La séance est ouverte à quatorze heures trente.
Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.
J’informe le Sénat que M. le Premier ministre a demandé au Sénat de bien vouloir procéder à la désignation de deux sénateurs appelés à siéger au sein de la Commission nationale d’évaluation des politiques de l’État outre-mer.
Conformément à l’article 9 du règlement, j’invite la commission de l’économie, du développement durable et de l’aménagement du territoire et la commission des affaires européennes à présenter chacune une candidature.
Les nominations au sein de cet organisme extraparlementaire auront lieu ultérieurement, dans les conditions prévues par l’article 9 du règlement.
Mes chers collègues, je vous informe que Mme Esther Benbassa a démissionné de la délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes.
Le groupe écologiste a présenté la candidature de M. Jean-Vincent Placé pour la remplacer.
En application des articles 110 et 8, alinéas 2 à 11, du règlement du Sénat, cette candidature a été affichée. Elle sera ratifiée si la présidence ne reçoit pas d’opposition dans le délai d’une heure.
L’ordre du jour appelle la désignation des vingt et un membres de la commission d’enquête sur l’évasion des capitaux et des actifs hors de France et ses incidences fiscales.
Je rappelle que cette commission d’enquête a été créée sur l’initiative du groupe communiste républicain et citoyen, en application de l’article 6 bis du règlement du Sénat, qui prévoit pour chaque groupe un « droit de tirage » pour la création d’une commission d’enquête ou d’une mission d’information par année parlementaire.
En application de l’article 8, alinéas 3 à 11, de notre règlement, la liste des candidats présentés par les groupes a été affichée.
Elle sera ratifiée si la présidence ne reçoit pas d’opposition dans le délai d’une heure.
J’informe le Sénat que la question orale n° 1526 de M. Gérard Roche est retirée, à la demande de son auteur, du rôle des questions orales.
Par conséquent, elle est également retirée de l’ordre du jour de la séance du mardi 7 février 2012.
Acte est donné de cette communication.
L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, de programmation relatif à l’exécution des peines (projet n° 264, texte de la commission n° 303, rapport n° 302).
Je rappelle que la discussion générale a été close.
Nous passons à la discussion des articles.
M. Michel Mercier, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés. Je suis au moins d’accord avec Mme le rapporteur sur ce point !
Sourires.
La réserve est de droit.
Chapitre Ier
Dispositions de programmation en matière d’exécution des peines
Le rapport rappelant les conditions d’une application effective de la loi n° 2009-1436 du 24 novembre 2009 pénitentiaire et d’une exécution plus rapide des peines, annexé à la présente loi, est approuvé.
ANNEXE
Rapport définissant les objectifs de la politique d’exécution des peines
La loi de programmation relative aux moyens nécessaires à la mise en œuvre de la loi n° 2009-1436 du 24 novembre 2009 pénitentiaire a pour objet de garantir la mise en œuvre effective des dispositions relatives aux conditions de détention ainsi qu’aux aménagements de peine prévues par ladite loi. Elle a aussi pour objet de favoriser une exécution plus rapide des peines, dans le respect des principes posés par l’article 132-24 du code pénal, et d’améliorer la prise en charge des mineurs délinquants.
I. – Garantir l’application effective de la loi n° 2009-1436 du 24 novembre 2009 pénitentiaire
La loi pénitentiaire a visé, par le développement d’une politique d’aménagement de peine ambitieuse, à réduire le nombre de personnes écrouées détenues. Dans cette perspective, les dépenses consacrées aux infrastructures doivent se concentrer sur l’entretien des bâtiments, la rénovation des structures existantes et l’augmentation du nombre de cellules individuelles pour répondre, dans le cadre fixé par les articles 716 et 717-2 du code de procédure pénale, au principe de l’encellulement individuel des personnes détenues.
A. – Ajuster le programme dit « 13 200 »
Le programme dit « 13 200 » sera modifié sur un point.
Quatre centres de semi-liberté supplémentaires seront adjoints au programme. Certes, compte tenu du développement de la surveillance électronique, les besoins en places de semi-liberté apparaissent globalement couverts pour les années qui viennent. Il subsiste néanmoins des besoins résiduels dans de grandes agglomérations, notamment en Île-de-France. La construction de quatre centres de semi-liberté supplémentaires, pour un total de 270 places, sera donc programmée. Le coût moyen à la place est estimé à 92 558 € (hors foncier). Le taux d’encadrement est évalué à 0, 17 personnel par personne détenue. Il convient de prévoir la localisation des centres de semi-liberté dans des secteurs desservis par les transports en commun dont les horaires sont compatibles avec les horaires décalés souvent imposés aux personnes détenues en semi-liberté.
B. – Garantir la mise en œuvre des droits des personnes détenues
Certains des droits reconnus aux personnes détenues par la loi pénitentiaire impliquent la mise en place de moyens adaptés. Il en est ainsi des dispositions de l’article 57 qui prévoient un strict encadrement des fouilles. À cette fin, tous les établissements pénitentiaires devraient être équipés de portiques permettant d’éviter le recours aux fouilles intégrales.
Les personnes détenues condamnées doivent être incarcérées dans l’établissement pénitentiaire le plus proche de leur domicile familial. Dans le cas où la condition de rapprochement familial des personnes détenues n’est pas respectée, l’État prend en charge, sous condition de ressources, les frais supportés par les membres de la famille à l’occasion de leur visite à la personne détenue.
C. – Favoriser une exécution plus rapide des décisions de justice
1. Renforcer les services d’application et d’exécution des peines
La justice n’est crédible et efficace que si ses décisions sont rapidement exécutées.
Plus de 585 000 condamnations pénales sont prononcées chaque année en répression de crimes ou de délits, dont près de 126 650 peines privatives de liberté, selon les données 2010. Parmi ces peines, 91 % sont des peines aménageables. La charge de travail des services d’application et d’exécution des peines dans les juridictions a donc augmenté.
Dès lors, l’objectif de réduction des délais d’exécution des peines suppose une augmentation des effectifs dédiés aux juridictions. La programmation prévoit à ce titre la création de 209 ETPT, dont 120 ETPT de magistrats et 89 ETPT de greffiers.
2. Généraliser les bureaux d’exécution des peines
Prévus à l’article D. 48-4 du code de procédure pénale, créé par le décret n° 2004-1364 du 13 décembre 2004 modifiant le code de procédure pénale et relatif à l’application des peines pris en application de la loi n° 2004-204 du 9 mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité, les bureaux de l’exécution des peines (BEX) permettent la mise à exécution des peines dès la sortie de l’audience. Selon les peines prononcées, ils permettent le paiement de l’amende, le retrait du permis de conduire suspendu ou annulé et la remise d’une convocation devant le juge de l’application des peines ou le service pénitentiaire d’insertion et de probation. L’efficacité des BEX est reconnue. Toutefois, en fonction des moyens humains disponibles dans les juridictions, le fonctionnement des BEX est le plus souvent limité à une partie des audiences, principalement les audiences correctionnelles à juge unique, les comparutions sur reconnaissance préalable de culpabilité et la notification des ordonnances pénales.
La possibilité d’assurer une exécution rapide et effective des peines prononcées renforcera la confiance de la population dans le fonctionnement efficace de la justice.
Il est donc essentiel de généraliser les BEX (pour les majeurs comme pour les mineurs) à toutes les juridictions, y compris au sein des cours d’appel, et à toutes les audiences, en élargissant leurs plages horaires d’ouverture.
À ce titre, les besoins des juridictions sont évalués à 207 ETPT de greffiers et d’agents de catégorie C.
Des travaux seront également nécessaires dans certaines juridictions pour aménager les BEX et leur permettre d’abriter les permanences des éducateurs de la protection judiciaire de la jeunesse.
Des crédits d’investissement à hauteur de 15, 4 millions d’euros sont programmés à ce titre.
3. Généraliser les bureaux d’aide aux victimes
Conformément à l’article 707 du code de procédure pénale, l’exécution des peines intervient dans le respect des droits des victimes. Celles-ci sont particulièrement intéressées par l’exécution des décisions qui les concernent, qu’il s’agisse de l’indemnisation de leur préjudice ou des mesures destinées à les protéger, comme dans le cas d’une interdiction faite au condamné d’entrer en relation avec elles imposée, par exemple, dans le cadre d’un sursis avec mise à l’épreuve.
Le plan national de prévention de la délinquance et d’aide aux victimes 2010-2012 a prévu la création de 50 bureaux d’aide aux victimes (BAV) au sein des principaux tribunaux de grande instance.
Les BAV ont pour mission d’accueillir les victimes au sein des palais de justice, de les informer et de les orienter vers les magistrats ou les structures compétents. Elles y bénéficient pour cela d’une prise en charge par une association d’aide aux victimes, qui les aide dans leurs démarches et peut aussi les assister dans l’urgence lorsque qu’elles sont victimes de faits jugés en comparution immédiate.
Les usagers se sont montrés satisfaits par les 38 bureaux déjà créés, qui accueillent un nombre croissant de victimes d’infractions pénales.
La généralisation des BAV à l’ensemble des tribunaux de grande instance garantira un égal accès de toutes les victimes à ce dispositif sur l’ensemble du territoire national.
Près de 140 BAV seront ainsi créés, pour un coût de fonctionnement annuel total s’élevant à 2, 8 millions d’euros.
II. – Renforcer les capacités de prévention de la récidive
A. – Mieux évaluer le profil des personnes condamnées
Préalablement à la mise en place d’un régime de détention adapté et d’un parcours d’exécution des peines propre à prévenir la récidive, il convient de conduire une évaluation rigoureuse et systématique des caractéristiques de chaque condamné. La création de trois nouvelles structures d’évaluation nationales, sur le modèle des centres de Fresnes et de Réau répond à cet objectif.
L’évaluation approfondie des condamnés à une longue peine, qui présentent un degré de dangerosité a priori supérieur, doit être développée en début de parcours et en cours d’exécution de la peine, notamment dès lors que le condamné remplit les conditions pour bénéficier d’un aménagement de peine. À cette fin, la capacité des centres nationaux d’évaluation, qui procèdent à une évaluation pluridisciplinaire sur plusieurs semaines, doit être accrue. Trois nouveaux centres seront créés à cette fin.
La création de 50 ETPT est programmée à ce titre.
B. – Renforcer les services d’insertion et de probation
Les conseillers d’insertion et de probation jouent un rôle essentiel dans le développement des aménagements de peine. Leurs responsabilités se sont beaucoup accrues au cours de la dernière décennie alors que leurs effectifs n’ont pas connu l’augmentation que l’étude d’impact annexée à la loi pénitentiaire avait jugée nécessaire - soit la création de 1000 emplois supplémentaires. Il est indispensable que l’évolution des effectifs permette d’atteindre un ratio de 60 dossiers suivis par CIP contre 88 aujourd’hui.
III. – Améliorer la prise en charge des mineurs délinquants
A. – Réduire les délais de prise en charge par les services de la protection judiciaire de la jeunesse des mesures éducatives prononcées par le juge
Réduire les délais d’exécution des mesures judiciaires prononcées contre les mineurs constitue un objectif essentiel non seulement parce que la mesure a vocation à mettre fin à un trouble à l’ordre public, mais également parce qu’il est indispensable qu’elle soit exécutée dans un temps proche de la commission des faits pour qu’elle ait un sens pour le mineur.
L’exécution rapide de ces mesures permet également de prévenir la récidive.
C’est pourquoi l’article 9 de la présente loi impose une prise en charge du mineur par le service éducatif dans un délai de cinq jours à compter de la date du jugement.
Cette disposition permettra de renforcer l’efficacité de la réponse pénale apportée à la délinquance des mineurs.
Or, une telle réduction de délais nécessite, en particulier dans les départements à forte délinquance, un renforcement ciblé des effectifs éducatifs de la protection judiciaire de la jeunesse. Dans ces départements, les délais d’exécution constatés sont en effet sensiblement supérieurs à la moyenne nationale, qui est actuellement de douze jours. Dans ces conditions, il n’est pas rare dans ces territoires qu’un mineur réitère des faits de délinquance alors même qu’une mesure prise à son encontre n’a pas encore été exécutée.
L’objectif de réduire le délai de prise en charge à moins de cinq jours ne pourra être atteint par la seule optimisation des moyens existants et nécessitera un renforcement ciblé des effectifs dans vingt-neuf départements retenus comme prioritaires.
La création de 120 ETPT d’éducateurs est programmée à ce titre. Elle interviendra de 2013 à 2014.
B. – Développer un suivi pédopsychiatrique dans les centres éducatifs fermés
Les mineurs les plus difficiles présentent des troubles du comportement caractéristiques (relations violentes et mise en échec de toute solution les concernant).
Or, ces mineurs constituent une grande partie du public suivi par les CEF.
Ainsi, les éducateurs ont à composer avec des mineurs qui, s’ils ne sont pas tous atteints de pathologies psychiatriques, connaissent généralement des troubles du comportement et présentent une forte tendance au passage à l’acte violent.
Les particularités de ces mineurs imposent une prise en charge concertée qui repose sur une articulation soutenue entre les services de la protection judiciaire de la jeunesse et les dispositifs psychiatriques de proximité.
À ce jour, 13 CEF ont été renforcés en moyens de suivi pédopsychiatrique entre 2008 et 2011 et les premiers résultats sont probants. Une diminution significative des incidents a été constatée.
Au vu de ces résultats, ce dispositif sera étendu à 25 CEF supplémentaires.
Ce déploiement s’appuiera sur des protocoles conclus entre les directions interrégionales de la protection judiciaire de la jeunesse et les agences régionales de la santé pour favoriser les prises en charge.
La création de 37, 5 ETPT est programmée à ce titre.
Je suis saisi de sept amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 30, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi le rapport annexé :
Rapport définissant les objectifs de la politique d’exécution des peines
« La loi de programmation relative à l’exécution des peines a pour objectifs de garantir la célérité et l’effectivité de l’exécution des peines prononcées, notamment des peines d’emprisonnement ferme, de renforcer les capacités de prévention de la récidive et d’améliorer la prise en charge des mineurs délinquants.
« Ces objectifs sont définis et précisés par le présent rapport.
« I. – Garantir la célérité et l’effectivité de l’exécution des peines prononcées, notamment des peines d’emprisonnement ferme
« A. – Accroître et diversifier le parc carcéral pour assurer une exécution effective des peines
« Le premier objectif de la présente loi est d’adapter quantitativement le parc carcéral aux besoins prévisibles à la fin de l’année 2017, en le portant à 80 000 places à cette date.
« Au 1er octobre 2011, le parc pénitentiaire comptait 57 540 places, pour 64 147 personnes incarcérées.
« Le scénario le plus probable d’évolution de la population carcérale aboutit à une prévision d’environ 96 000 personnes écrouées, détenues ou non, à l’horizon 2017. Il prolonge la croissance constatée entre 2003 et 2011 des condamnations à des peines privatives de liberté, soit 2 % par an en moyenne, pour se stabiliser en 2018 à un niveau légèrement supérieur à 154 000 peines annuelles. Il repose également sur une amélioration durable des délais d’exécution des peines.
« Dans le même temps, le Gouvernement anticipe une augmentation du nombre des personnes écrouées mais non détenues (pour l’essentiel placées sous surveillance électronique) de 8 200 au 1er octobre 2011 à 16 000 en 2017, qui prolongerait les évolutions enregistrées ces dernières années en matière d’aménagement des peines, évolutions qui se sont accentuées depuis l’entrée en vigueur de la loi n° 2009-1436 du 24 novembre 2009 pénitentiaire (le nombre de personnes placées sous surveillance électronique s’élevait à 1 600 au 1er janvier 2007 et à 5 800 au 1er janvier 2011).
« Sous ces hypothèses, le nombre de personnes écrouées détenues s’élèvera à 80 000 à horizon 2017, ce qui suppose de porter la capacité du parc carcéral à 80 000 places à cette échéance.
« Le second objectif de la présente loi, lié au premier, est de disposer rapidement et en nombre suffisant d’établissements spécialement conçus pour accueillir des personnes condamnées à de courtes peines. Cet objectif répond à plusieurs constats :
« – le parc actuel ne dispose pas de capacités spécifiques pour les courtes peines (or, plus de la moitié des peines en attente d’exécution ont une durée inférieure ou égale à trois mois) ;
« – aujourd’hui, faute de structures adaptées, les condamnés à de courtes peines sont généralement hébergés dans les maisons d’arrêt. Or, en regroupant les condamnés à de courtes peines, notamment les primo-condamnés, dans des établissements mieux conçus et adaptés à leur profil, les effets désocialisants de l’incarcération pourraient être limités ;
« – le maintien d’un parc uniforme est sous-optimal sur le plan économique : les personnes condamnées à de courtes peines ne représentant pas la même dangerosité que les personnes condamnées à des peines plus longues, elles peuvent avantageusement être hébergées dans des établissements à sécurité allégée, dont le coût d’investissement et de fonctionnement sera moindre que celui d’un établissement classique.
« La diversification du parc pénitentiaire qui résultera de la construction rapide de plusieurs milliers de places de prison spécialement adaptées aux courtes peines d’une durée inférieure ou égale à un an ou dont le reliquat est inférieur ou égal à un an permettra de mettre en adéquation les catégories d’établissement et les profils, en particulier ceux de dangerosité.
« Pour atteindre ces deux objectifs, le programme immobilier pénitentiaire actuellement mené par le ministère de la justice doit être adapté et complété. Il doit être réalisé dans les meilleurs délais pour améliorer l’exécution des peines.
« La programmation immobilière, qui fait l’objet de la première partie du présent rapport, est structurée autour du nombre de places brutes nouvelles à ouvrir, année par année, de 2013 à 2017. Pour chaque type de place, sont fixés un coût de construction unitaire de référence, hors coût d’acquisition foncière, exprimé en euros valeur 2010, ainsi qu’un taux d’encadrement « nombre de personnels par détenu ». Les crédits et les emplois nécessaires seront déduits chaque année, afin d’ajuster la programmation budgétaire à l’évolution du calendrier de réalisation des opérations.
« Les coûts de construction de référence seront actualisés selon l’évolution de l’indice du coût de la construction BT01.
« Par ailleurs, une cartographie des besoins de places de prison sera établie dans le ressort de chaque direction interrégionale de l’administration pénitentiaire, afin de mettre en adéquation le besoin et l’offre.
« 1. Ajuster les programmes de construction déjà lancés
« a. Le programme dit « 13 200 »
« Le programme prévu dans le cadre de la loi n° 2002-1138 du 9 septembre 2002 d’orientation et de programmation pour la justice sera achevé. Ce programme, qui inclura la reconstruction du centre pénitentiaire de Draguignan, permettra de disposer de près de 5 000 nouvelles places. Ces 5 000 places, dont la construction est pour l’essentiel déjà lancée, ne sont pas retenues dans le périmètre de la présente programmation. Elles sont néanmoins comptabilisées dans le futur parc de 80 000 places.
« Le programme dit « 13 200 » sera toutefois modifié sur deux points.
« D’une part, la capacité d’accueil des établissements dits « nouveau concept » prévus dans ce programme et dont la construction n’est pas encore lancée sera augmentée. En effet, ces quartiers « nouveau concept », polyvalents et modulables, comprennent des unités d’hébergement pour courtes peines. Ces unités seront densifiées, de manière à accroître le nombre de places pour courtes peines disponibles. Chaque quartier « nouveau concept » modifié, qui restera adossé à un établissement classique, aura une capacité de 150 places, au lieu des 90 places précédemment envisagées.
« D’autre part, quatre centres de semi-liberté supplémentaires seront adjoints au programme. Certes, compte tenu du développement de la surveillance électronique, les besoins en places de semi-liberté apparaissent globalement couverts pour les années qui viennent. Il subsiste néanmoins des besoins résiduels dans de grandes agglomérations, notamment en Île-de-France. La construction de quatre centres de semi-liberté supplémentaires, pour un total de 270 places, sera donc programmée. Le coût moyen à la place est estimé à 92 558 (hors foncier). Le taux d’encadrement est évalué à 0, 17 personnel par détenu.
« b. Le nouveau programme immobilier (NPI)
« Le NPI annoncé par le garde des sceaux en mai 2011 sera densifié. La capacité moyenne des établissements sera augmentée, passant de 532 places à 650 places. À l’exception des établissements parisiens, la capacité des établissements ne dépassera toutefois en aucun cas 850 places. Ce programme permettra ainsi de créer 9 500 places nettes, au lieu des 7 400 places prévues initialement.
« Ce programme prévoit notamment la fermeture de l’actuel centre pénitentiaire de la Nouvelle-Calédonie et la construction d’un nouveau centre pénitentiaire.
Le coût unitaire moyen de construction à la place du nouveau programme immobilier pour les établissements réalisés dans le cadre du partenariat public-privé sera de ce fait ramené de 164 000 à 152 000 (hors foncier). Quant au coût unitaire marginal des places nettes supplémentaires, il s’établira à 62 000 €.
« Le taux d’encadrement moyen s’établira à 0, 45 personnel par détenu.
« Les six établissements du NPI prévus pour être réalisés en maîtrise d’ouvrage publique (conception-réalisation) ne seront en revanche pas densifiés, compte tenu de leurs caractéristiques, notamment de complexité et d’éloignement.
« Le programme NPI sera cependant modifié sur deux points.
« D’une part, un établissement supplémentaire de 220 places sera construit en Guyane. Le coût moyen à la place, hors foncier, est estimé à environ 363 000 €. Les emplois nécessaires au fonctionnement de cette structure s’élèvent à 149 équivalents temps plein travaillé (ETPT).
« D’autre part, un nouvel établissement sera construit pour accueillir les détenus qui souffrent de graves troubles du comportement, sans pour autant relever de l’internement psychiatrique, sur le modèle de l’actuel établissement de Château-Thierry. Cette structure offrira 95 places. Le coût moyen à la place, hors foncier, est estimé à environ 384 000. Les emplois nécessaires au fonctionnement de cette structure sont estimés à 105 ETPT.
« 2. Lancer un nouveau programme spécifique de construction de structures dédiées aux courtes peines
« En complément des places d’hébergement pour courtes peines qui seront créées au sein des quartiers « nouveau concept » précités, un nouveau programme de construction sera lancé, portant exclusivement sur des structures pour courtes peines.
« Ces structures prendront la forme soit de quartiers pour courtes peines adossés à des établissements pénitentiaires classiques, soit d’établissements pour courtes peines autonomes. Dans le premier cas, leur capacité sera de 150 places ; dans le second cas, de 190 places.
« La conception des établissements et quartiers pour courtes peines sera adaptée à la nature particulière de ces peines. En particulier, les contraintes de sécurité y seront allégées.
« Le coût à la place des quartiers pour courtes peines sera inférieur de 40 % au coût à la place d’un établissement classique (une maison d’arrêt de 100 places) et de 10 % à celui des quartiers « nouveau concept ». Il est estimé à 103 900 €.
« Ce coût sera légèrement supérieur pour les établissements pour courtes peines autonomes qui ne seront pas adossés à un établissement et qui, de ce fait, ne pourront pas bénéficier de la mutualisation de certains services et fonctions support. Il restera néanmoins inférieur de 35 % au coût à la place d’un établissement classique et comparable à celui d’un quartier « nouveau concept ». Il est estimé à 114 300 €.
« Le taux d’encadrement, adapté à la faible dangerosité des personnes détenues, sera inférieur de moitié à celui d’un établissement classique. Il sera de 0, 22 personnel par détenu.
« Le tableau suivant synthétise les ouvertures de places brutes programmées sur la période, par catégorie :
Nombre de places brutes programmées
Total 2013-17
NPI densifié
Établissement supplémentaire en Guyane
Établissements pour courtes peines et quartiers pour courtes peines
Quartiers nouveau concept densifiés (programme 13200)
Centres de semi-libertés
Établissement spécialisé
Total des places brutes programmées
« 13 200 » et celles prévues dans les établissements et quartiers pour courtes peines, ce sont près de 7 500 places adaptées aux courtes peines qui seront ainsi créées d’ici 2017.
« Le tableau suivant retrace l’évolution prévue du nombre de places disponibles de 2011 à 2017 :
Total 2013-2017
Total 2011-2017
Nb de places brutes ouvertes au titre de la loi de programmation
Nb de places brutes ouvertes au titre de la loi des programmes immobiliers lancés
Total des places brutes ouvertes
Nb de places fermées
Total des places nettes ouvertes
Nb de places disponibles au 31 décembre n
« 3. Revoir la classification des établissements pénitentiaires pour mieux l’adapter au profil des détenus
« À l’horizon 2017, le nouveau programme de construction d’établissements pour courtes peines conduira à diversifier sensiblement le parc carcéral disponible. Cette évolution permettra de rompre avec l’uniformité de la prise en charge et de ne plus imposer aux personnes condamnées à de courtes peines des contraintes de sécurité conçues pour des profils plus dangereux. Ce faisant, le risque de désocialisation et de récidive sera amoindri.
« En conséquence, la classification des établissements pénitentiaires précisera leur niveau de sécurité. À ce jour, le code de procédure pénale distingue deux catégories d’établissements pénitentiaires : les maisons d’arrêt et les établissements pour peines, établissements eux-mêmes subdivisés en centres de détention et maisons centrales. Cette classification ne prend pas suffisamment en compte la diversité de profil des détenus au plan de la sûreté pénitentiaire. La typologie des niveaux de sécurité des maisons d’arrêt et des établissements pour peines permettra de distinguer :
« – les établissements à sécurité renforcée ;
« – 50 /les établissements à sécurité intermédiaire ;
« – 51/ les établissements à sécurité adaptée ;
« – 52/ les établissements à sécurité allégée.
« Les nouveaux établissements pour courtes peines (ou ECP) entreront dans la catégorie des établissements à sécurité allégée.
« 4. Se doter des outils juridiques et des moyens humains nécessaires pour accélérer la construction et l’ouverture de nouveaux établissements et atteindre l’objectif de 80 000 places d’ici 2017
« L’article 2 de la présente loi permettra à l’Agence publique pour l’immobilier de la justice de passer des contrats de conception-réalisation en recourant à la procédure du dialogue compétitif. Ces contrats permettront également de prendre en compte des prestations d’exploitation et de maintenance.
« L’article 3 de la présente loi prévoit par ailleurs de prolonger la disposition permettant d’accélérer les procédures d’expropriation, introduite par la loi n° 2002-1138 du 9 septembre 2002 précitée. La procédure d’expropriation prévue à l’article L. 15-9 du code de l’expropriation sera appliquée en vue de la prise de possession immédiate par l’État des terrains, bâtis ou non bâtis, dont l’acquisition est nécessaire aux opérations de construction ou d’extension d’établissements pénitentiaires.
« L’administration pénitentiaire et l’Agence publique pour l’immobilier de la justice, en concertation avec le ministère de la défense, évalueront notamment la faisabilité d’une reconversion des bâtiments ou des emprises appartenant à la défense nationale en vue d’y établir des établissements pénitentiaires, et notamment des structures allégées de type centres de détention ouverts ou quartiers courtes peines ou de semi-liberté.
« Par ailleurs, s’agissant des moyens humains, les effectifs de l’Agence publique pour l’immobilier de la justice devront être temporairement renforcés pour faire face à l’accroissement du plan de charge résultant de la présente programmation.
« De même, les capacités d’accueil de l’École nationale de l’administration pénitentiaire devront être augmentées.
« B. – Garantir une mise à exécution plus rapide des peines
« 1. Renforcer les services d’application et d’exécution des peines
« La justice n’est crédible et efficace que si ses décisions sont rapidement exécutées. L’effectivité de l’exécution des peines, et plus particulièrement des peines d’emprisonnement ferme qui sanctionnent les faits les plus graves, est une composante essentielle de la politique pénale de lutte contre la délinquance et contre la récidive.
« Plus de 585 000 condamnations pénales sont prononcées chaque année en répression de crimes ou de délits, dont près de 126 650 peines privatives de liberté, selon les données 2010. Parmi ces peines, 91 % sont des peines aménageables. Les récentes réformes en matière d’exécution et d’application des peines ont atteint leurs objectifs : augmenter significativement les aménagements de peines pour favoriser la réinsertion des condamnés, instaurer la surveillance électronique de fin de peine pour éviter les sorties sèches de détention des personnes qui ne bénéficient pas d’un tel aménagement et développer les mesures de sûreté lorsque ces personnes présentent une dangerosité et un risque de récidive en fin de peine. La charge de travail des services d’application et d’exécution des peines dans les juridictions a donc augmenté.
« Par ailleurs, les travaux des groupes de travail mis en place par le garde des sceaux, ministre de la justice ont préconisé que la charge de travail des juges de l’application des peines soit limitée à 700 à 800 dossiers par magistrat.
« Dès lors, l’objectif de réduction des délais d’exécution des peines suppose une augmentation des effectifs dédiés aux juridictions. La programmation prévoit à ce titre la création de 209 ETPT, dont 120 ETPT de magistrats et 89 ETPT de greffiers.
« 2. Rationaliser l’activité des services d’application et d’exécution des peines
« Dans le cadre de la révision générale des politiques publiques, la direction des services judiciaires a développé un programme « Lean » sur une dizaine de cours d’appel et de tribunaux de grande instance. Ce programme vise à réduire les temps morts de la procédure, à supprimer les tâches répétitives à faible valeur ajoutée qui détournent les magistrats et les fonctionnaires du greffe du cœur de leur métier. Il vise également à fluidifier les relations avec les auxiliaires de justice, les experts et les partenaires institutionnels, en associant l’ensemble des parties prenantes au fonctionnement du service public de la justice.
« Ce programme repose sur une démarche participative pour que les juridictions identifient elles-mêmes les voies d’une organisation plus efficace de leurs activités.
« Cette méthodologie sera étendue à l’exécution des peines et au fonctionnement de la chaîne pénale à la suite du déploiement de l’application « Cassiopée ».
« 3. Généraliser les bureaux d’exécution des peines
« Prévus à l’article D. 48-4 du code de procédure pénale, créé par le décret n° 2004-1364 du 13 décembre 2004 modifiant le code de procédure pénale et relatif à l’application des peines pris en application de la loi n° 2004-204 du 9 mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité, les bureaux de l’exécution des peines (BEX) permettent la mise à exécution des peines dès la sortie de l’audience. Selon les peines prononcées, ils permettent le paiement de l’amende, le retrait du permis de conduire suspendu ou annulé et la remise d’une convocation devant le juge de l’application des peines ou le service pénitentiaire d’insertion et de probation. L’efficacité des BEX est reconnue. Toutefois, en fonction des moyens humains disponibles dans les juridictions, le fonctionnement des BEX est le plus souvent limité à une partie des audiences, principalement les audiences correctionnelles à juge unique, les comparutions sur reconnaissance préalable de culpabilité et la notification des ordonnances pénales.
« La possibilité d’assurer une exécution rapide et effective des peines prononcées renforcera la confiance de la population dans le fonctionnement efficace de la justice.
« Il est donc essentiel de généraliser les BEX (pour les majeurs comme pour les mineurs) à toutes les juridictions, y compris au sein des cours d’appel, et à toutes les audiences, en élargissant leurs plages horaires d’ouverture.
« À ce titre, les besoins des juridictions sont évalués à 207 ETPT de greffiers et d’agents de catégorie C.
« Des travaux seront également nécessaires dans certaines juridictions pour aménager les BEX et leur permettre d’abriter les permanences des éducateurs de la protection judiciaire de la jeunesse.
« Des crédits d’investissement à hauteur de 15, 4 millions d’euros sont programmés à ce titre.
« 4. Généraliser les bureaux d’aide aux victimes
« Conformément à l’article 707 du code de procédure pénale, l’exécution des peines intervient dans le respect des droits des victimes. Celles-ci sont particulièrement intéressées par l’exécution des décisions qui les concernent, qu’il s’agisse de l’indemnisation de leur préjudice ou des mesures destinées à les protéger, comme dans le cas d’une interdiction faite au condamné d’entrer en relation avec elles imposée, par exemple, dans le cadre d’un sursis avec mise à l’épreuve.
« Le plan national de prévention de la délinquance et d’aide aux victimes 2010-2012 a prévu la création de 50 bureaux d’aide aux victimes (BAV) au sein des principaux tribunaux de grande instance.
« Les BAV ont pour mission d’accueillir les victimes au sein des palais de justice, de les informer et de les orienter vers les magistrats ou les structures compétents. Elles y bénéficient pour cela d’une prise en charge par une association d’aide aux victimes, qui les aide dans leurs démarches et peut aussi les assister dans l’urgence lorsque qu’elles sont victimes de faits jugés en comparution immédiate.
« Les usagers se sont montrés satisfaits par les 38 bureaux déjà créés, qui accueillent un nombre croissant de victimes d’infractions pénales.
« La généralisation des BAV à l’ensemble des tribunaux de grande instance garantira un égal accès de toutes les victimes à ce dispositif sur l’ensemble du territoire national.
« Près de 140 BAV seront ainsi créés, pour un coût de fonctionnement annuel total s’élevant à 2, 8 millions d’euros.
« C. – Prévenir les discontinuités dans la prise en charge des personnes condamnées, en fiabilisant les systèmes d’information de la chaîne pénale et en assurant leur interconnexion
« Le rapport conjoint de l’inspection générale des services judiciaires et de l’inspection générale des finances sur les services pénitentiaires d’insertion et de probation, remis en juillet 2011, a mis en évidence que l’applicatif de suivi des personnes placées sous main de justice (APPI) souffrait de dysfonctionnements auxquels il importait de remédier et devait par ailleurs faire l’objet d’améliorations, comme le développement de l’opérationnalité de ses fonctionnalités. La fiabilisation et la modernisation de cet outil sont jugées essentielles pour éviter les discontinuités dans la prise en charge des personnes placées sous main de justice, en particulier entre le milieu fermé et le milieu ouvert. Ce chantier sera donc prioritaire.
« Au-delà, c’est l’interconnexion de l’application « Cassiopée » avec l’ensemble des applications utilisées par les acteurs de la chaîne pénale qui doit être menée à bien.
« L’application « Cassiopée » fera l’objet d’une interconnexion avec les applications des services de police et de gendarmerie en 2013, avec le logiciel utilisé par la protection judiciaire de la jeunesse cette même année et avec la nouvelle application utilisée dans les établissements pénitentiaires « Genesis » en 2015, après le déploiement de cette dernière.
« Ces différents interfaçages doivent permettre de développer les outils statistiques sur l’exécution des peines et ainsi contribuer au pilotage des politiques pénales.
« L’interconnexion de l’application « Cassiopée » permettra aussi de développer le dossier dématérialisé de procédure, dont il est attendu un gain de temps, une meilleure transmission de l’information entre les acteurs de la chaîne pénale et donc une plus grande réactivité tout au long de la chaîne pénale, ainsi qu’une sécurisation des informations transmises. Ce projet sera développé à compter de 2013. Il permettra aux acteurs de la chaîne pénale d’accéder à un dossier unique sous forme dématérialisée à partir de leurs applications. Son déploiement sera progressif. Le dossier unique de personnalité des mineurs prévu à l’article 5-2 de l’ordonnance n° 45-174 du 2 février 1945 relative à l’enfance délinquante, créé par la loi n° 2011-939 du 10 août 2011 sur la participation des citoyens au fonctionnement de la justice pénale et le jugement des mineurs, en constituera le premier élément.
« Le casier judiciaire sera modernisé en 2013 et 2014 pour assurer une dématérialisation complète des extraits de condamnation. L’interconnexion avec l’application « Cassiopée » interviendra néanmoins dès 2013.
« Pour mener à bien l’ensemble de ces chantiers, les plateformes techniques utilisées par le ministère de la justice devront être optimisées afin d’assurer un accès sécurisé 24 heures sur 24, 7 jours sur 7. Une maintenance devra être mise en place. Dès 2013, des investissements seront donc nécessaires pour mettre en place un site de secours à proximité de celui de Nantes. Des investissements seront également nécessaires pour sécuriser les infrastructures de réseau.
« 284 millions d’euros de crédits d’investissement sont programmés au titre de ces différents projets.
« II. – Renforcer les capacités de prévention de la récidive
« A. – Mieux évaluer le profil des personnes condamnées
« Les services pénitentiaires d’insertion et de probation (SPIP) ont un rôle essentiel à jouer dans la politique de prévention de la récidive, en tant qu’ils assurent le suivi non seulement des personnes incarcérées, mais aussi des 175 000 personnes condamnées mais suivies en milieu ouvert.
« Préalablement à la mise en place d’un régime de détention adapté et d’un parcours d’exécution des peines propre à prévenir la récidive, il convient de conduire une évaluation rigoureuse et systématique des caractéristiques de chaque condamné. À cet égard, deux mesures seront prises : d’une part, la mise en place d’un outil partagé, valable pour tous les condamnés, le diagnostic à visée criminologique (DAVC), actuellement expérimenté. D’autre part, la création de trois nouvelles structures d’évaluation nationales, sur le modèle des centres de Fresnes et de Réau.
« 1. Généraliser le DAVC et le suivi différencié dans les SPIP
« La prévention de la récidive est indissociable d’un travail d’évaluation centré sur la personne placée sous main de justice, afin que la prise en charge de cette dernière par le SPIP soit individualisée et adaptée à ses problématiques. Construit avec les professionnels de la filière, le DAVC est la formalisation de ce travail d’évaluation. Expérimenté avec succès sur trois sites, il doit faire l’objet d’une généralisation.
« Les données du DAVC pourront être consultées et utilisées par les parquets et les services d’application des peines depuis l’application « Cassiopée ».
« La création de 103 ETPT de psychologues est programmée à ce titre.
« 2. Créer trois nouveaux centres nationaux d’évaluation
« L’évaluation approfondie des condamnés à une longue peine, qui présentent un degré de dangerosité a priori supérieur, doit être développée en début de parcours et en cours d’exécution de la peine, notamment dès lors que le condamné remplit les conditions pour bénéficier d’un aménagement de peine. À cette fin, la capacité des centres nationaux d’évaluation, qui procèdent à une évaluation pluridisciplinaire sur plusieurs semaines, doit être accrue. Trois nouveaux centres seront créés à cette fin.
« La création de 50 ETPT est programmée à ce titre.
« 2 bis (nouveau). Mieux prendre en compte la dangerosité psychiatrique et criminologique des personnes placées sous main de justice
« Si l’évaluation de la dangerosité des personnes placées sous main de justice est complexe, elle n’en demeure pas moins possible et incontournable pour lutter efficacement contre la récidive.
« La notion de dangerosité recouvre deux acceptions : l’une, psychiatrique, se définissant comme un risque de passage à l’acte principalement lié à un trouble mental et l’autre, criminologique, ayant trait à la forte probabilité que présente un individu de commettre une nouvelle infraction empreinte d’une certaine gravité.
« Si l’ensemble des acteurs judiciaires s’est aujourd’hui approprié l’évaluation de la dangerosité psychiatrique, il n’en va pas encore complètement de même pour l’évaluation de la dangerosité criminologique, qui reste trop peu prise en compte. Le fait que la France souffre d’une offre de formation insuffisante en criminologie est, à cet égard, révélateur.
« Afin de remédier à cette situation, il est indispensable de donner une nouvelle impulsion à l’enseignement de la criminologie et, à ce titre, d’encourager les universités et les écoles des métiers de la justice à donner à cette discipline une plus grande visibilité afin de répondre aux attentes de terrain de l’ensemble des praticiens et, plus particulièrement, des experts psychiatres, mais aussi des magistrats, des personnels pénitentiaires et des membres des commissions pluridisciplinaires des mesures de sûreté.
« Pour que l’évaluation de la dangerosité criminologique puisse progresser, il convient également d’engager une réflexion sur les outils et les méthodes à la disposition des praticiens. Si la méthode clinique, qui repose sur des entretiens avec la personne et son observation dans le cadre d’expertises psychiatriques, est aujourd’hui bien établie dans le cadre de l’évaluation de la dangerosité psychiatrique, la méthode actuarielle fondée sur des échelles de risques est, pour sa part, insuffisamment utilisée par l’institution judiciaire dans son ensemble. Très répandue dans les pays anglo-saxons et, en particulier, au Canada, cette méthode repose sur des tables actuarielles mettant en évidence les différents facteurs de récidive à partir d’études statistiques comparant des groupes de criminels récidivistes et de criminels d’occasion. Parce que la dangerosité criminologique ne se réduit pas à la seule dangerosité psychiatrique, il convient d’intégrer ces méthodes actuarielles dans les outils et méthodes permettant aux praticiens d’émettre des avis circonstanciés, fondés sur des critères précis.
« De manière plus générale, l’évaluation de la dangerosité criminologique des personnes placées sous main de justice doit s’inscrire dans une approche résolument pluridisciplinaire, afin d’appréhender l’ensemble des facteurs, psychologiques, environnementaux et contextuels, susceptibles de favoriser le passage à l’acte. Prévu à l’article 706-56-2 du code de procédure pénale, créé par la loi n° 2010-242 du 10 mars 2010 tendant à amoindrir le risque de récidive criminelle et portant diverses dispositions de procédure pénale, le répertoire des données à caractère personnel collectées dans le cadre des procédures judiciaires (RDCPJ) contribuera de manière décisive à renforcer la qualité des évaluations de la dangerosité criminologique des personnes poursuivies ou condamnées.
« 3. Renforcer la pluridisciplinarité des expertises pour les condamnés ayant commis les faits les plus graves
« La loi prévoit qu’aucune libération conditionnelle ne peut être accordée aux personnes condamnées à une peine d’emprisonnement ou de réclusion criminelle égale ou supérieure à dix ans pour un crime aggravé d’atteinte aux personnes ou commis sur un mineur sans avis de la commission pluridisciplinaire des mesures de sûreté, rendu à la suite d’une évaluation pluridisciplinaire de dangerosité réalisée dans un service spécialisé chargé de l’observation des personnes détenues et assortie d’une expertise médicale réalisée par deux experts.
« L’article 6 de la présente loi renforce la pluridisciplinarité de cette expertise en permettant au juge de l’application des peines, par décision spécialement motivée, de remplacer la double expertise de deux psychiatres par une expertise réalisée conjointement par un médecin psychiatre et par un psychologue.
« 4. Augmenter le nombre d’experts psychiatres judiciaires
« Les lois de procédure pénale adoptées lors de la dernière décennie, et plus particulièrement celles visant la prévention de la récidive, ont multiplié les cas d’expertise psychiatrique obligatoire pour s’assurer d’une meilleure évaluation de la dangerosité des auteurs d’infractions et établir s’ils peuvent faire objet d’un traitement.
« En conséquence, l’augmentation du nombre d’expertises psychiatriques réalisées sur les auteurs d’infractions pénales entre 2002 et 2009 est évaluée à plus de 149 %, pour un nombre constant d’experts psychiatres, qui est actuellement de 537 médecins inscrits sur les listes des cours d’appel. Ainsi, alors qu’en 2002 le ratio était de 61 expertises par expert psychiatre par an, ce ratio a été porté en 2009 à 151. Les délais d’expertise se sont donc inévitablement allongés.
« Pour remédier à cette situation, trois mesures incitatives seront prises :
« – le versement d’une indemnité pour perte de ressources de 300, en complément du tarif de l’expertise elle-même, lorsque l’expertise sera conduite par un psychiatre libéral ;
« – la mise en place d’un système de bourses pour attirer les internes de médecine psychiatrique vers l’activité d’expertise judiciaire. Ainsi que le prévoit l’article 7 de la présente loi, les étudiants signeront à ce titre un contrat d’engagement relatif à la prise en charge psychiatrique de personnes sur décision de justice, ouvrant droit à une allocation en contrepartie, d’une part, du suivi d’une formation en sciences criminelles, en psychiatrie légale ou en psychologie légale, relative à l’expertise judiciaire ou à la prévention de la récidive et, d’autre part, de leur inscription, une fois leurs études terminées, pour une durée minimale de deux ans sur une des listes d’experts judiciaires près les cours d’appel, lorsque le nombre des experts judiciaires y figurant est insuffisant ;
« – la mise en place de tuteurs pour encourager, former et accompagner les psychiatres qui se lancent dans l’activité d’expertise judiciaire : il s’agit d’organiser l’accompagnement d’un psychiatre, récemment diplômé ou non et qui souhaite démarrer une activité en tant qu’expert « junior », par un expert judiciaire « senior » qui lui sert de tuteur, au cours des vingt premières expertises qui lui sont confiées.
« B. – Renforcer le suivi des condamnés présentant un risque de récidive, notamment des délinquants sexuels
« 1. Généraliser les programmes de prévention de la récidive
« Les programmes de prévention de la récidive seront généralisés à tous les établissements pénitentiaires et incluront obligatoirement un volet spécifique relatif à la délinquance sexuelle et à l’étude des comportements. Ces programmes seront élaborés et mis en œuvre par une équipe interdisciplinaire, comprenant notamment des psychologues.
« 2. Créer un second établissement spécialisé dans la prise en charge des détenus souffrant de troubles graves du comportement
« Comme évoqué précédemment, un deuxième établissement spécialisé ans la prise en charge des détenus souffrant de troubles graves du comportement sera construit sur le modèle de l’actuel établissement de Château-Thierry. Cette structure offrira 95 places.
« 3. S’assurer de l’effectivité des soins
« a. En milieu fermé
« L’article L. 3711-3 du code de la santé publique, dans sa rédaction issue de la loi n° 2010-242 du 10 mars 2010 précitée, avait prévu, dans le cadre de l’injonction de soins suivie en milieu ouvert, l’obligation pour le médecin traitant du condamné d’informer, par l’intermédiaire du médecin coordonnateur, le juge de l’application des peines de l’arrêt de soins qui interviendrait contre son avis.
« Afin de renforcer l’effectivité des soins en milieu fermé, l’article 5 de la présente loi vise à améliorer l’information du juge de l’application des peines pour les traitements suivis en détention. Le médecin traitant délivrera au condamné des attestations indiquant s’il suit ou non de façon régulière le traitement proposé par le juge de l’application des peines, à charge pour le condamné de les transmettre au juge de l’application des peines, qui pourra ainsi se prononcer en connaissance de cause sur le retrait de réductions de peine et l’octroi de réductions de peine supplémentaires ou d’une libération conditionnelle.
« b. En milieu ouvert
« La mise en œuvre effective d’une injonction de soins, que cette mesure intervienne dans le cadre d’un suivi socio-judiciaire, d’une surveillance judiciaire, d’une surveillance de sûreté ou d’une libération conditionnelle, nécessite la désignation par le juge de l’application des peines d’un médecin coordonnateur, psychiatre ou médecin ayant suivi une formation appropriée, inscrit sur une liste établie par le procureur de la République ; celui-ci joue un rôle d’intermédiaire entre ce magistrat et le médecin traitant. Le médecin coordonnateur est informé par le médecin traitant de toute difficulté survenue dans l’exécution du traitement et transmet au juge de l’application des peines les éléments nécessaires au contrôle de l’injonction de soins.
« Cependant, au 1er septembre 2011, seuls 237 médecins coordonnateurs étaient répartis, d’ailleurs inégalement, sur le territoire national pour 5 398 injonctions de soins en cours. La justice est ainsi confrontée à un déficit de médecins coordonnateurs : 17 départements en sont actuellement dépourvus et le nombre d’injonctions de soins non suivies est évalué à 1 750 mesures. 119 médecins coordonnateurs supplémentaires seraient nécessaires pour que toutes ces mesures puissent être suivies, à raison de 20 personnes suivies par médecin, quel que soit le département de résidence du condamné.
« Deux mesures ont pour objectif de remédier à l’insuffisance de médecins coordonnateurs.
« En premier lieu, l’indemnité forfaitaire perçue par les médecins coordonnateurs désignés par le juge d’application des peines pour suivre les personnes condamnées à une injonction de soins, actuellement fixée par l’arrêté du 24 janvier 2008 pris pour l’application des articles R. 3711-8 et R. 3711-11 du code de la santé publique relatif aux médecins coordonnateurs à 700 bruts par année civile et par personne suivie, sera revalorisée et portée à 900 bruts.
« En second lieu, les mécanismes de bourse et de tutorat exposés précédemment pour augmenter le nombre d’experts psychiatres concerneront également les médecins coordonnateurs.
« C. – Renforcer et réorganiser les services d’insertion et de probation pour assurer un meilleur suivi des personnes placées sous main de justice.
« 1. Mettre en place des équipes mobiles
« L’activité des SPIP connaît de façon structurelle des variations sensibles liées à l’activité judiciaire et aux caractéristiques de gestion des ressources humaines de la filière insertion et probation. Pour y faire face, des équipes mobiles seront, conformément aux préconisations du rapport de l’inspection générale des services judiciaires et de l’inspection générale des finances, constituées pour renforcer les services d’insertion et de probation en cas de pic d’activité et introduire plus de souplesse dans la gestion des effectifs.
« La création de 88 ETPT est programmée à ce titre et interviendra dès 2013.
« 2. Recentrer les conseillers d’insertion et de probation sur le suivi des personnes condamnées
« L’article 4 de la présente loi prévoit de confier, sauf en cas d’impossibilité matérielle, les enquêtes présentencielles au secteur associatif habilité. Cela permettra aux conseillers d’insertion et de probation de se recentrer sur le suivi des personnes condamnées (dit « suivi post-sentenciel »). L’équivalent de 130 ETPT de conseiller d’insertion et de probation pourra ainsi être dégagé et redéployé.
« 3. Réorganiser les SPIP
« Pour assurer une prise en charge régulière et homogène de toutes les personnes placées sous main de justice, l’organisation et les méthodes de travail des services d’insertion et de probation, qui ont connu ces dernières années une forte augmentation de leur activité ainsi que des mutations importantes de la procédure pénale et de la politique d’aménagement des peines, seront modernisées. Outre la généralisation du diagnostic à visée criminologique et du suivi différencié ainsi que la fiabilisation et le perfectionnement de l’application APPI déjà évoquées, plusieurs mesures y concourront :
« – dans le prolongement de la circulaire de la direction de l’administration pénitentiaire n° 113/PMJ1 du 19 mars 2008 relative aux missions et méthodes d’intervention des services pénitentiaires d’insertion et de probation et en prenant en compte le résultat des travaux relatifs aux missions et méthodes d’intervention des SPIP actuellement en cours, un référentiel d’activité sera élaboré pour préciser les missions des services d’insertion et de probation ;
« – des organigrammes de référence seront élaborés, à l’instar de ceux existant dans les établissements pénitentiaires ;
« – des modèles types d’organisation seront mis en place (en fonction de l’activité, de la typologie des personnes suivies et des réalités territoriales) de façon à harmoniser les pratiques ;
« – un service d’audit interne « métier » sera mis en place ;
« – des indicateurs fiables de mesure de la charge du travail et des résultats seront élaborés ;
« – un meilleur processus de répartition géographique des effectifs sera mis en œuvre, afin de faire converger progressivement la charge d’activité entre les services ;
« – une organisation territoriale plus fine sera mise en place, notamment en faisant coïncider le nombre de résidences administratives (sur lesquelles sont affectés les conseillers d’insertion et de probation) et d’antennes (correspondant à un lieu d’exercice, elles peuvent être mixtes ou consacrées exclusivement au milieu ouvert ou à un établissement pénitentiaire), afin de réduire les rigidités dans la gestion des effectifs.
« III. – Améliorer la prise en charge des mineurs délinquants
« A. – Réduire les délais de prise en charge par les services de la protection judiciaire de la jeunesse des mesures éducatives prononcées par le juge
« Réduire les délais d’exécution des mesures judiciaires prononcées contre les mineurs constitue un objectif essentiel non seulement parce que la mesure a vocation à mettre fin à un trouble à l’ordre public, mais également parce qu’il est indispensable qu’elle soit exécutée dans un temps proche de la commission des faits pour qu’elle ait un sens pour le mineur.
« L’exécution rapide de ces mesures permet également de prévenir la récidive.
« C’est pourquoi l’article 9 de la présente loi impose une prise en charge du mineur par le service éducatif dans un délai de cinq jours à compter de la date du jugement.
« Cette disposition permettra de renforcer l’efficacité de la réponse pénale apportée à la délinquance des mineurs.
« Or, une telle réduction de délais nécessite, en particulier dans les départements à forte délinquance, un renforcement ciblé des effectifs éducatifs de la protection judiciaire de la jeunesse. Dans ces départements, les délais d’exécution constatés sont en effet sensiblement supérieurs à la moyenne nationale, qui est actuellement de douze jours. Dans ces conditions, il n’est pas rare dans ces territoires qu’un mineur réitère des faits de délinquance alors même qu’une mesure prise à son encontre n’a pas encore été exécutée.
« L’objectif de réduire le délai de prise en charge à moins de cinq jours ne pourra être atteint par la seule optimisation des moyens existants et nécessitera un renforcement ciblé des effectifs dans vingt-neuf départements retenus comme prioritaires.
« La création de 120 ETPT d’éducateurs est programmée à ce titre. Elle interviendra de 2013 à 2014.
« B. – Accroître la capacité d’accueil dans les centres éducatifs fermés (CEF)
« Depuis leur création, les CEF ont montré qu’ils étaient des outils efficaces contre la réitération et qu’ils offraient une réponse pertinente aux mineurs les plus ancrés dans la délinquance ou qui commettent les actes les plus graves.
« Les articles 10-2 et 20-10 de l’ordonnance n° 45-174 du 2 février 1945 relative à l’enfance délinquante, dans leur rédaction issue de la loi n° 2011-939 du 10 août 2011 précitée, élargissent les conditions de placement en CEF des mineurs délinquants en ouvrant le recours à ce dispositif dans le cadre du contrôle judiciaire pour les mineurs de 13 à 16 ans auteurs de faits punis de cinq ans d’emprisonnement lorsqu’il s’agit de violences volontaires, d’agressions sexuelles ou de délits commis avec la circonstance aggravante de violences et lorsque le magistrat envisage la révocation d’un sursis avec mise à l’épreuve, le placement en CEF devenant une alternative à l’incarcération dans ce cadre.
« La direction de la protection judiciaire de la jeunesse dispose actuellement de 45 CEF de 12 places, soit une capacité de 540 places. Le besoin est estimé à environ 800 places, ce qui conduit à créer 20 centres supplémentaires.
« Dans un souci d’optimisation des moyens existants, ces 20 CEF supplémentaires seront créés par transformation de foyers d’hébergement existants.
« La création de 90 ETPT d’éducateurs est programmée à ce titre. Cette mesure accompagnant la mise en œuvre de la réforme de la justice des mineurs prévue par la loi n° 2011-939 du 10 août 2011 précitée, 60 ETPT sur les 90 précités seront ouverts, par anticipation, dès le budget 2012.
« En outre, afin d’accélérer l’implantation de ces centres, l’article 8 de la présente loi les dispense, lorsqu’ils relèvent du secteur public de la protection judiciaire de la jeunesse, de la procédure d’appel à projets.
« C. – Développer un suivi pédopsychiatrique dans les centres éducatifs fermés
« Les mineurs les plus difficiles présentent des troubles du comportement caractéristiques (relations violentes et mise en échec de toute solution les concernant).
« Or, ces mineurs constituent une grande partie du public suivi par les CEF.
« Ainsi, les éducateurs ont à composer avec des mineurs qui, s’ils ne sont pas tous atteints de pathologies psychiatriques, connaissent généralement des troubles du comportement et présentent une forte tendance au passage à l’acte violent.
« Les particularités de ces mineurs imposent une prise en charge concertée qui repose sur une articulation soutenue entre les services de la protection judiciaire de la jeunesse et les dispositifs psychiatriques de proximité.
À ce jour, 13 CEF ont été renforcés en moyens de suivi pédopsychiatrique entre 2008 et 2011 et les premiers résultats sont probants. Une diminution significative des incidents a été constatée.
« Au vu de ces résultats, ce dispositif sera étendu à 25 CEF supplémentaires.
« Ce déploiement s’appuiera sur des protocoles conclus entre les directions interrégionales de la protection judiciaire de la jeunesse et les agences régionales de la santé pour favoriser les prises en charge.
« La création de 37, 5 ETPT est programmée à ce titre. »
La parole est à M. le garde des sceaux.
Comme je l’ai expliqué au cours de la discussion générale, hier, la position du Gouvernement est totalement différente de celle de la commission des lois du Sénat. Ainsi va la démocratie ! J’observe cependant que nous poursuivons les mêmes objectifs, même si nous empruntons des voies différentes.
Mesdames, messieurs les sénateurs, le projet de loi qui vous est aujourd'hui soumis diffère du texte initial. Pour sa part, le Gouvernement désire rester dans le cadre de la loi pénitentiaire. Il souhaite que les peines de prison prononcées puissent être exécutées, que l’aménagement des peines soit développé et que le principe de personnalisation des peines soit toujours appliqué.
L’amendement n° 30 a donc pour objet de rétablir le texte du rapport annexé tel qu’il a été voté par l’Assemblée nationale. Je présenterai d’ailleurs d’autres amendements visant à rétablir le texte initial.
Pour l’heure, je m’abstiendrai d’intervenir longuement, afin de ne pas indisposer la Haute Assemblée.
Le débat va maintenant avoir lieu.
L'amendement n° 37 rectifié bis, présenté par MM. Mézard, Baylet, C. Bourquin, Collin, Collombat et Fortassin, Mme Laborde, MM. Plancade, Requier, Tropeano, Vall et Vendasi et Mme Escoffier, est ainsi libellé :
Rapport annexé, avant l’alinéa 1
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
Toute personne privée de liberté conserve l’intégralité des droits qui ne lui a pas été retirée selon la loi par la décision la condamnant à une peine d'emprisonnement ou la plaçant en détention provisoire.
Les restrictions imposées aux personnes privées de liberté doivent être réduites au strict nécessaire et doivent être proportionnelles aux objectifs légitimes pour lesquelles elles ont été imposées.
La parole est à M. Jacques Mézard.
Cet amendement vise à rappeler les principes fondamentaux garantissant la dignité de la personne privée de liberté. Ces principes ont été posés par les recommandations du Comité des ministres du Conseil de l’Europe aux États membres sur les règles pénitentiaires européennes du 11 janvier 2006.
Le groupe du RDSE s’est toujours attaché à défendre une politique pénale visant à la fois à réprimer les atteintes à l’ordre public et à donner aux personnes détenues la garantie que leurs droits seront respectés. Nous veillons à ce que ces principes soient respectés dans tous les textes que le Gouvernement nous soumet. Nous les défendrons une nouvelle fois aujourd’hui au travers de nos amendements.
Nous considérons que la loi pénitentiaire a constitué une avancée réelle. À l’évidence, comme nous l’avons dit lors de la discussion générale, le projet de loi de programmation relatif à l’exécution des peines n’est pas à la hauteur des ouvertures de la loi pénitentiaire. De fait, le rapport définissant les objectifs de la politique d’exécution des peines, dans sa version initiale, n’est qu’une compilation de nouvelles dispositions circonstancielles, très éloignées de l’esprit de la loi pénitentiaire et même de ses orientations fondamentales.
L’amendement n° 37 rectifié bis vise simplement à insérer dans le chapeau de ce rapport deux principes fondamentaux attachés à la personne du détenu : la conservation des droits qui n’ont pas été expressément restreints par la loi et la proportionnalité de la restriction des droits. En d’autres termes, il s’agit de concilier la prise en compte des impératifs de sécurité, auxquels nous sommes tous attachés sur l’ensemble de nos travées, et la mise en œuvre de conditions de détention ne portant pas atteinte à la dignité humaine.
L'amendement n° 38 rectifié bis, présenté par MM. Mézard, Baylet, C. Bourquin, Collin, Collombat et Fortassin, Mme Laborde, MM. Plancade, Requier, Tropeano, Vall et Vendasi et Mme Escoffier, est ainsi libellé :
Rapport annexé, alinéa 1er, seconde phrase
Après les mots :
plus rapide
insérer les mots :
et individualisée
La parole est à M. Jacques Mézard.
Il est nécessaire de rappeler dans les objectifs de la politique d’exécution des peines que la recherche d’une plus grande rapidité de l’exécution des peines ne saurait se faire au détriment du principe d’individualisation des peines et de leur exécution, ce que pose d’ailleurs clairement l’article 2 de la loi pénitentiaire.
L'amendement n° 39 rectifié bis, présenté par MM. Mézard, Baylet, C. Bourquin, Collin, Collombat et Fortassin, Mme Laborde, MM. Plancade, Requier, Tropeano, Vall et Vendasi et Mme Escoffier, est ainsi libellé :
Rapport annexé, alinéa 1er, seconde phrase
Compléter cette phrase par les mots :
afin de permettre, en priorité, leur relèvement
La parole est à M. Jacques Mézard.
Dans le même esprit, cet amendement vise à préciser que si la prise en charge des mineurs délinquants doit être améliorée – tel est l’objet du projet de loi de programmation –, c’est dans l’idée de permettre leur relèvement.
Nous tenons à ce que cette référence implicite à l’ordonnance du 2 février 1945 relative à l’enfance délinquante, qui a été modifiée et malmenée à de nombreuses reprises depuis une dizaine d’années, figure dans le rapport annexé.
L’ordonnance de 1945 pose, je le rappelle, le primat de l’éducatif sur le répressif, principe auquel nous sommes attachés.
L'amendement n° 40 rectifié bis, présenté par MM. Mézard, Baylet, C. Bourquin, Collin, Collombat et Fortassin, Mme Laborde, MM. Plancade, Requier, Tropeano, Vall et Vendasi et Mme Escoffier, est ainsi libellé :
Rapport annexé
I. - Avant l'alinéa 3
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
Le personnel pénitentiaire exécute une importante mission de service public et son recrutement, sa formation et ses conditions de travail doivent lui permettre de fournir un haut niveau de prise en charge des détenus pour permettre l’application de la loi pénitentiaire.
II. - Alinéa 3, première phrase
Remplacer les mots :
La loi pénitentiaire
par les mots :
Celle-ci
La parole est à M. Jacques Mézard.
Cet amendement vise à rappeler la recommandation n° 8 du Comité des ministres du Conseil de l’Europe du 11 janvier 2006, qui souligne le caractère fondamental de la mission de service public remplie par les personnels de l’administration pénitentiaire, en l’occurrence pour permettre l’application de la loi pénitentiaire de novembre 2009.
Certes, il ne s’agit que d’une déclaration de principe, mais il nous paraît essentiel qu’elle figure de façon liminaire dans les dispositions relatives à l’application de la loi pénitentiaire.
L'amendement n° 13, présenté par Mme Assassi, M. Favier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Rapport annexé, alinéas 40 et 41
Supprimer ces alinéas.
La parole est à Mme Éliane Assassi.
L’article 9, qui prévoit la prise en charge du mineur par le service éducatif dans un délai de cinq jours, a été supprimé par la commission.
Si l’on ne peut être que favorable à la prise en charge rapide des mineurs, nous avons cependant estimé en commission qu’il était inutile d’inscrire dans la loi un délai butoir, cette exigence étant largement hypothéquée par l’octroi des moyens nécessaires aux services compétents.
En cohérence avec cette position, nous proposons de supprimer les alinéas 40 et 41 du rapport annexé.
L'amendement n° 55, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
Le rapport définissant les objectifs de la politique d’exécution des peines, annexé à la présente loi, est approuvé.
La parole est à M. le garde des sceaux.
Cet amendement vise à rétablir l’article 1er du projet de loi tel qu’il a été adopté par l’Assemblée nationale. Je rappelle que le rapport annexé tend à définir les objectifs de la loi.
Chacun l’aura compris, nous portons une autre vision de la politique pénitentiaire que le Gouvernement.
M. le garde des sceaux a dit, sur le ton de la plaisanterie, certes, mais le sujet est grave, que nous voulions vider les prisons.
Le propre des progressistes, monsieur le ministre, est de vouloir vider les prisons. Cette nouvelle mouture du texte ne videra malheureusement pas les prisons aujourd’hui !
La commission a retenu du rapport annexé présenté par le Gouvernement les objectifs qui lui semblaient positifs, même lorsque les moyens envisagés lui ont paru insuffisants. Les auditions auxquelles nous avons procédé nous ont permis de constater que les organisations représentatives des différents acteurs de la politique pénitentiaire ne sont pas favorables – c’est le moins que l’on puisse dire ! – aux propositions ayant trait à la politique pénitentiaire pour les années à venir formulées par le Gouvernement dans l’annexe.
Même si ces mesures sont insuffisantes, nous avons approuvé, en quelque sorte, la création de nouveaux centres de semi-liberté. Ils font en effet partie, nous semble-t-il, des alternatives à la prison qu’il faut développer.
Vous avez compris ce que j’ai voulu dire, cher collègue : ce n’est pas l’encellulement vingt-quatre heures sur vingt-quatre !
Nous avons aussi validé la création de nouveaux centres d’évaluation. Même si le caractère pluridisciplinaire des évaluations nous préoccupe quelque peu, nous pensons néanmoins que c’est une bonne chose.
La commission a aussi repris le principe du renforcement des bureaux de l’exécution des peines et des bureaux d’aide aux victimes, qui ont fait la preuve de leur efficacité, à condition que leur généralisation soit effective.
Nous avons aussi complété l’annexe en fonction, non pas de la volonté de votre rapporteure, mais des priorités qui nous semblent devoir guider la politique pénitentiaire, dans la continuité de ce que le Parlement, dans sa grande majorité, a acté dans la loi pénitentiaire de 2009.
Ainsi, nous avons rappelé que le présent projet de loi avait pour objet principal de garantir la mise en œuvre effective des dispositions relatives aux conditions de détention ainsi qu’aux aménagements de peine prévus par la loi du 24 novembre 2009. Nous avons également indiqué que les dépenses consacrées aux infrastructures devaient se concentrer sur l’entretien des bâtiments, la rénovation des structures existantes et l’augmentation du nombre de cellules individuelles, pour répondre aux souhaits exprimés dans la loi pénitentiaire.
Dans le même esprit, la rédaction retenue par la commission relève que la garantie de la mise en œuvre des droits des personnes détenues, en particulier le strict encadrement des fouilles, implique l’équipement des établissements pénitentiaires en portiques permettant d’éviter le recours aux fouilles intégrales.
Notre rédaction prévoit également – nous poursuivons dans notre logique – que l’évolution des effectifs des conseillers d’insertion et de probation permette d’atteindre un ratio maximal de soixante dossiers par conseiller.
Monsieur le garde des sceaux, vous avez bien conscience que nos propositions n’épuisent pas les obligations fixées par la loi pénitentiaire. Nous avons pour cela une bonne raison : contrairement au Gouvernement, nous ne voulons pas, à la veille de rendez-vous électoraux majeurs, à la fois présidentiel et législatifs, à l’occasion desquels nos concitoyens vont pouvoir exprimer leur choix, mettre en chantier, à la va-vite, des questions importantes touchant au droit pénal. Ces sujets devront faire l’objet de débats.
La majorité actuelle du Sénat a d’ores et déjà exprimé son opposition aux évolutions qu’ont connues le code pénal et le code de procédure pénale depuis dix ans. Nous n’avons pas souhaité que le projet de loi de programmation pour les années à venir aille au-delà du cadre de l’exécution des peines. Voilà pourquoi la commission a émis un avis défavorable sur l’amendement n° 30.
L’amendement n° 37 rectifié bis vise à rappeler les recommandations du Comité des ministres du Conseil de l’Europe sur les règles pénitentiaires européennes. Elles s’accordent tout à fait avec les orientations que nous souhaitons donner au projet de loi de programmation et nous paraissent utiles. Il est toujours bon de rappeler les principes au nom desquels nous légiférons.
La commission a donc émis un avis favorable sur cet amendement, tout comme sur les amendements n° 38 rectifié bis et 39 rectifié bis.
L’amendement n° 40 rectifié bis est apparu à la commission redondant avec la loi pénitentiaire. Je suggère donc à son auteur de le retirer, même si je suis évidemment favorable à son contenu.
L’amendement n° 13 vise, en cohérence avec les modifications adoptées en commission la semaine dernière, à supprimer les deux alinéas de l’annexe faisant référence à l’article 9 du projet de loi, qui a été supprimé par notre commission.
Autant la création de 120 équivalents temps plein travaillé, ou ETPT, d’éducateurs ayant vocation à être affectés aux services de milieu ouvert rencontrant le plus de difficultés nous paraît aller dans le bon sens, autant les dispositions de l’article 9 nous ont paru inutiles et de pur affichage.
Je tiens au préalable à indiquer que j’approuve totalement les propos de Mme la rapporteur.
Si je prends la parole, c’est pour réagir à l’intervention de M. le garde des sceaux, qui nous a affirmé que le projet de loi était la stricte application de la loi pénitentiaire.
Or, pour la majorité des membres de la commission des lois, tel n’est pas le cas. Nous pensons en effet que le projet de loi va à l’encontre d’un certain nombre des intentions et des intuitions fortes contenues dans la loi pénitentiaire.
Monsieur le garde des sceaux, vous n’avez pas pu assister – c’est bien normal – à la réunion que la commission des lois a tenue ce matin, au cours de laquelle elle a reçu la Conférence nationale des procureurs de la République.
À cette occasion, il nous a été indiqué que la profession était soumise à des injonctions paradoxales : d’un côté, on demande aux procureurs de remplir les prisons ; de l’autre, par des circulaires concomitantes, on leur demande de les vider. Allez comprendre…
Si vous le souhaitez, monsieur Hyest vous pourrez rétablir les faits et nous faire partager votre vision des choses.
Je désire insister sur un point en particulier.
Le projet de loi est mû par la volonté d’augmenter considérablement les capacités d’accueil des prisons. Sur ce sujet, je me réfère toujours aux visites de prisons que j’effectue et aux conversations que j’ai avec les fonctionnaires de l’administration pénitentiaire. C’est ainsi que, hier, on m’a signalé un cas récent de « sortie sèche ». Cette personne, qui avait purgé six ans de détention sur les dix ans auxquels elle était condamnée, s’est donc retrouvée sur le trottoir, avec un milieu familial détruit, un environnement social inexistant et une insertion professionnelle impossible. Voilà la réalité !
Conformément aux intuitions très fortes contenues dans la loi pénitentiaire, je dis que la question est non pas de savoir si quelqu'un qui a été condamné à dix ans doit purger l’intégralité de sa peine, comme le pensent certains de nos compatriotes, mais de se pencher sur ce qui se passe pendant ces dix années. Pendant la durée d’enfermement, quelle qu’elle soit, tout doit être fait pour qu’il n’y ait plus de sorties sèches, pour que cet être humain puisse se réinsérer dans la société et pour l’aider à trouver un milieu professionnel qui lui convienne. Dans ce cas, la période de détention peut permettre à la personne de s’amender, de ne pas récidiver et de se réinsérer dans notre société.
Il nous semblait que la loi pénitentiaire n’avait pas pour objet d’aboutir à toujours plus de détentions. La détention est certes nécessaire – nous nous écartons en cela de Michel Foucault, qui était pourtant un très grand penseur –, mais son objectif est de favoriser, dès le premier jour, la réinsertion de ceux qu’elle touche.
Il existe donc un désaccord entre la majorité des membres composant la commission des lois et votre texte, monsieur le garde des sceaux. En effet, le problème n’est pas, à notre sens, de créer toujours plus de places, construites sous le régime de partenariats public-privé, ou PPP, qui vont léguer à nos enfants et petits-enfants une dette archi-durable, qu’ils devront payer, tout comme ils devront payer, de façon inéluctable, les politiques mises en place aujourd'hui. Cela ne peut être notre conception : nous souhaitons au contraire faire en sorte que la période de détention favorise la réinsertion.
J’ai été quelque peu étonné par les propos de M. le Président de la République, qui a reçu hier un certain nombre de nos collègues. Comme vous n’étiez pas convié à cette réception, monsieur le garde des sceaux, je vais donc vous apprendre ce que dit la presse, à moins que vous ne l’ayez déjà lue.
M. Sarkozy a déclaré : « Tout va se jouer sur l’attitude de la majorité. » Si je comprends bien, votre responsabilité est grande, mes chers collègues.
Je poursuis : « Si on recommence le concours Lépine du parlementaire qui a des convictions, qui propose des amendements, la lisibilité du travail de la majorité sera réduite à néant. »
Cette conception du travail parlementaire me navre. Je le dis avec force : considérer que le parlementaire qui dépose des amendements en fonction de ses convictions réduit « à néant » la lisibilité de l’action politique relève d’une conception de la séparation des pouvoirs qui devrait inciter le garde des sceaux à se dresser de tout son être. Sachez que les élus ne font que leur travail, quel que soit le groupe auquel ils appartiennent !
Je tenais à le dire, pour que, dès l’ouverture du débat que nous menons, les choses soient bien claires.
Quel est l’avis du Gouvernement sur les amendements n° 37 rectifié bis, 38 rectifié bis, 39 rectifié bis, 40 rectifié bis et 13 ?
Avant d’en venir à l’avis du Gouvernement, M. le président de la commission souhaite certainement que je lui réponde, sinon son intervention perdrait de son utilité.
Bien sûr, mais l’objectif d’un parlementaire n’est pas seulement de voir ses propos figurer au Journal officiel.
Monsieur le président de la commission, j’assume parfaitement le fait de dire que le présent texte s’inscrit dans l’esprit de la loi pénitentiaire, que j’ai votée, tout comme vous. Je sais simplement qu’il est impossible de travailler dans de bonnes conditions dans un établissement pénitentiaire où les détenus sont les uns sur les autres. Comment assurer l’encellulement individuel avec un taux d’occupation des lieux de 136 % ?
La nécessité de construire de nouveaux établissements pénitentiaires pour permettre l’application des décisions prises par les magistrats relève donc de l’évidence. Au demeurant, je vous rappelle que les juges prennent également leurs décisions après avoir entendu le réquisitoire des procureurs, qui sont libres de leurs paroles et de leur façon de mener l’action publique. Trouvez-moi un seul procureur qui ait reçu une instruction du garde des sceaux ; il n’y en a eu aucun !
M. Michel Mercier, garde des sceaux. C’est possible, mais je souhaite tout de même profiter de l’occasion qui m’est offerte pour apporter un certain nombre de précisions. J’ai bien le droit de vous indiquer quelle est ma conception de la justice.
M. Pierre Charon applaudit.
Je le répète, les procureurs mènent librement l’action publique. Et si des condamnations sont prononcées, c’est parce que les magistrats du siège, qui sont eux aussi libres, ont suivi les réquisitions du parquet !
Le rôle du ministère de la justice est d’assurer l’exécution des décisions judiciaires. Tel est précisément l’objet du projet de loi. C’est le principe de la séparation des pouvoirs. Agir autrement serait la négation même de la justice.
Et ne dites pas que notre seule réponse est la prison : c’est faux ! C’est sous ce gouvernement – certes, le pouvoir législatif a donné l’impulsion en adoptant la loi pénitentiaire – que les aménagements de peines, dont le taux est passé de 10 % à 18 %, et les recours au bracelet électronique ont été les plus nombreux. Vous avez le droit de trouver que cela n’est pas suffisant, mais ne dites pas que ce n’est rien !
Il faut que nous ayons un vrai débat sur ces questions, et chacun pourra exprimer son point de vue. Mais vous ne rendrez pas service à la politique pénitentiaire en caricaturant l’action du Gouvernement. Nous n’avons qu’un seul objectif : réhabiliter le condamné pour qu’il redevienne un citoyen à part entière à sa sortie de prison.
Certes, tout ne peut pas se faire en un jour. Par exemple, il est plus facile de trouver du travail dans certains endroits que dans d’autres. D’ailleurs, tout le monde veut garder un établissement pénitentiaire sur son territoire, même ceux qui proclament par ailleurs qu’il y a trop de prisons !
Je peux le comprendre, mais il n’y a pas forcément de travail à proximité de chaque établissement pénitentiaire. Je parle de travail réel, débouchant sur une vraie formation, et pas simplement du fait d’emboîter des morceaux de plastique…
Par exemple, le centre pénitentiaire de Lannemezan, qui accueille des condamnés à de longues peines, offre une véritable formation professionnelle. On fabrique ainsi des portails qui sont vendus 13 000 euros pièce. À la sortie, les détenus trouvent tout de suite un travail. Mais ce n’est pas le cas partout, même si nous réalisons des progrès en ce sens.
Pour commencer, il faut améliorer les locaux de travail dans les centres pénitentiaires, qui se réduisent parfois à un appentis. C’est aussi l’un des objets du projet de loi.
Le Gouvernement a créé 1 000 postes de conseillers d’insertion et de probation. Vous pouvez trouver que c’est insuffisant et qu’il en faudrait 2 000 ou 3 000, mais vous ne pouvez pas nier les postes que nous avons créés. C’est ainsi que la démocratie fonctionne : tout n’est pas tout noir ou tout blanc. On peut exprimer un point de vue différent tout en reconnaissant le travail qui est accompli.
J’en viens à présent aux amendements sur l’article 1er.
Le Gouvernement, qui a déposé ses propres amendements, ne partage pas la position de la commission, même s’il la respecte.
Ainsi, l’amendement n° 37 rectifié bis est déjà satisfait par l’article 22 de la loi du 24 novembre 2009 pénitentiaire. Il est inutile de préciser toutes les vingt secondes que vous voulez faire appliquer la loi pénitentiaire. Répéter ce qui figure déjà dans la loi, c’est bégayer ! Au demeurant, cet article reprend une phrase célèbre de Valéry Giscard d’Estaing en 1974 : « La prison, c’est la privation de la liberté d’aller et de venir et rien d’autre. »
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable.
Il en va de même pour l’amendement n° 38 rectifié bis. Je rappelle, là encore, que la loi pénitentiaire fait partie de notre droit positif et que ses dispositions s’appliquent. Il est donc inutile d’aller plus loin.
En revanche, je suis favorable à l’amendement n° 39 rectifié bis, qui vise à rappeler un principe fondamental reconnu par les lois de la République issu de la jurisprudence du Conseil constitutionnel en insistant sur l’objectif de la politique menée pour les mineurs délinquants : le relèvement des mineurs.
Le projet de loi étant consacré à l’exécution des peines, et non au recrutement, à la formation et aux conditions de travail du personnel pénitentiaire, le dispositif visé à l’amendement n° 40 rectifié bis relève, me semble-t-il, du cavalier législatif. L’avis est donc défavorable.
Enfin, je rappelle que nous avons prévu des moyens supplémentaires et que nous en soutiendrons la création en demandant le rétablissement de l’article 9 du projet de loi. Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur l’amendement n° 13.
La parole est à M. Jean-Jacques Hyest, pour explication de vote sur l'amendement n° 30.
Pour ma part, je comprends parfaitement que le Gouvernement ait déposé un amendement tendant à rétablir l’annexe dans la rédaction adoptée par l’Assemblée nationale. Ce qui me surprend, c’est la volonté de la commission d’adopter les seules dispositions figurant déjà dans la loi pénitentiaire et de rejeter les mesures nouvelles.
On pourrait par exemple apporter des nuances quant au contenu de l’annexe, en discutant du nombre de places nécessaires à un horizon de quinze ou vingt ans. Mais ce n’est même pas le cas : on ne dit simplement rien ! Or quelle serait la situation si les politiques successives n’avaient pas eu pour effet d’augmenter le nombre de places dans les établissements pénitentiaires ? S’il y a eu des améliorations considérables, c’est bien parce que des programmes ont été menés pour faire respecter la loi pénitentiaire !
Je trouve d’ailleurs certaines déclarations pour le moins étonnantes. Il faut à l’évidence un établissement supplémentaire en Guyane ; qui peut prétendre le contraire ? Et je pourrais multiplier les exemples à l’envi !
Par ailleurs, nous sommes favorables à l’aménagement des peines, mais cela n’a aucun sens de le rendre automatique. Les magistrats seront incités à augmenter les peines de détention pour éviter les aménagements obligatoires. Quel est l’intérêt de prononcer une peine de prison si elle n’est pas exécutée ? D’ailleurs, lorsque l’incarcération ne s’impose pas, on peut opter pour la surveillance électronique ou un régime de semi-liberté. Ces possibilités se sont fortement développées, conformément à l’esprit de la loi pénitentiaire.
Je rappelle que le Sénat s’est prononcé à l’unanimité pour le maintien de l’aménagement des peines après deux ans, et non un an. Nous y tenions beaucoup.
Certains souhaitent que le nombre de détenus n’augmente pas et, invoquant le numerus clausus – j’adore cette expression
Sourires.
Personnellement, je souhaite pour mon pays que les prisons ne soient pas pleines. Cela suppose qu’il y ait suffisamment de places pour accueillir les détenus et permettre un vrai travail de réinsertion.
Comme M. le garde des sceaux l’a souligné, la réinsertion commence à l’entrée en prison. Il faut donc développer les services de probation. Vouloir séparer de nouveau l’extérieur et l’intérieur, comme certains le prônent, est une belle stupidité.
Par conséquent, je pense qu’il aurait été souhaitable de pouvoir amender quelque peu le rapport annexé, monsieur le garde des sceaux. Vous le savez, nous étions un certain nombre à plaider pour une étude d’impact un peu plus fine sur l’exécution des peines, ce qui aurait peut-être permis de dire qu’il n’était pas nécessaire d’ouvrir autant de places. Mais c’est une nuance. La finalité est d’appliquer la loi pénitentiaire dans de bonnes conditions, dans l’intérêt des personnes détenues et de la société. Nous le savons tous, l’insertion et la réinsertion sont des nécessités.
Par ailleurs, et M. le garde des sceaux le sait fort bien, les très courtes peines n’ont jamais prouvé vraiment leur efficacité. C’est d’ailleurs pour cela qu’elles ne sont pas exécutées. Mais, dans ce cas, il n’y a aucune réponse pénale. Ce n’est pas normal ! Tout acte qui mérite une sanction doit trouver une réponse, notamment – cela a été rappelé – s’agissant des jeunes.
C’est donc, me semble-t-il, un faux procès qui est fait à ce projet de loi. Le texte s’inscrit dans une perspective d’amélioration de la qualité d’accueil des détenus, de l’insertion et de création de nouveaux postes, même s’il n’y en a pas assez. Nous savons qu’il n’y a pas suffisamment de personnels dans les services d’insertion et de probation, ni de juges d’application des peines. Mais le Gouvernement crée de nouveaux postes, et c’est essentiel. À défaut, la sortie de prison serait, pour reprendre l’expression du président de la commission des lois, une « sortie sèche », ce qui est très mauvais.
En outre, on ne peut pas plaider pour une aggravation des sanctions, notamment pour les criminels et les délinquants sexuels, ce qui est d’ailleurs une bonne chose pour la société – cela a été la ligne générale depuis vingt ans, aboutissant à une augmentation de la part de ce type de détenus dans les prisons –, tout en s’opposant à la création de places supplémentaires dans les établissements pénitentiaires. Lorsque les magistrats prononcent des condamnations, ils ne font qu’appliquer la loi ; nous devons en tirer les conséquences en matière de politique pénitentiaire.
Par conséquent, au-delà de certaines nuances que je pourrais avoir sur l’annexe, je voterai l’amendement du Gouvernement. Ce n’est pas parce qu’on a voté la loi pénitentiaire qu’on ne doit plus rien faire ! À mon sens, il y a encore beaucoup à faire pour améliorer la situation dans nos prisons et le fonctionnement de la justice ! §
M. Jean-Pierre Michel. Puisque nous en sommes aux déclarations liminaires, je tiens à vous dire, monsieur le ministre, que nous vous reprochons surtout de présenter un projet de loi de programmation alors que vous allez bientôt quitter vos fonctions, le mandat présidentiel touchant à son terme.
Protestations sur les travées de l'UMP.
Il fallait déposer une motion tendant à opposer la question préalable, alors !
Monsieur le ministre, ce n’est pas vous qui êtes en cause personnellement, tout le monde le sait, mais une loi de programmation se présente en début et non en fin de mandature, après avoir procédé à un premier état des lieux. C’est notre critique la plus importante, même si le contenu du texte est également discutable ; d’ailleurs, mon collègue Jean-Jacques Hyest a émis un jugement assez négatif à son encontre, même si, au final, il le votera.
Je souhaite revenir, car j’ai été un peu rapide hier, sur ce qui est écrit dans l’annexe : « À l’exception des établissements parisiens, la capacité des établissements ne dépassera toutefois en aucun cas 850 places. » Cela signifie que l’on construira partout des établissements de 850 places, sauf en région parisienne où les centres atteindront 1 000, 2 000 ou 3 000 places et où l’on relèvera de 30 % le droit à bâtir et à enfermer, comme l’a annoncé dimanche soir le Président de la République !
La direction de l’administration pénitentiaire lit-elle les rapports du Contrôleur général des lieux de privation de liberté ou de l’Observatoire des prisons ? Écoute-t-elle les syndicats pénitentiaires ? Les gros établissements sont très difficiles à gérer, le nombre de suicides et d’agressions y est élevé.
Je l’ai souligné hier, vous n’appliquez pas la loi pénitentiaire, qui prévoyait que soient connus les taux de récidive, établissement par établissement. Il serait intéressant de connaître ces chiffres, même si je suis déjà quasiment certain que les établissements plus restreints fonctionnent beaucoup mieux que les gros.
Pourquoi revenir au gigantisme qui a tellement été critiqué ? Je pense, notamment, à Fleury-Mérogis. En agissant de la sorte, vous ne freinerez ni le nombre de suicides en prison ni le nombre d’agressions, et vous n’aiderez pas le personnel dans sa mission de garde, qui est aussi une mission d’insertion.
Bien entendu, le groupe socialiste suivra les préconisations de Mme la rapporteur.
Au début de la discussion des articles et avant d’entrer dans les détails du texte, il est normal de se livrer à des déclarations de principe.
Jean-Pierre Michel sait parfaitement que je n’ai supprimé aucun petit établissement. Je les ai tous maintenus, même ceux dont la suppression était prévue, car j’ai jugé, pour les avoir visités, qu’il y régnait une certaine « convivialité » même si leur conception immobilière n’était pas forcément parfaite. Il n’y a pas que Mayotte, monsieur le sénateur, quand bien même je m’efforce, bien sûr, de trouver une solution pour les détenus, mais aussi pour les gardiens de Majicavo, que vous avez oublié d’évoquer hier !
Les détenus que j’ai rencontrés ont tous manifesté le désir de rester dans ces petites structures en raison du travail d’humanisation qui y est fait.
Quant aux grosses structures, ce qui compte c’est avant tout le type d’architecture choisi. Pour les futurs établissements, il nous faudra tirer les leçons des échecs passés. C’est moins le nombre de places qui est en cause que le type d’architecture. Si l’établissement est composé de cinq pavillons de 100 personnes, avec des arbres, ce n’est pas la même chose qu’un unique bâtiment de 500 personnes.
Voilà pourquoi nous avons prévu de renforcer le système conception-réalisation. L’idée est que l’administration pénitentiaire puisse mieux imposer les architectures les plus adaptées.
J’ai bien compris, monsieur Michel, en écoutant M. Sueur et en constatant que vous avez vous-même, de façon imagée, évoqué le taux de 30 %, que, depuis dimanche, les propositions du Président de la République font l’actualité !
M. Jean-Pierre Michel s’esclaffe.
Je ferai un petit aparté statistique sur l’utilisation qui est faite des chiffres.
Depuis le début du débat, beaucoup de chiffres sont mis en lien les uns avec les autres. Pour autant, y a-t-il relation de causalité entre eux ? Selon vous, il y aurait plus de détenus, donc il faudrait plus de places. Pardonnez-moi, mais les choses ne sont pas aussi simples. Si l’on souhaite mettre des chiffres en rapport et établir des relations de cause à effet, il faut considérer l’ensemble des facteurs.
Le nombre de détenus n’est pas uniquement lié au nombre de places, il est aussi fonction des politiques pénales qui sont mises en œuvre, de l’évolution de la délinquance, et donc des mesures et des politiques de prévention de la délinquance. Il est également lié aux données sociodémographiques, qui peuvent être ponctuelles ou conjoncturelles.
Par ailleurs, le fait de créer plus de places n’entraînera-t-il pas une augmentation mathématique du nombre de détenus ?
Enfin, l’aménagement des peines me semble être la seule façon de personnaliser la peine. En matière pénale, on ne peut pas prévoir à l’avance toutes les peines possibles et imaginables, pas plus que l’on ne peut savoir à quel délinquant on aura affaire ni déterminer les infractions qui seront commises. Bien évidemment, il faut des normes afin de fixer et de quantifier la peine – prison, sursis, etc. –, et d’homogénéiser les condamnations sur l’ensemble du territoire.
N’étant d’accord ni avec la rédaction proposée par le Gouvernement pour le rapport annexé au texte ni avec la réécriture de la commission, je m’abstiendrai sur les deux amendements du Gouvernement.
Je tiens quand même à dire deux choses.
Premièrement, je suis extrêmement sceptique quant aux pronostics qui portent sur l’évolution du nombre de personnes écrouées. Je constate d’ailleurs que depuis les débuts, ou presque, de la Ve République, tous les ministres de la justice qui se sont livrés à ces pronostics, y compris de très bons ministres, se sont trompés, et même très largement ! Je pense, par exemple, à Albin Chalandon, qui fut également député de mon département, le Nord, et pour qui j’ai beaucoup d’estime. Pour autant, le moins que l’on puisse dire est que ses pronostics sur l’évolution du nombre de personnes écrouées ne se sont pas, et de très loin, réalisés.
J’espère, monsieur le ministre, que l’on se trompe aussi aujourd’hui, notamment l’administration pénitentiaire, lorsqu’on prévoit 80 000 personnes sous écrou à l’échéance de 2017.
Deuxièmement, nous assistons à une curieuse inversion des rôles au sujet de l’encellulement individuel. Si le principe de l’encellulement individuel, inscrit dans notre droit depuis 1875, est toujours proclamé aujourd’hui, si ne s’y est pas substitué le principe de l’encellulement collectif, c’est grâce au Sénat. C’est le Sénat qui, sur ce point, l’a emporté face au gouvernement de l’époque et qui, ensuite, est parvenu à convaincre nos collègues de l’Assemblée nationale en commission mixte paritaire. Néanmoins, le Sénat n’a jamais été un ayatollah de l’encellulement individuel.
Je suis souvent très étonné d’entendre dire que, pour respecter la loi pénitentiaire, il faut 95 %, 96 %, 97 %, voire 100 % de places d’encellulement individuel. L’un de vos prédécesseurs, Mme Rachida Dati, …
… nous rappelait que le programme Perben, réalisé à une époque où la loi, comme aujourd’hui, impose le principe de l’encellulement individuel, comprenait 32 % de cellules pour une occupation double. Il est tant d’exceptions au principe de l’encellulement individuel : les personnes suicidaires, les personnes qui, pour des raisons de santé souhaitent ne pas être seules, etc.
Le Sénat a été le premier à reconnaître qu’il n’était pas utile d’exiger un taux de 95 % ou de 99 % de cellules individuelles. Le Parlement est prêt à tolérer un volant de cellules pour occupations multiples, de l’ordre de 20 % ou de 25 %, voire de 30 %, si cela peut éviter de construire des places de prison coûteuses et inutiles. Il y va de l’intérêt de chacun.
Je soutiendrai les amendements du Gouvernement.
En effet, le rapport annexé au texte du Gouvernement exprime bien l’équilibre de la politique d’exécution des peines. Elle se résume en quelques mots : diversification des modes de détention pour les adapter aux différents condamnés, ainsi qu’à la durée de leur peine, et améliorer la qualité de la détention ; augmentation du nombre de places en prison pour remédier à la surpopulation carcérale, qui est une caractéristique française ; soutien, grâce à la mise en œuvre de moyens très importants, de toutes les mesures d’aménagement et d’exécution des peines décidées à l’occasion du vote de la loi du 24 novembre 2009.
Pour répondre à certaines interventions, j’ajoute que nous avons tout lieu de nous réjouir : pendant que d’autres battent la campagne, le Sénat continue de légiférer sérieusement ! Nous ne sommes d’ailleurs pas les premiers à nous comporter de la sorte avant une élection présidentielle. Je citerai, par exemple, la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé, la loi du 4 mars 2002 relative à l’autorité parentale, la loi du 5 mars 2007 réformant la protection de l’enfance, qui modifie la loi portant réforme du droit des incapables majeurs, et la loi du 5 mars 2007 relative à la prévention de la délinquance.
Il est bien dans la tradition républicaine de légiférer jusqu’à ce que les campagnes officielles démarrent. Je suis heureux que le Sénat, de ce point de vue, continue de donner l’exemple par son sérieux ! §
Il serait bon que la majorité gouvernementale évite de dénaturer la loi pénitentiaire en l’interprétant ou en l’appliquant mal.
Cette loi, je le rappelle, a été votée par tous les groupes du Sénat, excepté par le mien pour une raison très simple : nous l’avons estimée insuffisamment contraignante et nous avons jugé son contenu peu précis. Or il s’avère que des textes d’application n’ont pas été publiés, si bien que la loi n’est pas complètement mise en œuvre. Voilà pourquoi la commission des lois du Sénat a décidé, conjointement avec la commission de contrôle pour l’application des lois, de créer une mission de contrôle sur l’application de la loi pénitentiaire du 24 novembre 2009.
Néanmoins, je défends les principes qui ont prévalu lors de la rédaction de ce texte ; certains d’entre eux figurent d’ailleurs dans le projet de loi que nous examinons aujourd’hui. La loi pénitentiaire de 2009, ne l’oublions pas, nous était non pas dictée, car le Parlement est souverain, mais fortement demandée par les instances européennes.
Il n’est pas acceptable d’entendre aujourd’hui que le projet de loi de programmation est la pure application de la loi pénitentiaire de 2009.
Ce que nous contestons, et nous avons nous-mêmes pris certaines précautions, qui figurent d’ailleurs dans les propositions que j’ai formulées devant la commission, qui les a approuvées à la majorité, c’est la façon dont le programme du Gouvernement tord le bâton, si je puis dire. La distorsion qu’il opère est si importante qu’elle empêche de fait toute mise en application réelle des principes de la loi pénitentiaire.
Par ailleurs, la prévision que fait le Gouvernement – je ne fais là que répéter ce qu’un autre a dit – du nombre de personnes susceptibles d’être emprisonnées en 2017, sans même parler du quantum des peines, me paraît extrêmement contestable, pour des raisons que j’ai déjà expliquées et sur lesquelles je ne reviendrai donc pas.
L’histoire nous a déjà montré – je pense notamment au ministre Albin Chalandon – que l’on pouvait se tromper en faisant ce genre de pari sur l’avenir. Comment pouvez-vous affirmer qu’en 2017 les personnes susceptibles non pas d’être condamnées à une peine – on verra cela après –, mais d’être enfermées seront beaucoup plus nombreuses ? Cela revient à dire que les gouvernements futurs, quels qu’ils soient, n’auront pas d’autres solutions à proposer que l’emprisonnement. Cela veut dire que, en termes de politique pénale, on continuera d’augmenter les peines, qu’on n’aura pas développé les peines alternatives, qu’on n’aura trouvé aucune façon de gérer autrement les peines prononcées par les magistrats. Ce n’est pas acceptable !
Quand on voit la fluctuation, ne serait-ce qu’entre 2003 et 2011, du nombre de peines susceptibles de déboucher sur un enfermement, on se rend bien compte que l’évolution n’est pas linéaire. Par conséquent, dire que, d’ici à 2017, ce nombre ne fera qu’augmenter de façon continue ne m’apparaît pas comme une bonne manière d’envisager l’avenir.
Sur un autre aspect, le Gouvernement semble également se contredire. Exécution des peines ne veut pas dire enfermement.
Certes, mais le projet de loi de programmation donne précisément l’impression du contraire.
Ainsi, quid des alternatives, notamment pour ce qui concerne les courtes peines ? Vous nous dites vous-même, monsieur Hyest, que mettre les gens en prison pour de très courtes peines n’est pas très efficace. Cela veut donc dire que l’on doit s’obliger à développer l’alternative, ce que les juges d’application des peines ont toute possibilité de faire ; je crois qu’ils en sont assez d’accord, car incarcérer pour quelques semaines, cela n’a rien de reconstructif. Aucun programme ne peut être mis en place dans les établissements pour des périodes aussi brèves. En outre, cela obère gravement la situation sociale, familiale, notamment, des personnes qui vont se retrouver en prison puisque celles qui travaillent seront empêchées de le faire, et que les familles de ces personnes se désagrégeront encore plus.
Donc, nous devrions être d’accord sur le fait que les personnes condamnées à des peines de prison inférieures ou égales à trois mois ne doivent pas se retrouver enfermées. La semi-liberté, cela existe, c’est un aménagement de peine.
Certes, mais dans le calcul du nombre de places, on considère que les courtes peines, qui représentent la moitié de ce que vous appelez le « stock », sont des peines aménageables. Alors qu’à partir de ces éléments nous devrions être d’accord, nous ne le sommes pas. C’est quand même curieux !
Concernant les établissements, nous souhaitons tous, me semble-t-il, que ces derniers concourent aux différents moyens de favoriser la réhabilitation. Or, à cet égard, je souligne au passage qu’on est loin du compte, car la question de l’activité des détenus soulève beaucoup de problèmes : quel travail peuvent-ils faire ? Quelle doit être leur rémunération ? Le droit du travail leur est-il applicable, notamment en matière de chômage ?
Si l’on peut bien sûr être d’accord sur certains points, en l’espèce, s’agissant du texte que vous nous soumettez, il est question de l’extension du nombre de places, et non de l’aménagement du nombre de places existantes de manière à permettre le développement des activités à l’intérieur des établissements.
Enfin, j’évoquerai un aspect qui est lié aux établissements de conception nouvelle. Le coût extrêmement élevé de ces établissements, qui font l’objet de partenariats public-privé, la nécessité de construire de grandes unités, même si celles-ci se décomposent en plus petites unités, aboutissent inéluctablement à construire ces établissements en plein désert. Or nous ne sommes pas favorables à ce mouvement, car, outre que c’est une façon de cacher les prisons, c’est préjudiciable à la préservation des liens familiaux et sociaux des personnes détenues.
Je citerai l’exemple de l’établissement pénitentiaire pour mineurs de Porcheville, que j’ai visité récemment. Pour les jeunes qui sont enfermés dans cette prison, le maintien de liens est particulièrement important. Or l’EPM de Porcheville est quasi inaccessible par les transports en commun.
Bien sûr, les maires de villes-centres sont souvent opposés à l’implantation d’un établissement pénitentiaire sur leur territoire.
Moi, je suis favorable à l’implantation de ces établissements dans les villes-centres, comme beaucoup d’entre nous ici. Ce n’est peut-être pas facile, mais envoyer les détenus dans les déserts, comme cela se pratique aux États-Unis, où j’ai d'ailleurs visité plusieurs établissements de ce type, est franchement dommageable pour le maintien des liens familiaux.
Je salue mes collègues membres de la commission des lois, qui, sur ce texte très compliqué, ont travaillé avec beaucoup de passion.
Ayant écouté attentivement les interventions de Mme le rapporteur, de M. le président de la commission des lois et de M. le garde des sceaux, je me permettrai, en toute objectivité, de formuler plusieurs remarques.
M. le garde des sceaux a clairement indiqué qu’aucun établissement, même petit, n’avait été supprimé. Je retiens donc que le Gouvernement est lui aussi attaché au maintien du nombre de centres pénitentiaires.
Permettez-moi d’apporter mon modeste témoignage en tant que représentant du département des Ardennes. Voilà quelques mois, a eu lieu l’inauguration de l’extension de la maison d’arrêt de Charleville-Mézières. Je souhaite d'ailleurs, avec un certain nombre de collègues ici présents, et comme l’a fait le président de la commission des lois, rendre hommage à l’ensemble des personnels qui travaillent dans ces établissements. L’extension de l’établissement de Charleville-Mézières visait les personnes condamnées à des peines relativement courtes, de six mois, d’un an, voire de deux ans. En visitant les locaux, nous avons pris la mesure de l’investissement qui avait été consenti et qui, en totalité, était financé par l’État, c'est-à-dire par le ministère de la justice.
Donc, il ne faut pas voir que le négatif. Cet investissement, relativement important, a été réalisé dans le cadre du plan de relance.
Lors de la visite de cet établissement, pourtant de petite taille, nous avons également pu mesurer le travail qui est mené en direction des détenus. En effet, comme le président de la commission des lois l’a rappelé, nous sommes attachés à la réinsertion, notamment au travers du travail d’atelier, sujet sur lequel plusieurs de mes collègues sont intervenus.
J’en viens à l’amendement n° 30.
Il n’est pas si fréquent qu’un amendement soit aussi dense, mais, après en avoir lu les quatorze pages, on ne peut douter de son caractère pédagogique. Même si aucune proposition n’est parfaite, on ne peut que reconnaître la validité de l’état des lieux auquel il procède. Au-delà du constat, les propositions significatives, notamment en termes d’augmentation de capacité, qu’il contient sont de nature à répondre aux attentes et aux difficultés. Le Gouvernement s’efforce d’améliorer la situation de l’ensemble des professionnels en respectant la séparation des pouvoirs.
Voilà pourquoi je voterai cet amendement.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement est adopté.
L'amendement est adopté.
L'amendement est adopté.
L'amendement est adopté.
L'amendement n° 55 n'a plus d'objet.
Je mets aux voix l’ensemble de l'article 1er et le rapport annexé, modifié.
L'article 1eret le rapport annexé sont adoptés.
L'amendement n° 41 rectifié bis, présenté par MM. Mézard, Baylet, C. Bourquin, Collin, Collombat et Fortassin, Mme Laborde, MM. Plancade, Requier, Tropeano, Vall et Vendasi et Mme Escoffier, est ainsi libellé :
Après l’article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
À la troisième phrase de l’article 2 de la loi n° 2009-1436 du 24 novembre 2009 pénitentiaire, après le mot : « organisé », sont insérés les mots : «, dans les établissements pénitentiaires et les services d’insertion et de probation, ».
La parole est à M. Jacques Mézard.
Précédemment, Jean-Jacques Hyest rappelait l’importance des services pénitentiaires d’insertion et de probation. Pour notre part, nous considérons que le sort réservé aux SPIP n’est pas conforme à ce qu’il devrait être.
Le projet de loi prévoit en effet que ces services seront renforcés par une réorganisation de leur mode de fonctionnement plutôt que par un accroissement de leurs moyens humains et financiers. Même si un certain effort a déjà été réalisé, ce renforcement des moyens humains et financiers est indispensable, dans la mesure où les objectifs fixés par la loi pénitentiaire en termes de création de postes n’ont pas été pleinement satisfaits. Et nous savons, monsieur le ministre, combien est indispensable le travail de ces services !
On a rappelé de tous côtés la difficulté des détenus à assumer une sortie sèche. Il est donc indispensable de rappeler que, au 1er janvier 2011, les 2 716 conseillers de probation avaient à suivre près de 240 000 dossiers, soit une moyenne de 88 dossiers par conseiller. Comment s’étonner, dans ces conditions, que tout ne soit pas toujours parfait ?
Il est tout à fait anormal de mettre en cause ces services, qui ne peuvent malheureusement pas assumer la totalité de leurs missions dans les meilleures conditions, faute de moyens suffisants. Ce n’est pas l’application du programme de management Lean, qui est fondé, je le rappelle, sur des méthodes assimilables au taylorisme, qui apportera une solution positive et pérenne.
Nous estimons donc qu’il est primordial de donner aux SPIP les moyens de travailler convenablement. Commençons donc par souligner dans le texte même de la loi qu’ils participent au service public pénitentiaire.
Cet amendement tend à apporter une précision certes évidente, mais utile au vu, d’une part, des critiques portant sur le travail des SPIP, même s’il est vrai que des problèmes existent, et, d’autre part, de la tendance à la réorientation de leurs missions.
La commission a donc émis un avis favorable.
Je comprends l’objectif qui sous-tend cet amendement, mais la précision qu’il apporte semble redondante, puisqu’elle figure déjà dans la loi.
Madame le rapporteur, si vous le souhaitez, vous pouvez faire adopter un amendement tendant à insérer un article additionnel unique aux termes duquel toutes les dispositions de la loi pénitentiaire seront reprises dans le projet de loi. Car c’est exactement de cela qu’il s’agit ici : on ne fait que répéter une disposition existant déjà dans notre droit positif.
Je demande à M. Mézard de bien vouloir retirer son amendement. À défaut, le Gouvernement émettra un avis défavorable.
Monsieur le garde des sceaux, j’ai déjà appelé votre attention sur les besoins de financement des services d’insertion de l’Orne et sur la nécessité de les reloger dans des locaux plus conformes à l’exercice de leur mission de réinsertion et de suivi. Aujourd'hui, le personnel n’a pas les moyens de travailler dans des conditions convenables. De nombreux départements connaissent d’ailleurs une situation comparable.
Réaffirmer que les services d’insertion et de probation relèvent des missions du service public pénitentiaire n’est pas complètement inutile. Mieux vaut se répéter que se contredire ! Quoi qu’il en soit, nous avons l’impression que ces services sont sous-estimés et leurs personnels insuffisamment valorisés.
Voilà ce que je tenais à dire à l’occasion de l’examen de l’excellent l'amendement n° 41 rectifié bis.
L'amendement est adopté.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 1er.
(Supprimé)
L'amendement n° 31, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
L’article 2 de la loi n° 87-432 du 22 juin 1987 relative au service public pénitentiaire est ainsi modifié :
1° Le premier alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Cette mission peut en outre porter sur l’exploitation ou la maintenance d’établissements pénitentiaires, à l’exclusion des fonctions de direction, de greffe et de surveillance. » ;
2° Après la première phrase du deuxième alinéa, il est inséré une phrase ainsi rédigée :
« Ce marché peut notamment être passé selon la procédure du dialogue compétitif prévue aux articles 36 et 67 du code des marchés publics, dans les conditions prévues par ces articles. »
La parole est à M. le garde des sceaux.
Il s’agit de rétablir le texte de l’article 2 dans la rédaction adoptée par l'Assemblée nationale.
L’article 2, que la commission a supprimé, comportait deux dispositions : d’une part, il tendait à étendre le champ des marchés de conception-réalisation à l’exploitation et à la maintenance des établissements pénitentiaires construits dans ce cadre ; d’autre part, il ouvrait la possibilité de recourir à la procédure du dialogue compétitif pour passer ces marchés de conception-réalisation.
En élargissant le champ de ces marchés aux prestations d’exploitation et de maintenance, le nouveau dispositif figurant dans le projet de loi aurait permis à l’État de bénéficier de certains avantages des contrats de PPP – je pense au transfert des charges d’exploitation et d’entretien au cocontractant –, sans pour autant qu’il ait à respecter les règles de passation d’un contrat de PPP exigées par le Conseil constitutionnel.
Cette modification reposait cependant sur le postulat d’un surcoût de la gestion publique, qui ne semble guère démontré. Je l’ai déjà souligné, pour la Cour des comptes, « outre le fait que le “tout public” est potentiellement aussi efficace, rien n’établit que le privé soit “moins cher” et cela notamment en raison de l’apparente incapacité de l’administration pénitentiaire à mesurer précisément et à comparer ses coûts. De fait, l’affirmation d’un surcoût de la gestion publique ne résiste pas à l’examen. En effet, à périmètre comparable la gestion publique semble moins onéreuse […] ».
Je le rappelle, de nombreux acteurs du secteur estiment que nous allons vers une privatisation quasiment généralisée de l’activité intrapénitentiaire, une orientation qui leur semble dangereuse eu égard à la mission régalienne de justice de l’État.
Par ailleurs, il faut prendre en compte le fait que le choix du Gouvernement coûterait très cher à la collectivité, et ce pendant des dizaines d’années.
Pour toutes ces raisons, nous avons choisi d’être prudents.
Le Gouvernement souhaite faire preuve de pragmatisme sur la question de la construction d’établissements pénitentiaires. Il n’érige pas, contrairement à vous, madame le rapporteur, le PPP en dogme absolu.
Monsieur le président de la commission, je connais votre éclectisme. Mais je m’adressais à Mme le rapporteur, qui, elle, ne fait que parler du PPP !
Le Gouvernement a d’ailleurs exclu expressément le recours au PPP pour un certain nombre d’établissements. C’est la raison pour laquelle il vous a été proposé de modifier le code des marchés publics pour faciliter la construction d’établissements pour courtes peines.
Je connais les critiques qui peuvent être adressées au PPP, tout comme je sais parfaitement qu’il faut veiller à respecter un équilibre entre les constructions financées immédiatement et celles dont le financement pèsera longtemps sur le budget du ministère de la justice.
Lorsqu’on fait le choix de construire des bâtiments en régie, il faut les entretenir ! Ne pas prendre en compte le coût de l’entretien revient à fausser le débat.
Je veux dire enfin à Mme le rapporteur que le Gouvernement n’a jamais songé à confier les missions régaliennes de l’État à quelque autre structure que, en l’espèce, à l’administration pénitentiaire. Le service de l’hôtellerie peut être confié à des sociétés privées, car cela ne remet en cause ni le système de fonctionnement ni le rôle de l’établissement pénitentiaire.
Monsieur le garde des sceaux, sur les 25 ou 26 sites programmés dans le nouveau programme immobilier, le NPI, 22 d’entre eux ont été budgétés en PPP, le premier contrat devant être signé dès cette année. Alors ne venez pas me dire que ce n’est pas l’orientation choisie par le Gouvernement !
Vous incluez dans ce chiffre le programme en cours. Je parle, quant à moi, du NPI ! Je ne dénature pas, me semble-t-il, votre propos.
Je m’appuie sur l’expérience et la sagacité de Philippe Séguin, qui, dans son dernier rapport pour la Cour des comptes, qualifiait les PPP de « crédit revolving »de l’État et des collectivités locales.
Mes chers collègues, à en croire les propos tenus par les membres du Gouvernement à notre tribune, les PPP devaient rester exceptionnels. Cette procédure peut effectivement s’avérer utile lorsque les réalisations sont complexes ou les délais très courts. Depuis lors, M. Novelli ou Mme Lagarde se sont employés à généraliser cette procédure, qui est aujourd'hui fréquemment utilisée par l’État et par des collectivités locales de toutes sensibilités.
Comme nous sommes indépendants, nous avons le droit et le devoir de dire ce que nous pensons : je tiens donc à souligner à quel point cette orientation est néfaste, et ce pour deux raisons.
Premièrement, elle nous conduit à perdre la notion de maîtrise d’œuvre publique et les compétences en matière de construction d’établissements publics qui existaient notamment au ministère de la justice, pour les centres pénitentiaires, au ministère de l’éducation nationale, pour les rectorats, au ministère des finances ou bien encore au ministère de l’intérieur.
Deuxièmement, je signale que, en vertu de la loi, avant de faire le choix d’un PPP pour construire une prison, un bâtiment universitaire, un palais de justice ou une salle des fêtes, une étude doit être menée pour justifier le bien-fondé de ce choix au regard d’un marché classique. Je tiens à affirmer avec force que toutes les études faites à ce sujet, qui permettent simplement à certains cabinets de prospérer, n’ont aucun sens. Mes chers collègues, je vais m’attacher à vous le démontrer.
Comment comparer en effet ce que donnerait la réalisation d’un équipement avec un marché classique si on ne sait pas qui est candidat, aucun appel d’offres n’ayant été passé ? On doit donc confronter des offres virtuelles à un PPP potentiel, pour lequel on ne sait pas non plus qui sera candidat, et à quelles conditions. De surcroît, dans le dispositif dit compétitif, on peut changer au fur et à mesure de l’exécution du marché les conditions de l’appel d’offres.
Pour résumer, il faut comparer deux dispositifs sur lesquels on ne sait absolument rien, en s’appuyant sur des études pléthoriques. En faisant preuve d’un minimum de vigilance intellectuelle, on voit bien que ces documents n’ont aucune valeur.
Enfin, chacun sait bien que les collectivités publiques et l’État peuvent, même dans la situation actuelle, obtenir des crédits à un coût inférieur que les entreprises. Si l’on fait un calcul économique sur vingt, trente ou quarante ans, il est tout à fait évident que le PPP coûtera, au final, beaucoup plus cher qu’un marché classique ou qu’un financement par l’emprunt.
Je tenais à dire ici, pour que mon propos figure au compte rendu de nos débats, que le PPP est une solution de facilité, qui nous conduit à prendre une responsabilité historique par rapport aux générations futures. Telle est ma profonde conviction !
J’interviens également au nom de mon collègue Jean-Yves Leconte, qui ne peut être présent aujourd’hui.
Présenter ce projet de loi de programmation à 81 jours du premier tour de l’élection présidentielle est un non–sens politique.
Monsieur Reichardt, excusez-moi de me répéter, mais il vous arrive aussi de le faire, et parfois jusqu’à cinq heures du matin !
Il est totalement irresponsable de proposer la multiplication des constructions en PPP, alors que, selon le récent rapport de la Cour des comptes sur les partenariats public-privé pénitentiaires, l’engagement de l’État dépasse déjà 1 % du PIB. En outre, ce rapport souligne que le « postulat de surcoût de la gestion publique […] ne résiste pas à l’examen », ce que vient brillamment de démontrer le président de la commission des lois et ce que corroborent également les expériences britanniques menées en la matière depuis le début des années quatre-vingt.
La situation devient vraiment totalement irréaliste lorsque l’on constate que le Gouvernement multiplie les partenariats public-privé sur des objets où, in fine, c’est l’État qui, seul, paiera. Mes chers collègues de la minorité sénatoriale, pardonnez-moi, mais de tels dispositifs extrabudgétaires lui permettent de cacher des dépenses sous le tapis, un peu comme on y dissimule la poussière !
Il nous est donc aujourd'hui proposé de continuer à fonctionner de cette façon, alors pourtant que le Président de la République – dont il ne faut surtout pas dire qu’il sera peut-être candidat à sa réélection – défend quotidiennement une supposée règle d’or, laquelle ne s’appliquera en fait qu’à une partie de plus en plus faible des dépenses d’investissements de l’État. La supercherie n’est pas loin ! En tout cas, une menace énorme de plus pèse sur la crédibilité de l’État à tenir ses engagements financiers.
Une telle loi de programmation aurait mérité d’être débattue non pas quelques semaines avant la fin d’une législature, mais au début d’un mandat : il y va de la tradition républicaine et du respect des électeurs !
Par ailleurs, elle est de nature à inspirer une inquiétude majeure sur le plan financier, portant sur l’asphyxie du budget du ministère de la justice. En effet, selon la Cour des comptes, les dépenses pour les établissements en PPP étaient déjà de 81 millions d’euros en 2011, avant même cette dernière programmation. Elles s’établiront à 117 millions d’euros en 2011, à 578 millions d’euros en 2017 et seront ensuite supérieures à 700 millions d’euros annuels pendant une quinzaine d’années.
Le budget global de l’administration pénitentiaire devra donc, à moyens et fonctionnement constants, augmenter de plus de 15 % à l’échéance de 2017 et de plus de 20 % quelques années plus tard. En outre, cette estimation ne prend pas en compte les besoins en personnels de réinsertion – il faudra sans doute en recruter autour de 1 000 – et en personnels de surveillance – 6 000 environ –, qui auront forcément une incidence sur les prévisions de croissance du budget du ministère de la justice. Or, nul ne peut le nier, ces recrutements sont indispensables puisque, sans personnels complémentaires, c’est à la fois le suivi des détenus et la capacité de réinsertion qui seraient remis en cause.
Cette programmation engendrerait donc, à rapide échéance, une augmentation exponentielle des dépenses, laquelle n’est pas réaliste dans les circonstances actuelles et aurait, monsieur le garde des sceaux, de lourdes conséquences sur les budgets des autres missions de votre département ministériel. Une telle situation est de fait particulièrement inquiétante pour l’efficacité de la justice ainsi que pour sa capacité à conduire une exécution des peines efficace et rapide.
Elle est inquiétante, ne serait-ce que pour des questions de gestion financière : le coût d’une journée de détention est estimé à 71, 10 euros, quand celui d’une semi-liberté est de 47, 81 euros et celui du placement extérieur de 40 euros, le bracelet électronique ne coûtant, pour sa part, que 5, 40 euros par jour. Ces chiffres devraient faire réfléchir, indépendamment même de l’efficacité de la sanction et de la réinsertion.
Enfin, si la majorité des condamnations à de courtes peines étaient exécutées en milieu ouvert, le parc carcéral actuel suffirait amplement.
Pourquoi avoir fait le choix d’établissements à si grande capacité alors que la plupart des professionnels considèrent qu’un établissement pénitentiaire ne devrait pas accueillir plus de 500 personnes ? Or, dans votre projet, les capacités d’accueil sont portées à 650 places en moyenne !
Dans ces nouveaux établissements surdimensionnés, la vidéosurveillance remplace les rapports humains. Or, en matière de gestion et d’efficacité de la sanction, comme s’agissant de la protection, on ne peut trop demander aux caméras !
Comme l’indiquait fort justement le Contrôleur général des lieux de privation de liberté, nous sommes arrivés à l’ère de « l’industrialisation de la captivité », avec des conséquences lourdes sur la capacité des détenus à se réinsérer, laquelle devrait pourtant être notre préoccupation essentielle.
Monsieur le garde des sceaux, votre proposition de créer 30 000 places de prison supplémentaires, alors que le mandat présidentiel touche à sa fin et que le nombre de détenus a augmenté de 25 % en dix ans, souligne l’échec d’une politique qui relève de la fuite en avant répressive.
L’orientation est douteuse tant sur le plan de l’efficacité que sur celui de notre conception de la justice.
L’orientation est coûteuse pour nos finances.
Dans ces conditions, nous ne pouvons bien évidemment soutenir l’amendement n° 31.
En revanche, nous saluons une fois de plus le travail de Mme la rapporteur.
J’avoue que je suis un peu perdu : l’amendement n° 31, très technique, prévoit un élargissement de la possibilité d’utilisation de la procédure de conception-réalisation.
Pour ma part, je ne suis pas un fanatique du partenariat public-privé ; je crois d'ailleurs que le garde des sceaux ne l’est pas non plus. Je pense effectivement qu’il faut examiner à chaque fois les avantages et les inconvénients de l’opération.
Toutefois, il s’agit ici d’une procédure totalement différente : la conception-réalisation est une procédure économique, permettant de choisir en même temps les entreprises qui construiront les établissements et le maître d’œuvre – donc l’architecte –, d’éviter des marchés infructueux et d’obtenir généralement des prix tout à fait compétitifs.
L’élargissement de cette possibilité vise simplement à permettre que le partenaire privé puisse également assurer la gestion de l’exploitation ; cette opportunité me paraît constituer une éminente facilité.
En outre, je ne comprends pas que l’on puisse à la fois avoir des préventions sur la généralisation du partenariat public-privé et refuser une possibilité qui permette justement, dans un certain nombre de cas, d’échapper au PPP, de conserver un financement public et une maîtrise d’ouvrage assurée par l’État.
Permettez-moi d’apporter une petite précision : le rapport de la Cour des comptes traitait bien de la conception-réalisation. C’est sur cette base que nous avons supprimé l’article 2.
J’ajoute que c’est M. le garde des sceaux lui-même qui a parlé des PPP !
L'amendement n'est pas adopté.
(Supprimé)
L'amendement n° 32, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
I. – La procédure prévue à l’article L. 15-9 du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique peut être appliquée en vue de la prise de possession immédiate par l’État des terrains bâtis ou non bâtis dont l’acquisition est nécessaire aux opérations de construction ou d’extension d’établissements pénitentiaires.
Les décrets sur avis conforme du Conseil d'État prévus au premier alinéa du même article L. 15-9 de ce code devront être pris au plus tard le 31 décembre 2016.
II. - Les articles L. 314-1, L. 314-2 et L. 314-6 du code de l’urbanisme s’appliquent, le cas échéant, aux opérations de construction ou d’extension d’établissements pénitentiaires réalisés selon la procédure prévue à l’article L. 15-9 du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique.
La parole est à M. le garde des sceaux.
Cet amendement procède du même esprit que le précédent.
Il s’agit de maintenir des possibilités d’exproprier rapidement pour pouvoir construire, notamment dans les grandes agglomérations, les établissements pénitentiaires qui nous manquent.
La procédure d’extrême urgence est très dérogatoire du droit commun.
Selon l’étude d’impact, « vingt-trois projets sont en cours d’étude ou de réalisation. […] Ces établissements devront être localisés dans des zones très urbanisées. ». Dont acte ! Mais l’administration pénitentiaire ne dispose guère de réserve foncière préalable pour l’implantation de ces nouvelles structures. Tel était d'ailleurs également le cas lors de la réalisation du programme « 13 200 » places ; l’État n’avait néanmoins à l’époque jamais fait usage de la procédure d’extrême urgence.
L’intérêt de ce dispositif nous laisse donc perplexe, d’autant que nous sommes convaincus de la nécessité de dialoguer avec les collectivités locales pour arriver à un accord sur les localisations des établissements pénitentiaires, accord que nous appelons de nos vœux.
Or, monsieur le garde des sceaux, votre procédure ne saurait permettre un tel dialogue. La commission a donc émis un avis défavorable.
L'amendement n'est pas adopté.
En conséquence, l’article 3 demeure supprimé.
Chapitre II
Dispositions visant à améliorer l’exécution des peines
L’article 132-24 du code pénal est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les peines d’emprisonnement d’une durée égale ou inférieure à trois mois lorsqu’elles sont prononcées sans sursis font, dans tous les cas, l’objet d’une des mesures d’aménagement de peine mentionnées à l’alinéa précédent. »
L'amendement n° 15, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. le garde des sceaux.
Par cet article 4 A nouveau, la commission des lois propose que toutes les peines d'emprisonnement d'une durée égale ou inférieure à trois mois soient obligatoirement aménagées, et donc qu’elles ne soient pas exécutées en établissement pénitentiaire.
Le Gouvernement ne peut être favorable à des dispositions aussi systématiques, contraires à l’exigence d’individualisation de la peine. Si la juridiction estime que la gravité des faits et la personnalité du condamné justifient une courte peine d’emprisonnement non aménagée, elle doit pouvoir prononcer cette sanction.
Dans certains cas, ces dispositions pourraient être totalement inapplicables en raison d’un aménagement impossible. Au demeurant, elles risqueraient d’inciter les juridictions correctionnelles à prononcer des peines d’emprisonnement de plus de trois mois.
Il convient donc d’en rester aux dispositions issues de la loi pénitentiaire : tout y est fait pour inciter les juridictions à aménager les peines inférieures ou égales à deux ans ou à un an pour les récidivistes, sans toutefois qu’il y ait d’obligation systématique.
Conformément à ce que j’ai déclaré précédemment, nous considérons, contrairement à M. le garde des sceaux, que l’article 4 A s’inscrit dans le prolongement de la loi pénitentiaire de 2009. En effet, l’article 132-24 du code pénal issu de cette loi pose deux principes fondamentaux.
Premièrement, « en matière correctionnelle, en dehors des condamnations en récidive légale […], une peine d’emprisonnement sans sursis ne peut être prononcée qu’en dernier recours si la gravité de l’infraction et la personnalité de son auteur rendent cette peine nécessaire et si toute autre sanction est manifestement inadéquate ».
Deuxièmement, lorsqu’une telle peine est prononcée, elle doit, « si la personnalité et la situation du condamné le permettent, et sauf impossibilité matérielle », faire l’objet d’une mesure d’aménagement de peine.
La disposition proposée marque une avancée supplémentaire puisque, dans tous les cas, une peine d’emprisonnement sans sursis d’une durée égale ou inférieure à trois mois devrait faire l’objet d’un aménagement.
En effet, la grande majorité des acteurs de la chaîne pénale considèrent qu’une incarcération pour une aussi courte période – trois mois – provoque une rupture des liens sociaux existants sans que, par ailleurs, une action efficace en faveur de la réinsertion puisse en l’occurrence être matériellement conduite pendant le temps de la détention.
La commission a donc émis un avis défavorable.
Je suis très défavorable à cet article, pour deux motifs.
Tout d’abord, il faut faire confiance au juge. À cet égard, tout mécanisme automatique qui n’appelle pas d’appréciation portée sur la personnalité du condamné ni sur le parcours éducatif et d’insertion qu’il doit accomplir me paraît être non pas une avancée – comme l’affirme Mme le rapporteur – mais une régression de notre système judiciaire.
Ensuite, il faut conserver, dans tous les cas, non pas l’obligation de l’enfermement, mais sa possibilité, dans l’intérêt même des mesures alternatives qui devront autant que faire se peut être décidées pour le condamné, comme le prévoit la loi du 24 novembre 2009. En effet, ces mesures alternatives comportent elles-mêmes un certain nombre de contraintes pour le condamné, qu’il acceptera d’autant plus facilement que le risque de la prison subsiste. D'ailleurs, dans un certain nombre de cas, l’incarcération effective restera, du point de vue du juge, nécessaire.
Il me paraît donc imprudent d’adopter un texte qui prévoit des mesures aussi mécaniques.
Je ne peux qu’abonder dans le sens de mon collègue Philippe Bas : je suis totalement favorable à cet amendement, car l’aménagement systématique des peines d’emprisonnement ferme inférieures ou égales à trois mois est une véritable hérésie.
Certes, on l’a entendu tout l’après-midi, la majorité sénatoriale, considérant que la réalisation d’un parc pénitentiaire de 80 000 places traduit une priorité donnée à l’incarcération par rapport aux aménagements de peine, veut inverser la priorité au profit de ces derniers. Pourtant, mes chers collègues, ce n’est pas ce que vous faites : vous ne donnez pas la priorité aux aménagements de peine sur l’incarcération, vous instaurez une véritable automaticité. Faut-il vous le rappeler, automaticité et priorité ne sont pas synonymes.
Il est bon, nous en sommes tous convaincus, qu’une peine alternative à la détention, comme la semi-liberté ou le bracelet électronique, puisse être appliquée, mais nous, parlementaires, ne pouvons pas décider en amont qu’un délinquant, peu importe sa personnalité, doive obtenir un aménagement de peine dans tous les cas. Comment pouvons-nous dire que tous les délinquants méritent le même aménagement de peine et ne doivent pas aller en détention ? Chaque personnalité est particulière, vous le savez bien. Si un juge décide d’envoyer un délinquant en détention, il le fait en son âme et conscience : son rôle est de juger au cas par cas. Pour autant que je sache, dans cet hémicycle, nous ne sommes pas juges, alors n’empiétons pas sur leur pouvoir de décision et d’appréciation !
Il se peut que de courtes périodes d’incarcération n’aient aucun effet positif en matière de réinsertion, mais c’est au juge, et à lui seul, de l’apprécier, en fonction de son ressenti, des avis des experts et de l’enquête de personnalité dont il dispose. Poser le principe d’un aménagement systématique des peines d’emprisonnement de moins de trois mois, comme l’a dit M. le garde des sceaux, n’aboutira qu’à obliger la juridiction, face à un délinquant qu’elle souhaiterait envoyer en détention au regard de sa personnalité, à le condamner à une peine d’emprisonnement supérieure à trois mois.
Chers amis qui siégez sur les travées de la gauche, je suis sûr que ce n’est pas ce que vous souhaitez. Ne nous aventurons pas sur ce terrain !
Je le répète, je suis totalement favorable aux aménagements de peine, mais pas à leur systématisation, comme une très grande majorité de Français, j’en suis convaincu !
M. Philippe Bas applaudit.
Je ne suis pas un partisan farouche des peines planchers, parce que j’estime qu’elles portent atteinte, en partie, au principe de la personnalisation des peines, à la capacité du juge d’adapter chacune de ses décisions en fonction du tempérament ou de la personnalité du délinquant.
Pour la même raison, je ne peux pas être favorable à des mesures systématiques d’aménagement de peine, sous prétexte que la peine prononcée serait inférieure à trois mois d’emprisonnement. Je suis d’accord avec Mme le rapporteur pour reconnaître que, la plupart du temps, les peines d’emprisonnement très courtes n’ont guère d’effets positifs, mais il existe certaines catégories ou modalités de délinquance pour lesquelles, selon la plupart des spécialistes, le choc carcéral peut s’avérer salutaire et être la meilleure manière d’éviter la récidive.
Je voterai donc l’amendement du Gouvernement, car le caractère systématique des aménagements de peine constitue une forme d’offense à la liberté de décision des magistrats !
M. Philippe Bas applaudit.
Les arguments que je souhaitais développer ont été très largement défendus par nos trois collègues qui viennent de s’exprimer. J’ajouterai donc brièvement un commentaire, car je vois une double contradiction dans la position de la majorité sénatoriale.
Premièrement, comment des gens qui se sont parfois opposés avec tant de force et de conviction au principe d’automaticité des peines planchers peuvent-ils plaider aujourd’hui pour un dispositif lui aussi automatique ?
Deuxièmement, nous allons assister à une inflation répressive, parce qu’il est évident que les juges auront tendance, dans un certain nombre de cas, à être plus sévères pour être certains que l’incarcération soit effective.
M. Philippe Bas applaudit.
Malgré une légère divergence de vues avec M. le garde des sceaux sur les services pénitentiaires d’insertion et de probation, je soutiens totalement cet amendement du Gouvernement, pour toutes les raisons qui ont été rappelées, notamment le choc salutaire de la prison, évoqué par notre collègue Jean-René Lecerf.
Nous savons tous que les peines courtes peuvent ne pas être utiles, …
… mais nous devons aussi tenir compte de ce que ressentent les victimes. Si les délinquants qui encourent des peines d’emprisonnement inférieures à trois mois savent qu’ils vont « dans tous les cas », selon les termes du texte adopté par la commission, échapper à la prison, je crains que nous n’ayons à déplorer des débordements, tout en suscitant une incompréhension encore plus grande de la part des victimes. L’adoption de l’amendement du Gouvernement me paraît donc, de ce point de vue, tout à fait nécessaire.
Jusqu’à maintenant, personne n’a pu m’expliquer comment envisager une politique de réinsertion en établissement pénitentiaire pour les condamnés à des peines d’emprisonnement de moins de trois mois, mais peut-être certains de nos collègues sont-ils en mesure de le faire ?
Les victimes, dont la situation nous interpelle tous, sont tout aussi chagrines de voir les condamnés ne pas exécuter leur peine que de les voir revenir inchangés d’un bref passage en prison, voire plus ancrés dans la délinquance, comme nous pouvons de plus en plus le constater. En effet, sans programme efficace de réinsertion, domaine dans lequel beaucoup reste à faire – mais rien de sérieux n’est envisageable dans le cadre de l’exécution d’une peine de deux mois d’emprisonnement –, la prison tend plutôt à offrir de nouvelles occasions de retomber dans la délinquance.
Les effets de l’emprisonnement sont assez néfastes pour l’avenir, dans la mesure où l’incarcération totale coupe tout contact avec la société, la famille, le travail ; en effet, même si beaucoup de délinquants sont au chômage, un certain nombre d’entre eux ont malgré tout un travail au moment de leur condamnation. On laisse donc peu de chances à celui qui a purgé une peine de trois mois de retrouver une vie permettant de sortir de la délinquance.
J’ajoute que les mesures alternatives à l’emprisonnement sont une modalité d’application de la peine et certains semblent oublier qu’elles peuvent être diverses. Pardonnez-moi d’insister sur ce point, mais vous avez l’air de considérer que les mesures alternatives équivalent à un sursis
Le régime de semi-liberté, par exemple, reste contraignant : le condamné peut exercer une activité – il n’est pas inintéressant de pouvoir travailler –, mais il passe la nuit en détention.
Le placement sous surveillance électronique n’est pas non plus une partie de plaisir. Être sous surveillance vingt-quatre heures sur vingt-quatre représente une contrainte assez forte !
Si j’en crois le projet de loi initial, le Gouvernement estime que les personnes condamnées à de courtes peines doivent être enfermées, puisqu’il veut créer des établissements pour courtes peines. Nous, nous demandons plus d’établissements réservés à la semi-liberté : notre choix est donc bien différent.
Si l’on veut aller dans le sens de ce que préconise la loi pénitentiaire, c’est-à-dire l’aménagement des peines inférieures à deux ans d’emprisonnement – donc, a fortiori, les peines inférieures à trois mois –, il faut s’en donner les moyens ; tous les acteurs, y compris les juges – en tout cas, leurs organisations représentatives – y sont favorables.
Je maintiens donc ma position, et j’espère que la majorité me suivra. J’ajoute que, puisque le projet de loi reviendra devant l’Assemblée nationale, le débat aura lieu. Il est d’ailleurs bon qu’il se poursuive, car cette proposition n’est pas sortie de notre cerveau fébrile : elle est proposée par de très nombreux acteurs, compte tenu de ce qu’est la réalité. Ne raisonnons pas sur une fiction : raisonnons sur la réalité des courtes peines, sur la réalité des prisons, sur la réalité de la délinquance, sur la réalité sociale des personnes emprisonnées.
Je ne veux pas abuser du temps de la Haute Assemblée, mais nous touchons à un point important.
Madame le rapporteur, je ne caricature pas vos propos, alors ne caricaturez pas la position du Gouvernement : il n’est pas question d’emprisonner tous ceux qui sont condamnés à une peine inférieure à trois mois d’emprisonnement, mais nous estimons qu’il peut s’avérer nécessaire d’en emprisonner certains, c’est tout ! Nous contestons donc le caractère systématique de l’aménagement de peine.
En vous écoutant, on a l’impression que les personnes emprisonnées sont simplement gardées. Cette vision des choses ne correspond pas du tout à la réalité ! Les personnes condamnées à une courte peine, notamment, se voient proposer des stages de formation à la citoyenneté, d’initiation à la rédaction d’un curriculum vitae ou des bilans de santé, dont elles ont le plus grand besoin. Pendant le temps passé en prison, elles ne sont pas simplement gardées, on les aide à se reconstruire. Je rends donc hommage à l’administration pénitentiaire qui accomplit ce travail.
Le temps des gardiens, c’est le XIXe siècle ; nous sommes à une autre époque ! Allez à Agen visiter l’École nationale d’administration pénitentiaire, vous verrez que les agents de cette administration ne sont pas formés à la seule activité de gardien. Les agents de l’administration pénitentiaire aiment leur travail, qui est très difficile, et ils savent bien que le but de leur action est de reconstruire des citoyens.
Monsieur le ministre, si vous ne voulez pas que vos propos soient dénaturés, je ne souhaite pas non plus que l’on dénature les miens.
J’écoute et j’entends – il ne s’agit pas de la même chose ! – ce que disent les surveillants, auxquels je rends hommage. J’en connais personnellement un certain nombre : ils affirment, en ce qui concerne l’exécution des courtes peines, que leur action se résume essentiellement au rôle de porteurs de clés.
Ils sont donc eux-mêmes favorables à un dispositif qui consisterait à soumettre automatiquement à un aménagement les peines inférieures à trois mois d’emprisonnement. Le débat se poursuivra très certainement, mais il est intéressant que nous le poursuivions en toute connaissance de cause.
L’amendement n’est pas adopté.
La parole est à M. André Reichardt, pour explication de vote sur l’article.
Je ne peux naturellement pas voter l’article 4 A dans ces conditions.
Je m’étonne de l’obstination de Mme le rapporteur à ne pas vouloir comprendre nos explications : nous ne sommes pas hostiles aux aménagements de peine ; nous sommes contre leur systématisation. Un aménagement de peine doit être accordé à un délinquant dans la mesure où sa personnalité le permet. Dès lors que le juge estime qu’une incarcération est justifiée, comment pouvons-nous, ici, décider l’inverse ?
Par ailleurs, mes chers collègues, je vous laisse imaginer l’impact médiatique qu’aurait l’adoption d’un tel article. Dès demain, le Sénat serait pointé du doigt par la presse, pour avoir exonéré – elle ne le dirait pas autrement – de peines fermes de prison, donc d’incarcération, toutes les personnes condamnées à des peines égales ou inférieures à trois mois. Songez donc aux répercussions !
L’article 4 A est adopté.
I. – Après l’article 712 du code de procédure pénale, il est inséré un chapitre Ier bis ainsi rédigé :
« Chapitre I er bis
« Du mécanisme de prévention de la surpopulation pénitentiaire
« Section 1
« Du mécanisme de prévention de la surpopulation pénitentiaire et des conditions de sa mise en place
« Art. 712 -1 A. – Aucune détention ne peut ni être effectuée ni mise à exécution dans un établissement pénitentiaire, au-delà du nombre de places disponibles.
« Pour permettre l’incarcération immédiate des nouveaux condamnés, des places sont réservées dans chaque établissement, afin de mettre en œuvre le mécanisme de prévention de la surpopulation pénitentiaire prévu à l’alinéa précédent. Un décret définit la proportion de places nécessaire à la mise en œuvre de ce mécanisme.
« Section 2
« De la mise en œuvre du mécanisme de prévention de la surpopulation pénitentiaire par l’administration pénitentiaire et par le juge de l’application des peines
« Art. 712 -1 B. – Lorsque l’admission d’un détenu oblige à utiliser l’une de ces places réservées, la direction doit :
« – soit mettre en œuvre une procédure d’aménagement de peine pour une des personnes détenues condamnées à une ou des peines d’emprisonnement dont le cumul est égal à deux ans ou condamnées à une ou des peines dont le cumul est inférieur ou égal à cinq ans et dont le reliquat de peine est égal ou inférieur à deux ans selon la procédure simplifiée d’aménagement des peines prévue pour les condamnés incarcérés aux articles 723-19 à 723-27 du code de procédure pénale. Cet aménagement de peine peut prendre la forme d’un placement extérieur, d’une semi-liberté, d’une suspension de peine, d’un fractionnement de peine, d’un placement sous surveillance électronique, ou d’une libération conditionnelle ;
« – soit mettre en œuvre le placement sous surveillance électronique prévu comme modalité d’exécution de fin de peine d’emprisonnement à l’article 723-28 pour toute personne condamnée à laquelle il reste quatre mois d’emprisonnement à subir ou, pour les peines inférieures ou égales à six mois à laquelle il reste les deux tiers de la peine à subir.
« Le service d’insertion et de probation prépare sans délai cette mesure.
« Art. 712 -1 C. – La décision d’aménagement de peine ou de mise en œuvre du placement sous surveillance électronique prévu par l’article 723-28 du code de procédure pénale doit intervenir dans un délai de deux mois à compter de la date d’écrou du détenu entré en surnombre. Elle doit être mise en œuvre sans délai.
« Art. 712 -1 D. – À défaut de décision dans le délai de deux mois, le détenu le plus proche de la fin de peine dans l’établissement, choisi parmi ceux condamnés à une ou des peines d’emprisonnement dont le cumul est égal ou inférieur à deux ans ou ceux condamnés à une ou des peines dont le cumul est inférieur ou égal à cinq ans et dont le reliquat de peine est égal ou inférieur à deux ans bénéficie d’un crédit de réduction de peine égal à la durée de l’incarcération qu’il lui reste à subir.
« Art. 712 -1 E. – En cas d’égalité de situation entre deux ou plusieurs personnes condamnées, le crédit de réduction de peine prévu à l’article 712-1 D est octroyé en prenant en compte les critères et l’ordre des critères suivants à :
« – la personne détenue qui n’a pas fait l’objet de procédure disciplinaire, ou qui en compte le moins à son encontre ;
« – la personne détenue qui a été condamnée à la peine la plus courte.
« Art. 712 -1 F. – La décision d’octroi du crédit de peine doit intervenir dans les huit jours à l’expiration du délai de deux mois prévu à l’article 712-1 D.
II. – Les dispositions du I entrent en vigueur dix-huit mois après la promulgation de la présente loi.
L’amendement n° 16, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. le garde des sceaux.
Cet amendement est particulièrement important car il vise à supprimer l’article 4 B, introduit par la commission des lois du Sénat, qui prévoit un mécanisme au demeurant relativement simple : pour pouvoir incarcérer une personne, il faut en faire sortir une autre de prison.
C’est ce que je comprends de la rédaction de ce nouvel article. J’en rappelle les termes : la direction de l’établissement doit « soit mettre en œuvre une procédure d’aménagement de peine […] soit mettre en œuvre le placement sous surveillance électronique […] À défaut de décision dans un délai de deux mois, le détenu le plus proche de la fin de peine dans l’établissement, choisi parmi ceux condamnés à une ou des peines d’emprisonnement » est mis en liberté.
C’est ce que l’on appelle, peut-être de façon un peu abusive, la règle du numerus clausus, par laquelle, j’y insiste, pour mettre quelqu’un en prison, il faut en sortir un autre.
Parmi tous les problèmes que pose l’application de cette règle, le plus grave est que le jugement initial n’est pas respecté et que le juge n’est pas associé à la décision de libération.
Madame la rapporteur, comment pouvez-vous soutenir cette idée selon laquelle on ne pourrait faire exécuter une peine de prison qu’en libérant quelqu’un qui n’a pas fini de purger la sienne et sans qu’un magistrat soit présent pour prendre la décision ? Compte tenu des graves conséquences à attendre d’une telle disposition, j’aurais préféré que vous la supprimiez de vous-même. À défaut, je demande au Sénat de voter l’amendement de suppression présenté par le Gouvernement.
Je suis évidemment défavorable à cet amendement de suppression de l’article 4 B, qui reprend l’une des dispositions figurant dans une proposition de loi déposée à l’Assemblée nationale par notre collègue député Dominique Raimbourg.
Contrairement aux arguments avancés par M. le ministre, le mécanisme proposé ne met pas en cause l’autorité des décisions de justice puisqu’il n’interdit pas l’incarcération immédiate d’une personne, dans la mesure où un volant de places disponibles est prévu dans chaque établissement.
Par ailleurs, un délai de deux mois à compter de l’entrée du détenu en surnombre est fixé pour permettre la préparation d’une mesure d’aménagement de peine. Or on trouve toujours dans les prisons une ou plusieurs personnes qui font l’objet d’une telle procédure en cours.
Il s’agit, à mes yeux, d’une mesure très intéressante, pour pousser aux aménagements de peine, pour favoriser la sortie et pour restreindre le nombre de personnes en détention.
Madame la rapporteur, cette disposition n’est décidément pas raisonnable. Elle va, d’ailleurs, à l’encontre de tout ce que vous nous dites vous-même sur la nécessité de prévoir des aménagements de peine en fonction, non pas du nombre de places disponibles dans nos prisons, mais de la situation particulière de chaque condamné et des projets éducatifs ou d’insertion que celle-ci peut justifier ou rendre possibles.
Le mécanisme prévu à l'article 4 B fait de l’aménagement de peine une mesure subordonnée aux capacités d’accueil des établissements en vue de permettre l’enfermement des nouveaux condamnés.
Au cours des débats en commission des lois, auxquels j’ai participé, il a été reproché à certaines dispositions de venir en discussion sans avoir fait l’objet d’un minimum de concertation. Celle qui nous est proposée ici en est un exemple typique : elle prévoit une procédure extrêmement complexe, sort tout droit de ce que je qualifierai un « travail en chambre », en faisant fi de tout dialogue préalable. Voilà qui me paraît singulier en matière de politique pénale !
Les raisons pour lesquelles nous nous sommes opposés aux dispositions de l’article 4 A ressurgissent avec encore plus de force ici, pour nous interdire – mais à la puissance 10 par rapport à tout à l’heure ! – d’adopter ce type de mécanisme, parfaitement aveugle, arbitraire, automatique, dans un domaine où, au contraire, la dimension humaine doit absolument prévaloir sur l’esprit de système.
C’est la raison pour laquelle notre groupe s’opposera avec fermeté à une telle mesure, car elle fait bon marché du caractère individuel de la justice et tend à remplacer les magistrats par les directeurs d’établissement pénitentiaires.
MM. François-Noël Buffet et Alain Dufaut applaudissent.
Je n’avais pas prévu d’intervenir, mais je me dois de faire une mise au point après les interventions de MM. Bas et Reichardt, qui caricaturent véritablement nos positions.
L’objectif que nous recherchons est d’éviter la récidive.
Or, depuis cinq ans, chers collègues de l’opposition sénatoriale, la mise en application du système pénal et pénitentiaire que vous avez soutenu n’a fait que produire de la récidive : les chiffres sont là pour l’attester !
De notre point de vue – nous n’avons peut-être pas raison, nous verrons bien… –, parmi l'ensemble de la population, on trouve certaines catégories de personnes qui doivent, d’abord et avant tout, être réinsérées. Pour celles-ci, il faut éviter, autant que possible, un enfermement dans un établissement pénitentiaire.
Tel est l’objet de l'article précédent, que nous avons introduit par amendement en commission des lois et sur lequel je n’avais pas jugé utile de prendre la parole. Mais je ne peux pas laisser M. André Reichardt brandir la menace de répercussions médiatiques désastreuses et faire des annonces préélectorales sans réagir.
La récidive est le pire des fléaux. Depuis cinq ans, et même dix, c’est ce que la politique gouvernementale, la vôtre, a produit. Nous pouvons toujours discuter, mais, au moins, essayons un autre système !
Monsieur le garde des sceaux, si je vous fais crédit de votre honnêteté, ne déformez pas la réalité. S’agissant du numerus clausus pénitentiaire, ne dites pas qu’il équivaut à faire sortir un détenu de prison pour en enfermer un autre : c’est faux, et vous le savez !
Ce dispositif existe déjà ailleurs, notamment aux Pays-Bas et dans certains pays nordiques. Il consiste à favoriser un travail de coordination, au sein d’un ressort particulier, entre le juge de l’application des peines, le parquet et l'administration pénitentiaire, pour connaître la quantité de places libres dans les établissements, identifier les détenus pouvant bénéficier d’une libération conditionnelle ou d’un aménagement de peine, et donc avoir une idée des prochaines sorties prévues et de leur nombre.
Je le rappelle, seul le mandat de dépôt à l’audience entraîne une incarcération immédiate. Or les magistrats n’en prononcent que très peu, même lorsqu’ils condamnent à un an ferme et plus, parce qu’ils savent très bien que leurs décisions ne pourraient pas être exécutées ou qu’elles le seraient dans de très mauvaises conditions.
Le juge de l’application des peines, le parquet et l'administration pénitentiaire doivent pouvoir se mettre autour d’une table pour discuter, faire en sorte qu’il y ait toujours des places libres, selon les règles de la loi pénitentiaire, afin que la personne nouvellement condamnée puisse intégrer l'établissement, pas immédiatement puisque, je le répète, il n’y a que très rarement de mandat de dépôt à l’audience, mais dans un délai qui sera fixé par le juge de l’application des peines.
Voilà en quoi consiste le numerus clausus pénitentiaire. C’est une bonne mesure, qui obligera les professionnels concernés à se concerter, pour savoir véritablement ce qu’il advient des personnes condamnées, où on les place et dans quelles conditions.
Monsieur le ministre, mes chers collègues, ayons bien à l’esprit les conséquences qu’aura, dans les mois et les années à venir, l’instauration du numerus clausus pénitentiaire. Dans certains points de notre territoire, tels que la région parisienne ou le département du Nord, du fait de la très forte densité carcérale qui y est recensée, ce dispositif entraînera des libérations en nombre. Dans d’autres, comme peut-être le Massif central ou la Bretagne, il n’y en aura aucune.
Que je sache, notre pays est un État unitaire, et non pas fédéral. La loi doit y être la même pour tous. Or la présente disposition peut entraîner une violation directe du principe d’égalité devant la loi.
L’un de nos collègues, il y a quelques instants, a commencé son intervention en invitant le Sénat à ne pas tomber dans la caricature.
Mais il l’a poursuivie avec des propos, qui, de ce point de vue, sont pour le moins surprenants…
Au travers de l’amendement adopté en commission des lois, devenu l’article 4 B du présent texte, il s’agit, en réalité, de prévoir la libération automatique des détenus dont le reliquat de peine est le plus bas en cas d’incarcération d’un nouveau condamné. Je ne vois là rien d’autre que l’application de la règle « pour une entrée, une sortie ».
En nous expliquant le dispositif proposé, notre collègue a tout à l’heure insisté sur le fait que magistrats et responsables de l'administration pénitentiaire allaient se réunir pour trouver des solutions. Mais c’est déjà ce qui se passe aujourd'hui ! Le système actuel offre assez de souplesse pour permettre un tel travail de collaboration.
Avec le numerus clausus pénitentiaire, nous allons entrer dans un système d’automaticité, contraire à une bonne administration de la justice.
Monsieur Michel, comment pouvez-vous, dans le même temps, nous reprocher de caricaturer les positions de la gauche sénatoriale et nous accuser d’avoir créé de la récidive au cours des dernières années ? Si ce n’est pas de la caricature… En l’occurrence, c’est vraiment l’hôpital qui se moque de la charité !
Revenons au fond du sujet : j’ai le sentiment, mes chers collègues, que nous retombons dans le débat que nous avons déjà eu, tout à l’heure, à propos de l’article 4 A, dans la mesure où le principe de l’individualisation des peines, ô combien nécessaire, n’est véritablement pas pris en compte. L’instauration d’un numerus clausus pénitentiaire fait fi, très clairement, de la situation du délinquant, de sa personnalité et, ce qui est encore plus grave, des risques éventuels que sa libération anticipée peut faire courir à la société.
Sans vouloir charger la barque ni être particulièrement pessimiste à cet égard, je voudrais rappeler qu’un juge, lorsqu’il prononce une condamnation, se fonde sur un certain nombre d’études et de travaux effectués par la machine judiciaire. Par la suite, une mesure d’aménagement de peine peut être décidée, mais ce n’est qu’une possibilité, jamais une obligation. Il n’y a aucune automaticité.
Je le dis à titre personnel, l’instauration d’un numerus clausus est une hérésie, pour reprendre le terme que j’ai précédemment utilisé. §
Je tiens à réagir aux propos qui ont été tenus.
En effet, nous devons nous garder de tomber dans la caricature si nous voulons progresser. Sur ces questions difficiles, il est indispensable que chacun puisse s’exprimer tranquillement et sincèrement.
Cela dit, jamais le Gouvernement, pas plus que l’ancienne majorité sénatoriale, n’a proposé ni défendu l’idée selon laquelle il fallait laisser les personnes en prison pendant toute la durée de leur peine, qu’il fallait que tous les condamnés fassent de la prison. Beaucoup d’autres modes d’exécution de la peine sont possibles, à l’instar de la liberté sous condition ou du placement sous bracelet électronique ; mais c’est le juge qui décide.
C’est probablement à cela que M. le président de la commission des lois faisait allusion dans son intervention liminaire, lorsqu’il soulignait que le garde des sceaux avait tendance à prendre des circulaires destinées à vider les prisons.
La formule était sans doute quelque peu excessive, mais il est vrai que nous nous efforçons, d’ores et déjà, de gérer les sorties de prison. Il existe ainsi des conférences régionales d’aménagement des peines, semestrielles, et des commissions d’exécution des peines, qui se réunissent dans le ressort des tribunaux. J’ai eu l’occasion de rencontrer les magistrats qui siègent au sein de la commission d’exécution des peines du tribunal de grande instance d’Évry, dont le travail est particulièrement difficile, compte tenu de la présence dans ce ressort de la maison d’arrêt de Fleury-Mérogis, et je puis vous dire qu’ils font preuve d’une conscience professionnelle exceptionnelle. Le Gouvernement fait donc en sorte d’organiser l’aménagement de la peine.
Par ailleurs, la circulaire du 12 mai 2011 vise à permettre aux détenus ne bénéficiant pas d’aménagement de peine, mais présentant des garanties suffisantes de représentation, d’être reçus lors de rendez-vous pénitentiaires destinés à préparer l’incarcération.
Je suis tout à fait d’accord pour que les situations individuelles fassent l’objet d’un examen concerté et pour que l’on organise les sorties de prison, mais votre texte prévoit tout autre chose. L’article 4 B prévoit en effet que la direction de l’établissement doit libérer le détenu au bout de deux mois mais que, en l’absence de décision d’aménagement de peine ou de mise en œuvre du placement sous surveillance électronique prise dans ce délai, c’est le détenu le plus proche de la fin de peine dans l’établissement qui doit sortir.
L’automaticité de cette disposition, qui ne prévoit pas l’intervention du magistrat, la rend inacceptable.
Je suis tout prêt à discuter avec vous du renforcement du rôle des commissions d’exécution des peines, mais je n’accepte pas le caractère automatique de ce dispositif purement administratif, qui évacue le magistrat.
Selon Mme la rapporteur, cet article ne pose aucun problème : la décision du juge est respectée et il y aura des places vides supplémentaires pour accueillir les entrants. Ce faisant, elle reconnaît qu’il faut construire de nouvelles places !
Telle est la principale faiblesse de son argumentation : il n’est pas très raisonnable de considérer que des places vides permettront d’accueillir de futurs détenus, alors que nous manquons d’ores et déjà de places de prison. Si nous n’en construisons pas de nouvelles, il n’y en aura jamais de libres !
Au demeurant, tant le caractère automatique du dispositif que le fait de confier son organisation à la direction de l’établissement me paraissent contraires au principe de l’individualisation des peines. Et que devient le juge de l’application des peines, dont l’intervention constituait un vrai progrès ? Il me semble incompréhensible de vouloir l’évacuer ! J’espère donc que cette position sera revue.
Ce système avait été envisagé et débattu à l’Assemblée nationale, mais la proposition n’avait pas abouti. Quant à Mme Lebranchu, elle y avait également renoncé lorsqu’elle était garde des sceaux.
J’insiste donc auprès de la Haute Assemblée pour qu’elle vote l’amendement de suppression du Gouvernement.
L’amendement n’est pas adopté.
L’amendement n° 57, présenté par Mme Borvo Cohen-Seat, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Alinéa 19
I. – Après les mots :
crédit de
Insérer les mots :
réduction de
II. – Remplacer la référence :
712-1 D
par la référence :
712-1 C
La parole est à Mme la rapporteur.
Cet amendement tend à réparer une omission et à rectifier une erreur de référence.
L’amendement est adopté.
L’article 4 B est adopté.
L’amendement n° 43 rectifié bis, présenté par MM. Mézard, Baylet, C. Bourquin, Collin, Collombat et Fortassin, Mme Laborde, MM. Plancade, Requier, Tropeano, Vall et Vendasi et Mme Escoffier, est ainsi libellé :
Après l’article 4 B
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au deuxième alinéa de l’article 733 du code de procédure pénale, le mot : « Constitue » est remplacé par les mots : « Peut constituer ».
La parole est à M. Jacques Mézard.
La loi d’orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure, la LOPPSI, a défini comme violation automatique des obligations liées à la mise en liberté conditionnelle le fait pour le condamné de refuser de commencer ou de poursuivre le traitement prescrit par le médecin traitant, et qui lui a été proposé dans le cadre d’une injonction de soins.
Le présent amendement a pour objet de supprimer l’automaticité de cette violation, afin de permettre à la juridiction d’apprécier les circonstances dans le cas d’espèce.
nous avons considéré qu’il convenait de permettre au magistrat d’apprécier les obligations liées à la mise en liberté conditionnelle. Déjà, à l’époque, nous voulions supprimer l’automaticité !
L’avis de la commission est donc favorable, pour les raisons invoquées par M. Mézard.
L’article 733 du code de procédure pénale n’impose nullement la révocation d’une libération conditionnelle lorsqu’un condamné soumis à une injonction de soins refuse de suivre ces soins. Il n’y a donc pas d’automaticité en l’espèce.
Cet article précise simplement, ce qui est logique, que le refus de suivre ces soins constitue une violation des obligations de la libération conditionnelle. Ce sont des faits, et rien d’autre. Au juge d’apprécier alors si cette violation, comme n’importe quelle autre violation, justifie ou non la révocation de la mesure. L’article 733, dans sa rédaction actuelle, n’implique ni automaticité ni systématicité.
Il serait dès lors absurde de modifier la loi en vue de préciser que le refus de suivre ces soins « peut constituer » une violation. Il y a nécessairement violation, dans la mesure où le condamné est soumis à une injonction de soins qu’il ne suit pas, mais il n’y a pas de révocation automatique de la mise en liberté conditionnelle.
Je demande donc à ses auteurs de bien vouloir retirer cet amendement, satisfait par l’actuel article 733 du code de procédure pénale. À défaut, j’émettrai un avis défavorable.
L’amendement est adopté.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 4 B.
Après l’article 733 du code de procédure pénale, sont insérés les articles 733-1 A à 733-1 G ainsi rédigés :
« Art.733-1 A. – Sous réserve des dispositions de l’article 132-23 du code pénal, la libération conditionnelle est accordée de droit aux personnes condamnées lorsque la durée de la peine accomplie est égale au double de la durée de la peine restant à subir et ce sauf avis contraire du juge d’application des peines.
« Art.733-1 B. – Le directeur du service pénitentiaire d’insertion et de probation examine en temps utile le dossier de chacun des condamnés relevant de l’article 723-19, afin de déterminer, après avis du chef d’établissement pénitentiaire, la mesure de libération conditionnelle la mieux adaptée à sa personnalité et à sa situation matérielle, familiale et sociale.
« Sauf en cas d’absence de projet sérieux d’insertion ou de réinsertion ou d’impossibilité matérielle de mettre en place une mesure de libération, le directeur, après avoir obtenu l’accord du condamné à la mesure qui lui est proposée, adresse au procureur de la République, en vue de la saisine du juge de l’application des peines, une proposition de libération comprenant, le cas échéant, une ou plusieurs des obligations et interdictions énumérées à l’article 132-45 du code pénal. À défaut, il lui adresse, ainsi qu’au juge de l’application des peines, un rapport motivé expliquant les raisons pour lesquelles un aménagement de peine ne peut être proposé et en informe le condamné.
« S’il estime la proposition justifiée, le procureur de la République transmet celle-ci pour homologation au juge de l’application des peines. Celui-ci dispose alors d’un délai de trois semaines à compter de la réception de la requête le saisissant pour décider par ordonnance d’homologuer ou de refuser d’homologuer la proposition.
« S’il n’estime pas la proposition justifiée, le procureur de la République en informe le juge de l’application des peines en lui transmettant cette proposition. Il avise également le condamné de sa position. Le juge de l’application des peines peut alors ordonner un aménagement de peine, d’office ou à la demande du condamné, à la suite d’un débat contradictoire conformément à l’article 712-6 du présent code. Il peut également le faire après avoir reçu le rapport prévu au deuxième alinéa du présent article.
« Art. 733-1 C. – Si le juge de l’application des peines refuse d’homologuer la proposition, il doit rendre une ordonnance motivée qui est susceptible de recours par le condamné et par le procureur de la République devant le président de la chambre de l’application des peines de la cour d’appel selon les modalités prévues par le 1° de l’article 712-11.
« Art. 733-1 D. – À défaut de réponse du juge de l’application des peines dans le délai de trois semaines, le directeur du service pénitentiaire d’insertion et de probation peut, sur instruction du procureur de la République, ramener à exécution la mesure d’aménagement. Cette décision constitue une mesure d’administration judiciaire qui n’est pas susceptible de recours. Elle est préalablement notifiée au juge de l’application des peines.
« Art. 733-1 E. – Le juge de l’application des peines ou le président de la chambre de l’application des peines de la cour d’appel saisis en application des dispositions de l’article 733-2 ou de l’article 733-3 peuvent substituer à la mesure de libération conditionnelle proposée une autre mesure d’aménagement : une semi-liberté, un placement à l’extérieur, un placement sous surveillance électronique. Ils peuvent de même modifier ou compléter les obligations et interdictions énumérées à l’article 132-45 du code pénal et accompagnant la mesure. La mesure est alors octroyée, sans débat contradictoire, par ordonnance motivée.
« Lorsqu’elle est rendue par le juge de l’application des peines, cette ordonnance peut faire l’objet d’un appel de la part du condamné ou du procureur de la République selon les modalités prévues par le 1° de l’article 712-11.
« Art. 733-1 F. – Lorsque la proposition d’aménagement de la peine est homologuée ou qu’il est fait application des dispositions de l’article 733-1 D, l’exécution de la mesure d’aménagement est directement mise en œuvre dans les meilleurs délais par le service pénitentiaire d’insertion et de probation. En cas d’inobservation par le condamné de ses obligations, le directeur du service saisit le juge de l’application des peines aux fins de révocation de la mesure conformément aux dispositions de l’article 712-6. Le juge peut également se saisir d’office à cette fin, ou être saisi par le procureur de la République.
« Art. 733-1 G. – Pour les condamnés mentionnés à l’article 723-19 et afin de préparer une mesure de semi-liberté, de placement à l’extérieur, de placement sous surveillance électronique ou de libération conditionnelle selon les modalités prévues par le présent paragraphe, le directeur du service pénitentiaire d’insertion et de probation peut adresser au procureur de la République, aux fins de saisine du juge de l’application des peines, une proposition de permission de sortir, selon les modalités prévues par les articles 733-1 B à 733-1 F. »
L’amendement n° 17, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. le garde des sceaux.
L’article 4 C, ajouté par la commission des lois du Sénat, prévoit une libération conditionnelle automatique aux deux tiers de la peine. Le Gouvernement ne peut qu’être défavorable à cette disposition, dont le caractère systématique est contraire à l’exigence d’individualisation de la peine.
L’article 4 C reprend une disposition de la proposition de loi présentée par notre collègue député Dominique Raimbourg et visant à introduire le principe d’une libération conditionnelle aux deux tiers de la peine.
Aux termes de cet article, le placement sous le régime de la libération conditionnelle resterait facultatif à compter de la moitié de la peine, comme c’est le cas aujourd’hui, mais deviendrait systématique aux deux tiers de la peine, sauf avis contraire du juge de l’application des peines. Quoi qu’en dise M. le garde des sceaux, les magistrats pourraient donc s’opposer à la libération conditionnelle.
La commission a donc émis un avis défavorable.
Je trouve amusante l’explication donnée par Mme le rapporteur, qui fait un mix entre automaticité et intervention du juge. Il est dommage qu’elle n’ait pas adopté la même attitude aux articles précédents, ce qui nous aurait permis de trouver un terrain d’entente !
Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, n’adopte pas l’amendement.
L’amendement n° 58, présenté par Mme Borvo Cohen-Seat, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Alinéa 9, première phrase
Supprimer la référence :
ou de l'article 733-3
La parole est à Mme la rapporteur.
L’amendement est adopté.
L'amendement n° 44 rectifié bis, présenté par MM. Mézard, Baylet, C. Bourquin, Collin, Collombat et Fortassin, Mme Laborde, MM. Plancade, Requier, Tropeano, Vall et Vendasi et Mme Escoffier, est ainsi libellé :
Après l’article 4 C
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au troisième alinéa de l’article 763-5 du code de procédure pénale, le mot : « Constitue » est remplacé par les mots : « Peut constituer ».
La parole est à M. Jacques Mézard.
Cet amendement s’inscrit dans la continuité de l’amendement n° 43 rectifié bis, que nous avons adopté il y a quelques minutes.
Il vise à insérer, après l’article 4 C du projet de loi, un article additionnel tendant à modifier l’article 763-5 du code de procédure pénale relatif aux conséquences résultant pour un condamné de la violation de ses obligations liées à la mise en œuvre d’un suivi socio-judiciaire. Au troisième alinéa de cet article, nous proposons de remplacer le mot « constitue » par les mots « peut constituer ».
En effet, nous considérons que le juge doit pouvoir apprécier la réalité de la violation, ce que l’article 763-5 du code de procédure pénale dans sa rédaction actuelle ne lui permet pas – nous sommes en désaccord sur ce point avec M. le garde des sceaux.
La modification proposée vise à renforcer le pouvoir d’appréciation des magistrats. L’avis de la commission est donc favorable.
Par cohérence avec la position adoptée au sujet de l’amendement n° 43 rectifié bis, j’émets un avis défavorable.
L'amendement n'est pas adopté.
Les articles 132-18-1, 132-19-1 et 132-19-2 du code pénal sont abrogés.
L'amendement n° 18, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. le garde des sceaux.
Cet amendement tend à supprimer l’article 4 D, que la commission des lois a introduit dans le projet de loi et qui vise à abroger les articles du code pénal relatifs aux peines planchers applicables en cas de récidive ou de délit particulièrement violent.
Il va de soi que le Gouvernement ne peut pas être favorable à l’abrogation de ces articles. En effet, le mécanisme des peines planchers, qui a été jugé par deux fois conforme à la Constitution, constitue une réponse nécessaire et justifiée à la récidive et à la délinquance la plus violente.
J’ajoute que le juge dispose tout à fait de la possibilité d’écarter l’application de la peine plancher : comme Mme la rapporteur vient de le rappeler, les magistrats sont entièrement libres de ne pas appliquer ces peines.
Madame la rapporteur, vous avez utilisé le même argument pour défendre l’un de vos amendements… Aussi, je suis sûr que vous allez vous rendre à celui-ci, ce qui vous conduira à voter l’amendement présenté par le Gouvernement !
Monsieur le garde des sceaux, la commission est défavorable à votre amendement.
Je précise que, si vous n’avez pas rendu les peines planchers automatiques, …
En effet, elles ne sont pas automatiques.
En réalité, les peines planchers, dont l’instauration était une mesure d’affichage, ont des effets négatifs sur le quantum des peines.
En 2010, sur 16 003 condamnations éligibles à une peine plancher, 41, 4 % ont effectivement donné lieu au prononcé d’une telle peine. La part des peines minimales prononcées avec un emprisonnement entièrement ferme s’élève à 36, 9 %.
Il est vrai que les conséquences des peines planchers sur l’augmentation du nombre de personnes détenues demeurent encore mal évaluées. Mais leur effet sur la prévention de la récidive apparaît encore plus incertain... Or l’objet du mécanisme était justement de prévenir la récidive !
En outre, les peines planchers peuvent avoir un effet retard sur les incarcérations. En effet, comme l’a indiqué Mme Martine Lebrun, présidente de l’association nationale des juges de l’application des peines, l’ANJAP, au cours de nos échanges, les magistrats, souvent réticents à prononcer des peines minimales dont la sévérité ne leur paraît pas adaptée, sont conduits à les assortir d’un sursis avec mise à l’épreuve pour des durées souvent longues.
Or le rapport d’information de l’Assemblée nationale sur la mise en application de la loi du 10 août 2007 renforçant la lutte contre la récidive des majeurs et des mineurs souligne que « des manquements mineurs peuvent conduire à révoquer un sursis et donc à incarcérer la personne pour une période relativement longue, alors même qu’elle pouvait être sur la voie de sa réinsertion ». Et le rapport conclut : « sur le plan de la pédagogie de la peine, la sanction serait difficilement compréhensible ».
J’ajoute que la loi du 10 août 2007 a eu pour effet de limiter la liberté d’appréciation du magistrat et sa capacité à individualiser la peine, puisqu’il est tenu de motiver sa décision lorsqu’il prononce une peine inférieure au seuil prévu par la loi.
Si donc l’intérêt des peines planchers n’a pas pu être démontré, leurs inconvénients, déjà dénoncés lors de l’examen de la loi du 10 août 2007, sont à mes yeux patents. Nous étions tout à fait opposés à l’instauration de ce dispositif, dont il faut bien dire qu’il poursuivait, je le répète, un objectif d’affichage. En effet, vous n’avez pas instauré des peines planchers à l’américaine, même si vous avez prétendu le faire !
Bref, les peines planchers nous semblent avoir surtout des inconvénients. Nous étions opposés à leur création ; aujourd’hui, nous en proposons la suppression.
Je mets aux voix l'amendement n° 18.
J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe socialiste.
Je rappelle que l'avis de la commission est défavorable.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
Le scrutin a lieu.
Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
Il est procédé au dépouillement du scrutin.
Voici le résultat du scrutin n° 98 :
Le Sénat n'a pas adopté.
L'amendement n° 59 rectifié, présenté par Mme Borvo Cohen-Seat, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Compléter cet article par deux paragraphes ainsi rédigés :
… - Au troisième alinéa de l'article 132-24 du même code, les mots : « en dehors des condamnations en récidive légale prononcées en application de l'article 132-19-1 » sont supprimés.
… - Après le mot : « pénal », la fin de la première phrase du premier alinéa de l'article 362 du code de procédure pénale est supprimée.
La parole est à Mme la rapporteur.
Le Gouvernement demandait la suppression de l'article ; il ne peut donc pas être favorable à cet amendement.
Je mets aux voix l'amendement n° 59 rectifié.
J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe socialiste.
Je rappelle que l'avis du Gouvernement est défavorable.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
Le scrutin a lieu.
Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
Il est procédé au dépouillement du scrutin.
Voici le résultat du scrutin n° 99 :
Le Sénat a adopté.
Je mets aux voix l'article 4 D, modifié.
J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe socialiste.
Je rappelle que l’avis du Gouvernement est défavorable.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
Le scrutin a lieu.
Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
Il est procédé au dépouillement du scrutin.
L'amendement n° 42 rectifié bis, présenté par MM. Mézard, Baylet, Collin, Collombat et Fortassin, Mme Laborde, MM. Plancade, Requier, Tropeano, Vall et Vendasi et Mme Escoffier, est ainsi libellé :
Après l’article 4 D
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Les articles 706-53-13 à 706-53-22 du code de procédure pénale sont abrogés.
La parole est à M. Jacques Mézard.
Cet amendement vise à abroger la rétention de sûreté, contre laquelle nous nous sommes toujours élevés, ainsi que la surveillance de sûreté.
Je rappelle que ces deux dispositifs avaient été instaurés par la loi du 25 février 2008, elle-même modifiée par la loi du 10 mars 2010, adoptée à la suite de la censure par le Conseil constitutionnel – cela arrive ! – de la rétroactivité de la rétention de sûreté.
Nous avons dénoncé ce dispositif, qui touche au problème de la maladie mentale en milieu carcéral. De nombreux rapports, des missions d’information et même, en 2000, une commission d’enquête sénatoriale ont traité de cette question. La réponse apportée en 2008, puis en 2010, était fondée sur deux faits divers terribles – nous nous en souvenons tous –, qui ont été malheureusement instrumentalisés, comme cela fut trop souvent le cas ces dernières années.
La rétention de sûreté a donc été créée. Elle s’appuie sur la notion très contingente de dangerosité criminologique et psychiatrique. En d’autres termes, le lien de causalité entre infraction et privation de liberté est annihilé pour une personne qui présente une particulière dangerosité caractérisée par une probabilité très élevée de récidive.
Monsieur le garde des sceaux, près de quatre ans après la mise en œuvre de la loi de 2008 – je n’oublie pas la censure qui a justifié le texte de 2010 –, pourriez-vous nous dresser un bilan de la rétention de sûreté ? Quels en sont les effets ? Aujourd’hui, des personnes sont-elles détenues en application de ce dispositif ? Combien sont-elles ? Quelles perspectives voyez-vous à cette mesure ?
Pour notre part, nous considérons que ce n’est pas une bonne solution et qu’il conviendra dans les prochains mois de revenir sur les deux lois précitées.
Monsieur Mézard, je partage votre point de vue. D’ailleurs, les membres de mon groupe avaient exprimé la même conviction à l’occasion de la discussion de la loi qui a créé le dispositif en cause. Comme vous, j’en souhaite la suppression.
Je fais mienne la question que vous avez posée à M. le garde des sceaux afin de savoir, maintenant que nous avons la tête froide, les événements ayant motivé l’adoption de la rétention de sûreté étant éloignés, si cette disposition est justifiée.
Cela étant, mon cher collègue, je vous demande de bien vouloir retirer l’amendement n° 42 rectifié bis, et j’espère être fidèle en cela à la volonté de la commission.
Dans le temps qui nous était imparti au regard de la procédure ultrarapide qui nous a été imposée, nous n’avons pas pu auditionner les personnes adéquates et discuter de cette question. Nous avons donc décidé de rester dans le cadre limité de la loi en discussion.
À la veille d’échéances électorales très importantes, il n’est pas souhaitable, contrairement à ce que fait le Gouvernement, d’engager de grandes réformes du code pénal et du code de procédure pénale et d’en supprimer, dans la précipitation, certaines dispositions. Je note d’ailleurs que les récentes modifications ont été introduites, de façon beaucoup trop rapide, au gré d’événements conjoncturels.
Le numerus clausus, ce n’est pas une réforme importante ?
Je souhaite qu’un jour prochain nous remettions en chantier les deux codes précités parce que beaucoup reste à faire pour redonner du sens à la peine, rétablir la hiérarchie des peines. Il nous faudra aussi redéfinir les peines qui peuvent être fixées par la loi.
Je suis heureux d’entendre Mme la rapporteur dire qu’elle ne souhaite pas modifier les règles d’exécution des peines avant les élections, ce sujet étant trop important.
Je ne doute pas que vous soyez le seul à pouvoir les interpréter !
Moi aussi, monsieur Sueur, j’écoute et même j’entends !
Il m’a semblé pourtant que ce n’était pas toujours clair !
Pour ma part, j’ai compris que Mme la rapporteur ne souhaitait pas modifier les grandes règles existantes.
Nombre de dispositions que la commission a introduites n’entrent pas, elles non plus, dans le cadre de ce texte !
En tout cas, je suis très sensible à la volonté de Mme la rapporteur de ne pas modifier in fine les règles relatives à la rétention de sûreté. Elle a raison et elle ne les modifiera jamais. Je vais expliquer pourquoi en répondant à la question de M. Mézard.
Je le reconnais, la rétention de sûreté a posé des problèmes. Le Conseil constitutionnel s’est prononcé ; désormais, les dispositions relatives à la rétention de sûreté et à la surveillance de sûreté sont conformes à la Constitution. Je crois pouvoir dire que ces dispositions sont correctement appliquées, de façon très exceptionnelle, ce qui est tout à fait normal et correspond à l’esprit et à la lettre de la loi.
Depuis l’entrée en vigueur de la réforme, neuf personnes ont été placées sous surveillance de sûreté. Elles peuvent ainsi faire l’objet, après la fin de leur peine, d’un suivi judiciaire et médical en raison de leur dangerosité.
Une de ces personnes a été provisoirement placée en rétention de sûreté à cause du non-respect de ses obligations. La juridiction régionale de la rétention de sûreté a finalement considéré qu’il suffisait de renforcer les obligations de cette personne dans le cadre de la surveillance de sûreté en la plaçant sous surveillance électronique mobile. Je crois que cette personne est sortie aujourd'hui même du centre de rétention de sûreté. Cet exemple montre clairement que les garanties prévues par la loi sont entièrement respectées par les juridictions.
Le recours à la rétention de sûreté et à la surveillance de sûreté doit rester tout à fait exceptionnel. Cependant, il ne faut pas se priver de ces dispositifs dans les quelques cas où ils sont utiles, puisque ce sont parfois les seuls outils dont nous disposons. J’ajoute que nous veillons à ce que l’encadrement constitutionnel soit parfaitement respecté.
L'amendement n° 42 rectifié bis est retiré.
La parole est à M. le président de la commission.
Je voulais dire à M. le garde des sceaux qu’il serait peut-être utile de faire preuve de prudence dans la référence aux décisions souveraines du Conseil constitutionnel eu égard à l’actualité très récente et compte tenu du fait qu’un haut personnage de l’État a cru devoir préciser, …
… alors même que le Conseil constitutionnel n’a encore rendu aucune décision, la conclusion qu’il tirerait de ladite décision.
Je n’ai rien d’autre à ajouter, monsieur Hyest. Je pense que vous m’avez compris.
Je dirai de façon très calme et très sereine que les décisions du Conseil constitutionnel s’imposent à tous et que le Gouvernement les respectera toujours.
Par ailleurs, je suis heureux de constater que M. le président de la commission des lois se fait apporter dès que possible les dépêches relatant les propos réels ou supposés du Président de la République et n’a ensuite qu’une envie : diffuser la pensée du Président de la République !
M. Michel Mercier, garde des sceaux. Je suis heureux que vous soyez enfin son auxiliaire efficace !
Rires et applaudissements
I. – Le second membre de phrase du second alinéa de l’article 122-1 du code pénal est remplacé par trois phrases ainsi rédigées :
« Toutefois, la peine privative de liberté encourue est réduite du tiers. En outre, la juridiction tient compte de cette circonstance pour fixer le régime de la peine. Lorsque le sursis à exécution avec mise à l’épreuve de tout ou partie de la peine a été ordonné, cette mesure est assortie de l’obligation visée par le 3° de l’article 132-45 après avis médical et sauf décision contraire de la juridiction. »
II. – À la première phrase du premier alinéa de l’article 362 du code de procédure pénale, après les mots : « des dispositions », sont insérés les mots : « du second alinéa de l’article 122-1 et ».
III. – Le code de procédure pénale est ainsi modifié :
1° Avant la dernière phrase du troisième alinéa de l’article 721, il est inséré une phrase ainsi rédigée :
« Il peut également ordonner, après avis médical, le retrait lorsque la personne condamnée dans les circonstances mentionnées à la première phrase du second alinéa de l’article 122-1 du code pénal refuse les soins qui lui sont proposés. » ;
2° Le premier alinéa de l’article 721-1 est complété par une phrase ainsi rédigée :
« De même, après avis médical et sauf décision contraire du juge de l’application des peines, aucune réduction supplémentaire de peine ne peut être accordée à une personne condamnée dans les circonstances mentionnées à la première phrase du second alinéa de l’article 122-1 du code pénal qui refuse les soins qui lui sont proposés. »
IV. – Le code de procédure pénale est ainsi modifié :
1° L’intitulé du chapitre III du titre XXVIII du livre IV est ainsi rédigé : « Mesures de sûreté pouvant être ordonnées en cas de déclaration d’irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental ou en cas de reconnaissance d’altération du discernement » ;
2° Après l’article 706-136, il est inséré un article 706-136-1 ainsi rédigé :
« Art. 706-136-1. – Le juge de l’application des peines peut ordonner, à la libération d’une personne condamnée dans les circonstances mentionnées au second alinéa de l’article 122-1 du code pénal, une obligation de soins ainsi que les mesures de sûreté visées à l’article 706-136 pendant une durée qu’il fixe et qui ne peut excéder dix ans en matière correctionnelle et vingt ans si les faits commis constituent un crime ou un délit puni de dix ans d’emprisonnement. Les deux derniers alinéas de l’article 706-136 sont applicables. » ;
2° À la première phrase de l’article 706-137, les mots : « d’une interdiction prononcée en application de l’article 706-136 » sont remplacés par les mots : « d’une mesure prononcée en application des articles 706-136 ou 706-136-1 » ;
4° À l’article 706-139, la référence : « l’article 706-136 » est remplacée par les références : « les articles 706-136 ou 706-136-1 ».
L'amendement n° 19, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. le garde des sceaux.
Cet amendement vise à supprimer l’article 4 E, ajouté au projet de loi par la commission des lois, qui reprend les dispositions de la proposition de loi relative à l'atténuation de responsabilité pénale applicable aux personnes atteintes d'un trouble mental ayant altéré leur discernement au moment des faits, adoptée par le Sénat le 25 janvier 2011. Le Gouvernement, représenté par Nora Berra, s’y était alors opposé.
L’article 4 E prévoit la réduction d’un tiers de la peine encourue lorsque le condamné est atteint d’un trouble mental altérant ses facultés ou son discernement. Je demande au Sénat de bien noter qu’il s’agit d’une réduction automatique ; c’est là qu’est le problème.
Quel est l’état actuel du droit ? La proposition de la commission des lois constitue-t-elle un progrès ? Je rappelle que l’article 122-1 du code pénal, adopté en 1992, a été élaboré sous l’autorité de Robert Badinter. Cet article distingue deux hypothèses : soit le trouble mental a aboli le discernement de la personne – celle-ci est alors pénalement irresponsable –, soit il l’a seulement altéré – la personne demeure alors pénalement responsable, la juridiction devant toutefois tenir compte de cette circonstance lorsqu’elle détermine la peine et en fixe le régime. C’est de manière tout à fait volontaire que le législateur a choisi de ne pas être plus précis sur les conséquences que la juridiction doit tirer de l’existence d’un trouble mental altérant le discernement de la personne.
Ce choix se justifie pour deux raisons. D'une part, la notion de trouble altérant le discernement peut recouvrir des situations extrêmement diverses dans leur nature comme dans leur gravité, depuis l’altération très légère jusqu’à l’altération très importante. D'autre part, s’il faut laisser la possibilité à la juridiction d’être moins sévère – c’est le plus souvent le cas –, il faut aussi lui permettre de l’être davantage, si cela s’avère nécessaire en raison notamment de l’extrême dangerosité de la personne.
Du reste, le législateur l’a lui-même reconnu. La loi du 17 juin 1998 relative à la prévention et à la répression des infractions sexuelles ainsi qu’à la protection des mineurs, dite « loi Guigou », qui a créé la peine complémentaire de suivi socio-judiciaire avec injonction de soins, a aggravé la répression à l’encontre des personnes susceptibles de faire l’objet d’un traitement – ces dispositions se trouvent à l’article 131-36-4 du code pénal. Il s'agit bien de personnes atteintes d’un trouble mental altérant leur discernement.
En raison de son caractère général et systématique quelles que soient les circonstances, la réduction d’un tiers de la peine encourue proposée par le Sénat me paraît juridiquement très contestable et particulièrement inopportune. Je crois que cette mesure constituerait une véritable régression par rapport aux dispositions adoptées en 1992 et en 1998. C'est la raison pour laquelle j’estime, mesdames, messieurs les sénateurs, que vous devriez voter l’amendement du Gouvernement.
Imagine-t-on, par exemple, que l’auteur de multiples viols et assassinats commis dans des circonstances odieuses, que les experts ont déclaré pénalement responsable tout en reconnaissant que son discernement est très légèrement altéré – ce qui le rend plus dangereux –, puisse échapper à la réclusion alors même que la cour d’assises estime que cette peine est justifiée ? Il peut s’agir d’un trouble de la personnalité, comme par exemple une psychopathie, que la plupart des psychiatres considèrent comme incurable. Or la réduction d’un tiers de la peine s’appliquerait à tous, sans que soient prises en compte la personnalité de l’accusé et la nature de l’altération de son discernement.
Je le répète, je pense que les dispositions que vous avez introduites ne constituent pas un progrès par rapport à celles qui avaient été adoptées sur l’initiative de M. Badinter et Mme Guigou, et que l’on devrait s’en tenir aux lois de 1992 et 1998, qui, à mon sens, donnent entièrement satisfaction puisqu’elles laissent la possibilité au juge d’apprécier chaque cas particulier et de peser le degré d’altération dont sont « victimes » les personnes qui ont commis tel ou tel crime ou infraction. Je demande donc au Sénat de bien réfléchir à cette question et d’adopter l’amendement de suppression présenté par le Gouvernement.
La commission est défavorable à cet amendement.
Monsieur le garde des sceaux, c’est toujours le juge qui décide, ce n’est pas l’expert ; le juge a tout loisir, si je puis dire, de statuer par rapport à l’expertise.
Je n’ai jamais dit que c’était l’expert qui décidait !
Vous avez parlé du suivi socio-judiciaire ; je rappelle qu’il s’applique pour les délinquants sexuels. L’article 4 E du présent projet de loi n’a pas le même objet.
Nous n’avons fait que reprendre la proposition de loi relative à l’atténuation de responsabilité pénale applicable aux personnes atteintes d’un trouble mental ayant altéré leur discernement au moment des faits, qui avait été présentée par notre collègue Jean-René Lecerf et adoptée, à une très large majorité, par le Sénat le 25 janvier 2011.
Cette proposition de loi prévoyait que l’altération du discernement serait reconnue explicitement comme un facteur d’atténuation de la peine, puisque la peine encourue serait réduite d’un tiers, la juridiction demeurant libre, dans la limite de ce plafond, de prononcer la durée la plus appropriée en vertu du principe constitutionnel d’individualisation de la peine. Elle prévoyait également que le cadre légal relatif à la prise en charge médicale pendant et après la détention serait renforcé, avec en particulier la possibilité de soumettre la personne à une obligation de soins après sa libération.
Ces dispositions sont tout à fait compatibles avec les préoccupations que vous avez exprimées, monsieur le garde des sceaux, puisqu’elles n’empêchent pas de mettre en place un suivi de la personne après sa sortie de prison si cela est nécessaire.
La proposition de loi de Jean-René Lecerf a été adoptée par le Sénat à la quasi-unanimité. Je vous laisse donc juges, mes chers collègues ! J’ajoute que cette proposition de loi n’a toujours pas été inscrite à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale ; si nous adoptons les dispositions qu’elle prévoyait dans le cadre du présent projet de loi, nous pourrons être certains qu’elles seront examinées par nos collègues députés.
Le Gouvernement ne sera pas surpris que je vote contre son amendement dans la mesure où l’article qu’il vise à supprimer a pour but de donner vie, ou du moins de donner une chance, à une proposition de loi que, pour la plupart d’entre vous, mes chers collègues – à l’exception, bien entendu, de ceux qui ne sont parmi nous que depuis septembre dernier –, vous avez déjà voté en janvier 2011. Robert Badinter l’avait votée bien sûr lui aussi.
Cette proposition de loi a une histoire. Elle est le résultat d’une mission sénatoriale d’information commune aux commissions des lois et des affaires sociales, qui avait travaillé sur le thème de la prison et la maladie mentale, et à laquelle ont participé Gilbert Barbier, Christiane Demontès, Jean-Pierre Michel et moi-même.
Nous avions dans un premier temps, après de nombreuses auditions et visites, estimé que, pour au moins 10 % – à mon avis, ce chiffre est encore loin de la réalité – des personnes détenues dans les prisons de la République, la peine n’avait strictement aucun sens. Je rappelle que le Sénat avait introduit dans la loi pénitentiaire du 24 novembre 2009 des dispositions sur le sens de la peine.
Ceux qui visitent de temps à autre des établissements pénitentiaires, notamment des établissements comme celui de Château-Thierry, parfois surnommé « la maison des fous », ceux qui ont en mémoire les nombreuses personnes au regard halluciné qu’ils ont croisées, savent à peu près à quoi je fais allusion. Je ne parle même pas des personnes qui, lorsque vous entrez dans la prison à huit heures du matin, sont en train d’attendre le train, et l’attendent toujours à dix-huit heures lorsque vous partez…
Il y a donc dans les prisons de la République environ 10 % de personnes qui auraient dû être déclarées irresponsables par les cours d’assises, autrement dit 10 % de personnes dont le discernement était aboli au moment des faits mais qui ont été jugées responsables de leurs actes malgré cette abolition de leur discernement.
Qu’est-ce qui explique cette situation ? J’en ai parlé avec les présidents de cour d’assises ; ils m’ont répondu que, compte tenu de l’état de la psychiatrie en France et de ses évolutions, qui ne sont pas toutes condamnables – je pense notamment au développement de la psychiatrie ambulatoire –, il n’existe aucune solution pour ces personnes. Par conséquent, la seule façon de protéger la société est de les incarcérer. Certains de ces présidents de cour d’assises ont ajouté qu’ils disaient aux jurés qu’il leur appartenait de décider, sachant que, s’ils estimaient que le discernement de l’accusé était aboli au moment des faits, ce dernier sortirait peut-être dans quinze jours, un mois ou six mois, sans que la société en soit protégée.
Dès lors, que se passe-t-il ? Non seulement les personnes atteintes de troubles mentaux sont condamnées, mais elles le sont beaucoup plus sévèrement que les personnes saines d’esprit. En clair, pour le même crime, vous serez condamnés à dix ans d’emprisonnement si vous êtes sain d’esprit et à quinze ans si vous êtes malade mental… Trouvez-vous cette situation tolérable dans une démocratie avancée comme la nôtre ?
À l’issue de notre mission commune, nous avions fait ensemble quelques propositions, qui ont été reprises dans une proposition de loi, afin de restituer la véritable intention du législateur. Pour ma part – je peux me tromper –, je ne fais pas la même analyse que le garde des sceaux : lorsque le législateur précise qu’il faut tenir compte de l’altération du discernement pour fixer la durée de la peine et ses modalités d’exécution, je comprends que la maladie mentale doit être considérée comme une circonstance atténuante et non comme une circonstance aggravante.
C’est la raison pour laquelle nous avons proposé que, dans de tels cas, la peine d’emprisonnement encourue soit diminuée du tiers. Mais, pour ne pas mettre, comme l’a dit Mme Borvo Cohen-Seat, la société en danger, nous avons, en quelque sorte, « compensé » cette disposition en prévoyant des injonctions de soins spécialement incontournables.
J’ajoute, mes chers collègues, que si vous rejetiez l’amendement du Gouvernement vous ne feriez que permettre la mise en place d’une navette parlementaire un peu particulière. La proposition de loi relative à l’atténuation de responsabilité pénale applicable aux personnes atteintes d’un trouble mental ayant altéré leur discernement au moment des faits a été adoptée, à la quasi-unanimité, par le Sénat en janvier 2011. Voilà donc plus d’un an que nous attendons de l’Assemblée nationale qu’elle fasse montre de bonne volonté et l’inscrive à son ordre du jour.
Le cas n’est d’ailleurs pas rare : pour la proposition de loi relative à la législation funéraire, qui nous avait réunis, M. Sueur et moi-même – lui comme auteur, moi comme rapporteur –, nous avions dû attendre plus de deux ans, …
… à la suite de quoi l’Assemblée nationale a adopté, comme le Sénat, ce texte à l’unanimité !
Je crois que donner à nos collègues députés l’occasion d’exprimer à leur tour leur avis sur une proposition de loi du Sénat qui, je l’ai dit, me paraît faire honneur à ceux qui partagent une certaine conception de la démocratie, ne serait en tout cas pas un drame. §
J’ai rapporté la proposition de loi relative à l’atténuation de responsabilité pénale applicable aux personnes atteintes d’un trouble mental ayant altéré leur discernement au moment des faits.
Ce texte, présenté par Jean-René Lecerf, découle du rapport – qui, je l’indique à nos nouveaux collègues, est disponible – du groupe de travail de la commission des lois et de la commission des affaires sociales du Sénat sur la prise en charge des personnes atteintes de troubles mentaux ayant commis des infractions, auquel nous avions l’un et l’autre participé.
Pour établir ce rapport, le groupe de travail a entendu tous les psychiatres de France ou presque, des professeurs de droit et des magistrats, en particulier des présidents de cour d’assises… Ses conclusions ont fait l’objet d’un consensus au sein de la commission des affaires sociales, que vous présidiez alors, madame Dini. Elles ont donné lieu à plusieurs préconisations, relatives par exemple à la nature des établissements ou à l’expertise psychiatrique.
C’est de ces préconisations qu’a découlé, je l’ai dit, la proposition de loi, dont on peut considérer qu’elle a été adoptée à l’unanimité par notre assemblée, puisque, me semble-t-il, elle n’a recueilli aucune voix contre, mis à part celle de Mme Berra, qui nous est apparue quelque peu« décalée » par rapport au débat qui eut lieu dans cette enceinte.
C'est la raison pour laquelle nous devons, mes chers collègues, nous opposer à l’amendement du Gouvernement. §
L'amendement n'est pas adopté.
L'article 4 E est adopté.
(Supprimé)
Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 1 rectifié, présenté par MM. J.P. Michel et Sueur, Mmes Klès et Tasca et MM. Mohamed Soilihi et Leconte, est ainsi libellé :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
Le code de procédure pénale est ainsi modifié :
1° L’article 41 est ainsi modifié :
a) Au septième alinéa, après les mots : « ou toute personne », est inséré le mot : « morale » ;
b) Au neuvième alinéa, après le mot : « personne », est inséré le mot : « morale » ;
2° À la première phrase du sixième alinéa de l’article 81, après le mot : « personne », est inséré le mot : « morale ».
La parole est à Mme Virginie Klès.
Cet amendement porte sur les articles 41 et 81 du code de procédure pénale, lesquels autorisent le procureur de la République ou le juge d’instruction, dans des cas parfaitement énumérés et sous certaines conditions, à faire procéder à des enquêtes rapides pour vérifier la situation matérielle, familiale et sociale des prévenus ; dans certains cas, l’enquête est même obligatoire.
En l’état actuel du droit, peuvent réaliser ces enquêtes « les services pénitentiaires d’insertion et de probation, le service compétent de la protection judiciaire de la jeunesse ou toute personne habilitée ».
Dans la pratique, les enquêtes sont très souvent confiées aux services associatifs habilités et il apparaît qu’elles sont souvent effectuées par des personnes physiques indépendantes habilitées, lesquelles ne sont pas déclarées au régime général de la sécurité sociale, situation qui a été dénoncée à plusieurs reprises.
Les gardes des sceaux successifs se sont engagés à régulariser ces situations qui, de fait, constituent des fraudes à la sécurité sociale.
Après avoir demandé dans un premier temps la suppression de l’article 4 du projet de loi, nous proposons aujourd'hui de le rétablir, mais dans une rédaction permettant de viser non pas « toute personne habilitée », mais « toute personne morale habilitée », ce qui permettra de faire cesser ces fraudes à la sécurité sociale qui se sont presque institutionnalisées.
L'amendement n° 33, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
I. - L'article 41 du code de procédure pénale est ainsi modifié :
1° Au septième alinéa, les mots : « le service pénitentiaire d'insertion et de probation, le service compétent de l'éducation surveillée ou toute personne habilitée dans les conditions prévues par l'article 81, sixième alinéa, » sont remplacés par les mots : « une personne habilitée dans les conditions prévues au sixième alinéa de l'article 81 ou, en cas d'impossibilité matérielle, le service pénitentiaire d'insertion et de probation » ;
2° Au neuvième alinéa, les mots : « le service pénitentiaire d'insertion et de probation, le service compétent de la protection judiciaire de la jeunesse, ou toute personne habilitée dans les conditions de l'article 81, sixième alinéa » sont remplacés par les mots : « une personne habilitée dans les conditions prévues au sixième alinéa de l'article 81 ou, en cas d'impossibilité matérielle, le service pénitentiaire d'insertion et de probation ».
II. - À la première phrase du septième alinéa de l'article 81 du même code, les mots : « suivant les cas, le service pénitentiaire d'insertion et de probation, le service compétent de la protection judiciaire de la jeunesse ou toute association habilitée en application de l'alinéa qui précède » sont remplacés par les mots : « une personne habilitée en application du sixième alinéa ou, en cas d'impossibilité matérielle, le service pénitentiaire d'insertion et de probation ».
III. - L'ordonnance n° 45-174 du 2 février 1945 relative à l'enfance délinquante est ainsi modifiée :
1° Après le mot : « recueillera, », la fin du quatrième alinéa de l'article 8 est ainsi rédigée : « par toute mesure d'investigation, des renseignements relatifs à la personnalité et à l'environnement social et familial du mineur. » ;
2° Après le mot : « charger », la fin du quatrième alinéa de l'article 10 est ainsi rédigée : « les services du secteur public de la protection judiciaire de la jeunesse et du secteur associatif habilité des mesures d'investigation relatives à la personnalité et à l'environnement social et familial du mineur. »
La parole est à M. le garde des sceaux.
Cet amendement vise à rétablir les dispositions qui organisent le transfert des enquêtes présentencielles au secteur associatif habilité en vue de laisser aux services publics tout ce qui relève du post-sentenciel, c'est-à-dire de ce qui constitue le cœur du métier.
Utiliser les associations habilitées, notamment dans le domaine de l’action sociale des départements, pour mener des enquêtes – très proches des enquêtes présentencielles – est une pratique courante et permettra de spécialiser plus encore les agents des services pénitentiaires d’insertion et de probation dans le domaine du post-sentenciel.
La commission partage la préoccupation exprimée par les auteurs de l’amendement n° 1 rectifié.
J’ajoute que les personnes physiques, directement réglées par les régies des tribunaux, ne cotisent pas aux régimes de sécurité sociale, pratique contraire aux dispositions du décret du 17 janvier 2000, qui prévoit que les collaborateurs occasionnels du service public de la justice sont « affiliés au régime général de la sécurité sociale ».
La commission a donc émis un avis favorable.
Elle est en revanche défavorable à l’amendement n° 33.
L’article 4 du projet de loi tend à confier par priorité les enquêtes présentencielles au secteur associatif que le procureur de la République ou le juge d’instruction peut aujourd’hui confier indifféremment au service pénitentiaire d’insertion et de probation, au service compétent de la protection judiciaire de la jeunesse ou à toute personne – personne morale, si l’on retient l’amendement précédent – habilitée.
Cet article introduit des rigidités procédurales par rapport au droit en vigueur. Il aura pour effet d’obliger le parquet à saisir par principe les associations habilitées, même si celles-ci ne sont pas en mesure de fournir un service de qualité.
En outre, certains prévenus sont déjà suivis en post-sentenciel par le service pénitentiaire d’insertion et de probation, qui est plus à même d’informer le tribunal et d’éclairer l’enquête de personnalité à la lumière du suivi en cours.
Cet amendement vise à modifier les articles 41 et 81 du code de procédure pénale pour préciser que seules des personnes morales habilitées, et non des personnes physiques, peuvent procéder aux enquêtes visant à vérifier la situation matérielle, sociale et familiale des personnes concernées.
Il se veut une réponse à la difficulté rencontrée par certaines personnes physiques indépendantes habilitées à procéder à des enquêtes sociales dans la situation de collaborateur occasionnel du service public de la justice et dont la rémunération n’est pas encore à ce jour assujettie aux charges sociales.
D’abord, il me semble qu’il faudrait essayer de préciser quel est exactement le public visé. S’agit-il des délégués du procureur, ou d’autres cas sont-ils visés ?
Je comprends tout à fait, madame Klès, que vous vous préoccupiez de la situation inconfortable de ces collaborateurs occasionnels de la justice. Si le principe de leur assujettissement au régime général de la sécurité sociale a été acté, sa mise en œuvre a, en effet, pris un retard certain.
Le travail de détermination des règles d’assiette, relativement complexe du fait de la diversité des situations, a été mené à bien avec la direction de la sécurité sociale, mais la nécessité de procéder à des développements spécifiques sur le progiciel de gestion Chorus a conduit à reporter l’entrée en vigueur de la réforme au 1er janvier 2013.
Si je comprends l’intention qui sous-tend votre amendement, j’estime donc que celui-ci n’est pas parfaitement opportun dans la mesure où il restreindrait trop le champ des personnes habilitées à procéder à des enquêtes sociales en le limitant aux personnes morales, ce qui ne permettrait pas de couvrir l’ensemble des situations possibles et notamment celle des travailleurs indépendants.
Le sujet, je le reconnais, est complexe et je suis tout à fait prêt à ce que nous y travaillions ensemble. Je propose donc que nous fassions le point pendant la navette qui s’ouvre pour établir quelles sont les personnes concernées et quelles mesures doivent être prises. Nous disposerons ainsi de renseignements mieux établis et, en commission mixte paritaire ou lors d’une nouvelle lecture, le Sénat aura, évidemment, toute liberté pour voter les mesures qu’il jugera nécessaires.
Si vous acceptez cette proposition, je vous invite à retirer votre amendement ; si vous ne l’acceptez pas, je serai contraint d’émettre un avis défavorable.
Monsieur le ministre, je suis tentée de vous proposer l’inverse : on adopte notre amendement, on discute et on fait les modifications éventuellement nécessaires pendant la navette.
La situation dure depuis si longtemps que vous comprendrez que je préfère cette solution, mais nous restons ouverts à la discussion dans l’intervalle.
L'amendement est adopté.
En conséquence, l'article 4 est rétabli dans cette rédaction et l'amendement n° 33 n'a plus d'objet.
(Supprimé)
L'amendement n° 20, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
I. - Le 10° de l'article 138 du code de procédure pénale est complété par trois phrases ainsi rédigées :
« Une copie de l'ordonnance de placement sous contrôle judiciaire est adressée par le juge d'instruction au médecin ou au psychologue qui doit suivre la personne mise en examen. Les rapports des expertises réalisées pendant l'enquête ou l'instruction sont adressés au médecin ou au psychologue, à leur demande ou à l'initiative du juge d'instruction. Celui-ci peut également leur adresser toute autre pièce utile du dossier ; ».
II. - Le 3° de l'article 132-45 du code pénal est complété par trois phrases ainsi rédigées :
« Une copie de la décision ordonnant ces mesures est adressée par le juge de l'application des peines au médecin ou au psychologue qui doit suivre la personne condamnée. Les rapports des expertises réalisées pendant la procédure sont adressés au médecin ou au psychologue, à leur demande ou à l'initiative du juge de l'application des peines. Celui-ci peut également leur adresser toute autre pièce utile du dossier ; ».
III. - Le premier alinéa de l'article L. 3711-2 du code de la santé publique est ainsi rédigé :
« Le juge de l'application des peines communique au médecin traitant, par l'intermédiaire du médecin coordonnateur, copie de la décision ayant ordonné l'injonction de soins. Le juge communique également au médecin traitant, à la demande de ce dernier ou à son initiative, par l'intermédiaire du médecin coordonnateur, copie des rapports des expertises médicales réalisées pendant l'enquête ou l'instruction, du réquisitoire définitif, de la décision de renvoi devant la juridiction de jugement, de la décision de condamnation ainsi que des rapports des expertises qu'il a ordonnées en cours d'exécution de la peine. Le juge peut, en outre, adresser au médecin traitant toute autre pièce utile du dossier. »
La parole est à M. le garde des sceaux.
Toujours dans le même esprit, le Gouvernement souhaite le rétablissement de l’article 4 bis, dans sa rédaction adoptée par l’Assemblée nationale, car il permet un partage de l’information entre le médecin ou le psychologue traitant la personne poursuivie ou condamnée et les autorités judiciaires.
Aujourd'hui, le juge qui a pris la décision ne sait pas ce que fait le médecin qui a été choisi, et ce dernier ne sait pas ce qu’a fait la personne qu’il traite. Pour sortir de cette situation, il est indispensable que l’information soit partagée et que les professionnels soient informés des faits objets de la poursuite ou de la condamnation, ainsi que des éléments utiles du dossier, tels que les expertises.
Il est normal que l’autorité judiciaire renseigne les médecins concernés. On a vu ce qui pouvait se produire lorsqu’un enfant était inscrit dans un établissement scolaire sans que personne ait été informé des actes qu’il avait commis, le juge sachant, lui, pourquoi l’enfant devait être soigné, mais ne sachant pas comment il l’était !
On reconnaîtra que cette situation est quelque peu bizarre et, pour ma part, je crois qu’il faut faire confiance aux professionnels et accepter qu’il y ait un partage de l’information, dans le respect, bien sûr, des obligations tenant au secret professionnel pour chacun.
Monsieur le ministre, comme je l’ai indiqué dans le rapport, nous avons essayé de répondre au problème des établissements scolaires ; avec votre amendement, nous sommes dans un cadre plus général, et je regrette que les dispositions de l’article 4 bis, qui ont été introduites en séance publique à l’Assemblée nationale, n’aient pu faire l’objet de consultations approfondies de notre part.
Cependant, selon les observations que nous avons tout de même pu recueillir au cours des auditions auxquelles nous avons procédé après l’adoption de ces dispositions, il apparaît peu judicieux de prévoir la transmission du jugement au médecin, d’une part, parce que la seule lecture d’une décision, le plus souvent non motivée, n’éclairera pas nécessairement le thérapeute, d’autre part, parce que cette information peut aussi entraîner un refus de prise en charge.
Peut-être serait-il préférable de privilégier la voie du conseiller d’insertion et de probation pour transmettre l’information utile au thérapeute, qui pourra ensuite éventuellement, à la lumière de ces éléments, solliciter le juge de l’application des peines pour obtenir copie des expertises judiciaires ?
Il nous semble nécessaire de poursuivre la réflexion sur ce sujet. En l'état actuel, nous proposons de maintenir la suppression de l'article 4 bis.
L’amendement n° 20 vise à rétablir l’article 4 bis, adopté en séance publique à l’Assemblée nationale sur l’initiative de son rapporteur. Il a pour objet la transmission systématique d’une copie de la décision juridictionnelle pertinente entre l’autorité judiciaire et le médecin ou psychologue traitant une personne qui est poursuivie ou condamnée pour des crimes ou délits violents ou de nature sexuelle ou justifiant un traitement et qui est soumise à une obligation de soins ou à une injonction de soins. La transmission des rapports d’expertise médicale est laissée, quant à elle, à la diligence des autorités suscitées.
S’il convient d’améliorer le partage d’informations entre l’autorité judiciaire et le médecin ou psychologue traitant, il est en revanche beaucoup plus étonnant d’opter pour de telles modalités.
En effet, il est paradoxal que la transmission d’une copie de la décision juridictionnelle pertinente présente un caractère obligatoire et systématique, alors que celle des rapports d’expertise n’est qu’optionnelle et laissée à l’appréciation du magistrat ou du corps médical. C’est même incohérent, puisqu’une décision juridictionnelle ne contient aucun élément utile à un médecin, contrairement au rapport d’expertise médicale.
Par ailleurs, l’application de ces dispositions se heurte à de nombreux obstacles, ce qui remet sérieusement en question leur mise en pratique. Je ne prendrai que quelques exemples pour illustrer mon propos.
Le versement des rapports d’instructions au dossier n’est souvent effectif que de nombreux mois après le placement sous contrôle judiciaire. En d’autres termes, ces documents ne sont communicables qu’après un délai important. De facto, cette disposition est vidée de son intérêt.
Le choix du médecin étant libre, il faudrait que la personne ait communiqué le choix de son médecin au préalable. Quid en cas de changement ?
Nous pouvons encore citer l’impact important de cette disposition sur les greffes qui, comme d’habitude, ne se voient accorder aucun moyen supplémentaire, alors qu’ils sont déjà débordés.
Pour toutes ces raisons, nous voterons contre cet amendement.
L'amendement n'est pas adopté.
(Supprimé)
Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 6, présenté par MM. J.-P. Michel et Sueur, Mmes Klès et Tasca et MM. Mohamed Soilihi et Leconte, est ainsi libellé :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
Lorsqu’une personne placée sous le contrôle du juge d’application des peines a été condamnée pour une infraction mentionnée à l’article 706-47 du code de procédure pénale, ce magistrat peut d’office ou sur réquisition du ministère public, ordonner qu’une copie de la décision de condamnation ou d’aménagement de la peine, de libération conditionnelle, de surveillance judiciaire ou de surveillance de sûreté soit transmise à l’autorité académique à charge pour elle d’en informer s’il le juge utile le chef d’établissement, si le condamné est scolarisé ou a vocation à poursuivre sa scolarité dans un établissement scolaire public ou privé.
Sans préjudice de l’article 226-13 du code pénal, le fait pour les personnes à qui des décisions ont été transmises en application du premier alinéa ou qui ont eu connaissance des informations qu’elles contiennent en application du même alinéa, de communiquer ces décisions ou leur contenu à des tiers non autorisés à partager ces informations est puni de 3 750 euros d’amende.
La parole est à M. Jean-Pierre Michel.
L'article 4 ter, introduit à l'Assemblée nationale à la demande du Gouvernement, s'inscrit dans la logique du précédent et fait suite au drame de Chambon-sur-Lignon. La commission des lois en a proposé la suppression. Pour notre part, nous avons voulu le rétablir en en restreignant le champ, notamment pour tenir compte de la présomption d'innocence. En effet, on ne peut pas bafouer ce principe ainsi !
L'amendement n° 6 tend donc à instaurer la disposition suivante. Lorsqu’une personne est condamnée pour un crime de meurtre ou d’assassinat d’un mineur précédé ou accompagné de viol, de tortures ou d’actes de barbarie ou pour une infraction d’agression sexuelle ou d’atteintes sexuelles ou de proxénétisme à l’égard d’un mineur ou de recours à la prostitution d’un mineur, et que, placée sous le contrôle du juge de l’application des peines, elle est scolarisée ou a vocation à poursuivre sa scolarité dans un établissement scolaire public ou privé, copie de la décision de condamnation ou d’aménagement de la peine, de libération conditionnelle, de surveillance judiciaire ou de surveillance de sûreté peut être transmise, par le juge de l’application des peines, à l’autorité académique, à charge pour elle d’en informer, si elle le juge utile, le chef d’établissement.
Lorsque la personne condamnée se trouve dans un établissement public ou privé, nous estimons qu’il est possible que soit transmise la copie de cette décision aux autorités académiques qui en donneront connaissance au chef d'établissement. Mme la rapporteur apportera des précisions sur ce point, puisque la commission a déposé un sous-amendement tendant à fixer les modalités selon lesquelles, au sein de l’établissement qui intègre le mineur condamné, ces informations peuvent être communiquées.
Le sous-amendement n° 54, présenté par Mme Borvo Cohen-Seat, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Amendement n° 6
1° Après l'alinéa 1
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
Après l'article 712-22 du code de procédure pénale, il est inséré un article 712-22-1 ainsi rédigé :
2° Après l'alinéa 2
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
« Au sein de l'établissement, seules les personnes tenues au secret professionnel peuvent être informées, dans les limites strictement nécessaires à l'exercice de leurs compétences, par le chef d'établissement :
« En cas de refus de scolarisation, le juge de l'application des peines doit en être informé par l'autorité académique. »
La parole est à Mme la rapporteur.
La commission a émis un avis favorable sur l'amendement n° 6, sous réserve de la rectification apportée par le sous-amendement n° 54.
L’amendement tend à apporter trois aménagements utiles par rapport à la disposition que le Gouvernement avait initialement prévue et que la commission, bien qu’elle ait considéré qu'il était impossible d'ignorer la question, n’avait pas retenue pour les raisons que j'ai déjà évoquées.
Tout d’abord, cet amendement vise à présenter le partage d’informations comme une faculté laissée au juge de l’application des peines agissant d’office ou sur réquisition du parquet.
Ensuite, le partage de l’information ne concerne que la personne condamnée et non la personne mise en examen, ce qui nous paraît plus conforme à la présomption d’innocence.
Enfin, le nombre des personnes destinataires de l’information est beaucoup plus circonscrit que dans la version proposée par le Gouvernement, puisque le magistrat peut transmettre copie de la décision de condamnation à l’autorité académique, qui a seule la responsabilité, si elle le juge utile, d’en informer le chef d’établissement. Ne sont donc plus possibles la communication directe de la décision judiciaire par le juge au chef d’établissement ou l’échange d’information entre celui-ci, d’une part, et les responsables de l’établissement chargés de la sécurité et de l’ordre ainsi que les professionnels chargés du suivi social et sanitaire des élèves, d’autre part.
Le sous-amendement, qui a reçu l’accord des auteurs de l'amendement, tend à préciser les modalités d'insertion de la disposition proposée dans le code de procédure pénale et à apporter deux dispositions complémentaires quant à l’exercice de ce transfert d’informations.
Il prévoit, d’abord, qu’« au sein de l’établissement, seules les personnes tenues au secret professionnel peuvent être informées, dans les limites strictement nécessaires à l’exercice de leurs compétences, par le chef d’établissement ».
Il prévoit, ensuite, qu’« en cas de refus de scolarisation, le juge de l’application des peines doit en être informé par l’autorité académique ».
Ainsi, un échange est instauré entre l'établissement, la justice et le condamné.
L'amendement n° 21, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
I. - Le code de procédure pénale est ainsi modifié :
1° Après l'article 138-1, il est inséré un article 138-2 ainsi rédigé :
« Art. 138-2. - En cas de poursuites pour un crime ou pour une infraction mentionnée à l'article 706-47, le juge d'instruction ou le juge des libertés et de la détention peut, d'office ou sur réquisitions du ministère public, décider dans son ordonnance de placement sous contrôle judiciaire qu'une copie de cette ordonnance soit transmise à la personne chez qui le mis en examen établit sa résidence si cette transmission apparaît nécessaire pour prévenir le renouvellement de l'infraction.
« Lorsque la personne mise en examen pour l'une des infractions mentionnées au premier alinéa du présent article est scolarisée ou a vocation à poursuivre sa scolarité dans un établissement scolaire, public ou privé, copie de l'ordonnance est, dans tous les cas, transmise par le juge d'instruction à l'autorité académique et, le cas échéant, au chef d'établissement concerné ; le juge d'instruction informe également ces autorités des décisions modifiant les obligations du contrôle judiciaire ayant une incidence sur le lieu ou le mode de scolarisation de la personne.
« Les personnes à qui des décisions ont été transmises en application du deuxième alinéa ne peuvent faire état des renseignements ainsi obtenus qu'aux personnels qui sont responsables de la sécurité et de l'ordre dans l'établissement et, le cas échéant, dans les structures chargées de l'hébergement des élèves et aux professionnels, soumis au secret professionnel, qui sont chargés du suivi social et sanitaire des élèves. Le partage de ces informations est strictement limité à ce qui est nécessaire à l'exercice de leurs missions.
« Sans préjudice des dispositions de l'article 226-13 du code pénal réprimant la violation du secret professionnel, le fait, pour les personnes à qui des décisions ont été transmises en application du présent article ou qui ont eu connaissance des informations qu'elles contiennent en application de l'avant-dernier alinéa, de communiquer ces décisions ou leur contenu à des tiers non autorisés à partager ces informations est puni d'une amende de 3 750 €. » ;
2° Après l'article 712-22, il est inséré un article 712-22-1 ainsi rédigé :
« Art. 712-22-1. - Lorsqu'une personne placée sous le contrôle du juge de l'application des peines a été condamnée pour un crime ou pour une infraction mentionnée à l'article 706-47, ce magistrat peut, d'office ou sur réquisitions du ministère public, ordonner qu'une copie de la décision de condamnation ou de la décision d'aménagement de la peine, de libération conditionnelle, de surveillance judiciaire ou de surveillance de sûreté soit transmise à la personne chez qui le condamné établit sa résidence si cette transmission apparaît nécessaire pour prévenir la récidive.
« Lorsque la personne condamnée pour l'une des infractions mentionnées au premier alinéa du présent article est scolarisée ou a vocation à poursuivre sa scolarité dans un établissement scolaire, public ou privé, copie de la décision est, dans tous les cas, transmise par le juge d'application des peines à l'autorité académique et, le cas échéant, au chef d'établissement concerné ; le juge d'application des peines informe également ces autorités des décisions modifiant les obligations imposées au condamné ayant une incidence sur le lieu ou le mode de scolarisation du condamné.
« Les personnes à qui des décisions ont été transmises en application du deuxième alinéa ne peuvent faire état des renseignements ainsi obtenus qu'aux personnels qui sont responsables de la sécurité et de l'ordre dans l'établissement et, le cas échéant, dans les structures chargées de l'hébergement des élèves et aux professionnels, soumis au secret professionnel, qui sont chargés du suivi social et sanitaire des élèves. Le partage de ces informations est strictement limité à ce qui est nécessaire à l'exercice de leurs missions.
« Sans préjudice des dispositions de l'article 226-13 du code pénal réprimant la violation du secret professionnel, le fait, pour les personnes à qui des décisions ont été transmises en application du présent article ou qui ont eu connaissance des informations qu'elles contiennent en application de l'avant-dernier alinéa, de communiquer ces décisions ou leur contenu à des tiers non autorisés à partager ces informations est puni d'une amende de 3 750 €. »
II. - Le chapitre Ier du titre Ier du livre II du code de l'éducation est complété par un article L. 211-9 ainsi rédigé :
« Art. L. 211-9. - Lorsque, dans les cas prévus aux articles 138-2 et 712-22-1 du code de procédure pénale, une information relative au placement sous contrôle judiciaire ou à la condamnation d'un élève est portée à la connaissance de l'autorité académique, l'élève placé sous contrôle judiciaire ou condamné est, compte tenu des obligations judicaires auxquelles l'élève intéressé est soumis, affecté dans l'établissement public que cette autorité désigne, sauf si celui-ci est accueilli dans un établissement privé, instruit en famille ou par le recours au service public de l'enseignement à distance prévu à l'article L. 131-2 du présent code. »
La parole est à M. le garde des sceaux, pour présenter cet amendement et pour donner l’avis du Gouvernement sur l'amendement n° 6 et le sous-amendement n° 54.
Par cet amendement, le Gouvernement souhaite rétablir l'intégralité des dispositions prévues à l’article 4 ter tel qu'il a été voté à l’Assemblée nationale, à savoir le partage d’informations entre les autorités judiciaires, d’une part, et les autorités académiques et les personnes hébergeant les individus sous contrôle judiciaire ou condamnés, d’autre part.
Alors que les mesures prévues à l'amendement n° 6 ne visent que les personnes condamnées, celles que tend à instaurer l'amendement du Gouvernement concernent également les personnes placées sous contrôle judiciaire avant d'être condamnées. Les événements récents nous ont montré l'utilité d'un tel dispositif.
L’article 4 ter est important, car ce partage de l'information détenue par l'autorité judiciaire en cas de poursuite ou de condamnation pour des crimes ou délits violents ou de nature sexuelle est nécessaire. Ainsi, celui qui héberge, souvent après sa libération, la personne placée sous contrôle judiciaire ou condamnée aura accès à ces informations.
L'amendement n° 21 tend également à prévoir une information systématique de l'autorité académique et des responsables d'établissements scolaires à qui l'ordonnance de contrôle judiciaire ou la décision de condamnation sera adressée par l'autorité judiciaire. Pour que la détention de cette information ait du sens et permette d’agir en vue du non-renouvellement d'une infraction, il faut que ceux à qui cette décision judiciaire aura été transmise puissent eux-mêmes faire état des renseignements ainsi obtenus à certaines personnes strictement déterminées.
C'est pourquoi il est prévu que l'information pourra être partagée avec les seuls personnels qui sont responsables de la sécurité et de l'ordre au sein de l'établissement et, le cas échéant, dans les structures chargées de l'hébergement des élèves et des professionnels, ceux qui sont chargés du suivi social et sanitaire des élèves, tous étant soumis au secret professionnel.
J’en viens à l’avis du Gouvernement sur l'amendement n° 6 et le sous-amendement n° 54. Les débats au sein de la commission des lois ont montré qu'un certain nombre d'interrogations subsistaient ; c’est tout à fait normal sur ce sujet très complexe. Après la suppression de l’article 4 ter en commission, certains sénateurs socialistes proposent d’en rétablir les mesures qui concernent les personnes condamnées. Il est évident que cela va dans le bon sens : on ne peut être contre. Cependant, cela ne me semble pas suffisant pour répondre à toutes les situations auxquelles nous pouvons être confrontés, l’affaire que nous avons connue récemment en témoigne. Pour ce faire, il faudrait que la proposition du Gouvernement soit adoptée.
La parole est à M. Jean-Jacques Hyest, pour explication de vote sur le sous-amendement n° 54.
Dans le domaine judiciaire, le partage de l'information est toujours une affaire délicate. Cela fait l’objet de discussions sans fin avec les médecins. Pourtant, nous avons pu le constater, même s’il faut protéger la personnalité de chacun, l'absence d'information peut aboutir à des catastrophes et à des drames.
La commission des lois a commencé par nier le problème, avant de se rendre à l'évidence. L'intervention du législateur est justifiée par la survenue de ce fait divers auquel seul l'amendement du Gouvernement apporte une réponse.
Je rappelle en effet que le jeune en question était placé sous contrôle judiciaire. Par conséquent, avec les dispositions prévues à l’amendement n° 6, il aurait fallu attendre qu’il soit condamné pour que soient fournies les informations ! En outre, compte tenu de la gravité des actes qu'il a commis, je ne suis pas sûr qu'il eût été d'emblée envoyé dans un lycée. Les dispositions prévues ne suffisent donc pas.
Par conséquent, nous nous abstiendrons sur l'amendement n° 6 et le sous-amendement n° 54, car nous ne sommes évidemment pas contre. Mais nous préférons l'amendement n° 21, dont la rédaction est beaucoup plus complète et dont l’adoption permettrait de répondre à une situation particulière, même si elle est rare.
Nous risquerions, sinon, d’être confrontés demain à une situation comparable à celle que nous avons connue, celle d’un jeune homme placé sous contrôle judiciaire sans qu’aucune obligation de transmission d'informations existe, situation qui a abouti, hélas ! à un deuxième meurtre.
M. le garde des sceaux a bien montré la différence entre notre position et la sienne. Pour notre part, nous respectons la présomption d'innocence et je ne crois pas, cher collègue Hyest, que le drame survenu à Chambon-sur-Lignon soit un exemple pertinent en la matière.
Quand on connaît les faits dans le détail, on s'aperçoit que des dysfonctionnements ont eu lieu. Lesquels ? Où ? Pourquoi ? Mais passons là-dessus !
Pour ma part, je ne suis pas hostile à ce que l'on examine les mesures qu’il est possible de prendre lorsque des personnes, majeures ou mineures, sont encore présumées innocentes. Si une personne présumée innocente est placée sous contrôle judiciaire, le juge d'instruction ou le juge des enfants qui prend cette décision sait ce qu'il fait et doit assumer ses responsabilités. C'est la raison pour laquelle je pense que le cas qui a été évoqué ne devrait pas se produire.
J’ai donc proposé que l'information soit transmise seulement lorsqu’il s’agit de personnes condamnées qui pourraient être placées en semi-liberté et qui, dans ce cadre, pourraient fréquenter un établissement scolaire ou un centre de formation ou d'apprentissage. Dans ce cas, j’y suis tout à fait favorable.
En revanche, il est très problématique de ne pas respecter la présomption d’innocence, y compris dans ce cas-là.
C’est pourquoi, à ce stade de la discussion, il me semble préférable de voter mon amendement n° 6, sous-amendé par la commission, et de repousser l’amendement n° 21 du Gouvernement.
Le sous-amendement est adopté.
L'amendement est adopté.
En conséquence, l'article 4 ter est rétabli dans cette rédaction et l’amendement n° 21 n’a plus d’objet.
L'amendement n° 53 rectifié, présenté par MM. Mézard, Baylet, C. Bourquin, Collin, Collombat et Fortassin, Mme Laborde et MM. Plancade, Requier, Tropeano, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :
Après l’article 4 ter
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Après l’article 712-7 du code de procédure pénale, il est inséré un article 712-7-1 ainsi rédigé :
« Art. 712-7-1. – Un moyen de télécommunication audiovisuelle garantissant la confidentialité de la transmission peut être utilisé pour les procédures visées aux articles 712-6 et 712-7. Ce dispositif ne peut être mis en œuvre sans l’accord du condamné. Hors les cas où il a été commis d’office, le conseil du condamné peut se substituer à lui pour donner cet accord.
« L’accord du condamné n’est toutefois pas requis si sa présence est susceptible de mettre en péril de manière grave et circonstanciée l’ordre public, si aucun conseil ne peut autrement l’assister ou si l’utilisation d’un moyen de communication audiovisuelle constitue le seul moyen de respecter le délai raisonnable de la procédure. La décision de ne pas requérir cet accord doit être spécialement motivée.
« À tout moment au cours des débats, le juge de l’application des peines peut, d’office ou à la demande du ministère public, du condamné ou de son conseil, renoncer à l’utilisation du dispositif visé à l’alinéa précédent lorsqu’il apparaît :
« 1° Que le débat requiert, en raison des faits de la cause ou d’éléments de nature à nuire à leur appréciation, la présence du condamné ;
« 2° Qu’une difficulté technique altère la tenue des débats ;
« 3° Que la confidentialité de la transmission n’est plus garantie.
« À l’issue de l’audience, il est dressé un procès-verbal contradictoire faisant état des conditions générales de déroulement des débats. Ce procès-verbal mentionne également si le personnel chargé de la garde du condamné est intervenu à quelque titre.
« Le condamné doit pouvoir à tout moment s’entretenir de façon confidentielle avec son conseil. Le procès-verbal visé à l’alinéa précédent en fait mention. »
II. – La dernière phrase du premier alinéa de l’article 712-6 et la dernière phrase du second alinéa de l’article 712-7 du même code sont supprimées.
La parole est à M. Jean-Claude Requier.
Cet amendement tend à reprendre les recommandations formulées le 14 octobre dernier par le Contrôleur général des lieux de privation de liberté au sujet de l’utilisation de la visioconférence dans le cadre des procédures judiciaires.
Dans ses considérations, le Contrôleur relève que le respect de l’équilibre entre les parties au procès pénal est un des aspects des droits de la défense.
Le recours à la visioconférence s’est beaucoup développé ces dernières années, et d’abord en vue d’économiser du personnel. Cette technique est notamment utilisée dans le cadre du contentieux de l’hospitalisation sans consentement, de l’éloignement des étrangers en situation irrégulière, ou à l’occasion des gardes à vue dans les ressorts de barreaux peu pourvus en avocats.
Or cet accroissement de l’utilisation d’un moyen technique ne va pas sans susciter un certain nombre de dangers au regard des droits de la défense. En effet, c’est la présence simultanée du défendeur, de son conseil et du magistrat qui est de nature à permettre à ce dernier d’apprécier pleinement la personnalité de celui qui comparaît devant lui.
En l’état du droit, la rédaction de l’article 706-71 du code de procédure pénale nous semble bien trop imprécise puisqu’elle autorise le recours à la visioconférence « lorsque les nécessités de l’enquête ou de l’instruction le justifient », sans davantage de garanties.
Si l’utilisation de la visioconférence peut constituer une commodité dans certaines hypothèses particulières – risques de troubles à l’ordre public, nécessité de respecter des délais impératifs ou présence impossible d’un avocat –, le recours systématique à cette procédure ne saurait se justifier par son caractère pratique ou, pis, par le souci de faire des économies.
Cet amendement ne vise que les audiences tenues devant le juge d’application des peines ou devant le tribunal d’application des peines. Il tend à entourer l’utilisation de la visioconférence d’un certain nombre de garanties, notamment l’accord exprès du condamné qui comparaît. Ce dernier doit également pouvoir, à tout moment, s’entretenir avec son avocat de façon confidentielle, quand bien même celui-ci se trouverait physiquement aux côtés du magistrat. De la même façon, le condamné doit pouvoir demander à tout moment l’interruption de la transmission, lorsque certaines circonstances l’exigent.
Notre amendement ne vise pas à alourdir inutilement la procédure. II tend au contraire à s’assurer de sa totale équité, qui, à nos yeux, n’est pas négociable.
La commission des lois considère que ces dispositions relatives à la visioconférence méritent évidemment un débat. Les sénateurs de gauche se sont d’ailleurs exprimés en ce sens à maintes reprises. Toutefois, nous n’avons pas jugé opportun d’aborder cette problématique en détail à propos de ce projet de loi, qui ne présente pas de lien direct avec elle. Autrement dit, dans ce débat, l’amendement de nos collègues nous apparaît un peu hors sujet.
Nous ne balayons pas leurs propositions d’un revers de main, mais nous sollicitons le retrait de cet amendement, dans l’attente d’un débat spécifique.
M. Mézard doit savoir que la visioconférence permet, par exemple, dans certains cas, de tenir des audiences simultanées au siège de la cour d’appel de Riom et à la prison d’Aurillac et, partant, de maintenir l’existence de cette dernière. De toute façon, sans cette possibilité, il faudrait systématiquement amener à Riom les personnes détenues à Aurillac pour qu’elles assistent à l’audience organisée en vue de leur éventuelle libération.
C’est pourquoi je sollicite le retrait de cet amendement. Mieux vaut, avant de prendre une telle décision, étudier de près la manière dont les choses se passent sur le terrain.
(Supprimé)
L'amendement n° 22, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
Le code de procédure pénale est ainsi modifié :
1° Le cinquième alinéa de l'article 717-1 est remplacé par trois alinéas ainsi rédigés :
« Le médecin traitant du condamné délivre à ce dernier, au moins une fois par trimestre, des attestations indiquant si le patient suit ou non de façon régulière le traitement proposé par le juge de l'application des peines. Le condamné remet ces attestations au juge de l'application des peines, afin qu'il puisse se prononcer, en application des articles 721, 721-1 et 729 du présent code, sur le retrait des réductions de peine, l'octroi de réductions de peine supplémentaires ou l'octroi d'une libération conditionnelle.
« Une copie de la décision de condamnation est adressée par le juge de l'application des peines au médecin traitant du condamné. Les rapports des expertises réalisées pendant la procédure sont également adressés au médecin traitant du condamné, à sa demande ou à l'initiative du juge de l'application des peines. Celui-ci peut en outre adresser au médecin traitant toute autre pièce utile du dossier.
« Les cinquième et sixième alinéas sont également applicables au psychologue traitant du condamné. » ;
2° La dernière phrase du troisième alinéa de l'article 721 est remplacée par deux phrases ainsi rédigées :
« Il en est de même lorsque le juge de l'application des peines est informé, en application de l'article 717-1, que le condamné ne suit pas de façon régulière le traitement qu'il lui a proposé. La décision du juge de l'application des peines est prise dans les conditions prévues à l'article 712-5. » ;
3° Le premier alinéa de l'article 721-1 est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Il en est de même lorsque le juge de l'application des peines est informé, en application de l'article 717-1, que le condamné ne suit pas de façon régulière le traitement qu'il lui a proposé. » ;
4° L'article 729 est ainsi modifié :
a) Après la première phrase du dixième alinéa, il est inséré une phrase ainsi rédigée :
« Il en est de même lorsque le juge de l'application des peines est informé, en application de l'article 717-1, que le condamné ne suit pas de façon régulière le traitement qu'il lui a proposé. » ;
b) Au début de la deuxième phrase, le mot : « Elle » est remplacé par les mots : « Une libération conditionnelle »
La parole est à M. le garde des sceaux.
Cet amendement tend à rétablir le texte de l’article 5 dans la rédaction adoptée par l’Assemblée nationale.
Cet article permet d’améliorer l’effectivité des traitements dont peuvent faire l’objet des condamnées détenus, car il tend à prévoir que le médecin traitant délivre au moins une fois par trimestre un certificat de suivi au seul détenu, à charge pour ce dernier de le transmettre, ou non, au juge. Il s’agit ici d’améliorer et d’encadrer le dispositif existant pour le rendre plus opérationnel.
J’insiste sur le fait que ce certificat est remis au juge par le condamné lui-même, et non par l’intermédiaire d’un médecin coordonnateur. En effet, depuis la loi Guigou de 1998 sur les infractions sexuelles, qui a instauré le suivi socio-judiciaire et l’injonction de soins, les médecins coordonnateurs n’interviennent qu’en milieu ouvert et non en milieu fermé.
Le texte, tel qu’il a été adopté par l’Assemblée nationale, se trouve donc dans la droite ligne de cette loi de 1998 et je ne vois pas pourquoi la commission des lois du Sénat veut supprimer cette disposition, destinée à améliorer la prise en charge sanitaire des détenus.
La commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.
Nous avons auditionné des acteurs du secteur.
Il est ressorti de ces auditions qu’une telle disposition était de nature à porter atteinte au lien de confiance indispensable à une thérapie. Or une telle relation est toujours difficile à construire en prison, espace où le patient n’a pas le choix de son médecin et où il subit, de manière générale, une forte contrainte puisqu’il est incarcéré.
Ces mécanismes peuvent conduire la personne détenue à s’engager de manière totalement artificielle dans un suivi, qu’elle considère comme la seule façon d’obtenir une remise de peine.
Face aux réactions suscitées au sein du corps médical par cette disposition, l’Assemblée nationale est opportunément revenue au principe selon lequel les attestations sont transmises exclusivement au patient, à charge pour celui-ci de les remettre au juge de l’application des peines.
Néanmoins, l’Assemblée nationale a réintroduit une périodicité trimestrielle pour cette délivrance, pourtant supprimée par sa commission des lois. Or un traitement, notamment psychothérapeutique, peut être interrompu pendant plusieurs mois afin de permettre une maturation progressive de la prise de conscience par le détenu de la nécessité d’un accompagnement psychologique. Cela n’est possible que si un lien de confiance suffisamment fort existe avec le médecin. Sinon, le détenu sera très assidu à des séances auxquelles il ne croit pas et qui, dès lors, n’ont plus aucun sens.
Par ailleurs, l’Assemblée nationale a précisé que le juge de l’application des peines était tenu de communiquer au médecin traitant la décision de condamnation. Cette dernière mesure, en particulier, ne semble ni réaliste ni vraiment justifiée.
Il est fréquent que le juge de l’application des peines ne dispose pas du jugement de condamnation – il en est ainsi chaque fois qu’une personne est incarcérée sur mandat de dépôt dans le cadre d’une comparution immédiate –, et, dans le cas contraire, la charge que représentera pour le greffe la copie et la transmission de milliers de pièces judiciaires semble disproportionnée au regard de l’intérêt que représentent ces documents pour le médecin.
Telles sont les raisons pour lesquelles la commission n’est pas favorable au rétablissement de cet article.
L'amendement n'est pas adopté.
(Supprimé)
L'amendement n° 23, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
Au 2° de l'article 730-2 du code de procédure pénale, les mots : « par deux experts et » sont remplacés par les mots : « soit par deux experts médecins psychiatres, soit par un expert médecin psychiatre et par un expert psychologue titulaire d'un diplôme, certificat ou un titre sanctionnant une formation universitaire fondamentale et appliquée en psychopathologie. L'expertise ».
La parole est à M. le garde des sceaux.
Par cet amendement, le Gouvernement souhaite rétablir le texte de l’article 6 dans la rédaction adoptée par l’Assemblée nationale, afin de mettre en place des examens pluridisciplinaires en matière de demande de libération conditionnelle pour des personnes condamnées à de très longues peines, telle qu’elle est prévue par l’article 730-2 du code de procédure pénale.
Les avis conjoints d’un psychiatre et d’un psychologue sur la personnalité d’un condamné à une longue peine sont de nature à mieux éclairer le magistrat dans sa prise de décision que l’avis de deux psychiatres, qu’on a d’ailleurs parfois du mal à trouver.
Le Sénat pourrait adopter cet amendement sans se renier en aucune façon.
Cet amendement tend à permettre d’associer un psychologue à un médecin psychiatre dans le cadre de l’expertise mentionnée à l’article 730-2 du code de procédure pénale.
Il peut être utile, dans le cadre d’une approche pluridisciplinaire, de recourir à un psychologue. Néanmoins, dans le cas visé par l’article 6 tel qu’il a été voté par l’Assemblée nationale, la double expertise doit notamment porter sur l’opportunité, dans le cadre d’une injonction de soins, du recours à un traitement utilisant des médicaments inhibiteurs de la libido. Aussi l’objet même de l’expertise implique-t-il une appréciation à caractère médical, qui ne relève pas de la compétence professionnelle d’un psychologue.
Il ne nous paraît donc pas souhaitable, en l’espèce, de remplacer un psychiatre par un psychologue, qui plus est pour des raisons apparemment pratiques.
La commission est donc défavorable à cet amendement.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 51 rectifié bis, présenté par MM. Mézard, Baylet, C. Bourquin, Collin, Collombat et Fortassin, Mme Laborde, MM. Plancade, Requier, Tropeano, Vall et Vendasi et Mme Escoffier, est ainsi libellé :
Après l’article 6
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au deuxième alinéa de l’article 230-6 du code de procédure pénale, après le mot : « rogatoire », sont insérés les mots : « qui ont conduit à une décision de condamnation définitive de la personne qui a fait l'objet de ces mesures ».
La parole est à M. Jean-Claude Requier.
Cet amendement concerne les fichiers d’antécédents utilisés par les services de police et de gendarmerie pour faciliter la constatation des infractions à la loi pénale.
Comme tous nos collègues, nous sommes particulièrement attachés au principe de la présomption d’innocence : seule une décision de condamnation devenue définitive transforme un suspect en coupable.
Il y aurait beaucoup à dire, et surtout à faire, sur la question des fichiers de police : je vous renvoie à la lecture de l’excellent rapport de nos collègues députés Delphine Batho et Jacques-Alain Bénisti.
S’agissant des fichiers d’antécédents, il faut savoir qu’ils recensent des informations relatives non seulement à des personnes condamnées, mais aussi à des personnes n’ayant même pas fait l’objet de poursuites.
Sachant l’utilisation qui peut être faite de ces données, nous jugeons primordial de circonscrire le champ de ces fichiers aux seules personnes définitivement condamnées.
Mon commentaire portera sur les amendements successifs n° 51 rectifié bis, 52 rectifié bis, 46 rectifié et 45 rectifié, déposés par M. Mézard et plusieurs de ses collègues du groupe RDSE, et qui visent à modifier de manière substantielle les dispositions relatives aux fichiers, lesquels, il faut le souligner se sont multipliés depuis dix ans.
La commission des lois partage de nombreux objectifs de Jacques Mézard. Néanmoins, elle estime que, par son importance, le sujet mérite un débat spécifique et qu’il n’a sans doute pas sa place dans le cadre de la présente discussion.
Le Gouvernement doit certes entendre les préoccupations légitimes de nos collègues, mais il ne nous a pas été possible de procéder à un examen précis des mesures qu’ils préconisent, notamment en nous appuyant sur des auditions de personnes qualifiées.
La commission sollicite donc le retrait de cet amendement et des trois suivants.
Non, je le retire, monsieur le président, ainsi que les amendements n° 52 rectifié bis, 46 rectifié et 45 rectifié.
L’amendement n° 51 rectifié bis est retiré.
Les trois amendements suivants, n° 52 rectifié bis, 46 rectifié et 45 rectifié, qui avaient été présentés par MM. Mézard, Baylet, C. Bourquin, Collin, Collombat et Fortassin, Mme Laborde, MM. Plancade, Requier, Tropeano, Vall et Vendasi et Mme Escoffier, sont également retirés.
J’en rappelle néanmoins les termes.
L'amendement n° 52 rectifié bis, était ainsi libellé :
Après l’article 6
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au premier alinéa de l’article 230-7 du code de procédure pénale, les mots : « sans limitation d'âge » sont remplacés par les mots : « âgées au moins de treize ans ».
L'amendement n° 46 rectifié était ainsi libellé :
Après l’article 6
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article 706-54 du code de procédure pénale est ainsi modifié :
1° Après le sixième alinéa, sont insérés six alinéas ainsi rédigés :
« Ne peuvent être conservées pour une durée excédant trente années :
« 1° les données relatives aux personnes mentionnées au premier alinéa, à compter du jour où la condamnation est devenue définitive ou, si cette date n’est pas connue du gestionnaire du fichier, du jour de la condamnation ;
« 2° à compter de la date de leur transmission, les données transmises par des organismes de coopération internationale en matière de police judiciaire ou des services de police étrangers en application de l’article 24 de la loi n° 2003-239 du 18 mars 2003 pour la sécurité intérieure ;
« 3° à compter de leur demande d’enregistrement, les données relatives à des personnes inconnues recueillies dans le cadre d’une enquête préliminaire, d’une enquête pour crime ou délit flagrant, ou d’une instruction préparatoire relatives à l’une des infractions mentionnées à l’article 706-55 ;
« 4° les données recueillies en application des procédures visées au cinquième alinéa, y compris celles relatives aux ascendants et descendants d’une personne disparue.
« Les données relatives aux personnes mentionnées au deuxième alinéa ne peuvent être conservées pour une durée excédant dix années, sous réserve de leur effacement dans les conditions prévues au même alinéa. » ;
2° La seconde phrase du dernier alinéa est supprimée.
L'amendement n° 45 rectifié était ainsi libellé :
Après l’article 6
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article 706-56 du code de procédure pénale est ainsi modifié :
1° Les trois premiers alinéas du II sont supprimés.
2° Le III est abrogé.
(Supprimé)
L'amendement n° 24, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
I. - L'article L. 632-7 du code de l'éducation est ainsi rétabli :
« Art. L. 632-7. - Chaque année, un arrêté conjoint du ministre de la justice et des ministres chargés de la santé et du budget détermine le nombre d'internes qui, ayant choisi pour spécialité la psychiatrie, peuvent signer avec le Centre national de gestion mentionné à l'article 116 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 précitée un contrat d'engagement relatif à la prise en charge psychiatrique des personnes placées sous main de justice.
« Ce contrat ouvre droit, en sus des rémunérations auxquelles les internes peuvent prétendre du fait de leur formation, à une allocation mensuelle versée par le Centre national de gestion jusqu'à la fin de leurs études médicales.
« En contrepartie de cette allocation, les internes s'engagent à suivre, pendant ou à l'issue de leurs études médicales, une formation en sciences criminelles, en psychiatrie légale ou criminelle, en psychologie légale ou criminelle, relative à l'expertise judiciaire ou relative à la prévention de la récidive. Ils s'engagent également à exercer en qualité de psychiatre à titre salarié ou à titre libéral et salarié, à compter de la fin de leur formation, dans un ressort choisi en application du quatrième alinéa du présent article, ainsi qu'à demander leur inscription sur la liste d'experts près la cour d'appel et sur la liste de médecins coordonnateurs prévue à l'article L. 3711-1 du code de la santé publique permettant leur désignation dans ce ressort. La durée de leur engagement est égale au double de celle pendant laquelle l'allocation leur a été versée, sans pouvoir être inférieure à deux ans.
« Au cours de la dernière année de leurs études, les internes ayant signé un contrat d'engagement relatif à la prise en charge psychiatrique des personnes placées sous main de justice choisissent le ressort dans lequel ils s'engagent à exercer sur une liste de ressorts caractérisés par un nombre insuffisant de psychiatres experts judiciaires ou de médecins coordonnateurs.Cette listeest établie par arrêté conjoint du ministre de la justice et du ministre chargé de la santé.
« Les médecins ou les internes ayant signé un contrat d'engagement relatif à la prise en charge psychiatrique des personnes placées sous main de justice peuvent se dégager de leurs obligations prévues au troisième alinéa moyennant le paiement d'une indemnité dont le montant ne peut excéder les sommes perçues au titre de ce contrat. Les modalités de calcul et de paiement de cette indemnité sont fixées par un arrêté conjoint du ministre de la justice et des ministres chargés de la santé et du budget. Le recouvrement en est assuré par le Centre national de gestion.
« Les conditions d'application du présent article sont fixées par décret en Conseil d'État. Celui-ci précise notamment les modalités selon lesquelles les médecins peuvent, pendant la durée de leur engagement, être autorisés à changer de ressort d'exercice et à être inscrits sur les listes d'experts près la cour d'appel ou de médecins coordonnateurs établies pour les ressorts d'autres juridictions, ainsi que les conditions dans lesquelles l'absence de validation de la formation faisant l'objet du contrat et le refus d'accepter des désignations en qualité d'expert près la cour d'appel ou de médecin coordonnateur peuvent être considérés comme une rupture de l'engagement mentionné au troisième alinéa. La liste des formations mentionnées au troisième alinéa pour lesquelles le contrat d'engagement peut être signé est déterminée par un arrêté conjoint du ministre de la justice et des ministres chargés de l'enseignement supérieur et de la santé. »
II. - Au premier alinéa de l'article L. 681-1 et aux articles L. 683-1 et L. 684-1 du même code, après la référence : « L. 632-5, », est insérée la référence : « L. 632-7, ».
III. - À la dernière phrase du premier alinéa du I de l'article L. 136-5 du code de la sécurité sociale, les mots : « l'allocation mentionnée à l'article L. 632-6 » sont remplacés par les mots : « les allocations mentionnées aux articles L. 632-6 et L. 632-7 ».
IV. - L'article 2 de la loi n° 71-498 du 29 juin 1971 relative aux experts judiciaires est ainsi modifié :
1° Après le mot : « experts », la fin du III est ainsi rédigée : « judiciaires s'il ne justifie soit de son inscription sur une liste dressée par une cour d'appel depuis au moins cinq ans, soit de compétences reconnues dans un État membre de l'Union européenne autre que la France et acquises notamment par l'exercice dans cet État, pendant une durée qui ne peut être inférieure à cinq ans, d'activités de nature à apporter des informations techniques aux juridictions dans le cadre de leur activité juridictionnelle. » ;
2° Au IV, après le mot : « refus », sont insérés les mots : « d'inscription ou ».
La parole est à M. le garde des sceaux.
Il convient de rétablir l’article 7 dans sa rédaction initiale, qui prévoit le versement d’une allocation aux étudiants en psychiatrie en contrepartie de leur engagement à demander leur inscription sur la liste d’experts près la cour d’appel et sur la liste de médecins coordonnateurs prévue à l’article L. 3711-1 du code de la santé publique.
Nous le savons tous, notre pays manque cruellement de psychiatres, pour de nombreuses raisons, et cela n’affecte pas seulement les tribunaux ou les établissements pénitentiaires. En France, la psychiatrie est un peu le parent pauvre de la médecine.
Les dispositions prévues à l’article 7 visent simplement, grâce à un système de bourse, à rendre la psychiatrie et la fonction de médecin coordonnateur attractives pour de jeunes étudiants. Je ne vois pas au nom de quoi on pourrait s’opposer à une telle mesure.
L’article 7 vise à compléter le code de l’éducation afin de créer un contrat d’engagement destiné à inciter les internes en psychiatrie, en contrepartie d’une allocation mensuelle, à assurer la prise en charge psychiatrique des personnes sous main de justice en s’inscrivant sur une liste d’experts judiciaires et sur une liste de médecins coordonnateurs.
Il est à craindre que les étudiants en quête d’un petit revenu s’inscrivent sur ces listes sans que cela réponde réellement à une vocation et sans posséder les qualités requises. Mais c’est un autre sujet…
La commission est, en tout cas, hostile à la possibilité donnée à des élèves psychiatres, sortant de l’internat, dépourvus d’une expérience suffisante, d’assumer des missions d’expertise ou de médecin coordonnateur. Tous les psychiatres considèrent qu’il est au contraire souhaitable qu’un expert puisse faire valoir au moins une expérience clinique d’une certaine durée et une pratique professionnelle préalable.
Les moyens envisagés par le projet de loi pour répondre à l’insuffisance indéniable du nombre d’experts et de médecins coordonnateurs ne sont ni adaptés ni suffisants. Il est d’ailleurs souhaitable que les expertises soient revalorisées, comme la commission d’enquête de l’Assemblée nationale sur l’affaire d’Outreau l’avait rappelé et comme le souhaitent les psychiatres eux-mêmes.
Ceux-ci considèrent en outre qu’il faudrait non seulement enseigner davantage la médecine légale mais aussi se demander par qui et où ces expertises doivent être pratiquées. Quoi qu'il en soit, la disposition proposée par le Gouvernement ne recueille pas du tout l’accord des professionnels.
Telles sont les raisons pour lesquelles la commission a émis un avis défavorable sur l’amendement tendant à rétablir l’article 7.
L'amendement n’est pas adopté.
Le titre I du livre V du code de procédure pénale est complété par un chapitre IV ainsi rédigé :
« Chapitre IV
« Du service public départemental de l’insertion des personnes majeures sous main de justice
« Art. 713-42. — Il est créé, dans chaque département, un service public de l’insertion des personnes placées sous main de justice.
« Ce service est chargé de :
« 1° mettre en œuvre les décisions judiciaires ;
« 2° organiser et coordonner dans chaque département l’accompagnement social et l’insertion des personnes placées sous main de justice qu’elles soient détenues ou non et assurer sa continuité ;
« 3° préparer la sortie de prison des personnes détenues originaires du département, quel que soit leur lieu de détention et quel que soit leur statut ;
« 4° proposer à chaque stade de la procédure des solutions alternatives à la détention.
« À cette fin, ce service :
« 1° doit organiser dans chaque juridiction et en tous lieux utiles des permanences d’orientation sociale susceptibles d’une part de procéder aux enquêtes sociales rapides et d’autre part de proposer aux magistrats des solutions alternatives à la détention quel que soit le moment où les personnes sont déférées devant le juge des libertés et de la détention ou jugées en comparution immédiate ;
« 2° peut déléguer une partie de ses missions à des associations habilitées dont il coordonne l’activité ;
« 3° est l’interlocuteur des directions départementales de la cohésion sociale, de la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi et du conseil général pour la mise en œuvre des mesures d’accompagnement social, s’agissant notamment de l’hébergement, de l’octroi des minima sociaux et des mesures d’insertion par l’activité économique ;
« 4° conclut toutes les conventions utiles pour la mise en œuvre de ces missions, les mesures d’accompagnement social étant financées dans le cadre du droit commun, le financement de la partie contrôle et exécution de la peine étant assuré par le ministère de la justice. »
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 7 est présenté par MM. J.P. Michel et Sueur, Mmes Klès et Tasca et MM. Mohamed Soilihi et Leconte.
L'amendement n° 25 est présenté par le Gouvernement.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Virginie Klès, pour présenter l’amendement n° 7.
L’article 7 bis, que nous proposons de supprimer, prévoit la création d’un service public départemental de l’insertion des personnes majeures sous main de justice, chargé de mettre en œuvre les décisions judiciaires, d’organiser et de coordonner dans chaque département l’accompagnement social et l’insertion des personnes placées sous main de justice, de préparer la sortie de prison des personnes détenues et de proposer, à chaque stade de la procédure, des solutions alternatives à la détention.
Bien entendu, nous ne pouvons qu’être favorables à l’ensemble de ces missions et de ces objectifs. Toutefois, ce dispositif n’a pas fait l’objet d’une réflexion approfondie avec tous les acteurs du monde judiciaire. Or il nécessite une réelle concertation et une discussion avant de pouvoir être inscrit dans la loi.
La parole est à M. le garde des sceaux, pour présenter l’amendement n° 25.
Je me demandais si cela arriverait un jour…
Nous avons débattu de cette question en commission. Il est vrai que la création d’un service public de l’insertion des personnes placées sous main de justice est une bonne idée, mais il faut prendre garde à ne pas s’emballer trop vite : le fait est qu’il n’y a pas eu de concertation avec l’ensemble des professionnels sur ce sujet.
La commission a donc approuvé l’amendement de Mme Klès et de ses collègues.
L'amendement est adopté.
En conséquence, l'article 7 bis est supprimé et les amendements n° 12, 48 rectifié bis, 49 rectifié, 50 rectifié et 47 rectifié bis n'ont plus d'objet.
J’en rappelle néanmoins les termes.
L'amendement n° 12, présenté par Mme Assassi, M. Favier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, était ainsi libellé :
I. – Alinéas 3 et 4
Remplacer les mots :
de l’insertion
par les mots :
pénitentiaire d’insertion et de probation
II. – Après l’alinéa 4
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Le service pénitentiaire d’insertion et de probation est chargé de la politique pénitentiaire de prévention de la récidive au niveau départemental. Il assure la coordination de toutes les interventions sociales du droit commun dans le champ pénitentiaire. À cette fin, il conclut toutes conventions utiles pour la mise en œuvre de ses missions, dont il assure la coordination. Les missions du service public pénitentiaire ne peuvent faire l’objet d’aucune délégation directe à des organismes privés.
III. – Alinéas 10 à 14
Supprimer ces alinéas.
Les amendements n° 48 rectifié bis, 49 rectifié, 50 rectifié et 47 rectifié bis avaient été présentés par MM. Mézard, Baylet, C. Bourquin, Collin, Collombat et Fortassin, Mme Laborde, MM. Plancade, Requier, Tropeano, Vall et Vendasi et Mme Escoffier.
L’amendement n° 48 rectifié bis était ainsi libellé :
Alinéa 11
Remplacer le mot :
juridiction
par les mots :
tribunal de grande instance
L'amendement n° 49 rectifié était ainsi libellé :
Alinéa 11
Remplacer les mots :
des permanences d’orientation sociale susceptibles d’une part de procéder aux enquêtes sociales rapides
par les mots :
un dispositif de prise en charge sociale susceptible d’une part de mettre en œuvre dans les meilleurs délais des enquêtes sociales
L'amendement n° 50 rectifié était ainsi libellé :
Alinéa 13
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Il informe le président du conseil général des mesures qu’il met en œuvre à cet effet
L'amendement n° 47 rectifié bis était ainsi libellé :
Alinéa 8
Remplacer les mots :
originaires du département
par les mots :
dont le centre des intérêts matériels et moraux est situé dans son ressort
L'amendement n° 14, présenté par Mme Assassi, M. Favier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l'article 7 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 6152-4 du code de la santé publique est ainsi modifié :
1° Au début du premier alinéa est insérée la référence : « I » ;
2° Il est ajouté un paragraphe ainsi rédigé :
« II. – Les dispositions d'application de l'article 25 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 précitée aux personnels mentionnés aux 1° à 4° de l'article L. 6152-1 prévoient les conditions dans lesquelles ces personnels peuvent consacrer une partie de leur temps de service à la réalisation d'expertises ordonnées par un magistrat en application des dispositions du code de procédure pénale. »
La parole est à Mme Éliane Assassi.
Comme le souligne à juste titre la commission des lois dans son rapport, le projet de loi de programmation ne prévoit pas les moyens nécessaires pour faire face à l’insuffisance d’experts psychiatres, laquelle est aggravée par le recours de plus en plus fréquent à l’expertise à tous les stades de la procédure judiciaire.
Faute de pouvoir augmenter ces moyens, le présent amendement a pour objet de revenir sur une disposition de la loi HPST qui pourrait induire une véritable pénurie d’experts psychiatres.
Les experts psychiatres sont rarement des médecins libéraux et les expertises psychiatriques pénales sont le plus souvent assurées par des psychiatres hospitaliers.
Malheureusement, en rendant applicable aux praticiens hospitaliers l’article 25 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, relatif aux conditions de cumul d’un emploi public et d’une activité accessoire, l’article L. 6152-4 du code de la santé publique, tel qu’il est rédigé par le III de l’article 19 de la loi HPST, rendra très difficile pour eux l’exercice d’une activité d’expert judiciaire.
Pour réaliser des expertises, les praticiens hospitaliers devront au préalable avoir obtenu l’autorisation du directeur de l’établissement public de santé où ils exercent. Surtout, ils ne pourront effectuer un tel travail qu’en dehors de leurs heures de service. En pratique, ces contraintes risquent fort de leur interdire d’exercer une activité d’expert judiciaire, car elles paraissent peu compatibles tant avec les délais souvent très courts dans lesquels doivent être effectuées les expertises qu’avec les conditions concrètes de leur réalisation.
Des dispositions réglementaires sont donc nécessaires pour permettre aux praticiens hospitaliers de concilier de façon plus souple leurs obligations de service et la réalisation d’expertises judiciaires, comme le droit en vigueur le prévoit déjà pour l’exercice de certaines activités d’intérêt général.
Le sous-amendement n° 56, présenté par Mme Borvo Cohen-Seat, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Amendement n° 14
Compléter cet amendement par un paragraphe ainsi rédigé :
...- Le Gouvernement remet au Parlement, au plus tard six mois après l'entrée en vigueur de la présente loi, un rapport évaluant les conséquences pour les finances publiques d'une mesure de revalorisation de la tarification des expertises psychiatriques en matière pénale.
La parole est à Mme la rapporteur, pour présenter le sous-amendement n° 56 et pour donner l’avis de la commission sur l’amendement n° 14.
La commission a considéré que les dispositions figurant dans le projet de loi de programmation du Gouvernement étaient au mieux insuffisantes, au pis inadaptées.
Le cadre législatif tel qu’il résulte de la loi HPST n’incite pas les praticiens hospitaliers à faire des expertises. L’amendement n° 14 vise donc, à juste titre, à assouplir ce cadre, et c’est pourquoi la commission y est favorable. Toutefois, les dispositions requises étant d’ordre réglementaire, il s’agit surtout d’inciter le Gouvernement à les prendre.
L’objet du sous-amendement n° 56 est, en vertu de la même préoccupation, de demander au Gouvernement un rapport évaluant les conséquences pour les finances publiques d’une mesure de revalorisation de la tarification des expertises psychiatriques en matière pénale.
En vérité, les propositions du Gouvernement sont contradictoires. D’un côté, il propose de verser aux praticiens libéraux 300 euros pour chaque expertise – ce qui est, à mon avis, peu incitatif compte tenu du travail que cela implique – et, de l’autre, il ne facilite pas la réalisation de ces expertises par les praticiens hospitaliers.
Il est vrai, madame Assassi, que la situation en matière d’expertise psychiatrique est délicate, que les textes qui prévoient des examens et des expertises à tous les stades de la procédure pénale sont de plus en plus nombreux et qu’il est de plus en plus difficile de les faire réaliser.
Aujourd'hui, l’article L. 6152-4 du code de la santé publique encadre le cumul, par les praticiens hospitaliers, d’une activité principale et d’une activité accessoire, conformément aux règles applicables aux autres agents publics. L’application de cet article est source de difficultés s’agissant des activités d’expertise judiciaire des praticiens hospitaliers, qui ne peuvent plus exercer ces activités qu’en dehors des heures de service et de l’établissement où ils exercent à titre principal.
L’amendement n° 14, qui vise à assouplir les conditions d’expertise psychiatrique pénale tout en garantissant un encadrement par le pouvoir réglementaire, va donc dans le bon sens.
Mon sentiment ne peut être le même sur le sous-amendement n° 56, car il tend à prévoir que le Gouvernement remet au Parlement un rapport…
… évaluant les conséquences pour les finances publiques d’une mesure de revalorisation de la tarification des expertises psychiatriques en matière pénale.
Or, non seulement le sous-amendement n’a rien à voir avec le contenu de l’article additionnel qu’il est proposé d’insérer, mais encore, de manière un peu singulière, le rapport en question est censé évaluer l’impact budgétaire d’une mesure dont les contours ne sont pas précisés. Son objet même fait donc défaut.
Cependant, je peux vous répondre sur le fond, madame le rapporteur. Lors de l’examen des crédits pour 2012 de la mission « Justice » par la commission des lois du Sénat, voilà quelques semaines, j’ai eu l’occasion d’annoncer l’ouverture d’un important chantier de réforme des frais de justice, à la suite des conclusions du rapport conjoint de l’Inspection générale des services judiciaires et de l’Inspection générale des finances, qui m’a été remis à l’été 2011.
Parmi les volets de cette réforme figure la question de la juste tarification des frais de justice, certains tarifs méritant d’être revalorisés, notamment les expertises psychiatriques, et d’autres, au contraire, devant être diminués, par exemple les frais de réquisition des opérateurs téléphoniques. Ce travail de réexamen de la tarification de certains frais de justice est en cours. Dès qu’il sera terminé, tout naturellement, j’en informerai le Sénat, qui disposera ainsi d’un bien meilleur rapport que celui qui est demandé par ce sous-amendement parce qu’il sera le fruit des efforts du groupe de travail constitué pour l’occasion.
Madame la rapporteur, je vous demande donc de bien vouloir retirer votre sous-amendement, afin que le Gouvernement puisse émettre un avis de sagesse sur l’amendement présenté par Mme Assassi ; un signal très positif sera ainsi envoyé. Si l’amendement devait être complété par le sous-amendement, le Gouvernement serait contraint d’émettre un avis défavorable sur l’amendement, ce qui m’ennuierait beaucoup ! §
Monsieur le garde des sceaux, vous savez que le Parlement n’ayant pas la maîtrise des dépenses, ce que je regrette, …
Cela peut quelquefois être une bonne chose !
… il a parfois recours à un certain procédé pour demander au Gouvernement de lui apporter des informations quant à la façon d’améliorer une situation qui n’est pas satisfaisante eu égard à l’insuffisance des moyens budgétaires dégagés pour telle ou telle action. Voilà ce à quoi tend le présent sous-amendement !
Vous dites être favorable à la revalorisation de la tarification des expertises, même si cela doit se faire au détriment d’autres activités. Il s’agit d’une question politique dont il faudra discuter à l’avenir. Néanmoins, votre position ne peut que donner de l’espoir à ceux qui attendent cette revalorisation. Le Parlement n’a pas, de toute façon, la possibilité de fixer le montant de la rémunération des expertises.
Par souci de conciliation, je consens donc à retirer le sous-amendement n° 56, de manière que l’amendement présenté par Mme Assassi puisse être voté à l’unanimité.
Monsieur le garde des sceaux, l’expertise judiciaire, notamment l’expertise psychiatrique ou médicale, soulève de sérieux problèmes. Nous avons d’ailleurs évoqué ce sujet en commission des lois, et notre collègue Jean-Jacques Hyest pourrait le confirmer.
Je pense qu’il serait utile que la commission des lois propose la création d’une mission, comme elle a pu le faire dans d’autres circonstances, pour apprécier les conditions dans lesquelles se font ces expertises.
On manque d’experts médicaux et d’experts psychiatres. Où en trouver ? En tant que président du conseil d’administration d’un organisme gérant notamment un centre hospitalier, je constate que certains médecins-chefs passent la majorité de leur temps à faire des expertises plutôt qu’à diriger leur service, ce qui n’est pas sans inconvénients.
Il faut donc, me semble-t-il, mettre ces sujets sur la table. Naturellement, nous voterons l’amendement présenté par Mme Assassi, mais le sujet évoqué mérite une réflexion plus globale. §
L'amendement est adopté.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 7 bis.
(Supprimé)
L'amendement n° 35, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
Le dernier alinéa de l'article L. 315-2 du code de l'action sociale et des familles est ainsi rédigé :
« La procédure d'appel à projet prévue à l'article L. 313-1-1 n'est pas applicable aux établissements et services de l'État mentionnés au 4° du I de l'article L. 312-1. »
La parole est à M. le garde des sceaux.
Cet amendement a pour objet de rétablir l’article 8 dans sa rédaction adoptée par l’Assemblée nationale, en exonérant la protection judiciaire de la jeunesse, la PJJ, de la procédure d’appel à projet pour créer les structures du secteur public accueillant les mineurs délinquants. Il vise donc à faciliter la tâche de la PJJ et à accélérer les choses.
Le Gouvernement souhaite voir créer cinq établissements pour mineurs délinquants d’ici à la fin de l’année 2012, et il vaut mieux que la PJJ consacre tout son temps et toute son énergie à monter ces projets, plutôt qu’à se conformer à des procédures qui sont certes utiles, mais dont on peut affranchir le service public.
Je suis sûr, madame la rapporteur, que vous serez d’accord avec moi, car je sais que vous n’êtes pas hostile au service public de la PJJ.
Je suis très attachée au service public, personne ne pourra dire le contraire.
Il reste que, si la commission des lois a supprimé l’article 8 dans la rédaction issue du vote de l’Assemblée nationale, ce n’est par méchanceté
Sourires.
D’une part, elle est opposée à l’extension du nombre de CEF – centres éducatifs fermés – au détriment d’autres structures d’hébergement, …
Il s’agit de créer de nouveaux établissements !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, rapporteur. … ce qui risque d’appauvrir significativement l’éventail de solutions éducatives dont disposent les juges des enfants. Je ne veux pas ouvrir un débat sur la question des CEF, mais vous savez bien qu’il s’agit tout de même de marquer un effort au profit de ceux-ci.
M. le ministre fait un signe de dénégation.
D’autre part, sous couvert de favoriser l’extension des CEF, cet article est en réalité motivé par des considérations totalement étrangères à l’exécution des peines en ce qu’il vise à exempter le secteur public de la PJJ de la procédure d’appel à projet créée par la loi HPST du 21 juillet 2009.
Le présent projet de loi ne constitue pas un cadre pertinent pour examiner cette question.
C’est un argument que l’on pourrait opposer à de nombreux amendements !
Nous ne sommes pas défavorables aux CEF. D’ailleurs, si nous le prétendions, vous nous répondriez immédiatement, monsieur le garde des sceaux, qu’un certain candidat à l’élection présidentielle a prévu d’en créer plus…
Il y a dix ans, ces centres ont été créés pour épargner l’emprisonnement dans un établissement pénitentiaire, et la promiscuité avec d’autres détenus que cela induit, à des mineurs multirécidivistes, fortement ancrés dans la délinquance. Or un rapport de la commission des lois a constaté l’existence de graves dysfonctionnements au sein des CEF.
Premièrement, le Contrôleur général des lieux de privation des libertés tout comme la Défenseur des enfants ont indiqué que ces établissements étaient aussi fréquentés par des mineurs non multirécidivistes. Ces derniers vivent donc aux côtés de mineurs délinquants « confirmés ».
Les CEF doivent, me semble-t-il, revenir à leur vocation originelle.
Deuxièmement, bien que vous l’ayez nié d’un mouvement de tête, monsieur le garde des sceaux, le budget de la justice, et notamment celui de la PJJ, est tel que la création de ces centres se fait nécessairement au détriment d’autres réponses, notamment les dispositifs de placement en milieu ouvert. Bien souvent, les juges des enfants n’ont plus à leur disposition toute la palette des solutions éducatives de placement pour les mineurs délinquants, que ce soit au sein des CEF ou dans les centres de milieu ouvert, lesquels n’existent d’ailleurs pratiquement plus.
Si nous ne sommes pas défavorables aux CEF, il est néanmoins nécessaire qu’ils retrouvent la vocation qui avait justifié leur création par la loi Perben I et que le financement de leur création n’oblitère pas les autres réponses à la délinquance des mineurs.
J’aimerais ajouter un argument important à ceux qu’a énoncés M. Michel.
Équilibrer le dispositif de placement des mineurs délinquants ne consiste pas à créer le même nombre de places en centre éducatif ouvert et en centre éducatif fermé. Il faut que le milieu ouvert offre plus de places, car mieux réinsérer les mineurs délinquants après l’accomplissement de leur peine en CEF implique de leur offrir des solutions de transition, comme les centres éducatifs en milieu ouvert.
Le vrai rééquilibrage passe donc par plus de places en milieu ouvert qu’en CEF.
L'amendement n'est pas adopté.
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 3 rectifié est présenté par M. Daudigny et les membres du groupe socialiste et apparentés.
L'amendement n° 9 rectifié ter est présenté par MM. Savary, Béchu, Détraigne, Doligé, Huré, Roche et Sido.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 8
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 313-1-1 du code de l’action sociale et des familles est complété par un paragraphe ainsi rédigé :
« … – Les transformations et extensions entre établissements et services relevant à la fois du 1° et du 4° du I de l’article L. 312-1 sont exemptées de la procédure d’appel à projet. »
La parole est à M. Yves Daudigny, pour présenter l’amendement n° 3 rectifié.
Si vous le permettez, monsieur le président, je défendrai également l’amendement n° 2 rectifié, mes deux amendements s’inscrivant dans la même logique de simplification et de bon sens.
Entre la protection de l’enfance, la prévention et la lutte contre la délinquance juvénile, il existe ce qu’on pourrait appeler des « zones franches communes », qui risquent d’ailleurs de voir leur importance diminuer compte tenu du désengagement financier de la PJJ. À titre d’exemple, la PJJ, qui a consacré jusqu’à 100 millions d’euros au dispositif « jeunes majeurs », avec pour cible les majeurs de 18 à 21 ans, n’alloue plus aucun budget à ce programme en 2011 ! Ce n’est certes pas le sujet de l’amendement, mais cela permet de souligner combien il est important de pouvoir favoriser les créations, les extensions et les transformations des établissements et des services, qui ont très souvent la double habilitation PJJ et aide sociale à l’enfance, ou ASE.
C’est ce à quoi tend l’amendement n° 2 rectifié, qui a pour objet de permettre aux départements de continuer à créer, gérer et financer en régie ou en budgets annexes des établissements sociaux et médico-sociaux relevant de leur compétence, comme c’est le cas aujourd’hui, principalement en matière de protection de l’enfance. Les départements gèrent directement 30 % des capacités en régie, en budgets annexes ou dans le cadre d’un établissement public départemental.
La procédure d’appel à projet instituée par la loi du 21 juillet 2009, dite HPST, ne doit en effet pas pouvoir s’appliquer aux départements gestionnaires, car un département ne peut être à la fois promoteur d’un projet et décideur. Le président du conseil général ne peut lancer un appel à projet, y répondre, présider la commission de sélection et « s’auto-choisir ». Il y a là, de toute évidence, un risque juridique de conflit d’intérêts.
En l’absence de cette disposition, le secteur associatif aurait paradoxalement le monopole de la gestion d’établissements et services dans le domaine de la protection de l’enfance et, de surcroît, pour des coûts plus élevés. Le taux de charges sociales et fiscales sur les rémunérations est en effet de 56 % dans le secteur associatif et de 44 % dans le secteur public.
De l’avis de la direction générale de la cohésion sociale, cette asymétrie constitue bel et bien une malfaçon dans la loi HPST.
J’ajoute que cet amendement a déjà été défendu ici, lors de l’examen de la proposition de loi Fourcade, en mars 2011. En première lecture, l’avis de M. Xavier Bertrand était qu’il ne fallait pas « complexifier » les procédures. Or cet amendement tend justement à les simplifier ! En deuxième lecture, l’avis exprimé par le ministre consistait à dire qu’il fallait attendre, ce qui n’est pas tout à fait une raison de fond. En août suivant, M. Philippe Richert, ministre chargé des collectivités territoriales, saisi par courrier de la question, s’est prononcé favorablement. C’est pourquoi je me permets d’insister sur ce point.
L’amendement n° 3 rectifié s’inscrit dans la même logique pour des établissements et services ayant la double habilitation PJJ et ASE. Les ajustements de capacité et d’agréments, ainsi que la diversification des outils, doivent pouvoir être réalisés dès lors qu’ils font l’objet d’un accord conjoint du gestionnaire, du président du conseil général et de la PJJ, sans passer par des appels à projet qui seraient juridiquement périlleux pour tous.
À l’heure où l’accueil des mineurs isolés étrangers pose un problème de financement auquel l’État devra contribuer à apporter une solution, il serait paradoxal de se priver des capacités d’accueil et de prise en charge qui offrent des réponses sociales et judiciaires.
À cet égard, j’avais également présenté deux autres amendements relatifs au Fonds national de financement de la protection de l’enfance, qui sont tombés sous le coup de l’article 40, et cela ne fait que reculer la résolution du problème.
La parole est à M. Yves Détraigne, pour présenter l'amendement n° 9 rectifié ter.
Si vous le voulez bien, monsieur le président, je présenterai également mes deux amendements n° 9 rectifié ter et 8 rectifié bis. Je serai bref, car M. Daudigny a excellemment présenté ses amendements identiques.
Tous les membres des conseils généraux, et notamment leurs présidents, comprennent l’intérêt de ces amendements. Je pense d’ailleurs que M. le garde des sceaux, par ailleurs président de conseil général, ne peut qu’émettre un avis favorable. §
Par souci de clarté, j’appelle donc également en discussion les deux amendements identiques suivants.
L'amendement n° 2 rectifié est présenté par M. Daudigny et les membres du groupe socialiste et apparentés.
L'amendement n° 8 rectifié bis est présenté par MM. Savary, Béchu, Détraigne, Doligé, Huré, Roche et Sido.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 8
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 315-2 du code de l’action sociale et des familles est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« L’article L. 313-1-1 ne s’applique pas aux établissements et services non personnalisés des départements et aux établissements publics départementaux lorsqu’ils sont créés sur leur ressort territorial et qu’ils sont financés par le budget départemental. »
Quel est l’avis de la commission sur les amendements identiques n° 3 rectifié et 9 rectifié ter, ainsi que sur les amendements identiques n° 2 rectifié et 8 rectifié bis ?
La commission n’a pas tout à fait vu les choses comme les auteurs de ces amendements.
J’ai l’impression qu’il s’agit d’amendements présentés par l’Assemblée des départements de France !
D’une part, la commission a considéré que ces quatre amendements n’avaient pas de rapport direct avec le texte dont nous discutons.
D’autre part, je fais observer à M. le garde des sceaux que, d’un point de vue procédural, les commissions des affaires sociales ainsi que les commissions des finances de l’Assemblée nationale et du Sénat n’ont pas été saisies.
J’ajoute que la brièveté des délais qui nous ont été impartis pour l’examen du présent projet de loi n’a pas permis à la commission de procéder aux auditions qui s’imposaient pour pouvoir se prononcer en pleine connaissance de cause.
Par conséquent, je sollicite le retrait de ces amendements, auxquels, je le sais, leurs auteurs sont très attachés. Un autre véhicule législatif leur fournira l’occasion d’y revenir. Les problèmes soulevés sont réels, mais la commission n’est pas en mesure d’apprécier le bien-fondé des solutions proposées. Peut-être notre position eût-elle été différente si nous avions été saisis en amont, mais ce n’est pas le cas.
Au demeurant, nous avons pris le parti de ne pas aller au-delà de l’objet précis du texte.
Le Gouvernement partage l’avis de la commission. Cela dit, j’observe que MM. Daudigny et Miquel viennent de voter contre un amendement du Gouvernement dont l’objet était d’instituer un dispositif similaire pour la PJJ.
Il me paraît difficile de soutenir pour les départements un dispositif qu’on refuse pour la PJJ. Et, honnêtement, je ne crois pas souhaitable d’instituer un privilège au bénéfice des départements.
Nous devons, me semble-t-il, examiner la question avec soin, car il s’agit d’un vrai débat. Adopter un tel dispositif à cette heure-ci ne serait pas une bonne manière de légiférer.
Le Gouvernement demande donc le retrait de ces amendements. À défaut, son avis serait défavorable.
J’ai pris bonne note des arguments qui viennent d’être avancés par Mme le rapporteur – ou Mme la rapporteur ou Mme la rapporteure : je ne sais plus ce qu’il faut dire –, et je respecte la position de la commission des lois. Je reconnais également l’habileté de M. le garde des sceaux.
Mais on ne peut pas dire que ces amendements n’ont fait l’objet d’aucune étude préalable. Ils ont déjà été examinés, notamment par la commission des affaires sociales, et soumis au vote dans l’hémicycle.
Mon amendement n° 3 rectifié vise à éviter ces situations kafkaïennes où le président de conseil général se jugerait lui-même. Quant à mon amendement n° 2 rectifié, il tend à faire en sorte que deux situations tout à fait comparables fassent l’objet d’un traitement identique. Il s’agit donc d’amendements de bon sens, et je pense que nous pouvons parfaitement nous prononcer ce soir.
Pour ma part, j’ai voté l’amendement du Gouvernement sur la PJJ ; par cohérence, je voterai donc également ces amendements.
En effet, et vous le savez bien en tant que président de conseil général, monsieur le garde des sceaux, le système actuel aboutit à des absurdités totales.
D’ailleurs, il en va de même pour les établissements de la PJJ, qui sont soumis à la procédure des appels à projet pour des opérations qu’ils pourraient réaliser eux-mêmes !
Comme M. Daudigny l’a souligné à plusieurs reprises, aucune solution véritable n’a été apportée jusqu’à présent. Pour ma part, je n’aime pas beaucoup les cavaliers législatifs, mais j’estime que, en l’occurrence, il y a urgence. Faute d’adoption de ces amendements, un certain nombre de dossiers – M. Daudigny a évoqué celui des mineurs étrangers isolés, qui est une préoccupation lourde pour certains départements – ne pourront pas être traités par les conseils généraux.
Je pense donc qu’il est de notre devoir de voter ces amendements. Nous avons trop tardé à prendre les mesures qui s’imposent. Nous savons bien que la loi HPST du 21 juillet 2009 a soulevé un certain nombre de problèmes – d’où la loi adoptée sur l’initiative de notre ancien collègue Jean-Pierre Fourcade – et qu’ils n’ont pas tous été réglés. En l’occurrence, nous avons l’occasion d’en régler un. Alors, faisons-le !
Je mets aux voix les amendements identiques n° 3 rectifié et 9 rectifié ter.
Les amendements sont adoptés.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 8.
Je mets aux voix les amendements identiques n° 2 rectifié et 8 rectifié bis.
Les amendements sont adoptés.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 8.
(Supprimé)
L'amendement n° 36, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
I. – Le chapitre II de l'ordonnance n° 45-174 du 2 février 1945 relative à l'enfance délinquante est complété par un article 12-3 ainsi rédigé :
« Art. 12-3. – En cas de prononcé d'une décision exécutoire ordonnant une mesure ou une sanction éducatives prévues aux articles 8, 10-2, 10-3, 12-1, 15, 15-1, 16 bis, 16 ter et 19, à l'exception des décisions de placement, ou prononçant une peine autre qu'une peine ferme privative de liberté, il est remis au mineur et à ses représentants légaux présents, à l'issue de leur audition ou de l'audience, un avis de convocation à comparaître, dans un délai maximal de cinq jours ouvrables, devant le service de la protection judiciaire de la jeunesse désigné pour la mise en œuvre de la décision, qui se trouve ainsi saisi de la mise en œuvre de la mesure.
« Si le mineur ne se présente pas à la date fixée, le juge des enfants ou le juge d'instruction le convoque devant lui s'il le juge utile ou, dans un délai maximal de dix jours, devant le service de la protection judiciaire de la jeunesse. »
II. – L'article 12-3 de l'ordonnance n° 45-174 du 2 février 1945 relative à l'enfance délinquante entre en vigueur le 1er janvier 2014.
La parole est à M. le garde des sceaux.
Cet amendement vise à rétablir, dans la rédaction adoptée par l’Assemblée nationale, une disposition fixant un délai maximal de cinq jours ouvrables entre le jugement d’un mineur et sa première convocation devant le service éducatif, afin d’accélérer le processus.
En effet, si le délai entre la condamnation d’un mineur et l’exécution de sa peine est trop important, la sanction perd de sa signification. Il est donc essentiel qu’elle entre rapidement en application.
La commission a émis un avis défavorable sur cet amendement et souhaite le maintien de la suppression de l’article 9.
En effet, il s’agit d’une mesure de pur affichage. Tant que les services de milieu ouvert de la PJJ ne disposeront pas des moyens nécessaires pour prendre en charge les mineurs confiés par l’autorité judiciaire, le délai des cinq jours ouvrables ne pourra pas être respecté.
Une telle disposition pourrait même avoir des effets pervers. Les mineurs seraient ainsi convoqués rapidement, mais sans être immédiatement pris en charge ensuite. Finalement, on se contenterait de les convoquer…
L’ensemble des acteurs sont évidemment d'accord pour réduire autant que faire se peut les délais. À vous entendre, monsieur le garde des sceaux, on croirait qu’ils font exprès de ne pas s’occuper rapidement des publics concernés ! Ce n’est vraiment pas le cas, et la solution du problème ne réside pas dans la fixation d’un délai trompeur.
En outre, le fait que le mineur soit convoqué devant le service de la PJJ n’implique absolument pas que la mesure prescrite par le juge sera exécutée aussitôt. Par exemple, les peines de travaux d’intérêt général concernant des mineurs sont exécutées dans un délai moyen de dix-huit mois, faute, là encore, de structures disponibles…
La disposition visée par l’article 9 du projet de loi serait sans effet face à des difficultés qui sont réelles et apporterait seulement des solutions en trompe-l’œil.
L'amendement n'est pas adopté.
(Supprimé)
L'amendement n° 26, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
I. – Le deuxième alinéa de l'article 133-16 du code pénal est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Par ailleurs, la réhabilitation ne produit ses effets qu'à l'issue d'un délai de quarante ans lorsque a été prononcée, comme peine complémentaire, une interdiction, incapacité ou déchéance à titre définitif. »
II. – Le code de procédure pénale est ainsi modifié :
1° Le dernier alinéa des articles 736 et 746 est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Les incapacités, interdictions et déchéances prononcées, comme peine complémentaire, à titre définitif cessent d'avoir effet à l'issue d'un délai de quarante ans à compter du jour où la condamnation a été réputée non avenue. » ;
2° Le 4° de l'article 775 est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Il en va de même des interdictions, incapacités ou déchéances prononcées, comme peine complémentaire, à titre définitif ; »
3° L'article 783 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Toutefois, lorsque la réhabilitation est accordée par la chambre de l'instruction, le deuxième alinéa du même article 133-16 n'est pas applicable et la réhabilitation produit immédiatement ses effets pour les condamnations prévues au même alinéa. »
III. – Le présent article entre en vigueur, pour les condamnations concernant des faits commis après la publication de la présente loi, le 1er janvier 2015.
La parole est à M. le garde des sceaux.
Il vous est proposé de rétablir le texte de l’article 9 bis A dans la rédaction adoptée par l’Assemblée nationale, afin de renforcer la cohérence des dispositions sur la réhabilitation légale, qui ne doit ni faire obstacle à l’exécution des peines complémentaires définitives ni les supprimer, comme c’est le cas aujourd'hui. Seul le juge doit pouvoir y mettre fin par une réhabilitation judiciaire lorsque cela lui paraît justifié.
La commission des lois a supprimé l’article 9 bis A, car elle ne s’est pas considérée en mesure de se prononcer en pleine connaissance de cause sur un article introduit sans débat à l’Assemblée nationale et dépourvu de tout lien avec les dispositions du projet de loi initial.
Au demeurant, le caractère très laconique de l’objet de l’amendement ne permet pas d’éclairer davantage le Sénat sur la nécessité de telles dispositions, qui n’ont jamais été évoquées lors de l’examen des très nombreux – c’est le moins que l’on puisse dire ! – textes de procédure pénale examinés par le Parlement au cours des dernières années.
La commission des lois a donc émis un avis défavorable sur cet amendement.
L'amendement n'est pas adopté.
(Supprimé)
L'amendement n° 27, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
I. – Après l'article 133-16 du code pénal, il est inséré un article 133-16-1 ainsi rédigé :
« Art. 133-16-1. – Si la personne a été condamnée par une juridiction pénale d'un État membre de l'Union européenne à une des peines suivantes, la réhabilitation n'est susceptible de produire ses effets sur les condamnations françaises antérieures qu'à l'issue des délais ci-après déterminés :
« 1° Lorsque la peine prononcée est une sanction pécuniaire, qu'à partir de l'effacement de cette condamnation ou de l'écoulement d'un délai de trois ans à compter de son prononcé ;
« 2° Lorsque la peine prononcée est une peine d'emprisonnement d'une durée supérieure à un an, qu'à partir de l'effacement de cette condamnation ou de l'écoulement d'un délai de dix ans à compter de son prononcé ;
« 3° Lorsque la peine prononcée est une peine d'emprisonnement d'une durée supérieure à dix ans, qu'à partir de l'effacement de cette condamnation ou de l'écoulement d'un délai de quarante ans à compter de son prononcé ;
« 4° Lorsque la personne a été condamnée à une peine autre que celles définies aux 1° à 3°, qu'à partir de l'effacement de cette condamnation ou de l'écoulement d'un délai de cinq ans à compter de son prononcé. »
II. – Le code de procédure pénale est ainsi modifié :
1° L'article 769 est ainsi modifié :
a) À la seconde phrase du troisième alinéa, après le mot : « imprescriptibles », sont insérés les mots : « ou par une juridiction étrangère » ;
b) Il est ajouté un 10° ainsi rédigé :
« 10° Les condamnations prononcées par les juridictions étrangères, dès réception d'un avis d'effacement de l'État de condamnation ou d'une décision de retrait de mention ordonnée par une juridiction française. Toutefois, si la condamnation a été prononcée par une juridiction d'un État membre de l'Union européenne, le retrait ordonné par une juridiction française ne fait pas obstacle à sa retransmission aux autres États membres de l'Union européenne. » ;
2° Après l'article 770, il est inséré un article 770-1 ainsi rédigé :
« Art. 770-1. – Si un ressortissant français a été condamné par une juridiction étrangère et que cette condamnation figure au bulletin n° 1 de son casier judiciaire, il peut demander le retrait de cette mention au tribunal correctionnel de son domicile, ou de Paris s'il réside à l'étranger.
« La requête ne peut être portée devant la juridiction compétente, sous peine d'irrecevabilité, qu'à l'issue des délais prévus à l'article 133-16-1 du code pénal.
« La requête est instruite et jugée conformément à l'article 703 du présent code.
« Si la condamnation émane d'une juridiction d'un État membre de l'Union européenne, le retrait de sa mention au bulletin n° 1 ne fait pas obstacle à sa retransmission aux autres États membres. » ;
3° Le 13° de l'article 775 est complété par les mots : « concernant un mineur ou dont l'utilisation à des fins autres qu'une procédure pénale a été expressément exclue par la juridiction de condamnation » ;
4° L'article 775-1 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Si un ressortissant français a été condamné par une juridiction étrangère, il peut également, selon la même procédure, demander au tribunal correctionnel de son domicile, ou de Paris s'il réside à l'étranger, que la mention soit exclue du bulletin n° 2. » ;
5° Après l'article 775-2, il est inséré un article 775-3 ainsi rédigé :
« Art. 775-3. – Les informations contenues au bulletin n° 2 du casier judiciaire d'une personne, lorsqu'elles sont relatives à une condamnation prononcée par une juridiction étrangère, sont retirées à l'expiration des délais prévus à l'article 133-16-1 du code pénal. » ;
6° L'article 777 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, après le mot : « prononcées », sont insérés les mots : « par une juridiction nationale » ;
b) Avant le dernier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Le bulletin n° 3 contient également les condamnations prononcées par les juridictions étrangères à des peines privatives de liberté d'une durée supérieure à deux ans qui ne sont assorties d'aucun sursis. » ;
c) Le dernier alinéa est complété par les mots : «, sauf s'il s'agit de l'autorité centrale d'un État membre de l'Union européenne, saisie par la personne concernée » ;
d) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Si le demandeur est un étranger ressortissant d'un État membre de l'Union européenne, toute demande de bulletin n° 3 est adressée à l'autorité centrale de cet État, afin que celle-ci communique les mentions qui apparaissent sur le bulletin qui lui est délivré. » ;
7° À l'article 777-1, les mots : « l'alinéa 1er de » sont supprimés.
III. – Les dispositions du code pénal et du code de procédure pénale résultant du présent article ne sont applicables qu'aux condamnations prononcées par une juridiction étrangère à compter du 27 avril 2012.
IV. – Le second alinéa du III de l'article 17 de la loi n° 2010-242 du 10 mars 2010 tendant à amoindrir le risque de récidive criminelle et portant diverses dispositions de procédure pénale est supprimé.
La parole est à M. le garde des sceaux.
Cette fois, je pense que tout le monde aura à cœur de voter l’amendement que je présente.
Il s’agit de rétablir le texte de l’article 9 bis B, dans sa rédaction adoptée par l’Assemblée nationale, en vue de transposer deux décisions-cadres relatives au casier judiciaire européen.
Le 27 avril prochain, tous les pays de l’Union européenne disposeront d’une interconnexion des casiers judiciaires grâce à une décision-cadre dont l’objet est d’améliorer les échanges en matière de condamnations pénales et d’extraits de casier judiciaire entre les États membres de l’Union européenne, en automatisant ces échanges et en codifiant les données transmises, pour assurer une meilleure protection des données, ainsi qu’une traduction automatique.
La France a activement soutenu ce projet, car il permet de prendre en compte la réalité d’une délinquance qui, avec l’ouverture des frontières européennes, est devenue très largement internationale.
Dès lors, le refus d’une telle transposition est difficilement compréhensible, sauf à considérer le droit à l’oubli évoqué dans le rapport comme une volonté délibérée de freiner la capacité des États à se mettre au niveau d’une délinquance européenne, pour le seul bienfait des délinquants.
L’interconnexion des casiers judiciaires européens est une bonne mesure pour lutter contre la délinquance. Le Sénat pourrait accepter une telle transposition sans renier en quoi que ce soit les positions qu’il a défendues par ailleurs tout au long de nos débats.
La France enverrait un très mauvais signal en refusant de participer à l’interconnexion des casiers judiciaires européens.
La commission des lois a supprimé l’article 9 bis B du projet de loi, car, là encore, elle a considéré qu’elle n’était pas en mesure d’examiner dans des conditions satisfaisantes un article introduit sans débat à l’Assemblée nationale et dépourvu de lien avec les dispositions initiales du projet de loi.
Au demeurant, l’exposé écrit des motifs de l’amendement ne nous éclaire guère. Mais il est vrai que M. le garde des sceaux vient de nous apporter quelques justifications d’opportunité.
Je ferai néanmoins deux observations.
D’une part, l’une des décisions-cadres visées par cet article aurait dû être transposée au plus tard le 15 août 2010. Pourquoi une telle transposition de dernière minute, en empruntant ce véhicule législatif ? Cela paraît curieux !
D’autre part, un projet de loi de transposition de décisions-cadres en matière pénale a, semble-t-il, été récemment examiné en conseil des ministres. Pourquoi avoir choisi de dissocier de telles dispositions d’un ensemble dans lequel elles auraient eu leur place, alors qu’elles ne se rattachent à aucune des dispositions du présent projet de loi ?
La commission n’est donc pas favorable à cet amendement. Bien entendu, elle ne se prononce pas sur le fond, puisqu’elle n’a pas pu examiner la directive.
J’aimerais que M. le garde des sceaux nous explique pourquoi il n’a pas souhaité faire figurer de telles mesures dans la loi de transposition des décisions-cadres.
Parce qu’il faut le faire avant le 27 avril prochain !
Non ! Elles doivent entrer en vigueur le 27 avril.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, rapporteur. Dont acte. Dans ces conditions, la commission émet un avis de sagesse sur cet amendement.
M. le président de la commission des lois acquiesce.
L'amendement est adopté.
(Supprimé)
L'amendement n° 28, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
L'avant-dernière phrase du cinquième alinéa de l'article 706-53-5 du code de procédure pénale est ainsi rédigée :
« Lorsque la personne est en état de récidive légale, le régime de présentation mensuelle s'applique de plein droit. »
La parole est à M. le garde des sceaux.
Le Gouvernement souhaite rétablir cet article, qui renforce la cohérence et l’efficacité des dispositions du FIJAIS, le fichier judiciaire des auteurs d’infractions sexuelles, en cas de récidive légale.
En cas de récidive, la loi a posé le principe d’une obligation mensuelle de présentation de la personne condamnée devant les services de police pour justifier de sa situation. Elle a toutefois prévu que l’obligation de présentation mensuelle devait être nécessairement ordonnée par la juridiction ; or celle-ci omet parfois de le faire dans son jugement.
Il est donc plus simple de prévoir que cette obligation, comme c’est le cas de l’inscription au FIJAIS, résulte de plein droit de la condamnation en cas de récidive, sans exiger que cela figure expressément dans le jugement.
La commission des lois ne partage pas le point de vue du Gouvernement puisqu’elle a supprimé l’article 9 bis C, qui permettait à l’autorité administrative de se substituer à l’autorité judiciaire pour décider d’une mesure restrictive de liberté, en l’espèce le régime de présentation mensuelle pour les personnes fichées au FIJAIS et condamnées en récidive légale.
Nous avons estimé qu’il convenait d’inviter le parquet à requérir systématiquement la mesure de présentation mensuelle, lorsqu’il y a lieu, et de privilégier les voies de recours contre les décisions des juridictions plutôt que de permettre à l’autorité administrative d’imposer elle-même une mesure que la juridiction aurait omis de mentionner dans sa décision.
La commission a donc émis un avis défavorable.
En ce qui concerne l’amendement précédent, nous avons fait preuve collectivement de compréhension compte tenu de l’échéance évoquée par M. le ministre.
S’agissant du présent amendement, Mme le rapporteur a très bien exposé le problème de fond qui se pose. En effet, si je vous ai bien compris, monsieur le garde des sceaux, il s’agit de rendre l’obligation de présentation mensuelle automatique pour parer au fait le magistrat oublierait de la notifier dans son jugement. Autrement dit, on considère que, dans la mesure où un magistrat est susceptible de ne pas prendre une décision, mieux vaut inscrire dans la loi que la décision est prise de toute façon.
C’est un drôle de raisonnement et c’est une conception de l’indépendance des magistrats que nous ne pouvons partager. Nous sommes très attachés à la liberté des magistrats et nous entendons qu’on les laisse faire leur travail !
Que n’avez-vous eu la même foi dans les magistrats lorsqu’il s’est agi la libération conditionnelle, en prévoyant des tiers ou des quarts de peine ? Pourquoi, alors n’avez-vous pas laissé au juge le soin de décider de tout cela ?
Les peines planchers, le juge peut les écarter sans problème !
Je constate que, vers quinze heures, vous suivez une règle et que, vers dix-neuf heures quinze, vous en adoptez une autre !
L'amendement n'est pas adopté.
En conséquence, l’article 9 bis C demeure supprimé.
Chapitre III
Dispositions relatives à l’exécution des peines de confiscation
(Non modifié)
I. – La première phrase du neuvième alinéa de l’article 131-21 du code pénal est ainsi rédigée :
« La confiscation peut être ordonnée en valeur. »
II. – Après l’article 706-141 du code de procédure pénale, il est inséré un article 706-141-1 ainsi rédigé :
« Art. 706 -141 -1. – La saisie peut également être ordonnée en valeur.Les règles propres à certains types de biens prévues aux chapitres III et IV du présent titre s’appliquent aux biens sur lesquels la saisie en valeur s’exécute. » –
Adopté.
(Non modifié)
I. – L’article 131-21 du code pénal est ainsi modifié :
1° Au cinquième alinéa, les mots : « lorsque celui-ci, mis en mesure de s’expliquer sur les biens dont la confiscation est envisagée, n’a » sont remplacés par les mots : « ou, sous réserve des droits du propriétaire de bonne foi, dont il a la libre disposition, lorsque ni le condamné, ni le propriétaire, mis en mesure de s’expliquer sur les biens dont la confiscation est envisagée, n’ont » ;
2° Au sixième alinéa, après le mot : « condamné », sont insérés les mots : « ou, sous réserve des droits du propriétaire de bonne foi, dont il a la libre disposition ».
II. – La première phrase de l’article 706-148 du code de procédure pénale est ainsi rédigée :
« Si l’enquête porte sur une infraction punie d’au moins cinq ans d’emprisonnement, le juge des libertés et de la détention peut, sur requête du procureur de la République, autoriser par ordonnance motivée la saisie, aux frais avancés du Trésor, des biens dont la confiscation est prévue en application des cinquième et sixième alinéas de l’article 131-21 du code pénal lorsque la loi qui réprime le crime ou le délit le prévoit ou lorsque l’origine de ces biens ne peut être établie. » –
Adopté.
(Non modifié)
Le code de procédure pénale est ainsi modifié :
1° Le deuxième alinéa de l’article 707-1 est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :
« Néanmoins, les poursuites pour le recouvrement des amendes et l’exécution des confiscations en valeur sont faites au nom du procureur de la République par le comptable public compétent ou, dans les cas où la confiscation en valeur s’exécute sur des biens préalablement saisis, par l’Agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisis et confisqués.
« L’exécution des autres confiscations est réalisée au nom du procureur de la République par l’Agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisis et confisqués lorsqu’elles portent sur des biens meubles ou immeubles mentionnés aux 1° et 2° de l’article 706-160, même s’ils ne lui ont pas été préalablement confiés. L’Agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisis et confisqués procède, s’il y a lieu, aux formalités de publication. » ;
1° bis L’avant-dernier alinéa du même article 707-1 est ainsi rédigé :
« La prescription de la peine est interrompue par les actes ou décisions du ministère public, des juridictions de l’application des peines et, pour les peines d’amende ou de confiscation relevant de leur compétence, du Trésor ou de l’Agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisis et confisqués, qui tendent à son exécution. » ;
2° Après le mot : « prévues », la fin du 3° de l’article 706-160 est ainsi rédigée : « aux articles L. 2222-9 du code général de la propriété des personnes publiques et 707-1 du présent code ; ». –
Adopté.
(Non modifié)
L’article 713-40 du code de procédure pénale est ainsi modifié :
1° Le troisième alinéa est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :
« Les frais d’exécution de la décision de confiscation sont imputés sur le total des montants recouvrés.
« Les sommes d’argent recouvrées et le produit de la vente des biens confisqués, déduction faite des frais d’exécution, sont dévolus à l’État français lorsque ce montant est inférieur à 10 000 € et dévolus pour moitié à l’État français et pour moitié à l’État requérant dans les autres cas. » ;
2° Le dernier alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Le montant recouvré, déduction faite de tous les frais, est partagé selon les règles prévues au présent article. » –
Adopté.
(Non modifié)
À la deuxième phrase du deuxième alinéa de l’article L. 325-1-1 du code de la route, les mots : « à l’Agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisis et confisqués » sont remplacés par les mots : « au service des domaines ». –
Adopté.
Chapitre IV
Dispositions diverses
La présente loi est applicable en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis et Futuna. –
Adopté.
(Supprimé)
L'amendement n° 34, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
Après le deuxième alinéa de l'article 12 de la loi n° 2009-1436 du 24 novembre 2009 pénitentiaire, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Ils assurent également la protection des bâtiments abritant les administrations centrales du ministère de la justice. »
La parole est à M. le garde des sceaux.
Il s’agit de donner une base légale au fait que les agents de l’administration pénitentiaire qui, désormais, assurent la sécurité du ministère de la justice, place Vendôme, puissent être armés.
Je demande au Sénat de rétablir l’article 11, qui vise à permettre à ces surveillants de remplir leurs missions.
La commission des lois a supprimé cette disposition, car elle a considéré qu’il s’agissait d’un cavalier législatif. La commission n’a pas débattu sur la question de savoir si ces personnels devaient être armés ou non, mais elle a émis un avis défavorable.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 29, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet intitulé :
Projet de loi de programmation relatif à l’exécution des peines
La parole est à M. le garde des sceaux.
Je souhaite revenir un instant sur l’amendement précédent.
Les agents de l’administration pénitentiaire qui assurent la protection du ministère de la justice ne sont pas dans une situation de complète sécurité. Je regrette donc beaucoup l’avis défavorable de la commission. Je respecte, bien sûr, les positions défendues par Mme le rapporteur, mais il me semble qu’il y a que bien d’autres endroits, notamment devant les palais nationaux, où les gardes sont armés !
Place Vendôme, nous n’avons plus de gendarmes ni de gardes !
Pour ce qui est l’amendement n° 29, il vise à rétablir l’intitulé initial du projet de loi.
Monsieur le ministre, puisque je vous mets en colère, permettez-moi de vous répondre très gentiment.
Les agents de l’administration pénitentiaire ont-ils vocation à garder le ministère de la justice ? Un débat serait nécessaire sur ce point. Ces personnels sont chargés des transfèrements ; maintenant, ils doivent surveiller le ministère. Or celui-ci n’est pas une prison, que je sache !
Contrairement à ce que vous pensez, que des agents de l’administration pénitentiaire soient amenés à garder le ministère de la justice n’a rien d’une évidence !
Que voulez-vous, à force de supprimer des postes de policiers et de gendarmes, vous manquez de personnel pour garder le ministère !
Pour en revenir à l’amendement n° 29, l’actuel titre du projet de loi a été choisi par la commission. Nous sommes donc défavorables à la modification proposée par le Gouvernement. Notre intitulé, je l’espère, fera réfléchir les députés.
L'amendement n'est pas adopté.
Avant de mettre aux voix l'ensemble du projet de loi, je donne la parole à M. Jean-Jacques Hyest, pour explication de vote.
Faut-il voir le verre à moitié vide ou le verre à moitié plein ?
Certes, un grand nombre de dispositions ont été conservées, notamment dans l’annexe, mais le texte a été surchargé de mesures complètement contradictoires : suppression des peines planchers, obligations relatives au numerus clausus, etc. Le projet de loi s’en trouve défiguré.
Nous sommes contre les dispositions que la majorité sénatoriale a ajoutées et nous ne sommes pas satisfaits de la suppression de mesures positives, notamment celles qui prévoyaient la construction de certains établissements.
Monsieur Carrère, laissez-moi terminer, s’il vous plaît !
Comment voulez-vous que nous votions un texte aussi altéré ?
Pourquoi ne pas avoir déposé une motion tendant à opposer la question préalable, comme je l’ai dit tout à l’heure à M. Michel ? La situation aurait été plus claire : nous aurions pu voter contre !
Au lieu de cela, vous avez habilement essayé de faire passer un certain nombre de mesures que nous réprouvons, car elles modifient profondément le code de procédure pénale, alors que vous nous disiez, pas plus tard que ce matin, qu’il fallait cesser de le changer tout le temps !
Pour tous ces motifs, le groupe UMP, monsieur le garde des sceaux, votera contre ce texte, qui s’éloigne trop du projet initial du Gouvernement.
Votre compassion me va droit au cœur, monsieur Carrère, mais je vous la rendrai un jour, n’ayez crainte !
Monsieur Hyest, nous allons finir par ne plus savoir sur quel pied danser : quand nous déposons une motion tendant à opposer la question préalable, vous nous dites qu’il vaudrait mieux discuter le texte et l’amender en séance et, quand nous discutons du texte en séance et que nous l’amendons, vous nous dites que vous auriez préféré avoir à vous prononcer sur une question préalable !
Cette fois, nous avons choisi d’améliorer le texte. Que le résultat final ne vous plaise pas, ma foi, cela ne m’étonne pas outre mesure puisque nous n’avons pas toujours la même façon de voir les choses…
Grâce à l’intense travail de Mme la rapporteur, ce texte est devenu beaucoup plus acceptable à nos yeux.
Je ne répéterai pas tout ce qui a déjà été dit sur la façon un peu cavalière d’engager la procédure accélérée. Comme d’habitude, après un fait divers, certes dramatique, nous avons eu un discours, une annonce, des promesses et un nouveau texte de loi. Beaucoup de choses ont été dites aussi sur l’insécurité juridique qu’engendre cette façon de légiférer, mais aussi sur les partenariats public-privé et sur le risque d’endettement très lourd de l’État qu’induisait le texte qui nous a été transmis. Or il a été profondément modifié. Que notre rapporteur en soit remerciée !
Nous voterons donc ce projet de loi dans la rédaction qui résulte des travaux du Sénat. §
Le projet de loi initial était un symptôme de plus des dérives sécuritaires du Gouvernement et trahissait sa tendance maladive à laisser les faits divers et l’émotion lui dicter sa politique pénale.
En présentant un tel texte, il avait fait le pari d’une croissance exponentielle de la délinquance, se fixant une priorité absolue : enfermer. Il a ainsi misé sur une politique peu ambitieuse et a cherché à promouvoir une image peu valorisante de notre société.
La commission des lois, sous l’impulsion de notre rapporteure, Nicole Borvo Cohen-Seat, a fait le choix de redéfinir complètement le texte en mettant un terme à l’accroissement du parc pénitentiaire, en abrogeant des dispositions relatives aux peines planchers, en posant le principe de l’aménagement systématique des peines d’emprisonnement d’une durée égale ou inférieure à trois mois, en intégrant un mécanisme destiné à prévenir la surpopulation pénale et en posant le principe de l’atténuation de la responsabilité pénale des auteurs d’infractions dont le discernement est altéré au moment des faits.
Ainsi, notre commission a fait le choix de ne plus penser la détention selon une logique d’exclusion et d’élimination sociale.
Il était effectivement temps de reconsidérer complètement la privation de liberté. Contrairement à ce qui a été sous-entendu, voire dit depuis hier soir, affirmer que la prison ne doit plus être envisagée comme un lieu où l’on « purge sa peine », ce n’est pas adopter une position peu soucieuse des victimes. C’est, au contraire, être du côté des victimes que de se préoccuper de la réinsertion des condamnés, afin que chacun puisse vivre en sécurité.
Des pays européens ont fait le choix de remplacer les prisons actuelles par des lieux de vie fermés ; c’est le cas de la Suède ou de l’Espagne. Les personnes privées de leur liberté y exercent leur activité professionnelle dans le respect du droit du travail et vivent dans des conditions de dignité et de sociabilité aussi proches que possible de celles qui ont cours à l’extérieur.
Pour notre part, nous souhaitons suivre ce chemin, et ce projet, tel qu’il va être voté dans quelques instants, en fournit, me semble-t-il, les premiers jalons.
Je me félicite que la commission se soit ralliée à la position que j’avais défendue et qui consistait à ne pas déposer de motion tendant à opposer la question préalable sur ce projet de loi. Nous avons voulu montrer que nous étions fidèles aux conclusions des commissions d’enquête menées autour de l’an 2000, particulièrement au Sénat, …
… qui avaient pointé un grand nombre de questions et ont péniblement abouti, au bout de dix ans, …
… à la loi pénitentiaire, que la majorité d’alors a votée.
Nous n’avons pas non plus proposé toutes les dispositions qu’il serait pourtant nécessaire d’adopter pour permettre que la loi pénitentiaire s’applique concrètement. Si nous ne l’avons pas fait, c’est, d’abord, parce que nous n’avons pas la possibilité d’engager des dépenses supplémentaires et, ensuite, parce que ce sujet nous paraît mériter une réflexion approfondie, ce que ne permet pas la procédure d’urgence qui nous a été imposée pour la discussion de ce texte, à la veille, encore une fois, d’échéances électorales qui permettront au peuple de dire ce qu’il souhaite.
On ne peut donc pas maintenant nous dire que nous aurions dû déposer une question préalable.
Monsieur Hyest, vous avez vous-même manifesté, d’une façon qui m’a franchement déplu, votre scepticisme lorsqu’il m’a été proposé de faire ce rapport. Vous avez affirmé, avec un haussement d’épaule, que nous étions seulement capables de déposer une question préalable. Nous avons au contraire montré que nous pouvions proposer un texte.
Si j’en crois les explications de vote que nous venons d’entendre, ce texte va être voté et l’Assemblée nationale sera ainsi obligée, quoi qu’il lui en coûte, de se prononcer avec rapidité sur ce que nous proposons.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi.
Le projet de loi est adopté.
Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je remercie toutes celles et tous ceux qui ont participé à ce débat, durant lequel ont été abordées des questions très importantes. Chacun a pu exprimer ses positions, comme il se doit au sein d’une assemblée démocratique.
Je tiens également à remercier les trois présidents de séance, M. le président de la commission des lois et Mme Borvo Cohen-Seat, qui rapportait pour la première fois, me semble-t-il, au nom de la commission des lois, sur un texte important.
(Sourires.) Mais, hormis cette petite différence
Nouveaux sourires.
Je salue son travail. Naturellement, nous ne pouvions pas être d’accord : ses positions appartiennent au passé, les miennes sont modernes. §, j’ai été heureux de débattre avec elle. Nous nous retrouverons dans quelques jours, car j’ai la faiblesse de penser que le texte ne demeurera pas en l’état.
Je rappelle que le groupe écologiste a présenté la candidature de M. Jean-Vincent Placé pour remplacer Mme Esther Benbassa, démissionnaire, au sein de la délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes.
La présidence n’a reçu aucune opposition. En conséquence, cette candidature est ratifiée et je proclame M. Jean-Vincent Placé membre de la délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes.
Je rappelle que les groupes ont présenté leurs candidatures pour la commission d’enquête sur l’évasion des capitaux et des actifs hors de France et ses incidences fiscales.
La présidence n’a reçu aucune opposition. En conséquence, elles sont ratifiées et je proclame Mme Marie-France Beaufils, MM. Michel Bécot, Éric Bocquet, Mmes Corinne Bouchoux, Nicole Bricq, MM. Luc Carvounas, Pierre Charon, Jacques Chiron, Yvon Collin, Francis Delattre, Philippe Dominati, Louis Duvernois, Yann Gaillard, Mmes Colette Giudicelli, Nathalie Goulet, MM. Joël Guerriau, Philippe Kaltenbach, Mme Marie-Noëlle Lienemann, MM. François Pillet, Yannick Vaugrenard et Richard Yung membres de la commission d’enquête sur l’évasion des capitaux et des actifs hors de France et ses incidences fiscales.
J’informe le Sénat que les commissions mixtes paritaires chargées de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion, d’une part, de la proposition de loi relative à l’exploitation numérique des livres indisponibles du XXe siècle et, d’autre part, du projet de loi portant réforme des ports d’outre-mer relevant de l’État sont parvenues, chacune, à l’adoption d’un texte commun.
Afin d’éviter une séance trop tardive le mardi 7 février, le groupe UCR a préféré que le thème « Union européenne : vers un fédéralisme budgétaire », initialement programmé le mardi 7 février, puisse se tenir dans le cadre du débat préalable au Conseil européen des 1er et 2 mars qui sera organisé à la fin du mois de février.
Par ailleurs, Mme Brigitte Gonthier-Maurin, présidente de la délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes, a demandé l’inscription à l’ordre du jour de la proposition de résolution, présentée en application de l’article 34-1 de la Constitution, relative à l’application de la loi concernant les violences faites aux femmes. L’examen de cette proposition pourrait avoir lieu le lundi 13 février.
Le Gouvernement propose en outre d’inscrire, ce même lundi 13 février, la lecture des conclusions des commissions mixtes paritaires sur la proposition de loi relative à l’exploitation numérique des livres indisponibles du XXe siècle et sur le projet de loi fixant au 11 novembre la commémoration de tous les morts pour la France.
Il n’y a pas d’opposition ?...
Il en est ainsi décidé et l’ordre du jour des séances des mardi 7 et lundi 13 février est ainsi modifié :
MARDI 7 FÉVRIER 2012
À 9 heures 30 :
- Questions orales ;
À 14 heures 30 :
- Débat de politique étrangère ;
À 17 heures :
- Débat sur le rapport annuel du contrôle de l’application des lois ;
Le soir :
- Question orale avec débat sur le devenir des permis exclusifs de recherche de gaz de schiste après le vote de la loi.
LUNDI 13 FÉVRIER 2012
À 15 heures et, éventuellement, le soir :
- Proposition de résolution relative à l’application de certaines dispositions de la loi du 9 juillet 2010, concernant les violences faites aux femmes ;
- Conclusions de la commission mixte paritaire sur la proposition de loi relative à l’exploitation numérique des livres indisponibles du XXe siècle ;
- Conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi fixant au 11 novembre la commémoration de tous les morts pour la France.
M. le président du Conseil constitutionnel a informé le Sénat, le mercredi 1er février 2012, qu’en application de l’article 61-1 de la Constitution, la Cour de cassation a adressé au Conseil constitutionnel une décision de renvoi d’une question prioritaire de constitutionnalité (2012-232 QPC).
Le texte de cette décision de renvoi est disponible au bureau de la distribution.
Acte est donné de cette communication.
Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au jeudi 2 février 2012 à neuf heures trente, à quatorze heures trente et le soir :
- Proposition de loi, adoptée par l’Assemblée nationale, portant diverses dispositions d’ordre cynégétique (n° 524, 2011-2012) ;
Rapport de M. Jean-Jacques Mirassou, fait au nom de la commission de l’économie, du développement durable et de l’aménagement du territoire (n° 297, 2011-2012) ;
Texte de la commission (n° 298, 2011-2012).
Personne ne demande la parole ?…
La séance est levée.
La séance est levée à dix-neuf heures trente-cinq.