Séance en hémicycle du 26 juillet 2012 à 9h30

La séance

Source

La séance est ouverte à neuf heures trente.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, de finances rectificative pour 2012 (projet n° 687, rapport n° 689, avis n° 690 et 691).

Nous poursuivons la discussion des articles de la première partie.

PREMIÈRE PARTIE

CONDITIONS GÉNÉRALES DE L’ÉQUILIBRE FINANCIER

TITRE Ier

DISPOSITIONS RELATIVES AUX RESSOURCES

I. – IMPÔTS ET RESSOURCES AUTORISÉS (suite)

Dans la discussion des articles de la première partie, nous en sommes parvenus, au sein du titre Ier, à l’article 4.

I. – Le code général des impôts est ainsi modifié :

A. – À la première phrase du dernier alinéa de l’article 776 A et à l’article 776 ter, le mot : « six » est remplacé par le mot : « quinze » ;

B. – Le dernier alinéa de l’article 777 est supprimé ;

C. – L’article 779 est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa du I, le montant : « 159 325 € » est remplacé par le montant : « 100 000 € » ;

2° Le VI est abrogé ;

D. – Au deuxième alinéa de l’article 784, le mot : « dix » est remplacé par le mot : « quinze » ;

E. – Le V de l’article 788 est abrogé ;

F. – Le dernier alinéa des articles 790 B, 790 D, 790 E et 790 F est supprimé ;

G. – L’article 790 G est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa du I, le mot : « dix » est remplacé par le mot : « quinze » ;

2° Le V est abrogé ;

H. – L’article 793 bis est ainsi modifié :

1° La seconde phrase du deuxième alinéa est supprimée ;

2° Au troisième alinéa, les mots : « devant notaire » sont supprimés et le mot : « six » est remplacé par le mot : « quinze ».

II. – Le III de l’article 7 de la loi n° 2011-900 du 29 juillet 2011 de finances rectificative pour 2011 est abrogé.

III. – 1. Les A, 1° du C, D, 1° du G, 2° du H du I et le II s’appliquent, selon le cas, aux successions ouvertes et aux donations consenties à compter de la date de publication de la présente loi.

2. Les B, 2° du C, E, F, 2° du G et 1° du H du I s’appliquent à compter du 1er janvier 2013.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

La parole est à Mme Marie-Hélène Des Esgaulx, sur l’article.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Hélène Des Esgaulx

Monsieur le président, monsieur le ministre délégué, mes chers collègues, le plafond d’exonération des droits de succession va donc passer de 159 325 euros tous les dix ans à 100 000 euros tous les quinze ans, par enfant et par parent.

Une telle mesure va pénaliser les Français appartenant aux classes moyennes et dont le patrimoine est modeste, car elle ne tient notamment pas compte du renchérissement de l’immobilier.

A contrario de la gauche, nous, à droite, souhaitons permettre à une génération de tenter de vivre un peu mieux que la précédente. Avec le dispositif d’exonération actuel, les parents des classes moyennes ayant travaillé toute une vie peuvent transmettre à leurs enfants le fruit de leur travail et leur donner la possibilité de démarrer dans la vie avec un peu plus de soutien que ce qu’eux-mêmes ont connu.

Par ailleurs, je tiens à faire remarquer que l’étude d’impact sur cet article 4, comme pour nombre d’autres articles du projet de loi, est totalement défaillante dans la mesure où l’estimation de la recette attendue est surévaluée.

Les notaires vous le diront, mes chers collègues, depuis des mois, plusieurs milliers de personnes ont fait des donations, anticipant la date fatidique du 4 juillet. Non seulement il n’y aura pas le surcroît de recettes attendu, mais celles-ci vont dès à présent chuter. Monsieur le ministre, pourquoi n’a-t-il pas été tenu compte de ce phénomène dans l’étude d’impact ?

Pour toutes ces raisons, notre groupe proposera la suppression de cet article.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

La parole est à M. Albéric de Montgolfier, sur l’article.

Debut de section - PermalienPhoto de Albéric de Montgolfier

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, comme vient de le dire Marie-Hélène Des Esgaulx, cet article ramène de 159 325 euros à 100 000 euros le montant de l’abattement applicable aux donations qui s’effectuent en ligne directe.

Hier soir, nous nous sommes intéressés aux grosses fortunes, en examinant, assez tardivement, la question du retour à l’ancien barème de l’ISF. Ce matin, nous ne sommes plus du tout dans ce cas de figure puisque c’est de patrimoines moyens qu’il s’agit ici. J’en veux tout simplement pour preuve les montants concernés.

Selon les statistiques officielles de la chambre des notaires de Paris, 100 000 euros correspondent, en moyenne, à 12 mètres carrés dans la capitale, à 18 mètres carrés en Île-de-France et à 42 mètres carrés ailleurs dans notre pays. Vous le voyez, nous sommes loin des gros patrimoines dont nous parlions hier soir !

À l’avenir, cela aura une conséquence toute simple : la baisse de l’abattement, méconnaissant la réalité du marché de l’immobilier, va contribuer à alourdir la fiscalité sur les patrimoines moyens, qui se situent actuellement au-dessous du seuil de taxation ; les droits de mutation à titre gratuit devraient concerner non plus 5 % des successions, comme actuellement, mais 12 %. Ce ne sont donc pas les milliardaires qui sont visés !

Un autre point mérite d’être noté s’agissant des donations : il s’agit de la prolongation à quinze ans du délai de rappel, qui paraît excessive, d’autant que, je le rappelle, celui-ci était déjà passé de six ans à dix ans. Or il importe de favoriser la transmission intergénérationnelle des patrimoines.

À cet égard, il n’est pas inutile de rappeler que, selon la dernière étude de l’INSEE sur les revenus et le patrimoine des ménages, parue en juillet 2011, plus des trois quarts des ménages ayant reçu un patrimoine sont âgés de plus de cinquante ans. À l’évidence, le délai de quinze ans paraît bien excessif.

Pour l’ensemble de ces raisons, et parce que la fiscalité devient confiscatoire sur les patrimoines, y compris sur les patrimoines moyens, l’abaissement à 100 000 euros de l’abattement sur les donations en ligne directe ne peut être accepté. C’est la raison pour laquelle le groupe UMP votera contre cet article 4.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

Je suis saisi de deux amendements identiques.

L’amendement n° 104 est présenté par M. J.C. Gaudin et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire.

L’amendement n° 141 rectifié est présenté par MM. Arthuis, Zocchetto, Dubois, J. Boyer, Marseille, Tandonnet, Capo-Canellas et Roche, Mme Morin-Desailly, MM. Amoudry et Détraigne, Mme Férat et les membres du groupe de l’Union Centriste et Républicaine.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Marie-Thérèse Bruguière, pour présenter l’amendement n° 104.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Thérèse Bruguière

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, les allégements de droits de mutation à titre gratuit consentis par la loi du 21 août 2007 en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat, dite loi TEPA, permettent aux Français les plus modestes de transmettre le fruit d’une vie de travail à leurs enfants.

Par le présent amendement, nous proposons de supprimer l’article 4, qui augmente les droits applicables aux successions et réduit l’avantage fiscal sur les donations en ligne directe, sans tenir compte, notamment, du renchérissement de l’immobilier.

Une telle mesure est à l’opposé de notre attachement à la revalorisation du travail et de nature à réduire le pouvoir d’achat des classes moyennes.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

L’amendement n° 141 rectifié n’est pas soutenu.

Quel est l’avis de la commission sur l’amendement n° 104 ?

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, cet amendement vise à supprimer l’article 4, qui procède à plusieurs aménagements des droits de mutation à titre gratuit. J’y suis bien entendu défavorable au nom de la commission, car une telle suppression serait contraire au principe de redressement des comptes publics dans la justice.

L’article 4 ne fait d’ailleurs que revenir sur les excès de la loi TEPA, laquelle, on le sait, n’a bénéficié qu’à une minorité de gens aisés, pour un coût budgétaire maximal. Les mesures proposées sont équilibrées et respectent le principe de justice fiscale, en faisant contribuer les plus fortunés de nos concitoyens.

J’apporterai deux précisions utiles.

D’une part, l’exonération complète au profit du conjoint survivant est maintenue, tout comme celle en faveur des personnes handicapées.

D’autre part, compte tenu du dispositif proposé, 90 % des successions resteraient exemptées de droits, contre 95 % avec la loi TEPA. À l’évidence, les 10 % restants de successions ne concernent pas les classes moyennes et correspondent, de fait, aux déciles supérieurs de patrimoine. Je rappelle, à cet égard, que le patrimoine moyen, dans notre pays, est de 220 000 euros, et le patrimoine médian, de 113 500 euros.

Avec un abattement de 100 000 euros applicable tous les quinze ans par parent et par enfant, le calcul est rapide : 10 % des familles seulement, soit une minorité extrêmement réduite, auront, en réalité à supporter des droits de succession.

À mon sens, monsieur le ministre, mes chers collègues, les choses sont claires. Il est opportun de revenir partiellement sur le dispositif en vigueur, d’autant que la loi TEPA avait multiplié par trois ledit abattement, en le portant de 50 000 à 150 000 euros. Avec un seuil ramené à 100 000 euros, comme il est proposé ici, le dispositif reste donc encore plutôt favorable.

Debut de section - Permalien
Benoît Hamon, ministre délégué auprès du ministre de l’économie et des finances, chargé de l’économie sociale et solidaire et de la consommation

Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, le Gouvernement n’est évidemment pas favorable à l’amendement n° 104, mais je voudrais profiter de cette intervention pour réfuter l’argument que développe l’opposition, argument selon lequel la mesure proposée par le Gouvernement aboutirait à taxer les classes moyennes.

Il faut tout de même nous entendre sur ce que recouvre ce vocable de « classes moyennes » et sur les Français qui sont concernés. Cela a déjà été dit, et M. le rapporteur général l’a encore évoqué à l’instant, entre 88 % et 90 % des successions seront toujours exonérées. La frange restante de 10 % à ne pas l’être ne correspond donc pas exactement à l’idée que nous nous faisons des classes moyennes.

Je veux juste porter à votre connaissance les données suivantes, fournies par l’INSEE, sur le patrimoine des Français. En France, aujourd’hui, le patrimoine médian – seuil par rapport auquel la moitié d’une population concernée se situe au-dessus, l’autre, au-dessous – d’un ouvrier qualifié s’élève à 28 800 euros, celui de l’ensemble des ménages français, à 113 500 euros. Même en prenant en compte le patrimoine moyen, l’analyse reste valable puisque celui de l’ensemble des ménages français se situe à 229 300 euros.

Avec la mesure proposée par le Gouvernement, les parents d’une famille de deux enfants pourront continuer à transmettre 400 000 euros tous les quinze ans. À l’évidence, cela ne concerne donc pas les classes moyennes, qui continueront à être exonérées des droits de succession !

Mesdames, messieurs les sénateurs de l’opposition, il s’agit – et j’insiste sur ce point – d’une mesure d’équité, de justice. Le rendement de cette nouvelle contribution contribuera à améliorer les comptes publics. C’est une mesure de redressement, qui devrait à mon sens tous nous rassembler. Ne vous focaliser donc pas sur des argumentaires qui ne visent qu’à effrayer les classes moyennes alors que ces dernières ne sont, en l’occurrence, absolument pas concernées.

Debut de section - PermalienPhoto de Albéric de Montgolfier

Pensez à l’équivalence en mètres carrés, monsieur le ministre !

Debut de section - Permalien
Benoît Hamon, ministre délégué

Ou alors, c’est que vous avez une conception des classes moyennes qui ne correspond pas du tout à la réalité de la vie quotidienne des Français. Les vraies classes moyennes, auxquelles appartiennent celles et ceux qui travaillent ou ont travaillé toute leur vie, continueront à être exonérées des droits de succession. En tout cas, objectivement, au regard de la situation telle qu’elle est, vos arguments peinent à convaincre. Voilà pourquoi j’invite les auteurs de l’amendement à le retirer ; à défaut, j’émettrai un avis défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

La parole est à M. Jean Arthuis, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

J’avais déposé un amendement identique à l’amendement n° 104, car nous devrons à mon avis revoir le barème des droits de succession.

Lorsque le Gouvernement nous présentera un projet de loi tendant à assurer un financement solidaire de la dépendance, il nous faudra bien trouver de nouvelles recettes. Certains seront alors tentés d’adopter un dispositif identique à celui qui est prévu pour l’aide sociale, avec une reprise sur l’actif successoral. Je n’y serai pas favorable, pour ma part, car il s’agit là, en quelque sorte, d’une double peine : Alzheimer plus reprise sur l’actif successoral !

Il serait donc préférable, selon moi, que la solidarité s’exprime par un effort sur les droits de succession. Or si vous préemptez d’ores et déjà ce potentiel de recettes, que ferez-vous lorsque viendra l’heure de financer la dépendance ?

Pour cette raison, je voterai l’amendement présenté par notre collègue Jean-Claude Gaudin.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

La parole est à Mme Catherine Procaccia, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Procaccia

Vous nous avez expliqué, monsieur le ministre, que vous souhaitiez le rétablissement d’un certain nombre de dispositions antérieures. En effet, au travers des projets de loi qu’elle nous présente, la gauche passe pour l’instant son temps à laisser entendre que tout allait pour le mieux auparavant. Or, à l’époque qu’elle invoque, l’exonération des frais de succession était certes moindre, mais elle ne s’étendait pas sur quinze ans !

J’ai fait le calcul : ce n’est guère avant l’âge de 62 ou 63 ans, c’est-à-dire celui de la retraite, qu’un salarié peut faire une donation à ses enfants.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Procaccia

Les personnes qui, comme moi, ont été salariées toute leur vie et disposent d’un patrimoine moyen ne peuvent le transmettre alors qu’elles sont encore en activité, puisqu’elles doivent encore payer leur appartement, pour l’acquisition duquel elles se sont endettées pour trente ans !

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Procaccia

Ces personnes ne peuvent le faire qu’à l’âge de la retraite, vers 62 ou 63 ans. Et encore leur faut-il avoir suffisamment économisé pour faire face à une diminution de 50 % de leur revenu !

Et à supposer que l’on ait réussi à faire une donation à cet âge-là, on ne pourra transmettre à nouveau son patrimoine que quinze ans plus tard, à 77 ans, soit à un âge auquel, si l’on n’est pas encore dépendant, on vit éventuellement en maison de retraite.

Mme Nathalie Goulet s’exclame.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Procaccia

Cette disposition pose donc un véritable problème de transmission du patrimoine à des personnes qui ont travaillé toute leur vie !

Vous avez évoqué le patrimoine moyen des Français. Ce que je sais, pour ma part, c’est que plus de 50 % des Français disposent d’un patrimoine immobilier. Et vous voulez les empêcher de le transmettre !

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

La parole est à M. Philippe Dallier, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Dallier

Ce texte aura au moins prouvé une chose : nous avons un problème de définition des classes moyennes !

Vous nous avez expliqué, monsieur le ministre, que cette mesure concernerait finalement très peu de personnes : moins de 10 % des Français.

En tant que maire d’une commune située en plein milieu de la Seine-Saint-Denis, je puis vous dire que, dans ce département, un modeste pavillon de 100 mètres carrés, avec 250 mètres carrés de terrain, vaut de 250 000 à 300 000 euros.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Dallier

Non, cela ne baisse pas, mon cher collègue ! Je vous invite à faire le tour des agences immobilières...

Le propriétaire d’un tel pavillon, situé en Seine-Saint-Denis, doit-il être considéré comme riche ?

Ce débat me paraît tout de même assez surréaliste ! On y confond, à mon avis, deux situations : celle de nos concitoyens qui ont la possibilité, car leur patrimoine le leur permet, de transmettre plusieurs fois au cours de leur vie un patrimoine d’environ 200 000 ou 250 000 euros, et celle, que vient d’évoquer Catherine Procaccia, des Français qui, disposant de ce seul patrimoine, ne peuvent le transmettre qu’une fois.

Peut-être faudrait-il opérer un distinguo ! Débattre de la période de dix ou quinze ans entre chaque donation, c’est bien sympathique, mais il s’agit surtout de faire la différence entre les Français qui ne donneront qu’une fois dans leur vie et ceux qui pourront le faire plusieurs fois.

Sortons de ce débat sur les classes moyennes, car c’est la plus mauvaise façon d’aborder le sujet qui nous occupe !

Je considère, pour ma part, que l’on ne doit pas classer parmi les 10 % de Français les plus riches ceux de nos concitoyens qui ont réussi à acquérir un logement d’une valeur de 250 000 à 300 000 euros en Île-de-France. Si je devais expliquer le contraire à mes administrés, ils me riraient au nez ! §

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

La parole est à M. le président de la commission des finances.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Monsieur le président, monsieur le ministre délégué, mes chers collègues, j’exprimerai le même avis que mes collègues, mais d’une autre façon.

Le seuil de 100 000 euros correspond au prix de 12 mètres carrés dans Paris intra muros, oude 18 mètres carrés environ en Île-de-France « hors Paris », ou encore de 42 mètres carrés hors de l’Île-de-France. Ces évaluations, qui me semblent raisonnables, montrent que les catégories visées par l’article 4 sont bien les classes moyennes, celles-là mêmes qui constituent, au sein de la société, ce grand espace social sans lequel rien ne peut se faire dans notre pays !

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. On disait autrefois, à l’époque où le franc était encore en vigueur : « Pour 100 balles, t’as plus rien ! ».

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

Ce vieux slogan, que l’on a pu lire ces derniers jours dans la presse, la majorité nous en sert une variante. L’argument invoqué, que le président de la commission des finances vient de reprendre, est le suivant : 100 000 euros, on y arrive très vite à Paris !

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

L’article 4, nous dit-on, entraînera donc la taxation de personnes qui hériteront de 10 mètres carrés dans tel ou tel quartier de Paris. Il s’agit là d’une image facile et réductrice !

J’invoquerai, pour le démontrer, deux arguments.

Premièrement, on hérite, le plus souvent, de ses deux parents. §

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

Encore ne tient-on pas compte, dans cet exemple, des possibilités de démembrement d’un bien immobilier – elles sont bien connues des notaires et des avocats ! –, qui permettent d’aller encore plus loin pour échapper aux droits de mutation à titre gratuit.

Il faut donc le dire clairement : l’argument de l’opposition, qui ne cesse d’invoquer ce seuil de 100 000 euros, est trompeur !

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Deuxièmement, on ne peut pas traiter du droit fiscal français en se fondant uniquement sur les prix de l’immobilier dans le VIe arrondissement ou les quartiers chics de Paris, qui sont tout de même très atypiques !

Nouvelles exclamations sur les mêmes travées.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Hélène Des Esgaulx

Dans le bassin d’Arcachon, ce n’est pas mal non plus !

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

Veuillez poursuivre, monsieur le rapporteur général !

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

Cette argumentation suppose une appréciation totalement biaisée de la véritable valeur patrimoniale des biens immobiliers dont disposent nos concitoyens.

Comme je l’ai indiqué précédemment, en conservant ce dispositif, qui concerne seulement 10 % de nos concitoyens, nous pourrons solliciter ceux qui peuvent contribuer le plus. Ce faisant, nous suivons la logique que nous nous sommes fixée, et qui est justifiée dans ce contexte très difficile.

Ce dispositif relatif aux donations, tel qu’il reste en vigueur, est juste dans son principe. C’est la raison pour laquelle il faut rejeter cet amendement de suppression.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

J’indique d’ores et déjà que j’ai été saisi d’une demande de scrutin public sur l’amendement n° 104.

La parole est à Mme Isabelle Debré, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, je m’étonne que la majorité de gauche soit obligée, sur un texte aussi important, et parce qu’elle est minoritaire, de demander un scrutin public.

Debut de section - Permalien
Une sénatrice de l’Ump

C’est bien vrai !

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Hélène Des Esgaulx

Ils n’y croient pas ! Ils ne sont pas du tout mobilisés !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Carrère

C’est cela, votre explication de vote ? Vous avez une pensée profonde !

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

Il s’agit tout de même de l’un de vos premiers textes !

Vous me permettrez donc de m’interroger, mes chers collègues : assumez-vous véritablement les mesures que nous sommes en train de voter, comme celles qui sont relatives à la fiscalisation des heures supplémentaires ? §

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

À bien y regarder, vous demandez très souvent des scrutins publics, et cela provoque déjà des réactions.

Il me semble que le Président de la République avait promis, dans sa proposition n° 34, que la fiscalisation des heures supplémentaires ne s’appliquerait pas aux petites entreprises. Vous ne l’avez pas suivi sur ce point...

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

Ce matin, une fois encore, vous demandez un scrutin public, s’agissant cette fois-ci de l’augmentation des droits applicables aux successions et de l’avantage fiscal applicable aux donations en ligne directe. Je vous le demande, mes chers collègues, assumez-vous véritablement vos actes ?

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

Je mets aux voix l’amendement n° 104.

J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe socialiste.

Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

Le scrutin a lieu.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

Il est procédé au dépouillement du scrutin.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

Voici le résultat du scrutin n° 123 :

Le Sénat a adopté. (

En conséquence, l’article 4 est supprimé et les amendements n° 158 rectifié, 224, 225, 226, 160, 161, 176, 159 rectifié et 31 deviennent sans objet.

Nouveaux applaudissements sur les mêmes travées.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

Pour la bonne information du Sénat, je rappelle que l'amendement n° 158 rectifié, présenté par MM. Mézard, Collin, C. Bourquin, Fortassin, Alfonsi, Barbier, Baylet et Bertrand, Mme Laborde et MM. Mazars, Plancade, Requier, Tropeano, Vall et Vendasi, était ainsi libellé :

Alinéa 2

Remplacer le mot :

quinze

par le mot :

dix

L'amendement n° 224, présenté par MM. Delattre et de Legge, était ainsi libellé :

Alinéa 5

Remplacer le montant :

par le montant :

L'amendement n° 225, présenté par MM. Delattre et de Legge, était ainsi libellé :

Alinéa 5

Remplacer le montant :

par le montant :

L'amendement n° 226, présenté par MM. Delattre et de Legge, était ainsi libellé :

Alinéa 5

Remplacer le montant :

par le montant :

L'amendement n° 160, présenté par MM. Mézard, Bertrand, Alfonsi, Barbier, Baylet, C. Bourquin, Collin, Collombat et Fortassin, Mme Laborde et MM. Mazars, Plancade, Requier, Tropeano, Vall et Vendasi, était ainsi libellé :

Alinéa 7

Supprimer cet alinéa

L'amendement n° 161, présenté par MM. Mézard, Bertrand, Alfonsi, Barbier, Baylet, C. Bourquin, Collin, Collombat et Fortassin, Mme Laborde et MM. Mazars, Plancade, Requier, Tropeano, Vall et Vendasi, était ainsi libellé :

Alinéa 11

Supprimer cet alinéa

L'amendement n° 176, présenté par MM. Savary et Beaumont, Mme Bruguière, MM. Cambon, Cardoux et César, Mmes Deroche et Des Esgaulx, M. P. Dominati, Mmes Farreyrol et Lamure, MM. Legendre, Milon, de Montgolfier, del Picchia et Pierre, Mmes Primas et Procaccia, MM. Reichardt et Revet et Mmes Sittler et Troendle, était ainsi libellé :

I. - Après l'alinéa 13

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

...° À la première phrase du deuxième alinéa, le montant : « 101 897 € » est remplacé par le montant : « 250 000 € ».

II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

... – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

L'amendement n° 159 rectifié, présenté par MM. Mézard, C. Bourquin, Collin, Fortassin, Alfonsi, Barbier, Baylet et Bertrand, Mme Laborde et MM. Mazars, Plancade, Requier, Tropeano, Vall et Vendasi, était ainsi libellé :

Alinéa 15

Remplacer le mot :

quinze

par le mot :

dix

L'amendement n° 31, présenté par M. Marc, au nom de la commission des finances, était ainsi libellé :

I. Après l’alinéa 15

Insérer deux alinéas ainsi rédigés :

I bis. - L’article L. 181 B du livre des procédures fiscales est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« La valeur des biens ayant fait l’objet des donations antérieures dont il est tenu compte pour l’application du troisième alinéa de l’article 793 bis du code général des impôts peut, pour la seule appréciation de la limite mentionnée au deuxième alinéa du même article, être rectifiée. »

II. Alinéa 17

En conséquence, après la référence :

du I

insérer la référence :

, le I bis

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

L'amendement n° 147 rectifié, présenté par M. Détraigne, Mme Férat et MM. Dubois, J. Boyer, Marseille, Deneux, Amoudry et Tandonnet, est ainsi libellé :

Après l’article 4

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – À la première phrase du deuxième alinéa de l’article 793 bis du code général des impôts, le montant : « 101 897 euros » est remplacé par le montant : « 250 000 euros ».

II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

Cet amendement n’est pas soutenu.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

Je rappelle que l’article 5 a été réservé jusqu’à la fin de la première partie du projet de loi de finances rectificative.

I. – L’article 235 ter ZD du code général des impôts est ainsi modifié :

1° À la fin de la première phrase du premier alinéa du I, les mots : « 1er janvier de l’année d’imposition » sont remplacés par les mots : « 1er décembre de l’année précédant celle d’imposition » ;

2° À la fin du V, le taux : « 0, 1 % » est remplacé par le taux : « 0, 2 % ».

II. – 1. Le 1° du I s’applique aux sociétés dont les titres font l’objet de transactions réalisées à compter du 1er janvier 2013.

2. Le 2° du même I s’applique aux acquisitions réalisées à compter du 1er août 2012.

Debut de section - PermalienPhoto de Fabienne Keller

Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, après plusieurs années de tergiversations sur le bien-fondé de la mise en œuvre d’une taxe sur les transactions financières, ou TTF, le précédent président de la République, Nicolas Sarkozy, a fait adopter une telle taxe dans la loi du 14 mars 2012 de finances rectificative pour 2012.

Dans le présent projet de loi de finances rectificative, le Gouvernement propose de renforcer cette taxe, qui doit s’appliquer à compter du 1er août prochain. Je vous rappelle qu’elle porte seulement sur les actions des sociétés dont la capitalisation boursière est supérieure à 1 milliard d’euros.

Mais cette petite TTF marque une première étape. Son instauration a donné une impulsion très forte dans un dossier pour lequel le précédent président de la République s’était de longue date mobilisé.

Conciliabules prolongés sur les travées du groupe socialiste et du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Fabienne Keller

Mes chers collègues, j’ai le sentiment que le résultat du scrutin précédent crée une certaine confusion…

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

Poursuivez, ma chère collègue, il n’y a aucune confusion.

Debut de section - PermalienPhoto de Fabienne Keller

La confusion n’est pas sur nos travées, monsieur le président, elle est sur ceux de la majorité !

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

M. Alain Gournac. Vous réglerez cela tout à l’heure !

Exclamations et rires sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Fabienne Keller

Chers collègues de la majorité, l’article 4 a été supprimé et nous nous en réjouissons !

Le président François Hollande, lundi dernier, lors d’un sommet mondial sur le sida à Washington, a annoncé l’affectation d’une partie du produit de la TTF aux objectifs millénaires pour le développement dans le domaine de la santé, c’est-à-dire à la lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme.

Messieurs les ministres, au moment où vous nous proposez le doublement du taux de la taxe, rien n’est prévu pour flécher cette nouvelle ressource vers les objectifs auxquels, pourtant, le Président de la République a annoncé qu’elle serait en partie affectée.

Pour justifier le doublement du taux, vous n’invoquez que des éléments très généraux. Bref, la TTF va tomber dans les ressources générales, comme une taxe ordinaire.

Que deviennent alors les déclarations de principe très généreuses du Président de la République ? Comment expliquez-vous l’écart, à deux jours d’intervalle, entre ses déclarations à l’échelle mondiale et leur mise en œuvre concrète ?

Messieurs les ministres, je serais heureuse si vous pouviez nous confirmer que le doublement du taux de la TTF servira à alimenter le fonds de solidarité que M. Chirac avait créé pour récolter le produit de la taxe sur les billets d’avion.

Applaudissements sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Richard Yung

Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, je souhaite, à l’occasion de l’examen de l’article 6, présenter quelques remarques au sujet de la taxe sur les transactions financières.

Cette taxe, dont je rappelle qu’elle a été créée par la loi du 14 mars 2012 de finances rectificative pour 2012, est au fond une copie, pâle, d’une taxe britannique : la stamp duty.

Aussi paradoxal que cela puisse paraître, la taxe prévue par le gouvernement précédent à l’article 235 ter ZD du code général des impôts est moins ambitieuse que le droit de timbre britannique. En effet, son taux est de 0, 1 %, alors que celui de la taxe britannique est de 0, 5 %. Pourtant, il n’y a pas plus libéraux que les Britanniques et la City !

Chers amis de l’opposition qui utilisez cet argument, je constate que ce taux élevé n’a pas eu pour conséquence de faire fuir la finance de la City britannique…

Debut de section - PermalienPhoto de Richard Yung

Une autre différence majeure est que le dispositif français s’applique aux seules actions de sociétés françaises dont la capitalisation boursière est supérieure à 1 milliard d’euros, une limitation qui n’existe pas au Royaume-Uni. Donc, les socialistes, ce sont les Anglais !

Partant, le droit de timbre britannique rapporte environ 3, 5 milliards d’euros par an, alors que la taxe française, si elle était maintenue dans sa version adoptée au printemps dernier, rapporterait seulement 1 milliard d’euros.

Dans sa forme actuelle, la taxe française est en retrait par rapport au dispositif conçu par la Commission européenne. En effet, alors que la proposition de directive prévoit un champ d’application large, la taxe française ne vise que les transactions portant sur des actions, avec la limitation que j’ai indiquée. Son assiette n’inclut ni les obligations ni les produits dérivés. Quant aux taux d’imposition, ils sont tous les deux fixés à 0, 1 %.

En prévoyant le doublement du taux de cette taxe pour le porter à 0, 2 %, l’article 6 vise à le rendre identique au taux réel de la taxe proposée par la Commission européenne.

Il est une différence, toutefois, à savoir que la charge financière pèsera exclusivement sur l’acheteur, alors qu’elle devrait être répartie à parité entre l’acheteur et le vendeur.

Le Gouvernement a fait le choix de ne pas modifier, dans l’état actuel des choses, l’assiette de cette taxe. C’est une question dont nous pourrons rediscuter lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2013, d’autant plus que la taxe européenne sera adoptée dans le cadre d’une coopération renforcée, avec sans doute un champ d’application beaucoup plus large.

J’ajoute que, d’après les déclarations que M. Fabius a faites hier, c’est-à-dire tout récemment – et je réponds ainsi à Mme Keller –, il est envisagé que 10 % des recettes de cette taxe soient consacrées au développement.

Pour toutes ces raisons, nous soutiendrons évidemment le doublement du taux de la taxe.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

La parole est à Mme Marie-Hélène Des Esgaulx, sur l’article.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Hélène Des Esgaulx

Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, je dois avouer que cet article 6 m’étonne quelque peu.

Vous proposez, messieurs les ministres délégués, le doublement du taux de la taxe sur les transactions financières lancée par Nicolas Sarkozy et mise en place par le gouvernement Fillon dans la loi du 14 mars 2012 de finances rectificative pour 2012, qui devait entrer en vigueur le 1er août prochain.

Je constate avec surprise, mais avec une grande satisfaction, que la nouvelle majorité a changé son fusil d’épaule… En effet, chers collègues de la majorité, vous n’aviez pas voté pour cette mesure au printemps dernier !

M. le président de la commission des finances acquiesce.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Hélène Des Esgaulx

Vous l’aviez même fortement critiquée lors des débats parlementaires, en visant notamment son assiette et en dénonçant ce que vous appeliez une opération électoraliste.

Voilà que les élections passées, vous changez d’avis ! L’assiette de la taxe semble désormais vous convenir. Il faut croire que l’opération électoraliste était plutôt de votre côté…

Vous n’aviez pas voté notre projet car vous n’assumiez pas politiquement que Nicolas Sarkozy soit l’initiateur d’une taxe que, pourtant, vous appeliez de vos vœux tout autant que nous.

Pour leur part, les sénateurs du groupe UMP restent constants et cohérents avec eux-mêmes. Ils maintiennent leur position du mois de mars, favorable à un taux de 0, 1 %.

En conséquence, nous voterons contre le doublement de ce taux.

Applaudissements sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

La parole est à M. Henri de Raincourt, sur l’article.

Debut de section - PermalienPhoto de Henri de Raincourt

Monsieur le président, messieurs les ministres délégués, mes chers collègues, je serai bref car ma collègue Marie-Hélène Des Esgaulx vient de rappeler fort brillamment et fort opportunément la genèse de la taxe sur les transactions financières.

Dans une de mes vies antérieures, suffisamment récente pour que je m’en souvienne encore quelque peu, l’instauration d’une taxe sur les transactions financières était apparue comme une nécessité absolue.

Mais la nécessité absolue sera désormais d’avoir une discussion de fond – je conçois néanmoins bien que ce n’est ni le lieu ni le moment – au sujet de l’affectation du produit de cette taxe.

Cette initiative, lorsqu’elle a été prise par le président Nicolas Sarkozy, l’année dernière – et elle a en effet été critiquée –, avait en quelque sorte pour but d’amorcer un mouvement, d’accélérer la discussion aux niveaux européen et mondial sur l’affectation de ces nouvelles recettes.

En effet, il est absolument fondamental que le produit de cette taxe ne soit pas exclusivement réservé aux nécessités budgétaires, c’est-à-dire au comblement des déficits : il ne faut surtout pas manquer l’occasion historique de l’utiliser, pour une part non négligeable, au service du développement d’un certain nombre de pays.

Alors que l’aide publique au développement représente aujourd’hui 180 milliards de dollars par an, nous savons que les besoins nouveaux qui se font jour nécessiteront que nous y consacrions dans les années à venir 300 milliards de dollars.

L’enjeu est absolument considérable pour la paix, mais aussi pour la sécurité. En effet, si nous ne parvenons pas à mettre en œuvre dans les pays ayant besoin de cette aide une politique de développement audacieuse et efficace, nous verrons se multiplier les manifestations contre la pénurie alimentaire et les difficultés qu’un certain nombre de pays ont connues assez récemment.

En outre, il y aura des répercussions tout à fait négatives sur les mouvements migratoires – point n’est besoin d’insister.

C’est pourquoi je me réjouis d’avoir entendu le ministre des affaires étrangères évoquer enfin cette question, dont on n’avait pas beaucoup entendu parler jusqu’à maintenant.

Simplement, nous ne devons à mon avis pas nous enfermer dès aujourd’hui dans des idées préconçues. Il nous faut être suffisamment avertis de tous les aspects de cette question, finalement assez complexe, pour avoir un débat global sur notre politique d’aide publique au développement.

Et cette discussion ne doit pas se cantonner au niveau français ! Elle doit avoir lieu d’abord à l’échelon européen, puis à l’échelon mondial.

C’est la raison pour laquelle, monsieur le président de la commission des affaires étrangères, il faut que nous ayons, au moins au départ, une vision commune.

L’instauration de cette taxe en France vise en quelque sorte à montrer l’exemple, pour faire avancer un peu cette noble cause.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

La parole est à M. le président de la commission des finances.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Même si je comprends que M. le ministre délégué au budget se soit absenté – peut-être devait-il traiter des suites d’un précédent scrutin… –, je souhaite interroger le Gouvernement et dire ma conviction que, dans ce débat, c’est non pas le taux, mais l’assiette qui est essentielle.

Nous le savons, nous avons été contraints de lancer cette initiative dans des conditions un peu particulières – elles ont été rappelées – et avec une assiette étroite, à savoir les seules transactions sur actions.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Comme Richard Yung, notamment, l’a souligné, la réflexion européenne, dont on nous dit qu’elle devrait pouvoir avancer assez rapidement, porte sur une assiette beaucoup plus large. Celle-ci englobe, en particulier, les transactions sur les produits dérivés, qui concernent des volumes bien plus considérables, transactions sur la régulation desquelles nous pouvons sans doute accomplir quelques progrès. Peut-être l’un des mérites d’une future taxe européenne sera-t-il d’aller dans le sens de plus de transparence et de régulation sur les marchés de produits dérivés.

Monsieur le ministre, pouvez-vous nous informer de l’état d’avancement, à l’échelon européen, de cette future directive ? Vous semble-t-il possible de réunir les conditions nécessaires, en d’autres termes de convaincre les autres États membres de l’Union ? Ce débat n’est-il pas en quelque sorte un théâtre d’ombres, et la TTF une fiction que l’on agite ? Les intérêts propres de la place de Londres, puisque ceux-ci sont en cause, nous le savons, ne sont-ils pas tels que l’adoption d’un texte européen serait vouée à l’échec ? Pouvez-vous nous dire comment se présentent les positions des uns et des autres et s’il est vraiment réaliste d’espérer aboutir dans les prochains mois, comme nous le souhaitons bien entendu tous ici ?

Dans ces conditions, est-il vraiment si urgent de doubler le taux sur cette assiette étroite, c'est-à-dire de prendre le risque de pénaliser le marché des actions sur la place de Paris ? Celle-ci pourrait par ailleurs être mise à mal par d’autres mesures, susceptibles de dégrader sa compétitivité ; je pense en particulier aux dispositions prévues à l’article 5, dont l’examen a été réservé, qui, comme nous le verrons tout à l'heure, créent une contribution additionnelle à l’impôt sur les sociétés, c'est-à-dire une taxation supplémentaire forfaitaire des dividendes de 3 %.

Ces mesures ne peuvent que créer un handicap pour des émissions de fonds propres sur le marché, pour la réussite d’augmentations de capital, au moment où – on ne cesse de nous le dire – le financement bancaire, le crédit est soumis à des limitations du fait de l’évolution des normes comptables internationales et de la mise en place du système de Bâle III, que nous n’avons sans doute pas analysé de façon assez lucide.

Dans ce contexte, je le répète, est-il vraiment si urgent de doubler le taux sur une assiette réduite aux seules actions, sur le segment de marché qui est sans doute le plus directement connecté à l’économie réelle, aux investissements des entreprises, et qui est par ailleurs le mieux régulé, le plus transparent, celui dont les rouages sont les plus précis ?

Monsieur le ministre, de deux choses l’une : soit l’on croit en l’aboutissement réaliste dans les mois qui viennent du texte européen – il faudrait que vous nous disiez où l’on en est des négociations, des approches préparatoires –, soit l’on n’y croit pas. Dans la première hypothèse, je ne pense pas qu’il soit de bonne politique de doubler aujourd'hui le taux de la taxe sur les transactions financières et je me demande même si le produit que vous affichez n’est pas légèrement optimiste.

Hier soir, Jérôme Cahuzac, dont je comprenais bien les arguments, évoquait certaines mesures prises par la précédente majorité, dont il a rappelé que l’évaluation était un peu optimiste, notamment s'agissant de la réforme de l’impôt de solidarité sur la fortune menée à l’été 2011. M. Cahuzac affirmait que nous avions fait apparaître des recettes dont nous savions l’estimation optimiste. Sans doute n’en étions-nous pas aussi rigoureusement sûrs à l’époque que nous le sommes aujourd'hui, après les faits… Toutefois, ne risquez-vous pas, monsieur le ministre, de commettre la même erreur, ou plus exactement de pécher, comme cela a pu nous arriver, par excès d’optimisme quant au rendement affiché d’une mesure ?

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Richard

J’apprécie intensément l’ambiance de chambre de réflexion qui règne au Sénat ce matin. En particulier, je trouve rafraîchissante l’évolution qu’a connue depuis trois ou six mois la réflexion d’un certain nombre de nos collègues de la nouvelle minorité.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Richard

Mes chers collègues, notre assemblée peut rester une chambre de réflexion pendant encore un instant !

Monsieur de Raincourt, j’ai trouvé vos arguments très convaincants, mais je vous rappelle que nous avons posé à votre collègue M. Leonetti, il y a quatre mois, la question de l’utilisation des produits de la taxe sur les transactions financières. La position du gouvernement auquel vous apparteniez alors était que, bien sûr, ces recettes serviraient à remplacer une part de la contribution française à l’Union européenne. Il s'agissait d’un jeu à somme nulle qui, dans les intentions affichées par le gouvernement de l’époque, n’apportait pas un centime à la lutte contre la pauvreté.

J’en viens aux réflexions toujours pénétrantes du président de la commission des finances sur l’évolution de la taxe sur les transactions financières. Celui-ci estime qu’il serait encore mieux d’attendre que la décision soit entièrement européenne, et je comprends tout à fait sa position. Je rappelle que le Président de la République et la chancelière allemande ont déjà obtenu l’engagement de neuf États européens, ce qui constitue un exploit. Imaginer trouver un accord à vingt-sept est une façon, certes brillante et imaginative, de proposer l’enterrement pur et simple de ce projet.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Richard

Il est tout à fait légitime et judicieux d’approfondir la réflexion sur ce que devrait être l’assiette optimale de cette taxe, me semble-t-il. Néanmoins, en tirer la conclusion qu’il ne faut pas procéder aujourd'hui à une décision de taux représente une évolution assez marquée de la position prise exactement sur le même sujet par la précédente majorité, il y a cinq mois, lors du dernier collectif.

En effet, alors que l’on savait l’assiette insatisfaisante et que l’on ne disposait d’aucun accord européen – bref, alors que les conditions étaient les plus mauvaises –, la majorité gouvernementale de l’époque fut ravie d’instaurer cette taxe.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Richard

Certes, mais la décision a objectivement été prise. Je suis donc heureux que la fonction de chambre de réflexion du Sénat profite en particulier à nos collègues de l’UMP !

Debut de section - PermalienPhoto de Nathalie Goulet

À l'occasion du débat sur cette taxe relative aux transactions financières, je rappellerai simplement le remarquable travail effectué sous l’égide de Philippe Dominati et Éric Bocquet dans le cadre de la commission d’enquête sur l’évasion fiscale des capitaux et des actifs hors de France et ses incidences fiscales.

Cette commission vient de déposer son rapport. J’attire l’attention de M. le ministre sur la proposition n° 54 de cet excellent travail – je le souligne d’autant plus volontiers que j’y ai participé activement !

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Nathalie Goulet

Je crois donc que les membres de notre commission d’enquête voteront avec entrain et enthousiasme les dispositions visant à renforcer cette taxation sur les transactions financières.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

J’aurais aimé pouvoir voter la présente disposition, car, c’est vrai, cette récente taxe sur les transactions financières est un instrument utile, qui dédie une ressource nouvelle à la lutte contre la misère dans les pays en développement.

Je veux rappeler d'ailleurs que la recherche de financements innovants pour le développement remonte à plusieurs années déjà, puisqu’elle a donné lieu au rapport Landau en 2004 et au vote, sur l’initiative de Jacques Chirac, de la loi créant la taxe sur les billets d’avion. Ce sont donc les initiatives successives des présidents de la République Jacques Chirac et Nicolas Sarkozy – il est honnête de le rappeler – qui ont permis de créer ces nouveaux instruments. Je suis heureux de constater que, après les avoir refusés il y a cinq mois, la majorité sénatoriale et, maintenant, le Gouvernement de la République s’y rallient, en voulant même les amplifier.

Il y a malheureusement un point faible dans la disposition qui nous est proposée : comme notre excellent collègue Henri de Raincourt l’a rappelé tout à l'heure, l’affectation à l’aide au développement du produit du doublement de cette taxe, que nous avons créée il y a quelques mois, n’est pas certaine. Pour ma part, je ne pourrai donner mon soutien à cette mesure sans que des garanties juridiques sérieuses soient apportées au préalable, pour faire en sorte que le produit de cette taxe n’aille pas simplement s’ajouter aux ressources créées par ce collectif ou par la loi de finances initiale afin de diminuer les déficits publics, et soit bien directement consacré à l’aide au développement.

Tel n’est pas le cas, malheureusement, et c'est pourquoi je ne peux soutenir cette disposition, à mon grand regret.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

Je suis saisi de sept amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L'amendement n° 164 rectifié, présenté par MM. Collin, Mézard, C. Bourquin, Fortassin, Alfonsi, Barbier, Baylet, Bertrand et Collombat, Mme Laborde et MM. Mazars, Plancade, Requier, Tropeano et Vall, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

I. - L’article 235 ter ZD du code général des impôts est ainsi rédigé :

« Art. 235 ter ZD. – I. – L’ensemble des transactions financières, englobant toutes les transactions boursières et non boursières, titres, obligations, et produits dérivés, de même que toutes les transactions sur le marché des changes, sont soumises à une taxe assise sur leur montant brut.

« II. – Le taux de la taxe est fixé à 0, 05 %.

« III. – La taxe est due par les établissements de crédit, les institutions et les services mentionnés à l’article L. 518-1 du code monétaire et financier, les entreprises d’investissement visées à l’article L. 531-4 du même code et par les personnes physiques ou morales visées à l’article L. 524-1 du même code. Elle n’est pas due par la Banque de France et par le Trésor public.

« IV. – La taxe est établie, liquidée et recouvrée sous les mêmes garanties et sanctions que le prélèvement mentionné à l’article 125 A du présent code. »

II. - Le présent article entre en vigueur à compter du 1er août 2012.

La parole est à M. Yvon Collin.

Debut de section - PermalienPhoto de Yvon Collin

Mes chers collègues, je ne doute pas que cet amendement recevra le soutien de la majorité et d’une bonne partie des membres de l’opposition, puisqu’il vise à mettre en œuvre une disposition proposée par la majorité sénatoriale et adoptée avec des voix venues de tous les groupes politiques, lors de l’examen du projet de loi de finances initiale pour 2012.

À cette occasion, le Sénat avait adopté un amendement de notre excellente rapporteure générale de l’époque visant à instituer une taxe assise sur « l’ensemble des transactions financières », contrairement – faut-il le rappeler ? – au dispositif qui fut retenu ultérieurement sous la précédente législature, à la demande et sur instruction du dernier gouvernement Fillon.

Le dispositif de cette « taxe Sarkozy sur les transactions financières », si je puis me permettre de la nommer ainsi, ne porte que sur les acquisitions d’actions : il est donc bien moins ambitieux – chacun a pu le constater – que celui qu’avait adopté la majorité sénatoriale quelques mois plus tôt.

Permettez-moi, au passage, de souligner l’incohérence du discours du précédent gouvernement à ce sujet : ses membres n’ont eu de cesse de nous dire, lorsque nous défendions ici même, en novembre 2011, sur la proposition du groupe du RDSE, une taxe française sur les transactions financières, qu’il était impossible de mettre en place une telle imposition à l’échelon national. Or ils ont fini par entendre nos arguments, semble-t-il, puisqu’ils les reprennent à leur compte, quelques mois plus tard, pour défendre leur version de la taxe sur les transactions financières, qui est d'ailleurs a minima.

Le premier de ces arguments tenait à la nécessité de « montrer l’exemple » pour ainsi donner une impulsion et être suivis par nos partenaires européens.

Malheureusement, c’est le mauvais exemple que le précédent gouvernement a choisi de montrer en instaurant cette taxe, une taxe au rabais non seulement par rapport aux propositions de notre assemblée, mais aussi au regard de celles de la Commission européenne.

Comme on pouvait le craindre, et le risque est en train de se concrétiser, les autres États européens, notamment les plus réticents, semblent se satisfaire de cette taxe a minima qui leur évite un dispositif plus ambitieux, celui que nous appelons de nos vœux, seul à même de nous permettre de lutter efficacement contre la spéculation financière, dont nous connaissons tous les effets dévastateurs.

Pour que nous ne restions pas impuissants face à l’instabilité des marchés, je vous invite, mes chers collègues, à voter le présent amendement, qui vise à remplacer la taxe sur les transactions financières actuelle par un dispositif plus ambitieux, à l’assiette plus large, au taux plus faible, tel qu’il avait été adopté par le Sénat à deux reprises, lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2012 – le projet de loi de finances initial - et du premier projet de loi de finances rectificative pour 2012.

C’est cette version qui donnera le bon exemple à suivre à nos partenaires européens et enverra le bon signal à l’ensemble de nos concitoyens.

Je compte d’autant plus sur votre soutien, mes chers collègues, que, hier, j’ai noté que M. le ministre chargé du budget, dans sa réponse à mon intervention dans la discussion générale, a reconnu la nécessité d’une taxe sur les transactions financières plus ambitieuse.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

L'amendement n° 177, présenté par M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Bocquet et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

I. – Après l’alinéa 2

Insérer deux alinéas ainsi rédigés :

« 1° bis Le I est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Les titres représentant ceux mentionnés au premier alinéa émis par une société, quel que soit le lieu d’établissement de son siège social, sont soumis à la taxe. »

II. – Alinéa 5

Remplacer les mots :

Le 2° du même I s’applique

par les mots :

Les 1° bis et 2° du même I s’appliquent

La parole est à M. Thierry Foucaud.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La taxe sur les transactions financières peut souffrir d’être confrontée aux outils pour le moins sophistiqués de l’industrie et/ou de l’ingénierie financière, lesquels, si l’on n’y prend garde, auraient tôt fait d’en réduire l’assiette ou de permettre d’y échapper en mettant à disposition des véhicules juridiques et financiers idoines.

Les certificats représentatifs d’actions sont un bon exemple en la matière et leur usage est assez fréquent. La mise sur le marché de produits financiers hybrides pourrait les faire échapper à l’application de la taxe prévue à l’article 6 du présent projet de loi de finances rectificative.

Afin de prévenir ce risque et de rendre possible l’application de la taxe sur les transactions financières aux certificats représentatifs d’actions, nous vous proposons de modifier le paragraphe I de l’article 235 ter ZD du code général des impôts.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

L'amendement n° 165, présenté par MM. Collin, Mézard, Alfonsi, Barbier, Baylet, Bertrand, C. Bourquin, Collombat et Fortassin, Mme Laborde et MM. Mazars, Plancade, Requier, Tropeano, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :

Alinéa 3

Remplacer le taux :

par le taux :

La parole est à M. Yvon Collin.

Debut de section - PermalienPhoto de Yvon Collin

L’article 6 du projet de loi de finances rectificative prévoit le doublement du taux de la taxe sur les transactions financières.

Telle qu’elle a été adoptée durant la précédente législature, cette taxe est plus qu’imparfaite, comme j’ai eu l’occasion de le préciser à l’instant en présentant l’amendement n° 164 rectifié, qui vise à la remplacer par celle qu’a adoptée la majorité sénatoriale lors de la discussion du projet de loi de finances pour 2012.

Monsieur le ministre, si votre gouvernement maintient le dispositif de la taxe sur les transactions financières, je vous propose d’en accroître encore le taux.

En effet, alors que la taxe actuelle s’apparente assez largement au droit de timbre britannique – faut-il d’ailleurs rappeler que la Grande-Bretagne est une farouche opposante à toute initiative européenne de taxe sur les transactions financières ? –, son taux est néanmoins beaucoup plus faible que la taxe pratiquée outre-Manche.

Le droit de timbre britannique frappe en effet les acquisitions d’actions au taux de 0, 5 %, tandis que notre propre taxe, actuellement de 0, 1 %, passerait à 0, 2 % si l’article 6 du présent collectif budgétaire est adopté sans modification.

L’amendement n° 165 vise à faire passer ce taux à 0, 3 %, ce qui ne me paraît nullement excessif et permettrait, en outre, de dégager des ressources supplémentaires pour l’État, élément non négligeable dans le contexte actuel, vous en conviendrez, monsieur le ministre délégué.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

L'amendement n° 200, présenté par M. P. Dominati, est ainsi libellé :

Après l'alinéa 3

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

3° Au premier alinéa du VI, après le mot : « négocié », sont insérés les mots : « à l’achat »

La parole est à M. Philippe Dominati.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Dominati

Avant de présenter les deux amendements que j’ai déposés sur l’article 6, qui sont de nature technique, je souhaite revenir sur les propos de M. Marini.

La taxe sur les transactions financières, évoquée pour la première fois lors de l’examen de la précédente loi de finances, était destinée à lancer une initiative coordonnée à l’échelon international. Elle était soumise à une condition : son extension à l’échelle internationale.

En ce qui concerne la place financière de Paris, l’ambiance qui règne actuellement m’inquiète.

Le silence de la municipalité parisienne quand il s’agit de défendre la place financière de Paris et l’activité qu’elle représente n’est plus à démontrer et tranche par rapport à ce que connaît la place financière de Londres. Mais il a fallu nous y accoutumer depuis un certain nombre d’années. On sait très bien, en effet, que les initiatives économiques ne sont pas le fort de la municipalité parisienne…

Protestations sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Dominati

Mais le même constat peut être dressé aujourd’hui à l’échelon gouvernemental. Compte tenu de la réaction du Premier ministre britannique, nous attendons plus de réactivité du gouvernement français, monsieur le ministre délégué.

Selon notre collègue Alain Richard, neuf États européens auraient approuvé une taxe de cette nature ; d’autres intervenants évoquent six États. La réflexion ne serait pas aboutie. Je souhaite, pour ma part, obtenir des éclaircissements sur ce point. Il est très important de disposer d’un calendrier international et d’obtenir l’assurance que la France ne mène pas trop vite à bien son initiative afin de ne pas être une fois de plus défavorisée par rapport à la place financière de Londres.

J’en viens aux deux amendements que j’ai déposés sur l’article 6.

L’amendement n° 200 tend à préciser le texte pour éviter une éventuelle double imposition du prestataire de services d’investissement lorsque ce dernier agit non pour le compte de ses clients, mais en nom propre.

L’amendement n° 199, quant à lui, concerne la date de promulgation de la loi. La loi de finances rectificative qui résultera de nos travaux ne sera publiée qu’après le 1er août. Or il paraît difficile d’exiger des professionnels redevables qu’ils anticipent le relèvement d’un taux figurant dans une loi non encore promulguée. Par conséquent, cet amendement a pour objet de repousser au 1er septembre prochain l’application du taux proposé.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

L'amendement n° 32, présenté par M. Marc, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :

I. Après l’alinéa 3

Insérer deux alinéas ainsi rédigés :

3° Après le premier alinéa du VI, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Lorsque plusieurs opérateurs mentionnés au premier alinéa interviennent pour l'exécution de l'ordre d'achat d'un titre, la taxe est liquidée et due par celui qui reçoit directement de l’acquéreur final l’ordre d’achat. »

II. Alinéa 5

Remplacer les mots :

Le 2° du même I s’applique

par les mots :

Les 2° et 3° du même I s’appliquent

La parole est à M. le rapporteur général de la commission des finances.

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

Le présent amendement vise à préciser quel est le redevable de la taxe sur les transactions financières lorsque plusieurs opérateurs interviennent dans l’acquisition d’une même action ou d’un même titre assimilé.

Selon le dispositif actuel, la taxe est due par le prestataire de services d’investissement qui exécute l’ordre d’achat, le plus souvent une banque ou une société de gestion. Cependant, il n’est pas rare qu’entre l’ordre d’achat émis par le client, acquéreur final, et l’achat effectif de l’action, plusieurs prestataires interviennent et se transmettent successivement l’ordre d’achat. Ce phénomène est désigné sous l’appellation « chaîne d’intermédiation ».

Dans ces conditions, et pour des raisons pratiques, il convient de préciser que le redevable de la taxe est le prestataire de services d’investissement qui transmet l’ordre qu’il a directement reçu de la part de son client acquéreur final ou qu’il négocie pour son compte propre.

En d’autres termes, le redevable de la taxe est le prestataire le plus proche de l’émission initiale de l’ordre d’achat. L’insertion de cette précision technique dans l’article 6 nous semble nécessaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

L'amendement n° 199, présenté par M. P. Dominati, est ainsi libellé :

I. - Alinéa 5

Remplacer la date :

1er août 2012

par la date :

1er septembre 2012

II. - Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

... – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

Cet amendement a été précédemment défendu.

L'amendement n° 151, présenté par M. Fleming, est ainsi libellé :

I. - Compléter cet article par un III ainsi rédigé :

III. - Le présent article ne s'applique pas à la collectivité d'outre-mer de Saint-Martin.

II. - Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

- La perte de recettes résultant pour l'État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. Louis-Constant Fleming.

Debut de section - PermalienPhoto de Louis-Constant Fleming

Cet amendement a pour objet d’obtenir l’assurance que la loi organique statutaire du 21 février 2007 régissant la collectivité d’outre-mer de Saint-Martin sera bien respectée.

En effet, selon les dispositions du code général des collectivités territoriales issues de cette loi, la collectivité exerce ses compétences en matière d’impôts, droits et taxes, à l’exception des règles fixées par l’État pour Saint-Martin en matière de cotisations sociales et des autres prélèvements destinés au financement de la protection sociale ainsi qu’à l’amortissement de la dette sociale.

Pourtant, dans l’évaluation préalable du doublement du taux de la taxe sur les transactions financières présentée en annexe au projet de loi, figure un tableau suggérant une application éventuelle de cette mesure à la collectivité d’outre-mer de Saint-Martin.

Or il est clair que le produit de la taxe sur les transactions financières ne sera pas affecté au financement de la protection sociale. Il s’agit plutôt d’une imposition assimilable, dans sa nature, à la taxe sur le chiffre d’affaires. L’application d’une telle mesure à Saint-Martin ressortit donc à la seule compétence de la collectivité de Saint-Martin et non à celle de l’État.

L’application éventuelle de cette taxe et, a fortiori, le doublement de son taux contreviendraient aux dispositions de la loi organique régissant Saint-Martin. C’est la raison pour laquelle je souhaite que soit précisé clairement dans le présent article que la taxe sur les transactions financières n’est pas applicable à la collectivité d’outre-mer de Saint-Martin.

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

Depuis plusieurs années déjà, tous les groupes composant l’actuelle majorité sénatoriale ont pris des initiatives et présenté des amendements sur l’important sujet dont nous traitons en cet instant. Cela est vrai bien sûr du CRC, du groupe socialiste et du groupe écologiste, mais je tiens particulièrement à saluer l’activisme de notre collègue Yvon Collin en la matière et le rôle de pionnier de son groupe, le RDSE.

Tout à l’heure, j’ai noté avec intérêt que les plus ardents défenseurs à ce jour de la taxe sur les transactions financières votée sous l’ancienne majorité étaient auparavant les plus réservés, voire les plus virulents, quant à la mise en œuvre de cette taxe. Je me réjouis de leur conversion soudaine ! Ainsi donc la philosophie de cette taxe fait désormais l’unanimité.

Quant à l’affectation de la taxe, c’est un autre débat, qui n’est pas celui du jour, mais il est loin d’être mineur, puisque le produit supplémentaire attendu de la taxe à taux doublé est estimé à 500 millions d’euros.

Je donnerai maintenant l’avis de la commission des finances sur les amendements en discussion commune.

L’amendement n° 164 rectifié permet d’ouvrir le débat sur l’assiette optimale de la taxe sur les transactions financières, qui est limitée aux échanges d’actions françaises quel que soit le lieu de transaction ; l’assiette n’est donc pas délocalisable. Le présent amendement vise à étendre cette assiette un peu restrictive aux obligations, à des produits dérivés, notamment. Nous partageons la philosophie de cette proposition.

Telle est d’ailleurs la position défendue par notre pays, qui essaie de faire passer le message au niveau européen. Mais, jusqu’à présent, ni la France ni l’Europe en général n’ont pu aller plus loin que le fameux stamp duty britannique, qui a quelque peu inspiré le dispositif.

Nicole Bricq nous disait, lors de la présentation de son rapport, que la taxe française constituerait un plus petit commun dénominateur, quitte à essayer ensuite de faire partager notre ambition au reste de l’Europe. Il se trouve que, sans le Royaume-Uni, nos capacités d’action sont, hélas ! un peu limitées…

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

… et vous n’ignorez pas les risques importants de délocalisation.

Dans ces conditions, et comme convenu lors du dernier sommet européen des 28 et 29 juin, il a été envisagé que les neufs pays européens qui souhaitent progresser ensemble dans le cadre d’une coopération renforcée sur ce sujet puissent mettre en œuvre un dispositif commun.

Des réflexions sont en cours qui devraient aboutir dans les prochains mois. Des engagements ont en tout cas été pris pour que nous connaissions avant le mois de novembre prochain les composantes du nouveau dispositif sur lequel sera fondée la taxe. La question de l’assiette sera naturellement posée.

Dès lors, il me paraît un peu prématuré de s’engager dès aujourd'hui sur une extension de la taxe aux obligations et aux produits dérivés, car, d’une part, nous ne disposons pas d’études d’impact à l’instant T et, d’autre part, s’agissant des réflexions engagées en vue d’une coopération renforcée, nous connaîtrons, si je puis dire, le « résultat des courses » dans quelques mois.

Au surplus, mon cher collègue, j’attire votre attention sur le fait qu’envisager la mise en œuvre en France d’un dispositif amélioré incluant une extension de l’assiette imposerait une étude juridique préalable des modalités d’application de celui-ci, ce qui aurait pour effet de stopper la mise en recouvrement, puisque le texte déjà en vigueur n’existerait plus et le futur texte pas encore.

Ce sont ainsi 640 millions d’euros qui manqueraient au budget de 2012, …

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

… ce qui représente 1, 6 milliard d’euros en année pleine. L’argument n’est donc pas négligeable.

Au regard de ces divers éléments, malgré tout l’intérêt de l’amendement et sa philosophie, que nous partageons, je vous suggère, monsieur Collin, de retirer votre amendement.

L’amendement n° 177 de nos collègues du groupe CRC vise à éliminer une possibilité de contournement de la taxe sur les transactions financières en prévoyant qu’y sont également assujettis les certificats représentatifs d’actions émis par des banques étrangères et cotés sur les marchés étrangers.

Cet amendement me paraît d’un grand intérêt, car il supprime une possibilité de contournement de la taxe sur les transactions financières via les certificats représentatifs d’actions émis par les banques étrangères.

Je suis, comme la commission, favorable à son adoption.

L’amendement n° 165 vise à augmenter de 0, 1 % le taux applicable à la taxe sur les transactions financières et donc à le fixer à 0, 3 %, au lieu de 0, 2 % comme proposé à l’article 6.

Une telle augmentation pourrait menacer l’assiette même de la TTF en réduisant les échanges, ce qui pourrait conduire à un certain nombreux d’effets pervers non anticipés, faute d’étude d’impact.

En outre, il me paraît opportun, là encore, de se placer dans le cadre de la réflexion européenne engagée en vue d’une coopération renforcée entre neuf pays européens, dont l’Allemagne, l’Espagne, la Slovaquie ou encore la Pologne, qui ont accepté de cheminer ensemble vers un projet commun, ce qui m’amène à demander également le retrait de cet amendement.

L’amendement n° 200 de M. Dominati, de précision technique, est intéressant, mais il conviendrait d’en mesurer l’utilité et l’impact sur l’efficacité du dispositif de la taxe sur les transactions financières.

Je souhaiterais donc connaître l’avis du Gouvernement sur cette proposition.

Je suis en revanche défavorable à votre amendement n° 199, monsieur Dominati.

D’une part, la date d’entrée en vigueur de la TTF est connue de l’ensemble des acteurs financiers depuis plusieurs mois déjà. D’autre part, les modifications apportées par le présent article ne portent pas sur l’architecture du dispositif. Il me paraît dès lors difficile de remettre en cause des modalités techniques de la mise en œuvre de la TTF, en particulier sa date d’application.

Enfin, en ce qui concerne l’amendement n° 151 de M. Fleming, je crois opportun de rappeler que la taxe sur les transactions financières a vocation à s’appliquer non seulement à l’ensemble des actions des très grandes entreprises installées en France au sens large, mais aussi à tous les prestataires de services d’investissement à l’échelle mondiale.

Pourrait-on imaginer qu’il puisse y avoir un traitement différent pour Saint-Martin ou pour Saint-Barthélemy, par exemple ? La réponse, mon cher collègue, est négative.

Le champ des redevables de la TTF est bien mondial. La taxe a vocation à s’appliquer donc quels que soient la nationalité et le lieu de résidence de l’acheteur ou du prestataire de services d’investissement, aux banques ou aux sociétés de gestion établies à l’étranger comme à celles qui sont établies en France, en métropole ou outre-mer, dès lors qu’elles achètent des actions de sociétés françaises. Saint-Martin ne peut pas avoir un régime spécifique.

Je suis donc défavorable à cet amendement.

Debut de section - Permalien
Benoît Hamon, ministre délégué

Avant de donner l’avis du Gouvernement sur chacun des amendements, je ferai quelques remarques liminaires.

D’abord, l’important est que la TTF devienne internationale, nous en sommes tous d’accord. Pour commencer, nous devons avoir la capacité de construire au niveau de l’Union européenne la coopération renforcée qui donnera toute sa valeur à la taxe et permettra d’accroître son rendement, donc de financer, le cas échéant, le développement, comme vous l’avez suggéré, monsieur de Raincourt.

Je rappelle que le Président de la République avait évoqué, à Rio, l’affectation d’une partie du produit de la TTF au financement du développement, dans le sillage de la taxe sur les billets d’avion créée par le Président Chirac.

C’est un objectif que nous partageons, mais la discussion sur l’affectation du produit de cette taxe relèvera aussi de la négociation que nous allons avoir avec nos partenaires européens.

D’ici à la fin de l’été, une lettre signée par la France et l’Allemagne ainsi que d’autres partenaires européens sera adressée à la Commission européenne pour engager la discussion et appeler la Commission à organiser les conditions d’une coopération renforcée.

Nous voulons que la négociation conduise à la formule la plus ambitieuse qui soit. De ce fait, nous serons ouverts à la discussion tant sur la question de l’assiette – j’ai bien entendu vos préoccupations – que sur celle du taux, même si nous considérons aujourd'hui que notre proposition, c'est-à-dire un taux de 0, 2 %, a le mérite d’être alignée sur celle de la Commission européenne.

Je veux insister sur le fait que notre objectif est bien de passer d’une initiative nationale, qui, si elle restait telle serait trop réduite, à une initiative européenne, et une initiative vertueuse, au sens où elle engagerait un cercle vertueux non seulement, bien sûr, au sein de l’Union européenne mais aussi ailleurs dans le monde.

C’est tout l’objet de la taxe sur les transactions financières et, au lieu de débattre inutilement de la question de savoir qui peut revendiquer la paternité de la taxe, je propose que nous nous félicitions ensemble de ce que la France soit en position de jouer un rôle moteur dans l’institution d’une taxe qui, outre qu’elle contribuera, pour ce qui nous concerne, à rétablir les comptes publics, améliorera le financement du développement dans le monde.

C’est donc une initiative que je souhaite voir réussir, que tous ici vous soutenez et je suis particulièrement heureux que, lors du dernier sommet européen, nous soyons parvenus, à l’instigation de François Hollande, à engager la mise place des conditions d’une coopération renforcée sur ce sujet.

Je veux revenir maintenant sur quelques-uns des arguments de M. Marini, qui s’entendent parfaitement, notamment sur la question de l’assiette.

S’agissant du fameux stamp duty des Britanniques, qui, à l’affichage, paraît constituer une taxe assez séduisante, je veux cependant rappeler que son assiette est exonérée à 75 % et que son produit n’est donc pas celui que l’on pourrait en attendre. Cette taxe n’est ainsi pas aussi exemplaire qu’elle en a l’air, même si elle a le mérite d’exister, et depuis longtemps.

Pour ma part, j’estime que nous devons nous concentrer sur la façon de créer, à travers la taxe sur les transactions financières, un instrument nouveau en même temps qu’un instrument légitime de prélèvement sur les transactions financières.

La réponse à la question de savoir si l’assiette se contractera sous le simple effet du doublement du taux de la taxe est « oui », mais je peux vous assurer que nous avons retenu dans nos estimations sur la contraction de l’assiette, au regard de son rendement pour l’exercice actuel et l’exercice suivant, des proportions bien supérieures comparées à ce qu’avait pu faire la précédente majorité.

L’autre argument économique avancé est que la place parisienne pourrait être menacée. J’entends cet argument, quoique je trouve un peu curieux de renvoyer à Bertrand Delanoë je ne sais quelle responsabilité. La campagne électorale pour les municipales, c’est pour plus tard…

M. Philippe Dominati s’exclame.

Debut de section - Permalien
Benoît Hamon, ministre délégué

Je veux simplement rappeler que quiconque fait une transaction sur un titre français, où que ce soit dans le monde et quelle que soit sa nationalité, sera redevable de la TTF. Il n’y a donc pas de préjudice pour l’industrie financière française non plus que pour la place de Paris.

En outre, dès lors que ne sont concernés que les titres d’entreprises dont le volume de capitalisation est supérieur à 1 milliard d’euros, sont exclues les PME et les ETI, ainsi d’ailleurs que toutes les sociétés établies à Saint-Martin, monsieur Fleming. Il s’agit donc là d’une mesure dont l’effet économique sera très modéré.

Si je comprends les arguments de celles et ceux qui veulent étendre l’assiette aux produits dérivés et aux obligations – position parfaitement respectable –, je ne voudrais pas qu’une telle extension à ce stade retarde la mise en œuvre de l’augmentation de la taxe. En effet, si nous nous engagions dans une réforme d’ampleur, nous reporterions l’augmentation projetée au-delà du 1er août, alors que nous voulons que cette mesure ait un rendement immédiat.

La discussion aura lieu à l’échelle européenne et, dans le cadre des négociations européennes sur l’assiette, notre position sera la plus ambitieuse qui puisse être. Cela n’exclut pas que l’assiette évolue, mais, ce qui importe le plus aujourd'hui, c’est que, dès le 1er août, nous puissions mettre en œuvre cette taxe.

À ceux qui s’inquiéteraient de savoir s’il ne conviendrait pas de repousser la date de mise œuvre, et notamment à M. Dominati, je rappelle que les acteurs économiques savent depuis plusieurs mois que celle-ci interviendra au 1er août et qu’ils savent depuis le 4 juillet que le taux de la taxe sera doublé. De surcroît, ils auront jusqu’au 30 novembre pour payer, ce qui leur laisse un délai suffisant pour s’adapter. Voilà pourquoi, monsieur Dominati, je vous invite à retirer votre amendement n° 199 dont je demanderai sinon le rejet.

M. Collin a présenté deux amendements, l’un – l’amendement n °164 rectifié – qui vise à réduire le taux à condition que l’on élargisse l’assiette, l’autre – l’amendement n° 165 – qui tend à augmenter le taux de 0, 1 % à condition que l’assiette ne soit pas élargie.

Si nous sommes favorables à un élargissement de l’assiette aux certificats représentatifs d’actions proposé à l’amendement n °177, il nous paraîtrait à ce stade difficile, au regard des négociations européennes, de reporter la mise en œuvre au-delà du 1er août, comme nous y serions contraints si nous nous engagions dans une réforme beaucoup plus large de l’assiette de la TTF.

De la même manière, à ce stade des négociations européennes, nous préférons rester alignés sur la proposition de la Commission d’un taux à 0, 2 %.

Pour ces raisons, monsieur Collin, nous sommes défavorables à vos deux amendements, étant cependant entendu que la négociation européenne – nous y pousserons - pourra peut-être faire évoluer les choses, sur les questions du taux ou de l’assiette, et qu’en tout état de cause à ce stade nous intégrons, dans le projet de loi de finances rectificative, l’amendement n° 177.

Nous sommes favorables à l’amendement n° 32 de la commission des finances.

L'amendement n° 200 vise à faire préciser dans la loi que le redevable de la taxe sur les acquisitions de titres de capital est le prestataire de services d'investissement seulement lorsque celui-ci exécute l'ordre d'achat pour son propre compte.

Le Gouvernement juge cette précision inutile. En effet, le prestataire de services d'investissement qui négocie pour son propre compte n'est pas redevable de cette taxe s'il négocie une vente de titres, puisque la taxe ne vise que les acquisitions. C'est la raison pour laquelle le Gouvernement demande le retrait de cet amendement ; à défaut, il émettra un avis défavorable.

J’en viens à l'amendement n° 151.

Quiconque opère une transaction sur une action française sera redevable de la taxe, quelle que soit sa nationalité et où qu’il soit dans le monde, y compris Saint-Martin. Il n'est pas question d’ouvrir aujourd'hui le débat de la souveraineté fiscale de Saint-Martin ; elle n’est pas en cause ici.

Je précise par ailleurs que le volume de capitalisation, dont le seuil est de 1 milliard d'euros, ne concerne à ce stade aucune société établie à Saint-Martin, ce qui devrait vous rassurer, monsieur Fleming. C’est pourquoi le Gouvernement demande le retrait de cet amendement ; à défaut, il émettra un avis défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Yvon Collin

J'ai écouté attentivement M. le rapporteur général et de M. le ministre. Je ne suis toutefois pas complètement convaincu par leurs arguments.

Je remercie M. le rapporteur général d'avoir rendu hommage à tous les pionniers qui, sur ces travées, ont ouvert le débat sur cette taxe.

Je prends acte de la volonté du Gouvernement d'inscrire cette réflexion au sein d'une démarche européenne. Le Gouvernement et le Président de la République ont d'ailleurs déjà pris date.

Par conséquent, je retire l'amendement n° 164 rectifié, ainsi que l'amendement n° 165, monsieur le président.

Debut de section - PermalienPhoto de Yvon Collin

J'ai écouté attentivement M. le rapporteur général et de M. le ministre. Je ne suis toutefois pas complètement convaincu par leurs arguments.

Je remercie M. le rapporteur général d'avoir rendu hommage à tous les pionniers qui, sur ces travées, ont ouvert le débat sur cette taxe.

Je prends acte de la volonté du Gouvernement d'inscrire cette réflexion au sein d'une démarche européenne. Le Gouvernement et le Président de la République ont d'ailleurs déjà pris date.

Par conséquent, je retire l'amendement n° 164 rectifié, ainsi que l'amendement n° 165, monsieur le président.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

Nous le reprenons ensemble, monsieur le président !

Sourires.

Nouveaux sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Tout au plus une « reconstitution d’équipe dissoute »…

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

Je suis donc saisi d’un amendement n° 164 rectifié bis, présenté par MM. Marini et Arthuis, et dont le libellé est strictement identique à celui de l’amendement n° 164 rectifié.

La parole est à M. Jean Arthuis, pour explication de vote sur l'amendement n° 164 rectifié bis.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Todeschini

M. Jean-Marc Todeschini. ... et ne se ressemblent pas !

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

Mes chers collègues, je n'ai jamais été convaincu par la position prise par notre majorité, la précédente. Ce dispositif avait quelque chose d'incantatoire : il s’agissait de taxer la finance, ce qui est toujours assez populaire, mais avec quelle efficacité ? Et n’est-ce pas une manière d'automutilation ? Car enfin, ce qui pose problème, c'est l'effervescence de la spéculation, ce sont les titres dérivés.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

On a donné aux Français l'illusion que l'on avait réglé la question en concentrant le tir sur les actions françaises de sociétés dont le siège est en France. Cela signifie que, si EADS installe son siège aux Pays-Bas, la négociation sur ses actions échappe à la taxe. Très franchement, où est la justice ?

On se donne bonne conscience en affectant une fraction du produit de la taxe au développement dans le monde, aux grandes causes. Mais n'y a-t-il pas quelque hypocrisie à voler au secours du monde quand on est déjà en hyperdéficit et que l’on se finance par l’emprunt ?

Cessons de nous raconter des histoires et faisons preuve de réalisme !

Une base de transaction nous est offerte par l'excellent amendement qu’a présenté notre collègue Yvon Collin. Nous ne pouvons en rester au dispositif actuel.

La majorité d'hier avait, à mon avis, commis une imprudence et la majorité d'aujourd'hui va un petit peu plus loin. Il y a tout de même quelques euros à récolter ! Et c'est aussi une façon de cacher notre misère.

Tout cela me paraît trop approximatif pour être recevable. C'est la raison pour laquelle je voterai cet amendement que nous avons repris, Philippe Marini et moi-même.

Debut de section - PermalienPhoto de Richard Yung

J'ai un peu de mal à suivre ce débat sur l'affectation.

Debut de section - PermalienPhoto de Richard Yung

Le président de la commission des finances ne cesse de répéter qu'il n'y a rien de plus haïssable que l'affectation.

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Richard Yung

Pourtant, certains affirment aujourd'hui qu'ils ne voteront pas cet amendement, car aucune affectation n’est prévue.

Debut de section - PermalienPhoto de Richard Yung

C’est tout à fait blâmable, en effet.

Nous pouvons avoir un débat sur l'affectation : aide au développement ? budget national ? budget européen ? diminution de la quote-part des États au budget européen ? recettes affectées au budget européen ? On peut tout envisager, mais ce n'est pas l'objet de l'amendement.

J’en viens à l’assiette de cette taxe.

Mes chers collègues, je vous rassure, je suis sans doute comme vous, j'ai toujours avec moi ce petit livre.

M. Richard Yung brandit un fascicule. – Exclamations amusées sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Richard Yung

Vous l’avez tous avec vous, je l’espère ?

Nouvelles exclamations amusées sur les mêmes travées.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

M. Alain Gournac. Pour la prière tous les matins !

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Richard Yung

Permettez-moi de citer l’engagement n°7 du candidat François Hollande, aujourd’hui Président de la République élu : « Je proposerai la création d’une taxe sur toutes les transactions financières... »

La feuille de route est donc claire !

Debut de section - PermalienPhoto de Richard Yung

et nous nous en inspirons, mais, dans la mesure où nous considérons que le taux de 0, 1 % n'est pas suffisant, nous souhaitons le porter à 0, 2 %.

Debut de section - PermalienPhoto de Richard Yung

M. Richard Yung. Ce nouveau taux a le mérite d’être identique à celui qui est prévu par les textes européens, qu’ils soient en discussion ou en préparation. Pour le reste, nous y reviendrons dans le cadre de la discussion du projet de finances pour 2013.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

La parole est à M. Philippe Marini, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Monsieur le ministre délégué, je souhaite tout d'abord vous remercier des explications détaillées que vous nous avez fournies, qui constituent une synthèse utile sur ce sujet. C'est dans ce contexte que s’inscrit l'excellent amendement de MM. Collin, Mézard, Christian Bourquin, Fortassin, Alfonsi, Barbier, Baylet, et leurs collègues du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Sur le plan technique, l’amendement pose peut-être encore quelques difficultés, la matière est complexe et, en ce domaine, la mise en œuvre suppose certainement des études complémentaires.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Carrère

M. Jean-Louis Carrère. Regardez ce sourire gourmand !

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Chers collègues, dès lors que nous sommes tous d'accord sur l’idée d’élargir l'assiette, ne serait-il pas opportun que le Sénat, au-delà de ses différences, exprime son adhésion à cet objectif ?

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

La commission mixte paritaire se réunira lundi après-midi. Monsieur le ministre délégué, chers collègues de la majorité, cher collègue rapporteur général, nous le savons d’expérience car, dans le passé, nous nous sommes trouvés à plusieurs reprises dans la même configuration, vous ne prenez absolument aucun risque en votant cet amendement ! L’expression d’une volonté parlementaire sur un sujet en cours de négociation en Europe, comme le rappelait Alain Richard, et dans le cadre d'une coopération renforcée, est indéniablement un « plus », un soutien.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

C’est dans cet esprit que j'ai repris l'amendement, afin de faire progresser le débat.

C'est également la préoccupation de mon collègue Jean Arthuis, que je remercie d’avoir « corepris » cet amendement avec moi !

Sincèrement, mes chers collègues, puisque nous en avons l’occasion, pourquoi nous priver de ce moment d'unanimité ?

Bravo ! et applaudissements sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

La parole est à Mme Fabienne Keller, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Fabienne Keller

Je voterai cet amendement « Marini-Arthuis », inspiré par M. Mézard et ses collègues du RDSE.

En matière de taxe sur les transactions financières, nous semblons désormais très largement d'accord sur les principes. Nous ne pouvons que nous en réjouir, monsieur le ministre délégué. Un consensus large se dégage parmi les responsables politiques, mais également dans la population.

Sur ce sujet, permettez-moi de saluer le courage du précédent Président de la République – Henri de Raincourt était ministre chargé de la coopération, et donc du développement, au moment de la création de cette taxe. Nous voyons bien que cette initiative est une fondation sur laquelle nous pouvons construire une TTF plus développée, avec une assiette plus large, ainsi que les auteurs de cet amendement le proposent.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Carrère

C'est nous qui l’avions proposée à la commission des affaires étrangères !

Debut de section - PermalienPhoto de Fabienne Keller

Monsieur le ministre délégué, vous vous êtes opposé à cette mesure à l'Assemblée nationale, si bien qu’elle n’a pu être soumise au Sénat et que nous n’avons pas eu à nous prononcer.

Je me réjouis qu'un consensus puisse se dégager aujourd'hui.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

Nous nous réjouissons que vous vous réjouissiez !

Debut de section - PermalienPhoto de Fabienne Keller

Le sujet est suffisamment complexe pour justifier que nous mobilisions ensemble toutes nos énergies.

Le dispositif qui nous est proposé ici s’apparente en fait au stamp duty britannique et serait une sorte de droit de timbre à la française. Il rappelle le droit de timbre suisse, qui est le plus ancien, puisqu'il date de 1918.

Nous sommes assez loin des principes développés dans la directive européenne, qui prévoit d'assujettir à la taxe toute transaction, quel que soit le lieu où elle se déroule, dès lors que l'une des parties a un siège, une activité, une filiale dans l'un des États membres.

Avec cet amendement, qui vise à élargir l’assiette, nous sommes plus proches de l'idée fondatrice de cette taxe sur les transactions financières, qui, comme l'a magnifiquement rappelé Jean Arthuis, consiste à « attraper » non pas les actions échangées sur les marchés réglementés – celles-là, tout le monde les connaît - mais bien ces produits que personne ne connaît ni dans leur nature ni dans leur montant, qui font l'objet d'échanges très fréquents, voire à haute fréquence, qui font partie de ce fameux marché gris ou noir et, à ce titre, sont susceptibles de déstabiliser l'ensemble de la finance mondiale.

La taxe sur les transactions financières va dans le bon sens, à l’instar des directives européennes EMIR et MiFID, si elles parviennent à améliorer la transparence ou à redonner une place aux marchés réglementés.

Je tiens à saluer l'initiative de notre collègue Richard Yung, qui a proposé en commission une résolution allant dans le sens d'un renforcement de cette transparence.

Pour toutes ces raisons, mes chers collègues, comme nous sommes animés de la même volonté de faire avancer ce dossier non seulement français, mais européen, je vous propose, dans une belle unanimité, d’envoyer un signe et de soutenir cet amendement, qui marque la volonté de la France d'être à la pointe en matière de taxe sur les transactions financières.

Applaudissements sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Carrère

M. Jean-Louis Carrère. Les violons sonnent faux !

Sourires sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

M. le président. La parole est à M. Jacques Mézard, pour explication de vote.

Exclamations ironiques sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

M. Jacques Mézard. Monsieur le président, monsieur le ministre délégué, mes chers collègues, je remercie tout d’abord M. le rapporteur général de la commission des finances d’avoir rappelé les initiatives prises par M. Collin et mon groupe, le RDSE. Je tiens également, bien sûr, à remercier MM. Arthuis et Marini de reconnaître aujourd’hui les vertus de propositions que nous avions formulées voilà un certain nombre de mois. Malheureusement, elles n’avaient pas été beaucoup suivies d’effets, du temps où M. Arthuis était président et M. Marini rapporteur général de la commission des finances !

Sourires sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Aujourd’hui, vous reconnaissez que nous avions raison. Je vous invite pourtant à relire ce que vous nous aviez répondu à l’époque.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Nos propositions étaient intéressantes, méritaient d’être étudiées, mais, bien sûr, elles étaient inapplicables, car elles devaient faire l’objet d’un accord international. Voilà ce que vous nous disiez alors.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Je résume, mon cher collègue.

Il se trouve qu’il y a eu un certain changement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Force est de constater que des modifications sont intervenues sur le plan international. Depuis deux mois, un certain nombre d’initiatives ont été prises dans ce domaine. Il apparaît, notamment, que neuf pays sont en train de travailler ensemble pour faire des propositions convergentes nous permettant d’avancer.

Certes, il ne faut pas être dupe et vous avez manifesté une bien grande habileté en reprenant notre amendement, chers collègues. Néanmoins, nous vous avons entendu, monsieur le ministre délégué, et nous tenons aux objectifs qu’a clairement posés M. Collin.

Monsieur le ministre délégué, dans la mesure où le Gouvernement va donc travailler rapidement au niveau européen, en compagnie des autres pays européens qui sont sur cette ligne, nous confirmons le retrait de notre amendement et nous allons vous faire confiance. Mais nous reviendrons à la charge, car notre objectif n’avait rien d’électoral et nous sommes inspirés par une vraie conviction !

Très bien ! et applaudissements sur certaines travées du RDSE, ainsi que sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

La parole est à M. le rapporteur général de la commission des finances.

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

Pour ma part, je voudrais revenir à l’examen d’un projet de loi de finances rectificative, qui a vocation, je l’ai rappelé en introduction, d’une part, à redonner à la France une image positive en Europe, et, d’autre part, à améliorer notre solde budgétaire.

De ce point de vue, monsieur le président de la commission des finances, vous avez tendance à oublier, par ce petit jeu politicien que vous vous plaisez à pratiquer, §

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

C’est sûr, vous, vous ne faites pas de politique !

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

… que la somme en jeu est de 650 millions d’euros.

Non seulement le Gouvernement a trouvé, en arrivant aux affaires, un déficit de 84 milliards d’euros, …

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Lenoir

C’est pourquoi il faut élargir l’assiette !

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

vous essayez d’empêcher la rentrée dans les caisses de ces 650 millions d’euros en 2012. Car telles seraient les conséquences de l’adoption de votre amendement.

J’ai bien compris l’initiative des radicaux du groupe RDSE, engagés dans une démarche positive et constructive de recherche d’un compromis à l’échelon européen. Je remercie mes collègues du soutien qu’ils apportent à notre position, eux qui ont compris que nous avons grand besoin de la recette en question. L’amélioration des comptes publics contribuera à donner une image plus positive de la France et à servir sa parole, ce qui est essentiel actuellement.

J’invite donc le Sénat à rejeter l’amendement repris par MM. Marini et Arthuis.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.- Protestations sur les travées de l'UMP.

Debut de section - Permalien
Benoît Hamon, ministre délégué

Je souhaite apporter quelques précisions, notamment à M. Mézard et à M. Collin, qui ont déposé l’amendement originel.

Je vous remercie de la confiance que vous marquez au Gouvernement. La France est en train de retrouver un rôle positif au sein de l’Union européenne, un véritable leadership.

Exclamations sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Hélène Des Esgaulx

Nous aimerions bien que la France exerce un leadership en Europe !

Debut de section - Permalien
Benoît Hamon, ministre délégué

Laissez-moi terminer !

Le souhait du Gouvernement est de faire en sorte que cette taxe sur les transactions financières soit, demain, européenne et que son assiette lui permette d’avoir un rendement tel qu’elle puisse contribuer à l’amélioration du financement du développement, objectif qui semble vous motiver.

Réjouissez-vous de ce leadershippositif et constructif de la France depuis l’élection de François Hollande !

Nouvelles exclamations sur les travées de l'UMP.

Debut de section - Permalien
Benoît Hamon, ministre délégué

La négociation sur l’assiette, que nous mènerons avec nos partenaires européens, pourra notamment porter, en ce qui concerne l’assiette « actions », sur les transactions de court terme et les achats-reventes dans la même journée.

Ces discussions seront ouvertes ; nous leur avons fixé un objectif ambitieux depuis le départ, sur l’initiative du Président de la République et du Gouvernement. Nous y mettrons toute notre énergie et considérerons tous les arguments, y compris ceux que j’ai entendus dans cet hémicycle sur l’élargissement de l’assiette - même si je ne suis pas plus dupe que M. Mézard et si j’ai bien compris l’agilité de l’ex-majorité et actuelle opposition -, car nous voulons surtout parvenir à un accord européen sur le sujet.

Le mieux étant l’ennemi du bien, il est important de parvenir à un tel consensus, de sorte qu’un seul pays ne se retrouve pas isolé au sein d’une Europe elle-même isolée dans le monde. Au bout du compte, cette taxe contribuera à la réduction des déficits et à l’amélioration du financement du développement.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

M. le président. La parole est à M. Philippe Bas, pour explication de vote.

Murmures sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

Monsieur le ministre délégué, la situation est assez paradoxale. Vous-même venez d’évoquer le préalable européen. Vous souhaitez qu’une taxe à large assiette soit adoptée par l’ensemble des pays européens. Tel est aussi notre souhait.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

Mais ne pensez pas un seul instant que, dans la négociation européenne, vous serez plus fort en étant le moins-disant en ce qui concerne l’assiette de cette taxe.

Vous seriez au contraire beaucoup plus fort si vous donniez votre approbation à cet amendement, issu de vos propres rangs, que nous avons repris dans un souci de compromis sur toutes les travées de cette assemblée.

Protestations sur les travées du groupe CRC, du groupe socialiste et du groupe écologiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

Ayons, enfin, une position claire vis-à-vis de nos partenaires européens, pour faire adopter cette taxe à assiette large.

Je finis par me demander si vous êtes sincères dans votre volonté de pousser à la création d’une taxe sur les transactions financières internationales au niveau européen et d’en voir affecter le produit à l’aide au développement, alors que vous refusez de le faire actuellement.

Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

Je mets aux voix l'amendement n° 164 rectifié bis.

J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe UMP.

Exclamations sur les travées du groupe écologiste, du groupe socialiste et du groupe CRC, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

Je rappelle que la commission comme le Gouvernement ont émis un avis défavorable.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

Le scrutin a lieu.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

Il est procédé au dépouillement du scrutin.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

Voici le résultat du scrutin n° 124 :

Nombre de votants346Nombre de suffrages exprimés346Majorité absolue des suffrages exprimés174Pour l’adoption170Contre 176Le Sénat n'a pas adopté.

Ah ! sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

L'amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Dominati

Considérant, monsieur le président, les précisions apportées par M. le ministre délégué comme en partie satisfaisantes, je le retire.

L'amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Dominati

La promulgation de la loi doit avoir un sens. Il semble nécessaire de laisser à l’administration la possibilité d’annoncer aux redevables l’entrée en vigueur du nouveau dispositif.

Pour cette raison, je maintiens l’amendement n° 199.

J’ai noté que le rapporteur général motivait en partie sa demande de retrait de l’amendement n° 164 rectifié par l’absence d’étude d’impact le concernant. Mon propos n’était pas différent, monsieur le ministre délégué, lorsque je demandais à connaître l’impact de cette taxe sur la place financière de Paris. J’ai également remarqué la lucidité dont vous avez fait preuve, en constatant que l’unanimité, ou peu s’en faut, régnant sur ce sujet au sein de cette assemblée n’était pas du tout partagée en Europe – 9 pays sur 27, cela n’a rien d’une majorité – et dans le monde financier en général.

Que la France, pays le plus imposé de toutes les économies développées, veuille retrouver un leadership international n’est pas plus pour nous étonner. Il reste à convaincre nos partenaires européens. Cela prendra du temps. Je souhaitais donc que l’on n’accélère pas la cadence sur ce point, car cela se ferait au détriment de la place financière de Paris.

Je le répète, aucune étude d’impact n’a été réalisée, aucun travail n’a été mené à l’échelle régionale ou locale pour en mesurer les conséquences. Je tenais donc, une nouvelle fois, à attirer votre attention sur ce point.

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Louis-Constant Fleming

Les assurances données par M. le ministre délégué au sujet de la compétence en matière de fiscalité de Saint-Martin, ainsi que l’existence de deux conventions – la convention fiscale avec la France et la convention d’échange de renseignements –, me satisfont.

En conséquence, je retire l’amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

L’amendement n° 151 est retiré.

Je mets aux voix l’article 6, modifié.

L'article 6 est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

L'amendement n° 166, présenté par MM. Mézard, Alfonsi, Baylet, Bertrand, C. Bourquin, Collin, Collombat et Fortassin, Mme Laborde et MM. Mazars, Plancade, Requier, Tropeano, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :

Après l'article 6

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

La seconde phrase du IV de l’article 232 du code général des impôts est ainsi rédigée :

« Son taux est fixé à 12, 5 % la première année d’imposition, 15 % la deuxième année et 20 % à compter de la troisième année. »

La parole est à M. Jacques Mézard.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

M. Jacques Mézard. Je ne doute pas que cet amendement sera repris par tous sur toutes les travées.

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Cet amendement vise à modifier l’article 232 du code général des impôts. Il a pour objet de majorer les différents taux de la taxe sur les logements vacants.

Cette taxe a été instituée en 1999 afin de limiter la spéculation immobilière et de remédier au tarissement de l’offre de logements. Mais, nous le vivons dans nos collectivités, ce tarissement persiste, et la pénurie de logements dans certaines villes atteint des niveaux extrêmement inquiétants, notamment en ce qui concerne les logements sociaux, dont le déficit est évalué aujourd'hui à près de 900 000.

La taxe sur les logements vacants n’est donc pas suffisamment dissuasive. C’est pourquoi nous proposons d’en relever le taux, qui passerait de 10 % à 12, 5 % la première année d’imposition, de 12, 5 % à 15 % la deuxième année et de 15 % à 20 % à partir de la troisième année.

Certes, nous ne nous faisons pas d’illusions, nous savons que cette mesure à elle seule ne suffira pas à résoudre le problème de la pénurie de logements dans notre pays.

Bien évidemment, ce point devra faire l’objet d’une réflexion approfondie et d’un ensemble de mesures cohérentes et efficaces rassemblées dans un projet de loi sur le logement, texte que les sénateurs du RDSE attendent. Il y a urgence, nous le savons tous. C’est l’un des problèmes fondamentaux de notre pays, et il concerne nombre de nos concitoyens.

D’ici là, nous vous proposons, mes chers collègues, d’adopter le présent amendement visant à augmenter les taux de la taxe sur les logements vacants. Ce serait un excellent message politique, surtout s’il émanait de notre assemblée unanime, et de très bon augure pour une autre politique du logement.

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

Cet amendement prévoit une augmentation modérée des taux de la taxe sur les logements vacants.

Cette taxe, dont le produit est affecté à l’Agence nationale pour l’amélioration de l’habitat, l’ANAH, est assise sur la valeur locative des logements.

Son taux est fixé à 10 % la première année d’imposition, 12, 5 % la deuxième année et 15 % à compter de la troisième année. L’amendement propose une très légère augmentation, en portant respectivement ces taux à 12, 5 %, 15 % et 20 %.

J’indique cependant à nos collègues que le produit supplémentaire ne sera pas versé d’office à l’ANAH, puisque cette affectation est plafonnée à 21 millions d’euros en application de l’article 46 de la loi n° 2011-1977 du 28 décembre 2011 de finances pour 2012.

En outre, je pense qu’il faudra également revoir le périmètre de la taxe, qui ne s’applique en l’état qu’aux logements vacants situés dans les agglomérations de Paris, Lyon, Lille, Bordeaux, Toulouse, Montpellier, Nice et Cannes-Grasse-Antibes.

En conséquence, la commission des finances émet un avis favorable sur un amendement que le Sénat avait d’ailleurs déjà adopté dans le cadre de la loi de finances pour 2012.

Debut de section - Permalien
Benoît Hamon, ministre délégué

Monsieur le sénateur, vous proposez d’augmenter les taux de la taxe sur les logements vacants.

Votre préoccupation est née du constat de la spéculation immobilière dans de nombreuses régions, notamment la région parisienne. C’est la réalité : une multitude de logements vacants contribuent à alimenter la spéculation immobilière. Vous proposez donc le doublement en trois ans de la taxe sur ces logements vacants.

Réfléchir à la façon dont nous devons lutter contre la pénurie de logements, contribuer à la modération tant attendue des loyers, permettre que les Français puissent se loger à des prix acceptables, et donc réduire cette part des dépenses incompressibles dans le budget des ménages, est aussi l’une préoccupation du Gouvernement.

Dans le cadre de la préparation du projet de loi de finances initiale, la ministre du logement, Cécile Duflot, mais également Pierre Moscovici et Jérôme Cahuzac, réfléchissent à une série de mesures qui pourraient contribuer à faciliter la lutte contre l’existence d’un parc de logements vacants aussi important que celui que nous connaissons. Cela me semble aller dans le sens de votre réflexion, monsieur le sénateur.

Il faut néanmoins faire attention à un détail technique : si la taxe est augmentée de manière trop rapide et brutale, la tentation sera grande de contourner le dispositif. Par exemple, il suffit d’installer quelques meubles dans un logement par ailleurs inoccupé : on devient, certes, redevable de la taxe d’habitation, mais on s’exonère de la taxe sur les logements vacants !

Cela dit, votre préoccupation étant légitime et rejoignant la volonté du Gouvernement de faire en sorte que, demain, on puisse se loger moins cher, le Gouvernement s’en remet à la sagesse de la Haute Assemblée.

Très bien ! sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

La parole est à M. Christophe Béchu, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Christophe Béchu

Personne ici ne le conteste, le logement est une source de préoccupations, et la vacance est l’un des leviers pouvant permettre de régler en partie le problème.

En revanche, je suis surpris du débat auquel nous venons d’assister. On nous a expliqué, il y a quelques instants, sur la taxe sur les transactions financières, qu’il était souhaitable d’avoir une vision d’ensemble, que le présent projet de loi de finances rectificative n’avait qu’une ambition temporaire, qu’il ne s’agissait pas de mettre en place des mesures structurelles et que, en quelque sorte, l’on se contentait de poser quelques rustines financières et d’indiquer un certain nombre de directions.

Le groupe RDSE et son président se sont laissé convaincre qu’il était souhaitable d’avoir une vision d’ensemble sur la TTF, qu’ils pouvaient faire confiance au Gouvernement, ce qui justifiait que l’on n’adopte pas de mesures dans l’immédiat.

À l’inverse, alors que le logement est un sujet extraordinairement complexe, que les leviers d’intervention sont multiples - la construction, le blocage des prix, la taxe sur la vacance et j’en passe -, il serait nécessaire d’adopter dès aujourd'hui cette mesure !

Le rapporteur général qualifie l’augmentation de légère. Le ministre délégué a, me semble-t-il, été plus clair, en indiquant que cela représentait un doublement de la taxe en trois ans. Une augmentation de 100 % en trois ans, ce n’est pas exactement « léger « ; c’est, au minimum, significatif, pour ne pas dire davantage.

Si je ne suis absolument pas hostile à une réflexion en ce sens, voire à un alourdissement de la taxation sur les logements vacants, je ne comprendrais pas, alors que l’on nous annonce des textes significatifs sur le logement, que l’on adopte un tel dispositif au sein du présent projet de loi de finances rectificative.

Cette mesure aurait plutôt vocation à s’inscrire dans un texte plus large, plus global. Cela permettrait en outre de s’apercevoir de la cohérence des mesures envisagées par le Gouvernement en la matière. Je pense notamment à la manière dont il intègre les risques de contournement qui ont été évoqués, à la façon dont il honore ses ambitions en matière de construction de logement, ainsi qu’à la force de son engagement pour faire en sorte que nos concitoyens se logent à des tarifs raisonnables, objectif qui a été présenté par le Premier ministre dans la déclaration de politique générale.

Applaudissements sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

La parole est à Mme Catherine Procaccia, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Procaccia

Je voudrais simplement poser une question : cette taxe sur les logements vacants s’applique-t-elle également aux logements sociaux ?

Je m’explique.

Dans le département dont je suis l’élue, tous les offices d’HLM se plaignent du nombre de logements vacants. Ils disent également avoir du mal à loger des locataires dans certaines cités difficiles, et à recenser les logements vacants. Le préfet a confirmé ces propos.

Cette taxe, donc, s’appliquera-t-elle également au logement social ?

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

La parole est à M. Philippe Dallier, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Dallier

Le ministre s’en remet à la sagesse de notre assemblée. S’il adopte cette position, c’est qu’il n’est peut-être pas tout à fait convaincu de l’opportunité de cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Carrère

Ne faites pas l’exégèse des propos du ministre !

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Dallier

Eh bien, je le prends au mot, et je vous propose, mes chers collègues, de faire preuve de sagesse !

Le nombre des mises en chantier décline de manière très significative. La baisse des droits de mutation dans nos collectivités territoriales, chacun le voit, sera, cette année, de l’ordre de 25 % ou 30 %, voire plus.

Le logement est un vrai problème dans notre pays. Le Gouvernement envoie un certain nombre de signaux, que je qualifierais de contradictoires. Il a décidé d’encadrer les loyers de manière assez franche. En réalité, il n’a pas agi pour faire en sorte que les loyers baissent, il a simplement gelé la situation.

J’ai souvent eu l’occasion de dire dans cette enceinte que l’on pouvait trouver, en Seine-Saint-Denis, département dont je suis l’élu, des appartements dans un état piteux, pourtant loués à 25 euros le mètre carré. C’est assez exorbitant. Et même pour des logements loués à ce prix, les aides publiques sont versées. Elles contribuent donc également, à mon sens, à pousser le marché à la hausse.

Il nous faudra mener cette réflexion.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Dallier

La sagesse serait plutôt – j’irai dans le sens de Christophe Béchu – de considérer le dossier dans son ensemble, d’y bien réfléchir, et de proposer un ensemble de mesures cohérentes.

Vous vous êtes attaqués aux loyers. Vous voulez désormais vous attaquer aux logements vacants ; pourquoi pas ? J’ai tout de même assez peur du résultat. Les investisseurs pourraient bien se détourner radicalement du logement. Au bout du compte, croyez-moi, les conséquences seraient dramatiques !

Certains – je n’ose pas dire les plus extrémistes –…

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Dallier

… pourraient peut-être penser que le logement social aurait tout à gagner d’une attaque portée contre le logement privé. Je ne suis pas certain que cela soit, in fine, un bon calcul. Je pense même le contraire.

La sagesse serait donc de différer toute prise de position hâtive.

J’ajoute un élément, qui n’a pas manqué de m’inquiéter. Nous nous interrogeons sur le sort réservé à Action Logement, l’ancien 1 % patronal.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Dallier

Nous avions mis en place un prélèvement pour financer l’ANRU et l’ANAH, mais il avait été mal vécu par les partenaires sociaux. L’opposition d’alors l’avait largement critiqué, en invoquant l’extrême ponction que cela représentait. Or j’ai lu que Jérôme Cahuzac envisageait, pour l’année prochaine, de faire main basse sur le 1 %. Dès lors, il ne resterait rien du tout : plus d’aides aux salariés qui souhaitent acquérir un logement, plus de possibilités pour les travaux, plus rien !

La situation de ce secteur, si important pour l’économie française, est donc extrêmement difficile.

Procéder comme cela, à coup de mesurettes, sans ligne claire qui se dégage, serait très préjudiciable. Voilà pourquoi, à mon tour, mes chers collègues, je vous appelle à la sagesse !

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

La parole est à M. François Rebsamen, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de François Rebsamen

M. François Rebsamen. Inutile de s’enflammer ainsi, mes chers collègues.

Exclamations sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Dallier

Qui parle de s’enflammer ? Nous sommes convaincus, c’est tout !

Debut de section - PermalienPhoto de François Rebsamen

Continuons de travailler comme nous l’avons fait jusqu’à présent.

J’ai écouté avec intérêt, comme d’habitude, notre collègue Philippe Dallier.

Il faut soutenir cet amendement, pour des raisons simples.

D’abord, un tel dispositif a déjà été voté au Sénat.

Debut de section - PermalienPhoto de François Rebsamen

Ensuite, le ministre chargé du dossier à l’époque avait estimé qu’il s’agissait d’une très bonne proposition, mais qu’il était un peu tôt pour la mettre en œuvre. C’était voilà quelques mois. Nous suggérons à présent qu’elle entre concrètement en vigueur.

Enfin, d’après les constats qui ont été dressés, le taux de vacance a nettement diminué dans les agglomérations où la taxe sur les logements vacants s’applique. Par conséquent, comme le soulignait d’ailleurs le ministre du logement de l’époque, la taxe est efficace pour faire diminuer la vacance.

Cette mesure aura donc pour effet d’accentuer la remise sur le marché de logements qui sont aujourd'hui retenus pour des diverses raisons, sur lesquelles je ne m’étendrai pas. Je suis tout à fait favorable, avec le groupe socialiste, à l’adoption de cet amendement.

Applaudissements sur quelques travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

La parole est à M. Jean Arthuis, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

M. Jean Arthuis. Je voudrais à mon tour appeler à la sagesse.

Marques d’ironie sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

J’ai besoin d’être éclairé. Suffit-il de mettre des logements sur le marché pour faire résorber la vacance ? De nombreux logements sur le marché sont vacants.

La diversité régionale en matière de logements est forte. Il y a des régions où la demande est très supérieure à l’offre. Il y a aussi quelques régions où, à l’inverse, l’offre de logements est supérieure à la demande. Cela se vérifie dans un certain nombre de logements du parc social, mais également dans le privé.

Par conséquent, s’il devait y avoir un « acte III » de la décentralisation, cela pourrait consister à mettre à la disposition des autorités régionales des instruments de cette nature pour qu’ils correspondent à la réalité du terrain.

Je ne voterai donc pas cet amendement, qui me paraît trop brutal et qui s’appliquerait à des situations très diverses.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

La parole est à M. le rapporteur général de la commission des finances.

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

Je souhaite apporter quelques précisions complémentaires en réponse à certains arguments qui ont été avancés et qui sont parfois mal fondés.

Tout d’abord, M. Béchu a évoqué un « doublement » en trois ans. Ce n’est pas du tout le cas. En effet, vous l’aurez noté, il s’agit de passer de 10 % à 12 %, de 12, 5 % à 15 % ou de 15 % à 20 %.

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

Chacun des trois taux en vigueur supporte une augmentation modeste. Cela ne correspond en rien à un doublement en trois ans.

En outre, madame Procaccia, aux termes du II de l’article 232 du code général des impôts, les logements sociaux ne sont pas concernés.

M. Arthuis a évoqué l’étendue du dispositif. Rappelons simplement qu’il n’est pas possible, à l’heure actuelle, de faire abstraction de la volonté du bailleur. Si un bailleur met en location mais ne trouve pas preneur, la taxe ne s’applique pas pendant deux ans.

Elle s’applique seulement si l’on constate une volonté délibérée du bailleur de ne pas mettre le logement sur le marché. Votre préoccupation est donc satisfaite, mon cher collègue ; il n’y a pas de risque.

C’est pourquoi les arguments qui ont été avancés ne me paraissent pas justifier de changement de position de la part de la commission, qui a émis un avis favorable sur cet amendement.

Monsieur Dallier, non seulement cette mesure avait déjà été votée par le Sénat – M. Rebsamen l’a rappelé –, mais, en plus, elle s’inscrit dans le cadre d’une réflexion longue du Sénat. Plusieurs rapports ont été remis sur le sujet, dont celui, entre autres, de notre ancien collègue Thierry Repentin, fait au nom de la commission de l’économie. Nous nous appuyons sur cet acquis. C’est, me semble-t-il, une démarche tout à fait rigoureuse.

Il s’agit donc d’une avancée nécessaire et attendue de longue date. Raison de plus pour franchir cette étape aujourd'hui, « ici et maintenant » !

Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

M. Philippe Marini. Voilà une belle référence, passée dans la littérature !

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

La parole est à M. Serge Dassault, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Serge Dassault

Mes chers collègues, qu’entendez-vous par « logement vacant » ? Un logement vide ? Mais si un logement est vide, c’est peut-être tout simplement parce que l’on n’a pas trouvé de locataire ou d’acquéreur.

Il faut donc mieux définir la notion de « logement vacant ». Un logement que l’on achète pour les enfants une fois qu’ils seront majeurs est un logement vacant. Une maison de campagne dans laquelle on ne va pas pendant un an est un logement vacant.

Vous évoquez également un taux de 10 % ou de 20%. Mais 10 % ou 20 % de quoi ? De la valeur du bien ? Mais elle évolue en permanence. Ces chiffres sont bien jolis, mais à quoi correspondent-ils ?

Exclamations sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Serge Dassault

Entre nous, si vous voulez des logements, commencez par ne pas bloquer les loyers ! Le blocage, c’est le meilleur moyen pour qu’il n’y ait plus du tout de construction de logements. C’est ce qui s’est passé après la guerre ; on a vu le résultat. Essayez plutôt de lancer des constructions de logements bon marché là où il y a de la demande !

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-France Beaufils

Cela vaut d’ailleurs pour tous les présidents de séance, qui connaissent le même problème.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

M. le président. Ma chère collègue, quand on souhaite avoir la parole, il faut lever la main pour la demander.

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-France Beaufils

Mme Marie-France Beaufils. Mais, précisément, je l’ai fait, monsieur le président.

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-France Beaufils

Mme Marie-France Beaufils. Mais, précisément, je l’ai fait, monsieur le président.

M. Jean-Louis Carrère applaudit.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-France Beaufils

Il me semble tout à fait opportun de soutenir la démarche de M. Mézard et des membres du groupe RDSE. Le dispositif ouvrira de nouvelles possibilités pour répondre aux besoins dans les grandes agglomérations, particulièrement concernées par la question du relogement.

Ce n’est pas à ce stade de la discussion des articles que nous réglerons le problème des logements insalubres ou en mauvais état. Mais nous pourrons envisager de nouveaux modes opératoires pour le résoudre.

L'amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances rectificative, après l'article 6.

I. – Il est créé une taxe additionnelle à la taxe prévue à l’article 235 ter ZE du code général des impôts due au titre de 2012. Elle est due par les personnes redevables, en 2012, de cette dernière taxe.

Cette taxe additionnelle est égale au montant de la taxe de risque systémique qui était exigible au 30 avril 2012.

Elle est exigible le 30 août 2012.

Elle est acquittée auprès du comptable public compétent au plus tard le 30 septembre 2012.

Les VI à X du même article 235 ter ZE s’appliquent à cette taxe additionnelle.

II

III

Debut de section - PermalienPhoto de Joël Bourdin

M. Joël Bourdin. Monsieur le président, monsieur le ministre délégué, mes chers collègues, la taxe de risque systémique n’est pas forcément mauvaise en soi, ne serait-ce que parce qu’elle a été instituée par le Parlement à la demande du gouvernement précédent.

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Joël Bourdin

En revanche, le doublement de son taux pose problème, parce que son assiette est elle-même problématique. En effet, la taxe est assise sur les actifs des banques, plus précisément sur les actifs pondérés par un indice de risque : ce ne sont donc pas des actifs réels. Les actifs sont corrigés, multipliés par des coefficients, les actifs monétaires, supérieurs à un, ce qui a pour conséquence de « gonfler » l’assiette.

L’idée est effectivement d’imposer une taxe sur les banques beaucoup plus engagées dans des actifs spéculatifs. On assimile ainsi le « risque » à la « spéculation ».

Cependant, méfiance ! Il y a, certes, des risques choisis : les banques qui les ont choisis ont d’ailleurs été pénalisées dans le passé et ont même pénalisé les autres acteurs… Mais il y a aussi des risques nouveaux subis par les banques.

Dans les revues financières, on lit beaucoup de débats sur le ratio de liquidité. Et on nous dit de faire attention. Voilà quelques années, quand une banque achetait certaines obligations, des bons souverains, pas forcément de la Grèce, c’était considéré comme de la monnaie : as good as money. Ce n’était pas pondéré, ni risqué.

Désormais, les banques commencent à voir leurs actifs du bas de bilan pénétrés par des éléments de risque qu’elles n’ont pas choisis. Il y a des bons qu’elles considéraient comme de la monnaie qui n’en sont plus.

Par conséquent, si on impose les banques sur cette partie-là via la taxe de risque systémique, elles accumuleront moins d’obligations, moins de bons, et seront moins présentes sur le marché. Je vous laisse imaginer ce que cela signifie : elles auront sans doute moins d’actifs risqués de bas de bilan, mais elles accorderont moins de crédit. D’ailleurs, c’est déjà un peu le cas aujourd'hui.

Faisons donc attention ! Je suis favorable à la taxe de risque systémique, mais réticent quant au doublement de son taux. N’allons pas trop loin. Il est facile de taper sur les banques. Mais, et j’utiliserai la métaphore du système sanguin, tout le monde a besoin des banques. Des erreurs ont peut-être été commises, certains choix ont sans doute été mauvais, mais les banques sont aujourd'hui fragiles : elles risquent de ne pas être alimentées en liquidités. Alors, méfiance ! Ne tirons pas sur le pianiste !

Applaudissements sur quelques travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

L'amendement n° 33, présenté par M. Marc, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un IV ainsi rédigé :

IV. – Le Gouvernement remet, avant le 31 mars 2013, un rapport au Parlement sur l’assiette de la taxe de risque systémique mentionnée à l’article 235 ter ZE du code général des impôts. Ce rapport étudie notamment les modalités d’un élargissement du champ d’application de la taxe à l’ensemble des institutions financières qui sont d’importance systémique ou qui, par leurs liens avec les établissements de crédit, contribuent à la diffusion des risques systémiques.

La parole est à M. le rapporteur général de la commission des finances.

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

Il s’agit là d’un sujet que, par tradition, la commission des finances du Sénat suit avec beaucoup d’attention, comme tout ce qui a trait à la régulation financière.

L’article 7 crée une contribution exceptionnelle due par certains établissements de crédit, qui double le montant de la taxe de risque systémique acquittée par les banques en 2012.

Suite à l’adoption d’un amendement déposé par le rapporteur général de la commission des finances de l’Assemblée nationale, M. Christian Eckert, les députés ont pérennisé cette modification en doublant le taux de la TRS à compter du 1er janvier 2013.

Ce doublement doit s’accompagner d’une réflexion sur l’assiette et le champ d’application les plus pertinents pour réduire globalement le risque systémique. En effet, le renforcement des réglementations prudentielles applicables aux banques conduit actuellement à une désintermédiation croissante de l’économie et à un renforcement du financement par les marchés et par des acteurs financiers peu régulés, désignés sous le terme de « secteur bancaire parallèle » ou de « shadow banking ». C’est pour mieux éclairer les uns et les autres que nous avons récemment organisé sur ce thème au Sénat une table ronde réunissant de nombreux intervenants.

D’après le Conseil de stabilité financière, le secteur représenterait près de 45 000 milliards d’euros d’actifs financiers en 2010. Il comprend notamment certains fonds d’investissement, des fonds monétaires, des véhicules de titrisation ou encore les entreprises d’assurance, soit dans le cadre de leurs activités de crédit, soit en raison de leur taille et de leur importance dans le fonctionnement de l’économie.

Cette évolution accroît donc, selon nous, le risque systémique, en renforçant les liens entre les banques et les établissements non régulés, dont certains sont déjà ou pourraient devenir d’importance systémique.

Dans ce contexte, il convient de réfléchir aux conditions dans lesquelles pourraient contribuer à la TRS toutes les institutions financières qui sont ou d’importance systémique ou contribuent à la formation ou à la diffusion des risques systémiques.

Nous répondrions ainsi à M. Joël Bourdin qui, à l’instant, relevait que seules les banques sont aujourd'hui touchées par cette mesure et qu’il serait bon, effectivement, de s’intéresser à l’ensemble des établissements, des intervenants, qui, eux aussi, créent ou transmettent du risque systémique.

Tel est bien l’objet de cet amendement : en demandant au Gouvernement, avant le 31 mars prochain, de nous remettre un rapport circonstancié, détaillé, fouillé, nous souhaitons avoir une perception exacte de tous les acteurs qui interviennent dans ce risque systémique.

Forts de cet éclairage, le 31 mars 2013, nous pourrons effectivement présenter une proposition de loi afin d’étendre le dispositif à un certain nombre d’autres acteurs et, en tout cas, de répondre au souci que nous partageons aujourd'hui, de voir circonscrit ce risque systémique du mieux possible et de permettre que la régulation puisse s’étendre au-delà des institutions que nous connaissons tous.

Le shadow banking commence vraiment à susciter des inquiétudes, et pas seulement en France. Il faut réguler davantage, il faut que l’information soit améliorée, comme nous le demandons au travers de cet amendement.

Debut de section - Permalien
Benoît Hamon, ministre délégué

Le Gouvernement est favorable à cet amendement. Monsieur le rapporteur général, nous partageons en effet la préoccupation qu’il traduit.

Aujourd’hui, l’évaluation de l’exposition au risque des établissements bancaires est réalisée par l’Autorité de contrôle prudentiel, l’ACP, qui n’est pas une mécanique administrative classique. Elle réalise de surcroît cette évaluation sur une base solide, l’assiette consolidée mondiale.

Nous avons là une mesure très précise de l’exposition au risque d’un certain nombre d’établissements bancaires, donc des demandes de mise en réserve de fonds propres et de réserve prudentielle qu’il faut réaliser. Par conséquent, nous disposons d’une base solide et d’une assiette solide pour déterminer ce que doit être la taxe sur le risque systémique.

Même si notre situation n’est pas comparable à celle du Royaume-Uni, où le rendement de cette taxe est naturellement supérieur, on peut cependant plus raisonnablement se comparer à l’Allemagne, où, là encore, le rendement de la taxe sur le risque systémique est supérieur à celui de la France. Je formule cette observation afin que vous mesuriez l’importance de la proposition qui vous est faite aujourd'hui d’un doublement du taux de la taxe créée à l’article 7 du PLFR.

Nous sommes favorables à l’amendement n°33 du rapporteur général, donc à l’élaboration d’un rapport sur le champ d’application et l’assiette de la taxe de risque systémique, ne serait-ce qu’en raison de la multiplication des interventions sur les marchés d’acteurs financiers non régulés, ce qui appelle de notre part une très grande vigilance. De ce point de vue, l’initiative du rapporteur général de la commission des finances est la bienvenue.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

La parole est à M. le président de la commission des finances.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Bien entendu, cet amendement est absolument nécessaire. Comme le relevait à juste titre François Marc, l’audition publique que nous avons réalisée il y a quelque temps sur les opérations bancaires parallèles ou shadow banking a montré que notre pays – comme d’autres, d’ailleurs – a des progrès importants à faire pour que la régulation progresse.

Ma question, monsieur le ministre délégué, va un peu au-delà de cet article et concerne les projets qui peuvent être ceux du Gouvernement en matière de législation sur les banques.

En effet, s’il est légitime de s’inscrire dans une démarche internationale en vue de mieux comprendre et de mieux contrôler les risques, il n’en reste pas moins que, dans la conjoncture déprimée que nous connaissons actuellement, où les crédits sont nécessaires, où la confiance n’est pas ce que nous voudrions qu’elle soit, toute situation d’attente qui se prolongerait trop serait préjudiciable.

En d’autres termes, l’architecture – si c’est bien de cela qu’il s’agit – d’une nouvelle loi bancaire, sans doute en cours d’examen, mériterait, me semble-t-il, d’être assez rapidement précisée dans ses principes si l’on veut éviter que ne s’exerce un effet encore plus dépressif sur le crédit, donc sur le financement de l’économie.

La question qui se pose assez naturellement, au-delà de la normalisation comptable internationale, très cruelle pour le modèle de financement français, est bien de savoir si des restrictions supplémentaires seront apportées et si le cantonnement de fonds propres dans telle ou telle structure serait de nature à porter préjudice à la production de crédits pour l’économie.

Je ferai une dernière remarque à ce sujet. Je crois que, de manière objective, la comparaison des chiffres de production du crédit aux entreprises par les systèmes bancaires montre que, jusqu’en 2011 inclus, le système bancaire français a fait progresser ses engagements, plus que ce n’est le cas chez nos principaux partenaires en Europe.

Maîtriser les risques systémiques est, certes, une nécessité, mais il convient bien entendu de le faire, monsieur le ministre délégué, avec toute la prudence nécessaire, afin d’éviter des problèmes supplémentaires dans un contexte économique imprévisible qui, à tout moment, peut nous réserver des surprises désagréables.

Debut de section - Permalien
Benoît Hamon, ministre délégué

Je souhaite apporter une brève réponse à M. le président de la commission des finances, dont chacun connaît l’intérêt pour ces questions.

S’agissant des dispositions qui pourront figurer dans la future loi bancaire, dont la commission des finances du Sénat sera évidemment saisie, je retiens ce que vous venez de dire sur les encours de crédit à destination des entreprises, sur la part des engagements du secteur bancaire. L’important, à nos yeux, est l’effet de levier qu’entraînerait la création, demain, d’une banque publique d’investissement afin d’amorcer un financement beaucoup plus efficace de l’économie française. Il nous revient de faire en sorte que les acteurs du financement de l’économie tant du secteur privé que de la banque publique travaillent ensemble de manière beaucoup plus efficace.

De surcroît, nous examinerons, dans le cadre de cette loi bancaire, les très nombreuses préoccupations exprimées par les épargnants et les déposants, qui s’interrogent sur l’utilisation qui est faite de leurs dépôts. Nous discuterons également de la séparation – c’est un élément du débat – des activités de marché et des activités commerciales classiques des banques. Nous examinerons également la politique du crédit, notamment du crédit à la consommation, qui peut être un autre aspect de ce débat.

Tous ces sujets feront l’objet de discussions. Le Gouvernement, notamment le ministère de l’économie et des finances, y travaille et nous ne manquerons pas, en temps et en heure, de saisir la commission des finances du Sénat des intentions du Gouvernement en la matière.

L'amendement est adopté.

L'article 7 est adopté.

I. – Il est institué une contribution exceptionnelle due par toute personne, à l’exception de l’État, propriétaire au 4 juillet 2012 de volumes de produits pétroliers mentionnés au tableau B du 1 de l’article 265 du code des douanes, placés sous l’un des régimes prévus aux articles 158 A et 165 du même code et situés sur le territoire de la France métropolitaine.

II. – La contribution est assise, pour chacun des produits pétroliers mentionnés au I, sur la valeur de la moyenne des volumes dont les redevables étaient propriétaires au dernier jour de chacun des trois derniers mois de l’année 2011.

L’assiette est calculée à partir du montant fixé conformément au 1° du 2 de l’article 298 du code général des impôts pour le dernier quadrimestre de l’année 2011, hors droits, taxes et redevances.

Par dérogation, l’assiette des gaz de pétrole et autres hydrocarbures gazeux visés aux codes 27-11-14, 27-11-19 et 27-11-29 de la nomenclature prévue par le règlement (CEE) n° 2658/87 du Conseil, du 23 juillet 1987, relatif à la nomenclature tarifaire et statistique et au tarif douanier commun est calculée à partir du prix de revient de ces produits au 31 décembre 2011.

III. – Le taux de la contribution est fixé à 4 %.

IV. – La contribution est exigible le 1er octobre 2012.

V. – La contribution est liquidée, déclarée et acquittée sur une déclaration conforme au modèle établi par l’administration, déposée au plus tard le 15 décembre 2012. Le montant de la contribution n’est pas admis en charge déductible pour la détermination du résultat imposable de l’entreprise qui en est redevable.

VI. – La contribution est contrôlée et recouvrée selon les règles, garanties, privilèges et sanctions prévues à l’article 267 du code des douanes. Les infractions sont recherchées, constatées et réprimées, les poursuites sont effectuées et les instances sont instruites et jugées comme en matière de douanes par les tribunaux compétents en cette matière.

Debut de section - PermalienPhoto de Félix Desplan

Monsieur le président, monsieur le ministre délégué, mes chers collègues, l’instauration de la contribution exceptionnelle acquittée par le secteur pétrolier sera limitée à l’Hexagone, en raison des contraintes fortes qui pèsent sur le marché des carburants dans les départements d’outre-mer : étroitesse du marché, éloignement des grandes routes maritimes, insularité, exigence de sécurité des approvisionnements.

Aux Antilles, l’achat, le fret, le stockage, le raffinage et une partie de la distribution sont assurés par une seule société, la SARA, la Société anonyme de la raffinerie des Antilles, détenue par Total – à 50 % –, Rubis, ExxonMobil et Chevron-Texaco. La fixation du prix des carburants relève d’un régime spécifique, elle est administrée par l’État et évolue chaque mois, compte tenu d’un certain nombre d’éléments.

Il s’agit d’une question particulièrement sensible sur nos territoires, et je souhaite le souligner ici.

Le poids des dépenses afférentes à l’automobile dans le budget des familles est plus élevé qu’en métropole : 19 % en Guadeloupe, pour 13, 3 % dans l’Hexagone. Il est dû à la fois à un retard d’équipement des ménages les plus modestes et au manque de desserte des transports collectifs.

Les dépenses de carburants sont, de fait, peu élastiques et toute hausse se fait au détriment de la consommation d’autres biens.

Par ailleurs, contrairement à ce qui prévaut dans l’Hexagone, le personnel sur les pistes est nombreux, participant à un équilibre social dans un contexte de chômage très élevé.

Les graves troubles sociaux de février 2009 contre la vie chère ont eu pour origine une forte incompréhension face à des prix de carburants trop élevés par rapport à ceux de la France hexagonale, face également à des méthodes de calcul incompréhensibles. Car l’énergie est la principale composante de l’inflation sur nos territoires : sa contribution en Guadeloupe représentait, en 2011, 70 % de la hausse des prix !

L’Autorité de la concurrence, saisie à la suite de ces troubles, a constaté que la réglementation des prix ne garantissait plus l’absence de rente et que le dispositif d’encadrement des marges de distribution et des prix de détail avait été transformé en un système de prix unique aisément manipulable.

M. le ministre délégué chargé du budget a été sensibilisé à cette question, car il est l’auteur d’un excellent rapport sur le prix des carburants dans les DOM, déposé à l’Assemblée nationale quelques mois après les émeutes. Ce rapport a été à l’origine de quelques ajustements bienvenus, comme la suppression, dans la formule des prix, de composants contestables ou la suppression de clause de préférence lors de la revente de stations-services.

Mais beaucoup reste encore à faire, et l’organisation d’ensemble de la filière suscite toujours de très nombreuses interrogations.

Je salue ici le combat de notre nouveau ministre des outre-mer, Victorin Lurel, qui n’a eu de cesse, en tant que député, de déplorer le manque de transparence du mode actuel de fixation des prix des carburants en Guadeloupe et de dénoncer un système opaque et injuste, comme en témoignent les évolutions distinctes des prix du « sans plomb », du gazole et de la bouteille de gaz, que les communiqués de la préfecture peinent à expliquer de façon crédible.

Je salue son engagement à s’attaquer, en tant que ministre, aux causes structurelles de la vie chère dans les territoires ultramarins, dont, en priorité, celles qui sont relatives aux carburants. Il a ainsi annoncé hier, en conseil des ministres, qu’un projet de loi en ce sens serait présenté devant le Parlement à l’automne.

Il s’agit là d’un chantier effectivement urgent : se pencher sur la discrétion qui entoure les négociations des marges, les modalités d’accès des distributeurs de détail aux capacités de stockage ; rendre compréhensibles aux citoyens les méthodes de calcul ; mettre en place, comme l’a suggéré dans son rapport M. le ministre délégué chargé du budget, une structure qui réunirait toutes les parties prenantes ; donner aux observatoires des prix, mis en place dans les DOM et consacrés par la loi grâce à notre Haute Assemblée en février dernier, de réels moyens d’agir, et – pourquoi pas ? – leur permettre d’utiliser les outils dont dispose déjà l’Autorité de la concurrence, par exemple celui d’investiguer.

Debut de section - PermalienPhoto de Félix Desplan

Telles peuvent être les pistes à suivre pour une meilleure transparence sur la formation des prix des carburants et remédier aux dysfonctionnements de la filière pétrolière dans les DOM, source toujours actuelle d’incompréhension et de mécontentement de la population.

Debut de section - Permalien
Benoît Hamon, ministre délégué

Monsieur le sénateur, je veux vous rassurer : la taxe dont nous parlons ici ne concerne pas les stocks situés en dehors de la France métropolitaine, donc elle ne concerne pas les outre-mer.

À ce stade, je tiens à dire que la création de cette taxe n’aura pas forcément d’impact sur le prix du carburant et de l’essence à la pompe, une question qui préoccupe légitimement nos concitoyens. Le Président de la République a pris des engagements concernant l’encadrement de ces prix et nous serons mobilisés pour éviter des hausses.

En ce qui concerne la réalité de la vie chère aujourd'hui dans les outre-mer, largement évoquée par Victorin Lurel lors du dernier conseil des ministres, et les marges en aval considérables de certains producteurs et distributeurs - oligopoles, cartels ou monopoles -, le Gouvernement a l’intention d’agir pour rétablir une situation normale. Dans les outre-mer, sont aujourd'hui appliqués des tarifs absolument exorbitants au regard des normes pratiquées en France métropolitaine.

La lutte contre la vie chère est, je le répète, l’une des préoccupations du Gouvernement.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

L'amendement n° 142 rectifié, présenté par MM. Arthuis, Zocchetto, Dubois, J. Boyer et Marseille, Mme Morin-Desailly, MM. Roche et Capo-Canellas et Mme Férat, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Jean Arthuis.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

L’article 8 institue une contribution exceptionnelle sur la valeur des stocks de produits pétroliers. On le voit bien, le Gouvernement cherche des recettes pour tenir l’objectif d’un déficit à 4, 5 % du PIB…

Il est bien évidemment commode de taxer les banques et les compagnies pétrolières, et ces « marronniers » fiscaux ont refleuri sous tous les gouvernements. Mais j’observe que contribueront notamment à cette taxe les raffineries pétrolières, ce qui risque d’être un facteur d’accélération – si tant est qu’il y en ait besoin… – des délocalisations de raffineries, et donc de fermetures.

Par ailleurs, qui peut croire que cette taxe n’est pas un prélèvement sur le pouvoir d’achat des Français ? Peut-on imaginer que les entreprises qui acquitteront cette taxe ne la répercutent pas sur les consommateurs ?

Pour éviter cet écran de fumée, que je crois être une mauvaise manière, je suggère de supprimer l’article 8.

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

Cet amendement tend à supprimer l’article 8 instaurant une contribution exceptionnelle sur la valeur des stocks de produits pétroliers.

Je ne peux qu’être défavorable à la suppression de cet article : elle serait contraire aux principes de redressement des comptes publics dans la justice qui guident ce projet de loi de finances rectificative.

Cette mesure reprend un engagement de campagne du Président de la République, qui avait évoqué la nécessité d’une contribution du secteur pétrolier au redressement des comptes publics. Un tel dispositif peut se justifier dans un contexte de crise, alors qu’il existe un écart important entre les bénéfices consolidés des grands groupes du secteur et le niveau de l’impôt sur les sociétés qu’ils acquittent en France.

Il s’agit de garantir une recette substantielle de 550 millions d’euros.

Je précise à M. Arthuis que si, comme il le laissait entendre, il y avait une répercussion en chaîne et que, en définitive, le consommateur final était amené à payer, ce qui ne sera pas, à notre sens, le cas, cela représenterait au maximum 1 centime par litre.

Nous avons tous à l’esprit les profits importants que réalisent un certain nombre de groupes et le faible taux de fiscalité auquel ils sont soumis.

En définitive, l’adoption de cet amendement reviendrait à priver notre pays de 550 millions d’euros. La commission ne peut donc qu’y être défavorable.

Debut de section - Permalien
Benoît Hamon, ministre délégué

(Exclamations sur les travées de l'UMP.) Si nous n’en trouvions pas, notre déficit public atteindrait 5 % du PIB, et nous ne pourrions alors pas respecter les engagements que vous aviez pris, et que nous reprenons, sauf que, nous, nous les tiendrons

Protestations sur les mêmes travées.

Debut de section - Permalien
Benoît Hamon, ministre délégué

car nous ramènerons le déficit public à 4, 5 % du PIB.

Pour trouver des recettes, nous avons créé une contribution exceptionnelle sur les stocks de produits pétroliers. Je vous rappelle simplement que Total a déclaré l’année dernière des profits à hauteur de 1 milliard d’euros… par mois !

Tant mieux ! sur les travées de l’UMP.

Debut de section - Permalien
Benoît Hamon, ministre délégué

Il n’est donc pas illégitime que l’on se préoccupe de savoir si, cette année, nous pouvons créer une contribution exceptionnelle sur les stocks pétroliers. D’ailleurs, la société Total a fait savoir, dans un communiqué de presse, que l’effort demandé ne lui semblait pas insurmontable.

Quand on crée une recette nouvelle et que celui pour laquelle elle a été pensée considère qu’elle n’est pas insurmontable, nous devrions plutôt nous féliciter de l’avoir mise en place ! D’ailleurs, cette taxe, qui sera jugée par tous les Français comme juste et légitime, nous permettra de tenir les objectifs que vous aviez pris hier et que vous n’auriez pas pu respecter !

Protestations sur les travées de l'UMP.

Debut de section - Permalien
Benoît Hamon, ministre délégué

Le Gouvernement est donc défavorable à cet amendement de suppression.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

La parole est à M. Philippe Marini, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Je voterai cet amendement de suppression de l’article 8 présenté par Jean Arthuis. Je comprends bien l’objectif affiché par le Gouvernement, mais je me demande si l’assiette choisie est vraiment pertinente à cet égard.

L’objectif affiché, c’est de taxer les superprofits des compagnies pétrolières, et plus spécialement ceux de la compagnie Total, que vous avez citée, monsieur le ministre délégué.

Exclamations sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Caffet

Elle ne paye pas d’impôt sur les sociétés !

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Je parle de la finalité affichée, mes chers collègues, et M. le ministre délégué, à l’instant, ne parlait pas d’autre chose.

Or la technique de la taxe portant sur les stocks pétroliers me semble soulever un certain nombre de questions.

J’ai reçu des observations de la part de la Fédération française des pétroliers indépendants, …

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

Ce sont les classes moyennes des pétroliers !

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

M. Philippe Marini. … qui méritent, à mon avis, d’être citées.

Brouhaha sur différentes travées.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Mes chers collègues, quand on évoque un problème, vous pourriez au moins écouter les parties prenantes ! Cela n’aliénera en rien votre liberté de décision.

Nous parlons d’entreprises, donc d’agents économiques, et il me semble que, avant de se prononcer, il vaut mieux connaître le secteur et le contexte.

Je cite : « Pour le négoce de gros, la marge est du même ordre de grandeur que le taux de la taxe. Comme le stock représente au moins un quart de nos ventes annuelles, stocks stratégiques compris, car ils subiront la taxe qui nous sera répercutée, on nous prive donc de toute rémunération pendant un trimestre, ne nous permettant même pas de couvrir nos frais pendant cette période. »

Exclamations sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

C’est une citation, chers collègues !

Je poursuis : « Pour certains d’entre nous, la taxe dépassera le résultat annuel. Nos entreprises devront, pour la saine gestion, répercuter au consommateur cette nouvelle charge, et ce dès septembre, afin de conserver une capacité à investir dans nos installations et à perpétuer le maillage territorial des dépôts et des stations-service en France. »

Les professionnels rappellent que « le précédent gouvernement a déjà institué une surtaxe temporaire d’impôt sur les sociétés au-dessus d’un seuil de chiffre d’affaires ».

Puis-je en profiter, monsieur le président, pour présenter d’un mot mon amendement n° 95 ?

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Si l’on peut comprendre que le Gouvernement envisage une taxation accrue des sociétés pétrolières qui réalisent en France des profits substantiels, la situation paraît tout autre s’agissant de sociétés qui ont cessé leur activité.

Je pense à un groupe qui a subventionné la mise en place d’un plan social d’entreprise de plus de 100 millions d’euros, soit un coût d’environ 300 000 euros par personne, ce qui a permis d’éviter l’ouverture d’une procédure collective.

La nouvelle taxe pourrait ainsi entraîner de sérieuses difficultés de financement d’un plan social d’entreprise. Il s’agit d’une question de sécurité juridique et de prévisibilité des charges financières : l’équilibre financier d’un PSE ne devrait pas être remis en cause a posteriori.

L’amendement vise à tenir compte de ce type de situation et à exclure du champ d'application de la contribution les propriétaires de volumes pétroliers dont l'activité de raffinage a été arrêtée avant l’adoption de ce projet de loi par le conseil des ministres, c'est-à-dire le 4 juillet 2012.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

La parole est à M. Alain Néri, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

M. Alain Néri. Monsieur Marini, je vous ai écouté avec une grande attention. Pour une fois, je vous prendrai presque en flagrant délit d’incohérence.

Oh ! sur les travées de l'UMP – Rires sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

Jusqu’à présent, et hier encore, vous nous incitiez à prendre en compte les classes moyennes que nous étions, selon vous, en train de « martyriser ».

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

Or, aujourd'hui, vous défendez un amendement qui ne concerne pas vraiment les classes moyennes…Quand vous évoquez les parties prenantes, nous savons que, prenantes, les sociétés pétrolières le sont tout particulièrement ! (Sourires sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

Vous nous avez dit hier que, s’il y avait eu une augmentation de la TVA pour arriver à cette fameuse « TVA sociale » antisociale que vous avez défendue avec beaucoup de zèle et de fougue, il n’y aurait pas eu de répercussion sur les prix.

Ce matin, vous soulignez que la contribution exceptionnelle sera forcément répercutée sur les prix du pétrole à la pompe, donc sur les consommateurs.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

Avec tout le respect que je vous dois, permettez-moi de noter une certaine incohérence dans vos propos !

Nous avions observé que, lorsque le prix du baril baissait, le prix à la pompe ne baissait pas en conséquence, voire pas du tout. En revanche, quand le prix du baril augmentait, il était immédiatement répercuté sur le prix à la pompe. Nous avions donc mis en place la TIPP flottante, que vous aviez combattue avec véhémence.

C’est pourquoi je ne comprends pas aujourd'hui la cohérence de votre raisonnement.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

La parole est à M. Dominique de Legge, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique de Legge

Voilà quarante-huit heures que l’on nous explique que toutes les mesures présentées ne font que s’inscrire dans le strict respect des engagements pris par M. Hollande pendant la campagne présidentielle.

Pour ma part, je me souviens que, durant cette campagne, M. Hollande avait affirmé qu’il fallait absolument maîtriser les prix des carburants et qu’il allait prendre des mesures en ce sens, y compris en réhabilitant la TIPP flottante.

Or, on nous dit maintenant que tout cela n’est pas très grave et qu’il n’est pas du tout certain que la contribution exceptionnelle prévue sera répercutée sur les prix à la pompe. Cela étant, il n’est pas non plus certain qu’elle ne le sera pas… Je vois donc mal en quoi la mesure proposée correspond aux engagements de M. Hollande : pour une fois, c’est nous qui assurerons leur respect, en votant la suppression de l’article afin que les prix à la pompe n’augmentent pas ! §

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

La parole est à M. Jean Arthuis, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

M. Jean Arthuis. Ce débat est tout à fait intéressant et nous progressons d’heure en heure !

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

Monsieur Néri, le projet de TVA sociale – vous la qualifiez pour votre part d’« antisociale » – se différencie du dispositif prévu à l’article 8 en ce que le supplément de TVA avait pour vocation de financer l’allégement des charges sociales. Dans ces conditions, nous pouvions éviter une augmentation des prix toutes taxes comprises demandés aux consommateurs français souhaitant acheter des produits fabriqués sur notre territoire.

En ce qui concerne le dispositif de l’article 8, la démonstration de Philippe Marini est évidente : il suffira de fermer la raffinerie pour échapper à la taxe ! Pour accélérer le processus des délocalisations, on ne saurait donc mieux faire qu’adopter cet article… Cela contribuera certes à équilibrer les comptes publics, mais je ne vois toujours pas en quoi cela favorisera la croissance, la compétitivité, la création d’emplois, le pouvoir d’achat.

En tout état de cause, ainsi que l’a dit Philippe Marini, nombre de distributeurs, notamment les plus modestes d’entre eux, seront obligés d’augmenter le prix qu’ils demandent aux consommateurs. Il ne s’agit pas seulement ici de Total : il existe aussi des distributeurs qui maintiennent les quelques pompes n’ayant pas encore disparu en milieu rural.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

Je tenais à appeler l’attention du Sénat sur ce point.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

La parole est à M. Vincent Delahaye, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

Pour ma part, je regrette vivement, une nouvelle fois, que ce projet de loi de finances rectificative ne prévoie que des recettes – et donc des taxes – supplémentaires et aucune économie sur les dépenses. Certes, il faut du temps pour que des mesures d’économie portent leurs fruits, mais c’est aussi pourquoi, précisément, il est urgent de les décider.

La taxe prévue à l’article 8 est présentée comme « exceptionnelle ». Je ne comprends toujours pas le tableau figurant dans le rapport de la commission des finances : hier, on nous a dit que l’impact cumulé sur les années 2012 et 2013 de la contribution exceptionnelle sur la fortune serait nul ; aujourd'hui, on nous affirme qu’il en ira de même pour la contribution exceptionnelle sur le secteur pétrolier !

Je persiste à ne pas comprendre. S’agira-t-il vraiment d’une taxe exceptionnelle ou fera-t-elle l’objet d’un remboursement l’année prochaine ?

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

L'amendement n° 95, présenté par M. Marini, est ainsi libellé :

Alinéa 1

Compléter cet alinéa par les mots :

, à l'exclusion des volumes de produits pétroliers détenus dans le cadre d'opérations de raffinage antérieurement exercées par leur propriétaire ou l'une de ses filiales mais interrompues avant le 4 juillet 2012.

Cet amendement a déjà été défendu.

Quel est l’avis de la commission ?

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

Je demande à M. Marini de bien vouloir se rallier à l’amendement n° 237 du Gouvernement, qui sera présenté dans quelques instants.

Debut de section - Permalien
Benoît Hamon, ministre délégué

Nous partageons la préoccupation de M. Marini s’agissant des raffineries qui ont été contraintes de fermer leurs installations, notamment pour des raisons économiques et sociales.

Par rapport à la rédaction que vous proposez, monsieur Marini, l’amendement n° 237 du Gouvernement vise à introduire un délai de trois mois consécutifs de fermeture afin que l’on puisse faire la distinction entre les fermetures de raffineries pour maintenance ou nettoyage des cuves, par exemple, et celles tenant à un recul de l’activité. Cette rédaction nous semble plus précise, et le Gouvernement vous invite donc lui aussi à vous rallier à son amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

En d’autres temps, on m’aurait suggéré de rectifier mon amendement pour le rendre identique à celui du Gouvernement… Le résultat sera le même, mais cette solution me convient mieux !

Debut de section - Permalien
Benoît Hamon, ministre délégué

En ce cas, l’avis du Gouvernement serait favorable !

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Merci, monsieur le ministre ! Dans ces conditions, puisque nous sommes d’accord sur le fond, je propose une fusion de nos deux textes sur ce modeste sujet ! Je rectifie mon amendement afin de rendre sa rédaction identique à celle de l’amendement du Gouvernement.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

Il s’agit donc de l’amendement n° 95 rectifié, identique à l’amendement n° 237, présenté par le Gouvernement et ainsi libellé :

Après l’alinéa 4

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

II bis. – Les redevables ayant totalement interrompu leur activité pendant une durée continue supérieure à trois mois au cours du premier semestre 2012 sont exonérés de la contribution.

Quel est l’avis de la commission ?

Les amendements sont adoptés.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

L'amendement n° 34, présenté par M. Marc, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :

Alinéa 4

Après les mots :

tarif douanier commun

insérer les mots :

, et qui ne sont pas destinés à être utilisés comme carburants,

La parole est à M. le rapporteur général.

Debut de section - Permalien
Benoît Hamon, ministre délégué

Avis favorable.

L'amendement est adopté.

L'article 8 est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quatorze heures quarante.

La séance est suspendue.

La séance, suspendue à douze heures quarante, est reprise à quatorze heures quarante, sous la présidence de M. Thierry Foucaud.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

L'amendement n° 207 rectifié quater, présenté par M. Assouline et les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :

Après l'article 8

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. - L'article 42-3 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Sans préjudice de l'application du premier alinéa, tout éditeur de service détenteur d'une autorisation délivrée en vertu des articles 29, 29-1 et 30-1 doit obtenir un agrément du Conseil supérieur de l'audiovisuel en cas de transfert du contrôle direct ou indirect, au sens de l'article L. 233-3 du code de commerce, de la société titulaire de l'autorisation. Le Conseil apprécie si les modifications envisagées sont, eu égard, le cas échéant, aux engagements pris par les opérateurs intéressés pour en atténuer ou en compenser les effets, de nature à compromettre l'impératif fondamental de pluralisme et l'intérêt du public. »

II. - Le chapitre III du titre Ier de la première partie du livre Ier du code général des impôts est complété par une section XXIII ainsi rédigée :

« Section XXIII

« Taxe sur la cession de titres d'un éditeur de service de communication audiovisuelle

« Art. 235 ter ZG. - Tout apport, cession ou échange de titres ayant fait l'objet d'un agrément dans les conditions prévues au dernier alinéa de l'article 42-3 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication est soumis à une taxe au taux de 5 %, assise sur la valeur des titres apportés, cédés ou échangés. Cette taxe est due par la personne ayant, au terme des apports, cessions ou échanges réalisés sur ses titres, transféré le contrôle de la société titulaire de l'autorisation d'usage de la ressource radioélectrique.

« La taxe s'applique à l'ensemble des apports, cessions ou échanges dont le cumul au cours de six mois a abouti au transfert de contrôle de la société titulaire de l'autorisation.

« Le montant dû au titre de cette taxe fait l'objet d'un abattement de 1 000 000 € par société titulaire d'une autorisation d'usage de la ressource radioélectrique.

« Cette taxe est due et acquittée auprès du comptable public au plus tard le 1er mai de l'année qui suit celle de l'apport, de la cession ou de l'échange. Le paiement est accompagné d'un état conforme au modèle fourni par l'administration faisant apparaître les renseignements nécessaires à l'identification de la personne assujettie et à la détermination du montant dû.

« Cette taxe est recouvrée selon les règles et sous les sanctions et garanties applicables aux droits d'enregistrement. »

III. – Les I et II sont applicables aux apports, cessions ou échanges réalisés à compter du 26 juillet 2012.

La parole est à M. David Assouline.

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

Je procéderai tout d'abord à un petit rappel.

Quand le gouvernement de Lionel Jospin décida de promouvoir la télévision numérique terrestre, la TNT, il s'agissait d'atteindre deux objectifs en matière d'offre audiovisuelle : le pluralisme, en augmentant l'offre de chaînes, et l'émergence de nouveaux acteurs dans un paysage audiovisuel relativement concentré et fermé.

Malgré un certain scepticisme initial, le succès a été au rendez-vous. Les téléspectateurs ont apprécié l'augmentation de l'offre audiovisuelle, qui s'est étoffée de plus de vingt chaînes nouvelles.

Depuis, nous avons parfois assisté à quelques transgressions au regard des objectifs précités. Au rebours de l'esprit initial de pluralisme et de diversité, sont apparus des mouvements de concentration, voire des tentations de valorisation financière des fréquences appartenant au domaine public et concédées gratuitement par l'État.

Le présent amendement ne constitue pas une innovation, puisqu'il a été adopté par notre assemblée dans le cadre de l'examen du projet de loi de finances initiale pour 2012. Il a ensuite été voté par l'Assemblée nationale, le gouvernement de l'époque ayant lui-même estimé qu'il allait dans le bon sens. En effet, le Conseil supérieur de l'audiovisuel, le CSA, s'était ému des dérives que j'évoquais à l'instant et cherchait les moyens de les interdire. Cela étant, les préconisations du CSA seront certainement contestées devant le juge.

L'adoption de cet amendement, dont les dispositions sont assez modérées, permettrait de dégager des recettes supplémentaires pour le budget de l'État, ce que le Gouvernement ne peut manquer d'apprécier au regard des difficultés actuelles.

En décembre dernier, l'Assemblée nationale et le Sénat s'étaient prononcés en faveur de la mesure que je vous soumets à nouveau aujourd'hui. Le gouvernement d'alors y était plutôt favorable dans l'esprit, mais il avait jugé utile, devant les députés, de modifier la rédaction du texte élaboré par notre assemblée, pensant ainsi la sécuriser sur le plan juridique. Malheureusement, le Conseil constitutionnel a ensuite censuré la formulation adoptée par l'Assemblée nationale…

Instruits par cette expérience, nous avons établi une rédaction tenant compte des considérants de la décision du Conseil constitutionnel, tout en étant propre à éviter les effets pervers et à répondre aux attentes des acteurs du secteur, qui sont nombreux à avoir manifesté leur intérêt pour notre travail.

Je souhaite donc vivement que cet amendement dont le dispositif fait consensus puisse être adopté sans que se manifestent des clivages superflus.

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

Cet amendement, que David Assouline a brillamment défendu, comme à son habitude, vise à créer une taxe sur les cessions de titres par un éditeur de service de communication audiovisuelle.

Il s'agit de réguler la revente spéculative de sociétés détentrices de fréquences. J'indique d'emblée que je suis favorable à cet amendement, d'autant qu'il a été rectifié de manière à supprimer le caractère rétroactif de son dispositif, que la commission des finances avait souligné.

Cet amendement, qui avait été adopté par le Sénat lors de la discussion du projet de loi de finances pour 2012, avait été inspiré par l'opération réalisée par Canal Plus en septembre dernier : cette chaîne avait en effet pris une participation de 60 % dans Direct 8 et Direct Star, au profit du groupe Bolloré. Cet événement avait ému le monde de l'audiovisuel et inspiré l'action législative.

L'Assemblée nationale avait ensuite supprimé l'amendement en nouvelle lecture, puis le gouvernement d'alors avait introduit en loi de finances rectificative un dispositif d'inspiration similaire, mais à la rédaction plus complexe, à tel point que ce dernier fut censuré par le Conseil constitutionnel, au motif que l'assiette de la taxe proposée n'était pas suffisamment bien définie.

Tel n'est pas le cas pour la mesure qui nous est ici présentée, la rédaction étant beaucoup plus précise à cet égard.

Ainsi, elle prévoit un abattement suffisamment important pour que ne soient pas pénalisées les PME éditrices de radios indépendantes, qui n'ont aucune part dans le développement de la TNT nationale, et les entreprises éditrices de services de télévision locale, qui peinent à trouver leur équilibre économique.

En outre, la rédaction recentre le champ de la taxe sur son véritable objet, à savoir la taxation des seuls transferts de propriété.

Enfin, contrairement au dispositif adopté en décembre, le présent amendement, après rectification par ses auteurs, n'a plus de caractère rétroactif, puisque ses dispositions s'appliqueraient simplement à compter du 26 juillet 2012.

Pour toutes ces raisons, la commission a émis un avis favorable sur cet amendement.

Debut de section - Permalien
Jérôme Cahuzac

Le Gouvernement comprend très bien les intentions des auteurs de l'amendement, ainsi que les motivations de l'avis favorable de la commission des finances.

Je voudrais simplement préciser, au nom du Gouvernement, que l'objectif n'est évidemment pas de taxer telle ou telle société, ou de pénaliser tel ou tel acteur du monde industriel : il s'agit bien entendu d'une taxe de portée générale.

Pour autant, il paraît difficile au Gouvernement d'émettre un avis favorable ou défavorable. C'est pourquoi il s'en remet à la sagesse du Sénat.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à M. Philippe Bas, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

Il me serait agréable de pouvoir dire à M. Assouline que le groupe UMP est disposé à soutenir cet amendement.

Malheureusement, celui-ci réserve un sort particulier aux petites entreprises audiovisuelles ; or elles ne sont pas seules à pouvoir rencontrer des difficultés. Imposer cette taxation punitive pour toute vente présenterait l'inconvénient d'empêcher le bon fonctionnement d'un marché qui n'est pas forcément spéculatif : certaines ventes peuvent fort bien être inspirées par la nécessité d'apporter des capitaux nouveaux à une entreprise en difficulté, quelle qu'en soit la taille.

La précaution qui a été prise pour atténuer les effets de ce nouveau prélèvement ne dissipe pas complètement l'inquiétude que peut susciter la création de celui-ci.

D'une manière plus générale, je constate que, chaque fois que se pose un problème dans ce pays, la première réaction de la majorité actuelle est de créer un impôt nouveau pour le régler… En ce qui me concerne, je ne partage pas cette idée que la taxation serait systématiquement la bonne solution. On a encore eu ce matin la démonstration que cela n'était pas vrai : la taxe sur les logements vacants, créée en 1999 et dont le taux a été augmenté, n'a eu aucune efficacité pour remettre sur le marché des logements inoccupés. Dans le même esprit, le nouvel impôt que l'on nous propose ici d'instaurer ne me paraît pas être le bon instrument pour régler un problème dont je ne nie pas la réalité.

Je comprends moi aussi les bonnes intentions qui animent les auteurs de cet amendement, mais il me semble qu'il faut faire confiance au Conseil supérieur de l'audiovisuel pour régler efficacement la question. L'agrément que celui-ci doit délivrer suffit largement à empêcher des opérations spéculatives qui ne seraient pas justifiées par des motifs d'intérêt général tenant à la pérennité des entreprises audiovisuelles.

Telles sont les raisons pour lesquelles, en ce qui me concerne, je voterai contre cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à Mme Marie-Christine Blandin, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Christine Blandin

Pour ma part, je pense au contraire que cet amendement est très pertinent. Si les pouvoirs publics ont chargé une autorité indépendante, le Conseil supérieur de l'audiovisuel, d'attribuer les fréquences, c'est qu'ils savent combien sont forts les enjeux liés à l'utilisation publique ou marchande de celles-ci.

Les exigences sont fortes, les auditions rigoureuses et les propositions des candidats enregistrées et suivies dans la durée, jusqu'à ce qu'un détenteur d'une fréquence d'émission, qui s'en considère propriétaire, bouscule l'équilibre du système et revende sa chaîne, confondant dans la même transaction un bien marchand et un bien public, à savoir la fréquence.

L'amendement de notre collègue a donc pour objet de taxer de telles transactions : c'est le moins que l'on puisse faire.

En tant que présidente de la commission de la culture, je précise que cet amendement avait été adopté par le Sénat lors du dernier débat budgétaire par une majorité allant du groupe CRC au groupe UMP – à cet égard, je m'étonne que certains membres de ce dernier semblent avoir changé d'avis –et que c'est une modification maladroite de sa rédaction à l'Assemblée nationale qui a provoqué la censure du Conseil constitutionnel.

Nous soutenons donc résolument la création de cette taxe, tout en estimant que des régulations plus vertueuses encore devront voir le jour. Mais, aujourd'hui, nous examinons un projet de loi de finances rectificative et nous parlons de taxes.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à M. Jean-Claude Frécon, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Frécon

Je voudrais simplement attirer l'attention de notre assemblée sur une question de date : il est prévu que les dispositions de cet amendement entrent en vigueur le 26 juillet 2012, c'est-à-dire aujourd'hui. Or le présent texte ne sera pas définitivement adopté avant le 30 ou le 31 de ce mois, à l'issue de la commission mixte paritaire. Il ne faudrait pas que le Conseil constitutionnel puisse trouver là un nouveau motif de censure.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Nathalie Goulet

Je soutiens cet amendement frappé au coin du bon sens, d'autant qu'il ne me semble pas tout à fait pertinent de s'en remettre à l'action du CSA.

Nous rencontrons des difficultés, dans nos régions, pour faire respecter le pluralisme dans l'utilisation du réseau hertzien. En Normandie, notamment, on constate désormais une forte concentration. Je pense donc que M. Assouline a eu parfaitement raison de proposer la création de cette taxe.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à M. David Assouline, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

Monsieur Bas, pour avoir discuté de cette question avec certains de vos collègues au sein de la commission de la culture, je ne considère pas, à ce stade, que votre intervention reflétait l'opinion de la majorité des membres du groupe UMP.

En outre, c'est la première fois que l'on me dit que je suis trop répressif ; on m'a même plutôt fait le reproche inverse dans le passé ! Ainsi, les membres du CSA sont tellement conscients que les opérations spéculatives sur des fréquences qu'ils ont attribuées gratuitement représentent une menace qu'ils envisageaient des mesures d'interdiction. Moi qui suis plus modéré

Exclamations amusées sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

Nous sommes face à des acteurs du paysage audiovisuel qui prônent la concentration pour résister à la concurrence internationale, mais une telle évolution nuit au pluralisme. À l'inverse, la TNT était censée permettre l'arrivée de nouveaux acteurs, y compris de taille modeste, et garantir la diversité. Or ce sont de grands groupes qui sont derrière les derniers attributaires de fréquences. Je comprends la nécessité de constituer des groupes forts, mais cela ne doit pas amener à négliger l'objectif de pluralisme fixé par le législateur et ceux qui ont fait la TNT. Cette préoccupation transcende les clivages gauche-droite.

La taxe que nous proposons d'instaurer rapportera de l'argent à l'État et incitera à des pratiques plus vertueuses. Au travers de cet amendement de portée générale, je ne désigne personne à la vindicte publique. J'espère qu'il fera l'objet d'un très large consensus au sein de notre assemblée.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à M. Francis Delattre, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Delattre

Je voterai très volontiers cet amendement.

Outre qu'il me semble absolument anormal de réaliser des plus-values grâce à des fréquences attribuées gratuitement trois ou quatre ans plus tôt, je pense, monsieur le rapporteur général, que de telles opérations donnent probablement lieu à des pratiques d'évasion fiscale, puisqu'elles ont par exemple permis à M. Bolloré de devenir l'actionnaire de référence de Vivendi.

Il existe un réel problème en matière de pluralisme. Ainsi, à l'UMP, nous avons souffert d'un manque de pluralisme au cours des dernières campagnes électorales.

Exclamations amusées sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Delattre

Par conséquent, toute mesure tendant à infléchir la tendance en la matière est bienvenue.

Comme l'a rappelé M. Assouline, la TNT devait être un instrument de pluralisme. Il est tout à fait anormal que le CSA n'ait pas aujourd'hui les moyens de s'opposer aux opérations financières en question ; il incombe au législateur de les lui donner. À cet égard, je me suis inspiré de l'une des propositions de loi que vous aviez rédigées voilà deux ans, monsieur Assouline, pour élaborer, avec mes collègues du groupe UMP, un texte visant à la fois à permettre la constitution de groupes forts et à garantir le pluralisme. Nous le présenterons au Sénat en septembre prochain.

En effet, il ne nous a pas échappé que, derrière les journalistes que l'on accuse volontiers de parti pris, se trouvent des groupes industriels. Or, à la veille de chaque échéance électorale importante, on voit se manifester le syndrome du favori : les grands médias, qui ont besoin de la commande publique, se rangent au côté du favori désigné par les sondages, car il ne faut pas insulter l'avenir… On a ainsi vu cette chose extraordinaire : le magazine de M. Pinault est passé du centre droit au centre gauche, voire au-delà ! Je vais peut-être vous choquer en disant cela, mais si la couverture médiatique de la dernière campagne présidentielle avait été plus équilibrée, je ne suis pas sûr que le résultat eût été le même… §

Debut de section - Permalien
Un sénateur socialiste

On n'est trahi que par les siens !

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à M. Jean Arthuis, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

M. Jean Arthuis. Je voterai cet amendement, qui me semble fondé et juste.

Marques de satisfaction sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

Tout gouvernement doit être attentif aux conditions dans lesquelles sont délivrées les licences. En matière de téléphonie mobile, par exemple, il est très bien de vendre une licence à un quatrième opérateur, mais les moins-values qu'engendre l'arrivée sur le marché de ce nouvel acteur pour des sociétés dont l'État ou la Caisse des dépôts et consignations sont actionnaires sont nettement supérieures au produit de cette vente…

Réguler un peu mieux les transactions en question me paraît être de bonne administration publique.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à M. François Zocchetto, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de François Zocchetto

La position du groupe de l'UCR sur ce sujet est très claire, dans la mesure où nous avions déjà voté une telle disposition.

Je voudrais que chacun ici soit convaincu de la nécessité de légiférer en la matière, en vue de lutter contre la spéculation et la concentration liée au rachat des fréquences par de grands groupes. Pour atteindre ce double objectif, il est malheureusement nécessaire de mettre en place une taxation.

Cela étant, je m'interroge sur certains aspects du dispositif.

Ainsi, cette taxe est assise sur la valeur de revente des titres, qui sera le plus souvent égale, si j'ai bien compris, au montant de la plus-value réalisée, dans la mesure où les fréquences sont attribuées gratuitement. Si tel est bien le cas, le taux de 5 % prévu me paraît plutôt faible, puisqu'il est nettement inférieur au taux d'imposition des plus-values.

En outre, instaurer un abattement de 1 million d'euros sur le montant de la taxe paraît plutôt généreux pour les vendeurs. Ne devrait-on pas le réduire ?

Enfin, l'échéance pour le paiement de la taxe est fixée au 1er mai de l'année suivant l'opération : est-il judicieux de prévoir un tel délai, alors que l'imposition de la plus-value sur titres, aux termes du code général des impôts, interviendra plus tôt ?

Le groupe de l'UCR votera bien sûr cet amendement.

L'amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances rectificative, après l'article 8.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

J'informe le Sénat que la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif au harcèlement sexuel est parvenue à l'adoption d'un texte commun.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Nous reprenons la discussion du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, de finances rectificative pour 2012.

Dans la discussion des articles, nous poursuivons l'examen des amendements tendant à insérer des articles additionnels après l'article 8.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

L'amendement n° 122, présenté par MM. Dantec, Placé et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :

Après l'article 8

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le a. du 1° du 4 de l'article 298 du code général des impôts est ainsi rédigé :

« a. Les essences et gazoles utilisés comme carburants mentionnés au tableau B de l'article 265 du code des douanes, à l'exception de ceux utilisés pour les essais effectués pour les besoins de la fabrication de moteurs ou d'engins à moteur ; »

La parole est à M. Ronan Dantec.

Debut de section - PermalienPhoto de Ronan Dantec

Cet amendement vise à remettre en cause l'avantage accordé aux véhicules diesel dans les flottes des parcs d'entreprise, lié à la déductibilité de la TVA pour l'utilisation de ce type de carburant.

Le présent amendement s'inscrit totalement dans l'esprit des déclarations d'Arnaud Montebourg sur le développement de la « voiture propre » dans le cadre du plan de soutien au secteur automobile qu'il a présenté hier. Accorder un avantage fiscal pour l'utilisation du diesel est à mes yeux une aberration ; cela est incohérent avec la stratégie industrielle que nous souhaitons aujourd'hui mettre en place.

En outre, la suppression de cet avantage représenterait, pour l'État, une économie de 350 millions d'euros, ce qui n'est pas négligeable !

J'insiste sur le fait que les véhicules d'entreprise se renouvellent plus rapidement que les véhicules de particuliers, d'où l'intérêt d'inciter les entreprises à renoncer au diesel, pour accélérer la transition vers la voiture propre.

Cela me donne l'occasion de redire à quel point il est important, pour l'avenir de l'industrie automobile française, de sortir le plus rapidement possible de la filière diesel. L'Organisation mondiale de la santé et de nombreux rapports le soulignent, l'utilisation du diesel est dangereuse pour la santé humaine. Cette filière représente une impasse industrielle, dont il faut sortir. Tel était le sens, me semble-t-il, des déclarations d'Arnaud Montebourg.

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

Cet amendement tend à supprimer l'avantage fiscal accordé pour les véhicules diesel.

La commission des finances n'est évidemment pas insensible à la philosophie qui guide cette démarche. Le sujet est récurrent dans nos débats fiscaux depuis plusieurs années, d'autant que plusieurs rapports récents, notamment celui qui a été remis par le groupe de travail mis en place par le Centre d'analyse stratégique et présidé par Guillaume Sainteny, font état de la nocivité de certaines aides publiques pour l'environnement et la santé.

Je crois que le Gouvernement est bien conscient de cette préoccupation sociétale. C'est la raison pour laquelle une conférence environnementale est prévue pour le mois de septembre. Afin que la présente disposition puisse s'inscrire dans un plan global prenant en compte toutes considérations liées aux carburants, aux énergies et aux transports, il conviendrait peut-être de l'examiner dans ce cadre.

Dans cette perspective, nous sollicitons le retrait de l'amendement.

Debut de section - Permalien
Jérôme Cahuzac

Comme vient de l'indiquer M. le rapporteur général, cette question sera traitée lors de la conférence environnementale, laquelle aura à se pencher sur un problème de droit qui ne me paraît pas simple à régler. Nous ne pourrons en tout cas certainement pas le faire cet après-midi.

En effet, une directive communautaire de 2006 rend juridiquement impossible la non-déductibilité de la TVA pour les biens intermédiaires, en l'espèce le gazole. L'essence est un cas à part, car pour elle la non-déductibilité de la TVA prévalait déjà avant l'adoption de la directive, or il est constant que, si le droit à venir est conditionné par celle-ci, le droit déjà en vigueur demeure. J'ajoute que, de surcroît, l'adoption de cet amendement fragiliserait la situation de la France.

Par conséquent, au bénéfice des explications que je viens de vous donner, il serait prudent que vous retiriez cet amendement, comme l'ont fait les députés du groupe écologiste à l'Assemblée nationale, en laissant à la conférence environnementale le soin de définir les voies et moyens qui permettraient d'améliorer la situation actuelle. Pour des raisons juridiques et communautaires, il me semble impossible de le faire par voie d'amendement.

Pour toutes ces raisons, je sollicite le retrait de cet amendement ; à défaut, je serais contraint d'émettre un avis défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Ronan Dantec

J'ai pris bonne note de la volonté d'ouverture de M. le rapporteur général. M. le ministre délégué a reconnu l'incohérence du système actuel, les règles n'étant pas les mêmes pour l'essence et le diesel en matière de déductibilité de la TVA.

Je retire l'amendement, compte tenu des difficultés techniques soulevées, mais cette question devra être traitée, car nous ne pouvons laisser subsister une telle incohérence.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Je suis donc saisi d'un amendement n° 122 rectifié, présenté par M. Marini, qui reprend le contenu de l'amendement n° 122.

Vous avez la parole pour le défendre, monsieur Marini.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Monsieur le ministre, je voudrais vous poser une question portant sur un sujet connexe.

Chacun a pu prendre connaissance du plan de soutien au secteur automobile et des moyens supplémentaires prévus en faveur du système de bonus-malus. J'ai cru comprendre que ce plan comportait des financements très divers, y compris des sommes issues du grand emprunt, des sommes susceptibles d'être allouées par Oséo et des éléments d'ordre budgétaire, sans doute nouveaux, pour un montant s'établissant, si ma mémoire est bonne, entre 150 millions et 200 millions d'euros.

Puisque nous débattons d'un projet de loi de finances rectificative, je souhaiterais savoir si la partie budgétaire de ces financements a une existence dans les lois de finances déjà votées ou dans le texte que nous examinons aujourd'hui. En d'autres termes, n'annonce-t-on pas des sommes qui n'existent pas encore ou qui ne pourraient être dégagées que par de nouvelles augmentations de prélèvements ou par d'autres réductions de dépenses publiques ?

Cette question étant posée, je retire l'amendement n° 122 rectifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

L'amendement n° 122 rectifié est retiré.

L'amendement n° 123, présenté par M. Labbé et Mmes Blandin et Bouchoux, est ainsi libellé :

Après l'article 8

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article 265 bis A du code des douanes est abrogé.

La parole est à M. Joël Labbé.

Debut de section - PermalienPhoto de Joël Labbé

Cet amendement vise à supprimer l'avantage fiscal accordé aux producteurs d'agrocarburants de première génération. Pour l'année 2012, ce dispositif représente une perte de 196 millions d'euros pour le budget de l'État.

Selon le rapport publié par la Cour des comptes en janvier 2012, durant la période 2005-2010, la filière agricole productrice d'agrocarburants a bénéficié de 2, 6 milliards d'euros de dépenses fiscales cumulées, pour 1, 5 milliard d'euros d'investissements. Du point de vue strictement économique, le maintien de cette niche fiscale n'est pas justifié, puisque les investissements ont été réalisés et sont d'ores et déjà largement rentabilisés. Il s'agit avant tout d'une question de justice fiscale, d'autant que, pour nous écologistes, les efforts en matière de réduction de la dette n'auront de sens que s'ils s'inscrivent dans une stratégie générale de transition écologique et énergétique.

Cette transition doit permettre d'effacer l'autre dette, immense, que nous avons à l'égard des générations futures : la dette environnementale. Désormais, les mesures de l'État devront intégrer la notion de sobriété au lieu de perpétuer la fuite en avant dans le domaine des transports et des déplacements comme dans les autres champs d'activité.

Le même rapport mentionne l'avis de la direction générale du Trésor : les producteurs de biocarburants, compte tenu de l'importance de la pénalité représentée par la TGAP et de la possibilité de la répercuter sur les consommateurs, ce qu'ils ne manquent pas de faire, bénéficient « d'une rente […] assimilable à une subvention ». Par ailleurs, aux termes du rapport, le « soutien aux biocarburants […] paraît […] peu approprié dans la mesure où les exploitations concernées sont parmi les plus riches, et bénéficient déjà d'un soutien public plus important que la moyenne via la politique agricole commune ». C'est une question de justice, disais-je !

L'État subventionne une industrie bénéficiaire et, de surcroît, le développement de l'utilisation des agrocarburants de première génération s'opère au détriment du pouvoir d'achat des consommateurs. En effet, ces derniers paient les agrocarburants intégrés à l'essence ou au gazole, tandis que les performances énergétiques sont moindres.

De plus, du point de vue écologique, rien ne justifie cette niche fiscale que le Centre d'analyse stratégique considère comme dommageable à la biodiversité. Ce jugement est confirmé par l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie, l'ADEME.

En outre, comme l'a rappelé la Food and agriculture organization, la FAO, promouvoir les agrocarburants, c'est également soutenir une politique qui engendre indéniablement une hausse des prix des denrées alimentaires à l'échelle mondiale, au risque de provoquer de nouvelles émeutes de la faim.

Par ailleurs, dans les pays du Sud, les cultures destinées à la filière des agrocarburants, qui participent de la scandaleuse pratique de l'accaparement des terres, ont mobilisé 128 millions d'hectares au cours des dix dernières années. Elles représentent, à elles seules, deux fois la surface agricole de la France.

Mes chers collègues, pour toutes ces raisons, cette exonération n'a plus lieu d'être. Je vous demande donc avec force de voter la suppression d'un dispositif qui, je le répète, représente une perte de 196 millions d'euros pour le budget de l'État.

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

Comme pour l'amendement précédent, il s'agit de faire diligence pour valider une option certes tout à fait intéressante, mais la conférence environnementale a vocation à se saisir de ce dossier, non pas dans six mois ou dans un an, mais dans quelques semaines.

Dans cette perspective, la commission demande le retrait de cet amendement.

Debut de section - Permalien
Jérôme Cahuzac

Monsieur Labbé, les raisons pour lesquelles j'ai sollicité, il y a quelques instants, le retrait du précédent amendement, valent aussi pour celui que vous venez de présenter.

Cet amendement semble prématuré au regard de l'action du Gouvernement. Je vous ai indiqué le programme que nous comptons suivre. Agir de manière concertée, dans le cadre d'un plan d'ensemble, me paraît préférable, même si je respecte tout à fait votre liberté de déposer des amendements.

Comme M. le rapporteur général, je souhaiterais donc que vous retiriez cet amendement, d'autant que des agréments sont en cours de finalisation : son adoption créerait une situation d'instabilité juridique, dont les actuels bénéficiaires du dispositif risqueraient de demander à l'État de leur rendre compte, sous une forme ou sous une autre.

Il ne s'agit pas, pour le Gouvernement, de se défausser. Il s'est clairement engagé à réunir une conférence environnementale à la rentrée.Prendre une telle mesure au cœur de cet été paraît prématuré, je le redis, même s'il n'y a pas de désaccord de principe entre les auteurs de l'amendement et le Gouvernement.

Monsieur le président de la commission des finances, je répondrai maintenant à la question que vous avez posée voilà quelques instants, en reprenant l'amendement de M. Dantec. Au demeurant, je vous remercie d'assurer ainsi un certain écho aux propositions du Gouvernement. J'ai cru comprendre que vos propos n'étaient nullement ironiques et que vous approuviez le plan de soutien au secteur automobile.

Il est vrai qu'une partie du financement s'opérera dans le cadre d'un jeu à somme nulle : de fait, une incitation sera mise en œuvre sous la forme d'un bonus et financée par le biais d'un malus.

Debut de section - Permalien
Jérôme Cahuzac

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Le dispositif du bonus-malus avait déjà été préconisé lors du Grenelle de l'environnement et avait d'ailleurs été mis en œuvre par le gouvernement précédent.

M. le président de la commission des finances acquiesce.

Debut de section - Permalien
Jérôme Cahuzac

J'espère que ces explications vous donneront satisfaction, monsieur Marini, et je vous remercie de nouveau d'avoir assuré la publicité de ce plan de soutien au secteur automobile !

Debut de section - PermalienPhoto de Joël Labbé

Monsieur le ministre délégué, un débat relatif aux agrocarburants aura certes lieu dans le cadre de la conférence environnementale, mais cette dernière n'aura évidemment pas vocation à arrêter des décisions.

Pour l'heure, le présent amendement ne remet pas en cause les agrocarburants, dont les producteurs bénéficient d'autres avantages, notamment au titre de la TGAP. De surcroît, la France a anticipé sur le quota de 10 % fixé par l'Union européenne.

Quand on parle d'agrocarburants en France, il s'agit en fait du biodiesel. Ronan Dantec a évoqué tout à l'heure l'enjeu de santé publique que représente l'utilisation du diesel.

Il faut dire les choses telles qu'elles sont : chacun le sait, il existe une structure, Sofiprotéol, très liée à la FNSEA, qui jouit d'une forme de monopole et bénéficie à elle seule de près de 80 % de l'aide publique au développement des agrocarburants.

Si certains de nos compatriotes souffrent déjà énormément, d'autres sont plus à même de consentir un effort. Tout le monde admet la nécessité de réaliser des économies, mais un principe supérieur de justice doit prévaloir. Or cet amendement va précisément dans le sens de la justice !

Monsieur le ministre délégué, nous attendons qu'un acte soit posé. Je dis cela sans la moindre acrimonie, car nous appartenons très loyalement à la majorité. Nous avons cependant des exigences strictes, comme celle-ci. Nous souhaitons que des engagements soient pris au titre du projet de loi de finances pour 2013. Pour l'heure, je maintiens l'amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de René-Paul Savary

On ne peut pas ne pas réagir aux propos qui viennent d'être tenus quand on connaît un tant soit peu l'agro-industrie, notamment la filière de la bioraffinerie végétale, dont les agrocarburants ne constituent que la production la plus connue !

De quoi s'agit-il ? Il s'agit, par des voies propres, les voies fermentaires, de transformer la plante entière. Ainsi, la transformation de la paille de blé peut permettre d'obtenir des coproduits à valeur ajoutée tels que la pâte à papier, des pentoses, des lignines.

Pour cela, un effort de recherche est indispensable ! Les agrocarburants ne constituent qu'une première phase de transformation dans le domaine de la bioraffinerie végétale, c'est-à-dire des biotechnologies blanches. Leur production s'inscrit dans un ensemble de procédés industriels qui créeront les emplois de demain.

S'attaquer à cette filière, c'est donc, une fois de plus, s'attaquer à l'ensemble des entreprises qui la constituent, donc à l'emploi. C'est envoyer un mauvais signal à la filière agricole, qui s'est particulièrement investie dans le domaine de la recherche et de l'innovation. C'est la raison pour laquelle je suis opposé à cet amendement dont l'adoption mettrait dès à présent en péril tout un secteur de notre économie.

En matière d'agrocarburants, la recherche porte sur la transformation de la plante entière et ouvre de nouveaux débouchés. C'est la raison pour laquelle un certain nombre de crédits lui ont été alloués. Contrairement à ce qui a été affirmé, ces investissements n'ont pas encore été rentabilisés. Il faut poursuivre l'effort si l'on veut pouvoir, demain, produire des carburants à partir de la biomasse, de la fétuque ou d'autres plantes. C'est ainsi que nous pourrons nous assurer une certaine indépendance énergétique !

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à M. Yves Détraigne, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Détraigne

Or pour aboutir à la deuxième génération, il faut commencer par mener à leur terme les travaux sur la première génération : cela est indispensable. §

Par ailleurs, si l'on n'aide pas la filière française, qui, contrairement à ce que d'aucuns ont affirmé, n'a pas encore, tant s'en faut, amorti ses investissements dans le développement de biocarburants de première génération, c'est une production venue d'Asie, du Brésil ou d'Amérique du Nord qui envahira notre marché national. §Or cette production est bien plus fortement subventionnée que ne le sont nos biocarburants de première génération ! Il y a là un véritable enjeu pour notre balance commerciale.

Aux yeux de certains de nos concitoyens, les biocarburants sont entachés d'un péché originel : ils sont élaborés dans des régions d'agriculture productive. Il faut rappeler, parce que l'on n'en parle jamais, que cette agriculture dégage un excédent commercial de 10 milliards d'euros chaque année, soit l'équivalent de trente-deux Airbus ! C'est l'agriculture productive qui permet à la France d'être exportatrice dans le domaine agricole et agroalimentaire. Personnellement, je n'ai rien contre l'agriculture biologique. À mon sens, les deux modes de production ont leur place, mais, disons-le clairement, les rendements à l'hectare de l'agriculture biologique ne représentent que 40 % de ceux de l'agriculture conventionnelle, grâce à laquelle l'Europe a acquis son indépendance alimentaire.

Nous devons être très attentifs à cette dimension. Certes, le développement des agrocarburants de première génération n'est pas une fin en soi. Certes, ils ne sont pas parfaits, mais ils sont le point de passage obligé vers la mise au point des biocarburants de deuxième génération produits à partir de la plante entière et de végétaux non alimentaires. Il faut aller dans cette direction, nous sommes tous d'accord sur ce point, mais ne coupons pas les jambes aux entreprises qui sont précisément sur la voie de cet accomplissement.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à M. Jean Arthuis, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

Je voudrais profiter de cette occasion pour interroger à mon tour M. le ministre.

La concomitance de l'adoption par le conseil des ministres d'un plan de soutien au secteur automobile et de notre présente discussion n'aurait-elle pas justifié que nous obtenions connaissance de l'incidence budgétaire de ce plan, dans la mesure où il n'est pas douteux qu'il affectera les finances publiques au titre de l'année 2012 ?

De ce point de vue, monsieur le ministre, des fonds provenant du grand emprunt seront-ils alloués au financement des actions de soutien au secteur automobile ? Si tel est le cas, il faudra reconnaître que, finalement, c'est le budget de 2010 qui aura financé une partie de votre plan.

En effet, le grand emprunt était une opération marquée par une grande habileté en matière de présentation budgétaire, puisque les 35 milliards d'euros ont été imputés au budget de 2010, alors que les dépenses n'interviendront que plus tard, sur une période de cinq à dix ans. Vous en saurez sans doute gré au gouvernement précédent…

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à Mme Marie-France Beaufils, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-France Beaufils

Notre collègue Joël Labbé a soulevé de vraies questions.

On a développé la filière des biocarburants sans mener une véritable réflexion de fond sur la pertinence, au regard des besoins de l'alimentation tant humaine qu'animale, de consacrer des terres agricoles à cette finalité.

Un travail au fond me semble donc nécessaire sur ce sujet.

J'ai bien entendu les arguments de certains de nos collègues sur le risque de voir se développer l'importation de biocarburants produits à l'étranger grâce à des aides importantes. Toutefois, cela ne justifie pas que nous nous engagions nous aussi dans une démarche qui est destructrice pour les pays concernés !

Marques d'approbation sur les travées du groupe écologiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-France Beaufils

Faut-il voter immédiatement cet amendement ou attendre la conférence environnementale ? En tout cas, il convient de prendre le temps de mener une réflexion de fond sur ces questions, afin de pouvoir prendre ensuite les mesures les plus efficaces possible.

Nous nous abstiendrons, mais c'est une abstention positive…

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à M. Jacques Mézard, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

En ce qui nous concerne, nous ne voterons pas cet amendement, car nous considérons qu'il n'est pas raisonnable de faire systématiquement le procès de l'utilisation du diesel, des agrocarburants, du kérosène.

Nous sommes dans une période où notre filière automobile connaît des difficultés, où il est nécessaire d'avoir une approche – c'est un laïc qui parle ! – non pas « religieuse » de ces problèmes, mais sociétale et économique.

Il s'agit de questions de fond, qui comportent également une dimension sanitaire qu'il ne faut pas sous-estimer. On ne peut les traiter de cette manière, en faisant de l'affichage, car cela ne peut aboutir, au contraire, qu'à les compliquer encore.

Dans ces conditions, nous ne pouvons pas voter cet amendement.

M. Jean-Pierre Chevènement applaudit.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à Mme Marie-Christine Blandin, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Christine Blandin

J'entends bien qu'il y a deux raisons de ne pas voter l'amendement : soit parce que l'on n'est pas d'accord avec nous sur le fond et que l'on soutient les agrocarburants, soit pour des considérations de stratégie industrielle concertée. Sur ce point, je réponds que lorsque l'industrie automobile française cessera de construire des véhicules hybrides roulant au diesel, elle aura peut-être des chances de réaliser des ventes dans d'autres pays, ce qui sera très bon pour notre balance commerciale.

M. le ministre, quant à lui, nous a suggéré d'attendre la conférence environnementale. Nous pourrions l'entendre, mais cette conférence durera moins de quarante-huit heures et se déroulera à la mi-septembre. Nous n'en saurons donc pas plus.

Considérez au moins cet amendement comme une petite fiche de rappel pour la ministre qui organisera cette conférence environnementale, afin qu'elle n'oublie pas notre volonté d'engager la discussion sur ce sujet.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à M. Didier Guillaume, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

M. le ministre l'a très bien dit, il s'agit là d'un sujet de société fondamental.

Cela étant, nous ne pouvons pas être favorables à cet amendement, parce que nous discutons ici d'un projet de loi de finances rectificative et que ce débat doit être mené à l'échelle de la société, avec les associations et, évidemment, les partis politiques. À ce titre, la conférence environnementale fournira un cadre adapté.

Je ne pense pas qu'il faille opposer l'agriculture biologique et l'agriculture conventionnelle : la France a besoin des deux.

L'agriculture conventionnelle apporte une contribution indispensable à notre commerce extérieur, et nous devons féliciter ces industriels de l'agroalimentaire, ces semenciers, tous ces exportateurs dont l'activité enrichit notre pays !

Par ailleurs, dans beaucoup de territoires, l'agriculture biologique est la seule filière pouvant permettre aux producteurs de s'en sortir.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

Certes, les rendements sont modestes, mais les revenus dégagés sont, dans leur cas, supérieurs à ceux que pourrait leur procurer un mode de production conventionnel.

Ce n'est pas là un positionnement politicien, c'est une réalité ! Nous devrons définir une orientation stratégique : quelle agriculture voulons-nous pour les années à venir ? Si l'on ne mène pas cette réflexion, il ne sera plus nécessaire, d'ici à dix ans, de débattre de la place des biocarburants, parce qu'il n'y aura plus d'agriculteurs dans notre pays ! Il faut sauver notre agriculture, la défendre, la promouvoir. À cet égard, engager le débat sur la PAC sera indispensable.

La conférence environnementale doit permettre de définir une véritable stratégie, …

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

… en mobilisant tous les acteurs. Le Grenelle de l'environnement a duré des mois, ma chère collègue, mais la loi Grenelle 2 a fait « pschitt » et tout le monde s'accorde aujourd'hui à reconnaître que les résultats ne sont pas à la hauteur des espérances suscitées.

Certains d'entre nous pourraient approuver le dispositif du présent amendement, …

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

… mais l'adopter aujourd'hui, dans le cadre de la discussion de ce projet de loi de finances rectificative, ce serait voir les choses par le petit bout de la lorgnette.

M. le ministre a pris des engagements, nous nous sommes tous exprimés : j'invite nos collègues à retirer leur amendement et à attendre l'automne pour revenir sur le sujet dans un cadre plus adapté. Pour notre part, nous avons une grande ambition et nous estimons qu'il convient d'élaborer des lois d'orientation, des lois-cadres pour aller plus loin et donner de la visibilité aux acteurs.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à M. Joël Labbé, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Joël Labbé

J'apprends encore le métier…

J'ai entendu la position du groupe socialiste et l'expression d'une volonté forte de mettre les choses à plat.

Il ne s'agissait pas, pour moi, de faire le procès de l'agriculture intensive. La discussion portait sur l'énergie et les biocarburants.

Sur le fond, il y aura certes un débat sur les grandes orientations en matière agricole pour les années à venir, mais on continue à s'inscrire dans le court terme. Bien évidemment, il faut continuer à travailler sur les biocarburants de deuxième et troisième générations et y consacrer des moyens.

En ce qui concerne les agrocarburants de première génération, le maintien de la niche fiscale ne se justifie pas car la filière fonctionne bien.

Cela étant, je vais retirer mon amendement, pour éviter les divisions. Toutefois, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur général, notre exigence est extrêmement forte sur ces sujets. Nous nous inscrivons dans une logique majoritaire pour avancer ensemble.

Enfin, je voudrais également vous parler d'éthique.

Marques d'impatience sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

L'amendement n° 123 est retiré.

Je donne la parole à Mme Keller, qui l'avait demandée avant que M. Labbé n'annonce le retrait de l'amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Fabienne Keller

Mes collègues du groupe UMP et moi-même avions presque envie de nous retirer, car un débat interne à la majorité sénatoriale et présidentielle s'était instauré. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste, du groupe CRC et du groupe écologiste.)

On nous a promis que la conférence environnementale des 14 et 15 septembre prochains résoudrait la question de la transition énergétique en 48 heures chrono, pour reprendre le slogan d'un grand distributeur.

Debut de section - Permalien
Un sénateur socialiste

Ce sera plus efficace que le Grenelle !

Debut de section - PermalienPhoto de Fabienne Keller

Changer de sources d'énergie, être plus attentifs au caractère limité des ressources, protéger la biodiversité et le cadre de vie de nos concitoyens, essayer de construire une forme de développement et d'urbanisme plus respectueuse des ressources : nous sommes tous d'accord sur ces objectifs, mais par quelle voie les atteindre ?

Le Grenelle de l'environnement a posé des jalons très forts. Je forme le vœu que, les 14 et 15 septembre prochains, dans un large consensus, nous puissions progresser ensemble.

Monsieur le ministre, j'espère que, en dépit de la chaleur du mois d'août, vous travaillerez beaucoup, parce qu'un grand effort de concertation au sein de la majorité est nécessaire pour parvenir à des propositions réalistes, de nature à prolonger de manière constructive le travail qui a été bien amorcé par le Grenelle de l'environnement. §

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

L'amendement n° 121, présenté par MM. Dantec, Placé et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :

Après l'article 8

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après la première occurrence du mot : « aéronefs », la fin du b) du 1. de l'article 265 bis du code des douanes est ainsi rédigée : « pour les vols, à l'exclusion des aéronefs de tourisme privé et des vols effectués intégralement sur le territoire français. »

La parole est à M. Ronan Dantec.

Debut de section - PermalienPhoto de Ronan Dantec

Cet amendement vise d'abord à abonder le budget de la France à hauteur de 1, 3 milliard d'euros. Nous n'aurons guère d'autres occasions de dégager un tel montant de ressources nouvelles, il convient donc d'analyser notre proposition avec attention !

Il s'agit là aussi de remédier à une aberration : le kérosène utilisé par les avions est exonéré de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques, la TICPE, alors que le transport aérien émet davantage de gaz à effet de serre que d'autres modes de déplacement.

Cette exonération apparaît donc à la fois comme une aberration écologique et comme une distorsion de concurrence avantageant le transport aérien par rapport aux autres modes de déplacement, notamment le rail. Cela va à l'encontre tant des principes posés lors du Grenelle de l'environnement que de la volonté exprimée par le Gouvernement de renforcer la part du rail dans les modes de transport en France.

J'insiste sur le fait que cet amendement s'inscrit dans le respect de la convention de Chicago, qui prévoit la possibilité de supprimer cette exonération pour les vols domestiques. Les Pays-Bas et la Norvège ont déjà retenu cette option.

Je voudrais souligner trois autres points.

Tout d'abord, en ce qui concerne la fragilité actuelle du transporteur aérien historique Air France, il me semble que les exonérations dont bénéficie le transport aérien profitent surtout aux compagnies low cost, qui peuvent proposer des tarifs beaucoup plus attractifs que ceux des transporteurs classiques, lesquels respectent un certain nombre de normes sociales et de critères de qualité de service. La mesure que nous proposons ne handicaperait donc absolument pas les transporteurs aériens historiques.

Ensuite, le groupe écologiste est bien sûr très sensible à l'aménagement équilibré du territoire. À cet égard, nous n'oublions pas la situation des territoires qui ont particulièrement besoin du transport aérien, notamment les îles. Toutefois, ce n'est pas en rendant le transport aérien moins cher partout que l'on aidera ces territoires insulaires. Il faut trouver d'autres mécanismes, et le fait pour l'État de disposer d'une nouvelle ressource pourrait d'ailleurs lui permettre de déployer des dispositifs de soutien aux territoires les plus excentrés, qui rencontrent des difficultés en raison de cette situation.

Enfin, je voudrais insister sur la question de l'ETS, ou emissions trading system, à l'échelon européen, qui ne doit pas être confondue avec celle de la TICPE.

Premièrement, les montants en jeu ne sont pas les mêmes : l'ETS ne permettra jamais de compenser le cadeau concurrentiel au transport aérien que représente l'exonération de TICPE.

Deuxièmement, il est absolument impératif que le Gouvernement français et l'Europe continuent de défendre l'inscription du transport aérien dans l'ETS au niveau européen. Nous connaissons tous les pressions exercées pour que le transport aérien soit exclu de l'ETS. Toutefois, lâcher sur ce point reviendrait à décrédibiliser l'Europe dans les négociations internationales sur le climat, qui constituent un enjeu majeur.

Nous vous soumettons donc un amendement qui rapportera 1, 3 milliard d'euros au budget de l'État et qui aidera à lutter efficacement contre l'effet de serre.

Applaudissements sur les travées du groupe écologiste.

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

La position de la commission est la même que pour les deux amendements précédents : nous souhaitons que les questions soient envisagées globalement, en s'appuyant sur la conférence environnementale.

Quant aux moyens, je ne suis pas sûr que la retraite de Strasbourg proposée par Fabienne Keller soit de nature à faire avancer le sujet… Mais bon, pourquoi pas ?

S'agissant des montants, l'estimation avancée ne nous semble pas des plus fiables. Le rapport Guillaume évoquait un montant de 315 millions d'euros, et non de 1, 3 milliard d'euros. §Il faudra donc préciser les choses et affiner la réflexion d'ici à la présentation du projet de loi de finances pour 2013.

Debut de section - PermalienPhoto de Albéric de Montgolfier

Quoi qu'il en soit, cette mesure est une mauvaise idée !

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

Dans l'immédiat, je préconise le retrait de cet amendement, monsieur le sénateur.

Debut de section - Permalien
Jérôme Cahuzac

Le Gouvernement n'est pas favorable à cet amendement, d'abord pour des raisons juridiques. On peut certes gloser sur la prévalence de la convention de Chicago, qui est un traité, sur notre droit interne. Certains juristes la contestent. En revanche, personne ne remet en cause la prééminence de la directive adoptée en 2003.

L'adoption de cette mesure poserait ensuite un problème d'ordre économique.

Certes, il y a le précédent des Pays-Bas, mais ce pays n'a pas la même superficie que la France, ni les mêmes niveaux d'infrastructures, notamment ferroviaires.

Surtout, les compagnies opérant sur notre territoire rencontreraient des problèmes de deux ordres.

Elles seraient tout d'abord pénalisées dans la concurrence avec les compagnies low cost, qui organisent l'avitaillement en dehors de nos frontières et bénéficieraient dès lors d'un avantage compétitif supérieur à ce qu'il est actuellement.

Par ailleurs, un certain nombre de vols au départ de notre territoire se poursuivent à l'extérieur de nos frontières. Comment faire par exemple la part des choses pour un passager qui transiterait par Paris pour se rendre de Toulouse à Francfort, à Londres ou à New York ? Il y aurait de nombreux recollements et ajustements à faire. Ce serait une formidable source de complexité et de contentieux, et certainement pas satisfaisant sur le fond.

Pour ces deux raisons, je vous engage à retirer votre amendement, monsieur le sénateur. Je comprendrais que mes propos ne vous semblent pas agréables : sachez qu'il m'est arrivé, lorsque j'étais parlementaire de l'opposition, de déposer des amendements comparables et de me voir opposer les mêmes arguments… Cela étant, nous n'allons pas engager ici le fameux débat, parfaitement retracé par Weber, entre l'éthique de responsabilité et l'éthique de conviction ! Souffrez que je maintienne ma position.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à M. Jean-Claude Requier, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Requier

Je comprends très bien la philosophie de cet amendement, mais il y a loin de la théorie à la réalité !

Il existe deux France ferroviaires : celle des TGV, avec un accès rapide, régulier et confortable à la capitale, et celle des liaisons lentes, intermittentes et chaotiques avec Paris !

Nous avons donc besoin de liaisons aériennes. Je ne parle pas ici des grandes villes, comme Toulouse ou Nice, mais de petites capitales régionales comme Agen, Aurillac, Brive-la-Gaillarde, Castres, Le Puy ou Lannion, autant de villes qui sont desservies par des lignes régionales déficitaires, renflouées par les collectivités locales : conseils généraux, communautés d'agglomération ou communes. §Si l'on supprime l'exonération de TICPE, on aggravera encore les déficits, aux dépens des collectivités.

En conséquence, le groupe RDSE est opposé à cet amendement. C'est peut-être une vision de court terme, mais, pour nous déplacer à partir de nos territoires, la solution de court terme est de recourir au transport aérien !

Très bien ! et applaudissements sur les travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de René-Paul Savary

Je voudrais rappeler que le prix du carburant pèse de plus en plus lourd dans le coût du transport aérien : il représente aujourd'hui 35 % de celui-ci, contre 20 % à 25 % il y a encore peu de temps.

À l'heure où les échanges et les déplacements se multiplient, au sein de notre pays comme avec l'extérieur, il est important de démocratiser l'ensemble des modes de transport, dont le transport aérien.

Ce sont les lignes intérieures qui font vivre les aéroports régionaux, accroissent l'attractivité d'un territoire et renforcent son économie, dans des proportions parfois plus importantes que l'on aurait pu l'imaginer.

Certains d'entre vous connaissent l'aéroport de Vatry, dans la Marne. Nous avons ouvert des liaisons aériennes avec Marseille et Nice. Or, lorsque l'on analyse les choses, on constate que, contrairement aux idées reçues, il y a plus de passagers qui voyagent de Nice ou de Marseille vers la Champagne que de Champenois qui prennent l'avion pour le Sud. Une offre de transport aérien à des coûts raisonnables permet de créer des activités supplémentaires.

Parce qu'il est important de ne pas alourdir le coût du transport aérien, je suis personnellement opposé à cet amendement, d'autant que, comme l'a rappelé M. le ministre, l'avitaillement des avions se fait facilement en dehors de nos frontières, là où le prix du carburant est nettement plus avantageux.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

M. le président. La parole est à M. Serge Dassault, pour explication de vote.

Ah ! sur diverses travées.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Caffet

M. Jean-Pierre Caffet . Ce sont des interventions en rafale !

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Serge Dassault

Je voudrais féliciter M. le ministre chargé du budget de sa sagesse. Bien entendu, je suis moi aussi opposé à cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à Mme Fabienne Keller, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Fabienne Keller

Je voudrais remercier M. Dantec d'avoir ouvert ce débat important.

Comme vous l'avez rappelé, monsieur le ministre, la convention de Chicago ne permet pas la fiscalisation du gazole utilisé par les avions. Ce texte a d'ailleurs étendu, me semble-t-il, une réglementation qui s'appliquait depuis le Moyen Âge au transport maritime.

Si l'Europe a décidé d'intégrer les transports aériens dans le mécanisme des quotas d'émission de carbone – c'est une bonne nouvelle, même si l'on voit que la mise en œuvre de cette mesure rencontre certaines résistances –, je ne suis pas sûre, monsieur le rapporteur général, que ce sujet relève de la conférence environnementale.

En effet, on pourrait certainement réunir un consensus politique très large sur l'instauration d'une telle taxe, pour peu que son taux soit raisonnable et progressif dans le temps.

Cependant, la question du processus de renégociation de cet accord mondial se pose, monsieur le ministre. Pouvez-vous nous donner des informations sur les moyens que le Gouvernement entend mettre en œuvre pour transformer en réalité ce qui apparaît comme une proposition raisonnable, mais de très long terme ?

M. Pierre Hérisson applaudit

Debut de section - PermalienPhoto de Ronan Dantec

Aujourd'hui, il s'agit de se demander si le transport aérien doit bénéficier d'un tel avantage fiscal, notamment par rapport au transport ferroviaire, qui dans l'avenir aura grand besoin du soutien de l'État pour la modernisation des lignes, en particulier de celles que n'empruntent pas les TGV.

Le groupe écologiste, fidèle à ses convictions en la matière, maintient cet amendement.

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

L'amendement n° 120, présenté par MM. Dantec, Placé et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :

Après l'article 8

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le III de l'article 265 C du code des douanes est abrogé.

La parole est à M. Ronan Dantec.

Debut de section - PermalienPhoto de Ronan Dantec

La présentation de cet amendement sera plus brève, le débat ayant déjà eu lieu à l'Assemblée nationale.

L'autoconsommation des raffineries n'est pas taxée à l'heure actuelle, ce qui représente un très mauvais signal. Établir une telle taxation inciterait à l'amélioration des process industriels et contribuerait à la lutte contre l'effet de serre.

Néanmoins, il est apparu que cet amendement n'est sans doute pas compatible avec le droit européen. Pour cette raison, je le retire, en dépit de son caractère pédagogique.

I. – Le code général des impôts est ainsi modifié :

1° Le second alinéa du III de l'article 235 ter ZAA est supprimé ;

2° Il est rétabli un article 1668 B ainsi rédigé :

« Art. 1668 B. – La contribution mentionnée à l'article 235 ter ZAA est payée spontanément au comptable public compétent, au plus tard à la date prévue au 2 de l'article 1668 pour le versement du solde de liquidation de l'impôt sur les sociétés.

« Elle donne lieu à un versement anticipé à la date prévue pour le paiement du dernier acompte d'impôt sur les sociétés de l'exercice ou de la période d'imposition.

« Le montant du versement anticipé est fixé :

« a) Pour les entreprises ayant réalisé un chiffre d'affaires compris entre 250 millions d'euros et 1 milliard d'euros au cours du dernier exercice clos ou de la période d'imposition, ramené s'il y a lieu à douze mois, aux trois quarts du montant de la contribution exceptionnelle estimée au titre de l'exercice ou de la période d'imposition en cours et déterminée selon les modalités prévues au I de l'article 235 ter ZAA ;

« b) Pour les entreprises ayant réalisé un chiffre d'affaires supérieur à 1 milliard d'euros au cours du dernier exercice clos ou de la période d'imposition, ramené s'il y a lieu à douze mois, à 95 % du montant de la contribution exceptionnelle estimée au titre de l'exercice ou de la période d'imposition en cours et déterminée selon les modalités prévues au même I.

« Pour l'application des a et b, le chiffre d'affaires est apprécié, pour la société mère d'un groupe mentionné à l'article 223 A, en faisant la somme des chiffres d'affaires de chacune des sociétés membres de ce groupe.

« Si le montant du versement anticipé est supérieur à la contribution due, l'excédent est restitué dans les trente jours à compter de la date de dépôt du relevé de solde de l'impôt sur les sociétés mentionné au 2 de l'article 1668. » ;

3° Après l'article 1731 A, il est inséré un article 1731 A bis ainsi rédigé :

« Art. 1731 A bis. – L'intérêt de retard prévu à l'article 1727 et la majoration prévue à l'article 1731 sont appliqués :

« 1° Pour les entreprises mentionnées au a de l'article 1668 B, à la différence entre, d'une part, trois quarts du montant de la contribution exceptionnelle sur l'impôt sur les sociétés due au titre d'un exercice et, d'autre part, trois quarts du montant de cette contribution estimée au titre du même exercice servant de base au calcul du versement anticipé en application du même article 1668 B, sous réserve que cette différence soit supérieure à 20 % du montant de la contribution et à 100 000 € ;

« 2° Pour les entreprises mentionnées au b dudit article 1668 B, à la différence entre, d'une part, 95 % du montant de la contribution mentionnée au 1° du présent article et, d'autre part, 95 % du montant de cette contribution estimée dans les conditions mentionnées au même 1°, sous réserve que cette différence soit supérieure à 20 % du montant de la contribution et à 400 000 €.

« Toutefois, l'intérêt de retard et la majoration mentionnés au premier alinéa ne sont pas appliqués si le montant estimé de la contribution mentionnée au 1° a été déterminé à partir de l'impôt sur les sociétés lui-même estimé à partir du compte de résultat prévisionnel mentionné à l'article L. 232-2 du code de commerce, révisé dans les quatre mois qui suivent l'ouverture du second semestre de l'exercice, avant déduction de l'impôt sur les sociétés. Pour la société mère d'un groupe mentionné à l'article 223 A du présent code, le compte de résultat prévisionnel s'entend de la somme des comptes de résultat prévisionnels des sociétés membres du groupe. »

II. – Le I s'applique aux exercices clos à compter du 31 décembre 2012.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à Mme Marie-France Beaufils, sur l'article.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-France Beaufils

L'article 9 est le premier d'une série portant, de manière générale, sur l'impôt sur les sociétés.

Si nous approuvons la philosophie qui sous-tend ces articles, nous tenons néanmoins à formuler deux observations.

Tout d'abord, nous n'avions pas vu depuis longtemps un texte financier comportant un volet aussi fourni de mesures diverses relatives à l'impôt sur les sociétés. Aussi nous semble-t-il indispensable que les textes à venir approfondissent singulièrement la question.

Ensuite, cette floraison législative, certes bienvenue, montre qu'il y a beaucoup à faire dans le vaste champ de la fiscalité des entreprises.

Les entreprises ont été, pendant plusieurs décennies, au centre des politiques de moins-disant fiscal. Selon une croyance assez répandue, moins on soumettrait les circuits productifs à l'imposition, plus les vertus d'une plus grande liberté d'action conduiraient l'économie tout entière sur la voie de la croissance, du progrès et du plein emploi.

Le fameux théorème de Schmidt selon lequel « les profits d'aujourd'hui sont les investissements de demain et les emplois d'après-demain » s'est largement appliqué en France et en Europe, pour un résultat que nous connaissons tous et avec les conséquences que l'on sait pour les salariés : la France compte 5 millions de chômeurs à temps plus ou moins complet, 3 millions de salariés payés au SMIC, soit un salarié sur dix, 3 millions de salariés précaires. En outre, l'industrie assure aujourd'hui péniblement un sixième de notre PIB, le déficit de notre commerce extérieur atteint 70 milliards d'euros et la croissance est atone, rechutant parfois aussi vite qu'elle avait faiblement repris.

En Europe, on constate une concurrence fiscale et sociale exacerbée, tandis que le taux de chômage atteint 25 % en Espagne, où il s'élève même à 50 % chez les jeunes.

Devenue un véritable gruyère, farcie d'exemptions et de dérogations diverses, la fiscalité des entreprises doit clairement être revue et corrigée.

Selon certains économistes, 178 milliards d'euros sont affectés tous les ans à la réduction des impôts et des cotisations sociales prélevés au niveau de la production, donc de l'entreprise.

Dans le même ordre d'idées, il est évident que, comme l'a montré le travail réalisé par la commission d'enquête sénatoriale sur l'évasion des capitaux et des actifs hors de France et ses incidences fiscales, les entreprises sont les responsables et les bénéficiaires de l'essentiel de la fraude fiscale. Nous avons là du « grain à moudre », des marges importantes d'action pour réduire les déficits et financer les politiques publiques.

Percevoir mieux pour dépenser utile : voilà le principe qui doit, à notre avis, guider le travail de la nouvelle majorité parlementaire. Nous vous proposerons ultérieurement d'adopter, mes chers collègues, un certain nombre d'amendements en ce sens.

Applaudissements sur les travées du groupe CRC. – M. Didier Guillaume applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à M. le président de la commission des finances.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Monsieur le président, je souhaite dire quelques mots sur l'organisation de nos travaux.

Je me suis livré à quelques petits calculs classiques afin de déterminer ce que l'on appelle traditionnellement notre « braquet » : il était de huit amendements examinés à l'heure ce matin, il n'est plus que de deux à l'heure cet après-midi. Sachant qu'il nous reste encore quelque 140 amendements à examiner, nous avons devant nous une vingtaine d'heures de débat.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Si nous poursuivons à ce rythme, nous devrons peut-être demander à la conférence des présidents de prévoir une séance publique samedi, car celle de vendredi ne suffira pas.

Je souhaitais simplement vous informer de cette réalité, mes chers collègues : c'est la pendule qui vous parle ! §

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

L'amendement n° 112, présenté par M. J. C. Gaudin et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Philippe Dominati.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Dominati

Comme l'a dit tout à l'heure Mme Keller, ce sont surtout les débats internes à la majorité présidentielle plurielle et le manque de préparation de ce projet de loi de finances rectificative qui nous retardent.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

C'est la richesse du débat public ! Nous avons la chance de pouvoir discuter !

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Dominati

L'amendement n° 112 vise donc à supprimer l'article 9, tendant à instaurer un versement anticipé de la contribution exceptionnelle au titre de l'impôt sur les sociétés.

Une telle avance altérerait le budget de 2013 au profit de celui de 2012, ce qui nuirait à la lisibilité des comptes publics. Certes, il a pu être occasionnellement recouru à cette pratique dans le passé, mais pas avec une telle ampleur.

Surtout, il s'agit d'une question de principe. Solliciter la trésorerie des entreprises au bénéfice de celle de l'État, ainsi qu'on peut le lire dans le rapport, c'est tout de même faire preuve d'un grand cynisme dans la conjoncture économique présente.

Nous avons déjà dénoncé le fait que le monde de l'entreprise soit votre cible principale dans ce projet de loi de finances rectificative. En témoignent toutes les mesures proposées risquant de grever la compétitivité des entreprises. M. le rapporteur général nous avait ainsi indiqué, en commission, que l'effort fiscal demandé reposerait à hauteur de 42 % sur les entreprises.

Telles sont les raisons pour lesquelles le groupe UMP demande la suppression de l'article 9.

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

Certes, le dispositif de l'article 9 entraînera une perte de recettes pour le budget de 2013, mais la réforme prévue de la fiscalité du patrimoine, de l'impôt sur les sociétés et de l'impôt sur le revenu permettra de définir un mécanisme susceptible d'assurer les recettes qui seront nécessaires.

Contrairement à ce que vient d'affirmer notre collègue, il s'agit non pas de ponctionner la trésorerie des entreprises par le biais de je ne sais quel nouveau dispositif, mais d'anticiper une recette fiscale selon des modalités clairement définies. Nous restons dans le cadre de la fiscalité existante.

Dans ces conditions, la commission est défavorable à cet amendement.

Debut de section - Permalien
Jérôme Cahuzac

Le Gouvernement est également défavorable à cet amendement.

Tout d'abord, il ne s'agit pas de créer une recette ; la majorité précédente l'avait déjà prévue et l'avait votée. Il s'agissait à l'époque, pour l'État, de reprendre une avance de trésorerie qu'il consentait aux entreprises dont le chiffre d'affaires est supérieur à 250 millions d'euros. Nous modifions simplement le calendrier de perception de cette recette, pour des raisons qui n'échappent à personne.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à M. Dominique de Legge, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique de Legge

Je ne suis pas certain que l'on puisse vraiment parler d'une recette.

En effet, à la page 157 de votre rapport, vous-même écrivez, monsieur le rapporteur général, que « le présent article apporte un gain de trésorerie ». Cela signifie que nous avons affaire à un budget insincère, quelque 10 % des 7, 2 milliards d'euros de crédits nouveaux relevant d'un système qui s'apparente à de la cavalerie… Je ne pensais pas que l'État avait vocation à pratiquer la cavalerie aux dépens de la trésorerie des entreprises !

En outre, par un tour de passe-passe qui vous est assez habituel, vous nous expliquez régulièrement que les amendements que nous avons déposés – voire certains amendements de la majorité ! – ne sont pas recevables au motif que l'on ne saurait préempter les réformes à venir et le budget de 2013. Or je m'aperçois que ce principe ne vaut pas en l'occurrence…

Pour toutes ces raisons, je voterai l'amendement.

L'amendement n'est pas adopté.

L'article 9 est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

L'amendement n° 69, présenté par M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Bocquet et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Après l'article 9

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Après le 2 bis de l'article 38 du code général des impôts, il est inséré un 2 ter ainsi rédigé :

« 2 ter Pour l'application du 1 et du 2 du présent article, les charges d'intérêts liées à l'émission d'emprunts par une société sont admises, en déduction pour le calcul du bénéfice net, à condition que le rapport entre les capitaux propres et la dette financière ne soit pas inférieur à 50 %. »

II. – Les dispositions du présent I ne sont applicables qu'à compter du 1er octobre 2012.

La parole est à Mme Marie-France Beaufils.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-France Beaufils

Cet amendement vise à limiter l'effet de levier des emprunts contractés lors d'un rachat d'entreprise ou, pour être plus précise encore, à restreindre les conséquences que ces opérations peuvent avoir sur la situation même des entreprises concernées.

Le dispositif, maintes fois décrit, est bien identifié : une entreprise est achetée, qu'elle soit ou non en difficulté ; celui qui l'achète ne disposant pas des liquidités nécessaires, il recourt à un emprunt pour financer l'opération.

Si le contexte économique s'y prête, l'activité et le chiffre d'affaires de l'entreprise seront suffisamment importants pour assurer le remboursement de l'emprunt sans difficulté majeure. En revanche, la profitabilité de l'entité concernée sera, dans un premier temps, relativement limitée, et l'essentiel de l'excédent d'exploitation sera d'abord absorbé par les frais financiers, ce dont la majorité sortante ne parle jamais, préférant s'en tenir au « coût du travail »…

Si, par contre, la conjoncture est moins favorable, il existe deux possibilités : soit l'entreprise, victime de son endettement, croule et se trouve rapidement soumise à des procédures collectives, avec un plan de licenciements à la clé, soit les acquéreurs vendent au plus offrant machines, biens matériels et immatériels pour solder les comptes, en attendant que le démembrement ainsi organisé des capacités de production ne se traduise par des suppressions d'emplois.

Des exemples de recours à ce processus, nous en connaissons un nombre significatif dans notre pays. L'entreprise Samsonite, située dans le Pas-de-Calais, a ainsi fait l'objet d'une opération de LBO, ou leverage buy -out operation. Plus récemment, ce fut également le cas de l'entreprise Plysorol, ex-leader européen du contreplaqué, propriétaire de massifs forestiers en Afrique, qui avait été reprise par un groupe libanais, après être passée quelque temps sous la coupe d'un groupe chinois, et dont le propriétaire actuel entend réduire l'endettement en fermant deux des trois sites de production subsistants.

Il est donc plus que temps de mettre un terme à ces opérations spéculatives, qui coûtent beaucoup à notre économie et s'accompagnent bien souvent de suppressions massives d'emplois et de capacités de production.

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

Plusieurs études, notamment celle de la direction générale du Trésor du début de l'année 2011, ont montré que les grandes entreprises payent proportionnellement moins d'impôt sur les sociétés que les PME.

Ce phénomène s'explique, en partie, par le fait qu'elles recourent davantage à l'endettement et à l'effet de levier. Elles peuvent déduire les charges financières afférentes à ces opérations, c'est-à-dire les intérêts d'emprunts, de leur bénéfice imposable.

Cet amendement soulève une question majeure. Je sais que le Gouvernement étudie différentes pistes en vue de proposer un dispositif lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2013. Pour l'heure, j'invite nos collègues du groupe CRC à réfréner leur impatience légitime, que je partage, et à retirer leur amendement, au bénéfice de l'éclairage que pourra nous apporter M. le ministre.

Debut de section - Permalien
Jérôme Cahuzac

On connaît la situation actuelle : un certain nombre d'entreprises réduisent l'assiette de leur impôt sur les sociétés par le recours à un endettement excessif, directement ou par le biais d'une filiale. Cela fait partie des abus que le présent projet de loi de finances rectificative vise à corriger, au moins en partie.

Pour le reste, le Gouvernement travaille actuellement à l'élaboration d'un dispositif allant dans le sens de vos préoccupations, madame Beaufils, afin de pouvoir être en mesure de l'introduire dans le projet de loi de finances pour 2013 que le Sénat examinera à l'automne.

Dans cette perspective, j'aimerais que vous retiriez cet amendement ; à défaut, l'avis sera défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-France Beaufils

Monsieur le ministre, nous sommes très attentifs à ces sujets, car l'activité économique de notre pays est fortement affectée par les opérations financières en question, qui pèsent également lourdement sur le budget de la nation.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-France Beaufils

J'entends que le Gouvernement compte réaliser un travail de fond sur ces questions. Nous nous tenons à sa disposition pour participer à la réflexion, en vue de favoriser le développement de notre activité économique, au service de l'emploi, et d'éviter que celle-ci ne soit rongée par une approche financiarisée.

Pour l'heure, j'accepte de retirer cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

L'amendement n° 69 est retiré.

L'amendement n° 70 rectifié, présenté par M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Bocquet et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Après l'article 9

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le code général des impôts est ainsi modifié :

1° L'article 112 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« 9° La fraction d'intérêts non déductible en application du dernier alinéa du 1 de l'article 212 bis. » ;

2° Le premier alinéa du II de l'article 209 est ainsi modifié :

a) Après les mots : « mentionnée au sixième alinéa du 1 du II de l'article 212 », sont insérés les mots : « et au dernier alinéa du 1 de l'article 212 bis » ;

b) À la fin, les mots : « et au sixième alinéa du 1 du II de l'article 212 » sont remplacés par les mots : «, au sixième alinéa du 1 du II de l'article 212 et au dernier alinéa du 1 de l'article 212 bis » ;

3° Après l'article 212, il est inséré un article 212 bis ainsi rédigé :

« Art. 212 bis. – 1. Lorsque le montant des intérêts déductibles servis par une entreprise excède simultanément au titre d'un même exercice les deux limites suivantes :

« a. 3 000 000 euros ;

« b. 80 % du résultat courant avant impôts préalablement majoré desdits intérêts, des amortissements pris en compte pour la détermination de ce même résultat et de la quote-part de loyers de crédit-bail prise en compte pour la détermination du prix de cession du bien à l'issue du contrat, pour les exercices ouverts à compter du 1er janvier 2011 ;

« La fraction des intérêts excédant la limite visée au b ne peut être déduite au titre de cet exercice.

« Ce taux est fixé à 60 % pour les exercices ouverts à compter du 1er octobre 2012 et à 30 % pour les exercices ouverts à compter du 1er avril 2013.

« Toutefois, cette fraction d'intérêts non déductible immédiatement peut être déduite au titre de l'exercice suivant à concurrence de la différence calculée au titre de cet exercice entre la limite mentionnée au b et le montant des intérêts déductibles. Le solde non imputé à la clôture de cet exercice est déductible au titre des exercices postérieurs dans le respect des mêmes conditions sous déduction d'une décote de 5 % appliquée à l'ouverture de chacun de ces exercices.

« 2. Les dispositions prévues au 1 ne s'appliquent pas aux intérêts dus à raison des sommes ayant servi à financer :

« 1° Des opérations réalisées dans le cadre d'une convention de gestion centralisée de la trésorerie d'un groupe par l'entreprise chargée de cette gestion centralisée ;

« 2° L'acquisition de biens donnés en location dans les conditions prévues aux 1 et 2 de l'article L. 313-7 du code monétaire et financier.

« Ces dispositions ne s'appliquent pas non plus aux intérêts dus par les établissements de crédit mentionnés à l'article L. 511-9 du même code. » ;

4° L'article 223 B est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Par exception aux dispositions prévues au dernier alinéa du 1 de l'article 212 bis, les intérêts non admis en déduction, en application des quatre premiers alinéas du 1 du même article, du résultat d'une société membre d'un groupe et retenus pour la détermination du résultat d'ensemble ne peuvent être déduits des résultats ultérieurs de cette société. » ;

5° Après la référence : « 209 », la fin du dernier alinéa du 6 de l'article 223 I est ainsi rédigée : « d'une part et au sixième alinéa du 1 du II de l'article 212 et au dernier alinéa du 1 de l'article 212 bis d'autre part. » ;

6° Le dernier alinéa de l'article 223 S est complété par les mots : « et au cinquième alinéa du 1 de l'article 212 bis. »

La parole est à Mme Marie-France Beaufils.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-France Beaufils

La commission d'enquête sur l'évasion des capitaux et des actifs hors de France et ses incidences fiscales, créée à la demande de notre groupe et dont M. Éric Bocquet est le rapporteur, …

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-France Beaufils

… a mis en évidence que les entreprises utilisaient largement tous les outils juridiques et financiers disponibles pour échapper, autant que faire se peut, à l'imposition due à raison de leurs résultats.

La Haute Assemblée avait d'ailleurs déjà eu l'occasion, lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2012, de s'interroger sur quelques-unes des facettes de cette optimisation fiscale, dont les travaux de ladite commission d'enquête ont permis dans une large mesure de cerner les contours.

Je dois dire que, avant les travaux de la commission d'enquête, nous étions fort loin, pour la plupart d'entre nous, de nous douter du comportement fiscal de certaines de nos entreprises, singulièrement des grands groupes.

Le présent amendement n'est pas d'une originalité absolue, ne serait-ce que parce que le Sénat l'a déjà voté, à l'automne dernier, à la demande de Nicole Bricq, qui était alors rapporteure générale de la commission des finances. Ce dispositif pour le moins rentable procède d'une recommandation du Conseil des prélèvements obligatoires ; il est en vigueur en Allemagne et il fut défendu, en d'autres temps, par M. le ministre chargé du budget, en tant que président de la commission des finances de l'Assemblée nationale.

Il s'agit en fait de plafonner la déductibilité fiscale des intérêts versés par les entreprises au titre d'un même exercice, notamment lorsque ces intérêts rémunèrent des prêts accordés par la maison mère du groupe et qu'ils vont de pair avec le maintien de la sous-capitalisation de la société filiale. Cette sous-capitalisation est un instrument permettant de valoriser la société mère au détriment de ses filiales ; c'est l'un des outils d'optimisation fiscale les plus couramment utilisés, et il nous semble donc nécessaire de mettre un terme à ces pratiques.

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

La commission des finances souhaite connaître l'avis du Gouvernement.

Pour ma part, j'approuve évidemment la philosophie qui sous-tend cet amendement, puisque notre groupe avait déposé un amendement similaire lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2012. Il me semble d'ailleurs, monsieur le ministre, que cet amendement reprenait une proposition que vous aviez faite lorsque vous étiez député. C'est dire que cet amendement a du sens à nos yeux ! Cela étant, est-il opportun de l'adopter aujourd'hui ou vaut-il mieux attendre le dispositif plus large que vous nous soumettrez sans doute à l'automne, monsieur le ministre, lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2013 ?

Debut de section - Permalien
Jérôme Cahuzac

Il m'est bien cruel, madame Beaufils, d'être obligé de vous demander de retirer un amendement que je connais bien… Je m'y résous malgré tout, car le Gouvernement présentera au Parlement une vraie réforme en la matière dans le cadre du projet de loi de finances pour 2013.

L'exercice sera délicat, car s'il faut éviter qu'un endettement « de convenance » puisse permettre à des entreprises de réduire leur assiette de l'impôt sur les sociétés de manière illégitime, il faut également se garder, a fortiori en cette période de crise, de pénaliser des entreprises qui vont avoir besoin d'encours bancaires, du fait notamment d'une trésorerie défaillante. La rédaction du dispositif devra donc être fine.

Il n'est pas forcément pertinent de s'inspirer du modèle allemand, car c'est précisément quand une entreprise va mal que son EBITDA est faible ; par conséquent, instaurer un plafonnement en fonction de ce dernier reviendrait à appliquer une sorte de double peine à des entreprises déjà en difficulté.

Il m'est déjà pénible de vous inviter à retirer cet amendement, madame la sénatrice ; ne m'obligez à appeler à voter contre !

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Monsieur le ministre, vous l'aurez compris, il s'agit d'un amendement d'appel, auquel nous tenons beaucoup. Nous n'éviterons pas ce débat lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2013. Ces sujets sont très importants à nos yeux.

Cela étant dit, nous retirons l'amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

L'amendement n° 70 rectifié est retiré.

L'amendement n° 68 rectifié, présenté par M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Bocquet et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Après l'article 9

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

À la seconde phrase du deuxième alinéa du a quinquies du I de l'article 219 du code général des impôts, les mots : « portée au taux de 10 % » sont remplacés par les mots : « portée à 10 % du prix de cession des titres ».

La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin.

Debut de section - PermalienPhoto de Brigitte Gonthier-Maurin

La niche « Copé », fondée sur un traitement privilégié des plus-values réalisées lors de cessions d'actifs constitués par des parts sociales, est l'un des plus intéressants véhicules d'optimisation fiscale de notre droit… Selon l'évaluation des voies et moyens, son coût s'établit entre 3, 5 milliards et 4 milliards d'euros, soit tout de même de 7 % à 8 % du rendement de l'impôt sur les sociétés. Si l'on rapporte ce taux au taux normal d'imposition des bénéfices, la décote est comprise entre 2 et 2, 5 points.

À mesure que les années passent, la niche « Copé » représente un coût cumulatif de plusieurs milliards d'euros –probablement plus de 20 milliards d'euros aujourd'hui – pour les finances publiques, auquel il faut ajouter les financements extrabudgétaires ayant compensé la perte de recettes fiscales.

On peut donc se demander si le maintien de cette niche est justifié. A-t-elle permis de doper, de stimuler notre économie, en particulier notre industrie et notre commerce extérieur ? D'après les données disponibles, il semble bien que non : depuis 2007, année de la création de cette niche fiscale, nous avons perdu des centaines de milliers d'emplois dans le secteur industriel et productif, et notre balance commerciale s'est continûment dégradée.

Il nous a donc semblé particulièrement bienvenu que le Sénat adopte, à l'automne 2011, un amendement présenté par Nicole Bricq, alors rapporteure générale de la commission des finances, qui visait à modifier l'assiette du prélèvement libératoire en la faisant glisser de la plus-value constatée vers le produit de la cession lui-même. Comme le soulignait alors Nicole Bricq, « l'assiette logique, pour des charges afférentes à des actifs, c'est le prix de cession, la valeur des actifs, et non la plus-value nette, qui relève d'une autre logique puisque les moins-values en sont soustraites ».

Au bénéfice de ces observations, j'invite le Sénat à adopter cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

Nous renvoyons là encore à la grande réforme de l'assiette de l'impôt sur les sociétés que le ministre s'est engagé à mettre en œuvre et que nous attendons avec impatience. Le sort à réserver à la niche « Copé » devra être envisagé dans ce cadre.

J'invite donc nos collègues à retirer cet amendement, qu'ils pourront redéposer lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2013.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Je vous remercie, monsieur le ministre !

Rires.

Debut de section - Permalien
Jérôme Cahuzac

Je reprends à mon compte les arguments du rapporteur général. La question soulevée doit impérativement être traitée ; nous le ferons dans le cadre de l'élaboration du projet de loi de finances pour 2013.

Debut de section - PermalienPhoto de Brigitte Gonthier-Maurin

Cette grande réforme que vous annoncez est une urgence. J'ai rappelé le coût de la niche « Copé-Marini » et souligné son inefficacité. Comme l'a indiqué Nicole Borvo Cohen-Seat, nos amendements sont des amendements d'appel : il est impératif, pour le bon fonctionnement de notre économie et la sauvegarde de l'emploi, que le prochain projet de loi de finances comporte des mesures efficaces, qui soient de nature à régler les problèmes soulevés. Dans l'immédiat, je retire l'amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

L'amendement n° 68 rectifié est retiré.

L'amendement n° 76, présenté par M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Bocquet et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Après l'article 9

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. - Les personnes morales mentionnées aux articles L. 511-1 et L. 531-4 du code monétaire et financier qui, au jour de la publication de la présente loi, exploitent une entreprise en France au sens du I de l'article 209 du code général des impôts, acquittent une taxe spécifique.

II. - La taxe est assise sur la part variable des rémunérations attribuées par les personnes morales mentionnées au I, à ceux de leurs salariés, professionnels des marchés financiers, dont les activités sont susceptibles d'avoir une incidence significative sur l'exposition aux risques de l'entreprise, ainsi qu'aux professionnels de marché sous le contrôle desquels opèrent ces salariés.

La part variable des rémunérations mentionnée à l'alinéa précédent correspond au montant brut de l'ensemble des éléments de rémunération attribués à ces salariés en considération de leurs performances individuelles ou collectives, y compris lorsque leur versement et leur acquisition définitive sont sous condition, à l'exception des sommes leur revenant au titre de l'intéressement ou de la participation des salariés aux résultats de l'entreprise en application du livre III de la troisième partie du code du travail.

Les éléments de rémunération qui entrent dans l'assiette de la taxe sont pris en compte quelle que soit l'année de leur versement ou celle au cours de laquelle leur acquisition est définitive.

Lorsque la part variable prend la forme d'une attribution d'options sur titres, d'actions gratuites ou d'autres titres consentis à des conditions préférentielles, y compris lorsque cette attribution est effectuée par une société mère ou filiale de l'entreprise dans laquelle le salarié exerce son activité, l'assiette est égale à la juste valeur de ces options, actions ou titres à la date de leur attribution, telle qu'elle est estimée pour l'établissement des comptes consolidés pour les sociétés appliquant les normes comptables internationales adoptées par le règlement (CE) n° 1606/2002 du Parlement européen et du Conseil du 19 juillet 2002 sur l'application des normes comptables internationales.

Seule la part variable de la rémunération individuelle qui excède 27 500 € est prise en compte dans l'assiette de la taxe.

III. - Le taux de la taxe est de 50 %.

IV. - La taxe est exigible au premier jour du mois qui suit la publication de la présente loi. Lorsque tout ou partie de la part variable des rémunérations définie au II est attribué après cette date, la taxe correspondante est exigible au premier jour du mois suivant la décision d'attribution.

La taxe est déclarée et liquidée dans les vingt-cinq jours de son exigibilité sur une déclaration dont le modèle est fixé par l'administration.

Elle est acquittée lors du dépôt de cette déclaration.

V. - Dans le cas où le montant de la part variable des éléments de la rémunération finalement versés ou acquis aux salariés est inférieur au montant compris dans l'assiette de la taxe, aucune restitution n'est opérée.

VI. - La taxe est recouvrée et contrôlée selon les procédures et sous les mêmes sanctions, garanties et privilèges que la taxe sur la valeur ajoutée. Les réclamations sont présentées, instruites et jugées selon les règles applicables à cette même taxe.

La parole est à Mme Annie David.

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

Mme Annie David. Lorsque, à l'été 2008, les marchés financiers avaient connu une dangereuse surchauffe, la presse avait relevé que l'organisation économique du monde présentait des caractères étonnants et que les activités de ce que certains appellent l'industrie financière – mais que, pour notre part, nous avons plutôt tendance à nommer le grand capital

Ah ! sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

… s'étaient particulièrement développées.

Bien loin du guichet de banque ordinaire où les particuliers ouvrent leur compte, gèrent leurs économies et retirent leurs carnets de chèques ou leur carte de paiement, une activité bancaire intense, utilisant des outils financiers de plus en plus sophistiqués et composites – pour ne pas dire hybrides – s'est développée, jusqu'à créer des bulles financières de plus en plus grosses et de plus en plus incontrôlables. D'ailleurs, lorsque ces bulles explosent, elles ébranlent la planète tout entière !

Cette industrie financière, nourrie de transactions en temps réel, farcies d'algorithmes et de produits de synthèse, a des promoteurs zélés : ce sont ces fameux traders, à qui mission est donnée de valoriser autant que possible les potentiels de la banque qui les emploie, en les engageant dans de féroces parties de poker financier à échelle mondiale.

Si tout va bien, tant mieux ; celui qui a parié pour le compte de sa banque est récompensé et même plus que bien récompensé. En revanche, si les choses tournent mal, il en est évidemment tout autrement, comme nous l'avons constaté dans l'affaire Kerviel, du nom du trader concerné, quand bien même la responsabilité de ce dernier est limitée par le degré de liberté qu'on lui a laissé et les ordres qu'on a pu lui donner.

Pour apporter une touche de moralité ou de morale – on avait beaucoup entendu parler de moralisation du capital –, nous avions introduit dans notre législation, au détour d'une loi de finances rectificative, une taxation exceptionnelle assise sur la rémunération des traders dont le produit avait été réservé en grande partie à OSEO, organisme dont on connaît le rôle quand il s'agit de financer le développement des PME. D'ailleurs, cette taxe avait conduit certaines banques à minorer assez rapidement les rémunérations de caractère exceptionnel accordées à leurs commerciaux donneurs d'ordre, ce qui n'était déjà pas si mal…

Pour notre part, nous proposons de faire en sorte que cette taxe soit inscrite dans notre droit fiscal positif, afin, précisément, que les modes de rémunération de ces salariés ne débordent pas le droit commun.

Tel est le sens de cet amendement que, mes chers collègues, je vous invite vraiment à adopter.

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

L'amendement a pour objet de rendre pérenne la taxe sur les bonus des traders instituée, vous l'avez rappelé, pour la première fois par la loi de finances rectificative pour 2010. Comme vous l'avez aussi indiqué, elle a rapporté 360 millions d'euros, principalement affectés à OSEO.

À l'époque, elle devait répondre à des circonstances exceptionnelles, lesquelles ont eu tendance à se perpétuer. Il est vrai que les temps restent difficiles…

La taxe visait à modérer la masse salariale dans les banques et à limiter les risques pris par les opérateurs de marché.

Lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2012, nous avions tous considéré que la pérennisation de cette mesure était souhaitable. L'amendement proposé par nos collègues avait d'ailleurs été voté par le Sénat, mais supprimé par la commission mixte paritaire.

Quel est l'élément nouveau par rapport à la philosophie qui, au fond, reste la même ? Depuis lors, le Président de la République a pris l'engagement ferme qu'une nouvelle fiscalité sur les rémunérations excessives, parmi lesquelles celles des traders, serait élaborée. Cela ouvre, je pense, une perspective nouvelle : la mise en place d'un texte unificateur et sans doute fondateur. En effet, nous sommes partis pour de nombreuses années de soubresauts au sein de la sphère financière, ce qui nécessite une régulation stricte, durable, et donc le vote d'un texte fondateur dans des délais rapides. Le Président de la République s'y est engagé, et le sujet sera, j'imagine, traité à l'occasion du débat sur l'imposition à 75 %.

Cela me conduit à suggérer à nos collègues le retrait de l'amendement dans l'attente de la mise en œuvre de cet ambitieux programme qui nous est annoncé. Je pense que M. le ministre délégué ne manquera pas de nous éclairer sur ce point.

Debut de section - Permalien
Jérôme Cahuzac, ministre délégué

Le Gouvernement est défavorable à cet amendement pour deux raisons.

D'abord, une directive est en préparation à Bruxelles, précisément sur la rémunération de ces personnels particuliers : la CRD IV. La France contribue activement à son élaboration, en tentant de faire prévaloir l'efficacité autant qu'une forme de morale publique.

Ensuite, vous l'avez remarqué, dans ce projet de loi de finances rectificative, il est demandé aux banques et au secteur financier un effort particulier de plus de 500 millions d'euros. Il nous semble que, pour légitime et justifié qu'il soit, cet effort pourrait suffire et demander un effort supplémentaire à ce secteur-là, d'une manière ou d'une autre, pourrait être excessif. En effet, notre pays va avoir besoin du secteur bancaire et financier pour financer l'économie et aider en particulier les entreprises qui sont en grande difficulté. La réforme du secteur bancaire que nous nous proposons de présenter au Parlement devrait d'ailleurs y contribuer.

Enfin, si ces deux raisons ne vous ont pas convaincus de retirer votre amendement, sachez qu'une nouvelle fiscalité sera effectivement proposée à l'occasion de la réforme de l'impôt sur le revenu. On sait déjà qu'une tranche à 45 % sera instaurée. On sait aussi qu'une tranche exceptionnelle verra le jour. Le principe en a été décidé, même si les modalités restent à définir.

Pour toutes ces raisons, il me semble que le fait d'en discuter et, au terme de ce débat, d'adopter, je l'espère, les bonnes mesures en loi de finances initiale pourrait suffire. C'est dans cette perspective que je vous engage, une nouvelle fois, en vous priant de m'en excuser, à retirer cet amendement. À défaut, le Gouvernement appellera à voter contre.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Monsieur le ministre délégué, ce dispositif était effectivement provisoire, mais le législateur est tout à fait habilité à le rendre pérenne.

Certes, vous annoncez une réforme qui couvrirait le dispositif d'imposition des traders. Pour notre part, nous pensons que la coproduction législative n'est pas une mauvaise chose. C'est pourquoi, prenant nos responsabilités, nous ne retirons pas l'amendement.

L'amendement n'est pas adopté.

I

II. – Le même article 237 bis A est complété par un IV ainsi rédigé :

« IV. – Les provisions prévues au II cessent d'être admises en déduction des résultats imposables constatés au titre des exercices clos à compter de la date de publication de la loi n° du de finances rectificative pour 2012.

« Les provisions figurant à l'ouverture du premier exercice clos à compter de la date de publication de la même loi sont rapportées aux résultats imposables dans les conditions prévues au 4 du II. »

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à Mme Marie-Hélène Des Esgaulx, sur l'article.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Hélène Des Esgaulx

Cet article s'attaque à la participation et s'inscrit ainsi dans la même lignée idéologique que la mesure de hausse de 150 % du forfait social que nous examinerons plus tard.

Je dois bien avouer mes interrogations.

Est-ce parce que ce fut le général de Gaulle qui lança cette idée de la participation que vous voulez aujourd'hui décourager de ce système d'épargne salariale qui fonctionne très bien, en augmentant de manière spectaculaire sa taxation ?

Dix ans de droite au pouvoir vous poussent-ils à vouloir faire table rase de toute mesure de droite ? Circulez, il n'y a plus rien à voir !

Il s'agit pourtant d'associer les travailleurs à leur entreprise, de les faire participer aux bénéfices. Franchement, mes chers collègues du côté gauche de l'hémicycle, comment pouvez-vous décourager cette idée ? Cette position va complètement à l'encontre de votre dogme de la justice fiscale, censé guider toutes vos réformes ; en tout cas, c'est ce que j'avais cru comprendre. De plus, cela aura des conséquences sur la participation, qui concerne quand même entre dix millions et douze millions de salariés !

Le mécanisme fiscal lié à la provision pour investissement a pour objectif de maintenir les marges d'autofinancement des PME, afin de leur permettre d'investir, sous certaines conditions d'attribution à leurs salariés d'une participation aux résultats de l'entreprise.

Cesser d'admettre ces provisions en déduction des résultats imposables sera un mauvais signal pour les entreprises françaises, dans un contexte économique déjà peu propice aux investissements et dans lequel le taux de marge des entreprises est à son plus bas niveau depuis vingt-cinq ans. Cette mesure risque également d'avoir des conséquences sur les TPE et les PME de moins de cinquante salariés qui ne sont pas assujetties obligatoirement à la participation et qui ont opté – et il y en a beaucoup ! – pour ce mécanisme fiscal de provision pour investissement.

En outre, malgré la dégradation des comptes publics, il convient de souligner que les recettes pour l'État résultant de cet article seraient marginales : 31 millions d'euros seulement !

Les facteurs de la croissance ne sont pas uniquement liés à la consommation ; ils le sont également à la capacité d'investissement des entreprises ainsi qu'à la stabilité juridique. Aussi, plutôt que d'abroger ce dispositif, il conviendrait de l'encourager davantage. C'est la raison pour laquelle je soutiendrai l'amendement de suppression de cet article présenté par M. Dassault, au nom du groupe UMP.

Applaudissements sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Je suis saisi de deux amendements identiques.

L'amendement n° 107 est présenté par M. Dassault et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire.

L'amendement n° 136 rectifié est présenté par MM. Arthuis, Zocchetto, J. Boyer, Delahaye, Marseille, Dubois, Capo-Canellas, Amoudry, Roche et Deneux et Mme Férat.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Serge Dassault, pour présenter l'amendement n° 107.

Debut de section - PermalienPhoto de Serge Dassault

Cet article est une opération contre les participations dérogatoires, autrement dit contre les salariés. Je ne comprends pas du tout cette attitude antisociale qui consiste à vouloir supprimer ainsi aux salariés des rémunérations, des possibilités d'épargne, puisque la société accepte – ce n'est pas obligatoire – des accords dérogatoires qui leur permettent d'avoir plus.

Si je puis évoquer ma société, je vous signale que, pour le moment, nous reversons chaque année 100 millions d'euros au personnel, à égalité avec les dividendes distribués. Cela dure depuis plus de vingt ans et marche très bien. Je crois que nous sommes l'une des rares sociétés à pratiquer ainsi.

Avec la hausse du forfait social que vous avez décidé d'appliquer, la société sera pénalisée de 30 millions d'euros ; c'est intelligent ! Elle va donc diminuer la participation du personnel de 30 millions d'euros et ne plus distribuer que 70 millions d'euros, réduisant par là même les facilités qui étaient accordées.

Cette opération n'est vraiment pas du tout dans la ligne sociale du parti socialiste consistant à favoriser les personnels. Pourtant, voilà quelques années, les sénateurs socialistes et communistes avaient repris à leur compte l'amendement que j'avais proposé et qui avait été refusé par mes petits camarades de l'époque, car ils ne voulaient pas que j'applique ce système d'une façon obligatoire. Et j'avais voté avec vous, contre eux !

La présidente de séance d'alors est présente aujourd'hui.

Debut de section - PermalienPhoto de Serge Dassault

Je m'en souviendrai toute ma vie, cet amendement n'a pas été accepté à quelques voix près, ce qui était tout à fait désagréable !

Je souhaite que vous supprimiez cet article, qui est antisocial. C'est à croire que je suis plus socialiste que vous

Exclamations sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Serge Dassault

Vous voulez, avez-vous dit – et je trouve la phrase que vous avez prononcée tout à fait inacceptable ! –, supprimer certaines formes de rémunération pour les salariés. Au fond, votre objectif serait donc de supprimer la participation dérogatoire pour enlever cette forme de rémunération supplémentaire au personnel, afin que les salariés ne touchent pas plus. Là encore, ce n'est ni très social, ni très socialiste !

Par conséquent, dans l'intérêt de tous, à commencer par les salariés, puisque ce sont eux qui sont visés par le dispositif, je souhaite que vous votiez cet amendement de suppression.

Applaudissements sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

Dans le contexte de crise que nous connaissons, l'article 10 est un très mauvais signal. Je reconnais toutefois que le Gouvernement fait preuve de cohérence !

En effet, il nous expliquait hier qu'il fallait hypothéquer la compétitivité en renonçant à l'allégement des cotisations sociales.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat s'exclame.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

Le mécanisme prévu introduisait, sur le plan fiscal, la possibilité, dès lors que l'intéressement et la participation étaient bonifiés, de constituer une provision pour investissement et d'assurer une certaine neutralité fiscale.

Le Gouvernement nous invite à remettre en cause un dispositif favorable au pouvoir d'achat des salariés, à l'intéressement et à la participation, ainsi qu'à l'investissement. Monsieur le ministre délégué, le feu est dans la maison : il importe de bouger sans attendre et de sortir de toute vision dogmatique !

C'est pour ces raisons que j'ai déposé un amendement tendant à supprimer l'article 10.

Applaudissements sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

La provision pour investissement avait été conçue afin d'encourager la participation, à laquelle nous sommes, bien sûr, tous attachés, au-delà des obligations légales, tout en préservant les capacités d'investissement des entreprises.

Or le récent rapport d'évaluation des dépenses fiscales, dit rapport Guillaume, a montré que cette niche était inefficace. Notée 1 sur une échelle de 0 à 3, il y est dit qu'elle ne réussit ni à encourager la participation ni à faciliter les dépenses d'investissement. Elle n'atteint donc aucun des deux objectifs fixés.

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

Pour répondre aux préoccupations de certains de nos collègues, il convient de souligner que les PME bénéficient peu du dispositif.

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

S'agissant des niches, madame Des Esgaulx, puisque vous avez abordé le sujet, je souhaitais vous dire que notre préoccupation est de nous appuyer sur les évaluations qui ont pu être faites.

Nous l'avons bien vu, dans les dispositions prises au début de l'année, notamment dans le cadre de la première loi de finances rectificative pour 2012 de mars dernier, le gouvernement précédent s'était complètement « assis » sur le classement et les évaluations du rapport Guillaume, choisissant de supprimer des niches pourtant annoncées comme très efficaces.

Pour notre part, nous sommes fondés à considérer, à partir de ce travail rigoureux, que la niche en question n'est sans doute pas la plus performante, la plus utile, la plus efficace. L'article 10 vient opportunément la supprimer. Je suis donc bien sûr défavorable aux amendements identiques n° 107 et 136 rectifié.

Debut de section - Permalien
Benoît Hamon, ministre délégué auprès du ministre de l'économie et des finances, chargé de l'économie sociale et solidaire et de la consommation

Mesdames, messieurs les sénateurs, je veux vous rassurer, il n'y a pas, chez le Gouvernement, d'obsession qui consisterait à vouloir remettre en cause la participation, au motif que ce dispositif ne serait pas idéologiquement correct.

Pour avoir moi-même, lors de la conférence sociale, animé la table ronde sur les salaires, l'épargne salariale, le SMIC, j'ai pu voir quelles étaient les préoccupations et les objectifs des partenaires sociaux, tant du côté employeurs que du côté salariés. Des oppositions se sont manifestées chez les premiers au sujet de l'augmentation du forfait social, dont nous reparlerons tout à l'heure. Mais les discussions ont été sérieuses. Il a notamment été question de la façon dont il serait possible de faire évoluer l'épargne réglementée, l'épargne salariale, pour que la participation puisse être utilement employée comme un complément de rémunération.

Que constatons-nous cependant ? Outre que la participation et l'intéressement ne concernent qu'une minorité de salariés, principalement ceux des grandes entreprises et peu ceux des PME, une réalité s'impose : ces mécanismes servent de plus en plus de substituts à la rémunération du travail par le salaire.

Debut de section - Permalien
Benoît Hamon, ministre délégué

Nous entendons lutter contre ce phénomène.

Actuellement, vous le savez, le taux des prélèvements et des cotisations affectés aux salaires oscille entre 40 % et 45 % quand celui du forfait social est à 8 %. Même si ce dernier est porté à 20 %, la participation et l'intéressement resteront considérablement attractifs.

Il y a donc toujours un avantage « compétitif » évident à rémunérer les salariés sous la forme de participation et d'épargne salariale plutôt que de salaire. La contribution supplémentaire que nous proposons n'est donc ni injuste ni illégitime. Nous avons la volonté non pas de sanctionner de manière idéologique la participation et l'intéressement, mais de réintroduire un peu plus d'équité et de justice dans la façon dont ces dispositifs contribuent à l'effort collectif.

Dans le sillage des propos de M. le rapporteur général, je souligne que la niche sur la provision pour investissement a été jugée inefficace. Dès lors que le législateur a mis en place un certain nombre de dispositifs favorables à la compétitivité de nos entreprises ou à l'amélioration de la rémunération des salariés et que l'on constate que cela n'a que peu d'effets sur l'économie réelle, sur l'investissement, la tâche qui doit être la nôtre est de tirer les conséquences d'une telle évaluation.

Hormis pour les sociétés coopératives ouvrières, soumises à des statuts particuliers, il faut remettre en cause cette niche fiscale inefficace. C'est donc du bon usage de l'argent public que je m'inspire pour recommander le retrait, sinon le rejet, de ces deux amendements identiques.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à M. Jean Arthuis, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

Monsieur le ministre délégué, je vous remercie des précisions que vous venez d'apporter. Qu'il est dommage que vous n'ayez pu assister à tous nos débats depuis que nous avons ouvert la discussion sur ce collectif budgétaire ! Disant cela, je ne fais nullement reproche à M. Pierre Moscovici et à M. Jérôme Cahuzac d'avoir été alternativement présents, mais c'est vous qui avez évoqué votre participation au sommet social organisé au début du mois de juillet.

Au fil des années, il est vrai, nous avons multiplié les régimes dérogatoires, …

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

… pour permettre le versement de rémunérations exonérées de cotisations sociales. Si ces pratiques se sont développées, c'est parce que les cotisations sociales, dans notre pays, sont particulièrement élevées.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

Il a donc fallu trouver un équilibre extrêmement délicat, très technocratique, pour encadrer le dispositif, afin d'éviter tout glissement vers l'exonération d'une fraction de la rémunération des salariés.

Les partenaires sociaux se trouvent, aujourd'hui, dans une situation presque pathétique. Ils sont gestionnaires de la protection sociale. Il y a cinq caisses nationales, et autant de centrales syndicales : il faut que chacun puisse tenir sa position.

Si le salaire n'est plus l'assiette de cotisations, cette gestion paritaire a-t-elle encore une légitimité ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

Comment régler une telle difficulté existentielle ?

Pourtant, le surcroît de cotisations sociales patronales – nous avons essayé de le démontrer et peut-être aurons-nous l'occasion d'en reparler avec vous – participe à la perte de compétitivité et à l'organisation assez systématique des délocalisations et de la désindustrialisation.

J'entends bien votre message, monsieur le ministre délégué, mais le signal que vous donnez par cet article 10 est, je le répète, très négatif, propre à mettre en cause la participation, l'intéressement et l'investissement, pour un enjeu financier vraiment très marginal. Il va à l'encontre de l'ambition, qui nous anime, de recréer de l'emploi et de donner du pouvoir d'achat à nos concitoyens, bref, de donner de l'espérance et de la confiance !

Mme Marie-Annick Duchêne applaudit.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à Mme Annie David, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

Mme Annie David. Monsieur Arthuis, je suis très en colère après vos propos, vous vous en doutez.

Murmures sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

Vous nous parlez de coût du travail, vous reprochez à M. le ministre délégué de ne pas avoir assisté aux débats d'hier, qui, prétendez-vous, ont montré que le coût du travail était aujourd'hui le principal problème pour l'emploi dans notre pays. Non, ce n'est pas ce qui est ressorti de nos échanges ! Une telle affirmation découle des arguments avancés du côté droit de cet hémicycle.

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

Mme Annie David. De ce côté-ci de l'hémicycle, mon cher collègue, quand nous parlons du coût du travail, c'est pour dénoncer, non le niveau des salaires et de la participation, mais la rémunération versée aux actionnaires, aux traders, le montant des parachutes dorés !

Oh la la ! sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

C'est pour dénoncer tous ces bonus octroyés, cette logique qui est de faire en sorte de rapporter 10 % à 15 % de profits aux actionnaires plutôt que de répondre aux besoins industriels des entreprises.

Monsieur Dassault, puisque vous êtes présent parmi nous cet après-midi et que vous nous avez fait part de votre volonté de voir l'article 10 supprimé, j'aimerais bien connaître votre position à propos de l'entreprise Thales, dont vous êtes l'un des actionnaires et qui procède actuellement à un certain nombre de restructurations, avec des licenciements annoncés un petit peu partout sur le territoire français.

En Isère, ce sont 760 salariés qui vont être mis à la porte, parce que vous, entre autres, avez décidé que Thales devait recentrer sa stratégie sur l'armement. Ce groupe produit en Isère, de manière tout à fait compétitive puisqu'il est le leader mondial dans ce domaine, des appareils de radiologie médicale, dont il est inutile de rappeler l'importance en termes de santé publique.

Mesdames les sénatrices et messieurs les sénateurs de droite, nous n'avons pas la même conception de l'entreprise. §Nous n'avons pas la même conception du coût du travail et de la création d'emplois.

Cela fait dix ans que nous supportons votre politique, comme je vous le disais déjà hier. Résultat : il y a, aujourd'hui, en France, 8 millions de pauvres, dont 2 millions d'enfants !

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Dallier

Sous le gouvernement Jospin, il n'y avait pas de pauvres, peut-être ?

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

À vous entendre, il n'y a jamais de corrélation entre votre politique et la réalité, comme si la crise et le chômage étaient l'œuvre du Saint-Esprit !

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

Pour en revenir au présent article et pour ne pas dépasser mon temps de parole, car je suis respectueuse de notre institution, cet article, je veux dire combien nous y sommes favorables.

M. le ministre délégué l'a souligné, mais en étant plus modéré puisqu'il a parlé de « substituts », il y a là un détournement de la politique salariale. Cela permet aux entreprises de ne pas payer tous les impôts qu'elles devraient sur les revenus engrangés grâce à la productivité des travailleurs. Voilà la réalité, mes chers collègues !

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Il faut plutôt alourdir la taxation des revenus financiers des entreprises rentières que vous soutenez !

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

À la vérité, les grands groupes font preuve d'un réel manque de solidarité. J'aimerais bien qu'un jour, ici, soit évoquée la question de la responsabilité sociale des entreprises. Parlons du sort réservé à celles et ceux qui produisent les richesses : 700 milliards d'euros de richesses supplémentaires en dix ans, ce n'est tout de même pas rien ! Où sont-elles allées ? Sans doute pas dans les poches des 8 millions de pauvres, encore moins dans celles des 2 millions d'enfants, qui, aujourd'hui, ne vivent pas de manière décente.

Mes chers collègues, j'espère bien que ces deux amendements de suppression ne seront pas adoptés.

Applaudissements sur les travées du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à M. Serge Dassault, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Serge Dassault

Malheureusement, notre collègue n'a rien compris.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Nous sommes des imbéciles, c'est bien connu ! Vous, en tout cas, vous êtes les champions du chômage !

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Delattre

Quand vous aurez créé autant d'emplois que M. Dassault, …

Debut de section - PermalienPhoto de Serge Dassault

La participation est une source de motivation formidable pour le personnel. Dès lors qu'il sait qu'une partie du bénéfice lui sera aussi distribuée, il fait plus attention, il travaille mieux, il se réjouit que l'entreprise fasse du profit.

Voici ce qu'un syndicaliste m'a dit un jour : « Monsieur le président, votre système est formidable, parce que nous savons maintenant que nous travaillons non pas seulement pour le patron, mais aussi pour nous. » C'est cela, le principe de la participation : tout le monde travaille ensemble, en équipe.

Debut de section - PermalienPhoto de Serge Dassault

Il n'y a pas de lutte des classes : quand l'un gagne plus, l'autre aussi, en toute égalité. Voilà l'intérêt de la participation ! En plus, cela aboutit à augmenter l'épargne disponible.

Monsieur le ministre délégué, vous auriez tout intérêt à développer la participation. Certains de vos amis m'avaient fait confiance à cet égard voilà quelques années, mais cela n'avait pas suffi pour emporter la décision. J'espère qu'un jour nous serons les plus nombreux.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à Mme Michèle André, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

Les mois de juillet se suivent et ne se ressemblent pas. Il y a cinq ans, c'est Mme Lagarde, qui était assise au banc du Gouvernement, et M. Marini, alors rapporteur général de la commission des finances, que M. Dassault tentait de convaincre du bien-fondé de son intention.

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

Certes, monsieur le président de la commission des finances, mais tout en demandant le retrait de cet amendement, …

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

… qui fut long à obtenir, comme s'en souviennent ceux qui ont assisté à cet épisode.

Notre collègue François Marc, aujourd'hui rapporteur général, avait alors pensé que nous pourrions le reprendre.

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

Non, nous n'avions pas encore eu connaissance du rapport Guillaume. Nous ne l'avons analysé en commission des finances que par la suite, puis avons organisé un débat afin d'examiner l'efficacité des niches et de cette politique.

Il y a cinq ans, notre collègue Serge Dassault était venu nous serrer la main pour nous remercier de notre soutien. Cette année, tel ne sera pas le cas : le groupe socialiste suivra l'avis du rapporteur général.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à M. Roger Karoutchi, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

Monsieur le ministre délégué, vous en avez appelé au programme de François Hollande. Puis vous vous êtes empressé d'ajouter que tout le reste était soumis à cet impératif.

Que l'on soit d'accord ou non avec les engagements de François Hollande, on peut comprendre votre logique. Mais permettez-moi de vous dire qu'avec ce dispositif – et ne parlons pas des heures supplémentaires ! –, vous envoyez un signal extraordinairement négatif. Tout ça pour gagner quelques millions d'euros, alors que vous cherchez 7 milliards !

La participation et l'intéressement sont une « invention » du général de Gaulle, de René Capitant et d'autres, qui pensaient que l'association capital-travail devait permettre de dépasser la lutte des classes. Que l'on partage ou non ce point de vue, il faut reconnaître que ce mécanisme a changé les relations sociales au sein de l'entreprise.

Même si les ordonnances de 1967 sont désormais un peu anciennes et s'il convient de modifier celle du 21 octobre 1986, qui est quelque peu dépassée, pourquoi ne proposez-vous pas plutôt d'en revoir les modalités d'application ? Une telle décision éviterait de donner le sentiment que vous voulez porter un coup à la participation et à l'intéressement, alors même que vous vous posez en défenseurs du pouvoir d'achat.

Par rapport à l'ampleur du projet de loi de finances rectificative, l'article 10 n'est que très secondaire sur le plan financier. Sur le plan symbolique, en revanche, il est terrible.

Je partage tout à fait l'analyse de M. Arthuis : la participation et l'intéressement, quelles que soient leurs modalités fiscales, concernent des millions de Français, qui considèrent que ces dispositifs représentent un « plus » pour eux. Pourquoi remettre en cause, pour un résultat si mince, un dispositif qui est de nature à créer un peu de pouvoir d'achat supplémentaire et qui suscite une telle envie, une telle motivation ?

J'entendais Mme David évoquer les parachutes dorés. Pourquoi pas ? Allons-y ! Mais l'intéressement et la participation profitent à des millions de salariés susceptibles d'y gagner quelques dizaines, quelques centaines, voire quelques milliers d'euros supplémentaires. Quel signal le Gouvernement leur envoie-t-il ? Quel message envoyez-vous aux entreprises qui, depuis des années, font un effort en la matière ? Car il s'agit bien d'un effort, d'une volonté d'améliorer les relations dans l'entreprise.

Comme l'a dit notre collègue Serge Dassault, il règne dans les entreprises qui ont mis en place ces dispositifs un autre climat, une autre manière de concevoir les relations sociales. Ne les détruisez pas ; vous y gagneriez bien peu !

Applaudissements sur les travées de l'UMP. – M. Jean Arthuis applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à M. Philippe Bas, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

Le Gouvernement se prévaut de demander un effort important aux entreprises plutôt qu'aux ménages. Or, au fur et à mesure que nous progressons dans ce débat, je constate que la distinction entre prélèvements sur les entreprises et les ménages est spécieuse. Pour s'en convaincre, il suffit de faire l'inventaire des dispositions dont nous avons discuté jusqu'à présent.

Il en est ainsi de la disposition relative aux cotisations patronales versées à la Caisse nationale des allocations familiales. En revenant sur la baisse de ces cotisations, vous allez à l'évidence pénaliser le pouvoir d'achat des salariés.

Vous avez également décidé de taxer les heures supplémentaires, qui, je le dis au passage, étaient des heures de travail normales avant que vous n'instauriez les 35 heures, en 1998. En taxant ces heures supplémentaires, vous allez naturellement pénaliser les salariés.

Vous voulez désormais rendre plus difficiles la participation et l'intéressement. Or qui profite de ces dispositifs ? Les salariés, bien sûr !

Voilà trois mesures, prétendument destinées à faire porter l'effort sur les entreprises plutôt que sur les salariés, qui se retournent immédiatement contre les salariés de notre pays. C'est une mauvaise action pour le pouvoir d'achat !

C'est donc une raison supplémentaire d'adopter l'amendement excellemment présenté par notre collègue Serge Dassault et de rejeter les arguments du Gouvernement.

Enfin, je tiens à dire à Mme David qu'il est tout à fait déplorable d'évoquer les intérêts privés de certains de nos collègues. Je ne connais ici que des sénateurs !

Applaudissements sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à M. André Reichardt, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de André Reichardt

J'ai écouté avec attention l'intervention de M. le ministre délégué, qui nous a dit deux choses.

Tout d'abord, il nous a indiqué que le comité d'évaluation des dépenses fiscales avait jugé ce dispositif « inefficace » ; il a cependant pris la précaution de rappeler que cette instance l'avait aussi classé au niveau 1 sur une échelle de 0 à 3. Or j'ai la faiblesse de penser que, lorsque le comité assortit sa note d'un commentaire évoquant une possible amélioration du dispositif pour mieux atteindre son objectif d'incitation à l'investissement, il ne le juge pas totalement inefficace.

Ensuite, il a tenu à rassurer les sénateurs de droite, en indiquant que le Gouvernement n'était pas hostile à la participation et qu'il avait bien pris acte, lors de la conférence sociale, des préoccupations des salariés à cet égard.

Compte tenu de ces éléments, monsieur le ministre délégué, pourquoi ne pas prendre le temps d'améliorer ces dispositifs, qui ne semblent pas heurter votre vision et qui ne fonctionnent pas suffisamment bien ? Une réflexion pourrait être menée de façon consensuelle dans le cadre d'une concertation, notion si chère au Gouvernement, avec les partenaires sociaux. Après tout, vous prenez bien le temps d'examiner d'autres dispositifs à modifier… En tout cas, cela éviterait d'envoyer un signal détestable en matière de participation.

Je vous demande, mes chers collègues, de surseoir à la mise en œuvre de l'article 10 et de prendre le temps de la réflexion. Il en va, vous l'aurez compris, non seulement du respect d'un principe cher à ce gouvernement, celui de la concertation « à tout va » avant la prise de décision, mais aussi du pouvoir d'achat des travailleurs.

Applaudissements sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à M. Yann Gaillard, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Yann Gaillard

Il y a lors des débats parlementaires de grandes plages d'ennui, durant lesquelles on ne traite que de questions techniques, notamment juridiques et fiscales. On peut ainsi discuter pendant des heures, sans changer quoi que ce soit aux textes. Cela fait partie du jeu !

À d'autres moments, en revanche, quelque chose apparaît brusquement. Cela vient de se produire à l'occasion de l'examen de l'amendement de notre collègue Serge Dassault, dont chacun connaît la doctrine, la personnalité et les positions politiques. Une sorte de haine est en effet apparue du côté de l'extrême gauche.

Debut de section - PermalienPhoto de Yann Gaillard

Cela peut paraître tout à fait étonnant ; pour notre part, cela ne nous étonne pas.

Ce qui me surprend, en revanche, c'est que le Gouvernement ne manifeste aucune espèce de volonté d'adoucir le débat. Qu'y a-t-il de gênant dans le fait qu'une entreprise développe une politique un peu différente de celle des autres ? Pourquoi s'en prendre à de telles pratiques ?

Que le parti communiste, opposé depuis toujours à ces dispositifs, monte sur ses grands chevaux, c'est tout à fait normal. Mais pourquoi le Gouvernement ne manifeste-t-il pas un peu plus de compréhension ?

Debut de section - PermalienPhoto de Yann Gaillard

En quoi cela le gêne-t-il ? De tels dispositifs sont pourtant un « plus » offert aux salariés. Cette attitude est révélatrice du fonctionnement même de ce gouvernement, dont nous avons malheureusement hérité à la suite de la dernière élection présidentielle.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à M. Francis Delattre, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Delattre

Ce débat illustre assez bien le fossé qui existe entre la communication et la réalité des projets de loi. Ce grand écart va bientôt atteindre ses limites. Je lis ainsi dans un hebdomadaire, dont le moins que l'on puisse dire est qu'il vous a soutenus (M. Francis Delattre brandit L'Express.), à propos du Président de la République : « Il repousse les réformes » ; « Il endort les Français ». Vous y prenez votre part, monsieur le ministre délégué… Une prochaine rubrique pourrait s'intituler : « Les salariés trinquent ».

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Delattre

: on taxe, on surtaxe et maintenant on fait les poches des salariés ayant la chance de travailler dans des entreprises qui les incitent à bénéficier des fruits de leurs efforts.

« La cohérence », « l'État stratège », « l'effort juste » ne sont en fait que des éléments de langage, les marques distinctives d'une communication mensongère !

Mes chers collègues, cette communication a beau avoir marché lors des dernières élections, les futures fiches de paie vont bientôt contredire bien des complaisances médiatiques.

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

L'intéressement et la participation n'apparaissent pas sur la fiche de paie !

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Delattre

Le projet de loi de finances rectificative qui devait, mesdames, messieurs de la gauche extrême, sonner l'hallali fiscal des riches, des très riches, est en réalité une parfaite imposture.

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Delattre

Car ce sont les salariés qui, découvrant leur nouveau statut de riches, vont régler l'essentiel de l'addition !

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Delattre

M. Francis Delattre. En lisant le tableau que j'ai rapidement évoqué hier, on voit que les choses sont assez simples pour les salariés. Au cas où cela vous aurait échappé, monsieur le ministre délégué, les mesures relatives aux heures supplémentaires et à l'épargne salariale représentent très exactement 6 milliards d'euros de prélèvements supplémentaires à la charge des salariés et, pour l'essentiel, des salariés relativement modestes.

Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Delattre

Pendant ce temps, les plus riches d'entre les riches, ceux dont on avait annoncé l'hallali, que paieront-ils ? Tout au plus 2 ou 3 milliards d'euros, en une seule fois, au titre de la contribution exceptionnelle…

Quant à la taxation sur les stock-options, elle représente seulement 0, 3 milliard d'euros ; et celle sur les banques, 0, 6 milliard d'euros !

Autrement dit, la taxation des plus riches rapportera à peine 50 % des 6 milliards d'euros que vous allez prendre dans la poche des salariés !

Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

Les salariés n'ont plus rien dans leurs poches ! Vous avez tout pris !

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Delattre

Le désir de détricoter certaines mesures votées par l'ancienne majorité l'emporte quand nous ferions mieux de discuter d'un problème beaucoup plus important : trouver 33 milliards d'euros pour boucler le budget de 2013.

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Delattre

Et vous osez nous demander des anticipations de recettes sur ce budget !

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Delattre

Aux multiples demandes d'information que l'opposition et le président de la commission des finances lui adressent depuis le début de la séance, le Gouvernement oppose l'évitement de toutes les questions importantes.

Renvoyer à septembre, à des commissions ou autres comités Théodule, les mesures indispensables à la recherche d'une meilleure compétitivité de nos entreprises, alors que nous sommes submergés par une vague de plans sociaux, est une faute.

Plutôt que de vous voir rogner de nombreuses successions modestes et essayer de faire les poches des salariés qui bénéficient d'un peu de participation, …

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Delattre

… nous aurions préféré débattre de la future banque publique d'investissement, savoir quand elle sera opérationnelle et discuter de la manière dont OSEO, qui existe déjà, pourrait agir immédiatement pour faire face aux problèmes d'actualité que nous connaissons tous.

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Delattre

Cela aurait peut-être été plus utile que de s'acharner pendant trois jours sur les mêmes dossiers !

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Delattre

Nous nous interrogeons sur la capacité des entreprises à faire l'avance fiscale, ainsi que sur les raisons pour lesquelles vous essayez de matraquer – il n'y a pas d'autre mot – les quelques réserves qui restent aux salariés.

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Delattre

M. Francis Delattre. En réalité, ce débat montre notre attachement à cette idée : il n'est de vraie richesse que d'hommes, que d'hommes au travail. Et on travaille dans les entreprises !

Applaudissements sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Brigitte Gonthier-Maurin

Cessez donc de vouloir baisser le coût du travail !

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Mon cher collègue, vous avez parlé pendant six minutes.

Je vous signale, mes chers collègues, qu'il nous reste 140 amendements à examiner. Si nous avançons à cette allure, comme vous l'a dit le président de la commission des finances, ce n'est pas demain à midi ni demain après-midi que nous terminerons, mais demain soir.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Sachez que, si nous avançons lentement, ce ne sera pas la peine d'aller jusqu'à trois heures du matin ; nous nous arrêterons vers minuit.

Je vous demande donc de respecter le temps de parole de cinq minutes que notre règlement prévoit pour les explications de vote.

La parole est à M. Jean-Claude Lenoir, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Lenoir

Monsieur le président, j'ignore si vous vous adressiez à ceux qui étaient intervenus ou à celui qui allait intervenir… En tout cas, je vais essayer de ne pas encourir vos reproches.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Lenoir

Je suis frappé par les efforts pédagogiques que déploient les différents ministres qui se succèdent au banc du Gouvernement depuis trois jours pour minimiser l'importance du projet de loi de finances rectificative.

Ils nous expliquent que, finalement, les prélèvements nouveaux ne sont pas importants, qu'ils auraient pu être bien supérieurs et que, de toute façon, les réformes sont à venir. En particulier, les échanges qui ont eu lieu tout à l'heure avec le groupe communiste au sujet du renvoi à plus tard d'une réforme de la fiscalité montrent bien que le présent projet de loi de finances rectificative n'est qu'un petit exercice.

Pour autant, nous avons de bonnes raisons d'être inquiets. En effet, les signaux que vous donnez ont de quoi préoccuper une grande majorité de nos compatriotes.

Il faut dire qu'avec ce « petit collectif budgétaire » vous commencez par prendre largement dans la poche des Français. C'est leur pouvoir d'achat qui est amputé ! Et quand vous dites que, l'an prochain, il faudra prélever encore beaucoup plus, on sait très bien où vous irez chercher l'argent : sur le dos du contribuable !

L'examen de l'article 10 illustre bien votre propension à aller dans ce sens. Il s'agit de supprimer purement et simplement le dispositif mis en place par l'ordonnance du 21 octobre 1986.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Lenoir

Ce dispositif permet à une entreprise de donner plus de façon dérogatoire ou, quand elle n'est pas obligée de le faire, de donner néanmoins.

Quel signal vous adressez au monde du travail au moment où vous amputez le pouvoir d'achat des salariés en supprimant la défiscalisation des heures supplémentaires !

Un certain nombre de nos collègues ont prétendu tout à l'heure que de tels dispositifs existaient seulement dans les grandes entreprises.

Dans le territoire que j'ai l'honneur de représenter, les grands groupes ne sont pas vraiment présents, mais il y a de nombreuses PME. Or, au cours des mandats que j'ai exercés, j'ai été surpris de voir tant de petites entreprises se tourner vers ces dispositifs pour apporter à leurs salariés un complément de salaire très apprécié.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Lenoir

Sans compter que l'intéressement exerce des effets, que Roger Karoutchi a très bien décrits, sur les rapports des salariés avec les dirigeants et le climat social dans l'entreprise.

M. le ministre délégué a soutenu que, dans un certain nombre de cas, la part versée au titre de l'intéressement est un substitut au salaire. J'aimerais l'amener à un petit peu plus de réalisme.

Les salaires ne sont pas une variable. Des minima existent et, à temps de travail constant, le salaire ne peut pas être diminué. Allez donc voir les salariés dans les entreprises pour recueillir leur avis !

De manière ironique, c'est vous, monsieur le ministre délégué chargé de l'économie sociale et solidaire, qui siégez au banc de Gouvernement. Les principes que vous avez développés devant nous vous inspirent-ils dans la mission qui vous a été confiée par le Président de la République et le Premier ministre ? Avez-vous le sentiment que c'est ainsi que l'on peut promouvoir l'économie dite sociale et solidaire ?

Au Gouvernement et à nos collègues de la majorité, je demande à nouveau de réfléchir aux conséquences de cette mesure et au signal très négatif qu'enverrait son adoption. Pensez aux très nombreux salariés qui vont être profondément troublés par cette offensive en règle contre leur pouvoir d'achat !

C'est pourquoi, mes chers collègues, je vous demande de voter les amendements de nos collègues Dassault et Arthuis.

Applaudissements sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à M. Alain Néri, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

Je remercie nos collègues de l'opposition, car, en les écoutant, je me sens d'un seul coup rajeuni de cinq ans.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Ça fait du bien !

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

À l'époque, le président sorti nous promettait qu'il serait le président, non pas du pouvoir d'achat, mais de l'augmentation du pouvoir d'achat. Et, en effet, la première mesure prise a consisté à mettre en place le bouclier fiscal…

Il s'agissait d'éviter que les plus fortunés quittent notre pays, et même les faire revenir. J'attendais donc avec impatience le retour d'un ami du Président de la République, M. Johnny Hallyday. Mais celui-ci avait dû comprendre que la politique du Président Sarkozy était à l'image de sa chanson : « Noir c'est noir, il n'y a plus d'espoir ».

Exclamations sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

Monsieur Delattre, à supposer même que cette idée malheureuse nous soit venue à l'esprit, elle serait totalement inutile : les poches des salariés sont vides depuis longtemps, puisque vous avez réussi à fabriquer plus de 8, 5 millions de Français en dessous du seuil de pauvreté. Comment voulez-vous faire les poches à ceux dont les doublures du portefeuille se touchent aujourd'hui ?

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

Soyez donc rassuré : ce n'est pas aux salariés qu'on va faire les poches.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

Nous savons bien qu'un effort est nécessaire de la part de l'ensemble des Français, mais nous voulons qu'il soit équitable.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

En donnant leur confiance à François Hollande, les Français ont voulu dire qu'ils sont d'accord pour faire cet effort, à condition qu'il soit équitablement réparti et que ceux qui ont le plus donnent plus.

Certains essaient de nous faire pleurer en nous accusant de créer une taxe insupportable de 75 % pour ceux qui gagnent plus de 1 million d'euros.

Protestations sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

Je n'aurai pas la cruauté de leur rappeler que la première mesure qui a été prise il y a cinq ans, le bouclier fiscal, s'inscrivait largement dans la politique la plus antisociale qui soit, celle du paquet fiscal, qui a consisté à prélever 15 milliards d'euros qui auraient été très utiles pour mener une véritable politique sociale et de développement économique.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

Monsieur Delattre, en vous écoutant parler, j'avais l'impression que vous étiez en train de vous regarder dans une glace et que vous parliez de vous il y a cinq ans !

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à M. Éric Doligé, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Doligé

Je serai bref, mais certains propos doivent être rectifiés.

Vous avez dit, monsieur Néri, que le Président de la République qui n'a pas été reconduit dans ses fonctions avait annoncé qu'il serait le président de la hausse du pouvoir d'achat. Je vous rappelle que, à l'époque de cet engagement, il n'y avait pas la crise. Lorsqu'elle est survenue, il s'est battu pour défendre le pouvoir d'achat des Français, et il a réussi ! Voyez ce qui se passe dans un certain nombre de pays du sud de l'Europe ces jours-ci encore. Les baisses considérables de pouvoir d'achat que ces pays ont connues ne se sont pas produites en France !

Pour ma part, je constate que le Président de la République nouvellement élu est le président de la baisse du pouvoir d'achat. Telle est la réalité qu'illustrent les quelques mesures dont nous avons déjà débattu : celle qui concerne les heures supplémentaires, celle dont nous discutons actuellement à propos de l'intéressement, mais aussi celle qui va être prise au sujet des cotisations retraite de certains fonctionnaires pour compenser le retour à soixante ans de l'âge de départ à la retraite. Il en résulte que, dans nos collectivités et dans nos entreprises, le pouvoir d'achat va baisser pour les salaires moyens et les salaires les plus bas.

Celui qui s'est fait élire Président de la République n'avait pas annoncé tout cela. La réalité, c'est qu'il commence son mandat par ces quelques mesures révélatrices, qui adressent un signal dramatique aux salariés Il est d'ores et déjà le président de la baisse du pouvoir d'achat.

Applaudissements sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à Mme Isabelle Debré, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

La participation est un sujet qui tient à cœur à beaucoup d'entre nous sur ces travées. Je suis moi-même membre du COPIESAS, le Conseil d'orientation de la participation, de l'intéressement, de l'épargne salariale et de l'actionnariat salarié, l'ancien CSP, ou Conseil supérieur de la participation. Or, monsieur le ministre délégué, je m'étonne que l'une de vos premières mesures soit de taxer les entreprises vertueuses pratiquant la participation et l'intéressement et de pénaliser par là même les salariés qui en profitent.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

Je prendrai plus longuement la parole à ce sujet sur les articles 26 et 27, mais je souhaiterais en attendant vous lire cet extrait d'un journal qui me paraît sérieux, puisqu'il s'agit des Échos. Voici ce qu'écrivent deux économistes : « Nous voudrions aussi convaincre que le partage du profit est une piste féconde, qu'un gouvernement de gauche peut l'emprunter sans crainte, comme il l'a d'ailleurs déjà fait en 2001 avec la loi Fabius, précédée par les rapports en ce sens de Michel Sapin et Pierre Moscovici. » Je vous laisse méditer cette phrase.

Debut de section - Permalien
Benoît Hamon, ministre délégué

Monsieur Delattre, vous avez…

Debut de section - Permalien
Benoît Hamon, ministre délégué

… exhibé la couverture quelque peu racoleuse d'un magazine hebdomadaire, dont le titre – « L'Hypnotiseur » – est assez injuste à l'égard du Président de la République.

Au reste, au cours de cette séance, j'ai cru moi-même pendant quelques secondes être doté du don d'hypnotiser les foules, quand M. Dassault s'est qualifié de socialiste.

Debut de section - Permalien
Benoît Hamon, ministre délégué

Je me suis dit alors que je possédais des pouvoirs tout à fait nouveaux.

Debut de section - Permalien
Benoît Hamon, ministre délégué

Plus sérieusement, le pouvoir d'achat par unité de consommation a reculé au premier trimestre de 2012. Le revenu arbitral disponible a, quant à lui, diminué en 2011. Cela signifie que la dégradation du pouvoir d'achat des Français, qui est une réalité, est antérieure à l'élection de François Hollande.

Le précédent Président de la République avait commandé à M. Jean-Philippe Cotis un rapport fort utile – peu importe que l'on approuve ou non ses conclusions – sur le partage de la valeur ajoutée. Ces travaux avaient d'ailleurs abouti à cette fameuse proposition des trois tiers dans la répartition des profits, qui a connu le sort que vous savez, mesdames, messieurs les sénateurs.

Je veux y insister, ce qui ressort de ce rapport et de toutes les expertises effectuées, c'est que la crise a eu raison du pouvoir d'achat des ménages comme des marges des entreprises.

Debut de section - Permalien
Benoît Hamon, ministre délégué

M. Benoît Hamon, ministre délégué. Or, et là c'est moi qui suis surpris, la seule mesure que vous avez trouvée pour relancer la compétitivité a été d'augmenter la TVA, ce qui, compte tenu de la faiblesse des marges des entreprises, aurait forcément eu un impact sur les prix.

Exclamations sur les travées de l'UMP et de l'UCR.

Debut de section - Permalien
Benoît Hamon, ministre délégué

Dans le monde magique qui est le vôtre, cette mesure ne devait pas toucher les Français. Pourtant, tel aurait bien été le cas, au premier euro, du plus riche au plus pauvre.

Debut de section - Permalien
Benoît Hamon, ministre délégué

Qu'avons-nous fait, nous, pour le pouvoir d'achat ? Nous avons augmenté immédiatement l'allocation de rentrée scolaire de 80 euros par enfant, donné un coup de pouce au SMIC, engagé dans toutes les branches des négociations salariales sur les minima conventionnels. Nous avons lancé un véritable dialogue sur ce qui constitue l'élément essentiel des rémunérations : les salaires. Voilà des mesures concrètes !

Je veux à présent revenir sur la question de l'épargne salariale, de la participation et de l'intéressement.

Debut de section - Permalien
Benoît Hamon, ministre délégué

M. Benoît Hamon, ministre délégué. Nous avons décidé de réunir le COPIESAS.

Exclamations sur les travées de l'UMP et de l'UCR.

Debut de section - Permalien
Benoît Hamon, ministre délégué

Certes, monsieur Delattre, mais cet organisme qui a pour objet l'épargne salariale, l'actionnariat salarié, l'intéressement et la participation ne s'était jamais réuni. Les partenaires sociaux pourront donc faire le point sur ces questions.

Debut de section - Permalien
Benoît Hamon, ministre délégué

Nous avons donc engagé un processus de discussion, alors que vous ne l'aviez jamais fait.

J'observe aussi que vous avez été les premiers à augmenter le forfait social sur la participation. À présent, vous vous étonnez que nous fassions de même. Pourquoi agissons-nous ainsi ? Je le répète, en dépit de l'augmentation du forfait social, il subsistera un écart de plus de vingt points dans le niveau des prélèvements entre la participation et les salaires.

Oui, la participation restera un instrument utile pour permettre aux entreprises d'intéresser les salariés à leurs résultats, et même, dans certaines sociétés, pour favoriser les relations sociales ! Nous ne pénalisons pas la participation, nous mettons en place un système de prélèvements plus juste, …

Debut de section - Permalien
Benoît Hamon, ministre délégué

… pour faire en sorte que, demain, celles et ceux qui bénéficient de ce dispositif contribuent quelque peu à l'effort collectif, à un moment où, je vous le rappelle, vous nous laissez une situation des comptes publics extrêmement préoccupante.

Debut de section - Permalien
Benoît Hamon, ministre délégué

Si nous examinons la situation que vous nous avez laissée, nous nous rendons compte que nous ne sommes plus capables de satisfaire l'objectif sur lesquels vous vous êtes engagés, à savoir un déficit public de 4, 5 % du PIB. C'est pourquoi nous mobilisons des recettes supplémentaires…

Debut de section - Permalien
Benoît Hamon, ministre délégué

M. Benoît Hamon, ministre délégué. … et faisons en sorte de concilier redressement et équité.

Applaudissementssur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Je mets aux voix les amendements identiques n° 107 et 136 rectifié.

J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe de l'UCR.

Je rappelle que l'avis de la commission est défavorable, de même que l'avis du Gouvernement.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

Le scrutin a lieu.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

Il est procédé au dépouillement du scrutin.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Voici le résultat du scrutin n° 125 :

Le Sénat n'a pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

L'amendement n° 35, présenté par M. Marc, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 3

Remplacer la référence :

au II

par les références :

aux 1. et 2. du II

II. - Alinéa 4

Après le mot :

provisions

insérer les mots :

mentionnées au premier alinéa

La parole est à M. le rapporteur général.

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

Le présent amendement vise à apporter des corrections purement rédactionnelles au dispositif adopté par l'Assemblée nationale, afin de rendre celui-ci totalement opérant.

Debut de section - Permalien
Benoît Hamon, ministre délégué

Favorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à Mme Isabelle Debré, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

Cette disposition ne pose pas de problème en soi, au contraire.

Toutefois, monsieur le ministre délégué, je suis extrêmement surprise : vous nous annoncez que vous allez réunir le COPIESAS pour discuter de la participation et de l'intéressement et, dès maintenant, avant même d'avoir écouté les partenaires sociaux, vous prenez des décisions en la matière.

J'ai rarement vu un gouvernement affirmer qu'il va prendre des décisions et que, ensuite, il va réunir les acteurs.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

Je m'étonne de la méthode que vous employez. Vous nous annoncez ici que vous allez réunir le COPIESAS. Dont acte ! Je vous en félicite. Mais alors, pourquoi prendre dès maintenant des décisions sur ce sujet ? Cet organisme est tout de même composé d'experts, de représentants des partenaires sociaux, de personnalités qualifiées, de parlementaires…

Pour adopter des décisions du genre de celle qui figure dans ce collectif, nous n'étions pas à deux ou trois mois près. Le projet de loi de finances pour 2013 arrivera vite. Une fois encore, vous agissez dans la précipitation, sans étude d'impact et sans écouter les partenaires.

Applaudissements sur les travées de l'UMP.

L'amendement est adopté.

L'article 10 est adopté.

I. – L'article 209 B du code général des impôts est ainsi modifié :

1° Le III est ainsi rédigé :

« III. – En dehors des cas mentionnés au II, le I ne s'applique pas lorsque la personne morale établie en France démontre que les opérations de l'entreprise ou de l'entité juridique établie ou constituée hors de France ont principalement un objet et un effet autres que de permettre la localisation de bénéfices dans un État ou territoire où elle est soumise à un régime fiscal privilégié.

« Cette condition est réputée remplie notamment lorsque l'entreprise ou l'entité juridique établie ou constituée hors de France a principalement une activité industrielle ou commerciale effective exercée sur le territoire de l'État de son établissement ou de son siège. » ;

2° Le III bis est abrogé.

II. – Le I est applicable aux exercices clos à compter du 31 décembre 2012.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

Monsieur le ministre délégué, je m'étonne que vous nous accusiez d'avoir tenté d'augmenter les prix par le biais de la TVA sociale. À votre décharge, il faut dire que vous n'étiez pas présent lors du long débat au cours duquel a été abordée la question de l'allégement des cotisations sociales en vue d'améliorer la compétitivité des entreprises et, par voie de conséquence, de recréer des emplois, ainsi que celle du pouvoir d'achat de nos concitoyens. Nous avions alors fait la démonstration que si nous allégions les cotisations sociales, la compétitivité pouvait être restaurée sans augmentation corollaire des prix payés par les consommateurs français.

Nous avons noté que, lors de la conférence sociale, vous aviez reconnu – tout comme implicitement le Président de la République – que pouvait se poser un problème en matière de charges sociales, lesquelles devraient être allégées. Dès lors, comment comptez-vous compenser ?

Le supplément de TVA que nous préconisons doit être significatif ; cependant, il ne permettra pas à lui seul d'équilibrer les comptes publics. En effet, la TVA doit compenser à l'euro près les allégements de cotisations sociales.

Le jour où vous aurez abaissé ces cotisations, vous pourrez alors mettre un terme à toutes les rémunérations qui font l'objet de régimes dérogatoires et qui bénéficient d'allégements de cotisations sociales. En outre, si vous allez au bout du raisonnement, vous introduirez de la flexibilité dans la législation sur le travail. Alors oui, nous trouverons les bons leviers pour réhabiliter la compétitivité, pour améliorer l'emploi et le pouvoir d'achat !

Debut de section - PermalienPhoto de Nathalie Goulet

L'article 11 a trait au renversement de la charge de la preuve pour les transferts de bénéfices vers les pays à fiscalité privilégiée. Cette disposition figure parmi les 59 mesures proposées par la commission d'enquête sur l'évasion fiscale, qu'a déjà citée Mme Beaufils, dont le président était Philippe Dominati et le rapporteur Éric Bocquet.

Malgré le travail réalisé par le Conseil des prélèvements obligatoires, on ne peut pas évaluer avec précision le montant de l'évasion fiscale ; il se situerait entre 30 milliards d'euros et 80 milliards d'euros, soit le montant de l'intérêt de la dette.

Les transferts de bénéfices et le prix de ces opérations représentent une part importante du rapport de la commission d'enquête, qui a effectué de multiples auditions à ce sujet. En effet, alors que les regards se tournent vers la fraude, l'enjeu principal se trouve en réalité ailleurs : les systèmes qui exploitent les failles.

Monsieur le ministre délégué, je vous suggère à nouveau d'étudier avec beaucoup d'attention le travail de la commission d'enquête sénatoriale, qui devrait inspirer sinon le présent projet de loi de finances rectificative, la commission n'étant pas encore parvenue au terme de sa tâche, du moins le projet de loi de finances que vous allez nous présenter à l'automne.

L'article 11 est adopté.

I. – Le code général des impôts est ainsi modifié :

A. – Le II de l'article 209 est ainsi modifié :

1° Le b est ainsi rédigé :

« b) L'activité à l'origine des déficits ou des intérêts dont le transfert est demandé n'a pas fait l'objet par la société absorbée ou apporteuse, pendant la période au titre de laquelle ces déficits et ces intérêts ont été constatés, de changement significatif notamment en termes de clientèle, d'emploi, de moyens d'exploitation effectivement mis en œuvre, de nature et de volume d'activité ; »

2° Sont ajoutés des c et d ainsi rédigés :

« c) L'activité à l'origine des déficits ou des intérêts dont le transfert est demandé est poursuivie par la ou les sociétés absorbantes ou bénéficiaires des apports pendant un délai minimal de trois ans sans faire l'objet, pendant cette période, de changement significatif notamment en termes de clientèle, d'emploi, de moyens d'exploitation effectivement mis en œuvre, de nature et de volume d'activité ;

« d) Les déficits et intérêts susceptibles d'être transférés ne proviennent ni de la gestion d'un patrimoine mobilier par des sociétés dont l'actif est principalement composé de participations financières dans d'autres sociétés ou groupements assimilés, ni de la gestion d'un patrimoine immobilier. » ;

B. – Le 5 de l'article 221 est ainsi rédigé :

« 5. a. Le changement de l'objet social ou de l'activité réelle d'une société emporte cessation d'entreprise. Il en est de même en cas de disparition des moyens de production nécessaires à la poursuite de l'exploitation pendant une durée de plus de douze mois, sauf en cas de force majeure, ou lorsque cette disparition est suivie d'une cession de la majorité des droits sociaux.

« Toutefois, dans les situations mentionnées au premier alinéa du présent a, l'article 221 bis est applicable, sauf en ce qui concerne les provisions dont la déduction est prévue par des dispositions légales particulières.

« b. Le changement d'activité réelle d'une société s'entend notamment :

« i) De l'adjonction d'une activité entraînant, au titre de l'exercice de sa survenance ou de l'exercice suivant, une augmentation de plus de 50 % par rapport à l'exercice précédant celui de l'adjonction :

« – soit du chiffre d'affaires de la société ;

« – soit de l'effectif moyen du personnel et du montant brut des éléments de l'actif immobilisé de la société ;

« ii) De l'abandon ou du transfert, même partiel, d'une ou plusieurs activités entraînant, au titre de l'exercice de sa survenance ou de l'exercice suivant, une diminution de plus de 50 % par rapport à l'exercice précédant celui de l'abandon ou du transfert :

« – soit du chiffre d'affaires de la société ;

« – soit de l'effectif moyen du personnel et du montant brut des éléments de l'actif immobilisé de la société.

« c. Sur agrément délivré par le ministre chargé du budget selon les modalités prévues à l'article 1649 nonies, ne sont pas considérées comme emportant cessation d'entreprise :

« i) La disparition temporaire des moyens de production pendant une durée de plus de douze mois mentionnée au a lorsque l'interruption et la reprise sont justifiées par des motivations principales autres que fiscales ;

« ii) Les opérations mentionnées au b lorsqu'elles sont indispensables à la poursuite de l'activité à l'origine des déficits et à la pérennité des emplois. » ;

C. – L'article 223 I est ainsi modifié :

1° Les trois premiers alinéas du c du 6 sont remplacés par un alinéa ainsi rédigé :

« c. Les déficits et les intérêts mentionnés au premier alinéa proviennent de la société absorbée ou scindée ou des sociétés membres du groupe auquel il a été mis fin qui font partie du nouveau groupe et pour lesquelles le bénéfice des dispositions prévues au 5 est demandé, sous réserve du respect, par ces sociétés, des conditions mentionnées aux b, c et d du II de l'article 209. » ;

2° Le c du 7 est complété par les mots : «, sous réserve du respect, par ces sociétés, des conditions mentionnées aux b, c et d du II de l'article 209 ».

II. – Le I s'applique aux exercices clos à compter du 4 juillet 2012.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Je suis saisi de deux amendements identiques.

L'amendement n° 47 est présenté par Mme Des Esgaulx.

L'amendement n° 185 rectifié bis est présenté par MM. P. Dominati, Cambon, J. Gautier, Beaumont et Dassault et Mlle Joissains.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Alinéa 20

Remplacer le mot :

et

par le mot :

ou

La parole est à Mme Marie-Hélène Des Esgaulx, pour présenter l'amendement n° 47.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Hélène Des Esgaulx

L'article 12 du présent projet de loi de finances rectificative vise à limiter les possibilités d'exploitation des déficits à des fins d'optimisation fiscale. Toutefois, pour ne pas pénaliser les opérations de restructuration, un agrément du ministère du budget pourra être accordé quand les opérations d'adjonction, d'abandon ou de transfert d'activité sont indispensables à la poursuite de l'activité à l'origine des déficits et à la pérennité des emplois.

Or le cumul de critères prévu par le texte pour obtenir l'agrément n'est pas économiquement réaliste. En effet, si pérenniser les emplois est essentiel, il faut permettre à une entreprise en restructuration de bénéficier de l'agrément du seul fait de la poursuite d'activité.

Concrètement, le présent amendement vise à rendre les critères d'obtention de l'agrément ministériel alternatifs et non plus cumulatifs.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à M. Philippe Dominati, pour présenter l'amendement n° 185 rectifié bis.

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

L'article 12 vise à éviter le transfert abusif de déficits. La procédure d'agrément apporte toutefois un tempérament afin de ne pas pénaliser les entreprises en difficulté, et c'est essentiel.

Ainsi, parmi les critères retenus figurent la poursuite de l'activité et la pérennité des emplois, deux conditions cumulatives. L'adoption des amendements identiques que nous examinons et qui visent à rendre celles-ci alternatives affaiblirait le dispositif.

Je ne peux y être favorable, car nous savons que si un choix est laissé entre maintien de l'activité et pérennité des emplois, le risque est que le sacrifice de ces derniers soit privilégié. Nous devons donc conserver la fermeté du dispositif initial.

Debut de section - Permalien
Benoît Hamon, ministre délégué

Malgré la cohérence de votre raisonnement, madame la sénatrice, le Gouvernement considère essentiel et légitime, eu égard à la situation actuelle de l'emploi, le cumul des deux critères, à savoir le maintien de l'activité et de l'emploi, pour que soit délivré l'agrément. Si tel n'était pas le cas, la mesure visée, qui est une disposition anti-abus, bénéficierait aussi à une entreprise qui souhaiterait conserver les actifs indépendamment des emplois. C'est pourquoi le Gouvernement demande le retrait des amendements, faute de quoi il émettra un avis défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à M. Philippe Dominati, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Dominati

Mme Des Esgaulx fait preuve de pragmatisme et propose une solution efficace.

Je regrette qu'aucune étude d'impact n'ait été réalisée – le rapporteur général en fait pourtant bien souvent la demande – et que nous ne disposions pas de chiffres sur les dix ou vingt dernières entreprises sauvées grâce à l'agrément délivré par les pouvoirs publics et qui ont néanmoins réduit les emplois. Tel est le cas de Lejaby, d'une compagnie maritime du Nord de la France, notamment.

La solution suggérée permettrait de sauver des entreprises. En effet, monsieur le ministre délégué, vous instaurez un carcan d'une grande brutalité. Ne pouvant pas récupérer un investissement indéterminé, un certain nombre d'entreprises vont couler.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à M. le président de la commission des finances.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Je souhaite obtenir quelques précisions du Gouvernement, plus précisément de la direction de la législation fiscale.

Si je comprends bien, sont en cause les conditions pour obtenir un agrément. Le ministre peut – ce n'est pas une obligation – accorder le transfert des déficits, sans aucune compétence liée, si, selon la proposition qui nous est faite, poursuite de l'activité et maintien des emplois sont combinés. Mais que signifie précisément « poursuite de l'activité » ?

Si l'on retient une interprétation économique, ces termes font référence à un outil qui fonctionne. Peut-être une société fabriquant initialement des chaussures de sécurité produira-t-elle à l'avenir des chaussures de sport ? Certes, son activité aura changé, mais le site sera toujours opérationnel.

Si l'on se livre à une interprétation plus juridique en fonction de la jurisprudence du Conseil d'État, on peut considérer que l'expression susvisée veut dire « poursuite de l'activité d'origine qui a engendré les déficits ». Ces derniers sont liés à une activité bien définie dans les statuts de l'entreprise.

Nous avons besoin d'éclaircissements pour nous prononcer en toute connaissance de cause. Or si l'on opte pour cette dernière interprétation, étroitement juridique, la société que j'ai citée en exemple tout à l'heure qui fabriquerait désormais des chaussures de sport après avoir trouvé des clients pour cet article ne pourra pas bénéficier de l'agrément, même si elle maintient les emplois.

Monsieur le ministre délégué, peut-être est-il possible de lever les craintes exprimées par certains collègues et de concilier le dispositif avec la lecture qu'en fait M. le rapporteur général.

Debut de section - Permalien
Benoît Hamon, ministre délégué

Tout d'abord, lorsque nous évoquons un maintien de l'activité, il ne s'agit pas forcément d'une activité identique. Nous ne demandons pas que la société qui a été reprise fabrique au lacet près la même chaussure ! L'objectif est de contribuer à la restructuration de l'outil industriel et au maintien de l'activité. Par conséquent, la production peut être différente mais nécessiter des machines assez semblables. J'insiste sur ce point : ce sont bien les composantes de l'activité économique que nous prenons en considération.

Ensuite, lors de reprises effectives d'entreprises, des agréments ont été délivrés et l'emploi a été maintenu, même si, j'en conviens, parfois ce ne fut pas en totalité. En effet, nous l'avons constaté, face à une situation de crise – absence de marché, carnets de commandes vides, perte de clients –, les sociétés essaient de transformer l'outil de production et de se repositionner sur un autre marché. La société Lejaby, dont les salariés conservés en totalité doivent changer radicalement de métier, est un exemple en la matière.

S'il doit y avoir, hélas ! une contraction des effectifs liée à la restructuration, l'agrément pourra être donné, même si notre objectif reste bien sûr le maintien de l'emploi à 100 %. Nous tenons à ce que le repreneur sache bien, au moment où il demande le transfert des déficits, qu'il a des obligations en termes de maintien tant de l'activité que de l'emploi. Il y a d'ores et déjà une forme de jurisprudence en la matière, et elle sera suivie.

Dans la plupart des cas, je vous rassure, le repreneur a la volonté de conserver les effectifs ; il ne reprend pas une entreprise et ses machines dans l'intention maligne de faire tourner ces dernières sans salariés. Je n'en crois pas moins que lier le maintien de l'activité et le maintien de l'emploi comme nous voulons le faire sera profitable aux salariés et à celles et ceux qui cherchent un emploi.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à M. André Reichardt, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de André Reichardt

Nous le savons bien, quand une entreprise est en difficulté et s'engage dans une restructuration, tout doit être fait pour l'accompagner. Que fait d'autre le ministre du développement productif lorsqu'il intervient vis-à-vis de PSA – en utilisant une méthode que je réprouve à titre personnel –, sinon d'essayer de trouver des solutions aux difficultés qui frappent cette entreprise ? Or l'un des éléments pour aider les entreprises en restructuration est précisément l'agrément du ministère du budget.

Aussi, monsieur le ministre délégué, quand vous dites que cet agrément doit désormais être accordé à condition qu'il y ait non seulement engagement de poursuivre l'activité, mais également, de façon cumulative, engagement de pérenniser les emplois, vous vous trompez. Même en nuançant, comme vous venez de le faire, ce qu'il faut entendre par poursuite de l'activité, il n'est pas possible de demander ce double engagement à une entreprise en difficulté et en restructuration, puisque l'on sait qu'elle va, à un moment ou à un autre, être amenée à jouer – veuillez me pardonner de l'emploi de ce terme – sur cet élément de la compétitivité que constitue le coût salarial.

C'est porter un grave coup aux entreprises qui tentent de se restructurer que de leur imposer ces deux critères cumulatifs. Il me paraît évident qu'un chef d'entreprise qui s'engage à poursuivre son activité va essayer de maintenir le plus d'emplois possible. Ne mettons donc pas dès le départ une barre infranchissable pour la grande majorité des entreprises en restructuration.

Je vous en conjure, mes chers collègues : votez l'amendement de Mme Des Esgaulx ! Si vous ne le faites pas, tout ce qu'entreprend l'actuel gouvernement en matière de redressement productif est peu ou prou voué à l'échec.

Vous disposez là d'un levier qu'il vous faudrait utiliser à fond, monsieur le ministre délégué, mais vous êtes en train de vous priver de la possibilité de le faire en imposant ces deux critères cumulatifs.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Nathalie Goulet

Monsieur le ministre délégué, il me semble que vous avez parlé du maintien de l'activité – qui peut, éventuellement, on le sait, impliquer une diminution de l'effectif dans le cas d'une société en difficulté – et non pas du maintien de la totalité des emplois. Comme je ne demande qu'à comprendre avant de voter, pourriez-vous me confirmer que j'ai bien saisi votre pensée ?

Par ailleurs, s'agissant de l'action du Fonds stratégique d'investissement, j'avais moi-même assez lourdement insisté – j'avais d'ailleurs obtenu qu'un débat se tienne dans cette maison – pour que les subventions de l'État soient conditionnées par des comportements sociaux cohérents. Je pense à certaines entreprises, par exemple au groupe Trèves, ayant bénéficié de subsides importants et licencié du personnel dans des conditions totalement inadmissibles.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à M. Jean Arthuis, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

Ces dispositions relatives à l'engagement de maintenir les effectifs me paraissent relever de la bonne conscience des politiques appelés à accorder des subventions, des aides publiques ou encore des agréments.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

« J'ai pris la décision, mais j'ai veillé à ce que l'on maintienne l'emploi ou même à ce que l'on en crée. » C'est beau comme l'antique, mais, très franchement, c'est la situation économique qui va faire la différence ! Lorsque, malheureusement, l'entreprise n'atteint pas ses objectifs, on ne peut que le constater.

Ce type de clause me paraît donc quelque peu superfétatoire. Lorsque l'on délivre un agrément, il faut acquérir la conviction que ceux qui le souscrivent sont de bonne foi et qu'ils ont pris toutes les précautions requises. C'est un acte de confiance.

Je me permets donc de vous dire, monsieur le ministre délégué, que l'engagement sur le maintien de l'emploi, si vous confirmez qu'il est une condition absolument nécessaire, sera assez virtuel.

Debut de section - Permalien
Benoît Hamon, ministre délégué

Je ne veux pas allonger le débat, quoi qu'il soit passionnant, mais prenons le cas d'une entreprise dans laquelle le repreneur ne s'intéresse qu'aux brevets et à la technologie et, de facto, pas aux salariés. Cela existe – pas partout, heureusement, car les repreneurs ont plutôt envie, en général, de maintenir l'activité et l'emploi – et, dans de tels cas, il faut pouvoir refuser le transfert de déficits.

Évidemment, l'agrément conserve un caractère un peu discrétionnaire, même avec un texte comme celui que nous proposons, puisqu'il n'est pas postulé que la totalité des emplois sera maintenue mais seulement que le maximum sera fait pour que le plus d'emplois possible soient conservés.

Nous savons qu'il y a des entreprises qui se « cassent la figure ». Nous savons qu'il y a aussi des petites entreprises qui, si elles ne font pas de grosses marges, sont bénéficiaires mais ont du mal à trouver un repreneur. Ce que nous voulons tout simplement éviter, conformément à notre stratégie – que je crois d'ailleurs assez largement partagée –, c'est qu'un repreneur puisse obtenir le transfert du déficit de l'entreprise en difficulté qu'il reprend quand il n'a pas pour objectif réel de maintenir, avec l'activité, l'emploi.

Voilà le lien que nous voulons établir et, objectivement, il me semble distinguer dans les divers arguments plus de choses qui nous rapprochent que de choses qui nous éloignent. Je me permets donc d'insister une fois encore sur notre volonté de combiner activité et emploi.

Les amendements ne sont pas adoptés.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Monsieur le ministre délégué, mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pendant quelques instants.

La séance est suspendue.

La séance, suspendue à dix-huit heures dix, est reprise à dix-huit heures vingt.