La séance est ouverte à neuf heures cinquante.
Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n'y a pas d'observation ?...
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d'usage.
M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre, en application de l'article 67 de la loi n° 2004-1343 du 9 décembre 2004 de simplification du droit, le rapport sur la mise en application de la loi n° 2007-209 du 19 février 2007 relative à la fonction publique territoriale.
Acte est donné du dépôt de ce rapport.
Il sera transmis à la commission des lois et sera disponible au bureau de la distribution.
Monsieur le président, ne pensez-vous pas qu'il faille suspendre la séance en attendant que nos collègues de la majorité qui, pour des raisons évidentes, se sont couchés tard hier soir puissent nous rejoindre afin de pouvoir délibérer valablement ?
Ma chère collègue, comme vous pouvez le constater, votre souhait vient de s'exaucer. Grâce à votre force de persuasion, nos collègues arrivent dans l'hémicycle.
Nous allons donc pouvoir débattre dans la sérénité.
I. - La dernière phrase du 1° de l'article L. 411-5 du même code est remplacée par trois phrases ainsi rédigées :
« Les ressources doivent atteindre un montant qui tient compte de la taille de la famille du demandeur. Le décret en Conseil d'État prévu à l'article L. 441-1 fixe ce montant, qui doit être au moins égal au salaire minimum de croissance mensuel, au plus égal à ce salaire majoré d'un cinquième pour une famille de moins de six personnes, et au plus égal à ce salaire majoré d'un tiers pour une famille de six personnes ou plus. Ces dispositions ne sont pas applicables lorsque la personne qui demande le regroupement familial est titulaire de l'allocation aux adultes handicapés ou de l'allocation supplémentaire mentionnée à l'article L. 815-24 du code de la sécurité sociale. »
II. - Dans le 3° du même article L. 411-5, les mots : « principes fondamentaux reconnus par les lois de la République » sont remplacés par les mots : « principes essentiels qui, conformément aux lois de la République, régissent la vie familiale en France, pays d'accueil ».
L'article 2 dresse à nouveau des chevaux de frise afin d'interdire l'entrée du territoire français à un maximum de personnes, notamment à celles qui viennent des pays du Sud. Le projet de loi durcit encore la condition de ressources exigée pour qu'un étranger installé régulièrement en France puisse solliciter un regroupement familial.
Le texte vise à moduler ces ressources en fonction de la taille de la famille. L'Assemblée nationale a porté ce maximum à 1, 33 SMIC lorsque la famille compte plus de six enfants.
Par deux fois déjà, en 2003 et en 2006, le Sénat a rejeté à l'unanimité des dispositifs similaires introduits par voie d'amendements à l'Assemblée nationale. Notre position avait alors prévalu en commission mixte paritaire. À l'époque, le rapporteur avait considéré « qu'il n'y avait pas lieu de distinguer, sur le plan des ressources, la situation des familles étrangères et celle des familles de Français ». Or le principe de la discrimination est aujourd'hui présent à chaque phase de l'examen de ce projet de loi.
Lors du débat en 2003, le rapporteur, M. Jean-Patrick Courtois, avait déclaré : « Dans la mesure où le montant du salaire minimum de croissance mensuel est considéré comme assurant un niveau de vie suffisant pour les Français, il semble raisonnable de considérer que les étrangers atteignant ce niveau ont des ressources suffisantes ».
M. Courtois confirme.
Vous aviez repris, à notre grande satisfaction, monsieur Buffet, cette même analyse en 2006. Or, aujourd'hui, compte tenu du niveau de ressources excessif retenu par l'Assemblée nationale, vous acceptez par grandeur d'âme une modulation allant jusqu'à 1, 2 SMIC pour les familles de plus de six personnes, soit un couple et quatre enfants.
Je ne vois pas ce qui peut justifier ce changement. Comme vous le soulignez dans votre rapport, la part de l'immigration familiale baisse régulièrement depuis 2004, ce qui n'est d'ailleurs pas positif pour la France et la francophonie.
L'augmentation de 20 % des conditions de ressources est très importante pour les étrangers dont l'emploi est avant tout conditionné par l'acceptation de conditions de travail souvent très dures et de rémunérations minimales pour ceux qui ont la chance d'échapper à une embauche totalement ou partiellement illégale.
En fait, le Gouvernement met en place une sélection par l'argent de l'immigration familiale aux deux bouts de la chaîne : dans le pays d'origine, en organisant un accès à des formations qui se révéleront impraticables pour la majorité des conjoints et grands enfants des immigrés en situation régulière ; en France, en exigeant de ces mêmes immigrés un niveau de ressources plus élevé.
Enfin, cette disposition, comme le souligne la Commission nationale consultative des droits de l'homme, est susceptible d'entraîner des atteintes aux articles 3 et 9 de la Convention internationale des droits de l'enfant, en empêchant des enfants de rejoindre leurs parents, faute pour ceux-ci de justifier des ressources officiellement demandées.
Telles sont les raisons pour lesquelles nous avons déposé plusieurs amendements sur cet article.
L'article 2 du projet de loi vise à augmenter le seuil des ressources en exigeant du demandeur 1, 33 fois le SMIC selon la taille de sa famille.
Cette disposition met en place une discrimination entre les familles étrangères et les familles françaises dans la mesure où le SMIC est le salaire minimum de référence en France. Dès lors, pourquoi exiger d'une famille étrangère un « super SMIC » ? Si un tel revenu permet à une famille française de vivre convenablement, pourquoi ne serait-ce pas le cas pour une famille étrangère ?
Le Sénat a déjà rejeté à deux reprises une telle disposition. Va-t-il aujourd'hui se dédire ?
M. Mermaz a cité les propos de M. Courtois. Pour ma part, je citerai le président de la commission des lois, M. Hyest, qui déclarait en 2006 : « Il n'y a pas lieu d'établir de distinction, s'agissant des ressources, entre la situation des familles étrangères et celle des familles françaises. Par conséquent, s'il est considéré qu'un revenu égal au SMIC permet à une famille française de vivre dans des conditions acceptables, il en va de même pour une famille étrangère. »
II convient donc de maintenir le SMIC comme référence aux ressources financières exigées, sans modulation liée à la taille de la famille. Sinon, pour aller jusqu'au bout de la logique, il faudrait créer différentes catégories de SMIC en fonction de la taille de la famille afin de respecter le principe d'égalité ! Ainsi, on pourrait appliquer une modulation du SMIC à tout le monde.
En fait, je crois que nous aurions plutôt tout intérêt à supprimer cette distinction.
L'article 2 durcit encore davantage la condition de ressources que doit remplir le demandeur d'un regroupement familial.
Cet article, le Gouvernement ne s'en cache guère, a moins pour objectif de se préoccuper des conditions de vie des étrangers en France que de limiter l'immigration familiale. Selon les propres termes du Président de la République, les étrangers doivent venir en France pour travailler et non pour bénéficier des prestations sociales.
Les députés ont décidé, comme en 2003 et en 2006, alors que, jusqu'à présent, le montant des ressources du demandeur ne pouvait être inférieur au SMIC - montant duquel sont exclus les prestations sociales et certains revenus de remplacement -, que le montant minimum des ressources exigibles serait augmenté et modulé en fonction de la taille de la famille. Ce qui en 2003 et en 2006 n'était pas admissible le devient aujourd'hui !
Les députés avaient bien tenté d'introduire le principe de la modulation des ressources en fonction de la taille de la famille afin de conditionner un peu plus sévèrement la procédure de regroupement familial, mais cette tentative a finalement avorté. C'est aujourd'hui le Gouvernement qui est à l'origine de cette modulation !
Les députés ont ensuite procédé à un durcissement des conditions de ressources minimales exigées pour bénéficier d'un regroupement familial. Une telle disposition n'est pas sans conséquence : elle introduit une discrimination entre les familles françaises et étrangères. Cette discrimination a d'ailleurs été critiquée par le Conseil constitutionnel dans sa décision du 12 décembre 2005, tout autant que par le Sénat en 2006.
Le rapporteur de l'époque considérait que si un revenu égal au SMIC permettait à une famille française de vivre dans des conditions acceptables, il en allait de même pour une famille étrangère.
Autre conséquence, et non des moindres, à vouloir restreindre toujours plus les conditions du regroupement familial, le Gouvernement et la majorité ne respectent pas le droit fondamental de mener une vie familiale normale auquel peut prétendre toute personne.
Mme la Défenseure des enfants a d'ailleurs souligné cet aspect du problème et considère même que cette nouvelle exigence portée par l'article 2 a « pour conséquence de contrevenir aux articles 9 et 10 de la Convention internationale des droits de l'enfant », en résumé qu'elle est contraire à l'intérêt supérieur de l'enfant.
Nous comprenons donc mal dans ces conditions - en réalité, nous le comprenons trop bien ! - l'obstination du Gouvernement et de la majorité dans ce domaine.
J'espère et je souhaite fermement que notre assemblée fera preuve de la sagesse qu'elle a su exprimer en 2003 et en 2006, et qu'elle refusera la logique inscrite dans cet article 2.
Je suis saisi de huit amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 83, présenté par Mme Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat.
L'amendement n° 128, présenté par Mme M. André, MM. Mermaz, Collombat, Badinter, Dreyfus-Schmidt, Frimat, Peyronnet, Sueur et Yung, Mme Boumediene-Thiery, M. Assouline, Mme Cerisier-ben Guiga et Khiari, M. S. Larcher, Mme Tasca et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Supprimer le paragraphe I de cet article.
La parole est à Mme Catherine Tasca.
Dans son article 2, le projet de loi prévoit de durcir la condition de ressources exigée pour qu'un étranger installé régulièrement en France puisse solliciter un regroupement familial.
Le texte prévoit de moduler ces ressources en fonction de la taille de la famille en exigeant du demandeur au minimum le SMIC et au maximum le SMIC majoré d'un cinquième suivant la taille de la famille.
L'Assemblée nationale a porté ce maximum à 1, 33 SMIC lorsque la famille compte plus de six enfants, soit 1 667 euros.
Par deux fois, en 2003 et en 2006, notre assemblée a rejeté à l'unanimité des dispositifs similaires à celui du présent projet de loi introduits par voie d'amendements à l'Assemblée nationale.
En commission mixte paritaire, notre position avait prévalu.
À l'époque, le rapporteur avait considéré qu'il n'y avait pas lieu de distinguer, sur le plan des ressources, la situation des familles étrangères et celle des familles françaises.
M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur lors du débat en 2003, soulignait : « Dans la mesure où le montant du salaire minimum de croissance est considéré comme assurant un niveau de vie suffisant pour les Français, il semble raisonnable de considérer que les étrangers atteignant ce niveau ont des ressources suffisantes. »
Vous aviez repris, à notre grande satisfaction, monsieur le rapporteur, cette même analyse en 2006.
Or, aujourd'hui, vous admettez une modulation allant jusqu'à 1, 2 SMIC pour les familles de plus de six personnes, c'est-à-dire un couple avec quatre enfants. Je ne comprends vraiment pas ce qui peut justifier ce changement !
Comme vous le soulignez dans votre rapport, la part de l'immigration familiale baisse régulièrement depuis 2004.
L'augmentation de 20 % des conditions de ressources est très lourde pour les étrangers dont l'emploi est avant tout conditionné par l'acceptation de conditions de travail et de rémunérations minimales pour ceux qui ont la chance d'échapper à une embauche totalement ou partiellement illégale.
Le Gouvernement met en place une sélection par l'argent de l'immigration familiale aux deux bouts de la chaîne : dans le pays d'origine, en organisant un accès à des formations qui se révéleront impraticables pour la majorité des conjoints et des enfants d'immigrés en situation régulière ; en France, en exigeant de ces mêmes immigrés un niveau de ressources plus élevé.
Par ailleurs, il y a une grande hypocrisie à supposer, compte tenu de la situation de l'emploi et du logement dans notre pays, que les immigrés seraient mieux lotis que les nationaux.
Enfin, cette disposition est susceptible d'entraîner, comme le souligne la Commission nationale consultative des droits de l'homme, la CNCDH, des atteintes aux articles 3 et 9 de la Convention internationale des droits de l'enfant, en empêchant des enfants de rejoindre leurs parents, faute pour ceux-ci de justifier de ressources suffisantes.
Je rappelle que, dans notre pays, de nombreuses familles vivent actuellement en dessous du seuil de propriété. Il ne faudrait pas que cela devienne une raison de les séparer de leurs enfants.
L'amendement n° 2, présenté par M. Buffet au nom de la commission, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le I de cet article :
I. - Le 1° de l'article L. 411 5 du même code est complété par trois phrases ainsi rédigées :
« Toutefois, pour une famille de six personnes ou plus, les ressources doivent atteindre un montant qui tient compte de la taille de la famille du demandeur. Le décret en Conseil d'État prévu à l'article L. 441-1 fixe ce montant, qui doit être au moins égal au salaire minimum de croissance mensuel et au plus égal à ce salaire majoré d'un cinquième. Ces dispositions ne sont pas applicables lorsque la personne qui demande le regroupement familial est titulaire de l'allocation aux adultes handicapés ou de l'allocation supplémentaire mentionnée à l'article L. 815 24 du code de la sécurité sociale. »
La parole est à M. le rapporteur.
La position de principe en matière de modulation de ressources est que le SMIC est la référence.
Le projet de loi prévoyait une modulation pouvant aller jusqu'à 1, 2 fois le SMIC.
L'Assemblée nationale a augmenté ce seuil pour le porter à 1, 33 fois le SMIC pour les familles de plus de huit personnes.
La commission a décidé de reprendre ce principe en réaffirmant que le SMIC restait la référence et en proposant une modulation jusqu'à 1, 2 fois le SMIC pour les familles de plus de six personnes, afin de tenir compte de situations exceptionnelles.
On peut comprendre qu'une famille de deux ou trois personnes n'a pas les mêmes besoins qu'une famille de plus de six personnes et que les prestations familiales compensent moins bien, au-delà d'un certain seuil, le surcoût lié à un enfant supplémentaire dans le milieu familial.
Le sous-amendement n° 50, présenté par Mme Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet et MM. Desessard et Muller, est ainsi libellé :
I. - Supprimer la première phrase du troisième alinéa de l'amendement n° 2.
II. - Rédiger ainsi la deuxième phrase du même alinéa :
Les ressources doivent atteindre un montant qui doit être au moins égal au salaire minimum de croissance mensuel.
Le sous-amendement n° 68, présenté par Mme Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet et MM. Desessard et Muller, est ainsi libellé :
Dans la dernière phrase du dernier alinéa de l'amendement n° 2, après le mot :
handicapés
insérer les mots :
mentionnée à l'article L. 821-1 du code de la sécurité sociale, de l'allocation de solidarité aux personnes âgées mentionnée à l'article L. 815 1 du code de la sécurité sociale
Le sous-amendement n° 76, présenté par Mme Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet et MM. Desessard et Muller, est ainsi libellé :
Dans la dernière phrase du dernier alinéa de l'amendement n° 2, après le mot :
handicapés
insérer les mots :
mentionnée à l'article L. 821 1 du code de la sécurité sociale
La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.
Je présenterai ensemble ces trois sous-amendements.
Chers collègues de la majorité, j'ai du mal à comprendre pourquoi vous souhaitez revenir aujourd'hui sur un consensus qui a été acquis à deux reprises contre la mise en place de seuils de ressources pour les familles étrangères.
Je suis convaincue, comme vous le répétez, que vous n'êtes pas en service commandé et que vous saurez sur cette question faire preuve d'autant de sagesse qu'en 2003 et 2006 en refusant cette proposition.
Il est indéniable que cette disposition met en place une discrimination entre les familles étrangères et les familles françaises. Existe-t-il en France un SMIC réservé aux familles de plus de six personnes ? Je ne le crois pas, puisqu'il s'agirait d'une discrimination et d'une rupture du principe d'égalité.
Pourquoi alors prévoir un seuil différent pour les familles étrangères ? Pourquoi leur réserver un autre traitement parce qu'ils sont étrangers ? Craignez-vous que ces familles installées en France ne profitent du système des allocations familiales ou des prestations sociales ? Pensez-vous qu'une famille vient en France pour cela ? Allez-vous céder à cette suspicion ambiante ?
Si votre réponse est positive, il y a alors de réelles craintes à avoir sur l'avenir de la France. Si votre réponse est négative, votez contre cet amendement.
En revanche, l'absence de prise en compte des situations particulières, notamment pour les personnes âgées, est de nature à porter atteinte au droit de vivre en famille sur une base discriminante.
Le regroupement familial ne concerne pas que les étrangers en bonne santé, les jeunes ou les riches. Il concerne également les personnes âgées et les personnes handicapées.
Le projet de loi tend à « embourgeoiser » le regroupement familial et à exclure une fois de plus ceux qui bénéficient des allocations les plus précaires, c'est-à-dire ceux dont la situation personnelle les empêche de justifier d'un revenu égal au SMIC.
Vous savez qu'un retraité aujourd'hui perçoit environ une allocation de 750 euros. Il ne pourra pas, s'il le souhaite faire venir ses enfants pour le rejoindre, et il devra rester seul.
Il faut, bien sûr, saluer l'initiative de certains députés de la majorité qui ont ajouté, dans le projet de loi, une exception au principe du seuil de ressources minimales pour les personnes bénéficiaires de l'allocation aux adultes handicapés.
Seulement, on a oublié de mentionner dans l'amendement qui a été adopté à la suite de successives rédactions la source codifiée de l'allocation aux adultes handicapés, l'AAH. Le Gouvernement est même intervenu pour proposer une seconde délibération sur ce point.
En dépit de ce cafouillage, la disposition reste très mal rédigée.
Ces sous-amendements visent donc à insérer une exception au principe de seuil, d'une part, pour les personnes bénéficiant de l'allocation de solidarité aux personnes âgées et, d'autre part, pour celles bénéficiant de l'allocation aux adultes handicapés.
L'amendement n° 28 rectifié, présenté par MM. Demuynck et Peyrat, est ainsi libellé :
Après le mot :
mensuel,
rédiger comme suit la fin de la deuxième phrase du second alinéa du I de cet article :
au plus égal à ce salaire majoré de moitié pour une famille de moins de six personnes, et au plus égal à ce salaire multiplié par deux pour une famille de six personnes ou plus.
La parole est à M. Christian Demuynck.
L'amendement n° 28 rectifié est retiré.
L'amendement n° 34 rectifié, présenté par Mme Hermange, Desmarescaux et B. Dupont, est ainsi libellé :
Remplacer la dernière phrase du I de cet article par deux phrases ainsi rédigées :
Cette condition de ressources n'est pas opposable au demandeur retraité ou qui, en raison de trouble de santé invalidant ou d'un handicap, rencontre des restrictions dans l'accès à une activité professionnelle rémunérée. Les conditions d'application de ces dispositions sont fixées par décret en Conseil d'État.
La parole est à Mme Bernadette Dupont.
Cet amendement est en partie satisfait.
Toutefois nous souhaitons aussi que la condition de ressources ne soit pas opposable aux demandeurs retraités.
L'amendement n° 129, présenté par Mme M. André, MM. Mermaz, Collombat, Badinter, Dreyfus-Schmidt, Frimat, Peyronnet, Sueur et Yung, Mme Boumediene-Thiery, M. Assouline, Mme Cerisier-ben Guiga et Khiari, M. S. Larcher, Mme Tasca et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après les mots :
regroupement familial
Rédiger ainsi la fin de la dernière phrase du second alinéa du I de cet article :
est retraitée ou atteinte de trouble de santé invalidant ou d'un handicap ne permettant pas une activité professionnelle rémunérée.
La parole est à Mme Michèle André.
La Haute Autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité, la HALDE, dans sa délibération du 11 décembre 2006 a estimé que la condition de ressources appliquée à des personnes handicapées constituait non seulement une atteinte au droit de ces personnes à mener une vie familiale normale, mais encore une discrimination indirecte : « Si la règle posée à l'article L. 411-5 répond à un objectif légitime [...] elle s'avère en revanche injustifiable dans le cas des travailleurs handicapés bénéficiaires de l'AAH . »
Le collège de la HALDE recommandait donc au ministère de l'intérieur d'engager une réforme du regroupement familial et d'adresser des instructions aux préfectures afin qu'il soit procédé, sans attendre, à un examen particulier des demandes de regroupement familial émanant de personnes handicapées.
Or nulle mention n'était faite dans le projet de loi de la prise en compte de la question spécifique des travailleurs handicapés ni de celle plus générale des populations particulièrement vulnérables - retraités, malades, invalides -dont le niveau de ressources est trop souvent inférieur au SMIC.
Certes, l'Assemblée nationale a adopté un amendement, visant à préciser que ces conditions de ressources ne sont pas applicables lorsque la personne qui demande le regroupement familial est titulaire de l'allocation aux adultes handicapés ou de l'allocation supplémentaire mentionnée à l'article L. 815-24 du code de la sécurité sociale. C'est une avancée qui reste insuffisante.
Notre amendement, qui tend à compléter cette disposition, vise l'ensemble des populations particulièrement vulnérables, à savoir les retraités, les personnes atteintes de trouble de santé invalidant ou d'un handicap ne permettant pas une activité professionnelle rémunérée.
Pour ces dernières personnes, nous souhaitons que les conditions de ressources ne soient pas applicables.
Tel est l'objet de notre amendement.
L'amendement n° 33 rectifié ter, présenté par MM. Portelli, Béteille et Détraigne, Mme B. Dupont, M. Grillot, Mme Malovry et Mélot, MM. Milon, Othily, de Richemont et Seillier, Mme Sittler et M. Texier, est ainsi libellé :
Compléter la dernière phrase du second alinéa du I de cet article par les mots :
ou d'une pension de retraite.
La parole est à M. Hugues Portelli.
Cet amendement a pour objet d'ajouter au cas des handicapés le cas des titulaires d'une pension de retraite.
Je vous rappelle que beaucoup de retraités immigrés ne sont pas forcément titulaires de stock-options. En conséquence, ils n'ont pas forcément le SMIC.
M. le rapporteur en est tellement convaincu qu'il a oublié de supprimer la mention des retraités, dans son rapport, page 45, au paragraphe 3 intitulé : « Les cas particuliers des retraités, malades ou handicapés », ce qui prouve que, dans son for intérieur, c'était bien son intention.
Je vais donc au-delà de ses pensées secrètes en vous proposant cet amendement !
L'amendement n° 84, présenté par Mme Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Compléter la dernière phrase du second alinéa du I de cet article par les mots :
ou lorsque la demande de regroupement familial répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard de motifs exceptionnels.
La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat.
Nous avons déposé cet amendement de repli afin que le pire soit évité.
Si des personnes ont particulièrement besoin d'être entourées de leur famille, ce sont bien les personnes malades et les retraités, car la présence d'une famille est souvent nécessaire pour pallier une perte d'autonomie.
Afin de ne pas avoir à saisir la HALDE dans le cas de personnes étrangères, malades ou handicapées, à qui l'on opposerait la condition de ressources, je vous propose, mes chers collègues, d'exclure dès à présent les personnes vulnérables du dispositif de l'article 2.
L'amendement n° 83 vise à supprimer toute possibilité de modulation de ressources en fonction de la taille de la famille. La commission demande le retrait de cet amendement, ainsi que de l'amendement n° 128, qui a le même objet. À défaut, elle y sera défavorable.
La commission demande le retrait du sous-amendement n° 50, qui porte également sur les conditions de ressources et qui est contraire à l'amendement n°2. À défaut, elle y sera défavorable.
Elle est également défavorable au sous-amendement n° 68, qui vise à inclure également les personnes retraitées.
La commission est favorable au sous-amendement n° 76, qui est rédactionnel.
Elle est défavorable à l'amendement n° 34 rectifié, dans la mesure où, ainsi que je l'ai déjà expliqué tout à l'heure, nous souhaitons retenir le texte issu de l'Assemblée nationale qui tient compte de la situation des seules personnes handicapées, afin d'éviter la multiplication des exceptions.
Enfin, la commission est également défavorable aux amendements n° 129, 33 rectifié ter et 84.
Le Gouvernement partage l'avis de la commission sur les amendements de suppression n° 83 et 128 et y est donc défavorable.
Il est également défavorable au sous-amendement n° 50. Comme pour la condition de logement, la modulation a pour objet d'assurer les meilleures conditions d'intégration.
Madame Boumediene-Thiery, vous avez fait référence au juge constitutionnel et évoqué la discrimination qui existerait entre les Français et les étrangers. À cet égard, je ferai une remarque. Je regrette d'ailleurs que M. Badinter soit absent ce matin, car il présidait le Conseil constitutionnel lorsque ce point a été précisé.
Le Conseil constitutionnel a jugé de manière constante qu'il n'y avait pas de principe d'égalité entre les Français et les étrangers, parce qu'au regard des lois sur l'immigration les étrangers ne sont pas dans la même situation que les Français. Cela explique la position constante du Conseil constitutionnel.
J'ajoute que le dispositif proposé est, à mon sens, particulièrement équilibré et qu'il tient compte des problèmes d'intégration d'un étranger qui doit trouver un logement plus grand et donc plus cher pour accueillir sa famille.
Je suis également défavorable à votre sous-amendement n° 68, madame Boumediene-Thiery. Outre qu'il précise la référence de l'allocation aux adultes handicapés dans le code de la sécurité sociale, ce sous-amendement prévoit aussi d'étendre l'exemption prévue à l'article 2 aux personnes bénéficiant de l'allocation de solidarité aux personnes âgées. Pour ma part, je m'en tiens à l'avis rendu par la HALDE, qui avait seulement demandé que soient dispensés de la condition de ressources les bénéficiaires de l'allocation aux adultes handicapés, ainsi qu'au texte de l'Assemblée nationale.
En revanche, je suis favorable à votre sous-amendement n° 76, madame Boumediene-Thiery, qui est rédactionnel et qui précise, à juste titre, la référence de l'AAH dans le code de la sécurité sociale.
L'amendement n° 2 de la commission prévoit le retour au plafond de 1, 2 SMIC qui figurait dans le projet de loi, ce qui me paraît sage. Sans doute l'Assemblée nationale était-elle allée trop loin en prévoyant 1, 33 SMIC. Le Gouvernement est donc favorable à cet amendement.
En ce qui concerne l'amendement n° 34 rectifié, comme je l'ai déjà précisé, je m'en tiens à l'avis qui a été rendu par la HALDE, et suis donc défavorable à cet amendement.
La mesure proposée, madame Dupont, est à l'évidence sympathique, généreuse et compréhensible, mais elle est trop générale et, de ce fait, elle risque de provoquer des ruptures d'égalité, ce qui, très certainement, ne correspond pas à votre volonté.
D'ailleurs, la rédaction qui est issue des travaux de l'Assemblée nationale répond en grande partie à votre souci de voir prises en compte les situations de handicap qui, à l'évidence, limitent la capacité des personnes concernées à percevoir des revenus qui seraient suffisants.
Cependant, je partage le souci qui sous-tend votre démarche de ne pas empêcher les handicapés et les plus âgés de bénéficier de la présence de leurs proches auprès d'eux. Je demanderai donc - soyez-en assurée - aux préfets d'être particulièrement attentifs aux situations de détresse et d'y apporter des réponses positives.
Je suis également défavorable à l'amendement n° 129, qui est similaire à l'amendement n° 34 rectifié.
En ce qui concerne l'amendement n° 33 rectifié ter, là aussi, je comprends bien votre démarche, monsieur Portelli, qui consiste, en fait, à dispenser de conditions de ressources tous les retraités. Mais il faut y réfléchir, car votre proposition est beaucoup trop large, et les possibilités d'extension qu'elle implique ne correspondent pas à ce que je souhaite ni sans doute à ce que vous souhaitez vous-même.
Pour cette raison, je ne peux pas retenir une proposition aussi générale, même si j'en comprends bien l'esprit.
Enfin, l'amendement n° 84 crée une dispense de conditions de ressources pour raisons humanitaires. Outre que cette proposition est quelque peu polémique, elle est en tout cas très imprécise, ce qui dénature le texte. Le Gouvernement a donc émis un avis défavorable sur cet amendement.
Je tiens à apporter deux précisions de manière à lever toute ambiguïté.
A propos des références, je précise que le SMIC net mensuel est aujourd'hui de 1 005, 37 euros. Majoré d'un tiers, ainsi que l'avait proposé l'Assemblée nationale, il s'élève à 1 337, 14 euros. Nous avons pris comme référence le salaire net médian des ouvriers qualifiés, qui est de 1 320 euros.
Des ouvriers qualifiés ! Vous ne prenez pas celui des ouvriers non qualifiés !
En effet, et la proposition que nous faisons est en deçà du salaire médian des ouvriers qualifiés.
À l'attention de ceux qui ont évoqué aussi le montant mensuel de la retraite comme référence, je souligne qu'il est de 1 212 euros, c'est-à-dire supérieur au SMIC. Donc, pour cette raison, nous n'avons pas retenu cette disposition.
La parole est à M. Bernard Frimat, pour explication de vote sur l'amendement n° 83.
La course d'obstacles continue ! Monsieur le ministre, vous voulez que les choses soient bien claires. Elles le sont !
Vous nous proposez un texte de communication symbolique, destiné à pourrir la vie des étrangers en situation régulière qui veulent favoriser le regroupement familial. Si ce n'est pas clair à ce moment du débat, ce ne le sera jamais !
Quel aveu !
Monsieur le ministre, le Sénat, qui, par deux fois, s'était opposé à toute modulation, pour des raisons que nous ont expliquées brillamment Jean-Jacques Hyest, François-Noël Buffet et Jean-Patrick Courtois, aujourd'hui, change d'avis dans sa majorité. Pourquoi ? Pour des raisons symboliques !
Monsieur le ministre, combien de familles de quatre enfants demandent-elles le regroupement familial ? Vous qui aimez citer des chiffres, donnez-nous celui-là !
Vous élaborez un projet de loi, vous inventez des situations qui, la plupart du temps, ne se réaliseront pas, mais qui portent le même message.
De surcroît, nous avons curieusement remarqué - alors que vous avez plusieurs fois utilisé le « nous » à propos des amendements de votre majorité, de manière à vous les approprier - qu'aucun des amendements parlementaires qui pouvaient poser un problème, notamment d'ordre constitutionnel, ne figurait dans le texte initial ! Quelle magnifique manoeuvre de contournement du Conseil d'État !
Vous êtes dans votre logique : vous désignez l'étranger comme un obstacle, en vous abritant sous de faux prétextes en vertu desquels vous faites finalement tout cela pour son bien. Mais qui peut vous croire ? Qui peut croire que votre volonté est d'intégrer les étrangers et d'améliorer leurs conditions de vie en mettant des obstacles financiers modulés au regroupement familial ?
C'est la philosophie de votre texte. Moi, je souhaiterais que vous l'assumiez plus nettement et que vous cessiez de vous retrancher derrière des paroles de bon apôtre que chacun de vos gestes dément !
Voilà pourquoi nous souhaitons revenir à la position que le Sénat, à l'unanimité, avait défendue, en s'opposant à toute modulation. Nous voterons en faveur des amendements de suppression. Même si nous avons le sentiment que, une fois de plus, la solution à laquelle vous parviendrez ne sera pas appliquée, ne concernera personne, elle s'ajoute, en termes de symbole, à une série de vexations envers les travailleurs étrangers en situation régulière, qui apportent à notre pays leur force de travail et qui accroissent sa richesse. Mais cela vous gêne !
M. David Assouline applaudit.
Monsieur le ministre, avant de vous poser une question, je tenais à vous dire que je n'ai jamais fait référence au juge constitutionnel et que c'est certainement une erreur de votre part. Malheureusement, je sais que le Conseil constitutionnel a toujours accepté cette discrimination entre Français et étrangers.
À notre grand regret.
J'en viens à ma question.
Vous voulez exclure du dispositif prévu à l'article 2 l'allocation de solidarité aux personnes âgées, parce que vous considérez, en fait, qu'elle est trop faible. Elle ne s'élève qu'à environ 700 euros par mois. Or vous n'excluez pas - en tout cas, je ne le pense pas - l'ensemble des revenus concernant les retraités, car vous savez très bien que certains retraités ont des revenus supérieurs à l'allocation de solidarité aux personnes âgées. Certains retraités ont des revenus complémentaires, et vous ne les excluez pas.
C'est donc clair : vous voulez exclure les plus pauvres, ceux qui perçoivent l'allocation de solidarité. En revanche, les retraités qui ont un revenu supérieur, eux, ne seraient pas exclus. Est-ce bien le fond de votre pensée ?
Monsieur le ministre, dans la lettre de mission qu'il vous a adressée, le Président de la République écrit : « Le regroupement familial doit être subordonné au fait d'avoir un logement et des revenus suffisants pour faire vivre sa famille. » Je me suis donc intéressé aux revenus des Français.
En particulier, si l'on considère le revenu médian, la médiane étant la ligne qui partage en deux parties égales l'échantillon, on constate que le revenu médian des ouvriers non qualifiés est inférieur de 20 % au SMIC.
Ce sont des statistiques. Le revenu médian est le revenu qui partage exactement en deux un échantillon de population.
Pour la catégorie des ouvriers non qualifiés, le revenu médian, c'est-à-dire pour 50 % des ouvriers non qualifiés, est inférieur de 20 % au SMIC.
Si on prend pour référence le SMIC, cela signifie que 50 % des ouvriers non qualifiés en France n'ont pas un revenu suffisant. Pour la catégorie des artisans et ouvriers, l'écart entre le revenu médian et le SMIC est de l'ordre de 10 %.
Pourquoi prendre le SMIC comme référence de revenu - à plus forte raison, le SMIC multiplié par un coefficient - quand la majorité de la population française dispose d'un revenu inférieur au SMIC ?
Franchement, je préfère la formulation du Président de la République, qui se limite à exiger des candidats au regroupement familial un revenu « suffisant ». « Suffisant » ne signifie pas « équivalent au SMIC ». En outre, le seuil doit être placé en dessous du SMIC !
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
Le sous-amendement n'est pas adopté.
La parole est à M. Michel Mercier, pour explication de vote sur le sous-amendement n° 68.
J'ai écouté ce débat avec intérêt. Essayons d'être justes même si le Gouvernement souhaite être rigoureux.
Monsieur le ministre, vous avez proposé de ne pas soumettre les personnes handicapées à la condition de ressources.
Je vous lance donc un appel : vous ne pouvez pas écarter les personnes âgées du regroupement familial ! Les sous-amendements dont nous discutons relèvent d'approches différentes. La plus restrictive est défendue par Mme Boumediene-Thiery : elle réserve l'exception aux bénéficiaires de l'allocation de solidarité aux personnes âgées. La plus large est défendue par M. Portelli et Mme Bernadette Dupont : elle accorde le bénéfice de l'exception à tous les retraités. Il est impossible, en conscience, de traiter différemment les bénéficiaires de l'allocation aux adultes handicapés et les bénéficiaires de l'allocation de solidarité aux personnes âgées.
Monsieur le ministre, je vous demande de choisir entre ces deux formules. Retenez la plus restrictive, si vous le souhaitez, mais n'excluez pas les personnes âgées du regroupement familial sous prétexte que le montant de leur retraite est trop faible. Ou alors, augmentez les retraites - mais cela ne semble pas d'actualité ! Prenez au moins en compte les bénéficiaires de l'allocation de solidarité, si vous ne voulez pas étendre l'exception à l'ensemble des retraités.
Selon M. le ministre, dispenser l'ensemble des retraités de la condition de ressource risquerait de poser un problème.
Depuis le début de la discussion de ce projet de loi, nous débattons sous l'épée de Damoclès de la commission mixte paritaire. Pourquoi ne voterions-nous pas un texte relativement généreux et large, tout en sachant que la commission mixte paritaire le retravaillera ? Elle l'écartera peut-être purement et simplement, mais elle pourra aussi faire preuve de sagesse en retenant les amendements que le ministre ou les représentants des deux commissions pourront suggérer.
Personnellement, je saurai gré au Sénat de voter ces amendements en l'état et de laisser à la commission mixte paritaire le soin de les peaufiner.
Monsieur le ministre, puisque nous en venons à parler des personnes âgées, je voudrais rappeler que le Sénat a adopté l'article 58 de la loi du 5 mars 2007 instituant un droit au logement opposable. Cet article visait à mettre fin à l'assignation à résidence des vieux travailleurs migrants, les « chibanis », qui ne peuvent rentrer dans leur pays d'origine sans perdre le bénéfice de leurs droits sociaux. Le décret d'application relatif à cet article n'est toujours pas publié. Je souhaiterais savoir ce que vous comptez faire à ce sujet.
Monsieur le ministre, je n'ai pas été tout à fait convaincue par votre idée d'adresser une supplique aux préfets pour qu'ils accordent une attention particulière aux situations les plus difficiles.
Il faut à tout prix éviter ce genre de procédure si l'on veut prévenir les mesures discriminatoires, car les décisions risquent de varier d'un préfet à l'autre. Je me rallierai donc à la suggestion d'Hugues Portelli : remettons-nous en à la sagesse de la commission mixte paritaire.
J'ai écouté les arguments développés par Mme Boumediene-Thiery et j'ai été sensible aux propos de MM. Portelli et Mercier. C'est pourquoi, sur le sous-amendement n° 68, le Gouvernement s'en remet à la sagesse de la Haute Assemblée.
Le sous-amendement est adopté.
Le sous-amendement est adopté.
L'amendement est adopté.
En conséquence, les amendements n° 34 rectifié, 129, 33 rectifié ter et 84 n'ont plus d'objet.
La parole est à Mme Bariza Khiari, pour explication de vote sur l'article 2.
Le groupe socialiste ne votera pas cet article, car le Gouvernement entretient une fois de plus le fantasme lié au regroupement familial.
En prévoyant de moduler les conditions de ressources en fonction de la taille de la fratrie, cet article revient à se réapproprier le fonds de commerce de la droite extrême, à savoir le vieux discours sur les familles nombreuses venant en France, en vertu d'un droit constitutionnel - que vous rêvez d'abroger -, pour y vivre des prestations sociales. Sur cette question, il est regrettable que la commission des lois abandonne la position qu'elle défendait encore il y a un an à peine.
Étant donné la portée de ce texte, je me surprends à féliciter la majorité de l'assemblée d'avoir eu la générosité d'apporter des dérogations concernant les personnes les plus vulnérables, les handicapés comme les personnes âgées.
Monsieur le ministre, vous nous avez rappelé la jurisprudence constante du Conseil constitutionnel sur la différence entre les Français et les étrangers. Nous ne l'ignorons pas et les étrangers ne risquent pas de se considérer comme des Français, car ils n'ont pas le droit de vote, par exemple.
La reconnaissance du caractère objectif de cette différence ne nous dispense pas de respecter les règles relatives aux droits de l'homme, aux droits de l'enfant, au droit à une vie familiale normale, qui s'imposent avec la même force.
Cela doit guider notre réflexion, même si nous souhaiterions que cette différence soit plus réduite qu'elle ne l'est aujourd'hui.
Le constat de cette différence ne peut prévaloir sur l'exigence de dignité que nous devons avoir pour les étrangers qui vivent sur notre sol ou souhaitent y venir.
L'article 2 est adopté.
L'amendement n° 49, présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet, MM. Desessard et Muller, est ainsi libellé :
Après l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans la deuxième phrase du 1° de l'article L. 411-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, les mots : «, à l'article L. 815-1 du code de la sécurité sociale » sont supprimés.
La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.
Il s'agit simplement d'un amendement rédactionnel de coordination qui permet d'instaurer l'inapplicabilité de l'article L. 411-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile à certaines personnes.
Cet article exclut expressément l'allocation visée à l'article L. 812-1 du code de la sécurité sociale dans la prise en compte des ressources du demandeur d'un regroupement familial. Il convient donc d'harmoniser la rédaction de l'article L. 411-5 en prenant en compte la modification qui vient d'être votée, afin d'éviter une contradiction.
Il s'agit d'un amendement rédactionnel, auquel la commission est favorable.
Le Gouvernement est favorable à cet amendement de coordination avec le sous-amendement n° 68 de Mme Boumediene-Thiery, qui vient d'être adopté
Je voudrais saisir cette occasion pour répondre à Mme Khiari qui a évoqué la situation des vieux travailleurs immigrés. Vous avez raison, madame la sénatrice, la loi du 5 mars 2007, défendue à l'époque par Jean-Louis Borloo, a prévu une aide à la réinstallation dans leur pays d'origine des migrants âgés. Le décret d'application relatif à ces dispositions est en préparation et sera publié avant la fin de l'année 2007.
Il est juste d'aider les travailleurs arrivés en France dans les années soixante, qui vivent souvent précairement dans des foyers de l'ex-SONACOTRA, à se réinstaller dans leur pays.
Ne tardez pas trop, monsieur le ministre, sinon ils seront tous morts !
L'amendement est adopté.
Un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 2.
La dernière phrase du premier alinéa du III de l'article L. 313-11-1 du même code est remplacée par deux phrases ainsi rédigées :
« Les ressources doivent atteindre un montant qui tient compte de la taille de la famille du demandeur. Un décret en Conseil d'État fixe ce montant, qui doit être au moins égal au salaire minimum de croissance mensuel, au plus égal à ce salaire majoré d'un cinquième pour une famille de moins de six personnes, et au plus égal à ce salaire majoré d'un tiers pour une famille de six personnes ou plus. »
Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L'amendement n° 85 est présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.
L'amendement n° 130 est présenté par Mme M. André, MM. Mermaz, Collombat, Badinter, Dreyfus-Schmidt, Frimat, Peyronnet, Sueur et Yung, Mme Boumediene-Thiery, M. Assouline, Mme Cerisier-ben Guiga et Khiari, M. S. Larcher, Mme Tasca et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat, pour présenter l'amendement n° 85.
L'article 2 bis s'inscrit dans la même logique que l'article 2, puisqu'il vise à moduler en fonction de la taille de la famille, s'agissant des titulaires de la carte de résident de longue durée-CE, les conditions de ressources exigées pour pouvoir bénéficier du regroupement familial.
Or, depuis 2003, la politique de l'immigration des gouvernements successifs a toujours été la même : tenter de réduire à tout prix l'immigration subie. Pour ce faire, on actionne à chaque fois le levier des conditions de ressources exigées du demandeur au regroupement familial.
Chaque loi a donc durci ces conditions, quelles que soient les conséquences de ce durcissement sur le droit à vivre en famille. Les titulaires d'une carte de résident de longue durée-CE n'échappent pas à cette politique puisque, au nom de l'égalité de traitement avec les étrangers non communautaires, la majorité considère qu'ils doivent être soumis aux mêmes conditions de ressources que ces derniers. Ils se verront donc appliquer le principe de modulation de la condition de ressources en fonction de la taille de la famille prévue à l'article 2 du projet de loi.
N'acceptant pas cette modulation pour les étrangers non communautaires, nous ne l'acceptons pas davantage pour les étrangers communautaires. C'est pourquoi nous demandons la suppression pure et simple de l'article 2 bis.
L'article 2 bis tend à prévoir l'application de la modulation de la condition de ressources en fonction de la taille de la famille aux étrangers titulaires d'une carte de résident de longue durée-CE souhaitant regrouper leur famille en France. De tels cas existent. Par coordination avec l'amendement de suppression de l'article 2 que nous avions présenté, nous demandons également la suppression de l'article 2 bis.
Je profite de la défense de cet amendement pour attirer l'attention de notre assemblée sur l'extrême difficulté de la situation de nombreuses femmes étrangères disposant de revenus plus modestes encore que le SMIC. Je pense, par exemple, à celles qui sont vendeuses à temps partiel ou qui font des ménages pour faire vivre leur famille. Nous reviendrons sans doute sur cet aspect des choses lorsque nous évoquerons le sort bien difficile réservé à des femmes qui, ayant été victimes de violences conjugales, doivent souvent élever seules leurs enfants.
L'amendement n° 3, présenté par M. Buffet, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit cet article :
Le premier alinéa du III de l'article L. 313-11-1 du même code est complété par deux phrases ainsi rédigées :
« Toutefois, pour une famille de six personnes ou plus, les ressources doivent atteindre un montant qui tient compte de la taille de la famille du demandeur. Un décret en Conseil d'État fixe ce montant, qui doit être au moins égal au salaire minimum de croissance mensuel et au plus égal à ce salaire majoré d'un cinquième. »
La parole est à M. le rapporteur, pour le présenter et pour donner l'avis de la commission sur les amendements identiques n° 85 et 130.
Par coordination avec l'amendement n° 2 que nous avions présenté à l'article 2, l'amendement n° 3 prévoit la même modulation de la condition de ressources en fonction de la taille de la famille pour un étranger titulaire d'une carte de résident de longue durée-CE obtenue dans un autre État membre de l'Union européenne.
Par ailleurs, la commission est bien entendu défavorable aux deux amendements de suppression de l'article.
L'article vise donc à étendre l'application de la modulation de la condition de ressources à l'étranger titulaire d'une carte de séjour de longue durée délivrée dans un autre État membre de l'Union européenne et qui souhaite faire venir sa famille en France.
Les amendements de suppression n° 85 et 130 recueillent un avis défavorable du Gouvernement.
Quant à l'amendement n° 3 de la commission, le Gouvernement y est favorable, pour les mêmes motifs qu'il avait été favorable à l'amendement n° 2.
Les amendements ne sont pas adoptés.
L'amendement est adopté.
Le quatrième alinéa de l'article L. 431-2 du même code est complété par une phrase ainsi rédigée :
« En cas de violence commise après l'arrivée en France du conjoint mais avant la première délivrance de la carte de séjour temporaire, le conjoint se voit délivrer, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, une carte de séjour temporaire portant la mention «vie privée et familiale». »
L'amendement n° 131, présenté par M. Collombat, Mme M. André, MM. Mermaz, Badinter, Dreyfus-Schmidt, Frimat, Peyronnet, Sueur et Yung, Mme Boumediene-Thiery, M. Assouline, Mme Cerisier-ben Guiga et Khiari, M. S. Larcher, Mme Tasca et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés est ainsi libellé :
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
« Cependant, l'absence ou la rupture de vie commune ne peut pas être invoquée dans les cas où celle-ci est indépendante de la volonté des intéressés. »
La parole est à M. Pierre-Yves Collombat.
Cet amendement vise à prendre en considération des problèmes tout à fait particuliers.
Nous sommes régulièrement saisis, dans nos permanences, du cas de personnes dont la demande de visa de long séjour ou de regroupement familial est rejetée du fait qu'il y aurait eu rupture de la vie commune entre les deux conjoints.
Or, dans un certain nombre de situations, cette discontinuité de la vie commune - ce terme me paraît plus approprié, en l'occurrence, que celui de rupture - est indépendante de la volonté des intéressés. En particulier, des fonctionnaires ayant été mutés ou des personnes ayant dû quitter leur lieu de résidence pour raisons professionnelles rencontrent d'énormes difficultés à faire reconnaître la continuité de la vie commune avec leur conjoint.
Dans le même ordre d'idées, j'évoquerai le cas de malades se trouvant éloignés de leur conjoint du fait des contraintes imposées par le suivi d'un traitement.
Je concède tout à fait volontiers que nous sommes ici à la limite des domaines législatif et réglementaire, mais, si les personnes concernées ne rencontraient pas des tracasseries qui paraissent complètement ubuesques, je n'aurais pas eu besoin de présenter cet amendement. C'est aussi pour entendre M. le ministre sur cette question que je l'ai déposé.
Cet amendement vise le cas où l'administration interprète à tort une simple séparation physique ou matérielle comme étant constitutive d'une rupture de la vie commune.
Il s'agit là, incontestablement, d'une interprétation abusive. Cependant, la rédaction de l'amendement paraît trop imprécise à la commission. C'est la raison pour laquelle nous souhaitons que le Gouvernement nous apporte des éclaircissements sur la façon dont doit être interprétée la notion de vie commune par les préfets.
Cet amendement tend, de manière générale, à prendre en compte, dans l'appréciation du caractère effectif de la vie commune, les cas où la rupture de celle-ci est indépendante de la volonté des intéressés. Je pense, à l'instar de M. le rapporteur, que le critère proposé par les auteurs de l'amendement est trop vague pour être retenu dans la pratique administrative et que son application pourrait d'ailleurs être, dans un certain nombre de circonstances, source de fraudes potentielles.
Par conséquent, j'estime très sincèrement qu'il faut conserver au préfet...
... son pouvoir d'appréciation de la réalité de la vie commune.
C'est pourquoi j'émets un avis défavorable sur cet amendement.
Si M. le ministre m'avait dit explicitement qu'il considérait qu'il n'y avait pas rupture de la vie commune dans les deux cas que j'ai cités, à savoir l'éloignement du fait d'une mutation ou d'une obligation professionnelle constatée ou en raison du suivi d'un traitement médical, j'aurais retiré mon amendement. C'est précisément pour que des interprétations qui me paraissent abusives ne puissent prévaloir que je l'ai déposé. Je suis un peu déçu que M. le ministre ne se soit pas exprimé en ce sens et, dans ces conditions, je maintiens mon amendement.
L'amendement n'est pas adopté.
L'article 2 ter est adopté.
Dans le dernier alinéa de l'article L. 431-2 du même code, les mots : « à l'initiative de l'étranger admis au séjour au titre du regroupement familial, » sont supprimés, et les mots : « de son titre de séjour » sont remplacés par les mots : « du titre de séjour de l'étranger admis au séjour au titre du regroupement familial ».
L'amendement n° 4, présenté par M. Buffet au nom de la commission, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit cet article :
Le dernier alinéa de l'article L. 431-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est ainsi rédigé :
« En outre, lorsque la communauté de vie a été rompue en raison de violences conjugales qu'il a subies de la part de son conjoint, l'autorité administrative ne peut procéder au retrait du titre de séjour de l'étranger admis au séjour au titre du regroupement familial et peut en accorder le renouvellement. »
La parole est à M. le rapporteur.
Je suis saisi de deux sous-amendements identiques.
Le sous-amendement n° 67 est présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet, MM. Desessard et Muller.
Le sous-amendement n° 86 est présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
Ces deux sous-amendements sont ainsi libellés :
Dans le dernier alinéa de cet amendement, après les mots :
regroupement familial et
remplacer les mots :
peut en accorder
par les mots :
doit en accorder
La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery, pour présenter le sous-amendement n° 67.
Ce sous-amendement tend à prévoir que le renouvellement du titre de séjour de l'étranger admis au séjour au titre du regroupement familial soit automatique et non pas hypothétique, comme le donne à entendre l'amendement de la commission, en cas de violences subies de la part du conjoint.
En effet, l'absence d'automaticité du renouvellement du titre de séjour dans la situation décrite à cet article créerait un vide juridique. On nous dit que le titre de séjour ne pourra pas être retiré mais, en même temps, il est suggéré qu'il ne sera pas obligatoirement renouvelé. Qu'est-ce que cela signifie ? Que l'on va créer des sans-papiers ?
La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat, pour présenter le sous-amendement n° 86.
Si nous prenons acte de la volonté exprimée de protéger les femmes étrangères victimes de violences conjugales, nous souhaitons cependant, par ce sous-amendement, aller beaucoup plus loin dans cette direction.
En effet, des femmes étrangères peuvent se trouver dans une situation doublement dramatique. Mariées à un Français ou venues en France dans le cadre du regroupement familial, elles sont amenées, en raison de violences conjugales, à fuir le domicile, de leur propre initiative ou parce que leur conjoint les y force.
En tout état de cause, la communauté de vie est rompue, et si cette rupture intervient avant la délivrance du premier titre de séjour, celui-ci ne sera pas accordé à ces femmes puisqu'elles ne remplissent pas les conditions de non-interruption de la communauté de vie.
En définitive, les femmes victimes de violences conjugales qui rompent la communauté de vie sont, à l'heure actuelle, partiellement protégées lors du renouvellement du titre de séjour, mais partiellement seulement. En effet, le préfet reste libre d'accorder ou non ce renouvellement du titre de séjour.
Or de nombreuses associations ont été saisies de cas de femmes étrangères victimes de violences ayant été obligées de quitter le domicile conjugal avant la délivrance de leur premier titre de séjour. Ce faisant, elles risquent d'être doublement victimes, victimes de violences et victimes d'un retour forcé dans le pays d'origine.
Notre sous-amendement tend donc à protéger les femmes victimes de violences conjugales avant la délivrance du premier titre de séjour. Il s'agit de faire en sorte que le préfet ait l'obligation - je dis bien l'obligation, ce que ne prévoit pas l'amendement de la commission - de délivrer un titre de séjour à une femme se trouvant dans une telle situation.
Quel est l'avis de la commission sur les deux sous-amendements identiques ?
Il n'est pas contestable, naturellement, qu'il faille protéger les femmes victimes de violences conjugales. Cela est clair. Il est donc tout aussi clair que le titre de séjour ne peut pas être retiré dans un tel cas à une épouse ayant eu à subir, pendant la période de vie commune, des violences conjugales.
Pour autant, le renouvellement du titre de séjour obéit également à d'autres règles et à d'autres critères, qui sont appréciés par le préfet. Il faut donc laisser au préfet, le moment venu, la liberté d'accorder ou non le titre de séjour dès lors que l'existence de violences conjugales ne peut être l'unique élément d'appréciation, même si, au moment où ces violences se produisent, la victime doit pouvoir rester sur le territoire français.
La commission est donc défavorable aux deux sous-amendements.
Le Gouvernement partage l'avis de la commission sur les sous-amendements n° 67 et 86. Il n'est pas possible de prévoir l'automaticité de la délivrance ou du renouvellement du titre de séjour dans des situations où une analyse sérieuse et objective des faits par le préfet est absolument nécessaire. Ce dernier doit donc conserver une marge d'appréciation et l'on ne peut pas inscrire dans la loi l'automaticité du renouvellement du titre de séjour. C'est là une vraie différence de vues qui nous sépare des auteurs de ces sous-amendements, sur lesquels le Gouvernement émet donc un avis défavorable.
Mme Isabelle Debré. Je n'arrive pas à comprendre cette défiance à l'égard des préfets.
Exclamations ironiques sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.
Ce sont quand même des hommes et des femmes responsables ! En tant qu'élus locaux, mes chers collègues, nous avons très souvent l'occasion de recevoir dans nos permanences des personnes qui se disent victimes de violences, qu'il s'agisse de femmes ou d'enfants. Chaque fois que nous rencontrons de tels problèmes et que nous nous adressons au préfet, sa porte nous est toujours grande ouverte.
Par conséquent, je suis étonnée de cette défiance que vous manifestez à l'encontre des préfets. Cela me choque terriblement ! C'est aussi à nous de faire notre travail. Nous n'avons pas, en tant que législateur, à imposer des obligations aux préfets. Pour ma part, je leur fais confiance.
Je n'y reviendrai pas longuement, mais tout le monde sait que les préfets sont placés sous l'autorité du Gouvernement.
Je voudrais vous demander, mes chers collègues, d'accorder une attention un peu soutenue à cette question.
Quelle hypocrisie de dire que, si une femme est victime de violences, l'autorité administrative ne pourra pas lui retirer son titre de séjour, mais pourra éventuellement ne pas lui renouveler ! La question deviendra rapidement insoluble : vu la fréquence de renouvellement des titres de séjour, nous risquons de faire de ces femmes, et - le cas échéant - de leurs enfants, des sans-papiers.
Il y a déjà un certain temps, pas tout à fait vingt ans, lorsque j'étais secrétaire d'État, j'avais pu mesurer que l'évocation de la question des violences faites aux femmes dans notre pays, en France, faisait parfois sourire certains...
Il y a deux ans, nous avons rencontré les mêmes difficultés, mais la conférence des présidents a accepté d'inscrire à l'ordre du jour du Sénat notre proposition de loi sur les violences à l'égard des femmes. C'est la première loi sur le sujet, même si, au fil du temps, quelques accommodements avaient été trouvés pour garantir une situation meilleure aux femmes victimes de violences.
Cette loi n'a même pas deux ans, et l'on voudrait aujourd'hui placer dans une incertitude incroyable ces femmes qui viennent d'ailleurs, empreintes de cultures lourdes de traditions, et desquelles on exige déjà beaucoup.
Je ne suis sans doute pas la seule dans cette assemblée, mais mon statut d'ancienne secrétaire d'État chargée des droits des femmes me confère peut-être une responsabilité particulière pour évoquer le sujet.
Dans nos permanences, nous avons tous entendu des femmes venir avouer - et avec quelles réticences, peut-être parce qu'elles pensent que le sujet ne nous intéresse pas tous au même titre - qu'elles connaissaient des problèmes dans leur couple et qu'elles étaient victimes de violences conjugales. J'ai vu des femmes de milieux sociaux très aisés mettre quinze ans à se libérer par la parole de ces violences. Nous en connaissons tous et toutes. Si nous disons le contraire, nous sommes des menteurs !
Monsieur le ministre, au nom de toutes ces femmes qui, de tout temps, se sont battues et qui se battront encore pour aider les autres femmes victimes de violences conjugales, je vous en prie, donnez aux préfets les consignes utiles pour que le renouvellement des titres de séjour soit obligatoire. Sinon, nous nous déshonorons !
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.
Madame André, chacun ici connaît les responsabilités gouvernementales que vous avez exercées, mais d'autres sont peut-être moins familières à ceux qui nous écoutent : vous avez aussi été déléguée régionale des droits de la femme. Vos anciennes fonctions vous donnent donc à l'évidence une autorité personnelle, que vous partagez certes avec d'autres de vos collègues, mais dont il faut tenir compte.
J'ai bien entendu votre réflexion et la conclusion à laquelle vous avez abouti. Je ferai la proposition suivante : instructions seront données aux préfets, non pas par voie orale, mais par circulaire, afin que votre demande puisse être prise en compte, car il me paraît difficile d'inscrire cela dans la loi.
La parole est à M. Louis Mermaz, pour explication de vote sur le sous-amendement n° 67.
Dans la lignée des propos très forts tenus par Michèle André, il serait bon que notre assemblée vote le sous-amendement n° 67 qui remplace les mots « peut en accorder » par « doit en accorder ». Les choses seraient ainsi plus claires.
À mon tour, je souhaite défendre le sous-amendement n° 67 : s'il revient effectivement au ministre compétent de donner aux services préfectoraux des instructions claires par voie de circulaires, il appartient au législateur de voter des lois claires et précises. Les circulaires sont ainsi mieux comprises.
J'ai entendu le Président de la République, pendant la campagne électorale me semble-t-il, assurer qu'il se ferait un honneur d'accueillir toutes les femmes victimes de violences dans le monde. Nous sommes donc là dans la droite ligne de sa pensée !
Il serait bon que la loi soit précise, monsieur le ministre, ce qui ne vous dispense en rien de donner des explications de la loi par circulaire, comme c'est le devoir du Gouvernement.
Encore une fois, la loi doit prévoir de manière très claire que le préfet doit permettre à une femme victime de violences de rester sur notre territoire.
Le scrutin a lieu.
Il est procédé au comptage des votes.
Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 9 :
Le Sénat n'a pas adopté.
La parole est à Mme Michèle André, pour explication de vote sur l'amendement n° 4.
Nous regrettons de ne pouvoir voter cet amendement en l'état. Il paraît qu'il n'est pas pertinent d'instaurer une obligation par voie législative. Dont acte !
Monsieur le ministre, devant notre assemblée, je vous demande instamment de vous engager à donner des instructions...
... aux préfets pour qu'ils soient particulièrement attentifs à cette question.
Les femmes dont nous parlons ne devraient pas avoir à chercher le soutien d'élus, qui le leur accordent d'ailleurs bien souvent ; à la violence conjugale déjà très dure qu'elles subissent ne doit pas s'ajouter une violence administrative.
La parole est à Mme Monique Cerisier-ben Guiga, pour explication de vote.
Nous venons de donner un signal totalement négatif aux pays d'émigration, notamment d'Afrique du Nord, auxquels nous faisons souvent la leçon sur les droits des femmes.
La France, par le biais de ses autorités publiques, devrait protéger les femmes victimes de violences, sans que des interventions soient nécessaires.
Madame Debré, je vous signale que les préfets sont plus ou moins réceptifs à nos demandes selon qu'ils ont, ou non, atteint les chiffres de reconduites à la frontière qui leur ont été fixés. Ces préfets ont une carrière à mener, et il arrive qu'elle passe quelquefois avant les préoccupations humanitaires.
Protestations sur les travées de l'UMP.
Nous regrettons que cet amendement n'ait pas été sous-amendé.
Monsieur le ministre, la circulaire que vous vous êtes engagé à prendre devra être très nette. Au-delà des quotas qui mobilisent les préfets, la circulaire ne devra laisser aucune ambiguïté. Nous y veillerons.
L'amendement est adopté.
Après l'article L. 311-9 du même code, il est inséré un article L. 311-9-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 311-9-1. - L'étranger admis au séjour en France et, le cas échéant, son conjoint préparent, lorsqu'un ou plusieurs enfants ont bénéficié de la procédure de regroupement familial, l'intégration républicaine de la famille dans la société française. À cette fin, ils concluent avec l'État un contrat d'accueil et d'intégration pour la famille par lequel ils s'obligent à suivre une formation sur les droits et les devoirs des parents en France. Le président du conseil général est informé de la conclusion de ce contrat.
« En cas de non-respect des stipulations de ce contrat, manifesté par une volonté caractérisée de l'étranger ou de son conjoint, les mesures prévues aux 1°, 2° et 3° de l'article L. 222-4-1 du code de l'action sociale et des familles peuvent être mises en oeuvre par le préfet. Celui-ci en informe le président du conseil général.
« Lors du renouvellement de leur carte de séjour, l'autorité administrative tient compte du non-respect manifesté par une volonté caractérisée, par l'étranger et son conjoint, des stipulations du contrat d'accueil et d'intégration pour la famille et, le cas échéant, des mesures prises en application de l'alinéa précédent.
« Les conditions d'application de ces dispositions sont fixées par décret en Conseil d'État. »
Monsieur le ministre, avec cet article 3, vous affichez une nouvelle fois votre volonté de stigmatiser les familles immigrées, de les placer en dehors du droit commun.
Avec cette disposition, vous souhaitez soumettre ces familles à un nouveau contrat d'accueil et d'intégration, alors même qu'aucune évaluation sérieuse n'a été menée sur le contrat d'accueil et d'intégration que votre majorité a généralisé en 2006.
À ce propos, parler de contrat est abusif tant les obligations des parties sont déséquilibrées. Il ne s'agit dans les faits que de nouvelles obligations faites aux étrangers, et, en aucun cas, d'un réel service public de l'accueil des primo-arrivants.
Il en va de même pour ce nouveau contrat que devront conclure les parents bénéficiaires du regroupement familial. En échange, ces parents recevront une formation sur les droits et les devoirs des parents en France.
Au détour de cet article, nous apprenons donc que désormais le Gouvernement définira les droits et devoirs des parents dans notre pays. Décidément, votre conception de l'identité nationale est extensive ! Il y aurait donc un modèle unique et réglementé de la famille française.
Avec cette disposition, vous jetez encore une fois la suspicion sur les étrangers, en postulant par anticipation qu'ils seraient de mauvais parents. Les étrangers auraient nécessairement besoin d'une contrainte légale pour élever leurs enfants dans le respect des lois de la République, alors même que de telles contraintes ne s'appliquent pas aux parents français.
Pire, vous prévoyez que la violation des obligations de ce contrat, dont nul n'est en mesure de nous dire aujourd'hui ce qu'elles seront, pourra entraîner la mise sous tutelle des allocations familiales, et influencera la décision administrative pour le renouvellement des titres de séjour.
La suspension des allocations familiales est déjà prévue par la loi. Cette mesure reste exceptionnelle et vise à sanctionner les carences graves dans l'exercice de l'autorité parentale. Cette disposition s'applique à tous, Français comme étrangers. Pourquoi alors ajouter une condition spécifique pour les étrangers, si ce n'est pour les stigmatiser encore un peu plus ?
Je le répète, nous ne savons rien de ce que contiendra le contrat d'accueil et d'intégration pour la famille. Dès lors, je ne vois pas ce qui pourrait justifier d'imposer des obligations particulières aux parents étrangers.
Votre disposition, comme les sanctions prévues, sont incontestablement discriminatoires. Elles aboutiront à la création, en matière d'allocations familiales, d'un régime « spécial immigrés ».
Votre dispositif est donc arbitraire et stigmatisant. Vous prétendez agir pour l'intégration des étrangers, mais votre action va plutôt dans le sens d'une désintégration économique et sociale. La suspension des allocations familiales sera inévitablement vécue comme une punition, une mise au ban de la société. Elle ne fera que renforcer l'isolement de certaines familles.
Votre surenchère démagogique vous fait aller à l'encontre de l'intérêt même des enfants, qui sont les premiers destinataires des prestations familiales.
Pour toutes ces raisons, nous ne voterons pas cet article 3.
Le contrat d'accueil et d'intégration pour la famille prévu par le projet de loi vise, une fois de plus, à sanctionner les parents dont les enfants ont bénéficié du regroupement familial.
Ces mesures ne concernent que les comportements des enfants dont les parents sont responsables et pour lesquels ils peuvent être sanctionnés en cas de carences dans l'exercice de l'autorité parentale.
Le but des prestations familiales est de pourvoir aux besoins de la famille : elles ont pour objet l'entretien et l'éducation des enfants. Leur mise sous tutelle ne peut avoir pour cause qu'un manquement des parents à leurs obligations liées à l'exercice de l'autorité parentale.
Quel est le rapport entre le non-respect du contrat d'accueil et d'insertion pour la famille et l'exercice de l'autorité parentale et l'éducation des enfants ? Quel rapport y a-t-il entre l'absentéisme d'un enfant à l'école résultant de la négligence de ses parents et la méconnaissance de la langue française ?
En fait, les familles étrangères seront sanctionnées financièrement pour défaut d'intégration sur le fondement de dispositions prévues pour les cas de manquement à l'exercice de l'autorité parentale.
Cet article est discriminatoire : les familles françaises ne sont pas concernées par ces mesures, seules les familles étrangères seront sanctionnées. Les familles françaises qui méconnaissent les valeurs de la République ou dont la connaissance de la langue française est très mauvaise sont-elles sanctionnées ? Non !
Je rappelle que, dans ses décisions du 13 août 1993 et du 22 janvier 1990, le Conseil constitutionnel a, pour une fois, affirmé le principe d'égalité entre familles françaises et familles étrangères s'agissant du bénéfice d'une prestation familiale.
Cette décision est si exceptionnelle que je vais me permettre de vous la rappeler, monsieur le ministre : le législateur peut prendre à l'égard des étrangers des dispositions spécifiques, mais les étrangers jouissent des droits à la protection sociale, dès lors qu'ils résident de manière stable et régulière sur le territoire français.
Cette décision du Conseil constitutionnel devrait justifier à elle seule la suppression de l'article 3.
Mon intervention ira évidemment dans le même sens.
Alors que le contenu du contrat d'accueil et d'intégration pour la famille est flou, il est impressionnant de voir à quel point les sanctions prévues à l'article 3 sont, elles, précises ! On peut se demander si ce contrat n'a pas été créé dans le seul but de mettre en oeuvre les sanctions dont il est assorti !
Il conviendrait donc, dans un premier temps, de préciser le contenu dudit contrat. En quoi le fait de ne pas le respecter constituera-t-il une faute ? Quelle sera la nature de cette faute ? Comment d'ailleurs qualifier le non-respect du contrat ? Comment va-t-on démontrer que l'enfant souffre du non-respect du contrat alors que ses parents seront sanctionnés pour manquement à son éducation ? Le lien entre non-respect du contrat et manquement à l'éducation est loin d'être évident !
Par ailleurs, comment ce contrat d'accueil et d'intégration pour la famille se situe-t-il par rapport au contrat d'accueil et d'intégration mis en place il y a deux ans ? Les personnes immigrées devront-elles respecter les deux ? Les deux contrats seront-ils confondus ?
Par ailleurs, outre le fait que les sanctions encourues sont disproportionnées compte tenu du flou qui règne autour de ce contrat, comment justifier ces sanctions ? Comment justifier des différences de traitement en raison de l'identité des personnes ?
Dans sa décision du 22 janvier 1990, le Conseil constitutionnel a affirmé l'application du principe d'égalité entre nationaux et étrangers s'agissant du bénéfice d'une prestation sociale non contributive.
Par ailleurs, la Cour de cassation a déjà eu l'occasion, en avril 2004, de faire application de cette jurisprudence pour censurer l'exclusion du bénéfice des allocations familiales au seul motif que l'enfant serait entré sur le territoire hors regroupement familial.
Saisie sur cette même question, la Haute Autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité, la HALDE, avait en 2006 qualifié cette exclusion de discriminatoire. Je suppose que vous savez tout cela, monsieur le ministre !
Avec ce contrat d'accueil et d'intégration pour la famille, vous instaurez encore plus d'inégalité, au mépris des principes constitutionnels de non-discrimination.
Il faut cesser d'établir un lien entre des choses qui n'en ont pas entre elles. Il faut distinguer le regroupement familial, qui est une mesure de justice en soi, de respect des droits humains ; l'intégration, qui est un devoir du pays envers les étrangers - à cet égard, sans doute peut-on parler de contrat entre l'étranger et le pays d'accueil - ; enfin, il y a la responsabilité des parents à l'égard de leurs enfants. Ce sont trois choses différentes.
Je suis saisi de huit amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L'amendement n° 87 est présenté par Mme Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.
L'amendement n° 132 est présenté par Mme M. André, MM. Mermaz, Collombat, Badinter, Dreyfus-Schmidt, Frimat, Peyronnet, Sueur et Yung, Mme Boumediene-Thiery, M. Assouline, Mme Cerisier-ben Guiga et Khiari, M. S. Larcher, Mme Tasca et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, pour présenter l'amendement n° 87.
Après un an de mise en oeuvre des contrats existants, le bilan pose tout de même quelques problèmes : il n'y a pas toujours d'interprète présent, l'approche sociale est insuffisante, la journée de formation civique est trop dense, trop longue et inadaptée, les formations linguistiques sont insuffisantes.
De plus, pour financer le contrat d'accueil et d'intégration, le FASILD, le Fonds d'action et de soutien pour l'intégration et la lutte contre les discriminations, a dû se désengager de certains dispositifs qui étaient pourtant nécessaires, car ils contribuaient à l'intégration des populations immigrées ou issues de l'immigration.
De la même façon que nous avions dénoncé le contrat d'accueil et d'intégration pour les primo-arrivants, nous dénonçons ce contrat pour les familles.
Avec un tel article, sous couvert d'intégration par la culture, on jette le discrédit sur des familles, comme si, par essence, elles n'étaient pas capables de respecter d'elles-mêmes les valeurs de la République.
Pour l'essentiel, notre collègue Bariza Khiari a dit pour quelles raisons nous souhaitons la suppression de l'article 3.
Pour ma part, je m'interroge sur la pertinence de ce nouveau contrat d'accueil et d'intégration propre à la famille alors que le contrat d'accueil et d'intégration, qui n'a été mis en place que récemment, n'a pas encore fait l'objet d'une évaluation, notamment au regard des efforts qu'il demande aux services sociaux. Je précise d'ailleurs que ces travailleurs sociaux relèvent souvent des conseils généraux ou des communes.
Ne peut-on pas supprimer la possibilité pour le préfet de saisir le président du conseil général, qui a - vous le savez, monsieur le président, car vous être vous-même président d'un conseil général - bien d'autres préoccupations. Peut-être pourrions-nous alléger nos tâches dans ce domaine ?
L'amendement n° 5, présenté par M. Buffet, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Dans la deuxième phrase du premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 311-9-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, après les mots :
ils concluent
insérer le mot :
conjointement
La parole est à M. le rapporteur.
Le contrat d'accueil et d'intégration pour la famille doit être conclu par les deux parents.
Cet amendement vise à ce que la conclusion du contrat soit effectuée conjointement, c'est-à-dire par les deux parents ensemble, afin qu'il soit commun à la famille dans son intégralité.
L'amendement n° 6 rectifié, présenté par M. Buffet, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Après les mots :
les devoirs des parents en France
compléter la deuxième phrase du premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 311-9-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, par les mots :
, ainsi qu'à respecter l'obligation scolaire
La parole est à M. le rapporteur.
Cet amendement vise à intégrer dans le contrat d'accueil et d'intégration pour la famille, le respect de l'obligation scolaire des enfants, en plus de l'obligation de formation.
Le sous-amendement n° 69, présenté par Mme Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet et MM. Desessard et Muller est ainsi libellé :
Dans le dernier alinéa de l'amendement n° 6, remplacer le mot :
scolaire
par les mots :
d'instruction mentionnée à l'article L. 131-1 du code de l'éducation
La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.
Cet amendement vise à corriger la confusion faite, peut-être volontairement, dans l'amendement n° 6 de la commission des lois entre les mots « scolarisation » et « instruction ». En effet, ces deux mots ne désignent pas la même réalité.
Je vous rappelle que, en France, c'est non pas la scolarisation qui est obligatoire, mais l'instruction. La scolarisation n'est que l'une des modalités du respect de cette obligation.
L'article L. 131-2 du code de l'éducation, tel qu'il résulte de la loi du 23 avril 2005, prévoit que « l'instruction obligatoire peut être donnée soit dans les établissements ou écoles publics ou privés, soit dans les familles par les parents, ou l'un d'entre eux, ou toute personne de leur choix ».
S'il était adopté, l'amendement n° 6, qui vise à instituer une obligation de scolarisation pour les seuls enfants d'étrangers, serait, une fois de plus, contraire au principe d'égalité.
Soit l'amendement n° 6 présente une erreur de qualification de l'obligation, soit il vise à rendre obligatoire la scolarisation pour les seuls enfants d'étrangers. Dans ce cas, l'amendement est contraire au principe d'égalité.
Au mieux, ce sous-amendement est rédactionnel, au pire, il tend à modifier de façon substantielle l'amendement n° 6.
L'amendement n° 88, présenté par Mme Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen est ainsi libellé :
Supprimer les deuxième et troisième alinéas du texte proposé par cet article pour l'article L. 311-9-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.
Les dispositions prévues à l'article L. 222-4-1 du code de l'action sociale et des familles sont censées sanctionner les fautes ou les carences des détenteurs de l'autorité parentale.
L'article 3 prévoit d'étendre ces sanctions au non-respect du contrat d'accueil et d'intégration pour la famille. Mais en quoi le non-respect de ce contrat peut-il être assimilé à un manquement des parents à leurs devoirs d'éducation de leurs enfants ? Quel est le rapport entre les deux ?
Un tel projet est discriminatoire, je l'ai déjà dit. En outre, la sanction prévue est excessive et totalement contraire aux engagements internationaux de la France, notamment à la Convention relative aux droits de l'enfant.
Si une différence de traitement peut être admise dès lors qu'elle est fondée sur une différence de situation ou des considérations d'intérêt général, la Cour européenne des droits de l'homme exige cependant qu'une telle différence soit toujours fondée sur une justification objective et raisonnable, ou, pour reprendre la formule de 1973 du Conseil constitutionnel, que « la différence de traitement [...] soit en rapport direct avec l'objet de la loi qui l'établit ».
Or la justification avancée pour exclure les ressortissants étrangers du bénéfice des allocations familiales n'est à l'évidence ni objective ni raisonnable. En effet, le fait que des parents ne respectent pas les obligations résultant du contrat d'accueil et d'intégration pour la famille ne signifie pas qu'ils ne remplissent pas leurs obligations éducatives vis-à-vis de leurs enfants.
Par ailleurs, il est déraisonnable de supprimer des allocations destinées à l'entretien et à l'éducation des enfants, car, chacun le sait, ce sont eux qui seront punis.
Plus globalement, le contrat prévu par l'article 3 ne nous paraît pas être garant d'intégration. L'intégration est un phénomène complexe, qui ne se résume pas à quelques leçons sur les valeurs de la République !
L'amendement n° 51, présenté par Mme Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet et MM. Desessard et Muller est ainsi libellé :
Supprimer le deuxième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 311-9-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.
Les mesures prévues par le code de l'action sociale et des familles ne concernent que les comportements des enfants dont les parents sont responsables, comme je l'ai déjà dit, et en cas de carence dans l'exercice de l'autorité parentale.
À cet égard, j'ai rappelé tout à l'heure la décision du Conseil constitutionnel : le législateur ne peut prendre de décisions différentes en termes de protection sociale pour les personnes étrangères, dès lors que celles-ci résident de manière stable et régulière sur le territoire français.
L'article 3 introduit une rupture du principe d'égalité.
L'amendement n° 7, présenté par M. Buffet, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le deuxième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 311-9-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile :
« En cas de non-respect des stipulations de ce contrat, manifesté par une volonté caractérisée de l'étranger ou de son conjoint, le préfet peut saisir le président du conseil général en vue de la mise en oeuvre du contrat de responsabilité parentale prévue à l'article L. 222-4-1 du code de l'action sociale et des familles.
La parole est à M. le rapporteur.
Dans sa rédaction initiale, le projet de loi prévoyait que le préfet pourrait saisir le président du conseil général en cas de non-respect du contrat d'accueil et d'intégration pour la famille.
Dans ces conditions, le président du conseil général aurait alors mis en oeuvre le contrat de responsabilité parentale et, en cas d'échec, aurait pu demander la suspension des prestations familiales ou leur mise sous tutelle.
Toutefois, ce mécanisme de saisine du président du conseil général par le préfet a été remis en cause à la suite de l'adoption par les députés d'un amendement parlementaire visant à substituer le préfet au président du conseil général.
Ainsi, en cas de non-respect manifeste du contrat d'accueil et d'intégration familial, le préfet pourrait directement décider soit de suspendre le versement des allocations familiales, soit de saisir lui-même le procureur de la République de faits susceptibles de constituer une infraction pénale, soit de saisir l'autorité judiciaire, afin qu'elle mette en place une mesure d'aide à la gestion du budget familial, en clair, une mise sous tutelle des prestations familiales.
Une telle rédaction laisse penser que le préfet pourrait prendre diverses sanctions sans qu'un contrat de responsabilité ait, au préalable, été conclu.
Or tel n'est pas, me semble-t-il, l'esprit du contrat de responsabilité parentale, les sanctions éventuelles ne devant intervenir que si le refus des parents de collaborer est constaté.
Par conséquent, l'amendement n° 7 a pour objet de revenir à la rédaction initiale du Gouvernement.
Le sous-amendement n° 71, présenté par Mmes Boumediene - Thiery, Blandin et Voynet, MM. Desessard et Muller, est ainsi libellé :
Dans le second alinéa de l'amendement n° 7, après le mot :
stipulations
insérer les mots :
relatives à l'exercice de l'autorité parentale
La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.
L'article 3 institue des sanctions financières pour les parents dont l'enfant a bénéficié d'un regroupement familial.
À cet égard, la correction que l'amendement n° 7 vise à apporter rendrait le texte plus acceptable, mais il demeure tout de même insuffisant.
Ce sous-amendement a donc pour objet de compléter l'amendement de la commission des lois, en précisant que seul le non-respect des stipulations du contrat relatives à l'exercice de l'autorité parentale pourra donner lieu à la saisine du président du conseil général.
L'amendement n° 89, présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen - Seat, Mathon - Poinat et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Supprimer le troisième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 311-9-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.
Vous trouverez peut-être que nous insistons beaucoup sur le sujet, mais il est très important.
Le fait que le non-respect du contrat d'accueil et d'intégration pour la famille puisse conduire au non-renouvellement de la carte de séjour nous semble disproportionné.
En effet, d'une manière générale, il est aujourd'hui de bon ton de contractualiser les relations entre l'État et les citoyens. Or, en droit civil, un contrat implique, pour chaque partie, des obligations assorties de sanctions en cas de non-respect. S'agissant du contrat d'accueil et d'intégration, quelles seront les sanctions pour l'État si ce dernier faillit à sa mission d'intégration ?
D'ailleurs, intituler le contrat qui nous est proposé « contrat d'accueil et d'intégration » me semble déjà disproportionné, tant l'intégration renvoie à des considérations plus complexes que ce dispositif.
De fait, la personne censée n'être qu'une des deux parties au contrat sera la seule susceptible d'être sanctionnée en cas d'échec. C'est totalement anormal.
Avant de réformer une nouvelle fois le regroupement familial, il vaudrait mieux veiller à faire en sorte que la procédure se déroule dans des conditions normales et respectueuses de la dignité des personnes. Il n'est pas acceptable que les délais moyens de traitement des demandes atteignent dix-huit mois dans certains départements, alors que le délai légal est de six mois. Outre une séparation extrêmement difficile à supporter pour les familles, ces délais abusifs peuvent faire courir des risques à certaines personnes, notamment aux conjoints de réfugiés.
Alors que les contrats d'accueil et d'intégration déjà mis en place souffrent d'importantes carences qui ne sont pas sanctionnées - ce n'est pas moi qui les dénonce, ce sont les praticiens -, on voudrait punir les personnes qui n'en appliquent pas les dispositions à la lettre. Avouez que c'est tout de même un peu curieux. D'ailleurs, sur quelles bases ces personnes seront-elles sanctionnées ? Avec quelles justifications ? Et quels seront les recours possibles ? Sur tous ces points, le projet de loi reste muet et laisse place à l'arbitraire le plus total.
Arrêtons donc de parler de contrat, car il n'y a aucun contrat entre l'État et la personne étrangère. Encore une fois, il s'agit d'une mesure destinée à faire pression sur les étrangers, que l'on considérera toujours un peu fautifs pour se donner de bonnes raisons de les renvoyer dans leur pays ou de ne pas leur accorder de titre de séjour.
Aussi, face au flou qui entoure ce contrat d'accueil et d'intégration, il nous paraît totalement injustifié de sanctionner son non-respect par une privation de carte de séjour.
Quel est l'avis de la commission sur les deux sous-amendements et sur les cinq amendements qui n'émanent pas d'elle ?
La commission émet un avis défavorable sur les deux amendements identiques n° 87 et 132, qui sont des amendements de suppression.
S'agissant du sous-amendement n° 69, l'obligation scolaire est, en réalité, le terme générique du chapitre Ier du titre III du livre Ier du code de l'éducation.
Cela comprend le fait de suivre non seulement un enseignement primaire et secondaire, mais également, d'une manière plus générale, tout type de formation. Il s'agit donc d'un terme générique, qui permet de disposer d'une rédaction commune à tous les textes législatifs et d'éviter de recourir à des dérogations systématiques.
Par conséquent, la commission demande le retrait de sous-amendement, faute de quoi elle émettrait un avis défavorable.
L'avis de la commission est également défavorable sur les amendements n° 88 et 51, qui visent à supprimer certaines dispositions instituées par l'article 3.
En outre, la précision que le sous-amendement n° 71 tend à apporter nous semble beaucoup trop large. La commission émet donc également un avis défavorable sur ce sous-amendement.
Enfin, la commission émet un avis défavorable sur l'amendement n° 89, qui a pour objet la suppression de la possibilité de ne pas renouveler le titre de séjour pour un l'étranger ne respectant pas le contrat d'accueil et d'intégration.
Quel est l'avis du Gouvernement sur l'ensemble des amendements et des sous-amendements?
Le Gouvernement émet un avis défavorable sur les amendements identiques n° 87 et 132, qui visent à supprimer l'article 3, et sur les amendements n° 88, 51 et 89, qui tendent à en supprimer certaines dispositions.
En revanche, le Gouvernement émet un avis favorable sur l'amendement n° 5. En réalité, je souscris totalement aux deux idées défendues par M. le rapporteur, à savoir une égalité stricte entre le père et la mère et l'importance de l'engagement conjoint des deux parents dans l'intérêt des enfants.
Toutefois, j'aurais peut-être une nuance avec M. le rapporteur s'agissant du sous-amendement n° 69, qui a été déposé par Mme Boumediene-Thiery. Je vous le rappelle, ce sous-amendement vise à préciser la rédaction de l'amendement n° 6, en remplaçant l'expression « obligation scolaire » par les mots : « obligation d'instruction ». Monsieur le rapporteur, une telle rédaction me semble plus exacte.
Mme Alima Boumediene-Thiery sourit.
L'avis est également favorable sur l'amendement n° 6, sous-amendé par le sous-amendement n° 69. La principale obligation des parents, qu'ils soient français ou étrangers d'ailleurs, est d'envoyer les enfants à l'école. C'est par l'école que les plus jeunes pourront s'intégrer et acquérir les savoirs nécessaires pour vivre dans la société française et pour trouver ensuite un travail.
Je suis donc très favorable à cet amendement. En effet, ajouter le respect de l'obligation scolaire à la formation sur les droits et devoirs des parents contribuera à les responsabiliser. Je le précise d'ailleurs, un décret d'application fixera les moyens par lesquels, au terme d'une année scolaire, les parents pourront établir que les enfants auront effectivement suivi leur scolarité.
Le Gouvernement émet un avis défavorable sur le sous-amendement n° 71.
J'en viens à présent à l'amendement n° 7, qui a pour objet de revenir au dispositif initial du projet de loi s'agissant de la sanction du non-respect des obligations du contrat d'accueil et d'intégration pour la famille.
L'Assemblée nationale a souhaité que le préfet à l'origine du contrat en assure le suivi jusqu'à son terme, alors que notre projet initial était de tenir compte de l'évolution des responsabilités entre le préfet et les conseils généraux.
Pour ma part, je fais confiance au Sénat, qui est le représentant naturel des collectivités territoriales, pour élaborer un système institutionnel susceptible de donner au contrat d'accueil et d'intégration pour la famille les meilleures chances d'efficacité. Je m'en remets donc à la sagesse de la Haute Assemblée.
Je souhaite apporter une précision à propos du sous-amendement n° 69, sur lequel j'avais émis un avis défavorable.
Entendons-nous bien. La rédaction qui est proposée par Mme Boumediene-Thiery est différente de la nôtre, mais nous avons bien le même objectif.
Dès lors, puisque le Gouvernement a émis un avis favorable sur ce sous-amendement, nous pouvons le suivre.
Notre volonté était simplement de disposer d'une rédaction commune à tous les textes législatifs. En revanche, il n'y a aucune difficulté sur le fond.
Les amendements ne sont pas adoptés.
L'amendement est adopté.
La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote sur le sous-amendement n° 69.
Pour ma part, je ne comprends pas très bien le sens de ce sous-amendement n° 69.
Ce dispositif concerne les enfants qui sont nés dans des familles immigrées. Leur instruction pourrait, nous dit-on, être assurée par les parents ou par toute personne de leur choix.
Or, à mon sens, l'intégration doit s'effectuer par l'école de la République, et beaucoup d'entre nous qui sont nés de familles immigrées ont suivi leur scolarité sur les bancs de l'école de la République. C'est elle qui est, me semble-t-il, garante de l'intégration et de l'égalité.
Je ne vois donc pas très bien l'intérêt de remplacer l'obligation scolaire par l'obligation d'instruction. Je suis tout à fait prête à comprendre le sens d'une telle substitution, mais je voudrais que l'on me l'explique.
Mon intervention va exactement dans le sens des propos de Mme Goulet.
Avons-nous des ennemis dans ce débat ? Non. Les étrangers qui choisissent de venir en France pour y séjourner régulièrement ne sont pas nos ennemis. Ils sont même les bienvenus.
Murmures sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.
Avons-nous un ennemi ? Oui. Le communautarisme, voilà l'ennemi. Nous sommes ici dans une institution de la République. Nous voulons une France républicaine, composée de citoyens, où il n'y ait pas de communautés refermées sur elles-mêmes.
C'est pourquoi le sous-amendement n° 69 me gêne, madame Boumediene-Thiery.
En effet, l'une des façons de briser le communautarisme est d'éviter certaines singularités ouvertes à des populations françaises, singularités qui permettent, d'une manière exceptionnelle et très particulière, une instruction, des enseignements, repliés sur eux-mêmes. C'est exactement le contraire que nous souhaitons. Nous voulons l'ouverture. Pour nous, l'école est émancipatrice.
C'est la raison pour laquelle, pour une fois, je suis en désaccord avec vous, monsieur le ministre. Je souhaite que le sous-amendement n° 69 soit repoussé par le Sénat, pour favoriser l'obligation scolaire.
Le terme d'« instruction » me semble tout à fait valable étant donné les difficultés de scolarisation que peuvent rencontrer certaines familles, et je suivrai le Gouvernement.
La parole est à Mme Monique Cerisier-ben Guiga, pour explication de vote.
Je regrette une telle divergence d'appréciation entre nous.
Certes, voilà plus de cent ans, le code de l'éducation prévoyait effectivement la possibilité que l'instruction soit dispensée à domicile.
En effet, certains enfants avaient alors des précepteurs ou des gouvernantes et n'allaient à l'école - ce fut le cas pour André Gide - qu'une fois les bases de leur éducation déjà acquises en famille. Mais reconnaissons que cette époque est tout de même révolue.
J'ai connu personnellement ce type d'éducation, dans l'ouest de la France, au sein de familles extrêmement conservatrices qui trouvaient qu'aucune institution religieuse de la région n'était suffisamment traditionaliste pour bien éduquer leurs enfants...
...et qui les gardaient le plus longtemps possible à la maison. Ces familles attendaient la préparation au baccalauréat avant d'oser mettre leurs enfants à Notre-Dame-de-Sion ou dans toute autre institution de la ville parce que celles-ci étaient jugées trop gauchistes !
Je vois bien ce qui se passe dans des familles venues du Maghreb ou d'Afrique, extrêmement réactionnaires, voire obscurantistes. Je n'ai pas envie que des enfants issus de l'immigration aujourd'hui connaissent la même situation que certaines de mes camarades de classe voilà soixante ans.
Le communautarisme est un danger qui menace plus que jamais notre pays ; c'est un danger qui menace ces enfants. Nous voyons bien ce que cela donne en Grande-Bretagne et nous n'avons pas envie d'aboutir au même résultat en France.
Je suis donc totalement hostile à ce sous-amendement. J'estime, à cette occasion, qu'il faudrait envisager de modifier le code de l'éducation.
M. Gérard Longuet applaudit.
Au-delà des arguments développés par les uns et les autres, je rappelle que, selon la règle posée par Jules Ferry et toujours en vigueur, l'obligation scolaire peut s'accomplir hors de l'école publique et notamment à la maison. Or cette règle n'a jamais été remise en cause par la République. C'est clair !
J'ai assisté hier à une partie du débat et j'entendais sans cesse mettre en garde le Gouvernement sur le thème : « Vous allez introduire une discrimination entre les étrangers et les Français ! » Or, si je m'en tiens à l'amendement de la commission exprimé dans son sens strict, les étrangers en situation irrégulière ne pourraient pas satisfaire l'obligation scolaire en éduquant leurs enfants à la maison. Nous créons donc une discrimination entre les Français et les étrangers en situation irrégulière.
La rupture du principe d'égalité, dont on a parlé hier tout l'après-midi, quelquefois même à tort dans certaines circonstances, est ici patente et, si le Conseil constitutionnel n'annule pas, il rendra au moins une décision interprétative en indiquant que l'obligation scolaire peut être satisfaite à la maison pour tout le monde, Français ou étrangers.
Mais, mes chers collègues, quand nous avons dit cela, nous n'avons rien dit si nous ne rappelons pas que le fait de satisfaire l'obligation scolaire à la maison relève d'abord du contrôle et de l'autorisation du maire, et d'aucune autre autorité ! C'est le maire qui doit régulièrement - en principe tous les mois - aller dans la famille pour vérifier les conditions dans lesquelles est respectée l'obligation scolaire.
Si le maire constate une défaillance, il doit saisir l'inspecteur d'académie qui exerce le contrôle pédagogique et peut alors mettre un terme à l'expérience familiale si elle lui paraît de nature à compromettre les intérêts de l'enfant.
Par conséquent, mes chers collègues, quel que soit votre choix - l'amendement de M. Buffet modifié ou non par Mme Boumediene-Thiery - il n'empêche que le principe d'égalité est, en France, au-dessus de toute autre considération, et que vous ne pourrez pas obtenir que ce qui est autorisé pour les enfants français ne le soit pas pour les enfants étrangers.
Il vous restera, monsieur le ministre, à envoyer des instructions extrêmement strictes aux préfets et aux maires pour qu'ils fassent respecter normalement l'obligation scolaire dans ces cas-là et pour qu'ils veillent en particulier à ce que le programme de l'enseignement soit bien respecté par les familles, sans que soit mêlé le communautarisme ou le religieux au programme de base enseigné à tous les petits citoyens qui vivent sur le territoire de la République.
Voilà, monsieur le président, ce que je voulais dire.
Je voudrais ajouter un point, si vous me le permettez, ce qui m'évitera de reprendre la parole ultérieurement.
Monsieur le ministre, je sens monter actuellement un certain malaise parmi les maires de France, dont le congrès national ne devrait pas tarder à se faire l'écho : il s'agit de la question des limites à l'action d'un maire pour venir en aide à un étranger en situation irrégulière sans tomber sous le coup de l'aide à séjour irrégulier.
Il y a plusieurs circonstances.
Qu'en est-il des parrainages ? Sont-ils considérés comme une aide à séjour irrégulier ou pas, étant entendu que je fais la distinction entre les cas dans lesquels le maire sort de sa poche l'argent nécessaire pour aider personnellement l'étranger sur ses deniers et ceux dans lesquels il laisse à l'État le soin de tout payer ?
Ensuite, je voudrais citer la récente affaire de la cantine de Digoin. À partir du moment où les maires acceptent les enfants étrangers à l'école - c'est l'obligation scolaire -, il paraît difficile qu'ils leur interdisent l'accès à la cantine dans les mêmes conditions qu'aux autres enfants français ou étrangers en situation régulière, ainsi que le bénéfice des services sociaux et des subventions de la commune si celle-ci accorde des aides aux familles pour alléger le coût des repas.
Dans ce cas, est-ce une aide à séjour irrégulier ou pas ?
Enfin, le bureau d'aide sociale de la commune est fait pour venir en aide aux personnes de toute nationalité et de toute condition qui sont en situation d'urgence. Comment le maire, pour ne pas tomber sous le coup de la loi, peut-il faire l'arbitrage entre la non-assistance à personne en danger et l'interdiction d'apporter un soutien abusif à un étranger en situation irrégulière ?
Monsieur le ministre, cher Brice Hortefeux, je souhaiterais que les préfets reçoivent des instructions claires qui puissent être communiquées aux maires, de façon qu'ils sachent sur quel pied danser et qu'ils ne se trouvent pas soumis localement aux fantaisies de ceux qui voudront faire du zèle et menaceront de les poursuivre, dans des conditions, comme on dit dans notre chère Auvergne, « maltapropos » !
Je voudrais simplement rappeler que l'obligation scolaire telle qu'elle est prévue dans l'amendement est celle qui s'applique à tout enfant, français ou étranger. Il n'y a donc pas lieu de débattre d'une éventuelle différence de traitement : ce sera exactement le même traitement pour tous, français ou étrangers.
L'amendement s'inscrit bien dans le cadre de l'obligation existante, qui répond à des règles applicables définies depuis longtemps, et ne change rien sur ce point.
J'ajoute que l'instruction dispensée à la maison est placée sous le contrôle de l'inspecteur d'académie.
Le respect de l'obligation relève du maire et le contrôle, de l'inspecteur d'académie.
L'obligation scolaire, telle que je l'ai proposée dans l'amendement, ne crée aucune distinction entre les enfants. Les principes qui régissent aujourd'hui notre système seraient identiques pour tout le monde. Cet amendement ne présente donc pas de difficulté.
Monsieur le président, j'ai pris tout à l'heure position sur le sous-amendement n° 69. Les interrogations qu'il suscite montrent bien que la question est loin d'être simple ...
... et qu'il n'y a pas unanimité au sein même des groupes. J'ai peut-être pris une position un peu rapide en émettant un avis favorable et, compte tenu des précisions qui ont été apportées depuis, je m'en remets à la sagesse de la Haute Assemblée.
M. Michel Charasse a abordé un problème qu'il a, je crois, l'intention de soulever dans le cadre de ses responsabilités de président de l'association départementale des maires du Puy-de-Dôme. J'aurai sans doute alors l'occasion de lui répondre.
J'ai oublié de dire tout à l'heure que la scolarisation à domicile - notre collègue Gouteyron, qui a été inspecteur général de l'éducation nationale, connaît le sujet - représente entre 1 % et 2 % des enfants français.
Si vous constatiez un pourcentage supérieur en ce qui concerne les enfants étrangers en situation régulière ou irrégulière, alors, oui, Gérard Longuet, il y aurait lieu de s'en inquiéter et de renforcer les mesures de contrôle de l'exécution de l'obligation scolaire et de la qualité de l'enseignement. Mais cela relève des circulaires adéquates à adresser aux autorités administratives, préfets, maires, inspecteurs d'académie...
Le sous-amendement n'est pas adopté.
L'amendement est adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
Le sous-amendement n'est pas adopté.
L'amendement est adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
La parole est à Mme Monique Cerisier-ben Guiga, pour explication de vote sur l'article 3.
Ce qui frappe dans le contrat d'accueil et d'intégration pour la famille, c'est son aspect à la fois idéologique et coercitif. Aucune des centaines d'études réalisées depuis des décennies sur les conditions d'adaptation, puis d'intégration des millions de familles migrantes - et les bibliothèques du monde entier en sont remplies - n'est prise en compte !
Avec ce type de disposition, nous sommes en train de rendre plus difficile l'intégration des familles au lieu de l'accompagner et de la faciliter.
La Cour des comptes avait indiqué dans son rapport intitulé, publié en 2004, que la politique d'intégration bénéficiait d'un bien moindre effort financier que la politique de contrôle des flux.
Non seulement nous n'accordons pas des moyens suffisants à l'accueil des immigrants, mais encore le côté coercitif de notre politique est particulièrement nuisible à l'éducation des enfants dans les familles migrantes.
Je vous demande simplement, mes chers collègues, de vous référer à votre propre expérience de parents français en France, qui n'est pas différente de celle des familles de migrants. Tout ce que nous savons sur l'éducation des enfants en général, et sur les enfants de migrants en particulier, milite contre toutes les mesures qui dévalorisent les parents et ruinent leur autorité.
Si la confiance des parents dans leur propre capacité à éduquer est sapée par des mesures coercitives au lieu d'être renforcée par des mesures d'accompagnement, ils cessent de jouer leur rôle, qui est de transmettre des normes de comportements - humains, moraux, sociaux - dans un climat où l'affection et la sanction savent aller de pair.
Si les parents renoncent à ce rôle parce qu'on leur a fait perdre, par des mesures comme celles que vous proposez, toute confiance en leurs capacités, il n'y aura pas d'éducation, en tout cas pas d'éducation réussie. Je me réfère ici, notamment, aux travaux de Mme Claude Halmos, une psychanalyste spécialiste de l'éducation qui traite de manière très sensée de ces problèmes.
J'en appellerai également à notre propre expérience, celle de représentants des Français établis hors de France, celle d'expatriés qui ont dû accomplir un important travail sur eux-mêmes et sur leur famille pour s'adapter à leur pays d'accueil - et je préfère de beaucoup le terme d'adaptation à celui d'intégration.
Nos collègues sénateurs français de l'étranger présents aujourd'hui en séance le savent : nous avons pu vivre à l'étranger pendant des décennies sans jamais nous intégrer réellement mais en nous adaptant et en étant parfaitement à l'aise !
Demandons donc aux migrants qui se trouvent en France de s'adapter, et non de s'intégrer dès leur arrivée, car ce serait absurde : nous, les expatriés, devons accomplir un travail formidable, dont vous semblez d'ailleurs n'avoir aucunement conscience, monsieur le ministre, qui consiste à garder notre fierté et notre dignité, enracinées dans notre vécu, et, simultanément, à accepter d'autres normes, pour nous et, plus encore, pour nos enfants. C'est difficile, parfois même déchirant, mais les millions de migrants qui vivent à travers le monde prouvent tous les jours que c'est possible !
Monsieur le ministre, votre coercition travestie de paternalisme n'aide pas les familles migrantes à réussir l'éducation et l'adaptation de leurs enfants, pas plus qu'elle ne facilite leur propre adaptation à la société française.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat applaudit.
L'article 3 est adopté.
L'article L. 311-9 du même code est ainsi modifié :
1° Dans la quatrième phrase du deuxième alinéa, les mots : «, le cas échéant, » sont supprimés ;
2° Il est ajouté un II ainsi rédigé :
« II. - Un décret détermine les situations dans lesquelles le bilan de compétences n'est pas proposé. »
L'amendement n° 8, présenté par M. Buffet, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le 2° de cet article :
2° Le dernier alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Il fixe les situations dans lesquelles le bilan de compétences n'est pas proposé. »
La parole est à M. le rapporteur.
Favorable.
L'amendement est adopté.
L'article 3 bis est adopté.
Dans le troisième alinéa de l'article L. 311-9 du même code, les mots : « il peut être tenu » sont remplacés par les mots : « l'autorité administrative tient ».
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 90 est présenté par Mme Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.
L'amendement n° 133 est présenté par Mme M. André, MM. Mermaz, Collombat, Badinter, Dreyfus-Schmidt, Frimat, Peyronnet, Sueur et Yung, Mme Boumediene-Thiery, M. Assouline, Mme Cerisier-ben Guiga et Khiari, M. S. Larcher, Mme Tasca et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Éliane Assassi, pour présenter l'amendement n° 90.
Nous l'avons vu, le non-respect du contrat d'accueil et d'intégration peut être sanctionné par le non-renouvellement de la carte de séjour. Lors du débat à l'Assemblée nationale, M. Mariani - encore lui ! - a déposé un amendement visant à rendre systématique la prise en compte par le préfet de ce non-respect du contrat d'accueil. Ce texte a été adopté et il est devenu l'article que nous examinons aujourd'hui.
Comme nous nous sommes efforcés de le démontrer au cours des débats, le contrat d'accueil et d'intégration constitue un concept relativement flou et empreint de jugements de valeur. Son efficacité au bout de deux ans d'existence ne peut être prouvée ; sa compatibilité avec le nouveau contrat d'accueil et d'intégration des familles n'est pas vraiment définie ; les obligations de l'État à l'égard de l'autre partie contractante ne sont pas précisées et les populations immigrées ne disposent d'aucun recours possible pour contester l'application de ce contrat. En revanche, lorsque l'administration a jugé qu'une personne ne respectait pas les termes de ce contrat, la sanction est claire et rapide : on lui retire sa carte de séjour.
L'article 3 ter ne fait que renforcer cet acharnement à l'égard des populations immigrées. Chers collègues, ne nous voilons pas la face : ce contrat d'accueil et d'intégration ne constitue qu'un moyen supplémentaire pour juguler les flux migratoires ! Il est question ici non pas de politique humaniste d'intégration, et encore moins d'action sociale et culturelle, mais de décisions arbitraires et d'une logique purement comptable.
Nous demandons donc la suppression de cet article.
L'article 3 ter, introduit par l'Assemblée nationale, vise à lier plus fortement la compétence du préfet en cas de non-respect du contrat d'accueil et d'intégration manifesté par une volonté caractérisée.
Dans sa rédaction actuelle, l'article L. 311-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose seulement que le préfet « peut tenir compte » du non-respect du contrat d'accueil et d'intégration au moment du premier renouvellement du titre de séjour.
Aux termes du présent article, l'autorité administrative « tient compte » du non-respect du contrat, et ce qui n'était qu'une faculté devient pour le préfet une obligation. Nous nous opposons à cette systématisation, à laquelle nous préférons une analyse au cas par cas, beaucoup plus humaine.
Nous demandons donc la suppression de cet article.
La commission a émis un avis défavorable sur ces deux amendements de suppression, car elle considère que le refus de respecter le contrat d'accueil et d'intégration doit nécessairement être pris en compte par l'autorité administrative.
M. Roger Karoutchi, secrétaire d'État. Le Gouvernement émet naturellement un avis défavorable sur ces deux amendements de suppression. Le CAI est d'abord un contrat
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat s'exclame.
C'est un contrat qui ne lie qu'une seule des parties ! Au moins, désormais, la chose est dite !
Les amendements ne sont pas adoptés.
L'article 3 ter est adopté.
L'amendement n° 198, présenté par MM. Gouteyron, Courtois, J. Gautier et Demuynck et Mme Lamure est ainsi libellé :
Après l'article 3 ter, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le quatrième alinéa de l'article L. 311-9 du même code est complété par la phrase suivante :
« Il en est de même de l'étranger titulaire de la carte de séjour mentionnée au 5° de l'article L. 313 10 ou à l'article L. 315 1 et de son conjoint. »
La parole est à M. Adrien Gouteyron.
Mes chers collègues, lors de mon intervention au cours de la discussion générale, j'ai annoncé cet amendement, cosigné, entre autres, par Jean-Patrick Courtois, Christian Demuynck et Élisabeth Lamure, que j'associe à mon propos.
L'objet de cet amendement est extrêmement clair et simple. Il s'agit de dispenser du contrat d'accueil et d'intégration certaines personnes, très précisément les salariés en mission et les titulaires de la carte de séjour « compétences et talents », car ceux-ci n'ont pas vocation à rester durablement en France.
J'ai pu constater que, dans certains pays, des cadres et des chefs d'entreprise manifestaient leur inquiétude. J'ai aussi lu récemment dans certains journaux que tel ou tel ambassadeur avait exprimé sa préoccupation. Il s'agit là, me semble-t-il, d'un problème très concret que nous devons régler en affirmant l'intention du législateur : le contrat d'accueil et d'intégration n'est pas fait pour ces catégories d'étrangers ; il convient donc de les en dispenser très clairement.
La commission a accepté la proposition de M. Adrien Gouteyron et a émis un avis favorable sur cet amendement.
Le Gouvernement émet un avis très favorable.
Comme je l'ai déjà indiqué, les salariés en mission et les bénéficiaires de la carte « compétences et talents » n'ont pas vocation à demeurer durablement sur notre territoire. Si la carte « compétences et talents » est délivrée au maximum pour six ans, c'est d'ailleurs précisément pour que nous, pays d'accueil, ne risquions pas de piller les pays d'origine en les privant durablement de leurs élites.
La dispense du contrat d'accueil et d'intégration se justifie donc totalement dans ces cas.
Monsieur Gouteyron, je précise que j'avais déjà donné des instructions afin que ces contrats soient gérés avec une grande souplesse, mais l'inscription de cette règle dans la loi constitue à l'évidence une bonne idée.
Est-il nécessaire d'intervenir, tant vos propos, monsieur le ministre, sont extraordinaires ! À vous entendre, les étrangers disposant d'un titre de séjour qui, par définition, est toujours provisoire, seraient censés demeurer durablement sur notre territoire ! On n'y comprend plus rien !
M. le secrétaire d'État qui, tout à l'heure, nous a fait l'honneur de donner l'avis du Gouvernement à votre place a précisé qu'un contrat liait deux parties. Mais lorsque les sanctions s'appliquent à une seule des parties et que l'autre est libre de toute obligation, ce n'est plus un contrat !
Vos explications sont belles et bonnes, mais les étrangers qui ne respecteront pas le CAI seront sanctionnés, alors que rien n'est prévu en cas de manquement de l'autre partie, qui est censée offrir les prestations nécessaires. Appelez ce dispositif comme vous voudrez, mais ce n'est pas un contrat !
En réalité, personne n'est censé demeurer éternellement sur le territoire national - la preuve, c'est que les longs séjours sont de plus en plus limités. Il est absolument anormal d'opérer une distinction au profit de ceux qui ne resteront pas longtemps en France et qui, comme par hasard, sont notamment des cadres ! Mais, de nos jours, sait-on bien ce qui se passe chez les cadres ?
L'amendement est adopté.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 3 ter.
Je rappelle que le Sénat a examiné l'article 4 par priorité lors de sa séance du 3 octobre 2007.
L'amendement n° 96, présenté par Mme Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen est ainsi libellé :
Après l'article 4, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le 4°de l'article L. 313 11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est complété par une phrase ainsi rédigée :
Toutefois, lorsque la communauté de vie a été rompue en raison des violences conjugales que le conjoint étranger a subies de la part de son conjoint français, après le mariage mais avant la première délivrance du titre de séjour, l'autorité administrative doit délivrer ce titre.
La parole est à Mme Éliane Assassi.
Compte tenu du débat que nous avons eu tout à l'heure, lors de l'examen de l'article 2 quater, sur les violences conjugales, je retire cet amendement.
L'amendement n° 96 est retiré.
L'amendement n° 97, présenté par Mme Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen est ainsi libellé :
Après l'article 4, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La deuxième phrase du deuxième alinéa de l'article L. 313 12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est remplacée par deux phrases ainsi rédigées :
Toutefois, lorsque la communauté de vie a été rompue en raison des violences conjugales que le conjoint étranger a subies de la part de son conjoint français, l'autorité administrative doit accorder le renouvellement du titre. En cas de violences commises après le mariage ou l'entrée en France mais avant la première délivrance du titre, l'autorité administrative doit délivrer ce titre.
La parole est à Mme Éliane Assassi.
Après la première phrase du deuxième alinéa de l'article L. 311-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il est inséré une phrase ainsi rédigée :
« Le besoin d'une formation linguistique est apprécié au regard du niveau atteint par l'intéressé lors de l'évaluation prévue à l'article L. 411-8 et au deuxième alinéa de l'article L. 211-2-1. »
Je suis saisi de trois amendements en discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L'amendement n° 95 est présenté par Mme Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.
L'amendement n° 138 est présenté par Mme M. André, MM. Mermaz, Collombat, Badinter, Dreyfus-Schmidt, Frimat, Peyronnet, Sueur et Yung, Mme Boumediene-Thiery, M. Assouline, Mme Cerisier-ben Guiga et Khiari, M. S. Larcher, Mme Tasca et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Robert Bret, pour présenter l'amendement n° 95.
Aux termes de l'article 4 bis, la deuxième évaluation linguistique et civique réalisée à l'issue de la formation suivie dans le pays d'origine et prévue par les articles 1er et 4 du projet de loi sera prise en compte.
Cette seconde évaluation, réalisée au terme de la formation, devra déterminer si les étrangers arrivés en France doivent, ou non, suivre une nouvelle formation linguistique dans le cadre du contrat d'accueil et d'intégration. Là encore, ce second test sera réalisé dans le pays d'origine, bien avant l'arrivée de l'étranger en France.
Mes chers collègues, nous avons suffisamment exprimé nos réserves sur cette formation assurée dans le pays d'origine pour ne pas avoir à revenir sur le fond de cette disposition.
La rédaction de l'article 4 bis, telle qu'elle est issue des travaux de l'Assemblée nationale, comporte un aspect ambigu, et l'amendement n° 10 de la commission tente d'y remédier. Au-delà de ce problème, il me semble paradoxal de prévoir que l'étranger devra suivre une formation linguistique et civique dans son pays, subir ensuite un autre test puis, une fois qu'il sera arrivé en France, suivre de nouveau une formation linguistique et civique, cette fois dans le cadre du contrat d'accueil !
Avouons que le dispositif proposé est tout de même assez alambiqué ! Cette superposition d'évaluations et de formations ne semble ni très opportune ni rationnelle, en premier lieu pour l'étranger lui-même.
Je le rappelle - j'ai déjà défendu cette position lors de la discussion de l'article 4 -, il serait préférable, monsieur le ministre, que la législation française énonce non pas une obligation, mais un droit à la formation. Nous considérons que cette dernière pourrait être dispensée dans le pays d'accueil, c'est-à-dire dans notre pays, et non dans le pays d'origine, en prévoyant bien entendu les moyens nécessaires.
Pour toutes ces raisons, nous demandons la suppression de cet article.
Aux articles 1er et 4 du présent projet de loi, l'Assemblée nationale a prévu une seconde évaluation de la connaissance de la langue française et des valeurs de la République, à l'issue de la formation linguistique et civique suivie par l'étranger dans son pays d'origine - je ne répéterai pas les propos tenus par M. Bret, que je reprends à mon compte.
L'article 4 bis, introduit par l'Assemblée nationale, dispose que ce second test dispense de l'examen de langue réalisé en France, dans le cadre d'un contrat d'accueil et d'intégration.
Notre amendement supprime cette disposition par souci de cohérence avec notre opposition de principe à cette formation linguistique et civique.
L'amendement n° 10, présenté par M. Buffet au nom de la commission est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le second alinéa de cet article :
« L'étranger pour lequel l'évaluation du niveau de connaissance de la langue prévue à l'article L. 411-8 n'a pas établi le besoin d'une formation est réputé ne pas avoir besoin d'une formation linguistique. »
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter cet amendement et donner l'avis de la commission sur les amendements identiques n° 95 et 138.
Cet amendement tend à préciser que seuls les bénéficiaires du regroupement familial dispensés de suivre une formation linguistique dans le pays où ils sollicitent un visa sont réputés ne pas avoir besoin d'une formation linguistique dans le cadre du contrat d'accueil et d'intégration en France, tous les autres étrangers continuant de relever du droit commun du contrat d'accueil et d'intégration.
Par ailleurs, monsieur le président, il convient de compléter la rédaction du second alinéa de cet article pour tenir compte des modifications que le Sénat a apportées à l'article 4.
Je suis donc saisi d'un amendement n°10 rectifié, présenté par M. Buffet, au nom de la commission, et ainsi libellé :
Rédiger comme suit le second alinéa de cet article :
« L'étranger pour lequel l'évaluation du niveau de connaissance de la langue prévue à l'article L. 411-8 et au deuxième alinéa de l'article L.211-2-1 n'a pas établi le besoin d'une formation est réputé ne pas avoir besoin d'une formation linguistique. »
Veuillez poursuivre, monsieur le rapporteur.
Le Gouvernement émet également un avis défavorable sur les amendements identiques n° 95 et 138.
S'agissant de l'amendement n° 10 rectifié, si l'évaluation qui a eu lieu à l'étranger est positive, il n'est nullement besoin de procéder à une nouvelle évaluation à l'arrivée en France ou de prévoir une formation. Le Gouvernement y est donc favorable.
Les amendements ne sont pas adoptés.
L'amendement est adopté.
L'article 4 bis est adopté.
Le 7° de l'article L. 313-11 du même code est complété par une phrase ainsi rédigée :
« L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République. »
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 98 est présenté par Mme Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.
L'amendement n° 139 est présenté par Mme M. André, MM. Mermaz, Collombat, Badinter, Dreyfus-Schmidt, Frimat, Peyronnet, Sueur et Yung, Mme Boumediene-Thiery, M. Assouline, Mme Cerisier-ben Guiga et Khiari, M. S. Larcher, Mme Tasca et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Éliane Assassi, pour présenter l'amendement n° 98.
Cet article vient modifier le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le CESEDA, qui dresse la liste des catégories de personnes pouvant obtenir « de plein droit » une carte de séjour temporaire portant la mention « vie privée et familiale », en subordonnant son obtention à la « connaissance des valeurs de la République ».
Une fois de plus, sous couvert d'intégration par la culture, ce texte introduit un nouveau dispositif coercitif et totalement incohérent pour empêcher le regroupement familial.
Depuis 2006, une personne qui obtient la carte de séjour au titre de ses attaches personnelles et familiales doit signer un contrat d'accueil et d'intégration par lequel elle s'engage notamment à suivre une formation civique.
La nouvelle mesure prévue par ce projet de loi prend les choses à l'envers : les connaissances sont évaluées avant que les personnes se soient vu offrir la possibilité de les acquérir.
Initialement, le 7° de l'article L. 313-11 du CESEDA était consacré à la délivrance de plein droit de la carte de séjour temporaire portant la mention « vie privée et familiale » à tout étranger « dont les liens personnels et familiaux en France [...] sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus ».
La loi du 24 juillet 2006 est venue limiter ce droit en le subordonnant à la condition d'« insertion dans la société française ». Cette nouvelle exigence - tout aussi floue que subjective - a fini de vider de sa substance la notion de « plein droit ».
Le présent projet de loi s'inscrit dans la continuité de la précédente réforme et a pour objet son application concrète. L'imprécision de cette notion totalement floue et subjective que sont « les valeurs républicaines » ne fera que renforcer l'inégalité de traitement et le risque d'arbitraire. Le pouvoir discrétionnaire total, après avoir été légitimé par la loi de 2006, trouvera son application concrète et encore une fois stigmatisante.
Loin de prendre la voie de la prévention de l'encombrement des tribunaux, l'adoption de ce texte ne fera qu'augmenter les contentieux et le nombre de sans-papiers en France. Cela ajoutera de la précarité, des problèmes sociaux et des problèmes de santé publique dans des situations où cela n'aurait pas lieu d'être, car ces personnes ont droit au séjour au regard des principes constitutionnels et internationaux.
Ce dispositif affiche faussement une finalité d'intégration. Il s'agit en réalité d'une mesure de contrôle et de restriction des droits des étrangers, fondée sur l'arbitraire et la discrimination. C'est pourquoi nous demandons la suppression de l'article 5.
Les étrangers qui répondent aux conditions énumérées aux articles L. 313-11 et L. 313-11-1 du CESEDA ainsi que ceux qui ont obtenu la protection subsidiaire sont susceptibles d'obtenir de plein droit une carte de séjour temporaire. Par rapport à l'état du droit antérieur à la loi du 24 juillet 2006, le changement majeur réside dans la suppression de l'accès de plein droit à la carte de séjour temporaire portant la mention « vie privée et familiale » pour l'étranger résidant habituellement en France depuis dix ans, ou depuis quinze ans si, au cours de cette période, il a séjourné sur notre territoire en tant qu'étudiant.
Les catégories d'étrangers concernées sont les suivantes : le conjoint ou les enfants d'un étranger titulaire d'une carte de séjour temporaire ou d'une carte de résident autorisés à séjourner en France au titre du regroupement familial ; l'étranger qui justifie par tout moyen avoir sa résidence en France depuis qu'il a atteint au plus l'âge de treize ans avec au moins un de ses parents ; l'étranger qui a été confié au service de l'aide sociale à l'enfance depuis au plus l'âge de seize ans ; l'étranger, dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire, dont l'un des parents est titulaire de la carte « compétences et talents » ou d'une carte de séjour portant la mention « salarié en mission » ; l'étranger marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que la communauté de vie n'ait pas cessé depuis le mariage ; l'étranger marié à un ressortissant étranger titulaire d'une carte de séjour temporaire portant la mention « scientifique » ; l'étranger père ou mère d'un enfant français mineur, à condition qu'il contribue effectivement à l'entretien et à l'éducation de celui-ci depuis sa naissance ou depuis au moins deux ans ; l'étranger né en France, qui justifie par tout moyen y avoir résidé pendant au moins huit ans de façon continue, et avoir suivi, après l'âge de dix ans, une scolarité d'au moins cinq ans dans un établissement scolaire français, à condition qu'il fasse sa demande entre seize ans et vingt et un ans ; l'étranger titulaire d'une rente d'accident du travail ; l'étranger qui a obtenu le statut d'apatride ainsi que son conjoint et ses enfants sous certaines réserves ; l'étranger résidant en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale ; l'étranger qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa situation personnelle et de sa vie familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus.
La loi du 24 juillet 2006 a précisé que les liens personnels et familiaux pris en compte devaient être « appréciés notamment au regard de leur intensité et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine ».
Avec cet article, le projet de loi ajoute une nouvelle restriction à ce droit pour cette dernière catégorie, puisque l'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République.
Comme le disait ma collègue précédemment, propos que je reprends totalement à mon compte, on ajoute ici l'arbitraire à l'arbitraire et l'on voit que le pouvoir discrétionnaire total, après avoir été légitimé en 2006, trouve son application concrète et stigmatisante. Mais nous le savons depuis le début de la discussion !
Pour toutes ces raisons, nous demandons la suppression de cet article.
Je rappelle que l'article 5 apporte une simple précision, et elle ne lie pas le juge qui aura à apprécier la situation. Par conséquent, la commission émet un avis défavorable sur ces amendements de suppression.
Cet article prévoit d'évaluer l'insertion de l'étranger dans la société française « en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République », avant la délivrance de la carte de séjour temporaire portant la mention « vie privée et familiale ».
Quelles sont ces valeurs de la République que vous souhaitez évaluer, monsieur le ministre ? Allez-vous par décret figer la République et ses valeurs ? Ou bien cette notion ne servira-t-elle qu'à couvrir l'arbitraire des refus de titres de séjour, dont la seule motivation pourra être : « défaut d'insertion » ?
C'est à croire que vous doutez du rayonnement de la France, de l'adhésion que peuvent susciter des valeurs authentiquement républicaines ! Non, pour vous, l'immigration familiale est présumée contraire aux valeurs de la République.
Pour ma part, je considère que les valeurs républicaines sont partagées par la plupart des étrangers qui rejoignent notre pays. Ce n'est par un quelconque examen que vous emporterez l'adhésion à la République ! Non, c'est en mettant en acte les valeurs de respect de la personne humaine qui ont toujours été celles de la République.
Ce soupçon permanent qui pèse sur les étrangers est une insulte à tous ceux qui ont combattu pour défendre les valeurs de la République, et que la France a si mal remerciés, d'ailleurs. Tous les étrangers qui ont participé à la Résistance, qui se sont engagés pour libérer la France, ont-ils dû subir un examen d'identité ?
M. David Assouline acquiesce.
Les amendements ne sont pas adoptés.
L'article 5 est adopté.
Je rappelle que le Sénat a examiné l'article 5bis par priorité lors de sa séance du 3 octobre 2007.
L'amendement n° 181, présenté par M. Détraigne et les membres du groupe Union centriste - UDF est ainsi libellé :
Après l'article 5 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans le cadre de sa politique de codéveloppement, l'État encourage par voie de convention de partenariat la mise en place et le développement de services d'état civil dans les pays dans lesquels ces services sont inexistants ou font défaut.
La parole est à M. Jean Boyer.
Il s'agit d'un amendement d'appel.
Nous avons traité d'un sujet grave et délicat, qui a exigé un long débat, mais plutôt que d'avoir recours à des techniques telles que la comparaison par empreintes génétiques, pourquoi ne pas agir là où les lacunes sont constatées, c'est-à-dire sur les services d'état civil qui ont justifié le dépôt de cet amendement par Thierry Mariani ?
Même si cette option peut paraître très coûteuse, pourquoi ne pas mettre en place un système de coopération avec les États qui ont un service d'état civil défaillant?
Tel est l'objet de cet amendement, qui prévoit que le Gouvernement signe des conventions de partenariat avec des États tiers, dans le cadre de sa politique de codéveloppement, pour encourager la création ou le développement d'un service d'état civil bénéficiant à l'ensemble des ressortissants de ces pays.
Je remercie M. Jean Boyer et les membres du groupe Union centriste-UDF de me donner l'occasion de redire que la France poursuit son effort d'aide à la mise à niveau des services de l'état civil à destination de pays les plus en difficultés. Ainsi, le Mali bénéficie d'un programme d'aide triennale depuis 2006, qui est de l'ordre de trois millions d'euros par an. Le Cameroun, Madagascar, la Mauritanie, le Sénégal, pour ne citer qu'eux, ont également bénéficié d'aides importantes pour remettre à niveau leurs services d'état civil.
L'adoption de cet amendement - sans doute à l'unanimité - confortera l'action de la France dans ce domaine important.
Le sous-amendement du Gouvernement vise à remplacer le mot « codéveloppement » par celui de « coopération ». En effet, la mise à niveau des services d'état civil ne fait pas intervenir les migrants installés en France, puisqu'elle relève de la coopération classique entre la France et les États concernés.
Sous réserve de cette modification, le Gouvernement émet un avis favorable sur cet amendement.
Je suis donc saisi d'un amendement n° 181 rectifié, présenté par M. Détraigne et les membres du groupe Union centriste - UDF, et ainsi libellé :
Après l'article 5 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans le cadre de sa politique de coopération, l'État encourage par voie de convention de partenariat la mise en place et le développement de services d'état civil dans les pays dans lesquels ces services sont inexistants ou font défaut.
Quel est l'avis de la commission sur cet amendement ainsi rectifié?
La commission émet un avis favorable, car cet amendement s'inscrit parfaitement dans le prolongement de nos débats sur l'article 5 bis et de l'exposé des motifs de l'amendement n° 203 déposé par M. Jean-Jacques Hyest.
Il est vraiment nécessaire de se donner tous les moyens possibles pour faire en sorte que les actes d'état civil soient établis dans les formes requises, avant de recourir aux tests ADN que nous avons autorisés hier.
La parole est à Mme Marie-Christine Blandin, pour explication de vote sur l'amendement n° 181 rectifié.
Vous abordez ici une forme de soutien à la coopération. Cela ne nous fait évidemment pas oublier l'indignation que nous avons manifestée à l'égard d'autres dispositions qui ont été proposées et adoptées précédemment dans le cadre de l'examen de ce projet de loi.
Puisque nous évoquons soit le codéveloppement, soit la coopération, je veux vous interroger sur le coût des placements en centre de rétention, des reconduites à la frontière et, demain, des tests ADN, qui suscitent, je le répète, notre profonde indignation. Ce coût s'impute-t-il sur le budget de l'aide publique au développement ? Si tel était le cas, on mesurerait tout le cynisme de cette affectation budgétaire, car nous verrions mal comment l'on pourrait nommer « aide au développement » l'interruption brutale et humiliante de parcours individuels chargés d'espoir et de détresse.
L'amendement est adopté.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 5 bis, et le sous-amendement n° 213 n'a plus d'objet.
Le deuxième alinéa de l'article L. 313-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est ainsi modifié :
1° Dans la deuxième phrase, les mots : « à l'initiative de l'étranger » sont supprimés ;
2° Sont ajoutés les mots : « de séjour de l'étranger ».
L'amendement n° 12, présenté par M. Buffet, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit cet article :
La deuxième phrase du deuxième alinéa de l'article L. 313-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est ainsi rédigée :
« Toutefois, lorsque la communauté de vie a été rompue en raison de violences conjugales qu'il a subies de la part de son conjoint, l'autorité administrative ne peut procéder au retrait du titre de séjour de l'étranger et peut en accorder le renouvellement. »
La parole est à M. le rapporteur.
Monsieur le président, il s'agit d'un amendement purement rédactionnel.
Ce sous-amendement ressemble un peu à celui que j'ai défendu tout à l'heure.
La rédaction de l'amendement n° 12 fait apparaître une certaine incohérence. Dans le cas de figure visé, à savoir des violences conjugales subies par un étranger, l'autorité administrative ne peut pas lui retirer son titre de séjour. Il serait par conséquent logique que l'intéressé puisse continuer à bénéficier d'un tel titre. Or l'amendement susvisé ne prévoit pas le renouvellement automatique dudit document. L'administration ne peut pas retirer le titre et peut ne pas le renouveler. Une fois de plus, nous sommes confrontés au vide juridique que j'évoquais tout à l'heure.
Il faut vraiment mettre un terme à la situation, trop fréquente, dans laquelle se trouvent des personnes « ni expulsables, ni régularisables » et que les textes législatifs, notamment la loi CESEDA, n'ont pas réglée.
Si l'administration ne peut pas retirer le titre de séjour, elle doit pouvoir le renouveler de manière quasi automatique, faute de quoi l'amendement n° 12 de la commission n'aura plus de sens. En ne renouvelant pas le titre de séjour, l'administration va faire de nouveaux sans-papiers, comme nous l'avons vu tout à l'heure lorsque nous avons examiné le cas des femmes victimes de violences.
Pour éviter ces nouveaux sans-papiers mais aussi, et surtout, pour régler ces cas de « ni, ni », il est important qu'une bonne fois pour toutes soit décidé le renouvellement automatique du titre de séjour en faveur de ces personnes qui ne pourront pas se voir retirer ledit titre.
L'amendement n° 141, présenté par Mme M. André, MM. Mermaz, Collombat, Badinter, Dreyfus-Schmidt, Frimat, Peyronnet, Sueur et Yung, Mme Boumediene-Thiery, M. Assouline, Mme Cerisier-ben Guiga et Khiari, M. S. Larcher, Mmes Printz, Tasca et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés est ainsi libellé :
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
3° Les mots : « peut accorder » sont remplacés par les mots : « accorde, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, ».
La parole est à Mme Michèle André.
Il est quasiment défendu puisque nous nous sommes déjà longuement expliqués.
Nous revenons au débat sur le caractère automatique du renouvellement. Par conséquent, la commission émet un avis défavorable.
Le sous-amendement n'est pas adopté.
L'amendement est adopté.
En conséquence, l'article 5 ter est ainsi rédigé et l'amendement n° 141 n'a plus d'objet.
Le deuxième alinéa de l'article L. 313-12 du même code est complété par une phrase ainsi rédigée :
« En cas de violence commise après l'arrivée en France du conjoint étranger mais avant la première délivrance de la carte de séjour temporaire, le conjoint étranger se voit délivrer, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, une carte de séjour temporaire portant la mention «vie privée et familiale». »
L'amendement n° 142 rectifié, présenté par M. Collombat, Mme M. André, MM. Mermaz, Badinter, Dreyfus-Schmidt, Frimat, Peyronnet, Sueur et Yung, Mme Boumediene-Thiery, M. Assouline, Mme Cerisier-ben Guiga et Khiari, M. S. Larcher, Mme Tasca et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... - Après la première phrase du deuxième alinéa de l'article L. 313-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il est inséré une phrase ainsi rédigée :
« Cependant, il n'y a pas rupture de la vie commune dans les cas où l'éloignement temporaire résulte d'obligations professionnelles ou médicales indépendantes de la volonté des intéressés. »
La parole est à M. Pierre-Yves Collombat.
Nous avons rectifié l'amendement n° 142, car la formulation initiale était contestable.
Il s'agit toujours d'essayer de régler la situation de personnes temporairement éloignées pour des raisons indépendantes de leur volonté et qui se voient opposer une rupture de vie commune pour justifier le non-renouvellement de leur carte de séjour.
L'amendement n° 142 rectifié est extrêmement restrictif puisqu'il vise l'éloignement temporaire résultant d'obligations indépendantes de la volonté des intéressés. L'objection que M. le ministre m'avait opposée tout à l'heure selon laquelle il fallait laisser aux préfets la capacité d'apprécier la situation n'a plus lieu d'être. En l'espèce, les préfets pourront estimer si l'éloignement est temporaire, s'il est dû à des causes indépendantes de la volonté des intéressés et non à de simples accommodements destinés à détourner la loi.
La commission ne peut pas donner son avis puisqu'elle n'a pas été saisie de cet amendement rectifié.
Quoi qu'il en soit, mon cher collègue, je vous rends attentif aux conséquences qu'aurait l'adoption de ce texte.
La jurisprudence sur la notion de « vie commune » est très claire : les juridictions civiles n'imposent pas un domicile commun. Cet amendement soulève non un problème juridique, mais une question de mise en oeuvre du dispositif par les préfectures.
En outre, paradoxalement, cet amendement pourrait susciter une interprétation de la notion de vie commune plus restrictive que celle de la jurisprudence actuelle. En effet, cette dernière, nécessairement plus souple, reconnaît la vie commune même en cas de séparation pour d'autres motifs que des raisons professionnelles ou familiales. Indépendamment des cas où l'éloignement temporaire résulte d'obligations professionnelles ou médicales et n'entraîne pas une rupture de la vie commune, d'autres motifs peuvent entraîner un tel éloignement. L'amendement n° 142 rectifié est donc restrictif.
Le problème soulevé doit donc être résolu par la voie d'une circulaire très claire.
Mon cher collègue, je vous incite à retirer votre amendement, après avoir obtenu confirmation par M. le ministre que les préfectures ne pourront pas opposer sans raison l'absence de vie commune.
M. Brice Hortefeux, ministre. Les arguments de M. Collombat m'avaient presque convaincu, mais M. Hyest a développé une argumentation structurée qui m'a quelque peu ébranlé. Par conséquent, très courageusement, le Gouvernement s'en remet à la sagesse de la Haute Assemblée.
Sourires
M. Pierre-Yves Collombat. M. Hyest est redoutable ! Je ne vais tout de même pas modifier l'amendement n° 142 rectifié pour ajouter un « notamment » !
Nouveaux sourires
Tout à l'heure, une situation semblable a été évoquée. Si M. le ministre nous assure qu'il n'y a aucune raison d'interpréter des éloignements temporaires résultant d'obligations indépendantes de la volonté des intéressés comme étant des ruptures de la vie commune, cette affirmation figurant dès lors au procès-verbal, donc au Journal officiel, j'accepterai bien volontiers de retirer mon amendement dont je comprends fort bien les limites. Nos débats doivent tout simplement éclairer l'interprétation des préfets.
Monsieur le sénateur, je me propose de donner aux préfets, par voie de circulaire, des instructions répondant à votre préoccupation.
Dans ces conditions, monsieur le président, je retire l'amendement n° 142 rectifié.
L'article 5 quater est adopté.
Mes chers collègues, avant de suspendre la séance, je vous rappelle que nous devons achever l'examen de ce projet de loi ce soir et qu'il reste 116 amendements à examiner...
Nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quinze heures.
La séance est suspendue.
La séance, suspendue à douze heures quarante, est reprise à quinze heures, sous la présidence de M. Christian Poncelet.