’a rappelée tout à l'heure, je ne reviendrai pas sur la geste, sur l’épopée du mode de scrutin pour l’élection du conseiller territorial.
Toutefois, à la suite des propos qui viennent d’être tenus, je tiens à attirer votre attention sur un point qui me semble extrêmement grave.
En dehors de toute autre considération, la manière dont nous est présentée cette disposition en fait typiquement un cavalier !
Cet article, loin d’être l’expression d’un appel au bon sens des parlementaires pour faciliter, ici ou là, la vie de nos concitoyens ou la bonne gestion des élus, a été introduit par simple opportunité politicienne, pour répondre à des intérêts strictement partisans. Voilà qui est profondément choquant.
Aucune autre explication réelle ne peut être avancée pour justifier un tel relèvement du seuil pour le second tour, un tel alignement d’un mode de scrutin local sur un mode de scrutin national.
Nous tenons beaucoup à la suppression de l’article 1er B.
Ici, c’est le bal des hypocrites !
À la lecture du rapport de notre excellent rapporteur, on apprend que cet article a été introduit par l'Assemblée nationale sur l’initiative de M. Perben, indiquant que, avec un tel seuil – applicable dès les cantonales de 2011, et on se demande bien pourquoi ! –, « la probabilité est forte que la personne élue obtienne finalement plus de 50 % des suffrages exprimés ».
Effectivement, une fois que l’on aura éliminé tous les candidats susceptibles de se maintenir au second tour à l’exception de deux – et pourquoi pas, demain, un seul ? –, il est évident que le vainqueur sera élu avec plus de 50 % des suffrages exprimés !
En réalité, il s’agit d’empêcher certains partis d’être qualifiés pour le second tour !
Chers collègues de l’opposition, vous avez balayé d’un revers de main notre sous-amendement visant à abaisser à 8 % le seuil de maintien au second tour du mode de scrutin uninominal majoritaire ! Je regrette que Mme Blandin ne soit pas présente parmi nous en cet instant, car je me serais fait un plaisir de répondre aux propos tout à fait désagréables et injustes qu’elle a tenus à l’égard de notre groupe, …
… alors que ce seuil de 8° % aurait permis de maintenir la diversité de la vie démocratique dans la République.
Si les amendements de suppression de cet article ne sont pas adoptés, cette diversité sera balayée ! Voilà qui contentera nos collègues socialistes, ainsi que ceux de l’UMP, qui se retrouveront entre eux ! Mais je ne sais pas si c’est un bien pour notre vie démocratique !
Chers collègues, certes, nous ne pouvons pas être tous d’accord en permanence, mais ici, tout de même… Aujourd'hui, avec des seuils bas, quatre, voire cinq candidats peuvent rester en lice au second tour.
Madame, lorsque vous avez la parole, je vous laisse parler ! Ne m’interrompez pas ! Je peux avoir un point de vue différent du vôtre, tout de même !
Pour ma part, j’estime qu’il ne faut pas qu’un trop grand nombre de candidats restent dans la course pour le second tour ! L’élu doit recueillir 50 % des suffrages exprimés pour avoir, sur son territoire, une vraie légitimité.
Protestations sur les travées du groupe CRC-SPG.
C’est mon avis, chers collègues ! Certes, ce n’est pas le vôtre, mais permettez à la majorité d’avoir des positions qui sont tout aussi justifiables que les vôtres !
Applaudissements sur quelques travées de l ’ UMP.
À la suite de l’intervention de notre collègue Jacques Mézard, je tiens à préciser que le groupe socialiste a également déposé un amendement de suppression de l’article 1er B et a demandé un scrutin public. Nous n’avons donc aucunement l’intention de fortifier un quelconque duopole ! Nous sommes, nous aussi, très attachés à la suppression de cet article.
Nous raisonnons en chiffres, en pourcentages, sans jamais tenir compte de la fluidité du corps électoral, notamment de l’abstention.
Or, pour l’expression d’une sensibilité politique, un seuil de 10 % n’a pas la même réalité lorsque le taux de participation est de 80 % ou de 40 % ! Il faut, me semble-t-il, prendre en compte cet élément.
M. Christian Cointat. Pour ma part, je suis très attaché au scrutin majoritaire, qui a pour but, comme son nom l’indique, de dégager une majorité. Or, et je suis désolé de devoir vous le dire, chers collègues, les triangulaires et les quadrangulaires dégagent non pas des majorités, mais des minorités !
Rires sur les travées du groupe socialiste.
Personnellement, j’aurais souhaité que seuls les deux candidats arrivés en tête puissent se maintenir au second tour.
M. Christian Cointat. C’est ce que j’aurais souhaité ! Mais on a fixé un seuil. De grâce, ne l’abaissez pas, sinon le scrutin majoritaire n’aura, là, plus aucun sens !
Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.
Je profite de cette occasion pour dire que j’ai toujours été surpris que certains partis politiques fanfaronnent quand leur candidat n’a réussi à se faire élire qu’avec, quelquefois, 20 % ou 30 % des inscrits du pays, du département ou du canton ! Quelle légitimité un élu peut-il avoir lorsqu’il ne représente que 20 % ou 25 % des inscrits ? Aucune !
À cet égard, je pense que nous aurions intérêt à conduire ultérieurement une réflexion sur nos modes de scrutin afin de mieux prendre en compte les abstentionnistes. En effet, lorsque les abstentionnistes sont nombreux, c’est qu’ils ont un message à délivrer ! Quand un candidat n’a pas réussi à recueillir un minimum de voix par rapport au nombre d’électeurs inscrits, il n’a, me semble-t-il, aucune légitimité pour siéger dans une collectivité ou une institution, quelle qu’elle soit !
Certes, il est plus facile de le dire que de mettre en œuvre de nouvelles règles, mais ce que nous sommes en train de vivre en ce moment met en cause les fondements de notre démocratie. Cela exige de notre part que nous engagions, tous partis politiques confondus, une réflexion sur cette question.
L’article 1er B ne règle pas le problème de l’abstentionnisme, qui tend à croître de scrutin en scrutin. C’est un véritable problème.
Je partage assez les propos de M. Vasselle. C’est un fait, le scrutin uninominal à deux tours nuit au pluralisme. C’est pourquoi nous sommes favorables à la proportionnelle. Empêcher ou limiter le pluralisme n’est tout simplement pas une bonne chose pour la démocratie.
Chers collègues, l’un d’entre vous a-t-il jamais refusé d’être élu à l’issue d’une partielle marquée par un taux d’abstention de 80 % ?
À mes yeux, ce qui est grave, c’est qu’il y ait 80 % d’abstention ! Mais ne nous dites pas que les candidats qui ne sont pas élus avec 60 % des voix sont mal élus ! Sinon, nombreux sont ceux qui, parmi vous, auraient dû depuis longtemps renoncer à être élus !
Il est tout de même étonnant que ceux de nos collègues qui, dans cet hémicycle, faisaient il n’y a pas si longtemps l’éloge du mode de scrutin majoritaire à un tour s’offusquent aujourd’hui qu’un candidat soit élu sans avoir atteint la majorité absolue !
M. Pierre-Yves Collombat. Comme mon collègue l’a souligné tout à l'heure, on ne règle pas le problème en empêchant des candidats de se présenter et, de ce fait, en interdisant aux électeurs de voter pour les candidats qui répondraient à leurs attentes.
Protestations continues sur les travées du groupe CRC-SPG.
Quand mes collègues en auront terminé avec ce pugilat interne, je pourrai redire, après M. Vasselle que, lorsque l’électeur ne trouve pas chaussure à son pied, il s’abstient ! Pour l’élection présidentielle, cela a un sens d’éviter que plus de deux candidats ne se présentent au second tour. Mes chers collègues, l’inflation de candidats au premier tour de la dernière élection présidentielle a été telle que le scrutin s’en est trouvé complètement obscurci !
Faites preuve de sagesse et accordez une certaine respiration au mode de scrutin proposé, en maintenant le seuil actuel de 10 % !
Madame Borvo Cohen-Seat, vous n’avez sans doute pas dû comprendre ce qu’a dit tout à l'heure notre collègue Alain Vasselle.
Il n’a pas dit qu’il voterait pour les amendements identiques de suppression : notre collègue vote contre, si j’ai bien compris !
Je mets aux voix les amendements identiques n° 86 de Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, 328 de M. Pierre-Yves Collombat, 482 rectifié de M. Yvon Collin, et 552 de M. Nicolas About, tendant à supprimer l’article 1er B.
J’ai été saisi de deux demandes de scrutin public émanant, l'une, du groupe CRC-SPG, l’autre, du groupe socialiste.
Je rappelle que la commission a émis un avis défavorable, de même que le Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
Le scrutin a lieu.
Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
Il est procédé au dépouillement du scrutin.
Voici le résultat du scrutin n° 257 :
Le Sénat a adopté.
En conséquence, l'article 1er B est supprimé.
Applaudissements sur les travées du groupe CRC -SPG, du groupe socialiste, du RDSE et de l ’ Union centriste.
C’est un troisième camouflet pour le Gouvernement ! Celui-ci va-t-il enfin comprendre qu’il faut arrêter ?
Attendez le vote de l’Assemblée nationale !
Monsieur le secrétaire d’État, il faut arrêter les frais ! De camouflet en camouflet, il ne restera rien du texte !
Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 244 rectifié, présenté par MM. Pointereau, Cornu, Pinton, Laurent, Doublet et B. Fournier, Mme Rozier et MM. Lecerf, Trillard, Mayet et Pierre, est ainsi libellé :
Après l'article 1er B, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La délimitation des cantons peut dépasser les limites des circonscriptions législatives afin de tenir compte des spécificités territoriales.
L'amendement n° 245 rectifié, présenté par MM. Pointereau, Cornu, Lecerf, Pinton, Mayet, Laurent, Doublet et Pierre, Mme Rozier et MM. B. Fournier et Trillard, est ainsi libellé :
Après l'article 1er B, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La délimitation des cantons peut dépasser les limites des circonscriptions législatives afin de tenir compte des spécificités territoriales, dans la limite de 10 % de la population de la circonscription législative.
La parole est à M. Rémy Pointereau, pour présenter ces deux amendements.
Les amendements n° 244 rectifié et 245 rectifié visent à mieux répondre aux réalités administratives des bassins de vie qui possèdent une spécificité rurale ou de montagne.
L’élection des conseillers territoriaux étant complètement différente de l’élection des députés, elle doit refléter les réalités des « territoires ».
Par ailleurs, cet amendement est parfaitement cohérent avec la position de la commission des lois. En effet, à l’alinéa 3 de l’article 1er AA, il est précisé que le territoire « est une circonscription électorale dont les communes constituent un espace géographique, économique et social homogène ».
En inscrivant dans la loi la possibilité de dépasser les limites des circonscriptions, nous pourrons obtenir un découpage beaucoup plus cohérent.
On me dit toutefois que le Conseil constitutionnel ne serait pas forcément d’accord avec une telle proposition. Je sais également que l’Assemblée nationale y est farouchement opposée.
Selon moi, le Sénat doit ici jouer son rôle de représentant des collectivités locales. À ce titre, je regrette que nous n’ayons pas pu trouver un accord sur le mode de scrutin pour l’élection du conseiller territorial, car, finalement, c’est l’Assemblée nationale qui va maintenant prendre la main !
Marques d’approbation sur les travées de l ’ UMP.
Monsieur Pointereau, l’article 2 de la loi n° 2009-39 du 13 janvier 2009 relative à la commission prévue à l'article 25 de la Constitution et à l'élection des députés, qui habilitait le Gouvernement à légiférer par ordonnance pour délimiter les circonscriptions législatives, prévoit que tout canton dont la population est inférieure à 40 000 habitants est « entièrement compris dans la même circonscription pour l’élection d’un député d’un département ». Par symétrie, il paraît nécessaire de prévoir que les limites des futurs territoires respectent celles des circonscriptions législatives.
Par conséquent, la commission des lois a émis un avis défavorable sur ces deux amendements.
La parole est à M. Gérard Bailly, pour explication de vote sur l'amendement n° 244 rectifié.
Malgré les explications fournies, je suis un peu déçu de la position défendue par la commission et par le Gouvernement.
Monsieur le rapporteur, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, je prends l’exemple de deux communes de mon département, qui, depuis 1898, soit cent vingt-deux ans, demandent à changer de canton. Je peux vous montrer leurs premières délibérations. Elles n’ont jamais été autorisées à le faire, et ce malgré l’unanimité des conseils municipaux et des maires des communes du canton de départ comme du canton d’accueil.
Ces deux communes appartiennent à une communauté de communes, laquelle, pour la grande majorité des communes qui la composent, relève d’une circonscription législative différente.
Étant précisé qu’une telle décision ne concernerait que deux cent quarante habitants, il me semble absurde que l’opération soit impossible ! On frise le ridicule !
Pouvez-vous au moins, monsieur le secrétaire d’État, prendre l’engagement que le Gouvernement, dans les années qui viennent, examinera ce type de propositions, dont l’adoption n’introduirait qu’une modification minime des limites des circonscriptions ? Pour ne pas faire évoluer ces limites, on avait auparavant opposé la loi, qui interdit cette modification quand la population du canton que la ou les communes souhaitent quitter est moins importante que la population moyenne des cantons du département. On ne se souciait guère du fait que le canton d’accueil avait une population encore plus faible ! Le souhait de ces communes allait pourtant dans le sens d’un meilleur équilibre démographique.
Monsieur le secrétaire d’État, il y a longtemps que nous travaillons sur ce dossier. Je ne voudrais pas que la situation actuelle perdure encore des décennies, voire des siècles ! Je le répète, ces deux communes, partie intégrante d’une communauté de communes dont elles partagent les intérêts, sont bien éloignées du chef-lieu de leur canton. Il existe d’ailleurs d’autres cas similaires.
Pour cette raison, je souhaite que des solutions soient trouvées. Il n’est en effet pas possible de laisser perdurer une telle absurdité, laquelle, d’ailleurs, ne concerne qu’une infime partie de la population.
M. Alain Marleix, secrétaire d'État. Monsieur le sénateur, nous avons eu l’occasion de régler des cas marginaux similaires, les populations y attachant une certaine importance. Ces modifications ont concerné, si mes souvenirs sont exacts, de petites communes de l’Isère, de la Haute-Saône et de l’Yonne. Malheureusement, votre problème ne nous a pas été signalé.
M. Gérard Bailly s’exclame.
Ces questions relèvent du domaine législatif et ne peuvent être réglées au cas par cas. Je vous propose donc de nous retrouver lors du prochain découpage électoral. Pour ma part, je souhaite que l’on n’attende pas vingt-six ans.
M. Bernard Frimat s’exclame.
Il s’agit tout simplement de respecter la loi, qui prévoit que ce découpage doit intervenir à l’issue de deux recensements successifs. On pourrait d’ailleurs accélérer encore la procédure, les recensements étant désormais permanents, depuis la loi Jospin-Vaillant de 2002. La carte électorale serait ainsi mise à jour de façon beaucoup plus régulière, par exemple tous les cinq ans, ce qui éviterait le travail de Romains que nous avons dû assumer, la carte n’ayant pas été révisée depuis 1986.
M. Bernard Frimat s’exclame de nouveau.
Le Gouvernement s’engage donc – ce n’est certainement pas moi qui m’en occuperai ! –, à régler ces cas marginaux, qui empoisonnent souvent l’atmosphère locale.
Quoi qu’il en soit, monsieur Bailly, je regrette que vous ne nous ayez pas présenté votre dossier en temps utile. J’aurais essayé de vous donner satisfaction.
Monsieur le secrétaire d’État, vous venez d’affirmer que cette question relevait de la loi. Cela tombe bien, car, autant que je sache, justement, le législateur, c’est nous ! Or je souhaite que la loi évolue, pour mettre fin aux aberrations que l’on peut observer dans les zones de montagne.
Permettez-moi de vous donner, à mon tour, un exemple. Je connais un canton de mille cinquante habitants qui possède deux communautés de communes, tournées chacune vers deux circonscriptions différentes.
Or, si tout le canton doit être compris dans une seule et même circonscription, certaines communes de montagne se retrouveront à plus de soixante kilomètres de leur chef-lieu de canton. Cette situation, aberrante – je suis désolé d’avoir à vous le dire –, concerne à peine trois cents habitants.
Aujourd’hui, nous avons justement l’occasion de changer la loi. La proposition d’encadrer cette évolution dans la limite de 10 % de la population de la circonscription législative me paraît tout à fait raisonnable.
Bien entendu, il n’est pas souhaitable de modifier profondément les circonscriptions, ce qui reviendrait à transférer des populations nombreuses d’un canton à un autre.
Cette évolution est importante pour les zones de montagne ; elle relève d’ailleurs du simple bon sens.
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Mes chers collègues, ce n’est pas ce soir que nous réglerons ces problèmes locaux, si intéressants soient-ils ! Ce n’est même plus du travail de commission, ce sont des discussions de sous-préfecture !
Protestations sur diverses travées.
Lorsque nous avons procédé au redécoupage des circonscriptions législatives, nous avons dû veiller – c’était une règle posée par le Conseil constitutionnel – à ce qu’aucun canton ne soit partagé entre deux circonscriptions.
Nous devons aussi respecter cette exigence pour la délimitation des territoires.
Comme vous, j’aurais préféré que les députés laissent de côté cette question, qui aurait dû être débattue sereinement lors de l’examen du projet de loi n° 61 relatif à l’élection des conseillers territoriaux et au renforcement de la démocratie locale. Le présent projet de loi a vocation à proposer une nouvelle organisation des collectivités territoriales.
Cela dit, je reconnais que des situations exceptionnelles peuvent se présenter. D’ailleurs, je rappelle que nous avons accepté de fractionner des cantons qui comptaient plus de 40 000 habitants. Soyez donc rassurés, mes chers collègues : les cantons de 1 000 habitants auront de toute façon disparu !
En tout état de cause, quand bien même le conseiller territorial n’aurait pas vu le jour, il eût été nécessaire de revoir la carte des cantons, car il n’aurait pas été envisageable que subsistent entre eux de telles disparités démographiques.
Franchement, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'État, je regrette que l’Assemblée nationale ait introduit cette disposition, source de grandes difficultés.
Peu importe, mais si le Gouvernement est tombé dans ce piège, c’est encore pire !
Il aurait fallu conserver au présent projet de loi sa vocation organisationnelle plutôt que d’y insérer des dispositions électorales.
Mes chers collègues, dans la mesure où le projet de loi n° 61 a été déposé sur le bureau du Sénat, rien n’interdit à la commission des lois d’entamer ses travaux et de préparer la rédaction de son rapport. À moins que le texte que nous examinons aujourd’hui ne soit adopté de façon définitive antérieurement, rien ne nous empêchera de revenir sur la question qui nous occupe présentement lorsque nous examinerons le projet de loi n° 61.
La situation est assez cocasse.
Si mon amendement n° 10 rectifié bis avait été adopté, je comprendrais votre raisonnement, monsieur le président de la commission des lois, mais nous avons maintenu à la fois le canton en tant qu’entité administrative et le territoire. Dans la mesure où il n’est pas question de celui-ci dans la loi, je ne vois pas comment le Conseil constitutionnel pourrait interdire qu’un territoire soit partagé entre plusieurs circonscriptions !
M. Bruno Sido. Non, ce n’est pas pareil ! La preuve en est, monsieur le président de la commission des lois, que vous avez tenu à maintenir le canton sous sa forme actuelle, tout en créant le territoire, nouvelle couche du millefeuille. Par conséquent, rien n’empêche qu’un territoire s’étende sur deux circonscriptions législatives : CQFD !
Applaudissements sur certaines travées de l ’ UMP.
Monsieur Pointereau, les amendements n° 244 rectifié et 245 rectifié sont-ils maintenus ?
Monsieur le président, je retire l’amendement n° 244 rectifié, mais, sous la pression bienveillante de mes amis, je maintiens l’amendement n° 245 rectifié, qui, je le rappelle, vise à prévoir que les limites des cantons puissent dépasser celles des circonscriptions législatives, afin de tenir compte des spécificités territoriales, à concurrence de 10 % de la population de la circonscription législative au maximum.
L'amendement n° 244 rectifié est retiré.
La parole est à M. Jean-Pierre Raffarin, pour explication de vote sur l’amendement n° 245 rectifié.
Pour ma part, je me bats pour les sous-préfectures !
Nous sommes en train d’instituer des territoires, appelés à remplacer les cantons, dont la création est antérieure à la République. Cet échelon territorial, ressort d’élection du nouveau conseiller, a vocation à durer. C’est une entité d’avenir, qu’il ne convient certainement pas de construire selon les seules règles du passé : il faut aussi tenir compte des bassins de vie, de l’organisation socioéconomique, etc. Évitons donc de nous imposer trop de contraintes, par exemple celle de ne pas dépasser les limites des circonscriptions législatives. Le territoire doit correspondre à une réalité humaine plutôt qu’administrative. J’admets que l’on cherche à respecter autant que possible les limites des circonscriptions législatives, mais gardons-nous des contraintes excessives !
Très bien ! et applaudissements sur les travées de l ’ UMP.
L'amendement est adopté.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 1er B.
M. Bernard Frimat remplace M. Jean-Claude Gaudin au fauteuil de la présidence.
L'amendement n° 246 rectifié, présenté par MM. Pointereau, Cornu, Doligé, Lecerf, Mayet, Pinton, Laurent et Doublet, Mme Rozier et MM. B. Fournier, Pierre et Trillard, est ainsi libellé :
Après l'article 1er B, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Par dérogation à l'article L. 221 du code électoral, le remplaçant d'un conseiller territorial, de sexe opposé à celui-ci, est appelé à le remplacer si son siège devient vacant pour quelque cause que ce soit.
La parole est à M. Rémy Pointereau.
Cet amendement vise à réintroduire dans le projet de loi une disposition qu’avait adoptée l'Assemblée nationale, sur proposition du Gouvernement.
Pour faciliter l'accès du suppléant d'un conseiller territorial au conseil général et au conseil régional, il est proposé d'étendre le cas où celui-ci devient membre de ces deux assemblées à toutes les hypothèses de démission du titulaire, ce qui favorisera la parité.
Cet amendement est effectivement de nature à favoriser la parité et répond à une demande des délégations aux droits des femmes des deux assemblées et de l’Observatoire de la parité entre les femmes et les hommes.
La commission émet un avis favorable.
Avant la séance, j’ai retiré l’amendement n° 559, qui était identique à l’amendement n° 246 rectifié, au profit de l’amendement n° 263 rectifié ter, parce que ce dernier codifie la disposition et la rend ainsi immédiatement applicable. Je pense que M. Pointereau devrait également retirer l’amendement n° 246 rectifié au bénéfice de l’amendement n° 263 rectifié ter.
Monsieur le président de la commission des lois, peut-on appeler l’amendement n° 263 rectifié ter en discussion commune avec l’amendement n° 246 rectifié ?
L’amendement n° 263 rectifié ter, présenté par MM. Doligé, Sido, Pointereau, du Luart, Pinton et Leroy, Mme Rozier et M. de Montgolfier, est ainsi libellé :
Après l'article 1er B, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au premier alinéa de l'article L. 221 du code électoral, après les mots : « démission en application des articles L. 46-1, L. 46-2, L.O. 151 ou L.O. 151-1 du présent code », sont insérés les mots : « ou pour tout autre motif ».
La parole est à M. Rémy Pointereau.
La commission émet un avis favorable sur cet amendement, qui lui semble préférable à l’amendement n° 246 rectifié, car il codifie la disposition. C’est pourquoi elle suggère à M. Pointereau de retirer ce dernier.
Le Gouvernement est très favorable à l’amendement n° 263 rectifié ter.
Il eût mieux valu retirer l’amendement n° 246 rectifié. Cela n’ayant pas été fait, la commission demande que l’amendement n° 263 rectifié ter soit mis aux voix par priorité.
Quel est l’avis du Gouvernement sur cette demande de priorité formulée par la commission ?
La priorité est de droit.
Je vais donc mettre aux voix, par priorité, l’amendement n° 263 rectifié ter.
La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, pour explication de vote.
Mes chers collègues, si vous aviez voulu maintenir la situation actuelle en matière de parité, vous n’auriez pas modifié le dispositif ; si vous aviez voulu l’améliorer, vous n’auriez pas proposé d’étendre aux élections régionales le mode de scrutin en vigueur pour l’élection des conseillers généraux. Parité, parité chérie, que de turpitudes on commet en ton nom ! Si vous n’avez trouvé que ce moyen pour favoriser la parité, c’est bien de turpitudes qu’il s’agit !
Dans votre esprit, un mâle, vieux notable ou jeune loup, se présentera, puis il laissera un jour son siège à sa suppléante, qui aura eu le temps d’apprendre son métier d’élue…
Cela n’a rigoureusement aucun sens ! Que l’on présente d’emblée des femmes ! Lors des élections régionales en Provence-Alpes-Côte d’Azur, tous les députés et sénateurs de l’UMP se sont présentés, avant de démissionner à peine élus ! À quoi cela ressemble-t-il ?
Je m’étonne que cette façon un peu particulière et condescendante de considérer les femmes ne vous choque pas, ma chère collègue. En tout cas, c’est une turpitude !
Mme Évelyne Didier. En préambule, je tiens à faire remarquer que, en dépit de ce que pourraient donner à penser les échanges auxquels nous assistons, le mode d’élection des conseillers territoriaux n’a pas encore été décidé.
Marques d’approbation sur les travées du groupe socialiste.
Honnêtement, oser affirmer qu’il s’agit ici de favoriser l’élection des femmes, …
Je ne peux l’accepter ! Nous sommes peu nombreuses à être conseillères générales, et même maires : pour une femme, il n’est pas simple d’accéder à de telles fonctions.
Dans 90 % des cas, les femmes seront suppléantes. Ces messieurs s’en gaussent et trouvent cette situation normale ! En prime, les titulaires, qui auront fort à faire pour exercer leur double mandat départemental et régional, chargeront les suppléantes de recevoir les personnes qu’ils n’ont pas envie de voir, d’effectuer les déplacements qu’ils jugeront d’importance secondaire !
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.
M. Alain Vasselle. Madame Didier, je suis effaré des propos que vous venez de tenir.
Exclamations sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.
M. Alain Vasselle. Madame, considérez-vous que les femmes ne sont pas capables de se faire élire avec un scrutin uninominal à deux tours ?
Protestations sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.
C’est vraiment dévaloriser la femme que de considérer que seul le scrutin de liste à la proportionnelle peut lui permettre d’accéder à un mandat politique !
Il s’agit ici de mettre le pied à l’étrier au suppléant, qui peut être aussi bien un homme qu’une femme, car le titulaire peut tout à fait être une femme ! Lorsque le titulaire abandonne sa fonction, c’est son suppléant qui le remplace, quel que soit son sexe !
Pourquoi stigmatiser la situation des femmes au regard de cette disposition, qui est excellente ! Nous aurions dû d'ailleurs l’introduire dans la Constitution, au lieu d’y inscrire les règles relatives à la parité, qui sont dévalorisantes pour les femmes.
Exclamations indignées sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.
Des femmes pensent comme moi sur ce point ! Je le répète, cette disposition va dans le bon sens, ce qui m’amène d'ailleurs à déposer un amendement tendant à l’étendre à l’élection des députés !
Vous ne pouvez déposer qu’un sous-amendement à ce stade, monsieur Vasselle. Pour l’heure, le service de la séance n’a rien reçu…
La parole est à Mme Dominique Voynet, pour explication de vote.
Mme Dominique Voynet. Nous avons eu une discussion similaire lorsque fut adopté le mode de scrutin pour les élections cantonales. Nous avions alors déjà pu constater que cette question suscitait des rires gras et de la gêne.
Protestations sur les travées de l ’ UMP.
Disons-le sans détour : dans notre pays comme dans beaucoup d’autres, le pouvoir au plus haut niveau s’incarne toujours au masculin, et il reste difficile d’imaginer qu’une femme puisse réussir en politique si elle n’est pas adoubée par un homme !
(Exclamations sur les travées de l ’ UMP) ; un sanglier chenu rafraîchira son image grâce à une jeune pousse, dont la seule perspective sera que son mentor abandonne son mandat pour cause de cumul ou, plus souvent, qu’il décède.
Vives protestations sur les travées de l ’ UMP.
Avec la disposition qui nous occupe, deux scénarios sont envisageables : un jeune homme ambitieux, mais inexpérimenté, dont les dents rayent le parquet, sera coaché par une femme maternante, qui consacrera toute son énergie de militante à faire le café, à tenir des permanences et à répondre au courrier §
Ce mode d’élection mortuaire est pathétique, et nous devrions avoir honte d’en être encore là ! Les femmes doivent pouvoir bénéficier de modes de scrutin leur permettant de se battre d’égal à égal avec les hommes. La parité ne cesse de régresser, d’un mode de scrutin à l’autre, d’une élection à l’autre, avec le recul de la proportionnelle aux sénatoriales, avec le choix d’un mode de scrutin indigne pour les élections au conseil général et, aujourd’hui, pour le conseiller territorial, dont les compétences, le ressort territorial et le mode d’élection n’ont même pas encore été fixés.
Voilà un exemple de la confusion et de la démagogie qui peuvent régner ici quand un texte de loi mal ficelé épuise à la fois ceux qui le défendent et ceux qui le combattent !
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC -SPG.
Mme Catherine Procaccia. Pour ma part, je me réjouis de cet amendement.
Marques de satisfaction sur les travées de l ’ UMP.
Nous réclamons depuis un certain nombre d’années l’adoption d’un tel dispositif, mais on nous a opposé jusqu’à présent qu’il n’était pas constitutionnel. Je suis heureuse qu’il n’en soit plus ainsi !
Par ailleurs, la participation aux élections cantonales partielles n’est en général que de 20 % environ, ce qui amène à mettre en doute la légitimité de la personne élue, qu’elle soit un homme ou une femme. Dans cette perspective aussi, il me paraît donc opportun d’adopter la disposition qui nous occupe.
Enfin, il faut voir la réalité telle qu’elle est. L’objet de cet amendement, madame Didier, est de favoriser non pas l’élection des femmes, mais leur accès aux fonctions électives. En effet, d’ordinaire, la démission d’un mandat débouche sur une élection partielle, et la suppléante n’est pas forcément désignée comme candidate ; cela peut être un homme. Grâce à cet amendement, un certain nombre de femmes pourront accéder à un mandat.
Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.
Au Sénat, en tout cas au sein du groupe UMP, chacun connaît mon attachement à la cause de l’accession des femmes aux postes de responsabilité. Cette disposition n’est pas la panacée, mais elle est positive et permettra de faire avancer les choses.
Bravo ! et applaudissements sur les travées de l ’ UMP.
Je souscris totalement aux propos de Catherine Procaccia, qui a très bien exprimé ma pensée. Pour ma part, je voterai sans états d’âme cet amendement.
Entendre des propos comme ceux que vient de tenir Mme Voynet ne donne pas envie de voter pour des femmes ! §
Si je vote cet amendement, c’est non seulement pour favoriser l’accès des femmes aux fonctions électives, mais aussi dans un souci de simplification.
En tout état de cause, nous devons conserver à notre débat une certaine sérénité. Je suis désolée de constater que certaines femmes tiennent parfois des propos peu inspirés sur un tel sujet. Restons calmes, et montrons l’exemple !
Très bien ! et applaudissements sur les travées de l ’ UMP.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Trois sénateurs du groupe UMP – deux hommes et une femme – nous ont affirmé que la parité était humiliante pour les femmes.
Vives protestations sur les travées de l ’ UMP.
Si, mes chers collègues, c’est ce qu’ont soutenu Mme Troendle et M. Lecerf hier, ainsi que M. Vasselle aujourd'hui !
J’ai dit qu’il était humiliant de penser qu’elles ne pourraient être élues dans le cadre d’un scrutin uninominal !
Avant la loi sur la parité, l’Observatoire de la parité entre les femmes et les hommes avait auditionné les chefs de parti, dans la perspective des législatives. Le secrétaire général du RPR de l’époque avait alors indiqué que, pour favoriser la parité, son parti envisageait d’adjoindre des suppléantes aux candidats de sexe masculin, ce qui selon lui permettrait à ces femmes de faire leur apprentissage avant de pouvoir peut-être accéder à la candidature lors des législatives suivantes…
Je n’invente rien, chers collègues de la majorité !
La parité est intervenue, et quand vous avez ensuite essayé de proposer d’instaurer cette mesure pour les élections législatives, elle a été balayée, ce qui a fait plutôt sourire !
Aujourd'hui, vous remettez cette proposition sur le tapis pour l’élection de vos conseillers territoriaux. Cela signifie que, à vos yeux, les femmes ont besoin de suivre un apprentissage, en tant que suppléantes, avant d’être compétentes et de pouvoir être titulaires.
Chers collègues hommes, combien parmi vous ont passé un examen de compétences avant d’être candidats à des élections ?
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Nous devrions tous, hommes et femmes, être soumis à un tel examen avant de pouvoir prétendre à la candidature !
Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.
Je voudrais affirmer, avec calme et sérénité, mon opposition totale à cet amendement, dont l’adoption constituerait à mon sens un véritable déni de démocratie.
En effet, cela ouvrirait la voie à un nouveau mode d’élection, l’élection « masquée » : un candidat bénéficiant d’une certaine notoriété mènerait la campagne électorale et démissionnerait peu après son élection afin de permettre à son suppléant d’occuper le siège.
M. Gérard Bailly. Monsieur Daudigny, voyez ce qu’a fait Jean-François Kahn, qui était candidat dans la région Grand Est lors des dernières élections européennes : ce journaliste qui attaque volontiers le monde politique a bien vite passé la main une fois élu ! Ne dénoncez donc pas le mode électoral qui est proposé ici, car le scrutin à la proportionnelle ne vaut pas mieux.
Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.
Dans notre pays, les femmes sont plus nombreuses que les hommes à exercer les fonctions de médecin ou d’enseignant ; je pourrais citer encore bien d’autres exemples de cet ordre.
Dans ces conditions, je ne vois pas pourquoi nous résisterions de façon machiste à l’accès des femmes au pouvoir !
Les dispositions de cet amendement permettraient peut-être à un certain nombre de femmes d’entrer en politique, mais, comme l’a souligné Yves Daudigny, elles bafouent quelque peu un principe démocratique. Un élu a-t-il le droit de désigner son successeur ?
M. François Fortassin. Si un élu démissionne pour respecter les règles relatives au cumul des mandats, l’application d’un tel dispositif est acceptable ; en revanche, si cette démission était prévue dès l’origine, elle est beaucoup plus discutable. Il convient de s’interroger sur ce point, mais, en tout état de cause, être père de cinq filles est un motif suffisant pour que je ne sois pas machiste !
Sourires .
Il est impossible de mettre sur le même plan scrutin de liste et scrutin uninominal avec suppléance. La logique n’est pas la même.
Mme Muguette Dini. Cet amendement étant supposé, aux termes de son objet, favoriser l’accès des femmes aux fonctions électives, ses auteurs partent donc du principe que les candidats seront en grande majorité des hommes.
« Non ! » sur les travées de l ’ UMP.
J’aurais pu voter l’amendement si une telle mention n’avait pas figuré dans son objet.
Protestations sur les travées de l ’ UMP.
Je me souviens avoir été la seule à voter contre une disposition identique à propos des élections cantonales, pour la même raison. J’avais alors affirmé que, pour être sûrs qu’un nombre suffisant de femmes entre dans les assemblées départementales, il fallait tuer 45 % des conseillers généraux hommes !
Nous sommes confrontés à la même situation. Je partage l’opinion de ceux de nos collègues qui considèrent que cet amendement est machiste. C'est la raison pour laquelle je ne le voterai pas : je trouve absolument scandaleux que l’on puisse nous proposer un tel dispositif pour favoriser la parité !
Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.
Je ne comprends pas la position de Mme Dini : force est de constater qu’il y a davantage d’hommes que de femmes parmi les élus !
En tout état de cause, on vote un texte, pas son objet. Les femmes ne sont pas spécifiquement visées par le dispositif : il ne faut pas voir des arrière-pensées partout !
J’ajoute que le remplaçant éventuel sera élu en même temps que le titulaire. Tous deux se soumettent ensemble aux suffrages des électeurs. C’est exactement ce qui passe avec le scrutin de liste : lorsqu’un élu renonce à ses fonctions, il est remplacé par un de ses colistiers. Il ne s’agit pas d’un détournement du scrutin.
(Mme Nicole Borvo Cohen-Seat s’exclame.) Il n’y a pas à s’interroger davantage sur le sens de cet amendement de simplification et d’égalité.
Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.
Cet amendement vise à éviter des élections partielles et à donner une chance à ceux qui souhaitent entrer en politique et se soumettre au verdict populaire. §
En tant que deuxième cosignataire de cet amendement, je tiens à indiquer que l’objet figurant au-dessous de notre texte résulte d’une erreur matérielle et ne correspond nullement à notre proposition. Je vous prie de bien vouloir excuser ce quiproquo, mes chers collègues.
Comme l’a expliqué M. Cointat, notre seul objectif est la simplification, car il est toujours compliqué et coûteux d’organiser des élections partielles. Cet amendement tend à faire en sorte que le suppléant ou la suppléante remplace dans tous les cas le titulaire en cas de démission ou de décès. Tel est bien son seul objet !
Très bien ! et applaudissements sur les travées de l ’ UMP.
L'amendement est adopté.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 1er B.
Monsieur Pointereau, l'amendement n° 246 rectifié est-il maintenu ?
Je souhaite porter à la connaissance de notre assemblée des propos que le Président de la République vient de tenir sur une chaîne de télévision. Commentant à sa façon nos débats, il a estimé que le travail que nous accomplissions dans cette enceinte, opposition comme majorité, ne sert au fond à rien, puisque l'Assemblée nationale aura le dernier mot.
Dans ces conditions, mes chers collègues, que faisons-nous ici ? À quoi servent nos discussions approfondies et intéressantes, nos réflexions, nos arguments, nos amendements ? Devons-nous nous incliner devant l'Assemblée nationale ? Que devient notre rôle de représentants des collectivités territoriales ? Irons-nous demain expliquer dans nos territoires que nos opinions et nos débats sur la réforme des collectivités territoriales n’ont finalement que peu d’importance, puisque l'Assemblée nationale tranchera de toute façon en dernier ressort, comme vient de l’annoncer le Président de la République, dont la parole est sacrée ? De façon plus fondamentale, à quoi bon le bicamérisme ?
« Taisez-vous ! », nous dit en substance le Président de la République. Mes chers collègues, chacun d’entre nous doit prendre position sur cette marque de mépris…
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC -SPG.
La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, pour un rappel au règlement.
Mon rappel au règlement a le même objet que celui de M. Anziani.
Une dépêche de l’AFP nous apprend que le Président de la République a indiqué mercredi aux députés du groupe Nouveau Centre qu’il recevait à déjeuner que le sort du projet de loi de réforme des collectivités territoriales serait réglé par l’Assemblée nationale, après le refus du Sénat de voter deux de ses mesures phares.
« C’est l’Assemblée nationale qui aura le dernier mot. J’ai simplement dit à nos amis sénateurs : “ N’allez pas trop loin parce que c’est l’Assemblée qui aura le dernier mot ”. » : tels ont été les mots du chef de l’État, cité par le député de la Loire François Rochebloine.
C’est une dépêche de l’AFP. Si elle reflète fidèlement les propos tenus par le Président de la République, cela signifie que, aux yeux de celui-ci, les travaux du Sénat n’ont finalement aucune importance. C’est regrettable pour nous tous, et plus particulièrement pour nos collègues de la majorité, qui participent activement à ce débat.
Une telle situation est absolument inacceptable. L’Assemblée nationale avait déjà modifié considérablement le texte du Sénat, tant dans sa lettre que dans son esprit, pour en revenir strictement à la volonté initiale du Gouvernement.
Poursuivre ce débat n’a donc plus grand sens. Nous allons aborder, en principe, l’examen des tableaux de répartition des conseillers territoriaux, mais les attributions et le mode d’élection de ces derniers n’ont pas encore été définis. Nous devrions éviter de discuter dans le vide et laisser l’Assemblée nationale décider !
Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.
Je souhaiterais que les rappels au règlement aient trait au règlement, au lieu de servir à engager un débat sur des propos prêtés au Président de la République par je ne sais quel journaliste de l’AFP ou parlementaire.
M. Josselin de Rohan. Nous n’avons pas à nous occuper de cela ! De toute façon, les pouvoirs sont séparés. Le Président de la République dit ce qu’il veut, et nous, nous faisons ce que nous voulons !
Très bien ! et applaudissements sur les travées de l ’ UMP.
J’évoquerai trois textes récents dont j’ai été le rapporteur.
Lors de l’examen du projet de loi pénitentiaire, nous n’étions pas d’accord avec l’Assemblée nationale, notamment sur le principe de l’encellulement individuel. La commission mixte paritaire s’est ralliée à la position du Sénat. Le Gouvernement a-t-il alors décidé de passer outre et de demander à l’Assemblée nationale de statuer définitivement ? Non !
Lors de l’examen du projet de loi tendant à amoindrir le risque de récidive criminelle et portant diverses dispositions de procédure pénale, le Sénat était hostile à une ouverture des hypothèses de rétention de sûreté. Sa position a prévalu, là aussi, en commission mixte paritaire. Le Gouvernement s’y est-il opposé ? En aucune manière !
Lors de l’examen du projet de loi organique prorogeant le mandat des membres du Conseil supérieur de la magistrature, nous avons souhaité, contrairement à nos collègues députés, accorder l’autonomie budgétaire à cette instance. C’est à l’avis du Sénat que la commission mixte paritaire s’est rangée. Le Gouvernement a-t-il pris une initiative pour désavouer la Haute Assemblée ? Absolument pas !
En réalité, le Président de la République s’est contenté de rappeler une disposition de la Constitution, aux termes de laquelle, en cas de désaccord entre les deux assemblées, le Gouvernement peut demander à l’Assemblée nationale de statuer définitivement. Mais cela, nous le savons tous !
Mes chers collègues, nous nous sommes mis d’accord sur de nombreux points de cette grande réforme des collectivités territoriales, notamment l’élection des conseillers communautaires au suffrage universel direct par fléchage sur les listes municipales, un statut des métropoles respectant les communes membres, l’élaboration d’une loi ultérieure sur la répartition des compétences, qui réglera la question de la clause de compétence générale.
Le mode de scrutin pour l’élection des conseillers territoriaux est le seul point sur lequel il pourrait être demandé à l’Assemblée nationale de statuer définitivement, parce qu’il faut bien finir par trancher. Personnellement, cela ne me choquerait pas : ce serait l’application stricte des termes constitutionnels. Mais n’allons pas faire d’une exception la règle !
Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.
Je fais miens les propos que vient de tenir M. Lecerf avec passion, talent et autorité.
Je préside depuis un an exactement le groupe UMP, qui, pour être le premier groupe de cette assemblée, ne détient cependant pas la majorité absolue. Tout au long de cette année, notamment au cours de l’examen de chacun des trois textes que M. Lecerf vient d’évoquer, mais aussi lors des débats sur la suppression de la taxe professionnelle et l’instauration de la contribution économique territoriale ou sur le Grenelle II, je me suis efforcé de préserver notre autorité, notre indépendance et nos convictions.
Très bien ! sur les travées de l ’ UMP.
Je n’accepterai donc pas de leçon d’un collègue qui semble découvrir que si la vie politique est faite parfois de phrases à l’emporte-pièce, elle se nourrit d’abord de solidité et d’indépendance, vertus dont mon groupe a toujours su faire preuve !
Bravo ! et applaudissements sur les travées de l ’ UMP.
Je voudrais éclaircir certains points.
M. Lecerf nous a expliqué que, sur des textes récents dont il a été le rapporteur, le dernier mot était revenu au Sénat, mais que la Constitution dispose que, dans certaines circonstances, il peut revenir à l’Assemblée nationale de statuer définitivement.
Cependant, la réforme des collectivités territoriales est un sujet en lien direct avec la vocation même du Sénat. Si j’ai bien compris les propos de M. Longuet, je suis presque rassuré…
Une deuxième lecture de ce texte aura lieu à l’Assemblée nationale. Le Gouvernement se ralliera-t-il finalement à la position du Sénat ou à celle des députés ? Dans nos régions et nos départements, les élus locaux sont extrêmement attentifs à cette question.
M. Jean-Pierre Bel. Vous nous avez apporté quelques assurances, monsieur Longuet. Je vous donne rendez-vous : nous verrons bien ce qu’il adviendra, et si le Sénat sera écouté ou bafoué s’agissant d’un texte qui concerne directement nos collectivités territoriales.
Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste.
Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 243 rectifié bis, présenté par MM. Pointereau, Doligé et Mayet, Mme Rozier et MM. Trillard, B. Fournier, Pierre, Laurent et Doublet, est ainsi libellé :
I. - Après l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le nombre des conseillers territoriaux de chaque département et de chaque région est fixé par le tableau annexé à la présente loi.
II. - En conséquence, insérer une annexe ainsi rédigée :
RÉGION
Conseil régional
DÉPARTEMENT
Nombre de conseillers territoriaux
Alsace
Bas-Rhin
Haut-Rhin
Aquitaine
Dordogne
Gironde
Landes
Lot-et-Garonne
Pyrénées-Atlantiques
Auvergne
Allier
Cantal
Haute-Loire
Puy-de-Dôme
Bourgogne
Côte d'Or
Nièvre
Saône-et-Loire
Yonne
Bretagne
Côtes-d'Armor
Finistère
Ille-et-Vilaine
Morbihan
Centre
Cher
Eure-et-Loir
Indre
Indre-et-Loire
Loir-et-Cher
Loiret
Champagne-Ardenne
Ardennes
Aube
Marne
Haute-Marne
Franche-Comté
Doubs
Jura
Haute-Saône
Territoire de Belfort
Guadeloupe
Guadeloupe
Ile-de-France
Paris
Seine-et-Marne
Yvelines
Essonne
Hauts-de-Seine
Seine-Saint-Denis
Val-de-Marne
Val-d'Oise
Languedoc-Roussillon
Aude
Gard
Hérault
Lozère
Pyrénées-Orientales
Limousin
Corrèze
Creuse
Haute-Vienne
Lorraine
Meurthe et Moselle
Meuse
Moselle
Vosges
Midi-Pyrénées
Ariège
Aveyron
Haute-Garonne
Gers
Lot
Hautes-Pyrénées
Tarn
Tarn-et-Garonne
Basse-Normandie
Calvados
Manche
Orne
Haute-Normandie
Eure
Seine-Maritime
Nord - Pas-de-Calais
Nord
Pas-de-Calais
Pays de la Loire
Loire-Atlantique
Maine-et-Loire
Mayenne
Sarthe
Vendée
Picardie
Aisne
Oise
Somme
Poitou-Charentes
Charente
Charente-Maritime
Deux-Sèvres
Vienne
Provence-Alpes-Côte d'Azur
Alpes-de-Haute-Provence
Hautes-Alpes
Alpes-Maritimes
Bouches-du-Rhône
Var
Vaucluse
Réunion
Réunion
Rhône-Alpes
Ain
Ardèche
Drôme
Isère
Loire
Rhône
Savoie
Haute-Savoie
La parole est à M. Rémy Pointereau.
En première lecture, nous avions souhaité pouvoir disposer d’un tableau faisant état de l’effectif des conseillers territoriaux par département.
Le présent amendement a donc pour objet de présenter un tel tableau. Je l’avais déposé avant celui de la commission des lois, auquel je me rallie par courtoisie envers M. le rapporteur.
Je retire donc l’amendement n° 243 rectifié bis.
Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.
L’amendement n° 243 rectifié bis est retiré.
L'amendement n° 580, présenté par M. Courtois, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
I. - Après l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le nombre des conseillers territoriaux de chaque département et de chaque région est fixé par le tableau annexé à la présente loi.
II. - En conséquence, insérer une annexe ainsi rédigée :
RÉGION
Conseil régional
DÉPARTEMENT
Nombre de conseillers territoriaux
Alsace
Bas-Rhin
Haut-Rhin
Aquitaine
Dordogne
Gironde
Landes
Lot-et-Garonne
Pyrénées-Atlantiques
Auvergne
Allier
Cantal
Haute-Loire
Puy-de-Dôme
Bourgogne
Côte d'Or
Nièvre
Saône-et-Loire
Yonne
Bretagne
Côtes-d'Armor
Finistère
Ille-et-Vilaine
Morbihan
Centre
Cher
Eure-et-Loir
Indre
Indre-et-Loire
Loir-et-Cher
Loiret
Champagne-Ardenne
Ardennes
Aube
Marne
Haute-Marne
Franche-Comté
Doubs
Jura
Haute-Saône
Territoire de Belfort
Guadeloupe
Guadeloupe
Ile-de-France
Paris
Seine-et-Marne
Yvelines
Essonne
Hauts-de-Seine
Seine-Saint-Denis
Val-de-Marne
Val-d'Oise
Languedoc-Roussillon
Aude
Gard
Hérault
Lozère
Pyrénées-Orientales
Limousin
Corrèze
Creuse
Haute-Vienne
Lorraine
Meurthe et Moselle
Meuse
Moselle
Vosges
Midi-Pyrénées
Ariège
Aveyron
Haute-Garonne
Gers
Lot
Hautes-Pyrénées
Tarn
Tarn-et-Garonne
Basse-Normandie
Calvados
Manche
Orne
Haute-Normandie
Eure
Seine-Maritime
Nord - Pas-de-Calais
Nord
Pas-de-Calais
Pays de la Loire
Loire-Atlantique
Maine-et-Loire
Mayenne
Sarthe
Vendée
Picardie
Aisne
Oise
Somme
Poitou-Charentes
Charente
Charente-Maritime
Deux-Sèvres
Vienne
Provence-Alpes-Côte d'Azur
Alpes-de-Haute-Provence
Hautes-Alpes
Alpes-Maritimes
Bouches-du-Rhône
Var
Vaucluse
Réunion
Réunion
Rhône-Alpes
Ain
Ardèche
Drôme
Isère
Loire
Rhône
Savoie
Haute-Savoie
La parole est à M. le rapporteur.
Le texte adopté par le Sénat en première lecture ne comportait pas de tableau des effectifs des conseils généraux et des conseils régionaux, puisque nous avions considéré qu’il devrait être inclus dans le texte électoral qui interviendrait ultérieurement. La commission des lois avait même prévu que ce tableau ferait l’objet d’une ordonnance, ce qui aurait d’ailleurs réglé un certain nombre de problèmes.
L’Assemblée nationale a adopté une autre position et introduit un tableau des effectifs. Après des négociations et des discussions, j’ai été amené à déposer à titre personnel, avant qu’il ne soit repris par la commission des lois, sur proposition de son président, un amendement qui tend à présenter un tableau de répartition des conseillers territoriaux par département et par région.
Nous nous sommes appuyés sur un certain nombre de principes que je vais maintenant exposer pour que chacun comprenne bien la philosophie qui sous-tend ce tableau.
Premièrement, nous avons raisonné par région, après nous être convaincus que, compte tenu de la disparité en termes de population et de superficie des départements français, un tableau national ne serait pas satisfaisant, notamment pour les départements les moins peuplés.
Ainsi, dès l’origine, je tiens à le souligner, le cas des départements les moins peuplés a été pris en compte. Nous nous sommes demandé combien de conseillers territoriaux ils devraient compter au minimum. D’emblée, ce nombre plancher de conseillers territoriaux a été fixé à quinze, ce qui correspond à l’effectif de l’assemblée départementale comptant le moins d’élus, celle du Territoire de Belfort. Ce chiffre ayant été admis par la jurisprudence, nous pouvions le conserver, sauf à ce que le Conseil constitutionnel en décide autrement s’il est saisi.
Deuxièmement, répondant à une demande de mon ami Rémy Pointereau et d’un certain nombre de présidents de conseil général, nous avons prévu que le nombre de conseillers territoriaux par département serait toujours impair.
Troisièmement, nous avons posé le principe que le nombre maximal de conseillers territoriaux par région ne devait pas dépasser de 50 % l’effectif de l’assemblée régionale la plus nombreuse, à savoir celle de l’Île-de-France, qui compte 209 conseillers régionaux. Le plafond a donc été fixé à 310 conseillers territoriaux par région.
Quatrièmement, nous avons tenu compte de la notion de territoire, ce qui réjouira sans doute nombre d’entre vous, mes chers collègues. Nous nous sommes fondés sur la définition introduite sur l’initiative de M. Portelli à l’article 1erAA pour prendre en considération la démographie, la superficie, le nombre de communes, mais aussi la géographie. Dans cette perspective, nous avons établi une fourchette de plus ou moins 20 % pour la représentation moyenne de chaque département d’une même région par rapport au nombre moyen d’habitants par conseiller territorial à l’échelle de la région.
L’amendement n° 580 tend donc à fixer selon ces principes le nombre de conseillers territoriaux par région et par département. Ce tableau a bien entendu suscité les réactions d’un certain nombre de nos collègues, qui présenteront tout à l’heure des sous-amendements. J’indique d’ores et déjà que, n’ayant pas eu le temps de les étudier, je m’en remettrai, sauf pour deux ou trois d’entre eux, à l’avis du Gouvernement.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente.
La séance est suspendue.
La séance, suspendue à dix-neuf heures trente, est reprise à vingt-et-une heures trente, sous la présidence de M. Gérard Larcher.