La séance est ouverte à quatorze heures trente.
Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.
M. le Premier ministre a demandé à M. le président du Sénat de bien vouloir lui faire connaître le nom d’un sénateur appelé à siéger en tant que suppléant au sein de la commission nationale d’évaluation des politiques de l’État outre-mer.
La commission de l’aménagement du territoire a été invitée à présenter un candidat.
La nomination au sein de cet organisme extraparlementaire aura lieu ultérieurement, dans les conditions prévues par l’article 9 du règlement.
L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, de modernisation, de développement et de protection des territoires de montagne (projet n° 47 rectifié, texte de la commission n° 192, rapport n° 191 et avis n° 182, 185, 186).
Dans la discussion du texte de la commission, nous poursuivons, au sein du chapitre IV du titre II, l’examen de l’article 17 ter.
Titre II
SOUTENIR L’EMPLOI ET LE DYNAMISME ÉCONOMIQUE EN MONTAGNE
Chapitre IV
Développer les activités économiques et touristiques
I §(nouveau). – À la seconde phrase de l’article L. 342-18 du code du tourisme, les mots : « 50-1 de la loi n° 84-610 du 16 juillet 1984 relative à l’organisation et à la promotion des activités physiques et sportives » sont remplacés par les mots : « L. 311-1 du code du sport ».
II. – L’article L. 342-20 du même code est ainsi modifié :
1°A
1° Après les mots : « remontée mécanique », la fin du premier alinéa est supprimée ;
2° Le second alinéa est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :
« Après avis consultatif de la chambre d’agriculture, une servitude peut être instituée pour assurer, dans le périmètre d’un site nordique ou d’un domaine skiable, le passage, l’aménagement et l’équipement de pistes de loisirs non motorisés en dehors des périodes d’enneigement. Cet avis est réputé favorable s’il n’intervient pas dans un délai de deux mois à compter de la transmission de la demande d’institution de la servitude.
« Lorsque la situation géographique le nécessite, une servitude peut être instituée pour assurer les accès aux sites d’alpinisme, d’escalade en zone de montagne et de sports de nature, au sens de l’article L. 311-1 du code du sport, ainsi que les accès aux refuges de montagne. »
III
« Art. L. 342-26-1. – Lorsque la servitude instituée en application des articles L. 342-20 à L. 342-23 est susceptible de compromettre gravement l’exploitation agricole ou sylvicole d’un terrain grevé, son ou ses propriétaires peuvent, à compter de la publication de l’acte créant la servitude, mettre en demeure son bénéficiaire de procéder à l’acquisition du terrain grevé dans les conditions et délais prévus par les articles L. 230-1 et suivants du code de l’urbanisme.
« À défaut d’accord amiable, le prix est fixé selon les règles énoncées aux articles L. 342-25 et L. 342-26 du présent code. Si, trois mois après l’expiration du délai mentionné au premier alinéa de l’article L. 230-3 du code de l’urbanisme, le juge de l’expropriation n’a pas été saisi, la servitude n’est plus opposable au propriétaire comme aux tiers. »
IV §(nouveau). – L’article 54 de la loi n° 85-30 du 9 janvier 1985 relative au développement et à la protection de la montagne est abrogé.
Je suis saisi de six amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 260 rectifié, présenté par MM. Mézard, Arnell, Barbier, Bertrand, Castelli, Collin, Esnol et Fortassin, Mme Laborde et MM. Requier et Vall, est ainsi libellé :
Alinéas 3 à 7
Remplacer ces alinéas par trois alinéas ainsi rédigés :
1° Au premier alinéa, après les mots : « peuvent être grevées », sont insérés les mots : «, après avis de la chambre d’agriculture, » et après les mots : « sites nordiques », sont insérés les mots : « dont la définition est précisée par décret, » ;
2° Au second alinéa, après le mot : « instituée », sont insérés les mots : « après avis de la chambre d’agriculture, »
3° Est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« L’avis de la chambre d’agriculture est réputé favorable s’il n’intervient pas dans un délai de deux mois à compter de la transmission de la demande d’institution de la servitude. »
La parole est à M. Alain Bertrand.
Cet amendement vise à maintenir le texte de l’article L. 342-20 en l’état et à éviter la généralisation des servitudes sur l’ensemble des domaines skiables. Par ailleurs, il prévoit l’avis préalable de la chambre d’agriculture.
L'amendement n° 386, présenté par M. Bouvard, est ainsi libellé :
Alinéa 6
1° Première phrase
Supprimer les mots :
, dans le périmètre d’un site nordique ou d’un domaine skiable,
2° Seconde phrase
Supprimer cette phrase.
La parole est à M. Michel Bouvard.
L'amendement n° 386 est retiré.
Les amendements n° 146 rectifié, 188 rectifié bis et 305 sont identiques.
L'amendement n° 146 rectifié est présenté par MM. Carle et Savin.
L'amendement n° 188 rectifié bis est présenté par MM. L. Hervé, Bonnecarrère, Canevet, Capo-Canellas et Cigolotti, Mme Férat, MM. Gabouty et Guerriau, Mme Joissains et MM. Kern, Longeot, Médevielle et Pellevat.
L'amendement n° 305 est présenté par Mme Espagnac.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 6, première phrase
Supprimer les mots :
, dans le périmètre d’un site nordique ou d’un domaine skiable,
La parole est à M. Michel Savin, pour présenter l’amendement n° 146 rectifié.
La parole est à M. Bernard Delcros, pour présenter l'amendement n° 188 rectifié bis.
L’amendement n° 305 n’est pas soutenu.
L'amendement n° 332 rectifié bis, présenté par MM. Gremillet, Morisset et Pillet, Mme Di Folco, MM. Raison et Pierre, Mmes Imbert et Morhet-Richaud, MM. Bizet, Chaize, Pointereau, B. Fournier, Sido et de Raincourt et Mmes Lamure et Deromedi, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 6, première phrase
Après les mots :
site nordique
insérer les mots :
dont la définition est précisée par décret
II. – Alinéa 7
Après les mots :
situation géographique le nécessite
insérer les mots :
, après avis de la chambre d’agriculture
La parole est à M. Daniel Gremillet.
Cet amendement a deux objectifs.
Le premier est de préciser par décret la définition du périmètre d’un site nordique s'agissant des servitudes qui peuvent être instituées pour assurer le passage, l’aménagement et l’équipement de pistes de loisirs non motorisés en dehors des périodes d’enneigement.
Le second est de revenir sur la nécessité de l’enrichissement de l’avis de la chambre d’agriculture sur les territoires concernés.
Nous poursuivons le débat que nous avons entamé hier soir. Je rappelle qu’il s’agit d’un sujet très sensible tant pour ceux qui occupent le domaine skiable que pour ceux qui utilisent ces espaces au titre du pastoralisme.
Après bien des contacts et des auditions, tant à l’Assemblée nationale qu’au Sénat, il a été trouvé un consensus que ces amendements tendent à modifier. La commission des affaires économiques et votre rapporteur ont donc émis un avis défavorable sur l’ensemble de ces amendements, d’autant que nous avons beaucoup mis en avant le fait que les chambres d’agriculture puissent donner leur avis.
Je salue les collègues qui ont retiré leur amendement pour nous faire gagner du temps, sachant qu’il nous en reste quelque 130 à examiner.
Sourires.
M. Jean-Michel Baylet, ministre de l'aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales. Voilà six amendements rédigés de la même manière, à la virgule près : ou bien je dois tous vous féliciter, mesdames, messieurs les sénateurs, pour la concertation que vous menez, mais vous auriez pu aboutir à un seul amendement, ou bien, et je pense que la vérité est plutôt là, je dois constater que ces amendements ont été écrits ailleurs et tout simplement déposés ici.
Exclamations.
J’encourage tout de même le Sénat, et le Parlement en général, à ne pas devenir la chambre d’enregistrement des différents lobbies. Mais je me suis déjà exprimé hier, sur d’autres sujets, de la même manière.
En tout cas, pour ce qui est des servitudes en zone de montagne, un texte équilibré a été adopté à l’Assemblée nationale, en première lecture, et judicieusement complété par la commission des affaires économiques et la commission des lois du Sénat.
Il vise à concilier le respect du droit de propriété avec la volonté d’ouvrir le domaine skiable à des loisirs d’été. Il tient compte des impératifs agricoles.
En outre, l’avis de la chambre d’agriculture est déjà opportunément prévu à l’article 17 ter pour les loisirs d’été.
Le Gouvernement, comme le rapporteur pour avis, souhaite maintenir cet équilibre et émet donc un avis défavorable sur les six amendements.
La parole est à M. Loïc Hervé, pour explication de vote sur les amendements identiques n° 146 rectifié et 188 rectifié bis.
D’abord, une petite précaution d’usage.
Monsieur le ministre, si l’on considère, dans cette assemblée, que les associations d’élus sont des lobbies, il faut nous le dire tout de suite ! §En ce cas, les amendements qui sont le fruit d’une concertation avec des associations comme l’Association nationale des élus de montagne, l’ANEM, l’Association nationale des maires de stations de montagne, l’ANMSM, posent un problème. D'ailleurs, le Sénat se bat continuellement pour que les associations d’élus soient reconnues non pas comme des lobbies mais en tant que telles, c'est-à-dire, d’une certaine manière, comme la manifestation de l’intérêt général.
La question des servitudes en montagne, particulièrement des servitudes estivales, est absolument essentielle. Nous voyons en effet la montagne muter de l’hiver vers l’été, de l’hiver avec l’été. Dans les usages, les habitudes des clients, mais aussi des habitants de la montagne, nous constatons la nécessité de développer la pratique des sports outdoor l’été.
M. Loïc Hervé. Par conséquent, la simple suppression des mots « dans le périmètre d’un site nordique ou d’un domaine skiable » est une forme d’amélioration du texte de l’Assemblée nationale. Pardon, monsieur le ministre, mais nous sommes un certain nombre de sénateurs à le penser.
Applaudissements sur certaines travées de l'UDI-UC et du groupe Les Républicains.
M. le ministre a sans doute voulu faire de l’humour en ce début de séance, mais le sujet est sérieux.
J’ai déposé l'amendement n° 386, que je viens de retirer, pour une raison très simple : comme Loïc Hervé l’a expliqué, nous sommes confrontés à un problème avec les activités de pleine nature en période estivale et devons pouvoir instituer des servitudes pour éviter qu’un particulier ne puisse empêcher, par exemple, l’aménagement d’une piste de VTT.
La cohabitation avec les activités agricoles est, il est vrai, un sujet sur lequel les chambres d’agriculture sont extrêmement sensibles. Si ces amendements sont similaires, c’est parce que nous avons tenu des réunions de travail avec l’Association nationale des maires des stations de montagne, que certains sénateurs sont eux-mêmes des gestionnaires de stations de sports d’hiver, élus de stations, et que nous avons travaillé ensemble pour essayer d’aboutir à un texte qui convienne.
Après réflexion et après avoir pesé les avantages et les inconvénients, je considère que le texte adopté par l’Assemblée nationale constitue un point d’équilibre, même s’il ne règle pas tous les problèmes. La rédaction que nous avions retenue avec l’ANMSM va peut-être trop loin. Le sujet n’est pas réglé et mérite que l’on y travaille encore. C’est dans cet esprit que je vais voter le texte tel qu’il est proposé par la commission.
Monsieur le ministre, nous ne sommes pas des parlementaires présents uniquement pour déposer des amendements préparés par des bureaux d’études ou des institutions de lobbying.
Ces amendements sont le fruit d’un travail réalisé avec des associations d’élus, au regard de nos propres expériences, d’où leur convergence, rien de plus !
Je mets aux voix les amendements identiques n° 146 rectifié et 188 rectifié bis.
Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, adopte les amendements.
En conséquence, l'amendement n° 332 rectifié bis n'a plus d'objet.
Je mets aux voix l'article 17 ter, modifié.
L'article 17 ter est adopté.
L'amendement n° 91 rectifié, présenté par MM. Cornano, Antiste, S. Larcher et Patient et Mme Yonnet, n'est pas soutenu.
Chapitre V
Organiser la promotion des activités touristiques
I. – §(Non modifié) Au premier alinéa de l’article L. 134-1 du code du tourisme, après le mot : « conditions », sont insérés les mots : « et sous les réserves ».
II. – Le titre Ier du livre II de la cinquième partie du code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :
1° Le I de l’article L. 5214-16 est complété par six alinéas ainsi rédigés :
« Par dérogation au 2° du présent I, les communes touristiques érigées en stations classées de tourisme en application des articles L. 133-13 et L. 151-3 du code du tourisme ou qui ont engagé, au plus tard avant le 1er janvier 2017, une démarche de classement en station classée de tourisme peuvent décider, par délibération prise avant cette date, de conserver l’exercice de la compétence “promotion du tourisme, dont la création d’offices de tourisme”.
« L’engagement d’une démarche de classement au sens de l’alinéa précédent est matérialisé, avant le 1er janvier 2017 :
« a) soit par le dépôt auprès du représentant de l’État dans le département d’un dossier de classement de la commune en station classée de tourisme ;
« b) soit par une délibération du conseil municipal qui décide de préparer, en vue d’un dépôt avant le 1er janvier 2018, un dossier de classement de la commune en station classée de tourisme ;
« c) soit par une délibération du conseil municipal qui décide de préparer, en vue d’un dépôt avant le 1er janvier 2018, un dossier de classement de son office de tourisme dans la catégorie requise pour remplir les critères de classement de la commune en station classée de tourisme. La démarche doit être complétée dans ce cas par le dépôt d’un dossier de classement en station classée de tourisme dans l’année qui suit, le cas échéant, le classement de l’office de tourisme. »
« En l’absence de dépôt auprès du représentant de l’État dans le département des demandes de classement avant les échéances fixées aux trois alinéas précédents ou lorsqu’une des demandes de classement a été rejetée par celui-ci, la délibération de la commune touristique par laquelle elle a décidé de conserver la compétence « promotion du tourisme, dont la création d’offices de tourisme » cesse de produire ses effets et la compétence est exercée par la communauté de communes en lieu et place de la commune. » ;
2° Le I de l’article L. 5216-5 est complété par six alinéas ainsi rédigés :
« Par dérogation au 1° du présent I, les communes touristiques érigées en stations classées de tourisme en application des articles L. 133-13 et L. 151-3 du code du tourisme ou qui ont engagé, au plus tard avant le 1er janvier 2017, une démarche de classement en station classée de tourisme peuvent décider, par délibération prise avant cette date, de conserver l’exercice de la compétence “promotion du tourisme, dont la création d’offices de tourisme”.
« L’engagement d’une démarche de classement au sens de l’alinéa précédent est matérialisé, avant le 1er janvier 2017 :
« a) soit par le dépôt auprès du représentant de l’État dans le département d’un dossier de classement de la commune en station classée de tourisme ;
« b) soit par une délibération du conseil municipal qui décide de préparer, en vue d’un dépôt avant le 1er janvier 2018, un dossier de classement de la commune en station classée de tourisme ;
« c) soit par une délibération du conseil municipal qui décide de préparer, en vue d’un dépôt avant le 1er janvier 2018, un dossier de classement de son office de tourisme dans la catégorie requise pour remplir les critères de classement de la commune en station classée de tourisme. La démarche doit être complétée dans ce cas par le dépôt d’un dossier de classement en station classée de tourisme dans l’année qui suit, le cas échéant, le classement de l’office de tourisme. »
« En l’absence de dépôt auprès du représentant de l’État dans le département des demandes de classement avant les échéances fixées aux trois alinéas précédents ou lorsqu’une des demandes de classement a été rejetée par celui-ci, la délibération de la commune touristique par laquelle elle a décidé de conserver la compétence « promotion du tourisme, dont la création d’offices de tourisme » cesse de produire ses effets et la compétence est exercée par la communauté d’agglomération en lieu et place de la commune. » ;
3° Le I de l’article L. 5218-2 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Par dérogation au I de l’article L. 5217-2, les communes membres érigées en stations classées de tourisme en application de l’article L. 133-13 du code du tourisme ou ayant déposé une demande de classement en station classée de tourisme et n’ayant pas transféré la compétence prévue au d du 1° du I du même article L. 5217-2 à la date du 1er janvier 2018 peuvent décider, par délibération prise avant cette même date, de conserver l’exercice de la compétence ‟promotion du tourisme, dont la création d’offices de tourisme”. Lorsque la demande de classement a été rejetée par le représentant de l’État dans le département, la délibération de la commune touristique par laquelle elle a décidé de conserver la compétence « promotion du tourisme, dont la création d’offices de tourisme » cesse de produire ses effets et la compétence est exercée par la métropole en lieu et place de la commune. »
Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 242, présenté par MM. Savin et Calvet, Mme Lamure, M. Mandelli, Mme Deromedi, MM. Carle, B. Fournier, Perrin, Raison, Darnaud et Saugey, Mme Giudicelli et MM. Chaize et A. Marc, est ainsi libellé :
Alinéas 4 et 11
Après la troisième occurrence du mot :
tourisme
insérer les mots :
et les communes touristiques en application des articles L. 133-11 et L. 133-12 du même code ayant une marque territoriale protégée au sens de l’article L. 133-1 du même code et disposant d’au moins 5 000 lits touristiques
La parole est à M. Michel Savin.
Si vous m’y autorisez, monsieur le président, je présenterai conjointement l'amendement n° 243.
J’appelle donc en discussion l'amendement n° 243, également présenté par MM. Savin et Calvet, Mme Lamure, M. Mandelli, Mme Deromedi, MM. Carle, B. Fournier, Perrin, Raison, Darnaud et Saugey, Mme Giudicelli et MM. Chaize et A. Marc, et ainsi libellé :
Alinéas 4 et 11
Après la troisième occurrence du mot :
tourisme
insérer les mots :
et les communes touristiques en application des articles L. 133-11 et L. 133-12 du même code situées en zone de montagne au sens des articles 3 et 4 de la loi n° 85-30 du 9 janvier 1985 relative au développement et à la protection de la montagne et ayant une marque territoriale protégée au sens de l’article L. 133-1 du même code et disposant d’au moins 5 000 lits touristiques
Veuillez poursuivre, monsieur Savin.
La loi NOTRe prévoit le transfert de la compétence « promotion du tourisme, dont la création d’offices de tourisme » aux intercommunalités au 1er janvier 2017.
Le transfert de la compétence « tourisme » aux intercommunalités, si vertueux soit-il, n’est pas toujours adapté à la réalité des territoires, notamment en montagne. Les stations classées de tourisme ou les communes touristiques disposant de marques territoriales protégées situées en zone de montagne peuvent, certes, se situer dans la même intercommunalité, mais constituer en parallèle des destinations touristiques concurrentes. Elles ont besoin de ce fait, pour assurer leur promotion, d’outils propres.
Les catégories de stations de tourisme et communes touristiques traduisent une démarche volontaire et un dynamisme propre en faveur du tourisme. Ce dernier se concrétise notamment par une capacité d’hébergement renforcée pour les populations non permanentes et des animations spécifiques à destination des touristes. L’appartenance à l’une ou l’autre des catégories est un gage de qualité offert aux touristes.
Si la France souhaite rester la première destination touristique au monde, la loi doit prendre en compte ces communes classées de tourisme et ces communes touristiques disposant d’une marque territoriale protégée et d’au moins 5 000 lits touristiques. Ces dernières sont particulièrement investies dans le tourisme. Ainsi la loi doit leur permettre, si elles le souhaitent, de conserver leur office de tourisme communal de plein exercice, outil propre et efficace de promotion de leur territoire.
L'amendement n° 242 ouvre cette possibilité à l’ensemble des communes touristiques bénéficiant d’une marque territoriale protégée et disposant d’au moins 5 000 lits touristiques
L'amendement n° 243 restreint cette possibilité aux seules communes ayant une marque territoriale protégée, disposant d’au moins 5 000 lits touristiques et situées dans une zone de montagne au sens de la loi de 1985.
Le champ d’application de la dérogation a été très largement ouvert par l’Assemblée nationale et en commission. Il n’a jamais été question d’étendre au-delà des communes érigées à terme en stations classées de tourisme l’exception au transfert de compétence.
À titre subsidiaire, je rappelle que les communes qui disposent d’une marque territoriale protégée pourront toujours, même après le 1er janvier 2017, bénéficier d’un office de tourisme sur leur territoire, s’il est maintenu par l’EPCI, l’établissement public de coopération intercommunale, en application de la loi NOTRe, la loi portant nouvelle organisation territoriale de la République.
La commission des affaires économiques émet donc un avis défavorable sur les amendements n° 242 et 243.
Le Gouvernement est bien sûr défavorable à ces amendements, mais je voudrais, mesdames, messieurs les sénateurs, vous rappeler d’où nous venons.
Il n’y a tout de même pas si longtemps, vous avez voté une loi, la loi NOTRe…
M. Jean-Michel Baylet, ministre. Certes, on peut ne pas l’avoir votée à titre individuel
On le confirme sur certaines travées du groupe Les Républicains.
Cette loi prévoyait le transfert de tous les offices de tourisme à l’intercommunalité. À titre personnel, je trouve que c’était une très bonne chose, la solution étant juste et équitable.
J’entends bien que certaines stations, en montagne comme ailleurs, ont des offices de tourisme très prospères, mais il est rare que l’activité touristique bénéficie à une seule commune. Il était donc normal, solidaire et équitable que l’intercommunalité, comme sur un certain nombre d’autres sujets, par exemple le transfert des ports, bénéficie de ces offices de tourisme.
Le Premier ministre, en déplacement à Chamonix, s’est engagé à prévoir une dérogation pour les stations de montagne. Je n’ai jamais caché mon sentiment : à partir du moment où l’on ouvrait la porte, on y mettait le pied, on y mettait le bras ! Naturellement, les stations du littoral sont venues à la charge, puis les stations de l’intérieur. Au total, d’une dérogation qui touchait 30 communes, 30 offices de tourisme, nous sommes passés à 300 !
Vous voulez aller encore plus loin : il vient un moment où la mesure perd tout son sens !
L’engagement du Gouvernement a été tenu. L’Assemblée nationale a déjà assoupli le dispositif : les rapporteurs ont ajouté les communes ayant déposé un dossier de classement avant le 1er janvier ; un amendement adopté en séance, malgré mon avis défavorable, a ajouté les communes ayant simplement annoncé qu’elles demanderaient leur classement plus tard, avant le 1er janvier 2018.
L’ouverture opérée par le Gouvernement est déjà considérable. Dans un premier temps, toute commune touristique pourra retarder le transfert de l’office. Dans ce cas, elle ne transférera que si elle n’obtient pas le classement. Aller plus loin revient à nier l’intercommunalité.
Pour en revenir au point de départ, je suis convaincu qu’il est légitime, équitable et souhaitable que les offices de tourisme soient confiés aux intercommunalités. D'ailleurs, présidant une intercommunalité, j’ai naturellement transféré mon office de tourisme.
Nous sommes déjà allés très loin, pour ne pas dire trop loin : restons-en là !
L’avis du Gouvernement est défavorable.
Mon intervention portera sur l’ensemble des amendements consacrés à cette thématique.
J’ai bien compris que vous étiez favorable au regroupement des offices de tourisme, monsieur le ministre. D'ailleurs, 62 % des offices de tourisme sont aujourd'hui gérés par des intercommunalités. Toutefois, derrière chaque station de montagne, à la différence des autres stations, il y a une marque. Certaines communes comptent d'ailleurs trois stations. Par exemple, à Saint-Martin-de-Belleville, vous avez les marques Saint Martin de Belleville, Val Thorens et Les Ménuires. Quand vous allez à Val Thorens, vous n’allez pas aux Ménuires, et inversement, en termes de commercialisation. La marque générique sous laquelle nous sommes commercialisés à l’étranger est « Savoie Mont Blanc », mais ce ne sont pas les mêmes destinations.
Le transfert aux intercommunalités posait donc de vrais problèmes. J’ajoute que les budgets de certaines intercommunalités, je pense en particulier à la Haute Tarentaise, sont très nettement inférieurs à ceux des offices du tourisme de Tignes, Val d’Isère, Les Arcs ; les effectifs de personnel n’ont également rien à voir. La dérogation pour les stations de montagne est donc une mesure salutaire.
Cela étant, monsieur le ministre, je vous ai écrit, et j’aimerais que vous puissiez, à un moment ou à un autre, nous confirmer certains points en séance. Je dois reconnaître que le Gouvernement a fait un effort. Pour autant, la machine préfectorale, avec l’efficacité de l’administration française, continue à travailler : on nous dit que les délibérations prises en ce moment par les communes n’ont aucune valeur, qu’il nous faudra délibérer une fois la loi publiée. Or elle le sera au mieux entre Noël et le jour de l’An, et les conseils municipaux ne pourront pas délibérer en respectant les délais de convocation des intercommunalités et des communes.
Le Gouvernement doit s’engager à ce que nous ne nous fassions pas piéger par la machine préfectorale.
Un second point mérite clarification : l’application à tous les offices de tourisme. Or des interprétations des services de l’État indiquent que l’office est automatiquement transféré à l’EPCI lorsqu’une seule commune est classée en station classée de tourisme. Ce n’est pas la lettre du texte, mais l’interprétation des services de l’État.
Nous avons besoin d’obtenir des clarifications sur ces deux points. Celles-ci figureront au compte rendu et seront opposables de cette manière.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 460, présenté par M. Pellevat, au nom de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable, est ainsi libellé :
I. – Alinéas 9 et 16
1° Remplacer le mot :
trois
par le mot :
quatre
2° Remplacer les mots :
celui-ci
par les mots :
l’autorité administrative compétente
II. – Alinéa 18, seconde phrase
Remplacer les mots :
le représentant de l’État dans le département
par les mots :
l’autorité administrative compétente
La parole est à M. le rapporteur.
L'amendement est adopté.
L'amendement n° 205 rectifié, présenté par MM. L. Hervé, Bonnecarrère, Canevet, Capo-Canellas, Cigolotti, Delahaye, Gabouty et Guerriau, Mme Joissains et MM. Kern, Longeot et Médevielle, est ainsi libellé :
I. – Alinéas 9, 16 et 18
Compléter ces alinéas par les mots :
, au plus tard au 1er janvier de l’année suivant l’expiration d’un délai minimum de trois mois à compter de la décision de rejet
II. – Après l’alinéa 9
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« En cas de non-renouvellement de la demande de classement mentionné à l’article L. 133-13 du code du tourisme ou en cas de perte de ce classement à l’issue de la période fixée par l’article R. 133-40 du même code, la compétence “promotion du tourisme, dont la création d’offices de tourisme” est exercée par la communauté de communes en lieu et place de la commune, au plus tard au 1er janvier de l’année suivant l’expiration d’un délai minimum de trois mois à compter de l’échéance ou de la décision de rejet du classement. » ;
III. – Après l’alinéa 16
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« En cas de non-renouvellement de la demande de classement mentionné à l’article L. 133-13 du code du tourisme ou en cas de perte de ce classement à l’issue de la période fixée par l’article R. 133-40 du même code, la compétence “promotion du tourisme, dont la création d’offices de tourisme” est exercée par la communauté d’agglomération en lieu et place de la commune, au plus tard au 1er janvier de l’année suivant l’expiration d’un délai minimum de trois mois à compter de l’échéance ou de la décision de rejet du classement. » ;
IV. – Après l’alinéa 18
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« En cas de non-renouvellement de la demande de classement mentionné à l’article L. 133-13 du code du tourisme ou en cas de perte de ce classement à l’issue de la période fixée par l’article R. 133-40 du même code, la compétence “promotion du tourisme, dont la création d’offices de tourisme” est exercée par la métropole en lieu et place de la commune, au plus tard au 1er janvier de l’année suivant l’expiration d’un délai minimum de trois mois à compter de l’échéance ou de la décision de rejet du classement. »
La parole est à M. Loïc Hervé.
L’article 18 et celui qui le suit sont au cœur du projet de loi et méritent, nous le savons, des discussions approfondies.
Je voudrais saluer le travail que vous avez accompli, monsieur le ministre, mais aussi vos efforts, puisque vous avez rappelé votre position personnelle. Vous avez tenu l’engagement pris par le Premier ministre au Conseil national de la montagne à Chamonix. Vous avez accompagné, à l’Assemblée nationale et au Sénat, l’évolution nécessaire à la reconnaissance de la spécificité des offices de tourisme, notamment en montagne, qui sont des outils absolument essentiels de marketing, de promotion, de réservation, d’événementiel dans nos stations de ski.
Mon amendement vise à compléter le dispositif de l’article 18, lequel dispose que : « En l’absence de dépôt auprès du représentant de l’État dans le département des demandes de classement avant les échéances fixées aux trois alinéas précédents ou lorsqu’une des demandes de classement a été rejetée par celui-ci, la délibération de la commune touristique par laquelle elle a décidé de conserver la compétence ″promotion du tourisme, dont la création d’offices de tourisme″ cesse de produire ses effets et la compétence est exercée par la communauté de communes » - par la communauté d’agglomération ou par la métropole – « en lieu et place de la commune. »
Or, en cas de rejet, et c’est bien le problème, il n'est pas certain que la commune et l'EPCI soient en mesure d'organiser le transfert de la compétence à la date même du rejet de la demande de classement par l'autorité administrative. En fait, nous sommes en train de prévoir des situations liées à l’effet d’aubaine que sera l’adoption de cette loi après, j’imagine, une CMP conclusive et une promulgation par le Président de la République avant le 31 décembre.
Les dossiers vont être déposés et il faut que nous anticipions ce qui pourrait se passer en cas de rejet. Dès lors, il apparaît indispensable d'accorder aux acteurs locaux un délai raisonnable pour leur permettre d'organiser le transfert de compétence, notamment le transfert des personnels et des biens concernés.
Cet amendement pose une question pertinente, nous ne pouvons pas le nier. Il est bien évident que les opérations de mise en œuvre du transfert de compétence en cas de rejet de la demande de classement nécessiteront du temps pour être menées à bien. Celles-ci ne pourront pas se faire du jour au lendemain.
Néanmoins, la commission est défavorable à cet amendement, qui paraît satisfait par le droit positif.
Je répondrai tout d’abord à M. Bouvard.
Monsieur le sénateur, je vous ai adressé un courrier, …
… dont vous avez pu prendre connaissance dès hier en séance, et qui doit vous rassurer.
Je vous précise dans ce courrier que j’ai donné instruction aux préfets qu’ils exercent avec bienveillance le contrôle des actes des collectivités concernant ce transfert de compétence lorsque celles-ci envisagent l’application de la dérogation prévue par la loi.
Exercer avec bienveillance ne signifie pas ne rien contrôler, laisser faire tout et n’importe quoi : cela veut dire que nous comprenons la nécessité de respecter certains délais, puisque nous sommes en train de légiférer sur une disposition destinée à s’appliquer au 1er janvier prochain.
En ce qui concerne les offices de tourisme, si un seul office de tourisme est en station classée, je vous confirme qu’il ne sera pas transféré, à condition que la commune ait délibéré.
Plus globalement, je voudrais attirer l’attention sur le fait que le législateur semble prendre la fâcheuse habitude, dès qu’une loi a été votée, de prévoir tous les délais et dérogations possibles et imaginables. En ce qui concerne la loi NOTRe, l’application de certaines dispositions a même été repoussée jusqu’à 2020 ou 2022… Je ne suis pas certain que ce soit de très bonne méthode ! La loi de la République doit s’appliquer, et ce rapidement, sauf à créer des difficultés à la fois administratives et politiques. C’est une question d’efficacité.
En ce qui concerne l’amendement, parce qu’un premier délai a été accordé pour le transfert des offices de tourisme, il faudrait en accorder un nouveau ?
M. Jean-Michel Baylet, ministre. C’est de la crédibilité de l’action publique qu’il s’agit ici ! Je ne le dis pas en tant que ministre ou que membre de la majorité. Il est difficile de faire fonctionner correctement la République dans ces conditions. Surtout, cela complique la tâche des élus, qui veulent de la stabilité institutionnelle, et je partage leur point de vue !
Applaudissementssur certaines travées du groupe socialiste et républicain. – M. Philippe Bonnecarrère applaudit également.
M. Jean-Pierre Vial. Monsieur le ministre, vous déplorez le fait que, la loi NOTRe à peine votée, elle soit remise sur le métier. Si nous avions disposé de davantage de temps pour l’examiner, nous n’en serions pas là !
M. Alain Marc applaudit.
Par ailleurs, si ce texte porte principalement sur la montagne, beaucoup de dispositions ont vocation à s’appliquer sur tout le territoire national. Ainsi, le dispositif de l’article 18 intéresse l’ensemble des stations touristiques, de montagne ou pas. On ne peut que se féliciter de l’adaptation proposée.
En ce qui concerne la question soulevée par M. Hervé, ce qui est important, c’est que le Gouvernement s’engage à faire en sorte que les choses se passent bien. Moi-même, j’avais déposé un amendement visant à prévoir un délai courant jusqu’en 2019. Il fallait d’abord permettre de déroger à la loi NOTRe, qui fixait l’échéance au 1er janvier 2017. Une fois la dérogation obtenue, la durée de la procédure, particulièrement lourde, dépend non pas des collectivités, mais des services de l’État. Il revient à chacun de prendre ses responsabilités. Si les collectivités n’ont pas fait leur travail, elles seront responsables. Dans le cas contraire, il est normal qu’elles puissent compter sur la diligence des services de l’État. Je me félicite que nous ayons pu avoir cet échange aujourd’hui.
Applaudissements sur certaines travées du groupe Les Républicains.
L'amendement n'est pas adopté.
L’amendement n° 85 rectifié ter, présenté par M. Nègre, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 16
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
…° Le I de l’article L. 5217-2 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Par dérogation au présent I, les communes membres de la Métropole Nice Côte d’Azur érigées en stations classées de tourisme en application de l’article L. 133-13 du code du tourisme ou ayant déposé une demande de classement en station classée de tourisme et n'ayant pas transféré la compétence prévue au d du 1° du I du présent article à la date du 1er janvier 2018 peuvent décider, par délibération prise avant cette même date, de conserver l'exercice de la compétence “promotion du tourisme, dont la création d'offices de tourisme”. Lorsque la demande de classement a été rejetée par l’autorité administrative compétente, la délibération de la commune touristique par laquelle elle a décidé de conserver la compétence “promotion du tourisme, dont la création d'offices de tourisme” cesse de produire ses effets et la compétence est exercée par la métropole en lieu et place de la commune. » ;
La parole est à M. Louis Nègre.
Monsieur le ministre, j’ai bien entendu votre position de principe ; nous y reviendrons.
L’article 18, l’un des plus importants de ce projet de loi, concerne la promotion des activités touristiques, qui représentent une industrie lourde en France. Cet article prévoit explicitement la possibilité, pour les communes érigées en stations classées de tourisme, de conserver la compétence « promotion du tourisme, dont la création d’offices de tourisme ».
Cet amendement vise à faire bénéficier les communes de la métropole Nice Côte d’Azur d’une dérogation au transfert obligatoire de cette compétence, non encore opéré à ce jour, des communes à la métropole. Cette dérogation est justifiée par la forte notoriété et la densité touristique du littoral de cette métropole et de ses stations. Nice Côte d’Azur dispose en outre d’un territoire situé en moyenne et haute montagne. Elle comporte plus de communes rurales que de communes urbaines. Trente-deux de ses quarante-neuf communes membres sont classées en zone de montagne, et sept d’entre elles comprennent une station de sports d’hiver, dont deux de renommée internationale – Isola 2000 et Auron.
Nice Côte d’Azur est la seule métropole à présenter des caractéristiques territoriales de ce type. Il serait donc tout à fait légitime qu’elle bénéficie de cette possibilité de dérogation, qui a déjà été instaurée pour les communautés de communes et d’agglomération.
Il me paraît souhaitable d’avoir une lecture intelligente du texte de la loi, en donnant la souplesse nécessaire à l’adaptation. Nous sommes ici dans la maison des territoires, monsieur le ministre : nous devons nous adapter aux réalités du terrain, aux demandes des communes et de la métropole. L’adoption de cet amendement provoquerait-elle des dommages collatéraux ? Non ! J’invite donc mes collègues à le voter.
Il s’avère que la situation locale est particulière : dans les faits, le transfert de compétence prévu par la loi de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles, ou loi MAPTAM, n’a pas été effectué par les communes membres de la métropole Nice Côte d’Azur, et il existe un consensus local pour maintenir cette situation.
M. Gérard Bailly, rapporteur pour avis. Néanmoins, revenir sur le transfert prévu par la loi pour une période déterminée irait au-delà de l’équilibre trouvé et pourrait être source de fragilité sur le plan constitutionnel. La commission s’en remet à la sagesse de la Haute Assemblée.
Ah ! sur les travées du groupe Les Républicains.
Nous franchissons là un pas supplémentaire… Précédemment, il s’agissait d’accorder des délais ou des dérogations ; voilà maintenant que l’on propose carrément une mesure d’ordre rétroactif ! Que je sache, Nice Côte d’Azur a voulu devenir métropole : elle a voulu et même revendiqué ce statut, en toute connaissance de cause. J’imagine que ses responsables savaient alors à quoi ils s’engageaient, en particulier en matière de compétences obligatoires.
Si le Sénat décide aujourd’hui de revenir en arrière par rapport à la loi MAPTAM de 2014, qui prévoyait le transfert des offices de tourisme à la métropole, à quoi bon légiférer ? Bornons-nous à élaborer des lois bavardes, d’ordre général, que chaque territoire sera ensuite libre d’appliquer comme il l’entend… Ce serait un retour à l’époque féodale !
Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.
Mon propos vaut aussi pour l’amendement relatif à la métropole Aix-Marseille-Provence qui viendra ensuite en discussion.
M. Nègre a dit que le transfert de compétence n’a pas été opéré. Eh bien, je le regrette : la loi doit s’appliquer, et je vais y veiller !
Applaudissements sur certaines travées du groupe socialiste et républicain. – M. Alain Bertrand applaudit également.
Mme Évelyne Didier. Nous connaissons les talents oratoires de notre collègue Louis Nègre. Je serais disposée à voter son amendement, à condition que la droite s’engage à abroger la loi NOTRe une fois au pouvoir…
Applaudissements sur les travées du RDSE.
Mme Évelyne Didier. En définitive, vous êtes en train de détricoter ce que vous avez voté !
Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.
Vous vous appuyez sur la notion de notoriété pour justifier votre position, monsieur Nègre : est-ce là un nouveau critère juridique ? Y aura-t-il désormais des territoires à plusieurs vitesses, les notables et les autres ? Continuez ainsi, et c’en sera fait de la République !
Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste et républicain. – M. Alain Bertrand applaudit également.
Sourires.
L'amendement n'est pas adopté.
Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 259 rectifié, présenté par M. Guérini, Mme Jouve, MM. Amiel, Arnell, Barbier, Bertrand, Castelli, Collin, Esnol et Fortassin, Mmes Laborde et Malherbe et MM. Mézard, Requier et Vall, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
« La métropole d'Aix-Marseille-Provence restitue avant le 1er janvier 2018 la compétence promotion du tourisme, dont la création d'offices de tourisme prévue à l’article L. 5217-2, aux communes membres érigées en stations classées de tourisme. Cette restitution est décidée par délibérations concordantes de l'organe délibérant et des conseils municipaux de la métropole dans les conditions de majorité prévues au II de l'article L. 5211-5. Le conseil municipal de chaque commune concernée dispose d'un délai de trois mois, à compter de la notification au maire de la commune de la délibération de l'organe délibérant de la métropole, pour se prononcer sur la restitution proposée. À défaut de délibération dans ce délai, sa décision est réputée favorable. La restitution de compétences est prononcée par arrêté du représentant de l'État dans le département. Le retrait de la compétence se fait dans les conditions prévues à l’article L. 5211–25-1. »
La parole est à Mme Mireille Jouve.
L’article 18 du présent projet de loi organise le régime dérogatoire accordé jusqu’au 1er janvier 2018 aux communes classées stations de tourisme qui n’ont pas engagé le transfert à la métropole de la compétence « promotion du tourisme ».
Afin d’instaurer une stricte égalité entre les communes des Bouches-du-Rhône, l’amendement vise à autoriser la métropole Aix-Marseille-Provence, dont le statut et la gouvernance ne relèvent pas du droit commun des métropoles, à restituer cette compétence aux communes membres classées stations de tourisme l’ayant d’ores et déjà transférée.
Destinations touristiques très réputées, ces communes doivent pouvoir mettre en œuvre des politiques de promotion touristique spécifiques, en coordination avec la métropole, et maintenir des offices de tourisme indépendants.
J’ajouterai que, contrairement à celles de Nice Côte d’Azur, ces communes n’étaient pas toutes favorables à la création de la métropole…
L’amendement n° 1 rectifié bis, présenté par MM. Gilles et J.C. Gaudin, Mme Deromedi et MM. Carle, Guené, Cambon, Bonhomme, Calvet, Charon, Chasseing, César, Cantegrit et Doligé, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
« La métropole Aix-Marseille-Provence peut restituer jusqu’au 1er janvier 2018 sa compétence « promotion du tourisme, dont la création d’offices de tourisme », prévue au d du 1° du I de l’article L. 5217-2, aux communes membres érigées en stations classées de tourisme. Cette restitution est décidée par délibérations concordantes de l’organe délibérant et des conseils municipaux de la métropole dans les conditions de majorité prévues au II de l’article L. 5211-5. Le conseil municipal de chaque commune membre dispose d’un délai de trois mois, à compter de la notification au maire de la commune de la délibération de l’organe délibérant de la métropole, pour se prononcer sur la restitution proposée. À défaut de délibération dans ce délai, sa décision est réputée favorable. La restitution de compétences est prononcée par arrêté du représentant de l’État dans le département. Le retrait de la compétence se fait dans les conditions prévues à l’article L. 5211-25-1. »
La parole est à M. François Calvet.
Il s’agit de placer toutes les communes érigées en stations classées de tourisme de la métropole Aix-Marseille-Provence dans la même situation quant à la possibilité de conserver la compétence « promotion du tourisme ». Cela répond, là aussi, à un consensus local.
Néanmoins, revenir sur le transfert prévu par la loi MAPTAM pour une métropole irait au-delà de l’équilibre trouvé et pourrait être fragile d’un point de vue constitutionnel. Je m’en remets à la sagesse de la Haute Assemblée sur ces deux amendements.
L’avis du Gouvernement est le même que tout à l’heure : défavorable ! Que je sache, la France n’est pas un État fédéral. La loi s’applique donc de la même manière sur l’ensemble du territoire de la République.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
L’amendement n° 87 rectifié quinquies, présenté par MM. Calvet, Commeinhes, Guerriau et Doligé, Mme Lopez, MM. César et Houpert, Mme Malherbe, MM. Lefèvre et Dufaut, Mme Lamure, MM. Vasselle, Longeot et Savin, Mme Cayeux, M. Pointereau et Mmes Joissains et Deromedi, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – 1. Par dérogation au e du 1° du I de l’article L. 5215-20 du code général des collectivités territoriales, les communes érigées en stations classées de tourisme en application de l’article L. 133-13 du code du tourisme et membres d’un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre devenu communauté urbaine au 1er janvier 2016 peuvent décider, par délibération prise avant le 1er janvier 2017, de conserver l’exercice de la compétence “promotion du tourisme, dont la création d’offices de tourisme”.
2. Le e du 1° du I de l’article L. 5215-20 du code général des collectivités territoriales est complété par les mots : «, sous réserve du 1. du III de l’article 18 de la loi n° … du … de modernisation, de développement et de protection des territoires de montagne ».
3. Au premier alinéa de l’article L. 134-1-1 du code du tourisme, après les termes « Dans les conditions prévues à l’article L. 134-5 », sont insérés les mots : « et sans préjudice du 1. du III de l’article 18 de la loi n° … du … de modernisation, de développement et de protection des territoires de montagne ».
La parole est à M. François Calvet.
L’article 18 prévoit une dérogation au transfert obligatoire de la compétence « promotion du tourisme, dont la création d’offices de tourisme » des communes aux communautés de communes et d’agglomération et à la métropole d’Aix-Marseille-Provence, pour leur permettre, notamment, de maintenir un office de tourisme communal.
Cette dérogation n’a été envisagée ni pour les communautés urbaines ni pour les métropoles de droit commun, ces catégories d’établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre s’étant vu transférer la compétence en la matière par la loi MAPTAM du 24 janvier 2014. Ainsi, les modalités d’organisation de la compétence « promotion du tourisme » sur le territoire de ces EPCI, qu’ils aient existé en 2014 ou qu’ils aient été créés en 2015, ont d’ores et déjà été réglées.
Tel n’est pas le cas, en revanche, pour les intercommunalités devenues communautés urbaines au 1er janvier 2016. Dans leur cas, le sujet conserve toute sa pertinence.
Le présent amendement vise, dès lors, à permettre aux communes membres de ces nouvelles communautés urbaines de bénéficier, comme celles des communautés d’agglomération ou de communes et celles de la métropole Aix-Marseille-Provence, de la possibilité de mettre en œuvre la même dérogation. Je signale que certaines de ces communautés urbaines comprennent à la fois des communes littorales et d’autres de montagne. Il s’agit d’un amendement transpartisan.
L’esprit est le même que pour les amendements précédents. La commission est donc défavorable à cet amendement, qui consiste à revenir sur un transfert de compétence déjà effectué.
Même avis, pour la même raison.
Les établissements publics de coopération intercommunale en question sont devenus des communautés urbaines parce qu’ils l’ont voulu, leur assemblée ayant pris une délibération en ce sens. J’imagine que leurs responsables ont pris connaissance, au préalable, des compétences et des obligations liées à ce statut. Il faut assumer les conséquences de ses choix. La loi ne s’applique pas à la carte !
L'amendement n'est pas adopté.
L’amendement n° 286 rectifié, présenté par Mme Laborde, MM. Amiel, Arnell, Barbier, Bertrand, Castelli, Collin, Esnol, Fortassin et Guérini, Mmes Jouve et Malherbe et MM. Mézard, Requier et Vall, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – Le 4° de l’article L. 133-7 du code du tourisme est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les communes qui ont décidé par dérogation, de conserver l’exercice de la compétence “promotion du tourisme” continuent de percevoir entièrement le produit de la taxe de séjour. »
La parole est à Mme Mireille Jouve.
La loi NOTRe rend obligatoire le transfert de la compétence relative à la promotion du tourisme aux EPCI à compter du 1er janvier 2017. L’article 18 du présent projet de loi permet toutefois une dérogation à ce transfert, afin que certaines communes, par exemple celles qui ont une identité touristique forte, puissent conserver cette compétence.
Si cet amendement est adopté, les communes qui ont décidé de conserver la compétence « promotion du tourisme » ne seront plus obligées de reverser le produit de la taxe de séjour et pourront ainsi financer l’exercice de cette compétence.
Cet amendement apparaît comme redondant par rapport au droit en vigueur : en effet, l’EPCI concerné peut certes décider d’instituer une taxe de séjour, mais les communes ayant déjà institué cette taxe peuvent alors s’y opposer. Par ailleurs, le droit positif n’établit pas de lien automatique entre transfert de la compétence et institution de la taxe. L’avis est donc défavorable.
J’ajouterai que la question de la taxe de séjour ne se pose pas qu’en zone de montagne. Monsieur le ministre, au regard de l’ensemble des modifications importantes intervenues récemment dans l’organisation des collectivités locales, il serait peut-être bon de remettre les choses à plat sur ce sujet.
Je demande le retrait de cet amendement, qui est satisfait par le droit en vigueur. Comme le rapporteur pour avis vient de le rappeler, les communes peuvent tout à fait percevoir la taxe de séjour. À défaut de retrait, l’avis sera défavorable.
L'article 18 est adopté.
L’amendement n° 7 rectifié quinquies, présenté par Mme Morhet-Richaud, MM. Vial, Savin, Chasseing, de Raincourt, Commeinhes et Milon, Mme Deromedi, MM. Joyandet et de Legge, Mme Lamure, MM. Kennel, Houpert, Revet et Bignon, Mme Cayeux et MM. Dufaut, Vaspart, Doligé et Lefèvre, est ainsi libellé :
Après l’article 18
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au second alinéa de l'article L. 133-1 du code du tourisme, les mots : « la commune est autorisée » sont remplacés par les mots : « la ou les communes sont autorisées ».
La parole est à Mme Patricia Morhet-Richaud.
Une commune peut, par délibération du conseil municipal, instituer un organisme chargé de la promotion du tourisme, dénommé office de tourisme, dans les conditions prévues aux articles L. 133-2 à L. 133-10 du code du tourisme.
Lorsque coexistent sur le territoire d’une même commune ou d’un même établissement de coopération intercommunale à fiscalité propre plusieurs marques territoriales protégées distinctes par leur situation, leur appellation ou leur mode de gestion, la commune est autorisée à créer un office de tourisme pour chacun des sites disposant d’une de ces marques.
Or, plusieurs communes situées au sein d’une même communauté de communes peuvent disposer d’une même marque territoriale protégée. Il convient de supprimer toute difficulté d’interprétation dans ce cas. Tel est l’objet de cet amendement.
Cet amendement apparaît sans objet, car il est satisfait par le droit positif. Nous en demandons le retrait ; à défaut, l’avis sera défavorable.
Madame Morhet-Richaud, l’amendement n° 7 rectifié quinquies est-il maintenu ?
J’ai bien entendu les explications du rapporteur ; elles me permettront de rassurer les communes confrontées à cette difficulté. Je retire l’amendement, monsieur le président.
I. – La section 4 du chapitre II du titre IV du livre III du code du tourisme est ainsi modifiée :
1° A L’intitulé est complété par les mots : « et loisirs de neige non motorisés autres que le ski alpin » ;
1° L’article L. 342-27 est ainsi modifié :
a) Sont ajoutés les mots : « et des loisirs de neige non motorisés autres que le ski alpin » ;
b) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Les associations créées en application du premier alinéa peuvent se regrouper au sein d’une association nationale en vue de coordonner leurs activités. » ;
2° L’article L. 342-28 est ainsi modifié :
a) Au début, les mots : « Cette association » sont remplacés par les mots : « L’association mentionnée au premier alinéa de l’article L. 342-27 » ;
b) Après le mot : « fond », sont insérés les mots : « et des loisirs de neige non motorisés autres que le ski alpin » ;
3° L’article L. 342-29 est ainsi modifié :
a) Au début, sont ajoutés les mots : « En liaison avec l’association nationale mentionnée au second alinéa de l’article L. 342-27, » ;
a bis §(nouveau)) Les mots : « ainsi créée » sont remplacés par les mots : « créée en application du premier alinéa du même article » ;
b) Après le mot : « fond », sont insérés les mots : « et des loisirs de neige non motorisés autres que le ski alpin » ;
c) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« L’association nationale mentionnée au second alinéa de l’article L. 342-26-1 a pour objet d’assurer la promotion et le développement de la pratique du ski de fond et des loisirs de neige non motorisés autres que le ski alpin et des équipements nécessaires à leur déploiement ainsi que l’organisation de la formation des professionnels des sites nordiques. »
II. – §(Non modifié) À la première phrase de l’article L. 5211-25 du code général des collectivités territoriales, après le mot « fond », sont ajoutés les mots : « et des loisirs de neige non motorisés autres que le ski alpin ».
L’amendement n° 217, présenté par M. G. Bailly, est ainsi libellé :
Alinéa 15
Remplacer la référence :
L. 342-26-1
par la référence :
L. 342-27
La parole est à M. Gérard Bailly.
L'amendement est adopté.
L'article 18 bis est adopté.
L’amendement n° 230, présenté par MM. Dantec, Poher, Labbé et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 18 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le dernier alinéa de l’article L. 362-3 du code de l’environnement est supprimé.
La parole est à M. Ronan Dantec.
Cet amendement vise à corriger ce que l’on pourrait qualifier d’étourderie…
L’article L. 362-3 du code de l’environnement crée une dérogation à l’interdiction de circulation des motoneiges à des fins de loisirs qu’il instaure, afin de permettre le retour, de nuit, de la clientèle des restaurants d’altitude.
Or, les motoneiges, qui sont bruyantes, ont un très fort impact, particulièrement la nuit, sur la faune présente dans ces zones, en particulier le tétras.
En outre, leur circulation pose un grave problème de responsabilité, en cas d’accident, pour le gestionnaire du domaine skiable comme pour le maire.
C’est pourquoi nous proposons de supprimer cette dérogation, qui ne faisait d’ailleurs pas consensus lorsque nous en avions discuté : les élus de montagne de droite étaient plutôt contre.
La commission est défavorable à cet amendement, dont l’adoption remettrait en cause l’équilibre qui a pu être trouvé sur cette question.
Cette dérogation est strictement encadrée par voie réglementaire : l’article R. 362-1-2 du code de l’environnement prévoit que ce convoyage ne peut s’effectuer que sur autorisation du maire ou du préfet et sur un itinéraire précisément défini devant emprunter les pistes du domaine skiable et ne pas traverser des espaces naturels protégés. Le convoyage n’est autorisé que pendant la période hivernale et sur une durée comprise entre l’heure de fermeture des pistes et vingt-trois heures. Par ailleurs, le maire ou le préfet peuvent assortir leur autorisation de prescriptions particulières liées à la sécurité, à la tranquillité publique ou à la protection de l’environnement.
Ainsi, cette dérogation à l’interdiction de la circulation des motoneiges a été strictement encadrée pour permettre de concilier activité économique des restaurants d’altitude et respect de l’environnement.
Un décret publié le 21 octobre 2016, après de nombreuses consultations du public et une large concertation menées entre le 24 août et le 14 septembre 2015, précise les conditions de mise en œuvre de cette dérogation, en prenant très largement en compte à la fois le respect de l’environnement et de la nature et l’animation des stations. En montagne, il n’y a pas que des skieurs, et l’offre touristique et d’animation doit concerner tous les clients des stations, sauf à en voir certains partir à l’étranger…
Il me semble que nous avons réussi à trouver un bon équilibre entre les souhaits des protecteurs de l’environnement et ceux des responsables de l’animation des stations. Il est agréable de se rendre en motoneige dans un restaurant d’altitude et cela contribue à l’économie locale.
Le ministre l’a dit excellemment : on ne peut pas revenir sans cesse sur ce qui a été décidé. Une très large concertation a eu lieu sur ce sujet. Il y va de l’attractivité touristique de nos stations de sports d’hiver et de l’équilibre économique des restaurants d’altitude, qui sont particulièrement tributaires des aléas climatiques. L’utilisation des motoneiges leur assure une clientèle le soir, ce qui est très positif.
Monsieur le ministre, je souhaite profiter de cette occasion pour évoquer un point particulier. Le décret nous convient, mais il comporte une zone blanche, si j’ose dire… Il serait bon que le Gouvernement puisse nous confirmer que les clients qui sont montés au restaurant d’altitude avec les moyens motorisés en question doivent en redescendre de la même manière, et non pas à skis après la fermeture des pistes. Il s’agit d’éviter que la responsabilité des gestionnaires de domaine skiable puisse être engagée.
Le décret n’évoque pas le retour des clients montés au restaurant d’altitude en motoneige : il conviendrait de lever l’ambiguïté afin d’éviter quelques procédures judiciaires dans les années qui viennent.
Je suis catégoriquement opposé à l’amendement de nos collègues écologistes. Ce débat doit être dépassionné. La loi est très exigeante en matière d’accessibilité des hôtels ou des services publics. Emprunter une motoneige est le seul moyen, pour les enfants, les personnes à mobilité réduite ou âgées, d’accéder aux restaurants d’altitude l’hiver en soirée.
Plus largement, ce moyen de transport permet d’accroître la fréquentation de ces restaurants. Je souscris totalement à l’observation de Michel Bouvard sur la nécessité de préciser que les personnes montées au restaurant en motoneige doivent en redescendre par le même moyen.
M. Ronan Dantec. Je suis un peu dubitatif : seuls quelques clients très fortunés ont les moyens de se payer un trajet aller-retour en motoneige.
Protestations sur les travées du groupe Les Républicains et de l’UDI -UC.
La circulation nocturne de ces quelques clients a un fort impact sur la faune.
L’argument économique, d’ailleurs modeste eu égard au peu de personnes susceptibles d’employer ce moyen de transport, ne saurait tout justifier…
Pourquoi ne pas interdire de faire la vaisselle après dix-huit heures ?
Le problème est réel, et l’encadrement strict de cette pratique tend à le démontrer.
Pour favoriser des activités économiques relativement secondaires, puisque ces restaurants travaillent principalement le jour, leur principal intérêt étant la vue qu’ils offrent, …
Sourires.
(Exclamations amusées sur les travées du groupe Les Républicains et de l’UDI-UC.) Ne vous énervez pas, mes chers collègues, attendez la suite !
Sourires.
Je vais venir au secours de M. Dantec. §
Notre groupe est partagé sur cet amendement. Certes, les restaurants d’altitude présentent une originalité qui attire une clientèle pas forcément fortunée, mais recourir à des motoneiges pour s’y rendre revient à considérer que l’espèce humaine peut faire tout ce qu’elle veut sur cette planète, y compris pour satisfaire des besoins qui ne sont pas vitaux.
Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.
Les animaux ont besoin d’un territoire d’une superficie variable selon les espèces et d’une nuit qui ne soit pas troublée par un excès d’éclairage. Progressivement, nous imposons partout notre empreinte, sans nous interroger sur les besoins de la vie sauvage, animale ou végétale, qui tend à disparaître de notre monde. Connaîtrons-nous un jour des espaces complètement colonisés par l’homme, où l’animal n’aura plus aucune place ?
M. Michel Bouvard s’exclame.
Les personnes qui défendent ces pratiques sont les mêmes qui viennent ensuite pleurer sur la disparition de la girafe !
Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.
Mme Évelyne Didier. Ne caricaturez pas mes propos, monsieur Bouvard ! Je vous ai dit que nous étions partagés sur cette question ; acceptez que l’on défende parfois un point de vue différent du vôtre : ce que je dis n’est pas une bêtise !
Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe écologiste.
L’amendement n’est pas adopté.
Titre III
RÉHABILITER L’IMMOBILIER DE LOISIR PAR UN URBANISME ADAPTÉ
Chapitre Ier
Rénover la procédure des unités touristiques nouvelles
I. – Le livre Ier du code de l’urbanisme est ainsi modifié :
1° À la fin du 4° de l’article L. 104-1, la référence : « L. 122-24 » est remplacée par la référence : « L. 122-26 » ;
2° Au dernier alinéa de l’article L. 121-13, les mots : » l’autorisation prévue à l’article L. 122-19 vaut » sont remplacés par les mots : » les autorisations prévues aux articles L. 122-20 et L. 122-21 valent » ;
2° bis (Supprimé)
3° Le premier alinéa de l’article L. 122-15 est ainsi rédigé :
« Le développement touristique et, en particulier, la création ou l’extension des unités touristiques nouvelles prennent en compte les communautés d’intérêt des collectivités territoriales concernées et la vulnérabilité de l’espace montagnard au changement climatique. Ils contribuent à l’équilibre des activités économiques et de loisirs, notamment en favorisant la diversification des activités touristiques ainsi que l’utilisation rationnelle du patrimoine bâti existant et des formules de gestion locative des constructions nouvelles. » ;
4° Le paragraphe 1 de la sous-section 4 de la section 1 du chapitre II du titre II comprend les articles L. 122-16 à L. 122-18 et son intitulé est ainsi rédigé : « Définition des unités touristiques nouvelles » ;
5° Les articles L. 122-16 à L. 122-18 sont ainsi rédigés :
« Art. L. 122 -16. – Toute opération de développement touristique effectuée en zone de montagne et contribuant aux performances socio-économiques de l’espace montagnard constitue une “unité touristique nouvelle”, au sens de la présente sous-section.
« Art. L. 122 -17. – La liste des unités touristiques nouvelles structurantes est fixée par décret en Conseil d’État.
« Art. L. 122 -18. – La liste des unités touristiques nouvelles locales est fixée par décret en Conseil d’État. » ;
6° Le paragraphe 2 de la même sous-section 4 est ainsi rédigé :
« Paragraphe 2
« Régime d’implantation des unités touristiques nouvelles
« Art. L. 122 -19. – À l’exception des articles L. 122-5 à L. 122-7, le présent chapitre et le chapitre II du titre IV du livre III du code du tourisme sont applicables aux unités touristiques nouvelles.
« Art. L. 122 -20. – La création et l’extension d’unités touristiques nouvelles structurantes sont prévues par le schéma de cohérence territoriale qui en définit les caractéristiques conformément à l’article L. 141-23.
« La création ou l’extension d’une unité touristique nouvelle structurante est soumise, après avis de la commission spécialisée du comité de massif, à l’autorisation de l’autorité administrative, selon des modalités définies par décret en Conseil d’État, lorsque cette unité est située dans une commune qui n’est pas couverte par un schéma de cohérence territoriale.
« Art. L. 122 -21. – La création et l’extension d’unités touristiques nouvelles locales sont prévues par le plan local d’urbanisme qui en définit les caractéristiques conformément aux articles L. 151-6 et L. 151-7.
« La création ou l’extension d’une unité touristique nouvelle locale est soumise à l’autorisation de l’autorité administrative, selon des modalités définies par décret en Conseil d’État, lorsque cette unité est située dans une commune qui n’est pas couverte par un plan local d’urbanisme. Cette autorisation est délivrée par l’autorité administrative, après avis d’une formation spécialisée de la commission départementale de la nature, des paysages et des sites.
« Art. L. 122 -22. – Le projet de création d’unités touristiques nouvelles soumis à autorisation en application des articles L. 122-20 ou L. 122-21 est préalablement mis à la disposition du public pendant un mois, dans des conditions lui permettant de formuler ses observations.
« Ces observations sont enregistrées et conservées.
« La nature des documents communiqués au public et les modalités de leur mise à disposition sont précisées par l’autorité administrative et portées à la connaissance du public au moins huit jours avant le début de cette mise à disposition.
« À l’issue de la mise à disposition et avant de prendre sa décision, l’autorité administrative en établit le bilan.
« Art. L. 122 -23. – Les autorisations prévues aux articles L. 122-20 ou L. 122-21 prennent en compte les besoins de logements destinés aux salariés de la station, notamment les travailleurs saisonniers, et peuvent, le cas échéant, en imposer la réalisation. Elles peuvent prévoir des dispositions pour l’accueil et l’accès aux pistes des skieurs non-résidents.
« Art. L. 122 -24. – Les autorisations de création ou d’extension d’une unité touristique nouvelle prévues aux articles L. 122-20 ou L. 122-21 deviennent caduques si, dans un délai de cinq ans à compter de leur notification au bénéficiaire, les équipements et les constructions autorisés n’ont pas été engagés. En cas de recours, le délai de caducité est suspendu pendant la durée des instances.
« Lorsque les travaux d’aménagement ou de construction ont été interrompus pendant une durée supérieure à cinq ans, cette caducité ne s’applique qu’à l’égard des équipements et constructions qui n’ont pas été engagés. L’autorisation peut être prorogée une seule fois, pour une durée de cinq ans, par délibération du conseil municipal.
« Art. L. 122 -25. – Dans les communes non couvertes par un schéma de cohérence territoriale :
« 1° Les autorisations d’occupation du sol nécessaires à la réalisation des unités touristiques nouvelles structurantes ne peuvent être délivrées que dans les communes dotées d’un plan local d’urbanisme ;
« 2° Les autorisations d’occupation du sol nécessaires à la réalisation des unités touristiques nouvelles locales ne peuvent être délivrées que dans les communes dotées d’une carte communale ou d’un plan local d’urbanisme. » ;
7° La section 2 du même chapitre II est ainsi rédigée :
« Section 2
« Prescriptions particulières de massif
« Art. L. 122 -26. – Lorsque les directives territoriales d’aménagement n’y ont pas déjà pourvu, des décrets en Conseil d’État pris après l’organisation d’une enquête publique réalisée conformément au chapitre III du titre II du livre Ier du code de l’environnement, sur proposition des comités de massif prévus à l’article 7 de la loi n° 85-30 du 9 janvier 1985 relative au développement et à la protection de la montagne, peuvent définir des prescriptions particulières sur tout ou partie des massifs définis à l’article 5 de la même loi, pour :
« 1° Adapter en fonction de la sensibilité des milieux concernés les seuils et critères des études d’impact spécifiques aux zones de montagne fixés en application des articles L. 122-1 à L. 122-3 du code de l’environnement, ainsi que les seuils et critères d’enquête publique spécifiques aux zones de montagne fixés en application du chapitre III du titre II du livre Ier du même code ;
« 2° Désigner les espaces, paysages et milieux les plus remarquables du patrimoine naturel et culturel montagnard, notamment les gorges, grottes, glaciers, lacs, tourbières, marais, lieux de pratique de l’alpinisme, de l’escalade et du canoë-kayak ainsi que les cours d’eau de première catégorie, au sens du 10° de l’article L. 436-5 du code de l’environnement, et leurs abords, et définir les modalités de leur préservation ;
« 3° Préciser, en fonction des particularités de tout ou partie de chaque massif, les modalités d’application des articles L. 122-5 à L. 122-11 du présent code.
« Art. L. 122 -27. – Pour l’élaboration des propositions de prescriptions particulières de massif, les comités de massif peuvent recourir gratuitement, en tant que de besoin, aux services techniques de l’État ainsi qu’aux conseils d’architecture, d’urbanisme et de l’environnement. » ;
8° Après le premier alinéa de l’article L. 141-3, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« En zone de montagne, ce diagnostic est établi également au regard des besoins en matière de réhabilitation de l’immobilier de loisir et d’unités touristiques nouvelles structurantes. Il prend en compte la localisation des structures et équipements touristiques existants, les besoins globaux en matière d’immobilier de loisir, la maîtrise des flux de personnes, les objectifs de consommation économe de l’espace et de préservation de l’environnement, des paysages et du patrimoine architectural ainsi que les objectifs de protection contre les risques naturels. » ;
9° L’article L. 141-23 est ainsi rédigé :
« Art. L. 141 -23. – En zone de montagne, le document d’orientation et d’objectifs définit la localisation, la nature et la capacité globale d’accueil et d’équipement, notamment en matière de logement des salariés, y compris les travailleurs saisonniers, des unités touristiques nouvelles structurantes. » ;
10° Le 5° de l’article L. 143-20 est ainsi rédigé :
« 5° Au comité de massif lorsqu’il est totalement ou partiellement situé en zone de montagne ainsi que, lorsqu’il prévoit la création d’une ou plusieurs unités touristiques nouvelles structurantes, à la commission spécialisée compétente du comité ; »
11° Au 1° de l’article L. 143-25, la référence : « L. 122-24 » est remplacée par la référence : « L. 122-26 » ;
12° L’article L. 143-26 est abrogé ;
13° Au premier alinéa de l’article L. 143-28, les mots : « et d’implantations commerciales » sont remplacés par les mots : «, d’implantations commerciales et, en zone de montagne, de réhabilitation de l’immobilier de loisir et d’unités touristiques nouvelles structurantes, » ;
14° Après le deuxième alinéa de l’article L. 151-4, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« En zone de montagne, ce diagnostic est établi également au regard des besoins en matière de réhabilitation de l’immobilier de loisir et d’unités touristiques nouvelles. » ;
15° Après le mot : « transports », la fin du premier alinéa de l’article L. 151-6 est ainsi rédigée : «, les déplacements et, en zone de montagne, sur les unités touristiques nouvelles. » ;
16° L’article L. 151-7 est ainsi modifié :
a) Au début du premier alinéa, est ajoutée la mention : « I. – » ;
b) Il est ajouté un II ainsi rédigé :
« II. – En zone de montagne, ces orientations définissent la localisation, la nature et la capacité globale d’accueil et d’équipement des unités touristiques nouvelles locales. » ;
17° L’article L. 153-16 est complété par un 4° ainsi rédigé :
« 4° À la formation spécialisée de la commission départementale de la nature, des paysages et des sites, lorsque le projet de plan local d’urbanisme prévoit la réalisation d’une ou plusieurs unités touristiques nouvelles locales dans les conditions prévues au II de l’article L. 151-7 du présent code. L’avis porte uniquement sur les unités touristiques locales.» ;
17° bis Au 1° de l’article L. 153-25, la référence : « L. 122-24 » est remplacée par la référence : « L. 122-26 » ;
18° Après le premier alinéa de l’article L. 153-27, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« L’analyse des résultats porte également, le cas échéant, sur les unités touristiques nouvelles mentionnées à l’article L. 122-16 du présent code. »
I bis. – Le chapitre II du titre VII du livre IV du même code est ainsi modifié :
1° L’article L. 472-2 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« L’autorisation d’exécution des travaux est assortie d’une obligation de démontage des remontées mécaniques et de leurs constructions annexes. Ce démontage doit intervenir dans un délai de trois ans à compter de la mise à l’arrêt définitive de ces remontées mécaniques. » ;
2° L’article L. 472-4 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque des remontées mécaniques n’ont pas été exploitées durant cinq années consécutives, le représentant de l’État dans le département met en demeure l’exploitant de procéder à leur mise à l’arrêt définitive. »
II. – §(Non modifié) Le code de l’environnement est ainsi modifié :
1° Au second alinéa de l’article L. 333-2, la référence : « L. 122-24 » est remplacée par la référence : « L. 122-26 » ;
2° Au deuxième alinéa de l’article L. 341-16, la référence : « L. 122-19 » est remplacée par la référence : « L. 122-21 » ;
3° Au dernier alinéa de l’article L. 563-2, la référence : « à l’article L. 122-19 » est remplacée par les références : « aux articles L. 122-20 ou L. 122-21 ».
III. – §(Non modifié) À l’article L. 342-6 du code du tourisme, la référence : « L. 122-23 » est remplacée par la référence : « L. 122-25 ».
III bis. – Au début de la section II du chapitre Ier du titre IV de la loi n° 85-30 du 9 janvier 1985 précitée, il est ajouté un article 74 bis ainsi rédigé :
« Art. 74 bis. – I. – La création ou l’extension d’une unité touristique nouvelle peut être réalisée dans le cadre d’une procédure intégrée pour les unités touristiques nouvelles, dans les conditions définies à l’article L. 300-6 et au I bis de l’article L. 300-6-1 du code de l’urbanisme.
« La procédure intégrée pour les unités touristiques nouvelles est conduite dans un délai de quinze mois à compter de son engagement pour les unités touristiques nouvelles structurantes et dans un délai de douze mois à compter de son engagement pour les unités touristiques nouvelles locales. Lorsque la mise en compatibilité du document d’urbanisme n’est pas approuvée dans ces délais, l’autorité administrative compétente de l’État peut finaliser la procédure, après avoir demandé aux collectivités territoriales ou à leurs groupements compétents pour élaborer le document d’urbanisme de lui communiquer les motifs justifiant la méconnaissance de ces délais.
« II. –
Supprimé
« III. – Le présent article fait l’objet d’une évaluation dans un délai de trois ans à compter de la promulgation de la loi n° … du … de modernisation, de développement et de protection des territoires de montagne. »
IV. – Le présent article entre en vigueur à une date fixée par décret et au plus tard un an après la publication de la présente loi. Toutefois :
1° Les demandes d’autorisation de création ou d’extension d’unités touristiques nouvelles déposées avant l’entrée en vigueur du présent article demeurent régies par les dispositions antérieurement applicables ;
2° Les schémas de cohérence territoriale ou les plans locaux d’urbanisme approuvés avant l’entrée en vigueur du présent article demeurent régis par les dispositions antérieurement applicables jusqu’à leur prochaine révision réalisée en application, respectivement, de l’article L. 143-29 ou du 1° de l’article L. 153-31 du code de l’urbanisme. Il en est de même pour les projets de schéma de cohérence territoriale ou de plan local d’urbanisme arrêtés avant l’entrée en vigueur du présent article. Si le schéma de cohérence territoriale n’a pas prévu d’unités touristiques nouvelles locales, celles-ci peuvent néanmoins être réalisées dans une commune couverte par un plan local d’urbanisme, à la condition que ce dernier les prévoie, conformément aux articles L. 151-4 à L. 151-7 du code de l’urbanisme dans leur rédaction issue de la présente loi.
V. –
Supprimé
La parole est à M. le président de la commission des affaires économiques.
Près du quart des amendements déposés sur ce projet de loi porte sur les dispositions relatives à l’urbanisme.
Si je voulais me rendre sympathique à cette assemblée, je dirais que je lance un appel pour que les interventions soient plus concises, ce qui nous permettrait de ne pas siéger trop tard cette nuit…
Quels sont les enjeux liés à cet article ? De nombreux amendements visent à modifier à nouveau les règles d’urbanisme. On a même parfois l’impression que certains de leurs auteurs veulent jouer le « match retour », après la discussion du projet de loi relatif à l’égalité et à la citoyenneté, qui n’est pas encore définitivement adopté.
Mes chers collègues, sur l’initiative du président Gérard Larcher, un groupe de travail transpartisan animé par François Calvet et Marc Daunis a été créé. Il a présenté à la commission des affaires économiques un rapport qui a servi de base à l’élaboration d’une proposition de loi tendant à simplifier les règles d’urbanisme, adoptée à l’unanimité par notre assemblée.
Nous avons donc voté cette proposition de loi il y a quelques semaines, et un certain nombre d’amendements visent déjà remettre en cause une partie de ses dispositions !
Dans le cadre des travaux menés par nos deux collègues, un questionnaire a été envoyé aux maires. Plus de 10 000 réponses ont été reçues : le chiffre est considérable. Les maires nous demandent de simplifier, mais ils ajoutent qu’il ne faut pas remettre en cause sans cesse les règles d’urbanisme. Cette volonté de stabilité est très fortement exprimée par les élus. La raison en est simple : en matière d’urbanisme, entre le moment où une disposition légale est adoptée et celui où elle s’applique, il se passe plusieurs années. En effet, il faut prendre des textes d’application, les services instructeurs rendent des avis pas toujours cohérents d’un département à l’autre, une jurisprudence se construit, des décisions en matière d’urbanisme étant contestées devant les tribunaux : tout cela dure des années !
Actuellement, de nombreuses collectivités sont en train d’élaborer des plans d’urbanisme, souvent intercommunaux. Vouloir dès à présent remettre en cause les règles d’urbanisme nous expose à une véritable révolte des élus !
Je ne suis pas certain d’être entendu, parce qu’il y a toujours de bons arguments pour proposer de modifier un texte qui va bientôt s’appliquer. Cela étant, la commission des affaires économiques a été très ferme : sur la centaine d’amendements déposés, elle n’en a adopté que cinq ou six. Pour le reste, mes chers collègues, je vous renvoie à vos responsabilités !
Applaudissements sur certaines travées du groupe socialiste et républicain. – M. Alain Bertrand applaudit également.
L’amendement n° 225, présenté par MM. Dantec, Poher, Labbé et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 2
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
…° Après le 4° de l’article L. 104-1, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« …° Les unités touristiques nouvelles définies aux articles L. 122-17 et L. 122-18. » ;
La parole est à M. Ronan Dantec.
La soumission des unités touristiques nouvelles, les UTN, à une évaluation environnementale constitue une exigence fondamentale tant en opportunité, au regard des enjeux, qu’en droit, pour respecter les directives communautaires.
En opportunité, compte tenu de la définition des UTN et de la présentation du dossier par la commune d’implantation, quels que soient le ou les maîtres d’ouvrage des travaux prévus, une UTN constitue un programme de travaux constituant une unité fonctionnelle et économique.
L’intérêt majeur de cette notion d’UTN introduite par la loi Montagne de 1985 est bien de permettre de monter un dossier avec une vision stratégique de l’avenir, en amont des différentes autorisations opérationnelles, qui pourront s’étaler sur plusieurs années, concerner plusieurs maîtres d’ouvrage distincts et exiger des études techniques fines. C’est donc à ce stade qu’il faut mener des études économiques, financières et environnementales d’ensemble permettant de fonder un jugement sur le dossier.
Avec la rédaction adoptée à l’Assemblée nationale, la nature des UTN n’est pas modifiée et leur définition, y compris en partie réglementaire, restera la même pour les UTN en SCOT ou hors SCOT, telle que la définition législative est construite.
En droit européen, pour les mêmes raisons, une UTN, quelle qu’en soit la procédure d’approbation, constitue un programme touristique au sens du droit communautaire relatif à l’évaluation environnementale.
Puisque ces UTN sont susceptibles d’avoir des incidences notables sur l’environnement, elles s’inscrivent tout à fait dans ce que prévoit le droit communautaire et présentent toutes les caractéristiques pour être soumises à évaluation environnementale au titre de la directive 2001/42/CE. Toute exception constitue donc un manquement au droit communautaire.
La transposition de cette directive pose aujourd’hui quelques difficultés, mais si nous n’adoptons pas ces dispositions, nous allons vers des contentieux sur chaque projet et sur le cadre légal de l’UTN. Pour éviter que des projets ne soient de nouveau bloqués demain, il faut absolument soumettre les UTN à une évaluation environnementale.
Cet amendement tend à soumettre les UTN à une évaluation environnementale et impose, de ce fait, une obligation redondante.
En effet, les UTN sont créées, le plus souvent, par des documents d’urbanisme qui sont eux-mêmes soumis à évaluation environnementale en zone de montagne.
Lorsque l’UTN est créée par autorisation préfectorale sur un territoire non couvert par un SCOT, elle doit de toute manière être intégrée dans le plan local d’urbanisme, qui doit être modifié ou révisé à cette fin. À ce stade, une évaluation environnementale intervient donc.
L’avis de la commission est défavorable.
Je veux d’abord m’associer aux propos du président Lenoir : cessons de vouloir tout modifier avant même que les lois soient entrées en application ! Nous avons trouvé difficilement un équilibre à l’Assemblée nationale. Je vous demande de ne pas tout remettre systématiquement en question ; sinon, les élus locaux se trouveront placés dans une situation impossible.
Nous avons constaté qu’il n’y a pas de difficulté lorsqu’un SCOT existe, puisque les procédures relatives aux UTN y sont prévues. Il n’y a pas non plus de difficulté quand existe un PLUI.
Les problèmes se posent en l’absence de ces deux documents, pas faciles à élaborer, surtout en zones de montagne. Nous avons voulu donner la possibilité aux maires et aux promoteurs de se lancer néanmoins dans la réalisation d’UTN dans un tel cas. Pour cela, il a fallu trouver un équilibre entre, d’une part, le nécessaire contrôle du respect des lois et une certaine rigueur, et, d’autre part, une souplesse permettant d’agir entre la révision du SCOT et la construction du PLUI.
Vouloir aller plus loin revient soit à complexifier le droit, soit à renoncer à établir une règle du jeu, avec tous les dangers que cela comporte, particulièrement en zone de montagne.
La solution à laquelle nous sommes parvenus à l’Assemblée nationale, avec le concours tant de la majorité que de l’opposition, relève d’un équilibre de raison. On peut toujours préciser et améliorer le dispositif à la marge, mais ne jetons pas à bas ce qui a été difficilement et patiemment construit. Écoutons plutôt les sages propos du président Lenoir.
Dans cet esprit, j’émets un avis défavorable sur l’amendement n° 225. En effet, les UTN ne constituent pas un plan ou un programme au sens de la directive européenne. Je rappelle que l’objectif est de planifier la création des UTN dans des documents d’urbanisme. Les SCOT, ainsi que les procédures des PLU et des PLUI portant sur la réalisation des UTN sont systématiquement soumis à évaluation environnementale.
Enfin, les UTN, au stade de la réalisation du projet, seront soumises à étude d’impact, en application de la nomenclature du code de l’environnement.
Il me semble inutile d’ajouter davantage de contraintes. Nous risquerions de rendre les choses totalement impossibles !
Je trouve M. le ministre très sûr de lui quant à son appréciation de la situation du point de vue du droit communautaire ! La transposition de la directive européenne que j’ai mentionnée fait l’objet d’une procédure en manquement engagée par la Commission européenne : je peux même vous indiquer son numéro d’enregistrement. Il est donc difficile d’affirmer que le droit communautaire est respecté.
Je reste convaincu que, précisément dans les cas où il n’existe pas de SCOT ni de PLUI, ne pas instaurer l’obligation de réaliser une évaluation environnementale risque de fragiliser les projets et de conduire à des contentieux.
L’adoption de cet amendement ne rendrait pas plus difficile la réalisation d’UTN et limiterait les risques de recours.
Je suis totalement opposé à cet amendement et salue la position adoptée par M. le ministre.
Pour que les choses soient claires, je tiens à préciser que deux types d’UTN existent : des UTN immobilières et des UTN liées à l’aménagement d’un domaine skiable ou d’un golf, les secondes étant moins nombreuses que les premières depuis quelques années.
La procédure des UTN a été créée à une époque où la montagne connaissait un développement accéléré. Elle reste une procédure d’exception, très lourde et très coûteuse. Je ne suis pas sûr que beaucoup de nos collègues aient déjà monté de tels dossiers ou siégé au sein d’un comité chargé de se prononcer sur un projet de création d’UTN.
Cette procédure nécessite au minimum deux ans à deux ans et demi de démarches, elle s’est encore complexifiée au cours des dernières années, et les auteurs de cet amendement nous proposent de créer des dépenses supplémentaires en amont, ainsi que des occasions de recours devant les tribunaux…
Aujourd’hui, les UTN font presque systématiquement l’objet de recours de la part d’associations qui ont une vision intégriste de la montagne.
De quoi parlons-nous ? La montagne équipée, c’est-à-dire les domaines skiables, représente 3 % du territoire montagnard dans le massif alpin, le plus développé de ce point de vue, et les zones susceptibles d’être équipées à peine 0, 5 %. Il faut donc cesser de fantasmer sur une montagne qui serait complètement artificialisée !
En ce qui concerne la directive européenne, j’avais déposé un amendement relatif aux études d’impact qui a été déclaré irrecevable au titre de l’article 41 de la Constitution. Contrairement à ce qui vient d’être dit, la directive a été transposée. Elle prévoyait la possibilité de fixer des seuils en dessous desquels l’étude d’impact n’est pas nécessaire. Or la transposition française a rendu l’étude d’impact obligatoire dans tous les cas ! De ce fait, quand vous voulez allonger le trajet d’un téléski de 150 mètres pour réduire la pente et renforcer ainsi la sécurité des enfants, par exemple, vous êtes obligés de procéder à une étude d’impact, et le chantier prend deux ans de retard !
L’amendement n’est pas adopté.
L’amendement n° 461, présenté par MM. Cornano, Antiste, S. Larcher et Patient et Mme Yonnet, est ainsi libellé :
Alinéa 3
Rédiger ainsi cet alinéa :
3° Le dernier alinéa de l’article L. 121-13 est supprimé ;
La parole est à Mme Évelyne Yonnet.
Cet amendement vise à modifier les règles d’urbanisme dans les communes riveraines de lacs de plus de 1 000 hectares.
Avis défavorable.
L’amendement n’est pas adopté.
L’amendement n° 284 rectifié, présenté par MM. Mézard, Arnell, Barbier, Bertrand, Castelli, Collin, Esnol et Fortassin, Mmes Laborde et Malherbe et MM. Requier et Vall, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Rétablir le 2° bis dans la rédaction suivante :
2° bis Après le mot : « soumise », la fin de la deuxième phrase du premier alinéa de l’article L. 122-7 est ainsi rédigée : «, par le représentant de l’État dans le département, à l’avis de la commission départementale de la nature, des paysages et des sites, ou à celui de la commission départementale de la préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers, ou à celui de ces deux commissions. » ;
La parole est à M. Alain Bertrand.
À l’Assemblée nationale, nous avons voulu simplifier, afin qu’il n’y ait qu’une procédure au lieu de deux.
Avis défavorable.
Rires.
L’amendement n° 284 rectifié est retiré.
L’amendement n° 93 rectifié, présenté par MM. Cornano, Antiste, S. Larcher et Patient, Mme Yonnet et M. Desplan, est ainsi libellé :
Alinéa 6
1° Première phrase
Après le mot :
vulnérabilité
insérer les mots :
observée et prévisionnelle
2° Seconde phrase
Supprimer les mots :
la diversification des activités touristiques ainsi que
3° Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
La localisation, la conception et la réalisation d’une unité touristique nouvelle respectent la qualité des sites et les grands équilibres naturels, ainsi que les continuités écologiques mentionnées à l’article L. 371-1 du code de l’environnement.
La parole est à Mme Évelyne Yonnet.
L’intensité du changement climatique et la gravité de ses conséquences en montagne justifient pleinement une prise en compte spécifique dans la loi. Cette prise en compte doit concerner toutes les politiques de la montagne, en particulier pour le développement touristique et les UTN.
L’amendement n’est pas adopté.
Je suis saisi de trois amendements identiques.
L’amendement n° 147 rectifié est présenté par MM. Carle et Savin.
L’amendement n° 189 rectifié bis est présenté par MM. L. Hervé, Bonnecarrère, Canevet, Capo-Canellas, Cigolotti, Gabouty et Guerriau, Mme Joissains et MM. Kern, Longeot, Médevielle et Pellevat.
L’amendement n° 306 est présenté par Mme Espagnac.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Après l’alinéa 9
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Les extensions limitées inférieures aux seuils des créations d’unités touristiques nouvelles fixés par décret en Conseil d’État ne sont pas soumises à la présente sous-section.
La parole est à M. Jean-Claude Carle, pour présenter l’amendement n° 147 rectifié.
Les procédures de création d’UTN sont longues, coûteuses et très encadrées, comme l’a rappelé notre collègue Michel Bouvard.
Le présent amendement vise à écarter du champ d’application du régime des UTN les simples extensions d’une ampleur inférieure aux seuils de création définis par un décret en Conseil d’État.
Cet amendement va dans le sens souhaité par le Président de la République, celui de la simplification, de la réduction des normes et des contraintes !…
La parole est à M. Loïc Hervé, pour présenter l’amendement n° 189 rectifié bis.
La parole est à Mme Frédérique Espagnac, pour présenter l’amendement n° 306.
Puisqu’il s’agit de simplifier et de réduire les normes, la commission a émis un avis favorable.
Je mets aux voix les amendements identiques n° 147 rectifié, 189 rectifié bis et 306.
Les amendements sont adoptés.
L’amendement n° 322 rectifié, présenté par MM. Delcros, Bonnecarrère, Canevet, Capo-Canellas et Cigolotti, Mme Férat, M. Gabouty, Mme N. Goulet, M. Guerriau, Mme Joissains et M. Médevielle, est ainsi libellé :
Alinéa 10
Compléter cet alinéa par les mots :
et soumise à l’avis des élus territoriaux concernés
La parole est à M. Bernard Delcros.
De nouvelles procédures sont mises en place, relatives aux UTN « structurantes » et aux UTN « locales ». Elles n’ont pas fait l’objet d’une concertation très approfondie avec les associations d’élus. Nous proposons donc que celles-ci soient consultées sur le projet de décret en Conseil d’État fixant la liste et les conditions de création de ces UTN.
Les auteurs de cet amendement proposent que les UTN soient répertoriées sur une liste fixée par décret et soumise à l’avis des élus territoriaux concernés.
Il est évident que le Gouvernement se concertera avec les associations d’élus pour fixer les seuils des UTN. Il n’est donc pas forcément utile d’inscrire ce principe dans la loi.
Par ailleurs, je rappelle que l’article 5 du projet de loi prévoit une consultation obligatoire du Conseil national de la montagne sur toutes les dispositions visant les territoires de montagne.
La commission émet un avis défavorable.
Je sollicite le retrait de cet amendement, qui est satisfait. En effet, comme vient de le dire M. le rapporteur pour avis, l’article 5 du projet de loi prévoit la consultation du Conseil national de la montagne sur tout projet de loi ou de décret spécifique à la montagne.
L’amendement n° 322 rectifié est retiré.
Je suis saisi de quatre amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
Les amendements n° 213 et 441 sont identiques.
L’amendement n° 213 est présenté par Mme Espagnac.
L’amendement n° 441 est présenté par M. Bouvard.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 11
Remplacer cet alinéa par trois alinéas ainsi rédigés :
« Art. L. 122 -18. – Constituent des unités touristiques nouvelles locales :
« 1° Celles dont la liste est fixée par décret en Conseil d’État ;
« 2° Le cas échéant, celles définies par le plan local d’urbanisme, dans les conditions prévues au II de l’article L. 151-7. » ;
La parole est à Mme Frédérique Espagnac, pour présenter l’amendement n° 213.
Cet amendement vise à rétablir la possibilité d’identifier en tant qu’UTN d’intérêt local, dans le cadre du PLU, des projets dont l’ampleur serait en deçà des seuils fixés par le décret en Conseil d’État.
L’amendement n° 324 rectifié, présenté par MM. Delcros, Bonnecarrère, Canevet, Capo-Canellas et Cigolotti, Mme Férat, M. Gabouty, Mme N. Goulet, M. Guerriau, Mme Joissains et M. Médevielle, est ainsi libellé :
Alinéa 11
Compléter cet alinéa par les mots :
et soumise à l’avis des élus territoriaux concernés
La parole est à M. Bernard Delcros.
L’amendement n° 29 rectifié, présenté par MM. Delcros, L. Hervé, Lasserre et les membres du groupe Union des Démocrates et Indépendants - UC, est ainsi libellé :
Alinéa 11
Compléter cet alinéa par les mots :
, à l’exclusion de toute opération de construction ou d’extension d’hébergements et d’équipements touristiques d’une surface de plancher totale inférieure ou égale à 1 000 mètres carrés, et des logements à destination des personnels saisonniers ou permanents des équipements et hébergements touristiques
La parole est à M. Bernard Delcros.
Les amendements identiques n° 213 et 441 visent à rétablir la possibilité de créer des UTN en deçà des seuils fixés par le décret en Conseil d’État. Cela est contraire à la position de la commission. J’ai moi-même proposé de supprimer cette possibilité, qui semble de nature à créer des tensions inutiles entre les communes dans certaines intercommunalités de montagne. L’avis est donc défavorable.
L’avis de la commission est également défavorable sur les amendements n° 324 rectifié et 29 rectifié, pour les mêmes raisons.
La rédaction initiale du projet de loi prévoyait cette faculté, afin de permettre aux élus de faire face à des situations nouvelles. Cette souplesse a été jugée source d’insécurité juridique par la commission des affaires économiques du Sénat, qui l’a supprimée. Je m’en remets à la sagesse de la Haute Assemblée.
Je remercie M. le ministre de l’avis qu’il vient d’émettre.
Il me semble possible de donner un peu de souplesse dans ce domaine. Monsieur le ministre, à l’Assemblée nationale, vous aviez indiqué à M. Joël Giraud que vous pourriez donner une information sur les seuils envisagés d’ici à l’examen du texte par le Sénat.
Pourriez-vous nous donner un éclairage sur ce point ? En l’absence de cette information, je maintiendrai mon amendement.
Monsieur le sénateur, les engagements que j’ai pris à l’Assemblée nationale ont été tenus. Les délais étaient brefs pour organiser une concertation sur ce sujet très complexe. La discussion, en particulier sur les seuils, est ouverte et nous parviendrons très rapidement à des conclusions qui vous seront aussitôt communiquées, comme je m’y suis engagé.
Les amendements sont adoptés.
En conséquence, les amendements n° 324 rectifié et 29 rectifié n’ont plus d’objet.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à seize heures quinze, pour une déclaration du Gouvernement, suivie d’un débat, en application de l’article 50-1 de la Constitution.
La séance est suspendue.
La séance, suspendue à seize heures, est reprise à seize heures quinze, sous la présidence de M. Gérard Larcher.
L’ordre du jour appelle une déclaration du Gouvernement, suivie d’un débat, en application de l’article 50-1 de la Constitution.
La parole est à M. le Premier ministre.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain. – M. Alain Bertrand applaudit également.
Monsieur le président du Sénat, permettez-moi de vous dire à quel point je me sens honoré d’être à cette tribune cet après-midi. Il ne s’agit pas pour moi de faire une déclaration de politique générale, puisque le ministre des affaires étrangères et du développement international, Jean-Marc Ayrault, vous a lu la déclaration que j’ai faite devant l’Assemblée nationale hier après-midi au moment même où je la prononçais.
M. Bernard Cazeneuve, Premier ministre. Je vous rassure, je n’ai pas l’intention de procéder à la relecture de ce texte devant vous aujourd’hui…
Ah !sur les travées du groupe Les Républicains et de l'UDI-UC.
Je ne voudrais pas infliger une deuxième punition à ceux pour lesquels cette lecture a été une souffrance
Rires.
, ce qui serait une mauvaise manière de témoigner de mon amitié à cette assemblée
M. André Gattolin applaudit.
, pour laquelle j’ai une parfaite affection.
M. Pierre Charon applaudit.
Si je parlais de mon sentiment d’honneur à l’instant, c’est parce que j’ai toujours eu plaisir à passer du temps parmi vous dans les fonctions que j’ai été amené à occuper jusqu’à présent ; j’ai toujours goûté la manière dont les sénateurs et sénatrices de toute sensibilité contribuent à faire la loi ; j’ai toujours été très impressionné par cette exigence de rigueur, couplée à un esprit de consensus et de compromis, qui existe ici plus qu’ailleurs.
Au moment où cette responsabilité, qui est un honneur, m’est confiée par le Président de la République, j’ai la volonté – je le dis ici très sincèrement – de faire en sorte que le débat vive, à l’orée de la période particulière que va traverser notre pays. Il y aura des échéances électorales, auxquelles nous participerons : le Gouvernement apportera sa contribution en défendant le bilan du quinquennat et en faisant des propositions. Pour autant, par respect pour les Français et parce que le populisme gagne du terrain jour après jour, nous devons tout mettre en œuvre pour que la confrontation des points de vue et des idées entre nous, notamment au sein de la représentation nationale, puisse se faire dans le respect, comme je l’ai souligné hier à la fin de mon intervention à l’Assemblée nationale.
M. Jean-Louis Carrère applaudit.
Du respect, parce que les Français entendent jour après jour dans l’espace public le vacarme et le bruit provoqués par des oppositions qui s’apparentent parfois à des postures. Or ils veulent que les choix de projet qu’ils auront à faire leur soient présentés clairement, dans le respect des convictions des uns et des autres, surtout de celles qu’ils ne partagent pas forcément eux-mêmes.
Très attaché à l’apaisement du débat public, convaincu que notre pays est confronté à trop d’enjeux essentiels pour que nous ne cherchions pas à rechercher les compromis les plus utiles sur les questions essentielles, je m’emploierai, dans les responsabilités qui sont les miennes, à faire en sorte que ces notions de respect, d’écoute et d’élévation du débat public par l’effort collectif qui sera le nôtre puissent prévaloir sur toute autre considération.
Mesdames, messieurs les sénateurs, j’ai conscience de la gravité du moment où je suis amené à prendre ces fonctions. Même si je suis nommé pour peu de temps, cela ne change pas le contexte de la mission qui m’a été confiée. La période est d’une particulière gravité, pour des raisons qui tiennent d’abord à la situation internationale.
Je le sais, vous qui êtes particulièrement attachés aux valeurs humanistes ayant toujours rassemblé les républicains et conduit notre pays à tenir un discours universel, vous êtes tous choqués, scandalisés, révoltés par ce qui passe à Alep, à l’instant où je vous parle.
Des enfants, des femmes sont assassinés, persécutés par un régime dont nous pressentions depuis quelques mois – mais nous en avons désormais la confirmation – qu’il ne sait pas faire autre chose que de devenir le meurtrier de son propre peuple. Des hommes, souvent jeunes, qui sont enrôlés de force dans l’armée de Bachar al-Assad, ou qui, s’ils refusent, sont exécutés dans les conditions que l’on sait ; l’impossibilité pour des familles entières de quitter Alep, faute de couloir humanitaire ; l’incapacité des alliés de Bachar al-Assad, qui, pour un certain nombre d’entre eux, sont des puissances – je pense notamment à la Russie –, de mettre fin à cette catastrophe : tout cela est une honte et révolte un très grand nombre de nos concitoyens ainsi que la communauté internationale. Cette situation conduira la France à agir inlassablement pour la paix et pour que ces crimes abjects cessent.
À cet égard, je veux saluer l’action conduite par le chef de notre diplomatie, sous l’impulsion et l’autorité du Président de la République, qui a demandé la mise en place d’un couloir humanitaire, ainsi que la présence sur place d’observateurs internationaux et d’organisations non gouvernementales. Il a par ailleurs souhaité que le Conseil de sécurité des Nations unies se réunisse, de sorte que toutes les initiatives soient prises pour permettre de sortir des femmes, des enfants, des familles de cet enfer d’Alep.
Je sais à quel point nous pouvons compter sur l’ensemble des sénateurs et des sénatrices pour accompagner la voix de la France et de tous ceux qui sont attachés aux valeurs que nous portons.
Le contexte est aussi particulier pour des raisons qui tiennent à la menace terroriste. C’est pourquoi j’ai souhaité que le Gouvernement se fixe pour objectif dans les cinq mois qui viennent – croyez-moi, chaque jour compte dans la lutte antiterroriste ! – de mobiliser toute son énergie et toute sa force pour assurer la protection du pays contre ce risque.
Notre pays a été durement frappé, ce qui nous a conduits à réorganiser nos forces de sécurité et nos services de renseignement pour faire face. D’ici à la fin du quinquennat, plus de 9 000 emplois de policiers et de gendarmes, dont 2 000 dans les services de renseignement, auront été créés. Ainsi, le renseignement territorial a été renforcé dans le cadre de la Direction générale de la sécurité intérieure, laquelle a été érigée en direction à part entière du ministère de l’intérieur.
Par ailleurs, toujours sur la question du terrorisme, nous avons créé les conditions d’initiatives européennes essentielles pour que nous puissions, avec nos partenaires de l’Union européenne, être beaucoup plus efficaces que nous ne l’étions dans la prévention et la lutte contre ceux qui veulent frapper nos pays européens et qui ont déjà frappé certains d’entre eux.
Je pense à la mise en place de FRONTEX, avec son corps de gardes-côtes et de gardes-frontières, qui permet désormais d’être plus efficace dans le contrôle des frontières extérieures de l’Union européenne.
Je pense aussi à l’action engagée par la France pour alimenter, conforter le système d’information Schengen et pour connecter ce système à l’ensemble des autres fichiers criminels.
Je pense enfin à la lutte contre la fraude documentaire et à la directive pour lutter contre le trafic d’armes.
Bref, sur tous ces sujets, le ministre de l’intérieur Bruno Le Roux sait qu’il devra continuer à agir, jour après jour, heure après heure, car, sur bien de questions qui se posent encore, concernant notamment la directive sur les armes et l’interconnexion des fichiers, nous devons progresser. Or beaucoup des négociations relatives à ces questions essentielles au sein de l’Union européenne se dénoueront dans la période qui nous sépare de la fin du quinquennat.
(Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.) – sur la question de la protection sociale. Pour notre part, nous avons une position très claire, très nette : nous pensons qu’il est possible de réformer sans porter atteinte au service public, sans remettre en cause notre système de protection sociale
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain. – Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.
Protéger les Français, c’est aussi protéger leur modèle social. Je sais que cette question sera au cœur du débat pour l’élection présidentielle. Le programme sur lequel s’est appuyé le candidat qu’a désigné l’opposition, et à l’élaboration duquel, je l’imagine, un certain nombre d’entre vous ont participé, définit des orientations extrêmement claires – ou du moins l’étaient-elles jusqu’à une période récente ! §, …
… et que l’on peut assurer la solidarité en matière de santé, de préparation au vieillissement, de handicap sans organiser, à aucun moment, un quelconque recul. Je veux être extrêmement clair : le débat qui s’engage à l’occasion de l’élection présidentielle dans le respect ne signifie pas que nous n’avons pas vocation à nous dire les choses.
Parce que j’ai été ministre du budget et que nous avons eu à débattre de ces sujets à plusieurs reprises au cours des dernières années, permettez-moi de revenir sur un certain nombre de questions sur lesquelles j’aimerais que nous puissions tous tomber d’accord pour la qualité du débat.
Ce gouvernement, à la tête duquel je me trouve, et qui est l’héritier des politiques menées par mes deux prédécesseurs, Jean-Marc Ayrault et Manuel Valls, a-t-il contribué ou non au rétablissement des comptes publics au cours des dernières années ?
Oui ! sur les travées du groupe socialiste et républicain. – Non ! sur les travées du groupe Les Républicains.
Mais il ne suffit pas d’apporter la réponse ; encore faut-il prouver que la réponse correspond à la réalité, et je vais vous en faire la démonstration chiffrée de manière extrêmement précise.
Lorsque nous sommes arrivés aux responsabilités en 2012, le déficit budgétaire de notre pays était de 5, 3 %.
M. Bernard Cazeneuve, Premier ministre. Si l’on en croit la Commission européenne et le Haut Conseil des finances publiques, il sera inférieur à 3 % en 2017.
Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.
M. Bernard Cazeneuve, Premier ministre. Sauf à ce que l’arithmétique et les mathématiques aient totalement changé leurs règles, il me semble que 5 % est supérieur à 3 % ! Entre 5, 2 % et un peu moins de 3 %, il a dû se produire, si nous comprenons la même chose, une diminution de l’ordre de 2 points du déficit budgétaire de l’État…
Applaudissementssur les travées du groupe socialiste et républicain. – M. Alain Bertrand et Mme Aline Archimbaud applaudissent également.
Sourires ironiques sur les travées du groupe Les Républicains .
M. Bernard Cazeneuve, Premier ministre. Si je peux admettre, mesdames, messieurs les sénateurs, que l’opposition, qui est tout à fait légitime à nous adresser cette critique, considère que les déficits ont diminué moins vite qu’elle aurait pu le souhaiter, elle ne peut toutefois pas dire qu’ils ont augmenté.
Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.
Oui, je le répète, nous avons diminué le déficit budgétaire de 5, 3 % à 3 % entre 2012 et aujourd’hui. Nous avons pu y parvenir, tout simplement, en faisant en sorte que le taux de progression de la dépense publique diminue. Entre 2007 et 2012, la dépense publique avait augmenté de 170 milliards d’euros ; son taux de progression annuel était de 3, 3 %, et il est aujourd’hui de 1, 2 %.
Oui, ce gouvernement et les gouvernements qui l’ont précédé, sous la responsabilité de François Hollande, ont fait diminuer les déficits et ont maîtrisé la dépense publique, …
M. Bernard Cazeneuve, Premier ministre. … pour une raison très simple : sans maîtrise de la dépense publique, nous ne pouvons pas assurer la soutenabilité de notre modèle social.
Bravo ! et applaudissementssur les travées du groupe socialiste et républicain. – M. Alain Bertrand et Mme Aline Archimbaud applaudissent également.
Je veux donc dire aux sénateurs ayant contribué à ce résultat qu’ils ont toutes les raisons d’être fiers d’avoir accompli cette œuvre, même s’il reste encore beaucoup à faire pour moderniser l’État.
Permettez-moi également d’évoquer la situation des comptes sociaux.
En 2012, le déficit des comptes du régime général de la sécurité sociale s’élevait à 17, 4 milliards d’euros, contre 400 millions d’euros cette année.
Nous avons quasiment réalisé le retour à l’équilibre des comptes du régime général de la sécurité sociale.
M. Bernard Cazeneuve, Premier ministre. Comme vous êtes des républicains attachés au modèle social français, vous devriez vous en réjouir collectivement et remercier la majorité d’être parvenue à ce résultat !
Mêmes mouvements.
Si nous avons réussi à faire ce travail, ce n’est pas parce que nous avons procédé à des déremboursements ou parce que nous avons remis en cause l’hôpital public. Non ! C’est parce que nous avons fait un certain nombre de réformes importantes, dont l’hôpital et la sécurité sociale avaient besoin.
M. Bernard Cazeneuve, Premier ministre. Je vais vous le dire : le développement de la chirurgie ambulatoire, la modulation du prix du médicament, la réforme des retraites, bref autant de réformes qui ont permis, en l’espace de cinq ans, de diminuer le déficit du régime général de la sécurité sociale de 17 milliards d’euros, ce qui n’était pas arrivé depuis des années. Cette diminution permet en outre, et ce pour la première fois depuis le début des années 2000, de réduire la dette de la sécurité sociale. Cela, c’est à la majorité qui a soutenu ce gouvernement qu’on le doit. Je veux dire aux sénateurs et aux sénatrices de la gauche de cet hémicycle qu’ils ont toutes les raisons d’être fiers d’avoir contribué à ce résultat.
Nouveaux applaudissements sur les mêmes travées. – Vives exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.
Mesdames, messieurs les sénateurs, si nous pouvons mettre en place aujourd'hui…
Le micro de M. le Premier ministre s’éteint.
M. Bernard Cazeneuve, Premier ministre. Ce n’est pas parce que ce je dis déplaît à la majorité sénatoriale qu’il faut couper mon micro ; ce n’est pas convenable !
Sourires.
Rires.
M. Bernard Cazeneuve, Premier ministre. Si cette information est exacte, on doit pouvoir s’arranger !
Exclamations amusées sur l’ensemble des travées.
Si nous avons pu, notamment dans le projet de loi de finances pour 2017, mettre en place le tiers payant pour les femmes enceintes et les Français victimes d’affections de longue durée jusqu’au mois de novembre 2017, puis pour l’ensemble des Français au-delà de cette date, c’est précisément parce que nous avons redressé les comptes de la sécurité sociale.
Si nous pouvons permettre à des Français qui rencontrent des difficultés et qui ont besoin de la solidarité nationale pour accéder aux soins dentaires de bénéficier aujourd'hui de remboursements auxquels ils n’avaient pas droit jusqu’à présent, c’est parce que nous avons réussi à rétablir nos comptes.
L’objectif qui est le nôtre aujourd'hui, parce que nous avons réalisé ces efforts, parce que ce gouvernement est attaché à la solidarité nationale et qu’il tient à notre modèle social, est de conforter notre modèle au-delà de ce quinquennat.
Ainsi, le compte personnalisé d’activité doit permettre à des jeunes sans formation d’accéder à l’emploi en bénéficiant d’une première rémunération, ce qui, jusqu’à présent, n’était pas le cas.
Nous avons également souhaité mettre en place des dispositifs de solidarité qui n’existaient pas. Je pense au compte pénibilité pour ceux qui étaient confrontés à l’inégalité face au travail et dont les carrières étaient pénibles.
Je pourrais égrener la liste des mesures que nous avons prises et qui traduisent la philosophie profonde de ce gouvernement : il s’agit, face aux difficultés de la vie, de permettre aux personnes les plus vulnérables de bénéficier de la solidarité de la nation. La campagne pour l’élection présidentielle doit aussi être l’occasion de dire que ceux qui sont attachés à cette solidarité ne permettront pas que le mot « réforme » se conjugue avec l’idée d’une destruction du modèle social français.
Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain. – M. Alain Bertrand et Mme Aline Archimbaud applaudissent également.
La protection se joue en France – elle a été mise en œuvre au travers du rétablissement de nos comptes publics –, mais aussi au sein de l’Union européenne. Cela signifie qu’il nous faut lutter contre les conditions dans lesquelles s’effectue le détachement d’un certain nombre de travailleurs en Europe. Nous avons réussi à modifier la directive de 2014, nous réussirons à modifier celle de 1996. À cet égard, je sais pouvoir compter sur la totale mobilisation de Mme la ministre du travail.
La France ayant été en première ligne au cours des quatre dernières années pour la croissance en Europe, elle doit faire en sorte que le plan Juncker, doté d’une première enveloppe de 300 milliards d’euros, puisse être abondé de 500 milliards d’euros supplémentaires pour développer les projets de demain dont l’Union européenne a besoin, que ce soit dans le domaine de l’écomobilité, des transports, des énergies renouvelables ou de l’équipement numérique.
Sur tous ces sujets, nous devons continuer d’agir au sein de l’Europe, et c’est au cours des cinq prochains mois que cela va se jouer. Je sais également pouvoir compter sur l’ensemble des ministres concernés, en particulier sur M. le secrétaire d’État chargé des affaires européennes, pour mener ce combat sans trêve, sans pause, afin que les voix de l’espérance, dont celle de la France, puissent être entendues.
Les cinq prochains mois seront, j’y insiste beaucoup, importants pour prendre des décisions sur des dossiers qui, pour un certain nombre d’entre eux, sont en cours dans des domaines fondamentaux. §Je pense à l’emploi et à la formation des jeunes notamment.
À cet égard, j’ai demandé à Mme la ministre du travail et à Mme la secrétaire d’État chargée de la formation professionnelle et de l’apprentissage de bien vouloir proroger de six mois le plan de 500 000 formations mis en œuvre au cours de l’année dernière.
Les jeunes qui ont besoin d’une formation pour trouver un emploi, de même que les salariés français qui en ont besoin pour s’y maintenir, doivent pouvoir y accéder dans de bonnes conditions.
Toujours dans le domaine de l’emploi, j’ai également souhaité que nous allions plus loin dans la restauration de la compétitivité des entreprises. À cet effet, le CICE, le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, atteindra 7 % au cours de l’année 2017 et l’impôt sur les sociétés sera ramené à 28 %, contre 33 % il y a quelques années. Cette politique doit être approfondie, amplifiée. C’est la condition de la poursuite de la restauration des marges des entreprises, lesquelles ont progressé de deux points de PIB au cours des dernières années. Un certain nombre d’entreprises industrielles ont retrouvé aujourd'hui leurs marges des années 2000. Quant aux emplois industriels, la France en a créé 220 000 au cours des derniers mois, un niveau qui n’avait pas été atteint depuis de nombreuses années.
Si nous n’avions pas consenti les efforts que nous avons réalisés pour rétablir la compétitivité des entreprises, nous n’aurions jamais pu atteindre ces résultats.
En matière de développement durable, nous développerons les transports de demain, grâce à des projets importants. Je pense, par exemple, au RER E en Île-de-France. Ce dossier doit aboutir, car il peut permettre de développer les transports en commun dans les villes d’Île-de-France confrontées à des problèmes particuliers, comme l’a montré le pic de pollution. Nous ne traiterons pas ces problèmes si nous ne sommes pas capables de substituer de façon plus volontariste les transports en commun aux voitures. En ville, les voitures électriques doivent se substituer progressivement aux véhicules diesel, les véhicules usagés ayant un fort impact sur le niveau de pollution des villes. Un accompagnement des industriels est nécessaire à cet effet.
Nous conduirons la même politique dans de grandes métropoles comme Marseille. Nous continuerons d’accompagner cette grande métropole dans son vaste projet de développement des transports de demain.
Préparer l’avenir, c’est aussi créer des pôles universitaires de niveau international en France, grâce aux initiatives d’excellence : telle est notre volonté. Les pôles de Strasbourg, de Bordeaux et d’Aix-Marseille ont déjà été labellisés. Nous avons examiné d’autres dossiers ce matin en conseil des ministres, dont celui du plateau de Saclay. La recherche, l’innovation, l’université, les industries, les centres de transfert de technologie doivent pouvoir coopérer les uns avec les autres de façon beaucoup plus intégrée, afin de donner à notre pays une véritable chance de créer les conditions du développement des entreprises de demain sur son territoire.
Il nous faut aussi achever la réforme des masters, laquelle doit permettre à un plus grand nombre d’étudiants titulaires d’une licence d’accéder à des cycles supérieurs à l’université. Nous allons continuer de faciliter l’accès à l’université de ceux qui sont le plus en difficulté parce qu’ils ont besoin de la solidarité, en développant les bourses. Ainsi, près de 500 millions d’euros y ont ainsi été consacrés au cours des quatre dernières années. Nous devons poursuivre cette politique, car l’élitisme, la méritocratie républicaine, la capacité de l’école et de l’université à dégager les meilleurs de nos éléments supposent que chacun ait eu une chance égale d’accéder à l’université et à l’école.
À cet égard, il y avait beaucoup à faire, après la suppression de 80 000 emplois au sein de l’éducation nationale au cours des cinq années précédentes
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain et du groupe CRC. – M. Alain Bertrand et Mme Aline Archimbaud applaudissent également. – Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.
Avant de conclure mon propos, mesdames, messieurs les sénateurs, j’insisterai sur le fait que notre pays doit demeurer au cours des cinq prochains mois à la hauteur des défis du monde, …
… en particulier dans le domaine migratoire.
Nous avons eu à affronter durant ces derniers mois une crise migratoire sans précédent depuis la Seconde Guerre mondiale. Près de 2 millions de migrants sont arrivés sur le territoire de l’Union européenne. Beaucoup d’entre eux étaient pourchassés par des régimes abjects, des régimes qui persécutent, qui emprisonnent, qui exécutent, comme celui de Bachar al-Assad, comme ceux de l’Érythrée et du Soudan. Des milliers d’hommes et de femmes, livrés à des réseaux de passeurs, prennent tous les risques pour gagner notre continent, non pas pour vivre là où se trouve la richesse, mais tout simplement pour tenter de survivre là où, l’espèrent-ils, un avenir est possible pour eux-mêmes et leurs enfants.
Pour ma part, mesdames, messieurs les sénateurs, je vous le dis très clairement et très franchement, je suis fier d’appartenir à un gouvernement qui, plutôt que de laisser ces femmes, ces hommes, ces enfants dans la boue et dans le froid de Calais, a pris des dispositions pour qu’ils puissent être accueillis partout sur le territoire national.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain, du groupe CRC et sur quelques travées du groupe écologiste et du RDSE.
Je le dis dans cette assemblée, qui est aussi l’assemblée des collectivités locales : je suis fier de la générosité de maires de toutes sensibilités politiques, de droite comme de gauche, d’authentiques républicains considérant que la France ne serait plus la France si elle n’accordait pas sa protection à ceux qui sont persécutés dans leur pays. Oui, je suis fier que 465 communes aient accepté d’accueillir ces femmes et ces hommes. Il s’agit non pas de procéder à la régularisation de migrants en situation irrégulière, mais simplement d’accorder une protection à des femmes et des hommes relevant du statut de réfugié en France.
Je suis également fier d’être à la tête d’un gouvernement qui continuera de se battre pour que la France en Europe joue un rôle majeur dans les processus de relocalisation et de réinstallation des réfugiés.
Je suis fier aussi d’être à la tête d’un gouvernement qui, sur ces questions, qui peuvent susciter des peurs légitimes et des interrogations compréhensibles, s’adressera à chaque instant à l’intelligence de notre peuple plutôt qu’à ses instincts, afin de ne pas abaisser le niveau du débat politique.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain et du groupe CRC. – M. Alain Bertrand et Mme Aline Archimbaud applaudissent également.
Ceux qui ont rejoint notre pays, ceux qui y sont nés et qui ont décidé d’embrasser les valeurs de la République sont chez eux en France. Nous devons faire en sorte que la France demeure fidèle à elle-même, qu’elle reste attachée à la tradition de l’asile et qu’elle soit capable de leur parler le langage que les peuples du monde ont appris à aimer d’elle, pour reprendre la belle et grande formule de François Mitterrand.
Murmures sur les travées du groupe Les Républicains.
Face à la gravité du contexte auquel nous sommes confrontés, face à la profondeur et à la complexité des défis qui se présentent à nous, je n’ai dans cette responsabilité nouvelle qu’une seule et unique aspiration : faire au mieux, sans jamais avoir la garantie de bien faire. Tous ceux qui ont dirigé un gouvernement savent parfaitement que les choses sont complexes et que la volonté ne suffit pas toujours à relever tous les défis. Mais sans elle, rien n’est possible.
Cette volonté, je veux la mettre chaque jour sur le métier avec une boussole, et une seule, la plus sûre, la plus fiable qui soit : le sens de l’État. Je souhaite le faire de façon absolument désintéressée, puisque je ne participerai pas à la compétition qui s’engage, mais avec l’amour de la patrie, l’amour de la France et avec la volonté de faire en sorte que notre pays s’élève au-dessus de lui-même.
Mmes et MM. les sénateurs du groupe socialiste et républicain, ainsi que plusieurs sénateurs du groupe écologiste et du groupe du RDSE, se lèvent et applaudissent longuement.
Acte est donné de la déclaration du Gouvernement.
Nous allons maintenant procéder au débat sur la déclaration du Gouvernement.
Dans le débat, la parole est à M. Philippe Dallier, pour le groupe Les Républicains.
Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.
Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, nous vivons un moment étrange, car jamais discours de politique générale n’aura aussi mal porté son nom.
Ce n’est pas spécialement votre faute, monsieur le Premier ministre. Cela est dû plutôt aux circonstances et au moment choisi pour votre nomination.
Nous sommes à un peu moins de cinq mois de l’échéance présidentielle ; le projet de loi de finances pour 2017 est en passe d’être adopté, en tout cas par l’Assemblée nationale ;…
Pas par le Sénat, c’est sûr : il a démissionné ! L’Assemblée nationale, elle, prend ses responsabilités !
… le Parlement cessera ses travaux dans quelques semaines. Autant dire qu’il n’est plus question de changer quoi que ce soit à la politique conduite jusqu’à présent, et encore moins d’en définir une nouvelle.
Dès lors, l’exercice imposé du discours de politique générale est tout simplement vide de sens.
Voilà bien une première sous la Ve République, qui découle d’une autre première : la décision du Président de la République de ne pas briguer un second mandat.
Exclamations sur les travées du groupe socialiste et républicain.
Il l’a indiqué lors de son intervention le 1er décembre dernier, égrenant ce qu’il considérait comme des réussites, à tel point que j’ai cru un instant qu’il allait se représenter…
Ne nous a-t-il pas en effet déclaré : « J’ai assaini les comptes publics » ;…
J’avoue que, en préparant cette intervention, j’ai pris la précaution de le réécouter pour être certain que j’avais bien entendu.
Ainsi, les comptes publics seraient assainis, …
… alors que le déficit du seul budget de l’État affiché pour 2017 est de 70 milliards d’euros et que personne ne croit à la prévision de croissance pour l’année prochaine.
La sécurité sociale serait à l’équilibre, …
M. Philippe Dallier. … alors que le déficit prévisionnel de la branche maladie, pour 2017, est de 2, 6 milliards d’euros et que l’équilibre, version Marisol Touraine, est un déficit de 400 millions d’euros, essentiellement dû à l’excédent de la branche vieillesse pour 1, 6 milliard d’euros, conséquence heureuse des réformes que nous avons adoptées et que vous avez toujours refusé de voter !
Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et de l'UDI-UC.
Surtout, le financement du Fonds de solidarité vieillesse porterait ce déficit à 4, 2 milliards d’euros pour l’année prochaine. Et je ne parle pas des 160 milliards d’euros de la dette sociale.
Enfin, toujours plus fort, le Président de la République nous a également déclaré : « La dette publique est préservée. »
M. Philippe Dallier. « Préservée » ? Quel drôle de terme ! Elle aura progressé de 500 milliards d’euros depuis 2012, pour atteindre 2 200 milliards d’euros !
Exclamations sur les travées du groupe socialiste et républicain.
Mais dans quelle bulle vit donc le Président de la République pour tenir pareil discours ?
Quant au chômage, contre lequel François Hollande s’était engagé à lutter lors de la campagne de 2012, il se situe encore à des sommets en raison de la politique de l’assommoir fiscal qui a tué la croissance. Or, sans croissance, nous ne ferons pas reculer durablement le chômage ; nous ne rétablirons pas nos équilibres budgétaires ; nous ne réduirons pas notre dette.
Tel est le véritable bilan de François Hollande que vous venez de reprendre à votre compte, monsieur le Premier ministre, et c’est bien ce bilan, plus encore que ses confidences déplacées à des journalistes en mal de scoops, qui l’empêche d’être à nouveau candidat.
D’ailleurs, ce bilan, ce sont ses anciens ministres et ses amis qui en parlent le mieux, que ce soit Arnaud Montebourg, Benoît Hamon ou Martine Aubry, tous les frondeurs, ou même, dans un registre différent, Emmanuel Macron, qui, samedi dernier, s’époumonait à la porte de Versailles pour nous expliquer qu’il fallait faire la révolution…
M. Philippe Dallier. La révolution, rien que cela ! Mais que ne l’a-t-il donc pas faite lorsqu’il était le conseiller du Président de la République à l’Élysée, puis son ministre ?
Mme Joëlle Garriaud-Maylam applaudit.
Voilà, mesdames, messieurs les sénateurs, où en est rendue cette majorité, qui n’en est plus une depuis longtemps !
C’est donc bien sous le poids de son bilan, qui est un boulet, et sous l’amicale pression de ses amis, notamment celle de son Premier ministre, Manuel Valls, pressé de tenter sa chance, que François Hollande a décidé, contraint et forcé, de renoncer.
Jamais, depuis 1958, la France n’avait connu pareille situation. Chacun peut, en cet instant, mesurer et louer la solidité de notre Constitution, qui nous évite une crise institutionnelle, alors même que, à l’évidence, il n’y a plus de majorité pour soutenir la politique du Gouvernement.
Si le général de Gaulle avait pu voir que cette Constitution, après tout le mal que la gauche a pu en dire, permettrait à un Président de la République socialiste, lâché par les siens et par l’opinion, de se maintenir, envers et contre tous, il en aurait bien ri. Oui, il en aurait ri, mais, lui, dans une telle situation, il en aurait tiré les conséquences en redonnant la parole au peuple, …
… quand d’autres ne pensent qu’à durer, encore un peu. Leur seul objectif, et le Président de la République nous l’a dit, est de donner à leur camp une petite chance supplémentaire de conserver le pouvoir, alors que c’est de l’avenir de la France qu’il s’agit.
N’en doutons pas, les Français jugeront sévèrement cette attitude fort peu courageuse.
De quoi seront donc faites les quelques semaines qui nous séparent du 7 mai 2017 ?
Il n’est pas très difficile de le deviner. Ce sera le temps des chrysanthèmes et des couronnes de fleurs : …
… les chrysanthèmes qu’inaugurera le Président de la République et les couronnes de fleurs que finiront par déposer en hommage, à ses pieds, ceux-là mêmes qui l’ont enterré politiquement.
Alors que la crise économique appelle des réformes structurelles et des décisions fortes, nous allons perdre quelques mois dans le crépuscule d’une gauche qui ne sait plus où elle en est, qui n’a plus de chef ou, plutôt, qui en a trop, et qui n’a surtout plus de boussole. À coup sûr, l’hiver sera rude. Vivement le printemps !
Monsieur le Premier ministre, vous êtes condamné à expédier les affaires courantes ; encore faudrait-il le faire sur tous les dossiers.
Quelle ne fut pas notre surprise de vous entendre, à peine installé, déclarer que le dossier de l’aéroport Notre-Dame-des-Landes n’était pas une priorité et qu’il n’y aurait donc probablement pas d’évacuation du site avant l’élection présidentielle. Vous nous aviez habitués à plus de courage !
Mais surtout, quel affaiblissement de l’État à un moment où chacun sent bien la nécessité de faire respecter la loi et les décisions des tribunaux ! Et des décisions de tribunaux, vous n’en manquez pas, puisqu’il y en a eu 178 sur le sujet.
Restent la politique étrangère de la France et la sécurité des Français.
Sur la première, à l’évidence, la voix du Président de la République et de son gouvernement, quoi que vous en disiez, ne va plus beaucoup porter. Nos partenaires attendent déjà leur nouvel interlocuteur en mai prochain.
Je veux cependant, sur ce point, vous faire part de notre indignation sur la petite musique que certains, à gauche – pas vous, monsieur le Premier ministre ! –, distillent depuis la tragique chute d’Alep.
Il y a bien des responsables à cette situation, ils sont en Syrie, et nous espérons, comme vous tous, qu’ils seront poursuivis pour leurs crimes.
M. Philippe Dallier. Mais il faudrait également que les Occidentaux, les États-Unis, l’Europe, la grande absente, et même la France s’interrogent sur la politique conduite jusqu’à présent. En refusant de dialoguer avec la Russie, on lui a finalement laissé les mains libres.
Exclamations sur les travées du groupe socialiste et républicain.
Écoutez-moi ! Qu’avez-vous obtenu comme résultat ? Celui que nous constatons ! Quelqu’un ici le juge-t-il satisfaisant ?
M. Philippe Dallier. Depuis des mois, François Fillon n’a pas dit autre chose. Il est donc absolument indigne de voir aujourd’hui certains le pointer du doigt après la chute d’Alep.
Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.
À l’évidence, la France ne pouvait pas agir seule. Mais quelles initiatives efficaces a-t-elle prises ? Aucune, malheureusement, et je le regrette.
Enfin, en matière de sécurité intérieure, monsieur le Premier ministre, la majorité sénatoriale sera à votre écoute, comme cela a été le cas jusqu’à présent. Elle le sera sur la prolongation de l’état d’urgence, car il est nécessaire de lever l’obstacle des prochaines échéances électorales. Nous formons des vœux pour la pleine réussite de votre action en ce domaine.
Mes chers collègues, il nous reste encore un peu de travail à accomplir jusqu’à la fin du mois de février, mais l’heure du bilan a bel et bien sonné. Les Français rendront bientôt leur verdict.
Monsieur le Premier ministre, vous avez dit hier à l’Assemblée nationale que vous n’étiez pas en poste pour éteindre la lumière avant de partir. Vous avez raison, laissez-la allumée, nous pourrons ainsi nous mettre immédiatement au travail.
Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et de l'UDI-UC.
La parole est à M. David Rachline, pour la réunion administrative des sénateurs ne figurant sur la liste d’aucun groupe politique.
Monsieur le Premier ministre, comme prévu, votre discours souligne que votre action au cours des prochains mois ne résoudra aucunement les problèmes qui touchent la France et les Français.
Sans avoir la prétention de vous faire en trois minutes un discours de politique générale, je vais tout de même vous présenter les grandes lignes de la politique que nous voulons mener au service de la France et des Français.
Comme nous sommes profondément démocrates
Protestations sur les travées du groupe socialiste et républicain.
Il est également plus que temps de faire en sorte que l’ensemble des Français soient représentés au Parlement. Nous mettrons donc en place la représentation proportionnelle intégrale. Pour réconcilier les Français avec la politique, il faut, d’une part, qu’ils sachent qu’ils seront écoutés et, d’autre part, qu’ils soient tous représentés dans leur diversité.
Mais à quoi bon redonner au peuple son pouvoir s’il ne peut l’exercer ? Notre objectif sera de retrouver notre souveraineté nationale et donc de rendre sa souveraineté au peuple de France, sans laquelle la défense de la démocratie n’est qu’un élément de langage dans la bouche d’une élite totalement déconnectée.
Souveraineté législative tout d’abord : il est grand temps que le Parlement redevienne le lieu de l’élaboration de la loi française et non plus une chambre d’enregistrement de lois votées, ou plutôt imposées, par des instances supranationales sans aucune légitimité démocratique.
Souveraineté économique ensuite : seul moyen de s’attaquer au chômage de masse qui touche nos compatriotes, seul moyen de faire baisser les impôts mis en place sur ordre de Bruxelles, au nom du dogme de l’austérité, et seul moyen, bien sûr, de redonner aux entreprises françaises la capacité de se battre à armes égales dans cette économie mondialisée en mettant en place, comme cela existe dans de nombreux pays, un patriotisme économique.
Souveraineté régalienne, bien sûr, sur l’ensemble de notre territoire : il ne doit plus y avoir de quartiers dans lesquels la loi qui s’applique n’est pas la loi française, plus de frontières non contrôlées, plus de villages ou de banlieues sans services publics.
En retrouvant notre souveraineté, nous préserverons notre identité. Nous ne voulons pas de l’importation du multiculturalisme en France. Nous ne voulons pas d’une immigration massive qui fait que, dans certains quartiers, les gens ne se sentent plus chez eux. Nous ne voulons pas de l’islamisation d’une partie de notre territoire et de notre population.
Nous souhaitons que la France continue de puiser ses forces dans son histoire millénaire. Nous souhaitons que la France continue d’être une voix différente dans le concert des nations et qu’elle ne soit plus soumise à Washington ou Bruxelles. Nous souhaitons que la France continue de faire rayonner sa culture qui fait rêver de par le monde. Bref, nous souhaitons que l’identité française ne soit pas diluée dans une mondialisation uniformisante.
Il y a aujourd’hui dans notre pays un souffle d’espérance, ce même souffle qui a jadis animé Jeanne d’Arc, les poilus de Verdun et les résistants des Glières. §Cette espérance est portée aujourd’hui par Marine Le Pen !
Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, mes chers collègues, je souhaite, avant toute chose, à cette tribune, exprimer ma solidarité avec les populations civiles qui souffrent et meurent à Alep et dans le monde, ce monde où la violence s’installe, encouragée par le jeu dangereux des grandes puissances depuis des décennies. Si j’ai un vœu à formuler du haut de cette tribune, c’est de demander que soit décrété l’état d’urgence, l’état d’urgence de la paix !
Monsieur le Premier ministre, j’ai écouté avec attention votre déclaration de politique générale. Ce qui m’a frappée d’emblée, c’est le pari impossible que vous tentez : celui d’écrire une nouvelle page du quinquennat, une page où chaque jour compte, où vous pourriez remonter le cours du temps, rendre acceptable à notre peuple, et particulièrement à ceux qui vous ont porté au pouvoir, un bilan qu’ils n’acceptent pas, qu’ils rejettent tant que, pour la première fois de l’histoire de la Ve République, un Président doit avouer son échec avant même la fin de son premier mandat et renoncer à une nouvelle candidature. Vous parlez d’acte courageux, mais vous ne pouvez nier l’échec, l’échec puissant aux conséquences encore masquées sur la vie politique de notre pays.
Cet échec, ce terrible bilan ne vient pas de nulle part ou d’une opposition de droite si affûtée qu’elle aurait poussé François Hollande au renoncement. Cet échec puise sa source dans le renoncement à l’espérance née du rejet de Nicolas Sarkozy et du discours antilibéral du candidat socialiste.
La genèse de l’échec, c’est la soumission, dès l’automne 2012, au traité budgétaire européen, qui porte en son sein l’austérité, la soumission aux dogmes des traités européens libéraux.
Cette renégociation promise par le candidat – monsieur le Premier ministre, vous le savez très bien, car vous étiez alors ministre délégué chargé des questions européennes – aurait pu être l’acte fondateur d’une politique de progrès social, de justice fiscale, de développement économique, au service d’une lutte déterminée contre le chômage.
Être élu pour lutter contre la finance et valider dans la foulée un traité de soumission aux intérêts financiers garantissait la suite du quinquennat et la débandade actuelle du pouvoir exécutif et de sa majorité.
La suite, nous la connaissons. Si l’on met de côté quelques mesures positives qui ont pu masquer l’oubli des promesses, comme « le mariage pour tous », ce fut surtout une succession de lois et de mesures répondant aux souhaits des marchés financiers et de ceux qui organisent leur domination en Europe.
Le pacte de responsabilité et le choix clair d’une politique d’austérité, c’est-à-dire de restrictions des dépenses publiques et de contraintes pesant sur les salariés, furent les premières manifestations de cette soumission aux choix libéraux.
La mesure phare de ce pacte, le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, le CICE, a frappé et frappe encore par son caractère unilatéral. Ce qui devait être du donnant-donnant avec le patronat – rappelons-nous que M. Gattaz avait promis un million d’emplois ! – est donc devenu un formidable cadeau.
Monsieur le Premier ministre, le bilan du quinquennat, qui est aussi le vôtre, est marqué par cette disposition inique. Ce crédit d’impôt a coûté 60 milliards d’euros depuis sa création au budget de la nation, et vous proposez aujourd’hui une nouvelle progression, à hauteur de 7 %.
Hier, vous n’avez pas décrit la réalité du CICE : Carrefour, par exemple, a empoché 146 millions d’euros en 2014 au titre de ce dispositif, alors que, depuis 2012, la progression de ses dividendes est de 25 % ! Quant au groupe Auchan, il a reçu 88 millions d’euros, alors que les salaires de ses dirigeants étaient augmentés de 12, 5 % en 2015 ! Et comment justifier que La Poste, qui a empoché, en 2015, 341 millions d’euros au titre du CICE, poursuive aujourd’hui sa politique d’autodestruction ?
Pourquoi, monsieur le Premier ministre, de tels choix, si ce n’est pour mettre en œuvre le dogmatisme induit par le traité Merkel-Sarkozy évoqué plus haut ? C’est ce choix originel qui a renvoyé aux calendes grecques la réforme fiscale pourtant promise par Jean-Marc Ayrault.
Le bilan est lourd : explosion de la TVA, impôt injuste par nature, qui frappe riches et pauvres au même niveau ; réduction importante que vous voulez encore accélérer, monsieur le Premier ministre, de l’impôt sur les sociétés – comme si le CICE ne suffisait pas ! – ; matraquage des classes moyennes par l’impôt sur le revenu et les impôts locaux, alors que l’évasion fiscale se poursuit et que les 500 familles les plus riches ont vu leur patrimoine augmenter de 25 % en cinq ans.
Mais de tout cela, vous n’avez pas parlé, car ce bilan tourne le dos à l’idée même d’une politique de gauche. Il tourne le dos au projet d’une politique de croissance, d’une politique d’investissement au service de l’emploi.
Monsieur le Premier ministre, nous abordons le point crucial qui, selon nous, explique le retrait de François Hollande : la lutte contre le chômage et la lutte contre la précarité, qui ne peuvent être menées efficacement en continuant d’alimenter massivement les rouages de la mondialisation financière.
Partager les richesses pour, d’une part, améliorer les salaires et relancer la consommation, et, d’autre part, replacer l’argent dans l’investissement productif et créatif dans la recherche est une voie de rupture avec l’ordre libéral que vous n’avez même pas commencé à explorer.
Vous le savez bien, le vernis financier gangrène notre société. C’est lui qui menace nos grandes entreprises publiques, nos services publics comme la SNCF et La Poste. En prônant leur modernisation, c’est en fait leur casse que vous prônez, ouvrant ainsi la voie aux privatisations thatchériennes promises par M. Fillon et ses amis.
Monsieur le Premier ministre, la déclinaison du renoncement de 2012, c’est la loi Macron, puis la loi El Khomri, cette loi qui s’attaque au droit du travail. Ces deux lois, vous les avez passées sous silence ou presque.
Et pour cause, elles sont pour beaucoup dans la faillite politique de ce quinquennat, dans la cassure de la majorité, dans la rupture profonde avec votre électorat et, plus largement, le peuple de France.
Ces deux textes furent adoptés en recourant au 49-3, car ils avaient reçu un accueil minoritaire non seulement dans l’opinion, mais aussi à l’Assemblée nationale.
La loi Macron est une liste à la Prévert libérale. Sous couvert de modernité, de révolution en marche, c’est un saut vers le passé, celui où les puissances d’argent régnaient sans résistance sur la destinée des pays et des peuples.
Cette loi, qui privatise des aéroports bradés – ou en passe de l’être – à des consortiums financiers souvent basés à l’étranger, cette loi qui autorise l’extension du travail le dimanche, cette loi qui a créé des bus estampillés au nom du ministre, cette loi mortifère pour le rail écologique, qui prévoit des aménagements fiscaux pour les actions gratuites distribuées aux cadres dirigeants, cette loi qui casse les élections prud’homales et ouvre la voie vers une commercialisation du droit, est une loi de déstructuration de la société. Elle marque le quinquennat du sceau du désordre libéral et sert l’intérêt d’une minorité au détriment de celui du peuple.
Que dire de la loi Travail ?
Les recours successifs à l’article 49-3 de la Constitution, la mobilisation policière excessive, dangereuse, n’ont pas eu raison de l’hostilité majoritaire de nos concitoyennes et nos concitoyens, ceux qui vous ont donné, monsieur le Premier ministre, votre légitimité. Comment s’étonner que le peuple de gauche vous reprenne cette légitimité face aux agressions dont il a été victime de la part de M. Hollande et de ses gouvernements successifs ?
La loi Travail, c’est le retour à la solitude du travailleur face à la puissance patronale. Vous connaissez votre droit, monsieur le Premier ministre, vous connaissez l’histoire du droit, et vous savez que cette loi nous ramène aux rapports de classe du début du XXe siècle.
Avec mon groupe, nous ne lâchons pas l’affaire, comme l’on dit ! Nous avons déposé une proposition de loi visant à abroger la loi Travail, qui sera discutée ici, au Sénat, le 11 janvier 2017. Nous montrerons alors à tous ceux qui, majoritaires, je le répète, rejettent cette loi inique que la parenthèse désenchantée peut être refermée, que l’espoir d’une rupture avec les choix libéraux, conservateurs qui ont prévalu est le bon pari pour l’avenir.
Par ce texte, déposé ici au Sénat, dont chacun sait qu’il est le laboratoire des projets de la droite où foisonnent les prétendants aux postes ministériels, nous porterons le débat pour contrer le projet ultraconservateur de M. Fillon.
M. Henri de Raincourt s’exclame.
Sourires.
Monsieur le Premier ministre, la soumission aux dogmes libéraux qui marque votre bilan est un véritable tremplin pour cette droite qui entend en finir avec le droit du travail avec une violence inouïe. La surenchère sécuritaire, la prolongation sans fin d’un état d’urgence d’exception, les errements de la déchéance de nationalité encouragent une grave dérive droitière.
Le projet visant à achever la casse des services publics, avec la suppression irresponsable de 500 000 fonctionnaires, le plan de destruction de la sécurité sociale, la liquidation définitive du code du travail sont aujourd’hui, par la faute des concessions à l’idéologie du marché et de la mondialisation financière, à cette vague née des mesures Thatcher et Reagan, une remise en cause des idées de solidarité qui fondent notre République.
Ce projet funeste de la droite, il est minoritaire dans le pays et, sur de nombreux points, largement minoritaire.
La France ne veut pas de la semaine des 48 heures, elle ne veut pas de la suppression de l’ISF.
Cette France, elle veut des écoles ouvertes à tous, qui fonctionnent. Elle veut des hôpitaux permettant l’accès aux soins pour tous. Elle veut une police de proximité. Cette France, elle veut des logements accessibles pour la jeunesse, pour les travailleurs, pour les personnes âgées aux revenus modestes.
Cette France – ma France ! –, elle veut vivre dans la paix, ensemble, sans haine de l’autre. Elle veut remettre en son cœur les valeurs de liberté, d’égalité et de fraternité, idéaux qui s’affichent encore aujourd’hui, et pour longtemps, je l’espère, sur le fronton de nos mairies.
Cette droite, monsieur le Premier ministre, elle peut être battue lors des prochaines échéances électorales, mais seule la rupture exprimée fortement en 2005 par le peuple avec les dogmes libéraux permettra de créer la dynamique pour battre cette droite et l’extrême droite.
Le bilan n’est pas celui que vous avez affiché, monsieur le Premier ministre. Il suffit de parler au peuple pour comprendre le grand écart entre vos propos d’autosatisfaction et la triste réalité de notre pays assommé par le chômage et la pauvreté croissante.
Aujourd’hui, l’heure est au rassemblement pour contrer le retour au pouvoir d’une droite qui entend construire, à l’image de Donald Trump, un nouveau monde sans frein pour les puissances capitalistes.
Chaque jour compte, monsieur le Premier ministre. Oui, chaque jour compte pour reconstruire l’espoir ! Nous, nous savons faire la différence entre la droite et la gauche
Exclamations.
Mme Éliane Assassi. Nous voulons battre la droite et l’extrême droite. Mais sachez que ce quinquennat nous rend la tâche difficile !
Applaudissements sur les travées du groupe CRC.
M. Jacques Mézard. Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, il est des hommes dont les qualités sont sublimées dans les difficultés. Vous êtes de ceux-là, monsieur le Premier ministre. Au cours de ce quinquennat difficile, vous avez eu la charge de combler certaines brèches ouvertes dans le rempart de l’exécutif : Europe, budget, intérieur, Matignon aujourd'hui. Que n’êtes-vous arrivé plus tôt ! Nous vous avons attendu trop longtemps !
Murmures sur les travées du groupe Les Républicains.
Ministre de l’intérieur, vous avez dû faire face avec compétence et courage à un terrorisme aveugle, que tous ici avons rejeté et rejetons, que nous détestons de toute la force de nos convictions, de notre attachement unanime aux valeurs de notre République.
À ce moment de mon propos, au nom du groupe du RDSE, je tiens à rendre une nouvelle fois hommage à toutes ces femmes, à tous ces hommes de nos forces de sécurité qui, depuis tant de mois, sous votre autorité, font tant pour protéger nos concitoyens.
Une fin de quinquennat chaotique vous amène à Matignon, avec un CDD de cinq mois. Je ne doute pas que vous ayez accepté cette mission comme un devoir et un honneur, avec le sens de l’État qui vous caractérise.
Ce n’est pas par hasard si, dans les premiers moments de votre discours de politique générale, vous avez cité Pierre Mendès France, dont les sept mois passés à la présidence du Conseil ont marqué de manière indélébile la vie politique de la France.
Durant les cinq mois qui viennent, le pays doit être gouverné malgré, puis-je dire, la période électorale. Oui, nous voulons un gouvernement et l’on peut penser que le meilleur moyen de valoriser votre action est de la mener. Aux candidats de développer leurs programmes, au Gouvernement de gouverner !
Dans votre discours de politique générale, vous avez insisté sur le bilan de vos prédécesseurs, en plaçant votre action dans la continuité. C’est là l’illustration de votre sens de la loyauté.
Assumer le bilan n’est pas le plus facile. Entre le « tout va bien », le « ça va mieux » de la majorité et le « rien ne va » de l’opposition, il y a une marge, et nous sommes dans cette marge. Cher Philippe Dallier, en général, le chant du coq précède le chant du cygne !
Sourires.
Je ne reviendrai pas sur le bilan de votre prédécesseur. Notre groupe a su dire quand il était en opposition, nous l’avons fait sur les désastreuses réformes territoriales et sur certaines initiatives de caractère populiste. Nous avons pu aussi voter nombre de textes conformes selon nous à l’intérêt général, ce que nous continuerons à faire. Et je souhaite que, dans les débats à venir, nous puissions, les uns et les autres, valoriser la France, ses atouts, son avenir au lieu de la critiquer, comme c’est malheureusement souvent le cas.
La période électorale n’améliorera pas cette double vision dépassée
M. Jean-Louis Carrère applaudit.
Je peux d’ailleurs citer, à la virgule près, ce que je disais ici, le 9 avril 2014, à votre prédécesseur : « Comment aussi ne pas constater que les vraies fractures politiques, voire idéologiques, traversent en fait les deux grands partis dominants à gauche et à droite : sur la construction européenne, sur l’euro, sur l’économie, sur le rôle de l’entreprise, sur la fiscalité, sur l’énergie.
« Le déséquilibre des pouvoirs dans nos institutions est devenu dangereux et plus inquiétant que le millefeuille territorial ! »
Il est des sujets fondamentaux sur lesquels la concertation préalable, raisonnée, est indispensable entre les courants politiques représentés au Parlement, en ayant le bon sens de s’écouter et, donc, en même temps, de mieux écouter les Français. Oui, je le dis de nouveau, dans le respect des convictions des uns et des autres, il n’est jamais trop tôt pour rassembler, il est souvent trop tard !
Dans votre discours, vous avez utilisé le mot « respect » issu, je n’en doute pas, de votre passage dans la sensibilité politique qui est la mienne – cela sera un vrai changement !
Pour nous tous, une démocratie représentative, c’est le respect dû, d’abord, à tous nos compatriotes et à tous ceux qui vivent sur le territoire de la République. Il doit, ensuite, de la part de l’exécutif, s’exprimer, se manifester à l’égard du Parlement et des deux chambres qui le composent.
Soyons clairs, tel ne fut pas vraiment le cas durant les deux derniers quinquennats. Outre le recours abusif à la procédure accélérée, je pense à un comportement général qui, parfois, relève tout simplement du mépris, révélateur du déséquilibre profond de nos institutions, lequel doit d’ailleurs plus à la pratique des exécutifs qu’à la lettre constitutionnelle.
Comment ne pas constater que la profusion de la production législative et réglementaire est inversement proportionnelle au pouvoir du Parlement ? Une responsabilité collective, il faut le dire, entre le pouvoir exécutif et le pouvoir législatif.
Les préoccupations de nos concitoyens, nous les connaissons : sécurité, emploi, pouvoir d’achat, tel est le triptyque dont tout découle et dont chacun des trépieds concerne au premier chef celles et ceux pour lesquels la vie est la plus difficile, celles et ceux qui éprouvent chaque jour une inquiétude pour le lendemain.
En abordant la question du déséquilibre des institutions, avec le poids excessif du Président de la République, dont on voit les conséquences désastreuses lorsqu’il est lui-même fragilisé, je me dois de dire ici fermement que, pour nous, le bicamérisme est essentiel à un fonctionnement équilibré de nos institutions, à la représentation de nos territoires, à une élaboration apaisée de la loi.
Mme Françoise Gatel et M. Jean-François Longeot applaudissent.
C’est donc, monsieur le Premier ministre, avec regret que je relève que des candidats importants aux primaires, de votre sensibilité politique, pour certains, veulent nommer les sénateurs par tirage au sort, que d’autres veulent revenir à ce que le peuple français a rejeté en 1969 : une fusion avec le Conseil économique et social, dans la ligne des propositions du rapport Bartolone-Winock.
Monsieur le Premier ministre, vous êtes ici devant la Haute Assemblée. Il serait bon que vous nous exposiez la position du Gouvernement à ce sujet.
M. Jacques Mézard. Pour être équitable, je me dois de dire que, de l’autre côté, certains responsables – et non des moindres – veulent euthanasier la moitié des parlementaires, comme d’autres, en des siècles passés, faisaient jeter leur tête dans la corbeille pour apaiser la colère du peuple !
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.
Le Parlement, comme tous les secteurs de la société, doit savoir évoluer, d’abord, dans ses méthodes de travail – cela a largement commencé au Sénat – ; cela doit et va se poursuivre. Nous avons tous un premier devoir, celui de travailler !
Mais il est plus que temps d’arrêter de modifier les institutions, …
Je citerai un exemple : depuis 2012, quasiment toutes les règles électorales auront été modifiées, qu’il s’agisse des municipales, des départementales, des intercommunales, des régionales ou des sénatoriales…
Les Anglais changent-ils constamment leurs institutions ? Non ! Pas plus que les Allemands ou les Américains !
Monsieur le Premier ministre, le « bougisme » n’est pas du progressisme, c’est une pathologie !
Applaudissements sur les travées du RDSE, ainsi que sur certaines travées de l'UDI-UC et du groupe Les Républicains.
Oui, le numérique a bouleversé tous les secteurs en général et les relations entre les hommes. Les responsables politiques partout dans le monde ont peiné non seulement à anticiper cette révolution, mais souvent à la suivre, quand ils ne préfèrent pas tout simplement l’imposer.
La réalité des toutes prochaines années, c’est l’intelligence artificielle qui va bouleverser nos économies, nos industries, nos emplois, notre système éducatif, ce sont les ordinateurs quantiques, toutes ces innovations. C’est la démographie galopante de certains pays, le climat, la construction de l’Europe, et j’en oublie !
Monsieur le Premier ministre, disposer de peu de temps peut être le moyen de l’accélérer, surtout avec votre capacité de travail dans les chantiers que vous pourrez impulser !
Avant de conclure, je veux évoquer le dossier européen, grande idée qu’est la construction européenne. Alors que l’Europe est dans une situation qui justifie, voire impose des initiatives fortes, la France peut et doit agir.
Ne nous leurrons pas, de grands empires se constituent ou se reconstituent à l’extérieur de l’Europe, et ils jouent parfaitement de la faiblesse actuelle de l’Europe. Le Brexit, l’élection de Donald Trump, l’affirmation de la Russie, le poids croissant de la Chine et de l’Inde imposent un sursaut européen. Monsieur le Premier ministre, vous connaissez bien ce dossier puisque vous avez été chargé des affaires européennes. Prenez l’initiative, elle ne pourra qu’être bénéfique, y compris à vos successeurs !
Concernant la politique extérieure, le groupe du RDSE, souvent par les voix de Jean-Pierre Chevènement et de Robert Hue, a exprimé des divergences par rapport à la politique menée ces dix dernières années, qu’il s’agisse de l’intervention en Libye, de l’approche du dossier syrien et de la politique française au Moyen-Orient, de nos relations détériorées avec la Russie dont nous risquons d’avoir aggravé les conséquences à la suite de l’élection américaine, l’atlantisme étant en train de sombrer par son côté ouest.
Monsieur le Premier ministre, ne gérez pas une fin de règne ! Surmontez les clivages de circonstances et les conservatismes les plus ancrés ! Redonnez confiance à la Nation, c’est le message bienveillant que vous adresse le groupe du RDSE du Sénat de la République !
Applaudissements sur les travées du RDSE et sur plusieurs travées du groupe écologiste et du groupe socialiste et républicain.
En cette période de fin d’année propice aux vœux, permettez-moi d’espérer, monsieur le Premier ministre, que votre nomination clôturera l’un des épisodes les plus étonnants et peut-être les plus regrettables de la Ve République.
Pendant de longues semaines, au milieu d’urgences telles que le danger terroriste, nos interventions militaires à l’étranger, le sort de six millions de chômeurs, les Français ont assisté à un spectacle curieux : …
… un Président de la République et un Premier ministre, issus du même parti, ont passé leur temps à développer des stratégies machiavéliques pour se pousser à renoncer mutuellement, prenant les Français à témoin.
Spectacle étonnant – pour ne pas dire navrant ! – qui se poursuit désormais sur la thématique du bilan.
Ainsi, à certains moments, et pour justifier d’avoir tué le père, ce quinquennat devient un « échec », une « succession de renoncements », voire une « trahison ». Ces mots ont été prononcés par des personnes ayant exercé de grandes responsabilités dans le Gouvernement.
À d’autres moments, à l’inverse, quand il s’agit de justifier chaque ambition personnelle, le bilan est repeint en rose. On vante alors la distribution de droits et d’égalités plus ou moins réelles que l’on fera financer par les classes moyennes et les générations futures.
Je ne suis pas certain, monsieur le Premier ministre, que cette dialectique à géométrie variable soit de nature à réconcilier nos compatriotes avec l’engagement politique. Nous ne pouvons toutefois vous faire grief de ces joutes qui se déroulent désormais hors du Gouvernement, jusqu’au moment où vos ministres soutiendront des concurrents différents, au risque de perdre toute l’énergie qui leur serait nécessaire pour conduire les politiques ministérielles dont ils ont la charge. Je ne doute pas que vous serez vigilant à cet instant.
À défaut de changer la face du quinquennat, je formule le vœu que votre nomination assure la dignité du terme de cette présidence.
La situation à laquelle notre pays est confronté ne permet pas de passer les cinq prochains mois purement et simplement par pertes et profits.
Je dois vous le dire, malheureusement, nous n’attendons et n’espérons plus rien sur le front économique. En dépit du fameux alignement des astres, vous avez réussi l’exploit de nous faire passer à côté de la reprise, à côté de la croissance, à cause de l’illisibilité de l’action économique, avec un double discours consistant un jour à chanter les louanges de l’entrepreneuriat, en écho, par exemple, à M. Macron, et, le lendemain, à relancer la lutte des classes. Le résultat, c’est que l’investissement est en berne et que nos entreprises performantes et championnes se développent partout, sauf en France !
Les emplois créés – et il y en a ! – se comptent par milliers ou peut-être par dizaines de milliers, alors qu’ils devraient se compter par centaines de milliers.
Protestations sur les travées du groupe socialiste et républicain.
Seuls prospèrent, vous l’avez dit tout à l’heure, les départs en formation. Votre politique budgétaire a, quant à elle, touché ses limites, qu’il s’agisse du budget de la sécurité sociale ou de celui de l’État ; les chiffres ont été rappelés tout à l’heure.
À force de ne remettre en cause aucune des vaches sacrées des fondements idéologiques de la gauche historique et de vous contenter d’économies au rabot sur le dos des collectivités territoriales, vous en êtes maintenant à présenter des budgets insincères.
Nous avons connu, c’est vrai, en fin de mandat, des budgets parfois malicieux, mais vous ne pouvez demander au Parlement de valider une politique consistant à encaisser tout de suite les recettes futures et à reporter les nouveaux engagements électoraux sur 2018 et au-delà.
Vous ne pouvez pas nous reprocher d’expliquer aux Français que le véritable budget pour 2017 sera celui qui sera présenté l’été prochain.
Vous ne pouvez pas non plus nous reprocher de leur expliquer que les comptes de la sécurité sociale ne sont pas à l’équilibre, contrairement à ce que tendent de faire croire les manœuvres comptables et de communication.
Ainsi, monsieur le Premier ministre, en dépit de votre bonne volonté, vous ne pourrez pas modifier le bilan bien médiocre du quinquennat qui s’achève.
De toute façon, vous n’avez, pas plus aujourd’hui qu’hier, de majorité cohérente à l’Assemblée nationale pour suivre un cap clair. C’est bien le problème de l’ambiguïté de la ligne politique avec laquelle vous êtes arrivé au pouvoir et que vous êtes contraint de poursuivre.
Beaucoup de vos amis – je sais que vous n’en êtes pas et que vous êtes même parfois désolé de leur attitude ! – n’ont su se défaire d’une culture d’opposition et se satisfont encore de la facilité de la critique et d’un supposé idéalisme plutôt que de l’exigence de l’exercice du pouvoir.
C’est toutefois parce que vous, vous incarnez depuis quatre ans et demi cette gauche responsable – malheureusement si étroite en nombre – que nous avons envie de penser que les cinq prochains mois pourraient avoir un sens.
En tant que ministre de l’intérieur, nous vous avons souvent entendu proclamer deux priorités absolues : garantir la sécurité des Français…
M. François Zocchetto. Vous êtes désormais Premier ministre, et nous vous demandons de conserver ce cap. Il y a quelques instants encore, vous nous alertiez sur la menace terroriste. Jamais la majorité sénatoriale n’a failli quand vous nous avez demandé de prendre des mesures.
M. le Premier ministre opine.
… et nous continuerons de le faire. Vous connaissez l’ampleur de la tâche qui incombe à nos forces de sécurité. Nous savons tous ici qu’elles font un travail extraordinaire. Mais nous savons aussi à quel point les forces de l’ordre, quelles qu’elles soient, sont épuisées, à bout de souffle, et n’ont malheureusement plus les moyens d’assurer convenablement leurs missions.
J’en veux pour preuve les rassemblements de fonctionnaires de police et, plus largement, quelque chose de plus pernicieux qui recommence à se développer, l’état d’esprit anti-police qui anime de nouveau des pans de notre société. Nous vous demandons donc de donner à nos policiers et à nos gendarmes le plein soutien qu’ils méritent.
Eh oui ! sur les travées du groupe socialiste et républicain.
Comme vous, nous n’avons aucun état d’âme à affirmer que le combat contre le terrorisme doit être poursuivi à l’extérieur de nos frontières. Daech recule en certains endroits, mais la victoire est très loin – vraiment très loin ! – d’être assurée.
D’ailleurs, comment pourrions-nous parler de victoire alors que nous assistons, à Alep, à l’une des pires catastrophes de ces dernières décennies ? Vous n’en êtes évidemment pas personnellement responsable. En revanche, vous avez obstinément refusé, depuis des années, d’avoir tout contact avec le régime syrien ou de discuter avec la Russie. De ce fait, nous sommes obligés de constater que nous manquons aujourd’hui de tout moyen pour intervenir et même influer sur les événements dramatiques et les actes criminels qui sont commis.
La diplomatie sert aussi à maintenir des passerelles avec les régimes les plus critiquables, plutôt qu’à se draper dans des postures moralisatrices qui n’impressionnent personne et qui se sont d’ailleurs révélées contre-productives ces derniers temps.
Monsieur le Premier ministre, la crédibilité de la parole de l’État était également l’une de vos constantes. Il faut dire ce que l’on fait et faire ce que l’on dit.
M. François Zocchetto. Dans cet esprit, vous avez une excellente opportunité de mettre en œuvre votre ligne : je veux parler de l’évacuation du site de Notre-Dame-des-Landes.
Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC, ainsi que sur quelques travées du groupe Les Républicains.
Comment pouvez-vous admettre qu’une minorité ultra-violente impose sa volonté, en dépit de toutes les procédures démocratiques conduites depuis trente ans et des décisions de justice rendues par dizaines ?
Dois-je également vous rappeler le référendum que le gouvernement précédent, auquel vous apparteniez, a lui-même provoqué ?
Et pourtant, depuis une semaine, d’obscures raisons justifieraient un nouveau report de l’évacuation. Je ne peux pas croire, monsieur le Premier ministre, à une manœuvre aussi grossière, qui ferait reposer sur vos successeurs la responsabilité que vous ne voudriez pas assumer. La parole de l’État, celle d’une évacuation, maintes fois réaffirmée dans cette enceinte, y compris par vous-même, ne peut se dissoudre aussi facilement.
Monsieur le Premier ministre, cinq mois, c’est très court.
C’est vrai, vous n’aurez pas le temps nécessaire pour restaurer le quinquennat.
Montrez-nous toutefois que ce quinquennat aurait pu avoir un autre visage et une autre ambition. Donnez-nous des raisons d’espérer qu’une gauche réaliste et constructive pourrait être, demain, une opposition utile !
Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC et du groupe Les Républicains. – M. Alain Bertrand applaudit également.
M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, pour le groupe écologiste.
Applaudissements sur les travées du groupe écologiste.
Monsieur le Premier ministre, hier, dans votre déclaration de politique générale, et aujourd’hui encore, vous avez exprimé une position forte et déterminée sur la situation dramatique à Alep. Le groupe écologiste se joint à vous pour condamner ces atrocités et exprime son soutien à votre démarche.
Monsieur le Premier ministre, la déclaration de politique générale que vous avez présentée hier devant l’Assemblée nationale, et que vous avez synthétisée devant nous tout à l’heure, est de bonne facture, tout en étant paradoxale.
Exclamations amusées sur les travées du groupe socialiste et républicain.
Elle constitue, d’une part, une feuille de route a minima d’un gouvernement gérant une fin de quinquennat pour le moins difficile et, d’autre part, un testament d’une majorité qui, tout au long de son mandat, s’est fracturée faute d’une orientation et d’une action conforme à ses engagements initiaux, faute aussi du souffle nécessaire pour faire vivre l’espoir suscité par l’élection du Président Hollande en 2012.
Le renoncement de celui-ci à se présenter pour un second mandat, fait sans précédent sous la Ve République, souligne de fait, par sa lucidité et sa dignité, cet échec patent et nous engage tous.
Cet échec du Président de la République est un échec de la gauche, qui ne s’est unie, en 2012, que par anti-sarkozysme et n’a jamais bâti le projet commun qui lui fait encore défaut aujourd’hui.
M. Jean Desessard. C’est aussi l’échec du parti socialiste qui, fort de sa majorité absolue à l’Assemblée nationale, a cru pouvoir gouverner seul et qui a persisté dans cette conviction, alors que la majorité s’effritait progressivement, jusqu’au quasi-dépôt d’une motion de censure lors des débats sur la loi Travail l’été dernier.
Exclamations sur les travées du groupe socialiste et républicain.
C’est enfin l’échec de votre prédécesseur, qui a cru que l’article 49, alinéa 3, de la Constitution et la politique du coup de menton pouvaient être des instruments de rassemblement d’une gauche de plus en plus divisée.
Protestations sur les travées du groupe socialiste et républicain.
Monsieur le Premier ministre, si votre déclaration de politique générale s’inscrit dans la continuité, elle souligne aussi, en creux, tous les dysfonctionnements de la gestion passée.
Pour les écologistes, ce quinquennat, marqué par un certain volontarisme, mais aussi par de trop nombreux renoncements, conservera longtemps un goût d’inachevé.
Ainsi, si la diplomatie française peut s’enorgueillir d’avoir permis la conclusion, lors de la COP21, de l’accord planétaire sur le climat, …
… la France n’emprunte pas encore le chemin du respect de ses engagements internationaux.
Si les écologistes se sont reconnus dans l’ambition de la loi sur la transition énergétique, sa mise en œuvre est décevante dans de nombreux domaines qui faisaient justement sa force : diminution de la part du nucléaire, rénovation thermique des bâtiments, fiscalité du carbone. Ces manquements obèrent la capacité de la France à diminuer ses émissions de gaz à effet de serre.
D’une manière plus générale, la philosophie productiviste qui a animé les gouvernements successifs depuis 2012 – l’aide aux entreprises sans contrepartie, le soutien à tous les grands projets d’aménagement, quelle que soit leur utilité – nous semble incompatible avec le cap fixé en matière de transition écologique.
Par ailleurs, nous nous sommes félicités de l’adoption, avec le soutien du pouvoir exécutif, de la majorité de gauche à l’Assemblée nationale et même, parfois, de la majorité sénatoriale, de propositions de loi écologistes telles que la loi Blandin sur les lanceurs d’alerte, la loi Abeille sur les ondes électromagnétiques, la loi Allain sur l’ancrage territorial de l’alimentation et la loi Gattolin sur l’interdiction de la publicité dans les programmes de télévision pour enfants.
Cependant – mes chers collègues socialistes, vous m’attendez, et je ne vais pas vous décevoir ! –, …
M. Jean Desessard. … nous regrettons vivement que le Gouvernement, celui de M. Valls, bien sûr, – maintenant tout va changer !
Sourires.
En effet, récemment, lors des débats relatifs au projet de loi Montagne et à la loi Sapin II à l’Assemblée nationale, des amendements soutenus par le Gouvernement, ressemblant fort à des cavaliers législatifs, ont modifié des dispositions essentielles de ces textes, les vidant de leur substance. Vous donnez d’une main, vous reprenez de l’autre ! §Mais c’était avant…
Il est un autre sujet sur lequel le Gouvernement a soufflé le chaud et le froid, nuisant à la lisibilité de son action : celui de la politique d’accueil des migrants. Le message d’extrême fermeté adressé par votre prédécesseur, monsieur le Premier ministre, à l’ensemble de l’Europe lors d’un déplacement en Allemagne a rompu avec la tradition d’asile séculaire de notre pays et a jeté une ombre noire sur l’action du Gouvernement.
Pourtant, le pragmatique ministre de l’intérieur que vous étiez a eu l’intelligence de signer une convention avec Damien Carême, maire de Grande-Synthe, pour que l’État puisse accompagner la commune dans la gestion du camp humanitaire qui accueille une partie du flot continu de réfugiés que connaît le nord de la France.
Aujourd’hui, monsieur le Premier ministre, vous avez clairement affirmé votre volonté de mettre en place une politique d’accueil généreuse. Nous en prenons note, et je dirai même que nous nous en réjouissons.
« Ah ! Enfin ! » sur les travées du groupe socialiste et républicain.
Monsieur le Premier ministre, faites-nous oublier le triste épisode où la gauche a envisagé la déchéance de nationalité !
M. Ronan Dantec applaudit.
Monsieur le Premier ministre, vous avez cinq mois pour agir, cinq mois pour redorer le blason de ce quinquennat, cinq mois pour avancer sur des chantiers essentiels. J’en vois, pour ma part, trois.
D’abord, approfondir le volet social, en posant les premiers jalons du débat sur le revenu de base inconditionnel. Ce débat traverse aujourd’hui la classe politique, mais aussi la société française, avec, comme horizon, la création du socle d’un nouveau pacte social. Vous avez affirmé la volonté d’aller vers une allocation sociale unique ; c’est un premier pas. Allons plus loin en lançant une grande expérimentation sur le revenu universel, comme l’a proposé, de façon unanime, la mission commune d’information du Sénat sur la mise en place et les modalités d’un revenu de base en France.
Ensuite, engager la fermeture de la centrale de Fessenheim et poursuivre par un grand débat national sur le coût réel du nucléaire. Cela nous permettrait d’envisager lucidement l’avenir de l’énergie en France, d’anticiper les problèmes financiers d’EDF et, accessoirement, de respecter la promesse du candidat Hollande.
Enfin – ce sujet est d’actualité –, prendre des positions fermes à l’égard du diesel reviendrait à envoyer un signal fort pour lutter contre la pollution atmosphérique, ce poison invisible qui tue 48 000 Français chaque année, coûte des milliards à notre budget et impacte la santé publique autant que le tabac. Ce fléau pèse sur les enfants, les personnes âgées, les malades et les populations fragiles vivant dans des logements mal protégés proches d’un trafic routier dense. Ce serait la simple application du principe de précaution, inscrit dans la Constitution.
En outre, nous avons été heureux d’apprendre que le Gouvernement ne s’engagerait pas dans un affrontement inutile et dangereux contre la ZAD de Notre-Dame-des-Landes.
Exclamations sur plusieurs travées de l'UDI-UC et du RDSE.
Nous continuons cependant de penser, comme l’a également suggéré la ministre de l’environnement, que l’abandon de l’arrêté d’utilité publique serait plus judicieux pour mettre un terme à ce conflit qui agite le territoire breton depuis quatre décennies.
Exclamations sur les travées de l'UDI-UC et du groupe Les Républicains.
Rappelons-nous, nous avions voté l’écotaxe avant de l’annuler, sous la pression des bonnets rouges : il y a des précédents !
Monsieur le Premier ministre, comme vous l’avez affirmé, les cinq mois qui viennent comptent triple. Nous sommes d’accord avec vous : désormais, chaque jour compte. Et, dans chaque jour, il y a trois temps.
Un temps pour gouverner la France, avec toutes les difficultés que cela comporte.
Un temps pour changer de méthode, en associant plus directement le Parlement à votre action.
Un temps, enfin, pour créer l’espoir qui nous a manqué, en dépassant les simples déclarations d’intention de la gestion passée et en prenant des mesures concrètes et des actes forts, à même de rassembler, comme nous le souhaitons, les forces citoyennes, de gauche et écologistes.
Des actes ! Nous vous remercierons quand les actes auront été réalisés ! C’est ce qui a manqué : nous étions partis ensemble, avant de nous fracturer ! Réfléchissez !
M. Jean Desessard. Monsieur le Premier ministre, les promesses s’envolent ; seuls les actes restent, et permettront de creuser, nous l’espérons, le sillon d’un avenir partagé.
Applaudissements sur les travées du groupe écologiste.
M. le président. La parole est à M. Didier Guillaume, pour le groupe socialiste et républicain.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.
M. Didier Guillaume. Alep martyrisé ! Alep bombardé ! Alep abandonné ! Où est la communauté internationale ? Que faisons-nous ici, à nous raconter des histoires sur un pseudo-bilan évoqué à travers un prisme déformant ? Sommes-nous capables, plutôt que d’envoyer quelques parlementaires en voyages d’agrément en Syrie, de nous mettre tous d’accord pour proclamer que cela ne peut pas continuer ? Le peuple syrien, les habitants d’Alep valent mieux que cela ! Eux qui connaissent et aiment la France ne peuvent pas continuer ainsi !
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain. – M. Alain Bertrand et Mme Aline Archimbaud applaudissent également. – Exclamations sur plusieurs travées du groupe Les Républicains.
Si l’Organisation des Nations unies n’est plus à la hauteur, changeons-en ! Si la communauté internationale n’est pas au niveau, faisons-la évoluer ! Mais nous devons unanimement condamner ce qui se passe aujourd’hui à Alep, et tout faire pour que la paix soit à Alep ! Les images que nous en recevons sont absolument inacceptables.
Monsieur le Premier ministre, le Président de la République vous a confié la mission de tenir la barre et de préparer l’avenir. Nous avons confiance en vous et en votre gouvernement pour ce faire.
Ah ! sur les travées du groupe Les Républicains.
Alors que la France est fracturée et que les extrêmes grondent, en particulier l’extrême droite, sommes-nous capables de faire vivre la tradition multidécennale de la Haute Assemblée et de regarder clairement les choses ? Nous avons des oppositions ; nous nous affronterons lors de l’élection présidentielle. Je voudrais néanmoins que nous ayons tous conscience, mesdames, messieurs les membres de la majorité sénatoriale, d’une chose : le second tour de la primaire ne conduit pas automatiquement au second tour de l’élection présidentielle ! Il y aura une élection, et la gauche fera tout pour ne pas vous laisser détruire ce qu’elle a construit !
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain. – Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains et de l'UDI-UC.
Mes chers collègues, il ne faut pas tenir un double discours, différent entre Paris et les départements. Lorsque vous visitez les TPE et les PME, que vous rencontrez les chefs d’entreprise, que vous vantez les qualités du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, parce que les entreprises ont gagné des marges de manœuvre avec la baisse des charges, vous les en félicitez. Ici, en revanche, vous êtes contre. Soyons cohérents ! Le CICE et le pacte de responsabilité sont des mesures qui vont dans le bon sens. Tout démocrate éclairé doit les soutenir.
Regardons maintenant l’école. Bien sûr, on peut avoir des divergences à ce sujet. Mais enfin, lorsque nous créons 60 000 emplois d’enseignant dans les écoles
Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.
et que plus aucune fermeture de classe n’a lieu en zone rurale, que dites-vous, mesdames, messieurs les sénateurs de droite représentant les zones rurales ? Dites-vous qu’il ne fallait pas créer ces postes ? Dites-vous qu’il ne fallait pas les créer quand il y a un enseignant devant chaque classe ? Et vous soutenez un programme qui prévoit d’en supprimer 500 000 ! Ce n’est pas à la hauteur !
C’est vrai ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain. – M. Alain Bertrand applaudit également.
Tenons donc le même discours, que l’on soit à Paris ou dans nos départements !
Lorsque ce gouvernement mettra en œuvre, dans les mois qui viennent, le compte personnel d’activité, une véritable sécurité sociale professionnelle pour tous que vous avez combattue et que vous n’avez pas votée, qu’allez-vous dire à vos concitoyens que vous rencontrerez dans vos permanences, aux jeunes, aux travailleurs des entreprises qui sont usés ? Leur direz-vous que vous êtes contre le compte pénibilité, parce que ce mécanisme serait trop bureaucratique ? Leur direz-vous que vous êtes contre la sécurité sociale professionnelle, parce qu’elle n’entre pas dans vos priorités politiques ? Non ! Lorsque les mesures mises en œuvre sont bonnes pour la France et les Français, la Haute Assemblée devrait être unanime et dire bravo au Gouvernement, qu’il soit de gauche ou de droite.
M. Jean-Louis Carrère applaudit.
Monsieur le Premier ministre, vous allez mettre en place la garantie jeunes. Si les jeunes sont une priorité pour vous, mes chers collègues, pourquoi vous opposer à ce programme, qui va apporter des garanties nouvelles à tous les jeunes âgés entre 18 et 25 ans ?
M. Didier Guillaume. Le Premier ministre a annoncé, dans sa déclaration de politique générale, que moins de jeunes seront au chômage en 2017 qu’en 2012 : c’est une réalité, les chiffres sont vrais, il faut appeler un chat un chat !
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain. – M. Alain Bertrand applaudit également.
Mes chers collègues, je mets au défi quiconque dans cette assemblée de nous présenter les chiffres du chômage des jeunes en 2012 et en 2017 et de réfuter l’annonce de M. le Premier ministre. Vous devriez vous en réjouir ! Un jeune qui n’est plus au chômage, c’est bon pour notre pays. Et ce qui est bon pour les jeunes est bon pour la France, nous devons nous retrouver unanimes sur ce point.
Je pourrais continuer ainsi à développer le bilan du Gouvernement, mais, à l’évidence, c’est d’autant plus difficile que nous approchons de l’élection présidentielle.
J’ai entendu tout à l’heure beaucoup de critiques. Certes, c’est la vie démocratique. Mais nous aimerions réhabiliter le débat, sans nous montrer donneurs de leçons.
Exclamations amusées sur les travées du groupe Les Républicains et de l'UDI-UC.
Sourires.
M. Didier Guillaume. J’ai entendu beaucoup de discours à charge, bien des développements sur les prochaines élections, mais peu de commentaires sur la déclaration de politique générale du Premier ministre, que ce soit pour le soutenir ou le critiquer.
Protestations sur les travées du groupe Les Républicains et de l'UDI-UC.
Je veux revenir à la réalité de ce qui a été dit.
Monsieur le Premier ministre, vous êtes, aux yeux de la représentation nationale, à nos yeux, un homme politique de très grand talent. Nous sommes fiers du ministre de l’intérieur que vous avez été. Je veux dire ici que le démantèlement de la jungle de Calais est un honneur pour la France, une fierté pour le Gouvernement et pour la gauche, et nous l’avons assumé !
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain. – M. Alain Bertrand, Mme Aline Archimbaud et M. Patrick Abate applaudissent également.
Dans le même temps, certains, à droite, aident les maires à ne pas accueillir de réfugiés : c’est une honte ! §L’humanité a toujours eu besoin d’accueillir ceux qui bénéficient du droit d’asile. Je sais de quoi je parle : de telles démarches ont eu lieu dans la région Auvergne-Rhône-Alpes. Ce n’est pas digne d’un responsable politique d’agir de la sorte.
Lorsque vous avez mené, monsieur le Premier ministre, votre action comme ministre de l’intérieur, vous l’avez fait avec beaucoup de sérénité, de calme, de retenue et de précision ; tous l’ont reconnu. Permettez-moi de saluer votre successeur, M. Bruno Le Roux, nouveau ministre de l’intérieur. Je suis très heureux qu’il ait accédé à cette fonction, et je suis sûr que, dans vos pas, il continuera l’œuvre que vous avez accomplie.
Monsieur le Premier ministre, nous avons confiance dans la ligne politique que vous avez développée dans votre discours de politique générale. Nous avons confiance dans les femmes et les hommes qui vous entourent dans ce gouvernement. Nous avons confiance en vous pour diriger l’action du Gouvernement dans les cinq mois qui viennent.
Mais cette confiance politique et personnelle, c’est avant tout une confiance pour la France et pour l’œuvre que nous avons accomplie, que vous avez accomplie depuis 2012. Pour ce qui reste à faire jusqu’en 2017, je rappellerai un dicton qui existe, sous différentes formes dans toutes les régions de France. Dans le Sud-Ouest, on l’exprime ainsi : c’est à la fin du marché qu’on compte les oies. §En d’autres mots, ne vendons pas la peau de l’ours avant de l’avoir tué : l’élection présidentielle va arriver, et nous ferons tout pour ne pas laisser faire la droite.
Monsieur le Premier ministre, la confiance du groupe socialiste et républicain vous est entièrement acquise. Nous soutiendrons les projets de loi que vous nous présenterez jusqu’à la fin de ce quinquennat, et soyez sûr que nous serons fiers de défendre votre bilan, non pas par petits bouts, mais dans son ensemble ! Ainsi, nous serons fiers d’avoir conduit cette majorité aux côtés du Président de la République et des trois Premiers ministres successifs !
Vifs applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain. – Mme Aline Archimbaud et M. Alain Bertrand applaudissent également.
M. Bernard Cazeneuve, Premier ministre. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je voudrais d’abord remercier l’ensemble des orateurs, sans exception, qui se sont exprimés à cette tribune avec sincérité, avec conviction et, pour la plupart d’entre eux, avec pondération. Bien entendu, je ne saurais répondre à l’ensemble des interpellations qui m’ont été adressées : ce serait vous infliger un nouveau discours de plusieurs dizaines de minutes, et certains d’entre vous ne méritent pas de subir un tel sort.
Rires
Vous avez tous rappelé, avec beaucoup de gravité, de profondeur et de sensibilité, la situation qui prévaut à Alep. Personne ici ne peut imaginer que, parmi les orateurs qui se sont exprimés, quiconque n’ait pas une conscience profonde de la tragédie humanitaire qui se joue, de la responsabilité internationale que cela appelle et de la responsabilité collective qui doit s’emparer de nous face à une telle tragédie.
Je voudrais vous dire, très sincèrement, comment je perçois le contexte et comment je lis ce que nous avons fait depuis près de trois ans sur cette question.
Monsieur Dallier, il est, selon vous, incorrect d’imputer au candidat que vous avez choisi, du fait de ses propos, la responsabilité des difficultés d’Alep. Vous avez raison : je ne peux à la fois appeler de mes vœux une relation différente entre la majorité et l’opposition, ce qui ne signifie pas que les débats ne doivent pas avoir lieu – ils doivent avoir lieu ! –, et, dans le même temps, après être descendu de cette tribune, me mettre à faire le contraire de ce que je crois nécessaire dans la République.
François Fillon ne gouverne pas ; on ne saurait donc le tenir comptable de ce qui se passe actuellement. En revanche, il a fait connaître certaines orientations de politique étrangère sur lesquelles il n’est pas interdit de nous interroger, tant dans son intérêt que dans le nôtre. Je veux être tout à fait clair sur ce point : il est injuste de dire que le Gouvernement n’a pas agi sur la question syrienne, alors qu’il a été le seul à le faire au sein de l’Union européenne.
Permettez-moi de retracer quelques étapes importantes de notre action.
En juillet 2013, le Président de la République et le ministre des affaires étrangères de l’époque, un homme qui ne manque ni de talent ni de conviction, M. Laurent Fabius, ont pris l’initiative de parler avec l’opposition modérée, alors que le silence prévalait partout en Europe. Ils considéraient qu’il n’y avait pas d’avenir pour la Syrie avec le gouvernement de Bachar al-Assad, et qu’il ne saurait y avoir de solution politique si l’on ne permettait pas à l’opposition modérée de se rassembler pour trouver une alternative. On nous a alors jugés très sévèrement, je vous le rappelle, monsieur Dallier : selon certains, la Russie comptait, et il fallait parler avec Bachar al-Assad, car, à les en croire, il était faux d’affirmer que son gouvernement s’en prenait à son peuple et était prêt à l’exterminer.
Nous pouvons nous dire collectivement ici – faisons-le sans aucune agressivité, car il s’agit de l’essentiel, de l’avenir de femmes, d’hommes et d’enfants qui sont enfermés dans Alep et ne peuvent en sortir ! – que ce raisonnement avait peut-être quelques limites et quelques failles. Comment considérer aujourd’hui que la lutte contre Daesh et l’avenir de la Syrie peuvent reposer sur l’alliance entre le gouvernement de Bachar al-Assad, l’Iran et la Russie, alors que l’on voit ce qui se passe à Alep ? Nous devons engager sur ce point une introspection collective.
Je ne suis pas du tout de ceux qui, sur de tels sujets, considèrent que l’on peut, dans l’outrance et l’emportement, porter des jugements politiciens à l’égard de grands leaders politiques français, sous prétexte que nous sommes en période électorale. Je le ferai d’autant moins à l’encontre de François Fillon que je suis bien déterminé, compte tenu de la nature de son projet, à le combattre, mais que j’ai pour l’homme de la considération et de l’estime. On peut à la fois ne pas être d’accord sur des projets et respecter ceux qui les portent. Dès lors, on ne peut pas dire, pour ce qui les concerne, n’importe quoi.
En outre, je subis trop, dans l’exercice de mes responsabilités actuelles, et j’ai trop subi, comme ministre de l’intérieur, les invectives et les outrances pour les utiliser à l’encontre de ceux que je combats : il faut savoir ce que l’on veut en politique !
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain, ainsi que sur quelques travées du groupe CRC. – Mme Aline Archimbaud et M. Alain Bertrand applaudissent également.
Je demande donc, sur la question syrienne, que l’on prenne conscience de la gravité du contexte, que l’on ne pratique pas l’amalgame à l’égard de ceux qui s’expriment, que l’on ne porte pas de jugement hâtif sur la politique du Gouvernement et que l’on essaie simplement, compte tenu de la gravité de la question, de faire en sorte que ce soit la voix de la France qui l’emporte sur toute autre considération. Les humanistes de ce pays, qui sont tout de même très majoritaires dans cet hémicycle, doivent pouvoir essayer de trouver, entre eux, des solutions à ce problème.
Le deuxième sujet sur lequel je voudrais intervenir concerne le site de Notre-Dame-des-Landes.
Ce sujet m’intéresse depuis que je suis Premier ministre, pour des raisons entomologiques ; je vais, monsieur Dallier, monsieur Zocchetto, vous en donner les raisons. Je me suis exprimé pour la première fois sur ce sujet depuis que j’ai été nommé Premier ministre, il y a exactement deux heures à l’Assemblée nationale. Je n’avais jusqu’à présent rien dit, et ce pour une raison très simple. Même si, comme moi, on est ardemment laïque, il faut garder à l’esprit la leçon de L’Ecclésiaste : il est un temps pour tout.
J’ai préparé une déclaration de politique générale. Ce sujet est complexe ; on ne le réglera pas à coups de « y a qu’à » « faut qu’on ». J’étais chargé, à la demande de mon prédécesseur, qui s’est exprimé clairement sur ce sujet, de déterminer les conditions dans lesquelles nous pouvions intervenir. J’étais donc particulièrement bien placé pour savoir que ce n’était pas par l’incantation ou la déclaration unilatérale qu’on parviendrait à trouver une solution.
Mon successeur au ministère de l’intérieur, en qui j’ai grande confiance lorsqu’il était président du groupe socialiste à l’Assemblée nationale, est chargé de définir, avec moi, les modalités d’une intervention.
Vous m’invitez, monsieur Zocchetto, à être comme on imagine que je suis : convenable et désireux de mettre en œuvre ce que j’ai annoncé. Vous avez raison ; c’est précisément la raison pour laquelle je n’entends pas, sur ce sujet, raconter n’importe quoi. Je vais donc vous dire très précisément ce que j’en pense, alors que, devant le Sénat et jusqu’à aujourd’hui, je ne me suis pas exprimé.
À Notre-Dame-des-Landes, les projets ont été élaborés, depuis plus de quatorze ans maintenant, par les collectivités territoriales et, notamment, l’État. Ils ont fait l’objet d’un ensemble de décisions qui, elles-mêmes, ont donné lieu à 169 recours. Tous les recours ont été gagnés. Nous sommes dans un État de droit.
Une fois que le SCOT aura été révisé, il faudra vérifier que le précontentieux est purgé. Ce n’est pas une manœuvre dilatoire : il ne s’agit pas de renvoyer ce dossier à des délais emphytéotiques.
Enfin, dans un État de droit, lorsque toutes les procédures ont été respectées, on ne peut pas – je ne peux pas, par conviction républicaine et comme républicain légaliste –, accepter que l’on puisse se considérer légitime à enfreindre le droit par la violence. Je suis donc enclin à faire en sorte que le droit soit respecté. Sinon, il n’y a plus d’État de droit. Considérer que l’on puisse remettre en cause, par la violence, les lois que le législateur adopte et que le juge applique, après qu’elles ont été interprétées, c’est la fin de la République. Je ne puis accepter cela !
Si nous étions empêchés et qu’un autre gouvernement – que je n’appelle pas de mes vœux, vous l’avez bien compris ! – était appelé à prendre une décision, il serait confronté exactement à la même situation.
Quelle est la vérité ?
Cette opération doit être réalisée. Il s’agit non pas de savoir si elle doit l’être ou pas, mais de déterminer si elle peut l’être dans de bonnes conditions, sans violence, sans blessés, a fortiori sans mort. Comme ministre de l’intérieur, j’ai vécu un événement qui m’a profondément marqué et, en tant que Premier ministre, je n’entends pas être à la tête d’un gouvernement qui engagerait des opérations tant que la manière dont elles doivent intervenir n’est pas parfaite.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.
Si certains, dans cet hémicycle, considèrent que l’on peut investir cette zone toutes troupes déployées, sans aucune autre considération, je leur dis très clairement que, de mon point de vue, ce ne serait pas raisonnable.
Monsieur Dallier, monsieur Zocchetto, nous sommes dans un contexte de menace terroriste extrêmement élevée. Ce n’est pas un problème de fêtes de fin d’année. Je connais cette situation pour avoir été ministre de l’intérieur pendant près de deux ans. Si nous voulons réussir cette opération, il faut pouvoir planifier l’utilisation de nos forces de telle sorte que leur intervention soit efficace et que le front antiterroriste ne soit pas pour autant désarmé.
J’ai à l’esprit cette autre considération importante. Monsieur Zocchetto, on ne peut pas affirmer que l’on a beaucoup demandé aux forces de l’ordre et qu’elles sont épuisées et, dans le même temps, exiger qu’elles soient envoyées sur des opérations extrêmement difficiles, sans autre considération.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain. – M. Alain Bertrand et Mme Aline Archimbaud applaudissent également.
Par conséquent, si l’on veut que cette opération soit bien menée et que la vérité soit dite aux Français, il faut faire en sorte qu’elle soit méticuleusement préparée, en tenant compte de tous les paramètres.
Telle est ma position ; elle n’est rien d’autre que celle-là. Elle est celle d’un républicain sincère à la tête d’un gouvernement qui veut bien faire les choses et qui, parce qu’il est animé de cette volonté, n’entend absolument pas agir n’importe comment.
Sur un sujet aussi important et aussi difficile que celui-ci, il n’est pas question non plus, sous prétexte d’échéances électorales dont je comprends l’importance pour préempter ce sujet à des fins politiques, de se lancer dans une opération qui ne serait pas maîtrisée.
Mesdames, messieurs les sénateurs, voilà très exactement ce que je pense. Si je n’ai pas pris d’engagements sur des dates ou des modalités, c’est parce que nous travaillons sérieusement sur ce sujet, qui, plus qu’aucun autre, interdit toute improvisation. C’est précisément parce que je ne veux pas faire le contraire de ce que j’aurais annoncé et que je n’ai pas l’intention de vous décevoir, puisque vous me prêtez un tempérament d’une certaine noblesse, que je resterai prudent. Prudent ne veut pas dire pusillanime : cela signifie méticuleux, précis, méthodique et pragmatique.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain. – M. Alain Bertrand et Mme Aline Archimbaud applaudissent également.
Je terminerai mon propos en évoquant la menace terroriste, puisque nous aurons l’occasion de débattre des autres sujets au cours des prochains mois.
Mesdames, messieurs les sénateurs, je tiens à vous exprimer ma très grande gratitude et ma reconnaissance pour la manière dont les débats sur l’état d’urgence et les lois antiterroristes se sont déroulés ces derniers mois.
Concernant l’état d’urgence, je salue le remarquable travail accompli par Michel Mercier – je ne veux pas le compromettre par un excès de compliments !
Sourires.
M. Bernard Cazeneuve, Premier ministre. … sous la direction de Philippe Bas, pour lequel j’ai également de l’estime, non pour ce qu’il pense, mais parce que c’est un élu de mon département et que les Normands ont tout intérêt à être solidaires tellement ils sont peu nombreux.
Nouveaux sourires.
Sur toutes ces questions, j’ai pu constater que, lorsque l’essentiel était en jeu, la représentation nationale, l’Assemblée nationale comme le Sénat, avait su faire montre d’une certaine unité et d’une certaine cohérence.
Lors de l’examen du projet de loi sur le renseignement par exemple, les débats furent assez toniques, notamment avec Mme Benbassa ou, plus encore avec Mme Assassi, mais ont attesté d’un grand respect des sujets traités et d’une grande compréhension des contraintes du Gouvernement.
Mesdames, messieurs les sénateurs, mes propos sont sincères et, en même temps, un peu intéressés.
Sourires.
En effet, deux projets de loi vous seront bientôt soumis, le texte prolongeant l’état d’urgence et un texte relatif aux forces de sécurité, qui traitera des questions de légitime défense, de conditions d’engagement des armes, d’anonymisation, etc. Il nous faudra, pour les forces de l’ordre, être animés du même souci d’unité et de rassemblement.
M. Alain Joyandet s’exclame.
Pour ce qui concerne les forces de sécurité intérieure, je veux là aussi vous dire simplement les choses.
Je suis las de répéter toujours la même chose. Qui plus, je ne veux pas vous donner le sentiment d’être atteint du syndrome du cacatoès. §Quand je vous dis qu’il y a eu des suppressions d’emplois – près de 13 000 ! –, mesdames, messieurs les sénateurs de la majorité sénatoriale, cela vous agace beaucoup. Mais il n’en demeure pas moins que cela n’a pas été sans impact sur le fonctionnement des forces de l’ordre.
Nous avons créé des postes, ce qui vous agace également. En effet, comme vous ne pouvez tout de même pas contester que vous avez supprimé des emplois, parfois vous contestez que nous en ayons créé, mais peu importe. Dépassons cela. Allons au-delà des échéances qui se présentent à nous et essayons de parler aux forces de l’ordre, qui, comme cela a été dit, sont très sollicitées et ont besoin que la représentation nationale, dans toute sa diversité, leur adresse des messages forts et éminemment républicains.
L’effort sur les forces de l’ordre devra être maintenu. Quel que soit le gouvernement aux responsabilités dans les années à venir, la politique de rehaussement des effectifs et des moyens d’investissement devra être poursuivie ; dans le cas contraire, vous aurez, collectivement, des difficultés.
Je tiens à profiter de mon passage à Matignon, d’abord, pour agir toutes les minutes et toutes les heures ; ensuite – je le dis sans ambages –, pour donner envie aux Français de continuer avec nous ; et, enfin, pour faire en sorte que ce que nous croyons nécessaire ne s’arrête pas avec l’arrivée d’un autre gouvernement.
Je le répète, il faut maintenir les efforts sur la sécurité à la fois en termes d’effectifs et de moyens d’investissement et le faire dans une perspective européenne. En effet, nombre des sujets relatifs à la lutte antiterroriste sont éminemment européens : système d’information Schengen, connexion des fichiers, directive sur les armes à feu, lutte contre la fraude documentaire, capacité de déclencher des exercices FRONTEX. Croyez-moi, sur tous ces sujets, l’Union européenne n’est pas unanime. Sans une France forte pour faire avancer les dossiers, comme nous avons essayé de le faire jusqu’à présent, ce sera extrêmement difficile.
Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je vous remercie du fond du cœur de la qualité de ce débat. J’ai bien compris que je n’avais pas convaincu tout le monde ; je pense à Jean Desessard ou à Éliane Assassi. Ce n’est pas grave, car, dans les cinq mois à venir, nous aurons d’autres occasions de rencontres
Sourires.
, et il est très mauvais, quand l’amitié est au rendez-vous, d’épuiser le sujet dès la première fois.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain, ainsi que sur plusieurs travées du groupe écologiste et du RDSE.
Nous en avons terminé avec le débat sur la déclaration du Gouvernement.
Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
La séance, suspendue à dix-huit heures dix, est reprise à dix-huit heures vingt, sous la présidence de M. Claude Bérit-Débat.
Nous reprenons la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, de modernisation, de développement et de protection des territoires de montagne.
Dans la discussion du texte de la commission, nous poursuivons l’examen, au sein du chapitre Ier du titre III, de l’article 19.
Titre III
RÉHABILITER L’IMMOBILIER DE LOISIR PAR UN URBANISME ADAPTÉ
chapitre Ier (suite)
Rénover la procédure des unités touristiques nouvelles
L'amendement n° 452, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 16
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Les unités situées en discontinuité de l’urbanisation sont prises en compte dans l’étude prévue à l’article L. 122-7.
II. – Alinéa 18
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Les unités situées en discontinuité de l’urbanisation sont prises en compte dans l’étude prévue à l’article L. 122-7.
La parole est à M. le ministre.
Cet amendement vise à rétablir l’étude de discontinuité, disposition propre aux territoires de montagne qui accompagne le principe instauré par la loi de 1985 selon lequel, en montagne, les constructions se font en continuité de l’urbanisation existante.
Cependant, lorsque, dans un document d’urbanisme – un schéma de cohérence territoriale, un SCOT, un plan local d’urbanisme, un PLU, demain un plan local d’urbanisme intercommunal, un PLUI –, la collectivité prévoit que l’on puisse construire dans un secteur en discontinuité, il est nécessaire qu’elle évalue les impacts de son choix sur les paysages – c’est, me semble-t-il, la moindre des choses ! – et les conditions de bonne insertion de cette construction dans cette urbanisation future. C’est l’objet de l’étude de discontinuité prévue à l’article L. 122-7 du code de l’urbanisme, annexée aux documents d’urbanisme.
Dès lors, rien ne justifie que l’on exclue de l’étude de discontinuité les projets d’unités touristiques nouvelles, les UTN, lorsqu’ils sont prévus en discontinuité de l’urbanisation existante dans le document de planification. Ce faisant, on rajoutera des débats et, à coup sûr, des contentieux, alors que la procédure relative aux UTN n’est déjà pas facile.
C’est la raison pour laquelle le Gouvernement propose de rétablir la disposition initiale adoptée par l’Assemblée nationale. Il s’agit non pas d’une étude particulière pour chaque UTN, mais d’une étude portant sur les différents projets envisagés en discontinuité de l’urbanisation existante, qu’il s’agisse ou non d’UTN.
J’ajoute que, lorsque cette étude existe dans un document d’urbanisme qu’il s’agit de réviser, cette exigence ne se traduira pas par une formalité administrative complexe et lourde, dans la mesure où seule une actualisation est demandée. Sur la question délicate des UTN, ne créons pas des exceptions qui entraîneront chaque fois des contestations et des contentieux, alors que nous cherchons au contraire à simplifier les choses et à alléger les procédures concernant les UTN.
Cet amendement vise à revenir au texte de l’Assemblée nationale, en soumettant les UTN à une étude de discontinuité. C’est contraire à la position de la commission.
Je partage le souci du Gouvernement d’élever le standard d’exigences des documents d’urbanisme de montagne en matière de discontinuité. Cependant, je fais confiance aux collectivités, qui réalisent leurs documents d’urbanisme et évaluent les impacts paysagers et environnementaux avec sérieux. Si elles ne le font pas, l’État, qui est étroitement associé aux procédures de planification, peut, je le rappelle, demander aux collectivités les modifications nécessaires.
Pour toutes ces raisons, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
L'amendement n'est pas adopté.
Je suis saisi de onze amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
Les quatre premiers sont identiques.
L'amendement n° 191 rectifié bis est présenté par MM. L. Hervé, Bonnecarrère, Canevet, Capo-Canellas, Cigolotti, Gabouty et Guerriau, Mme Joissains et MM. Kern, Longeot, Médevielle et Pellevat.
L'amendement n° 308 est présenté par Mme Espagnac.
L'amendement n° 348 rectifié est présenté par MM. Gremillet, Morisset et Pillet, Mmes Di Folco, Imbert et Morhet-Richaud, MM. Chasseing, Bizet, Chaize, Mandelli, Pointereau et Sido, Mme Lamure, M. de Raincourt et Mme Deromedi.
L'amendement n° 418 est présenté par M. Bouvard.
Ces quatre amendements sont ainsi libellés :
I. – Alinéa 17
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Dans ce cas, l’unité touristique nouvelle n’est pas soumise à l’article L. 142-4.
II. – Alinéa 19
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Dans ce cas, l’unité touristique nouvelle n’est pas soumise à l’article L. 142-4.
La parole est à M. Loïc Hervé, pour présenter l’amendement n° 191 rectifié bis.
Cet amendement vise à permettre aux projets d’UTN structurantes et locales menés dans les territoires non couverts par un schéma de cohérence territoriale, via les procédures d’autorisation spécifique, de déroger au principe d’urbanisation limitée qui sera applicable dès le 1er janvier 2017.
Les procédures d’autorisation spécifique ont été maintenues, afin que les communes non couvertes par des documents d’urbanisme puissent continuer à mener de nouveaux projets, malgré la réforme des UTN.
Ces procédures spécifiques n’ont cependant un sens que si elles dérogent également au principe d’urbanisation limitée, puisque, dans le cas contraire, sans ouverture de nouveaux secteurs à l’urbanisation, les projets ne pourraient être menés à leur terme.
Je précise – c’est un point très important –, notamment à l’endroit de nos collègues élus de montagne présents sur toutes les travées, que 80 % des stations de montagne ne sont actuellement pas couvertes par un schéma de cohérence territoriale. C’est le cas de mon territoire.
L’amendement n° 308 n’est pas soutenu.
La parole est à M. Daniel Gremillet, pour présenter l'amendement n° 348 rectifié.
L'amendement n° 149 rectifié, présenté par MM. Carle et Savin, est ainsi libellé :
Alinéa 17
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Dans ce cas, l’unité touristique nouvelle n’est pas soumise à l’article L. 142-4.
La parole est à M. Jean-Claude Carle.
L'amendement n° 150 rectifié, présenté par MM. Carle et Savin, est ainsi libellé :
Alinéa 19
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Dans ce cas, l’unité touristique nouvelle n’est pas soumise à l’article L. 142-4.
La parole est à M. Jean-Claude Carle.
Les cinq amendements suivants sont identiques.
L'amendement n° 148 rectifié est présenté par MM. Carle et Savin.
L'amendement n° 190 rectifié bis est présenté par MM. L. Hervé, Bonnecarrère, Canevet, Capo-Canellas, Cigolotti, Gabouty et Guerriau, Mme Joissains et MM. Kern, Longeot, Médevielle et Pellevat.
L'amendement n° 307 est présenté par Mme Espagnac.
L'amendement n° 347 rectifié bis est présenté par MM. Gremillet, Morisset, Pillet et Bizet, Mmes Di Folco, Imbert et Morhet-Richaud, MM. Chasseing, Chaize, Mandelli, Pointereau, Sido et de Raincourt et Mmes Lamure et Deromedi.
L'amendement n° 417 est présenté par M. Bouvard.
Ces cinq amendements sont ainsi libellés :
Après l’alinéa 19
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Les unités touristiques nouvelles ne sont pas soumises à l’article L. 142-4.
La parole est à M. Jean-Claude Carle, pour présenter l'amendement n° 148 rectifié.
La parole est à M. Loïc Hervé, pour présenter l'amendement n° 190 rectifié bis.
L’amendement n° 307 n’est pas soutenu.
La parole est à M. Daniel Gremillet, pour présenter l'amendement n° 347 rectifié bis.
Tous ces amendements en discussion commune visent à permettre aux UTN structurantes ou locales réalisées par des territoires non couverts par un SCOT de déroger au principe d’urbanisation limitée.
D’autres amendements présentés à cet article, qui viendront ultérieurement en discussion, ont un objet similaire. Je prendrai donc le temps de présenter les arguments de la commission de façon approfondie. C’est d’autant plus nécessaire que le sujet est complexe et il est de nature à menacer un accord en commission mixte paritaire.
Je ne crois pas qu’il soit utile d’introduire une dérogation à la règle d’urbanisation limitée pour permettre la réalisation des UTN. En effet, cette règle n’est pas d’application absolue. Le droit prévoit déjà que l’on puisse y déroger sur accord du préfet.
Le système existant est en fait assez souple. On pourrait donc en rester au droit actuel et considérer qu’il suffit de joindre au dossier de création d’UTN une demande de dérogation à la règle d’urbanisation limitée. Si le dossier est solide, le préfet accordera la dérogation.
Dans un prochain texte de simplification, nous pourrions d’ailleurs fusionner les deux associations dans la même procédure.
Par ailleurs, introduire une dérogation ouvrirait une brèche dans le dispositif d’urbanisation limitée. Si l’on accorde une dérogation de plein droit pour les projets d’aménagement touristique, vous le savez bien, demain, nous devrons examiner des demandes de dérogation de plein droit pour les projets d’aménagement de toutes sortes : centres commerciaux, etc. Les territoires qui ne sont pas en zone de montagne voudront, eux aussi, bénéficier de ce type de dérogation de plein droit.
M. Gérard Bailly, rapporteur pour avis. Et, une fois de plus, on vous écoutera !
Sourires.
Qu’ont de si particulier les projets d’UTN qui justifierait qu’ils aient un régime à ce point différent de tous les autres projets ?
Entrer dans cette logique de dérogation de plein droit revient à menacer l’une des règles les plus structurantes du code de l’urbanisme, règle dont le Sénat, en 2010, a étendu la portée, sur l’initiative de la commission des affaires économiques, notre ancien collègue Dominique Braye et Jean-Paul Émorine étant à l’origine de l’amendement visant à inciter à la généralisation des SCOT.
Enfin, j’insiste sur le fait que l’introduction de dérogations à l’urbanisation limitée conduit à aborder un sujet très lourd dans le cadre de la discussion d’un article dont l’équilibre politique est, chacun le sait, fragile.
J’ajouterai que cette dérogation de plein droit à la règle d’urbanisation limitée n’offre qu’une garantie de façade, car, si l’État entend s’opposer à un projet d’UTN, il dispose de toute façon d’un grand nombre de leviers pour le faire dans le cadre de la procédure d’autorisation préfectorale.
Pour toutes ces raisons, la commission émet un avis défavorable sur l’ensemble des amendements en discussion commune.
Le Gouvernement est du même avis que la commission.
Une fois de plus, à force de vous montrer maximalistes, je crains que le remède proposé ne soit pire que le mal ! §Je vais vous en expliquer les raisons.
Tout d’abord, vous verrez à l’usage que vous aurez créé une procédure tellement libérale, tellement peu contrôlée et si peu encadrée que cela entraînera des recours à n’en plus finir. Vous le savez bien, mesdames, messieurs les sénateurs, nombre d’associations font des recours, en particulier dans vos territoires. Ces recours vous feront perdre tellement de temps – la durée de certains contentieux se compte en années – que, au final, les dérogations que vous voulez mettre en œuvre ne vous en feront gagner aucun !
Ensuite, je vous rappelle que je souhaitais construire ce texte. Nous y sommes parvenus à l’Assemblée nationale. §Monsieur Carle, il me semble tout à fait légitime que le Gouvernement puisse s’exprimer sur le sujet au même titre que vous !
Si vous déséquilibrez trop ce fragile point d’accord que nous avons trouvé, nos travaux en commission mixte paritaire ne seront pas un long fleuve tranquille ! Et pourtant, il importe d’aller vite ! §J’essaie simplement de développer mes arguments. Après, il vous reviendra aux législateurs que vous êtes, mesdames, messieurs les sénateurs, de décider !
Je tiens tout de même à rappeler les longs débats que nous avons eus pendant des heures et des heures et plusieurs jours sur la question des offices de tourisme. Nous avons tous intérêt à agir vite : si ce texte n’est pas adopté avant la fin de l’année, de nombreux vides juridiques subsisteront. Il sera inutile de venir me voir après pour vous plaindre des décisions prises par les préfets.
J’ai tenu les mêmes propos à l’Assemblée nationale et devant les députés de tous bords politiques. Et nous sommes arrivés à un accord ! J’espère que la sagesse du Sénat nous permettra également d’y parvenir.
Ne soyez pas maximalistes, alors que nous cherchons à construire un texte comme celui-là. Sinon, nous ne parviendrons pas à un texte commun en commission mixte paritaire. C’est cela l’esprit de la coconstruction. Nous sommes dans une situation différente : il faut faire un pas les uns en direction des autres et ne pas défaire tout le travail réalisé par l’Assemblée nationale.
C'est la raison pour laquelle je suis défavorable à ces amendements, qui remettent en cause l’équilibre auquel nous sommes parvenus sur l’article 19. J’insiste sur ce point, mesdames, messieurs les sénateurs : rien ne justifie que les UTN dérogent aux principes d’une urbanisation limitée dans les territoires non couverts par un SCOT.
L’objectif constamment visé depuis plus de quinze ans, et qui me semble d’ailleurs partagé par chacun ici, est de freiner l’étalement urbain et l’artificialisation des sols. Le SCOT, en mettant en œuvre une stratégie territoriale destinée à rationaliser l’utilisation de l’espace, constitue un outil majeur de lutte contre cet étalement urbain et cette artificialisation des sols.
Le texte prévoit qu’il peut être dérogé à ce principe après accord du préfet. Nous avons introduit cette possibilité à l’Assemblée nationale sur ma proposition, afin de ne pas bloquer des projets importants pour des territoires sans SCOT. C’est d’ailleurs l’adoption de cette mesure qui nous a permis de trouver un point d’équilibre.
Cela étant, il faut bien, à un moment donné, fixer des règles du jeu si vous voulez créer de nouvelles UTN en vous passant des SCOT et des PLU. Dans la mesure où certains territoires n’ont ni SCOT ni PLU, il faut bien une autorité qui arbitre les projets. Or qui mieux que le représentant de l’État dans les départements est en mesure d’assurer cet arbitrage ?
Je vous demande de bien réfléchir à l’esprit de ce projet de loi, mesdames, messieurs les sénateurs. Je vous demande également de ne pas aller trop loin, parce que cela posera problème lorsqu’il sera question de trouver un compromis avec l’Assemblée nationale et, surtout, parce que, sur le terrain, vous ne pourrez pas agir comme vous le voudrez en raison de très nombreux contentieux, qui vous feront perdre beaucoup de temps. C’est en cela, je le confirme, que le remède est pire que le mal.
Tout d’abord, j’aimerais évoquer la question des UTN, qui est au cœur du débat. C’est d’ailleurs vous qui l’avez souhaité, monsieur le ministre ! En effet, vous avez expliqué, dans votre intervention liminaire, que vous vous apprêtiez à signer le projet d’ordonnance portant réforme des UTN, mais que vous avez décidé de ne pas le faire pour porter le débat devant le Parlement. Nous y sommes ! Et nous allons passer un peu de temps sur le sujet aujourd’hui. À cet égard, je vous remercie d’avoir permis la tenue de ce débat, monsieur le ministre.
Ensuite, vous avez évoqué les travaux de la CMP. Dans le respect des principes mêmes du bicamérisme, l’Assemblée nationale a fait son travail ; le Sénat fait le sien.
Les parlementaires, députés comme sénateurs, qui se réuniront en CMP la semaine prochaine auront la responsabilité de construire ensemble ou non un texte de compromis. À ce stade de la discussion, il n’est pas de la responsabilité des sénateurs d’anticiper les débats qui auront lieu en CMP pour aboutir à un texte commun, texte qui sera ratifié ou non par la suite par les deux assemblées, et ce dans les conditions prévues par la Constitution.
Je le répète, personne ne m’empêchera de donner mon avis sur un certain nombre de points. Et, monsieur le ministre, sur la question des UTN, nous ne sommes pas maximalistes : nous sommes précis !
Nous savons très bien que cette question posera problème à compter du 1er janvier 2017 dans les territoires non couverts par un SCOT. Pour être moi-même élu de l’un de ces territoires, qui comprend une grande partie des stations de la Haute-Savoie, je connais très bien les difficultés rencontrées sur le terrain. C'est d’ailleurs la raison pour laquelle nous avons déposé ces amendements.
De grâce, monsieur le rapporteur, dans ce genre d’affaires, on connaît très bien le rôle du préfet. Nous l’avons dit lorsque nous avons abordé la question des commissions départementales de la coopération intercommunale, les CDCI, entre le stylo du greffier et le couteau suisse… Laissons donc un peu de marge aux élus de ce pays ! C’est, me semble-t-il, fondamentalement notre rôle.
Tel est le sens des modestes amendements que nous présentons et qui traitent de la situation de territoires dans lesquels aucun SCOT n’existe encore. En effet, un jour viendra où l’ensemble du territoire national sera couvert par un SCOT, à l’image de ce qui s’est passé pour la carte intercommunale.
Une fois n’est pas coutume, je ne partage pas l’avis de M. le rapporteur ni celui de M. le ministre, sur l’article 19.
En Haute-Savoie, les UTN représentent un enjeu très important. Au cours des sept dernières années, on a recensé trente des derniers projets d’UTN en Savoie et en Haute-Savoie. Il s’agit donc d’un enjeu de première importance pour nous.
Permettez-moi de rappeler l’historique des débats qui se sont déroulés à l’Assemblée nationale sur les UTN : il y a eu de nombreuses discussions, qui ont permis d’aboutir à un accord, même fragile. En revanche, certains engagements avaient été pris. Aujourd'hui, il semble malheureusement que toutes les demandes émanant des associations d’élus, telles que l'Association nationale des élus de la montagne, l'ANEM, ou l’Association nationale des maires des stations de montagne, n’aient pas été satisfaites. Les amendements que nous présentons aujourd'hui résultent des revendications de nos collègues élus qui développent au quotidien ces UTN.
Nous souhaitons donner un peu plus de flexibilité à ce dispositif. Comme l’a très bien souligné mon collègue Loïc Hervé, simplifions le texte ! Et voyons par la suite s’il existe des marges de manœuvre en CMP !
En tout cas, je voterai à titre personnel tous ces amendements, non sans m’en être excusé auparavant auprès du rapporteur Gérard Bailly.
Monsieur le ministre, nous sommes conscients des efforts que vous avez accomplis, et nous vous savons gré d’avoir fait en sorte que le débat ait lieu au Parlement.
C’est récurrent. Je me souviens que, voilà quelques années, sous le gouvernement de Lionel Jospin, dans le cadre de la précédente réforme des UTN, Didier Migaud et moi-même avions rédigé un projet de décret, que nous avions présenté dans un texte législatif, avant de le retirer, le Gouvernement s’étant engagé à reprendre un certain nombre des dispositions que nous proposions sur les seuils ou diverses problématiques relatives aux UTN.
Nous vous donnons volontiers acte des efforts réalisés et nous sommes conscients qu’un point d’équilibre reste à trouver.
Néanmoins, je me pose certaines questions quand j’entends dire que des dérogations peuvent être accordées par le préfet. Ce n’est pas de la défiance vis-à-vis du préfet lui-même. En vérité, comme je le disais avant-hier lors de la discussion générale, le problème vient du fait que c’est non plus la direction départementale des territoires qui instruit aujourd’hui les dossiers, mais des services administratifs qui se situent à Lyon, qui sont éloignés du terrain et n’ont aucune connaissance du territoire. Sans compter que le préfet n’ose pas déjuger ses services quand ils lui transmettent leur réponse. Et on aboutit à des inepties.
Je tiens à la disposition de chacun ici
L’orateur brandit le dossier.
Pourquoi prévoir des dérogations pour les territoires de montagne et ne pas en prévoir ailleurs ? La réponse est très simple, mes chers collègues : dans les territoires de montagne, des surfaces d’une taille considérable sont classées. On y trouve des zones naturelles d’intérêt écologique, faunistique et floristique, les ZNIEFF 1 et 2, des sites classés et protégés au titre de l’environnement. D’autres terrains ne sont pas constructibles en raison de risques naturels, de risques d’inondation ou d’avalanche. La surface utile est donc très limitée.
S’il est impossible de lancer de nouveaux projets d’urbanisation à certains endroits, c’est la mort des stations et des villages de montagne ! Je dis cela parce que je travaille justement en ce moment sur un dossier qui correspond exactement aux cas évoqués.
Je voterai ces amendements, car je les juge utiles, et il reviendra aux membres de la CMP de trouver une solution adaptée.
Je représente un territoire de montagne, mais à dominante rurale. Bien sûr, le tourisme y est beaucoup moins important que dans les stations des Alpes, mais il représente tout de même un enjeu essentiel pour nos communes. Nous voulons en effet améliorer les choses pour y maintenir la vie et l’emploi.
J’ai une expérience en ce qui concerne les petites communes : il existe bel et bien des communes sans PLU ! Or, dans ces communes, il est aujourd’hui pratiquement impossible d’obtenir un permis de construire.
Monsieur le ministre, j’ai bien entendu ce que vous avez dit : vous cherchez à être constructif et pragmatique, et je le comprends. Toutefois, je partage les propos de M. Hervé : nous tenons à donner notre avis et nous pensons que les élus doivent pouvoir peser sur les projets d’urbanisation. Certes, il ne faut pas faire n’importe quoi. Mais les élus ne feront pas n’importe quoi ! C'est la raison pour laquelle je voterai ces amendements.
Je mets aux voix les amendements identiques n° 191 rectifié bis, 348 rectifié et 418.
Les amendements sont adoptés.
En conséquence, les amendements n° 149 rectifié et 150 rectifié, ainsi que les amendements identiques n° 148 rectifié, 190 rectifié bis, 347 rectifié bis et 417 n'ont plus d'objet.
Je suis saisi de quatre amendements identiques.
L'amendement n° 151 rectifié est présenté par MM. Carle et Savin.
L'amendement n° 192 rectifié bis est présenté par MM. L. Hervé, Bonnecarrère, Canevet, Capo-Canellas, Cigolotti, Delahaye, Gabouty et Guerriau, Mme Joissains et MM. Kern, Longeot, Médevielle et Pellevat.
L'amendement n° 309 est présenté par Mme Espagnac.
L'amendement n° 419 est présenté par M. Bouvard.
Ces quatre amendements sont ainsi libellés :
Après l’alinéa 18
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
Les unités touristiques nouvelles locales situées en deçà de seuils fixés par décret en Conseil d’État et non prévues initialement au plan local d’urbanisme ne sont pas soumises au premier alinéa.
La parole est à M. Jean-Claude Carle, pour présenter l’amendement n° 151 rectifié.
Il s’agit d’un amendement rédactionnel et de cohérence avec des amendements adoptés précédemment.
La parole est à M. Loïc Hervé, pour présenter l'amendement n° 192 rectifié bis.
J’ai beaucoup de mal à comprendre ces amendements, car la commission a supprimé la possibilité pour un PLU de créer une UTN en deçà des seuils prévus par décret. Par conséquent, en deçà de ces seuils, il ne peut tout simplement pas exister d’UTN.
La formulation même de ces amendements dont le dispositif prévoit des « unités touristiques nouvelles locales situées en deçà de seuils fixés par décret en Conseil d’État » me paraît donc contradictoire dans les termes. Un projet d’aménagement touristique en deçà de ces seuils est régi par les règles de droit commun de l’aménagement. Ce sera aussi vrai demain que cela l’est dans le droit actuel.
C’est pourquoi la commission émet un avis défavorable sur ces amendements identiques.
Permettez-moi tout d’abord de répondre à M. Chasseing : c’est bien la moindre des choses, dès lors qu’une commune n’a pas le plus petit document d’urbanisme, que ce soit en zone de montagne ou non, que la loi s’applique dans toute sa rigueur !
Il n’y a pas que dans les territoires de montagne que certaines communes n’ont pas de PLU. C’est aussi le cas dans mon propre département, et j’en connais les raisons : il n’est pas simple pour les conseils municipaux des petites communes rurales d’établir une carte communale. C’est pourquoi je suis de ceux qui ont vigoureusement défendu la création du plan local d'urbanisme intercommunal, le PLUI : ce dispositif devrait permettre de surmonter toutes ces difficultés. Il s’agit là d’une excellente initiative.
En effet, certains maires voudraient bien mettre en place une carte communale. Seulement qui dit carte communale, dit contrainte : on peut construire à certains endroits et pas à d’autres. Or on préfère encore ne pas avoir de carte communale du tout plutôt que de laisser construire chez le voisin et pas chez soi ! Il est pourtant vrai que cette situation a des effets considérables sur ces communes, puisqu’elles sont confrontées au refus systématique des services de l’État de délivrer des permis de construire. En cela, le PLUI constitue une belle avancée.
J’en reviens aux quatre amendements identiques.
Par cohérence avec ce que je viens de dire, je suis naturellement défavorable aux amendements identiques n° 151 rectifié, 192 rectifié bis et 419 pour les raisons que le rapporteur vient d’exprimer d’excellente manière.
Évidemment, je maintiendrai mon amendement.
Dans le respect de la summa divisio entre l’article 34 et l’article 37 de la Constitution, je souhaite réitérer la demande formulée par notre collègue Michel Bouvard, qui souhaitait connaître le brouillon du décret en Conseil d’État relatif au seuil d’exclusion des UTN pour éclairer nos débats. Cette demande a également été formulée à l’Assemblée nationale. Je la réitère formellement à ce moment de la discussion.
Je mets aux voix les amendements identiques n° 151 rectifié, 192 rectifié bis et 419.
Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, adopte les amendements.
L'amendement n° 409, présenté par M. Bouvard, est ainsi libellé :
I. – Après l’alinéa 21
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« La procédure d’autorisation est conduite dans un délai de quinze mois à compter de son engagement. À défaut d’achèvement dans ce délai, le représentant de l’État dans le département finalise la procédure de mise en compatibilité du schéma de cohérence territoriale. »
II. – Après l’alinéa 24
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« La procédure d’autorisation est conduite dans un délai de douze mois à compter de son engagement. À défaut d’achèvement dans ce délai, le représentant de l’État dans le département finalise la procédure de mise en compatibilité du plan local d’urbanisme. »
La parole est à M. Michel Bouvard.
Cet amendement traite un autre problème, celui de la longueur des procédures d’autorisation. Dans le cadre des concertations que nous avons eues avec vos services, monsieur le ministre, nous avons évoqué la question des délais d’autorisation.
Il nous a semblé qu’il n’était pas absurde de borner les délais de ces procédures pour éviter qu’elles ne s’éternisent et que le traitement des dossiers ne prenne encore plus de temps.
L’une des particularités des territoires de montagne, c’est, globalement, que l’on ne peut réaliser des travaux que six mois par an. Quand les procédures s’éternisent, on peut en arriver parfois à perdre une année.
C’est pourquoi cet amendement vise à fixer la durée maximale des procédures d’autorisation à quinze mois pour les UTN structurantes et à douze mois pour les UTN locales.
Cet amendement me semble satisfait par le droit en vigueur et le texte en discussion.
Je rappelle que le droit autorise déjà la mise en œuvre d’un projet d’UTN, tout en mettant en compatibilité le document d’urbanisme avec le projet. Cela s’appelle la procédure de déclaration de projet.
Par ailleurs, le projet de loi crée une procédure intégrée pour les UTN, qui, à mon avis, n’apporte rien par rapport à la déclaration de projet, mais qui permet d’afficher une volonté de conduire rapidement les projets d’UTN.
La commission demande le retrait de cet amendement ; à défaut, elle y sera défavorable.
L'amendement n'est pas adopté.
Je suis saisi de quatre amendements identiques.
L'amendement n° 152 rectifié est présenté par MM. Carle et Savin.
L'amendement n° 193 rectifié bis est présenté par MM. L. Hervé, Bonnecarrère, Canevet, Capo-Canellas, Cigolotti, Delahaye, Delcros, Gabouty et Guerriau, Mme Joissains et MM. Kern, Longeot, Médevielle et Pellevat.
L'amendement n° 310 est présenté par Mme Espagnac.
L'amendement n° 420 est présenté par M. Bouvard.
Ces quatre amendements sont ainsi libellés :
Alinéas 54 et 55
Supprimer ces alinéas.
La parole est à M. Jean-Claude Carle, pour présenter l’amendement n° 152 rectifié.
Cet amendement vise à supprimer l’avis de la commission départementale de la nature, des paysages et des sites, la CDNPS, sur le plan local d’urbanisme, dès lors qu’il prévoirait une ou plusieurs unités touristiques nouvelles.
Outre toutes les consultations déjà prévues, le PLU est soumis pour avis à la commission compétente en cas de réduction des surfaces des espaces agricoles, naturels ou forestiers, lorsqu’il couvre une commune ou un EPCI situés en dehors d’un schéma de cohérence territoriale approuvé. De plus, s’il existe déjà un SCOT prévoyant une réduction des surfaces des espaces agricoles, naturels ou forestiers, il est rappelé que ce dernier est alors également soumis pour avis à cette commission. La généralisation de la consultation de cette commission n’apparaît donc pas justifiée.
Par ailleurs, cette procédure risque d’aboutir à une situation dans laquelle les commissions se prononceront en opportunité sur les choix opérés par le projet de PLU arrêté. L’insertion d’un alinéa prévoyant que l’avis porte uniquement sur les unités touristiques locales n’écarte en rien la possibilité de soumettre le projet de plan dans son ensemble aux commissions.
De plus, la nécessité de délivrer un avis qui porterait uniquement sur les UTN locales est en contradiction avec la réflexion globale menée à l’échelle du territoire, dans laquelle est censée s’inscrire l’élaboration du plan local d’urbanisme.
Un nouvel avis portant sur le projet de PLU aboutirait enfin à renforcer le nombre de contentieux relatifs à un document déjà fortement exposé à ce risque.
La parole est à M. Claude Kern, pour présenter l'amendement n° 193 rectifié bis.
La commission est défavorable à ces quatre amendements identiques visant à supprimer la soumission des projets de PLU comportant la création d’une UTN locale à l’avis de la CDNPS.
En effet, la consultation de la CDNPS en cas de création d’une UTN locale constitue non pas une procédure administrative supplémentaire et inutile par rapport au droit actuel, mais une garantie nécessaire.
Aujourd’hui, je rappelle que la CDNPS est consultée dans tous les cas prévoyant la création d’une UTN. C’est le cas lorsqu’une UTN est créée par un SCOT ou par une décision du préfet. À cet égard, je vous invite à vous reporter aux articles L. 143-20 et L. 122-19 du code de l’urbanisme.
Au sortir de la réforme, il y aura trois manières de créer une UTN.
Premièrement, une UTN structurante pourra être créée dans le cadre d’un SCOT. Dans ce cas, c’est le droit actuel qui s’applique, et la CDNPS sera consultée.
Deuxièmement, la création d’une UTN pourra résulter d’une décision du préfet. Dans ce cas, comme dans le droit actuel, la CDNPS sera également consultée.
Troisièmement – et c’est la nouveauté de ce projet de loi –, des UTN dites locales pourront être créées par le PLU. Dans ce cas de figure, le projet de loi prévoit également la consultation de la CDNPS, ce qui place les UTN locales sous le même régime que les autres UTN.
En adoptant ces amendements identiques, nous créerions une exception pour les UTN locales. Or je ne vois pas pourquoi la protection des paysages devrait être moins bien garantie dans ce cas précis.
C’est pourquoi la commission est défavorable, je le répète, à ces amendements identiques.
Si ma mémoire est bonne, l’Assemblée nationale a déjà supprimé l’une de ces commissions avec l’accord du Gouvernement. Il n’en reste donc plus qu’une : on ne peut tout de même pas tout supprimer ! Là encore, vous allez ouvrir la voie à des contentieux systématiques. Une fois de plus, j’en appelle à la raison.
Je suis sensible à ce que vous dites : j’ai donné mon accord à l'Assemblée nationale pour supprimer l’une des deux commissions, dont l’avis était requis pour la création d’une UTN locale, en vue de gagner du temps et d’alléger les complexités. D’ailleurs, peu après l’examen du texte par l’Assemblée nationale, j’ai reçu des courriers.
Là encore, le trop est l’ennemi du bien ! À tout vouloir supprimer, vous provoquerez contentieux sur contentieux. Ces commissions, au-delà du fait que leurs avis sont pertinents – je vous l’accorde, certaines d’entre elles peuvent parfois être un peu intégristes ! –, garantissent tout de même que les procédures se déroulent dans les meilleures conditions.
Si vous préférez placer ces procédures de consultation en dehors du droit commun, le remède sera pire que le mal ! Vous créerez une avalanche de contentieux et, vous le verrez, nous serons obligés de revenir en arrière. Que la raison l’emporte ! Je ne vous parle même plus de la CMP…
Je ne veux pas prolonger inutilement les débats. Les UTN sont un sujet compliqué.
Pour ma part, j’estime que les explications du rapporteur et du ministre sont fort pertinentes. Mes chers collègues, on ne peut pas toujours vouloir déroger aux règles en vigueur !
Avant-hier, nous avons assisté à une discussion un peu vive entre nos collègues Michel Bouvard et Jean Desessard, après que ce dernier a prononcé une phrase que M. Bouvard a mal interprétée, qui laissait entendre que certains élus pouvaient parfois privilégier certains intérêts économiques. Mais proposer que les élus puissent se dédouaner de toutes les règles et demander qu’ils puissent faire comme bon leur semble, ce n’est pas leur rendre service quand ils ont besoin de mettre en place une unité touristique nouvelle. Aujourd’hui, il existe un certain nombre de procédures, et il ne reste plus qu’une seule commission à l’avis de laquelle la création d’une UTN est soumise.
À cet égard, le rapporteur a réalisé un bon travail en commission, en élaguant de nombreuses dispositions issues du texte de l’Assemblée nationale. J’étais d’ailleurs plutôt favorable à la position de la commission sur l’article 19.
Or vous êtes en train de déséquilibrer un petit peu trop le texte, et je le regrette, car ce sont des dossiers très complexes, très coûteux et qui mettent beaucoup de temps à aboutir. Les élus sont souvent confrontés à des difficultés importantes lorsqu’ils cherchent à lancer des projets d’UTN. Dès lors, il me paraît nécessaire de respecter les procédures en vigueur si l’on veut que les projets se déroulent de façon transparente et ne donnent lieu à aucune contestation possible.
En demandant de telles dérogations sur les UTN, vous allez trop loin. C’est pourquoi je ne voterai pas ces amendements identiques.
Je mets aux voix les amendements identiques n° 152 rectifié, 193 rectifié bis et 420.
Les amendements ne sont pas adoptés.
Mes chers collègues, pour permettre à la conférence des présidents de se réunir, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente.
La séance est suspendue.
La séance, suspendue à dix-neuf heures, est reprise à vingt-et-une heures trente, sous la présidence de M. Jean-Pierre Caffet.